Je voudrais tout d'abord remercier la vice-présidente du Comité, Mme Sonia Sidhu. Elle répond toujours présente si nous avons besoin d'elle.
Madame Sidhu, merci infiniment pour votre leadership et votre soutien ces derniers jours.
Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement ainsi qu'à la motion adoptée le mardi 1er février, le Comité entame son étude sur le rapport entre l'exploitation des ressources et la violence faite aux femmes et aux filles autochtones.
La réunion se déroulera en formule hybride, conformément à l'ordre adopté par la Chambre des communes le 25 novembre 2021, qui prévoit que les députés peuvent être présents dans la salle ou siéger à distance, par la voie de l'application Zoom. Le 10 mars 2022, le Bureau de régie interne a pris une directive obligeant les personnes présentes dans la salle à porter un masque, sauf si elles sont assises à leur place durant les délibérations.
Les instructions suivantes s'adressent aux témoins et aux membres du Comité.
Veuillez attendre que je vous nomme avant de prendre la parole. Si vous participez à la réunion par vidéoconférence, activez votre microphone en cliquant sur l'icône pour intervenir, et désactivez‑le quand vous n'avez pas la parole. Pour l'interprétation dans l'application Zoom, vous pouvez sélectionner le parquet, l'anglais ou le français au bas de l'écran. Si vous vous trouvez dans la salle, vous devez utiliser votre oreillette et choisir le bon canal. Je vous rappelle que vous devez toujours vous adresser à la présidence.
J'informe les témoins que le Comité doit régler quelques questions de régie interne. Je vous remercie à l'avance de votre patience.
Nous devons adopter le budget de la présente étude. La greffière vous a transmis le budget préliminaire, qui s'établit à 14 345 $, pour l'étude portant sur le rapport entre l'exploitation des ressources et la violence faite aux femmes et aux filles autochtones. Ce budget comprend des dépenses pour les microphones, entre autres.
Le Comité accepte‑t‑il d'adopter ce budget préliminaire?
Des députés: Oui.
La présidente: Bien. Le point suivant concernant cette étude très importante est celui des mémoires en langue autochtone. La greffière et les analystes ont examiné la possibilité de recevoir des mémoires en langue autochtone dans le cadre de l'étude sur le rapport entre l'exploitation des ressources et la violence faite aux femmes et aux filles autochtones.
Je propose au Comité de consentir à recevoir des mémoires rédigés en inuktitut, en algonquin, en chipewyan, en mitchif et en pied-noir.
Nous avons été informés que les services d'interprétation et de traduction nous permettent de recevoir des mémoires en quatre langues autochtones.
Le Comité consent‑il à recevoir des documents en langue autochtone?
Des députés: Oui.
La présidente: Je souhaite donc la bienvenue à nos témoins. Nous allons changer un peu la formule habituelle. Nous sommes en direct, alors je vous demande votre coopération à tous.
Nous accueillons aujourd'hui Mme Diane Redsky, la directrice exécutive du Ma Mawi Wi Chi Itata Centre Incorporated; Mme Debbra Greig, qui est travailleuse sociale clinique et qui fournit aussi des services en santé mentale au Conseil des femmes autochtones du Yukon; Mme Ninu Kang, la directrice exécutive de l'Ending Violence Association of British Columbia, ainsi que Mme Leslie Varley, la directrice exécutive de la British Columbia Association of Aboriginal Friendship Centres. Les deux sont membres d'Ending Violence Association of British Columbia et de la British Columbia Association of Aboriginal Friendship Centres. Mesdames, soyez les bienvenues.
Je remercie nos témoins. Vous aurez chacune cinq minutes pour vous exprimer. Je lèverai le petit carton que vous voyez ici quand il restera une minute. La nouvelle formule est un peu plus souple et nous permettra d'ajouter 15 ou 20 secondes au temps alloué, mais je veillerai à ce que les membres puissent vous poser leurs nombreuses questions.
Madame Redsky, vous avez cinq minutes. Nous vous écoutons.
[La témoin s'exprime en ojibwé ainsi qu’il suit:]
Boozhoo, Shiweginin ndizhinikaas, Adik ndodem.
[Les propos en ojibwé sont traduits ainsi:]
Salutations. Je m'appelle Shiweginin et je suis du clan du caribou.
[Traduction]
Mon nom spirituel est Love Eagle. En anglais, on m'appelle Diane Redsky. J'aimerais rendre hommage au territoire traditionnel et à la Première Nation de Shoal Lake, ma communauté, qui fournit l'eau à la ville de Winnipeg. Je rends aussi hommage aux ancêtres signataires du Traité no 3, de même qu'à vos ancêtres, qui j'en suis convaincue marchent tous les jours à vos côtés.
Nous sommes ici aujourd'hui pour parler des appels à la justice 13.4 et 13.5 issus de l'Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées, et pour formuler des recommandations pour que cesse la violence que subissent les femmes et les filles autochtones en lien avec l'exploitation des ressources.
Je voudrais commencer par manifester notre gratitude aux familles des personnes bispirituelles et autres, des femmes et des filles autochtones qui sont portées disparues, qui ont été assassinées ou qui sont des survivantes. Jamais vous et les générations de familles et de personnes survivantes qui vous ont précédées n'avez renoncé à faire entendre votre voix, à réclamer le respect et un traitement équitable, la sécurité et la paix. C'est en faisant résonner votre voix, forte et puissante, que vous avez obtenu la tenue d'une enquête nationale au Canada. Merci. Meegwetch de notre part à tous.
Je salue aussi celles et ceux qui ont réalisé l'enquête nationale sur les personnes bispirituelles et autres, les femmes et les filles autochtones qui sont disparues ou qui ont été assassinées, et je rends hommage à nos familles, aux personnes survivantes et aux parties prenantes qui ont fait entendre leur voix et qui ont formulé 231 appels à la justice. J'ai présenté un exposé sur l'exploitation sexuelle et la traite des femmes et des filles autochtones au Canada dans le cadre de l'enquête nationale. Je préside le groupe de travail urbain du Plan d'action national sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées. Je considère important de mentionner, pour les fins de la présente étude, que j'ai aussi été directrice de projet au sein du Groupe de travail sur la traite des femmes et des filles au Canada qui a mené ses travaux de 2011 à 2015, et que je suis actuellement la directrice exécutive du Ma Mawi Wi Chi Itata Centre.
La question à l'étude revêt une très grande importance. Nous vous remercions de vous intéresser au rapport entre l'exploitation des ressources et la violence dont sont victimes les femmes et les filles au Canada. Je tiens à souligner pour débuter quelques rapports qui méritent votre attention relativement aux plans d'action nationaux sur les femmes, les filles, les personnes bispirituelles et autres qui sont autochtones et qui sont disparues ou qui ont été assassinées. Plusieurs plans d'action nationaux ont été préparés en appui à la mise en œuvre des recommandations et doivent faire partie prenante du processus. Le rapport du groupe urbain parle expressément de la nécessité d'élaborer les mesures en concertation. Je vais y revenir.
