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Je déclare la séance ouverte.
Bienvenue à la deuxième réunion du Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration. Aujourd'hui, le Comité entreprend son étude sur le recrutement et les taux d’acceptation des étudiants étrangers.
C'est avec plaisir que je vous présente les trois premiers témoins dans le cadre de cette importante étude. Je souhaite la bienvenue à Larissa Bezo, présidente et chef de la direction du Bureau canadien de l'éducation internationale. Nous accueillons également Francis Brown Mastropaolo, directeur des affaires internationales de la Fédération des cégeps. Il y a aussi deux représentants d'Universités Canada: Paul Davidson, président-directeur général, et Marc LeBlanc, agent principal des relations gouvernementales et internationales.
Avant de commencer, j'aimerais faire quelques observations pour la gouverne de tous les témoins.
Avant de prendre la parole, veuillez attendre que je vous nomme. Quand vous êtes prêt à parler, vous pouvez cliquer sur l'icône du microphone afin de l'activer. Toutes les observations doivent s'adresser à la présidence.
L'interprétation pour cette vidéoconférence fonctionnera pratiquement de la même façon que pour une réunion de comité ordinaire. Lorsque vous intervenez, veuillez parler lentement et clairement. Lorsque vous n'avez pas la parole, votre microphone devrait être désactivé.
Sur ce, je souhaite de nouveau la bienvenue à tous nos témoins. Vous aurez chacun cinq minutes pour faire une déclaration préliminaire, après quoi nous passerons à la période des questions.
Nous allons commencer par Mme Bezo, présidente et chef de la direction du Bureau canadien de l'éducation internationale.
Madame Bezo, vous avez la parole.
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Bonjour. Merci beaucoup de me donner l'occasion de contribuer à ces importantes délibérations. Je me joins à vous de façon virtuelle depuis Ottawa, le territoire traditionnel non cédé du peuple algonquin anishinabe.
Le Bureau canadien de l'éducation internationale, ou BCEI, regroupe plus de 150 établissements membres qui englobent tout le secteur canadien de l'éducation internationale — de la maternelle à la 12e année et jusqu'au doctorat —, et qui comptent près de 2 millions d'étudiants. Nous sommes extrêmement fiers du statut du Canada comme destination de choix pour les étudiants étrangers, et nous sommes très conscients de la nécessité de protéger, de maintenir et, si possible, d'améliorer la position du Canada dans un marché mondial où la concurrence est féroce.
Par conséquent, nous saluons l'intérêt manifesté par le Comité en vue de faire la lumière sur le traitement des demandes de visa d'étudiant, y compris les raisons pour lesquelles les taux de refus diffèrent d'un bureau canadien des visas à l'autre et la façon dont nous pouvons améliorer la situation pour maintenir les taux de refus aussi bas que possible.
Chaque lettre de refus n'est pas seulement dévastatrice pour l'étudiant qui a rempli les critères d'admission d'un établissement canadien. En effet, chaque refus représente aussi un échec du processus, un gaspillage de ressources pour l'étudiant et l'établissement d'accueil, une occasion ratée pour la collectivité où l'étudiant prévoyait d'étudier et, enfin, moins de chances de tirer parti des liens interpersonnels qui découlent de l'éducation pour promouvoir l'engagement mondial à long terme et la prospérité future du Canada.
Le problème s'aggrave. Le taux de refus des demandes de visa d'étudiant au Canada a augmenté au cours des dernières années. C'est surtout préoccupant dans le contexte de certains pays et régions, notamment l'Afrique et, en particulier, l'Afrique francophone.
Nous devons veiller à ce que ces défaillances du processus ne soient pas interprétées par les étudiants étrangers prospectifs comme un manque de respect. Les risques pour la réputation et l'image de marque du Canada sont importants.
Le secteur canadien de l'éducation internationale a connu une croissance exponentielle ces dernières années, soit d'environ 135 % depuis 2009. Cette croissance s'est produite dans le cadre d'un programme d'immigration de plus en plus ambitieux et, plus récemment, dans le contexte de la pandémie.
Pour s'adapter à la situation, Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada a dû changer de tactique et miser davantage sur la technologie pour faciliter le traitement des demandes. Malheureusement, les taux de refus des visas d'étudiant ont augmenté au même rythme que cette croissance, passant de 31 % globalement en 2016 à 53 % en 2020. Il est difficile de fermer les yeux sur l'écart grandissant entre l'ambition politique et la capacité de traitement.
Certes, il est important de se pencher sur les taux de refus des permis d'études, mais nous encourageons vivement le Comité à étudier les liens entre ce problème et les questions plus générales de cohérence et d'intégration des politiques dans l'ensemble du secteur canadien de l'éducation internationale.
Il y a trois questions que je voudrais aborder très brièvement. Premièrement, d'après ce que nous disent les établissements, il existe des disparités troublantes dans le système actuel. Nous savons que de nombreux étudiants bien qualifiés ont vu leur demande de permis rejetée — plus d'un demi-million depuis 2016. Dans certains centres de traitement des visas canadiens à l'étranger, les taux d'approbation des permis d'études ont été et demeurent extrêmement faibles, malgré l'orientation stratégique officielle de la Stratégie en matière d'éducation internationale, selon laquelle le Canada devrait diversifier la provenance des étudiants étrangers.
Le pouvoir discrétionnaire est clairement exercé, comme il se doit, au vu des préoccupations légitimes du Canada pour ce qui est de protéger l'intérêt national et de sélectionner les étudiants qui ont les meilleures chances de réussir. Par contre, pour ce qui est de savoir quand et comment exercer ce pouvoir discrétionnaire, les modalités sont souvent opaques.
Nous devons, à tout le moins, garantir un certain degré d'uniformité entre les centres de visa pour être en mesure de vérifier et de confirmer que l'exercice du pouvoir discrétionnaire, le cas échéant, s'est fait de manière équitable et conforme aux valeurs canadiennes et aux priorités du gouvernement du Canada.
