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JUST Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de la justice et des droits de la personne


NUMÉRO 050 
l
3e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 28 février 2011

[Enregistrement électronique]

(1530)

[Traduction]

    La séance est ouverte. Il s'agit de la 50e réunion du Comité permanent de la justice et des droits de la personne. Je précise que nous sommes le 28 février 2011.
    Vous avez tous devant vous l'ordre du jour. Nous sommes saisis de deux projets de loi différents.
    Tout d'abord, nous terminerons l'étude article par article du projet de loi C-54, que nous avions entamée avant la relâche. Une fois cela terminé, nous poursuivrons notre examen du projet de loi C-4, Loi modifiant la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents et apportant des modifications connexes et corrélatives à d'autres lois.
    Nous avons parmi nous des témoins.
    Nous avons le plaisir d'accueillir, pour nous aider, Carole Morency, avocate générale intérimaire de la Section de la politique en matière de droit pénal du ministère de la Justice; de même que Matthias Villetorte, qui est lui aussi avocat à la Section de la politique en matière de droit pénal.
    À notre dernière réunion, nous avions discuté d'un amendement à l'article 3, qui a été rejeté, après quoi nous sommes revenus à l'article 3. Un certain débat s'est élevé à son sujet. J'aimerais savoir si on a quelque chose à ajouter en ce qui concerne l'article 3, avant que je le mette aux voix.
    Monsieur Comartin.
    Procédons-nous toujours en votant sur chacun des articles?
    Je crois que nous avions déterminé qu'un regroupement serait permis. Nous allons tenir un vote par appel nominal. Mais, d'après ce que j'ai compris, après avoir soulevé certaines objections, M. Petit a accepté que nous regroupions des articles non contestés...
    Il y a des...?
    ... ou dont on ne souhaite pas débattre davantage.
    Y a-t-il d'autres arguments? Nous en sommes à l'article 3.
    Alors je vais maintenant demander le vote: l'article 3 est-il adopté?
    (L'article 3 est adopté par 10 voix contre 1.)
    Le président: Vous remarquerez que, pour les quatre prochains articles, c'est-à-dire les articles 4, 5, 6 et 7, aucun amendement n'a été proposé. Voulez-vous voter sur ces dispositions en un seul bloc?
    Une voix: Oui.
    Le président: Puisqu'il n'y a pas d'objection, c'est ce que nous ferons. Je vais mettre aux voix les articles 4, 5, 6 et 7. Ces articles sont-ils adoptés?
    (Les articles 4 à 7 inclusivement sont adoptés par 10 voix contre 1.)
    Le président: Les articles 4, 5, 6 et 7 sont maintenant adoptés; passons à l'article 8.
    (Article 8)
    Le président: Nous avons un amendement libéral.
    Monsieur Lee, voulez-vous le présenter?
(1535)
    Monsieur le président, j'ai rédigé cet amendement parce que je trouvais la formulation de l'alinéa d) trop vague, à deux égards, dont la formulation du Code lui-même, le libellé de la disposition en tant que tel. Ensuite, entre les mains d'un tribunal, plus tard, ce libellé pourrait-il donner lieu à une autre ambigüité ou imprécision? Je pense que les membres reconnaîtront qu'un manque de précision ou une ambigüité, que ce soit dans la loi ou les ordonnances judiciaires qui en découleront, nuiront à l'application et à la viabilité de ceux-ci.
    J'ai essayé de rendre cette ordonnance plus précise. En ce moment, on dit « utiliser Internet ou tout autre réseau numérique ». Quand on y songe, nous sommes entourés de centaines de réseaux numériques. Alors que nous sommes assis ici, dans cette salle, il y a probablement une demi-douzaine d'entre eux qui nous entourent. Nos automobiles sont reliées à des réseaux numériques; c'est aussi le cas de notre secteur du transport, et probablement de nos moniteurs cardiaques. Les systèmes d'alarme de nos maisons sont connectés à un réseau numérique, nos systèmes de bureautique aussi, tout comme nos téléphones. Je pourrais continuer comme ça longtemps.
    J'ai tout simplement trouvé ce libellé trop vague. Si un tribunal devait le reprendre... Par exemple, si la cour dit: « J'ordonne que l'utilisation d'Internet ou de tout autre réseau numérique vous soit interdit pendant deux ans », qu'est-ce que cela signifierait pour le délinquant, dans la pratique? Cela pourrait s'appliquer à n'importe quel réseau numérique.
    Je ne dis pas qu'un juge le fera nécessairement, mais il pourrait le faire. Si c'est la formulation prévue dans le Code criminel, un juge pourrait simplement la reprendre dans son ordonnance. Il pourrait y avoir toutes sortes de litiges possibles au sujet des réseaux qui devraient être compris là-dedans ou non.
    Mon amendement ajoute simplement l'expression « que le tribunal précise » après « réseau numérique ». Si le tribunal interdit à une personne de se servir — même pour sauver sa peau — d'un réseau numérique, il lui faut préciser lesquels seront interdits. Voilà simplement l'effet de ma petite phrase: elle vise à obliger le Code et le tribunal à être plus précis.
    Merci, monsieur Lee.
    Tout d'abord, avant que nous tenions un débat là-dessus, vous avez peut-être remarqué que les amendements Libéral-1 et Libéral-3 sont liés; ils sont semblables. Ils traitent d'une question similaire. Malheureusement, en comité, la présidence n'a pas le pouvoir de regrouper des amendements à des fins de débat et de vote, ainsi que le Président de la Chambre peut le faire à l'étape du rapport.
    Les comités examinent les amendements un par un, et étudient les projets de loi article par article. Un dilemme survient lorsqu'un amendement a une relation corrélative avec d'autres amendements. Si le comité doit prendre des décisions cohérentes au sujet des amendements, le vote qu'on tiendra sur l'un devra tenir compte des autres. Le problème est que la disposition visée n'est peut-être pas encore mise en discussion.
    Une solution pratique, que la présidence a déjà appliquée dans le passé, consiste à faire une déclaration précisant ces modifications corrélatives. Je propose qu'advenant le rejet du premier amendement, l'amendement Libéral-1, le troisième amendement, le Libéral-3, soit aussi rejeté, car le comité aura alors déjà tranché la question. Et si le premier amendement est adopté, le troisième le sera d'office, puisque le comité est tenu de prendre des décisions cohérentes.
    Il faut vous entendre sur la manière de procéder. Que voulez-vous faire?
(1540)
    Ça me va.
    M. Lee n'y voit pas d'objection.
    Le concept est le même pour les deux...
    Le Bloc est d'accord; M. Comartin et le gouvernement aussi.
    Très bien; nous sommes tous d'accord. Il est essentiellement question de l'amendement LIB-1, mais cela touche également l'amendement LIB-3.
    Nous allons entendre M. Dechert.
    Oui, merci, monsieur le président.
    J'aimerais simplement demander aux représentants du ministère s'ils ont quelque chose à dire au sujet de l'amendement de M. Lee.
    Madame Morency.
    Pour faire suite à l'une de mes comparutions précédentes, on m'a demandé de fournir au comité des renseignements pour éclaircir ce qu'on entendait par l'expression « Internet ou tout autre réseau numérique ». Nous avons fourni cette information.
    En lisant cette réponse, le comité constatera que les termes utilisés sont bel et bien cohérents, parce qu'ils désignent un réseau relié à un autre à des fins de communication. L'expression « autre réseau numérique » a été ajoutée pour que les réseaux qui ne sont pas basés sur le protocole TCP, le protocole régissant la transmission des données sur Internet, soient aussi couverts par cette disposition.
    Par exemple, au cours des années 1990, les babillards électroniques étaient couramment utilisés et fréquemment visités. Ce réseau ne fonctionne pas sur la base du protocole TCP, mais si une activité sur ce réseau a le même résultat qu'avec Internet... Autrement dit, si un accusé peut communiquer par ce moyen avec une autre personne afin de faciliter son comportement fautif, les termes utilisés dans le projet de loi que vous avez devant vous visent à tenir compte d'un tel cas.
    On a laissé entendre, par exemple, qu'il y a de nombreux autres réseaux. Je ne suis pas une experte technique en la matière; toutefois, je ne crois pas qu'un système numérique pouvant faire fonctionner les composantes électroniques d'une automobile constitue un réseau en ce sens. On peut trouver, dans une voiture, un réseau qui communique avec l'extérieur par des moyens de communication, comme un téléphone ou autre, mais ce serait certainement visé par le libellé que vous avez sous les yeux, dans le projet de loi C-54.
    Donc, pour ce qui est des précisions apportées par les tribunaux, le libellé aura-t-il une incidence...? L'orientation globale du projet de loi C-54 est conforme à ce que prévoit l'article 161 du Code criminel en ce moment. Autrement dit, il indique au tribunal, au moment du prononcé de la peine, qu'il doit examiner la possibilité d'imposer des conditions. On y suggère des termes que le tribunal pourra utiliser. Ils ne sont pas déterminants par rapport à la question, cependant: une cour sera toujours libre d'utiliser les termes de la loi ou d'imposer d'autres restrictions appropriées dans les circonstances.
    Donc, si ces mots n'étaient pas là, un tribunal pourrait quand même imposer ces conditions. Et s'ils sont là, ils fournissent une indication supplémentaire au tribunal.
    Toutefois, j'aimerais préciser qu'il y a une légère différence entre cet amendement et l'autre qui s'intitule LIB-3. Elle tient à la formulation... Je sais que l'intention est la même, mais il s'agit de la tournure du libellé de l'amendement LIB-3 et de la disposition qu'il vise à modifier. Dans l'amendement LIB-3, on fait référence au tribunal, alors que, pour cette infraction, la disposition comme telle parle du juge. Il y a donc là une distinction qui, techniquement, serait inexacte d'un point de vue rédactionnel, bien que je suis consciente qu'on voulait traiter le tout de façon uniforme.
    Monsieur Dechert.
    Madame Morency, à votre avis, l'amendement proposé ici est-il nécessaire?
    Eh bien, comme je l'ai dit, les tribunaux se fient déjà aux directives prévues en ce moment à l'article 161 du Code criminel; ils reprennent les termes qui y figurent et les adaptent selon les circonstances. Donc, les juges ne sont pas obligés de s'en tenir à ce qui est écrit, et pourront aller au-delà, selon le cas. Je dirais que cette disposition leur en donne la possibilité, et que l'expression « Internet ou tout autre réseau numérique » dans le but de communiquer, est aussi très claire.
    Merci.
    Monsieur le président, il me paraît intéressant de noter qu'habituellement, les membres de l'opposition nous disent qu'il faudrait accorder un plus grand pouvoir discrétionnaire aux juges. En outre, la plupart du temps, ces députés sont en désaccord avec l'opinion du gouvernement quant à la nécessité d'imposer des peines minimales obligatoires pour différentes infractions du Code criminel, car selon eux, les tribunaux exercent dûment leur pouvoir discrétionnaire de façon régulière. Et pourtant, avec cet amendement, on dirait que l'opposition souhaite restreindre le pouvoir discrétionnaire des tribunaux.
    À mon sens, cette disposition est censée faire partie d'une peine imposée à une personne ayant exploité sexuellement un enfant. Il est clair, d'après le contexte, que la mention de l'utilisation d'Internet ou d'un réseau numérique en tant que condition de l'ordonnance imposée à cet individu est censée faire référence à l'usage d'Internet ou d'un réseau numérique dans une situation susceptible de mener à l'exploitation sexuelle d'un enfant.
    Selon moi, il est hautement improbable qu'un tribunal du Canada dira à un délinquant reconnu coupable: « Vous ne pouvez activer le système d'alarme de votre maison, parce qu'il s'agit d'un réseau numérique, et nous ne voulons pas que vous en fassiez usage ». Il est évident que cette personne aura été condamnée pour avoir exploité sexuellement un enfant en se servant d'Internet ou d'autres réseaux numériques. Donc, il s'agit simplement d'une condition qui, espérons-le, empêchera de tels délinquants de récidiver.
    Pour ces raisons, je presse le comité de rejeter cet amendement.
    Merci.
(1545)
    Merci.
     Mme Jennings est la suivante, puis nous entendrons de nouveau M. Lee.
    Madame Jennings.
    Maître, pour m'aider à mieux comprendre, pourriez-vous me dire, en tenant compte du libellé actuel de l'article du Code criminel dont il est question aujourd'hui avec ces amendements au projet de loi C-54, si l'amendement proposé par mon collègue, M. Lee, améliore d'une quelconque façon la loi pour les tribunaux et les juges? Est-ce que cela clarifie les choses, ou est-ce redondant?
    Dans sa forme actuelle, tant dans le Code criminel que dans l'article 8 du projet de loi C-54, le libellé exprime assez bien qu'un juge pourra limiter, préciser ou élargir des ordonnances qu'il émettra à un délinquant au moment de la détermination de la peine. S'agit-il d'une amélioration, ou est-ce redondant ou superflu?
    Il y a un risque qui me vient à l'esprit lorsque j'examine le libellé. Si un tribunal, au moment du prononcé de la peine, pense à Internet, nous savons tous ce que cela signifie, mais s'il y a d'autres réseaux auxquels nous ne songeons pas car nous ne les considérons pas distincts d'Internet... Dans mon document « Réponse à l'engagement », l'exemple cité est celui d'un réseau local qui ne va pas au-delà d'une certaine zone géographique limitée.
    Si la précision n'est pas apportée, on pourra se demander si cette condition est censée s'appliquer à un tel cas. Si le tribunal se contente de dire « Internet » parce qu'il ignore quels autres réseaux peuvent exister, ne risque-t-on pas de perdre le bénéfice de cette condition? Je crois que oui.
    Si je vous ai bien comprise, cet amendement présenté par M. Lee ne renforce en aucune façon le pouvoir du juge qui détermine la peine, et il pourrait même, en fait, avoir des conséquences imprévues s'il était adopté par notre comité.
    Est-ce exact?
    C'est juste...
    Merci.
    ... et dans la mesure où un tribunal voudra apporter des précisions, ce libellé ne l'en empêchera pas.
    Merci.
    Monsieur Lee.
    Je voudrais simplement interroger Mme Morency à propos du contenu d'une ordonnance judiciaire interdisant l'utilisation d'un réseau numérique. À l'heure actuelle, à l'article 161 du Code criminel, par exemple, il est question d'interdire à un contrevenant « d'utiliser un ordinateur au sens du [...] dans le but de communiquer avec une personne âgée de moins de 16 ans ». On a donc là une référence précise à un ordinateur et au fait de communiquer avec une personne de moins de 16 ans.
    Une fois que nous ajoutons le nouvel alinéa d), que j'aimerais modifier, il n'y a aucune référence à la communication avec qui que ce soit, ni d'ailleurs à une quelconque forme de communication. On interdit simplement à la personne « d'utiliser Internet ou tout autre réseau numérique ». Cela revient à dire « n'importe quel réseau numérique ». J'aimerais donc vous demander si, advenant qu'un juge soit appelé à le faire, il y a un risque qu'il émette simplement une ordonnance d'interdiction reprenant tel quel le libellé de l'alinéa, de sorte que l'ordonnance du tribunal se lira ainsi: « L'usage d'Internet ou de tout autre réseau numérique vous est interdit »?
    Si votre réponse est oui, et qu'il est possible qu'un juge émette une telle ordonnance, je dis non: je ne veux pas que les juges imposent une telle condition, car nous serons incapables d'en assurer l'application. Cette ordonnance n'a pas la moindre chance d'être appliquée. Ce n'est pas assez clair. Si nous devons interdire à un citoyen — et qui plus est, à un citoyen reconnu coupable —, d'utiliser un réseau numérique, nous devons savoir quels sont les réseaux numériques qu'il n'a pas le droit d'utiliser. Ma question est celle-ci: un juge reprendra-t-il tout simplement le libellé de la disposition? Est-il possible qu'un juge utilise tels quels les termes de cette disposition dans son ordonnance d'interdiction?
(1550)
    Vous me demandez s'il est possible qu'un juge reprenne à son compte l'énoncé de la condition? Oui, c'est possible, mais la condition proposée dans le projet de loi C-54 précise également « en conformité avec les conditions imposées par le tribunal ». Donc, premièrement, c'est intégré dans la condition.
    Deuxièmement, vous avez tout à fait raison au sujet de ce que prévoit l'article 161 en ce moment, c'est-à-dire une condition interdisant simplement l'utilisation d'un ordinateur dans le but de communiquer avec une jeune personne. Cette condition a été ajoutée en 2002, au moment de la création du délit de leurre par Internet, parce que cette infraction concernait l'utilisation d'un moyen, l'ordinateur, pour communiquer avec une jeune personne.
    Mais ce que le projet de loi C-54 reconnaît, c'est que les délinquants peuvent utiliser des ordinateurs reliés à Internet à toutes sortes de fins. Oui, ils les utilisent pour communiquer directement avec une jeune personne — et la loi couvre déjà cet aspect —, mais aussi pour commettre d'autres délits, selon leur comportement délinquant, qu'il s'agisse par exemple d'accéder à de la pornographie infantile...
    Donc, l'idée, avec ce projet de loi C-54, est d'obliger un tribunal à en tenir compte chaque fois qu'il impose une peine à une personne reconnue coupable d'une de ces infractions de nature sexuelle à l'égard d'enfants, et à examiner si, en l'espèce, compte tenu du délinquant qu'il a devant lui, de la nature de son comportement criminel ou de sa conduite devant le tribunal, il y a lieu de restreindre l'accès de cette personne à Internet ou à d'autres technologies qui pourraient autrement faciliter une récidive de sa part.
    En ce moment, les tribunaux le font dans la pratique, par exemple dans le cas des ordonnances de probation. Le délinquant pourrait dire, par exemple: « Je dois avoir accès à Internet pour mon travail, car celui-ci est de telle nature... ». Donc, normalement, le tribunal en tient compte dans son ordonnance. Encore une fois, le délinquant sera assujetti à une supervision déterminée par l'agent de probation — ou on pourra désigner un autre adulte qui connaît les antécédents criminels de la personne — pour veiller à ce qu'il y ait une surveillance adéquate.
    Pourrait-on faire plus pour donner davantage d'indications à la cour? Le problème, c'est que plus on est précis, plus il y a de risques d'oublier quelque chose. L'objectif était de laisser au tribunal chargé de déterminer la peine le soin de déterminer les mesures appropriées dans les circonstances, en tenant compte des arguments du ministère public quant aux façons de mieux protéger la collectivité du délinquant, ainsi que des arguments de l'avocat de la défense relativement aux mesures nécessaires dans ce cas précis.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Nous en avons suffisamment discuté. Je demande seulement que le tribunal précise quels réseaux numériques il interdit à la personne d'utiliser, afin qu'elle soit au courant. Si vous pensez que c'est un peu trop précis, très bien, mais je vais proposer la motion et vous pourrez...
    Je crois que M. Ménard voulait faire une observation.
    Monsieur Ménard.