La Commission de protection de l'environnement du Manitoba a publié le rapport d'une étude des incidences sociales des aménagements hydroélectriques dans le nord de la province. J'incite fortement le Comité à prendre contact avec Manitoba Keewatinowi Okimakanak, ou MKO, un organisme politique du Nord manitobain dirigé par le grand chef Settee. Son rôle est également très important dans ce processus.
Je travaille dans le secteur depuis plus de 20 ans, et l'expérience que j'ai acquise, notamment pour ce qui a trait à l'exploitation des ressources… aussi appelée les « camps de travailleurs », offrent aux prédateurs un accès très facile aux femmes et aux filles autochtones, sans mentionner les personnes de nos familles qui sont particulièrement vulnérables parce qu'elles sont bispirituelles, lesbiennes, gaies, bisexuelles, transgenres, queers, en questionnement, intersexuées et asexuelles, ou 2ELGBTQQLA. Il y a un lien évident entre l'exploitation sexuelle des femmes et ces camps de travailleurs, tristement célèbres pour leur banalisation de la prostitution ou de l'achat et de la vente de services sexuels. Les coûts sociaux, physiques et financiers de ces pratiques sont la moindre de leurs préoccupations. Nos femmes et nos filles sont victimes d'exploitation sexuelle et de violence.
D'expérience, je sais que partout où se trouvent des hommes qui ont de l'argent et qui sont de passage, des femmes et des filles seront victimes d'exploitation sexuelle, et des femmes et des filles autochtones subiront une forme ou une autre de violence. Les travailleurs de ces camps ont le sentiment effrayant que tout leur est dû, et ce sentiment est perpétué par les stéréotypes sociaux dégradants comme quoi les femmes autochtones sont prêtes à tout pour de l'argent et qu'on peut leur faire subir n'importe quoi en toute impunité. Il n'est pas rare que des hommes qui agressent des femmes autochtones s'en tirent indemnes.
Je vais vous donner un petit exemple. Je vais taire le nom de la ville et de l'organisme parce que je n'ai pas leur autorisation. L'important à retenir est que c'est quelque chose de très courant. L'organisme est situé dans une ville où il y a beaucoup d'activités d'exploitation des ressources. Son antenne locale, qui se consacre à l'autonomisation des filles, reçoit régulièrement, et j'insiste sur ce mot, des demandes d'hommes qui cherchent à acheter les services de jeunes filles. L'exploitation des ressources cause du tort à nos femmes et nos à filles, mais ces torts sont tout à fait évitables.
Je vais conclure par six recommandations.
Premièrement, il est primordial d'étudier les appels à la justice 13.4 et 13.5 pour les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées conjointement avec les quatre voies et les principes de changement formulés dans l'enquête nationale. C'est le seul moyen d'avoir une vue d'ensemble et d'en arriver au changement transformationnel nécessaire pour stopper le génocide et la violence dont sont victimes les femmes autochtones au Canada. Je vous recommande également de tenir compte de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones et du rapport de la Commission de vérité et réconciliation.
Deuxièmement, je comprends tout à fait l'importance de trouver un équilibre entre l'industrie, le gouvernement et les communautés, mais je crois aussi qu'il faut obliger les entreprises à faire preuve de responsabilité sociale pour être en mesure de comprendre les effets de leurs agissements sur le territoire et les communautés locales, et d'établir leurs plans en conséquence.
:
Merci beaucoup de votre invitation à participer à votre étude.
Je suis ici au nom de Terri Szabo. Je suis une travailleuse sociale clinique et j'offre des services en santé mentale. Je travaille auprès des membres de communautés de Premières Nations en région rurale depuis plus de 43 ans.
Je vais faire de mon mieux pour vous faire un exposé cohérent. J'ai eu très peu de temps pour me préparer.
Le Conseil des femmes autochtones du Yukon tient à ce que le Comité comprenne bien comment la colonisation a dépossédé les membres des Premières Nations du Canada de leur autonomie. L'exploitation des ressources a contribué à perpétuer le processus de colonisation. Nous avons vu l'industrie piller le territoire, sans donner aux populations de véritables possibilités de participer à l'exploitation des ressources et de conserver leur autonomie. Généralement, leurs membres occupent des emplois mal payés et ne restent pas dans l'industrie parce qu'elle ne leur offre pas de possibilités permanentes de perfectionnement et d'accès à des postes plus influents.
Il faut sensibiliser l'industrie aux souffrances des membres des Premières Nations et aux séquelles de la colonisation. Partout au Canada, et dans le Nord particulièrement, la colonisation a privé les peuples des Premières Nations de leur autonomie.
Le Comité devra déterminer à qui reviendra la responsabilité d'opérer la transformation qui s'impose pour sensibiliser les exploitants aux dommages qui ont été causés. Ils doivent voir par eux-mêmes comment les membres des Premières Nations ont été dépossédés de leur autonomie. Des ressources seront nécessaires pour leur offrir des possibilités équivalentes d'accès à l'éducation et en matière de planification des ressources.
La violence sexiste fait partie des conséquences de l'exploitation des ressources partout dans le Nord et, j'en suis certaine, dans l'ensemble du pays. Il faut sensibiliser l'industrie à l'ampleur des conséquences de l'oppression. Il faudra mettre en place des mesures d'atténuation des torts causés. Le gouvernement devra déterminer à qui reviendra la responsabilité d'opérer la transformation nécessaire au chapitre de l'éducation et de la sensibilisation dans le secteur de l'exploitation des ressources.
Il faut assurer la sécurité des femmes qui travaillent dans les sites d'extraction des ressources ou à proximité. Un premier pas serait de confier cette responsabilité à des Autochtones sur place et d'offrir un service téléphonique sans frais où les travailleuses pourront signaler ce qu'elles estiment être des actes de violence sans craindre de perdre leur emploi, y compris les remarques désobligeantes, racistes ou misogynes dans les camps de travail. Ces comportements ne peuvent plus être tolérés, et il faut prendre des mesures dès le départ pour assurer la sécurité des femmes.
Le Conseil des femmes autochtones du Yukon vous demande également de déterminer d'où doit provenir le financement pour favoriser la participation et le développement économique des Premières Nations et leur capacité d'exploiter les ressources. Il faut mettre en œuvre les ententes sur les répercussions et les retombées pour aider les Premières Nations à recouvrer leur autonomie.
Il est clair que les personnalités et les sociétés se développent à partir du soi. Si on y pense bien, la colonisation est une forme d'agression. En ce sens, les colonisateurs ont été des tyrans et les membres des Premières Nations à travers le pays ont été leurs victimes. Cette relation n'a pas changé. Le gouvernement et les exploitants de ressources ont tyrannisé les membres des Premières Nations partout et, au fil du temps, ils sont devenus passifs et dépossédés de leur autonomie.
