:
Madame la présidente, mesdames et messieurs les membres du Comité, nous sauterons les présentations, puisque la présidente s'en est chargée.
Je tiens à souligner qu'au cours des dernières années, le sous-commissaire Flynn a été responsable de la plupart de nos dossiers d'ingérence étrangère. Nous avons donc une mine de connaissances, et j'espère que nous pourrons en faire profiter tous les membres du Comité.
Comme vous le savez, l'ingérence étrangère constitue une menace complexe pour la sécurité du Canada et des Canadiens. La GRC utilise activement tous les outils à sa disposition pour lutter contre l'ingérence étrangère. Elle travaille en étroite collaboration avec ses partenaires nationaux et internationaux pour adopter une approche multidimensionnelle et partager autant d'informations que possible.
[Français]
Je reviendrai plus en détail, dans une minute, à la manière dont nous nous attaquons à l'ingérence étrangère, mais je vous assure que nous faisons tout ce qui est en notre pouvoir pour assurer la sécurité des Canadiens et des Canadiennes.
L'ingérence étrangère peut impliquer différents États tels que la République populaire de Chine, la Fédération de Russie et la République islamique d'Iran, entre autres, qui s'en prennent au Canada, à ses institutions, à sa société et à ses citoyens.
[Traduction]
Ces activités sont entreprises pour promouvoir les intérêts stratégiques d'un État et les méthodes utilisées peuvent inclure des menaces de violence, la coercition ou la surveillance du public, notamment de groupes culturellement et linguistiquement divers, de défenseurs des droits de la personne, de dissidents politiques, de partisans de la démocratie et de politiciens à tous les niveaux, y compris de parlementaires.
J'aborderai deux questions aujourd'hui. Je parlerai du rôle de la GRC dans sa réaction aux menaces liées à l'ingérence étrangère sur le plan de la sécurité publique, notamment pour les membres du public et les députés, ainsi que de l'enquête menée et de la façon dont les députés peuvent identifier et signaler à la GRC les activités liées à l'ingérence étrangère.
[Français]
Tout d'abord, l'intimidation des députés est préoccupante, car elle constitue une menace à la sécurité des dirigeants élus et à notre démocratie. Des acteurs étrangers tentent d'ébranler notre souveraineté et d'exercer le pouvoir d'États étrangers à l'échelle transnationale. Je tiens à assurer aux membres de ce comité que nous sommes conscients de ces menaces, que nous réagissons et que nous luttons contre l'ingérence étrangère.
[Traduction]
La GRC a ouvert une enquête sur les allégations d'intimidation visant et a contacté le commissaire aux élections fédérales au sujet d'autres allégations qui ont été révélées et qui relèvent de son mandat, et elle a offert son aide.
Dans le cadre de l'approche du gouvernement du Canada, la GRC dispose d'un certain nombre d'outils pour lutter contre l'ingérence étrangère. Les équipes d'enquêteurs de la GRC peuvent s'appuyer sur des dispositions spécifiques du Code criminel pour enquêter sur des menaces potentielles de violence, de harcèlement et d'intimidation impliquant un acteur étatique. Ces dispositions concernent le bris de confiance, l'intimidation, le harcèlement criminel, et les menaces ou violences influencées par l'étranger qui relèvent de la Loi sur la protection de l'information.
Nous utilisons les connaissances acquises grâce à nos renseignements criminels, ainsi que notre collaboration avec nos partenaires nationaux et internationaux en matière d'application de la loi, de sécurité et de renseignement, pour nous adapter aux méthodes criminelles utilisées par les acteurs étrangers.
[Français]
La GRC travaille en étroite collaboration avec le Service canadien du renseignement de sécurité, le SCRS, dans le cadre de notre accord de coopération. Nous avons entrepris d'assurer l'efficacité de ce partenariat malgré certains défis auxquels nous sommes toujours confrontés en ce qui concerne l'utilisation des renseignements des partenaires pour faire avancer les enquêtes criminelles.
Cela dit, beaucoup de travail a été accompli à la suite de l'Examen relatif à l'amélioration opérationnelle, mené en 2018, qui portait sur les défis liés à l'utilisation des renseignements comme éléments de preuve. Sur les 76 recommandations, 18 doivent encore être pleinement mises en œuvre afin de faciliter l'utilisation complète des renseignements pour poursuivre les affaires criminelles.
[Traduction]
Il est important de souligner notre coopération avec la police locale, ainsi qu'avec nos partenaires nationaux et internationaux en matière d'application de la loi, de sécurité et de renseignement, afin de lutter contre les activités d'ingérence étrangère. J'ai récemment participé à une réunion du groupe d'application de la loi du Groupe des cinq en Australie et l'ingérence étrangère a été l'un des principaux thèmes de nos discussions.