[Français]

    J'ai assez pratiqué le droit pour savoir que certains juges ont l'habitude de rendre de nombreuses décisions dans la même matinée à l'égard de certaines catégories de crimes. Il faut savoir que les formules peuvent être extrêmement vagues. J'envisage très bien des situations en vertu desquelles les juges rendraient...
(1555)

[Traduction]

    Nous n'entendons pas du tout l'interprétation anglaise. Nous n'entendons rien. Pourriez-vous dire quelque chose...?

[Français]

    Habituellement, je parle trop, mais cette fois-ci ça va bien, je parle juste assez.

[Traduction]

    Nous entendons bien maintenant.

[Français]

    Je disais donc que j'ai assez pratiqué le droit à titre d'avocat et j'ai surtout assez entendu plaider des avocats pour savoir qu'il y a des périodes lors desquelles les juges rendent énormément de décisions. Ils peuvent en rendre jusqu'à 50 dans la même matinée. C'est le cas du juge en chef ou de celui qui prend sa place, devant qui les gens plaident coupables. On a parfois l'habitude, hélas, d'utiliser des formules consacrées.
     Je conçois parfaitement que le danger soulevé par M. Lee soit réel. En effet, les juges donnent une ordonnance, à savoir de ne pas utiliser Internet ou tout autre réseau numérique, sans ajouter quoi que ce soit. Ce danger me semble assez grand. Car dans les situations de la vie normale, de la vie professionnelle, on a accès à différents réseaux, et si on craint justement que la personne condamnée n'utilise certains réseaux numériques à des fins pornographiques, il faut qu'on le dise au juge. Ainsi, il ajoutera à sa décision l'interdiction d'utiliser Internet ou tel autre réseau numérique à certaines fins.
    Moi aussi, je crains qu'un juge ne s'arrête là, c'est-à-dire qu'il s'arrête à « ou tout autre réseau numérique ». Cela oblige les procureurs de la Couronne — et je pense que c'est normal — à exprimer leurs inquiétudes et à spécifier devant le juge quels sont les réseaux numériques que le condamné ne devrait pas utiliser.
    D'ailleurs, les explications données par Mme Morency me convainquent que l'expression est trop générale et que, dans la pratique, il faut forcer ceux qui veulent interdire des choses à préciser ce qu'ils veulent interdire, plutôt que de les laisser faire des interdictions extrêmement larges.
    Bref, c'est une bonne addition au projet de loi qui est proposée par le député de Scarborough—Rouge River, et je prévois voter favorablement.

[Traduction]