Deuxièmement, en ce qui a trait à la double intention, nous encourageons le Comité à adopter une position ferme sur cette question. La double intention est un concept simple qui met en évidence une réalité, à savoir que de nombreux étudiants étrangers peuvent vouloir rester ici pour y vivre et y travailler après avoir terminé leur programme d'études au Canada. Cela leur permet de déclarer d'emblée leur intention de le faire sans qu'on leur reproche d'avoir fait de fausses déclarations à cet égard, ce qui est un effet pervers des incitatifs qui s'offrent à eux dans notre système actuel.
En effet, si la politique énoncée par le gouvernement du Canada est de combler notre déficit démographique grâce à l'immigration et d'attirer chez nous de jeunes immigrants parmi les plus doués et les plus brillants, alors tâchons de créer un programme qui reconnaît et encourage officiellement ce genre de candidats.
En ce qui concerne la double intention, il faut une approche plus intégrée...
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Merci, madame la présidente.
En dernier lieu, nous devons énoncer plus clairement nos intentions quant à la façon dont nous comptons améliorer les processus de vérification des visas d'études. Emploi et Développement social Canada, ou EDSC, doit entretenir des rapports plus efficaces avec l'industrie, les provinces, les territoires et les organismes de services communautaires pour déterminer les priorités du marché du travail en vue d'améliorer et d'éclairer les politiques.
Avec le temps, IRCC doit prendre des mesures pratiques pour améliorer ses programmes de formation, par exemple en mettant explicitement l'accent sur la formation en matière de compétence interculturelle, en évaluant de manière concrète les algorithmes actuellement utilisés pour la sélection des demandeurs afin d'y repérer des partis pris involontaires et en explorant la convergence des facteurs qui expliquent pourquoi certains bureaux des visas affichent des taux de refus élevés.
En conclusion, nous encourageons vraiment le Comité à se pencher sur les avantages et les risques liés à la mise en œuvre d'une toute nouvelle voie d'accès pour les étudiants étrangers afin de permettre à ceux qui le veulent d'étudier au Canada et d'y rester après l'obtention de leur diplôme. Il ne suffit pas de modifier légèrement le cadre actuel des visas temporaires. Nous avons besoin d'une vision audacieuse et novatrice qui vient renforcer nos objectifs en matière d'immigration et qui montre clairement que les choses ont changé au Canada. Nos membres ont très hâte d'intervenir dans ce dossier.
Je vous remercie de votre temps.
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Je vous remercie, madame la présidente.
Je tiens tout d'abord à remercier les membres du Comité de m'avoir invité à comparaître aujourd'hui.
Je suis ici au nom des 48 cégeps du Québec. Il s'agit d'établissements d'enseignement supérieur publics qui sont fréquentés par 195 000 étudiants. De ce nombre, plus de 7 000 sont des étudiants internationaux et 30 % d'entre eux viennent des pays de l'Afrique francophone.
L'accueil d'étudiants internationaux est une priorité pour les cégeps. De fait, le nombre d'étudiants internationaux augmente d'environ 15 % chaque année. Les cégeps contribuent ainsi à l'atteinte des objectifs du Canada en matière d'attraction internationale.
Selon une récente étude, nos membres considèrent que les procédures d'immigration sont le principal obstacle au recrutement international. Cela est d'autant plus vrai pour les étudiants en provenance des principaux bassins de recrutement de l'Afrique francophone.
Les cégeps constatent que, depuis plusieurs années, le taux de refus de permis d'études pour les candidats de ces pays est très élevé et qu'il tend même à s'accroître, ce qui barre la route à des milliers d'étudiants pourtant admis dans nos établissements.
Entre 2015 et 2020, les plus hauts taux de refus observables concernaient les demandes provenant de 13 pays de l'Afrique francophone. Pour plusieurs de ces pays, les taux de refus ont atteint 80 %. La moyenne régionale est demeurée supérieure à 65 %. Aucune autre région du monde n'est comparable. À titre d'exemple, les importants bassins de recrutement que sont l'Inde et la Chine présentaient respectivement des taux de refus moyens de 35 % et de 17 %.
Ces taux de refus exceptionnels nous indiquent qu'un traitement défavorable est appliqué dans le cas des candidats qui viennent de l'Afrique francophone, d'une part, et dans le cas des candidats qui veulent étudier dans un cégep, d'autre part. En effet, pour cette même région, les taux de refus par niveau d'enseignement dégagent une tendance claire: ils sont nettement plus élevés pour les cégeps, tandis qu'ils diminuent pour les cycles universitaires.
L'année 2020 a été particulièrement préoccupante pour les cégeps, alors que les taux de refus des demandes ont oscillé entre 85 % et 100 % pour la majorité des pays de l'Afrique subsaharienne.
Les cégeps ont l'impression de souffrir d'abord d'un processus d'immigration qui perçoit ces pays de manière systémique, mais aussi de la méconnaissance du système d'enseignement supérieur canadien.
En clair, les membres de la Fédération se demandent s'il y a des partis pris au moment de traiter les demandes ou encore des problèmes dans le fonctionnement du système d'immigration. Cela permettrait d'expliquer un résultat aussi désastreux. En effet, la croissance récente des taux de refus nous force à remettre en question l'utilisation de systèmes automatisés tels que le système Chinook. Par ailleurs, il nous apparaît que la redistribution, en 2020, des dossiers de l'Afrique francophone vers des centres de traitement à l'extérieur de cette région a contribué à l'augmentation des taux de refus.
La situation a des répercussions importantes sur les cégeps ainsi que sur l'ensemble des collectivités où ils sont situés. Tout d'abord, c'est en vain que les cégeps investissent des ressources humaines et financières. En outre, tous les cégeps du Québec, et d'autant plus ceux situés à l'extérieur des grands centres, ont besoin des étudiants internationaux pour remplir leur mission d'éducation et pour assurer le développement social, culturel et économique de notre pays. Enfin, les collectivités ne bénéficient pas des retombées directes de la présence de ces étudiants.
