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LANG Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent des langues officielles


NUMÉRO 021 
l
3e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 8 juin 2010

[Enregistrement électronique]

(0900)

[Français]

    Bonjour à tous. Je vous souhaite la bienvenue au Comité permanent des langues officielles. Nous en sommes à notre 21e rencontre.

[Traduction]

    Conformément au paragraphe 108(3), nous étudions le Rapport annuel 2009-2010 du commissaire aux langues officielles, renvoyé au comité le mardi 25 mai 2010.

[Français]

    Cela nous fait plaisir, ce matin, de recevoir le commissaire aux langues officielle, M. Graham Fraser, et les membres de son équipe.
    Monsieur le commissaire, bienvenue au comité. Nous sommes heureux de vous recevoir ce matin pour que vous puissiez nous faire connaître les conclusions de votre rapport annuel.
    D'entrée de jeu, je voudrais vous dire que les membres — tout comme moi — ont sûrement été réjouis de voir que les travaux du comité constituent une source d'inspiration pour votre rapport.
    Sans plus tarder, je vous invite à nous faire part de vos recommandations.
    Merci beaucoup, monsieur le président, mesdames et messieurs les députés.

[Traduction]

    C'est avec plaisir que je vous présente les conclusions du volume I de mon quatrième rapport annuel.
    Je suis aujourd'hui accompagné de Sylvain Giguère, commissaire adjoint, Politiques et Communications; Ghislaine Charlebois, commissaire adjointe, Assurance de la qualité; Johane Tremblay, avocate-conseil; et Lise Cloutier, commissaire adjointe, Services corporatifs.
    Vous noterez que le volume I du Rapport annuel ne contient pas les bulletins de rendement des institutions fédérales ni les données sur les plaintes. Ces informations seront publiées à l'automne dans le volume II.
    Le volume I traite de trois enjeux distincts qu'on doit aborder globalement. Que le gouvernement néglige l'un d'eux et on connaîtra des reculs sur les autres plans. On ferait bien de garder cela en tête étant donné que les ministères et les organismes examinent de très près leur budget.
    Ainsi, si les universités ne préparent pas les étudiants adéquatement, le gouvernement et le secteur privé auront du mal à engager les employés bilingues dont ils ont besoin. Si les gestionnaires et les superviseurs n'encouragent pas les employés à utiliser la langue officielle de leur choix, les services bilingues offerts à la population en souffriront et le développement des communautés de langue officielle sera touché. Si les dirigeant des institutions fédérales n'assument pas pleinement leurs responsabilités découlant des changements apportés à la gouvernance des langues officielles, le rendement du gouvernement va se détériorer rapidement dans le domaine. Tout est lié.

[Français]

    La question de la langue de travail au sein des institutions fédérales est importante. Depuis 1988, les employés du gouvernement fédéral, dans certaines régions du pays, ont le droit de travailler en français ou en anglais, selon leur préférence. Or seulement 67 p. 100 des francophones disent se sentir à l'aise d'intervenir en français dans les réunions, et la même proportion d'anglophones affirment qu'ils ont accès à toute leur formation professionnelle en anglais.
    La situation de la langue au travail est certes complexe. Il n'existe pas de solution unique à l'ensemble des problèmes, mais je présente plusieurs pistes dans mon rapport. Si un leadership solide des hauts dirigeants de l'administration publique est nécessaire, les superviseurs et les gestionnaires ont aussi un rôle à jouer dans leurs interactions quotidiennes avec leurs employés. Le succès d'un milieu de travail bilingue passe par une relation respectueuse entre collègues.
    Dans bien des cas, le maintien d'une culture de travail unilingue nuit aux efforts visant à offrir des services bilingues de qualité à la population. Un milieu de travail bilingue offre aux deux communautés linguistiques la possibilité de contribuer pleinement, dans leur première langue officielle, au développement et à la mise en oeuvre des politiques et programmes qui servent tous les Canadiens et Canadiennes.
    Quarante pour cent des postes de la fonction publique fédérale requièrent le bilinguisme. Le secteur privé a également des besoins importants en main-d'oeuvre bilingue et multilingue.
     Étant le plus grand employeur du pays, le gouvernement fédéral doit travailler avec les universités et les gouvernements provinciaux pour que les étudiants de tout le pays aient accès à de meilleurs possibilités d'apprentissage du français et de l'anglais langue seconde. En offrant de meilleurs possibilités d'apprentissage aux étudiants, on améliore le rendement des futurs travailleurs canadiens. Pour ce faire, il faut de la planification, de la coordination et un fort leadership gouvernemental.
(0905)

[Traduction]

    Le succès de la mise en oeuvre de la Loi sur les langues officielles repose aussi sur l'application des principes de saine gouvernance. Les processus qui peuvent paraître purement bureaucratiques ont souvent des conséquences sur la vie quotidienne de personnes vivant à des milliers de kilomètres des centres de décisions. C'est pourquoi, dans mon rapport, je consacre un chapitre aux changements qui ont eu lieu récemment dans la façon dont les organismes centraux du gouvernement fédéral s'acquittent de leurs responsabilités linguistiques.
    Combinée à la disparition de l'Agence de la fonction publique du Canada et de son unité de langues officielles, la réduction récente de l'effectif du Centre d'excellence en langues officielles du Secrétariat du Conseil du Trésor a entraîné une perte d'expertise considérable pour les institutions fédérales, qui tentent d'améliorer leur rendement en matière de langues officielles.
    S'il est trop tôt pour évaluer l'incidence définitive que ces changements auront sur la façon dont le gouvernement fédéral s'acquitte de ses obligations, je déplore qu'ils aient été mis en place sans que soient consultés, par exemple, les responsables des langues officielles au sein des ministères et organismes fédéraux. C'est mal démarrer une initiative qui est fondamentalement risquée.

[Français]

    Dans ce contexte, les dirigeants des institutions doivent faire preuve de vision. S'ils agissent sans avoir de plan clair assurant des résultats, il faut s'attendre à des reculs.
    Ainsi, la délégation de responsabilités ne doit pas mener au laisser-aller. Le gouvernement doit montrer comment cette nouvelle approche permettra une mise en oeuvre plus efficace de la Loi sur les langues officielles et l'épanouissement des communautés de langue officielle.
    Les leaders des communautés de langue officielle ont, par ailleurs, exprimé des inquiétudes en ce qui concerne les retards dans la mise en oeuvre de la Feuille de route pour la dualité linguistique 2008-2013. Les graves retards dans la signature d'ententes entre les institutions fédérales et les organismes communautaires sont également une source de préoccupation. Les dirigeants de certains organismes oeuvrant à renforcer la vitalité des communautés de langue officielle sont allés jusqu'à utiliser leur propre carte de crédit en attendant le financement du gouvernement. Lorsque le financement dont ces organismes ont besoin pour offrir des services essentiels n'arrive que très tard dans l'année, c'est la communauté tout entière qui en paie le prix.
    Malgré ces retards préoccupants dans la réalisation des engagements vis-à-vis des communautés de langue officielle, j'ai néanmoins constaté avec satisfaction que le gouvernement s'est engagé, dans le plus récent discours du Trône, à maintenir la Feuille de route pour la dualité linguistique intacte. Par la même occasion, le gouvernement proclamait que: « Les deux langues officielles du Canada font partie intégrante de notre histoire et nous confèrent un avantage unique dans le monde. » Une telle affirmation signifie pour moi que le français et l'anglais font partie non seulement de notre histoire, mais aussi de notre avenir. Pour soutenir cette vision, le gouvernement doit agir avec clairvoyance, il doit soigneusement évaluer les décisions qui pourraient avoir des retombées sur la dualité linguistique canadienne. Le processus de prise de décision doit être transparent.

[Traduction]

    Les politiques linguistiques font parfois l'objet de débats. Ces débats nous rappellent les valeurs fondamentales sur lesquelles repose la politique linguistique du Canada.
    Après avoir fait l'objet de discussions à la Chambre des communes, un projet de loi sur le bilinguisme des juges à la Cour suprême est maintenant entre les mains du Sénat et est au coeur du débat. Ma position sur la question est claire: les juges de la plus haute cour du pays doivent posséder une connaissance suffisante des deux langues officielles pour instruire les appels sans avoir recours à l'interprétation. Pour siéger à la Cour suprême, le bilinguisme est une compétence fondamentale. C'est une question de justice et d'égalité.
    Le débat montre clairement la pertinence des sujets traités dans le rapport. En effet, les universités doivent préparer les futurs juristes à pratiquer dans un système de justice où tous les citoyens ont le droit d'être entendus dans la langue officielle de leur choix. De plus, pour travailler efficacement et tirer le meilleur parti de l'expertise de chacun, les juges doivent être en mesure de discuter des affaires entre eux dans la langue officielle de leur choix. En fait, ce débat peut être compris sous l'angle du privilège des avocats d'accéder aux postes de juges au plus haut tribunal du pays ou sous l'angle du droit des citoyens d'être entendus dans la langue officielle de leur choix. Le gouvernement doit se pencher sur cet enjeu et sur ses obligations en vertu de la Loi sur les langues officielles en tenant compte de l'esprit de la loi et des valeurs qu'elles incarnent. Je suis prêt à discuter plus en détail de la question si vous le voulez bien.
(0910)

[Français]

    Les Jeux olympiques et paralympiques d'hiver de 2010 ont parfaitement illustré le défi que le gouvernement doit relever afin de mettre en oeuvre pleinement la Loi sur les langues officielles. En abordant la loi comme une série de règles, on peut certes mettre en place des éléments administratifs, mais on s'expose à oublier l'essentiel. C'est ainsi qu'à Vancouver, un grand nombre de services étaient offerts en français comme en anglais, alors que la cérémonie d'ouverture a suscité de nombreuses critiques et plaintes qui font actuellement l'objet d'une enquête. Heureusement, nos athlètes eux-mêmes, par leur bilinguisme inspirant, nous ont rappelé que la dualité linguistique est une valeur à cultiver.
    Je vous remercie de votre attention.

