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PROC Rapport du Comité

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Inclusion des langues autochtones sur les bulletins de vote des élections fédérales : Un pas vers la réconciliation

Introduction

En vertu du sous-alinéa 108(3)a)(vi) du Règlement de la Chambre des communes[1], le mandat du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre (le Comité) inclut la revue de toute question relative à l’élection des députés à la Chambre des communes et la présentation de rapports à ce sujet.

Le 14 décembre 2021, le Comité a adopté la motion suivante :

Que le Comité entreprenne une étude sur l’ajout des langues autochtones sur les bulletins de vote fédéraux pour les élections générales[2].

Cette motion fait écho à une autre motion ayant été adoptée par le Comité à sa dernière réunion de la 43e législature[3]. Vu la dissolution de la 43e législature dans les semaines qui ont suivi l’adoption de cette motion, une étude sur la question n’a pu être amorcée par le Comité à ce moment.

Le Comité a entamé son étude sur l’ajout des langues autochtones sur les bulletins de vote fédéraux le 29 mars 2022. Dans le cadre de cette étude, le Comité a entendu 17 témoins lors de quatre réunions. Le Comité souhaite exprimer sa sincère reconnaissance à tous les témoins ayant participé à cette étude pour leur précieuse contribution.

Contexte

A.  Obstacles à la participation électorale des Autochtones

Au moment d’entreprendre son étude, le Comité reconnaissait que les séquelles permanentes du colonialisme au Canada avaient eu une incidence sur la participation des peuples autochtones aux élections fédérales canadiennes. Le Comité s’est notamment fait dire que « les conséquences intergénérationnelles des pensionnats sont énormes [et que] la liste de ces conséquences est longue[4] ». L’une de ces conséquences est l’effacement constant des langues des Premières Nations, des Inuits et des Métis. Des décennies de tentatives visant à les assimiler à l’ensemble de la société canadienne, de même que les politiques coloniales connexes, peuvent avoir coupé les peuples autochtones des institutions et processus électoraux du Canada.

Mme Karliin Aariak, commissaire au Bureau du commissaire aux langues du Nunavut, a soutenu que les ministères et organismes fédéraux comme Élections Canada ont un rôle à jouer pour assurer la revitalisation, la promotion et la préservation des langues autochtones[5]. Elle a également indiqué que la Loi sur la protection de la langue inuite du Nunavut

[déplore] les mesures et politiques gouvernementales du passé visant l’assimilation et l’existence d’attitudes gouvernementales et sociétales qui présentent la culture et la langue inuite comme étant inférieures et inégales, et reconnaissant que ces mesures, politiques et attitudes ont produit, de façon persistante, un impact négatif et destructeur sur la langue inuite et les Inuits[6].

Marjolaine Tshernish, directrice générale de l’Institut Tshakapesh, a déploré que les Autochtones aient dû attendre près d’un siècle après la Confédération pour obtenir le droit de vote[7]. Par exemple, Aluki Kotierk, présidente de Nunavut Tunngavik Inc., a indiqué que les Inuits ont obtenu le droit de vote en 1950, mais que « ce n'est qu'en 1962 que toutes les communautés inuites ont eu accès aux services de vote[8] ». Le fait d’avoir été exclus du processus pendant aussi longtemps a probablement des répercussions sur le taux de participation actuel, selon Mme Tshernish[9].

Selon Allison Harell, professeure de science politique à l’Université du Québec à Montréal,

[i]l est important d'admettre que l'histoire coloniale du Canada est telle que nous devons veiller à ce que les Autochtones puissent participer à leurs propres conditions à nos processus électoraux, tout en reconnaissant que certains peuvent ne pas considérer le processus électoral comme légitime ou comme le leur. Le fait de rendre les bulletins de vote multilingues pourrait être un moyen d'accroître la légitimité du processus électoral pour ces électeurs, et non seulement cette perception de légitimité favoriserait une plus grande participation, mais elle est importante pour la santé de notre système démocratique[10].

De même, Mme Kotierk a indiqué ce qui suit :

Soutenir les peuples autochtones du Canada et leur droit de voter dans leur propre langue est une étape importante vers l’objectif de la réconciliation. Cela nous aiderait à sentir, en tant qu’Autochtones, que nous sommes un élément important du système démocratique. Cela démontrerait le respect de notre langue, de notre culture et de notre vision du monde en tant que peuple autonome. Nous aurions un sentiment plus fort d’appartenance aux institutions démocratiques canadiennes, ce qui fournirait au Canada une base plus solide pour aller de l’avant avec les peuples autochtones et rendrait le Canada plus fort[11].

En présentant ce rapport, le Comité souhaite reconnaître les effets continus du colonialisme sur la participation des Autochtones au processus électoral, aussi bien en tant que candidats qu’en tant qu’électeurs.

B.  Les langues autochtones au Canada

On compte actuellement plus de 70 langues autochtones parlées au Canada, dont le nombre de locuteurs varie considérablement d’une langue à l’autre. En outre, un écart marqué existe entre le nombre de personnes d’origine autochtone au Canada et le nombre de locuteurs de ces langues.

Ainsi, selon les données du Recensement de 2016, 15,6 % de la population autochtone au Canada étaient en mesure de soutenir une conversation dans l’une ou l’autre de ces langues[12]. Cette proportion est notamment explicable par de nombreux évènements ayant nui à la vitalité des langues autochtones, particulièrement le régime des pensionnats. De plus, seulement 12,5 % de la population autochtone déclarait une langue maternelle autochtone en 2016, ce qui signifie que pour un certain nombre de locuteurs, une langue autochtone a été apprise comme langue seconde[13].

Les langues autochtones peuvent être recoupées selon douze familles linguistiques autochtones distinctes. Le tableau 1 présente le nombre de locuteurs d’identité autochtone pouvant parler une langue autochtone, selon la famille linguistique, de même que les principales concentrations provinciales et territoriales de ces locuteurs.

Tableau 1 – Population d’identité autochtone pouvant parler une langue autochtone, selon la famille linguistique et les principales concentrations provinciales et territoriales, 2016

Familles linguistiques autochtones

Population

Principales concentrations provinciales et territoriales

Langues algonquiennes

175 825

Manitoba (21,7 %), Québec (21,2 %), Ontario (17,2 %), Alberta (16,7 %), Saskatchewan (16,0 %)

Langues inuites

42 065

Nunavut (64,1 %), Québec (29,4 %)

Langues athabascanes

23 455

Saskatchewan (38,7 %), Territoires du Nord‑Ouest (22,9 %), Colombie‑Britannique (18,4 %)

Langues salishennes

5 620

Colombie‑Britannique (98,8 %)

Langues siouennes

5 400

Alberta (74,9 %), Manitoba (14,2 %)

Langues iroquoiennes

2 715

Ontario (68,9 %), Québec (26,9 %)

Langues tsimshennes

2 695

Colombie‑Britannique (98,1 %)

Langues wakashanes

1 445

Colombie‑Britannique (98,6 %)

Michif

1 170

Saskatchewan (41,9 %), Manitoba (17,5 %)

Haïda

445

Colombie‑Britannique (98,9 %)

Tlingit

255

Yukon (76,5 %), Colombie‑Britannique (21,6 %)

Kutenai

170

Colombie‑Britannique (100,0 %)

Total des locuteurs de langues autochtones

260 550

Québec (19,3 %), Manitoba (15,5 %), Saskatchewan (14,5 %), Alberta (13,8 %), Ontario (12,7 %)

Note :     « Identité autochtone » est une expression qui comprend les personnes qui sont Premières Nations (Indiens de l’Amérique du Nord), Métis ou Inuits et/ou les personnes qui sont des Indiens inscrits ou des traités (en vertu de la Loi sur les Indiens du Canada) et/ou les personnes qui sont membres d’une Première Nation ou d’une bande indienne.

Source : Statistique Canada, Les langues autochtones des Premières Nations, des Métis et des Inuits, 25 octobre 2017.

Selon les données de Statistique Canada, 92,6 % des locuteurs de langues autochtones au Canada parlent une langue appartenant à l’une des trois premières familles présentées dans le tableau 1, soit les langues algonquiennes, inuites et athabascanes. Les langues algonquiennes les plus courantes sont les langues cries[14], l’ojibwé (anishinaabemowin) et l’oji‑cri, avec respectivement 96 575, 28 130 et 15 585 locuteurs déclarés. Pour les langues inuites, l’inuktitut est la langue la plus parlée avec ses 39 770 locuteurs déclarés. Finalement, le dené est la langue la plus commune pour les locuteurs de langues athabascanes, avec 13 005 locuteurs déclarés[15].

Certaines langues autochtones ont un statut de langues officielles dans les territoires. Ainsi, au Nunavut, l’inuktitut et l’inuinnaqtun sont des langues officielles, en plus de l’anglais et du français[16]. Les Territoires du Nord-Ouest reconnaissent 11 langues officielles :

  • cinq langues athabascanes (le chipewyan, le gwich’in, l’Esclave du Nord, l’Esclave du Sud et le tłı̨chǫ);
  • une langue algonquienne (le cri);
  • trois langues inuites (l’inuktitut, l’inuinnaqtun et l’inuviakuktun);
  • l’anglais et le français[17].

Finalement, bien que seuls le français et l’anglais soient reconnus comme langues officielles au Yukon, la Loi sur les langues indique que le territoire « reconnaît l’importance des langues autochtones au Yukon et souhaite prendre les mesures nécessaires pour maintenir et valoriser ces langues au Yukon, et en favoriser le développement[18] ».

C.  Électeurs autochtones

1.   Participation électorale des électeurs autochtones

Les électeurs autochtones font partie des groupes d’électeurs identifiés par Élections Canada comme devant surmonter d’importants obstacles pour voter aux élections fédérales. Parmi les obstacles connus, on compte notamment les barrières linguistiques, l’éloignement et la faible densité de population de certaines communautés, ce qui complique le recrutement de travailleurs électoraux et la sélection de lieux de scrutin[19].

Élections Canada souligne que chaque groupe d’électeurs autochtones a une histoire qui lui est propre relativement à ses relations avec les élections fédérales. À titre d’exemple, les Métis possédaient le droit de voter aux élections fédérales bien avant les membres des Premières Nations vivant dans les réserves et les Inuits. L’historique de privation du droit de vote des Autochtones au Canada expliquerait en partie le taux de participation plus faible des électeurs autochtones par rapport aux électeurs non autochtones[20].

Élections Canada rapporte que, pour la 43e élection générale fédérale, la participation électorale des électeurs autochtones hors réserve était plus faible que chez les non‑Autochtones (66,4 % contre 77,5 %), et beaucoup plus faible chez les électeurs autochtones vivant dans une réserve (51,8 %, contre 67 % de la population générale). En outre, les électeurs autochtones étaient plus susceptibles d’affirmer ne pas avoir exprimé leur vote pour des raisons liées au processus électoral (21 %, contre 12 % des électeurs non autochtones)[21].

En outre, les résultats de l’Étude nationale auprès des électeurs pour la 43e élection générale fédérale canadienne indiquent que les électeurs autochtones étaient moins susceptibles de considérer le vote comme un devoir plutôt qu’un choix (61 %, contre 74 % des électeurs non autochtones), et étaient moins susceptibles de se déclarer très satisfaits des services reçus par Élections Canada (59 %, contre 67 % des électeurs non autochtones)[22].

2.   Initiatives actuelles d’Élections Canada en matière de langues autochtones

Dans le cadre de la 44e élection générale fédérale, le Guide pour l’élection fédérale[23] a été distribué partout au pays. Il s’agit d’un document qui offre de l’information sur le droit de vote, l’inscription, les manières de voter, l’identification et les services d’aide au vote. Élections Canada rapporte, dans son Rapport sur la 44e élection générale du 20 septembre 2021[24], que 15 806 012 guides bilingues ont été distribués au pays, de même que 10 159 guides trilingues au Nunavut. En outre, le guide est disponible sur le site Web d’Élections Canada en 49 langues, dont 16 langues autochtones. La feuille d’information sur l’identification de l’électeur[25] est également disponible en ligne dans ces mêmes langues autochtones, soit :

  • langues algonquiennes : atikamekw, cri de Moose, cri des plaines, innu (montagnais), mi’kmaq, oji‑cri, ojibwé, pied-noir, saulteaux;
  • langues inuites : inuktitut;
  • langues athabascanes : déné, gwich’in;
  • langues iroquoiennes : mohawk;
  • langues tsimshennes : nisga’a;
  • langues siouennes : stoney;
  • michif.

