Je vais donc commencer. Bonjour, mesdames et messieurs les membres du comité. Je vous remercie de m'accueillir ici aujourd'hui pour vous entretenir de mon projet de loi d'initiative parlementaire, le projet de loi .
Quand j'étais étudiant à Edmonton, où j'ai grandi, j'ai appris l'histoire de l'Holocauste dans le cadre de la Seconde Guerre mondiale. Des manuels scolaires rappelaient les événements qui se sont déroulés, les batailles qui ont été livrées, les sacrifices de nos soldats, de nos aviateurs et de nos marins ainsi que de leurs familles, et, finalement, la victoire des Alliés sur les nazis. J'ai également appris ce qu'a été l'Holocauste, comment des groupes de gens qui ne correspondaient pas à certains stéréotypes ont été exterminés au nom de la pureté raciale. Toutefois, quand j'ai vu cela dans un manuel scolaire, ces événements m'ont semblé bien loin et appartenant au passé. C'était arrivé avant ma naissance, à des gens au sujet desquels je ne savais pas grand-chose, dans des pays situés à l'autre bout du monde. Je n'avais qu'une compréhension superficielle de l'Holocauste. Cela faisait partie de l'histoire. C'était une chose que j'avais apprise, mais que je n'avais jamais vraiment comprise.
Pour les jeunes d'aujourd'hui, c'est un événement encore plus lointain. Quand on a le privilège de vivre dans un pays comme le Canada, l'Holocauste peut sembler totalement étranger, une chose que les gens ont du mal à comprendre parce qu'ils ne peuvent pas cerner la réalité de telles atrocités et de telles horreurs.
Certaines personnes comprennent mieux ces terribles événements parce qu'ils leur ont été racontés par des membres de leur famille ou des anciens combattants qui ont été témoins de l'Holocauste et qui, dans certains cas, y ont survécu. Mais au fur et à mesure que le temps passe et que les rangs de ceux qui peuvent raconter ces histoires s'éclaircissent, ce crime sans précédent risque de devenir simplement un fait historique, quelque chose qui existe peut-être dans les manuels d'histoire, mais dont on ne comprend plus la véritable signification.
D'une certaine façon, le fait que nos enfants aient de la difficulté à comprendre cette brutalité témoigne des progrès que nous avons faits. Aujourd'hui, le Canada est un pays qui représente des espoirs et des possibilités pour les gens qui, dans le monde, cherchent à trouver une nouvelle patrie et un avenir meilleur pour eux-mêmes et pour leurs familles. En tant que Canadiens, nous sommes fiers d'un pays qui valorise et exige le respect envers les autres, qui respecte la dignité personnelle de tous et qui offre un climat de tolérance et de compréhension. Notre société est le rêve auquel aspirent bien des gens dans le monde et ce pourquoi des milliers d'hommes et de femmes se sont battus, au sein de nos forces armées, dans des pays lointains, opprimés et ravagés par la guerre. Mes propres parents sont venus au Canada pour bénéficier de tout ce que le Canada a à offrir aux nouveaux arrivants.
Dans le Canada d'aujourd'hui, ceux qui ont l'honneur d'y vivre auraient énormément de difficulté à saisir toute l'horreur de l'Holocauste. Les dangers auxquels notre pays est maintenant confronté sont la complaisance et le désintérêt, qui pourraient faire que des choses comme l'Holocauste restent enfermées dans les pages d'histoire. Et au cas où nous risquerions de penser que la l'haine et l'antisémitisme sont des reliques du passé, on voit presque chaque jour des gens dans le monde entier continuer à nier l'existence même de l'Holocauste ou à essayer de minimiser la portée des crimes commis contre l'humanité.
Le président Ahmadinejad en Iran continue à scandaliser le monde en niant l'Holocauste. Ses remarques bornées et ignorantes sur l'Holocauste ont été dénoncées à peu près partout dans le monde, mais il y a quand même des gens, même dans notre propre pays, qui sont d'accord avec lui. Il faut continuer de dénoncer publiquement ceux qui nient l'Holocauste et qui expriment ce genre de points de vue. Ce monument témoignera de la position du Canada.
La montée, ouverte ou insidieuse, de l'antisémitisme en divers endroits du monde est une raison impérieuse supplémentaire pour le Canada de continuer à veiller à ce que l'Holocauste soit à la fois reconnu et condamné.
À mon avis, les députés sont chargés de deux rôles importants: défendre les intérêts de leurs électeurs, et soutenir des causes qui sont à l'avantage de tout le Canada. J'estime que la création d'un Monument national de l'Holocauste s'inscrit dans ces deux rôles et contribuera à faire comprendre aux générations futures de Canadiens les atrocités de l'Holocauste grâce à une icône visible et concrète dans la capitale nationale.