[Traduction]

    J'aimerais maintenant prendre le temps qui reste pour répondre à vos questions.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur le commissaire, de cette allocution.
    Nous allons, sans plus tarder, commencer le premier tour avec Mme Zarac.
    Merci, monsieur le président.
    Je vous souhaite la bienvenue, monsieur le commissaire, ainsi qu'à vos employés.
     Je vous remercie d'être ici aujourd'hui. Je suis contente que vous ayez terminé votre discours en parlant des athlètes. C'est un bel exemple à suivre. Je vous remercie aussi d'avoir pris en considération, dans votre rapport, l'étude qui a été menée l'an passé à propos des délais. Cette étude était très importante pour nous. Vous avez mentionné dans votre rapport que vous alliez faire un suivi et demander au gouvernement de prendre des mesures. J'espère aussi que vous allez lui demander d'être très spécifique et d'inclure des statistiques dans son rapport. Même si on donne des raisons, il est très important de prouver ce qui a été fait. Ça permet d'apporter des améliorations.
    Vous avez aussi mentionné les retards qu'il y a eu dans le cadre du Plan d'action. Hier, à Ottawa, avait lieu une consultation sur les langues officielles. Un expert en la matière a dit considérer que le Plan d'action était fort supérieur à la Feuille de route. Je ne fais pas de partisanerie; j'essaie simplement de trouver de meilleures solutions. Il faut en effet faire quelque chose. Des témoins nous disent que la dualité linguistique n'est pas respectée. On ne voit pas les deux langues officielles comme une valeur ajoutée. Pourtant, on devrait le comprendre et surtout le voir.
    Que faudrait-il ajouter à la Feuille de route pour pouvoir faire des pas de géant et promouvoir les langues officielles au Canada?
    Je ne suis pas en position de faire le genre de comparaison détaillée que vous recherchez. Cependant, j'ai remarqué certaines choses, notamment que des fonds additionnels avaient été alloués à la Feuille de route et non au Plan d'action, notamment dans le domaine de l'immigration. En outre, des fonds ont été consacrés à l'apprentissage d'une langue seconde au niveau postsecondaire. Dans le passé, nous avons exprimé notre regret concernant l'élimination de fonds destinés à la formation linguistique des fonctionnaires. Chacun des plans avait des forces et des lacunes. Un volet culturel n'était pas présent dans la Feuille de route, pour des raisons qu'on a bel et bien expliquées à l'époque.
    J'aimerais parler un peu de la question de la valeur. Je ne dis pas cela de façon partisane, mais je remarque qu'il y a une certaine hésitation de la part de tous les gouvernements à promouvoir les deux langues officielles en tant que valeur. C'est le cas de tous les gouvernements, depuis très longtemps. Je ne sais pas si vous avez vécu cette expérience, mais souvent à Ottawa ont lieu des évènements qui sont publics mais un peu à l'extérieur de la fonction publique. À cette occasion, des hauts fonctionnaires ou des dirigeants d'institutions fédérales sont invités à parler devant des groupes ou dans le cadre de colloques. Il s'agit d'un mélange de fonctionnaires et d'autres gens qui maîtrisent les deux langues officielles mieux que moi. Or ils commencent leur allocution en disant: « Merci d'être venus en si grand nombre » et la terminent, trente minutes plus tard, en disant: « Encore une fois, merci. » Il reste que tout le discours est livré en anglais.
    Dans une autre situation, une fonctionnaire qui parlait à d'autres fonctionnaires a dit en français à la fin de sa présentation: « Ah, je vois que le commissaire aux langues officielles est présent. J'aurais dû faire une partie de mon intervention en français. Si vous avez des questions en français... » En revanche, j'ai aussi fait une présentation dans une institution fédérale où le directeur était un anglophone bilingue. Il a dit à ses employés: « Pour l'amour de Dieu, si seulement les francophones pouvaient faire l'effort d'utiliser le français lors des réunions! » Une tendance culturelle, même ici à Ottawa et même au sein de la fonction publique, fait en sorte que l'utilisation des deux langues est uniquement une question symbolique. C'est comme une prière en latin, dans certaines situations. On fait un genre de référence symbolique aux deux langues officielles, puis l'événement se poursuit en anglais.
(0915)
    Merci, monsieur le commissaire.
    Monsieur Nadeau.
    Merci, monsieur le président.
    Bonjour, monsieur le commissaire, et bonjour à tous vos collègues.
    Pierre Bourgault, ce grand souverainiste qui nous a malheureusement quittés, disait que si le Canada anglais était aussi bilingue que le Québec, on ne parlerait même pas de l'indépendance du Québec; on se sentirait chez nous partout. Lorsqu'on sait qu'environ 7 p. 100 de la population canadienne est bilingue, on comprendra qu'on ne peut pas se sentir chez nous partout.
    Moi-même, pour avoir travaillé dans le monde de la francophonie minoritaire pendant un bon bout de temps, j'ai ressenti ce sentiment, en me retrouvant quelque part au Canada, qui nous incite à nous demander si on sera capable de parler français aujourd'hui et quelle incidence ça aura sur nos enfants par rapport à la langue française. On a encore beaucoup de chemin à faire, vous le dites.
    Je ne veux pas dire qu'il n'y a pas de gains ici et là, mais les gains parcellaires ne sont pas la réalité du tissu social. Je sais que le logo sur l'épinglette que vous et certains de vos collègues portez à vos manteaux veut refléter ce tissu social canadien des deux langues officielles.
    On disait de nous, les Franco-Ontariens, que nous étions non pas la crème du pays, mais la colle du pays. Car en parlant anglais et français, on venait à bout de faire des liens avec les francophones unilingues et la majorité des anglophones unilingues. Ce n'est pas une identité culturelle très forte. D'une certaine façon, dans le fondement même des termes, c'est même péjoratif, quand on y pense.
    Je représente une des circonscriptions où il y a le plus grand nombre de fonctionnaires au Canada, on est dans la région de la capitale fédérale. Je ne suis pas sûr que c'est culturel le fait que les francophones — et on retrouve ça dans d'autres régions du Québec aussi, ce n'est pas juste ici — parlent anglais plus souvent qu'autrement dans des rencontres où on a le droit de parler français. Je pense que la chose elle-même est politique. C'est se dire que si un fonctionnaire parle français la moitié ne comprendra pas, s'il écrit une note en français, le supérieur ne comprendra pas. La note va passer par toutes sortes de truchements et ne se rendra pas à temps, et le fonctionnaire ne sera pas perçu comme un bon employé. Les conséquences sont lourdes, et c'est la réalité proprement dite.
    Dans votre rapport, à la page 25, vous citez M. Savoie, de l'Université de Moncton, qui dit, entre autres: « [...] un gestionnaire très motivé, très respecté et très compétent fera une différence dans la promotion de la politique sur les langues officielles [...] ».
    On sait que beaucoup de hauts fonctionnaires ne parlent même pas le français. Ils le baragouinent ou ont suivi le cours, mais une fois qu'ils l'ont suivi, ils ne sont plus là nécessairement pour le parler. Je le vois même de témoins, de hauts fonctionnaires qui viennent devant les comités dont je fais partie: ils font tout en anglais. Bien sûr, il y a l'interprétation pour les aider. Cette réalité ne semble pas peser lourd dans la volonté politique: elle n'est pas là. J'appelle ça l'« élan pour le maintien de la folklorisation du fait français ».
    Vous en êtes rendu à dire — et je ne vous chicane pas — que c'est culturel; moi, je vous dis que c'est politique. Il y a un élément qui fait que c'est normal, c'est ainsi: a truly French Canadian is bilingual. Ça ne pose pas problème aux fonctionnaires, ils vont parler en anglais et le francophone va comprendre.
    Face à cette situation, c'est extrêmement lourd. On l'observe dans le débat sur les juges à la Cour suprême. Les juges à la Cour suprême, c'est la pointe de l'iceberg, c'est un épiphénomène, c'est un exemple dans un océan de réalités. Imaginez-vous, on ne se bat qu'au sujet d'un exemple.
    Vous dites que vous remettez en question le fait que le Secrétariat du Conseil du Trésor a des difficultés à s'acquitter de ses responsabilités linguistiques. Pouvez-vous nous proposer des éléments, des pistes, qui pourraient l'aider? Que devrait-on faire?
(0920)
    D'abord, je voudrais clarifier une chose. Certains disent que tout élément culturel est, par définition, politique. La politique est aussi culturelle. On communique dans une culture, on ne peut pas éviter ce chevauchement entre la politique et la culture.
    Il y a une autre chose que je dirais vis-à-vis de la langue de travail: ce chapitre est un peu un avant-goût d'une étude qu'on espère pouvoir publier à l'automne. Cette étude ira plus en détail sur la question de leadership en matière de langue de travail et abordera exactement les questions que vous avez soulevées.
    Merci, monsieur le commissaire.
    On va enchaîner avec M. Godin.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais aussi vous souhaiter la bienvenue au comité.
    J'aimerais parler d'Air Canada Jazz. Après avoir étudié ce dossier, on apprend que la filiale Jazz se rapporte directement à Air Canada. La filiale elle-même n'est pas soumise directement à la Loi sur les langues officielles, tandis qu'Air Canada l'est. Je ne sais pas comment le dire pour vous faire comprendre. C'est Air Canada qui impose à Jazz de donner les services dans les deux langues officielles, puisque Air Canada est soumise à la Loi sur les langues officielles.
     Alors, comment peut-on régler un problème, si Jazz est le problème? Par exemple, j'ai porté plainte auprès de vous, monsieur le commissaire. Je me suis aussi plaint à Air Canada, et Jazz m'a répondu au nom d'Air Canada. Alors, j'ai envoyé la lettre de Jazz à Air Canada et j'ai dit aux gens d'Air Canada que je ne faisais pas affaire avec Jazz mais avec eux.
    Alors, dans le projet de loi qu'on vous a demandé d'appuyer, est-ce le problème que vous tentez de régler?
    En effet, on a notamment remarqué une chose à savoir que, lors de chacun des changements de structure d'Air Canada ou d'ACE, des éléments sont retirés de la structure d'Air Canada pour devenir des filiales d'Air Canada. Donc, on en perd la supervision directe.
     Actuellement, Jazz fonctionne un peu comme une tierce partie ou un sous-traitant d'Air Canada. Air Canada a la responsabilité, comme entrepreneur, de faire en sorte que les règles auxquelles elle est assujettie soient respectées par Jazz.
(0925)
    Selon Air Canada, Jazz est également soumise aux langues officielles. C'est ce que les représentants d'Air Canada ont dit quand il ont comparu devant le comité avant vous. Ainsi, vous n'êtes pas obligé de répondre tout de suite à ma question, car vous y répondrez peut-être à la suite de la plainte que j'ai déposée. Vous pouvez aussi y répondre, si vous le désirez.
    Avez-vous le pouvoir, dans une situation de sous-traitance, d'aller jusqu'au bout des choses et d'aller voir ce qui s'est passé chez Jazz?
    On a certainement la capacité de faire le suivi dans des cas de non-respect de la loi, qu'il s'agisse d'un entrepreneur ou d'une institution, par exemple, les autorités aéroportuaires qui sont...
     Ainsi, monsieur le commissaire, cela veut dire que vous êtes capable d'aller voir quelle sorte d'examens Jazz fait passer à ses employés pour déterminer si ceux-ci sont bilingues.
     Air Canada ne fait pas passer l'examen aux employés de Jazz; Jazz le fait. La seule réponse de Jazz a été de dire que l'employé avait refusé de parler en français. Finalement, selon la lettre qui m'a été envoyée, Jazz venait de s'apercevoir que cet employé avait réussi le test alors qu'il n'aurait jamais dû le réussir. Imaginez-vous!

[Traduction]

    Soit on parle la langue, soit on ne la parle pas.