Au Nunavut, de l’information sur le processus électoral – en plus d’autres ressources, telles que la liste des candidats, les messages de recrutement et le matériel de formation des travailleurs électoraux – a été offerte en inuktitut. Nouveauté pour la 44e élection générale : un fac-similé (une affiche reproduisant le bulletin de vote en inuktitut pour aider les électeurs à marquer leur bulletin) a été placée dans les lieux de vote.

Élections Canada indique sur son site Web qu’il est possible pour les électeurs ayant des questions sur le processus électoral d’appeler le centre d’appels d’Élections Canada ou le bureau de leur directeur du scrutin local et de demander de l’information dans la langue de leur choix. Plus de 100 langues seraient disponibles par voie téléphonique, y compris certaines langues autochtones. Le service d’interprétation immédiate par téléphone est offert sur demande, en fonction des disponibilités, et n’est pas accessible aux bureaux de scrutin.

En outre, le Programme des aînés et des jeunes autochtones d’Élections Canada vise à offrir des services d’interprétation, à expliquer le processus de vote et à répondre aux questions des électeurs autochtones. Le site Web d’Élections Canada indique que ce service est offert aux bureaux de vote « qui servent principalement des électeurs autochtones », et que l’organisme redouble d’efforts pour accroître la participation au programme depuis 2019[26].

D.  Bulletins de vote fédéraux

1.   Types et caractéristiques des bulletins de vote

Dans le cadre d’une élection générale fédérale, il y a deux types de bulletins de vote : les bulletins de vote réguliers et les bulletins de vote spéciaux. Les bulletins réguliers sont utilisés les jours de vote par anticipation et le jour du scrutin, et sont imprimés avec les noms des candidats.

Les bulletins de vote spéciaux, utilisés en dehors des jours de votes par anticipation et de scrutin, sont imprimés en blanc, les électeurs devant y inscrire eux-mêmes le nom du candidat choisi. Les trousses de bulletins spéciaux comprennent un bulletin de vote, une enveloppe intérieure non marquée ainsi qu’une enveloppe extérieure identifiant l’électeur et sa circonscription, et qui contient une déclaration devant être signée par l’électeur[27].

L’apparence et le contenu des bulletins de vote sont prescrits par la Loi électorale du Canada (LEC). Le recto et la version des bulletins de vote ordinaire sont imprimés sur le modèle du formulaire 3 de l’annexe 1 de la LEC, tandis que les bulletins de vote spéciaux sont établis en fonction du formulaire 4 de l’annexe 1 de la LEC[28].

Les exigences prévues à la LEC supposent l’utilisation de l’alphabet latin sur le bulletin et la publication des noms des candidats en ordre alphabétique. La LEC prévoit également des caractéristiques physiques comme la souche et le talon, séparés par des lignes perforées. En raison de ces caractéristiques physiques prévues à la loi, un nombre restreint de fournisseurs possède les capacités d’imprimer les bulletins actuels, particulièrement selon l’échéancier serré propre à la tenue d’élections fédérales[29].

À l’heure actuelle, les noms des candidats peuvent figurer dans n’importe quelle langue utilisant l’alphabet latin. Les candidats devant fournir une preuve d’identité lors de leur mise en candidature, c’est le nom figurant sur cette pièce qui est inscrit sur le bulletin[30].

Concernant les partis politiques, c’est le parti qui choisit la langue dans laquelle son nom figurera au bulletin, puisque rien n'oblige un parti à avoir un nom bilingue. Actuellement, trois partis fédéraux ont un nom unilingue français, tandis qu’un parti a un nom unilingue anglais. Les noms de partis unilingues ne sont pas traduits sur les bulletins de vote[31].

2.   Calendrier de production des bulletins de vote

La LEC prévoit que l’impression et la distribution des bulletins de vote doivent se faire durant la période comprise entre la clôture des mises en candidature (21 jours avant le scrutin) et le premier jour du vote par anticipation (10 jours avant le scrutin). Selon le directeur général des élections, l’impression et la distribution des bulletins en temps opportun dans les grandes circonscriptions et les circonscriptions éloignées constituent déjà un défi important[32].

Le tableau 2 présente le processus actuel de production des bulletins de vote, comme décrit dans une lettre du directeur général des élections adressée à la présidente du Comité datée du 11 avril 2022[33]. Le Jour 0 correspondant au jour du scrutin, les étapes décrites se comptent à rembours.

Tableau 2 – Calendrier de production des bulletins de vote

Jours

Étape

Description

Jours 34/33 à 21

Mises en candidature

La période de mise en candidature est celle où les candidats peuvent soumettre leur formulaire de candidature avec leur nom, tel qu’il doit être inscrit sur le bulletin de vote. Elle se termine le jour 21, à 14 h, et les candidats ont jusqu’à 17 h, heure locale, pour se désister. La production des bulletins ne peut commencer tant que cette période n’est pas terminée et que la liste des candidats n’est pas confirmée.

Jours 30 à 29

Envoi des bulletins de vote aux services d’impression

Élections Canada (EC) communique avec les imprimeurs pour confirmer les détails logistiques. Si un service d’impression n’est plus disponible, il est remplacé. Des imprimeurs sont choisis dans tout le pays afin de réduire les délais de livraison. EC leur envoie le papier nécessaire à l’impression des bulletins de vote et confirme leur réception au plus tard le jour 24.

Jours 21 à 18

Préparation de l’image des bulletins de vote

Voici les étapes suivies par le personnel de l’administration centrale d’EC pour préparer la reproduction visuelle des bulletins de vote :

  • a)      Passer en revue l’information des candidatures de dernière minute, et s’assurer que les noms et les autres renseignements sont correctement inscrits dans le système.
  • b)     Produire pour chaque circonscription un Rapport de vérification de la liste des candidats, qui indique le nom des candidats et leur parti.
  • c)      Produire une image des bulletins de chaque circonscription en format PDF.
  • d)     Envoyer les Rapports de vérification aux DS, qui doivent confirmer que les renseignements sont exacts et effectuer un contrôle de la qualité de l’image.
  • e)     Une fois que les DS ont réalisé les tâches précédentes pour leurs circonscriptions, les images sont envoyées aux imprimeurs par courriel.
  • La moitié nord du Canada compte environ 20 circonscriptions, où la distribution en temps voulu des carnets de bulletins de vote dans les bureaux de scrutin éloignés représente un défi. Ces circonscriptions étant considérées comme prioritaires, les étapes a) à e) sont réalisées au plus tard le soir du jour 21 (en supposant que la vérification des candidatures par les DS est alors terminée). Les circonscriptions restantes sont traitées en lots, et le processus doit être terminé au plus tard à 7 h, le jour 18.

Si un DS relève une erreur dans son Rapport de vérification ou si le contrôle de la qualité de l’administration centrale d’EC révèle un problème, les renseignements pour cette circonscription doivent être corrigés, et le processus repris du début, y compris la production du Rapport de vérification et d’une image.

Jour 21 (14 h)

Fin de la période de mise en candidature

Voici les étapes suivies par le personnel de l’administration centrale d’EC pour préparer la reproduction visuelle des bulletins de vote :

  • f)      Passer en revue l’information des candidatures de dernière minute, et s’assurer que les noms et les autres renseignements sont correctement inscrits dans le système.
  • g)      Produire pour chaque circonscription un Rapport de vérification de la liste des candidats, qui indique le nom des candidats et leur parti.
  • h)     Produire une image des bulletins de chaque circonscription en format PDF.
  • i)       Envoyer les Rapports de vérification aux DS, qui doivent confirmer que les renseignements sont exacts et effectuer un contrôle de la qualité de l’image.
  • j)       Une fois que les DS ont réalisé les tâches précédentes pour leurs circonscriptions, les images sont envoyées aux imprimeurs par courriel.

La moitié nord du Canada compte environ 20 circonscriptions, où la distribution en temps voulu des carnets de bulletins de vote dans les bureaux de scrutin éloignés représente un défi. Ces circonscriptions étant considérées comme prioritaires, les étapes a) à e) sont réalisées au plus tard le soir du jour 21 (en supposant que la vérification des candidatures par les DS est alors terminée). Les circonscriptions restantes sont traitées en lots, et le processus doit être terminé au plus tard à 7 h, le jour 18.

Si un DS relève une erreur dans son Rapport de vérification ou si le contrôle de la qualité de l’administration centrale d’EC révèle un problème, les renseignements pour cette circonscription doivent être corrigés, et le processus repris du début, y compris la production du Rapport de vérification et d’une image.

Jour 19 (14 h)

Fin du processus d’approbation des candidatures par les directeurs du scrutin (DS)

Voici les étapes suivies par le personnel de l’administration centrale d’EC pour préparer la reproduction visuelle des bulletins de vote :

  • k)      Passer en revue l’information des candidatures de dernière minute, et s’assurer que les noms et les autres renseignements sont correctement inscrits dans le système.
  • l)       Produire pour chaque circonscription un Rapport de vérification de la liste des candidats, qui indique le nom des candidats et leur parti.
  • m)    Produire une image des bulletins de chaque circonscription en format PDF.
  • n)     Envoyer les Rapports de vérification aux DS, qui doivent confirmer que les renseignements sont exacts et effectuer un contrôle de la qualité de l’image.
  • o)     Une fois que les DS ont réalisé les tâches précédentes pour leurs circonscriptions, les images sont envoyées aux imprimeurs par courriel.

La moitié nord du Canada compte environ 20 circonscriptions, où la distribution en temps voulu des carnets de bulletins de vote dans les bureaux de scrutin éloignés représente un défi. Ces circonscriptions étant considérées comme prioritaires, les étapes a) à e) sont réalisées au plus tard le soir du jour 21 (en supposant que la vérification des candidatures par les DS est alors terminée). Les circonscriptions restantes sont traitées en lots, et le processus doit être terminé au plus tard à 7 h, le jour 18.

Si un DS relève une erreur dans son Rapport de vérification ou si le contrôle de la qualité de l’administration centrale d’EC révèle un problème, les renseignements pour cette circonscription doivent être corrigés, et le processus repris du début, y compris la production du Rapport de vérification et d’une image.

Jours 21 à 18

Préparation et vérification de l’image des bulletins.

Voici les étapes suivies par le personnel de l’administration centrale d’EC pour préparer la reproduction visuelle des bulletins de vote :

  • p)     Passer en revue l’information des candidatures de dernière minute, et s’assurer que les noms et les autres renseignements sont correctement inscrits dans le système.
  • q)     Produire pour chaque circonscription un Rapport de vérification de la liste des candidats, qui indique le nom des candidats et leur parti.
  • r)      Produire une image des bulletins de chaque circonscription en format PDF.
  • s)      Envoyer les Rapports de vérification aux DS, qui doivent confirmer que les renseignements sont exacts et effectuer un contrôle de la qualité de l’image.
  • t)      Une fois que les DS ont réalisé les tâches précédentes pour leurs circonscriptions, les images sont envoyées aux imprimeurs par courriel.

La moitié nord du Canada compte environ 20 circonscriptions, où la distribution en temps voulu des carnets de bulletins de vote dans les bureaux de scrutin éloignés représente un défi. Ces circonscriptions étant considérées comme prioritaires, les étapes a) à e) sont réalisées au plus tard le soir du jour 21 (en supposant que la vérification des candidatures par les DS est alors terminée). Les circonscriptions restantes sont traitées en lots, et le processus doit être terminé au plus tard à 7 h, le jour 18.

Si un DS relève une erreur dans son Rapport de vérification ou si le contrôle de la qualité de l’administration centrale d’EC révèle un problème, les renseignements pour cette circonscription doivent être corrigés, et le processus repris du début, y compris la production du Rapport de vérification et d’une image.

