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Je déclare la séance ouverte.
Bonjour à tous.
Bienvenue à cette vingt-neuvième et dernière réunion de la session du Comité permanent de l'industrie et de la technologie de la Chambre des communes.
Conformément à l'article 108(2) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le vendredi 8 avril 2022, le Comité se réunit pour étudier la compétitivité dans le contexte des petites et moyennes entreprises au Canada.
La réunion d'aujourd'hui se déroule sous forme hybride, conformément à l'ordre adopté par la Chambre le 25 novembre 2021. Les députés et les témoins peuvent participer à la réunion en personne ou par l'application Zoom. Comme ils connaissent les règles sanitaires qui sont toujours en vigueur ici, à Ottawa, celles et ceux qui assistent à cette séance en personne sont priés d'agir en conséquence.
Avant de faire les présentations, je veux remercier les témoins de leur patience. Quelques discours ainsi que la tenue de votes ont un peu bousculé l'horaire de la Chambre. Je les remercie d'être toujours avec nous.
Sans plus tarder, je vais présenter les témoins qui nous font l'honneur de se joindre à nous aujourd'hui.
Nous recevons M. Jean‑Guy Couillard, qui comparaît à titre personnel; M. Vincent Rousson, qui est recteur à l'Université du Québec en Abitibi‑Témiscamingue et qui comparaît également à titre personnel; M. David Macdonald, qui est économiste principal au Centre canadien de politiques alternatives; M. Benjamin Dachis, qui est vice‑président associé aux Affaires publiques de l'Institut C. D. Howe; M. Mathieu Lavigne, qui est directeur des Affaires publiques et économiques à la Fédération des chambres de commerce du Québec; et Mme Audrey Langlois, qui est conseillère en matière de main-d'œuvre et d'économie, également à la Fédération des chambres de commerce du Québec.
Je vous remercie d'être avec nous aujourd'hui.
Monsieur Couillard, vous disposez de cinq minutes pour faire votre présentation. Vous avez la parole.
Je m'appelle Jean-Guy Couillard, et je suis retraité du Mouvement des Caisses Desjardins depuis 2001. J'ai 78 ans. Je suis retourné sur le marché du travail en mai 2019, dans une épicerie, après avoir rencontré mon médecin qui m'a suggéré de faire une activité qui pourrait améliorer mon état de santé.
Je commençais à souffrir de courbatures. J'ai choisi de retourner sur le marché du travail pour améliorer ma santé et pour aider la coopérative de ma communauté, qui manquait de personnel. Au bout de trois semaines seulement, ma santé, tant sur le plan physique que mental, a commencé à se raffermir.
À l'épicerie où je travaille, nous manquons cruellement de personnel. Comme je suis un retraité, on a rapidement demandé mon aide pour recruter de nouveaux employés parmi les retraités que je connais. Depuis ce temps, j'ai sollicité plusieurs retraités pour leur demander de revenir au travail. Sur une centaine de contacts, seulement trois ont accepté de travailler. Presque tous les autres, soit plus de 75 % d'entre eux, refusent de revenir sur le marché du travail, car ils paieraient trop d'impôt.
Personnellement, je viens de faire mes déclarations de revenus et, pour l'année qui vient de se terminer, j'ai dû rembourser plus de 2 500 $ aux deux paliers de gouvernement. La plupart des gens de mon âge auraient la même somme à rembourser s'ils avaient travaillé. C'est la somme que j'ai dû rembourser en plus de celle qui est prélevée sur chaque paie.
Pendant ce temps, plusieurs études sont menées pour trouver des solutions au manque de personnel. Selon moi, une solution pourrait être efficace, et ce, rapidement. Il s'agirait de ne pas prélever d'impôt sur le revenu de travail que gagnent des personnes retraitées qui restent sur le marché du travail ou qui y retournent. En plus de combler le manque de personnel, la présence des retraités sur le marché du travail aurait l'avantage de les garder en santé plus longtemps, ce qui permettrait aux gouvernements de faire des économies en ce qui a trait aux services de santé. En fait, ces économies pourraient être beaucoup plus importantes pour le gouvernement que les remboursements d'impôt qu'il pourrait recevoir sur les revenus des aînés.
Selon La Presse, une journée passée à l'hôpital coûte 1 369 $. Aux soins intensifs, une journée coûte 3 776 $. Peu de retraités sont restés sur le marché du travail ou y sont retournés, et si rien n'est fait, il est à prévoir que certains d'entre eux se retireront du marché, car ils trouvent qu'ils paient trop d'impôt. On prévoit qu'un grand nombre de personnes prendront leur retraite dans peu de temps, ce qui aura pour effet d'accentuer la pénurie de main-d'œuvre. Les personnes retraitées peuvent représenter une solution, car elles sont expérimentées, ponctuelles et rigoureuses.
Par ailleurs, il est important que les personnes recevant la pension de la Sécurité de la vieillesse et le Supplément de revenu garanti ne soient pas pénalisées. Celles qui ont des plans de retraite ne devraient pas l'être non plus.
Dans les entreprises, des employés qui arrivent à la retraite resteraient au travail après la retraite s'il n'y avait pas d'impôt à payer sur leur travail. Le temps presse, et la solution que je propose serait applicable rapidement et permettrait d'avoir accès à de la main-d'œuvre qualifiée. C'est pourquoi je pense qu'il serait nécessaire que le projet débute pendant l'année 2022. Mon employeur appuie entièrement mon projet, car il croit que ce serait utile pour lui et pour les autres entreprises de notre pays.