Ils ont maintenant sombré dans l'apathie. Il faut que les choses changent, et le seul moyen d'y arriver sera d'assurer que tous les membres des Premières Nations ont suffisamment de ressources et de possibilités pour faire des changements positifs et regagner leur autonomie. C'est essentiel pour qu'ils puissent devenir des partenaires à part entière dans tout ce processus et qu'ils cessent d'être des victimes passives. Ils ne doivent plus se contenter de manier le pic et la pelle. Ils doivent pouvoir gravir les échelons pour avoir le contrôle sur ce qui se passe dans leurs communautés et sur les ressources convoitées par les exploitants et les colonisateurs depuis leur arrivée. Colonisation et pillage vont toujours de pair.
Nous voulons être sur un pied d'égalité, et nous demandons que des mesures soient prises pour offrir aux membres des Premières Nations des chances égales de relever des défis et de retrouver leur autonomie.
Vous connaissez sûrement Abraham Maslow et sa théorie de la réalisation du soi, mais je ne sais pas si vous êtes au courant qu'il étudiait les Pieds-Noirs de l'Alberta quand il est parvenu à cette conclusion. À cette époque, ce peuple était pleinement autonome.
Nous voulons que les membres des Premières Nations retrouvent cette autonomie si importante dans le processus de réalisation du soi. Ils pourront alors traiter sur un pied d'égalité avec les autres joueurs du secteur de l'exploitation des ressources.
:
Bonjour à tous. Je m'appelle Leslie Varley et je suis la directrice exécutive de la British Columbia Association of Aboriginal Friendship Centres.
Je suis membre du clan Giskaast de la Nation Nisga'a et je vis sur le territoire de la bande de Musqueam, à Vancouver. Je vous joins aujourd'hui depuis le magnifique territoire des Lekwungens, à Victoria.
Je vais vous soumettre directement nos recommandations. Il y a tant à faire, collectivement et en collaboration.
Je commencerai par rappeler que les femmes autochtones sont bien conscientes qu'elles et leurs filles sont considérées comme des dommages collatéraux par le gouvernement et le secteur des ressources, en ce sens qu'ils admettent que ce qui leur arrive est inévitable et qu'il suffit de payer. Ni le secteur ni le gouvernement ne sont pas tenus responsables de leurs travailleurs. Mes recommandations visent avant tout à assurer le financement des organismes autochtones afin que nous puissions fournir des services à nos membres, mais j'en ai d'autres.
Premièrement, il faudrait obliger l'industrie de l'exploitation des ressources à collaborer avec les femmes des nations locales et qui vivent en milieu urbain en vue de l'établissement de plans de sécurité crédibles et pratiques pour les femmes et les filles autochtones. Ces plans devront prévoir la responsabilisation des secteurs des ressources à l'égard de leurs propres activités et de leurs travailleurs.
Récemment, dans le Nord de la Colombie-Britannique, une société du secteur de l'exploitation des ressources a présenté au conseil municipal ce qu'elle a appelé un plan de conciliation visant à assurer la sécurité des femmes et des filles autochtones. Suivant ce plan, tous les hommes devaient porter le macaron d'une campagne de sensibilisation. Je pense que vous savez de quoi je parle. On n'évalue jamais l'efficacité des campagnes de sensibilisation. Il n'y a jamais de contrôle des leaders du point de vue de la sécurité des femmes. Même si elles sont inefficaces, l'industrie et le gouvernement semblent adorer ces mesures tape-à-l’œil parce qu'elles donnent l'impression qu'ils agissent.
Pour les femmes autochtones, ces mesures ne sont d'aucune utilité. Même les plus racistes peuvent arborer un macaron prometteur. C'est tout à fait inutile. Ces solutions pensées par des hommes permettent aux entrepreneurs de continuer de faire des profits sur le dos des femmes autochtones victimes de violence. Dans l'exemple dont je parle, l'entreprise exploitante de ressources n'a pas consulté les femmes autochtones avant d'établir un plan censé assurer leur sécurité. Ce n'est rien de nouveau pour nous, mais je donne cet exemple parce qu'il est récent. C'est arrivé la semaine dernière.
Il est aussi très important à nos yeux d'instaurer des mécanismes de financement réalistes et pratiques pour les Autochtones, peu importe où ils vivent. En Colombie-Britannique, nous sommes 85 % à vivre hors des réserves. À ce jour, il n'y a toujours pas de mécanisme de financement à long terme pour la lutte contre la violence faite aux femmes et l'offre de services de soutien complets. Nous devons passer par nos collègues des principaux organismes pour obtenir du financement. La British Columbia Association of Aboriginal Friendship Centres regroupe 25 centres qui reçoivent seulement du financement par projet pour le renforcement des capacités. Je vous rappelle que nous sommes en 2022 et que nous devons encore nous contenter de financement fondé sur les projets pour mener notre lutte contre la violence.
L'offre de services complets est insuffisante pour les Autochtones. Les organismes autochtones sont notoirement sous-financés comparativement aux principaux organismes. En raison du manque de services adaptés à la culture autochtone, nous avons moins facilement accès à des professionnels qui peuvent nous aider et nous diriger vers des organismes de soutien. Nous avons besoin d'un soutien adéquat dans tous ces domaines pour être en mesure de fournir les services dont nos communautés ont besoin.
La recommandation suivante concerne la police. Nous devons collaborer avec la police pour qu'elle mène des enquêtes. C'est la police qui décide si une enquête est justifiée ou non, et qui a donc le contrôle dans beaucoup de domaines. Il faut la tenir responsable en matière de collecte des données. Selon Statistique Canada, c'est la police qui est responsable de recueillir les données qui lui sont transmises, mais elles sont nettement insuffisantes.
Mon dernier point touchera le logement. Pour les femmes qui cherchent à fuir la violence, la situation est tout simplement désastreuse. Dans notre province, élever ses enfants dans un lieu sûr est devenu un luxe que très peu d'entre nous peuvent s'offrir. Les groupes autochtones urbains et les Premières Nations ont besoin de financement pour construire des logements de transition.
Trop souvent, les femmes n'ont nulle part où aller et les hommes qui les exploitent savent qu'elles ne sont pas en sécurité si elles n'ont pas de logement. Pour les femmes et leurs enfants, un logement est un ancrage, un refuge. Quand elles ont un logement, les femmes ont moins besoin de se livrer au commerce du sexe pour survivre, de subir la violence d'un partenaire et les sévices physiques, et elles peuvent mieux protéger leurs filles et leurs fils contre l'exploitation sexuelle.
Merci.
Je vous cède la parole, madame Kang.
Bonjour. Je m'appelle Ninu Kang et je suis directrice exécutive de l'Ending Violence Association of British Columbia. Je me trouve actuellement sur les territoires traditionnels non cédés des nations de Squamish, de Musqueam et de Tsleil-Waututh. C'est un grand honneur pour moi de rencontrer le Comité aux côtés de Leslie Varley.