Jour 18

Préparation de l’épreuve de bulletin de vote

Les imprimeurs préparent une épreuve de bulletin de vote, que les DS inspectent avant d’approuver l’impression. Après avoir fait l’inspection d’après une liste de contrôle, les DS peuvent autoriser l’impression. S’ils relèvent un problème, toute étape doit être refaite.

Jours 18 à 13

Production des carnets de bulletins de vote

Les imprimeurs préparent les carnets de bulletins de vote pour le vote par anticipation en suivant les grandes étapes ci-dessous :

  • a)      Faire les rajustements nécessaires en ce qui concerne le papier fourni par EC pour l’impression.
  • b)     Imprimer les images et les numéros de série individuels sur les bulletins.
  • c)      Perforer chacun des bulletins et séparer le bulletin du talon, puis le talon de la souche.
  • d)     Assembler les feuilles en paquets de 50 de sorte que les numéros de série se suivent.
  • e)     Couper les feuilles en bulletins individuels, ajouter une couverture et relier les carnets.

Les imprimeurs ont indiqué que les étapes de perforation, de découpage et souvent de classement des numéros de série requièrent des machines spécialisées qui fonctionnent manuellement, à un rythme plus lent que l’impression. Bon nombre d’imprimeurs ne possèdent pas de tels équipements, ce qui limite les options pour la production des bulletins de vote.

Jours 14 à 13

Livraison des premiers carnets de bulletins de vote aux DS

Les imprimeurs livrent les carnets de bulletins de vote aux DS pour le vote par anticipation.

Jours 13 à 11

Contrôle de la qualité des carnets et préparation pour le vote par anticipation

Les DS et leur personnel réalisent les tâches suivantes :

  • a. Compter les carnets de bulletins de vote pour vérifier la quantité reçue.
  • b. Procéder à un contrôle de la qualité des bulletins.
  • c. Faire parvenir certains des carnets au bureau du directeur adjoint du scrutin supplémentaire, s’il y a lieu.
  • d. Préparer et distribuer le nombre approprié de carnets au scrutateur et/ou au superviseur de centre de scrutin de chaque bureau de vote par anticipation de la circonscription, en consignant dans le Rapport des bulletins de vote et la Feuille de contrôle des bulletins de vote chaque carnet distribué et à qui ils ont été remis.

Jours 11 à 7

Vote par anticipation

Durant cette période, les fonctionnaires électoraux effectuent un contrôle de la qualité, notamment pour vérifier que les carnets reçus et les numéros de série correspondent aux données du Rapport des bulletins de vote, puis les bulletins sont remis aux bureaux de scrutin. À partir de ce moment, les scrutateurs sont chargés d’effectuer un contrôle de la qualité à mesure que les carnets sont utilisés.

Si les superviseurs de centre de scrutin n’utilisent pas la réserve de carnets pour le vote par anticipation, ils les retournent au bureau les jours 7 et 6 pour qu’ils puissent être utilisés par les bureaux de scrutin ordinaire. Chaque carnet retourné au bureau du DS est réinscrit.

Jours 13 à 6

Préparation et livraison des carnets de bulletins de vote aux DS

Une fois que l’imprimeur a terminé l’impression des bulletins pour le vote par anticipation, il continue à en imprimer en vue du scrutin ordinaire. Il reprend donc les étapes des jours 18 à 13 ci‑dessus et livre les carnets destinés aux bureaux de scrutin ordinaire aux DS.

Jours 6 à 1

Contrôle de la qualité des carnets et préparation pour le scrutin ordinaire

Les DS et leur personnel répètent les tâches des jours 13 à 11, cette fois pour les bureaux de scrutin ordinaires.

Jour 0

Jour du scrutin ordinaire

Les superviseurs de centre de scrutin et les scrutateurs prennent les bulletins de vote, procèdent au contrôle de la qualité, remettent les bulletins selon les besoins, et font le suivi de l’utilisation de ces derniers.

Source : Directeur général des élections, Lettre à la présidente du Comité, 11 avril 2022, Annexe 2.

Témoignages et mémoires

A.  Témoignage du directeur général des élections du Canada

Le Comité a amorcé son étude en accueillant le directeur général des élections du Canada, M. Stéphane Perrault, et d’autres représentants d’Élections Canada.

M. Perrault a dit comprendre l’importance de la question des langues autochtones sur les bulletins de vote pour les Autochtones, et être déterminé à accroître l’utilisation des langues autochtones dans le processus électoral. M. Perrault a cependant encouragé le Comité à examiner avec attention toutes les complexités et les enjeux que soulèverait le recours à des bulletins multilingues[34].

M. Perrault a informé le Comité que l’amélioration des services en langues autochtones constitue un élément important pour assurer l’inclusivité du processus électoral, et pour réduire les barrières auxquelles sont confrontés les électeurs autochtones. Il a par ailleurs affirmé que, de manière plus fondamentale, l’amélioration de ces services fait partie du processus de réconciliation avec les peuples autochtones[35]. En outre, s’il croit qu’Élections Canada a une incidence limitée sur la revitalisation de ces langues, l’emploi de langues autochtones dans le cadre des processus politiques et électoraux demeure symboliquement important à ses yeux[36].

1.   Options de modification du bulletin de vote ordinaire

Concernant la possibilité d’ajouter des langues autochtones sur les bulletins de vote ordinaires, M. Perrault a proposé quatre options potentielles. Chacune soulève ses propres enjeux et questions particulières en matière de politiques, d’opérations et d’intégrité électorale.

Les trois premières options nécessiteraient des modifications législatives, tandis que la quatrième pourrait être mise en œuvre sous le cadre juridique existant[37]. De façon générale, M. Perrault préconise la quatrième option, puisqu’il ne recommande pas de modifications législatives à ce stade[38].

Un tableau préparé par Élections Canada évaluant les considérations de politique pour chaque option est présenté à l’Annexe A. En outre, l’Annexe B présente les dispositions de la LEC identifiées par Élections Canada comme devant être modifiées pour inclure des langues autochtones sur les bulletins de vote.

a)  Option A : Bulletin de vote multilingue obligatoire

La première option présentée par M. Perrault serait d’offrir aux électeurs, dans des circonscriptions désignées, un bulletin de vote multilingue officiel, qui comprendrait une ou plusieurs langues autochtones. M. Perrault a souligné que cette option soulève d’importantes questions quant au seuil de population autochtone requis dans une circonscription pour qu’une langue soit incluse au bulletin. Une autre question est de savoir si un plafond maximal de langues à inclure sur un même bulletin devrait être établi[39].

Commentant un potentiel seuil d’électeurs autochtones représentant 1 % de la population d’une circonscription, M. Perrault a indiqué qu’un tel seuil se traduirait par des bulletins en 17 langues dans 27 circonscriptions, et jusqu’à 5 langues autochtones sur un même bulletin dans certaines circonscriptions[40]. Selon M. Perrault, la détermination d’un seuil doit prendre en compte la demande et la capacité d’offrir la traduction ou la translittération[41] sur le terrain[42]

Selon M. Perrault, la présence de plus de deux langues sur un seul et même bulletin soulève d’importants enjeux relatifs à l’accessibilité et au design. Notamment, inscrire le nom des partis et des candidats en plusieurs langues risque de surcharger le texte et de rendre le bulletin difficile à comprendre pour certains électeurs, notamment ceux ayant une faible littéracie, un handicap intellectuel ou un handicap visuel. M. Perrault souligne que des tests de conception du bulletin auprès de certaines communautés d’électeurs seraient essentiels avant qu’un tel modèle soit intégré dans la législation électorale[43].

En outre, M. Perrault a affirmé qu’Élections Canada ne possède pas d’expertise en langues autochtones, et qu’un bulletin dans une langue autre que l’anglais ou le français nécessiterait la translittération des noms des candidats et la traduction des noms des partis. Bien qu’Élections Canada offre des produits d’information en 16 langues autochtones, l’organisation est consciente que, pour plusieurs langues, les experts sont peu nombreux et les délais de traduction considérables. Selon M. Perrault, si les bulletins de vote devaient être traduits, cela pourrait avoir des conséquences importantes sur les délais de production et sur l’ensemble du calendrier électoral, dont il faudrait vraisemblablement prolonger la durée[44].

M. Perrault a par ailleurs souligné que les États multilingues ont habituellement recours à des solutions alternatives pour offrir à l’électeur un bulletin dans sa langue de préférence, notamment l’utilisation de machines de vote électronique permettant de sélectionner la langue du bulletin et de l’interface. Dans d’autres cas, les noms des partis sont remplacés par des logos ou des symboles[45]. M. Perrault a en outre mentionné que tous les modèles papier ont des limites inhérentes, l’ajout d’un nombre trop élevé de langues sur un bulletin papier pouvant créer de la confusion chez les électeurs[46].

b)  Option B : Bulletin de vote multilingue au choix des candidats et des partis

La deuxième option est une variante de l’option A, où un bulletin de vote multilingue officiel serait remis aux électeurs. Dans ce cas-ci, toutefois, la LEC serait modifiée pour permettre aux candidats et aux partis d’indiquer de quelle façon et dans quelles langues leur nom devrait figurer sur ce bulletin de vote. Les partis indiqueraient en outre dans quelles circonscriptions leur nom apparaîtrait sur le bulletin dans une langue autochtone[47].

Selon M. Perrault, cette approche est similaire à celle utilisée au Nunavut dans le cadre des élections territoriales, les candidats pouvant inscrire leur nom en langue inuite et en alphabet latin sur le bulletin. Laisser le choix aux partis fédéraux de fournir ou non des versions autochtones de leur nom s’alignerait également avec l’approche actuelle, qui autorise, mais n’oblige pas les partis à avoir leur nom dans les deux langues officielles[48].

M. Perrault a affirmé que cette option éliminerait la nécessité d’une traduction ou d’une translittération indépendante des informations se trouvant sur le bulletin, mais qu’elle soulève d’autres enjeux. Notamment, les candidats doivent, à l’heure actuelle, fournir une preuve documentaire de leur nom; la question est de savoir si cette exigence devrait être maintenue pour les noms autochtones, en plus des noms français et anglais. Si cette exigence ne devait être maintenue, il resterait à déterminer si Élections Canada aurait la responsabilité de valider la translittération, et qui déterminerait la version du nom d’un parti à utiliser dans une circonscription donnée[49].

Finalement, M. Perrault a souligné que ce modèle n’offrirait pas aux électeurs autochtones des bulletins entièrement dans leurs langues. Ainsi, certains noms de candidats ou de partis pourraient faire l’objet d’une translittération ou d’une traduction, et d’autres non[50].

c)  Option C : Bulletin de vote distinct dans une langue autochtone

La troisième option présentée par M. Perrault serait de modifier la LEC afin d’y prévoir la possibilité d’offrir un bulletin distinct, en langue autochtone, à la demande d’un électeur. M. Perrault indique que cette option réduirait la complexité des bulletins par rapport aux premières options, mais présenterait d’importants défis relatifs aux délais de production et à la distribution[51].

En outre, cette option pourrait menacer la confidentialité du vote dans les circonscriptions où les membres d’une communauté linguistique autochtone sont peu nombreux. Ainsi, l’utilisation d’un bulletin distinct par un nombre restreint d’électeurs permettrait potentiellement d’identifier les choix de vote de ceux‑ci[52].

M. Perrault a indiqué au Comité qu’il ne recommande pas l’utilisation de bulletins distincts[53].

d)  Option D : Fac-similé (affiche ou copie) du bulletin de vote en langue autochtone

Option préconisée par M. Perrault, la quatrième option serait qu’Élections Canada produise une copie du bulletin à imprimer, puis à afficher au lieu de scrutin ou dans l’isoloir. La copie (ou fac-similé) serait une reproduction des bulletins de vote officiels dans une ou plusieurs langues autochtones et servirait de référence pour les électeurs[54].

Dans le cadre de la 44e élection générale fédérale, Élections Canada a mené une expérience de ce type dans les bureaux de vote du Nunavut. Des reproductions en inuktitut du bulletin ont ainsi été affichées près des isoloirs. M. Perrault a souligné que malgré certains défis de production, ces reproductions ont pu être produites à temps pour le vote par anticipation[55]. Un exemple de fac-similé affiché aux lieux de vote du Nunavut est présenté à la Figure 1.

