:
Bonjour, chers collègues.
[Français]
Bonjour à tous.
[Traduction]
Mesdames et messieurs, nous nous réunissons pour la 117e séance du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre.
Nous disposons encore de trois heures ce matin, et jusqu'au début de l'après-midi.
Je remarque que certains membres du Comité ont été surpris d'apprendre qu'il y avait un petit déjeuner ce matin. J'ai l'impression que c'est peut-être l'une des heures de réunion les plus matinales, alors j'espère que tout le monde profite du changement au plan de repas.
Nous accueillons ce matin des témoins du Bureau de la traduction.
[Français]
Je vais les présenter et leur céder la parole dans un instant.
[Traduction]
Je rappelle à mes collègues et aux témoins que lorsque vous n'utilisez pas votre oreillette, vous devez la placer sur l'autocollant à votre gauche ou à votre droite afin de respecter la santé et le bien-être de nos interprètes — ce que vous comprendrez parfaitement, bien sûr.
Sur ce, chers collègues, nous poursuivons notre étude. Il s'agit de la deuxième réunion consacrée à notre examen de la Politique de prévention de la violence et du harcèlement en milieu de travail à l'intention des députés de la Chambre des communes. J'ai trouvé la dernière réunion extrêmement enrichissante, productive et respectueuse. J'espère que nous pourrons continuer sur cette voie.
Sans plus tarder, j'aimerais souhaiter la bienvenue aux représentants du Bureau de la traduction: le président-directeur général, M. Jean-François Lymburner; le vice-président du Service au Parlement et interprétation, M. Matthew Ball; et la vice-présidente des Politiques et services intégrés, Mme Annie Trépanier.
Nous accorderons 10 minutes tout au plus à votre groupe pour faire une déclaration préliminaire.
Sur ce, je vous cède la parole, monsieur Lymburner.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Bonjour à tous.
Je souligne la présence de mes collègues Annie Trépanier et Matthew Ball, les deux vice-présidents du Bureau de la traduction qui m'accompagnent aujourd'hui.
Je reconnais que nous sommes réunis sur le territoire traditionnel du peuple algonquin.
Monsieur le président et honorables membres du Comité, je vous remercie de cette invitation à contribuer à votre examen de la Politique sur la prévention du harcèlement et de la violence en milieu de travail des députés de la Chambre des communes.
Nous sommes heureux de pouvoir faire le point avec vous aujourd'hui sur la relation de longue date entre les députés et nos employés. Je tiens à souligner que nous célébrons le 90e anniversaire de la création du Bureau de la traduction. En effet, il y a maintenant 90 ans que nous offrons des services linguistiques de qualité qui, je le rappelle, sont essentiels au bon fonctionnement du Parlement.
[Traduction]
Bien que nos traductrices, traducteurs et terminologues aient rarement la chance de côtoyer les parlementaires pour qui ils et elles travaillent, c'est plutôt le contraire dans le cas de nos interprètes, qui passent le plus clair de leurs journées, et souvent de leurs soirées, en présence des élus.
Depuis l'inauguration de l'interprétation simultanée à la Chambre des communes il y a 65 ans, on voit — et surtout on entend! — les interprètes du Bureau dans la plupart des rencontres parlementaires.
J'en profite d'ailleurs pour saluer Mathieu, Kristen et Caroline, qui sont en cabine pour notre rencontre d'aujourd'hui.
Monsieur le président, les interprètes n'ont pas de lien hiérarchique direct avec les députés: ils ne font pas partie du personnel politique ou parlementaire, mais plutôt de l'administration publique centrale. Et bien que les députés soient leur public cible principal, ils transigent rarement avec eux, sauf les quelques fois où ils sont appelés à se tenir à leurs côtés pour offrir ce qu'on appelle l'interprétation chuchotée. En général, les interprètes sont isolés dans leur cabine, et les greffières et greffiers de l'Administration de la Chambre des communes leur servent d'intermédiaires avec les députés.
Néanmoins, les députés ont un impact direct sur les conditions de travail des interprètes par leur discipline durant les rencontres interprétées. Certains comportements de base, comme le fait de respecter le droit de parole, facilitent grandement le travail des interprètes, en plus de prévenir les incidents acoustiques qui peuvent se produire lorsque plus d'un micro est ouvert en même temps.
:
À ce sujet, les honorables membres de votre comité ne sont pas sans savoir que plusieurs directives, procédures et mesures ont été mises en place, depuis quelques années, pour favoriser la qualité du son et ainsi protéger l'ouïe et la santé des interprètes.
En effet, il y a plus de 10 ans déjà que les interprètes ont commencé à faire état de symptômes liés à l'interprétation simultanée lors de rencontres virtuelles et hybrides. Depuis lors, nous n'avons jamais cessé nos démarches afin de mieux comprendre et prévenir les risques pour les interprètes, avec l'aide de l'Administration de la Chambre des communes, qui est responsable du soutien technique lors de l'interprétation.
En nous inspirant des nombreux rapports d'études que nous avons obtenus et de ce que nous avons appris lors de nos consultations à l'étranger, nous avons mis en place plusieurs mesures de protection. Le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre en a d'ailleurs fait état en mai 2020 et encore en janvier 2023 dans ses rapports intitulés « Fonctions parlementaires et pandémie de la COVID‑19 » et « L'avenir des délibérations hybrides à la Chambre des communes ».
Permettez-moi de résumer certaines de ces mesures. Entre autres, les consoles d'interprétation sont conçues pour protéger l'ouïe des interprètes. De plus, un technicien est maintenant affecté à chaque rencontre où il y a de l'interprétation simultanée. Des tests de son doivent aussi avoir lieu avant chaque rencontre. Enfin, toute personne qui prend la parole virtuellement, comme c'est le cas ici aujourd'hui, est dans l'obligation d'utiliser un microphone de qualité ISO, à défaut de quoi ses interventions ne seront pas interprétées.
[Traduction]
Nous avons également créé un poste de directeur des Affaires parlementaires et du Bien-être des interprètes afin de veiller à l'efficacité et au renforcement des mesures de protection. Au courant de la dernière année, notre directeur a collaboré avec l'Administration de la Chambre des communes à établir des protocoles pour officialiser la prévention et la gestion des incidents acoustiques.
Il a aussi dressé un plan d'amélioration continue, dans le cadre duquel nous avons reçu cette année les résultats des trois nouvelles études, à savoir deux études sur le son transmis aux interprètes, et une sur l'évolution de leur ouïe. Nous avons très hâte de connaître les nouvelles recommandations que nous feront les experts d'ici la fin de l'année.
Je suis heureux de signaler, monsieur le président, que tous ces efforts portent leurs fruits. Alors que 128 incidents acoustiques avaient été signalés en 2022, on en a recensé 74 en 2023, et que 10 jusqu'à présent cette année.
Bien sûr, des incidents se produisent encore. Le son est quelque chose de très complexe qu'il est difficile de contrôler parfaitement, et il existera toujours un risque d'incident acoustique. Néanmoins, nous sommes déterminés à poursuivre notre travail d'équipe avec l'Administration de la Chambre et des experts en la matière pour réduire ce risque au minimum.
Tout récemment encore, à la suite d'une instruction reçue du Programme du travail d'Emploi et Développement social Canada, de nouvelles directives concernant la manipulation des oreillettes, comme il a été mentionné ce matin, ont été instaurées pour éviter les retours de son appelés effet Larsen.