Il y a aussi des conséquences liées à l'incohérence entre le refus de permis d'études et les autres initiatives gouvernementales. Le Canada investit plus ou moins 7 millions de dollars par année simplement pour faire la promotion du pays comme destination d'études. Le Québec, quant à lui, investit près de 15 millions de dollars dans des mesures d'attraction et des bourses d'études pour les étudiants internationaux, et ce, seulement pour le niveau du cégep. Bien que ce soit les directions d'établissements qui procèdent à l'admission des étudiants après une analyse sérieuse, c'est plus souvent l'agent d'immigration qui se prononce sur la validité du parcours de l'individu.
Enfin, la situation a également des répercussions sur la réputation du Canada. Celui-ci se targue d'être une destination d'études accessible et accueillante, mais il réserve aux étudiants un traitement différent selon leur pays d'origine. Une diplomatie simplement basée sur l'image n'est que spectacle et comporte ses limites, surtout auprès d'une jeunesse qui sera rapidement invitée à regarder ailleurs.
En conclusion, si le problème des taux de refus de permis d'études est d'ordre national, il est particulièrement dommageable pour les cégeps et pour l'ensemble de la francophonie canadienne.
Il semble que l'acteur responsable des procédures migratoires soit, à lui seul, capable de contrecarrer les efforts des gouvernements, des établissements et, surtout, des étudiants africains francophones.
Nous croyons essentiel que le traitement des demandes de permis d'études soit équitable, juste et transparent pour tous les individus, sans égard à leur pays d'origine, à leur langue ou au niveau de formation visé.
Nous invitons le Comité à faire la lumière sur les processus en cours et à analyser les raisons qui expliquent les taux de refus des demandes d'étudiants africains francophones, par exemple en vérifiant si ces étudiants sont victimes de préjugés, comme cela a été mentionné.
Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada, c'est-à-dire IRCC, souhaite intégrer de nouveaux systèmes de traitement des demandes de permis. Il est extrêmement important que ces derniers ne possèdent pas les mêmes défauts que le système actuel; on doit en faire une priorité.
Nous demeurons disposés à collaborer avec le Comité et avec IRCC sur ces questions. Nous souhaitons être partie prenante lorsque des solutions seront proposées en vue de régler le problème que nous soulevons ici aujourd'hui.
Je vous remercie.
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Merci beaucoup, madame la présidente, et merci à l'équipe informatique de la Chambre des communes de m'avoir aidé à me connecter sans difficulté.
Je suis ravi d'être avec vous aujourd'hui. Au nom d'Universités Canada et de nos membres, je vous remercie de l'invitation à discuter avec vous.
Je tiens également à remercier les membres du Comité, ainsi que tous les autres parlementaires, du travail extraordinaire qu'ils continuent de faire en cette période éprouvante.
Je suis accompagné aujourd'hui de Marc LeBlanc, qui dirige notre unité des relations internationales.
J'ai eu le plaisir de comparaître devant le Comité en avril dernier pour discuter du Programme des travailleurs étrangers temporaires. Comme vous vous en souviendrez sans doute, Universités Canada représente 96 universités partout au pays. Ensemble, les universités canadiennes représentent une entreprise de 38 milliards de dollars qui emploie plus de 300 000 personnes. De plus, les universités sont souvent le plus gros employeur au sein de leur collectivité. Ce sont des catalyseurs et des piliers socioéconomiques en ces temps difficiles.
Les universités canadiennes font partie intégrante de l'approche d'Équipe Canada pour lutter contre la COVID 19, que ce soit pour atténuer les risques, trouver un vaccin ou accélérer la reprise économique et sociale du Canada.
[Français]
Maintenant que les frontières rouvrent et que le Canada accueille à nouveau des étudiants étrangers, nous sommes impatients de collaborer avec ce comité pour veiller à ce que le pays demeure une destination prisée par les grands talents.
Je souhaite aujourd’hui vous parler du rôle des universités pour attirer les talents qui favoriseront la relance économique.
[Traduction]
Lors de ma dernière comparution devant le Comité, j'ai mentionné que la concurrence mondiale pour les talents est aujourd'hui la ruée vers l'or du XXIe siècle.
[Français]
La concurrence mondiale s’intensifie et, bien que le Canada jouisse d’une bonne réputation, il faudra redoubler d’efforts pour attirer les esprits les plus brillants.
[Traduction]
Nous avons pris des mesures, comme le programme des étudiants étrangers, pour attirer des personnes hautement qualifiées au Canada. Les étudiants étrangers apportent plus de 22 milliards de dollars à l'économie canadienne et soutiennent plus de 218 000 emplois. Ils jouent également un rôle fondamental dans la constitution d'un bassin canadien de talents hautement qualifiés.
Avec la réouverture des frontières un peu partout dans le monde, les étudiants étrangers ont plus de choix qu'il y a seulement deux ans. Le Canada est reconnu mondialement pour sa diversité et son accueil, tout en ayant des établissements de calibre international, et nous observons de plus en plus d'étudiants étrangers venant des marchés émergents. Ces atouts doivent être mis à profit alors que la concurrence mondiale s'intensifie. Il sera également essentiel que notre système d'immigration demeure concurrentiel.
Nous nous réjouissons à l'idée de travailler, au cours des prochains mois, en collaboration avec le Comité afin d'assurer un traitement rapide et exact des demandes de visa dans les marchés clés et de créer une expérience plus conviviale pour les demandeurs.
Il y a un défi plus urgent que nous devons relever, à savoir le taux élevé de refus des demandes de visa dans bon nombre de nos marchés prioritaires, surtout en Afrique francophone. Nous apprécions grandement le travail du Comité pour examiner cette question plus en détail. Les plus importants pays sources d'étudiants étrangers de niveau universitaire affichent, en moyenne, un taux d'approbation d'environ 80 %, certains atteignant même 95 %. Toutefois, certains des principaux pays sources africains ont des taux d'approbation plus faibles pour les permis d'études dans les universités canadiennes.