Sur ce, je vais céder le micro. M. Flynn et moi sommes prêts à répondre aux questions concernant l'ingérence étrangère.
Merci.
:
Merci beaucoup, madame la présidente. Par votre entremise, j'aimerais remercier les témoins d'être parmi nous aujourd'hui.
Je vous dirai franchement, madame la présidente, qu'il me sera difficile de suivre Mme Blaney, parce qu'elle a déjà soulevé certaines des questions que j'allais poser. Je suis heureuse qu'elle ait obtenu des réponses.
J'aimerais poser à M. Berthold quelques questions qui compléteront celles de ma collègue. Il a mentionné que la GRC n'était pas au courant, que la conseillère à la sécurité nationale et au renseignement n'était pas au courant, que le n'était pas au courant et que le ministre de la Sécurité publique n'était pas au courant de la menace qui pesait sur Michael Chong. Son cas est l'objet de la réunion d'aujourd'hui, la question de privilège concernant la campagne d'intimidation envers lui.
Cela ne renforce‑t‑il pas les conclusions du rapporteur spécial, M. Johnston, qui a formulé une recommandation au sujet de la gouvernance et de la communication des renseignements ainsi que des problèmes liés à la circulation de ces renseignements?
Vous n'étiez pas au courant des détails de ces menaces, n'est‑ce pas? Et si tel est le cas, que suggérez-vous que nous améliorions pour que vous soyez mis au courant? Le SCRS était au courant, mais vous ne l'étiez pas.
Quelles améliorations apporteriez-vous au processus pour que toute menace ou intimidation à l'endroit d'un député en poste soit portée à votre attention et, par conséquent, que tous ceux qui ont besoin de le savoir soient mis au courant?
Sur ce, messieurs le commissaire et le sous-commissaire, au nom des membres du Comité de la procédure, je tiens à vous remercier tous les deux pour cette conversation très honnête.
Je pense que les commentaires que vous venez de faire, monsieur le sous-commissaire, sont tout à fait exacts. Nous ne voulons pas nous contenter de réagir, mais il arrive des moments où nous devons être honnêtes quant à la façon dont nous, les législateurs, pouvons aider nos organismes et organisations à faire le travail qu'ils doivent faire, parce que personne d'entre nous n'est seul dans cette situation, et lorsqu'il s'agit de nos institutions démocratiques, chacun d'entre nous a une responsabilité.
Je sais que c'est une question difficile que vous a posée M. Fergus, mais à tout moment, si vous avez l'occasion de nous adresser des suggestions quant à ce que nous pourrions faire pour vous permettre d'accomplir le travail que nous vous confions et que nous avons besoin que vous fassiez, nous serions heureux de les recevoir. Je ne pense pas que ce soit lié à ce que vous ne faites pas ou ce que vous n'avez pas fait. Je pense que cela témoigne de notre volonté de renforcer nos institutions, nous tous ensemble, parce que je pense qu'en tant que Canadiens, nous avons cette responsabilité.
Je pense que nos droits et libertés s'accompagnent de responsabilités, et les connaissances que vous avez, je sais que je ne les aurais jamais eues, et je sais que bon nombre d'entre nous ne les ont pas, mais il y a des gens qui ont servi. Si quelque chose vous vient à l'esprit, veuillez en parler à vos équipes et nous le faire savoir. Je crois que la plupart des gens prennent cette question très au sérieux, et nous voulons nous assurer de jeter des bases plus solides pour l'avenir.
Je vous remercie de votre temps et de votre attention. Je tiens à vous remercier de votre service. Je vous souhaite une très bonne fin de journée, et nous avons hâte de vous revoir. Merci. Portez-vous bien et soyez prudents.
La séance est suspendue. Nous allons nous préparer pour notre prochain groupe de témoins.
:
Merci, madame la présidente.
Je salue les membres du Comité.
Je vous remercie de m'avoir invité ce matin.
L'ingérence étrangère est une question importante qui continue d'être au cœur de notre programme national et mérite notre attention constante.
[Traduction]
Madame la présidente, je sais qu'au moins une partie de la raison pour laquelle vous m'avez invité ici aujourd'hui, c'est que j'ai été conseiller intérimaire à la sécurité nationale et au renseignement du début juillet 2021 au début janvier 2022.
C'est bien sûr au cours de cette période qu'un rapport du SCRS sur l'ingérence étrangère de la Chine a été produit et diffusé, le 20 juillet 2021. C'est un rapport qui a suscité une vive controverse depuis la publication de ses principaux éléments dans le Globe and Mail le 1er mai dernier.