[Français]
Le Bureau de la traduction sait à quel point ces mesures peuvent complexifier le déroulement de vos réunions. Nous sommes reconnaissants à vos honorables collègues de la bonne grâce avec laquelle ils s'y soumettent.
Nous sommes aussi conscients de la frustration que les députés peuvent ressentir lorsque, malgré toutes les précautions, une réunion doit être interrompue parce que le son n'est pas de qualité suffisante pour permettre l'interprétation.
Pour une personne qui n'a jamais interprété, il peut être difficile de concevoir qu'un problème de son apparemment mineur puisse empêcher l'interprétation. Cependant, puisque les interprètes doivent parler et écouter en même temps, il leur faut une qualité de son qui va bien au-delà des besoins des participants. Un simple grésillement, qu'un participant ordinaire remarquera à peine, peut causer des maux de tête et des troubles de l'ouïe aux interprètes.
C'est la raison pour laquelle nous avons donné à nos interprètes la directive de s'interrompre en cas de problème de son.
[Traduction]
Je ne cacherai pas que cette décision est souvent mal accueillie. Même si le greffier sert alors d’intermédiaire entre les députés et les interprètes, certains députés peuvent exprimer du mécontentement, et les interprètes peuvent être ou se sentir ciblés.
Mais au bout du compte, malgré les désagréments, une chose est claire: un interprète ne peut pas interpréter ce qu’il n’entend pas, et ne devrait jamais se mettre en danger en tentant de le faire pour éviter les critiques. C’est pourquoi notre protocole stipule clairement que si une pression est exercée sur un interprète pour l’inciter à ne pas interrompre le service ou à le reprendre malgré la mauvaise qualité du son, il doit contacter immédiatement ses supérieurs, qui interviendront pour corriger la situation.
Cela dit, jusqu’à présent, grâce à l'excellente collaboration des greffières et greffiers ainsi que des présidentes et présidents des comités, les interactions se sont déroulées dans un climat de respect.
[Français]
Il n'en demeure pas moins que l'existence d'outils, comme la politique que vous examinez actuellement, est très utile pour désamorcer les conflits qui peuvent survenir dans le contexte des réunions parlementaires, où les émotions sont parfois à fleur de peau. Bien que nous n'ayons jamais eu à en faire usage, nous sommes reconnaissants aux honorables députés de l'avoir mise en place et nous remercions le Comité de solliciter nos commentaires relativement à sa mise en œuvre.
Nous nous ferons maintenant un plaisir de répondre à vos questions.
[Traduction]
Merci beaucoup.
:
C'est une très bonne question, monsieur le président. Je vais effectivement essayer de décortiquer les données.
Vous avez mentionné ce qui se passait avant la pandémie. J'ai également dit dans ma déclaration préliminaire que nous évaluons la situation depuis 10 ans. Vous vous souvenez peut-être que j'ai joué au football canadien, et les gens sont beaucoup plus conscients maintenant des problèmes liés aux commotions cérébrales. L'effet est similaire lorsque l'oreille est exposée à un bruit assourdissant, qui peut créer... Je pense que les données et la science s'améliorent et permettent de comprendre ce qui se passe. Comme pour les commotions cérébrales, personne ne s'en souciait à l'époque où je jouais, mais je pense qu'il y a désormais beaucoup de protocoles en place. La raison pour laquelle il n'y avait pas de données auparavant est peut-être que le problème a été mis en lumière lors de la pandémie.
Pour ce qui est de la ventilation — j'aime vraiment la question, monsieur le président, parce que nous les appelons des « incidents acoustiques » —, le son ressemble à une chaîne d'approvisionnement, mais c'est une chaîne acoustique. Le problème pourrait être attribuable à bien des choses. S'il y a un participant à distance, comme c'est le cas aujourd'hui, quelque chose peut se produire dans son immeuble qui lui fait perdre sa connexion, de sorte que nous ne l'entendons plus. Pour nous, il pourrait s'agir d'un incident acoustique, mais qui ne cause pas de blessure ou ne nuit pas à l'audition de l'interprète. Cela dit, celui‑ci ne sera pas en mesure d'interpréter s'il n'entend pas le son. Il s'agit donc d'une interruption de service pour nous. Nous en faisons le suivi.
Il y a ensuite... Je ne sais pas, mais certains d'entre vous assistaient peut-être à des réunions il y a quelques semaines lorsqu'une alerte a sonné sur nos téléphones. Il s'agissait d'un essai du système d'alerte partout au Canada. Croyez‑le ou non, il y avait beaucoup de réunions partout au Canada. Tout le monde avait son téléphone et, soudain, il y a eu un son puissant. Pour les interprètes qui écoutaient activement, cela aurait pu créer un certain malaise, et nous avons des moyens de le mesurer.
Comme nous l'avons mentionné, nous sommes passés de 128 cas en 2022 à 78 l'année dernière, et nous en avons maintenant 10. En contrepartie, les incidents qui restent sont principalement attribuables au comportement humain. En fait, lorsque vous ramenez l'oreillette vers le microphone, c'est ce qui cause ce qu'on appelle « l'effet Larsen ». C'est essentiellement un joli nom pour le son de la rétroaction acoustique. Ce son peut être extrêmement dommageable pour l'ouïe. C'est pourquoi, même si nous n'avons que quelques incidents en ce moment, ce sont ceux que nous aimerions vraiment prévenir en travaillant avec nos collègues. Voilà un type d'incidents.
Lorsque le son est très faible, il se peut aussi que les interprètes travaillent, mais sans pouvoir entendre, ce qui aura probablement un effet sur eux. Ce n'est pas aussi immédiat que l'effet Larson, mais nous répertorions ces cas également. Ils font partie de la famille des incidents acoustiques.
:
Ce sont d'excellentes questions.
D'entrée de jeu, il est important de préciser que le Bureau de la traduction fait partie de l'administration publique et que, à ce titre, il suit le Code de valeurs et d'éthique du secteur public. Le Bureau de la traduction fait partie de la famille de Services publics et Approvisionnement Canada, qui a aussi un code de conduite. Ces deux codes régissent les cas de violence et de harcèlement non seulement à l'intérieur du ministère, mais aussi avec le public ou avec les clients. Il faut savoir que de 90 à 100 ministères et agences utilisent les services du Bureau. Il peut s'agir de services de traduction, mais le cas qui nous interpelle aujourd'hui est celui de l'interprétation.
Nous ne vous cacherons pas que les interprètes sont assez invisibles, ici. Souvent, il peut se passer des choses derrière la vitre de la cabine des interprètes. Lors d'une réunion du Comité de liaison, nous avons rencontré les présidents de comité et nous avons pu discuter avec eux des façons d'avoir une meilleure communication afin que, lorsqu'il se passe quelque chose dans la cabine des interprètes, le président ou le greffier en soit informé.
Pour ce qui est des comportements, je peux vous donner un exemple. Vous avez sans doute déjà entendu parler de gens qui parlent en tournant le fil de leur oreillette. Ce n'est pas nécessairement fait de façon volontaire. Souvent, c'est un tic nerveux lors d'un débat. C'est comme lorsque certaines personnes manipulent nerveusement un crayon. Ce genre de comportement peut absolument compromettre le travail des interprètes. De plus, cela peut être perçu non pas comme un manque de respect, mais comme un manque de connaissance des dangers de l'effet Larsen. C'est pour cette raison qu'il y a aujourd'hui des autocollants indiquant comment procéder.