En 2019, les taux d'approbation des demandes de visa pour les étudiants de premier cycle venant du Maroc et du Sénégal — deux de nos pays prioritaires pour le recrutement d'étudiants francophones — étaient respectivement de 55 % et 20 %, contre 85 % et 95 % dans d'autres marchés.
Des taux de refus élevés ont une incidence directe sur nos efforts de recrutement et sur la réputation du Canada à titre de pays accueillant et de destination de choix pour poursuivre des études et se bâtir une vie. Nous reconnaissons que les universités ont un rôle à jouer pour régler ce problème, et nous sommes prêts à collaborer avec le gouvernement fédéral, les gouvernements provinciaux et d'autres intervenants pour faire en sorte que nos futurs étudiants répondent aux exigences nécessaires pour obtenir des décisions favorables concernant leur permis d'études.
[Français]
Pour réussir, le gouvernement fédéral, les gouvernements provinciaux et les universités doivent adopter une approche collaborative afin d’attirer au Canada les étudiants les plus brillants. En travaillant de concert, nous pouvons faire en sorte que le nombre d'inscriptions dans les établissements canadiens demeure viable et leur permette ainsi de bénéficier de la présence d'étudiants de partout dans le monde.
Nous sommes reconnaissants de tout le travail que fait le Comité pour aider le Canada à se rétablir de la pandémie. Nous avons hâte de poursuivre ce partenariat en vue de bâtir un Canada fort.
[Traduction]
Je vous remercie encore une fois de m'avoir donné l'occasion de témoigner devant vous. Nous sommes impatients de travailler avec le Comité tout au long de cette législature, car le Canada restera une destination de choix pour les étudiants étrangers du monde entier.
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J'allais simplement faire suite à la question précédente, avant l'intervention de M. Godin. Nous sommes assurément en concurrence avec la France pour ce qui est d'attirer des étudiants francophones. En effet, la France jouit d'une image de marque très puissante, en plus de ses racines historiques. Elle s'emploie activement à attirer des étudiants francophones sur son territoire.
Il est important que toutes les universités canadiennes, tant au Québec qu'ailleurs au pays, s'efforcent, elles aussi, d'attirer des étudiants francophones. Dans les communautés francophones en situation minoritaire partout au pays, les étudiants francophones sont un atout très précieux non seulement pour le secteur de l'éducation, mais aussi pour la croissance économique de la région.
En ce qui a trait à la concurrence générale sur les marchés anglophones, les États-Unis, le Royaume-Uni et l'Australie sont nos principaux concurrents et ils dépensent des sommes nettement plus importantes pour promouvoir leur image de marque.
Nous communiquons régulièrement avec IRCC sur un certain nombre de questions, notamment celle de savoir comment renforcer l'image de marque du Canada, car les gens pensent d'abord à ce qu'évoque un pays lorsqu'ils se demandent où aller faire leurs études.
Deuxièmement, sur le plan des politiques, le contexte canadien est très positif, non partisan et favorable à l'accueil des étudiants étrangers. Nous avons de bonnes politiques. Nous devons améliorer nos réalités opérationnelles sur le terrain dans les marchés où nous essayons de recruter des étudiants. C'est pourquoi nous travaillons avec IRCC sur les marchés clés afin de trouver des moyens d'aider son personnel à mieux comprendre le travail effectué et de garantir la qualité, l'intégrité et la rapidité du traitement des demandes de visa. C'est vraiment important.
J'ai mentionné certains des taux de refus de nos étudiants éventuels. Les universités investissent beaucoup d'efforts et d'argent pour améliorer leur profil et recruter ces étudiants. Par conséquent, si ces derniers essuient un refus pour des raisons incompréhensibles, nous perdons des investissements. Nous perdons le potentiel offert par ces étudiants.
Nous voulons nous assurer d'être un pôle d'attraction mondial pour les étudiants.
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Merci, madame la présidente.
Je souhaite la bienvenue aux témoins.
Ma première question s'adresse aussi à M. Brown Mastropaolo.
Comme vous le savez, monsieur Brown Mastropaolo, toute demande faite par un étudiant étranger qui souhaite venir étudier au Canada doit respecter certains critères financiers.
Vous savez très bien que, conformément à l'Accord Canada-Québec relatif à l’immigration et à l’admission temporaire des aubains, le gouvernement du Québec détermine les ressources financières requises afin qu'un étudiant soit admissible à l'obtention d'un permis d'études. Au Québec, un étudiant âgé de 18 ans ou plus doit fournir la preuve qu'il aura des fonds de plus de 13 000 $ par année d'études, alors qu'il s'agit de 10 000 $ ailleurs au Canada.
Premièrement, croyez-vous que cela a une incidence sur le taux d'approbation des demandes d'étudiants étrangers qui veulent étudier dans les établissements d'enseignement postsecondaire du Québec?
Deuxièmement, j'aimerais savoir si, de votre côté, vous avez fait des démarches auprès du gouvernement du Québec afin de régler ce problème en lui demandant d'accepter de fixer le critère à 10 000 $ au lieu de 13 000 $.
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Je vous remercie de la question.
En fait, il serait important de ne pas occulter les vraies raisons qui se trouvent derrière les hauts taux de refus. Parler des capacités financières des demandeurs, qu'il s'agisse de 10 000 $ ou de 13 000 $, ne fait malheureusement pas partie du combat à mener, à mon avis.
Je vais vous démontrer concrètement la situation. D'abord, la différence entre ces deux montants est minime. Ensuite, on voit que le même taux de refus s'applique à des étudiants à qui le gouvernement du Québec accorde des bourses, notamment des bourses d'excellence, auquel cas les boursiers reçoivent 14 000 $ par année en frais de subsistance pour la durée de leurs études et sont exemptés des droits de scolarité. Malgré le fait qu'ils soient boursiers du gouvernement du Québec et qu'ils aient été sélectionnés par les cégeps après analyse de leur dossier, ces étudiants se voient également refuser un permis d'études.
