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FAIT Rapport du Comité

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CHAPITRE V : CONCLUSION : MENER LE G8 VERS
UN PROCESSUS PLUS EFFICACE ET PLUS PARTICIPATIF

Nous nous sommes réunis parce que nous partageons les mêmes convictions et les mêmes responsabilités. Nous sommes chacun pour notre part responsables de la conduite d’une société ouverte, démocratique, profondément attachée à la liberté individuelle et au progrès social. Notre succès renforcera, et cela de façon décisive, l’ensemble des sociétés démocratiques.

        Communiqué du premier Sommet du G7, Rambouillet,
        France, 1975
174

CE QUE LES CANADIENS NOUS ONT DIT

[…] Premièrement, le sommet a été conçu comme un concert mondial […] Les contestataires de la société civile, les citoyens du G8 et d’autres ont donc parfaitement le droit de demander au sommet d’étudier et de résoudre n’importe quel problème auquel eux-mêmes ou leurs collectivités sont confrontés. Contrairement aux institutions internationales qui doivent respecter leur charte ou limiter leur action à des domaines précis, le système du G7/G8, surtout à l’échelon du sommet, ne peut pas légitimement se détourner et passer la balle sans donner des explications crédibles.

John Kirton, professeur, directeur, Groupe de recherche sur le G8 de l’Université de Toronto175

La facture du sommet de Kananaskis dépassera presque certainement les cotisations totales du Canada à l’ONU pour 2002. Le G8 va à l’encontre d’une gouvernance participative mondiale et rappelle en ce sens une époque ancienne, celle du « Concert de l’Europe », où les principales puissances européennes conspiraient pour consolider leur mainmise sur le pouvoir en intervenant périodiquement et en supprimant les mouvements populaires. Du fait qu’il représente une petite minorité riche de la planète, le G8 fera inévitablement la même chose en utilisant des moyens modernes bien sûr. […] Il mènera de toute évidence à une impasse. Prenons l’argent consacré aux sommets du G8 et utilisons-le à des fins constructives pour mettre en oeuvre des projets de radiation de dette, porter les contributions au chapitre de l’aide à 0,7 %, pourcentage qu’elles auraient dû atteindre il y a longtemps, et financer les efforts d’adoption d’un modèle de gouvernance mondiale dans un contexte démocratique.

Eric Squire, Mémoire, 28 février 2002, Montréal, p. 2

Si notre gouvernement et les autres gouvernements n’ont rien à cacher, ils devraient faire preuve de transparence dans leurs débats et leurs échanges et nous faire de la place. Les sommets de Québec, de Gênes ou même de Kananaskis ne sont pas des réunions privées à la « Davos ». Autant que nous sachions, il s’agit d’échanges entre gouvernements et c’est le peuple qui légitime ces gouvernements aux yeux du monde. Les enjeux sont trop importants pour qu’ils prennent de telles décisions à l’insu d’une majorité de leurs citoyens.

Blair Doucet, Conseil exécutif de la Fédération des travailleuses et travailleurs du Nouveau-Brunswick, Mémoire, Saint-Jean, 28 février 2002, p. 8

À cause de la mondialisation, le règlement de questions qui ont une incidence directe sur la vie des Canadiens est de plus en plus souvent confié à des organismes internationaux dont les représentants sont généralement nommés par les gouvernements au lieu d’être démocratiquement élus par les citoyens. Pour que la société civile ait vraiment son mot à dire sur la position qui sera adoptée à ces réunions, le gouvernement du Canada devrait entreprendre des consultations publiques à l’échelle du pays bien avant la tenue de sommets de haut niveau.

Desirée McGraw, directrice de Montréal, Groupe de recherche sur le G8 de l’Université de Toronto, Mémoire, Montréal, 27 février 2002, p. 2

Nous signalons que si le G8 se préoccupe véritablement d’un développement à l’échelle mondiale, il cherchera à habiliter les véritables institutions multilatérales, telles que les Nations Unies et le tribunal international mentionné plus haut, qui sont des représentants potentiellement bien plus crédibles de la majeure partie de la population du globe.

Edward Hudson, St. John’s Mobilization for Global Justice, Témoignages, 25 février 2002, réunion no 58, St. John’s

Ne sommes-nous pas en train d’assister à la mise au rancart de l’Organisation des Nations Unies et de ses organismes? Le G8 ne peut se comporter en comité exécutif des pays riches. À cet égard, la CSN croit que le G8 serait bien avisé, plutôt que de s’octroyer des rôles nouveaux dans le domaine de la gouverne mondiale, de prôner le renforcement des institutions de l’ONU, par exemple de l’Organisation internationale du travail, l’OIT.