Dans certains cas, la réunion de comité a dû être interrompue. Nous avons parlé des gens en ligne. Il y a eu un cas où, même si le témoin avait un bon micro, il n'y avait pas de son. Nous ne pouvons pas interpréter ce que nous n'entendons pas. Dans ce cas, nous devons interrompre la rencontre. Quand le service d'interprétation redevient fonctionnel après une interruption, on sent l'empressement du Comité à voir la réunion continuer. Parfois, vous avez des débats très engagés pendant les séances de comité.
C'est ce genre de situation qui peut arriver. Jusqu'à présent, nous avons réussi à en discuter.
Je vais demander à M. Ball, qui est un interprète de carrière, de vous en parler davantage.
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C'est une très bonne question, monsieur le président. Ce que nous avons fait, comme je l'ai mentionné dans ma déclaration préliminaire, c'est que nous avons créé un poste de directeur responsable du bien-être des interprètes. Cela ne s'est jamais fait auparavant dans l'histoire du Bureau de la traduction. Nous avons mis en poste une personne dont c'est le seul objectif — et la santé mentale fait assurément partie du bien-être. Il y a de nombreux éléments à prendre en compte.
Nous avons un grand nombre de discussions. Nous rencontrons les interprètes, les réunissons pour obtenir leurs commentaires, et nous assurons d'avoir des plans pour améliorer nos services.
Je tiens à souligner que nous faisons 50 000 heures d'interprétation chaque année pour le Parlement, ce qui est formidable. Il y a beaucoup de choses qui vont bien.
Encore une fois, il s'agit de prédire tout type d'incident. Je dirais que ce qui cause le plus de stress à l'heure actuelle au travail... Si vous vous rendez au travail à pied et que vous ne savez pas si quelque chose va vous arriver aujourd'hui, c'est une source d'anxiété, mais ce n'est pas la seule cause.
La relation avec nos collègues de la Chambre des communes et du Sénat est primordiale. Ce que nous faisons est un sport d'équipe, car beaucoup de gens qui ne font même pas partie de la même organisation se rassemblent tous pour appuyer notre travail ici.
Nous y accordons beaucoup d'attention. J'ai mentionné l'ombudsman de Services publics et Approvisionnement Canada, ou SPAC, qui est un service extraordinaire auquel les interprètes peuvent s'adresser. De plus, à cause de ce qui s'est passé...
Et, bien sûr, nous avons aussi des directives de Travail Canada.
La situation est très grave, alors nous voulons nous assurer que tout le monde comprend ce que nous faisons. Notre principal outil consiste à être transparents et à discuter.
:
Merci beaucoup, monsieur le président.
Je remercie les témoins d'être ici ce matin.
[Traduction]
Je tiens à remercier tout particulièrement les interprètes de leur travail. Soyez assurés que lorsque j'étais présidente d'un comité, s'il y avait un problème de son, nous arrêtions les délibérations. Nous ne poursuivions pas si nous ne pouvions pas avoir un son permettant aux interprètes de faire leur travail en toute sécurité.
J'aimerais revenir brièvement sur ce que disait ma collègue, Mme Mathyssen. Dans cette enceinte, les interprètes passent leur journée à être notre voix, et certains députés parlent avec grande passion de leur sujet — ce qui arrive tant à la Chambre qu'en comité. Certains hurleront dans le micro et d'autres se disputeront entre eux. Il y a donc parfois des mots interprétés qui ne sont pas des plus agréables, qu'il s'agisse d'un son très fort ou de querelles entre députés.
Il y a aussi parfois le sujet à l'étude. J'ai siégé au Comité des anciens combattants, où nous avons entendu des témoignages horrifiants. Dans le cadre de certaines des études que nous entreprenons au Comité de la condition féminine, nous entendons des témoignages horribles. Les interprètes sont très professionnels, mais, au bout du compte, ils rentrent chez eux et doivent se remémorer ce qu'ils ont entendu et ont eu à dire.
Je pense que c'est là où nous essayons d'en venir. Les mots que nous utilisons, que ce soit le ton, le son ou les mots, doivent avoir une incidence sur eux. En fait, je peux me lever et quitter le débat à la Chambre si le sujet devient un peu difficile pour moi, mais les interprètes ne le peuvent pas. Je pense que c'est là où nous voulons en venir: il faut comprendre que les mots que nous utilisons et la façon dont nous les utilisons ont une incidence sur eux.
Y a‑t‑il eu des plaintes ou des gens qui vous ont dit: « Écoutez, je ne peux plus siéger à ce comité; c'est trop lourd pour moi »? Une telle situation s'est-elle déjà produite?
:
Je vous remercie, madame Romanado.
Chers collègues, nous allons suspendre brièvement la séance pour accueillir le prochain groupe de témoins.
Habituellement, nous insérons des pauses-santé à nos réunions pour permettre aux gens de bouger un peu et de reprendre leur souffle. Je vais nous accorder quelques minutes de plus, car il nous reste encore deux heures ce matin.
Je voulais mentionner une chose qui pourrait être utile. Je sais qu'il peut être un peu difficile de s'y adapter, mais pour nous aider à savoir combien de temps il nous reste dans nos interventions — j'ai remarqué que Mme Gaudreau l'a fait plus tôt —, il serait utile de vous chronométrer et d'afficher l'horloge devant vous.
Cela permettrait d'accomplir deux choses: premièrement, il n'y aurait pas d'écart entre les horloges du président et des députés et, deuxièmement, je n'aurais pas à vous interrompre, ce qui donnerait peut-être une réunion plus fluide.
C'est ma recommandation. Je sais que la mise en œuvre pourrait prendre un peu de temps, mais je pense que cela pourrait être utile.
[Français]
Sur ce, monsieur Ball, monsieur Lymburner et madame Trépanier, merci beaucoup d'être venus ici ce matin.
[Traduction]
Chers collègues, nous allons suspendre la séance pendant quelques minutes, puis nous reprendrons avec notre deuxième groupe de témoins.
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Merci, monsieur le président.
Je vous remercie de m'avoir invitée à comparaître aujourd'hui. Je m'excuse à l'avance si je me laisse emporter par l'émotion.
Je suis profondément troublée par les graves répercussions de l'augmentation du harcèlement et des menaces sur la sécurité des députés et de notre personnel, sur la capacité des députés de remplir leurs rôles et, en fin de compte, sur l'intégrité du Parlement et la viabilité à long terme de notre démocratie. Même si j'ai travaillé pendant plus de 25 ans dans le secteur des services bancaires d'investissement immobilier, qui était dominé par les hommes, et que j'ai certes vécu de la misogynie et du harcèlement durant ma carrière précédente, cela ne se compare nullement à ce que j'ai vécu en tant que députée. L'ampleur des menaces et de la misogynie dont je suis victime, en ligne et en personne, est telle que j'ai souvent peur de sortir en public. Ce n'est pas une façon durable ni saine de vivre.
J'ai été agressée verbalement à l'épicerie, dans ma collectivité, par un homme qui criait: « Allez vous faire foutre, vous et Trudeau. Vous irez en prison pour ce que vous avez fait. » Lors d'un événement commercial à Burlington, un homme m'a dit de façon agressive, en pointant son doigt devant mon visage, que je devais surveiller mes arrières et que j'allais recevoir ce qui m'était dû.