En conclusion, j'ajoute que le fait de ne pas percevoir d'impôt sur le revenu de travail des employés de 65 ans et plus constituerait une solution profitable pour tous.
Je vous remercie d'avoir pris le temps de m'écouter, et je vous suis grandement reconnaissant de m'avoir accordé ce temps. Mon employeur appuie mon projet, et il a envoyé une lettre pour le certifier.
Je vous remercie beaucoup de m'accueillir à votre comité cet après-midi.
L'Abitibi‑Témiscamingue est une région qui connaît une forte pénurie de main-d'œuvre, ce qui est notamment attribuable à l'effervescence économique du secteur minier. Actuellement, plus de 4 300 postes sont vacants dans la région, comparativement à 1 925 en 2019. Le taux de chômage atteint un seuil historiquement bas, c'est-à-dire 3,4 %, soit deux points sous la moyenne nationale.
En outre, le pourcentage de la population en âge de travailler ne cesse de chuter et il ne devrait pas se stabiliser avant 2030. D'ici les 10 prochaines années, nous risquons de perdre près de 8 000 travailleurs.
Compte tenu de cette pénurie, les employeurs ont souvent recours à des travailleurs-navetteurs non résidents. Cette pratique pourrait se généraliser si rien n'est fait sous peu, ce qui limiterait le développement économique des régions du Québec. Puisque la pénurie de main-d'œuvre est un phénomène qui demeure prévalent sur le plan national, la solution logique est de se tourner vers l'immigration ou vers les étudiantes et étudiants internationaux qui terminent leurs études.
Il existe présentement une incohérence quant aux politiques d'immigration canadienne et québécoise et quant aux besoins des régions, comme l'Abitibi-Témiscamingue, des universités francophones québécoises et des besoins de main-d'œuvre des entreprises sur nos territoires.
Alors que les universités québécoises, à l'instar de celles du reste du Canada, affichaient des taux de refus semblables en 2015, autour de 30 %, pour ce qui est de demandes de permis d'études, l'écart entre nos universités n'a pas cessé de croître depuis. Actuellement, 52 % des demandes de permis d'études visant des universités francophones sont refusées par Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada, ou IRCC, comparativement à 33 % pour celles visant les universités ailleurs au Canada. Il s'agit d'un écart de près de 20 %.
À titre d'exemple, le taux de refus pour les étudiants tunisiens, qui représentent le deuxième bassin de recrutement de notre université, est passé de 33 % en 2016 à 50 % en 2020.
Parmi l'ensemble des universités québécoises, ce sont celles du réseau de l'Université du Québec, qui regroupe notamment toutes les universités situées en région, qui sont les plus pénalisées par les refus. Au cours des trois dernières années, les taux de refus des demandes de visa d'études formulées par des étudiants étrangers se destinant à l'un ou l'autre de ces établissements ont souvent franchi la barre des 60 %, et même des 80 %, selon certains pays.
Quant aux universités anglophones, les taux de refus sont bien moindres. En 2019, l'Université McGill affichait un taux de refus de seulement 9 %, comparativement à 23 % pour l'Université Concordia et 27 % pour l'Université Bishop's.
En Abitibi‑Témiscamingue, la situation est encore plus grave au Cégep où l'on observe un taux de refus de 75 %. En enseignement professionnel, le taux de refus atteint 95 % pour les étudiantes et étudiants étrangers qui ne viennent pas de la France.
On peut également noter une disparité considérable entre les taux d'acceptation des étudiantes et étudiants pour le Certificat d'acceptation du Québec, ou CAQ, et celui pour les permis d'études. À titre d'exemple, en 2019, 12 182 CAQ ont été délivrés à des étudiantes et étudiants d'origine algérienne. Parmi ces derniers, seulement 2 679 ont obtenu un permis d'études.
Plusieurs facteurs déterminent si un permis d'études sera refusé ou accepté, mais la capacité financière des étudiantes et étudiants est le principal motif de refus évoqué par l'IRCC pour notre clientèle étudiante à l'Université. Par ailleurs, plus de 50 % de nos étudiantes et étudiants se voient accorder des bourses couvrant non seulement leurs frais d'études, mais également leurs frais de subsistance. Malgré cela, ces étudiants se voient tout de même refuser leur permis d'études.
De plus, les agents d'immigration peuvent refuser une demande, sans appel, s'il remet en cause la bonne foi du demandeur. Cette pratique nous apparaît totalement discriminatoire, car cette décision n'est pas basée sur des données probantes et objectives, mais plutôt sur des perceptions.
À cela s'ajoute le nouveau système de traitement des demandes appelé Chinook, qui a été créé sans surveillance légale, selon des documents déposés à la Cour fédérale. Ce système manque de transparence, car il ne conserve aucune note écrite à la suite des décisions des agents d'immigration et n'oblige en rien ces derniers à tenir compte des preuves présentées par les candidats ayant fait une demande de séjour temporaire.
En réponse à nos questions, les autorités nous disent que ce ne sont pas les candidats francophones en général ou les candidats africains en particulier qui sont refusés, mais bien les candidats venant de pays instables sur le plan économique ou politique, vu les problèmes que cela soulève. Or, pour un même pays, les permis sont accordés aux étudiantes et étudiants séjournant dans une université anglophone, mais ils sont refusés aux étudiantes et étudiants des universités francophones situées en région.