Figure 1 – Exemple de fac-similé affiché aux lieux de vote du Nunavut pendant la 44e élection générale

Exemple d'une affiche placée aux lieux de vote du Nunavut pour aider les électeurs à marquer leur bulletin de vote.

Source : Élections Canada, Rapport sur la 44e élection générale du 20 septembre 2021, 27 janvier 2022.

Selon M. Perrault, l’expérience au Nunavut ne s’est pas soldée par beaucoup de commentaires, mais aucune plainte n’a été reçue au sujet des reproductions de bulletins de vote. Selon lui, peut-être qu’aucun commentaire n’a été reçu parce que les habitants du Nunavut s’attendent à ce que l’inuktitut soit utilisé dans les documents. Toutefois, certaines plaintes ont été reçues concernant d’autres articles, notamment une affiche « Votez ici » qui n’était pas traduite en inuktitut[56].

M. Perrault a dit souhaiter mettre ce type de produit à l’essai dans d’autres circonscriptions et avec d’autres langues, en consultation avec les communautés autochtones. Il a en outre affirmé vouloir accroître la disponibilité de produits d’information en langues autochtones dans les bureaux de vote dans le but de réduire les obstacles auxquels sont confrontés les électeurs autochtones et pour que leur expérience de vote reflète davantage leur identité[57].

Selon M. Perrault, cette approche permettrait à Élections Canada de se familiariser davantage avec les langues autochtones et d’accroître son agilité quant à leur utilisation ailleurs qu’au Nunavut. La mise à l’essai des affiches impliquerait une collaboration avec les candidats et les partis, notamment pour la translittération des noms de candidats et, le cas échéant, la traduction des noms des partis. Les délais d’impression et de production seraient également mis à l’essai[58].

2.   Bulletins de vote spéciaux

La question des bulletins de vote spéciaux soulève des difficultés particulières, puisque l’électeur doit lui-même écrire le nom du candidat sélectionné. La LEC suppose que les langues n’utilisant pas l’alphabet latin ne sont pas acceptées. Le nom du candidat doit être inscrit sur le bulletin de vote spécial tel qu’il figure sur la déclaration de candidature[59]. Comme dans le cas des bulletins ordinaires, toute modification de la langue utilisée sur les bulletins de vote spéciaux nécessiterait une modification législative[60].

M. Perrault a souligné que si des bulletins de vote spéciaux en langue autochtone étaient utilisés, cela soulèverait des difficultés lors de la compilation des résultats des bulletins de vote postaux qui sont envoyés à Ottawa dans le cadre d’un vote national. Ainsi, si les électeurs inscrivaient le nom du candidat en plusieurs langues et alphabets distincts, le processus de dépouillement serait plus ardu. M. Perrault a donc invité le Comité à se demander si l’ajout des langues autochtones devrait s’appliquer aux bulletins spéciaux, ou seulement aux bulletins ordinaires. Il a par ailleurs souligné que dans le cadre de l’essai du fac-similé au Nunavut, seuls les bulletins ordinaires faisaient l’objet d’une reproduction en inuktitut[61].

M. Perrault a en outre indiqué que si les bulletins spéciaux devaient être traduits en plusieurs langues, cela présenterait des difficultés pour s’assurer que le bon bulletin de vote est remis à la bonne personne, particulièrement pour les électeurs à l’étranger. Selon lui, il vaut mieux garder le bulletin aussi simple que possible en raison de la diversité des électeurs utilisant des bulletins postaux[62].

3.   Accessibilité des services de traduction

M. Perrault a indiqué au Comité que les délais et l’accessibilité de la traduction varient énormément en fonction de la langue autochtone et de la région du pays. Au Nunavut, la traduction en inuktitut est normalement disponible dans les 24 à 48 heures, et il serait sans doute possible de faire imprimer les bulletins de vote dans cette langue. Des modifications à la LEC seraient nécessaires, notamment pour permettre l’ajout d’une langue au bulletin, pour prévoir qui validerait la traduction, dans quel ordre alphabétique les noms seraient présentés ou encore pour spécifier si tous les noms doivent être traduits[63].

Selon M. Perrault, et selon l’expérience vécue de production de fac-similés, Élections Canada dispose essentiellement d’une période de 24 heures pour produire, imprimer et distribuer les bulletins à temps pour le vote par anticipation. Ce délai ne laisserait pas le temps de confirmer l’exactitude de la traduction obtenue dans l’état actuel des choses[64].

M. Perrault croit qu’il serait hasardeux d’utiliser de nouvelles langues sur le bulletin officiel tant qu’Élections Canada ne sera pas fixé sur la capacité à obtenir rapidement une traduction conforme. Il a rapporté qu’Élections Canada fait habituellement appel au Bureau de la traduction pour ses besoins en langues autochtones[65].

B.  Témoignages de représentants d’autres organismes électoraux

Le Comité a entendu les témoignages de représentants d’organismes électoraux où l’usage de langues autochtones dans le processus électoral est consacré. Il a ainsi accueilli Stephen Dunbar, directeur général des élections des Territoires du Nord-Ouest, Dustin Fredlund, directeur général des élections du Nunavut, ainsi que Samantha Mack, responsable de la conformité de l’assistance linguistique de l’Alaska Division of Elections.

Dans le cadre de leur comparution devant le Comité, MM. Dunbar et Fredlund ont tous deux affirmé l’importance qu’un candidat ayant un nom autochtone soit en mesure de voir ce nom reflété sur le bulletin de vote, et ce même si ce nom s’écrit dans un alphabet autre que latin. M. Dunbar a témoigné que dans certains cas, la version anglicisée d’un nom autochtone perd sa signification première, et que l’inclusion d’une telle forme anglicisée sur un bulletin pourrait être blessante pour le candidat[66]. Quant à M. Fredlund, il a rappelé l’impact du « Projet Noms de famille » des années 1970 au Nunavut, le gouvernement fédéral ayant entrepris à l’époque de donner des noms de famille anglicisés aux Inuits. Beaucoup de personnes ne reconnaissent pas ces noms de famille comme les leurs[67].

Finalement, ils ont tous deux dit être en contact régulier avec Élections Canada, et qu’ils seraient disposés à collaborer ou à partager leur matériel traduit avec l’organisme fédéral[68].

1.   Territoires du Nord‑Ouest

M. Dunbar a informé le Comité que les Territoires du Nord‑Ouest comptent 11 langues officielles et que la capacité de converser dans une langue autochtone varie de moins de 200 locuteurs pour l’inuktitut à plus de 2 200 locuteurs pour le tł̨ıchǫ. Il a fait remarquer que si ces nombres semblent peu élevés, il est important de souligner que, dans les plus petites communautés, la plupart des résidents parlent une langue autochtone[69].

La Loi sur les élections et les référendums des Territoires du Nord‑Ouest ne permet actuellement que la présence du nom et la photo du candidat sur le bulletin de vote puisqu’aucun parti politique n’est représenté à l’Assemblée législative. M. Dunbar a mentionné au Comité que les photos des candidats permettent aux électeurs ne pouvant lire de reconnaître les candidats par leur photo[70].

M. Dubar a expliqué au Comité que la Loi oblige le candidat à indiquer sur le formulaire de mise en candidature le nom sous lequel il est connu dans sa communauté. Les candidats n’ont pas à présenter de documents délivrés par le gouvernement pour confirmer leur nom. Le nom indiqué dans le bulletin de vote est celui qui figure sur le formulaire et n’est pas traduit[71]. Dans les Territoires du Nord‑Ouest, une élection dure 29 jours, et les candidats ont jusqu’au 25e jour avant le scrutin pour faire parvenir leur déclaration de mise en candidature[72].

Il n’y a rien à traduire sur les bulletins de vote, car ces derniers ne comportent que les noms et les photos des candidats. Il en va toutefois autrement des référendums, puisque la question posée dans le plébiscite serait traduite dans la langue la plus couramment parlée dans une circonscription électorale[73]. M. Dunbar a donné l’exemple du référendum de 1992 sur la frontière entre le Nunavut et les Territoires du Nord‑Ouest, lors duquel la question avait été traduite dans 10 des 11 langues officielles, la traduction en langue crie n’ayant pu être assurée avant la tenue du référendum. La proclamation et les directives pour les électeurs avaient également été produites en 10 langues. Selon les langues couramment parlées dans la circonscription électorale, le bulletin de vote pouvait comporter jusqu’à quatre langues[74].

M. Dunbar a informé le Comité que son bureau éprouve certaines difficultés à faire produire les documents dans toutes les langues officielles. Par exemple, le bureau des langues qui a fourni la traduction lors du référendum de 1992 n’existe plus; il n’y a donc plus de « guichet unique » pour la production de documents dans les 11 langues officielles. Élections Territoires du Nord‑Ouest s’en remet donc maintenant à des fournisseurs individuels, qui ne travaillent pas tous à la même vitesse et qui ne sont pas toujours en mesure de produire les documents nécessaires dans les délais demandés. De plus, dans certains cas, la terminologie varie considérablement entre les dialectes d’une même langue[75]. M. Dunbar a mentionné que la production de documents en plusieurs dialectes est en cours de discussion, et que dans certaines régions des Territoires du Nord‑Ouest, la traduction sera plus uniforme, alors que dans d’autres, c’est la langue propre à la communauté qui sera employée[76].

Élections Territoires du Nord‑Ouest s’efforce actuellement de faire en sorte que l’information en ligne destinée aux électeurs soit publiée dans les langues autochtones parlées dans chaque circonscription électorale. Dans les bureaux de vote, Élections Territoires du Nord‑Ouest produit des affiches en diverses langues, qui indiquent entre autres « Votez ici » et « Lieu de scrutin » ainsi que des affiches informant les électeurs des pièces d’identité exigées. L’organisme commence à se préparer en vue de produire la documentation nécessaire à l’élection générale territoriale de 2023[77].

Une autre mesure prise par Élections Territoires du Nord‑Ouest en ce qui concerne les langues autochtones consiste à demander aux directeurs de scrutin de chaque circonscription électorale d’organiser, au besoin, le service d’un interprète dans chaque bureau de vote. Or, dans les communautés plurilingues, il n’est pas toujours possible de trouver un interprète disponible pour chaque langue[78].

M. Dunbar a également souligné qu’il faut veiller à ce que des outils orthographiques appropriés soient installés sur les ordinateurs pour prendre en charge les polices de caractères autochtones. Il a fait remarquer que les paramètres par défaut des logiciels de traitement de texte peuvent présenter les polices autochtones avec des signes diacritiques incorrects[79].

2.   Nunavut

M. Fredlund a dit au Comité que les bulletins de vote indiquent les noms des candidats dans l’une ou l’autre des langues officielles du Nunavut. L’inuktitut est écrit en écriture syllabique, et l’inuinnaqtun, en alphabet romain[80]. Une élection au Nunavut dure 35 jours, et les candidats doivent soumettre leur mise en candidature entre 35 et 30 jours avant le jour du scrutin[81].

Élections Nunavut comptent sur les candidats pour l’orthographe et la translittération de leurs noms. Les noms sont communiqués durant la période de déclaration et inscrits sur le bulletin de vote. M. Fredlund a expliqué qu’Élections Nunavut a la capacité interne de veiller à ce que chaque nom écrit en inuktitut syllabique représente fidèlement le choix du candidat et de lire les bulletins de vote en blanc écrits en syllabique[82]. De plus, Élections Nunavut est tenu par la loi de nommer des scrutateurs qui parlent la langue de la communauté[83].

En 2019, le Nunavut a tenu ses élections municipales en même temps que l’élection fédérale. Élections Nunavut a donc partagé de nombreux locaux avec Élections Canada. M. Fredlund a fait observer que si toute la documentation d’Élections Nunavut avait été rédigée en quatre langues, y compris les bulletins de vote, ce n’était pas le cas de celle d’Élections Canada. M. Fredlund a informé le Comité qu’il y avait eu de la confusion chez certains électeurs, qui ne faisaient pas la distinction entre les deux organismes, et qu’Élections Nunavut avait reçu de nombreuses plaintes concernant la production linguistique uniquement en anglais et en français durant les élections[84].