La quête toxique des élus pour obtenir des mentions « J'aime » et la publication d'extraits vidéo dans les médias sociaux a empêché la tenue de conversations constructives, a exacerbé nos différences et a diminué notre capacité à faire preuve d'empathie les uns envers les autres. Dans les courriels, lors d'appels téléphoniques et dans les médias sociaux, l'un des exemples les plus flagrants de cette dégradation du discours politique est l'utilisation croissante en anglais d'un terme péjoratif de quatre lettres commençant par « c », un terme que je ne suis pas à l'aise de répéter ici au Parlement. Avant de devenir députée, tant dans ma vie personnelle que professionnelle, je n'avais jamais entendu quelqu'un me lancer ce mot, mais depuis que je suis députée, il est devenu complètement normal dans la population d'utiliser ce mot pour nous accoler une étiquette et nous rabaisser, moi et mes collègues députées.
Aujourd'hui, je veux lire à l'intention du Comité, du Parlement et des Canadiens des extraits de messages que j'ai personnellement reçus par courriel, par téléphone et dans les médias sociaux depuis que je suis députée. Je veux aussi que vous pensiez à mes formidables employés, qui doivent subir ces injures au téléphone et lorsqu'ils lisent les propos des gens. Cela a des répercussions négatives sur leur santé mentale et sur la capacité des députés d'embaucher du personnel et de le maintenir en poste.
Je tiens à préciser que, même si je donnerai des exemples précis de propos tenus par certains députés conservateurs, je ne veux en aucun cas laisser entendre que cela reflète la pensée de tous les députés conservateurs. En fait, l'épinglette que je porte aujourd'hui m'a été offerte en cadeau par un député conservateur. J'ai des amis en face.
Je pense qu'il convient de mentionner qu'il existe beaucoup plus d'exemples que ceux que j'ai choisi de vous donner aujourd'hui, mais comme ils comportent des mots qui ne sont pas du tout dignes d'être prononcés au Parlement, je ne les mentionnerai pas ici.
Voici quelques exemples: « Je ne sais vraiment pas comment vous faites, minables salopes libérales, pour vous regarder dans le miroir. Bonne chance aux prochaines élections, espèce d'ordure. » « Je vais m'en prendre à vous. C'est fini. Vous êtes cuite. » « Comment se fait‑il que vous soyez au pouvoir? Vous devriez vivre dans une porcherie, espèce de merde. » « Nous surveillons vos moindres gestes. Vous n'êtes en sécurité nulle part. Dieu veillera à ce que vous soyez jugée le jour du jugement. Ce jour viendra. Dieu vous enverra brûler en enfer. »
Même après avoir annoncé le 1er mai que je ne me représenterai pas — précisément en raison du harcèlement, de la misogynie, des injures et des menaces explicites de violence que j'ai reçues —, j'ai été inondée de dizaines de messages haineux. En voici quelques exemples: « Démisionne maintenant, stupide vache. N'attends pas et ne va pas te cacher, salope attardée!!! » « Bon débarras, connasse. Le monde de la politique, comme vous l'appelez, est toxique parce que votre parti est corrompu. Il est un tas de merde dégoûtant. Si vous, les enfoirées, aviez gouverné comme des êtres humains, le pays ne détesterait pas les salopes corrompues et fascistes que vous êtes. Tu dois faire mieux, espèce de conne. »
Enfin, voici un dernier exemple: « Tu es une députée et une Canadienne pitoyable. Que ta vie soit remplie de stress et d'anxiété. Que tu ne connaisses jamais la paix durant ta misérable vie. Que tu vives et meures seule dans un endroit sombre et froid. Que tu brûles en enfer, connasse. »
Le ton et la teneur du discours public se sont tellement détériorés que je crains que la population perde confiance envers les institutions publiques; et à la détérioration du discours public s'ajoutent la désinformation et les mensonges propagés par des politiciens dans les médias sociaux. Je m'inquiète des conséquences de tout cela sur notre démocratie.
Les députés doivent comprendre qu'ils alimentent et exacerbent le harcèlement, les injures et les menaces à l'endroit d'autres députés lorsqu'ils répandent de fausses informations et des mensonges et qu'ils se livrent à des attaques personnelles contre d'autres députés. C'est ce que j'ai observé personnellement, à l'instar de bon nombre de mes collègues.
Par exemple, en 2018, la députée conservatrice s'est servie de son budget de la Chambre des communes, donc de l'argent des contribuables, pour envoyer à tous les ménages de ma circonscription un dépliant sur lequel on pouvait lire « La députée Pam Damoff ne défend pas les victimes de viol et de traite de personnes à des fins sexuelles » et « Pam Damoff choisit de soutenir l'État islamique plutôt que les femmes et les filles ». La première phrase se lit comme suit: « Le gouvernement actuel est déterminé à accueillir des terroristes de l'État islamique au Canada. »
Nous entendons souvent des députés conservateurs utiliser avec insouciance et sans fondement des termes comme « corrompu » et « trahison » au Parlement et dans leurs publications dans les médias sociaux. Les députés conservateurs , Michael Cooper, et ont accusé des membres du comité de l'éthique d'être corrompus, et M. Barrett m'a accusée personnellement d'avoir participé à une opération de camouflage. Par la suite, des députés conservateurs ont publié nos adresses électroniques dans les médias sociaux et ont encouragé le public à nous contacter.
À cause de cela, mon personnel a dû créer un sous-dossier pour les messages misogynes dans ma boîte de réception. Je vais citer certains des messages que j'ai reçus: « Tu es une foutue menteuse minable [...] J'en ai assez de toi, espèce d'ordure [...] Comment peux‑tu dormir la nuit [...] Je sais que ton ex‑mari dort bien maintenant qu'il s'est débarrassé de toi [...] Démissionne comme députée et représentante d'Oakville [...] Tu me dégoûtes [...] Quel beau legs. » « Vous êtes des perdantes pathétiques, vous méritez la prison. Vous êtes des putains de salopes. » « Hé, foutue traîtresse [...] quitte le Canada, avant qu'on décide de s'occuper de toi comme il se doit. »
Soit dit en passant, ce sont tous des messages différents. Ce n'est pas un seul et même message.
