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INDU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de l'industrie et de la technologie


NUMÉRO 127 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 3 juin 2024

[Enregistrement électronique]

  (1100)  

[Français]

    Je vous souhaite un bon lundi matin à tous et à toutes. Soyez les bienvenus à la 127e réunion du Comité permanent de l'industrie et de la technologie de la Chambre des communes.
     La réunion d'aujourd'hui se déroule dans un format hybride, conformément au Règlement.
    Comme le stipule l'ordre de renvoi du mercredi 7 février 2024, le Comité entreprend l'étude du projet de loi C‑352, Loi modifiant la Loi sur la concurrence et la Loi sur le Tribunal de la concurrence.
    Nous recevons aujourd'hui M. Jagmeet Singh.
    Monsieur Singh, je vous remercie de vous joindre à nous pour nous présenter votre projet de loi.
    Avant de commencer, je demande à tous les participants de prendre connaissance des consignes touchant l'utilisation des oreillettes qu'ils trouveront sur un petit carton devant eux. Il y va de la santé et de la sécurité de tous, surtout de celles de nos interprètes.
    Sans plus tarder, je cède la parole à M. Singh.
    Merci, monsieur le président.
    Je suis extrêmement content d'être ici. Je vous remercie de me donner l'occasion de présenter mes pensées sur mon projet de loi.

[Traduction]

    Je sais que peu de Canadiens considèrent que la concurrence est un enjeu pertinent dans leur vie; malgré tout, je crois que cela a une importance fondamentale pour les Canadiens et les Canadiennes. J'ai en tête deux exemples qui mettent en relief l'importance du projet de loi: l'alimentation, et les frais de téléphonie cellulaire et d'accès à Internet.
    À l'heure actuelle, notre pays fait face à un très grave problème en matière d'alimentation, comme vous le savez, monsieur le président. Le recours à l'aide des banques alimentaires a atteint un sommet au Canada. Un Canadien sur quatre doit sauter des repas parce que la nourriture coûte si cher. Les Canadiens savent, quand ils vont au supermarché, qu'ils n'ont jamais payé autant pour leur épicerie, alors qu'ils voient de l'autre côté les présidents d'entreprise et leurs sociétés réaliser des profits monstres. Les Canadiens se font escroquer et arnaquer. Cela doit cesser.
    Nous savons que cela n'est pas la première fois pour les Canadiens. En 2018, les grandes chaînes d'épicerie et les producteurs de pain avaient travaillé main dans la main pour arnaquer les Canadiens avec le stratagème de fixation du prix du pain. Nous savons que cela a coûté très cher. On a volé aux Canadiens quelque 5 milliards de dollars, et pourtant, la plus grosse amende infligée à l'un des principaux conspirateurs dans cette stratégie de fixation du prix du pain — la boulangerie Canada Bread — était de 50 millions de dollars.
    Au regard des 5 milliards de dollars de bénéfices que ces entreprises ont collectivement arrachés aux Canadiens, une amende de 50 millions de dollars représente une tape sur les doigts. Cela doit cesser.
    Nous savons que c'est en protégeant les consommateurs et en luttant contre la cupidité des entreprises que nous pourrons abaisser le coût de la nourriture et le coût de la vie pour les Canadiens.
    Cela vaut tout aussi bien pour les frais de téléphonie cellulaire et d'accès à Internet. Les frais de téléphone cellulaire et d'accès à Internet au Canada sont parmi les plus élevés au monde, ce qui n'a rien de surprenant: les fusions successives ont entraîné une concentration massive des services de téléphonie cellulaire et d'accès à Internet chez seulement trois grands fournisseurs au pays. Il s'agit de Rogers, Bell et Telus.
    La fusion récente entre Rogers et Shaw a seulement empiré les choses. Cela ne va qu'augmenter les coûts pour les consommateurs et leur donner encore moins d'options. Encore une fois, la vie n'en sera que moins abordable. C'est un autre exemple de la cupidité des entreprises.
    Cette fusion n'aurait jamais dû se faire. Mon projet de loi prévoit des mesures qui nous permettront de veiller à ce que cela n'arrive plus ou à ce que cela ne soit plus aussi simple.
    Nous savons que le coût de la vie augmente et nous savons que cela est dû aux pressions de la cupidité des entreprises. Avec mon projet de loi, j'espère y mettre un frein. Si nous empêchons les grandes sociétés d'arnaquer leurs clients, les coûts diminueront pour les Canadiens.
    Je crois que le rôle du gouvernement est de renforcer et de protéger les droits des consommateurs et de les protéger contre l'exploitation. Voilà ce que j'espère faire grâce à mon projet de loi.
    Je vais maintenant vous donner quelques détails plus précis qui, je l'espère, orienteront vos questions.
    Depuis le dépôt de mon projet de loi, nous avons été en mesure de pousser le gouvernement à apporter des modifications importantes à ses projets de loi existants afin de protéger les consommateurs. J'aimerais passer en revue les changements qui ont été faits aux projets de loi C‑56 et C‑59.
    Les néo-démocrates ont proposé des amendements visant précisément à augmenter les sanctions en cas de comportement anticoncurrentiel et à ce qu'il soit plus facile pour le Bureau de la concurrence de poursuivre ces grandes sociétés quand elles escroquent les Canadiens.
    Nous avons aussi modifié certaines définitions précises de manière à ce que les prix abusifs soient considérés comme une infraction.
    Nous avons aussi veillé à ce que le Bureau de la concurrence puisse ouvrir des enquêtes afin de véritablement cerner les problèmes qui surviennent, exiger la production de documents et lutter contre la cupidité des entreprises.
    Grâce aux modifications que nous avons poussé le gouvernement à apporter, il serait plus difficile pour les sociétés de fusionner, comme dans le cas de Rogers et Shaw.
     Trois enjeux restent à régler, principalement dans deux domaines.
    Premièrement, il y a la fixation du prix du pain, dont j'ai déjà parlé. Ce problème n'est toujours pas visé comme il devrait l'être par le gouvernement libéral. Le gouvernement a refusé de mettre en place des sanctions plus sévères.
    Si les entreprises commettent un crime, elles doivent être pénalisées. Ce que nous voulons, dans les cas où les grandes sociétés conspirent pour arnaquer les Canadiens, c'est qu'elles reçoivent des amendes sévères et importantes. Cela est cependant absent du projet de loi.
    Nous pensons que certaines fusions, si elles causent préjudice aux Canadiens, devraient être carrément interdites. Il ne s'agit pas d'évaluer si la fusion serait nuisible ou pas, ou si elle devrait être autorisée ou pas. Si un certain seuil est atteint, ces fusions devraient être purement et simplement interdites, mais le gouvernement rejette cette modification.
    Je tiens à souligner que je crois que le gouvernement peut être une force bienveillante pour les Canadiens. Il peut lutter contre la cupidité des entreprises et rendre la vie abordable.
    Les libéraux et les conservateurs ont fermé les yeux sur la cupidité des entreprises pendant des décennies. Ils ont délibérément omis de renforcer les droits des consommateurs et de donner au Bureau de la concurrence les outils dont il a besoin pour lutter contre la cupidité des entreprises. Avec ce projet de loi, j'espère rectifier la situation. Nous y avons apporté des modifications importantes, conformément aux amendements, et nous espérons ainsi terminer le travail.

  (1105)  

    Merci beaucoup, monsieur Singh.
    Commençons la discussion. La parole va à M. Williams pour six minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Monsieur Singh, vous affirmez que vous défendez l'équité pour les gens et pour les Canadiens, et vous affirmez ici aujourd'hui que vous défendez la concurrence.
    Depuis que vous avez conclu votre entente avec le gouvernement libéral — et cela fait maintenant plus de deux ans et demi —, nous avons assisté à trois fusions: la Banque Royale du Canada a acheté la Banque HSBC Canada — c'est‑à‑dire que la première banque du Canada a acheté la septième en importance —, Rogers a acheté Shaw, et WestJet a acheté Sunwing.
    Ces fusions ont été faites au détriment des Canadiens. Les Canadiens et les Canadiennes souffrent.
    Pourquoi n'avez-vous pas défendu les Canadiens en vous opposant à ces fusions?
    Ce n'est pas exactement ce qui s'est passé. Nous nous sommes absolument opposés à ces fusions. À l'époque, nous avons dit que c'était inapproprié. Maintenant, nous ne faisons pas que dire que c'est inapproprié: je propose un projet de loi qui empêchera que ce genre de choses se produise. Nous avons proposé des amendements à d'autres projets de loi, que j'ai mentionnés, afin qu'il soit plus difficile pour les entreprises de réaliser ce genre de fusions. Nous avons très clairement dit que nous nous opposions aux fusions qui nuisent aux Canadiens. J'ai posé des questions au Parlement précisément à ces égards. Je présente un projet de loi inscrit à mon nom précisément pour interdire les fusions entre les entreprises qui détiennent plus de 60 % des parts de marché. Nous avons aussi proposé des amendements pour faire en sorte qu'il soit plus difficile pour les sociétés qui détiennent 30 % et plus des parts de fusionner.
    Monsieur Singh, vous avez pourtant une entente avec le gouvernement, une entente que vous auriez pu résilier à n'importe quel moment. Vous auriez pu faire en sorte que cette exigence soit incluse dans l'entente. Ultimement, nous jugeons que ces ententes sont inutiles, parce que, comme le gouvernement n'a pas défendu les Canadiens, ces entreprises ont pris plus de place.
    Prenez le cas de la Banque Royale du Canada qui a acheté la Banque HSBC Canada. Même à Vancouver, où vous habitez, la Banque HSBC Canada détenait 10 % des prêts hypothécaires. Après la fusion, les taux d'intérêt ont augmenté de près de 1 % — et fait plus important encore — tout comme les profits.
    Pouvez-vous me dire, monsieur Singh, dans quelle mesure les profits de la Banque Royale du Canada ont augmenté au cours du dernier trimestre se terminant le 31 mars par rapport au dernier trimestre de décembre 2023? Donnez-moi un chiffre.
    Nous sommes absolument opposés à ce genre de fusions. C'est pourquoi nous présentons un projet de loi justement pour les interdire. Si les conservateurs sont en faveur de ce genre de changements, je les invite à appuyer mon projet de loi, qui interdirait carrément toute fusion qui porterait la part du marché d'une entreprise à plus de 60 %.
    Monsieur Singh, donnez-moi simplement un chiffre, s'il vous plaît.
    Appuyez le projet de loi. Le but du projet de loi est de mettre fin à ce type de fusions, d'empêcher les fusions qui nuisent aux Canadiens.
    Monsieur Singh...
    Les conservateurs ont longtemps fermé les yeux sur ce problème.
    ... il s'agit d'un milliard de dollars. Voilà les profits de la Banque Royale du Canada au cours du premier trimestre de 2024 par rapport au dernier trimestre de 2023. La Banque HSBC a seulement fait 300 millions au cours du dernier trimestre.
    Le résultat de ces fusions est évident. Si on ne défend pas les intérêts des Canadiens, ils souffrent. Prenez les factures des téléphones cellulaires, dont vous avez parlé: les Canadiens reçoivent les factures les plus élevées au monde pour leurs services de téléphonie cellulaire, et pourtant, vous ne vous êtes pas opposé à la fusion entre Rogers et Shaw.
    Ce n'est pas vrai. Nous nous y sommes opposés.
    Ultimement, vous auriez pu empêcher cette fusion. Vous auriez pu tenir tête au gouvernement et dire: « C'est notre limite. Nous n'allons pas autoriser cela. »
    Depuis, Rogers et Shaw ont profité de cette fusion.
    Je vais commencer par ceci: le premier ministre, que vous soutenez, a dit à la Chambre des communes que les factures de téléphonie cellulaire avaient baissé de moitié. Il l'a dit. Il a dit que les factures de téléphonie cellulaire avaient baissé de moitié, alors je vais vous poser une question toute simple. À quel point les revenus de Rogers ont-ils augmenté au cours de l'exercice se terminant le 31 mars 2023 — je parle des revenus associés aux services sans fil par client — en comparaison de l'année précédente? Donnez-moi un chiffre.

  (1110)  

    Nous nous sommes fermement opposés à la fusion entre Rogers et Shaw. Durant la période des questions, je pose des questions directement aux ministres et au gouvernement. Ce que j'ai dit figure au compte rendu. J'ignore si M. le député a jamais posé une question là-dessus, même une fois. J'ai questionné le premier ministre directement à ce sujet, et j'ai dit que c'était une mauvaise chose. Le projet de loi que j'ai présenté et dont nous discutons présentement protégerait les consommateurs contre ce genre de fusions. Je veux littéralement redresser la situation au moyen du projet de loi à l'étude.
    Si les conservateurs souhaitent protéger les consommateurs — ce que je trouve étonnant —, alors ils pourraient appuyer mon projet de loi qui interdirait les fusions donnant aux sociétés une part du marché supérieure à 60 %.
    Monsieur Singh...
    Je m'oppose aux fusions qui nuisent aux Canadiens, et nous avons actuellement des projets de loi — dont un devant votre comité — qui ferait justement cela, qui protégerait les consommateurs contre les fusions.
    ... vous vous adressez au porte-parole de l'opposition, du Parti conservateur, en matière de concurrence, parce que notre chef a jugé que la concurrence était un enjeu suffisamment important et que quelqu'un devait s'en occuper. Quand nous parlons de ce que vous auriez pu faire, vous étiez dans une tout autre position: vous auriez pu empêcher le gouvernement d'autoriser ces trois fusions qui ont nui aux Canadiens.
    On dit que vous êtes le maître des contradictions. Vous défendez l'intérêt de ces sociétés, qui n'ont fait que grossir...
    M. Jagmeet Singh: Je ne défends pas leur intérêt, je leur tiens tête.
    M. Ryan Williams: ... depuis que vous êtes au pouvoir, et les consommateurs, pour leur part, ont moins de pouvoir. Nous savons que les prix ne diminuent pas. Nous ne voyons pas de concurrence. Vous avez présenté un projet de loi, et nous avons proposé beaucoup de changements. Vous et moi avons tous deux proposé une modification à la défense fondée sur l'efficience, que le gouvernement actuel nous a volée.
    Vous ne défendez pas l'intérêt des Canadiens. Plutôt, les Canadiens ont l'impression que vous les avez trahis. Ils n'ont pas l'impression que vous tenez tête aux sociétés. Ils ne croient pas que des mesures seront prises, et les gens font seulement confiance aux actes...
    Monsieur Singh, un autre changement que nous réclamons ici au Canada serait le système bancaire ouvert. Si nous envisageons de réduire la part du marché des banques au Canada, un système bancaire ouvert est la solution. Au Royaume-Uni, où un système bancaire ouvert a été mis en œuvre, cela a permis à la moyenne des gens au Royaume-Uni d’économiser 400 $ par année. Il n'y a pas de frais de transactions, pas de frais mensuels et pas de frais de découvert dans un système bancaire ouvert, même avec seulement 14 % de parts du marché.
    Il a fallu six ans pour que le gouvernement présente un projet de loi. Il a choisi un organisme de réglementation et lui a à peine donné une somme dérisoire, 1 million de dollars, pour la mise en place de la réglementation. L'organisme de réglementation, l'Agence de la consommation en matière financière du Canada, a récemment témoigné devant un comité sénatorial.
    Savez-vous à combien des 27 000 plaintes elle a répondu depuis 2019? Pouvez-vous seulement me donner un chiffre?
    C'est intéressant: je suis littéralement en train de dire à M. Williams que nous nous opposons à ce que les grandes sociétés arnaquent les Canadiens. Je me suis opposé aux fusions. M. Williams le sait très bien. Il sait que j'ai tenu tête aux sociétés et je me suis opposé aux fusions. Je ne sais pas s'il n’a jamais lui-même posé une question à ce sujet durant la période de questions, mais moi, si. Je peux aussi dire, en outre, que j'ai remarqué que le député n'a posé aucune question à propos de la cupidité des épiceries.
    Serait‑ce parce que le président et chef de la direction de Metro a versé un don maximal à votre chef? Serait‑ce parce que le stratège du Parti conservateur ou des entreprises est un lobbyiste pour Loblaws? Cela explique peut-être pourquoi vous ne voulez pas discuter des chaînes agroalimentaires et des chaînes d'épicerie, mais moi, si. Je suis prêt à les affronter. Je suis prêt à affronter toutes ces sociétés qui voudraient escroquer les Canadiens.
    Merci, messieurs Singh et Williams.

[Français]

     Monsieur Turnbull, vous avez la parole pour six minutes.

[Traduction]

    Merci, monsieur le président, et merci à M. Singh de sa présence ici aujourd'hui.
    Je trouve cela un peu ironique d'entendre les conservateurs parler de 400 $ d'économies par année, alors qu'ils refusent d'aider les familles à sauver de l'argent sur les frais de garderie, sur les soins dentaires et sur l'assurance-maladie, ou d'aider à nourrir les enfants qui ont faim, ou qu'ils s'opposent à la Prestation canadienne pour les personnes handicapées, et je pourrais continuer comme cela longtemps. La liste est interminable, en plus de l'Allocation canadienne pour enfants et de bien d'autres mesures.
    Monsieur Singh, je sais que vous dites que vous nous avez poussés à faire certaines choses, et je vais évidemment devoir exprimer mon désaccord à ce sujet, parce que le gouvernement du Canada a présenté à maintes reprises des révisions de la Loi sur la concurrence — les projets de loi C‑19, C‑56 et C‑59 —, et je crois que notre collaboration avec le NPD quant à certains de ces changements a vraiment porté des fruits. Je pense que c'est une approche que nous devrions tous adopter dans le cadre de nos travaux parlementaires, parce que si nous sommes ici, c'est vraiment pour servir les Canadiens.
    Nous comprenons bien la concurrence dans le marché. Plus il y a de concurrence, plus il y a d'options et meilleurs sont les prix. Nous le disons depuis le jour un. Je sais que nous ne sommes peut-être pas du même avis à certains égards, mais c'est la position du gouvernement.
    Monsieur Singh, je vais prendre un peu de recul: je serais curieux d'entendre votre approche quant à la réforme de la concurrence, et je sais aussi que vous êtes un ancien avocat de la défense et défenseur de la Charte des droits et libertés.
    Diriez-vous que vous êtes favorable aux principes de la justice naturelle, protégés en vertu de la Charte?