M. Fredlund a également précisé qu’il se parle beaucoup de dialectes différents dans les communautés parlant l’inuktitut, mais que les locuteurs de l’inuktitut se comprennent suffisamment les uns les autres pour qu’il ne soit pas nécessaire de fournir la documentation en 25 dialectes[85].

3.   Alaska

Mme Mack a informé le Comité que l’Alaska est en train de mettre en œuvre le scrutin préférentiel. Pour aviser les électeurs du changement, son département a lancé une vaste campagne de sensibilisation qui est menée dans neuf langues autochtones de l’Alaska, en plus de l’espagnol, de l’anglais et de l’iñupiat. Elle a mentionné au Comité que l’inclusion des langues autochtones dans le processus électoral ne se limite pas à leur simple inclusion dans le bulletin de vote, mais qu’elle englobe également les campagnes de sensibilisation et les communications publiques.

Aux États‑Unis, conformément à l’article 203 de la Voting Rights Act, la loi fédérale sur le droit de vote, une sous‑division étatique ou politique doit offrir une aide linguistique aux électeurs si plus de 5 % parlent une langue donnée sans pouvoir s’exprimer ou comprendre très bien l’anglais[86].

Pour traduire les langues autochtones, l’Alaska Division of Elections utilise un modèle de groupe dans lequel plusieurs locuteurs de chaque langue autochtone se réunissent pour traduire ensemble[87]. Mme Mack a fait savoir au Comité que les différences dialectales sont l’aspect le plus difficile du travail de traduction. C’est pourquoi un modèle de groupes de traduction a été établi afin d’éliminer l’écart entre la normalisation et la spécificité. Elle a fait remarquer que les groupes de traduction ont joué un rôle clé pour que la documentation soit comprise dans une vaste superficie géographique[88].

C.  Témoignage de la députée fédérale du Nunavut

1.   Nunavut : contexte des élections fédérales dans le territoire

Lori Idlout, députée du Nunavut, a expliqué au Comité que la Loi sur le Nunavut[89] habilite le gouvernement du Nunavut à décider du déroulement des élections sur le territoire[90]. Elle a ajouté que l’article 32 de l’Accord sur les revendications territoriales du Nunavut[91] traite de la langue et de la culture. Elle a précisé que, même si l’article ne contient pas de libellé précis sur la langue ou le scrutin, il traite de l’élaboration de politiques sociales et de l’offre de possibilités aux Inuits d’y participer[92].

Mme Idlout a dit au Comité que, selon le recensement de 2021, le Nunavut compte 36 858 habitants, dont 85 % sont inuits. Ces derniers vivent dans 25 communautés[93].

Elle a mentionné qu’aux dernières élections fédérales, le taux de participation au Nunavut a été d’environ 34 %[94]. Elle a expliqué que, bien que le taux de participation aux élections fédérales ait été élevé au Nunavut lors de la création du territoire, il a diminué depuis et demeure faible. Mme Idlout a attribué le faible taux de participation à la « tentative de séparer la langue et la culture » au sein du système de vote fédéral, qu’elle a décrite comme « un autre signe des conséquences du colonialisme[95] ».

2.   Obstacles à la participation des Nunavummiuts aux élections fédérales

Selon Mme Idlout, lors des élections fédérales, les employés d’Élections Canada qui desservent les électeurs dans les bureaux de scrutin au Nunavut n’accueillent les électeurs qu’en anglais ou en français. Elle a ajouté que, conformément à la LEC[96], le bulletin de vote n’est qu’en anglais ou en français, mais a précisé qu’Élections Canada a mené un projet pilote durant l’élection générale de 2021 où des bulletins de vote étaient présentés aux électeurs en inuktitut[97].

Toujours selon Mme Idlout, la plupart des aînés du Nunavut ne lisent ni l’anglais ni le français. À cet égard, elle a relaté avoir eu à expliquer à des gens que son nom était celui au centre du bulletin de vote, entre deux autres candidats. Elle a qualifié cette situation d’inacceptable dans un Canada moderne et affirmé que, pour parvenir à une véritable réconciliation, il faut protéger et promouvoir les langues autochtones[98].

Mme Idlout a également noté que les locuteurs inuktituts unilingues trouvent le processus de plainte inaccessible lorsqu’ils veulent dénoncer les obstacles auxquels ils doivent faire face à Élections Canada, puisqu’ils doivent présenter leurs plaintes en anglais ou en français[99]. Elle a également fait remarquer que les Nunavummiuts sont, encore aujourd’hui, réticents à aller se plaindre à cause de toute l’oppression et de toutes les atrocités dont ils ont été victimes pendant des générations (par exemple, se faire battre avec un bâton d’un mètre) s’ils parlaient leur langue ou chantaient leurs chansons[100].

Mme Idlout a dit au Comité avoir été informée que des gens n’avaient pu voter au Nunavut à cause de barrières linguistiques. Les difficultés éprouvées par les Nunavummiuts pour exercer leur droit fondamental de voter sont « une bien triste affaire au Canada[101] ».

Mme Idlout a raconté au Comité avoir entendu beaucoup de gens au Nunavut dire : « À quoi bon voter, puisque cela ne changera absolument rien? ». À son avis, « les membres des Premières Nations, les Métis et les Inuits sont nombreux à avoir perdu le réflexe d’utiliser leur voix, parce que leur voix ne compte pas[102] ». Elle a affirmé que le Parlement devait travailler plus fort pour s’assurer qu’il entend leur voix.

3.   Solutions proposées

Mme Idlout a dit au Comité qu’elle avait cinq recommandations à faire au sujet de cette étude :

  • faire en sorte qu’Élections Canada tire des leçons d’Élections Nunavut sur la tenue d’élections dans quatre langues;
  • faire en sorte qu’Élections Canada engage des interprètes‑traducteurs autochtones à temps plein pour acquérir l’expertise et les connaissances nécessaires en matière de langues autochtones pour des élections à venir;
  • améliorer le processus actuel de plaintes d’Élections Canada pour permettre aux Autochtones unilingues d’exprimer leur mécontentement;
  • mener une étude sur la gouvernance autochtone dans la démocratie du Canada en tant qu’autre forme de réconciliation;
  • s’assurer que le gouvernement fédéral respecte les cultures autochtones pour gagner la confiance nécessaire à une véritable réconciliation[103].

Selon Mme Idlout, les langues autochtones devraient aussi figurer sur les bulletins de vote fédéraux partout au Canada[104]. Pour y arriver, elle propose d’évaluer l’ampleur du déclin d’une langue dans les communautés autochtones, et fournir des bulletins de vote en langue autochtone dans les communautés où la langue est en déclin[105]. Mme Idlout a également mentionné qu’il n’est pas suffisant de fournir les bulletins de vote en langues autochtones et que les services aux bureaux de vote doivent être offerts dans la ou les langues autochtones appropriées[106].

Mme Idlout a ajouté qu’Élections Canada doit s’assurer que le personnel des élections qui travaille dans les communautés autochtones reçoive une formation sur les traumatismes vécus par les Autochtones. Selon elle, le comportement du personnel qui n’a pas suivi de formation semblera « très colonial[107] ».

Enfin, selon Mme Idlout, les parlementaires doivent mieux informer les électeurs, y compris dans les communautés autochtones, des services fédéraux qui sont à leur disposition.

D.  Témoignages de représentants de groupes ou d’organismes autochtones

1.   Représentants du Nunavut

i.    Contexte des élections fédérales au Nunavut

Mme Kotierk a expliqué au Comité que la Loi sur la protection de la langue inuit[108] (LPLI) du Nunavut s’appliquait aux organismes, ministères et établissements fédéraux[109]. Selon elle, l’article 3 de la Loi oblige Élections Canada à utiliser la langue inuite pour l’affichage public, l’affichage et la publication d’affiches, ainsi que la prestation des services d’accueil dans les services aux clients ou à la clientèle accessibles au public[110]. Elle a dit au Comité qu’Élections Canada ne s’était pas acquitté de ses obligations concernant la langue inuite prévues dans la LPLI au Nunavut.

Mme Aariak a indiqué au Comité qu’à son avis, le Canada devrait porter une attention particulière aux articles 5 et 13 au moment de mettre en œuvre la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones (DNUDPA)[111]. Elle a précisé que l’article 5 prévoit que les peuples autochtones ont le droit de participer pleinement, s’ils le désirent, à la vie politique, économique, sociale et culturelle de l’État. L’article 13 exige que les États signataires prennent des mesures efficaces pour veiller à ce que les droits linguistiques soient protégés et à ce que les peuples autochtones puissent comprendre et être compris dans les procédures politiques, juridiques et administratives[112]. Mme Kotierk a indiqué que le fait de s’assurer que la langue inuite figure sur le bulletin de vote serait un pas dans la bonne direction en vue du respect de l’engagement du Canada à mettre en œuvre la DNUDPA.

Mme Kotierk a également présenté au Comité des données historiques sur le droit de vote des Inuits. Elle a rappelé que les Inuits menaient auparavant une vie nomade, qu’ils se gouvernaient eux‑mêmes et avaient des interactions très limitées avec le gouvernement jusqu’aux années 1940 et 1960[113], soit jusqu’à ce qu’ils soient déplacés par le gouvernement dans des communautés. Les Inuits ont obtenu le droit de vote en 1950, mais ce n’est qu’en 1962 que les communautés inuites ont eu accès aux services de vote.

Mme Kotierk a mentionné que le taux de participation à l’élection fédérale de 2019 au Nunavut a été de 48 %. Elle a comparé ce taux au taux de participation global, de 67 %, et déploré que le Nunavut ait le plus bas taux de participation de toutes les provinces et tous les territoires[114].

ii.   Obstacles à la participation des Nunavummiuts aux élections fédérales

Mme Aariak a expliqué au Comité que le Nunavut compte trois langues officielles : l’inuktut, qui inclut l’inuktitut et l’inuinnaqtun, l’anglais et le français[115]. Mme Kotierk a mentionné que, selon le recensement de 2016, le Nunavut comptait 11 020 locuteurs anglophones, 595 locuteurs francophones et 22 600 locuteurs de langues inuites[116]. Les Inuits du Nunavut s’attendent donc à entendre, à voir, à lire et à parler l’inuktut dans tous les aspects de leur vie au Nunavut. Ils s’attendent aussi à pouvoir exercer leur droit de vote en inuktut.

Mme Aariak a donné au Comité une série d’exemples où des renseignements électoraux ont été fournis aux électeurs du Nunavut exclusivement en anglais et en français, notamment des affiches, des dates et des heures de fonctionnement des bureaux de vote par anticipation, de l’information concernant les bulletins de vote spéciaux et le nom de l’organisation elle‑même, « Élections Canada »[117].

Mme Aariak a précisé que les bulletins de vote utilisés lors des élections municipales et territoriales au Nunavut comprennent l’inuktut. À son avis, il n’y a aucune raison qu’Élections Canada adopte une norme inférieure[118]. À cet égard, Mme Kotierk a signalé que, lors des élections municipales et territoriales au Nunavut, les services, la documentation et le soutien destinés aux candidats et aux électeurs étaient offerts en inuktut. Les candidats ont aussi la possibilité d’approuver l’inscription de leur nom en écriture syllabique sur le bulletin de vote. À sa connaissance, la prestation de services de traduction ou d’impression en inuktut au Nunavut n’a jamais posé problème[119].

Mme Kotierk a relaté avoir entendu qu’Élections Canada avait demandé à une résidente d’Iqaluit engagée comme employée lors des élections fédérales de traduire une affiche sur laquelle était indiquée « masque obligatoire ». Cette personne avait fait savoir à l’organisme que la traduction ne faisait pas partie de son travail et qu’il était décourageant de voir que les affiches n’étaient pas offertes en inuktut[120].

Mme Kotierk a mentionné qu’il est louable qu’Élections Canada ait traduit le guide de vote, ses cartes d’information de l’électeur et certains autres documents en inuktitut, et que sa campagne d’information comprenait notamment des annonces en inuktitut. Toutefois, elle a déploré le fait que l’inuktut ne figure pas sur le bulletin de vote et que les efforts d’Élections Canada sont incohérents et ponctuels et qu’ils dépendent de la bonne volonté du personnel de l’heure[121].

iii. Solutions proposées

Mme Aariak a dit au Comité que les organismes, ministères et établissements fédéraux, dont Élections Canada, doivent s’engager à prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer l’utilisation, la préservation, la revitalisation et la promotion de la langue inuite au Nunavut[122].