Il y avait aussi ceci: « Tu es une ordure qui agit en traîtresse. Tu devrais être jetée en prison pour avoir appuyé la destruction de notre pays et de notre population. Tu es une criminelle. » Un autre message disait ceci: « Ton bien-aimé patron comparaîtra devant le tribunal de Nuremberg, comme vous devriez tous le faire. Vous êtes des êtres humains pathétiques et satanistes, et vous êtes tous finis. » Puis le dernier message disait: « Tu es une pute arrogante, élitiste et détraquée. Tu vas pourrir dans une prison à sécurité maximale quand la révolution viendra. Je te suggère de te retirer pendant qu'il est encore temps, TRAÎTRESSE! »
Même si je suis la cible du lobby des armes à feu depuis de nombreuses années et que je reçois beaucoup plus que des « gazouillis méchants », comme il les appelle, je veux donner un autre exemple démontrant que les commentaires d'un député ont été la cause directe d'une avalanche de messages haineux publiés dans les médias sociaux, transmis par courriel et livrés au téléphone. Au cours de l'étude article par article du projet de loi , le député conservateur Blaine Calkins a publié une vidéo dans laquelle il m'accuse d'assimiler les chasseurs au tireur de Danforth, ce que je n'ai absolument pas fait. À la suite de la diffusion de sa vidéo, j'ai immédiatement reçu des messages contenant des propos menaçants et agressifs, tels que ceux‑ci: « Tu es une pauvre conne. Le gouvernement doit justifier le fait de retirer à une personne ce qui lui appartient en droit, de lui interdire de le conserver, et la peur n'est pas une justification. Je prie pour que tu meures d'une mort horrible et douloureuse, et ta famille aussi, parce que vous et ta génétique ne valez pas cher et vous devez disparaître de la surface de la Terre. » « Allez, mon Dieu, répondez à ma prière. Elle est une putain de menteuse et un gaspillage de peau humaine. » Un autre message disait ceci: « À l'époque médiévale, cela aurait été considéré comme de la trahison, on t'aurait coupé la tête et on l'aurait suspendue. » Un autre disait: « Eh bien, quelle libérale menteuse de premier ordre. Allez vous faire foutre, Pam, de préférence avec fusil d'assaut semi-automatique en guise de godemiché. » Ce message était accompagné d'une photo. En voici un dernier: « Même si tu me suçais, je ne voterais pas pour toi. »
Même si je fais part à la police des menaces explicites de violence que je reçois, elle dit souvent qu'elles ne sont pas suffisamment graves pour qu'elle fasse quoi que ce soit. Je sais que le commissaire de la GRC a dit récemment que nous devrions envisager de fournir à la police des outils supplémentaires par le biais de la législation pour lui permettre de répondre adéquatement aux menaces à l'égard des politiciens. Je crois qu'il témoignera devant le Comité, et j'ai hâte d'entendre son témoignage.
Je suis d'accord avec ceux qui soutiennent qu'une bonne dose de partisanerie et de critiques à l'égard du gouvernement est fondamentale et a toujours été à la base du Parlement et d'une saine démocratie, mais ce que j'ai vécu, et ce que beaucoup d'autres parlementaires et membres de notre personnel ont vécu, ne constitue pas une critique légitime de la politique gouvernementale ni un débat d'idées constructif. Je suis profondément inquiète pour notre Parlement et notre démocratie si la situation perdure.
Bien qu'il puisse être difficile de contrôler les paroles et le comportement des autres, je crois que collectivement, en tant que parlementaires, nous avons la responsabilité de donner le ton et de donner l'exemple quant à la façon dont nous interagissons et discutons les uns avec les autres, et de nous élever au‑dessus des attaques personnelles et de l'hostilité.
À tout le moins, nous devons dénoncer les comportements inappropriés au sein de nos propres partis politiques, ainsi que le harcèlement et les injures de la part de députés à l'endroit d'autres députés. Je suis encouragée par le fait que des représentantes élues d’Halton ont récemment pris l'engagement public d'être solidaires et de demander à la police d'en faire davantage pour lutter contre les injures et les menaces à l'endroit des élus.
Les parlementaires sont appelés à faire leur travail avec civilité, compassion et respect: avec respect envers autrui, envers notre rôle, envers nos fonctions, envers le processus législatif et envers l'institution qu'est le Parlement ainsi que les Canadiens.
Je suis consciente des défis complexes auxquels nous sommes confrontés, des problèmes que nous devons surmonter et des divergences d'opinions que nous devons apaiser. Cependant, je crois que le Canada peut faire ressortir ce qu'il y a de meilleur en chacun de nous si, en tant que parlementaires, nous faisons notre part.
Encore une fois, je tiens à remercier le Comité de m'avoir donné l'occasion de comparaître aujourd'hui, et je serai heureuse de répondre aux questions.
Merci, monsieur le président.
:
Merci, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du Comité, de m'avoir invitée à comparaître aujourd'hui devant le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre pour parler de l'examen de la Politique de prévention de la violence et du harcèlement en milieu de travail à l'intention des députés.
Je m'excuse à l'avance si ma voix tremble aujourd'hui. Elle tremblera, mais je ne me tairai pas. Je ne me laisserai pas intimider. Je vais continuer de représenter mes électeurs du mieux que je peux.
Monsieur le président, je tiens d'abord à saluer la femme courageuse qui est assise à mes côtés comme témoin, la députée Pam Damoff, qui a tant fait pour mettre la question du harcèlement et des menaces à l'endroit des députés, en particulier les femmes, à l'avant-plan de la conversation qu'il est essentiel de tenir en ce moment. C'est une question importante parce qu'elle touche littéralement aux valeurs fondamentales de notre démocratie canadienne.
Pouvons-nous être en désaccord sans être désagréables? Allons-nous préserver ce à quoi ressemble la démocratie pour les générations futures?
Si nous ne sommes pas en mesure de mettre fin au harcèlement envers autrui au nom de la partisanerie politique, nous ne survivrons pas en tant que démocratie. La prochaine génération sera complètement désengagée, désintéressée et n'aura aucune confiance envers les institutions démocratiques. Je pense qu'il est essentiel que nous le reconnaissions.
Il y a deux semaines, une classe d'élèves de ma circonscription a assisté à la période des questions depuis la tribune. Lorsque je les ai rencontrés par après, la première chose qu'une des jeunes filles m'a demandée, c'est si les propos étaient toujours aussi violents. Elle m'a demandé comment je pouvais faire cela et pour quelles raisons je le faisais.
Je lui ai répondu que c'était parce que quelqu'un devait le faire. Nous devons nous assurer d'avoir des discussions positives et constructives entre nous, afin de pouvoir représenter et soutenir les Canadiens comme ils le méritent. Nous sommes tous élus, les 338 députés, dans nos circonscriptions par les gens qui y vivent. Nous les représentons.
Monsieur le président, je suis gênée par la façon dont notre comportement érode les valeurs que nous défendons. J'ai quelques exemples à vous donner aujourd'hui, monsieur le président.
Vous a‑t‑on déjà traité de raciste simplement parce que vous faisiez votre travail? Vous a‑t‑on déjà tout bonnement traité de terroriste, comme si on vous appelait par votre nom? Vous a‑t‑on déjà craché dessus?
Moi, oui.
Quelqu'un m'a déjà dit: « Je veux te prendre doucement avec une scie à chaîne ». Imaginez la violence de cette idée et vouloir l'exprimer publiquement. Comment les gens peuvent-ils penser qu'ils ont le droit de faire cela?
Le harcèlement n'a rien de nouveau pour moi. Je suis députée depuis neuf ans, et j'en fais l'objet depuis le premier jour.
Je vais mentionner quelques incidents où des députés se harcelaient entre eux, qui ont créé, pour moi en particulier, des situations qui mettent la vie en danger.
En 2017, j'ai déposé la motion M‑103 à la Chambre. Il s'agissait d'une motion visant à lutter dans notre pays contre tous les types de racisme et de discrimination systémiques fondés sur la religion, y compris l'islamophobie. C'était une tentative de jeter des ponts entre les communautés.
Malheureusement, une course à la direction du Parti conservateur était en cours à l'époque, et les candidats à la direction ont commencé, par le biais des médias d'extrême droite, à faire croire que je voulais imposer la charia au pays, et qu'il ne s'agissait pas d'une motion non contraignante, mais d'une première étape, à savoir un projet de loi. C'était tout à fait faux. Ce n'était pas vrai du tout et malicieux.
Des courriels à cet égard ont circulé dans tout le pays. Ils ont été utilisés pour recueillir des fonds pour les candidats à la direction du Parti conservateur.
Tout cela s'est produit parce que les députés conservateurs qui étaient candidats à la direction du parti estimaient qu'il s'agissait d'une façon de se faire de la publicité. La stratégie politique de l'agitation nuit à la façon dont nous nous comportons en tant que Canadiens et en tant que parlementaires. Nous devons penser d'abord et avant tout aux Canadiens.