  (1115)  

    Je crois savoir où le député veut en venir, avec ces questions.
    En tant qu'avocat, je peux vous dire que ce que nous avons constaté, c'est que donner un pouvoir discrétionnaire complet aux juges pour imposer les peines a mené à l'affaire dont je vous ai parlé, les 5 milliards de dollars que les grandes sociétés ont soutirés aux Canadiens avec le stratagème de fixation du prix du pain. La plus grosse amende qu'un juge a imposée dans cette affaire s'élevait à 50 millions de dollars, une tape sur les doigts au regard de 5 milliards de revenus nets.
    Ce que j'espère faire, c'est de mettre en place des lignes directrices pour les juges. Les juges respectent les lignes directrices. Ils vont respecter la jurisprudence. L'amende la plus élevée était de 50 millions de dollars. Cela n'aura pas un effet dissuasif assez important.
    Nous avons dit que le juge devrait avoir un pouvoir de dissuasion, imposer une amende représentant jusqu'à 10 % du revenu de l'entreprise. Dans le cas de Loblaws, qui affiche des revenus de 60 milliards de dollars, le juge pourrait imposer une amende de 6 milliards de dollars. Ça, c'est de la dissuasion. Sans lignes directrices, les juges n'iront pas plus loin que la jurisprudence, qui dit présentement que 50 millions de dollars est l'amende la plus élevée qui peut être imposée. C'est très loin d'être suffisant.
    Vous êtes cependant d'accord pour dire que les rôles de juge, de jury et de bourreau ne devraient pas être réunis et donnés à un commissaire, peu importe lequel. Ne seriez-vous pas d'accord pour dire que, dans certains cas, il doit y avoir une séparation claire entre la fonction d'enquête et la fonction décisionnelle, et c'est pour cette raison que nous avons un commissaire et un tribunal de la concurrence.
    Bien sûr qu'il doit y avoir cette séparation, mais soyons très clairs: les libéraux refusent de reconnaître que le stratagème de fixation du prix du pain a coûté quelque chose comme 5 milliards de dollars aux Canadiens, et les amendes qui ont été imposées reflètent l'un des exemples les plus scandaleux de tape sur les doigts pour ces grandes sociétés.
    Ce que je propose, ce sont des lignes directrices qui donneraient au juge le pouvoir d'imposer des amendes représentant le triple du bénéfice réalisé, ou 10 % des revenus de l'entreprise. Ce sont des sanctions et des pénalités sévères, et je ne comprends pas pourquoi les libéraux sont réticents à l'idée d'appliquer des lignes directrices qui laisseraient savoir aux juges qu'ils doivent aller plus loin et imposer des pénalités plus sévères pour les crimes graves. Si les entreprises vont escroquer les Canadiens, elles doivent comprendre qu'elles s'exposent à des sanctions sévères. C'est ce que je propose: des pénalités qui empêcheront ces entreprises d'escroquer les Canadiens.
    Encore une fois, je vais devoir exprimer mon désaccord, parce que nous avons augmenté les sanctions.
    Seulement, pas pour la collusion ou le complot.
    Peut-être que vous voulez les augmenter davantage. Cependant, d'après ce que je comprends du droit, plus une sanction est potentiellement sévère, plus il est important d'avoir cette séparation entre la fonction décisionnelle et la fonction d'enquête.
    Si vous acceptez qu'il y ait un tribunal... Vous ne proposez pas, dans votre projet de loi d'initiative parlementaire, d'éliminer le tribunal, dans les réformes que vous proposez en matière de concurrence, n'est‑ce pas?
    Non, pas du tout.
    Je veux que ce soit clair. Même si nous avons été en mesure de pousser le gouvernement à apporter des modifications relativement aux activités anticoncurrentielles, le gouvernement a tout de même refusé d'apporter ces changements relativement à la collusion, au complot ou à la fixation des prix, et la fixation des prix est justement ce dont je parle, par rapport à la fixation du prix du pain.
    Nous avons des preuves de ce qui s'est passé en 2018. Les libéraux et même, en toute franchise, les conservateurs ne veulent pas s'attaquer à la fixation des prix. Voilà ce que je propose de faire dans ce projet de loi, de s'attaquer à un problème qui reste à régler, de prendre des mesures contre la fixation des prix ou le complot ou contre les sociétés qui conspirent pour escroquer les Canadiens. Nous avons besoin de sanctions sévères dans ce genre de cas, et ces sanctions ne sont actuellement pas dans la loi du gouvernement. Mon projet de loi corrigerait cela et servirait à protéger beaucoup plus les consommateurs.
    Juste pour que ce soit clair, vous reconnaissez tout de même l'avantage d'avoir un tribunal administratif. Pourriez-vous nous parler de ces avantages?
    Il n'y a rien dans mon projet de loi qui donne à penser que nous modifierions cette structure. Nous sommes concentrés strictement sur...
    Est‑ce parce que vous reconnaissez l'importance de la fonction qu'un tribunal remplit?
    Oui. Il y a une séparation entre ceux qui enquêtent et ceux qui décident, et c'est normal.
    Ma priorité est de veiller, si une entreprise escroque un Canadien, à ce qu'elle subisse une sanction sévère. Ce n'est pas ce qui est prévu à l'heure actuelle, en ce qui concerne la collusion ou le complot, c'est-à-dire quand les grandes sociétés conspirent, comme cela s'est vu avec la fixation du prix du pain. C'est le problème dont j'ai parlé et qui reste à régler, et que mon projet de loi veut corriger.
    Mais vous ne prônez pas que l’on contourne les principes de la justice naturelle dans ce régime, c'est-à-dire la séparation des pouvoirs et l'équité et l'application régulière de la loi, qui sont les bases de notre système?
    Je ne pense pas avoir jamais laissé entendre que c'est le cas, et il n'y a rien de tel dans mon projet de loi.
    D'accord, excellent. C'est seulement que votre député, ici, souhaite cela en matière de protection de la vie privée. Voilà pourquoi je pose la question. Votre député, ici, est entièrement prêt à éviscérer le projet de loi en ce qui concerne le tribunal de la protection des renseignements personnels, et nous avons entendu des témoignages...
    La protection de la vie privée et la concurrence sont des sujets très différents. Ce dont je parle aujourd'hui concerne la concurrence, qui est un tout autre enjeu.
    Eh bien, les deux ne sont pas si différents, mais je vais m'arrêter ici.
    Merci, monsieur Turnbull.

[Français]

     Monsieur Garon, vous avez la parole pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Singh, soyez le bienvenu au Comité. C'est un plaisir de vous voir.
    Je vous félicite pour le dépôt de votre projet de loi.
    Évidemment, vous avez mis l'accent sur les épiceries, puisque c'était le dossier de l'année. On comprend que c'est important, mais votre projet de loi modifierait les règles sur la concurrence pour l'ensemble des industries, alors je me permettrai de vous parler, comme l'a fait mon collègue conservateur, du système bancaire ouvert.
    Vous savez qu'aujourd'hui, les banques sont appelées à devenir des manufacturiers de produits financiers, et les interfaces sur lesquelles les clients vont aller les acheter et les utiliser sont des applications. Il faut donc une loi et une réglementation pour encadrer tout cela, effectivement. Vous savez que le budget, que vous avez appuyé, contenait une intention de réglementer le système bancaire ouvert. Vous savez aussi, puisque vous êtes un homme d'une grande culture, qu'au Québec, notre plus importante institution financière, Desjardins, relève du gouvernement du Québec.
    Le projet de loi du gouvernement semble contenir l'intention d'imposer un cadre et de mettre le revolver sur la tempe de Desjardins en lui disant tout simplement de choisir entre se conformer au cadre fédéral et être isolé de son côté. Il ne semble y avoir eu aucune coordination avec le gouvernement du Québec pour harmoniser tout cela.
    Quelle est votre position? Seriez-vous prêt à appuyer un projet de loi sur le système bancaire ouvert à l'égard duquel il n'y a eu aucune coordination avec le gouvernement du Québec pour tenir compte du plus important employeur au Québec et de notre plus importante institution financière?
    Appuieriez-vous un tel projet de loi?

  (1120)  

    Aujourd'hui, je me suis préparé à parler de mon projet de loi portant sur la concurrence, qui vise plus particulièrement à s'attaquer à des problèmes qui frappent fort aujourd'hui, comme la difficulté que les Canadiens ont à faire l'épicerie. Je propose des mesures pour protéger les consommateurs et imposer des pénalités plus sévères aux grandes entreprises...
    Monsieur Singh, vous faites de la politique. Je ne veux pas manquer de courtoisie, mais vous connaissez la valeur du temps. Je vous parle de la proposition actuelle sur le système bancaire ouvert, qui met le Québec devant un fait accompli. Vous pouvez dire que vous ne vous êtes pas encore forgé d'opinion là-dessus — j'ai du respect pour les gens qui prennent le temps de réfléchir —, mais dites-le-moi. Ne changez pas de sujet.
    J'étais en train d'expliquer qu'aujourd'hui, je me suis préparé à défendre et promouvoir mon projet de loi. Je suis prêt à réfléchir à ce que vous avez soulevé et à considérer votre proposition, mais aujourd'hui, je veux me concentrer sur le défi qui est devant nous. Il s'agit d'adopter des mesures pour protéger les consommateurs contre les grandes entreprises qui exploitent les gens, c'est-à-dire les grandes chaînes d'épicerie, mais aussi les grandes entreprises de télécommunications.
    C'est ce dont je veux parler aujourd'hui, mais je suis prêt à considérer votre proposition.
     On attendra votre réflexion là-dessus. Merci beaucoup.
    Un bon nombre des dispositions de votre projet de loi sont déjà appliquées, puisqu'elles faisaient partie de projets de loi qu'on a adoptés précédemment, comme les projets de loi C‑56 et C‑59. Cependant, il reste une partie qui ajouterait beaucoup de contraintes aux autorités de la concurrence.
    Essentiellement, avec les modifications législatives qui ont été apportées jusqu'à maintenant, le Bureau de la concurrence doit non seulement chercher des gains d'efficience avant d'autoriser une transaction, mais, par ailleurs, on doit maintenant pouvoir prouver que le consommateur a bénéficié des gains d'efficience. Votre projet de loi, quant à lui, ajoute une contrainte liée à la structure du marché, et non à la conséquence d'un fusionnement. Si la part de marché combinée résultant d'un fusionnement dépasse 60 %, on l'interdira, et si elle se trouve entre 30 % et 60 %, il y aura une enquête, si je comprends bien.
    Que ferait-on, par exemple, dans les cas où il y a ce qu'on appelle un monopole naturel, dans des régions éloignées? Il y a des chaînes d'épicerie dans des régions très éloignées qui ont de la difficulté à rester ouvertes et, si elles ne fusionnent pas pour prendre le marché, elles feront faillite et les gens n'auront plus de nourriture.
    Savez-vous que la rigidité de votre projet de loi empêcherait des gens de manger, dans certaines régions? Y avez-vous pensé?
     J'ai pensé à la question de l'impact d'un monopole. Si la part de marché d'une entreprise est supérieure à 60 % à la suite d'une fusion, cela fait mal aux gens. C'est indéniable.
    Comment peut-on aider les petites entreprises? Comment peut-on aider les entreprises dans les régions? Je pense que c'est cela, la solution, et on doit le faire.
    Je suis rigide pour ce qui est de prévenir un monopole. Si une entreprise a plus de 60 % du marché, c'est un problème. Nous avons déjà vu l'impact des monopoles ou des oligopoles dans le domaine de...
    Monsieur Singh...
    ... la télécommunication. Cela fait mal aux gens.
    Pourquoi n'avez-vous pas fixé le seuil à 50 %, à 55 % ou à 42 %, par exemple? D'où vient le seuil de 60 %?
    C'est pour prévenir une situation comme le fait que les grandes entreprises d'épicerie, soit Loblaws, Metro, Sobeys, Walmart et Costco, possèdent maintenant la majorité des épiceries au pays. M. et Mme Tout‑le‑Monde peuvent le voir quand ils regardent les options dans le marché. C'est un grand problème.
    Pour prévenir cette situation, nous avons donc consulté d'autres pays et avons déterminé que ce seuil de 60 % était une limite claire. Nous ne devons pas accepter une situation où une entreprise a plus que cela, comme...

  (1125)  

    Quels autres pays, par exemple, utilisent un seuil rigide de 60 %? Si une entreprise allait détenir 60,01 % du marché à la suite d'une fusion, quel autre pays interdirait strictement la fusion sans analyser le dossier et sans regarder les conséquences?
    Je ne dis pas que je suis contre le projet de loi. J'essaie vraiment de le comprendre. La démarche est honnête.
    Pouvez-vous me nommer trois autres pays qui font ça?
    Nous avons...
    Si vous les avez tous consultés, est-ce que vous pouvez me le dire?
    Oui. Nous avons consulté des lois ou des projets de loi en Europe et en Australie, qui ont guidé notre décision de fixer le seuil à 60 %.
    Les Américains ont-ils un seuil de 60 %?
     Non, je ne le pense pas, mais les Américains ont des lois sur la concurrence qui sont plus fortes que les nôtres.
     Elles sont aussi plus souples.
    Oui, nous avons regardé ce qui se fait aux États‑Unis aussi, mais, en ce qui concerne le seuil de 60 %, nous avons vraiment regardé les exemples de l'Europe et de l'Australie.
     Merci, monsieur Singh.
    Je vous en prie.
     Merci.
    Monsieur Masse, la parole est à vous.

[Traduction]

    Merci, monsieur le président. C'est un plaisir d'être ici.
    Merci de votre présence, monsieur Singh.
    Je trouve curieux que mes collègues conservateurs aient oublié leur propre histoire. Je me rappelle l'époque des conservateurs sous Peter MacKay et David Orchard, de leur prise du pouvoir et ce qui a suivi, et même de l'administration Harper, où ils avaient juste assez de députés à la Chambre des communes pour bloquer ou renverser un gouvernement, parce que ce n'était pas le leur. Ils sont allés voir le lobby comme ils l'avaient fait la dernière fois, comme lors de la dernière législature, au lieu d'agir et d'essayer d'être constructifs.
    Je pense que ce projet de loi est important parce que, malgré les désaccords autour de la table à propos de certaines choses, il y aura toujours des raisons de ne pas agir.
    Le Comité a cependant un bon bilan, pour ce qui est d'agir de manière bipartisane pour débattre publiquement de certains de ces enjeux. En ce qui concerne les chaînes d'épicerie en particulier, c'est notre comité qui a d'abord demandé aux présidents et directeurs généraux de témoigner ici, non seulement par rapport à la fixation du prix du pain, mais aussi parce qu'ils avaient mis fin aux primes liées à la pandémie le jour même, intégralement.
    Pourriez-vous nous parler un peu plus du problème de la fixation du prix du pain? Il s'agit tout de même d'un aliment de base dans la vie des gens, ici au Canada.
    Quelle aurait été l'incidence de ce projet de loi sur la fusion entre Rogers et Shaw, qui a été autorisée? Si nous avions eu cette protection, quel aurait pu être le résultat?
    Merci beaucoup de la question.
    Encore une fois, fondamentalement, je ne peux m'imaginer rien de plus important pour les Canadiens que de pouvoir acheter de la nourriture. C'est une nécessité. Tout le monde en a besoin. Ce que nous voyons très clairement, quand on regarde la situation d'un bout à l'autre du pays, c'est que les Canadiens qui vont à l'épicerie se font escroquer une fois rendus à la caisse. Ils le savent. Quand on a posé la question aux Canadiens, ils ont dit très clairement qu'ils sentaient que la cupidité des entreprises était la principale raison de la hausse des prix.
    Le projet de loi vise cela directement. Nous allons viser directement les grandes chaînes d'épicerie du pays — les Loblaws, Métro, Sobeys, Walmart et Costco — et leur faire comprendre directement qu'ils ne peuvent pas escroquer les consommateurs. Le projet de loi créerait des protections supplémentaires.
    L'élément manquant, comme je l'ai souligné aux libéraux, est que même si nous avons réussi à les convaincre de modifier les sanctions pour les activités anticoncurrentielles, ils ont refusé de renforcer les sanctions relatives au complot ou lorsque les grandes sociétés conspirent pour escroquer les Canadiens. Le stratagème de fixation du prix du pain, dont j'ai déjà parlé, était que les grandes chaînes d'épicerie et les grands producteurs de pain commerciaux ont conspiré pour augmenter le prix du pain. Ils en ont été reconnus coupables et ils ont donc dû payer des amendes. L'amende la plus sévère a été imposée à la Boulangerie Canada Bread, à hauteur de 50 millions de dollars seulement. Au regard de l'argent qu'ils ont fait et de l'énormité de l'escroquerie pour les Canadiens, il s'agit d'une tape sur les doigts.
    Notre projet de loi contient des lignes directrices claires pour les juges afin qu'ils imposent des sanctions plus strictes et plus sévères. Nous savons que, au Canada, un pays assujetti à la common law, les sanctions doivent respecter la jurisprudence. Présentement, le précédent a été établi à 50 millions de dollars. C'est l'amende la plus élevée, mais ce n'est tout simplement pas suffisant. Nous avons créé des lignes directrices expliquant au juge la sanction maximale qu'il peut imposer. Parmi ce que nous avons élaboré, je pense qu'il y a deux points très importants: premièrement, 10 % des revenus de l'entreprise. Pour une entreprise comme Loblaws, qui a 60 milliards de revenus, l'amende maximale peut s'élever à 6 milliards de dollars. En fournissant à un juge des lignes directrices claires sur la sanction maximale qu'il a le droit d'imposer, nous pourrons imposer des sanctions plus sévères qui auront un effet dissuasif pour ces entreprises.
    Un autre exemple de ce que nous avons prévu est le triple des bénéfices accumulés. Si, collectivement, ces sociétés ont fait 15 milliards de dollars, alors, collectivement, le juge peut imposer une sanction de 15 milliards de dollars en amendes. Encore une fois, cela aura un effet dissuasif très important. Si une entreprise sait qu'elle risque de perdre des milliards de dollars en amendes, elle ne va pas escroquer les Canadiens. C'est un point important.
    Vous avez mentionné la fusion entre Rogers et Shaw. Pour que ce soit clair, le Bureau de la concurrence a essayé de l'empêcher. Nous avons demandé directement au ministre de l'empêcher, mais les libéraux ont refusé d'empêcher la fusion, alors qu'ils auraient dû le faire. Cette fusion est mauvaise pour les Canadiens, elle est mauvaise pour la concurrence. Elle réduit les options et les choix et va faire augmenter les prix.
    Notre projet de loi, dans lequel nous avons réussi à forcer le gouvernement à inclure certaines de ces mesures, nous permettrait de veiller à ce que, dans le cas d'une fusion où la société se retrouverait avec 30 % des parts d'un marché, l'entreprise devrait se plier à un processus très difficile où elle devra convaincre que la fusion est pour le bien des Canadiens ou pour le bien des consommateurs. C'est un seuil très difficile à atteindre. Dans le cas de la fusion entre Shaw et Rogers, la société n'aurait pas réussi à prouver que le seuil était respecté.
    À propos de cette fusion, les parts du marché étaient de près de 60 %, mais pas exactement. Si cela avait été 60 % ou plus, alors la fusion serait immédiatement interdite. C'est une protection que nous devons avoir. Nous devons aussi avoir en place des mesures strictes pour empêcher la formation d'oligopoles, parce que nous savons ce que cela entraîne. Que ce soit les chaînes d'épicerie ou les télécommunications, les Canadiens se retrouvent avec moins de choix et des prix plus élevés. C'est une escroquerie.