Les dossiers du Bureau du Conseil privé montrent que le rapport en question était dans mon dossier de lecture du 17 août 2021. Je tiens à préciser que je ne me souviens pas de l'avoir reçu ou de l'avoir lu à ce moment‑là. Comme Jody Thomas, j'étais, à l'époque, entièrement occupé par l'évacuation de l'Afghanistan, car Kaboul venait de tomber deux jours plus tôt.
Je crois avoir lu le rapport lorsque la poussière de l'Afghanistan est retombée parce qu'il a suffisamment suscité mon intérêt pour que je commande un document de suivi à un groupe différent au sein de notre communauté du renseignement afin d'obtenir le portrait le plus complet possible de l'ingérence étrangère de la Chine au Canada. Je me ferai un plaisir de revenir sur ce point si cela intéresse les membres du Comité.
Il y a deux aspects importants du rapport du 20 juillet 2021 du SCRS qui semblent avoir été largement mal compris.
Premièrement, ce rapport n'a jamais été conçu pour inciter les lecteurs à agir, que ce soit au sujet du ciblage des députés ou de tout autre exemple d'ingérence étrangère qu'il mentionne. Dans ses propres mots, tels qu'ils ont été publiés dans le Globe, le rapport visait à établir « une base de référence pour comprendre l'intention, les motifs et la portée de l'ingérence étrangère de Pékin au Canada ». Ce n'était pas une note incitant à l'action. C'était une note d'information.
Les agences de renseignement du Canada et d'ailleurs produisent une gamme de produits pour les consommateurs. Ces produits sont de courts rapports contenant des fragments d'information, parfois provenant d'une seule source, qui ont tendance à être concis et opportuns, ainsi que des évaluations périodiques plus longues qui reposent souvent sur des renseignements antérieurs et qui sont conçues pour approfondir la compréhension de questions complexes. C'est comme la différence entre le genre de nouvelles de dernière heure qui paraissent à la une du Globe and Mail et les rapports fouillés qui paraissent souvent dans les pages du milieu du numéro du week-end.
Le rapport de juillet 2021 du SCRS était très fouillé. Il n'avait pas pour but d'inciter qui que ce soit à agir, que ce soit moi à titre de CSNR intérimaire, ou qui que ce soit d'autre. Ce n'est certainement pas quelque chose dont je me serais empressé d'aller parler au .
Fait important, comme l'a mentionné le Globe, et l'a répété Jody Thomas, le rapport ne nommait pas ni aucun autre député. En effet, il aurait été très inhabituel que ce type de rapport entre dans ce genre de détails.
Le deuxième aspect clé du rapport de juillet 2021 qui semble avoir été largement mal compris, c'est que quiconque lit un tel rapport aurait pu présumer sans crainte de se tromper que toute mesure nécessaire sur l'un ou l'autre des points précis soulevés avait déjà été prise. En effet, c'était le cas pour la mention dans le rapport des actions de la Chine contre des députés canadiens.
Je rappelle au Comité... Comme l'a rapporté le Globe, le ciblage de députés canadiens par la Chine était lié à une motion parlementaire de février 2021, parrainée par , condamnant l'oppression des Ouïghours par Pékin et assimilant cette oppression à un génocide.
Vous vous souviendrez qu'après la motion et les sanctions subséquentes que le Canada a imposées plusieurs semaines plus tard à des personnes et à des entités en Chine, la Chine a réagi en sanctionnant et tous les membres du Sous-comité des droits internationaux de la personne du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international.
C'est dans ce contexte, comme le montre le rapport de David Johnston, que la Chine a établi des « profils » et des « mesures envisagées » contre Michael Chong et d'autres députés. C'est en réponse à cette activité chinoise qu'en mai 2021, le SCRS a rédigé la note de gestion des enjeux, mentionnée dans le rapport de David Johnston, à l'intention du ministre de la Sécurité publique.
Si vous lisez la page 31 du rapport Johnston, vous verrez qu'il ne s'agissait pas d'une note demandant une décision du ministre. Il s'agissait d'une note d'information indiquant au ministre de l'époque que le SCRS comptait donner des breffages sur la sécurité défensive aux députés que, selon les renseignements, la Chine avait l'intention de cibler.
Je sais qu'il y a eu des questions sur la façon dont cette note de gestion des enjeux a été envoyée, qui l'a reçue et ainsi de suite. Je sais que vous avez déjà posé la question au . Je sais que vous allez poser ces questions à mon collègue, David Vigneault, lorsqu'il comparaîtra devant vous ce soir. Mais le tableau d'ensemble est le suivant: des renseignements ont fait surface au printemps, à l'époque de la motion sur les Ouïghours, selon lesquels le gouvernement chinois cherchait de l'information sur des parlementaires et sur M. Chong et ses proches.