D'aucuns ont dit qu'on n'a pas besoin d'un monument. Après tout, disent-ils, «tout le monde a entendu parler de l'Holocauste. A-t-on vraiment besoin d'un monument?» Personnellement, je crois que oui. Rappelez-vous qu'après la fin de la Seconde Guerre mondiale, on a commencé à parler de l'Holocauste. Les journaux ont parlé des crimes commis, mais on n'en prenait pas vraiment la mesure complète. Personne ne saisissait vraiment ce qui s'était passé. C'est seulement quand on a vu les photos, quand on a pu comprendre de façon plus concrète, qu'on a commencé à saisir l'importance de l'Holocauste. C'est pourquoi j'estime qu'il ne suffit pas de lire des récits sur l'Holocauste dans un manuel scolaire.
Chaque année, des milliers de Canadiens, dont beaucoup sont des écoliers, viennent visiter notre capitale. Un monument concret, tangible, installé dans la capitale de notre nation, les marquera autrement que les mots qu'ils peuvent lire sur une page. Comme bien d'autres, j'ai été étonné d'apprendre que le Canada était la seule nation alliée qui n'ait pas encore de Monument de l'Holocauste dans sa capitale nationale. Comme dans ces autres pays, plus le temps passe et moins il y a de survivants pour témoigner personnellement de l'Holocauste.
Un monument permanent à ceux qui sont morts dans les camps de concentration ou chez eux aux mains des nazis sera un rappel durable de cette ère sinistre de haine et de violence que nous ne voulons jamais voir se reproduire. En érigeant ce monument dans la capitale nationale, au siège du gouvernement, nous manifestons un respect approprié pour cet événement effroyable et nous en reconnaissons la gravité. La Grande-Bretagne, les États-Unis, la France, tous nos alliés ont compris qu'il était important de se souvenir de l'Holocauste, et le Canada se doit d'en faire autant.
J'ai été enchanté par tous les appuis, de tous les partis, dont j'ai bénéficié en vue de la création d'un Monument national de l'Holocauste.
L'honorable Irwin Cotler a déclaré ceci:
Ce monument sera un monument du souvenir, un monument pour que nous n'oubliions pas. Ce sera un acte de mémoire. Ce sera aussi une façon de nous rappeler qu'il faut agir pour que l'expression ne jamais oublier, qui est à l'origine de ce monument, se traduise par l'expression jamais plus.
Madame Lavallée a déclaré:
L'Holocauste constitue l'un des plus grands crimes du XXe siècle. Le Bloc québécois appuie donc le projet de loi qui vise à commémorer tant les survivants que les victimes.
Judy Wasylycia-Leis a dit ceci:
Il est vraiment étonnant que nous n'ayons pas un monument de l'Holocauste ici, dans la capitale du Canada. Avec ce projet de loi, nous cherchons à réparer cette omission. J'espère que nous pourrons le faire rapidement.
Anita Neville a quant à elle dit ceci:
... j'espère que tous les députés des autres partis jugeront approprié d'appuyer ce projet de loi. C'est important, non seulement pour reconnaître ce qui s'est passé à cette époque, mais, comme nous l'avons entendu ailleurs ce soir, pour faire en sorte que nos enfants sachent ce qui s'est produit et qu'ils puissent faire en sorte que cela ne se reproduise jamais à l'avenir.
De nombreux organismes de partout au Canada ont exprimé leur appui, notamment B'nai Brith, le Congrès juif canadien, le Comité Canada-Israël et le Comité des affaires politiques canadiennes juives.
J'aimerais également rendre hommage à Laura Grossman, du Canadian Memorial Holocaust Project, et à l'honorable Peter Kent, ministre d'État (Affaires étrangères), qui ont vivement appuyé cette initiative.
Je considère ce projet de loi comme un exemple de ce que le Parlement peut faire de mieux lorsque nous transcendons les intérêts partisans et que nous allons de l'avant dans un dossier d'une importance énorme pour les Canadiens.
Le premier ministre a dit:
Il s'agit d'un projet très méritoire, qui servirait à honorer la mémoire des victimes et à veiller à ce que les futures générations de Canadiens tirent des leçons de l'un des chapitres les plus horribles de l'histoire de l'humanité.
Mesdames et messieurs les membres du comité, ce monument deviendra un témoignage de nos propres idéaux et valeurs et l'incarnation des paroles et récits écrits dans les livres d'histoire. Ce monument est une déclaration des Canadiens au reste du monde. Il rend hommage à ceux qui ont péri dans cette tragédie qu'est l'Holocauste et affirme aux générations futures de Canadiens que cela ne se reproduira plus jamais.
Merci.
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Merci, monsieur le président.