[Français]

    Je pense que les tribunaux ont déclaré très clairement que les compagnies aériennes qui ont des responsabilités linguistiques ont des responsabilités de résultats. C'est dans ce sens que l'on peut vérifier pour voir comment il se fait qu'elles n'ont pas réussi à produire les résultats qu'elles sont obligées de produire en vertu de la loi.
    J'ai une autre question, sur un autre sujet.
    M. Jean Léger, qui représente les francophones de la Nouvelle-Écosse, était ici la semaine dernière. Il disait que, depuis le mois de décembre, je crois, il essaie d'avoir une rencontre avec des fonctionnaires du gouvernement et que cela avait toujours été refusé. À son avis, en Nouvelle-Écosse, au sein du groupe de hauts fonctionnaires qu'il veut rencontrer, il y en a peut-être seulement un qui parle le français.
    Au palier fédéral.
    Au palier fédéral.
    Je ne peux pas vous dire si ce chiffre est exact. On peut vérifier.
    Il faut que je souligne le fait que la Nouvelle-Écosse n'est pas une région désignée bilingue. Donc, les employés n'ont pas le droit de travailler en français...
    La Nouvelle-Écosse n'est pas une région désignée bilingue, et le gouvernement y transfère beaucoup de responsabilités fédérales. Par exemple, des institutions bilingues qui étaient à Moncton sont déménagées en Nouvelle-Écosse. Alors, « on n'est pas bien partis ».
    Non, en effet. C'est un problème institutionnel que j'ai souvent souligné dans le passé, et des fonctionnaires anglophones m'ont signalé leur difficulté à maintenir un certain niveau de français après avoir été transférés de Moncton à Halifax. À Moncton, ils m'ont raconté qu'après avoir suivi le cours, il était très facile pour eux de maintenir le niveau de français qu'ils avaient atteint.
    Non, mais là, on s'en va sur un...
    Merci, monsieur Godin. On est déjà...
    M. Yvon Godin: Je vais revenir sur ce sujet, c'est important.
    Le président: On passe de l'est à l'ouest du pays.
    Monsieur Weston, vous avez la parole.
    Merci, monsieur Fraser, d'être ici aujourd'hui.
    Je suis ravi d'entendre vos propos, non pas parce que je suis d'accord, mais parce que vous me poussez à penser à des choses auxquelles je ne pense pas régulièrement. Nous avons entendu les propos de M. Bourgault. Le problème n'est pas qu'il ait souligné l'importance de la langue française dans les autres régions du Canada, mais qu'il ait oublié les autres langues que nous parlons, les langues des droits humains, les langues de comptabilité, les langues que nous, Canadiens, considérons comme très importantes, et que le reste du monde considère comme magnifiques. Je pense que le piège dans lequel vous pouvez tomber est celui d'être a good hammer.
(0930)

[Traduction]

    Il faut garder le sens de la mesure. Par exemple, le coeur importe dans le corps humain, mais s'il absorbe tout l'oxygène, le cerveau va mourir.
    Pour ce qui est de la Cour suprême du Canada, même si...

[Français]

nous sommes d'accord — je suis un avocat de la Colombie-Britannique, mes enfants fréquentent une école d'immersion française, j'aime bien la province de Québec, j'ai travaillé pour le gouvernement du Québec — moi,

[Traduction]

    Je ne pourrais pas satisfaire aux critères proposés dans le projet de loi de M. Godin, et aucun avocat de la Colombie-Britannique que je connais ne le pourrait non plus. Voici donc ma préoccupation: si nous imposons l'objectif valable et admirable d'augmenter le bilinguisme à la Cour suprême du Canada, c'est une bonne chose; en revanche, si nous allons trop loin, nous négligeons d'autres aspects importants — l'exercice de la justice et la représentation des régions. En définitive, cela pourrait soulever un tollé. Des gens de la Colombie-Britannique qui, comme moi, veulent promouvoir le bilinguisme au même titre que MM. Nadeau et Godin pourraient se mettre à voir les choses autrement. Ils pourraient dire qu'il n'y a pas de justice dans nos tribunaux ni de représentation régionale et que l'interprétation simultanée sera supprimée pour que les gens des institutions soient bilingues.
    Les conséquences pourraient être bien pires que la solution.
    Vous avez dit que vous étiez ici pour discuter. J'aimerais beaucoup connaître votre réponse.
    Merci de votre question.
    Permettez-moi tout d'abord de parler de la norme et vous dire si elle est vraiment exagérée ou si elle est au contraire inférieure à la norme à laquelle les fonctionnaires doivent satisfaire. Contrairement à d'autres institutions fédérales, la Cour suprême bénéficie actuellement d'une exemption. Il y a vingt-deux ans, lorsqu'on a modifié la Loi sur les langues officielles et qu'on s'est demandé s'il fallait inclure cette exemption relative à la Cour suprême dans la loi, le ministre de la Justice Ramon Hnatyshyn a dit que nous n'étions pas encore prêts.
    Cela fait maintenant 22 ans que la Loi sur les langues officielles a été modifiée. Sommes-nous prêts? À l'heure actuelle, huit juges sur neuf répondent aux critères. En réalité, on attend moins des juges que des hauts fonctionnaires du gouvernement, des chefs des partis politiques et des militaires de haut rang.
    Tout ce qui est demandé dans le projet de loi d'initiative parlementaire, c'est la compréhension orale. Les juges n'auraient pas à rendre des décisions par écrit ou à poser des questions dans une autre langue; on leur demande simplement de comprendre.
    Selon moi, c'est particulièrement important, parce que...
    Si je peux vous interrompre, monsieur Fraser, il s'agit d'une norme élevée. Même dans les examens pour le service extérieur, c'est la partie qu'échouent les gens qui ont étudié une autre langue pendant des années.

[Français]

Leur niveau de compréhension n'est certainement pas celui qui est requis pour un juge de la Cour suprême.
    Merci beaucoup, monsieur Weston.
    On va continuer avec M. Bélanger.

[Traduction]

    Je vous remercie, monsieur le président.
    Simplement pour continuer dans la même veine, durant les 13 ans où M. Chrétien était premier ministre, tous les juges nommés à la Cour suprême pouvaient travailler dans les deux langues. Je crois que la première personne nommée par le gouvernement actuel était aussi bilingue. De plus, je crois qu'à l'Université de Toronto et à l'Université de la Colombie-Britannique, on a indiqué que si le projet de loi était adopté, on adapterait le programme pour que les diplômés puissent accéder à la Cour suprême.
    Je voulais simplement communiquer cette information, monsieur le président.
(0935)

[Français]

    Merci, monsieur le commissaire, d'être ici ce matin avec votre équipe. Je veux me concentrer sur la question du Conseil du Trésor.
    Toutefois, avant, je veux vous remercier d'avoir clarifié votre position sur la question des juges de la Cour suprême. En effet, lorsque le ministre Moore a comparu devant nous, il n'y a pas longtemps, il a tenté de nous démontrer que ce n'était pas votre position. Je suis content que vous l'ayez clarifiée. On sait maintenant comment le commissaire aux langues officielles du Canada se situe par rapport à cette question.
    Concernant le Conseil du Trésor, si j'ai bien compris ce que vous disiez dans votre commentaire de ce matin, la décision de décentraliser et de tout diriger vers les agences est une décision qui était unilatérale, puisqu'il n'y a pas eu de consultation au préalable.
    Ce sont les informations qu'on a relativement à cette décision.
    Sauf erreur, alors qu'il y avait 74 personnes attitrées à ces fonctions au sein du Conseil du Trésor en 2006, il n'en reste plus que 13 aujourd'hui.
    C'est exact.
    Nonobstant cela, on a ajouté aux fonctions, puisqu'on a éliminé une agence entre-temps et qu'on a remis les responsabilités de cette agence au Conseil du Trésor.
    C'est exact.
    C'est bien parti.
    Vous avez mentionné quatre fonctions en particulier qui ne sont plus exercées par le Secrétariat du Conseil du Trésor. Premièrement, il y a la liaison entre les institutions fédérales par l'entremise d'experts que vous appelez les « portefeuillistes ». Deuxièmement, il y a les services d'interprétation de la Loi sur les langues officielles pour tous les ministères et agences. Troisièmement, il y a sa participation au Rendez-vous de la Francophonie au sein de la fonction publique. Quatrièmement, il y a le recensement des pratiques exemplaires en matière de langues officielles.
    Est-ce que d'autres ont été complètement abandonnées?
    Pour autant que je sache, la liste est complète.
    La réponse que j'ai eue, c'est qu'on s'attend à ce que les sous-ministres et les chefs d'institutions fédérales, qui sont soumis à la loi, prennent en charge cette responsabilité de faire respecter la loi, puisque c'est à eux de prendre leurs responsabilités.
    On a pris soin, dans le rapport, de ne pas condamner la décentralisation proprement dite, mais de souligner notre souci que le processus de décentralisation comporte des risques. On a également pris soin d'énumérer les éléments qui ne sont plus parmi les outils et parmi les fonctions qui sont exercées au centre, au Conseil du Trésor.
    Est-ce que vous savez, monsieur le commissaire, si des 61 postes qui ont été éliminés, certains ont été transférés à des agences ou ministères pour les aider à mettre en oeuvre ce que le Conseil du Trésor faisait auparavant?
    Pas à ma connaissance. Je pense qu'il y en a certains qui ont postulé des emplois et qui ont peut-être été embauchés pour certaines fonctions, mais...
    Je parle de transferts de postes.
    Non.
    Il n'y a pas eu de transferts de postes du Conseil du Trésor? Est-ce que ça signifie qu'il y a eu une élimination nette d'une soixantaine de postes qui étaient consacrés à la mise en oeuvre de la Loi sur les langues officielles?
    C'est la façon dont je comprends la situation.
    Est-ce que le Conseil du Trésor consulte le Commissariat aux langues officielles lorsqu'il apporte des changements aux règlements qui touchent la Loi sur les langues officielles?
    Pas de façon officielle. On jette un coup d'oeil sur les règlements, mais en général, c'est après coup.
    J'y reviendrai, monsieur...
    Parfois, le fait qu'on nous consulte devient une pente glissante en ce qui concerne notre indépendance. Pour surveiller le gouvernement, nous ne voulons pas remplacer le Conseil du Trésor quant à ses responsabilités. Nous sommes disponibles pour aider les ministères et nous essayons d'être ouverts, mais nous ne voulons pas nous retrouver dans une situation où la responsabilité repose sur nos épaules. Nous conservons un rôle d'ombudsman. D'une façon, il faut que nous gardions une certaine distance.
(0940)
    Merci beaucoup, monsieur Bélanger.
     Nous allons maintenant passer à M. Nadeau.
    Merci, monsieur le président.
     Le français est vu comme un fardeau et une obligation juridique plutôt que comme une fierté culturelle. C'est ce que j'ai saisi plus tôt de votre propos. Vous dites ceci dans votre rapport:
De plus, aucune mesure n’a été prévue pour empêcher certaines institutions fédérales de faire une interprétation restrictive de la Loi sur les langues officielles.
    Les questions de M. Bélanger ont confirmé la tendance. Qu'il s'agisse des services, des fonctionnaires ou des serviteurs de l'État qui ont des responsabilités, tout rapetisse comme une peau de chagrin. Y a-t-il autre chose qu'on devrait savoir à cet égard? Que devrait-on faire pour améliorer la situation?
    J'ai appris notamment, au sujet du rôle des comités parlementaires et du gouvernement, que quand vous faites comparaître devant vous des ministres et des sous-ministres, c'est en soi une incitation à mieux connaître la problématique en cause. L'intérêt d'un comité parlementaire exerce en soi une pression sur les institutions. Faire témoigner des gens, ça déclenche un processus de travail et d'analyse sur ce qui se passe au sein des institutions. Un élément ayant été relégué aux oubliettes peut tout à coup devenir une question sur laquelle on met un accent considérable.
    D'accord. On a donc également du travail à faire. J'espère que les 12 collègues le feront ensemble.
    Par ailleurs, monsieur le commissaire, je vous ai fait parvenir une lettre du COVAN. On sait qu'il a eu des problèmes avant et pendant les jeux. Après ceux-ci, tous les députés du Bloc québécois — et je ne sais si ça a été le cas pour les collègues des autres partis — ont reçu une lettre et un colis contenant un très beau costume portant l'effigie des Jeux. Or la lettre adressée aux députés du Bloc québécois n'était rédigée qu'en anglais. On a écrit à M. Furlong et on lui a donné un ultimatum. La lettre était datée du 25 mars, mais on ne l'a reçue qu'à la fin du mois de mai. On a aussi reçu les costumes dans nos circonscriptions. On a vérifié si l'erreur ne touchait que moi, mais on s'est rendu compte que la situation était la même partout.
    On a écrit une lettre en français et en anglais. On a dit à M. Furlong souhaiter qu'il nous écrive en français. S'il veut que nous soyons de vrais ambassadeurs... Nous avons été bons princes puisque nous avons écrit la lettre destinée à M. Furlong dans les deux langues officielles. Nous n'avons toujours pas reçu de réponse. Nous vous avons envoyé, ainsi qu'à M. Aubut, du Comité olympique canadien, une copie conforme de la lettre.
    Quelle est votre réaction face à cette situation? Le gouvernement fédéral ne fait pas son travail et ne donne pas l'exemple. Le Comité olympique canadien est une organisation paragouvernementale et elle fonctionne selon la même philosophie que le gouvernement. Le français, c'est secondaire. On nous envoie un beau cadeau et on fait passer la pilule en nous envoyant une lettre en anglais.
    Je trouve ça regrettable.
    Comme vous le savez, vous avez fait énormément de travail, au sujet des Jeux olympiques; nous aussi. Je l'ai mentionné dans la préface du rapport annuel.
    Je trouve regrettable que des gestes comme ceux-là et des cérémonies qui ont suscité beaucoup de plaintes aient fait ombrage aux Jeux proprement dits, alors que sur le terrain, il y a eu énormément d'efforts de la part des institutions fédérales, des bénévoles et même des compagnies privées pour accueillir des visiteurs dans les deux langues officielles et fournir des services.
     Donc, je trouve regrettable, après tant d'efforts de tant de gens et, dans bien des aspects, de réussites sur le terrain, qu'un manque de réflexe fasse ombrage à ces réussites.
(0945)
    Merci, monsieur le président.
    Merci beaucoup, monsieur Nadeau.
    On va enchaîner avec Mme O'Neill-Gordon.