Ces renseignements ont été utilisés, en ce sens qu'ils ont mené à une note d'information à l'intention du ministre de la Sécurité publique, puis, en juin 2021, à un breffage sur la sécurité défensive à l'intention de M. Chong et d'un autre député. Tout cela figure à la page 31 du rapport de M. Johnston.
Madame la présidente, certains pourraient trouver que tout cela a pris trop de temps. On a déjà fait valoir que si le ministre de la Sécurité publique de l'époque n'était pas au courant des renseignements concernant M. Chong et d'autres députés, il y avait manifestement des lacunes. Mais je dirais que le système a fonctionné conformément aux protocoles qui étaient en place en 2021. Fait important, comme vous le savez, le système a été modifié. La nouvelle directive ministérielle émise le 16 mai dernier signifie qu'à l'avenir, toute information reçue concernant des députés particuliers sera communiquée aux ministres.
Pour en revenir à mon point de départ, madame la présidente, tout cela pour dire qu'à mon avis, l'attention centrée sur le rapport de 2021 du SCRS — la personne qui était alors le conseiller à la sécurité nationale et au renseignement, qui d'autre avait lu le rapport, s'il était tombé dans un trou noir — a été mal dirigée. Les mesures prises par les autorités compétentes à l'égard du ciblage des députés l'ont été avant même la publication de ce rapport.
Avant de terminer, madame la présidente, permettez-moi de faire deux dernières observations. Tout d'abord, on a beaucoup parlé du terme « cible » dans le sens de « cible de Pékin ». Je n'ai pas l'intention de minimiser un seul instant à quel point il a dû être déstabilisant pour M. Chong et les autres députés d'apprendre que la Chine avait établi des profils sur eux et s'apprêtait peut-être à prendre des mesures, y compris contre les membres de leur famille vivant à l'étranger. En même temps, comme Jody Thomas, Wesley Wark, Thomas Juneau et d'autres l'ont déjà dit, il n'y a rien de fondamentalement mauvais à ce que des gouvernements étrangers parlent de députés ou de qui que ce soit d'autre dans la société canadienne. Les membres du Comité doivent savoir que toutes les ambassades, y compris les ambassades canadiennes dans le monde, créent des cartes d'influence qui répertorient les personnes par l'entremise desquelles elles ont l'intention de poursuivre des objectifs nationaux. L'important est de savoir si l'activité en question est clandestine, trompeuse ou menaçante pour une personne ou une institution. Comme des témoins précédents l'ont dit, l'intention et la capacité sont essentielles.
Aux fins du compte rendu, bien que les gouvernements qui ont des valeurs différentes des nôtres n'apprécient pas toujours les activités du Canada à l'étranger, les diplomates canadiens ne font pas d'ingérence à l'étranger. Tout ce qu'ils font est transparent et officiel.
Cela m'amène à mon deuxième et dernier point, madame la présidente. Bien que nous nous soyons concentrés récemment, et à juste titre, sur les députés, dans le cas de la Chine, bon nombre des Canadiens figurant sur des listes, que vous vouliez appeler ces personnes des « cibles » ou des éléments de « cartes d'influence » plus vastes, sont d'origine ethnique chinoise. Ces membres de la diaspora sont, à mon avis, les populations les plus vulnérables en ce qui concerne l'ingérence de la Chine au Canada. Ce sont des citoyens canadiens et des résidents permanents. Ils méritent les mêmes protections que tous les autres Canadiens.
En ce qui concerne l'ingérence étrangère, je considère qu'il s'agit de la plus grande menace à long terme. Nous devons en savoir davantage sur l'ingérence étrangère continue dans ces communautés, sur la forme qu'elle prend et sur la façon dont elle peut être combattue.
Les audiences publiques avec ces communautés devaient être incluses dans la deuxième partie du processus dirigé par David Johnston, et j'espère que l'importance de cet aspect ne se perdra pas dans le processus qui sera adopté à l'avenir.
[Français]
Merci beaucoup, madame la présidente.
:
Merci beaucoup, madame la présidente.
Monsieur Morrison, par votre entremise, madame la présidente, je suis absolument abasourdi et, franchement, troublé par votre témoignage et par votre refus singulier d'accepter la responsabilité, en tant que conseiller de la sécurité nationale et du renseignement auprès du premier ministre, de ce qui équivaut à un échec colossal, pour le dire charitablement.
Vous avez cité la page 31 du rapport de M. Johnston, où l'on dit qu'une note de gestion d'enjeux, signalant que avait été ciblé par Pékin, avait été envoyée au ministre de la Sécurité publique, sauf que le ministre de la Sécurité publique n'avait pas reçu cette note, pas plus que son sous-ministre ou son chef de cabinet.