Comme je l'ai dit, outre des propos violents, j'ai reçu des menaces de mort. Entre autres, un homme m'a invitée à me familiariser avec son fusil, un autre m'a dit qu'on allait me pendre, puis un autre a divulgué mon adresse dans une émission de radio et il a dit: « Allez la tuer. Je filmerais volontiers la scène si vous allez la tuer. »
Lorsque des députés s'attaquent entre eux dans les médias sociaux, lorsque la stratégie politique de l'agitation est mise en œuvre par les médias de droite, nous faisons indirectement ce que nous ne pouvons pas faire directement, selon les règles de la Chambre des communes. Nous nous intimidons les uns les autres pour faire de la politique partisane, et c'est tout à fait injuste envers les Canadiens. Nous nous mettons dans l'embarras devant les Canadiens. Nous pouvons faire tout le cinéma que nous voulons dans les médias sociaux, mais il reste que ces messages dans les médias sociaux, ou les lettres comme celles que ma collègue, la députée Pam Damoff, a reçues dans sa circonscription, constituent du harcèlement, et nous devons faire quelque chose à ce sujet.
Comme je l'ai dit, de nombreux députés conservateurs — pas tous —, y compris l'actuel , ont fait des choses semblables pour cibler des députés, les intimider, les harceler et les réduire au silence, et cela a contribué à semer la division dans des collectivités, maintenant plus que jamais, et ce, dans certaines collectivités plus que dans d'autres.
Il y a des conséquences réelles lorsque des députés décident de recueillir des fonds et de générer des clics en déshumanisant les autres par des insultes et des attaques, et je ne suis pas la seule cible. Pas plus tard que la semaine dernière, le sergent d'armes, qui a témoigné devant le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, nous a dit que les cas de harcèlement envers des députés, surtout en ligne, ont augmenté d'environ 700 à 800 %. Ce n'est pas nouveau, et cela ne devrait pas être banalisé.
Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité, il faut que les gens puissent critiquer légitimement leurs représentants élus, leurs politiques et leurs positions afin de faire avancer le discours démocratique productif dans notre pays. Il faut aussi que les députés puissent participer au discours, que l'opposition puisse faire son travail et que le gouvernement puisse faire le sien. Ce que nous observons, cependant, c'est que l'intimidation, le harcèlement, les menaces et la violence, auxquels s'ajoute la misogynie envers nous en tant que parlementaires, rendent les limites floues et nous empêchent de nous acquitter de nos responsabilités envers nos électeurs.
Le rapport du Comité sur la Politique de prévention du harcèlement et de la violence en milieu de travail à l'intention des députés doit faire état d'une distinction et d'une limite claires entre la critique légitime et le harcèlement pur et simple, en particulier entre les députés, et plus précisément envers les femmes, compte tenu de nos expériences uniques.
Permettez-moi de dire, monsieur le président, que les gens nous regardent. Les Canadiens nous regardent, et nous devons faire mieux. Nous devons nous assurer d'agir avec respect, car si nous ne nous respectons pas les uns les autres, comment pouvons-nous nous attendre à ce que les Canadiens se respectent les uns les autres? Comment pouvons-nous continuer de jeter des ponts entre nous, et comment pouvons-nous défendre une démocratie fondée sur le respect?
Merci.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Vous avez énormément de courage, chères collègues.
Avant de poser quelques questions, je vais me permettre de vous dire à quel point j'ai honte. Ce n'est pas la première fois que je le dis: j'ai honte de nous, moi y compris. J'ai l'impression que nous sommes en train de faire un examen de conscience. Certains ont les oreilles bouchées ou n'écoutent pas l'interprétation, mais j'espère que ça percole. Nous pourrions sortir tellement d'éléments.
Ce qui me rend tellement outrée — le mot est juste —, c'est que, même si la majorité des gens disent qu'ils ne peuvent pas tolérer la situation et qu'elle est inacceptable, elle a quand même cours à l'intérieur même de notre institution aujourd'hui. Comment se fait-il que nous acceptions de tolérer cette situation? Je m'explique. Notre examen de conscience consiste à nous demander au nom de quoi nous le faisons. Est-ce au nom du gain ou du pouvoir? La partisanerie a le dos large. Qu'est-ce que le respect?
Aujourd'hui, nous parlons de harcèlement. Nous avons entendu des mots qui illustrent le harcèlement. Je pense entre autres à nos interprètes, qui ont dû donner l'interprétation en français de mots totalement inacceptables. Il y a urgence d'agir, et je crois que l'ensemble de l'institution est très d'accord sur cette urgence. Cela étant dit, j'entends toujours des propos qui enveniment la situation et qui contribuent aux dommages collatéraux, alors que nous avons pourtant le droit de nous exprimer et d'être respectés.
Mesdames, je veux savoir ce que vous en pensez. Dire des mots qui ont une incidence sur les réseaux sociaux, c'est une chose, mais se faire menacer de mort est inacceptable.
Quels comportements constituent du harcèlement? Considère-t-on comme du harcèlement le fait de ne pas écouter la personne qui parle, et ce, régulièrement, de rouler des yeux lorsqu'elle parle, de sourire de façon méprisante, de se positionner de façon à provoquer ou à intimider cette personne, qui se trouve souvent à être une femme? Est-ce seulement moi qui vis ce genre d'expérience ou le vivez-vous également? Le harcèlement ne se manifeste pas nécessairement par des mots.
J'aimerais entendre vos commentaires sur le sujet.
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Merci, monsieur le président. Je vais être brève.
D'entrée de jeu, je vais prendre le temps de dire ce que j'ai à dire tranquillement. J'ose espérer que ce qui vient de se passer ici aujourd'hui, étant donné tout le courage, toute l'honnêteté et toute la franchise dont on a fait preuve, ne sera pas utilisé de manière néfaste pour donner lieu, dans une semaine, à une mobilisation partisane. Si tel est le cas, j'aurai compris que la situation est encore plus grave que je ne l'avais imaginé. J'espère que mes collègues liront les comptes rendus et que ceux qui sentent que le chapeau leur fait le porteront. Nous allons peut-être réussir à changer une petite chose aujourd'hui.
Je sais que, tantôt, j'ai peut-être mal formulé ma question. Essentiellement, je voulais savoir jusqu'où va le harcèlement, dans nos gestes et dans notre attitude. La conclusion à laquelle j'en viens aujourd'hui, c'est que l'heure est grave et qu'il y a urgence d'agir.
J'entends parler de la possibilité de former un sous-comité impartial. Certains vont faire du chemin en disant que cela reste partisan. S'il y a quelqu'un qui peut dire qu'il n'est pas en quête du pouvoir, effectivement, on pourra s'assurer d'avoir une neutralité, pour être exemplaire. Je pense que c'est un virage à 180 degrés que nous devons faire.
En terminant, j'ai une seule question pour ma collègue Mme Damoff.
Est-ce qu'on peut s'imaginer qu'un homme victime de harcèlement aurait pu faire ce que vous avez osé faire le 1er mai, devant l'incapacité de tout tolérer, c'est-à-dire donner sa démission?
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Je vous remercie de la question.
Je ne pense pas que le travail de notre personnel soit suffisamment reconnu. Personne dans cette salle ne pourrait faire le travail qu'il fait sans le soutien de son personnel.