Je ne crois donc pas que la question de la capacité financière des étudiants soit la bataille à mener en priorité.
On a des statistiques sur les taux de refus pour des études dans les cégeps en fonction des pays de provenance. On est capable de faire toutes les comparaisons nécessaires. On sait quelles sont les raisons les plus populaires pour refuser un permis d'études. À la lumière des taux de refus et des raisons, parfois nombreuses pour un même étudiant, qui accompagnent ces refus, je crois que notre priorité, en tant que nation, devrait être de nous pencher sur le système d'immigration et sur l'analyse qui en est faite. D'une part, les agents d'immigration connaissent-ils bien notre système d'enseignement supérieur au Canada, de même que la réalité de ces jeunes qui souhaitent aller étudier à l'étranger? D'autre part, pourquoi les taux de refus sont-ils plus élevés lorsqu'il est question d'aller étudier dans certains établissements?
À partir de ces statistiques, on doit commencer à établir un diagnostic précis et complet de la situation, avant de se pencher sur une mécanique un peu plus opérationnelle qui relève d'une compétence partagée entre le fédéral et le provincial.
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Oui, pour ce qui est de l'examen des tendances et des expériences avant et après la pandémie, il y a quelques différences notables. Comme je l'ai mentionné dans ma déclaration préliminaire, sur le plan du traitement, étant donné les mesures de santé publique et l'accès limité aux centres de traitement des visas et aux documents d'appui, nous avons constaté un ralentissement, voire un arrêt du traitement de ces demandes au début de la pandémie. Depuis lors, des efforts ont été déployés pour accélérer le processus.
Selon les chiffres que nous voyons, notre secteur de l'éducation internationale est revenu, dans l'ensemble, aux niveaux observés avant la pandémie, c'est‑à‑dire à la fin de 2019.
Nous trouvons donc cela encourageant de ce point de vue. Toutefois, comme je l'ai mentionné, un demi-million de demandes ont été rejetées depuis 2016.
J'abonde dans le même sens que mes collègues, M. Davidson et M. Mastropaolo. Il faut en faire plus du côté opérationnel pour éliminer les obstacles dans ces volets, régler certains des problèmes et trouver les problèmes de nature systémique qui nous empêchent d'avancer.
Au sujet des frais de scolarité, oui, c'est une question délicate. Nous travaillons avec les établissements non seulement pour tenter de trouver des façons d'accueillir ces étudiants talentueux au Canada, mais aussi de bien positionner la valeur de l'éducation canadienne.
Je peux vous transmettre le dernier sondage du Bureau canadien de l'éducation internationale mené auprès des étudiants étrangers. En décembre 2019, il a reçu plus de 40 000 réponses d'étudiants étrangers qui se trouvent toujours au Canada. La grande qualité du système d'éducation canadien demeure pour eux un des éléments les plus intéressants...
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Merci beaucoup, madame la présidente.
Je remercie tout d'abord les témoins de comparaître ce matin. Il s'agit d'une étude très importante qui me tient beaucoup à cœur, comme on le sait.
J’ai entendu les conservateurs parler de concurrence et les libéraux blâmer le gouvernement du Québec dès leurs premières questions. Pour ma part, je pense que nous sommes ici pour trouver des solutions, car il y a effectivement un problème. D’une part, des êtres humains à qui l'on fait miroiter un rêve se le font arracher des mains de la façon la plus impersonnelle possible. D’autre part, il y a dans ce pays une cristallisation d'un traitement inéquitable pour les francophones, peu importe leur provenance. Cette étude est donc importante, et j'espère qu'on va réajuster le tir pour trouver des solutions concrètes, car la rentrée de septembre 2022 s’en vient assez rapidement.
Monsieur Brown Mastropaolo, j’ai adoré votre présentation d’ouverture. Dans notre étude, il sera beaucoup question de statistiques, mais nous ne devons pas oublier que, derrière celles-ci, il y a des visages humains.
Ce serait bien que vous nous décriviez le parcours type d’un étudiant africain francophone qui se serait vu refuser un permis d’études. Pouvez-vous énumérer les étapes qu'il aurait franchies, par exemple?
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Je vous remercie de me poser la question et d'ainsi me donner l’occasion de présenter le parcours de l'étudiant international, que l’on qualifie parfois de parcours du combattant.
Je vais donner l’exemple d’une étudiante camerounaise, que je vais appeler Amina. Elle va bientôt terminer son lycée. Elle va participer à un salon d’ÉduCanada au Cameroun, où elle va rencontrer des représentants d’Affaires mondiales Canada ainsi que des représentants de cégeps. Ces gens vont lui fournir des conseils en matière d'orientation et l’aider à remplir sa demande d’admission, qu'elle va soumettre rapidement. Elle va ensuite être admise et, vu la qualité de son dossier, elle va réussir à obtenir une bourse d’excellence du gouvernement du Québec. Comme je l’ai mentionné, cette bourse inclut 14 000 $ pour les frais de subsistance, en plus d'une exemption des droits de scolarité. Après l’obtention de son Certificat d'acceptation du Québec, Amina va arriver à déposer, autour de la fin avril, sa demande complète de permis d’études auprès du bureau canadien des visas. Pendant 20 semaines, Amina ne va recevoir aucune nouvelle d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada, c'est-à-dire IRCC. Le cégep va tenter de la rassurer tant bien que mal. Pour les cégeps, la rentrée des classes a lieu quelque temps entre le 20 et le 25 août. Or, ce n'est qu'entre le 5 et le 10 septembre qu'Amina va recevoir une réponse d'IRCC, et ce sera un refus.
Quelles sont les raisons typiques qu'on donne pour justifier un refus? Premièrement, l’agent n’est pas convaincu qu’Amina va retourner au Cameroun à la fin de ses études au Canada. Deuxièmement, l’agent trouve que le programme d’études proposé n’est pas raisonnable, compte tenu de son parcours professionnel ou des autres occasions d’éducation qui s'offrent à elle localement. Ce sont les raisons qu’on donne souvent.