    Merci.
    Nous allons donner la parole à M. Comartin.
    Après avoir écouté vos observations sur l'amendement, madame Morency, je dois avouer que je n'ai pas trop compris si cela limite le pouvoir discrétionnaire du tribunal en ce qui concerne les peines pouvant être infligées. M. Dechert l'a laissé entendre, mais je ne vous ai pas entendue le dire.
    Pouvez-vous nous en parler? Limitons-nous le pouvoir judiciaire discrétionnaire relativement à la peine pouvant être infligée pour l'accès à ce type de communications par la personne reconnue coupable?
    Ce que j'ai dit, c'est que cela risque de le limiter. Si on utilise la formulation proposée, soit « d'utiliser Internet ou tout autre réseau numérique que le tribunal précise », alors on s'attendra à ce que le tribunal précise quels sont les autres réseaux, mis à part Internet.
    L'information que j'ai fournie au comité... Je ne suis pas une experte dans le domaine technique, mais je crois savoir que l'Internet inclut, par exemple, les réseaux locaux. J'ai déjà donné l'exemple des babillards électroniques, entre autres. Mais les experts disent que techniquement, cela ne fait pas partie d'Internet, à proprement parler, et c'est pourquoi l'autre formulation...
    En réalité, la question est de savoir qu'elle est l'intention. Que gagnons-nous ici? Premièrement, on veut s'assurer que le tribunal croit en la nécessité d'une telle condition. Deuxièmement, le tribunal devrait déterminer quelles exigences, quels paramètres devraient être imposés avec cette condition. Je pense que dans sa forme actuelle, le projet de loi donnerait au tribunal toute la latitude requise pour être aussi précis ou général que nécessaire, selon les situations.
    Le fait d'ajouter les mots « que le tribunal précise » limiterait-il cette latitude? Comme je l'ai dit, le seul risque qui me vient à l'esprit, c'est qu'un juge ne se penche pas sur cette question et ne se rende pas compte que ces autres réseaux techniques qui ne fonctionnent pas avec un protocole TCP ne sont peut-être pas considérés comme faisant partie de l'Internet que nous connaissons. Je crois qu'au bout du compte, d'une façon ou d'une autre, on prendra en considération, dans la détermination de la peine, les représentations faites au tribunal par le ministère public et la défense à l'égard de ce qui est approprié dans les circonstances et de l'intention.
    Nous le voyons actuellement. Les tribunaux le font à l'heure actuelle dans le cadre des ordonnances de probation, sans toutes ces mesures, parce qu'ils adaptent les conditions en fonction des circonstances de chaque cas. Si les conditions sont trop générales ou qu'elles vont au-delà de ce qui est nécessaire pour protéger la collectivité contre une récidive du délinquant sexuel, il pourrait y avoir un risque. Les tribunaux en sont très conscients.
(1600)
    Encore une fois, après le plaidoyer de l'avocat de la Couronne, le juge ne pourrait-il pas utiliser les mots « d'utiliser Internet ou tout autre réseau numérique » puis, grâce à ce libellé, préciser un autre forum? Ne serait-ce pas ainsi, normalement, qu'un juge procéderait pour cette partie de la détermination de la peine?
    Je crois que c'est une interprétation possible. J'essaie seulement d'aider le comité à comprendre l'intention, la façon dont le libellé pourrait être interprété... Je ne suis évidemment pas en mesure de dire que ce sera nécessairement... que le risque se matérialisera ou qu'un tribunal ne serait pas enclin à l'interpréter, car comme je l'ai dit, lorsqu'on la lit en entier, la disposition indique déjà « à moins de le faire en conformité avec les conditions imposées par le tribunal »; il y a donc une directive pour les tribunaux.
    Cela aide-t-il davantage le tribunal? C'est possible, mais comme vous le dites, je crois tout de même que le risque est plus élevé. La question est de savoir s'il s'agit d'un gros risque.
    Je ne suis vraiment pas non plus un expert dans le domaine technique, mais d'après ce que j'ai lu, à un moment donné, nous irons au-delà de la définition d'Internet ou de réseau numérique et adopterons une technologie tout à fait différente, mais pouvant tout de même être utilisée de cette manière, et avec cet amendement, nous donnerions au tribunal le pouvoir de préciser ce qui est interdit.
    Par conséquent, monsieur le président, j'appuierai cet amendement au moment du vote.
    Très bien.
    Nous avons encore deux autres intervenants, soit M. Petit et M. Lemay.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Ma question s'adresse à Mme Morency.
    Vous avez donné plus tôt des explications et avez dit que ce serait peut-être la même chose. Voici le libellé qu'on veut ajouter: « d’utiliser Internet ou tout autre réseau numérique, à moins de le faire en conformité avec les conditions imposées par le tribunal. » La formulation « les conditions imposées par le tribunal » ressemble drôlement à celle disant « que le tribunal précise ». Les mots « que le tribunal précise » équivalent à « conditions imposées par le tribunal ».
    Je reviens sur le fait qu'un juge va imposer ou répéter ces conditions vis-à-vis du condamné. Si on prend l'amendement tel qu'il est libellé, le juge parlerait de « tout autre réseau numérique que le tribunal précise ». Prenons le cas où le tribunal aurait oublié de préciser ces conditions. L'avocat de la défense, si jamais son client se faisait prendre de nouveau — le risque de récidive existe —, pourrait dire au juge que parce qu'on n'a pas précisé les réseaux que son client ne pouvait pas utiliser, on ne peut pas le condamner ou l'accuser de nouveau, ni dire qu'il a failli à ses conditions.
    En conséquence, le fait d'exiger que le tribunal ait à préciser les conditions permettrait à la défense, en tout temps, d'interjeter appel si le juge n'a pas précisé quels réseaux étaient interdits d'accès. On sait très bien qu'il y a toutes sortes de réseaux sur Internet, tels que le Wi-Fi, les systèmes électroniques et téléphoniques, sans parler des autres réseaux qui seront peut-être inventés d'ici à ce que le projet de loi soit adopté par le Sénat.
    Si le libellé dit effectivement « que le tribunal précise », le danger est de se retrouver devant une personne condamnée qui, après avoir recommencé à avoir des contacts avec des enfants de moins de 16 ans, dira au juge qu'elle ne peut pas être condamnée de nouveau parce qu'on n'avait pas précisé quels réseaux lui étaient interdits d'accès. Cela va donc limiter le pouvoir de décision du juge.
    Actuellement, avec le libellé que nous avons, à savoir « d’utiliser Internet ou tout autre réseau numérique, à moins de le faire en conformité avec les conditions imposées par le tribunal », ne laisse-t-on pas justement une plus grande latitude au juge qui pourra dire ce qu'il interdit au condamné, en répétant exactement le libellé? De cette manière, lorsque la personne sera condamnée — on parle toujours d'enfants de moins de 16 ans —, tous les réseaux lui seront interdits parce qu'il a commis une infraction à l'aide de l'un de ces réseaux. Si on oublie l'un des réseaux, il pourra récidiver à l'aide de ce réseau en disant qu'on ne lui avait pas interdit de le faire. Est-ce que cela pourrait arriver, selon le libellé de l'amendement de M. Lee?
(1605)

[Traduction]

    Je crois que j'ai déjà tenté de répondre à cela, en ce sens que le tribunal doit d'abord examiner la condition, qui indique qu'il peut soit interdire d'utiliser Internet ou tout autre réseau numérique, soit, comme on l'a proposé, tout autre réseau numérique que le tribunal précise... Le tribunal va l'interpréter. Il pourrait utiliser exactement les mêmes mots. Il pourrait dire, dans ce cas-ci, que la condition appropriée est l'interdiction d'utiliser l'Internet, point, ou alors il pourrait préciser.
    Si on avait, par exemple, la motion... si elle était adoptée, que cette formulation se trouvait dans les conditions, qu'un délinquant récidivait et tentait de se défendre en disant: « On ne m'a pas spécifié que je ne pouvais pas utiliser ce réseau », je crois qu'on aurait un argument à soulever devant la cour: y a-t-il un consensus selon lequel l'Internet inclut ceci ou n'inclut pas cela? Est-il possible d'avoir ce...? Oui. Il est possible d'invoquer cet argument.
    Encore une fois, je pense que les gens s'entendent sur la définition courante d'Internet, celle qui figure dans un dictionnaire, mais comme je l'ai dit, l'intention ici n'était pas de compliquer la question, mais de donner une orientation claire au tribunal dans de tels cas.
    Merci.
    La parole est maintenant à M. Lemay.
    J'aimerais simplement demander à tout le monde de poser des questions brèves lorsque vous vous adressez à Mme Morency ou à M. Villetorte, car nous risquons encore une fois de manquer de temps pour cette étude article par article. Nous devons entendre deux témoins vers 16 h 30 relativement au projet de loi C-4; si possible, essayez d'être brefs... Je vous en serais reconnaissant.
    Monsieur Lemay.

[Français]

    Pour ma part, je crois que nous devons voter en faveur de l'amendement. Certains, surtout ceux qui ne pratiquent pas beaucoup le droit, oublient parfois que 80 p. 100 des individus se représentent seuls devant les tribunaux, et ces individus ne savent pas ce que cela veut dire. Si nous adoptons cet article sans l'amendement proposé par M. Lee, un individu qui se représente seul ne pourra pas savoir ce que cela implique précisément.
    Peut-être que certains membres du comité connaissent davantage le Code criminel que moi qui ai exercé le droit pendant 30 ans, mais je pense que l'amendement à l'article doit être apporté. Ainsi, la Couronne pourra statuer et interdire clairement à un individu, d'autant plus à celui qui se représente seul, tel ou tel comportement. Au moins, l'individu qui se représente seul, ce qui est le cas de 80 p. 100 des gens qui font appel aux tribunaux, n'aura pas d'excuse.
    Je crois que nous devons adopter l'amendement de M. Lee.

[Traduction]

    Très bien.
    Monsieur Dechert.
    Très brièvement, monsieur le président, j'aimerais simplement faire une précision à l'intention de M. Comartin, car je crois qu'il a mal compris ce que je voulais dire tout à l'heure, soit que nous traitons ici des peines infligées aux personnes qui ont été reconnues coupables d'exploitation sexuelle d'un enfant. Un juge leur a imposé des conditions. Maintenant, l'opposition dit que le juge doit nommer précisément tous les réseaux que ces individus n'ont pas le droit d'utiliser, afin que dans l'avenir, s'ils sont pris à utiliser un réseau numérique, un autre juge ne puisse pas dire qu'ils n'ont pas respecté les conditions qui leur avaient été imposées.
    Il me semble que c'est le contraire de ce que l'opposition fait valoir, soit que nous pouvons nous en remettre au pouvoir discrétionnaire des juges, que nous n'avons pas besoin de leur lier les mains, car ils connaissent les circonstances de l'affaire, qu'ils vont utiliser leur pouvoir discrétionnaire de façon judicieuse et que par conséquent, nous pouvons compter sur eux pour infliger la peine appropriée et nous n'avons pas à préciser dans notre projet de loi qu'il faut imposer telle sentence minimale. Néanmoins, l'opposition croît qu'un juge dira — je me permets d'utiliser l'exemple de M. Lee — « Ce délinquant s'est fait installer un système d'alarme résidentiel, qui fonctionne au moyen d'un réseau numérique, alors j'en conclus qu'il ne respecte pas les conditions qui lui ont été imposées. » Alors, qu'arrivera-t-il? On le renverra en prison parce qu'il a un système d'alarme résidentiel?
    Il me semble que cela veut dire qu'ils ne font pas beaucoup confiance au pouvoir discrétionnaire du tribunal. C'est l'argument que j'essayais de faire valoir. Je tiens à le préciser à l'intention de M. Comartin.
(1610)
    Très bien.
    Quelqu'un d'autre veut-il prendre la parole?
    Monsieur Ménard.
    Nous allons ensuite revenir à M. Comartin.

[Français]

    J'ai une question très simple. Actuellement, toutes les compagnies de taxis sont reliées par des réseaux de communication qui leur sont propres. Est-ce un réseau numérique?

[Traduction]

    Je demande au comité de se reporter à la réponse écrite que j'ai fournie, dans laquelle j'explique notre interprétation de ce terme. S'il s'agit d'un réseau qui facilite la communication entre les deux — ce peut être public et privé —, je ne sais pas si c'est le même genre de réseau.

[Français]

    D'accord. Les chauffeurs de camion disposent du même type de système: ils ont des réseaux pour communiquer. Admettons qu'un individu qui occupe un emploi comme chauffeur de taxi est condamné. Je suis sûr que le juge est prêt à lui permettre d'utiliser le réseau numérique de la compagnie de taxis. Autrement, s'il perd son emploi, il ne pourra pas non plus avoir un meilleur emploi comme chauffeur de camion, puisque cette restriction ne sera pas plus respectée. Cela me paraît clairement abusif. La généralité de l'ordre de la cour est abusive.
    Quand on veut restreindre le pouvoir de quelqu'un, on doit être plus précis que vague. C'est pourquoi l'amendement proposé par M. Lee est parfaitement justifiable et réaliste. Je vous ai donné l'exemple d'un individu qui voudrait passer d'un emploi de chauffeur de taxi à celui de chauffeur de camion ou, par extension, à celui de conducteur de camion dans une mine. Dans le cadre de ces trois emplois, on travaille avec des réseaux numériques qui relient les employés les uns aux autres.
    Si on veut interdire quelque chose à quelqu'un, on doit lui préciser ce que c'est. Sinon, parce qu'on a voulu lui interdire un réseau, on lui interdit tous les autres. L'objectif de l'article était de lui défendre l'accès à un réseau, mais on lui défend l'accès à tous les autres réseaux de même nature.
    À mon avis, l'amendement présenté par M. Lee est important.