  (1130)  

    Merci.
    Je sais que les libéraux pensent: « Ah, ah! on vous a eus », parce que nous, l'opposition, nous étions contre un tribunal appliquant les lois sur la protection de la vie privée et nous proposions des solutions. Un des problèmes que nous avons à cet égard, c'est le simple fait que le tribunal du Bureau de la concurrence poursuit notre Bureau de la concurrence lui-même. Cela coûtera de l'argent aux Canadiens et cela minera aussi la confiance envers le Bureau de la concurrence, selon moi. C'est l'une des raisons pour lesquelles nous ne croyons pas qu'un tribunal est l'une des meilleures choses qui soit.
    Votre projet de loi vise à modifier dans une certaine mesure le tribunal en l'empêchant dans les faits de pouvoir poursuivre en retour le Bureau de la concurrence. Pouvez-vous nous en dire plus? C'est tout à fait absurde qu'il soit essentiellement possible non seulement d'annuler ou d'invalider une décision du Bureau de la concurrence, mais aussi de punir celui‑ci et de punir les Canadiens, parce qu'il a défendu la bonne chose et qu'il a fait son travail comme il le fallait.
    Oui, je pense que cet amendement parle de lui-même. Le fait que cela empêche ce type de poursuite semble être une bonne chose. Les gens veulent exercer leur droit de soulever une inquiétude sans être punis en retour.
    Je crois qu'il s'agit d'un amendement convenable, et je l'appuie.
    Me reste‑t‑il du temps?
    Non, monsieur Masse, mais nous reviendrons à vous.
    Monsieur Perkins, vous avez la parole pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur Singh, d'être présent.
    Dans votre déclaration préliminaire, évidemment, vous avez beaucoup parlé du prix des aliments. C'est l'un des fondements de cette initiative. Cependant, pendant neuf ans, le NPD a voté en faveur de chaque budget qu'a présenté Justin Trudeau, et les Canadiens sont plus misérables et affamés que jamais. Par exemple, la laitue a augmenté de 94 % durant cette période, les oignons, de 69 % et le chou, de 70 %, depuis votre accord avec les libéraux. Une étude de l'Université Dalhousie réalisée par le « Professeur d'alimentation », comme il se fait appeler, montre que la taxe sur le carbone augmente de 34 % le prix des aliments en gros.
    Ma question est simple: Allez-vous finalement admettre que les taxes sur le carbone augmentent le prix des aliments?
    Eh bien, vous venez de dire une ou deux choses qui sont complètement fausses.
    Pendant neuf ans, nous n'avons pas appuyé tous les budgets. Ce n'est pas vrai.
    En ce qui concerne les coûts que doivent assumer les Canadiens, on leur a posé exactement cette question: Selon vous, essentiellement, qu'est‑ce qui fait augmenter votre facture d'épicerie?
    M. Rick Perkins: [Inaudible]
    M. Jagmeet Singh: On a posé la question aux Canadiens, et ils ont répondu que ce qui faisait augmenter le prix de leurs aliments, c'était surtout la cupidité des entreprises.
    Nous avons aussi effectué une enquête. Nous avons demandé au Bureau de la concurrence d'étudier la question, et il est très clair que ces sociétés volent les Canadiens. En fait, les économistes ont dit clairement...
    Mais, monsieur Singh, ce n'est pas la question que je vous ai posée.
    ... que les grandes sociétés volent de plus en plus les Canadiens, nous allons donc nous attaquer au facteur le plus important.
    Veuillez répondre à la question, s'il vous plaît.
    Est‑ce que la taxe sur le carbone fait augmenter le prix des aliments, oui ou non?
    Nous savons que le principal facteur qui fait augmenter le prix des aliments, c'est la cupidité des entreprises, donc pourquoi est‑ce que nous...
    Vous éludez la question.
    Je ne sais pas pourquoi les conservateurs écartent du revers de la main le principal facteur et qu'ils s'intéressent à autre chose.
    Ce qui nuit aux Canadiens crève les yeux: les énormes profits que font les PDG de ces grandes sociétés. Les conservateurs veulent ignorer cela — le principal facteur qui fait augmenter les prix des aliments — et veulent que les Canadiens croient qu'ils se soucient vraiment d'eux.
    La seule chose que l'on ignore ici, c'est ma question, monsieur Singh. Vous ne voulez pas répondre à ma question sur la taxe sur le carbone, laquelle fait augmenter les prix des aliments.
    Eh bien, vous ignorez le principal facteur qui fait augmenter le prix des aliments dans notre pays.
    Monsieur Singh, récemment, à l'Institut Broadbent, vous avez donné un appui très flou à la taxe sur le carbone. L'appuyez-vous, ou non?

  (1135)  

    Ce qui est intéressant, c'est que nous parlons des prix des aliments, que j'ai affirmé que la cupidité des entreprises fait augmenter le prix des aliments et que les Canadiens sont en accord avec cela, mais que le député ne veut pas parler de la cupidité des entreprises. En substance, ce projet de loi...
    Je parle des prix des aliments et de la taxe sur le carbone qui les fait augmenter.
    En substance, ce projet de loi s'attaque à la cupidité des entreprises.
    Allez-vous répondre à ma question ou allez-vous encore une fois seulement lire l'aide-mémoire du bureau du premier ministre?
    Est‑ce que la taxe sur le carbone fait augmenter le prix des aliments et appuyez-vous la taxe sur le carbone, oui ou non?
    Ce qui fait augmenter le plus le prix des aliments, c'est la cupidité des entreprises, et je ne sais pas pourquoi le député ne veut pas parler...
    Ce qui fait augmenter le plus les prix, ce sont les politiques du gouvernement que vous soutenez.
    ... de la cupidité des entreprises, qui volent les Canadiens. Lorsque les Canadiens se rendent à l'épicerie et qu'ils paient plus d'argent que jamais pour leur épicerie, ils savent qu'ils se font voler.
    Je ne sais pas pourquoi le député ne veut pas parler de la cupidité des entreprises.
    Combien de gens s'adressent actuellement aux banques alimentaires du fait que vous soutenez le gouvernement fédéral actuel?
    Les gouvernements conservateurs et libéraux qui se sont succédé ne se sont jamais attaqués à la cupidité des entreprises et ont fermé les yeux sur le fait que les Canadiens se font voler par les PDG; à cause de cela, maintenant, un Canadien sur quatre saute des repas. On ne s'est jamais autant servi des banques alimentaires parce que les libéraux et les conservateurs…
    Grâce à votre appui des politiques libérales.
    ... refusent de s'attaquer à la cupidité des entreprises.
    Lorsque vous avez rendu visite aux travailleurs en grève de Metro et que vous êtes allé sur leur ligne de piquetage, leur avez-vous dit que votre frère et le porte-parole du NPD sont lobbyistes pour Metro?
    Tout d'abord, c'est tout à fait faux. Ensuite, le député sait très bien que nous nous dénonçons la cupidité des PDG de Metro, Sobeys, Loblaws, Walmart et Costco. Cependant, ce qui est intéressant, c'est que les conservateurs attaqueront tout le monde, y compris ma famille, plutôt que les PDG qui volent les Canadiens. Cela en dit beaucoup...
    Nous ne faisons qu'attaquer votre hypocrisie.
    ... sur la nature des conservateurs.
    M. Rick Perkins: Donc, lorsque vous vous en êtes pris à Loblaws...
    M. Jagmeet Singh: Tout ça pendant que je m'en prends directement aux PDG et aux sociétés.
    Monsieur Perkins, veuillez rester respectueux dans vos propos, au sein de notre comité.
    Je vous laisse poursuivre.
    Il pourrait éviter cela s'il répondait aux questions plutôt que de les éluder comme le font les libéraux.
    Non, non, monsieur. Vous savez que j'ai parlé directement de l'enjeu...
    M. Rick Perkins: Lorsque vous avez commencé à vous en prendre à Loblaws et à d'autres épiciers...
    M. Jagmeet Singh: ... à savoir la cupidité des entreprises qui fait augmenter le prix des aliments. Je m'en prends aux grandes chaînes d'épiceries.
    Monsieur le président, pourriez-vous lui dire d'arrêter de m'interrompre pour que je puisse poser mes questions?
    Peut-être que le député ne veut pas faire cela parce que son chef reçoit un maximum de dons du PDG de Metro.
    J'invoque le Règlement, monsieur le président.
    Je suis prêt à attaquer les PDG de toutes les sociétés.
    D'accord, monsieur Singh.
    Monsieur Perkins, allez‑y.
    Le chef du NPD m'interrompt quand je lui pose des questions. Il est un témoin. Ce n'est pas à lui de poser des questions. Il nuit aux interprètes quand il m'interrompt et pendant que je pose mes questions.
    Selon moi, cela va dans les deux sens. Vous êtes tous deux des parlementaires chevronnés. La pratique veut habituellement que la réponse prenne autant de temps que la question, et les questions ont été assez longues, monsieur Perkins.
    Elles ont duré environ 20 secondes.
    Essayez seulement de garder cela à l'esprit dorénavant, messieurs les députés.
    Monsieur Perkins, vous avez la parole.
    Lorsque vous avez commencé votre croisade contre les épiciers, avez-vous tout dit au commissaire à l'éthique, au sujet du conflit avec votre frère, avant de décider de vous en prendre aux autres épiceries, sauf celle pour laquelle il travaille?
    Tout d'abord, c'est tout à fait faux, et le commissaire le sait. J'ai ciblé tous les PDG qui volent les Canadiens, y compris Metro, y compris Sobeys et y compris Loblaws. Le député le sait. Les mensonges du député ne changeront rien au fait que, maintenant, je lutte contre la cupidité des entreprises, tandis que les conservateurs veulent parler de tout sauf de cela, et essaient d'attaquer les membres de ma famille plutôt que la cupidité de ces grandes sociétés.
    Vous vous êtes attaqué à Loblaws environ 70 fois, et vous n'avez presque pas mentionné le mot « Metro » avant que l'on vous pose une question, aujourd'hui. Vous dites que vous n'avez pas parlé au commissaire à l'éthique de votre attaque contre les chaînes d'épiceries et du conflit direct lié au travail de votre frère? Vous ne vous êtes pas donné la peine de faire cela?
    Le commissaire sait que j'ai dénoncé la cupidité de toutes les sociétés et que je les ai toutes nommées, y compris le PDG...
    Sauf votre frère.
    ... de Loblaws, le PDG de Metro...
    Est‑ce que votre frère a déjà rencontré le PDG de Metro?
    ... le PDG de Sobeys. J'ai dénoncé Walmart et Costco... Toutefois, les conservateurs ne veulent pas s'en prendre à la cupidité des entreprises. Le fait qu'ils ne veulent pas s'y attaquer en dit beaucoup.
    Votre réponse [inaudible] mes questions. Votre frère a‑t‑il déjà rencontré le PDG de Metro?
    Merci, monsieur Perkins et monsieur Singh. Ça suffit, votre temps est écoulé.
    C'est maintenant au tour de M. Badawey, pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur Singh, d'être ici aujourd'hui.
    Je ne tenterai pas de mettre les projecteurs sur la politique et sur la vie que nous vivons ici, à Ottawa, ni sur les partis que nous représentons. Je veux mettre les projecteurs sur les gens et sur l'équité.
    Lorsque le gouvernement a présenté le projet de loi C‑56 et le projet de loi C‑59, c'est exactement ce que nous avons fait: nous avons mis l'accent sur les gens et sur l'équité dans le cadre de la réforme de la concurrence. Dans une certaine mesure, je pense que c'est ce que vous essayez de faire ici aussi, et je l'apprécie.
    Cela dit, grâce à ces projets de loi, nous avons des études de marché établies et solides et le pouvoir de contraindre. Nous avons sévi contre les comportements anticoncurrentiels et la collaboration intersectorielle. Nous avons éliminé la défense des gains en efficience, renforcé le droit à la réparation, les dispositions antiécoblanchiment et l'examen des fusions et réprimé les pratiques déloyales en matière de prix — y compris l'affichage de prix partiels — en plus de renforcer les sanctions pécuniaires.
    J'ai lu votre projet de loi d'initiative parlementaire, et j'apprécie son intention, mais je souligne aussi ce que nous avons accompli grâce aux projets de loi C‑56 et C‑59.
    Ce que je veux vraiment, c'est aller un peu plus dans le détail, monsieur Singh, et parler de l'aspect commercial, et non pas politique.
    Vous avez mentionné certains éléments manquants de ce projet de loi. Corrigez-moi si j'ai tort, mais vous avez dit qu'il n'y avait pas de sanctions plus sévères. Donc, ma première question, c'est: quel genre de sanctions plus sévères aimeriez-vous y voir, outre ce qui a été indiqué dans ces deux projets de loi? Ma deuxième vise à savoir si certaines fusions devraient être interdites à partir d'un certain niveau.
    Pourrions-nous avoir un peu de détails? Franchement, j'aimerais que nos discussions donnent des résultats et j'aimerais accomplir ce que nous, le Comité — et je présume nous tous —, voulons accomplir en ce qui concerne l'équité, et, encore une fois, lier tout cela aux gens que nous représentons.

  (1140)  

    Merci.
    Je pense qu'il est important de se rappeler qui ce projet de loi concerne. Il concerne les gens. Il concerne les gens qui se rendent à l'épicerie et qui se font voler. Il concerne les gens qui paient des factures de téléphone cellulaire et des frais Internet parmi les plus élevés dans le monde, sachant que les Canadiens ont besoin d'aide. Ce projet de loi vise à protéger les gens, protéger les consommateurs et imposer des sanctions plus sévères.
    Même si je suis d'accord pour dire que nous avons pu demander des amendements qui ont réglé un certain nombre de changements, y compris la capacité du Bureau de la concurrence d'enquêter sur de possibles comportements anticoncurrentiels et d'imposer des sanctions plus sévères le cas échéant, l'élément manquant c'est celui dont j'ai parlé. C'est lorsque nous voyons l'un des exemples les plus flagrants de grandes sociétés qui volent les Canadiens, c'est lorsqu'il y a de la collusion entre les sociétés ou qu'elles travaillent ensemble pour augmenter le prix du pain. On appelle cela la « fixation des prix ». On pourrait aussi appeler cela un « complot ». On appelle aussi cela de la « collusion ». Ce comportement, celui des grandes sociétés qui travaillent ensemble pour voler les Canadiens, n'a pas été examiné précisément par les libéraux. Nous avons demandé des changements, et ils n'ont pas été acceptés.
    Ce que nous avons inclus dans mon projet de loi vise justement à régler le problème que j'ai mis en lumière: dans un des cas les plus inacceptables de collusion, la fixation du prix du pain, la sanction la plus élevée était de 50 millions de dollars pour la Boulangerie Canada Bread. Cette somme de 50 millions de dollars n'est qu'une tape sur les doigts pour cette société, compte tenu de la somme totale des revenus qu'ont pu faire tous les partenaires en collusion avec elle. La somme volée aux Canadiens s'élevait à 5 milliards de dollars.
    Mon projet de loi vise à fournir des lignes directrices au juge qui serait saisi d'une affaire aussi grave que celle‑là afin qu'il sache quelles mesures il peut prendre. Il peut demander jusqu'à 10 % des revenus d'une entreprise. Il peut demander le triple des bénéfices qu'elle a réalisés. Ce sont des mesures dissuasives importantes. Ce sont des sanctions importantes qui dissuaderaient ces entreprises de voler les gens. C'est ce que nous avons inclus.
    L'autre mesure que nous avons incluse concerne le cas où une fusion entraînerait la détention de 60 % des parts de marché ou plus. Dans ce cas, cette fusion serait immédiatement interdite.
    Merci, monsieur Singh.
    Encore une fois, j'ai parlé de ce que contenaient les projets de loi C‑56 et C‑59. Vous avez souligné ces deux points. Manque‑t‑il d'autres éléments à ces deux projets de loi?
    La troisième chose qui manque, ce sont des sanctions plus sévères dans le cadre d'ententes ou d'arrangements entre les institutions financières fédérales, qui pourraient s'élever à 25 millions de dollars, ce qui correspond aux dispositions existantes sur les sanctions imposées aux cartels criminels. Encore une fois, c'est une autre façon d'englober la collusion ou la collaboration. Selon ces arrangements, les grandes sociétés collaborent ensemble pour voler les Canadiens; donc, en faisant correspondre l'amende avec ce que l'on imposerait à un cartel criminel, nous disons que c'est un crime de voler les Canadiens, et, s'il y a un crime, les sociétés devraient payer l'amende. C'est l'objectif réel de ce projet de loi, s'assurer que les entreprises ne volent pas les Canadiens et que la cupidité des PDG ne l'emporte pas sur les besoins des Canadiens. C'est ce que nous faisons avec ce projet de loi.