Le Canada ne peut pas et ne doit pas se priver de personnes hautement qualifiées si elles souhaitent demeurer dans ce pays et participer activement à son développement économique, social et culturel une fois leur formation complétée.
L'Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue, ou UQAT, connaît une forte augmentation du nombre d'étudiants internationaux, tout comme le reste du réseau universitaire au Canada. Nous sommes ainsi des acteurs prépondérants dans la réussite de la Stratégie en matière d'éducation internationale 2019‑2024 du gouvernement du Canada.
De plus, nous sommes une réelle solution quant au manque de main-d'œuvre au pays: nous formons une main-d'œuvre hautement qualifiée pour les entreprises; nos étudiantes et étudiants offrent une main-d'œuvre importante pour les entreprises de service pendant leur parcours universitaire; nos étudiantes et étudiants étrangers sont intégrés à leur communauté d'accueil sur les plans culturel et linguistique; nos étudiantes et étudiants contribuent à remédier à la baisse démographique des régions; et nos étudiantes et étudiants participent activement au développement économique du pays.
Dès lors, il est impératif que le gouvernement du Canada, dans sa recherche de solutions à la pénurie de main-d'œuvre et au développement économique de toutes ses régions, intègre les universités dans ses outils d'immigration. On doit faciliter et accélérer le processus lié à la délivrance des permis d'études afin que les étudiantes et les étudiants étrangers puissent jouer un rôle décisif dans le développement économique de notre pays.
Je vous remercie beaucoup de votre attention.
Je suis prêt à répondre à vos questions.
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J'aimerais remercier le Comité de m'avoir invité à témoigner aujourd'hui dans le cadre de son étude sur les petites et moyennes entreprises.
Les deux dernières années ont été difficiles pour les petites entreprises au Canada. Partout au pays, nos entreprises ont reçu un soutien gouvernemental sans précédent par l'entremise de la subvention salariale, des subventions pour le loyer et des prêts du Compte d'urgence pour les entreprises du Canada — ou CUEC. En fait, pendant la pandémie, les mesures de soutien destinées aux entreprises ont constitué la plus importante catégorie de dépenses gouvernementales. L'aide destinée aux travailleurs occupait la deuxième position et les dépenses en santé, la troisième, loin derrière.
Ce qui pose maintenant problème aux entreprises, ce n'est pas de demander une aide gouvernementale, mais plutôt de trouver des employés pour aider les clients qui font la queue devant leur porte. Cependant, il est important de souligner qu'il existe toujours un lien très clair entre les salaires offerts pour de nouveaux emplois et les taux de postes vacants. Ainsi, si une entreprise offre des salaires plus élevés, une partie moindre de ces postes demeureront vacants.
En outre, les travailleurs des secteurs les plus touchés, comme ceux de l'alimentation et de l'hébergement, qui ont été mis à pied au cours des premiers mois de la pandémie, ne sont pas restés inactifs. Au contraire, ils ont utilisé la PCU pour se diriger vers d'autres secteurs qui étaient restés ouverts et avaient besoin de travailleurs. Par conséquent, lorsque la reprise économique a commencé pour de bon, à l'automne 2021, ces travailleurs n'étaient plus disponibles pour occuper les postes qu'ils avaient auparavant, car ils étaient déjà employés ailleurs, à des salaires probablement plus élevés.
L'élargissement du Programme des travailleurs étrangers temporaires est la toute dernière solution du gouvernement fédéral au problème des taux élevés de postes à pourvoir. Plus précisément, le gouvernement a prévu de nouveaux fonds pour qu'un plus grand nombre de demandes soient traitées plus rapidement; l'effectif dans les lieux de travail peut désormais être composé de 20 % de travailleurs étrangers temporaires, comparativement à 10 % auparavant; les travailleurs peuvent être gardés à l'emploi beaucoup plus longtemps, jusqu'à 270 jours; et l'embauche de travailleurs étrangers temporaires sera autorisée dans les régions présentant un taux de chômage qui dépasse 6 %.
L'élargissement du programme risque d'empêcher la hausse des salaires, qui auraient autrement été augmentés pour attirer de nouveaux travailleurs. Les salaires des travailleurs ont augmenté de 3,9 % au cours de la dernière année, bien en deçà de l'inflation, qui s'est établie à 6,8 % sur la même période. Une hausse du nombre de travailleurs étrangers temporaires aura pour effet de supprimer ces gains salariaux, en particulier pour les travailleurs à faible salaire.
Pour les travailleurs étrangers temporaires qui viennent au Canada pour y travailler, le programme tel qu'il est structuré crée de dangereux déséquilibres de pouvoir entre l'employeur et l'employé qui favorisent l'employeur. Les travailleurs étrangers temporaires sont privés, soit explicitement, soit effectivement, des droits fondamentaux des travailleurs dont jouissent les Canadiens. Par exemple, le droit fondamental de changer d'emploi afin d'obtenir un meilleur salaire ou de meilleures conditions est bafoué, et les plaintes sur le traitement en milieu de travail peuvent facilement donner lieu à l'extradition. Maintenir des salaires bas en important des travailleurs qui sont privés de leurs droits fondamentaux en milieu de travail va à l'encontre de la stratégie du gouvernement pour un marché du travail inclusif.