Elle a fait trois recommandations au Comité :

  • modifier la LEC pour inclure l’alphabet latin et l’écriture syllabique de l’inuktitut sur les bulletins de vote fédéraux;
  • modifier la LEC pour que la langue inuite soit utilisée sur les panneaux et les affiches publics d’Élections Canada et pour qu’elle soit au moins autant visible que l’anglais et le français;
  • créer et mettre en œuvre une politique afin qu’Élections Canada s’acquitte de ses obligations, énoncées dans la LPLI[123].

Pour sa part, Mme Kotierk a appuyé l’inclusion des langues autochtones dans les bulletins de vote dans les circonscriptions où il y a une « forte présence » d’Autochtones. Elle a également appuyé l’idée de donner aux électeurs le droit de demander des bulletins de vote spéciaux dans la langue autochtone de leur choix, quel que soit l’endroit où ils vivent[124].

Mme Aariak a dit au Comité qu’au Nunavut, il existe de nombreuses ressources en langue inuite et une autorité en matière de langue inuite à qui Élections Canada pourrait faire appel[125].

2.   Réseau jeunesse des Premières Nations du Québec‑Labrador

i.    Priorités du Réseau jeunesse des Premières Nations Québec‑Labrador

Shikuan Vollant, porte‑parole du Réseau des Premières Nations Québec‑Labrador, a affirmé au Comité qu’il appuyait toutes les initiatives qui valorisent et revitalisent les langues autochtones. Il a toutefois souligné que l’inclusion des langues autochtones sur les bulletins de vote fédéraux n’est pas une priorité pour la population dans sa communauté. Il a précisé que, si le but de cette initiative était de revitaliser les langues autochtones, le financement serait beaucoup mieux utilisé s’il était investi pour reconnaître et dédommager financièrement les aînés autochtones, bâtir des espaces où se réunir pour enseigner les langues autochtones ou organiser des sorties dans le territoire avec les jeunes des communautés[126].

Cédric Gray‑Lehoux s’est dit d’accord et a mentionné que, selon lui, l’argent serait mieux utilisé s’il servait à créer des lieux où les Autochtones pourraient renouer avec leur territoire et fraterniser avec les aînés, afin de maintenir les liens culturels qui ont été, pendant des centaines d’années, systématiquement détruits par les institutions[127].

Selon M. Gray‑Lehoux, il faut donner la priorité à la mise en place de systèmes pour l’apprentissage des langues autochtones et que le plus important, c’est d’amener les jeunes Autochtones à renouer avec leur langue et leur culture[128]. À cet égard, M. Vollant a mentionné qu’il est âgé de 30 ans et qu’il fait partie de l’une des dernières générations qui parlent parfaitement la langue innue, et que selon lui, le plus important est de promouvoir les langues autochtones auprès des jeunes. Beaucoup de ses neveux et nièces parlent plus l’anglais, en raison d’Internet et des médiaux sociaux, que l’innu[129].

M. Vollant a admis au Comité que, tant que la Loi sur les Indiens[130] existera, les Autochtones ne se sentiront pas chez eux à la Chambre des communes[131].

ii.   Réserves quant à l’inclusion des langues autochtones sur les bulletins de vote

M. Vollant a informé le Comité qu’environ 40 % des Autochtones votent aux élections fédérales. Il a fait valoir que les raisons sont multiples, mais qu’aucune étude ne mentionne la traduction des bulletins de vote comme une solution à cette abstention[132].

M. Vollant et M. Gray‑Lehoux ont exprimé plusieurs réserves quant à l’inclusion des langues autochtones sur les bulletins de vote des élections fédérales, notamment les suivantes :

  • cette mesure « coûterait énormément d’argent », qui pourrait être mieux investi dans des programmes et des installations destinés à revitaliser les langues et la culture autochtone[133];
  • la traduction des bulletins de vote dans les 60 langues des Premières Nations, des Métis et des Inuits alourdirait inévitablement les déchets et le gaspillage qu’entraîne une élection, et son organisation a dénoncé ce possible impact environnemental[134];
  • cette mesure ajouterait un niveau de complexité au processus de vote. Par exemple, au Québec, il existe 11 langues autochtones distinctes. Or, les peuples autochtones étaient relativement nomades, se déplaçant souvent pour le travail ou les études. Par conséquent, 11 langues autochtones devraient manifestement être représentées à chaque bureau de vote au Québec. Autrement dit, ce serait un fardeau assez lourd, non seulement pour les électeurs, mais également pour les travailleurs dans les bureaux de vote[135];
  • il faudrait s’assurer d’employer la bonne prononciation et la bonne graphie dans chacune des 43 communautés des Premières Nations au Québec et au Labrador, ce qui créerait un véritable cauchemar linguistique et logistique[136].

Par ailleurs, M. Vollant a fait observer que le mot « voter » n’existe pas dans la langue innue. Il a expliqué au Comité qu’il serait probablement plus facile pour un jeune Autochtone de sa communauté de lire le mot « voter » en français que d’inventer un mot qu’il n’a jamais entendu ni lu et qui serait probablement très long[137].

M. Vollant a dit avoir appris à parler l’innu avant de le lire ou de l’écrire. C’est pour cette raison que, même s’il parle très bien l’innu, il a beaucoup de difficultés à le lire[138].

M. Vollant a mentionné au Comité que sa mère, même si elle parle à peine français, vote quand même aux élections fédérales en français. Selon lui, le fait d’avoir des bulletins de vote en langue innue en plus d’en français n’apporterait rien à sa communauté[139].

Finalement, selon M. Vollant et M. Gray‑Lehoux, l’initiative visant à inclure les langues autochtones sur les bulletins de vote fédéraux part d’une bonne intention, mais ce n’est pas une priorité[140]. Ils ont reconnu que les nations du Nunavut ont une expérience différente, car leur langue est relativement homogène sur leur territoire, alors que le Québec et le Labrador comptent 11 nations parlant 11 langues distinctes[141].

3.   L’Institut Tshakapesh

Mme Tshernish a expliqué au Comité que beaucoup de membres de sa communauté se sentent exclus de la démocratie canadienne et s’abstiennent de voter ou refusent de participer au recensement de Statistique Canada. Les conséquences de cette abstention pour les communautés autochtones sont énormes[142].

Selon Mme Tshernish, si on fournissait de la documentation, dont le bulletin de vote, et des services en langues autochtones, les Autochtones pourraient vivre pleinement leur citoyenneté. On accorderait ainsi aux Premières Nations le droit de s’exprimer dans leur langue, tout en les reconnaissant qui forment une nation et ont leur propre langue, culture et identité[143].

Elle s’est dite favorable à l’inclusion des langues autochtones sur les bulletins de vote fédéraux, puisque le moment est venu d’aller plus loin que les gestes symboliques et de poser des gestes concrets[144]. Elle a indiqué que la présence des langues autochtones était très importante pour sa communauté, tout comme la consultation et le respect mutuel des modes de vie de chacun[145].

Mme Tshernish a souligné que, dans les circonscriptions de la Côte‑Nord, la langue innue comprend trois dialectes, mais que les bulletins de vote fédéraux ne pouvaient être rédigés que dans un seul, à l’exception de quelques mots qui pourraient être écrits en trois dialectes[146].

Mme Tshernish a proposé que certains mots en langues autochtones figurent sur la carte d’information de l’électeur, les affiches aux bureaux de vote et les publicités sur le vote[147].

4.   Conseil en Éducation des Premières Nations

i.    Contexte des élections fédérales selon le Conseil en Éducation des Premières Nations

M. Denis Gros‑Louis, directeur général, Conseil en Éducation des Premières Nations, a informé le Comité que son association représente huit des onze nations au Québec[148].

M. Gros‑Louis a indiqué que, selon lui, l’initiative visant à inclure les langues autochtones sur les bulletins de vote fédéraux était un bon premier pas qui permettrait de respecter les langues autochtones et qui favoriserait la réconciliation et la préservation des langues[149].

Il a mentionné que les langues autochtones sont le véhicule d’expression de la vision du monde des Autochtones et la pierre angulaire de leur identité[150].

M. Gros‑Louis a également admis que de nombreuses communautés autochtones ne sentent pas interpellées par les dossiers fédéraux. Selon lui, de nombreuses raisons expliquent le désengagement des électeurs des Premières Nations, notamment les effets néfastes de la Loi sur les Indiens, le manque de respect de la part des partenaires fédéraux et le sentiment que les enjeux fédéraux ne les interpellent ou ne les intéressent pas[151].

M. Gros‑Louis a fait remarquer que, selon une étude menée par Élections Canada sur le taux de participation des électeurs des Premières Nations, le taux de participation dans les communautés au Québec est d’environ 27,8 %[152]. Il a dit au Comité que les communautés des Premières Nations ont des points de vue différents, voire opposés, sur la participation aux élections fédérales. Certaines nations participent à cet exercice, alors que d’autres refusent catégoriquement de le faire. Il a mentionné que, selon des données récentes de Statistique Canada, la principale raison invoquée par les Autochtones pour s’abstenir de voter est de nature politique[153].

M. Gros‑Louis n’était pas d’accord avec les témoins ayant affirmé que l’ajout des langues autochtones aux bulletins de vote fédéraux était un exercice « dispendieux ». Selon lui, la réparation des préjudices causés aux langues et aux cultures autochtones n’a pas de prix[154].

ii.   Solutions proposées

M. Gros‑Louis a fait quatre recommandations au Comité concernant cette étude :

  • conformément à l’appel à l’action no 57 de la Commission de vérité et réconciliation du Canada, offrir une formation de sensibilisation à la haute direction et au personnel d’Élections Canada, axée sur l’histoire autochtone et l’amélioration des aptitudes interculturelles que devraient avoir les fonctionnaires;
  • établir des liens officiels de consultation et de collaboration entre Élections Canada et le Bureau du commissaire aux langues autochtones, qui est le chien de garde des langues autochtones au Canada;
  • inclure les langues autochtones dans les bulletins de vote fédéraux et demander à Élections Canada d’élaborer, en collaboration avec la nation atikamekw, un document qui fournit de l’information sur le processus électoral et le déroulement de la journée du scrutin et que la même possibilité soit offerte aux 10 autres nations autochtones du Québec;
  • s’assurer que les images présentées dans les documents électoraux et les livrets reflètent l’identité des nations autochtones[155].

M. Gros‑Louis a dit au Comité qu’Élections Canada devrait collaborer avec les communautés autochtones, y compris celles qu’il représente, pour que l’organisme puisse améliorer son expertise et sa capacité sur les questions autochtones. À son avis, Élections Canada devrait communiquer avec son association dès maintenant, car être proactif est un geste de réconciliation[156].

M. Gros‑Louis a montré au Comité un document d’Élections Canada traduit en collaboration avec la nation atikamekw. Il a laissé savoir qu’il le remettrait au Comité pour qu’il le présente à Élections Canada[157].

E.  Perspective universitaire

Le Comité a entendu les témoignages de trois témoins issus du milieu universitaire. Outre Mme Harell, ces témoins sont Jean-François Daoust, professeur adjoint de l’Université d’Edinbourg, et Dwight Newman, professeur de droit à l’Université de la Saskatchewan et titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur les droits des Autochtones en droit constitutionnel et international.

Ces trois témoins ont traité de l’importance de consulter les différentes communautés autochtones pour comprendre leurs attentes et besoins relativement au processus électoral. En outre, ils ont convenu que pour les langues dont la survie est menacée, les bulletins de vote multilingues ne sont sans doute pas une politique prioritaire et qu’il serait plus important d’investir dans d’autres types de soutien[158].

Dans cette optique, le Comité reconnaît que les études universitaires portant sur les peuples autochtones et le processus électoral fédéral sont en constante évolution. À l’heure actuelle, la recherche dans ce domaine a ses limites, une réalité que les chercheurs universitaires reconnaissent eux-mêmes. Le Comité est d’accord avec le témoignage des chercheurs universitaires selon lequel la mobilisation et la collaboration autochtones dans ce domaine de recherche sont importantes afin de mieux comprendre les différents obstacles auxquels se heurtent les collectivités autochtones.