[Français]

     Merci beaucoup, monsieur Badawey.
    La parole est maintenant à M. Garon pour deux minutes et demie.
     Merci beaucoup, monsieur le président.
    Monsieur Singh, j'aimerais vous poser une question technique. Pouvez-vous me nommer un marché canadien non réglementé dans lequel une seule entreprise détient plus de 60 % des parts de marché?
     Lors de la fusion de Rogers et de Shaw, atteignait presque 60 %, mais il ne s'agissait pas exactement de.

  (1145)  

    Pouvez-vous nommer une seule fusion dans l'histoire canadienne que votre seuil de 60 % aurait pu prévenir?
    Il s'agit d'une mesure préventive visant les fusions à venir.
    Il s'agit donc de quelque chose qui n'est jamais arrivé. Est-ce exact?
    La situation actuelle est du jamais-vu.
    En ce moment, seulement trois entreprises de télécommunication détiennent la majorité des parts de marché. S'il y a une autre fusion d'entreprises de télécommunication, peu importe lesquelles, celles-ci vont détenir plus de 60 % des parts de marché, ce qui serait un grave problème.
    Je comprends la nécessité d'abaisser le seuil de 35 % à 30 % et de mener une étude. Pour ce qui est du seuil de 60 %, je pense qu'il s'agit d'un aspect de la loi qui n'aura probablement jamais de mordant.
    J'ai une dernière question à vous poser, monsieur Singh. Mon temps de parole est compté — vous savez ce que c'est de ne pas faire partie de l'opposition officielle.
    J'aimerais parler de Glentel. Comme vous le savez, Bell et Rogers ont formé une coentreprise, et cette dernière va bientôt avoir le monopole quant à la vente de forfaits cellulaires dans les épiceries Loblaws. Votre projet de loi s'attaque à la structure de marché, mais il semble que, même après les projets de loi C‑56 et C‑59, il existe encore des comportements qui semblent anticoncurrentiels, mais qui sont encore permis.
    Quelle est votre opinion sur ce modèle d'affaires? Que pensez-vous de l'idée que deux concurrents forment une coentreprise et détiennent le monopole dans une grande chaîne d'épicerie?
    Trouvez-vous que ce sont des pratiques anticoncurrentielles? Pensez-vous qu'on devrait même aller plus loin que ce que les projets de loi C‑56 et C‑59 ont déjà accompli?
    La réponse brève est oui. D'ailleurs, j'ai posé la question au premier ministre, lors de la période des questions orales à la Chambre des communes.
    Que feriez-vous?
     Je lui ai dit qu'il s'agissait d'un grand problème et que le gouvernement libéral devait agir. On n'avait jamais prévu une telle situation.
    Il y a une alliance entre la plus grande entreprise d'épicerie et des grandes entreprises de télécommunication. Comme vous l'avez dit, cela fera que cette coentreprise va avoir le monopole des services de télécommunication, dans les épiceries. Ce n'est pas du tout une bonne chose.
    Le gouvernement doit agir immédiatement. Il devrait y avoir un projet de loi pour régler la question des mesures anticoncurrentielles.
    Cela devrait-il se faire avant l'élection?
    J'espère que oui, car cela peut être néfaste pour les gens.
    J'espère qu'on prendra des mesures pour empêcher cela.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Massé, la parole est à vous.

[Traduction]

    Merci, monsieur le président.
    En fait, je suis heureux que vous ayez soulevé ce point, parce que, en tant que néo-démocrates, nous nous opposions à un certain nombre de ces prises de contrôle. Revenons sur certaines de ces prises de contrôle; rappelons-nous, nous avons perdu Future Shop au profit de Best Buy. Nous étions contre. Nous avons perdu Zellers, racheté par Target. Puis, Target a cessé ses activités au Canada, après que Zellers a établi un syndicat et donné à ses travailleurs un salaire supérieur au salaire minimum ainsi que des avantages sociaux. Target a été tout simplement éjecté du marché canadien. C'est pour cette raison que nous étions contre. Une autre prise de pouvoir importante au Québec a été l'achat de Rona par Lowes, achat auquel nous nous sommes opposés. La part de marché que vous avez mentionnée, 60 %, c'est en fait une façon de prévoir les choses. Je comprends que, quand vous regardez ce qui reste dans le marché, il y a Telus, Bell, Rogers, Vidéotron et Cogeco; ce sont donc les pièces du casse-tête importantes qui restent, et un seuil de 60 % est possible si nous ne faisons rien. Pouvez-vous en dire plus sur le fait que oui, nous ne pouvons pas prédire l'avenir, mais nous pouvons envoyer des messages aux sociétés pour leur dire que les consommateurs canadiens ne peuvent tout simplement plus être traités comme une colonie.
    C'est un excellent exemple. J'en ai parlé brièvement en répondant à la question précédente, mais cela me donne l'occasion d'en parler davantage.
    En ce qui concerne le seuil de 60 % — pas seulement dans le secteur des télécommunications, mais aussi de l'épicerie —, compte tenu des énormes parts de marché que chaque société possède, aujourd'hui, s'il y a d'autres fusions, le seuil de 60 % serait atteint. Le message que nous envoyons avec ce projet de loi, c'est que, non, ce n'est pas permis. Vous ne pouvez pas fusionner si cela lèse les Canadiens.
    Ces fusions seront interdites d'emblée. Cela empêcherait ces entreprises de même envisager ce genre de fusions. Je pense que c'est très important, malheureusement, compte tenu de la concentration des choses, en ce moment.
    Comme vous l'avez mentionné dans votre question, monsieur Masse, le marché des télécommunications est déjà si concentré que toute fusion supplémentaire atteindrait facilement ce seuil. Nous voulons dire que non, cela ne doit pas se produire.
    Monsieur Masse, je vous remercie d'avoir souligné toutes les fusions auxquelles s'opposaient les néo-démocrates. Nous pouvons clairement voir que les libéraux et les conservateurs ont toujours permis ces fusions. Ils ont eu l'occasion de s'y opposer et ne l'ont pas fait. Cela a nui aux Canadiens. Cela a causé du tort aux Canadiens.
    C'est pourquoi je présente aujourd'hui un projet de loi qui empêcherait cela dans les faits.

  (1150)  

    Enfin, très rapidement, on a mentionné que l'Union européenne et l'Australie se sont servis de ces modèles parce que ce sont des pays du Commonwealth. Oui, les États‑Unis sont proches de nous, mais ils ont eux aussi des lois antitrust.
    Pourriez-vous nous expliquer quels sont les avantages de ces lois pour la protection de leurs consommateurs par rapport à ce que fait le Canada? Il peut s'agir du secteur de l'automobile, de l'épicerie ou de différentes choses. Nous n'avons pas été traités de façon équitable.
    Certainement. C'est un point à souligner: les lois canadiennes sur la concurrence sont parmi les moins strictes au monde. C'est une des choses que nous avons constatées lorsque nous avons commencé à creuser la question.
    Le Bureau de la concurrence signale cette préoccupation depuis longtemps. Il n'a pas les outils nécessaires pour s'attaquer aux comportements nuisibles et il n'en a pas la capacité.
    Aux États‑Unis, grâce aux lois antitrust et à leurs lois sur la concurrence, ils protègent beaucoup mieux leurs consommateurs. Nous devons en faire beaucoup plus pour nous assurer que les consommateurs ne se font pas voler par les grandes sociétés.

[Français]

     Merci, monsieur Singh.
    Monsieur Williams, vous avez la parole.

[Traduction]

    Monsieur Singh, j'aimerais revenir sur la question des cellulaires.
    Après la fusion Rogers-Shaw, je vous ai demandé si vous saviez à quel point les prix avaient augmenté et à quel point les revenus des services sans fil avaient augmenté, par consommateur. Je n'ai pas eu de réponse.
    C'est 1 % pour l'année, sur des prix déjà au plus haut, alors que le gouvernement avait promis qu'il réduirait les prix de 50 %. En fait, il a dit qu'il l'avait fait.
    Au bout du compte, nous voyons un gouvernement qui promet des choses et qui ne tient pas ses promesses. Nous voyons que vous le soutenez et que vous n'en faites pas assez pour le forcer à agir. Vous en avez le pouvoir, monsieur.
    Quand vous avez comparu devant le Comité du patrimoine canadien, la semaine dernière, Mirko Bibic, le PDG de Bell, était en face de vous. Vous ne lui avez même pas posé de question au sujet des nouveaux taux de Loblaws et des produits de la marque sans nom qui sont offerts par l'entremise de Bell.
    Où situez-vous la limite, monsieur, quand allez-vous demander au gouvernement de mettre un terme à des fusions qui lèsent les Canadiens?
    Comme vous l'avez dit, il ne suffit pas de présenter des projets de loi ou de poser une question au Parlement; il faut aussi savoir où est la limite que le gouvernement ne doit pas dépasser si vous voulez pouvoir déclarer que vous défendez les Canadiens? Nous n'avons pas vu cela.
    Je suis heureux que vous parliez du PDG de Bell.
    Je crois qu'il serait important de souligner que je suis le seul chef à m'être opposé à des PDG. Je me suis opposé au PDG de Bell. Je me suis attaqué aux PDG des épiceries. Encore une fois, je suis le seul chef à m'être opposé à ces sociétés riches et puissantes qui volent les Canadiens.
    Je suis fier d'être le seul chef. J'aimerais que les autres chefs comprennent que c'est important et que ces sociétés roulent les Canadiens.
    Les Canadiens s'attendent à ce que les chefs les défendent. Je crois que c'est le rôle du gouvernement d'empêcher les grandes sociétés de voler les Canadiens. C'est pourquoi je me suis présenté et que j'ai posé ces questions. C'est pourquoi je vais continuer de m'en prendre aux grandes sociétés.
    Monsieur Singh, vous avez plié. Vous avez permis à ces sociétés de vous passer dessus. Les Canadiens voient très bien votre jeu.
    En plus, je dois dire...
    Monsieur le président, je cède le reste de mon temps à M. Perkins.
    Je vais terminer ma réponse. La question était assez longue. Je vais terminer ma réponse, puis je répondrai avec plaisir à vos questions.
    Il est clair — et les conservateurs le savent très bien — que je me suis attaqué à la richesse et à la cupidité de ces entreprises ainsi qu'à l'exploitation par leurs PDG. Pour ce qui est de Bell, la question ne s'est pas présentée. J'aurais été ravi de poser la question au PDG de Bell.
    J'ai posé la question au premier ministre, lorsque j'ai été mis au courant, mais cela aurait été une excellente question à poser au PDG.
    Il faut souligner que ni Pierre Poilievre ni Justin Trudeau n'ont posé de questions à ces PDG, mais moi, je l'ai fait.
    Merci, monsieur Singh.
    Monsieur Perkins, allez‑y.
    Je veux revenir à M. Singh. Je veux revenir à ma question.
    Est‑ce que votre frère a rencontré le PDG de Metro, oui ou non?
    Pouvez-vous répéter la question?
    Est‑ce que votre frère, qui travaille pour l'une des plus grandes entreprises de lobbying du Canada, a rencontré le PDG de Metro?
    Vous savez, c'est très intéressant. Les conservateurs s'en prennent à ma famille, mais pas à la cupidité des PDG de Metro, de Loblaws et de Sobeys. Je me demande bien pourquoi.
    Le 1er avril 2025, le premier ministre augmentera encore une fois la taxe sur le carbone, ce qui augmente le coût de tout, y compris des aliments, ce qui semble vous préoccuper, mais vous ne semblez pas prêt à faire quoi que ce soit, sauf présenter un projet de loi bonbon.
    Le 1er avril 2025, lorsque la taxe sur le carbone augmentera encore une fois, allez-vous vous y opposer, oui ou non?
    Je pense que cela en dit beaucoup que le député vienne de qualifier de « projet de loi bonbon » un projet de loi qui s'attaque à la fixation du prix du pain, à la collusion et au fait que les grandes sociétés volent les Canadiens. Cela en dit beaucoup sur la perspective des conservateurs sur la cupidité des sociétés.
    Donc, la réponse est non. Vous n'allez pas...
    Ils pensent que mettre un frein à la cupidité des entreprises... Je veux que les Canadiens sachent cela.
    M. Rick Perkins: [Inaudible]
    M. Jagmeet Singh: Je vais répondre; je vais terminer la question. Je vais répondre à votre question.
    Vous n'allez pas vous opposer à la taxe sur le carbone.
    Vous prenez plus de temps pour répondre que j'en ai pris pour poser ma question.
    Pas du tout. Ils renvoient spécifiquement à un projet de loi qui s'attaquera à la cupidité des sociétés et qui empêchera une répétition de ce qui s'est passé avec la fixation du prix du pain, et le député qualifie cela de « projet de loi bonbon ». Cela vous montre bien la position des conservateurs à cet égard.
    Je veux revenir sur l'éthique, le problème de l'éthique.
     Avant de vous en prendre aux grandes épiceries, avez-vous contacté le commissaire aux conflits d'intérêts et à l'éthique pour l'informer et obtenir son feu vert en lien avec le rôle de votre frère qui fait du lobbying pour Metro? Oui ou non? Avez-vous fait cela? Répondez par oui ou par non. Avez-vous eu son feu vert?

  (1155)  

    Premièrement, c'est absolument...
    Enfreignez-vous les lois de l'éthique?
    Premièrement, c'est absolument faux, et deuxièmement, j'ai attaqué le PDG de Loblaws, le PDG de Metro et le PDG de Sobeys. Je les ai directement accusés d'escroquer les Canadiens. Je n'ai rien entendu de tel de la part des conservateurs. Je me demande bien pourquoi.
    Vous n'avez pas consulté le commissaire à l'éthique. C'est ce que vous dites.
    Je crois que c'est parce que les conservateurs n'ont aucun intérêt à dévoiler les vraies raisons pour lesquelles les Canadiens paient trop cher leurs produits d'épicerie, soit la cupidité des entreprises...
    C'est à cause de la taxe sur le carbone et du budget que vous continuez de soutenir...
    Ils n'en tiendront pas compte, et vous voyez ce qu'ils sont prêts à faire: ils vont s'attaquer à n'importe qui d'autre...
    [Inaudible] ... dépenses inflationnistes que vous continuez de soutenir.
    Monsieur Perkins, monsieur Singh, il est impossible d'entendre quoi que ce soit.

[Français]

     Je pense que nous pouvons faire mieux.
    Monsieur Perkins, vous avez la parole.