Marc Laviolette, Confédération des syndicats nationaux, Témoignages, 28 février 2002, réunion no 64, Montréal

[…] Il est essentiel que les femmes occupent une place spéciale dans les discussions des pays membres du G8. […] De toute évidence, il n’y a pas de solution toute faite à la reconfiguration du monde. Nous savons que des millions de femmes du monde entier contribuent à l’élaboration de solutions de rechange qui peuvent être mises en œuvre sur-le-champ. […]

La Marche mondiale des femmes, Mémoire, Montréal, 27 février 2002, p. 1

Nous voilà maintenant en train de foncer vers le prochain sommet du G8 sans avoir eu l’occasion d’apprendre de nos erreurs à Québec. Nous faisons certes remarquer à nouveau aux services policiers qui seront chargés d’assurer la sécurité là-bas qu’il faut porter une attention scrupuleuse à la protection du droit à la manifestation pacifique, ce qui signifie deux choses. Cela peut vouloir signifier, parfois, de protéger des manifestants pacifiques d’autres manifestants qui ne sont pas pacifiques. Mais cela signifie aussi, ce qui est plus important, que les forces policières doivent s’abstenir d’avoir une réaction excessive et intimidante lors d’événements pacifiques, à tel point que les gens ne se sentent pas en sécurité dans la rue […] Ce serait très mal respecter certaines de nos valeurs les plus fondamentales.

Alex Neve, Amnistie internationale Canada, Témoignages, 30 avril 2002, réunion no 66, Ottawa

Nous représentons des centaines de milliers de gens qui ont des préoccupations tout à fait légitimes, tout autant que celles du milieu des affaires. Si nos préoccupations doivent être reçues avec une aimable indifférence, et si nous ne sommes pas sincèrement consultés dans le cadre du processus, de façon directe, nous allons trouver une autre voie. Nous n’allons tout simplement pas nous laisser ignorer. Si cela signifie et exige — on le dirait bien — qu’il nous faut recourir aux mécanismes syndicaux plus traditionnels, nous le ferons. Nous n’avons pas l’intention de laisser les choses suivre leur cours sans nous.

Larry Brown, Syndicat national des employées et employés généraux du secteur public, Témoignages, 30 avril 2002, réunion no 66, Ottawa

[…] Je pense que le Canada doit entamer un débat véritablement démocratique sur la politique étrangère et les questions liées à la sécurité. […] Un grand nombre d’entre nous souhaitent que le gouvernement du Canada fasse un grand pas en avant et prenne la tête du mouvement visant à instaurer un système mondial de gouvernement qui repose sur la démocratie, l’égalité et la solution pacifique des conflits internationaux.

Peter Coombes, End the Arms Race, Témoignages, 6 mai 2002, réunion no 76, Vancouver

Le droit d’exprimer son désaccord est un élément essentiel de la démocratie. Le G8, et notamment le Canada, disent souvent qu’il faut promouvoir la démocratie et une saine gestion publique partout dans le monde. En réalité, la démocratie et une saine gestion publique doivent être protégées à l’intérieur du G8. Greenpeace exhorte le gouvernement du Canada et les forces de l’ordre canadiennes à veiller à ce que les manifestants puissent exercer leurs droits démocratiques. […] Les ONG ont une vaste expertise qui devrait servir de fondement aux travaux du G8. Greenpeace voudrait que les ONG se voient conférer le statut d’observateurs au Sommet. De plus, il serait encourageant que le programme du Sommet reflète les résultats des audiences du Comité. Il arrive trop souvent que de telles audiences s’apparentent davantage à un exercice de relations publiques qu’à une consultation sincère.

Sarah Blackstock, Greenpeace Canada, Mémoire, Toronto, 7 mai 2002, p. 4

Les Canadiens qui protestent contre les politiques de mondialisation ne sont ni des terroristes ni des criminels. Dans un pays démocratique, le gouvernement devrait protéger le droit des citoyens de dire ce qu’ils pensent et de manifester leur opposition ou leur appui à la politique officielle.