[Traduction]

    Monsieur Comartin.
    Eh bien, mes commentaires sont pratiquement du même ordre. Mon point de vue est à l'opposé de celui de M. Dechert sur cet amendement; il me semble que nous faisons exactement le contraire. Nous disons à la magistrature: « Vous disposez de ce pouvoir additionnel, et nous aimerions que vous l'utilisiez ».
    M. Lemay a tout à fait raison quand il dit que les personnes reconnues coupables doivent savoir ce qu'elles ne peuvent pas faire, mais cela permet également au juge d'être très précis. Si nous adoptons une nouvelle technologie, je crois que le libellé — celui du gouvernement dans le projet de loi actuel, ainsi que celui de l'amendement — permettrait au tribunal d'interdire à la personne reconnue coupable d'utiliser non seulement l'Internet, mais aussi tout le nouveau système, sauf dans certaines conditions. Voilà comment je vois cet amendement et pourquoi je pense que nous devrions l'appuyer.
    Merci.
    Madame Jennings.
    En tout respect pour mes collègues maître Ménard, maître Lemay et maître Comartin, je ne peux pas être d'accord avec eux. N'importe quel juge ou procureur de la Couronne qui prend ses responsabilités au sérieux préciserait, lors des audiences de détermination de la peine, quels réseaux numériques devraient être inclus dans l'ordonnance. Même quand une personne se représente seule... et je doute que dans 80 p. 100 des procès criminels, la personne accusée se défende elle-même. J'aimerais connaître le chiffre réel. Je sais que dans les procès civils, le pourcentage est élevé, mais j'aimerais voir ce chiffre. C'est un autre argument.
    Supposons qu'une personne se trouve dans la situation que M. Ménard a décrite. C'est un chauffeur de taxi qui pourrait devenir chauffeur de camion. Ensuite, il peut devenir livreur pour une compagnie minière ou une autre compagnie de transport. J'ai peine à croire que cette personne ne serait pas en mesure, lors de la détermination de la peine, d'expliquer au juge qu'il doit pouvoir utiliser ces réseaux pour communiquer, puisqu'il est chauffeur de taxi, qu'il possède également un permis lui permettant de conduire des camions lourds et que cela pourrait lui permettre d'occuper un emploi secondaire.
    Mais n'importe quel juge... Vous savez, M. Ménard a occupé des postes d'autorité dans le passé; je ne crois pas qu'en tant que ministre, il ne prenait pas ses responsabilités au sérieux. Je sais qu'il le faisait. Je suis sûre que les procureurs de la Couronne, même ceux du Québec, qui sont sous-payés et surchargés de travail — et c'est vrai qu'ils le sont, par rapport à leurs homologues des autres provinces — n'essaieraient pas d'inciter le tribunal, le juge, à prononcer un jugement si vague qu'il empêcherait le délinquant d'obtenir un emploi ou de garder son emploi, et que si le délinquant n'était pas représenté par un avocat, il ne défendrait pas son point de vue. S'il est représenté par un avocat, il revient à cet avocat de faire valoir à quels types de réseaux au juste cette personne, ce délinquant, doit avoir accès afin d'exercer un emploi rémunéré.
    Par conséquent, les libéraux n'appuieront pas cet amendement.
(1615)
    Merci.
    Monsieur Lemay.
    Excusez-moi. J'invoque le Règlement. M. Lee retire-t-il l'amendement?
    Je ne suis pas certain que c'est...
    Pourquoi tenons-nous ce débat s'il a l'intention de retirer l'amendement?
    Monsieur Lee, est-ce que vous retirez l'amendement?
    Non, je n'ai pas dit que je le retirais.
    Je ne suis pas certain que ma collègue ait tout à fait raison non plus. Il y a au moins un libéral qui va appuyer l'amendement.
    Très bien.
    L'hon. Marlene Jennings: Eh bien, l'opposition officielle, représentée par...
    Le président: Très bien. Vous savez ce que...?
    Monsieur Lemay, pourriez-vous être bref?

[Français]

     Je serai très bref, monsieur le président.
     La position dont vient de nous faire part ma collègue me pose vraiment problème. Il faut vraiment ne pas être allé souvent au tribunal, surtout au cours des dernières années et dans le cadre de causes criminelles, pour adopter une telle position.
    Madame Jennings, les derniers chiffres dont on nous a rendu compte ici même indiquent que 80 p. 100 des personnes se représentent elles-mêmes en cour. Quand les ordonnances de probation et d'interdiction ont trois ou quatre pages, le tribunal doit expliquer tout cela morceau par morceau à l'individu à qui il s'apprête à imposer une peine.
    J'essaie de convaincre ma collègue d'éviter que les choses ne soient larges à ce point et que, par le fait même, la personne ne comparaisse de nouveau devant le tribunal, ne soumette une nouvelle requête ou ne soit arrêtée et subisse encore un procès. Un simple amendement, ici aujourd'hui, permettrait de préciser ce que le tribunal peut rendre en fait de décision. Cet amendement m'apparaissait si simple et si utile. Je trouve déplorable que le Parti libéral, du moins en partie, s'y oppose.

[Traduction]