[Traduction]

    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je veux souhaiter la bienvenue à tous ce matin. Il est agréable de vous revoir ici et d'entendre vos explications.
    Comme vous le savez tous, le comité étudie de très près la feuille de route dans la cadre de l'examen qu'il fait de la dualité linguistique. Dans votre rapport, vous indiquez que la feuille de route est un outil essentiel dont doit se servir le gouvernement pour respecter la dualité linguistique. Nous avons constaté la même chose au cours de l'étude.
    La feuille de route diffère grandement du plan d'action, notamment en ce qui concerne le financement. Le gouvernement a prévu des fonds de 1,1 milliard de dollars pour cinq ans. Davantage d'efforts seront déployés dans les milieux culturels. Des fonds ont été accordés pour offrir une vitrine à la musique, ce qui ne se faisait pas dans le programme précédent. Le programme de traduction a également été mis en valeur.
    Nous avons appris que le plan d'action précédent ne portait que sur huit ministères. Or, le nouveau programme concerne 15 ministères, ce qui constitue une grande amélioration.
    Tout en reconnaissant qu'il y a toujours place pour l'amélioration — comme nous le savons tous —, diriez-vous que la feuille de route est une amélioration par rapport au plan d'action? Quels sont les aspects améliorés au juste?
    Je ne veux pas trop m'avancer, car nous surveillons la mise en oeuvre du plan dans le détail. L'ajout de la composante culturelle dont vous avez parlé et l'investissement auprès des immigrants sont de bonnes mesures. Il y a certaines choses concernant l'apprentissage de la langue seconde qui importent selon moi.
    Comme je l'ai dit plus tôt, je suis toutefois désolé de constater qu'on a réduit les cours de langue dans le secteur public. Comme vous l'avez souligné, il s'agit du renouvellement à hauteur de 1,1 milliard de dollars d'un programme qui disposait auparavant d'un budget de 750 millions. Compte tenu de l'élément culturel ajouté au programme et de l'inflation, je pense que le montant net est très semblable. J'ai finalement appris pourquoi la culture ne faisait pas partie du premier plan. Dans ce temps-là, le secteur culturel n'était tout simplement pas prêt à participer au processus de reddition de comptes et de gestion des fonds publics.
    Je pense que l'ancien programme a simplement été renouvelé. On a fait certains rajustements et on a renforcé des éléments. Certaines priorités ont changé... Je répète que j'ai été déçu de voir une diminution des sommes investies pour les cours de langue dans le secteur public. Toujours est-il que je ne peux pas commenter plus en détail la comptabilité générale des deux programmes.
    J'aimerais revenir à la question posée par M. Bélanger concernant la consultation menée sur la modification de la réglementation. La consultation a été effectuée en 2001. C'était avant que je sois en poste, mais des changements ont été apportés à la réglementation pour faire suite au jugement rendu par la Cour suprême dans l'affaire Donnie Doucet. Nous avons donc été consultés par le passé, mais c'était avant que j'entre en fonction.
(0950)
    En tant que Néo-Brunswickoise, je suis très heureuse du 1,1 million de dollars accordé. En tant qu'agente d'éducation, j'espère bien sûr que des fonds importants seront investis dans l'éducation. Voilà où nous devons commencer pour que nos enfants soient bilingues.
    Je veux également savoir ce que vous pensez de...
    Je vous remercie, madame O'Neill-Gordon. Votre temps est écoulé.

[Français]

    Nous allons enchaîner avec M. Godin.
    Monsieur le commissaire, pour enchaîner sur ce que disait Mme O'Neill-Gordon, je dirai que comme Néo-Brunswickois, je suis moins heureux.
    On se souviendra qu'en matière d'éducation au Nouveau-Brunswick, dans les écoles d'immersion, c'est passé de la première à la cinquième année, et 350 anglophones ont manifesté à Fredericton. Alors, je ne sais pas ce qu'elle peut voir, comme enseignante, qui la rend aussi heureuse, considérant le recul que ça représente. Dans le domaine de la santé, tous les équipements sont dans les hôpitaux anglophones, tandis que les hôpitaux francophones n'en ont pas du tout. On peut suivre toutes les démarches qui se font en matière de santé au Nouveau-Brunswick.
    Je suis peut-être un peu moins heureux qu'elle. Je sais qu'elle représente le gouvernement, il faut donc qu'elle parle pour le gouvernement.
    Quand on considère la Feuille de route et les fonds qui ont été accordés à l'immigration, on remarque que 10 millions de dollars ont été alloués au Nouveau-Brunswick. Pourtant, on s'est fait dire la semaine dernière que ça faisait deux ans que l'annonce avait été faite, mais que le programme commence seulement...
    Excusez-moi, monsieur Godin, mais nous avons un rappel au Règlement.

[Traduction]

    Madame O'Neill-Gordon.
    Je veux qu'il soit clair que, comme nous parlons de ce que vous faites dans le système de l'éducation... il y a certainement eu un recul au cours de la dernière année. Il s'agit d'une compétence provinciale, tout comme la santé.
    C'est un sujet de discussion, et non un rappel au Règlement.
    Mme O'Neill-Gordon: Je voulais simplement...
    Mme O'Neill-Gordon, ce n'est pas un rappel au Règlement, mais plutôt un sujet de discussion.
    Je vous remercie.
    Allez-y.

[Français]

    Les 10 millions de dollars voués à l'immigration ont été donnés il y a deux ans, censément, et on se fait dire que ce n'est que maintenant que l'argent peut commencer à être distribués par l'entremise de l'APECA. Je me demande quelle sorte de programme c'est, s'il y a un suivi. L'argent ira-t-il vraiment pour favoriser l'immigration des francophones au Nouveau-Brunswick ou plutôt pour l'immigration en général? Il faut étudier tous ces points.
    En ce qui concerne les transferts de Moncton à Halifax, vous avez dit, monsieur le commissaire, que la Nouvelle-Écosse n'est pas assujettie à la Loi sur les langues officielles au fédéral. Vous pourrez peut-être expliquer cela. Sauf que si le programme va desservir le Canada ou tout l'Atlantique, c'est peut-être autre chose.
    Faites vite, s'il vous plaît, parce que j'ai d'autres questions importantes à poser.
    J'aimerais clarifier une chose. Je n'ai pas dit que la Nouvelle-Écosse n'est pas assujettie à la Loi sur les langues officielles. J'ai plutôt dit que ce n'est pas une région désignée bilingue pour ce qui est de la langue de travail. Ça veut dire qu'en effet, des gens ont droit à des services du gouvernement du fédéral, mais que les fonctionnaires qui travaillent à Halifax n'ont pas le droit de travailler en français, ce qui rend cela plus difficile...
    Mais si les gens sont transférés pour aller donner un service à tout l'Atlantique, ne faudrait-il pas que ce soit revu de nouveau?
    En effet, il y a eu des discussions portant sur cette question. Cela dit, on trouve que c'est plus difficile pour une institution fédérale de donner un service dans les deux langues si les employés n'ont pas le droit de travailler dans la langue de leur choix. C'est pour ça qu'on dit que toutes ces questions sont liées.
    Maintenant, parlons des juges de la Cour suprême. Le ministre nous a dit ici, en comité, qu'il avait voté contre mon projet de loi sur les juges à la Cour suprême parce qu'il divisait les Canadiens. Si le ministre du Patrimoine canadien pense qu'un projet de loi sur les juges de la Cour suprême qui ne concerne que 9 juges sur 33 millions de personnes divise les Canadiens, pensez-vous qu'ils auront à coeur d'aller dire qu'ils vont donner des services bilingues à Vancouver, en Nouvelle-Écosse, et qu'ils vont forcer les fonctionnaires à travailler dans les deux langues, avec cette sorte d'attitude venant d'en haut? N'est-ce pas des commentaires de division plutôt que des commentaires rassembleurs?
    Je ne veux pas faire un procès d'intention sur des commentaires émis en débat politique. On dit que la question divise le pays. Tout ce que je peux dire en réponse, c'est que toute question politique divise le pays. C'est la nature du débat politique et démocratique. Quand il y a un événement qui demande un vote, des gens appuient, d'autres s'opposent. C'est la nature du débat démocratique.
(0955)
    Pour être juge, une personne ne doit-elle pas être avocat?
    Tout à fait.
    Plus tôt, M. Weston a dit qu'à Vancouver, il n'y a absolument aucun avocat bilingue. Or je pensais que le juge de la Cour d'appel de la Colombie-Britannique était complètement bilingue. Alors, on pourrait nommer une personne...

[Traduction]

    J'invoque le Règlement.