Pour le Canada, un pays qui accueille des immigrants de divers endroits dans le monde, une meilleure approche pour avoir de nouveaux travailleurs consisterait à accélérer le processus d'acceptation de nouveaux Canadiens. Ces nouveaux Canadiens pourraient et devraient être puisés dans le bassin des travailleurs étrangers temporaires qui préféreraient vivre au Canada de façon permanente. Sans la suppression des droits inhérente au programme des travailleurs étrangers temporaires, les nouveaux Canadiens sont plus libres de négocier de meilleurs salaires et de meilleures conditions de travail, ce qu'ils font généralement.
Il ne fait aucun doute que des salaires plus élevés feront en sorte que certains employeurs à faible marge de profits seront incapables de soutenir la concurrence dans un monde postpandémique. La hausse de l'endettement des entreprises qui est liée à la pandémie exercera une pression supplémentaire sur certaines d'entre elles à mesure que les taux d'intérêt augmenteront, mais le fait est que les taux de faillite d'entreprise étaient beaucoup plus faibles pendant la pandémie qu'ils ne l'étaient avant la pandémie, ce qui entièrement attribuable à l'aide fédérale.
Une économie qui fonctionne bien est une économie qui connaît un renouvellement des entreprises, de sorte que certaines entreprises ferment et sont remplacées par des nouvelles. La fermeture d'une entreprise libère des ressources sous forme d'espace, de travailleurs et d'équipement pour de nouvelles entreprises qui pourraient être plus viables. Il s'agit d'une caractéristique souhaitable et nécessaire de notre économie.
Pour certaines entreprises, il se peut qu'il n'y ait pas de voie viable à suivre, et dans ces cas, nous devons accélérer et non retarder les faillites afin de régler les obligations et, espérons‑le, de permettre aux entrepreneurs de continuer à créer de nouvelles entreprises. Nous devrions favoriser une voie de sortie, pour ainsi dire, pour les entreprises qui ne sont plus viables à mesure que les salaires augmentent.
Merci. Je serai ravi de répondre à vos questions.
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Je vous remercie beaucoup de m'avoir invité à parler à ce comité aujourd'hui.
Votre étude contient de nombreuses questions que l'Institut C.D. Howe a couvertes au cours des dernières années. Il y a de nombreux sujets dont je pourrai parler lorsque vous poserez vos questions, comme les mesures concrètes à prendre pour résoudre les problèmes liés au commerce interprovincial et soutenir les chaînes d'approvisionnement canadiennes, ce qui peut être fait concernant les exigences réglementaires, ainsi que les pénuries de main-d'œuvre et la pression inflationniste.
Il n'est pas étonnant que ces facteurs qui limitent la capacité de production de l'économie canadienne soient tous reliés, de sorte que votre étude, qui établit un lien entre ces questions et la façon dont elles touchent les PME en particulier, sera vraiment importante, et je m'en réjouis à l'avance.
Cependant, mes observations d'aujourd'hui porteront sur un élément de votre étude sur la Loi sur la concurrence qui est à l'ordre du jour fédéral. Lors de ma dernière comparution, j'ai parlé des problèmes liés aux modifications à la Loi sur la concurrence proposées dans le cadre de la loi d'exécution du budget. Il semble qu'on souhaite adopter cette loi à toute vapeur, et les commentaires que j'ai faits à ce sujet il y a un mois restent valables pour votre étude.
Je veux toutefois me tourner vers l'avenir. Le gouvernement s'est engagé à apporter d'autres changements à la Loi sur la concurrence. Voici donc ce que je lui suggère de faire et ce que votre étude peut et doit préconiser en ce qui concerne la façon dont la réforme de la concurrence peut aider les petites entreprises.
Tout d'abord, en ce qui concerne le processus, nous avons besoin d'un groupe de travail digne de ce nom et d'un document qui fera l'objet de discussions publiques, contrairement aux réformes à la Loi sur la concurrence et à la loi d'exécution du budget, que les gens ont vues à la dernière seconde. Nous devons corriger ce processus.
Pour en venir au fond, je vais vous donner quelques idées auxquelles vous devriez réfléchir.
Comme l'ont fait valoir les auteurs David Rosner et Julie Rosenthal dans une note de service de l'Institut C.D. Howe, nous devons développer davantage la jurisprudence pour améliorer l'application de la Loi sur la concurrence contre l'abus de position dominante. Ce sous-développement découle de deux restrictions que prévoit la loi. Premièrement, la loi donne au commissaire de la concurrence un quasi-monopole concernant l'application de mesures contre les monopoles. La loi d'exécution du budget étend l'accès privé comme moyen de corriger ce paradoxe.
Cependant, il sera nécessaire de prendre quelques mesures supplémentaires pour que ce changement fonctionne, en particulier pour les petites entreprises. Ce comité devrait recommander la suppression de la compétence exclusive du Tribunal de la concurrence d'entendre des causes portant sur l'abus de position dominante.
Il y a de nombreuses raisons que je peux brièvement énumérer ou dont je pourrai parler, si nous en avons le temps, lorsque vous nous poserez vos questions, si cela vous intéresse. L'une d'entre elles est d'accélérer le processus dans les tribunaux, ce qui améliorera particulièrement l'accès des petites entreprises et rendra le droit de la concurrence plus inclusif.