Alberta Federation of Labour, Mémoire, Edmonton, 9 mai 2002, p. 3

Un dialogue continu doit être instauré avec la population pour qu’elle puisse se prononcer sur les nombreux enjeux, souvent complexes, associés à la mondialisation. Nous espérons que le travail de votre Comité contribuera à la mise en place d’un dialogue officiel continu et à la participation des citoyens.

Le Comité pour la justice sociale de Montréal, Mémoire, Montréal, 27 février 2002, p. 2

Gouvernance et responsabilisation en démocratie : quelques questions pour
le G8

        Même si M. Kirton a soutenu que les sommets du G7 ont été conçus « comme un concert démocratique » et que « dès le départ, la gouvernance du G7/G8 était un exercice public plutôt qu’un effort tendant à pratiquer la démocratie en privé176 », il ressort clairement des témoignages entendus par le Comité qu’un grand nombre de Canadiens ont des doutes sur la structure, le mandat et les processus en cause. Nous avons été heureux de l’allocution prononcée par l’ambassadeur Fowler, le représentant personnel du premier ministre au Sommet, qui a dit lors de l’ouverture de nos audiences publiques que les consultations « joueront un rôle décisif en aidant le premier ministre à se préparer pour le Sommet, en permettant aux Canadiens de participer à un véritable débat sur les questions internationales à l’ordre du jour du G8 et en facilitant l’expression pacifique des opinions ». Les déclarations officielles des dirigeants et des ministres du G8 donnent à entendre qu’ils sont de plus en plus conscients de la nécessité d’encourager une mobilisation plus constructive des citoyens autour des questions de mondialisation et de faire preuve d’une plus grande ouverture et d’une plus grande transparence. Par contre, des promesses en ce sens ne suffiront pas à apaiser les critiques et à combler les attentes de nombreux groupes d’intérêt activistes, ni à régler les plaintes plus générales à propos de l’insuffisance perçue des efforts de consultation publique à ce jour177.

        Le Comité regrette d’avoir dû reporter une partie de ses audiences à l’extérieur d’Ottawa et d’avoir été dans l’impossibilité d’en donner avis suffisamment à l’avance. Nous demeurons néanmoins convaincus qu’il était important que nous nous rendions dans chaque région pour avoir la chance d’entendre le témoignage non seulement de quelques experts et dirigeants d’organismes nationaux, mais aussi de particuliers et de bénévoles, de citoyens passionnément concernés, qui n’ont pas eu peur de dire ce qu’ils pensent. Nous osons espérer que ce précieux document public sera utile aux délibérations du gouvernement sur les améliorations à apporter au processus du Sommet.

        En fait, s’il y a une chose sur laquelle même les « sherpas » de sommets antérieurs du G7/G8, les universitaires partisans du processus et les adversaires les plus acharnés du G8 sont peut-être d’accord, c’est que les questions de la gouvernance, de la réforme démocratique et de la responsabilisation véritable en vue de l’atteinte d’objectifs réalistes ne peuvent être contournées ou évitées, quelle que soit la forme que prendront le sommet de cette année ou les sommets futurs. Le choix d’un endroit relativement isolé pour le Sommet de Kananaskis, même s’il peut paraître attrayant à la lumière des dilemmes que pose la sécurité, ne saurait donner l’impression que le G8 se replie sur lui-même, se coupe du monde extérieur parce qu’il est sur la défensive, et n’a aucune idée des préoccupations des citoyens. Une réforme crédible du G8 suppose qu’il devra relever les défis de l’organisation de sommets à une époque marquée par des insécurités de toutes sortes à l’échelle mondiale. Et il devra trouver des moyens, en ayant notamment recours aux technologies de l’information et des communications du XXIe siècle, de réduire les coûts des réunions et, facteur plus important encore, les déficits démocratiques. M. Kirton a fait cette mise en garde : « […] la tendance instinctive à organiser un petit sommet discret ultra-sécurisé et à l’abri de la société civile risque maintenant d’amener le G8 à commettre une erreur grossière […] Il est en effet devenu impératif de trouver de meilleurs moyens, plus novateurs, de communiquer avec la société civile et, par l’intermédiaire des médias, avec les citoyens du G8 et du monde178 ».