J'ai envoyé mon exposé à une ancienne collaboratrice pour qu'elle le relise hier soir. Lorsqu'elle m'a répondu, elle m'a dit: « Merci de dire tout cela. J'ai ressenti de l'anxiété, même si je suis partie il y a un certain temps. »
C'était traumatisant, et c'est toujours traumatisant pour le personnel, surtout lorsque les appels téléphoniques au bureau de circonscription se répètent.
Je suis sûre que c'est la même chose à London.
Comme le disait Mme Khalid, à la lecture des courriels, je ne pense que ces personnes ont suffisamment de soutien. Je pense que la Chambre des communes a fait beaucoup de choses et je sais qu'elle est consciente du problème. Elle a organisé une formation sur le désamorçage pour le personnel afin qu'il dispose, je l'espère, des outils nécessaires pour calmer le jeu lorsqu'on reçoit de tels appels, mais c'est assez intimidant.
La plupart de nos employés sont des jeunes. C'est assez intimidant, surtout pour ceux qui sont en première ligne, dans la collectivité, d'être confronté à une telle situation à la porte du bureau ou au téléphone, parce que bien souvent, les personnes qui appellent le font à répétition. Elles gardent leur numéro de téléphone secret pour que l'on ne sache pas qui appelle.
J'ai dit à mon personnel de ne pas répondre aux appels téléphoniques lorsque l'indicatif régional n'est pas le nôtre, parce que ce sont souvent des appels injurieux et que, bien franchement, si quelqu'un vit dans un secteur dont l'indicatif régional est différent, ce n'est probablement pas un électeur de ma circonscription. Si c'en est un, il peut laisser un message.
Toutefois, je pense qu'on ne prête pas assez attention à notre personnel quant à ce qui se passe dans nos bureaux.
Je pense aussi que parfois, il est important de parler des politiques. Je pense que parfois, il y a des politiques qui font que les gens ont l'impression qu'on ne les écoute pas ou qu'ils sont invisibles. Je ne cherche pas à le justifier.
Écoutez, je suis dans la même situation. J'ai également porté plainte contre des personnes qui avaient menacé de me tuer. Or, pour revenir à ce que vous disiez, si les gens ont le sentiment que l'on ne les écoute pas, je pense que c'est un élément important de l'équation. Mme Rempel Garner en a beaucoup parlé et j'aimerais faire cette recommandation.
La chose la plus importante que l'on me dit, c'est que personne ne répond aux questions pendant la période de questions. Nous connaissons la pire situation d'insécurité alimentaire de l'histoire, nous avons des problèmes de logement, une crise de santé mentale, des taux de suicide en hausse et toutes ces choses. Je ne cherche pas à justifier le comportement haineux des gens, mais il y a toujours une raison pour laquelle quelqu'un fait ce qu'il fait.
À plus grande échelle, nous élevons nos enfants et nous leur disons « si tu ne peux pas dire cela à quelqu'un en personne, ne le dis pas en ligne », et dans nos recommandations, je pense qu'il est bon de revenir à l'aspect criminel de la question.
L'une des choses qui sont revenues souvent dans le cadre de mon travail est la Charte des droits des victimes. Beaucoup de gens pensent que les criminels ont plus de droits que les victimes dans notre pays. En 2020, le Bureau de l'ombudsman fédéral des victimes d'actes criminels a demandé un examen parlementaire de la Charte canadienne des droits des victimes en citant les quatre principaux problèmes à résoudre, mais cela n'a jamais été fait. Cela n'a jamais eu lieu.
Je suppose que ma question comporte deux volets. Qu'en pensez-vous? Devrait‑on en faire un examen? Suggérez-vous quelque chose de ce genre également?
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Chers collègues, nous allons reprendre nos travaux.
Je reconnais que nous avons dépassé le temps imparti. J'ai fait de mon mieux pour être juste envers tous les partis en ce qui concerne le temps de parole. Cela dit, je comprends qu'il peut être difficile, vu nos emplois du temps respectifs, de rester plus tard que prévu.
Ce que je propose, et je regarde dans la salle pour m'assurer que tout le monde est d'accord, c'est que nous fassions une série de questions complète, et ensuite nous verrons où nous en sommes, compte tenu des responsabilités des députés.
Bien entendu, il est toujours possible pour moi et certains membres du Comité de rester, tout en reconnaissant qu'il n'y aura pas de vote sur certaines procédures ou quoi que ce soit d'autre. Nous pourrons avoir un segment informel en poursuivant la réunion avec les témoins. Nous pourrons en discuter lorsque nous serons rendus là, mais je veux essayer de respecter l'emploi du temps de tout le monde.
Commençons. Sentez-vous libres de venir me parler maintenant pour me dire ce que vous voulez faire.
Sur ce, je souhaite la bienvenue au prochain groupe de témoins.
Nous accueillons Julie Lalonde, formatrice, et Sabreena Delhon, directrice générale du Centre Samara pour la démocratie.
Madame Lalonde, vous pourrez faire une déclaration préliminaire de cinq minutes, et ce sera ensuite le tour de Mme Delhon, qui aura elle aussi cinq minutes. Nous passerons ensuite aux questions.
Allez‑y, madame Lalonde.
Je suis ravie que le Centre Samara ait été ajouté à la liste. J'allais parler de son travail, qui est d'une importance critique.
Je vous remercie de l'invitation.
[Français]
Je m'appelle Julie S. Lalonde. Je travaille depuis plus de 20 ans pour mettre fin à la violence fondée sur le genre au Canada. J'ai travaillé directement avec des victimes et survivantes en tant qu'intervenante dans des centres de soutien. J'ai élaboré plusieurs politiques et procédures pour diverses organisations. De plus, je forme des milliers de Canadiens et de Canadiennes chaque année sur leurs responsabilités comme témoins pour créer des communautés de soutien. Je n'ai jamais fait partie du personnel de députés ni travaillé en politique de manière officielle, mais j'ai formé des députés, des employés et des stagiaires de tous les principaux partis politiques, à l'échelle provinciale et fédérale.
[Traduction]
J'aimerais vous parler aujourd'hui des préoccupations qui ont souvent été exprimées par le personnel et les stagiaires au fil des ans dans le cadre de nos formations.
La principale préoccupation concerne la définition des enjeux véritables. J'ai observé la réunion de mardi et j'étais présente ce matin, et je constate que la conversation se poursuit ici.
Si je vous disais: « La solution au harcèlement est orange », nous pourrions tous hocher la tête et dire « Parfait, cela semble être un plan formidable », et partir d'ici prêts à nous attaquer au problème. Or, le problème, c'est que la moitié d'entre vous penserait au fruit et l'autre moitié à la couleur, mais vous seriez tous convaincus d'être sur la bonne voie et d'être sur la même voie.
En lisant la politique et le code de conduite et en écoutant les délibérations des réunions précédentes du Comité, comme je l'ai dit, il semble y avoir beaucoup de confusion au sujet de ce qui constitue exactement du harcèlement et de ce qu'il faut faire si cela vous arrive ou si cela arrive à quelqu'un avec qui vous travaillez. Cela m'amène à la deuxième préoccupation que j'entends souvent, surtout de la part des membres du personnel et des stagiaires, qui se demandent ce qu'il faut faire.