[Traduction]

    Ce serait bien d'avoir une réponse directe de votre part, pour une fois. Vous parlez comme un ministre libéral.
    Répondez-moi par oui ou par non: avez-vous communiqué avec le commissaire à l'éthique pour discuter de votre conflit d'intérêts flagrant?
    En fait, votre question vise à savoir à qui je m'attaque? J'accuse le PDG de Metro. J'accuse le PDG de Loblaws.
    Ce n'est pas la question.
    J'accuse le PDG de Sobeys, mais les conservateurs préfèrent s'en prendre à n'importe qui d'autre — même à ma famille — plutôt que de s'attaquer à la cupidité des entreprises.
    C'est très révélateur.
    Non, je m'en prendrais à votre hypocrisie, votre hypocrisie éhontée.
    Merci, chers collègues. C'est tout le temps que nous avons.
    C'est au tour de M. Gaheer, pour cinq minutes.
    Excellent. Merci, monsieur le président, et merci à M. Singh d'être venu témoigner devant le Comité.
    Je souhaite discuter du chevauchement entre ce que le gouvernement a déjà présenté et ce projet de loi. Manifestement, nous avons adopté des réformes importantes avec le projet de loi C‑56. Il permet aux organismes de réglementation de tenir les entreprises responsables de leurs actes, et il défend les droits des Canadiens. Nous avons donné plus de pouvoirs au Bureau de la concurrence afin qu'il mène des enquêtes plus efficaces. Nous avons facilité le blocage des fusions qui ne sont pas dans l'intérêt des Canadiens et nous sommes passés à l'action contre des collaborations qui étouffent la concurrence et réduisent les choix des consommateurs.
     S'il manquait quelque chose au projet de loi C‑56, à mon avis cela a été efficacement ajouté dans le projet de loi C‑59, dont les amendements ont résulté en une loi sur la concurrence plus moderne et efficace. Entre autres choses, ces amendements aident à empêcher les fusions préjudiciables et les collaborations anticoncurrentielles, et ils tiennent les grandes firmes responsables de leurs actes.
     J'aimerais parler de votre témoignage en réponse aux questions de M. Badawey. Vous avez dit que votre projet de loi met peut-être davantage l'accent sur la fixation des prix et les pénalités, mais, quand je consulte le projet de loi C‑19, qui date de 2022, je lis ceci:
La section 15 de la partie 5 modifie la Loi sur la concurrence afin de renforcer les pouvoirs d'enquête du commissaire de la concurrence, d'ériger en infraction criminelle la fixation des salaires et les accords connexes, d'augmenter les amendes maximales et les sanctions administratives pécuniaires, de préciser que la divulgation incomplète des prix est une indication fausse ou trompeuse, d'élargir la définition d'agissement anti-concurrentiel, de permettre l'accès privé au Tribunal de la concurrence pour remédier à un abus de position dominante et d'améliorer l'efficacité des exigences en matière de transactions devant faire l'objet d'un préavis et d'autres dispositions.
    Quand je consulte ces projets de loi côte‑à‑côte, il paraît manifeste que ce que le projet de loi C‑352 propose est déjà intégré.
    Quels sont vos commentaires à ce sujet?
     Je soulignerais d'abord que les modifications apportées aux projets de loi C‑56 et C‑59 étaient des amendements apportés par le NPD pour traiter spécifiquement de pénalités plus importantes et de comportements anticoncurrentiels. Ces amendements ont été adoptés, et nous sommes heureux d'avoir pu insister sur ces sujets.
     Cette approche du comportement anticoncurrentiel n'est pas reflétée dans l'approche de la fixation des prix. Ce n'est pas la même approche. Même lorsque vous avez cité le projet de loi C‑19, il n'a pas la même rigueur à propos des comportements anticoncurrentiels qu'à propos de la fixation des prix.
    En particulier, quand il est question de fixation des prix, nous parlons d'une situation où les sociétés sont de connivence, travaillent ensemble et complotent afin de hausser toutes ensemble les prix. Je pense en particulier à la fixation du prix du pain. Ce sujet, la fixation du prix du pain, n'a pas été examiné. C'est l'un des exemples récents les plus inacceptables de grandes sociétés qui escroquent les Canadiens. Cette question spécifique reste à régler. Ce que je demande, c'est de prévoir des pénalités claires pour régler le cas. Voilà le domaine où nous avons proposé des amendements que les libéraux ont rejetés.
    Les libéraux ne se sont pas montrés disposés à réagir à cette récente et inacceptable manœuvre des sociétés qui se sont acoquinées pour arnaquer les Canadiens avec le prix du pain. Voilà ce contre quoi je me bats, et cela n'a pas été spécifiquement examiné.
    Nous établissons des lignes directrices pour que les pénalités règlent le problème. L'amende de 50 millions de dollars, la plus élevée dans l'un des cas les plus scandaleux, était beaucoup trop modeste. C'était à peine une tape sur les doigts. Les lignes directrices que nous fournissons donneraient aux juges des moyens de sévir plus musclés, par exemple des amendes allant jusqu'à 10 % du revenu de la société, ce qui, dans le cas d'une entreprise telle que Loblaws, équivaudrait à 6 milliards de dollars. C'est ce que je veux dire quand je parle de solutions musclées.

  (1200)  

    Je ne suis pas avocat en droit de la concurrence, mais, selon ce que je connais de ce domaine, la fixation des prix est un comportement anticoncurrentiel.
    Nous sommes tous deux avocats. D'après ma lecture parallèle de ces projets de loi, ils couvrent largement les mêmes sujets. Certaines améliorations sont apportées par le projet de loi C‑352, mais je crois que le gouvernement a vraiment bien travaillé le dossier au fil des ans. Ces trois projets de loi en témoignent.
    J'ai des questions sur l'exception relative aux gains en efficience. Votre projet de loi va abroger cette exception, mais voit ensuite la comparaison entre l'efficacité et la concurrence comme un facteur pouvant entrer dans la prévention ou l'édulcoration substantielle des critères de concurrence.
    Peut-être qu'une conséquence inattendue de cela est que votre projet de loi permettrait tout de même aux fusions anticoncurrentielles de résister à une contestation fondée sur les gains en efficience, mais sur une base discrétionnaire.
    Était‑ce le but de votre projet de loi?
    Le but est de combler une brèche qui permet aux sociétés de fusionner, même si cela nuit aux Canadiens.
    S'il y a un amendement qui renforcerait le projet de loi dans le but de protéger les Canadiens contre les abus, je suis prêt à l'entendre. Pour le moment, c'est une question qui n'a pas été examinée et qui doit l'être.
    Je tiens à répéter que, bien qu'il existe trois projets de loi, et bien que les néo-démocrates aient obligé le gouvernement à adopter des amendements solides qui renforceront la protection, la nature spécifique d'un complot ou d'une collusion n'est toujours pas définie. Les comportements anticoncurrentiels dont il est question ne règlent pas directement ce qui s'est passé avec la fixation du prix du pain. C'est ce à quoi je veux en venir, avec ce projet de loi, le cas le plus scandaleux, dont les Canadiens se souviennent encore. Ils se rappellent que, quand la décision de 2018 a révélé que ces entreprises étaient de connivence et avaient manigancé pour les voler, les pénalités étaient aussi bénignes qu'une tape sur les doigts. Il faut remédier à cela.
    Voilà pourquoi ce projet de loi est très explicite et clair quant à la fixation des prix, et aux scénarios de collusion et de complots, où les grandes sociétés escroquent les Canadiens.
    C'est formidable. Merci.

[Français]

     Merci, messieurs Gaheer et Singh.
    Je vous félicite pour votre projet de loi qui est parvenu à une étape cruciale, soit celle de l'examen en comité. Je vous remercie de vous être prêté à cet exercice.
    Chers collègues, au cours de la deuxième heure de la réunion, nous nous entretiendrons avec des témoins qui sont venus nous parler du projet de loi C‑352. Nous allons suspendre la réunion brièvement pour donner le temps aux gens de s'installer.
    La séance est suspendue.

  (1200)  


  (1205)  

    Chers collègues, je vous demanderais de reprendre votre place pour que nous ne perdions pas trop du temps prévu à l'horaire.

[Traduction]

    Chers collègues, je vous demande de prendre place. Nous reprenons la réunion.
    Avant de passer aux témoignages sur le projet de loi C‑352, vous avez reçu une copie du budget pour notre étude du projet de loi C‑352, qui est 10 500 $. Nous l'avons fait circuler. Ai‑je votre consentement unanime pour l'adopter?
    (La motion est adoptée.)
    Le président: Merci beaucoup.

[Français]

    Je vous remercie de vous joindre à nous pour cette première rencontre du Comité sur le projet de loi C‑352. Nous accueillons M. Pierre Larouche, professeur en droit et innovation, Faculté de droit de l'Université de Montréal.
    Soyez le bienvenu, professeur.
    Nous accueillons aussi, du Bureau de la concurrence Canada, M. Matthew Boswell, commissaire à la concurrence, et M. Anthony Durocher, sous-commissaire, Direction générale de la promotion de la concurrence.
    En dernier lieu, nous accueillons, de l'Association du barreau canadien, M. Antonio Di Domenico, secrétaire, Section du droit de la concurrence et des investissements étrangers.

[Traduction]

    Je vous remercie de vous être joints à nous.
    Sans plus attendre, je donne la parole à M. Larouche, pour cinq minutes.
    La parole est à vous.

[Français]

    Je vous remercie de cette invitation à comparaître devant votre comité.
    Je me présente brièvement. Je suis professeur titulaire en droit et innovation à la Faculté de droit de l'Université de Montréal. J'ai 30 ans d'expérience en droit de la concurrence et en gouvernance économique, acquise en partie en pratique privée, mais surtout comme professeur de droit de la concurrence, en Europe. J'ai enseigné en Europe pendant 15 ans. J'ai enseigné au Collège d'Europe à plusieurs fonctionnaires de la Commission européenne qui travaillent aux grandes affaires de concurrence. J'ai enseigné le droit de la concurrence américain lors d'une année sabbatique à l'Université Northwestern. Je suis à l'Université de Montréal depuis sept ans, où je continue de travailler dans ce domaine. J'ai repris contact avec le droit canadien.
    C'est avec plaisir que je vous parle ce matin. J'aimerais peut-être commencer par une note un peu théorique sur tout cela. Il y a beaucoup de bonnes intentions derrière toutes les modifications qui sont proposées à la Loi sur la concurrence, comme le projet de loi C‑56, qui a été adopté, et le projet de loi C‑59, qui est à l'étude. Cependant, si on compare le droit canadien à celui d’autres pays de l'Organisation de coopération et de développement économique, ou OCDE, il ressort du lot à deux égards: d'abord, la loi est très longue et très complexe; ensuite, le cadre institutionnel est déficient. En conséquence, le droit de la concurrence canadien est faible et difficile à appliquer. Les parties défenderesses, les entreprises, peuvent facilement se défendre, et elles réussissent généralement à éviter l'application de la loi.
    La loi étant longue et complexe, selon moi, il faudrait cesser de toujours y ajouter des détails. Il faudrait plutôt retourner vers de grands principes, avoir de grandes positions claires sur le plan politique et donner plus d'espace au commissaire et au Bureau de la concurrence pour qu'ils puissent faire leur travail.
    Quant au cadre institutionnel au Canada, le Bureau devrait avoir des pouvoirs de décision comme cela se fait partout en Europe, même au Royaume‑Uni, et pour une partie des compétences des autorités américaines. Selon moi, si on regarde ce qui s'est passé récemment en droit canadien, surtout avec la fusion entre Rogers et Shaw, le tribunal a constitué le principal problème. Celui-ci devrait agir seulement comme instance d'appel ou, encore mieux, faire du contrôle judiciaire sur la base d'une décision du Bureau.
    Je vais maintenant vous parler des deux questions plus précises qui vous occupent aujourd'hui au sujet du projet de loi C‑352 et que M. Singh a mentionnées tout à l'heure. La hausse des peines en vertu de l'article 45 est une bonne idée en soi, mais cela montre, encore une fois, combien la loi canadienne est complexe, forçant un choix entre les articles 45 et 90. Il faudrait évidemment que les peines soient élevées en vertu de l'article 45, mais cela relève du droit criminel et c'est moins évident. Une peine adéquate, comme on le mentionne ici, équivaudrait à 10 % des recettes globales. Idéalement, si on regarde la pratique de la Commission européenne et des autorités américaines, le niveau de la peine doit se situer autour du niveau de profit de l'entreprise pour que cela fasse vraiment mal; elle se situe généralement autour de 5 à 6 % des revenus. Ainsi, en adoptant une peine maximale de 10 %, le Canada est dans la bonne ligue, et cela veut dire que les pénalités devraient atteindre assez facilement les centaines de millions de dollars.
    Par contre, en ce qui concerne la deuxième proposition, soit les seuils de parts de marché pour le contrôle des concentrations, selon moi, c'est un point de référence qui est un peu dépassé. Il est préférable d'avoir un bon test général et de laisser le Bureau faire son travail. Les parts de marché peuvent être trompeuses dans les deux sens. D'une part, il peut y avoir le cas exceptionnel d'une fusion avec des parts de marché élevées, où il serait quand même possible de prouver que c'est bon pour le consommateur. D'autre part, surtout, il y a aussi des fusions avec des parts de marché moins élevées, qui peuvent être nocives pour le consommateur lorsque, par exemple, les deux parties qui fusionnent sont des concurrents proches sur le marché.
    Ce sont des éléments qui font tout à fait partie de l'analyse contemporaine du droit de la concurrence et qu'on n'aborde pas avec des seuils de parts de marché. Ceux-ci créent évidemment l'illusion que le seul problème découle de fusions horizontales, alors qu'il y a des fusions verticales ou des fusions en conglomérat qui peuvent aussi être problématiques.
    Voilà donc mes commentaires en introduction.
    Je vous remercie encore de m'entendre aujourd'hui.

  (1210)  

     Merci beaucoup, monsieur Larouche.
    Je cède maintenant la parole à M. Boswell, du Bureau de la concurrence Canada.

[Traduction]

    Bon après-midi, monsieur le président. Merci de m'avoir invité à témoigner devant vous aujourd'hui.

  (1215)  

[Français]

     Je m'appelle Matthew Boswell, et je suis le commissaire de la concurrence. Je suis accompagné de mon collègue Anthony Durocher, qui est le sous-commissaire de la Direction générale de la promotion de la concurrence.
    Nous sommes heureux d'être ici, aujourd'hui, pour discuter du projet de loi C‑352. Grâce à plusieurs textes législatifs, la politique de la concurrence au Canada est en train de connaître une mise à niveau générationnelle. Nous sommes reconnaissants envers les membres de ce comité et d'autres personnes qui ont particulièrement insisté sur la nécessité de renforcer la concurrence dans l'économie canadienne.
    Comme vous le savez sans doute, la plupart des éléments importants contenus dans le projet de loi C‑352 ont été intégrés dans des lois antérieures et à venir, soit les projets de loi C‑19, C‑56 et C‑59. Ces modifications donnent suite à un nombre important de recommandations du Bureau et harmonisent davantage notre cadre de la concurrence avec les meilleures pratiques internationales.

[Traduction]

    Tout comme la concurrence sur les marchés oblige les entreprises à offrir des produits et des services qui répondent toujours mieux aux besoins des consommateurs, la concurrence sur le marché des idées mène à de meilleures politiques publiques. Selon moi, les parrains du projet de loi C‑352 et ceux des autres projets de loi émanant de députés présentés cette session‑ci méritent des félicitations pour avoir amené à des améliorations notables de la loi sur la concurrence. Ces améliorations incluent, entre autres choses, une refonte complète de nos critères en matière d'abus de position dominante, y compris des pénalités plus sévères, l'ajout de présomptions structurales réfutables dans les examens de fusions et de solutions plus musclées contre les fusions anticoncurrentielles, la possibilité pour le commissaire de la concurrence de mener des études de marchés et la protection de ce dernier contre le paiement des dépens des parties adverses devant le Tribunal de la concurrence.
     À mon avis, il y a très peu d'éléments dans le projet de loi C‑352 qui n'ont pas déjà été traités dans d'autres lois. Dans le cadre de la modernisation de la Loi sur la concurrence, les questions qui restent ne sont pas pressantes, mais certaines pourraient sûrement servir à améliorer la Loi sur la concurrence. Nous serions heureux de discuter de ces quelques questions.
    Il y a aussi certains aspects du projet de loi qui, de mon point de vue, représenteraient un pas en arrière, au vu de réformes antérieures, par exemple la réintroduction d'un maximum sur les amendes infligées aux cartels. Nous serions ravis de discuter aussi de cela, bien entendu.
    Durant la réunion d'aujourd'hui, ou encore lors d'une future comparution devant votre comité, il pourrait aussi être productif de discuter de ce que j'appelle souvent « l'éléphant dans la pièce » au Canada, à savoir les obstacles réglementaires à la compétition, dans notre pays.
    La Loi sur la concurrence est un outil fondamental pour protéger et promouvoir une plus grande concurrence au Canada, mais ce n'est pas le seul outil. Afin de tirer à profit des progrès gigantesques accomplis grâce à la Loi sur la concurrence, nous tous dans le secteur public, dans tous les ordres de gouvernement, devons examiner ce qui peut être fait de plus au sujet de la réglementation et des politiques qui freinent la concurrence au Canada, souvent de façon non intentionnelle. Nous savons que l'intensité concurrentielle du Canada a diminué ces deux dernières décennies. Il faudra une approche pangouvernementale pour renverser cette tendance, et le gouvernement fédéral devra travailler de pair avec les administrations municipales, provinciales et territoriales.
    Une concurrence accrue est la clé pour pallier les problèmes liés à l'abordabilité, améliorer le choix des consommateurs et encourager une croissance forte et inclusive à long terme et, plus important encore, répondre aux besoins pressants du Canada en matière de productivité accrue.
    La politique sur la concurrence au Canada est à un point tournant. Il nous faut en profiter. Le consensus n'a jamais été aussi unanime: le Canada a besoin de plus de concurrence. Il est temps pour les gouvernements de tout le Canada de travailler de concert afin de faire de la concurrence une priorité économique nationale.

[Français]

     En conclusion, le Bureau de la concurrence est déterminé à appliquer la loi d'une façon transparente et fondée sur des principes et des données probantes. Nous avons été inébranlables dans nos efforts pour mettre en œuvre les outils nouveaux et améliorés que le Parlement nous a accordés. Nous resterons fidèles à cette approche.
    Je vous remercie de nous avoir donné l'occasion de comparaître devant vous aujourd'hui.
    Nous serons heureux de répondre à vos questions.

  (1220)  

[Traduction]

    Merci. Nous avons hâte d'entendre vos questions.

[Français]

     Merci beaucoup, monsieur Boswell.
    Monsieur Di Domenico, vous avez la parole.