        Il a été suggéré dans certains mémoires d’instaurer d’autres mécanismes de représentation et de reddition de comptes (pour accroître la confiance de la population dans la démocratie et favoriser le respect des obligations découlant du droit international) dans le processus décisionnel du G8. Plusieurs représentants de groupes ouvriers ont plaidé en faveur d’une consultation officielle des associations syndicales nationales et internationales. Henri Massé, président de la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec, a fait valoir que cette solution permettrait au Canada de sortir des sentiers battus en montrant qu’il favorise la participation de ses citoyens et des représentants de ces derniers. Des représentants d’ONG ont expliqué comment ils avaient maintenant régulièrement accès, à titre d’observateurs officiels notamment, aux organismes et conférences des Nations Unies. Gordon Smith, ancien sous-ministre et sherpa du MAECI, actuellement responsable du Centre for Global Studies de l’Université de Victoria, a félicité les membres du Comité d’avoir posé des questions critiques au sujet de la gouvernance future et il s’est reporté à plusieurs rapports de son centre, selon lequel il fallait se tourner vers les meilleures pratiques pour accroître la transparence, la participation et l’imputabilité au niveau des institutions internationales179. Il a également suggéré d’envisager des moyens novateurs pour associer un plus grand nombre d’acteurs non étatiques, tout en débordant du cadre des élites (dont celles des organisations de la société civile). À son avis, le Canada était un « leader naturel dans ce domaine », ce qui n’était pas nécessairement le cas des États-Unis. Il devait ajouter : « Je crois que comme cela est déjà arrivé au cours de notre histoire, nous avons ici l’occasion de jouer un rôle prépondérant, et j’espère que nous le ferons180 ». (Traduction)

        Le Comité partage cette opinion, compte tenu de la tradition de diplomatie multilatérale que possède le Canada, et il est confiant que son ex-président, M. Bill Graham, sous la direction de qui cette étude a débuté et qui agit maintenant comme ministre des Affaires étrangères, abondera dans le même sens. John Kirton a indiqué dans son témoignage à Toronto le 7 mai que les ministres des Affaires étrangères du G8 devraient se réunir au moins aussi fréquemment que les ministres des Finances du G7, ce qui donnerait la possibilité au Canada de profiter d’une tribune supplémentaire pour exercer son leadership international dans les dossiers d’actualité urgents comme la crise au Moyen-Orient. En tant que principal expert du Canada pour les questions liées au G8, le professeur Kirton a proposé également au Comité un menu utile que pourrait examiner le G8 avant le Sommet de Kananaskis et subséquemment. Il suggère entre autres ce qui suit181 :

  • concevoir une stratégie d’information coordonnée et améliorée qui reconnaît que la « transparence est un devoir de base de la démocratie »;

  • informer le public au moyen d’outils de sensibilisation multilingues et profiter des avantages des médias électroniques;

  • associer les parlementaires (voir ci-dessous pour plus de détails);

  • créer des centres d’études et des programmes de bourses du G8;

  • utiliser à meilleur escient la couverture médiatique des sommets182;

  • à la fin des sommets, présenter des communiqués clairs et compréhensibles pour le commun des mortels, en y intégrant des objectifs tangibles assortis d’échéanciers précis, et faire preuve de franchise quant à la réalisation des promesses antérieures et aux nouveaux engagements;

  • associer la société civile aux processus entourant les sommets.

        En ce qui a trait au dernier ingrédient essentiel, Kirton prétend qu’un « forum multilatéral de la société civile, dirigé par des parlementaires, pourrait siéger en même temps que les dirigeants. Il serait également possible de l’organiser avec un minimum de chevauchement juste avant et au début du sommet […] Quelle que soit la formule retenue, un tel forum donnerait aux médias et aux dirigeants qui s’intéressent au point de vue de la société civile la possibilité les uns d’écrire des articles et les autres de faire des commentaires sur autre chose que les slogans scandés par la foule des manifestants. Dans le cadre de cette innovation, il serait important que tous les dirigeants du G8, plutôt que le chef de gouvernement du pays hôte ou d’autres qui le souhaitent, s’entretiennent collectivement avec les leaders du forum de la société civile ».