Notre association reconnaît… Quand j'ai été invitée à témoigner devant le Comité, il m'est apparu important, considérant le contexte régional, que Mme Varley et moi… Nous sommes les directrices exécutives dans nos régions respectives, et je lui ai demandé de prendre les commandes.
Il est clair aux yeux de l'Ending Violence Association of British Columbia que nous faisons partie des structures de systèmes coloniaux et, comme l'a mentionné Mme Varley, quand nous parlons des femmes autochtones et des enjeux qui les concernent…
:
Merci infiniment, et merci à nos témoins.
Pour le premier tour de questions, six minutes seront allouées à chaque parti. Au deuxième tour, le Parti conservateur et le Parti libéral auront chacun cinq minutes, et le Bloq québécois ainsi que le Nouveau Parti démocratique auront chacun deux minutes et demie. Les partis disposeront de nouveau de six minutes au troisième tour et, au quatrième tour, nous reviendrons aux périodes de cinq minutes pour les conservateurs et les libéraux, et de deux minutes et demie pour les bloquistes et les néo-démocrates. Les conservateurs et les libéraux concluront avec cinq minutes chacun.
Nous nous sommes entendus sur cette répartition du temps pour que ce soit équitable pour tous les partis. Les partis disposent du même temps au début pour poser leurs nombreuses questions. Je vais surveiller l'horloge de près.
Madame Ferreri, nous commençons avec vous. Vous avez six minutes.
Si c'est possible, j'aimerais vraiment que chacune de vous nous soumette ses recommandations concernant l'obligation des sociétés en matière de responsabilité sociale.
La semaine dernière, j'ai eu le privilège de me rendre à Jasper et à Banff, en Alberta, et de discuter avec la cheffe de la Première Nation de Simpcw. Le pipeline rallie énormément d'appuis parce que c'est un formidable moteur de création d'emplois et de possibilités.
Où se trouve le juste équilibre? Comment faire pour favoriser la croissance économique, lutter contre la pauvreté et diminuer la violence? J'aimerais entendre vos recommandations clés à cet égard.
Je vais m'adresser à Mme Redsky. Que signifie pour vous l'obligation des entreprises en matière de responsabilité sociale?
:
Merci, madame la présidente.
Je voudrais en premier lieu remercier les témoins pour leurs merveilleux témoignages. Merci d'être des nôtres et de répondre à nos questions sur cet enjeu crucial.
Je vais adresser ma première question à Mme Varley.
Une de vos premières recommandations concerne l'obligation pour ces entreprises de mettre en place un plan pour assurer la sécurité des femmes et des filles. Pouvez-vous nous dire plus exactement ce que nous devrons prendre en compte à cet égard?
Vous avez aussi parlé de l'importance de consulter les femmes autochtones pour l'élaboration de ces plans. Cela va de soi, mais pouvez-vous nous donner quelques orientations à suivre si la décision est prise de rendre ces plans obligatoires?
:
Comme l'a expliqué Mme Redsky, il sera primordial que les Premières Nations locales et les communautés autochtones urbaines participent à l'élaboration des plans de sécurité des entreprises du secteur des ressources.
Je vais répéter ce que Mme Redsky a dit concernant les vérifications en profondeur des casiers judiciaires. Par ailleurs, le contrat des employés devrait stipuler des règles de tolérance zéro à l'égard de la violence, pour éviter aux victimes d'avoir à établir la preuve de la violence qu'elles ont subie devant la justice pénale. C'est essentiel quand on sait que la plupart des femmes autochtones ne veulent pas avoir de démêlés avec la justice. Nous ne nous sentons pas en sécurité dans ce système. Nous devons collaborer étroitement avec le secteur pour nous assurer que les plans de sécurité nous protègent vraiment.
Ce n'est pas normal selon moi que les femmes et les organismes autochtones aient à établir leurs propres plans de sécurité. Pour rétablir l'équilibre, il sera essentiel de concevoir des plans solides en concertation avec le secteur des ressources. Nous avons besoin de l'appui du gouvernement, qu'il collabore avec nous pour convaincre le secteur des ressources que ces plans de sécurité sont essentiels étant donné que, la plupart du temps, les femmes autochtones ne signalent pas ces crimes violents à la police. Les statistiques l'ont abondamment démontré, et il faut par conséquent trouver d'autres moyens de les protéger. Il faut des politiques de ressources humaines strictes pour assurer la sécurité des femmes qui vivent à proximité des camps de travailleurs et celles qui y travaillent.
:
Il y a toujours eu du financement, mais toujours dans le cadre de programmes à court terme. L'aide n'est jamais permanente, contrairement aux problèmes. Les organismes bénéficiaires sont toujours inquiets parce qu'ils ne savent jamais d'une fois à l'autre s'ils recevront du financement.
Il faut changer tout cela. Les racines des préjudices transmis de génération en génération sont profondes. Ces gens ont été dépossédés de leurs pouvoirs et ils ne peuvent donc pas les transmettre à leurs enfants et ils sont incapables de se motiver pour les retrouver. Les préjudices subis sont colossaux et il faut les réparer. Autrement, vous pourrez mettre tous les pansements que vous voudrez, mais vous n'atteindrez jamais la racine du problème. Il faut aider les gens à guérir. C'est leur esprit qu'il faut guérir. Le financement doit être permanent et suffisant pour que le travail soit confié à des professionnels plutôt qu'à des personnes qui, même avec les meilleures intentions, n'ont pas forcément les compétences voulues pour faire un réel changement.
Nous voulons atténuer les préjudices et favoriser un changement positif. Pour y arriver, il faut faire des évaluations, il faut des ressources, et il faut des gens qui sont en mesure de bien utiliser les ressources pour aider les gens à guérir. C'est un travail énorme, et le gouvernement a un déficit de 500 ans à rattraper.
:
La Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones est un instrument très important pour la reconnaissance des droits de la personne et des droits inhérents des Autochtones. Cela me ramène à ce que j'ai dit en introduction: nous avons nos propres lois et nous avons aussi nos propres solutions à des problèmes très complexes.
Pour beaucoup de communautés, la difficulté vient de ce que ces réponses ne sont jamais entendues, soutenues, financées ou évaluées adéquatement, et qu'il est donc impossible de les justifier. C'est ça la réalité. Ces réponses sont la plupart du temps ignorées, et rien ne bouge. Nous sommes coincés dans un cycle perpétuel: nous avons toutes les réponses, mais nous n'obtenons pas les ressources nécessaires pour les mettre en œuvre et opérer des changements significatifs.
La volonté, l'esprit et la vitalité, les valeurs inhérentes de notre culture sont et ont toujours été très forts. Nous sommes ici pour une raison. C'est très important selon moi. La Déclaration des Nations unies marque un pas important vers la reconnaissance de la force des Autochtones du Canada, et il faut en soutenir tous les aspects.