Sur la question de l’ajout de photos de candidats sur les bulletins de vote, les opinions étaient partagées. M. Daoust était d’avis que cela ouvrirait la porte à des conséquences malheureuses, puisqu’on sait que même l’ordre alphabétique peut avoir un effet inconscient sur le choix des électeurs. Mme Harell a indiqué qu’il faut chercher des solutions créatives, et que si les photos permettent de donner de l’information de façon multilingue, il s’agit d’une option à considérer. Elle a toutefois reconnu que les inquiétudes de M. Daoust sont appropriées. M. Newman considère également qu’il faut chercher des solutions créatives, tout en prenant en considération les autres problèmes que pourrait causer une telle initiative[159].

1.   Jean-François Daoust, professeur adjoint de l’Université d’Edinbourg

M. Daoust a indiqué au Comité qu’il distingue trois volets de la question de l’ajout de langues autochtones sur les bulletins de vote : un volet normatif, un volet technique et un volet empirique. La présentation de M. Daoust s’est concentrée sur le premier et le troisième volet[160].

Pour le volet normatif, M. Daoust a encouragé le Comité à réfléchir aux valeurs de la société canadienne, et sur la façon dont elles peuvent se refléter sur les politiques publiques et le processus électoral. Selon lui, la société canadienne se voulant inclusive, cela implique de favoriser l’inclusion de tous les groupes sociaux dans le processus démocratique, particulièrement pour les groupes faisant face à des barrières systémiques et qui participent moins au processus démocratique. En ce sens, il lui apparaît cohérent et désirable de permettre aux Autochtones de voter en ayant accès à des bulletins de vote dans leurs langues. Pour cette raison, il a indiqué que le Comité devrait avoir un a priori positif face à une telle initiative pour des fins d’inclusion[161].

Relativement au volet empirique, M. Daoust a formulé la question suivante : peut-on s’attendre à une augmentation de la participation électorale des Autochtones grâce à cette mesure? À la lumière de ses recherches, il a affirmé qu’il est peu probable que l’ajout de langues sur le bulletin produise un impact important sur la participation. Selon lui, une telle initiative augmenterait la participation électorale seulement si elle facilitait le processus de vote et si cette considération, à savoir la facilité d’aller voter, avait une grande influence dans la décision des électeurs de s’abstenir ou non. Or, de manière générale, la grande majorité des électeurs considèrent que voter est facile, ce qui signifie que les personnes qui s’abstiennent le font habituellement pour des raisons qui ne sont pas liées à la facilité d’aller voter[162], qu’ils soient autochtones ou non[163]. M. Daoust a affirmé que l’intérêt envers la politique et le fait de considérer le vote comme un devoir plutôt qu’un choix sont des facteurs qui ont plus d’impacts sur la participation que la facilité d’aller voter[164].

M. Daoust a conclu qu’il ne voit pas de raison normative pour ne pas inclure de langues autochtones sur les bulletins, mais que, à la lecture de la littérature scientifique, on ne devrait pas s’attendre à ce qu’une telle mesure provoque une augmentation importante de la participation électorale des Autochtones. Il a cependant affirmé que ses conclusions sont basées sur des données de recherche assez limitées quant aux échantillons recueillis auprès des Autochtones[165].

En réponse à une question, M. Daoust a également mentionné que la dimension symbolique d’une telle initiative peut parfois être sous-estimée. Les symboles peuvent avoir des impacts sur les attitudes politiques, renforcer la confiance avec le gouvernement fédéral, ou encore accroître l’intérêt de certains électeurs envers la politique. Les effets indirects de l’impact symbolique d’une telle mesure pourraient ainsi avoir plus de portée que les effets directs sur le taux de participation[166].

2.   Dwight Newman, professeur de droit à l’Université de la Saskatchewan et titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur les droits des Autochtones en droit constitutionnel et international

M. Newman a rappelé au Comité que, en 2021, le Canada a adopté la Loi concernant la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones. L’article 5 de la Loi établit une obligation juridique selon laquelle le gouvernement du Canada doit prendre toutes les mesures nécessaires pour veiller à ce que les lois fédérales soient compatibles avec la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones (DNUDPA)[167].

L’article 13.2 de la DNUDPA exige que les États prennent des mesures efficaces « pour faire en sorte que les peuples autochtones puissent comprendre et être compris dans les procédures politiques, juridiques et administratives, en fournissant, si nécessaire, des services d’interprétation ou d’autres moyens appropriés[168] ». Selon M. Newman, l’article 13.2 n’impose sans doute pas d’exigence juridique précise concernant la mise à disposition de bulletins de vote dans les langues autochtones, en partie parce qu’il établit les droits des peuples autochtones en tant qu’entités collectives plutôt qu’en tant qu’électeurs individuels. Il a cependant souligné que l’ajout des langues autochtones aux bulletins de vote serait compatible avec les objectifs sous‑jacents de la DNUDPA[169].

M. Newman a aussi parlé des dispositions de la Charte canadienne des droits et libertés qui garantissent le droit de vote et la protection contre la discrimination. À son avis, ces dispositions pourraient fort bien étayer l’argumentation juridique la plus solide à l’encontre des obstacles à la participation électorale, dont les obstacles linguistiques, tout particulièrement dans le cas des électeurs qui parlent une autre langue et qui ont une maîtrise restreinte de l’anglais ou du français[170]. Il n’a toutefois pas connaissance de l’existence d’une quelconque jurisprudence en ce sens[171].

M. Newman a indiqué au Comité que le Canada est un peu en retard sur les questions linguistiques et le vote, surtout en comparaison avec les États‑Unis. Comme l’a également mentionné Mme Mack au Comité, M. Newman a précisé que l’article 203 de la Voting Rights Act, la loi américaine sur le droit de vote, prévoit diverses formes d’assistance linguistique dans les districts où la présence d’une communauté minoritaire le justifie, qu’elle soit autochtone ou non. Cet article a été ajouté lors de la modification de la loi en 1975. Cependant, M. Newman a mentionné que la mise en œuvre de cette obligation juridique aux États‑Unis ne s’est pas faite sans heurts[172].

M. Newman a soumis des questions essentielles sur lesquelles devrait se pencher le Comité, notamment les suivantes :

  • le Nunavut se trouverait‑il dans une situation spéciale et serait‑il judicieux de mener un projet pilote au Nunavut avant d’étendre le projet à d’autres circonscriptions?
  • faut‑il prévoir des seuils proportionnels en fonction de la population capable de voter dans d’autres langues?
  • sous quelle forme les langues autochtones pourraient‑elles être présentées sur les bulletins de vote, sous des représentations syllabiques ou des versions translittérées lorsque les deux sont possibles?
  • à combien s’élèveraient les fonds nécessaires et les fonds seraient‑ils investis de façon plus optimale dans d’autres mesures visant à favoriser la participation électorale des Autochtones?
  • le recours à un fac‑similé de bulletin serait‑il envisageable[173]?
  • dans quelle mesure un bulletin surchargé serait‑il difficile d’accès pour les personnes souffrant de certains handicaps[174]?
  • d’autres formes d’assistance linguistique devraient‑elles être établies[175]?

M. Newman a souligné l’importance d’échanger avec les communautés autochtones du pays pour connaître les obstacles auxquels elles doivent faire face[176]. Il a dit au Comité que, selon lui, il faudrait protéger les droits linguistiques des Autochtones, mais que l’idée d’octroyer des protections identiques à celles des anglophones et des francophones peut soulever certaines questions, notamment en raison de la myriade de langues autochtones au Canada[177].

3.   Allison Harell, professeure au département de science politique de l’Université du Québec à Montréal

Mme Harell a soulevé trois questions que pourrait prendre en considération le Comité dans le cadre de son étude sur l’ajout des langues autochtones aux bulletins de vote fédéraux.

Tout d’abord, elle a demandé si l’absence de langues autochtones était un obstacle à la participation politique. Selon ses études, les ressources socioéconomiques constituent un obstacle important pour tous les électeurs. Or, certains facteurs, comme la confiance envers le gouvernement fédéral et la prépondérance des questions autochtones, revêtent également de l’importance, en particulier chez les jeunes électeurs autochtones[178].

Mme Harell a toutefois souligné que la présence des langues autochtones sur les bulletins de vote serait un geste symbolique important, qui témoignerait de la volonté du Canada que les Autochtones participent au processus électoral. Mme Harell a également fait remarquer que la participation aux élections est un choix et que, bien qu’il soit important de supprimer les obstacles à la participation, bon nombre d’électeurs autochtones pourraient choisir de s’abstenir de voter pour d’autres raisons[179]. Elle a ajouté que, même si certains Autochtones ne votent pas aux élections fédérales, ils sont néanmoins politiquement actifs dans d’autres sphères de leur communauté[180].

Ensuite, Mme Harell a reconnu que l’inclusion de nombreuses langues autochtones aux bulletins de vote représente tout un défi, notamment en raison des délais de production serrés des bulletins de vote aux termes du cadre législatif actuel. Elle a toutefois souligné que l’existence de bulletins de vote en plusieurs langues présente aussi des avantages, comme l’élimination d’un obstacle injuste à la participation. À son avis, la présence des langues autochtones sur les bulletins de vote pourrait également constituer un pas vers la réconciliation. Mme Harell a aussi mentionné qu’il fallait affirmer sans équivoque, en tant que colons, que les nations autochtones sont sur un pied d’égalité avec les Anglais et les Français au Canada[181].

Mme Harrel a terminé sur un dernier point : la question fondamentale à se poser en ce qui concerne la présence des langues autochtones sur les bulletins de vote devrait être de savoir si les nations et les électeurs autochtones le souhaitent afin de participer pleinement au processus électoral. La consultation est donc extrêmement pertinente, et le renforcement de la capacité de consultation au sein d’Élections Canada serait, selon elle, une mesure logique[182]. Bien que la mise en œuvre de bulletins de vote multilingues puisse engendrer des coûts et des difficultés, elle a dit croire que la réconciliation exige un engagement sérieux de la part du gouvernement à rendre le processus électoral accessible aux électeurs autochtones dans leur propre langue[183].

Mme Harell a indiqué qu’il serait logique de lancer un projet pilote et que la mise en œuvre d’un processus à la grandeur du pays qui se solderait par une expérience ratée pourrait grandement miner la confiance des gens à l’égard du système électoral[184].

Analyse et recommandations

Un aspect fondamental du système électoral canadien tient au fait qu’aucun citoyen pouvant participer à une élection générale fédérale ne devrait se heurter à des obstacles indus lorsqu’il exerce leur droit de vote.

Durant cette étude, le Comité a écouté avec beaucoup d’intérêt les difficultés créées par les obstacles linguistiques auxquels font face les électeurs autochtones désireux de voter durant des élections fédérales, en particulier les Inuits unilingues du Nunavut.

Parallèlement, le Comité a également appris que le Parlement et les parlementaires ont encore à déployer des efforts considérables pour faire participer davantage les Autochtones au système et au processus électoraux fédéraux. Le Comité a été troublé d’entendre à quel point le faible taux de participation électorale des Autochtones est généralisé au Canada.

Le Comité prend au sérieux les engagements du Canada concernant la réconciliation avec les Autochtones. Même si l’amélioration de l’expérience de vote des Autochtones aux élections fédérales n’est qu’un petit pas vers la réconciliation, c’est tout de même un pas dans la bonne direction.

Par conséquent, le Comité recommande :

Recommandation 1

Qu’un projet pilote soit entrepris par Élections Canada, en partenariat avec Élections Nunavut, afin d’inclure les langues inuites sur les bulletins de vote fédéraux dans les circonscriptions fédérales du Nunavut.

Recommandation 2

Qu’un groupe consultatif composé de collectivités autochtones soit formé par Élections Canada afin de collaborer avec Élections Canada à la formulation de recommandations visant à rendre le processus électoral fédéral le plus accessible possible pour les électeurs autochtones.