[Traduction]

    Je tiens à vous remercier, au nom de la section de l'Association du Barreau canadien, de m'avoir invité à comparaître aujourd'hui. Nos membres ont une vaste expérience dans la fourniture de conseils à un vaste éventail de clients concernant des questions de concurrence. Nous vous remercions de nous fournir la possibilité d'être entendus.
     Pour donner une vue d'ensemble, un bon nombre des questions abordées dans le projet de loi C‑352 ont été traitées dans le projet de loi C‑56, qui a reçu la sanction royale en décembre 2023, ou sont contenues dans le projet de loi C‑59, qui est actuellement soumis au Sénat. J'aimerais parler aujourd'hui de deux propositions du projet de loi C‑352, à savoir les dispositions sur l'interdiction d'un fusionnement et les présomptions structurelles, aux articles 8 et 9 du projet de loi, et l'inclusion des gains en efficience comme facteur pour évaluer les effets concurrentiels des fusions et des collaborations de concurrents civils, aux articles 7 et 10 du projet de loi.
     Pour commencer avec la disposition sur les fusions et l'interdiction, le projet de loi C‑352 créerait une ligne claire arbitraire qui empêcherait le Bureau de la concurrence Canada et le Tribunal de la concurrence d'évaluer les effets concurrentiels des fusions avec des parts de marché combinées de 60 % ou supérieures à 60 %. La proposition ne tiendrait pas compte ou ne ferait pas de distinction entre les différents niveaux de concentration, même si la cible acquise avait, par exemple, une part de marché de 1 %.
    Cette mesure serait sans précédent et ferait du Canada une exception mondiale. Les lois sur la concurrence et les lois antitrust à l'échelle mondiale reconnaissent que, à elles seules, les parts de marché et la concentration ne permettent pas de déterminer le pouvoir des marchés et les effets concurrentiels. Comme la Loi sur la concurrence le reconnaît déjà, une conclusion concernant l'effet concurrentiel d'une fusion doit évaluer des facteurs importants comme la probabilité d'entrée et d'expansion, le rôle joué sur le marché par l'entité acquise, la présence d'autres concurrents vigoureux et efficaces sur un marché, et la nature du changement et de l'innovation sur un marché, entre autres choses. Dans notre mémoire, il serait inapproprié de limiter la capacité du Bureau de la concurrence et du Tribunal de la concurrence d'effectuer une analyse du pouvoir des marchés et des effets concurrentiels fondés sur les faits et les preuves à leur disposition.
     Le fait que le projet de loi C‑352 mette l'accent sur les parts de marché et la concentration en excluant d'autres facteurs pose également trois autres problèmes importants.
    Premièrement, l'approche éliminerait entièrement l'analyse de ce qui compte le plus, soit les conditions concurrentielles avant et après la fusion, en faveur d'un accent mis uniquement sur les statistiques des parts de marché qui ne sont pas en soi déterminantes des effets sur les marchés.
    Deuxièmement, dans de nombreux cas, il n'est pas possible de tirer fiablement une conclusion factuelle concernant les parts de marché en fonction des parts de marché actuelles d'une entreprise.
    Troisièmement, les parties à la fusion ne disposent souvent pas des données requises pour déterminer ce qu'est leur part de marché dans tout marché antitrust pertinent. Le Bureau de la concurrence recueille ces renseignements dans le cadre de son examen, mais à moins qu'il ne prévoie communiquer cette information aux parties à la fusion ou à leur conseil dans le cadre du processus d'application de la loi, ce qu'il ne fait actuellement pas à moins d'y être contraint dans le cadre d'un litige, les parties à la fusion sont confrontées à d'importants problèmes d'application régulière de la loi.
    Pour ce qui est des dispositions sur les présomptions structurelles, la section de l'ABC n'appuie pas l'inclusion de présomptions structurelles dans la Loi sur la concurrence. Nous convenons que les niveaux de concentration et de parts de marché peuvent fournir un mécanisme de sélection préliminaire utile pour repérer les fusions problématiques possibles. Toutefois, nous ne pensons pas qu'une fusion doive être présumée causer des effets anticoncurrentiels en raison de la seule part de marché.
    De plus, l'inclusion des présomptions structurelles dans la Loi sur la concurrence, qui est une loi, ne permettra pas d'harmoniser la loi canadienne avec la loi américaine. C'est important. Aux États-Unis, les présomptions structurelles ont été introduites dans des lignes directrices non législatives sur l'application de la loi, qui sont de nature flexible et préférables à une loi fixe. Cela ne fait partie d'aucune loi américaine. Si des présomptions structurelles sont introduites, nous pensons que le meilleur endroit où les introduire serait dans les lignes directrices sur l'application de la loi relative aux fusions du Bureau de la concurrence, comme l'approche qui continue d'être employée aux États-Unis.
     Enfin, pour ce qui est des gains en efficience, le projet de loi C‑352 propose d'inclure les gains en efficience comme facteur législatif explicite à l'article 93 et au paragraphe 90.1(2) de la Loi sur la concurrence pour évaluer si une fusion ou une collaboration d'un concurrent civil est susceptible d'amoindrir ou d'empêcher de façon importante la concurrence.
    La section de l'ABC approuve cette inclusion. Il est bien reconnu au Canada et à l'échelle mondiale que les gains en efficience sont un facteur pertinent pour évaluer les effets concurrentiels, parce qu'ils peuvent entraîner des fusions et des collaborations entre compétiteurs qui sont proconcurrentielles, qui augmentent la productivité et qui profitent aux consommateurs. Le Bureau de la concurrence a plaidé pour que les gains en efficience fassent partie de la liste des facteurs que le Tribunal de la concurrence peut prendre en considération lorsqu'il évalue les effets concurrentiels. D'ailleurs, ce changement permettrait également de renforcer l'approche actuelle du Bureau dans son évaluation des effets concurrentiels des fusions et des collaborations entre concurrents civils.

  (1225)  

    Merci de m'avoir donné l'occasion de vous présenter nos observations.

[Français]

     Merci beaucoup.
    Nous allons commencer la discussion. Je donne donc la parole à M. Vis pour six minutes.

[Traduction]

    Merci à tous les témoins d'être ici aujourd'hui.
    Je pense que, peu importe de quelle région du pays vous venez, les Canadiens se demandent, dans le contexte de cette loi, pourquoi diable ils doivent payer autant pour leur épicerie.
    J'ai regardé en détail pendant la première heure de notre réunion aujourd'hui le rapport du Bureau de la concurrence intitulé « Le Canada a besoin de plus de concurrence dans le secteur de l'épicerie ». Deux points principaux qui étaient en quelque sorte abordés seront difficiles à atteindre, selon moi, et pourraient même être contradictoires.
    En plus de certaines autres études réalisées par le Bureau de la concurrence, le rapport décrit que lorsque les plus grandes sociétés d'une industrie consolident leur position, leur part de marché, elles sont moins susceptibles d'être remplacées ou de faire face à des défis importants pour ce qui est de leur part de marché. Le rapport signale également que nous devons encourager la croissance dans l'entrée de nouveaux concurrents.
    Dans le contexte des épiceries, toutefois, ce que j'ai lu essentiellement ce matin, c'est que le Bureau de la concurrence souligne qu'il sera difficile de voir de la concurrence dans notre secteur de l'épicerie au Canada.
    Serait‑ce une juste hypothèse, monsieur Boswell?
    Merci d'avoir posé la question.
    Mon collègue M. Durocher y répondra.
    Ce que notre rapport a décrit, c'étaient les mesures que le gouvernement peut prendre pour accroître la concurrence dans le secteur des épiceries.
    Les clauses restrictives et le contrôle des biens sont des exemples qui peuvent empêcher les nouvelles entrées dans tout le pays.
    Une autre mesure consiste à attirer l'attention sur les avantages d'un nouvel arrivant étranger sur le marché canadien, à la lumière des renseignements fournis par d'autres.
    Nous continuons de travailler avec les gouvernements pour établir des priorités et faire avancer ces dossiers.
    Nous avons depuis lancé une enquête sur l'utilisation des contrôles de biens par les plus grands épiciers également. Ce sont des mesures prises pour protéger et promouvoir la concurrence dans l'industrie, et c'est un secteur prioritaire pour le Bureau.
    Entendu. De façon plus générale, toutefois, approuveriez-vous mon hypothèse selon laquelle il sera difficile d'atteindre une plus grande concurrence vu la concentration des grandes sociétés en ce moment?
    La concurrence prend du temps à se manifester. Il est certain que le secteur est concentré en ce moment, mais si une nouvelle société entrait sur les marchés d'un bout à l'autre du pays, cela aurait une incidence. Je pense qu'il ne fait aucun doute que c'est un marché concentré. C'est pourquoi nous travaillons avec les gouvernements pour prendre des mesures utiles pour le rendre plus concurrentiel.
    Le Bureau de la concurrence ferait‑il face aux mêmes types de défis que le gouvernement fédéral lorsqu'il chercherait à encourager l'administration municipale à rezoner des biens afin de permettre plus d'épiciers dans nos collectivités?
    À cet égard, l'une de nos principales recommandations était que les gouvernements limitent l'utilisation des contrôles des biens et songent à l'interdire. Cela relève de la compétence provinciale et municipale, et il n'est pas certain qu'il y ait un rôle pour le gouvernement fédéral. Cependant, s'ils contreviennent aux lois sur la concurrence parce qu'ils sont anticoncurrentiels de nature, alors il a un rôle à jouer en vertu de la Loi sur la concurrence, qui est une législation fédérale.
    Merci.
    Dans ce rapport, il est indiqué que les marges de nos grands épiciers ont augmenté de 1 à 2 %. Je ne pense pas que cela soit non significatif lorsque vous calculez les plus de 1 000 $ que la famille canadienne moyenne dépense chaque mois à l'épicerie.
    Diriez-vous que les prix ont aussi augmenté en raison des problèmes liés à la chaîne d'approvisionnement, des taxes sur le carbone, des coûts de la main-d'œuvre et de l'immobilier également?

  (1230)  

    Vous avez tout à fait raison. Notre rapport indiquait que les marges avaient augmenté de 1 à 2 %, ce qui est modeste, mais significatif, en ce sens que cela influe sur… et souligne le fait que nous avons besoin d'une plus grande concurrence dans le secteur.
    Nous n'avons pas exploré de manière approfondie toutes les manières dont les prix ont augmenté. Un certain nombre de facteurs entrent en jeu dans l'environnement inflationniste. Il y a eu des perturbations de la chaîne. Toutefois, nous n'avons pas étudié en profondeur tous les problèmes. Nous nous sommes concentrés sur l'examen de la concurrence parce que c'est là que réside notre expertise.
    Le Bureau de la concurrence a‑t‑il examiné la production alimentaire au Canada comme une variable clé dans le coût des aliments et la concurrence des produits? Je viens d'une partie du Canada où les ventes à la ferme sont les plus élevées du pays, et c'est en grande partie attribuable aux secteurs soumis à la gestion de l'offre, mais nous sommes également le principal producteur de framboises, de bleuets, de fraises, parmi d'autres produits que les Canadiens consomment.
    Quel effet notre capacité actuelle de cultiver des aliments a‑t‑elle sur le montant que les Canadiens payent à l'épicerie?
    Dans le cadre de notre travail, en particulier dans le contrôle des fusions, il arrive parfois que le Bureau ait agi pour protéger la concurrence, que ce soit en vue de s'assurer que les agriculteurs sont protégés pour ce qui est du prix qu'ils payent pour l'engrais ou de leur capacité de vendre des grains. Il existe un certain nombre d'exemples à cet égard pour faire en sorte que la chaîne d'approvisionnement alimentaire soit aussi concurrentielle que possible.
    Dans le contexte de notre étude de marché, nous n'avons pas fait d'analyse détaillée…
    Eh bien, abordons cette question un instant, cependant, la chaîne d'approvisionnement. J'ai aussi les chemins de fer du CN et du CP qui passent directement à travers de ma circonscription dans le canyon du Fraser. Avons-nous investi suffisamment dans les infrastructures essentielles pour permettre le plus faible coût pour la circulation des marchandises au Canada? Avons-nous fait un travail suffisant pour permettre aux agriculteurs de mettre leurs produits sur le marché au Canada?
    Si nous regardons la concurrence ferroviaire, par exemple, nous voyons qu'il est essentiel pour les agriculteurs et les producteurs alimentaires d'amener leurs marchandises sur le marché. C'est un espace réglementé. Nous avons formulé des recommandations en 2015 dans le contexte de l'examen de la Loi sur les transports au Canada concernant la façon de nous assurer que le système ferroviaire est aussi concurrentiel que possible.
    Est‑il suffisamment concurrentiel?
    Je pense que notre mantra au Bureau de la concurrence, c'est que le Canada a besoin d'une plus grande concurrence. Je pense que je peux signaler un certain nombre de secteurs où nous avons besoin d'une plus grande concurrence au pays, et…
    Ce serait donc non.
    Je ne peux me prononcer sur tout secteur particulier…
    D'accord, dans ce cas, j'aimerais soulever un autre point dans mon temps limité.
    Pour ce qui est du coût de l'étiquetage, j'ai une fille d'un an et demi, et le coût des préparations pour nourrissons chez Costco est astronomique. C'est une vraie dépense pour les jeunes mères. Ce qu'on nous dit principalement chez Costco, c'est que c'est attribuable aux problèmes d'étiquetage. C'est la même chose pour le Tylenol pour enfants. Que pouvons-nous faire pour rendre l'étiquetage moins cher? Comment réduire les formalités administratives, pour que les mères puissent obtenir la préparation pour nourrissons dont elles ont besoin rapidement?
    Nous préconisons constamment des moyens pour réduire les obstacles à l'entrée et à l'expansion.
    Quelle recommandation principale pouvez-vous fournir…

[Français]

     Monsieur Vis, c'est malheureusement tout le temps dont vous disposiez.
    Merci, monsieur Durocher.
    Monsieur Arya, vous avez la parole.

[Traduction]

    Merci, monsieur le président.
    D'abord, nous devons reconnaître que, sur le plan de sa population, le Canada est petit, avec 40 millions de personnes, mais sur le plan géographique, nous sommes un très grand pays.
    Notre voisin du Sud a une forte population, une grande économie, etc., ce qui fait que nous nous retrouvons en quelque sorte dans une situation particulière, à savoir si l'on doit permettre ou non à des entreprises de prendre de l'expansion et de servir les Canadiens d'un bout à l'autre de ce vaste pays.
    Monsieur Larouche, je suis heureux d'entendre vos commentaires sur la durée et la complexité. Les seules personnes qui profitent de la complexité sont les avocats, et cela ne fait qu'ajouter au coût de l'administration des lois sur la concurrence dans le secteur public et dans les rapports avec ces grandes sociétés.
    Vous avez également parlé du cadre institutionnel. J'ai un très grand nombre de projets de loi concernant cette question particulière. Dites-vous que nous devrions peut-être commencer de zéro un tout nouveau projet de loi? Ce n'est pas comme si c'était possible, mais je le dis tout de même.

  (1235)  

    Si vous me posez la question en tant qu'universitaire, oui, je réécrirais le projet de loi à partir de zéro et le simplifierais de beaucoup. Je pense que le commissaire l'a très bien expliqué. Toutes les modifications qui sont sur la table seraient utiles, mais elles rendent également la loi plus complexe et plus lourde.
    Le contexte est le même partout. Lorsque les enjeux de ce litige atteignent 100 millions de dollars, ou 1 milliard de dollars en Europe — j'ai pratiqué dans ce domaine — c'est très bien. C'est un bar ouvert. Vous pouvez facturer autant que vous le voulez, parce que tout fera l'objet d'une contestation, et chaque texte individuel sera disséqué. C'est ce que j'ai vu partout. Je pense que la meilleure approche consiste à garder la loi générale, à laisser l'autorité faire le travail, à attaquer l'autorité sur le travail qu'elle a fait et à passer du temps à contrôler ce travail.
    J'approuve cette approche, garder la loi et la législation adoptée par l'intermédiaire du Parlement le plus souple possible, et déléguer l'autorité pour le règlement. Il peut y avoir une flexibilité, selon les besoins du marché ou les changements de circonstances.
    Nous sommes des politiciens. En tant que membres de partis politiques, nous devons montrer aux gens que nous travaillons fort pour eux. De toute manière, c'est une chose différente pour un moment différent.
    Pour ce qui est des parts de marché, encore une fois, je suis d'accord avec vous: nous devions conserver le bon chiffre de 30, 50 ou 60 %, sans reconnaître s'il s'agissait d'une fusion verticale ou latérale, ni la nature de l'industrie et du secteur, etc.
    Y a‑t‑il quelque chose dans le domaine des parts de marché que d'autres pays font mieux et que nous pouvons adopter?
    Tout d'abord, plus tôt, M. Singh a évoqué 60 % comme chiffre en Europe. Je ne le crois pas. Je pense que, en Europe, le seuil établi pour déterminer qu'une société est dominante se situe à environ 50 %. Aux États-Unis, c'est environ 60 %. Cependant, c'est une autre question. Il ne s'agit pas de contrôle des fusions.
     Ce qui se trouve maintenant dans le projet de loi C‑59… Encore une fois, nous pouvons débattre pour savoir si cela devrait figurer dans le projet de loi C‑59 ou dans les lignes directrices, mais l'approche de l'IHH est conforme à ce qui est fait aux États-Unis et en Europe. Les seuils ne sont pas exactement les mêmes, mais c'est habituellement une bonne manière d'entrer dans un dossier et de repérer les dossiers qui méritent une attention plus particulière que ceux que vous pouvez simplement laisser tomber pour concentrer vos ressources ailleurs.
    Merci.
    Je sais que vous avez des idées. Si vous en avez d'autres, vous pouvez les fournir par écrit au Comité pour que nous puissions les examiner lorsque nous préparerons notre rapport.
    Monsieur Boswell, vous avez mentionné les règlements et les politiques avec des ordres de gouvernement différents. Si nous travaillons ensemble avec une seule approche et certains objectifs, nous pouvons en profiter.
    Aimeriez-vous fournir des exemples à cet égard?
    Il y a de nombreux exemples.
    Je vais juste revenir en arrière pour dire que le Canada a dégringolé au classement au cours des dernières décennies pour ce qui est des obstacles réglementaires à la concurrence dans l'ensemble de notre économie. L'OCDE produit un rapport sur ce qu'elle appelle les indicateurs de réglementation des marchés de produits. Dans le dernier rapport, paru en 2018, le Canada était avant-dernier parmi les pays de l'OCDE pour ce qui est des obstacles réglementaires qui nuisent à la concurrence.
    Ils sont partout, dans tous les ordres de gouvernement…
    J'en suis sûr.
    Vous et moi sommes d'accord pour dire qu'il y a des problèmes. Ce que j'aimerais savoir, c'est si vous pouvez nous donner un exemple de ce que nous pouvons faire et de la manière dont nous pouvons améliorer les choses.
    Bien sûr. Il y a les échanges interprovinciaux. Si nous devions éliminer les obstacles aux échanges interprovinciaux au pays, nous constaterions immédiatement une augmentation importante de notre PIB. Et surtout, cela profiterait le plus aux provinces les plus pauvres. C'est un excellent exemple.
    Les restrictions étrangères à l'investissement nuisent également à la concurrence au pays, et elles concernent de nombreux secteurs différents. Nos activités peuvent diminuer, et c'est pourquoi nous disons que tous les ordres de gouvernement doivent s'attaquer à ce problème, et de toute urgence. Nous devons nous y attaquer si nous voulons remettre notre productivité sur les rails et continuer d'être membre du G7.
    Descendez à l'échelon municipal. Il y a des restrictions sur l'endroit où les camions-restaurants peuvent se stationner par rapport aux restaurants…
    Pour ce qui est des échanges interprovinciaux, nous avons signé des accords de libre-échange avec plus de 51 pays, qui couvrent la plupart des éléments, mais nous n'avons pas d'accord de libre-échange au sein du Canada. Si vous parlez à n'importe quel politicien fédéral, tout le monde vous dira que nous devons travailler sur le libre-échange interprovincial, mais personne ne s'attaque à cette question délicate.