    Merci.
    Nous allons donner la parole à Mme Jennings, puis à M. Comartin.
(1620)
    Oui. Je tiens simplement à préciser que l'opposition officielle n'appuiera pas cet amendement. C'est un député libéral qui le propose, et il a dit clairement qu'il l'appuierait au moment du vote.
    Je crois que nous avons compris.
    Monsieur Comartin.
    J'aimerais dire deux choses rapidement, monsieur le président. Je ne crois pas que nous voulions prolonger cette discussion, étant donné que ce qui s'en vient est inévitable.
    D'abord, vous devez comprendre que ce que nous essayons de faire ici — ceux qui appuient l'amendement —, c'est de permettre à la police et aux procureurs de poursuivre ceux qui commettent ces infractions. Plus l'article est précis, meilleures sont leurs chances de porter des accusations et d'obtenir une condamnation. Plus le libellé est général, plus ce sera difficile pour eux.
    Je ferai une dernière observation à propos de notre magistrature. Je soutiens autant les juges que les autres membres du comité. J'ai le plus grand respect pour eux, mais je sais aussi qu'ils ne sont pas parfaits. Je vais vous donner un exemple d'un projet de loi que nous avons adopté dans le passé qui exigeait une détermination judiciaire. Il s'agit de l'exigence d'ordonner le prélèvement d'échantillons génétiques. Au cours des quatre années suivant l'adoption de cette loi, nos juges ont ordonné le prélèvement dans seulement 50 p. 100 des cas où l'ADN était obligatoire. On a oublié de le faire. Nos procureurs étaient beaucoup trop occupés. Ils n'ont pas attiré l'attention des juges sur cette exigence. Cela leur a échappé.
    Si on s'attend à ce que cette fois-ci, comme par magie, comme l'a dit ma collègue libérale, ils le fassent automatiquement, on est bien loin de la réalité du fonctionnement de nos tribunaux.
    Merci.
    Nous traitons toujours de l'amendement LIB-1.
    Nous allons procéder à un vote par appel nominal.
    (L'amendement est rejeté par 7 voix contre 4.)
    Le président: Nous allons maintenant proposer l'article 8 non modifié.
    (L'article 8 est adopté par 10 voix contre 1.)
    Le président: Vous remarquerez qu'aucun amendement n'est proposé pour les articles 9 à 14. Je suggère que nous regroupions ces articles.
    Les articles 9 à 14 sont-ils adoptés?
    Monsieur le président, je crois que les articles 13 et 14 ne devraient pas être inclus dans ce groupe. Je comprends pourquoi vous voulez regrouper les articles 9, 10, 11 et 12, mais nous créons de nouvelles infractions dans les articles 13 et 14. Ils sont très différents.
    C'est la raison pour laquelle j'ai posé la question. Ils sont peut-être différents, mais aucun amendement n'est proposé. Si vous souhaitez que nous traitions ces articles séparément, nous sommes prêts à le faire.
    Monsieur le président, je ne vois aucun problème en ce qui concerne les articles 9 à 12, comme je l'ai dit, mais j'aimerais que les articles 13 et 14 fassent l'objet d'un vote distinct.
    Très bien. Je vais mettre aux voix les articles 9 à 12.
    (Les articles 9 à 12 inclusivement sont adoptés par 10 voix contre 1.)
    Le président: L'article 13 sera mis aux voix séparément.
    (L'article 13 est adopté à l'unanimité.)
    Le président: L'article 14 sera également mis aux voix séparément.
    (L'article 14 est adopté par 10 voix contre 1.)
    (Article 15)
    Le président: Pour l'article 15, on propose l'amendement LIB-2.
    Monsieur Lee, peut-être pourriez-vous nous le présenter.
(1625)
    Je ne proposerai pas cet amendement, monsieur le président.
    Très bien. Il n'y a pas d'amendement LIB-2.
    J'ai une question, cependant. Je voudrais poser une question à Mme Morency au sujet de l'article 15 du projet de loi, plus particulièrement sur l'article 172.2 proposé. C'est un article plutôt long et technique qui vise à permettre la... Quel est le bon mot? « Provocation policière » n'est pas le bon terme, mais cela concerne les preuves et la condamnation de quelqu'un qui tente de leurrer une personne de moins de 18 ans, et d'autres scénarios.
    Si je ne m'abuse, l'article semble supprimer un grand nombre de protections qui sont intégrées dans notre Code criminel à l'intention de nos citoyens. Il le fait de façon évidente, car il crée une présomption qui, normalement, n'est pas prévue au Code criminel, mais qui existe dans certaines circonstances. Le paragraphe 172.2(3) crée une présomption, sauf preuve contraire, que l'accusé savait telle et telle chose. Le paragraphe (4) supprime un moyen de défense; dire qu'on ne savait pas l'âge d'une personne ne constitue pas un moyen de défense, à moins d'avoir pris des « mesures raisonnables » pour s'assurer de l'âge de cette personne. Ensuite, le paragraphe (5) indique que si la personne avec qui l'accusé a fait un arrangement était un agent de police ou un agent de la paix, cela ne constitue pas un moyen de défense, et à l'alinéa (5)b), on dit que le fait que la jeune personne n'existait pas ne constitue pas un moyen de défense.
    Ce que j'aimerais vous demander, c'est si le ministère de la Justice a en fait examiné... Soit dit en passant, je tiens à préciser que je ne suis pas contre l'objectif de cet article, qui est de coincer, d'inculper, de juger et de condamner les personnes qui tentent de commettre une infraction criminelle à l'égard d'une jeune personne.
    Mais je vous demande si le ministère de la Justice a élaboré des scénarios, un exercice, une simulation de situation réelle, afin de s'assurer qu'une personne innocente ne serait pas prise au piège et reconnue coupable bien malgré elle si on retire toutes ces conditions relatives à l'intention criminelle. Car d'après ce que je comprends, on pourrait être condamné même sans victime, simplement en étant piégé par les gens qui portent les accusations. Le fait d'avoir cru quelque chose d'autre ne pourrait même pas constituer un moyen de défense. Parce que la personne n'existe pas, on n'aurait pu prendre aucune mesure pour s'assurer de l'âge de la personne.
    Ma question est la suivante: Quand nous avons mis au point ce système élaboré afin d'attraper et de faire condamner quelqu'un, même en se servant de quelqu'un qui n'existe pas et sous la direction de la police, le ministère de la Justice l'a-t-il vérifié et analysé afin de s'assurer que d'innocents citoyens ne soient pas pris au piège?
(1630)
    La nouvelle infraction proposée à l'article 172.2 corrige une lacune dans la loi actuelle; la seule disposition qui en traite actuellement est l'article 172.1, qui porte sur l'infraction relative au leurre d'enfants, soit lorsqu'un accusé communique directement avec un jeune au moyen d'un ordinateur en vue de faciliter la perpétration à son égard d'une infraction sexuelle. Par exemple, si deux adultes — mais il n'est pas nécessaire que ce soit deux adultes — se parlent directement et que leur discussion porte sur la perpétration d'une infraction sexuelle à l'égard d'une autre personne, d'un enfant, nous ne pouvons pas intervenir actuellement aux étapes de préparation comme nous pouvons le faire dans le cas d'une infraction consistant à leurrer un enfant.
    Donc, la première chose que je dirai au sujet de la nouvelle infraction proposée à l'article 172.2, c'est qu'elle vise à corriger cette lacune.
    Ensuite, en ce qui concerne les situations que la nouvelle infraction pourrait viser, on donne l'exemple d'une opération d'infiltration de la police, et c'est une possibilité, mais il est également possible qu'un adulte discute avec un père ou un voyagiste quelque part pour que l'un ou l'autre lui fournisse un enfant à des fins d'exploitation sexuelle. Dans ce cas, il y a un accord de volonté. Il y a une entente ou un arrangement entre ces deux personnes et il y a peut-être un enfant en cause pour faciliter la perpétration de l'infraction.
    La nouvelle infraction proposée vise à intervenir avant que l'enfant ne soit agressé sexuellement, comme nous le faisons actuellement en ce qui concerne l'infraction de leurre d'enfant. Il pourrait arriver, cependant, comme vous l'avez déjà mentionné, qu'un adulte demande à un autre adulte de lui trouver un enfant dans le but de l'agresser sexuellement, et que le premier ignore que le deuxième est un agent d'infiltration. Je comprends que certaines personnes se demandent si nous créons cette infraction afin de normaliser une telle situation. Mes observations écrites dans l'engagement que j'ai transmis au comité visaient à rassurer... ou mes commentaires visaient à rassurer le comité sur le fait que le moyen de défense relatif à la provocation policière reste possible en vertu de l'infraction actuelle de leurre sur Internet et le reste également en vertu de la nouvelle infraction proposée.
    Pourquoi tous ces moyens de défense existent-ils? Parce que lorsque deux adultes communiquent entre eux à cette fin, il y a un accord de volonté. Dans une situation d'infiltration qui ne constitue pas une situation de provocation policière, un défendeur pourrait soutenir qu'il ne voulait pas vraiment faire cela et qu'il n'était pas d'accord avec l'autre personne, premièrement, parce qu'il s'agit d'un agent d'infiltration, et deuxièmement, parce qu'en réalité, il n'y avait pas d'enfant à rencontrer.
    L'infraction fait donc un parallèle avec l'approche que nous avons actuellement pour l'infraction de leurre sur Internet. Quant à la présomption dont vous avez parlé, elle fait déjà partie de l'infraction de leurre sur Internet. Quant à la croyance raisonnable mais erronée de l'âge, on en parle à l'article 150.1, et c'est parce que cela concerne le régime actuel relatif à l'âge du consentement. Cette infraction s'ajoute à celle prévue dans le cadre de ce régime.
    Donc, si l'accusé croit qu'il communique dans le but précis de trouver un enfant de 10 ans afin de l'agresser sexuellement, on prendra en considération la conviction de l'accusé au sujet de l'âge de la victime. C'est ce que cette disposition permet de faire, car elle doit présenter le but de... Ce sera pour commettre une infraction sexuelle à l'égard d'un enfant.
    Ce qui est différent, et ce qui ne figure pas dans l'infraction de leurre sur Internet, mais qui figure dans cette nouvelle infraction du projet de loi C-54, c'est la partie que vous avez soulignée dans le paragraphe (5), soit que même si l'autre personne est un agent d'infiltration, ou même si l'enfant n'existe pas vraiment, on peut quand même prouver l'infraction. Cela ne veut pas dire que le défendeur ne pourrait pas essayer de recourir à la défense de la provocation policière en vertu de la common law. C'est une pratique courante pour les policiers d'aller sur Internet à titre d'agent double, pas pour provoquer — si c'est le cas, on peut invoquer la provocation policière comme moyen de défense — mais pour aller sur les sites Web où les délinquants recherchent ce genre d'occasion. Ils parlent avec des gens partageant les mêmes idées...
    Le comité a entendu le témoignage d'un agent de la PPO, qui a indiqué qu'il s'agit là d'un réel sujet d'inquiétude. C'est un vrai problème. J'ai donné au comité deux exemples: dans celui du leurre par Internet, on pouvait invoquer la provocation policière comme moyen de défense, et dans l'autre, on en débattait, mais le tribunal a déterminé qu'on ne pouvait l'invoquer dans ces circonstances.
(1635)
    Le ministère de la Justice a effectivement envisagé tous les scénarios d'application de la nouvelle infraction et pensé aux individus qu'elle permettrait d'attraper. Le ministre a mentionné dans son exposé que l'objectif est d'intervenir à l'étape où l'individu s'apprête à commettre l'infraction, parce qu'on ne peut pas intervenir à cette étape sans cette mesure. En 2002, lorsqu'on a adopté les dispositions sur le leurre par Internet, le même problème s'est présenté: on ne pouvait intervenir à l'étape où l'individu s'apprêtait à commettre le crime. La nouvelle infraction visait donc à permettre aux autorités d'intervenir avant qu'un enfant ne soit agressé sexuellement, ou sur le point de l'être.
    Je vous remercie de votre franchise. Vous avez apporté une réponse assez complexe à une question nébuleuse.
    J'approuve la volonté de mettre la main au collet des prédateurs sexuels avant qu'ils ne passent à l'acte. J'y vois toutefois un piège institué par la loi. J'ai délibérément évité de parler de « provocation policière », étant donné que c'est un moyen de défense. Mais sommes-nous en train de créer un piège dans la loi? Nous admettons tous que la disposition a été conçue dans un but précis. Par contre, le ministère a-t-il envisagé la possibilité qu'elle permette d'appréhender d'autres individus, si elle est utilisée à mauvais escient ou de mauvaise foi? Ainsi, si la police manque de preuves pour appréhender l'auteur d'un vol de banque, elle pourrait se servir de cette disposition pour monter un coup contre lui et ainsi procéder à son arrestation.
    C'est bel et bien un piège qui serait ainsi institué par la loi, et il n'y en a aucun autre dans tout le Code criminel. C'est peut-être dommage que nous ne puissions pas coincer, avant qu'ils ne passent à l'acte, les individus qui envisagent de commettre un vol de banque, un meurtre ou un autre crime. Mais c'est quand même un piège institué par la loi. Je demande simplement au ministère ou au gouvernement de nous rassurer, de nous confirmer qu'il s'est penché là-dessus, et que la disposition ne permettra pas de piéger des citoyens qui sont par ailleurs innocents.
    Comme je l'ai dit, nous croyons que cette disposition va combler une lacune. Nous avons pris le temps d'examiner les problèmes potentiels et les différents scénarios possibles. Or, dans la common law et dans la disposition relative à l'infraction contenue dans le projet de loi, des mesures de protection sont prévues pour les tribunaux, de façon à éviter qu'une personne soit accusée à tort si quelqu'un finissait par se servir de cette disposition à mauvais escient, ce qui est fort improbable. La décision R. v. Sargent de 2010 de la cour provinciale de l'Alberta, que j'ai remise au comité, constitue un exemple de défense de provocation policière qui n'a pas fonctionné. Par contre, cette même défense a été couronnée de succès dans la décision R. v. Bayat de 2010 de la Cour supérieure de justice pour la province de l'Ontario.
    Merci, monsieur le président.
    Merci.
    Monsieur Comartin, la parole est à vous.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais souligner, pour le compte rendu, que je voterai contre le projet de loi en raison des peines minimales obligatoires prévues aux articles 172.2 et 173. Par contre, je tiens aussi à préciser que, mis à part le problème des peines minimales obligatoires, la modification proposée par le gouvernement est bienvenue et absolument nécessaire, puisqu'elle permet aux forces policières et aux procureurs de mettre la main au collet de ceux qui se livrent à ce genre d'activité. Je voulais simplement le souligner.
    Toutefois, les peines minimales obligatoires vont à l'encontre des besoins, selon tout ce que nous avons entendu. Les auteurs de ce genre d'infractions sont condamnés à l'emprisonnement de toute façon, mais, à mon avis, il faut absolument laisser aux tribunaux le pouvoir d'imposer les peines qui conviennent, qu'il s'agisse de courtes ou de longues peines.
(1640)
    Merci.
    Je vais maintenant mettre aux voix l'article 15 sans modification. Nous procéderons à un vote par appel nominal.
    Étant donné qu'il n'y a aucune modification, je propose que nous procédions au vote d'une série d'articles.
    M. Comartin a énuméré un certain nombre d'articles qu'il préfère que nous mettions aux voix séparément. Nous les avons ici et nous les regrouperons dès que possible.
    Très bien.
    Nous allons procéder à un vote par appel nominal. Madame la greffière, allez-y, s'il vous plaît.
    Je précise que M. Petit a voté oui. Il a d'abord dit non, puis il a changé son vote.
    J'invoque le Règlement, monsieur le président: je propose que nous adoptions une motion disant que nous sommes d'accord à l'unanimité pour que M. Petit change son vote.
    M. Comartin propose que nous permettions à M. Petit de changer son vote non pour un oui. Est-ce que tout le monde est d'accord?
    (La motion est adoptée.)
    (L'article 15 est adopté. [Voir le Procès-verbal])
    (Les articles 16 à 19 inclusivement sont adoptés par 10 voix contre 1.)
    (Article 20)
    M. Comartin désire parler de l'article 20.
    Je suis d'accord pour que nous procédions à un seul vote pour les articles 20 à 30, mais j'aimerais d'abord poser deux questions au témoin.
    D'une part, madame Morency, la plupart de ces articles sont des ajouts. Pour le compte rendu, pourriez-vous expliquer en quoi consistent les articles 20 à 27?
    D'autre part, l'article 29 porte sur le projet de loi C-16, qui n'est toujours pas adopté. Qu'arrivera-t-il si son titre est changé? Faudra-t-il alors modifier rétroactivement le projet de loi?
    Pardonnez-moi, mais votre dernière question portait-elle sur l'article 29, une disposition de coordination avec le projet de loi C-16?
    Oui, dans l'éventualité où le titre serait modifié.
    Je vois, je comprends maintenant. Veuillez m'excuser. Ce sera changé le moment venu...
    M. Joe Comartin: Oui.
    Mme Carole Morency: D'accord. Je pense que je vais devoir prendre la question en délibéré. Je crois que l'article est manifestement une disposition de coordination entre le projet de loi et ce numéro. À mon avis, le numéro attribué au projet de loi permet de l'identifier même si le titre change. Les rédacteurs et la greffière pourront toutefois nous aviser si cela pose problème.
(1645)
    Très bien.
    Par contre, je pense que la disposition de coordination vise à identifier le plus précisément possible le projet de loi et la session dans laquelle il a été déposé. Même si le titre changeait, nous saurions quand même qu'il s'agit du projet de loi C-16 de la présente session.
    D'accord.
    Pourriez-vous répondre à l'autre question?
    Vous m'avez demandé de vous décrire de façon générale ce qui est prévu aux articles 20 à 27 du projet de loi C-54. Les articles 20 et 21 énumèrent les nouvelles infractions proposées dans le projet de loi pour les dispositions du Code criminel qui visent à faciliter le témoignage d'enfants victimes lors des procédures criminelles. Puisque l'un des objectifs principaux du projet de loi C-54 est d'uniformiser la manière de procéder, les enfants victimes des nouvelles infractions auront le droit de témoigner derrière un écran ou autrement, au même titre que ceux qui sont victimes de tout autre type d'infraction d'ordre sexuel.
    L'article 22 vise aussi à uniformiser les pratiques dans le cas de prélèvement d'ADN pour des infractions semblables dans le but d'obtenir une déclaration de culpabilité. Les articles 22 et 23 concernent la Loi sur l'enregistrement de renseignements sur les délinquants sexuels, et ont pour objectif d'uniformiser les façons de procéder.
    À la fin du projet de loi, vous trouvez une disposition de coordination entre ces articles et les modifications déjà apportées aux articles du Code criminel en vertu de l'ancien projet de loi S-2, qui a reçu la sanction royale et qui entrera bientôt en vigueur. Ces articles et la disposition de coordination visent à ajouter les nouvelles infractions au Code criminel une fois que les deux lois seront en vigueur, et à faire en sorte que les mêmes façons de procéder seront utilisées pour traiter ces infractions, conformément à ce qui a été prévu dans le projet de loi S-2.
    L'article 24 porte sur la disposition relative aux délinquants dangereux du Code criminel. Nous y ajoutons la nouvelle infraction d'entente et d'arrangement visant une infraction d'ordre sexuel à l'égard d'un enfant, et deux infractions de proxénétisme mettant en cause des enfants. Encore ici, nous essayons d'uniformiser. Lorsque des articles sont modifiés ici et là au cours des années, il arrive que certains éléments soient oubliés. Nous essayons d'adopter une démarche uniforme.
    L'article 25 porte sur la disposition relative aux délinquants à contrôler. La liste...
    L'objectif de cet article est le même que celui de l'article 24, n'est-ce pas? Il s'agit simplement d'une autre infraction.
    L'objectif est le même, mais...
    Il y en a beaucoup plus.
    ... nous ajoutons d'autres infractions qui ne figurent actuellement pas au Code criminel. Encore ici, nous cherchons à uniformiser les façons de procéder lorsque nous traitons des infractions d'ordre sexuel à l'égard des enfants.
    L'article 26 propose une modification similaire à la disposition d'engagement de ne pas troubler l'ordre public, dont nous venons de discuter au sujet de LIB-1. L'article permettrait au tribunal d'imposer à un individu les deux nouvelles conditions proposées, s'il a des motifs raisonnables de croire que celui-ci pourrait commettre l'une des infractions énumérées. Il s'agit d'ajouter les deux nouvelles infractions que propose le projet de loi C-54, ainsi que... Il s'agit de deux conditions et de deux infractions.
    L'article 27 modifie la formule 5.04, une ordonnance de prélèvement d'ADN, et ce, parce que nous avons modifié les dispositions concernant l'autorisation de prélèvements pour les deux nouvelles infractions.
    Pardonnez-moi, mais était-ce...?
    Le temps est écoulé. Vous n'avez pas besoin de parler des articles 28 et 29.
    Merci, monsieur le président.
    Merci.
    Nous allons procéder au vote. Je crois que tout le monde est d'accord pour que nous votions une seule fois pour les articles 20 à 30 inclusivement.
    (Les articles 20 à 30 inclusivement sont adoptés par 11 voix contre 0.)
    Le président: Les articles 20 à 30 sont adoptés. Nous allons maintenant passer au titre abrégé. L'article 1 est-il adopté?
    (L'article 1 est adopté par 11 voix contre 0.)
    Le président: Les trois prochains articles ne devraient pas prêter à controverse. Voulez-vous que nous procédions à un vote par appel nominal?
(1650)
    Nous pouvons rapidement les passer un à la fois.
    Bien.
    Le titre est-il adopté?
    Des voix: Oui.
    Le président: Le projet de loi est-il adopté?
    Des voix: Oui.
    Une voix: Avec dissidence.
    Le président: Le projet de loi est adopté avec dissidence.
    Enfin, puis-je faire rapport du projet de loi à la Chambre?
    Des voix: Oui.
    Le président: Merci à tous.
    Nous allons suspendre la séance deux minutes pour permettre aux prochains témoins de prendre place.