Ici, posons-nous des questions. Tout d'abord, comment un agent d’immigration peut‑il juger si Amina retournera ou non au Cameroun, surtout quand les différents paliers de gouvernement mettent en place une panoplie de mesures incitatives pour que la résidence temporaire devienne une résidence permanente, notamment dans le cas des étudiants internationaux? De plus, comment l’agent d’immigration peut-il se substituer à l’autorité d’un établissement d’enseignement supérieur pour se prononcer sur le parcours scolaire d’une personne? Enfin, est-ce que c’est le rôle de l’agent d’immigration d’apprécier la pertinence du système d’éducation canadien ou, dans ce cas-ci, camerounais?
Au total, Amina va avoir consacré 10 mois de son année à convaincre ses parents, à rassembler un peu de fonds supplémentaires, à préparer son séjour et à obtenir une bourse. Finalement, elle va devoir abandonner son projet et elle ne va pas nécessairement comprendre pourquoi. Le cégep va annuler son séjour, sans trop comprendre non plus pourquoi c'est ainsi.
C’est un peu cela, le problème: on ne comprend pas pourquoi. Les cégeps rencontrent beaucoup de candidats de qualité et, après analyse de leur dossier, décident de leur accorder des bourses parce qu'ils estiment que ceux-ci vont cheminer correctement vers la réussite. Pourquoi les refuse-t-on, alors?
Amina va continuer de parler du Canada, tout comme ses parents, d'ailleurs, mais le discours aura changé. Ce ne sera plus le rêve de l’unifolié; on ne parlera plus de la neige, de l’expérience culturelle, ni de la qualité de l’éducation. Le Canada sera plutôt devenu un synonyme de faux espoirs et évoquera un parcours du combattant parsemé d’embûches.
L’histoire d’Amina, c’est celle de milliers d’étudiants africains francophones que nous rencontrons chaque année dans les cégeps, lorsque nous participons à différentes activités de recrutement, dont les salons d’ÉduCanada.
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Je vous remercie, madame la présidente.
Je remercie tous les témoins de leurs exposés et de nous faire part de leur expertise.
Ma question s'adresse à Mme Bezo. Vous avez parlé dans votre déclaration liminaire du problème de la double intention. La double intention existe aussi, de fait, dans le cas de la réunification familiale, mais même dans ce volet, beaucoup de demandes sont rejetées parce que l'agent d'immigration qui examine la demande considère que l'époux ou l'épouse ne retournera pas dans son pays d'origine après sa visite en raison de la double intention. Dans le cas des étudiants, oui, certains veulent venir pour étudier, et certains peuvent vouloir rester, mais cela ne signifie pas nécessairement qu'ils ne respecteront pas les exigences en matière d'immigration et qu'ils ne retourneront pas dans leur pays d'origine.
De ce point de vue, étant donné qu'IRCC prend ces éléments en considération, croyez-vous que le gouvernement devrait indiquer clairement que, à moins que les règles d'immigration n'aient pas été respectées par le passé, la demande de la personne ne devrait pas être automatiquement rejetée parce que l'agent d'immigration estime qu'elle ne retournerait pas dans son pays d'origine?
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Si on pense vraiment au potentiel stratégique lié à cette voie d'accès et à ce bassin, je crois que nous recommanderions fortement d'envisager des solutions novatrices dans ce cas. Au lieu de travailler à l'intérieur du cadre des visas temporaires en place, nous pourrions penser à une voie d'accès pour ceux qui peuvent décider de rester et à qui le Canada pourrait vouloir ouvrir la porte. Il serait beaucoup plus stratégique, à notre avis, de penser à une nouvelle voie d'accès nous permettant de réfléchir à une option concrète pour les étudiants qui veulent étudier puis rester après avoir obtenu leur diplôme. Le Canada pourrait ainsi recenser les lacunes dans ces domaines.
Les chefs d'entreprise, par exemple, nous disent clairement que nous devons recruter et former de nouveaux talents pour être concurrentiels sur la scène internationale. Nous entendons dire que la viabilité de nos établissements de recherche, de nos industries du savoir et de nos secteurs clés dépend de l'arrivée de ces gens très talentueux. Nous entendons Emploi et Développement social Canada dire que nous sommes aux prises avec une pénurie grave de main-d'œuvre dans des secteurs cruciaux en croissance. C'est donc un moment stratégique, à notre avis, pour réfléchir à la prospérité future de notre pays, à notre connectivité mondiale future, et pour laisser de côté le cadre existant et mettre en place un cadre plus clairement défini, et c'est possible de le faire.
Je pense que nos établissements d'enseignement souhaitent assurément faire partie de la solution et réfléchir à la façon d'innover pour créer une voie d'accès plus audacieuse qui s'harmonise avec les objectifs en matière d'immigration de notre pays et qui les renforce. Il est crucial, à mon avis, d'examiner la question d'un point de vue beaucoup plus stratégique et le futur...
Merci, madame la présidente.
J'aimerais poser une question qui s'adresse aux trois témoins.
Le sujet de notre étude, c'est-à-dire le recrutement et les taux d'acceptation d'étudiants étrangers au Québec et au Canada, a probablement été motivé par un portrait un peu négatif de la situation.
Selon vous, le Canada est-il en train de perdre de son leadership et de son attractivité en matière de formation d'étudiants étrangers, et plus particulièrement auprès des étudiants francophones?
Madame Bezo, vous pouvez répondre en premier. Ensuite, M. Davidson et M. Brown Mastropaolo pourront répondre aussi.
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Je vous remercie, madame la présidente.
Je remercie tous les témoins de leur présence.
Ma question s'adresse à tous les témoins.