Monsieur Uppal, merci d'être venu ici et de nous avoir donné une idée de ce qui vous a motivé à déposer ce projet de loi. C'est tout à fait louable. Nombre d'entre nous, nous tous d'ailleurs, j'en suis convaincu, sont tout à fait scandalisés chaque fois que nous pensons au mal qui peut être fait par des gouvernements organisés, ou des gouvernements désorganisés, qui sont motivés par l'idéologie, chose qui a amené l'Holocauste et la Seconde Guerre mondiale, et le massacre, le meurtre de millions de personnes. Je suis heureux qu'il demeure ici des personnes qui se souviennent encore que la guerre est une vile activité et que le génocide est pire encore.
Vous savez que la Chambre a accepté que le principe de l'érection d'un monument ici dans la région de la capitale nationale était une chose que pouvait appuyer la société canadienne. Peu importe qu'un ministre de la Couronne ou qu'un ministre de second rang appuie ou non votre projet de loi. Celui-ci est le reflet de la volonté de la Chambre des communes. Il reflète l'approche de chaque député, sans exception, et de tous les partis. Personne ne veut être associé de manière positive à l'Holocauste. Nous tenons à nous rallier à toutes les condamnations possibles de ce chapitre de l'histoire.
Nous applaudissons donc à votre projet de loi car il dit que le gouvernement du Canada va mettre de côté un terrain. Vous n'en avez pas parlé dans votre déclaration, mais c'est ce que précise votre projet de loi. Il va réserver un terrain dans la région de la capitale nationale, c'est-à-dire en cet endroit que tous les Canadiens reconnaissent comme leur appartenant, et l'on va établir un conseil qui rassemblera les fonds requis pour l'érection de ce monument commémoratif.
Avez-vous discuté du projet de loi avec votre parti, celui qui est au pouvoir, avant d'en faire le dépôt?
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Si nous en avons l'avis, monsieur le président — et je crois que M. Gaudet est d'accord avec moi — le fond de ces amendements touche au coeur et au principe du projet de loi. Comme je l'ai indiqué dans ma question à M. Uppal, les amendements portent sur la question de savoir si le gouvernement est prêt à établir un site pour le monument et à mettre en route la création d'un monument.
Mes collègues, Mme Mendes et Mme Crombie, ont indiqué que le gouvernement peut faire cela en l'absence d'une loi introduite par un de ses membres, d'un projet de loi qu'il propose maintenant de bouleverser complètement, article par article. Il pourrait procéder par mesure administrative. Il pourrait apporter les fonds. Il n'a besoin du soutien de personne. Le principe a déjà été approuvé. Il a été établi lors de la législature précédente et, ajouterais-je, par l'une de mes collègues du Parti libéral.
Nous souscrivons à ce projet de loi. Nous souscrivons à son principe. Les amendements mettent ce principe en pièces. Lorsque j'ai demandé à M. Uppal si le gouvernement avait demandé son consentement pour introduire les amendements, ce n'était pas parce que j'ai l'esprit retors mais parce que lui, comme auteur du projet de loi, doit donner son accord à un amendement favorable.
Je pense qu'il n'y a rien de favorable dans ces amendements. Ces amendements ne peuvent qu'être déclarés irrecevables. Ils vont à l'encontre du principe du projet de loi. Ils taillent en pièce l'essence de ce que M. Uppal a indiqué en réponse à ma question — à savoir, fondamentalement, que le gouvernement doit fournir le terrain, et il ne le fait pas.
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Mon premier rappel au Règlement, monsieur le président, porte sur la question de savoir de quels amendements il parle?
Mon deuxième rappel au Règlement est que, s'il a ces amendements — et il a mentionné qu'ils changent l'esprit du projet de loi, ce que très franchement je conteste — peut-être peut-il nous indiquer en quoi ils le modifient.
Donc, même si vous jugez mon rappel au Règlement irrecevable, s'il va clamer que ces amendements sont mauvais, il pourrait au moins nous indiquer précisément en quoi ils modifient l'esprit. Il m'apparaît, en les lisant, qu'ils améliorent un projet de loi antérieur sur le plan de l'administration du projet.
Nous sommes tous en faveur d'un Monument national de l'Holocauste. Nous sommes prêts, du côté gouvernemental, à rectifier tout problème pouvant exister. Je pose la question à M. Volpe: lui et son parti sont-ils prêts aujourd'hui, tout de suite, à rectifier tout problème pouvant exister et à faire avancer les choses aussi rapidement que possible?
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J'ai été heureux d'entendre que M. Volpe et les libéraux sont maintenant prêts à approuver le projet de loi, ayant découvert qu'il est en fait très similaire — ou identique, a-t-il dit — à un projet de loi libéral adopté il y a trois ans, ou déposé à la Chambre il y a trois ans.