    Nous reprenons la séance.
    Deux témoins sont avec nous. Tout d'abord, nous accueillons Jean-Guy Dagenais, président de l'Association des policières et policiers provinciaux du Québec.
    Nous recevons également Hirsch Greenberg, membre du Conseil d'administration de l'Association canadienne de justice pénale.
    Je vous souhaite la bienvenue à tous les deux. Veuillez nous excuser de notre retard. Comme vous pouvez le constater, nous essayons de terminer l'étude article par article d'un projet de loi. Je vous remercie d'être venus.
    Nous allons chacun vous accorder du temps pour nous présenter votre exposé. Ensuite, les membres du comité vous poseront des questions.
    Commençons avec M. Dagenais.

[Français]

    Dans un premier temps, je voudrais vous remercier de l'invitation et de l'attention que vous porterez à notre présentation.
    L'Association des policières et policiers provinciaux du Québec représente plus de 5 200 policiers syndiqués au Québec, et nous considérons que les modifications apportées à la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents vont favoriser une meilleure protection du public contre les crimes violents.
    Nous tenons à souligner l'importance de mettre l'accent sur les infractions violentes. De plus, à titre de policiers, nous sommes d'avis qu'il est de notre responsabilité, lors de nos enquêtes sur des crimes graves commis par des adolescents, de récolter de la preuve suffisamment afin que le juge puisse ordonner la détention, s'il y a lieu.
    Le projet de loi vise à modifier la loi en réduisant le fardeau de la preuve, ce qui nous aidera dans notre travail à éloigner de la rue les récidivistes d'actions violentes.
    Il est certain que par l'attribution de nouvelles obligations qui seront générées par le projet de loi C-4, de nouvelles ressources, tant du point de vue financier que du point de vue de l'effectif, devront être prévues.
    De plus, la mise en place d'un registre central facilitera le travail des corps policiers comme la Sûreté du Québec. Il faut en arriver à l'uniformisation de l'information afin d'en assurer une meilleure coordination.
    Il faut toujours s'assurer que la peine applicable aux adultes ne sera envisagée que dans les cas d'une infraction qui a été commise avec violence.
    La possibilité de lever l'interdiction de publication pour les cas les plus graves est bien endossée par les corps policiers. Il faut éviter que l'adolescent ne commette à nouveau un crime avec violence. Celui-ci peut se retrouver dans un quartier où il est important que le public soit protégé.
    À titre d'exemple, le public peut se retrouver avec un délinquant sexuel dans son quartier. L'intérêt public doit être protégé, et on peut ainsi éviter qu'un crime ne soit commis à répétition ou qu'il n'y ait récidive. Il doit y avoir une prise de conscience du jeune contrevenant que son crime est grave, et nous considérons que les modifications apportées à la loi vont réparer les torts causés aux victimes qui ont été trop longtemps laissées pour compte.
    Un adolescent n'a pas la même maturité qu'un adulte; il est vulnérable, influençable. Les modifications à la loi doivent lui faire prendre conscience de la gravité de son geste.
    À titre de policiers, notre rôle premier est de protéger la société, et nous devons avoir les outils nécessaires pour exercer notre mandat. Il faut que les adolescents qui commettent des crimes graves répondent de leurs actes lorsque les circonstances de l'infraction le justifient.
    Certaines enquêtes qui nous amènent à élucider des crimes graves commis par des adolescents nous obligent à penser que ceux-ci doivent prendre conscience de la gravité de leurs gestes, et leurs remises en liberté, souvent trop rapides, ne servent pas les intérêts de la collectivité qui mérite de pouvoir vivre dans un milieu sécuritaire.
    Il faut décourager les jeunes contrevenants de commettre d'autres infractions. Nous sommes d'avis qu'il existe des lacunes dans la loi actuelle et que des modifications s'imposent. Nous endossons le fait qu'il faut faire de la protection de la société un objectif primordial de la loi. Une loi non modifiée, qui ne correspond pas à l'objectif de vivre dans une société en toute sécurité, ne correspondrait pas à nos attentes et à nos valeurs.
    Certains adolescents n'hésiteront pas à recourir à la violence, voire à l'intimidation, pour atteindre des objectifs criminels, ce qui, à notre avis, représente une menace grave pour la collectivité canadienne. Certains adolescents, bien qu'ils n'aient pas la maturité d'un adulte, vont faire des efforts pour commettre des crimes graves, et quelle que soit la nature du crime commis, les modifications à la loi devront les dissuader de recommencer.
    À titre d'enquêteurs, nous ne devons pas être privés d'avoir en main les outils qui nous permettront de recourir aux diverses dispositions du Code criminel qui pourraient être utilisées dans nos enquêtes.
    Au fil des ans, nous croyons qu'il y a lieu d'élaborer un règlement sur les infractions graves commises par des adolescents, ce qui permettra à la police et aux poursuivants de différents milieux d'exploiter à fond les dispositions du Code criminel, de manière à diminuer l'accroissement de la menace envers la sécurité du public.
    Je vous remercie, monsieur le président.
(1655)

[Traduction]

    Merci.
    Nous allons maintenant laisser la parole à M. Hirsch Greenberg. Allez-y, s'il vous plaît.
    Je vous remercie de m'avoir invité à comparaître au nom de l'Association canadienne de justice pénale.
    J'aimerais commencer par essayer d'exprimer notre compréhension globale de l'objectif général des modifications proposées, c'est-à-dire rendre les jeunes contrevenants responsables de leurs actes et assurer la protection du public.
    Nous croyons toutefois qu'il faut changer le cadre conceptuel pour bien appliquer ces principes, car, dans la pratique, les modifications proposées arriveront difficilement à rendre les jeunes contrevenants responsables de leurs actes ou à nous mettre à l'abri de la criminalité, surtout de la criminalité chez les jeunes.
    Pour y arriver, le gouvernement du Canada et les gouvernements des provinces doivent tout d'abord avoir une vision juste de la criminalité chez les jeunes, fondée sur les faits. Quelle est la situation au niveau national? Où les crimes risquent-ils le plus d'être commis, et qui en sont les auteurs? Et surtout, quelle est la situation au niveau des collectivités? Comment touchent-ils les gens? Qu'en est-il des victimes et leurs familles, ainsi que des jeunes contrevenants et de leurs familles?
    Un deuxième élément important doit être pris en considération dans les discussions entourant la responsabilisation des jeunes et la protection du public. La criminalité chez les jeunes n'est pas seulement l'affaire des systèmes judiciaires et correctionnels; elle n'est pas non plus simplement le fait de jeunes pris isolément qui s'adonnent à des activités criminelles; les sanctions ne sont pas un gage de sécurité au sein des collectivités; et l'incarcération ou les autres peines ne constituent pas les meilleures façons d'améliorer la sécurité des collectivités. Il peut être souhaitable de sévir contre la criminalité dans certains quartiers. Je n'ai jamais entendu un argument qui justifierait d'être moins sévères à cet égard, et j'ignore pourquoi qui que ce soit défendrait une telle position. C'est un faux choix, selon moi.
    Nous devons étudier toutes les mesures qui fonctionnent, plutôt que de nous demander jusqu'où nous pouvons aller pour punir un jeune contrevenant. Nous devons répondre aux besoins de la société canadienne, des collectivités, de nos enfants et de nos jeunes, et aussi prévenir la criminalité et intervenir si un crime a été commis, tout en répondant aux besoins des jeunes contrevenants et de leurs victimes. Il faut maintenant adopter un cadre conceptuel plus efficace dans lequel tous les besoins des Canadiens, des collectivités, des victimes et des jeunes contrevenants ne s'excluent pas mutuellement. Ils font tous partie d'un tissu social, économique, culturel et psychologique complexe, et ne devraient pas être isolés comme s'ils pouvaient naître ou être compris de façon indépendante.
    Nous ne pouvons pas traiter les jeunes de criminels si nous voulons qu'ils agissent autrement. Le crime n'est pas une création des jeunes, mais des adultes. Si nous menaçons les jeunes d'une justice vengeresse et de châtiments, comment pouvons-nous nous attendre à ce qu'ils deviennent des adultes confiants et à ce qu'ils adoptent des comportements sains? Nous devons nous demander ce qu'il faut changer dans la vie des jeunes pour prévenir la criminalité, ce qu'il faut changer après qu'un jeune est passé à l'acte, et quel est le rôle de la répression dans les comportements criminels futurs.
    Dans les modifications proposées, on se demande comment dissuader et dénoncer. Il faudrait changer le cadre conceptuel et se demander plutôt comment modifier efficacement le comportement criminel d'un jeune en l'aidant à regagner confiance en lui afin qu'il soit pleinement responsable de ses actes.
    Dans les modifications proposées, on se demande comment augmenter la durée de la détention avant le procès afin de retirer le jeune de la rue. Si l'on changeait le cadre conceptuel, on se demanderait pourquoi le jeune se trouve dans la rue plutôt qu'à l'école, et comment mieux comprendre les comportements criminels des jeunes.
    Dans les modifications proposées, on se demande comment redéfinir la violence. Il faudrait plutôt chercher à comprendre le traumatisme qui pousse un jeune à tomber dans la violence.
    Dans les modifications proposées, on se demande comment couvrir un jeune de honte, puisqu'on propose de publier le nom de ceux accusés d'un crime grave. Il faudrait plutôt se demander comment faire pour qu'un jeune qui a commis un acte de violence soit moins susceptible d'adopter des comportements semblables à l'avenir.
    En guise de conclusion à propos du changement du cadre conceptuel, j'aimerais citer Robert Yazzie, juge en chef de la Nation Navajo:

Qu'est-ce qu'un contrevenant? C'est une personne qui a peu d'estime pour les relations saines et peu de respect envers les autres. Les Navajos disent que ces gens agissent comme s'ils n'avaient aucune famille. Que peut-on faire alors? Allons chercher sa famille!
    Merci.
(1700)
    Merci.
    Nous allons passer aux questions, en commençant par les libéraux.
    Madame Jennings, vous avez sept minutes.