Je le répète, pour y arriver, il faudra le faire en concertation. L'industrie, le gouvernement et les communautés devront absolument travailler main dans la main.
Cette approche concertée est la clé et c'est seulement de cette façon que nous pourrons avancer.
Meegwetch.
J'aimerais maintenant poser une question d'ordre plus général, à laquelle tous les témoins pourront répondre.
Il faut tenir compte du développement économique de certaines communautés, ainsi que de la sécurité et de la réduction de la violence. Il faut trouver un équilibre entre le développement économique, la sécurité des femmes et la protection de l'environnement. Parfois, de tels projets peuvent avoir un impact sur les ressources environnantes. Je sais à quel point la protection de l'environnement, de la Terre-Mère, est importante, voire essentielle, pour les peuples autochtones.
Pouvez-vous nous parler de cet équilibre entre l'économie, la sécurité des femmes et la protection des ressources et de l'environnement?
:
Merci beaucoup, madame la présidente.
Je remercie également les témoins de participer à notre réunion.
J'ai entendu beaucoup de questions durant les travaux du Comité. Nous parlons très souvent de la prospérité économique associée à l'exploitation des ressources. Selon moi, le débat à ce sujet, et notamment dans une arène comme la Chambre des communes, fait abstraction du fait que la prospérité de notre pays a été et continue d'être liée à l'exploitation des terres, des territoires et des ressources. Les peuples qui vivent sur les territoires autochtones… Nous avons sombré dans la pauvreté parce que le développement s'est fait au détriment des droits de la personne et de la participation de nos peuples.
Ma première question s'adresse à Diane Redsky, avec qui j'ai le privilège de travailler à Winnipeg et que je connais très bien. Vous avez parlé des prédateurs sexuels. Une des raisons pour lesquelles cette étude est si importante est que beaucoup de prédateurs sexuels viennent dans notre communauté pour travailler dans ces industries. Il n'y a aucune vérification de sécurité ou du casier judiciaire. À cause de cette négligence, nous avons vu beaucoup d'exploitation sexuelle des femmes, des filles, des personnes bispirituelles, et même de très jeunes enfants. J'ai même entendu parler d'une jeune fille de 13 ans en Colombie‑Britannique.
Pouvez-vous nous brosser un portrait de la manière dont la crise de l'exploitation sexuelle associée aux sociétés d'extraction des ressources se répercute sur la santé et le bien-être des communautés? Je sais que j'ai seulement six minutes, mais je tiens à commencer par là avant de passer à un autre sujet.
Merci.
:
Merci, madame Gazan. Je suis très contente de vous voir.
Il y a deux aspects importants. Il est connu que partout où il y a des hommes qui ont de l'argent et qui sont de passage, il y aura une forme ou une autre d'exploitation sexuelle et de violence. Au sein du groupe de travail national, mais aussi dans le cadre de mon travail au sein d'un organisme qui offre des services de soutien en violence familiale, j'ai constaté à quel point cette dynamique est récurrente et pour ainsi dire inévitable. Les répercussions sur ces communautés et les femmes de ces communautés sont épouvantables.
Il ne faut pas oublier non plus que ces industries favorisent ou tolèrent ces comportements, ou qu'elles ferment simplement les yeux. Le silence est aussi grave que le consentement. Elles ne font rien pour mettre fin à la violence. Elles ont pourtant un important rôle et une grande responsabilité à cet égard.
J'attire à nouveau l'attention du Comité sur le rapport de la Commission de protection de l'environnement du Manitoba, qui décrit très bien la situation dans le nord de la province. Ce rapport est non seulement très instructif, mais il permet aussi de comprendre comment nous pouvons faire preuve de leadership dans l'élaboration de ces solutions.
Meegwetch.
Je vais maintenant me tourner vers Mme Varley.
L'appel à la justice 13.15 demande aux industries d'exploitation des ressources, au gouvernement et aux fournisseurs de services « de prévoir et de reconnaître la demande accrue en matière d'infrastructures sociales attribuables aux projets d'extraction et d'exploitation des ressources », et d'élargir les infrastructures sociales pour « répondre aux besoins prévus des communautés hôtes ». Nous avons de nombreux exemples de cela sur le terrain.
Pouvez-vous nous expliquer brièvement à quoi cela pourrait ressembler? Actuellement, y a‑t‑il suffisamment de financement versé aux communautés pour les aider à atténuer les conséquences et à mettre en place des plans de sécurité efficaces pour les femmes, les filles et les personnes bispirituelles?
:
Merci, madame la présidente.
Je tiens à dire pour commencer que la sécurité des femmes et des filles est primordiale et que nous devons examiner toutes les répercussions possibles de l'exploitation des ressources.
Madame Varley, vous avez parlé de tolérance zéro, et je suis tout à fait d'accord que c'est ce qu'il faut atteindre.
Madame Greig, vous nous avez demandé de déterminer à qui revient la responsabilité de sensibiliser l'industrie de l'exploitation des ressources, et je suis tout à fait d'accord. Le gouvernement, l'industrie et les communautés doivent être proactifs.
Nous avons aussi entendu parler du lien entre la pauvreté et la violence, de même que du lien entre l'exploitation des ressources et la réconciliation économique.
Ma première question s'adresse à Mme Varley ou à Mme Greig. Quelles sont actuellement les ressources utilisées pour évaluer la situation? Que se fait‑il du côté de la mise en application? Dans l'ensemble, y a‑t‑il une certaine cohérence entre les chiffres?
:
Ma réponse est la même. Nous n'avons pas les ressources nécessaires pour faire face à l'augmentation de la violence contre les femmes et les filles autochtones, en particulier dans le nord-ouest, où passe le pipeline. À ma connaissance, aucune ressource supplémentaire n'a été envoyée aux femmes et aux filles autochtones.
Je vous ai donné l'exemple de leurs ressources. Ils sont arrivés avec leur plan de sécurité, pour lequel ils n'ont pas pris la peine de consulter une seule femme autochtone, et c'était un plan ridicule.
Il n'y a pas de ressources et il devrait y en avoir. Je suis d'accord avec Diane Redsky; il est inévitable qu'il y ait de la violence, même si nous nous attendons à une tolérance zéro et que nous savons que nous sommes la marchandise. En fin de compte, cela est mis de côté.
Pourquoi le secteur ne s'y prend‑il pas à l'avance pour mettre en place des ressources solides au sein de la collectivité, par et pour les femmes et les filles autochtones? Je pense que c'est une question importante.
:
Je vais devoir regarder à nouveau. C'était par le truchement du groupe de travail national.
Cette entreprise du secteur amenait, à ses propres frais, des familles dans les camps. Ce sont principalement des hommes dans ces camps. Plutôt que de les isoler, elle fournissait des fonds pour que les familles viennent visiter les camps régulièrement. Elle cherchait constamment à résoudre les problèmes avec la communauté.