[Français]

    Je m'excuse, monsieur Godin, il y a un autre rappel au Règlement.
    J'aurai droit à un autre tour pour avoir la réponse?
    Oui.
    Je voudrais rappeler aux membres de faire la distinction entre un rappel au Règlement et un point de débat.
    Sur ce, je vous écoute, monsieur Weston.
    Ce n'est pas un point de débat. Je n'ai pas dit qu'il n'y avait aucun avocat bilingue en Colombie-Britannique; j'ai dit que je n'en connaissais pas un, même si je parle français. Il y en a probablement, mais c'est important de...
    Dans ce cas, je crois que votre point est valide, monsieur Weston, car il précise votre pensée. Évidemment, de cette façon, on va pouvoir continuer.
    Je veux juste ajouter, puisque vous avez laissé le débat se faire, que ce n'est pas de ma faute s'il ne connaît pas les avocats en Colombie-Britannique.
    Il s'adonne que je n'en connais pas non plus, monsieur Godin.
    Monsieur Fraser, vous avez la parole.
    J'aimerais souligner un point au comité. Que ce projet de loi soit adopté au Sénat ou non, ça ne met pas fin au débat sur le bilinguisme des juges à la Cour suprême.
    Absolument pas. Ça, je peux vous le garantir.
    Ce n'est pas un coup de baguette magique qui va soudainement transformer le système juridique en ce qui à trait à l'accès à la justice dans les deux langues officielles. Si ça ne passe pas, ça ne mettra pas fin à l'importance du bilinguisme des juges.
    Je pense que c'est très important de se rendre compte que ce n'est pas la fin, mais le début d'une discussion sur la manière d'assurer un accès au système de justice au Canada dans les deux langues officielles.
    Excellent.
    Merci beaucoup, monsieur Godin.
    On en est déjà à notre troisième tour, et c'est M. Bélanger qui l'entamera.
    Merci, monsieur le président.
    Je vais continuer avec la question du Conseil du Trésor, si vous me le permettez, monsieur le commissaire.
    C'est inquiétant. Le gouvernement présent a éliminé le secrétariat qui existait au Conseil privé et qui avait pour mandat de s'assurer qu'au sein de tous les ministères et de toutes les agences, on respecte la Loi sur les langues officielles. Le gouvernement a également éliminé le comité ad hoc du Cabinet qui pouvait se réunir périodiquement, au besoin, pour la mise en oeuvre de la Loi sur les langues officielles. Le comité de sous-ministres a également été éliminé. De même, il y avait deux consultations annuelles auprès des communautés. L'une était tenue au printemps, par les gens de la haute fonction publique, et l'autre, à l'automne, par les ministres. Ces consultations ont également été éliminées, et ce, avant même les mesures qui ont été prises par le Conseil du Trésor.
     Ensuite, vous confirmez qu'il y a quatre fonctions relevant du Conseil du Trésor que celui-ci n'exerce plus. Ces postes, qui étaient occupés par une soixantaine de fonctionnaires qui exerçaient ces responsabilités, ont été éliminés, mais n'ont pas été transférés aux agences et ministères. Maintenant, il reste 13 personnes pour remplir les fonctions du Conseil du Trésor.
    Pouvez-vous me dire, rapidement, quelles sont les fonctions que le Conseil du Trésor doit continuer d'exercer?
    Il continue d'avoir toutes les mêmes responsabilités qui sont décrites dans la loi. Sur ce plan, il n'y a donc pas de changement.
    Il y a une chose que je devrais faire remarquer. Récemment, ce Centre d'excellence en langues officielles a émis un communiqué à tous les ministères concernant leur responsabilité de tenir compte de la décision de la Cour suprême relativement au litige DesRochers c. Canada, ou l'affaire CALDECH, leur demandant de faire en sorte que leurs programmes et services soient adaptés aux besoins des communautés de langue officielle en situation minoritaire.
    Ainsi, je ne veux pas donner l'impression qu'on pense qu'au Centre d'excellence en langues officielles, on ne fait rien. On y continue de surveiller la situation et d'envoyer des messages aux institutions. Cependant, comme vous dites, et comme on le fait remarquer dans notre rapport, il y a une série de fonctions qui ne sont plus exercées.
(1000)
    Monsieur le commissaire, j'ai lu et relu les pages 24 et 25 de votre rapport, en français. Je les porterais à l'attention de quiconque est intéressé par la question.
     Le titre est assez révélateur: « Une approche gouvernementale risquée ». Vous parlez d'un gouvernement qui n'a pas tenu de consultation avant d'entamer ces changements. Vous dites qu'il y a des dangers réels dans cette décentralisation amorcée, que les champions des langues officielles au sein des divers ministères et organismes sont craintifs vis-à-vis de ces changements, et qu'on peut s'interroger sur la capacité réelle du Secrétariat du Conseil du Trésor à s'acquitter de ses responsabilités. Vous suggérez qu'il n'est pas trop tard pour corriger le tir, mais qu'il faut le faire.
     Avez-vous discuté de cela avec les responsables du Conseil du Trésor?
    Oui.
    Quelle a été leur réaction?
    Ils ont réagi en disant qu'ils étaient conscients des responsabilités, et que maintenant, cette responsabilité de faire respecter la loi et les obligations, qui sont très claires, relevait de plus en plus des ministères et des responsables des institutions.
    C'est tout?
    Il fut un temps, monsieur le commissaire, où les ministères devaient rendre compte au Conseil du Trésor de ce qu'ils faisaient par rapport à la Loi sur les langues officielles. Est-ce toujours le cas?
    Pour autant que je sache, oui. Cependant, il y a un certain nombre de comptes qui sont rendus à Patrimoine canadien. Des rapports réguliers sont faits en ce qui concerne les articles 41 et 42 de la Loi sur les langues officielles, et ils sont envoyés à Patrimoine canadien.
    Vous faites une bonne gestion de votre temps, monsieur Bélanger. Nous en sommes presque à la seconde près.
    Nous allons maintenant passer à la secrétaire parlementaire, Mme Glover.
    Merci, monsieur le président.
    Bienvenue à tous nos témoins.
    Je veux revenir aux pages 24 et 25, que M. Bélanger a mentionnées. Monsieur le commissaire, à la page 24 de votre rapport, vous dites ceci:
Il est encore tôt pour évaluer l’incidence définitive que les changements de la dernière année auront sur la dualité linguistique.
     En plus, vous dites ce qui suit à la page 25:
Ainsi, les changements qu’a apportés le gouvernement fédéral à la gouvernance des langues officielles pourraient toujours avoir une incidence positive [...]
     Quant à moi, il est important de toujours viser l'avenir et de ne pas tirer soi-même des conclusions sans avoir de preuves.

[Traduction]

    Voilà ma plus grande déception lorsque je fais partie d'un comité; les gens prennent des décisions ou tirent des conclusions sans avoir de preuve.
    On tort les propos de personnes comme vous, monsieur le commissaire, pour satisfaire des besoins partisans, ce que je trouve déplorable.
    Cela m'amène à corriger certaines affirmations faites aujourd'hui.
    Monsieur le commissaire, vous et moi avons discuté des juges francophones et du fait qu'il serait difficile de mettre en oeuvre le projet de loi s'il était adopté.
    Je crois en avoir parlé il y a quelques minutes. Nous ne sommes qu'au début du processus.
    Exactement. J'allais justement en parler, alors je suis contente que vous l'ayez dit de nouveau. Il y a beaucoup de travail à faire.
    Je dois reprendre M. Bélanger. Il essaie encore de dépeindre le ministre, qui travaille pourtant très fort à ce sujet, comme quelqu'un de malhonnête. Je pense qu'il s'agit de propos non parlementaires. À la dernière séance, M. Bélanger a précisément fait état de ce dont nous avons parlé — de ce que vous avez dit.
    Je vais reprendre les propos du ministre pour que M. Bélanger n'essaie pas une fois de plus de jouer sur les mots à des fins partisanes.
    L'honorable ministre a dit qu'il avait discuté avec vous. L'objet de la rencontre était de discuter de son rapport, mais vous avez parlé plusieurs minutes de la question des juges. Vous avez affirmé que la mise en oeuvre d'une loi causerait certains problèmes d'ordre pratique. Il a aussi dit que vous aviez indiqué que ce n'était pas si simple et qu'il faudrait travailler à ce sujet.
    Je n'aime pas du tout prendre mon temps pour corriger les affirmations partisanes faites au comité, mais cela n'a pas de fin.
    Nous devons faire du bon travail. C'est pourquoi je voudrais tout d'abord connaître vos impressions sur le rapport de Monique Collette. Je souhaiterais que vous donniez une réponse écrite, notamment en ce qui concerne les pratiques exemplaires évoquées dans votre rapport. Ces pratiques ne sont pas mises en évidence, et j'aimerais beaucoup avoir votre opinion là-dessus. Le rapport de Mme Collette est volumineux. J'aimerais connaître les pratiques que vous estimez tout particulièrement bonnes.
    J'aimerais également savoir ce que vous pensez du projet pilote que nous avons mené avec 11 universités. La fonction publique a maintenant plus de flexibilité. Je connais bon nombre de fonctionnaires qui suivent actuellement des cours de langue pour améliorer leur connaissance de leur langue seconde, au lieu d'être simplement sur une liste d'attente.
    Veuillez me donner vos impressions sur le projet pilote auquel participent 11 universités pour aider les fonctionnaires à devenir bilingues.
(1005)
    Je dirais très brièvement que le projet pilote importe beaucoup. Le projet a été mis en oeuvre tardivement. C'est pourquoi il n'a pas eu la réponse escomptée dans certaines universités. Nous devrons voir l'évolution du projet sur une période un peu plus longue.
    Concernant le rapport de Monique Collette, j'ai trouvé intéressant...
    Pardonnez-moi de vous interrompre, mais j'ai seulement quelques minutes. Je vous serais grandement reconnaissante de me fournir une réponse écrite au lieu d'en discuter. Il y a deux ou trois autres choses dont je voudrais parler.
    J'ai un commentaire bref à faire sur le rapport de Monique Collette. Les pratiques qui y figurent ne sont pas hiérarchisées; il s'agit de l'ensemble des pratiques exemplaires adoptées au pays et au gouvernement. À bien des égards, c'est une boîte à idées. Je pense que nous avons parlé de ce rapport dans le nôtre entre autres pour que davantage de gens soient au courant de son existence. Des hauts fonctionnaires qui m'ont posé des questions sur les pratiques exemplaires ne savaient clairement pas que ce recueil était disponible.
    Je n'ai plus de temps.
    Je pense que c'est un bon rapport, mais j'aimerais connaître votre opinion sur les pratiques que vous considérez les meilleures.
    Merci.

[Français]