En fait, M. Johnston, à la page 32 de son rapport, que j'espère que vous avez pris la peine de lire, a dit que c'était l'exemple le plus marquant de la mauvaise circulation de l'information. Vous avez dit dans votre témoignage que le système fonctionnait correctement.
Comment pouvez-vous affirmer une telle chose?
:
Merci beaucoup, madame la présidente.
J'aimerais non seulement vous remercier, mais aussi vous dire que je me sens comme dans Les 12 travaux d’Astérix, comme si la situation sera enfin limpide seulement lorsque nous aurons enfin obtenu toutes les pièces du casse-tête et entendu tous les témoignages.
Ainsi, nous constatons que ce que nous sommes en train de faire est essentiel. Nous sommes des parlementaires, et non des experts. Cependant, nous sommes devant le public, qui constate présentement que nous sommes en train de faire notre ménage de printemps, lequel aurait dû être fait il y a 20 ans.
J'ai une foule de questions, et il est important pour moi de les poser, parce que je ne suis vraiment pas rassurée, non pas par l'expertise des gens, mais à cause des failles dans les communications. Si ce n'avait été de ces failles, l'alarme aurait sonné. Des noms seraient sortis. Des personnes auraient été au courant. Quand un premier ministre potentiel n'est même pas mis au courant de ce qui est en train de lui arriver, c'est grave.
Actuellement, nous sommes en train de constater qu'il y a plusieurs chaises, mais qu'elles comportent toutes de grandes fêlures. Nous allons donc être constructifs, aujourd'hui.
Je comprends que le témoin, que je salue en passant, a une vaste expérience, tant à l'ONU, au SCRS que comme sous-ministre. Toutefois, nous avons urgemment besoin de ce cri du cœur qui nous aidera vraiment à faire la lumière.
Si nous demandons aux gens s'ils ont vraiment confiance en notre démocratie, ils répondront probablement que, si on les informe des nouveaux moyens que nous allons prendre, ils vont y croire.
J'aimerais entendre vos commentaires à cet égard et j'aurai ensuite quelques autres questions.
Vous avez une très grande d'expertise et vous collaborez maintenant avec le SCRS, comme sous-ministre.
Je vous cède la parole.
:
Je remercie la députée d'avoir soulevé toutes ces questions.
[Traduction]
Je pense qu'il est toujours bon de faire un nettoyage de printemps. Cela nous aide à mettre les choses à jour.
Je m'inquiète moi aussi de la menace que représente pour nos institutions l'ingérence étrangère, mais aussi du manque de compréhension de la nature de la menace. En ce sens, je souligne qu'une directive ministérielle a été émise le 16 mai. Il est donc très clair que le , par l'entremise du ministre de la Sécurité publique, souhaite être informé rapidement en cas de renseignements ou de menaces potentielles pour les députés.
De plus, comme d'autres témoins l'ont dit devant votre comité, je crois que le gouvernement envisage d'apporter des modifications législatives à certains des principaux cadres juridiques qui régissent cet espace. Un projet est en cours — je pense que c'est bien connu — pour créer un registre des agents. Des modifications pourraient aussi être apportées à d'autres lois.
Je pense que vous pouvez vous attendre, et les Canadiens aussi, à une mise à jour des cadres qui régissent ce domaine. De plus, comme Jody Thomas l'a dit lorsqu'elle a comparu devant vous, au sein de la fonction publique, nous sommes en train de créer ou de peaufiner certains mécanismes de gouvernance et d'échange de l'information afin de pouvoir faire de notre mieux pour fournir des renseignements pertinents au gouvernement.
Le dernier point que j'aimerais soulever, et je serai heureux d'en parler plus longuement plus tard... J'ai un bagage assez varié, comme vous l'avez dit, ou comme la députée l'a mentionné. Je ne suis pas fonctionnaire de carrière. J'ai vu comment d'autres organisations travaillent à l'extérieur du Canada. Ce que je dirais, c'est que je pense que nous avons une structure de sécurité nationale qui a été optimisée pour le terrorisme. Nous avons connu cette période au Canada entre 1989 et, disons, l'invasion russe de l'Ukraine en 2022, où, après le 11 septembre, la principale menace a été considérée comme provenant des terroristes. Je ne suis plus certain que ce soit le cas.
Il y a des tensions géopolitiques. Il y a l'ingérence étrangère. Nous avons ce que la stratégie indo-pacifique appelle — je n'ai peut-être pas le libellé exact — une Chine de plus en plus affirmée. Le monde a changé, et notre organisation doit pouvoir s'y adapter.
Nous pouvons débattre de la question de savoir si les mesures prises étaient appropriées, mais je trouve alarmant que de nombreux députés aient été ciblés et qu'ils ne le savaient tout simplement pas. C'est préoccupant.