[Français]

     Je vous remercie beaucoup de vos présentations.
    Monsieur Dagenais, vous êtes président de l'Association des policières et policiers provinciaux du Québec. J'aimerais vous demander si vous et votre association êtes au courant de la tenue d'une commission d'enquête en Nouvelle-Écosse, présidée par le juge Nunn, à propos du cas d'un délinquant, d'un jeune contrevenant. À la suite des activités déplorables de ce jeune, la population a demandé la tenue d'une enquête publique. Lors de cette enquête publique, le juge Nunn a évalué en détail la Loi sur les jeunes contrevenants et la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents. Il a fait plusieurs recommandations, dont certaines touchaient seulement le gouvernement provincial, entre autres en ce qui concerne la protection de la jeunesse ou des services du même genre. Toutefois, six recommandations touchaient la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents. Êtes-vous au courant de ces recommandations?
    D'entrée de jeu, je dirais que non, je ne suis pas au courant.
    Dans une ancienne vie, en 2007, j'étais porte-parole de l'opposition officielle en matière de justice. J'ai demandé que soit traduit le sommaire exécutif du rapport. J'ai donc en ma possession une copie traduite de ce rapport, incluant les recommandations. J'aimerais en faire parvenir une copie à vous et à M. Greenberg.
    À l'époque, j'avais envoyé ce rapport à plusieurs intervenants au Québec. Les réponses obtenues relativement aux recommandations du juge Nunn étaient assez favorables. Je vous l'enverrai par l'intermédiaire du président du comité. J'aimerais que M. Greenberg et vous le commentiez par écrit et le remettiez au président du comité afin que tous les membres du comité puissent profiter de votre expertise dans le domaine, de votre analyse et de vos considérations sur les recommandations du juge Nunn.
(1705)
    Madame Jennings, vous dites que vous aviez envoyé une copie de ce rapport à différentes organisations. Je comprends que nous ne faisions alors pas partie de la liste. En quelle année avez-vous fait cet envoi?
    C'était en 2007. Je dois dire que l'Association des policières et policiers provinciaux du Québec ne faisait pas partie de cette liste. À l'époque, le gouvernement n'avait aucun intérêt à procéder à une révision de la loi actuelle.
    Ça me fera plaisir de commenter le rapport lorsque j'en recevrai une copie.
    Ma liste d'envoi était à l'époque assez restreinte.
    Lorsque je recevrai le document, ça me fera plaisir de le commenter.
    Merci beaucoup, monsieur Dagenais.

[Traduction]

    C'est la même chose pour vous, monsieur Greenberg; j'ai le sommaire. Je peux aussi vous donner les adresses Internet où vous pouvez obtenir le rapport complet en anglais. Il s'agit d'un excellent rapport, et je dois dire que les recommandations qu'on y trouve au sujet des amendements à la loi en vigueur ont été examinées à fond.
    Malheureusement, le projet de loi C-4 ne tient pas compte de ces recommandations. C'est dommage, car si je me souviens bien, le rapport a été publié en décembre 2006. Le gouvernement a donc eu plusieurs années pour l'étudier, le prendre en considération et organiser des consultations.
    Il a décidé de ne pas mettre en oeuvre ces recommandations même si, à l'époque, on semblait s'entendre sur le sujet partout au Canada. J'ai consulté différents groupes intéressés de toutes les provinces, y compris les procureurs généraux, et tout le monde semblait penser que les recommandations du juge Nunn étaient vraiment ce qu'il fallait — rien d'autre.
    Merci.
    Merci.
    Nous allons passer à M. Ménard. Vous avez sept minutes.

[Français]

    Merci.
    Monsieur Dagenais, vous dites être en faveur d'une publication plus facile du nom des jeunes contrevenants. Certaines des personnes ayant témoigné devant le comité nous ont signalé que certains jeunes chefs de gang ne seraient que trop heureux de voir leurs noms publiés, et même encore plus heureux d'être identifiés comme des membres de gang à la une du Journal de Montréal. Ne pensez-vous pas que cela les conforte dans une vie criminelle qu'ils vont espérer poursuivre?
    Monsieur Ménard, ce qu'on remarque, c'est qu'il y a peut-être plus d'infractions graves. Vous mentionnez les gangs de rue. Or, ces derniers vont souvent se servir des plus jeunes. Je n'irais pas jusqu'à dire que c'est parce que les jeunes doivent moins répondre de leurs gestes. Après tout, on parle de jeunes qui ont commis des infractions graves telles que des meurtres prémédités. Dans de tels cas, il faut aussi protéger la société, comme je l'ai mentionné dans mon document. Souvent, les victimes ne savent pas que ces gens-là se trouvent dans leur quartier. Si l'information était rendue publique, on pourrait reconnaître ces gens. Je comprends qu'ils seraient peut-être heureux de faire les manchettes, cependant il faut aussi considérer les victimes.
    Dans certains cas où il s'agissait d'adultes, on a clairement diffuser leur identité, et on a même eu de la difficulté à les envoyer dans des maisons de transition pour cette raison.
    À partir du moment où un jeune a commis un crime grave, selon la décision du juge, il importe que son identité soit révélée afin de protéger le public, comme je l'ai mentionné dans mon document. On parle parfois de prédateurs sexuels, et malheureusement on en trouve chez les jeunes. C'est dans le but de protéger la société qu'on finit par révéler, tôt ou tard, l'identité de ces gens.
(1710)
    Si, comme parent, vous apprenez qu'un jeune dont le nom a été révélé est effectivement l'enfant d'un de vos voisins, qu'allez-vous dire à vos propres enfants au sujet de ce jeune?
    Si j'avais des enfants et que j'apprenais qu'un jeune qui habite à deux rues de chez moi avait commis un crime grave en tant que délinquant sexuel — on parle toujours de crimes graves —, il y aurait une sécurité à établir dans le quartier. Trop souvent, ces gens-là vont être libérés rapidement, se retrouver dans la société et passer incognito. Or, ils peuvent récidiver.
    Il est certain dans le cas d'infractions graves — et j'insiste encore une fois sur ce fait —, il faut révéler l'identité des délinquants et alerter les gens. Il faut que les gens soient protégés et qu'ils se protègent eux-mêmes en prenant la peine de signaler des incidents aux policiers.
    Lorsque je travaillais comme policier dans de plus petites localités, très souvent les gens nous avisaient que tel individu était revenu dans leur quartier. Les gens se protégeaient entre eux. Il faut penser aussi aux victimes. C'est une protection qui se fait entre les victimes elles-mêmes.
    C'est d'ailleurs dans ce but que je dis qu'il serait bon de rendre l'information publique. Il ne faut pas le faire dans tous les cas, mais certainement dans le cas d'infractions graves.
    Comprenez-vous pourquoi ce projet de loi s'appelle la Loi de Sébastien?
    Effectivement, je sais que ce jeune en question a perdu la vie dans un quartier de Laval à cause d'un groupe de jeunes. D'ailleurs, j'ai eu l'occasion de croiser ses parents. C'est pour cette raison que le projet de loi s'appelle la Loi de Sébastien.
    Et le meurtrier du jeune Sébastien a été envoyé devant une cour pour adultes.
    Oui.
    Il a reçu une peine d'emprisonnement à perpétuité.
    Oui.
    Sauf erreur, il est difficile d'appliquer la loi plus durement que ça.
    Il a été envoyé en prison à perpétuité. Il n'en sortira pas demain.
    Toutefois, vous savez comme moi combien de fois des prédateurs sexuels ont malheureusement été remis en liberté. On a eu un autre cas dans la région de Québec, à Sainte-Foy. Un prédateur sexuel s'est retrouvé en liberté sans qu'on ait révélé son identité. Grâce à l'honnêteté d'un bon samaritain qui a signalé avoir vu le prédateur sexuel en train d'enfermer un enfant dans le coffre arrière de son véhicule, les policiers de Québec ont pu procéder à l'arrestation. C'est grâce à ce témoin.
    Il est certain que si l'identité des personnes est révélée, les citoyens peuvent servir de témoins. Peut-on vraiment être contre ça?
    Dans le cas du jeune Sébastien, il ne s'agit pas d'un prédateur sexuel.
    Vous avez raison.
    Il y a eu une chicane entre jeunes à propos d'une fille.
    Comprenez-vous que le but du projet de loi est de modifier la loi pour que des cas comme celui de Sébastien Lacasse ne se reproduisent plus?
    Même si c'était à cause d'une jeune fille, le crime n'en était pas moins grave. Il y a quand même...
    Alors, qu'est-ce qui peut être changé dans la loi? On n'aurait pas pu lui donner plus qu'une peine d'emprisonnement à perpétuité.
    L'emprisonnement est une chose, mais je me demande parfois si le plus gros de la peine n'est pas d'être identifié en tant que délinquant et qu'on diffuse cette information. Ce n'est facile pour personne. Quand vous commettez une infraction grave, la prison, c'est une chose. Or, vous savez comme moi que les gens sortent parfois très rapidement de prison. Ils n'y restent pas tous à perpétuité.
    Est-ce le cas de M. Labonté, qui a tué le jeune Sébastien Lacasse?
    Je ne vous dis pas que c'est le cas de M. Labonté. Ça, c'est un cas d'espèce. Toutefois, on peut prendre d'autres cas de jeunes qui ont commis des infractions graves. Quand on parle d'infractions graves...
    C'est pourtant par référence à ce cas d'espèce que le procureur général a décidé de baptiser ainsi ce projet de loi.
    Sauf erreur, il serait plus difficile aujourd'hui, en vertu du projet de loi proposé, d'envoyer devant une cour pour adultes le jeune Labonté, celui qui a tué le jeune Sébastien Lacasse. Êtes-vous en faveur de ces dispositions qui rendraient plus difficile la condamnation du meurtrier du jeune Sébastien Lacasse?
(1715)
    Je ne vous dis pas que ça peut rendre la condamnation plus difficile. C'est un cas d'espèce. Or, combien de jeunes qui commettent des infractions graves, au lieu de se retrouver dans un centre de détention à perpétuité, réintègrent plutôt la collectivité, sans que leur identité soit révélée, et récidivent? Il faut peut-être empêcher la récidive.

[Traduction]

    Merci.
    Nous allons passer à M. Hyer.
    Bienvenue. C'est la première fois que vous vous joignez au comité, n'est-ce pas? Vous disposez de sept minutes.
    Si vous n'y voyez pas d'inconvénient, je vais donner la parole au suivant. Mais merci quand même.
    Je vous en prie.
    Nous allons donc passer à M. Petit. Vous avez sept minutes.