Je vais retourner dans mes notes et fournir cette information au Comité, ou je peux la transmettre à Leah Gazan pour qu'elle la transmette au Comité dès que je la trouve.
Encore une fois, nous espérons que nous pourrons trouver des entreprises qui s'engagent à faire ce que Mme Varley disait, c'est‑à‑dire agir à l'avance et vouloir vraiment résoudre les problèmes correctement avec les collectivités qui seront touchées.
:
Pour l'autre question, madame Redsky, vous avez parlé des ententes sur les répercussions et les avantages. Plus tôt, vous avez mentionné l'exemple du Québec à ma collègue.
Je fais partie de Sudbury, et la communauté minière a parlé pendant des décennies des ERA et de l'importance de ces ententes, mais je ne pense pas que beaucoup d'ERA, surtout par le passé, portaient spécifiquement sur les déterminants sociaux ou sur le logement, ou sur la violence contre les femmes. Je me demande si vous avez des exemples.
Que pensez-vous des recommandations du gouvernement fédéral selon lesquelles nous devrions envisager de financer des organisations pour fournir de l'éducation aux bases de ressources, comme l'Association minière du Canada, pour l'industrie minière, et la COSIA, pour le pétrole et le gaz, de sorte qu'elles puissent ensuite éduquer leurs membres du secteur privé afin de s'assurer que les ententes sur les répercussions et les avantages comportent des critères?
Quel rôle voyez-vous pour le gouvernement fédéral? Un grand nombre de ces ententes sont négociées avec les chefs locaux — qui, malheureusement, sont probablement des hommes — et les conseils. Pensez-vous que le gouvernement fédéral devrait prendre la direction de ce rôle d'éducation des associations afin que celles‑ci puissent ensuite éduquer leurs membres?
:
Merci beaucoup, madame la présidente.
Je crois que c'est un point important: l'hypersexualisation des femmes autochtones. J'ai soulevé ce point à un comité — à l'Halloween, les costumes comme la squaw sexy ou la Pocahottie, et comment nous sommes hypersexualisées, ce qui nous rend plus susceptibles et vulnérables à la violence.
Cela rejoint l'appel à la justice 3.7: « Nous demandons à tous les gouvernements d'offrir du soutien et des programmes de guérison continus et accessibles à tous les enfants des femmes, des filles et des personnes 2ELGBTQQIA autochtones et aux membres de leur famille » et de créer un fonds permanent qui « [tient] compte des distinctions ».
Madame Varley, pouvez-vous parler de l'importance de programmes de guérison culturellement pertinents offerts pour soutenir les collectivités et les familles touchées par la violence des travailleurs de passage travaillant dans des projets d'exploitation des ressources?
:
Je vous remercie beaucoup, madame la présidente.
Je remercie également les invités.
Je suis à peu près certaine que tous mes collègues présents, particulièrement celles du Parti conservateur qui siègent avec moi à cet important comité, sont en faveur de la tolérance zéro pour ce qui est de la violence faite aux femmes et aux filles autochtones. Mes collègues l'ont dit et je vais le répéter également. Ce que je trouve dommage dans ce que je viens d'entendre et ce que j'ai aussi observé, c'est cette insensibilité que je ressens de la part de différents intervenants dans ce dossier.
Si je vous ai bien comprise, madame Varley, le secteur n'est pas le sel responsable. Si je vous ai mal comprise, dites-le-moi. Je vois cela comme une responsabilité partagée. Le secteur de l'industrie est concerné, tout comme les communautés, le gouvernement, les élus locaux, les bars et la police. Il s'agit, pour moi, d'une responsabilité partagée.
Ma question s'adresse à vous, madame Varley.
Si les autres témoins veulent ajouter leur grain de sel, je serai enchantée de les entendre.
Si vous pouviez rassembler aujourd'hui tous ces gens autour d'une table, qui ferait quoi et le ferait quand? Voilà la question à poser. Il faut se mettre au travail ensemble, car la responsabilité ne revient pas à un groupe en particulier.
Comment voyez-vous cette responsabilité partagée et quels sont les devoirs que vous donneriez à faire à chaque personne touchée par ce que vivent les femmes et les filles autochtones?
:
Je suppose que je commencerais ici par rappeler à tout le monde que les femmes autochtones sont aussi des êtres humains. Elles ont les mêmes droits de la personne que tous les autres Canadiens et Canadiennes, et toutes les lois sur la violence contre les femmes et les filles s'appliquent en ce qui les concerne.
Je demanderais aux services policiers de collaborer avec nous pour veiller à ce qu'ils respectent ces lois de sorte que les femmes autochtones puissent signaler les cas de violence en toute sécurité. Je demanderais aux secteurs des ressources d'élaborer une politique de tolérance zéro pour leurs travailleurs de sorte qu'en cas de violence, celle‑ci soit dénoncée. Le système judiciaire ne devrait pas imposer aux femmes le fardeau de la preuve et les obliger à se revictimiser en passant par le processus judiciaire. Il faut éliminer tout cela. S'il y a des rapports de violence de la part d'hommes travaillant dans le secteur, il faut les sortir de ce secteur et ne pas leur permettre de revenir.
Je demanderais au secteur des ressources de procéder à des vérifications approfondies des références et des antécédents des personnes qui travaillent dans les secteurs, afin que nous n'introduisions pas de dangereux prédateurs dans la collectivité comme c'est le cas actuellement.
Je demanderais aux collectivités, aux municipalités, aux conseils municipaux et aux communautés autochtones de collaborer et de travailler ensemble pour se demander ce qu'ils peuvent faire pour soutenir et protéger les femmes et les filles, et pour s'assurer que les femmes et les filles autochtones, en particulier, bénéficient du même degré de protection des droits de la personne que tous les autres Canadiens.
Que devons-nous mettre en place dans nos collectivités pour nous assurer que tous ces processus sont présents?
Madame Greig, vous avez peut-être quelque chose à ajouter à ce sujet.
Mme Greig semble avoir des difficultés à obtenir l'interprétation. Pourrions-nous demander à quelqu'un des services informatiques de l'appeler pour régler ce problème?
Je sais que nous devons aussi voter ce soir et qu'il y a beaucoup de choses qui s'annoncent. Nous avons un vote à 17 h 45 et je ne veux pas retarder trop de choses.
Peut-être pouvons-nous passer à Mme Sudds pour ses six minutes, si vous voulez bien.
Madame Sudds, si vous avez quelque chose de précis à demander à Mme Greig, vous pourrez le faire pendant la dernière partie de vos six minutes. Je vous cède la parole.
:
Merci beaucoup, madame la présidente.
Je remercie sincèrement les témoins qui se sont jointes à nous aujourd'hui. J'apprends beaucoup, pour être tout à fait franche. Je vous remercie beaucoup de l'expertise et des idées que vous partagez avec nous.