[Français]

     Merci, monsieur Arya.

[Traduction]

    C'est tout le temps que vous avez.

[Français]

    Monsieur Garon, vous disposez de six minutes.

  (1240)  

    Merci, monsieur le président.
    D'abord, je vous salue tous. C'est gentil de votre part d'être ici aujourd'hui avec nous.
    Je veux revenir à votre témoignage, monsieur Larouche. Nous étudions des projets de loi, ici, qui visent à améliorer le régime concurrentiel, comme les projets de loi C‑56 et C‑59. Comme vous l'avez dit, il y a toujours des ajouts qui semblent pleins de vertus, mais il s'agit toujours d'ajouts marginaux.
    De ce que j'ai compris de votre témoignage, il y aurait deux façons de faire une réforme de la Loi sur la concurrence. La première serait d'établir un cadre très bien défini qui laisserait beaucoup de liberté au commissaire de la concurrence, et la deuxième serait d'ajouter sans arrêt des conditions, ce qui donnerait l'impression qu'on agit, mais qui, finalement, rendrait la Loi tellement compliquée qu'elle en deviendrait inopérante.
    Récemment, j'ai discuté avec des gens du cas des États‑Unis en lien avec la question de la présomption structurelle. On me disait qu'aux États‑Unis, il y avait une présomption en faveur du consommateur et que, dans certains cas, les autorités de la concurrence n'avaient pas nécessairement à se justifier autant qu'elles doivent le faire ici, au Canada. Il semblerait que cela rend le régime plus flexible et plus rapide et que cela réduit le nombre de recours potentiels, puisque cela permet de mieux protéger les consommateurs. On sait que les intérêts des consommateurs sont très diffus, alors que les intérêts des entreprises, qui ont des moyens, sont concentrés.
    Cette présomption en faveur du consommateur pourrait-elle être admise dans le régime concurrentiel canadien?
     Oui, il pourrait l'être.
    Je voudrais que ce soit clair. Ce dont vous discutez dans les projets de loi et dans celui-ci, ce sont, pour la plupart, des réformes qui vont dans le bon sens. Comme vous le dites, c'est du travail qui se fait à la pièce.
    Prenons l'exemple de la fameuse exception des gains en efficience, appelée « défense fondée sur les gains en efficience », qu'on a abolie. Elle avait été mise en place en 1980. En 1980, c'était issu de la doctrine. On pensait que c'était une bonne idée, et on l'avait mise dans la loi. Il a fallu 30 ans, voire 40 ans, pour qu'on s'en débarrasse. Entre-temps, partout ailleurs, c'était un truc qui était dans les lignes directrices des autorités. Dans les années 1990, on a ajouté l'idée qu'en effet, c'était bien beau d'avoir une efficacité supérieure, mais qu'il fallait aussi prouver que les consommateurs en retiraient quelque chose, au bout du compte.
    Il faut donc se demander comment les gains en efficience sont redistribués.
    C'est exact.
    Dans les autres territoires, ce travail s'est fait au cours des années 1990, au moyen d'une réinterprétation et d'un progrès dans la communauté. Ici, nous sommes restés limités par un texte de loi très rigide. Nous avons eu une interprétation absolument renversante de la Cour suprême dans l'arrêt Tervita Corporation. Avec tout le respect que je dois à la Cour suprême, ce qu'elle a fait est incompréhensible. On est allé encore plus dans une mauvaise direction. Maintenant, on l'abolit.
    Je pense qu'on devrait laisser le soin au Bureau de la concurrence de faire ce qu'il veut de ces arguments. De toute façon, ces arguments vont être invoqués dans toutes les affaires. Le Bureau doit les prendre en considération.
    Mon interprétation est-elle juste? Je ne suis pas juriste, mais j'ai côtoyé des gens dans le domaine de l'économie et de la concurrence dans le secteur privé. J'ai l'impression qu'il y a tellement de contraintes, tellement d'échappatoires dans la Loi, qu'une entreprise qui a énormément de moyens pour se défendre, finalement, va toujours être en mesure de contourner la Loi dans sa forme actuelle.
    C'était le premier volet de ma question. Par la suite, je vous céderai le reste de mon temps de parole pour répondre à mes questions.
    Le deuxième volet de ma question est en lien avec le fameux 60 % des parts du marché.
    J'ai demandé à M. Singh d'où venait le pourcentage de 60 %. Il m'a répondu qu'il avait regardé les régimes partout dans le monde. Quand on lui a demandé lesquels, il ne le savait pas. Finalement, on se rend compte qu'il n'y a pas vraiment de 60 %, que 60 % est un pourcentage arbitraire et que, finalement, il vaut mieux être conséquentialiste et essayer de regarder quel serait l'effet d'une fusion sur le prix au consommateur, à savoir comment les gains en efficience seraient redistribués.
    J'ai l'impression qu'on est encore en train d'ajouter des contraintes qui vont encore possiblement complexifier le travail du régulateur. Ai-je raison là-dessus?
     Oui, je serais porté à vous donner raison.
    En c e qui a trait à la première question sur le comportement des entreprises, il faut comprendre que les entreprises font ce qu'elles doivent faire. Elles ont des textes législatifs. Elles embauchent des avocats, des consultants, puis elles invoquent des arguments. Plus il y a de textes, plus il y aura d'arguments. Surtout quand c'est dans la loi, les juges se sentent capables de l'interpréter. Cela aboutit justement à des jugements comme l'arrêt Tervita Corporation.
    Quand ce sont des politiques du Bureau de la concurrence ou de l'autorité en place, les juges ont tendance à garder une certaine retenue et à donner le bénéfice du doute au Bureau. Je pense qu'il est quand même plus favorable d'avoir une loi équilibrée.
    En ce qui concerne le pourcentage de 60 %, dans les autres territoires, donc l'Union européenne et les États‑Unis, en matière de contrôle des concentrations, on commence par des tests de l'indice de Herfindahl-Hirschman, ou IHH, c'est-à-dire l'ensemble des indices de concentration que nous avons en ce moment ou que nous aurons à l'adoption du projet de loi C‑59. Les parts de marché ne jouent pas un rôle énorme parce qu'elles ne sont pas un très bon indicateur.

  (1245)  

    De ce que je comprends, dans le cas de l'indice de Herfindahl-Hirschman ou d'autres trucs du genre, il peut y avoir deux distributions différentes de parts de marché, qui donnent le même indice, par exemple. Finalement, le fait de réduire le tout aux parts de marché empêche presque le travail du commissaire de la concurrence de faire son travail, parce que cela réduit ses outils à un seul, c'est-à-dire un seuil.
    Oui, c'est exact.
    L'IHH tient compte non seulement de la part de marché du plus grand, mais aussi de la manière dont tous les autres acteurs sont placés sur le marché. Prenons l'exemple d'une concentration où un acteur a 30 % du marché, mais où deux autres acteurs ont 30 % du marché pour faire contrepoids. Ce n'est pas la même chose que si vous avez un acteur qui a 30 % du marché, et que tout ce qu'il y a par la suite...
    Vous en avez 200 autres qui se partagent le reste.
    C'est exact. L'IHH capture cela, et c'est l'outil que toutes les autorités utilisent.
    J'ai terminé mon intervention.
    Merci, monsieur Garon.
    Monsieur Masse, la parole est à vous.

[Traduction]

    Merci, monsieur le président.
    Merci aux témoins d'être ici.
    Je remarque une différence dans le ton de mes collègues conservateurs. Cela doit être dû à la dose de caféine qu'ils ont prise ce matin durant le témoignage du témoin précédent.
    Des voix: Ha, ha!
    M. Brian Masse: Je suis heureux que nous parlions de cette question ici et j'apprécie le fait que certaines modifications ont été apportées à la Loi sur la concurrence au fil des ans. L'exemption des gains d'efficience en est une que j'ai réclamée très longtemps, et il y en a d'autres.
    Nous sommes ici, et je pense que le contexte est important. Je vais poser cette question de façon générale, en commençant peut-être par M. Boswell.
    Il est vrai qu'il est très difficile de faire adopter un projet de loi d'initiative parlementaire. C'est l'un des outils qui s'offrent à nous en tant que députés. De plus, nous avons récemment vu que le gouvernement a modifié certaines lois, pas dans toute la mesure du possible, mais nous constatons ici des avantages et des inconvénients dans ce projet de loi.
    Essentiellement, les options qui nous sont proposées en ce moment sont de modifier le projet de loi sous différents aspects et de poursuivre le travail, où il y a un bon et solide consensus sur des éléments ou, subsidiairement… En toute honnêteté, avec la date et les éléments que nous examinons, nous ne verrons probablement pas d'autres types de changements de la Loi sur la concurrence d'ici les deux à trois prochaines années. Je ne peux pas prédire l'avenir, mais je ne vois juste pas comment cela pourrait se produire étant donné que la législature tire à sa fin, qu'il y aura un autre appel électoral et que le Comité devra reprendre le dossier.
    Je suis heureux d'entendre les commentaires du commissaire à la concurrence au sujet de la productivité et des gains d'efficience liés aux questions réglementaires — et c'est probablement une étude que nous pourrions même envisager de faire — mais les probabilités que nous nous attaquions à toutes ces questions sont très réduites.
    En gardant cela à l'esprit, je vais commencer par vous, monsieur le commissaire.
    Que faisons-nous maintenant? Envisageons-nous de modifier le projet de loi pour fournir des outils supplémentaires et renforcer la concurrence au Canada pour le moment et travailler avec ce que nous avons, ou devons-nous attendre le temps qu'il faudra et espérer, à tout le moins, nous occuper de cette question d'ici quelques années? C'est vraiment là où nous en sommes en ce moment.
    Nous avons l'autre projet de loi d'initiative parlementaire au Sénat, ce qui est formidable. Nous ne savons pas de quoi il retournera, mais ce sont les étapes pratiques parmi lesquelles nous devons choisir, et ce sont les voies qui nous sont offertes.
    Encore une fois, je comprends qu'il vaudrait mieux avoir un meilleur processus. Bien que notre démocratie puisse nous laisser tomber à bien des égards, je ne connais toujours pas de meilleurs processus. Les solutions de rechange qui existent ailleurs dans le monde ne sont pas meilleures.
    Monsieur Boswell, allez‑y s'il vous plaît, puis nous passerons aux autres témoins. Prenez tout le temps dont vous avez besoin. Je pense que nous avons environ quatre minutes.
    Merci d'avoir posé cette question très pragmatique. J'espérais avoir l'occasion d'en parler dès le départ.
    Du point de vue du Bureau de la concurrence, comme je l'ai dit dans ma déclaration liminaire, nous sommes ravis de l'attention qui a été accordée à la concurrence dans ce projet de loi d'initiative parlementaire, ainsi que dans d'autres projets de loi d'initiative parlementaire et projets de loi gouvernementaux pour modifier la loi. Je me range à l'avis de M. Larouche. C'était probablement trop complexe en 1986, lorsque, selon certains, il a été rédigé par le milieu des affaires.
    Pour ce qui est du présent projet de loi, du point de vue du Bureau de la concurrence, je dirais que nous n'avons pas besoin de traiter des articles 2, 3, 5, 6, 7, 8, 9, 10 et 11. L'article 4, qui traite de l'amende prévue pour les institutions financières fédérales, est très bien pour ce qui est de la période de 14 ans, mais il devrait s'agir d'une amende à la discrétion du tribunal, et non pas d'une amende maximale, soit les 25 millions de dollars actuellement prévus.
    Par rapport à l'article 12, le bureau pense — et nous l'avons ajouté dans nos recommandations adressées à IDSE — qu'une période limite de trois ans pour les transactions devant faire l'objet d'un avis est un bon pas en avant. En ce moment, elle n'est que de un an. Avec nos collègues des États-Unis, il n'y a pas de période limite pour l'examen des fusions.
     Enfin, en ce qui concerne les dépens adjugés, cela a été abordé dans le projet de loi C‑59, mais j'aimerais simplement souligner que, dans notre mémoire à IDSE, nous avons parlé d'une immunisation complète. Le projet de loi C‑59 constitue un équilibre assez raisonnable, et nous sommes donc, d'une manière ou de l'autre, assez heureux du résultat. Nous croyons fermement ne pas avoir besoin de ces autres articles. Ils ont déjà été abordés dans le projet de loi C‑19, le projet de loi C‑56 et, bientôt je l'espère, le projet de loi C‑59, mais ils ont servi de contribution utile au débat et à l'échange d'idées.

  (1250)  

    En résumé, nous poursuivrions notre travail tout en examinant les autres choses que vous avez mentionnées.
    Oui. Vous pouvez aller de l'avant avec quelques articles, et le reste a été abordé adéquatement dans d'autres projets de loi.
    D'accord, merci.
    Je l'ai mentionné plus tôt, mais je pense que de nombreux articles sont déjà abordés. De ceux qui restent et qui ont été discutés plus tôt, je pense que l'article 3 est une bonne idée, mais j'irais jusqu'à dire qu'il va causer des problèmes devant les tribunaux. Selon moi, les seuils de fusion, les articles 8 et 9, ne sont pas une bonne idée pour les raisons que j'ai expliquées plus tôt.
    La seule chose que j'aimerais souligner, comme vous l'avez fait remarquer, c'est que la défense des gains d'efficience a déjà été abolie. Avec tout le respect que je vous dois, cela fait actuellement partie des lois du pays.
    La clé, cependant, c'est qu'il y a une lacune dans tout cela. En abolissant la défense sur les gains d'efficience, on a ajouté comme facteur les gains d'efficience que le commissaire du Tribunal de la concurrence peut examiner dans le contexte d'une fusion proposée ou d'une collaboration de concurrents civils. Je dirais qu'il s'agit d'un oubli, parce que les lois antitrusts du monde entier considèrent les gains d'efficience comme un facteur à prendre en considération dans l'évaluation des effets concurrentiels.
    Pour cette raison, l'efficience devrait être inscrite dans l'article 93 et le paragraphe 90.1(2) de la Loi sur la concurrence.
    Monsieur le commissaire, avez-vous une opinion à ce sujet?
    Avec tout le respect que je lui dois, je ne suis pas d'accord avec M. Di Domenico, qui est un ami.
    Je crois que cela est devenu très clair avec l'abrogation de la défense fondée sur les gains d'efficience dans les dispositions sur les fusions et dans les collaborations entre concurrents. Nous avons toujours un article qui dit « les facteurs qui sont relatifs à la concurrence ».
     Le ministre Champagne a déclaré que « les facteurs » pourraient être des gains d'efficience qui sont favorables aux consommateurs.
    D'accord.
    Nous pouvons l'examiner. Nous allons l'examiner. Nous ne fermons pas les yeux.
    Nous n'avons pas besoin de réintroduire ce critère complexe de neutralisation et de pondération qui existait dans l'ancienne version. Cela va compliquer les choses et nous enfermer dans l'ancienne version, selon laquelle si l'on réalise ces gains d'efficience et que la fusion nuit aux consommateurs, la fusion pourrait quand même avoir lieu.
    Je dirais de le laisser complètement de côté. Nous l'examinerons dans le cadre de la disposition sur les « facteurs » qui figure dans la loi.
    D'accord. Nous pouvons également assurer un suivi à ce sujet.
    Je suppose que ce que j'essaie de faire valoir ici, c'est que les choses ont évolué au fur et à mesure que le projet de loi était élaboré et créé, et c'est un processus normal ici. C'est la même chose en ce qui concerne ma position au sujet du tribunal. En parcourant le projet de loi C-27, je suis resté ouvert, dans une certaine mesure, à la création d'un tribunal. Toutefois, d'après les données probantes qui ont été présentées — et autour de cette table, nous n'avons jamais vraiment eu affaire à des tribunaux auparavant —, je suis arrivé à certaines conclusions qui me préoccupent beaucoup. Nous avons donc laissé la porte ouverte à une modification du tribunal, mais pas à son élimination. Je veux dire, nous pourrions même nous débarrasser du tribunal ici, si le Comité décidait réellement de le faire.
    De toute façon, c'est un peu là où nous en sommes. Nous sommes ici dans un environnement en constante évolution. J'espère que nous pourrons en quelque sorte continuer à ajouter des choses pendant que nous en avons l'occasion.