Comme vous le savez, le Canada est en concurrence avec les autres pays pour attirer des étudiants étrangers, et ces étudiants doivent dépenser des sommes énormes pour pouvoir venir étudier ici. Parmi les mesures incitatives que nous leur offrons, il y a la possibilité de travailler à temps partiel pendant leurs études, la possibilité de rester au pays après la fin de leurs études et la possibilité de travailler et d'obtenir la résidence permanente, et éventuellement, la citoyenneté.
On m'a parlé dernièrement de quelques cas de demandeurs du Pakistan. IRCC a refusé une des demandes au motif que l'agent n'était pas convaincu que l'étudiant quitterait le pays à la fin de ses études, et ce, pour les quatre raisons suivantes: les perspectives d'emploi limitées dans son pays de résidence, sa situation d'emploi actuelle, le but de sa visite et ses liens familiaux au Canada et dans son pays de résidence.
N'est‑ce pas exactement le type de personne que l'on s'attend à voir répondre à nos efforts de recrutement?
Dans l'autre cas, le demandeur avait un baccalauréat en administration des affaires, et il voulait venir au Canada pour faire des études de maîtrise. L'agent d'IRCC a répondu que la demande... ne contient pas une explication convaincante des raisons qui incitent le demandeur à faire une maîtrise en gestion dans le cadre de son cheminement professionnel. L'agent note également que le demandeur veut étudier dans une université chrétienne alors qu'il est indiqué dans son passeport qu'il est de confession musulmane et qu'il n'y a rien dans sa demande qui explique la divergence dans ses croyances religieuses.
En Ontario, il n'est pas inhabituel de voir des familles non catholiques, y compris des familles musulmanes, qui préfèrent inscrire leurs enfants dans des écoles séparées catholiques.
Ne vous semble‑t‑il pas qu'il nous arrive parfois de saboter nos propres efforts pour attirer des étudiants étrangers? Que proposez-vous pour remédier à ces problèmes?
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Je vais commencer, et je suis certain que Mme Bezo et M. Mastropaolo vont vouloir ajouter leurs commentaires.
Je pense qu'il s'agit là d'exemples très concrets et très pertinents pour le Comité. Nous ne parlerons pas, bien entendu, de cas particuliers, mais pour revenir à une question précédente, cela nous donne une idée des obstacles contre lesquels se butent les étudiants.
Encore une fois, cela revient au fait que nous pouvons avoir un engagement politique, et c'est le cas, car tous les partis sont en faveur d'une politique d'immigration positive au Canada, ce qui est vraiment une bonne chose pour notre compétitivité. Nous avons donc le soutien politique. Nous avons une politique favorable, soit une voie d'accès très attrayante pour attirer les étudiants étrangers au Canada, pour étudier, pour travailler et pour rester. Nos concurrents étrangers examinent nos outils, les copient et les bonifient. Nous devons demeurer concurrentiels.
Nous avons ensuite les réalités opérationnelles liées aux délais pour le traitement des visas. Nous voulons garantir l'intégrité du processus, mais le pouvoir décisionnel des agents d'immigration de première ligne est réel. Nous devons veiller à ce que tous les employés qui représentent le Canada soient bien formés et ont été bien informés des objectifs que nous voulons atteindre comme pays, parce qu'à une certaine époque — et je travaille dans le domaine depuis plus de deux décennies maintenant —, nous voulions que les étudiants étrangers retournent dans leur pays d'origine à la fin de leurs études. Si vous manifestiez le moindre intérêt à rester au pays, votre demande était immédiatement rejetée. Nous avons maintenant une approche beaucoup plus souple et qui est avantageuse tant pour le Canada que pour le pays d'origine.
Ces exemples concrets sont affligeants, mais je suis heureux que le Comité fasse cette étude et demande à IRCC comment il compte relever ces défis.
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Merci, madame la présidente.
J'espère que vous n'entendez pas trop les klaxons; mon bureau donne sur la rue Wellington.
Hier après-midi, nous avons reçu la réponse du gouvernement à nos questions écrites portant sur le sujet dont nous traitons dans cette rencontre-ci. Je vais résumer ce que cela révèle. Je voudrais savoir ce que M. Mastropaolo en pense. Les autres témoins pourront ajouter un élément de réponse s'ils le souhaitent.
Voici quelques-unes des conclusions tirées. Premièrement, les taux de refus de demandes de permis temporaire sont considérablement plus élevés dans le cas des étudiants qui veulent venir étudier au Québec que dans le cas de ceux qui veulent aller étudier ailleurs au Canada. Deuxièmement, les délais de traitement des demandes sont systématiquement plus longs au Québec, comparativement au reste du Canada, et ce, pour tous les types de dossiers d'immigration permanente. Troisièmement, le taux d'acceptation des permis d'études pour des universités anglophones est supérieur à celui pour des universités francophones.
En fin de compte, quelle est la source du problème? Cela est-il lié à un procédé discriminatoire? Est-ce notre système d'immigration qui, de façon inhérente, exerce de la discrimination envers les étudiants étrangers, et en particulier les francophones?
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Je vais me permettre de réagir à cette question.
Effectivement, la question se pose: y a-t-il de la discrimination selon le pays de provenance, la langue ou encore le niveau de scolarité visé? Nous le voyons dans les statistiques concernant les cégeps: ce sont ces établissements qui obtiennent les taux de refus les plus élevés parmi tous les niveaux d'enseignement, et particulièrement lorsqu'il s'agit d'accueillir des étudiants venant de pays francophones, si l'on exclut ici l'Europe de l'Ouest. Pour nous, les taux de refus au niveau du cégep posent problème. On remarque une tendance nette. D'ailleurs, cette tendance existait même avant la pandémie et avant l'adoption d'un système de traitement automatisé.
C'est la même chose pour les délais de traitement. Ces derniers sont excessivement longs. Comme je l'ai mentionné tout à l'heure, on ne reçoit pas de nouvelles pendant des dizaines de semaines. Nous avons vu le réagir en ajoutant des ressources. C'est bien, nous saluons ce geste, mais on reste dans des mécanismes réactifs. Va-t-on toujours attendre d'avoir un arriéré de 1,8 million de dossiers avant de réagir, alors que cela fait trois, quatre ou cinq ans que les établissements dénoncent la situation?