Vous avez dit que avait reçu un breffage sur la sécurité défensive, mais je veux être très claire. D'après les témoignages que nous avons entendus, il a reçu ce breffage, mais il ignorait que sa famille et lui étaient ciblés.
En quoi cela est‑il logique? Si je ne sais pas que je suis ciblé, en tant qu'être humain, et qu'on me fournit des renseignements, ces renseignements sont utiles — a dit qu'ils l'étaient —, mais ils ne me permettent pas d'évaluer le problème de façon significative. C'est ce qui m'inquiète vraiment, parce qu'au bout du compte, pour moi, ce n'est pas une question partisane. Il s'agit d'un système défectueux — je ne pense pas qu'il le soit entièrement, mais il l'est en partie — et nous devons le corriger pour que les parlementaires puissent lui faire confiance, et que les Canadiens puissent leur faire confiance également.
Pouvez-vous m'expliquer votre point de vue ou me donner une idée de la raison pour laquelle on lui a fourni un breffage sur la sécurité défensive, mais il ne savait pas que lui et sa famille, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur du Canada, étaient ciblés?
:
Merci beaucoup, madame la présidente.
Monsieur Morrison, vous dites qu'il n'est pas anormal que des États étrangers parlent de citoyens canadiens. Dans ce cas particulier, nous avons la preuve, dans une note, qu'un diplomate a menacé un député parce qu'il avait fait son travail de porte-parole de ses électeurs, et qu'il l'a menacé de sanctionner sa famille. Il est tout à fait inacceptable que vous laissiez entendre qu'il s'agit simplement d'un État étranger qui parle de quelqu'un d'une façon qui n'aurait pas dû sonner l'alarme, et cela sape vraiment votre crédibilité.
Vous avez dit que le système fonctionnait bien. J'aimerais revenir sur ce point.
Le système a bien fonctionné, même si un député en exercice, M. Chong, n'a pas été informé. Le système a bien fonctionné, même si les renseignements dont vous disposiez ont permis à un diplomate de Pékin de rester au Canada pendant deux ans de plus pour harceler et intimider des Canadiens d'origine chinoise. Cependant, vous dites, monsieur, par votre entremise, madame la présidente, que le système fonctionne bien.
De plus, monsieur Morrison, vous n'avez pas donné suite à cette note, qui contenait des renseignements qui ont mené à l'expulsion d'un diplomate, M. Zhao Wei. Appuyez-vous la décision d'expulser M. Zhao Wei?
:
Veuillez vous arrêter, monsieur Cooper.
Monsieur le sous-ministre, je vais vous dire qu'une série de commentaires ont été faits dans le cadre de cet échange. Je dois vous remercier d'avoir tenté de répondre sans que vous puissiez avoir la parole.
Cette institution que nous créons et que nous essayons d'améliorer ne fonctionne pas toujours bien. Souvent, la façon dont les gens interprètent les commentaires et la façon dont ils sont répétés ne correspondent pas à la façon dont ils sont formulés.
Votre déclaration préliminaire fera partie de notre cahier. Les députés pourront l'examiner. Je peux vous assurer qu'ils en retiendront ce qu'ils — certains plus que d'autres — voudront en retenir.
Cela dit, c'est très important pour moi dans ce dossier. Dès qu'il y a eu un bon échange, pendant une bonne heure, j'ai récompensé ce bon comportement. J'en ai fait l'éloge. J'ai exprimé ma satisfaction.
J'essaie de ne rien interrompre, mais pour le moment, je prends le temps de le faire, parce que les membres doivent comprendre que la présidence prendra le temps qu'il faudra si nous ne parlons pas quand c'est notre tour et nous ne permettrons pas à tout le monde de jouer son rôle.
C'est aussi simple que cela.
Je vais redonner la parole à M. Cooper, mais, monsieur le sous-ministre, soyez assuré que je vous donnerai le temps de répondre si vous le voulez. Votre présence ici pour nous donner de l'information est importante. J'aimerais également faire quelques observations aujourd'hui.
Nous devons comprendre comment fonctionnent nos institutions. Souvent, les gens qui sont élus, qui n'ont pas participé aux échanges, ne comprennent pas vraiment où il y a des chevauchements et comment cela fonctionne. Ce que vous savez et ce que nous savons ne correspond pas toujours. C'est l'occasion pour nous de mieux comprendre ce que vous savez.
Merci.
J'espère que tout le monde a pu respirer un peu.
Monsieur Cooper, vous avez la parole.
:
Merci beaucoup, madame la présidente. Par votre entremise, j'aimerais remercier M. Morrison d'être parmi nous aujourd'hui.
J'essaie de déterminer la question de privilège pour M. Chong. Je vais préciser quelques dates. Ensuite, pourriez-vous vous assurer que j'ai la bonne information?