        De fait, immédiatement avant le Sommet de Kananaskis se tiendra un « Sommet du Peuple » parallèle sur le campus de l’Université de Calgary, sous les auspices du « G6B » ou « Groupe des 6 milliards »183. Amnistie internationale a signalé dans son mémoire que des recommandations sont formulées par le truchement du G6B dans divers champs de la gouvernance mondiale et a demandé au Comité de « faire des pressions sur le gouvernement canadien afin de trouver une manière de présenter au sommet officiel les recommandations définitives du G6B, de même que les autres points de vue exprimés par les membres de la société civile alors réunis »184. (Traduction) Lors des audiences tenues subséquemment par le Comité à Calgary, Randy Rudolph, coprésident de la séance sur l’éducation à la conférence du G6B, a indiqué que des discussions avaient lieu avec l’ambassadeur Fowler afin de trouver un mécanisme pour lui présenter leurs observations, les résumés de leur conférence et leurs recommandations et qu’il voyait des signes encourageants lui permettant de croire que ceux-ci seraient intégrés au processus même du Sommet185.

        Finalement, le Comité constate que le point de vue de la société civile doit d’abord et avant tout être exprimé par l’entremise des représentants dûment élus. Comme nous l’a mentionné l’éminent spécialiste des relations internationales Joseph Nye, bien que d’autres formes de démocraties mondiales puissent naître dans l’avenir, à ce stade au sein des démocraties politiques nationales : « Les parlementaires sont les représentants élus du peuple. À mon avis, les mettre en contact plus fréquemment avec d’autres représentants élus à l’échelle internationale constitue la première étape importante à franchir pour réduire le déficit démocratique. Je suis en faveur des ONG, elles font beaucoup de bonnes choses, mais elles ne remplacent pas les parlementaires élus186 ».

        John Kirton soutient que l’heure est venue pour la démocratie parlementaire de prendre place au G8 : « Comme le Sommet des Amériques et le système du G7/G8 constituent, pour le Canada et les États-Unis, les seules institutions internationales vraiment centrées sur des sommets institutionnalisés plurilatéraux auxquels participent des dirigeants démocratiquement élus, il est clair que le G8 devrait suivre l’exemple des Amériques en associant les parlementaires à son processus d’une manière organisée ». À son avis, « Le dossier du G8 occupe cependant une place assez importante dans l’esprit de l’électeur moyen pour qu’il soit temps d’établir un Groupe interparlementaire du G8 ».

        Faisant référence aux audiences nationales tenues par le Comité en 1999, avant la conférence de Seattle, concernant le programme de l’OMC — à l’égard duquel le Comité a récemment renouvelé sa demande, après Doha, en faveur de la création d’un « mécanisme parlementaire permanent de l’OMC187 » — laquelle figure maintenant à l’ordre du jour du Sommet du G8 cette année, le professeur Kirton suggère d’encourager des efforts parallèles dans d’autres pays du G8 et de mettre en commun les résultats (comme le présent rapport) à une réunion interparlementaire du G8, puis de les transmettre au moment opportun aux dirigeants, avant la tenue des futurs sommets. De l’avis de M. Kirton, cela demeurerait possible jusqu’à la veille de Kananaskis. Il propose que le Canada tienne une réunion interparlementaire inaugurale du G8 et que la réunion des présidents des assemblées législatives du G8 qui doit se dérouler en septembre 2002 au Canada serve pour « lancer ce nouveau Groupe interparlementaire du G8188 ».

        Le Comité convient d’emblée que l’apport de la société civile, y inclus les parlementaires, dans les processus délibératifs et décisionnels du G8, doit devenir non seulement un élément permanent de ces ententes de gouvernance internationale, mais doit se concrétiser d’une manière imaginative, accessible et viable qui soit propice à une participation pacifique et productive des citoyens et de leurs représentants élus. On pourrait notamment envisager de recourir aux technologies des communications interactives de plus en plus répandues en vue de créer, par exemple, un « Forum virtuel » et/ou un « Parlement virtuel » du G8 destiné à la population. Le Comité ne prétend pas posséder toutes les réponses, mais les dirigeants du G8 se doivent d’analyser les possibilités de changements plus fondamentaux. L’ouverture plus grande du G8 exigerait évidemment certaines dépenses, mais elles ne seraient certainement pas de l’ordre de centaines de millions de dollars. De plus, en innovant de la sorte pour le bénéfice de la démocratie, on pourrait au fil du temps contrer ce phénomène qui ne vise qu’à mettre en lumière, de manière improductive, des événements prestigieux de courte durée auxquels ne participent que des dirigeants et qui sont de plus en plus coûteux et contestés, sans compter qu’ils suscitent une véritable obsession pour la sécurité et qu’ils risquent de crouler sous le poids de leurs propres impératifs et appréhensions liés à leur gestion.