En outre, la loi d'exécution du budget contient un nouveau pouvoir, de sorte que, si une entreprise plaignante réussit à établir les éléments constituant un abus de position dominante, le Tribunal de la concurrence peut ordonner à l'entreprise fautive de cesser son comportement illégal, mais aussi de payer une sanction administrative pécuniaire.
Comme je l'ai mentionné lors de la dernière réunion à laquelle j'ai participé, la nouvelle sanction administrative pécuniaire, créée par la loi d'exécution du budget, est potentiellement inconstitutionnelle. De plus, paradoxalement, la sanction administrative pécuniaire serait versée au gouvernement et non à l'entreprise qui a réussi à démontrer qu'elle avait subi un préjudice concurrentiel. Aucune disposition ne prévoit que le gouvernement transfère une partie de cette sanction administrative pécuniaire à l'entreprise lésée à titre de compensation.
Ce qui est important, c'est que, en particulier dans le cas des petites entreprises, cela peut ne pas suffire à les inciter à entamer des poursuites. De plus, sans la possibilité d'obtenir des dommages-intérêts, une entreprise victime se retrouve fragilisée.
Dans une note de service destinée au milieu du droit de la concurrence que l'Institut C.D. Howe a publiée aujourd'hui, l'auteur, Peter Glossop, soutient que nous devons adopter la pratique selon laquelle des dommages et intérêts sont versés directement aux plaignants. Nous devons trouver un équilibre entre inclure des garanties pour protéger les petites entreprises afin qu'elles puissent se permettre d'intenter des poursuites contre des concurrents dominants, d'une part, et prévenir les poursuites vexatoires, d'autre part. L'Australie dispose d'un modèle, à l'article 82 de sa loi sur la concurrence et la consommation, que je peux expliquer si cela vous intéresse.
Enfin, comme l'a fait valoir l'ancien dirigeant du Bureau de la concurrence, George Addy, dans une note de service de l'Institut C.D. Howe, dans les discussions sur la réforme, il n'a pas été question d'un important vide juridique qui n'a pas été comblé: l'absence de surveillance, de responsabilité et de transparence quant à l'utilisation des ressources fournies au commissaire de la concurrence.
Les forces policières du Canada sont soumises à une certaine forme de surveillance civile, par exemple par des membres des commissions de police qui ne sont pas en service. Ils examinent les décisions et les priorités budgétaires. Il n'existe pas d'organisme équivalent pour le Bureau de la concurrence.
Il est temps de mettre en place un tel organisme, avec un apport plus important de la part du Parlement quant aux priorités du Bureau de la concurrence, mais, et c'est important, pas aux décisions de mise en application précises. Encore une fois, je peux entrer dans les détails si la question vous intéresse.
Je pourrais parler de bien d'autres choses au sujet des réformes de la Loi sur la concurrence qui sont nécessaires et sur lesquelles votre comité pourrait se pencher. Par exemple, je pourrais parler de suggestions intermédiaires sur des modifications à apporter à la défense fondée sur les gains en efficience, des raisons pour lesquelles le Canada devrait envisager d'adopter une approche semblable à celle du Digital Regulation Cooperation Forum du Royaume-Uni quant à la réglementation de l'économie numérique et du bon objectif de la politique en matière de concurrence.
Je vais m'arrêter ici. Je serai heureux de répondre aux questions, si nous avons le temps.
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Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité, bonjour.
Je m'appelle Mathieu Lavigne, et je suis le directeur des Affaires publiques et économiques à la Fédération des chambres de commerce du Québec, ou FCCQ. Je suis accompagné aujourd'hui de ma collègue Mme Audrey Langlois, conseillère, Main-d'œuvre et économie.
Je vous remercie de nous recevoir par visioconférence depuis Montréal.
La FCCQ, que certains d'entre vous connaissent bien, est un organisme qui regroupe 125 chambres de commerce et 1 200 entreprises membres, pour un total de plus de 50 000 entreprises. Nos membres exercent leurs activités dans tous les secteurs de l'économie sur l'ensemble du territoire du Québec, dans toutes les régions. Étant le plus important réseau de gens d'affaires et d'entreprises au Québec, la FCCQ agit également comme chambre de commerce provinciale et met en avant les intérêts de ses membres en matière de politiques publiques.
Nous vous remercions de nous avoir invités à participer à cette étude sur la pénurie de main-d'œuvre et sur la productivité de nos petites et moyennes entreprises, ou PME. C'est un sujet qui est évidemment au cœur de notre travail à la FCCQ.
Je vais rapidement faire quelques constats et, surtout, quelques recommandations à propos des différents volets qui font partie du mandat de l'étude, mais soyez assurés que nous pourrons aborder d'autres sujets en réponse à vos questions, si le temps nous le permet.
À tout seigneur, tout honneur, commençons par la pénurie de main-d'œuvre. C'est manifestement la principale préoccupation du milieu économique québécois. En guise d'exemple, en mars dernier, il y avait 259 170 postes vacants au Québec, soit le double du nombre de postes vacants qu'il y avait à la fin de 2019, avant la pandémie.
Les causes de la pénurie sont multiples, d'où l'importance de déployer tout un arsenal de mesures. J'aimerais attirer votre attention sur certaines d'entre elles, en commençant par l'attraction des travailleurs étrangers qualifiés.