Nous croyons savoir que, le 18 février 2021, M. Chong a présenté la motion de l'opposition. Le 22 février 2021, il y a eu un vote. Vous avez dit qu'après ce vote, des cartes d'influence avaient été créées au sujet des membres du Sous-comité des droits de la personne, dont M. Chong. Il n'y avait aucune menace physique ou imminente.
Je crois comprendre que la note de gestion des enjeux de mai 2021 — je n'ai pas la date exacte — a été préparée. Elle ne mentionnait pas de menace précise et ne nommait aucun député. Par la suite, M. Chong a reçu le premier breffage sur la sécurité défensive le 24 juin 2021 — un breffage qui ne mentionnait pas de menaces précises.
Le 20 juillet 2021, une évaluation et une analyse approfondie ont lieu — la fameuse note —, mais cela n'exige aucune mesure et aucun député n'est nommé. Cela figurait dans votre dossier de lecture du mois d'août. Pourriez-vous préciser la date exacte? Encore une fois, cela ne comprenait pas le nom des députés. Vous avez demandé un certain suivi.
M. Chong a déclaré qu'il avait entamé des réunions avec le SCRS le 5 août 2021, le 25 février 2022 et le 18 juillet 2022.
J'essaie de mieux comprendre quand la menace pesant sur M. Chong lui a été communiquée. J'essaie de comprendre quand il a été mis au courant de la menace précise. Il a dit avoir été informé par les médias le 1er mai 2023, je crois. Nous essayons de déterminer la question de privilège.
Pourriez-vous préciser la date de la note de gestion des enjeux de mai 2021, la date du dossier de lecture et la date à laquelle M. Chong a été mis au courant de la menace précise contre lui qui aurait constitué une tactique d'intimidation?
:
Merci beaucoup, madame la présidente.
Monsieur Morrison, en réponse à la dernière question de M. Nater, vous avez dit à propos du suivi de la note de service du SCRS de juillet 2021 que vous avez vu une ébauche en décembre 2021, et que le document final était prêt en janvier 2022. Lorsque M. Nater vous a demandé de fournir une copie de ce document au Comité, vous avez dit que vous ne pourriez pas le faire, mais qu'une grande partie de son contenu avait été rapportée par Global News.
Aux fins du compte rendu, madame la présidente, je fais remarquer que Global News a effectivement, le 8 mars, fait état d'un « rapport spécial » de janvier 2022 préparé par le Bureau du Conseil privé, horodaté et mis en forme finale, en laissant entendre qu'il était destiné au et à ses principaux collaborateurs.
Cette note de service, ou « rapport spécial », parlait entre autres d'un important transfert clandestin de fonds, destiné spécialement à l'élection fédérale, depuis le consulat de Chine à Toronto jusqu'à un député provincial en passant par un membre du personnel d'un candidat à l'élection fédérale de 2019. On estimait aussi dans ce rapport que le Canada demeurait très exposé à l'ingérence chinoise, sur la foi de renseignements qui mettaient en évidence les efforts intenses et persistants déployés par le Parti communiste chinois depuis plus d'une décennie. On calculait enfin que le groupe visé comprenait au moins 11 candidats et 13 collaborateurs ou plus.
Bref, monsieur Morrison, vous avez admis ce que le et le gouvernement ont nié et tenté de camoufler à maintes reprises.
Cette note de service du BCP, ce rapport spécial de janvier 2022, a‑t‑elle été portée à l'attention du ?
:
Merci beaucoup, madame la présidente.
Je tiens à remercier encore une fois le témoin parce qu'il nous présente une chronologie qui va nous aider à assembler les pièces du casse-tête. Comme je le disais, il est difficile de voir l'ensemble quand les éléments d'information ou de renseignement sont pris un à un.
Monsieur Morrison, vous avez dit que la trousse de lecture du 17 août 2021, qui comprenait la note de service du 20 juillet, contenait des renseignements qui vous ont incité à demander un suivi. Vous avez ensuite vu en décembre 2021 une ébauche, mise en forme finale en janvier 2022. Nous savons qu'un décret daté du 4 janvier nommait Jody Thomas conseillère à la sécurité nationale et au renseignement et qu'elle est entrée en fonction le 11 janvier 2022.
Elle a déclaré que, dès ce moment‑là, ainsi que dans son rôle précédent de sous-ministre de la Défense nationale, les agissements de la République populaire de Chine étaient au nombre de ses préoccupations. Ce n'était pas quelque chose de nouveau. J'ai moi-même siégé au comité de la défense nationale au cours de mon premier mandat et j'étais au courant des enjeux de sécurité nationale impliquant la Chine, la Russie et d'autres acteurs étatiques.