Je vais commencer par Mme Varley.
J'ai lu quelques articles sur les divers programmes de prévention que vous menez au sein de votre association des centres d'amitié. Évidemment, nous entendons aujourd'hui parler d'une tolérance zéro pour la violence contre les femmes de la part du secteur des ressources.
Je me demande si vous pouvez parler de certains des programmes de prévention que vous avez essayés. C'est une question à deux volets: quel en est l'impact et qu'est‑ce que vous aimeriez faire d'autre ou que vous proposeriez qui soit fait?
:
Nous avons eu de nombreux fonds pour des projets de mise au point de certaines capacités. Nous avons travaillé avec des jeunes autochtones, par exemple, pour leur apprendre à connaître leur corps et leur pouvoir sur leur propre corps et comment elles peuvent décider si et quand quelqu'un peut les toucher et comment. Nous avons passé un certain temps à faire cela, mais c'était dans le cadre du financement d'un projet et c'est terminé.
Nous avons effectué de nombreuses recherches sur le trafic sexuel des filles autochtones qui se trouvent parfois dans nos projets de logement ou dans nos quartiers pauvres et qui sont la cible des trafiquants. Nous avons travaillé avec ces femmes et ces filles pour essayer de leur apprendre à protéger leur corps et à se protéger elles-mêmes, et à obtenir de l'aide et des ressources.
Une compagnie de téléphone nous a très généreusement fait don de 1 000 téléphones avec capacité de conversation et texte pour que, si les femmes et les filles autochtones doivent faire de l'auto-stop pour se déplacer entre leur collectivité et une ville locale ou ailleurs, elles aient, on l'espère, une certaine sécurité. Parfois, cela fonctionne. Souvent, il y a des zones mortes. Il y a encore de très nombreuses zones mortes en Colombie-Britannique pour le service cellulaire, alors ce n'est pas toujours utile.
Récemment, nous avons commencé à mettre au point une certaine formation et la capacité pour les femmes autochtones de fournir des services de soutien contre la violence à l'endroit des femmes et des filles autochtones. En général, en Colombie-Britannique, si l'on appelle une ligne d'assistance téléphonique, on n'a pas un ou une Autochtone à l'autre bout du fil. L'un des domaines dans lesquels nous avons vraiment travaillé ces derniers temps est le développement de notre propre capacité de fournir des services par et pour les femmes et les filles autochtones.
:
C'est génial. Je vous remercie beaucoup. De toute évidence, c'est un travail incroyablement important.
Pour ma prochaine question, j'aimerais simplement poursuivre avec Mme Redsky.
Auparavant, une de mes collègues vous a posé une question sur la façon dont le gouvernement, les familles et les partenaires peuvent tous collaborer afin de mettre au point des solutions communautaires pour mieux soutenir les femmes et les filles autochtones. Je pense que votre réponse était, en quelque sorte, de forcer ou de mandater l'industrie de l'exploitation des ressources à travailler avec la collectivité de manière proactive.
C'était une déclaration très dure, et j'aimerais vraiment que vous nous en disiez plus. De quoi s'agirait‑il pour que cela ait un impact réel?
:
Merci de donner suite à cet aspect.
J'aimerais commencer par dire que la plupart des industries... Cela a été très rare. En fait, dans toute ma carrière, je n'ai entendu parler que d'une seule entreprise au Québec qui a fait un effort pour être proactive en ce qui concerne ses répercussions sur la collectivité, sur le plan social, sur l'environnement, et ainsi de suite. Cela m'en dit long. Pourquoi les autres ne le font-elles pas?
Je pense que c'est un problème de ressources. Cela finit par faire ponction sur les résultats financiers, car il faut investir des ressources, suffisamment d'argent, pour bien faire les choses. Je pense que nous devons rendre obligatoires les évaluations de l'impact environnemental, et je dirais qu'une évaluation de l'impact social devrait être ajoutée à cela, avec l'engagement total des collectivités environnantes, puis il devrait y avoir des ressources adéquates pour résoudre les problèmes et investir dans ces solutions, et elles devraient faire partie de tout ce qui est mandaté.
Meegwetch.
:
Si je peux continuer, la racine de tout est le Soi. Si une personne est de nature agressive, elle sera agressive de toutes sortes de manières.
À mon avis, toutes les sociétés d'exploitation des ressources devraient faire faire des évaluations par des psychologues, et que toutes les personnes qui vont y travailler fassent l'objet de telles évaluations. On peut ainsi éliminer la misogynie et la violence. On peut dépister toutes sortes de choses grâce à des évaluations psychologiques. Cela pourrait être fait et améliorerait les choses dans tous les domaines.
La racine de toute violence et de tout comportement agressif est le Soi. Si des personnalités immatures et non développées arrivent dans ces camps, il y aura tous les ravages, de la misogynie et de la violence. Si les personnes qui arrivent sont bien développées, elles vont traiter les autres avec respect. Il faut regarder qui arrive, et on peut voir qui arrive si l'on fait des évaluations psychologiques.
Je crois que le débat sur la déshumanisation des femmes autochtones est vraiment essentiel ici. Bien des gens ne se rendent pas compte que les femmes autochtones, en temps réel, aujourd'hui, en vertu de la Loi sur les Indiens, non seulement n'ont pas les mêmes droits que les hommes, mais n'ont toujours pas les mêmes droits que les autres femmes. C'est pourquoi cette étude est si importante et pourquoi je suis si reconnaissante au Comité d'être ouvert à ces discussions vraiment difficiles.
Ma question s'adresse à Mme Kang ou à Mme Varley.
Vous avez parlé un peu de la sécurité des transports. J'ai été horrifiée lorsque les services de bus Greyhound ont été supprimés. La coalition pour les FFADA, dont votre organisation faisait partie, a signalé le besoin crucial de transports « sûrs, abordables et fiables » et a noté que leur absence entraînerait une augmentation de l'auto-stop, ce qui est en corrélation directe avec la crise actuelle des femmes et des filles autochtones disparues et assassinées dans tout le pays.
Je ne peux que penser à la route des pleurs en Colombie-Britannique, d'où vous êtes originaire, et aux histoires tragiques et non résolues que nous avons entendues.
Pouvez-vous nous expliquer comment des moyens de transport sûrs, abordables et fiables pourraient contribuer à assurer la sécurité des femmes et des filles autochtones et des personnes 2SLGBTQ+ dans les régions rurales et éloignées où se déroulent fréquemment des projets d'exploitation des ressources?
:
Je peux répondre à cette question.
J'ai grandi dans le Nord de la Colombie-Britannique, et même lorsque j'étais une fillette à l'école primaire et au début de l'école secondaire, si je me promenais dans ma petite ville, je me faisais draguer par des hommes plus âgés. Physiquement, les femmes autochtones sont toujours ciblées de cette manière et cela n'a pas changé dans ces petites villes du Nord. Aujourd'hui, l'un des meilleurs endroits où trouver des femmes autochtones est le long des autoroutes, où elles tentent de faire de l'auto-stop pour aller rendre visite à des amis ou aller chez le médecin, ou pour n'importe quelle autre raison.