        Bref, le moment est venu pour le G8 d’envisager comment il pourrait mettre de l’ordre dans ses affaires avec le grand public, non seulement pour assurer son propre avenir en tant qu’instrument de gouvernance multilatérale valable pouvant fonctionner de façon démocratique et transparente, mais aussi pour progresser concrètement en vue d’atteindre les objectifs collectifs des politiques publiques — pour le bénéfice de ses citoyens, de ceux et de celles qui vivent dans des régions moins favorisées, en Afrique en particulier — et surtout finalement, pour léguer un monde meilleur aux enfants de l’avenir.

Recommandation 20

Le Canada devrait proposer aux dirigeants du Sommet du G8 qui aura lieu à Kananaskis de constituer un groupe de travail sur la réforme du G8, lequel analyserait des options pour élargir l’accès public démocratique tout en réduisant les coûts des sommets et formulerait des recommandations en vue d’interventions pouvant être faites avant le prochain sommet. Ce groupe devrait s’attarder particulièrement à améliorer la transparence et les communications du G8; accroître la participation des parlementaires et des acteurs non étatiques; mesurer l’efficacité en fonction du rendement réel; revenir au point de départ à la recommandation 1, en offrant un mécanisme permettant de rendre des comptes régulièrement à la population quant aux résultats des sommets.

En outre, le Comité prie instamment le gouvernement d’appuyer la tenue d’une réunion inaugurale des parlementaires du G8 pour le Sommet de Kananaskis, laquelle déboucherait ensuite sur la création d’un groupe interparlementaire du G8 qui serait invité à formuler directement ses recommandations aux futurs sommets.


174    Cité dans John Kirton, « Devinez qui vient à Kananaskis La société civile et le G8 dans l’année de présidence du Canada »,
            International Journal, hiver 2001-2002, document traduit pour le Comité.

175    Extrait d’un article rédigé pour la publication International Journal et soumis au Comité par M. Kirton avant qu’il ne lui
            présente son témoignage à Toronto, le 8 mai 2002.

176      Ibid.

177     Un nouveau rapport des Réseaux canadiens de recherche en politiques publiques qui fait état d’un malaise au sujet de l’état
            actuel des consultations publiques sur les politiques fédérales est révélateur à cet égard. Voir Susan Phillips et Michael Orsini,
            Mapping the Links : Citizen Involvement in Policy Processes, Document de recherche no F21, publié le 24 mai 2002 et disponible
            à l’adresse http://www.cprn.org.

178     Mémoire, « Guess who is coming to Kananaskis », p. 104.

179     Rethinking GovernanceHandbook: An Inventory of Ideas to Enhance Accountability, Participation, and Transparency, Centre
             for Global Studies de l’Université de Victoria, n.d.; rapport de la 2020 Global Architecture Conference, Victoria (C.-B.), août 2001.

180     Témoignages, 7 mai 2002, réunion no 78, Vancouver, 11 h 10.

181    Mémoire, « Devinez qui vient à Kananaskis? », passim.

182     Desirée McGraw, associée du Groupe de recherche du G8, a indiqué ce qui suit dans son mémoire présenté à Montréal le
            17 février 2002 : « Étant donné que les représentants de la presse n’ont pas accès directement aux délégués gouvernementaux lors
            des réunions du G8/G20, ils doivent se fier au contenu bien ficelé des conférences de presse et des communiqués. De plus, cet accès
            direct déficient les porte à se tourner à l’extérieur du sommet officiel pour obtenir des entrevues et des images, ce qui renforce, voire
            exagère, le rôle des protestataires. Cette approche biaisée, imputable à l’actuelle structure de la plupart des sommets économiques,
            n’aide en rien à relever la qualité des discussions sur la mondialisation dans le grand public », p. 2. (Traduction)

183     Pour plus d’information sur la conférence du G6B qui aura lieu du 21 au 25 juin, consultez http://www.peaceandhumanrights.org

184     Mémoire, 4 avril 2002.

185     Témoignages, 8 mai 2002, réunion no 80, Calgary, 10 h 30.

186     Témoignages, 2 mai 2002, réunion no  74, Ottawa, 10 h 55.

187     Rapport du Comité intitulé Pour un nouveau cycle de négociations efficace : Les grands enjeux du Canada à l’OMC,
            mai 2002, 26e recommandation, p. xix et p. 85ff.

188     Mémoire,« Devinez qui vient à Kananaskis? », p. 11.