[Français]

     Merci, monsieur Massé.
    Monsieur Généreux, vous avez la parole pour cinq minutes.
    Je remercie les témoins.
    Monsieur Boswell, plus tôt, vous avez parlé d'une mise à niveau générationnelle. Qu'entendiez-vous par là?
    Cela dit, avant que vous répondiez à cette question, j'aimerais que vous répondiez à la question suivante. Plus tôt, mon collègue M. Vis a posé la question qui tue, si je peux m'exprimer ainsi. Il a demandé si un tel projet de loi allait véritablement avoir un effet sur le coût de l'épicerie demain matin.
     Je remercie le député de sa question, monsieur le président.
    Si M. Généreux est d'accord, je répondrai en anglais, car il y a des détails techniques.

  (1255)  

[Traduction]

    La combinaison des projets de loi présentés au Comité, au comité des finances de la Chambre et au Sénat au cours des dernières années aura, je crois, un impact à long terme sur certains aspects de la concurrence dans l'ensemble de notre économie. Cela ne se fera pas du jour au lendemain. C'est indéniable. De plus, nous ne voulons pas faire de promesses exagérées.
    Cependant, notre pays n'a pas prêté attention à l'importance de la concurrence dans l'organisation de ses affaires économiques depuis des décennies — littéralement, des décennies. Le Canada compte de multiples oligopoles et a des problèmes très importants liés à l'intensité de la concurrence.
    Il s'agit d'un élément important pour stimuler la concurrence, qui fait baisser les prix, élargit le choix des consommateurs, stimule l'innovation et stimule la productivité. Ce sont là les avantages importants à long terme d'un pays qui accorde de l'importance à la concurrence.
    Peut-elle, du jour au lendemain, résoudre la crise de l'accessibilité financière que nous traversons? Non, et nous ne le promettons pas.
    Il s'agit toutefois de réformes importantes qui permettent de changer complètement de cap. C'est un navire qui vogue depuis au moins 1986.

[Français]

    Si, demain matin, un gouvernement choisissait d'abolir la taxe sur le carbone, cela aurait-il un effet direct?
    Les personnes qui produisent la nourriture qu'on mange dans les épiceries sont taxées de différentes manières, y compris, maintenant, au moyen d'une taxe sur le carbone. Les gens qui transportent cette nourriture sont également taxés. Les gens qui la transforment le sont aussi, par la taxe sur le carbone. Évidemment, cette taxe sur le carbone est ensuite refilée par les entreprises directement aux consommateurs.
    Demain matin, si un gouvernement abolissait la taxe sur le carbone, cela aurait-il un effet direct sur les prix à la consommation?

[Traduction]

    De manière générale, d'un point de vue économique, si vous supprimez les coûts dans la chaîne d'approvisionnement, vous finirez par pouvoir offrir des produits à un prix inférieur.

[Français]

     La réponse est donc oui.
    Tantôt, vous avez utilisé le mot « productivité ». À ma connaissance, au Canada, une heure travaillée représente environ 55 $ pour le pays, alors qu'elle représente 75 $ aux États‑Unis et 80 $ en Europe.
    Quel est le problème qui explique notre manque de productivité, au Canada, et quel est le lien entre celui-ci et le projet de loi qui est devant nous?

[Traduction]

     Je dirais que cela va au‑delà du projet de loi dont nous débattons aujourd'hui, le projet de loi C‑352. Cela revient au point que je soulevais: la concurrence stimule la productivité. D'innombrables études le démontrent très clairement. La concurrence stimule la productivité dans une économie, et c'est précisément à ce titre qu'elle constitue un pilier clé d'une économie capitaliste.
    Comme je le disais, nous n'avons pas accordé beaucoup d'importance à la concurrence au Canada pendant des décennies. On l'a fait remarquer. Le gouvernement a mis sur pied en 2008 un groupe d'experts chargé d'examiner la concurrence dans l'économie. Ce groupe d'experts, en 2008, a souligné à quel point la concurrence a été négligée au Canada et la façon dont la concurrence est un moteur clé de la productivité.
    Nous en sommes au point où la première sous-gouverneure de la Banque du Canada a déclaré il y a un mois qu'il était temps de briser la vitre. Il y a une urgence. Il y a urgence. Nous devons y remédier. Dans son discours, elle a clairement souligné que la concurrence était essentielle pour résoudre le problème de productivité dans notre pays.

[Français]

     Merci.
     J'aimerais laisser quelques secondes à mon collègue M. Williams pour qu'il puisse poser une question.

[Traduction]

    Posez une question brève.
    Merci. C'est une question brève.
    Monsieur le commissaire, merci d'être venu aujourd'hui. Je sais que vous lancez une étude sur l'industrie aérienne. La date limite de présentation des commentaires du public est le 17 juin. Ce sont les nouveaux pouvoirs prévus par le projet de loi C‑56, nous ne faisons donc que les mettre à l'essai.
    L'une de nos préoccupations est qu'il existe une lettre du ministre de l'Industrie qui dit de mettre l'accent sur les services intérieurs de transport aérien, et non sur les aéroports. Évidemment, nous pensons que vous devriez examiner l'ensemble de la question. La concurrence entre les aéroports est tout aussi importante que la concurrence intérieure.
     Si la question revient, les pouvoirs conférés par le projet de loi C‑56 permettent-ils au ministre de modifier le cadre de l'étude après que nous l'avons examinée ou après la consultation publique du 17, oui ou non?

  (1300)  

    Je crois comprendre qu'avec les modifications législatives découlant du projet de loi C‑56, nous menons des consultations sur le mandat que nous avons actuellement, comme vous l'avez souligné à juste titre. Une fois que nous aurons entendu les commentaires des Canadiens — et je peux vous dire que nous recevons beaucoup de commentaires —, nous pourrons alors modifier le mandat, en fonction des points soulevés par les gens dans le cadre de nos consultations. Nous fournirons ensuite le mandat de l'étude au ministre.
    Peut‑il modifier l'étude s'il le souhaite?
    Merci, monsieur Williams, mais la question que vous avez posée n'était pas brève.

[Français]

    D'ailleurs, M. Généreux m'a bien eu. Je pensais que c'était son temps de parole qu'il partageait avec vous.
     Chers collègues, il est 13 heures, mais nous avons commencé à 12 h 8. Si vous êtes d'accord, pour être juste envers tout le monde, je propose de continuer quelques minutes.
    Monsieur Van Bynen, vous avez la parole pour cinq minutes.

[Traduction]

    Merci, monsieur le président. Tout cela est très intéressant.
    Nous avons entendu plus tôt une référence à un rapport du Bureau de la concurrence; le bureau soulignait la nécessité de moderniser les lois canadiennes sur la concurrence afin de respecter les réalités de l'économie d'aujourd'hui. Nous savons que certains de ces éléments ont été mis en place, et nous avons entendu dire que les obstacles réglementaires constituent l'un des principaux éléments, en particulier le commerce interprovincial.
    Y a‑t‑il d'autres éléments que nous devrions prendre en considération à mesure que nous progressons en ce qui concerne l'amélioration de l'intensité concurrentielle?
    En ce qui concerne l'amélioration…
    J'invoque le Règlement, monsieur le président.
    Je reçois l'interprétation en français.

[Français]

     Il semble y avoir un problème technique.

[Traduction]

    Pouvons-nous réessayer?
     Êtes-vous toujours sur [inaudible]?
    Je suis sur le canal anglais.
    Ce n'était pas le bon canal. D'accord, cela devrait probablement fonctionner maintenant, monsieur Van Bynen.
    Je suis désolé.
    Allez‑y, monsieur Boswell.
    Je pense que cette approche pangouvernementale dont j'ai parlé plus tôt est quelque chose que nous devrions adopter, en tant que nation, avec le leadership du gouvernement fédéral. Lorsque j'en parle, et lorsque nous en parlons au bureau, ce n'est pas comme si nous avions créé cela de toutes pièces. C'est ce que d'autres pays ont fait et font.
    Dans les années 1990, les Australiens disposaient d'une Commission de la productivité au sein de laquelle ils ont examiné 1 800 lois et règlements en vue de renforcer la concurrence dans l'ensemble de l'économie australienne au niveau fédéral, et les États australiens y ont également participé. Ces travaux ont entraîné une augmentation significative du PIB australien de 2,5 %, ce qui valait environ 5 000 $ australiens par foyer, une somme d'argent importante dans les années 1990. Voilà l'exemple australien.
    Les États-Unis ont actuellement une approche pangouvernementale en matière de concurrence dans l'économie américaine. Il existe un conseil de la concurrence à la Maison-Blanche, au sein duquel tous les secrétaires des différents départements du gouvernement américain sont chargés de cerner les problèmes de concurrence dans leurs domaines de compétence et de les régler.
    Nous ne parlons pas de quelque chose qui n'a pas été fait ailleurs dans le monde, mais nous devons désespérément travailler là‑dessus au Canada si nous voulons résoudre nos problèmes.
    Il est bon que nous entendions parler d'autres exemples qui se produisent à l'extérieur du Canada. Cela pourrait être un bon point de départ.
    Nous avons entendu dire que le prix du carbone était un problème en ce qui concerne le coût des aliments. J'ai entendu plus tôt une déclaration sur la manière dont nous mesurerions l'efficacité de la concurrence et sa valeur, et la façon dont la valeur de ces arguments relatifs aux gains d'efficience se traduisait en valeur pour le consommateur.
    Comment pourrions-nous y parvenir? Si nous envisageons des gains d'efficience, comment pouvons-nous garantir que le consommateur profite de ces gains d'efficience?
    M. Larouche pourrait peut-être répondre à ce sujet.
    En ce qui concerne les textes législatifs ou les lignes directrices, vous ajoutez généralement un libellé à la défense fondée sur les gains d'efficience pour dire que la partie qui invoque cette défense doit démontrer que les gains d'efficience profitent aux consommateurs — du moins dans une part raisonnable. L'autorité dispose alors des outils nécessaires pour demander: « Vous allez économiser 10 % sur vos coûts avec cette fusion. Quelle part de ce pourcentage sera refilée au consommateur? » C'est le genre de disposition dont vous avez besoin.

  (1305)  

    Y a‑t‑il des exemples qui pourraient servir de point de référence?
    Oui. C'est la norme dans la législation européenne. Je crois que cela figure également dans les lignes directrices aux États-Unis.
    Pourriez-vous nous les envoyer afin qu'on puisse également les verser au dossier ici?
    L'autre élément que j'ai examiné concernait les articles qui, selon vous, n'étaient pas aussi efficaces. Vous avez fait référence aux articles 3, 8 et 9. Avons-nous tous les détails de vos raisons qui justifient la nécessité de modifier les articles 3, 8 et 9, monsieur Larouche?
    En ce qui concerne les articles 8 et 9, je pense que ce qui se trouve actuellement dans le projet de loi C‑59 avec l'IHH, est bon. C'est certainement plus conforme aux normes mondiales qu'aux seuils de parts de marché.
    En ce qui concerne l'article 3, selon moi, le problème sous-jacent est cette nécessité de toujours choisir entre les articles 45 et 90.1 comme instrument. Cela ne changera pas. Ce serait alors une bonne idée de prévoir également des sanctions sérieuses dans l'article 3, mais cela poserait des problèmes devant les tribunaux, car il s'agit de dispositions pénales.
    Si l'on veut avoir un niveau de sanction qui correspond à ce qui se fait ailleurs, il devrait se situer autour de 10 % comme maximum théorique. Normalement, la sanction correspondra à environ 4 à 5 % du chiffre d'affaires au niveau où devrait se situer le bénéfice. C'est la pratique. Cela signifierait qu'au Canada, si nous y allons avec un facteur de un à dix, avec l'Union européenne ou les États-Unis, nous jouerions dans la fourchette des 100 millions de dollars.

[Français]

     Monsieur Van Bynen, c'est tout le temps de parole dont vous disposiez.
    Monsieur Garon, vous avez maintenant la parole pour deux minutes et demie.
     Merci, monsieur le président.
    Je ne m'attendais pas à parler de cela, mais, comme M. Williams a abordé le sujet, je vais poser une question au commissaire, M. Boswell, que je salue au passage.
    Il y a trois grands aéroports dans la région de Montréal: celui de Saint‑Hubert, celui de Dorval et celui de Mirabel. Une administration aéroportuaire administre deux de ces aéroports, ce qui a eu comme conséquence qu'elle en a à peu près fermé un à la circulation du grand public, aux vols commerciaux.
    Ce régime me semble être conçu par le gouvernement fédéral pour être anticoncurrentiel et pour générer des comportements anticoncurrentiels chez Aéroports de Montréal.
    Cela fait-il partie des sujets qui vous intéressent maintenant que vous avez de nouveaux pouvoirs d'enquête?

[Traduction]

    Merci de la question. Je m'excuse de répondre dans ma langue.
    Je pense que nous allons examiner un large éventail de questions dans cette étude de marché. Nous avons maintenant le projet de mandat et nous espérons qu'il sera parachevé plus tard en juin ou juillet. À l'heure actuelle, dans l'ébauche, nous parlons d'examiner la gouvernance des aéroports en ce qui concerne son incidence sur la concurrence, et nous verrons si cela fait partie du mandat final.

[Français]

     Dans le secteur privé, est-ce qu'on tolérerait, par exemple, qu'une entreprise en achète une autre, acquière à peu près toutes ses parts de marché, puis mette fin à ses activités commerciales?
    Dans un domaine autre que l'aviation, une telle pratique serait-elle tolérée si le secteur éprouve des problèmes de capacité?

[Traduction]

    Il est difficile de formuler des hypothèses au pied levé…

[Français]

     Faites-vous plaisir.

[Traduction]

    … je vais donc résister à la tentation de vous donner une réponse.

[Français]

    Merci beaucoup.
    Monsieur Larouche, vous avez parlé des contraintes réglementaires, qui sont en soi des contraintes à la concurrence. Vous qui avez travaillé en Europe, une région quand même reconnue pour s'être dotée d'un cadre réglementaire assez important, quelle est l'étendue du chantier qui se dresse devant nous si nous voulons commencer à travailler sur des assouplissements réglementaires?
    Par où devrions-nous commencer et de quelle façon?
    C'est une grande question.
     Il vous reste 12 secondes.
    Je crois que le commissaire Boswell a tout à fait raison lorsqu'il parle d'approche horizontale ou transversale. Il y a énormément de travail à faire. La procédure d'enquête qui sera appliquée pour la première fois dans le secteur des services aériens au Canada devrait aussi permettre, si elle est utilisée comme au Royaume‑Uni, par exemple, au Bureau de la concurrence de proposer des recommandations précises sur les modifications réglementaires à apporter. C'est cela, une approche transversale. L'autorité de la concurrence peut aussi mettre le doigt sur des problèmes dans d'autres secteurs.
    Au-delà de tout cela, il s'opère un changement de mentalité. Je suis de retour au pays depuis sept ans, et je trouve que c'est tranquille au Canada, que les marchés sont paresseux. Prenons l'exemple des épiceries, dont on a parlé aujourd'hui. On y voit des choses surprenantes. D'abord, les marges sont élevées. Ici, on trouve qu'une marge de 5 %, ce n'est pas beaucoup. En réalité, elles se situent à environ 2 % aux États‑Unis et à 1 % en Europe. La marge réalisée au Canada est donc très élevée.
     Par ailleurs, les grands acteurs pratiquent ici des politiques identiques. Ils ont tous des supermarchés qui se ressemblent. Les gens se plaignent-ils des prix trop élevés? On ouvre alors des supermarchés où on agrandit la gamme, avec Maxi et Super C, par exemple. Aux États‑Unis et en Europe, les modèles d'affaires sont beaucoup plus diversifiés.
    Il y a des entrants. Whole Foods peut se situer dans le marché haut de gamme. De temps à autre, il va mener une guerre des prix. Au bas de la gamme, il va y avoir un supermarché à prix moindres qui va de temps à autre dire qu'il offre lui aussi de la qualité. Les supermarchés ont donc chacun leur modèle d'affaires et ils s'attaquent.
    Dans ces marchés, il faut arriver à une situation où les entreprises craignent ce que les autres vont faire, plutôt qu'à une situation où les entreprises peuvent prévoir facilement ce que les autres vont faire, comme c'est le cas ici aujourd'hui.

  (1310)  

     Merci beaucoup. C'est très intéressant.

[Traduction]

    Monsieur Masse, vous disposez de deux minutes et demie, mais si vous pouvez en utiliser moins, je vous en serais reconnaissant.
    Je le ferai, monsieur le président. Je vais donc laisser partir nos invités également.
    Cependant, je veux m'assurer de consigner officiellement quelque chose au sujet des 60 %. Le Comité s'est penché sur une situation qui comportait un seuil de 60 %, et il s'agissait de Supérieur Propane. L'entreprise a utilisé la défense fondée sur les gains d'efficience, ce qui a eu des répercussions sur les collectivités rurales en particulier.
    Au sein du Comité, je pense que nous aurions même fait une recommandation ou travaillé sur ce sujet dans le passé en ce qui concerne Supérieur Propane, car il s'agissait d'une question importante dont nous avons traité dans l'étude sur le sujet auparavant.
    Merci, monsieur le président, et je vais laisser tout le monde disposer de ses deux minutes supplémentaires maintenant.
    Merci beaucoup, monsieur Masse.

[Français]

    Je remercie les témoins de s'être prêtés à cet exercice.
     (La séance est levée.)
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