Pourriez-vous nous expliquer ce que vous feriez différemment ou ce que vous recommanderiez? Vous avez reçu la trousse de lecture en août. Nous étions alors en campagne électorale. Le Cabinet a été assermenté plus tard cette année‑là. Par conséquent, vous avez dû attendre environ cinq mois avant de recevoir l'ébauche. Je suppose que le SCRS recueillait plus de renseignements que vous en aviez demandé.
Pourriez-vous nous dire ce que vous feriez de différent ou ce que vous nous recommanderiez pour aider la conseillère à la sécurité nationale, ses successeurs et les ministères, pour voir s'il y a quelque chose que nous aurions pu faire autrement durant ce délai?
Il me semble s'être écoulé pas mal de temps entre le moment où vous avez demandé le suivi et le moment où l'ébauche vous est arrivée. J'imagine que dans le domaine du renseignement, les choses ne se résument pas à un simple échange de courriels. Il faut réunir des éléments et différentes personnes y travaillent. Comme vous le disiez, nous étions aussi en pleine évacuation de Kaboul.
Pourriez-vous nous dire ce que vous recommanderiez à cet égard?
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Merci beaucoup, madame la présidente.
Monsieur Morrison, je vous écoute depuis le début. J'ai écouté plusieurs témoins depuis le début de ces audiences sur le cas de M. Michael Chong. Une chose m'épate, et c'est de voir que personne n'a endossé la responsabilité de l'information provenant d'un peu partout.
Vous avez confirmé, aujourd'hui, que vous avez lu à plusieurs reprises ces notes de service qui parlaient de l'ingérence étrangère. Vous avez confirmé pratiquement le contenu de la note de service qui avait été révélée par Global News en disant que c'était très secret, mais que l'ensemble du contenu avait pratiquement été révélé dans cet article. Votre prédécesseur, M. Vincent Rigby, a dit qu'il avait lu en 18 mois de 5 000 à 7 000 documents. Il m'a même mis au défi de m'asseoir sur le siège du conseiller à la sécurité nationale pour voir l'importance du travail.
C'est justement là, le problème: on assoit des gens comme vous ou comme M. Rigby dans ces chaises pour analyser cette information. Qui fait le lien entre les différentes informations, qui fait les renvois nécessaires et qui fait en sorte de déterminer ce qui est important?
À vous entendre et à entendre tous ceux et celles qui sont passés devant nous depuis le début, tout le monde a été informé, mais personne n'a pris de décision.
Quand vous voyez le mot « information », faites-vous exprès de ne prendre aucune mesure parce que vous vous dites que quelqu'un d'autre va le faire à votre place, monsieur Morrison?
C'est inquiétant pour les Canadiens et c'est inquiétant pour la diaspora chinoise. Il est inquiétant aussi de savoir que des gens qui sont nommés aux postes comme les vôtres sont incapables d'être les yeux des citoyens canadiens, qui ont justement besoin de personnes qui vont voir les éléments comme ceux-là.
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Merci, madame la présidente.
[Traduction]
Monsieur Morrison, encore une fois, je me sens obligé de dire ceci. Personne ne remet en question les capacités que vous mettez au service de notre pays; votre service est exemplaire. Je ne peux que présumer, sur la foi de témoignages que j'ai reçus, que vous vous êtes comporté de façon honorable en portant beaucoup d'attention aux détails, et que vous faites de votre mieux. Comme M. Rigby, votre prédécesseur, l'a fait remarquer, beaucoup de documents à lire tombent sur votre bureau. Lorsque vous avez répondu à mes questions au sujet des notes d'information ou des notes de service, s'il s'agissait de renseignements classifiés, c'est ce que vous faites. Même pour une note d'information, vous donniez suite parce que vous saviez d'expérience qu'il y avait quelque chose à approfondir.
Je vous remercie de votre travail.
J'aimerais revenir à une question concernant le rapport Johnston. À la page 24 de son rapport, M. Johnston a écrit ce qui suit: « On ne sait pas très bien s'il y avait de l'argent et s'il s'est vraiment rendu au personnel ou au député provincial, et aucun renseignement ne donne à penser que des candidats fédéraux ont bien reçu des fonds. »
Les médias ont par la suite rapporté qu'aucune preuve n'établissait qu'il y avait eu un financement caché, mais ils ont été largement ignorés, ce qui fait que le public a continué de penser que des candidats, parfois identifiés seulement comme étant des candidats libéraux, avaient touché des fonds. La conseillère à la sécurité nationale et au renseignement, Mme Thomas, et le chef de cabinet du premier ministre ont tous deux témoigné devant le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre et déclaré que rien ne prouvait que de l'argent avait été envoyé à des candidats fédéraux.
Monsieur Morrison, ce que M. Johnston écrit dans son rapport vous paraît‑il vrai?