Finalement, pour ce qui est des taux d'acceptation, il est vrai qu'ils sont plus élevés du côté anglophone que du côté francophone, selon les données disponibles.
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Je suis vraiment heureux que vous ayez soulevé la question d'attirer et de garder les étudiants.
Encore une fois, le Canada a fait des choses remarquablement innovatrices au cours des dernières années pour augmenter l'admissibilité au travail pendant que vous êtes étudiant, ce qui non seulement vous procure un revenu, mais vous donne une expérience de travail et des possibilités d'apprentissage intégré au travail pendant que vous êtes ici. Nous avons également élargi, par le truchement des permis de travail pour les diplômés, des possibilités pour que les personnes planifient vraiment de rester au Canada pendant un certain temps et, franchement, de s'enraciner pendant qu'elles sont ici.
Il existe également des programmes vraiment novateurs en collaboration avec le secteur privé. Je pense au Partenariat d'Halifax en Nouvelle-Écosse, qui travaille avec les étudiants internationaux dès leur arrivée au Canada pour leur montrer les possibilités et les avantages de rester au Canada. Nous avons également bénéficié, au cours des dernières années, de l'alignement des gouvernements fédéral et provinciaux du Canada atlantique pour faire des étudiants étrangers un véritable moteur de renouveau économique dans cette région. En fait, j'ai entendu certaines personnes parler des universités canadiennes comme étant le Quai 21 du XXIe siècle. Elles ne font pas qu'attirer des gens, elles les intègrent à la vie canadienne et font de notre pays un endroit très attrayant où vivre, travailler et élever une famille.
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Je vous remercie de poser de nouveau cette question. Je vais y répondre rapidement.
Je pense que, en premier lieu, il faut une analyse assez rigoureuse des mécanismes en place à IRCC visant à assurer l'équité procédurale. Il s'agit d'un élément qui devrait faire partie du système d'immigration. Or, on ne voit pas cela quand on regarde les taux de refus.
La question de la transparence mérite aussi d'être examinée dans notre système d'immigration.
Par ailleurs, on parle de différentes solutions, par exemple le Volet direct pour les études ou encore la nouvelle voie vers la résidence permanente pour les étudiants internationaux. C'est un ensemble de solutions que nous devons regarder tous ensemble. Quand IRCC travaille seul de son côté, par la suite, nous devons un peu patauger pour être sûrs de bien expliquer les choses. Il faut donc un meilleur dialogue entre les établissements d'enseignement et IRCC sur la question des étudiants internationaux.
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Merci, monsieur Brown Mastropaolo.
J'ai une question qui tue. Je vais vous donner mon opinion, mon constat personnel, puis j'aimerais entendre votre avis à tous les trois. Vous êtes les experts et c'est vous qui avez à composer avec cette situation.
Comme vous le savez, il y a des conséquences économiques pour le milieu, mais aussi pour vos établissements d'enseignement: lorsqu'il y a moins d'enseignants, il y a moins de revenus, et lorsqu'il y a moins de revenus, on fait des coupes dans les programmes.
N'est-ce pas là une façon de laisser s'éteindre la motivation à promouvoir le français?
La question s'adresse à Mme Bezo, à M. Davidson et à M. Brown Mastropaolo.
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Merci, madame la présidente.
L'année dernière, le gouvernement libéral a mis en place une politique d'immigration historique pour aider les étudiants. Si l'on considère les 90 000 demandes qui ont été présentées et les 27 000 demandes express, cette politique a été d'une grande aide. L'intention du gouvernement est de faire en sorte que tous les étudiants puissent accéder au volet de la résidence permanente et ensuite à celui de la citoyenneté.
Je continue d'entendre des étudiants de pays comme le Pakistan et le Bangladesh dire qu'ils sont victimes de discrimination en raison de leur pays d'origine. Leurs visas sont rejetés. Nous avons une double intention, à savoir que les étudiants qui viennent ici pour étudier entrent dans les volets de la résidence permanente et de la citoyenneté.
Pourquoi leurs demandes sont-elles rejetées et comment le gouvernement peut‑il mettre en place une politique cohérente? On a mentionné plus tôt qu'ils ne retourneront pas dans leur pays et que leurs demandes ne devraient pas être rejetées pour cette raison.
L'un d'entre vous souhaite‑t‑il formuler un commentaire à ce sujet?
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Je suis ravie d'intervenir.
Il existe des éléments très concrets et opérationnels qui permettraient de répondre à certaines des préoccupations que vous avez soulevées concernant les obstacles ou les défis systémiques perçus.
Une façon simple de déterminer s'il existe des problèmes systémiques dans certains de ces bureaux des visas et dans certains des échantillons de pays que vous avez cités est de demander aux analystes d'IRCC d'autres régions de procéder à un examen en aveugle d'un échantillon de demandes qui ont reçu une réponse favorable ou défavorable, afin de s'assurer de la concordance des résultats.
Une autre option pourrait être de lancer un projet pilote, dans lequel vous permettez aux candidats des régions à fort taux de rejet — je pense même aux collègues d'Afrique francophone — de faire appel des décisions en cas d'erreurs de fait évidentes. Il arrive que l'on dise à des boursiers qu'ils n'ont pas les ressources financières nécessaires pour payer leur séjour. C'est un exemple. Il ne suffit pas de demander aux candidats de soumettre à nouveau leur demande.
Une autre option serait de demander régulièrement à des analystes d'IRCC de différentes régions d'examiner des cas identiques et de comparer les résultats. En l'absence de consensus sur le résultat, on constatera qu'il est nécessaire de dispenser de nouveaux types de formation sur la confiance interculturelle et peut-être d'autres domaines de traitement où le pouvoir discrétionnaire entre en ligne de compte dans ces décisions.
Il s'agit d'exemples très simples, mais qui montrent comment nous pouvons réellement faire avancer les choses de manière constructive.