[Français]

    Je vous remercie, monsieur le président.
    Bonjour, monsieur Dagenais. Je vous remercie d'être venu. Vous m'avez dit que vous aviez bravé la tempête, alors je suis bien content que vous soyez avec nous, vivant et en bonne santé.
    J'aimerais attirer votre attention sur certains de vos propos. Vous avez dit que ça pouvait faciliter le travail des policiers, de façon générale. D'après la façon dont on a préparé le projet de loi, une infraction grave n'est pas une simple infraction comme il s'en commet tous les jours, comme un vol à l'étalage. Il s'agit d'infractions graves. Il s'agit habituellement d'infractions à l'égard de biens de plus de 5 000 $, d'infractions susceptibles de mettre en danger la vie publique, de méfaits publics, de possession non autorisée d'arme à feu, etc. Ce sont des infractions graves. C'est la première des choses qu'on veut bien cerner.
    Je voudrais connaître votre opinion sur un deuxième aspect. Au Québec, comme dans les autres provinces — il ne faut pas s'imaginer que nous sommes parfois différents —, quand un jeune a commis beaucoup d'infractions, il y a beaucoup de sanctions extrajudiciaires. Vous savez comme moi que c'est très difficile de savoir quel genre de sanction extrajudiciaire l'individu a reçu. Une personne peut être allée jusqu'à sept fois devant un tribunal de la jeunesse et avoir reçu des sanctions extrajudiciaires sans qu'on le sache, parce que tout est confidentiel, on ne la transfère pas, et ainsi de suite.
    Premièrement, êtes-vous favorable à ce que le système judiciaire soit informé des sanctions extrajudiciaires imposées aux jeunes, ce qui permettrait de voir la progression qui s'est faite? Bien souvent, le juge ne le sait pas. Aujourd'hui, il ne le sait toujours pas, et ça ne changera pas, à moins qu'on n'établisse un tel registre.
    Vous dites que ça va faciliter le travail des policiers. Pensez-vous que ça puisse vous aider de connaître les sanctions extrajudiciaires qu'a reçues le jeune au cours des huit dernières années, par exemple?
    Vous avez raison, monsieur Petit.
    Trop souvent on s'est présenté devant la cour dans des cas où, parce qu'il s'agissait d'un mineur, il n'y avait pas de registre. C'est dans ces cas qu'il y a récidive. Les jeunes ne lisent pas nécessairement les lois, mais lorsqu'ils passent devant un juge, ils savent pourtant qu'ils seront remis en liberté après leur peine. Puis, c'est une infraction après l'autre. Ils se disent qu'ils ont une certaine impunité.
    Les procureurs de la Couronne doivent établir le fardeau de la preuve, mais ce sont les policiers qui, par leurs enquêtes, doivent obtenir suffisamment de preuves pour porter des accusations. Souvent, l'absence de registre, dans le cas des mineurs, facilite la récidive.
    Comme c'est mentionné dans mes notes, il est important de faire prendre conscience aux adolescents qui commettent des crimes graves qu'à un moment ou un autre, ils vont être sanctionnés. À partir de là, le registre va aider aux enquêtes policières. Ce n'est pas facile pour nous.
    Prenons le cas d'un jeune qui est devant le juge, lequel saurait qu'il comparaît régulièrement depuis 10 ans devant un tribunal de la jeunesse et qu'il reçoit des sanctions extrajudiciaires. Croyez-vous que le fait d'avoir pris connaissance d'un registre des sanctions extrajudiciaires puisse aider le juge à rendre une meilleure décision? Comme policier, vous avez ces informations et vous êtes en mesure d'aller voir le procureur de la Couronne et de lui expliquer la situation.
    Nous avons toujours le fardeau de la preuve. Nous travaillons avec le procureur de la Couronne. Dans le cas de personnes majeures, nous soumettons toujours ce qu'on appelle le plumitif des infractions criminelles. Nous pouvons dire au procureur que c'est la quatrième fois qu'un individu est arrêté pour la même infraction; c'est un cas de récidive. Nous ferions la même chose pour les jeunes. On parle ici d'infractions graves à répétition. On ne parle pas d'une exception.
    Comme policiers, on remarque souvent que ce sont toujours les mêmes personnes que l'on arrête dans certains quartiers et à certains endroits. Ce sont toujours les mêmes noms qui reviennent. À l'aide du registre, on peut dire au procureur que c'est la quatrième fois qu'un individu est arrêté pour telle infraction, qu'il y a eu récidive de sa part d'un endroit à l'autre. Dans le cas d'un jeune, il va peut-être récidiver à l'extérieur de la ville ou de la province. C'est donc important pour les policiers de déclarer au procureur qu'il y a eu récidive dans ce cas précis à trois, quatre, cinq ou six reprises. C'est pourquoi, comme je l'ai mentionné, il est important de disposer d'un registre, puisqu'on a le fardeau de la preuve.
(1720)
    Monsieur Dagenais, vous savez que présentement, quand quelqu'un désire se présenter devant un tribunal pour adultes, le procureur de la Couronne doit adresser la demande au juge du tribunal dans le cas où il estime que la cause devrait être entendue par un tribunal pour adultes.
    En vertu du nouveau projet de loi que nous proposons, dans le cas d'un meurtre, d'une tentative de meurtre, d'un homicide involontaire, d'une accusation d'agression sexuelle grave et ainsi de suite, ce serait automatique. La Couronne serait tenue d'informer le juge des raisons pour lesquelles elle ne souhaite pas soumettre le cas à un tribunal pour adultes. Consentiriez-vous comme moi que, dans ces quatre cas très graves — je ne souhaiterai jamais qu'un jeune soit obligé de passer par ce processus, c'est terrifiant et sa vie est en jeu —, ce soit automatique et que l'inverse soit permis, c'est-à-dire que ce soit le procureur de la Couronne qui puisse décider que le jeune ne doit pas aller devant un tribunal pour adultes? Que pensez-vous de cette proposition?
    Comme policiers, nous sommes d'accord. Le procureur de la Couronne, à la lumière des informations qu'il aura, estimera si le jeune ne doit pas passer devant une cour de justice pour adultes.
    Cependant, comme je l'ai mentionné dans mes commentaires, le rôle du policier consiste à protéger la société. Malheureusement, et vous l'avez très bien mentionné, il faut considérer le cas des infractions très graves. Nous sommes tout à fait d'accord avec cela.

[Traduction]

    Merci.
    Il vous reste chacun deux ou trois minutes pour poser vos questions.
    Vous avez deux minutes, madame Jennings.
    Le ministre de la Justice a mené une série de consultations publiques, qu'il a gardées privées, auprès d'un certain nombre de groupes intéressés partout au Canada. Pour autant que je sache, nous n'avons pas la liste des groupes qui y ont participé. Est-ce que vous ou vos organismes avez participé à ces consultations sur le projet de loi C-4?
    Pas que je sache.

[Français]

    Et votre organisation, monsieur Dagenais?
    Pas dans le cadre du projet de loi C-4 .
    Merci.

[Traduction]

    Merci.
    Nous allons passer à M. Lemay.

[Français]

    Je prends au bond la balle de Mme Jennings. Je suis très surpris, monsieur Dagenais. Une table ronde nationale a été organisée. Selon les documents dont nous disposons et que nous avons finalement obtenus du parti gouvernemental dans le cadre de l'examen approfondi de la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents, le ministre de la Justice, M. Nicholson, a invité les ministres des provinces et des territoires. Les consultations ont commencé à Vancouver et se sont poursuivies. Les participants représentaient les groupes suivants: magistrature, procureurs, avocats de la défense, responsables des programmes d'aide juridique, corps policiers et GRC.
    Êtes-vous en train de nous dire aujourd'hui que le plus important corps policier du Québec n'a pas participé à cette table ronde nationale sur la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents? Est-ce exact?
    Je ne vous parle pas au nom de la GRC, je vous parle...
    Non, non, je parle de vous.
    Nous, les policiers provinciaux, n'avons pas participé à cette table ronde, du moins je n'y ai pas participé à titre de président de l'association.
    Mais est-ce que quelqu'un de votre organisation y a participé? Je ne parle pas de la GRC; je parle de l'Association des policières et policiers provinciaux du Québec. Vous représentez la Sûreté du Québec, vous êtes partout sur le territoire québécois, et vous me dites ne pas avoir participé à cette table ronde.
    Peut-être la Sûreté du Québec l'a-t-elle fait, mais pas l'Association des policières et policiers provinciaux du Québec. Moi, je représente le syndicat.
    Qui représentez-vous?
    Je représente les policiers de la Sûreté du Québec, le syndicat. Quelqu'un de la direction de la Sûreté du Québec a peut-être participé à cette table ronde.
    Je m'excuse, mais vous représentez des membres syndiqués de la Sûreté du Québec qui sont tous les jours — et c'est ce que vous venez de nous dire — aux prises avec ces problèmes. Or vous dites ne pas avoir été sensibilisé à cela. J'en suis très surpris. Si c'est le cas, il y a vraiment là une carence...
    Il ne faut pas confondre l'Association des policières et policiers provinciaux du Québec et la Sûreté du Québec. Si quelqu'un a participé à la table ronde, c'est la direction de la Sûreté du Québec. Vous me dites qu'il y a eu un projet de loi et une table ronde qui portait sur celui-ci. Je sais qu'il y avait des représentants de la Sûreté du Québec, mais pas de notre association.
(1725)
    Merci.

[Traduction]

    C'est maintenant au tour de M. Norlock. Vous avez deux ou trois minutes.
    Merci beaucoup aux témoins d'être ici aujourd'hui.
    Monsieur Dagenais, les policiers sont les premières personnes qu'on appelle lorsqu'un crime est commis. Évidemment, ils rencontrent les victimes en premier. Habituellement, ils accompagnent les victimes tout au long de leur cheminement dans le système de justice pénale, et très souvent par la suite. En effet, de nos jours, on s'occupe des victimes un peu plus longtemps, et un grand nombre d'entre nous pense que nous devrions nous en occuper encore plus.
    Nous parlons ici de crimes très graves, comme les voies de fait, les infractions contre les biens et les crimes sexuels. Nous ne nous attardons pas aux délits mineurs. Nous oublions souvent que les victimes passent leur vie en thérapie, et que si on s'est introduit par effraction dans leur domicile ou qu'on l'a cambriolé, elles installent des barreaux à leurs fenêtres, surtout les personnes âgées.
    Pouvez-vous nous faire part de vos commentaires au sujet de vos expériences et de celles de vos membres concernant l'aide aux victimes, ce qu'elles ont vécu et comment ces évènements ont changé leur vie?

[Français]

    Dans le cadre d'un projet de loi, je comprends qu'on prenne en compte les droits des prévenus, mais comme je le mentionnais plus tôt, on oublie trop souvent les victimes. Ce sont elles qui, durant toute leur existence, doivent assumer les conséquences de l'acte qui a été commis. J'ai connu des personnes qui avaient été agressées, séquestrées et victimes d'une tentative de meurtre, mais qui se sont retrouvées seules avec elles-mêmes en quittant la cour. Elles ont dû se présenter en consultation. Or après deux ou trois mois de consultation, ces victimes qui avaient été agressées alors qu'elles allaient travailler devaient retourner au travail. Sans cesse par la suite, elles craignaient de se faire agresser ou d'être suivies. Et ça, monsieur, ça peut durer toute une vie. J'en ai connu plusieurs pour qui c'était le cas.
    Si on demande que les lois soient plus sévères, c'est parce que comme policiers, on connaît les victimes. On devrait leur accorder la priorité. Quand je dis qu'il faut éloigner les criminels de la rue, c'est dans le but de prendre en compte les victimes. Souvent, les lois visent à protéger les droits des prévenus, et nous ne sommes pas contre cela. Par contre, j'ai vu des cas où les agressions avaient été commises plus d'une vingtaine d'années auparavant, mais où les victimes vivaient toujours les mêmes traumatismes, ne pouvaient pas sortir le soir, se sentaient suivies, etc. C'est un choc post-traumatique. Certaines s'en sortent bien, mais d'autres beaucoup moins bien, surtout si elles apprennent qu'elles peuvent croiser leur agresseur dans la rue. J'ai déjà vu des cas où le prévenu avait été emprisonné pendant une dizaine d'années et où la victime, sachant qu'il avait été libéré — et ici, je vous épargne mes commentaires —, recommençait à avoir peur. Il faut aussi penser à cela.
    Merci.

[Traduction]

    Je remercie nos deux témoins de leur présence. Vos témoignages ont été enregistrés et nous aideront dans notre étude du projet de loi C-4.
    Merci tout le monde.
    La séance est levée.
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