Nos membres sont très inquiets quant à la lenteur du traitement des dossiers des candidats à l'immigration. Alors que le délai de traitement pour un travailleur qualifié est de 32 mois au Québec, le temps d'attente pour un programme similaire dans une autre province du Canada sera bientôt fixé à six mois. L'accélération du traitement des demandes d'immigration et de la délivrance des permis de travail devrait être une priorité de tous les instants pour le gouvernement fédéral. Je profite de l'occasion pour appuyer ce que le recteur de l'Université du Québec en Abitibi‑Témiscamingue nous a mentionné plus tôt. Nous sommes sur la même longueur d'onde.
Bien sûr, l'immigration n'est pas la seule réponse à la pénurie de main-d'œuvre. Il est également nécessaire de mieux former, et de le faire en continu, les travailleurs actuels et ceux de demain, ainsi que d'inciter les chômeurs à retourner rapidement au travail, et les travailleurs expérimentés qui le souhaitent, à rester un peu plus longtemps sur le marché du travail.
C'est pourquoi nous proposons que le gouvernement mette en place un régime volontaire d'épargne formation continue, ou RVEFC, qui serait un peu basé sur le modèle du régime enregistré d'épargne-études. Nous suggérons également qu'il procède à une vraie révision globale du régime d'assurance-emploi afin de le recentrer sur sa mission première, soit un soutien du revenu temporaire accompagné de mesures de soutien favorisant un retour rapide à l'emploi. Enfin, nous recommandons qu'il augmente le seuil de revenu à partir duquel les prestations du Supplément de revenu garanti, ou SRG, sont réduites.
Le fardeau fiscal, réglementaire et administratif est un autre frein important à la croissance de nos PME. Là aussi, le gouvernement fédéral peut et doit agir, en commençant par mettre en œuvre rapidement l'ancien projet de loi , lequel favorise le transfert intrafamilial d'entreprises. Les règles fiscales actuelles compliquent la vie des propriétaires de PME et nuisent à la relève familiale d'entreprises. Ce projet de loi doit être mis en œuvre.
Une autre source d'embûches pour les entrepreneurs est le dédoublement de lois et de mécanismes de reddition de comptes semblables au palier fédéral et au Québec. Nous demandons depuis plusieurs années au gouvernement fédéral d'entreprendre des discussions avec le gouvernement du Québec afin de s'entendre avec lui sur la question de la déclaration de revenus unique, par exemple, de façon pragmatique et innovatrice, en centrant la démarche exclusivement sur l'intérêt du contribuable.
Ensuite, nous suggérons au gouvernement fédéral de s'inspirer de ses homologues québécois, qui, pour la deuxième année de suite, ont présenté un projet de loi de type omnibus en matière d'allégement réglementaire. Il ne fait aucun doute que, parmi les innombrables lois et règlements fédéraux, on pourrait chaque année en éliminer et en simplifier d'autres afin de rendre la vie plus facile à nos entrepreneurs.
En terminant, je vous remercie d'étudier sérieusement les défis liés à la productivité et à la main-d'œuvre qui se posent pour nos PME.
Nous sommes prêts à répondre à vos questions.
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Je n'ai pas besoin de vous dire que nous le souhaitons aussi.
Tout à l'heure, vous avez parlé de la situation des travailleurs étrangers. Le traitement de leur dossier prend six mois s'ils vont à l'extérieur du Québec, et 32 mois s'ils viennent au Québec. Le Québec a un droit de regard sur l'immigration et souhaite avoir plus de pouvoirs dans ce domaine. Nous allons probablement avoir un débat politique dans les trois prochains mois au Québec sur la question.
J'aimerais avoir vos commentaires sur le fait que, depuis une quarantaine d'années, le Québec procède avec les deux approches, fédérale et provinciale. On les fusionne, mais on voit que cela prend beaucoup plus de temps.
Selon vous, pourquoi le traitement des dossiers est-il plus long au Québec? Est-ce parce que le Québec procède avec les approches de deux gouvernements pour tenter de faire avancer les choses?
Est-ce, au contraire, parce qu'il choisit avec beaucoup plus de rigueur les immigrants afin qu'ils puissent bien s'intégrer, ce qui retarde l'étude et l'analyse de leurs cas?
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Bonjour, monsieur Deltell. Si vous me le permettez, je vais intervenir là-dessus.
Je m'appelle Audrey Langlois et je suis conseillère, Main-d’œuvre et économie, à la Fédération des chambres de commerce du Québec.
Pour répondre à votre question, il s'agit effectivement d'un partage de compétences entre le gouvernement fédéral et le gouvernement du Québec. Cela est devenu un sujet délicat et difficile, qui est à l'origine de beaucoup de débats. Je dirais même qu'il s'agit d'un débat de société. Lorsque cela devient difficile, il est important de discuter et de trouver des solutions.
Actuellement, il est difficile d'expliquer pourquoi exactement les délais de traitement sont plus longs au Québec. Certains diront que c'est en raison du traitement des dossiers, qui se fait encore sur papier. D'autres, que c'est en raison des seuils d'immigration, qui sont limités au Québec. Quoi qu'il en soit, il y a certainement un problème.
Le gouvernement fédéral a maintenant un rôle important à jouer, soit celui d'accorder des délais de traitement identiques à ceux qui sont accordés au reste du Canada. Certaines entreprises subissent les contrecoups de ces délais. Pour 90 % d'entre elles, l'immigration est nécessaire si elles veulent assurer leur productivité et ne pas limiter non plus leurs activités de production. Nous demandons donc au gouvernement de réduire ces délais, de les rendre comparables à ceux du reste du Canada et d'éliminer toute lenteur.