    Merci, madame Glover.
     Pour compléter votre requête auprès du commissaire, j'ai demandé à notre greffière de mettre la main sur le fameux rapport de Monique Collette et de le distribuer aux membres du comité. Je crois que ceux-ci vont y trouver des éléments intéressants.
     Monsieur Nadeau, vous avez la parole.
    Monsieur le commissaire, nous avons abordé plus tôt une question que nous n'avons pas eu le temps de traiter au complet. Il s'agit du fait que vous remettez en question la capacité du Secrétariat du Conseil du Trésor de s'acquitter de ses responsabilités linguistiques.
    On a entendu les propos de M. Bélanger. Ce dernier nous a savamment éclairés sur ce qui fait sérieusement défaut dans la machine gouvernementale. J'aimerais que vous nous parliez davantage de cette question. Par ailleurs, j'aimerais savoir ce que le Secrétariat du Conseil du Trésor devrait obtenir, à votre avis, pour être en mesure de s'acquitter de ses responsabilités linguistiques.
    Il est important, je crois, de continuer à être vigilant. Je trouve regrettable que certaines fonctions soient disparues de la carte. Auparavant, des ressources étaient destinées aux champions des langues officielles ou à certains ministères. Je vais demander à Sylvain Giguère d'en parler. Avant de venir au commissariat, il travaillait dans un ministère en tant que champion des langues officielles. Il pourrait témoigner de son expérience.
     J'ai eu le plaisir, pendant deux ans et demi, d'être champion des langues officielles au ministère des Transports. Nous avions un petit groupe à l'interne. Il existe toujours. Il s'agissait de deux ou trois personnes qui travaillaient à la question des langues officielles. Nous exercions du leadership auprès des gens en région pour nous assurer que des services étaient offerts dans les deux langues. Le groupe du Conseil du Trésor nous aidait, étant donné qu'il y avait des portefeuillistes, à répondre à certaines questions. Le fait que ces gens ne soient plus là nous a obligés à développer des expertises à l'interne. L'expertise d'un groupe de 30 ou 40 personnes qui travaillaient à ces dossiers doit maintenant être développée par un petit groupe de deux ou trois personnes. Son niveau d'expertise n'est peut-être pas aussi élevé, mais il est tout de même bon. C'est difficile.
     On devrait voir se développer des communautés de pratique qui rassembleraient les responsables des langues officielles, les champions des langues officielles des ministères. C'est sur ça qu'on devrait se concentrer davantage. Le groupe des 13 qui restent devrait s'assurer que les communautés de pratique sont solides, biens formées et biens informées, et qu'elles se rencontrent souvent. Ce serait un élément clé.
(1010)
    Supposons que je sois fonctionnaire et que je veuille travailler en français, ce qui est un droit. J'aurais des textes et des commentaires à émettre; je me sentirais un peu coincé par la lourdeur ou la non-réceptivité des gens concernant le fait que je parlerais français dans un milieu qui serait surtout anglophone, bien que bilingue sur papier. Dans ces conditions, est-ce que j'irais voir ces champions, de façon à obtenir un peu plus d'appui et à savoir comment procéder?
    En fait, je recevais chaque semaine des coups de fil et je tenais des rencontres avec des gens qui voulaient discuter de sujets semblables. Nous exercions en effet un leadership. Nous nous adressions à des gens des plus hauts niveaux. Nous trouvions des moyens pour exercer une influence, que ce soit sur d'autres institutions ou sur nos collègues à l'interne. C'était un de nos rôles, et celui-ci s'est accentué de plus en plus avec le départ de certaines personnes du Conseil du Trésor.
    On parle ici du ministère des Transports, donc d'une grosse machine pancanadienne, d'un océan à l'autre.
    Absolument. Il s'agissait de plus de 5 000 personnes.
    Aujourd'hui, 13 personnes doivent faire le travail d'une trentaine de personnes. C'est bien cela?
    Au Conseil du Trésor, ces gens forment un petit groupe, mais dans chacun des ministères, il y a au minimum deux ou trois personnes. Dans un ministère aussi vaste que le ministère des Transports, ceux qui reprennent le flambeau en matière de langues officielles doivent travailler plus fort et développer ces expertises. C'est pourquoi l'appui des pairs, y compris ceux des autres ministères, est si important, surtout en région.
    Je comprends.
    Il y a aussi l'aspect interministériel. Je sais que ce n'est pas dans le rapport, mais c'est une question que nous ont soumise la Fédération des communautés francophones et acadienne et le Quebec Community Groups Network. Voyez-vous de l'espoir à l'horizon? Est-ce que quelque chose se développe? J'entends parler de cette question depuis le milieu des années 1980, mais on dirait que ça n'avance pas vraiment. Le réflexe consiste à dire que Patrimoine canadien s'occupe des langues officielles, point à la ligne. Je sais que vous avez votre document, les articles 42 et 43, etc., mais où est l'accélérateur qui va permettre de faire avancer le dossier de la collaboration interministérielle?
    Je pense que vous mettez le doigt sur un problème qu'on constate à l'intérieur d'autres éléments du gouvernement, qui disent que les langues officielles relèvent de Patrimoine canadien, pas d'eux, alors que cela devrait plutôt être intégré dans le fonctionnement du gouvernement. Donc, dès qu'un problème touche l'autre langue officielle, on tend à dire que ça ne relève pas de soi, mais de Patrimoine canadien. C'est un défi réel que d'intégrer l'utilisation des deux langues, de servir des citoyens dans les deux langues, sans qu'il soit dit que ce n'est pas tel groupe qui doit servir le citoyen, mais tel autre.
    C'est pour cela que je dis souvent qu'il faut faire en sorte que la dualité linguistique soit perçue comme une valeur au sein de la fonction publique, même pour des gens qui ne sont pas eux-mêmes bilingues. Je vais profiter de l'occasion pour souligner l'importance du DVD créé par Parcs Canada au sujet de l'offre active, qui explique très clairement que c'est l'obligation des employés de faire une offre active aux citoyens, même s'ils ne sont pas eux-mêmes bilingues.
    Ah, c'est bien. Merci beaucoup, monsieur le commissaire et monsieur Nadeau.
    Nous allons maintenant entamer notre quatrième tour avec Mme Boucher, qui va partager le temps qui lui est alloué.
    Bonjour, monsieur Fraser. Je suis très heureuse de vous accueillir encore une fois aux Comité permanent des langues officielles. Vous nous donnez toujours de bonnes pistes.
    Je suis de ceux qui considèrent que le verre est à moitié plein plutôt qu'à moitié vide. J'aime voir les résultats. Malheureusement, on est dans un monde imparfait, il y a toujours place à l'amélioration. Quand on prend des décisions, il y a toujours des défis, quelles que soient ces décisions
    Au Sénat, dernièrement, en réponse à une question de la sénatrice Fortin-Duplessis, qui commentait votre dernier rapport, vous souligniez que le soutien du gouvernement de 1,1 milliard de dollars pour les langues officielles représentait le montant le plus important jamais investi par un gouvernement dans l'histoire du Canada pour les langues officielles.
    En ce qui concerne les langues officielles, vous avez dit: « Nous voyons déjà certain signes d'amélioration. Quand j'ai fait des consultations avec la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada et le Quebec Community Group Network, ils ont tous les deux affirmés qu'ils voyaient effectivement des signes encourageants. »
    Il est certain que partout où on va, quand on prend des décisions, il y a des risques. Mais les choses qui fonctionnent bien, les souligne-t-on suffisamment? Les gens sont-ils conscients de ce qui fonctionne bien? On met souvent l'accent sur ce qui va mal, et ça se produit partout, pas seulement au sein du gouvernement.
    Parfois, il est agréable d'entendre des bonnes nouvelles. Parmi les bonnes nouvelles dont vous nous avez fait part, il y a le cas des 11 universités qui se sont concertées. Pourriez-vous nous parler un peu des choses qui vont bien et des effets favorables de certaines initiatives du gouvernement?
(1015)
    Vous avez mentionné la question des ententes avec les communautés. C'est un problème qu'on a souligné, mais on a remarqué aussi que — et c'était un peu lié au travail que vous avez fait au sein de ce comité — le ministre a reconnu qu'il y avait un problème, et il y a eu des efforts pour améliorer la situation. On reconnaît cela dans le rapport, mais, pour cette raison, on demande au ministre de nous faire rapport à la fin de l'année financière au sujet des mesures précises qui ont été prises pour faire en sorte que ce phénomène ne se répète pas.
    Vous parlez des 11 universités, de projets-pilotes. C'est un pas dans la bonne direction, et j'espère qu'on peut envoyer le message. Il y a une chose que j'ai essayé de répéter au sous-ministre et aux fonctionnaires, qui sont eux-mêmes des agents de recrutement pour le gouvernement: dire très clairement aux universités qu'il y a entre 12 000 et 15 000 nouveaux postes qui s'ouvrent chaque année au sein du gouvernement fédéral, dont 5 000 sont des postes désignés bilingues. Je pense que vous-mêmes, dans votre rapport, avez souligné le fait que le gouvernement est le plus grand employeur au Canada qui a besoin d'employés bilingues. C'est très important qu'on envoie un message aux universités selon lequel elles ont un rôle à jouer dans ce système.
    Vous savez, c'est une dynamique qui existe depuis 40 ans: en raison de la Loi sur les langues officielles, les gouvernements ont eu tendance à souligner à la population que ce n'est pas elle qui a l'obligation d'apprendre l'autre langue; c'est l'institution qui a l'obligation d'être bilingue. Le bilinguisme officiel, ce n'est pas un problème pour les gens, c'est seulement l'institution qui devrait se transformer. Cela fait en sorte que, chaque fois qu'il y a un changement, cela devient une obligation s'il faut combler une position, que ce soit dans la fonction publique, dans les Forces canadiennes ou en ce qui concerne les postes de chefs de parti politique. Présentement, on a une discussion au sujet de l'importance de la dualité linguistique au sein du système judiciaire. On tend à dire whoa!, car on nous dit depuis 40 ans que cela n'est pas notre problème. Cependant, il y a certains postes clés et il est important que les gens qui remplissent ces postes parlent les deux langues officielles. Pour que cela fonctionne, il faut qu'il y ait une espèce de promotion de l'importance de la dualité linguistique au Canada.
(1020)
    Merci beaucoup, monsieur le commissaire.
    Merci, madame Boucher.
    On va enchaîner avec M. Bélanger.
    Merci, monsieur le président.
    Je vais parler de deux choses, rapidement.
    D'abord, monsieur le commissaire, je vais faire un voeu. J'aimerais que votre commissariat, s'il le veut, se penche sur une note. C'est une note qui nous a été présentée par notre recherchiste, Mme Lecomte, en date du 4 mai, la note 4 de la page 2, et je vous la laisserai. Elle dit que:

La Politique sur les différents modes de prestation de services a changé le 1er avril 2007. Elle a été remplacée [on parle des politiques qui s'appliquent au Conseil du Trésor, à l'ensemble des ministères] par la Politique en matière de présentation de rapports au Secrétariat du Conseil du Trésor sur les institutions fédérales et sur les sociétés dans lesquelles le Canada détient des intérêts. La nouvelle politique ne comporte pas de principes directeurs relatifs aux langues officielles tels qu’ils étaient énoncés à l’annexe C de l’ancienne politique.
    Alors, on a complètement enlevé une référence aux langues officielles qui existait auparavant. Votre commissariat pourrait peut-être jeter un coup d'oeil là-dessus. Car je crois qu'il y aura des répercussions sur les langues officielles, puisqu'on veut se pencher sur l'avenir.
    Ensuite, j'adore être réprimandé par Mme Glover. Monsieur le commissaire, je maintiens ma position à savoir que le ministre, lorsqu'il a comparu devant nous, insinuait que vous aviez une position contraire à la vôtre. Tout ce que j'ai dit, c'est que je suis très content que vous ayez clarifié votre position par rapport au projet de loi de M. Godin, qui porte sur le bilinguisme à la Cour suprême. Je maintiens, monsieur le commissaire, que ce que le ministre insinuait n'était pas correct. Je suis content —et je le reste — que vous ayez clarifié et que vous mainteniez votre position: ce que ce projet de loi veut faire pour le Canada est bien.
    Je cède le reste du temps qui m'est accordé à M. D'Amours.
    Merci, monsieur Bélanger.
    Je vous remercie, monsieur le commissaire, ainsi que les gens de votre bureau, d'être avec nous encore ce matin. Je dis « encore » parce que si vous êtes obligé de comparaître souvent devant nous, ce n'est pas toujours bon signe en ce qui concerne le bilinguisme au sein de l'appareil gouvernemental. On est quand même heureux que vous soyez parmi nous.
    Plus tôt, vous avez mentionné quelque chose concernant l'aspect interministériel et vous nous avez fait part des commentaires de certains ministères, dont l'un établissant que les langues officielles sont la responsabilité de Patrimoine canadien, donc qu'ils s'en lavent les mains.
    Monsieur le commissaire, cela me fait sourire parce que, en ce qui a trait aux langues officielles, la responsabilité revient au Conseil du Trésor. Vous en avez discuté plus tôt et mon collègue M. Bélanger a aussi soulevé cet argument. À présent, c'est la responsabilité des ministères de voir à l'application des langues officielles. Par contre, quand vient le temps de les mettre en application et de les respecter, on dit que c'est la responsabilité du ministère du Patrimoine canadien, et on s'en lave les mains. Tout le monde veut s'en laver les mains. Tout le monde veut se départir des responsabilités liées aux langues officielles. Tout le monde veut s'en laver les mains. Elles sont maintenant la responsabilité de Patrimoine Canada et c'est à se demander où ce sera transféré par la suite.
    Si les gens de l'appareil gouvernemental... On parle du gouvernement, et non pas des fonctionnaires. On parle de la direction. Ceux qui sont censés prendre le leadership dans le dossier se lancent la balle, mais la balle ne revient jamais. On la lance à l'un et à l'autre. À un certain moment, on se demande si quelqu'un pourra l'attraper et s'assurer que les langues officielles pourront être appliquées au sein de l'appareil gouvernemental.
    Avez-vous un commentaire à émettre à ce sujet?
(1025)
    J'aimerais corriger moi-même le tir. Quand j'ai fait ce commentaire, j'avais un incident particulier en tête. Je n'aurais peut-être pas dû généraliser. Il ne faut pas oublier le rôle très important qui est joué, dans beaucoup de ministères, par les champions des langues officielles. Je ne voudrais pas vous donner l'impression que la question des langues officielles est un dossier sans alliés au sein des ministères. Beaucoup de personnes travaillent très fort.
    Monsieur le commissaire, permettez-moi...
    Soyez bref, monsieur D'Amours.
    ... je suis d'accord avec vous pour dire que l'on a peut-être des champions au sein des ministères. J'en suis conscient et je suis d'accord avec vous à ce sujet. Le problème, c'est que nous avons des champions, mais que, parfois, la tête ne suit pas. La tête, c'est le leadership, ce sont les ministres. Ce sont eux qui sont supposés prendre le leadership dans ce dossier.
    Tout à fait. C'est pour ça, d'ailleurs, que nous sommes en train de faire une étude sur le leadership et la langue de travail. J'espère que cette étude pourra être complémentaire au rapport de Mme Monique Collette. J'espère qu'il servira d'outil à des gestionnaires et qu'il renforcera cette question clé.
    J'ai pu remarquer une chose, notamment: lorsqu'il y a un changement de ministre, de sous-ministre ou de directeur, le climat dans le lieu de travail peut se transformer en un claquement de doigts. Si un ministre prend ça au sérieux, on voit soudainement des améliorations.
    Par contre, si c'est quelque chose de secondaire pour un ministre, un sous-ministre ou un sous-ministre adjoint, on peut très vite voir un changement de culture linguistique au sein d'une organisation.
    Merci, monsieur D'Amours.
    M. Godin a maintenant la parole.
    Monsieur le commissaire, si un ministre dit que de vouloir forcer les juges de la Cour suprême à être bilingues divise les Canadiens... On parle de leadership. Je ne vous demanderai pas de commenter ce sujet.
    Plus tôt, mon collègue conservateur M. Weston, qui est avocat, disait que s'il ne parlait pas le français, cela lui enlèverait la possibilité d'accéder à la Cour suprême. Il y a deux aspects aux langues officielles: le service dans la langue de son choix et la langue de travail. Est-ce que la langue de travail peut être au-dessus du service au citoyen?
    Lorsque j'entends les sénateurs conservateurs qui sont contre mon projet de loi et qui ne sont pas à blâmer, car ils ont été nommés par Stephen Harper qui est aussi contre ce projet de loi, ou bien quelqu'un est allé leur dire... Ce n'est pas normal que tout le monde aille dans une même direction. Les sénateurs disent que, si les juges de la Cour suprême doivent être bilingues, il y a violation de la loi parce qu'ils ne peuvent pas parler dans la langue de leur choix avec le client. Cela n'a pas de bon sens.
    Je ne sais pas si vous comprenez ce que je dis.
    M. Graham Fraser: Oui, oui, je comprends.
    M. Yvon Godin: C'est exactement ce qu'ils ont dit. La personne au service des Canadiens et des Canadiennes n'a pas d'autre choix que de parler au client dans la langue de ce dernier. Elle ne peut pas dire qu'une loi la protège et qu'elle peut parler la langue de son choix. Sinon, les langues officielles sont de la foutaise. Quelle est votre impression à ce sujet?
    Une disposition de la loi elle-même dit très clairement que travailler dans sa langue ne prime pas sur le droit du citoyen de recevoir un service. Pour ma part, j'ai parlé récemment à des gens d'un syndicat. Quelqu'un dans la salle a dit qu'il n'avait pas le droit de travailler dans sa langue, que c'était le citoyen qui était déterminant. Je lui ai répondu que c'était exact, que c'était même écrit dans la loi.
    Autrement, chaque fonctionnaire devrait être accompagné d'un traducteur. Cet argument n'a aucun sens. Pourtant, aujourd'hui, des sénateurs veulent l'utiliser pour voter contre le projet de loi.
    À ce sujet, je pense qu'une maîtrise suffisante de l'autre langue officielle est essentielle pour agir de façon appropriée en tant que juge à la Cour suprême.
(1030)
    Par ailleurs, vous parlez du laissez-faire et de toutes ces choses-là. Le gouvernement parle du montant qu'il a investi dans les langues officielles. Je suis d'accord pour dire que l'argent aide, mais la volonté politique de faire respecter la loi n'est-elle pas encore plus forte? On peut parler des 2 milliards de dollars qui ont été alloués, mais en réalité, quand vous faites vos enquêtes, vous notez qu'il y a du laissez-faire, qu'il n'y a pas de leadership de la part des ministères. Peu importe, alors, l'argent qui est alloué.
    C'est pourquoi, monsieur le président, je pense que tout élément dépend de l'autre. La clé, dans tout cela, est en effet le leadership. La gouvernance dépend de l'accès à l'information; le service aux citoyens dépend d'un système de gouvernance approprié. Il est plus difficile pour l'institution d'offrir un service dans les deux langues si le droit de travailler dans sa langue n'est pas respecté. Il y a un genre de cercle qui peut être soit vertueux soit vicieux.
    On dit que les langues officielles ont été confiées aux ministères plutôt qu'au Conseil du Trésor. Recommanderiez-vous que le Conseil du Trésor reprenne en main cette responsabilité pour que quelqu'un soit chargé d'examiner ce que tout le monde fait, pour que quelqu'un ait le pouvoir — plus important que celui d'un ministre — de préciser ce qui ne fonctionne pas dans un ministère. Je n'ai rien contre le ministre du Patrimoine canadien, mais s'il disait quoi faire aux gens de la Défense nationale, il se ferait envoyer sur les roses. Si ça venait du Conseil du Trésor, ce serait différent.
    J'ai exprimé cette préoccupation au début de mon mandat, précisément pour cette raison. J'ai toujours pensé que, dans n'importe quelle organisation, une directive venant d'en haut avait plus d'impact qu'une directive d'un collègue.
    Concernant la question de la gouvernance ou de l'horizontalité, pour utiliser un terme de prédilection au sein du gouvernement, on a fait faire une étude par le professeur Donald Savoie...
    Monsieur Fraser, je vous demanderais de retenir vos commentaires. Nous aurons la chance d'y revenir. Nous allons d'abord terminer le quatrième tour. Nous verrons ensuite s'il est possible de faire un cinquième tour.
    Monsieur Nadeau.
    Vous étiez bien parti, monsieur le commissaire. Vous pouvez continuer.
    Le professeur Savoie, pour lequel j'ai beaucoup respect, a fait une étude très nuancée sur la question de l'horizontalité qui m'a fait nuancer ma position. C'est pourquoi nous avons pris soin de ne pas dire que la décentralisation est un mal en soi. Ce qui est important, c'est le résultat. Nous traitons donc ce sujet avec prudence. Cependant, c'est très important que, lorsque des responsabilités sont transférées, décentralisées, privatisées ou qu'il y a des transformations institutionnelles, on prenne soin de faire en sorte que ce ne soit pas les droits linguistiques des citoyens qui en souffrent.
    En fait d'exemple, on mentionne ce qui s'est produit avec la création des autorités aéroportuaires. Il n'y a pas eu de suivi. Il y a eu certaines directives de sorte que chaque autorité interprète ses obligations de façon différente. Certaines disent que cela fait partie de l'expérience du client. D'autres disent que c'est une question gouvernementale, d'autres encore que cela relève de leurs avocats. Quand nous avons fait notre vérification de l'Autorité aéroportuaire de Halifax, nous avons eu l'impression que le processus de vérification lui-même a fait comprendre aux différents paliers de l'administration de l'aéroport la nature de leurs obligations. Les obligations ont donc été transmises à l'autorité aéroportuaire, mais, je ne sais pour quelle raison, n'ont pas été vraiment communiquées aux administrateurs. Cela devient également une question de culture organisationnelle. Dans certains domaines, on peut dire que cela fait tout à fait partie de la culture de l'organisation. On n'a plus besoin de faire ce genre de suivi.
     Toutefois, je pense que l'on n'est pas rendus là en ce qui concerne la question des langues officielles. Il faut continuer d'être vigilants face à ce dossier.
(1035)
    Je suis bien d'accord avec vous à cet égard. J'ai moi-même été employé par un conseil scolaire mixte, catholique et public. Pour ma part, j'enseignais aux écoles publiques Louis-Riel, Gisèle-Lalonde et De la Salle. Lorsque nous sommes allés au Collège Samuel-Genest, à Ottawa, j'ai entendu un élève dire qu'il fallait absolument que les immigrants, les nouveaux arrivants, apprennent l'anglais parce que, sinon, ils auraient de la difficulté, ils ne pourraient pas communiquer avec leurs camarades qui parlent anglais dans le corridor à l'école et qu'ils voulaient se faire des amis. Vous ne le savez peut-être pas, mais mon coeur saigne encore. Je sais que cette réalité existe. Cela venait de la bouche de quelqu'un qui est ici depuis environ un an. Il nous le disait sans retenue, c'est la réalité qu'il vit.
    À une autre occasion, j'ai fait une présentation à l'école Grande-Rivière à Aylmer et j'ai également entendu parler anglais dans le corridor. Cette école est au Québec. Le travail est donc énorme. Je comprends qu'il faut faire tous les efforts possibles pour prêcher par l'exemple, le gouvernement fédéral en premier et nous, les parlementaires, qui sommes membres du Parlement.