Donc, oui, ces transports... Il n'y a pas que le bus Greyhound qui ferme, mais aussi d'autres secteurs qui fournissent des services. On ne peut monter dans le bus de la santé que si l'on a un problème de santé et il faut avoir une ordonnance; aussi, on ne peut se faire conduire en ville que si l'on vient d'une des collectivités autochtones, ou si l'on peut prouver que l'on va voir son médecin. C'est ridicule de voir que cet autobus roule à vide sur les autoroutes toute la journée et traverse nos collectivités parce que les gens n'ont pas les documents nécessaires pour le prendre.
Oui, cela pourrait être mieux coordonné et mieux organisé pour nos gens.
Les centres d'amitié essaient d'assurer de petits trajets entre les centres. Nous avons quelques bus et voitures là‑bas, et nous essayons de fournir des téléphones portables pour rendre la situation plus sûre pour les femmes qui, en fait, doivent faire de l'auto-stop.
Ce n'est pas sûr et nous devons créer plus de sécurité. Nous apprécions ce genre de sécurité en ville. Je peux sauter dans un bus à tout moment et aller à peu près où je veux dans un rayon de 80 km, mais dans le Nord, ce n'est pas possible et ce n'est pas sûr du tout.
:
Oui, je le peux. Très brièvement, c'est une voix très importante. C'est la voix de MKO. Cette organisation dirige vraiment cette question depuis que la Commission de protection de l'environnement du Manitoba a publié son rapport en 2018, qui est d'une importance capitale.
Je suis consciente — et me place certainement aux côtés de MKO — de sa demande d'une enquête publique dont l'objectif est de traiter toutes les répercussions que le fait de documenter l'horrible réalité des femmes et des filles autochtones a fait ressortir en ce qui concerne de nombreux projets d'exploitation des ressources, et en particulier, le rapport de Manitoba Hydro.
Il est extrêmement important dorénavant de les soutenir, de faire une enquête approfondie, comme vous le faites ici. Nous devons vraiment aller au fond des problèmes. Surtout, comment pouvons-nous prévenir cela, et comment pouvons-nous soutenir les relations qui existent?
Il est vraiment important que, dans notre société, l'industrie, le gouvernement et les collectivités travaillent la main dans la main pour veiller à ce qu'ils travaillent tous à assurer la sécurité publique, et en particulier à la sécurité des femmes et des filles autochtones dans tout ce qu'elles font.
:
Je suis d'accord avec vous.
Cela nous ramène aux recommandations de Mme Redsky sur la question holistique... Je vais revenir sur ce dont j'ai été témoin la semaine dernière. C'était très opportun pour moi, étant en Alberta et assise à une réunion de la chambre de commerce où nous parlions d'emploi, du secteur du tourisme et des pipelines.
Nous avions cette magnifique cheffe extraordinaire. C'était la première fois qu'elle était invitée à la table, et une chose étonnante s'est produite. La ville n'avait pas vu le fait que ses problèmes de logement étaient mis à rude épreuve par les travailleurs du pipeline. De nombreux Autochtones des premières nations y travaillaient, et elle a dit: « Eh bien, nous injectons de l'argent dans votre économie. » Jusqu'à ce que la ville s'assoie à la table, elle ignorait le stress qui avait été créé. Les deux parties voulaient récolter les avantages de l'exploitation des ressources et de la réconciliation économique, et elles en étaient toutes deux satisfaites.
Est‑ce que tout le monde dans ce groupe de témoins est d'accord pour dire que nous avons besoin de l'exploitation des ressources et de la réconciliation économique? Y a‑t‑il un grand « mais » après ça? Pouvons-nous convenir que nous avons tous besoin de l'exploitation des ressources pour injecter de l'argent dans notre économie?
Je tiens vraiment à remercier nos témoins d'aujourd'hui pour les recommandations très éclairantes et très solides qu'elles nous ont présentées.
J'aimerais m'attarder un peu sur ce que je commence à entendre, je crois, et qui concerne vraiment l'impunité. Cela nous ramène à certaines des choses que vous avez dites. Madame Varley, vous avez utilisé une expression vraiment très alarmante: « dommage collatéral accepté ». Les femmes et les filles autochtones sont des dommages collatéraux acceptés.
Madame Redsky, vous avez décrit les stéréotypes et la présomption que les femmes autochtones feraient n'importe quoi pour de l'argent. Il y a la drague dont a parlé Mme Varley. Madame Greig, vous avez parlé de déresponsabilisation et du fait que les femmes autochtones sont dans un état d'apathie — et c'est intéressant que vous ayez utilisé le terme « apathie ». Il est vraiment difficile pour les législateurs d'essayer de mettre au point des programmes ou des modèles de financement qui puissent s'attaquer à ce genre de notions historiques, coloniales et sociétales très profondément ancrées qui, dans bien des cas, sont probablement même inconscientes. Elles se perpétuent et sont intériorisées, mais elles se perpétuent aussi lorsque les femmes sont traitées comme des objets.
Il y a beaucoup d'argent dans le budget. Dans le dernier budget, il y avait quelque 860 millions de dollars pour la sécurité dans les collectivités autochtones. Nous avons de l'argent dans ce budget, avec 500 millions de dollars et plus pour lutter contre la violence sexiste, mais ce que j'entends de vous, c'est que les ressources ne sont pas là ou, quand elles le sont, elles ne sont pas cogérées et mises au point avec la contribution des femmes qui sont touchées.
Pouvez-vous nous donner des conseils? Que pouvons-nous faire, en particulier en tant que comité formulant des recommandations, qui nous permettra, en tant que législateurs et gouvernement, de fournir les ressources qui pourraient ensuite être utilisées pour lutter contre l'impunité accablante avec laquelle les hommes de passage et les autres dont vous parlez s'en tirent?
J'aimerais que chacune d'entre vous réponde, mais je vais commencer par Mme Redsky.
Je signale simplement que la sonnerie retentit maintenant. Nous avons presque terminé le quatrième tour. Si nous voulons le terminer, j'aurais besoin du consentement du Comité pour la continuation de notre quatrième tour, afin que nous puissions le faire. Ce quatrième tour devrait durer encore 15 minutes. J'ai besoin de l'approbation de tout le monde pour cela.
D'accord. Comme il n'y a pas de contre, nous allons poursuivre ce tour de questions.
Je vais maintenant passer la parole à Sylvie Bérubé, puis à Leah Gazan et enfin à Michelle Ferreri. Ensuite, il y a un autre tour de cinq minutes pour les libéraux.
Madame Bérubé, vous avez deux minutes et demie. Allez‑y.