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Je pense que c'est exactement ce que dit cette étude.
Nous nous trouvons dans une situation unique où les profits des entreprises ont largement profité de l'inflation, alors que les salaires des travailleurs traînent loin derrière l'inflation dans cette poussée inflationniste initiale que nous connaissons depuis un an et demi. Les entreprises sont en mesure d'augmenter les prix, non seulement pour compenser la hausse du coût des intrants — à laquelle elles font certainement face —, mais aussi un peu plus, et utiliser ensuite ce montant supplémentaire pour réaliser des profits. Je pense que les travailleurs se rendent maintenant compte à quel point le prix des produits a augmenté et on peut espérer qu'ils négocieront leur salaire à la hausse avec le temps, mais ils ne l'ont pas encore fait. Leurs salaires n'ont certainement pas suivi le taux d'inflation.
Les travailleurs ne sont pas responsables de l'inflation, mais les profits des entreprises jouent un rôle dans l'inflation.
Honnêtement, le prix des intrants joue le plus grand rôle à cet égard. Le prix du pétrole et le manque à gagner en matière de raffinage de l'essence aux États-Unis, en plus d'autres intrants importants comme les engrais, par exemple, et le blé, sont principalement touchés à cause de la guerre en Ukraine. C'est ce qui alimente l'inflation. Les profits des entreprises jouent aussi un rôle dans ce phénomène. Nous observons un pouvoir de fixation des prix, en particulier dans les industries concentrées. Les travailleurs n'ont aucun rôle dans cette situation. Ils sont loin derrière lorsqu'il s'agit de l'inflation.
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Je vous remercie, monsieur le président.
Je remercie tous les invités qui sont avec nous aujourd'hui.
Pour commencer, je vais m'adresser à M. Rousson, recteur de l'Université du Québec en Abitibi‑Témiscamingue.
Monsieur Rousson, je dois vous avouer que je suis coupable de plagiat, et je voudrais vous présenter toutes mes excuses. En effet, j'ai utilisé certaines de vos données statistiques la semaine dernière, quand nous avons reçu des fonctionnaires du ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration.
Je leur ai posé une question en m'appuyant sur vos statistiques, et j'ai reçu la réponse suivante:
Notre ministère examine toujours les moyens de répondre aux préoccupations du Québec concernant les taux d'approbation des étudiants internationaux. En 2021, de tous les étudiants qui ont déclaré l'anglais ou le français comme langue officielle, 50 % de ceux qui ont choisi le Québec ont déclaré le français comme langue officielle. Lorsqu'on compare les taux d'approbation des élèves ayant le français comme langue déclarée, ils sont très semblables: 41 % au Québec et 40 % dans le reste du Canada, ce qui vaut également pour le taux d'approbation entre la langue déclarée pour les élèves francophones et anglophones destinés au Québec. Le taux d'approbation global pour les étudiants destinés au Québec est de 41 %, et il est d'environ 62 % pour le reste du Canada.
Ma question est simple. Comment réagissez-vous à cette réponse, à ces éléments statistiques qui soulignent clairement une différence majeure entre le Québec et le Canada, entre les francophones et les anglophones?
Surtout, quelles sont les conséquences, pour l'UQAT, sur le taux de fréquentation ainsi que sur votre planification et votre rentabilité?
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Je vais commencer par répondre au dernier élément de votre question.
Pour ce qui concerne la rentabilité, ce ne sont pas nécessairement les étudiants étrangers qui font en sorte que nous bouclons les budgets de nos universités. Ce n'est donc pas l'appât du gain qui nous motive. Ces étudiants jouent un rôle important non seulement dans le développement du savoir et de la recherche, mais aussi pour les entreprises de nos communautés.
Par contre, l'écart lié aux taux d'approbation a des conséquences majeures sur notre effectif étudiant. Cela ne concerne pas seulement l'UQAT. Cela se passe aussi chez mes collègues, que ce soit à Rimouski ou à Chicoutimi, où plusieurs centaines d'étudiants étrangers sont admis dans nos programmes chaque année. Ces étudiants potentiels ont des lettres d'autorisation. Ils obtiennent des bourses de nos professeurs et les autorisations requises du gouvernement du Québec, mais IRCC refusent leur demande de permis d'études. Ce problème a donc des répercussions énormes.
Le délai de traitement des demandes est extrêmement long. Ces étudiants ont un projet de vie. Ils ont le projet d'être formés par les meilleures universités dans le monde. Ils viennent au Canada pour cela, et leurs demandes sont souvent refusées parce qu'un agent d'immigration n'est pas certain que l'étudiant va retourner dans son pays ou qu'il a les fonds suffisants pour pouvoir faire ses études. Cela se produit malgré le fait que nous soumettons tous les documents nécessaires et que nous précisons qu'ils ont des bourses à temps plein pour la durée de leurs études et que cela va couvrir les frais universitaires et leurs frais de subsistance. Il y a donc vraiment un écart de compréhension entre la réalité, soit ce qui se passe sur le terrain dans nos universités, et ce qui est perçu dans les officines gouvernementales, si je peux m'exprimer ainsi.