Recommandation 3

Qu’Élections Canada imprime et affiche des fac-similés du bulletin de vote officiel dans des langues autochtones pour qu’ils servent de guide aux électeurs au bureau de vote et/ou dans l’isoloir, là où c'est approprié, tel que déterminé par le groupe consultatif composé de collectivités autochtones.

Recommandation 4

Qu'Élections Canada consulte le Commissaire fédéral aux langues autochtones pour l'orienter sur ces questions.


[1]              Chambre des communes, Règlement de la Chambre des communes, sous-alinéa 108(3)a)(vi).

[2]              Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre (PROC), Procès-verbal, 14 décembre 2021.

[3]              PROC, Procès-verbal, 22 juin 2021.

[4]              PROC, Témoignages, 1re session, 44e législature, réunion 16, 7 avril 2022, 1210 (Marjolaine Tshernish, directrice générale, Institut Tshakapesh).

[5]              PROC, Témoignages, 1re session, 44e législature, réunion 14, 31 mars 2022, 1105 (Karliin Aariak, commissaire, Bureau du commissaire aux langues du Nunavut).

[6]              Ibid., 1110.

[7]              PROC, Témoignages, 1re session, 44e législature, réunion 16, 7 avril 2022, 1250 (Tshernish).

[8]              PROC, Témoignages, 1re session, 44e législature, réunion 14, 31 mars 2022, 1115 (Aluki Kotierk, présidente, Nunavut Tunngavik Inc.).

[9]              PROC, Témoignages, 1re session, 44e législature, réunion 16, 7 avril 2022, 1250 (Tshernish).

[10]            PROC, Témoignages, 1re session, 44e législature, réunion 16, 7 avril 2022, 1115 (Allison Harell, professeure, Département de science politique, Université du Québec à Montréal).

[11]            PROC, Témoignages, 1re session, 44e législature, réunion 14, 31 mars 2022, 1120 (Kotierk).

[12]            À noter que certains établissements et réserves n’ont pas participé au Recensement de 2016, parce que le dénombrement n’était pas autorisé ou qu’il a été interrompu avant d’être terminé.

[13]            Statistique Canada, Les langues autochtones des Premières Nations, des Métis et des Inuits, 25 octobre 2017.

[14]            Les langues cries comprennent ces catégories : cri non déclaré ailleurs (personnes qui ont déclaré « cri » comme langue), cri des plaines, cri des bois, cri des marais, cri du Nord‑Est, cri de Moose, cri du Sud‑Est.

[15]            Statistique Canada, Les langues autochtones des Premières Nations, des Métis et des Inuits, 25 octobre 2017.

[16]            Gouvernement du Nunavut, Langues officielles.

[17]            Gouvernement des Territoires du Nord-Ouest, Informations générales sur les langues autochtones.

[18]            Yukon, Loi sur les langues, LRY 2002, c. 133.

[19]            Élections Canada, Rapport sur la 44e élection générale du 20 septembre 2021, 27 janvier 2022.

[20]            Élections Canada, Électeurs autochtones.

[21]            Ibid.

[23]            Élections Canada, Guide pour l’élection fédérale.

[24]            Élections Canada, Rapport sur la 44e élection générale du 20 septembre 2021.

[25]            Élections Canada, Feuille d’information sur l’identification de l’électeur.

[26]            Élections Canada, Renseignements pour les électeurs autochtones.

[27]            Élections Canada, « Chapitre 12 – Règles électorales spéciales (08/2021) » dans le Manuel du directeur du scrutin (08/2021).

[28]            Loi électorale du Canada, L.C. 2000, ch. 9, par. 116(1), 138(1), art. 186 et Annexe 1.

[29]            PROC, Témoignages, 1re session, 44e législature, réunion 13, 29 mars 2022, 1105 (Stéphane Perrault, directeur général des élections, Élections Canada).

[30]            Ibid.

[31]            Ibid.

[32]            Ibid.; Directeur général des élections, Lettre à la présidente du Comité, 11 avril 2022, Annexe 2.

[33]            Directeur général des élections, Lettre à la présidente du Comité, 11 avril 2022, Annexe 2.

[34]            PROC, Témoignages, 1re session, 44e législature, réunion 13, 29 mars 2022, 1110 (Perrault).

[35]            Ibid., 1105.

[36]            Ibid., 1230.

[37]            Ibid., 1105.

[38]            Ibid., 1110.

[39]            Ibid., 1105.

[40]            Ibid.

[41]            La translittération peut se définir comme la « [r]eprésentation, lettre par lettre, de la forme graphique d’une unité d’une langue dans le système d’écriture d’une autre langue, sans la préoccupation de rendre compte des sons réellement prononcés ». Voir la fiche sur la translittération dans Termium Plus.

[42]            PROC, Témoignages, 1re session, 44e législature, réunion 13, 29 mars 2022, 1125 (Perrault).

[43]            Ibid., 1105.

[44]            Ibid.

[45]            Ibid., 1110.

[46]            Ibid., 1130.

[47]            Ibid., 1105.

[48]            Ibid.

[49]            Ibid.

[50]            Ibid., 1110.

[51]            Ibid., 1105.

[52]            Ibid.

[53]            Ibid., 1110.

[54]            Ibid., 1105.

[55]            Ibid.

[56]            Ibid., 1125.

[57]            Ibid., 1105.

[58]            Ibid.

[59]            Ibid., 1115.

[60]            Ibid., 1120.

[61]            Ibid., 1115, 1210.

[62]            Ibid., 1120.

[63]            Ibid., 1115.

[64]            Ibid., 1145.

[65]            Ibid.

[66]            PROC, Témoignages, 1re session, 44e législature, réunion 15, 5 avril 2022, 1130 (Stephen Dunbar, directeur général des élections, Élections Territoires du Nord-Ouest).

[67]            PROC, Témoignages, 1re session, 44e législature, réunion 15, 5 avril 2022, 1130 (Stephen Fredlund, directeur général des élections, Élections Nunavut).

[68]            Ibid., 1150 (Dunbar et Fredlund).

[69]            Ibid., 1105 (Dunbar).

[70]            Ibid., 1120.

[71]            Ibid., 1105, 1205.

[72]            Ibid., 1115.

[73]            Ibid., 1120.

[74]            Ibid., 1105.

[75]            Ibid.

[76]            Ibid., 1155.

[77]            Ibid., 1115.

[78]            Ibid., 1120.

[79]            Ibid., 1105.

[80]            Ibid., 1110 (Fredlund).

[81]            Ibid., 1115.

[82]            Ibid., 1110.

[83]            Ibid., 1145.

[84]            Ibid., 1120.

[85]            Ibid., 1155.

[86]            PROC, Témoignages, 1re session, 44e législature, réunion 15, 5 avril 2022, 1140 (Samantha Mack, conformité de l’assistance linguistique, Alaska Division of Elections).

[87]            Ibid., 1110.

[88]            Ibid., 1200.

[89]            Loi sur le Nunavut, (L.C. 1993, ch. 28).

[90]            PROC, Témoignages, 1re session, 44e législature, réunion 15, 5 avril 2022, 1225 (Lori Idlout, députée, Nunavut).

[91]            Loi sur la protection de la langue inuit, L.Nun. 2008, ch. 17.

[92]            PROC, Témoignages, 1re session, 44e législature, réunion 15, 5 avril 2022, 1210 (Idlout).

[93]            Ibid.

[94]            Ibid.

[95]            Ibid.

[96]            Loi électorale du Canada (L.C. 2000, ch. 9).

[97]            PROC, Témoignages, 1re session, 44e législature, réunion 15, 5 avril 2022, 1210 (Idlout).

[98]            Ibid, 1215 et 1235.

[99]            Ibid, 1215.

[100]          Ibid, 1240.

[101]          Ibid, 1235.

[102]          Ibid, 1240.

[103]          Ibid, 1220.

[104]          Ibid, 1225.

[105]          Ibid, 1230.

[106]          Ibid, 1210.

[107]          Ibid, 1250.

[108]          Loi sur la protection de la langue inuit (L.Nun. 2008, ch. 17).

[109]          PROC, Témoignages, 1re session, 44e législature, réunion 14, 31 mars 2022, 1105 (Kotierk).

[110]          Ibid, 1200.

[111]          Ibid., 1115 (Aariak).

[112]          Ibid, 1150.

[113]          Ibid., 1115 (Kotierk).

[114]          Ibid.

[115]          Ibid., 1105 (Aariak).

[116]          Ibid., 1115 (Kotierk).

[117]          Ibid., 1110 (Aariark).

[118]          Ibid, 1105.

[119]          Ibid., 1130 (Kotierk).

[120]          Ibid., 1115.

[121]          Ibid., 1120.

[122]          Ibid., 1110 (Aariak).

[123]          Ibid.

[124]          Ibid., 1120 (Kotierk).

[125]          Ibid., 1230 (Aariak).

[126]          PROC, Témoignages, 1re session, 44e législature, réunion 14, 31 mars 2022, 1120 (Shikuan Vollant, porte‑parole, Réseau jeunesse des Premières Nations Québec‑Labrador).

[127]          PROC, Témoignages, 1re session, 44e législature, réunion 14, 31 mars 2022, 1150 (Cédric Gray‑Lehoux, porte‑parole, Réseau jeunesse des Premières Nations Québec‑Labrador).

[128]          Ibid.

[129]          Ibid., 1140 (Vollant).

[130]          Loi sur les Indiens, L.R.C. (1985), ch. I‑5.

[131]          PROC, Témoignages, 1re session, 44e législature, réunion 14, 31 mars 2022, 1145 (Vollant).

[132]          Ibid., 1120 (Vollant).

[133]          Ibid.

[134]          Ibid.

[135]          Ibid., 1150 et 1210 (Gray‑Lehoux).

[136]          Ibid., 1215 (Vollant).

[137]          Ibid., 1145.

[138]          Ibid.

[139]          Ibid, 1140.

[140]          Ibid., 1120 (Vollant).

[141]          Ibid., 1150 (Gray‑Lehoux).

[142]          PROC, Témoignages, 1re session, 44e législature, réunion 16, 7 avril 2022, 1210 (Tshernish,).

[143]          Ibid.

[144]          Ibid.

[145]          Ibid, 1245.

[146]          Ibid, 1235.

[147]          Ibid.

[148]          PROC, Témoignages, 1re session, 44e législature, réunion 16, 7 avril 2022, 1215 (Denis Gros‑Louis, directeur général, Conseil en Éducation des Premières Nations).

[149]          Ibid, 1215 et 1220.

[150]          Ibid, 1215.

[151]          Ibid.

[152]          Ibid.

[153]          Ibid.

[154]          Ibid, 1220.

[155]          Ibid, 1220.

[156]          Ibid, 1235.

[157]          Ibid, 1240.

[158]          PROC, Témoignages, 1re session, 44e législature, réunion 16, 7 avril 2022, 1155 (Jean‑François Daoust, professeur adjoint, Université d’Edinbourg); PROC, Témoignages, 1re session, 44e législature, réunion 16, 7 avril 2022, 1155 (Dwight Newman, professeur de droit et titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur les droits des Autochtones en droit constitutionnel et international, Université de la Saskatchewan); PROC, Témoignages, 1re session, 44e législature, réunion 16, 7 avril 2022, 1155 (Allison Harell).

[159]          Ibid., 1200 (Daoust, Newman et Harell).

[160]          Ibid., 1105 (Daoust).

[161]          Ibid.

[162]          Ibid.

[163]          Ibid., 1145.

[164]          Ibid.

[165]          Ibid., 1105.

[166]          Ibid., 1135.

[167]          Ibid., 1105 (Newman).

[168]          Ibid.

[169]          Ibid.

[170]          Ibid., 1105, 1120.

[171]          Ibid., 1120.

[172]          Ibid., 1105.

[173]          Ibid., 1120.

[174]          Ibid.

[175]          Ibid., 1105.

[176]          Ibid., 1155.

[177]          Ibid., 1205.

[178]          Ibid., 1115 (Harell).

[179]          Ibid.

[180]          Ibid., 1135.

[181]          Ibid., 1115.

[182]          Ibid., 1155.

[183]          Ibid., 1115.

[184]          Ibid., 1155.