    Lorsqu'on compare le plan Dion à la Feuille de route, on voit que dans le premier cas, le Secrétariat du Conseil du Trésor recevait 72 millions de dollars, alors que la Feuille de route reçoit 17 millions de dollars pour le respect des langues officielles. On nous dit que l'argent a été transféré à l'École de la fonction publique. Je vérifie et je m'aperçois que le montant est passé de 13 millions à 3 millions de dollars.
    De plus, on demande aux fonctionnaires de s'auto-évaluer pour connaître la qualité de leur français. Les bras m'en tombent. On ne peut pas dire que c'est une amélioration. Le nerf de la guerre, c'est l'argent. La volonté politique se reflète quelque part. Lorsqu'on n'a pas d'autorité pour le faire, on laisse simplement se dissoudre le bon travail qui a déjà été entamé. Vous comprendrez mon désarroi face à cette situation.
    Monsieur Nadeau, nous terminons notre quatrième tour, mais il nous reste du temps pour un cinquième et dernier tour. Il vous sera donc possible de compléter la question.
     Madame Zarac, vous avez la parole pour trois minutes.
    Merci, monsieur le président.
    J'ai mentionné plus tôt qu'il y avait eu une consultation sur les langues officielles hier. J'aimerais féliciter mon collègue M. Bélanger, qui est à l'origine de cette rencontre. Lors de cette consultation, un des conférenciers a mentionné qu'il fallait chercher l'unité dans la dualité et la diversité. Je crois que c'est un bon conseil et que ça devrait être un de nos objectifs. Je crois que la meilleure façon de prêcher est par l'exemple. Ça provient donc de la gouvernance.
    Je reviens à ce qui a été mentionné plus tôt, soit le droit de travailler dans sa langue par rapport au droit de se faire servir dans sa langue. Le gouvernement est le plus grand employeur au Canada. Pour l'employeur, le fait que l'employé devant servir des gens soit capable de leur répondre devrait faire partie des critères de sélection. Plutôt que de voir une opposition, l'un contre l'autre, et de toujours avoir en tête qu'on cherche l'unité dans tout cela, est-ce que l'employeur ne devrait pas avoir la responsabilité de s'assurer que l'employé est capable de répondre?
(1040)
    Tout dépend de la désignation du poste. Dans la fonction publique, 40 p. 100 des postes sont désignés bilingues, et ce pourcentage est de 60 p. 100 dans la région de la capitale nationale.
    À quand remonte la dernière fois qu'on a révisé ces désignations?
    C'était en 2005, je crois.
    Demandez-vous quels bureaux ont l'obligation de servir les gens dans les deux langues ou parlez-vous de postes individuels?
    Quand les régions ont-elles été désignées bilingues ou non bilingues? Vous mentionnez des postes spécifiques, mais ma question porte davantage sur le droit de travailler dans sa langue par rapport à celui de se faire servir dans sa langue. N'est-ce pas au départ un critère de sélection de l'employeur?
    En effet, depuis 2005, je crois, il est obligatoire que les candidats à des postes désignés bilingues soient bilingues. Par contre, un débat est en cours présentement pour déterminer si rechercher des candidats bilingues pour un poste qui n'est pas désigné bilingue peut être considéré comme un atout. L'article 91 de la loi stipule qu'un poste ne doit être désigné bilingue qu'en fonction de sa définition. C'est donc une disposition qui, dans le cas de certains postes, a pour objectif de protéger d'une désignation absolue les gens qui n'ont pas les capacités linguistiques nécessaires.
    Merci, madame Zarac.
    Nous allons maintenant passer à M. Nadeau.
    Monsieur le commissaire, nous avons abordé plus tôt la question de l'argent. On parle présentement de 1,1 milliard de dollars. Dans le cas des appareils clés — je pense ici au Secrétariat du Conseil du Trésor et à l'École de la fonction publique —, ça a diminué considérablement.
    Allez-vous aborder ce sujet dans la partie 2 de votre rapport ou avez-vous déjà des choses à nous dire à ce sujet?
    Dans la partie 2 du rapport... Je vais expliquer un peu pourquoi on a pris la décision, cette année, de publier deux volumes plutôt qu'un. On a pensé que, d'abord, cela nous permettrait d'avoir une discussion thématique sur certains éléments, comme la gouvernance, l'apprentissage de langues secondes, la vitalité des communautés et la langue de travail.
    Ensuite, par le passé, on a trouvé qu'entre la fin de l'année financière, moment où les institutions devraient faire rapport et où nous faisons nos évaluations, et la date de tombée pour le rapport annuel, cela était plus difficile, pour des gens de l'assurance de la conformité, de faire une analyse appropriée des données. Donc, cela fait en sorte qu'il n'y a pas de bulletin dans ce rapport.
    On va observer les institutions de plus près avec l'évaluation des données dans le volume 2. On entreprend, dans le moment, nos discussions au sujet du volume 2.
    Aimeriez-vous avoir d'autres précisions par rapport à cela?
    Merci, monsieur le président.
    Merci beaucoup, monsieur Nadeau.
    On poursuit avec M. Godin.
    Voici la dernière question que j'aimerais vous poser, monsieur le commissaire.
    Vous savez, à l'époque où M. Benoît Sauvageau était député — vous n'étiez pas commissaire à cette époque —, on parlait de contravention. Si la loi est violée, il devrait y avoir une contravention. Cela fait 40 ans que l'on parle de la même chose.
     On a présentement un gouvernement qui aime punir et bâtir des prisons. Il serait peut-être temps de demander au gouvernement d'émettre des contraventions à ceux qui violent la loi.
    Pensez-vous que vous devriez avoir un plus grand pouvoir? C'est encore la même question. Vous avez un pouvoir de recommandation, vous avez aussi le pouvoir de porter une cause devant la cour. Il y a toujours la question de savoir si le commissaire devrait avoir plus de pouvoirs.
(1045)
    Vous savez, monsieur le président, c'est une question à laquelle je réponds toujours avec prudence.
    Quand j'ai postulé cet emploi, je l'ai fait en fonction des pouvoirs actuels. Il y a un éventail de pouvoirs dans la loi. On explore, chez nous, comment utiliser au maximum les pouvoirs existants, comme notre pouvoir d'intervenir devant les tribunaux. Toutefois, je suis redevable devant le Parlement, et si vous, les parlementaires, pensez que le commissaire aux langues officielles...
    Monsieur Fraser, je sais que vous êtes redevable.
    Vous êtes un officier du Parlement et vous êtes redevable devant le Parlement, et tout. Vous avez été nommé à cette fonction alors que des lois étaient déjà en place. Toutefois, vous êtes un homme d'expérience. Vous êtes une personne qui peut saisir l'importance des dossiers. C'est dans votre rapport, ce n'est pas moi qui l'ai écrit. Votre rapport dit qu'il y a du laissez-faire et que des choses ne se font pas.
     Est-ce qu'on continue seulement à taper sur la tête de quelqu'un, pendant que les violations de la loi continuent, qu'il y a du laissez-faire et que les ministères ne prennent pas la question au sérieux? C'est bien beau de dire que de belles choses se passent, mais ce ne sont pas toutes de belles choses.
    Je suis tout à fait d'accord.
    Dans mon esprit, c'est un débat de fond qui devrait être tenu avec les autres agents du Parlement aussi. Peut-on demander à la même personne de jouer un rôle d'ombudsman d'une part, et d'avoir un pouvoir d'ordonnance d'autre part? Cela exigerait-il plutôt la création d'une autre institution?
     C'est un débat assez complexe et je suis tout à fait prêt à entreprendre cette discussion avec les parlementaires. Toutefois, je ne pense pas qu'il soit approprié pour moi de dire si je devrais avoir un pouvoir d'ordonnance ou de punition. Il ne faut pas être juge et partie, en même temps.
    Merci, monsieur le commissaire.
    Merci, monsieur Godin.
    Monsieur Généreux, c'est votre tour.
     Mesdames et messieurs, bienvenue.
    Je suis le député conservateur de Montmagny—L'Islet—Kamouraska—Rivière-du-Loup, qui est probablement l'une des circonscriptions, sinon la circonscription la plus francophone au Canada. Il n'y a évidemment pas beaucoup de fonctionnaires dans cette circonscription. Il y a cependant beaucoup d'entreprises privées. Depuis les 40 dernières années, celles-ci ont fait de plus en plus d'exportations. Le bilinguisme est devenu un aspect fondamental du travail pour les employés de ces entreprises. C'est inévitable, et cela fait partie de la richesse de ma circonscription que d'avoir des gens aussi ouverts au bilinguisme.
    Tout à l'heure, M. Nadeau a prononcé un mot qui m'a donné des « frissons dans le dos ». J'utilise un peu d'humour comme les bloquistes le font dans toutes leurs présentations. Il a parlé du français comme étant un « fardeau ».
    Madame Tremblay, monsieur Giguère, madame Charlebois, madame Cloutier et monsieur Fraser, considérez-vous le français comme étant un « fardeau » au Canada?
    Absolument pas.
    Merci. Je considère qu'il s'agit d'une richesse et d'une réalité canadienne. Je suis conservateur. Est-ce assez clair? Je suis capable de dire cela. Est-ce assez clair?
    Des voix: Oh, oh!
    M. Bernard Généreux: Au Québec, on dit « clair comme de l'eau de roche ». C'est incroyable. Le rôle des bloquistes au comité est de ternir notre image. Ils le font très bien, ils sont très bons dans ce domaine. Le vôtre est d'être neutre. Vous le faites très bien. Je respecte cela. Votre rôle est de critiquer de façon constructive, à mon avis. Vous le faites non seulement en comité, mais également à la radio. Il y a quelques semaines, j'ai écouté l'émission de Christiane Charette, c'est par hasard que j'écoutais la radio. Vous avez dit que le comportement relativement à la dualité linguistique et au bilinguisme du premier ministre étaient exemplaires. J'étais très content d'entendre cela.
    Je ne suis pas parfaitement bilingue et le premier ministre non plus. Cependant, on fait des efforts. En comité, j'écoute les propos dans la langue parlée par les gens, je ne me sers pas de la traduction. Depuis mon arrivée au comité, il y a six mois — je suis marié à une Anglo-Montréalaise depuis 22 ans et mes enfants sont parfaitement bilingues —, je m'efforce d'écouter les témoignages dans la langue parlée. On travaille fort et je l'apprécie. Pour moi, c'est une richesse.
(1050)
    Tout à fait. À mon avis, c'est au coeur de l'identité canadienne.
    Je ne peux pas croire qu'en 2010, il y ait encore des gens qui, pour essayer de donner une mauvaise image du gouvernement, disent que le français est un « fardeau » au Canada. Coudon!, je ne peux pas croire que les gens peuvent dire des choses semblables. Dans votre rapport, vous écrivez: « Aucune solution unique ne permettra de rapidement et facilement transformer l'ensemble de la fonction publique en un milieu de travail où le français et l'anglais sont sur le même pied. »
    Avez-vous une date quant au « rapidement » et au « facilement »? Cela fait 40 ans qu'on en parle. On va probablement en parler pendant encore 150, 200 ou 300 ans. Cela fait partie du Canada, de notre réalité. Est-ce que je me trompe en disant cela?
    Pour ma part, c'est une opinion que j'avais bien avant de devenir commissaire aux langues officielles. La question linguistique est au centre de l'identité, de l'histoire, du passé et de l'avenir du Canada, tout comme la question des classes en Grande-Bretagne ou la question raciale aux États-Unis. Ce n'est pas quelque chose que l'on règle pour ensuite passer à autre chose. C'est une dynamique. On a deux sociétés majoritairement unilingues qui se côtoient, qui vivent ensemble. Le défi est de faire en sorte que des liens, des ponts, s'établissement entre ces deux communautés. L'une des institutions les plus importantes qui dessert ces deux communautés linguistiques est le gouvernement fédéral. Est-ce facile, est-ce que cela va se régler par un rapport annuel, une étude que l'on va publier l'année prochaine ou un projet de loi, etc.? Non. C'est un travail continuel.
    De plus, notre pays accueille entre 225 000 et 250 000 personnes par année qui n'ont pas vécu notre histoire et nos luttes linguistiques. Il s'agit donc d'un travail à refaire, d'une histoire à raconter, d'une éducation à refaire de façon constante pour accueillir ces gens au sein de notre pays et leur faire comprendre la dynamique, l'espoir et l'idéal que cela représente pour notre pays.
    Il y a deux semaines, on est allés dans une école et on a rencontré une demoiselle nommée Andréa qui parle quatre langues. Quand elle est arrivée ici, elle en parlait deux. Maintenant, après un an, elle en parle quatre. Ce n'est pas quelque chose d'impossible; c'est quelque chose de réalisable.
    M. Graham Fraser: Oui, tout à fait.
    M. Bernard Généreux: Je suis marié depuis 22 ans à une anglophone, on ne se comprend pas après tout ce temps, mais on s'aime beaucoup.
    Des voix: Ah, ah!
    On devrait dire cela à la Cour suprême et voter en faveur du projet de loi.
    On voit que le temps passe vite en bonne compagnie. Monsieur le commissaire — ainsi que les membres de votre équipe —, je vous remercie d'être venus nous présenter votre rapport aujourd'hui.
    On se revoit jeudi pour les travaux du comité.
    La séance est levée.
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