Je ne suis pas particulièrement surpris par les statistiques qui sont présentées par le gouvernement. Nous sommes actuellement un peu dans une guerre de chiffres entre ce que nous observons sur le terrain et ce que le gouvernement nous dit. Toutefois, les données réelles que nous obtenons nous donnent raison. Il y a vraiment un écart majeur entre les taux d'acceptation des étudiants francophones et les taux d'acceptation des étudiants anglophones au pays. Il y a aussi un écart qui se creuse d'année en année entre les universités francophones et les universités anglophones au Québec.
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Des changements devraient effectivement être apportés à la loi. Ces étudiants sont les meilleurs ambassadeurs que nous puissions avoir. Ce sont les meilleurs également pour ce qui est de s'intégrer à la communauté canadienne. Vous avez nommé quelques statistiques réjouissantes concernant notre université. J'aimerais en relever deux autres.
Parmi toutes les universités au Canada, nous sommes au premier rang pour ce qui est de solliciter des entreprises pour qu'elles puissent investir dans la recherche, fondamentale et appliquée, à l'UQAT. Nous sommes donc au premier rang au Canada. De plus, nous sommes au deuxième rang quant à l'intensité de la recherche au Canada. Nos professeurs sont parmi les meilleurs pour aller chercher des fonds des organismes subventionnaires canadiens qui leur permettront de faire de la recherche, ce qui vient donner un sérieux coup de pouce aux entreprises canadiennes. Pour faire cela, nous avons notamment besoin d'étudiants diplômés, à la maîtrise ou au doctorat. Nous en avons beaucoup qui viennent du Québec et du Canada, mais nous pourrions faire mieux concernant les étudiants étrangers.
J'aimerais vous faire part d'une dernière petite statistique, monsieur Lemire, si vous me le permettez. Comparativement à l'Ontario, nous recevons deux fois moins d'étudiants étrangers au Québec. En comparaison de la Colombie‑Britannique, le Québec reçoit trois fois moins d'étudiants étrangers.
Il y a donc un écart qui se creuse entre les provinces canadiennes. Malheureusement, ce sont le développement du savoir, le développement de la recherche et la compétitivité du Canada à l'échelle internationale qui écopent actuellement.
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Eh bien, ce qui est intéressant, c'est que si on examine les récessions précédentes à la suite desquelles les profits des entreprises ont dépassé les salaires des travailleurs dans la ventilation du PIB, on trouve l'épisode le plus similaire en 1981, c'est‑à‑dire la récession de 1981. Le point commun entre la récession actuelle et cette récession, ce sont les taux d'inflation élevés, qui n'étaient pas nécessairement présents dans certaines autres récessions.
Dans le cas des autres récessions, les travailleurs sont sortis vainqueurs et ont donc accaparé une plus grande partie du PIB, tandis que les profits des entreprises représentaient une partie moins importante, et les résultats étaient assez équilibrés lors d'une de ces récessions. Il se pourrait bien que dans la phase initiale d'inflation rapide, le secteur des entreprises soit plus à même de tirer parti de la situation en augmentant les prix, ce qui se traduit par des marges de profits plus élevées et des profits d'entreprise plus importants. En période d'inflation, les économistes s'inquiètent souvent de la spirale des salaires des travailleurs, c'est‑à‑dire que les travailleurs exigent des salaires plus élevés, ce qui alimente l'inflation.
Mais le danger, dans ce cas‑ci, pourrait bien être la spirale des prix des entreprises, c'est‑à‑dire que les entreprises augmentent leur marge de profit dans les premières phases de la reprise. Elles souhaitent ensuite maintenir ces marges et, par conséquent, elles continuent d'augmenter leurs prix. Si une entreprise décide d'augmenter ses prix de 10 % parce qu'elle pense que cela correspond à l'inflation à venir, il se pourrait bien que ce soit l'entreprise qui crée cette inflation, car elle est en train d'augmenter ses prix, surtout dans les secteurs où il n'y a pas beaucoup de concurrence.
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Je vous remercie. J'ai toute une série de questions à vous poser, mais je pense que je vous en poserai une seule.
Vous avez mentionné qu'en raison des soutiens, certaines entreprises qui n'étaient peut-être pas prospères ont tout de même réussi à survivre. Nous avons constaté que les taux de faillite avaient effectivement baissé pendant la pandémie, ce qu'un grand nombre de personnes pourraient trouver paradoxal, selon moi, et contraire aux idées reçues.
Vous avez également mentionné que des salaires plus élevés nuisent aux employeurs à faible marge de profits et qu'au fur et à mesure que les salaires augmentent dans les secteurs à salaires peu élevés, il faut prévoir une voie de sortie pour les entreprises qui ne sont pas en mesure de fonctionner dans ces environnements à faible marge de profits. J'aimerais savoir si certains secteurs seraient particulièrement touchés par cette situation. Je pense à des amis que je connais qui possèdent des restaurants, un secteur bien connu pour avoir de faibles marges de profits tout en présentant des risques élevés.
Si l'on tient compte de l'effet, comme vous l'avez dit tout à l'heure, des travailleurs à faible salaire qui ont migré vers des postes à salaires plus élevés lorsqu'ils ont été mis à pied, comment pouvons-nous nous assurer que les restaurants familiaux, par exemple, sont en mesure de survivre aux pressions que vous avez mentionnées pendant votre déclaration préliminaire?