Il existe encore beaucoup de confusion quant à savoir à qui exactement on doit signaler le harcèlement, à quoi ressemble la confidentialité dans ce processus, à quoi ressemble la reddition de comptes dans ce processus, etc. La connaissance est le pouvoir, et nous ne pouvons pas nous attendre à ce que les gens se manifestent en tant que victimes de harcèlement ou en tant que témoins, s'ils ne savent pas ce qui se passe par la suite. Par ailleurs, je soulignerai plusieurs fois l'importance des témoins aujourd'hui.
La Chambre des communes a besoin de ce qu'on appelle une politique « chaque porte à laquelle on cogne est la bonne », qui encourage les gens à communiquer avec toute personne en qui ils ont confiance pour savoir comment gérer un sentiment d'insécurité ou une préoccupation.
Enfin, j'ai entendu beaucoup de frustration de la part des députés, employés et stagiaires parce qu'on ne reconnaît toujours pas les réalités du XXI e siècle, et cela a été mentionné à plusieurs reprises. Ce qui arrive en ligne est important. Si vous deviez faire des opérations bancaires à un endroit et il est impossible de les faire en ligne, vous seriez furieux. Il est naïf de prétendre que ce qui se passe sur Internet n'est pas réel en 2024.
Les attaques collectives coordonnées, qu'elles soient menées par des robots ou des particuliers, ont une incidence sur la capacité d'une personne à faire son travail. Les personnes qui sont en première ligne de la gestion des médias sociaux, comme on l'a mentionné plus tôt aujourd'hui, celles qui répondent aux courriels et aux appels téléphoniques et qui sont derrière vos comptes Twitter et Facebook, doivent être protégées et soutenues dans leurs rôles difficiles.
Le travail des députés et de leurs employés exige également une grande mobilité et varie souvent d'un jour à l'autre. Il faut donc que les politiques et procédures précisent que tout harcèlement est inacceptable, qu'il se produise à la Chambre, au bureau ou lors d'un barbecue communautaire. Nous vivons à une époque de plus en plus instable, et cela doit se refléter dans vos politiques et dans votre travail ici.
Enfin, je suis heureuse de parler des pratiques exemplaires en matière de prévention de la violence et de changement de culture, mon domaine d'expertise, mais surtout, je tiens à souligner l'urgence de bien faire les choses. Nous avons tous droit à un milieu de travail sûr et équitable, mais les députés donnent aussi l'exemple aux Canadiens. Le fait de bien faire les choses ici envoie le message que la civilité est importante, que nous pouvons être en désaccord les uns avec les autres sans nous livrer à des attaques personnelles et que les conflits peuvent être résolus de manière à ce que tout le monde puisse avancer. Créer une Chambre des communes plus sûre signifie créer une Chambre des communes plus démocratique. Nous serons alors tous gagnants.
[Français]
Merci.
:
Merci, monsieur le président. C'est un plaisir de m'adresser au Comité aujourd'hui.
Je m'appelle Sabreena Delhon et je suis la directrice générale du Centre Samara pour la démocratie, un organisme de bienfaisance non partisan qui se consacre à rendre la culture démocratique du Canada plus accessible, plus réceptive et plus inclusive.
Nous étudions l'expérience vécue par les élus depuis plus de 15 ans dans le cadre de notre projet d'entrevues de départ des députés, qui a donné lieu à plusieurs publications et deux balados. Ce matériel est une ressource clé pour les politiciens en herbe. Il est utilisé par les éducateurs des écoles secondaires et postsecondaires de tout le pays pour enseigner la citoyenneté active, et il a reçu une grande couverture médiatique. Plus de 160 entrevues de départ ont été menées auprès d'anciens députés depuis 2008. Aujourd'hui, je m'appuierai sur notre série d'entrevues effectuées auprès de la plus récente cohorte pour orienter les changements potentiels à la politique de prévention du harcèlement et de la violence en milieu de travail.
Au cours des entrevues, d'anciens députés de tous les partis ont dit craindre que leurs conditions de travail créent des obstacles importants à la création d'un Parlement représentatif de la société canadienne. Ils demandent une modernisation sous la forme d'une plus grande souplesse, de politiques plus rigoureuses en matière de ressources humaines et de protocoles formels pour prévenir le harcèlement. Les personnes que nous avons interrogées estiment que ces changements sont essentiels pour attirer et retenir les parlementaires. C'était le leitmotiv de ce groupe, plus que pour les cohortes précédentes. Les députés ont fait part à maintes reprises de leurs préoccupations selon lesquelles le fait de ne pas améliorer le Parlement en tant que lieu de travail minerait la confiance des Canadiens à l'égard de cette institution.
La voie à suivre ne passe pas uniquement par les politiques, mais par la création d'une culture saine qui peut renverser la vapeur de la tendance, à savoir la normalisation d'un environnement de plus en plus hostile à la fois en et hors ligne.
Pour ce faire, il faut se poser les questions suivantes. Comment récompenser un bon comportement? Comment incite‑t‑on les partis à contribuer à la civilité et à la collégialité? Quelles autres limites saines peut-on mettre en place pour favoriser des conditions de travail plus productives?
Je vais maintenant passer à des commentaires précis sur les conditions de travail des anciens députés. Les commentaires racistes ont été identifiés par les personnes interviewées comme un risque important lorsqu'elles siégeaient à la Chambre des communes. Ce problème a été aggravé par l'absence de mécanismes permettant de réagir, ce qui a créé un sentiment d'aliénation.
En ce qui concerne l'équité entre les sexes, le harcèlement des jeunes députées a été soulevé comme une préoccupation par un certain nombre de nos personnes interviewées, hommes et femmes. Certaines personnes interviewées ont parlé des effets négatifs du harcèlement ou de l'intimidation pendant la période des questions, qui étaient liés au harcèlement plus général et au musellement des femmes et des groupes sous-représentés dans l'arène politique.
L'effet du harcèlement en ligne des députés était aussi un thème récurrent. Les personnes interviewées nous ont expliqué à quel point le harcèlement avait eu des répercussions sur leur santé mentale et sur leur famille. Il s'agit d'une préoccupation particulière pour les personnes issues de communautés minoritaires qui sont la cible d'un volume élevé de violences en ligne.
Récemment, nous avons vu de nombreux politiciens de tous les ordres de gouvernement quitter l'arène politique en raison de la haine et du harcèlement qui ont fini par pourrir leur travail. Il ne s'agit pas seulement d'avoir la couenne dure ou d'être plus résilient. Lors de nos entrevues, les femmes à qui nous avons parlé ont souvent mentionné avoir reçu des menaces de mort et avoir eu de la difficulté à obtenir la sécurité dont elles avaient besoin.
Si des conditions de travail plus sécuritaires ne sont pas mises en place, les dirigeants dont nous avons besoin, les dirigeants qui reflètent la diversité des collectivités du Canada, ne resteront pas, ou ils cesseront tout simplement de se manifester. Le contexte que j'ai décrit ici est lourd de conséquences pour le personnel et a un effet paralysant sur la mobilisation du public. On éloigne les gens de l'engagement démocratique au lieu de les y attirer.
Aucune des personnes interviewées ne regrette d'avoir consacré des années au service public, et elles partagent leurs histoires avec nous pour aider à faire évoluer la vie au Parlement. En cette période marquée par le recul de la démocratie à l'échelle mondiale, il n'a jamais été aussi urgent d'établir des conditions saines d'engagement civique.
Nous sommes prêts à travailler en partenariat pour favoriser un milieu de travail plus sûr et plus inclusif, si le Comité estime que nous avons un rôle à jouer.
Merci.