Mon souci est le suivant. Je tiens à ce que l'on sache que peu importe au gouvernement qui devrait recevoir le crédit de ce projet de loi. Nous pensons que le fond du projet de loi est très important. Il touche beaucoup de gens. Six millions de Juifs et leurs familles ont été anéantis au cours de cette période et c'est donc un sujet sur lequel le comité, le gouvernement et l'opposition devraient avancer le plus rapidement possible, de la manière la plus réfléchie possible, sans s'inquiéter de savoir à qui revient le mérite et sans s'inquiéter de toutes ces querelles politiques. Je pense que ce qui compte à ce stade, c'est d'avancer.
Je tiens également à dire, à ceux qui vont lire le procès-verbal et à ceux qui nous écoutent, où qu'ils se trouvent, que je pense que tous les partis considèrent cette mesure comme très importante. Le comité est maître de ses travaux, et donc nous pouvons remédier à toute imperfection du projet de loi dès aujourd'hui. Je pense qu'il importe que tous ceux qui nous écoutent comprennent bien que nous pouvons réparer toute imperfection maintenant, par un vote. Même avec une contestation des amendements ou tout ce que l'on voudra, nous pouvons parfaire ce texte et expédier ce projet dans les 15 prochaines minutes, afin de créer ce monument.
Mais M. Gaudet a déposé une motion disant qu'il veut plus de temps pour réfléchir et peut-être consulter son parti au sujet des amendements, qui pourtant ne me semblent pas modifier le fond. Si c'est ce que M. Gaudet et le Bloc veulent faire, le gouvernement ne peut que s'incliner parce que ce qui compte est d'avancer avec ce projet de loi. Mais il importe aussi que tout le monde ait l'occasion de réfléchir.
Je veux m'assurer que tous ceux qui nous écoutent et tout le monde dans cette salle sachent bien que nous ne revendiquons pas le crédit d'une mesure qui est simplement la bonne chose à faire. Si M. Gaudet veut y réfléchir plus avant et si M. Uppal n'y est pas opposé, je propose que le gouvernement appuie la motion de M. Gaudet de reporter cette étude à la prochaine fois.
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Monsieur le président, je réalise que nous avons parfois la tentation de faire des discours parce que nous voulons nous adresser à l'auditoire de nos délibérations sur ce projet de loi, et c'est légitime. Je ne veux salir les motifs de personne mais je sais que tout le monde autour de cette table a convenu de plusieurs... Je reprends ici les termes de M. Uppal, « l'esprit du projet de loi ». L'esprit du projet de loi était de créer un monument de l'Holocauste dans la région de la capitale nationale.
Les dispositions particulières du projet de loi indiquaient qui allait fournir quoi: le terrain, son aménagement, le monument lui-même. Le gouvernement initialement avait dit qu'il allait fournir le terrain. Le projet de loi est un peu différent du projet de loi libéral antérieur à cet égard, qui prévoyait qu'il fournirait et le terrain et le monument et l'entretien. Mais c'est acceptable. La question est que nul ici n'est contre cette intention. Nul n'a rejeté le principe, car tout le monde à la Chambre a voté en faveur du projet de loi de M. Uppal. Chacun pourrait se montrer partisan et dire qu'il aurait préféré que ce soit un député néo-démocrate, ou bloquiste ou libéral ou conservateur qui le présente. Le fait est que la Chambre des communes a pris un projet de loi d'initiative parlementaire et a voté à l'unanimité en sa faveur.
Cela dit, en ce qui concerne d'éventuels amendements, j'avais demandé un éclaircissement préalable à leur sujet, car je considère que les amendements dont nous avons reçu avis touchent à l'esprit et au principe du projet de loi. Que quelqu'un comme le secrétaire parlementaire, notre bon ami, M. Jean, donne à entendre que ceux d'entre nous qui objectons à tout ce qui pourrait amoindrir le projet de loi de M. Uppal veulent du mal à toutes ces familles des six millions de victimes de l'Holocauste — qui ont souffert personnellement et, par extension, leur famille et toute leur communauté — est scandaleux. Il n'existe pas une seule personne autour de cette table, j'en suis sûr, qui ne considère que c'est là un moment et une période d'infamie dont il faut toujours se souvenir et qui doit toujours être dénoncé par quiconque croit en la civilité de l'humanité.
Ce que nous voulons faire avec ce monument, c'est créer une commémoration afin que tous se souviennent de cette infamie et la dénoncent toujours. Ce serait une manifestation exemplaire de comportement démocratique. Cela m'indigne que quelqu'un veuille transformer cela en un moment partisan et je suis indigné par le fait que quelqu'un donne à entendre que nous, au Parti libéral, voudrions tirer quelque avantage avec cette motion procédurale, alors que nous cherchons à défendre le principe de ce projet de loi.