Passer au contenu

NDVA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain

STANDING COMMITTEE ON NATIONAL DEFENCE AND VETERANS AFFAIRS

COMITÉ PERMANENT DE LA DÉFENSE NATIONALE ET DES ANCIENS COMBATTANTS

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 5 mai 1998

• 1803

[Traduction]

Le président (M. Robert Bertrand (Pontiac—Gatineau—Labelle, Lib.)): Bonjour, mesdames et messieurs. Soyez les bienvenus à notre séance de discussion ouverte.

Comme vous le savez probablement, le Comité permanent de la défense nationale et des affaires des anciens combattants parcourt le pays pour aller rendre visite à différentes bases afin de discuter avec les militaires et leurs conjoints de la manière d'améliorer la qualité de vie dans l'armée. C'est la raison pour laquelle nous sommes à Goose Bay ce soir. Nous sommes venus pour vous entendre.

Nous avons une liste de témoins. Le premier est M. Terry Quinn.

• 1805

Peut-être pourrions-nous commencer par présenter les différents membres du comité; d'abord monsieur Pratt.

M. David Pratt (Nepean—Carleton, Lib.): Merci, monsieur le président. Je m'appelle David Pratt. Je suis député de Nepean—Carleton, juste en dehors d'Ottawa. Je suis membre du comité de la défense depuis septembre dernier, et j'ai été élu en juin 1997.

M. Hec Clouthier (Renfrew—Nipissing—Pembroke, Lib.): Je m'appelle Hec Clouthier, je suis député de Renfrew—Nipissing—Pembroke, circonscription dans laquelle se trouve la BFC Petawawa.

Mme Judi Longfield (Whitby—Ajax, Lib.): Je m'appelle Judi Longfield. Je suis députée libérale de Whitby—Ajax, qui se trouve juste à l'est de l'agglomération torontoise, et je fais partie du comité depuis septembre 1997.

M. Lawrence D. O'Brien (Labrador, Lib.): Merci, monsieur le président. Je tiens à me présenter moi-même cette fois-ci. Je m'appelle Lawrence O'Brien; la plupart d'entre vous me connaissent sans doute.

Une voix: Je vous connais.

M. Lawrence O'Brien: Vous me connaissez? Vous voyez.

Je ne suis pas membre titulaire du comité, mais j'ai tenu à me joindre à lui pour ce voyage à Goose Bay.

M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est, Réf.): Je m'appelle Art Hanger, je suis critique du Parti réformiste pour les questions de défense, et ma circonscription est Calgary Nord-Est.

M. Leon E. Benoit (Lakeland, Réf.): Je m'appelle Leon Benoit, député de la circonscription de Lakeland en Alberta. Je suis aussi critique adjoint de mon parti pour les questions de défense.

M. David Price (Compton—Stanstead, PC): Je m'appelle David Price, je suis député progressiste-conservateur de Compton—Stanstead, et également critique pour les questions de défense.

[Français]

M. Ghislain Lebel (Chambly, BQ): Je m'appelle Ghislain Lebel et je suis député de Chambly, sur la rive sud de Montréal.

[Traduction]

Le président: Et je m'appelle Robert Bertrand. Ma circonscription est celle de Pontiac—Gatineau—Labelle et je suis président du CPDNAC.

Comme je l'ai dit, nous allons entendre 11 témoins, et si d'autres personnes souhaitent également intervenir, nous les invitons à donner leur nom à Michel de manière à qu'il m'en fournisse la liste et que je puisse les appeler.

Commençons tout de suite par monsieur Terry Quinn.

M. Terry Quinn (président, Union des employés de la Défense nationale): C'est un peu regrettable que je n'aie pas les avantages de ceux qui m'ont précédé, car je serais mieux préparé, mais je suppose que c'est ça la vie politique.

En tout cas, notre union est presque à bout de souffle. J'en suis le président, et bientôt l'ancien président, car nous allons avoir de nouvelles élections. C'est la première fois que je prends la parole devant un comité tel que le vôtre. Le fait qu'il se trouve ici aujourd'hui ne manque pas de sel. C'est un peu comme si l'on fermait les portes de l'écurie après que les chevaux se soient enfuis. J'espère que votre comité sera un peu plus efficace en ce qui concerne les anciens combattants qu'il ne l'a été pour la défense, car j'estime que vous n'avez pratiquement rien fait, et je vous le dis très carrément.

Pour revenir à la question qui nous préoccupe, en tant que syndicaliste, je considère la situation dans laquelle le gouvernement libéral nous place, et je la compare avec celle qui avait été créée par le gouvernement conservateur. Je ne vois pas grande différence; vous nous avez utilisés comme cobaye. Nous sommes la base cobaye pour l'ensemble du pays. J'ai une opinion tout à fait personnelle sur la question, et elle est assez peu flatteuse, mais je laisserai cela de côté pour le moment.

Je voudrais vous parler de quelques-uns des commentaires que j'ai entendus faire aujourd'hui par les représentants de la ville et de la Chambre de commerce. À mon avis, la municipalité manque un peu de franchise. D'un côté, elle nous dit qu'elle voudrait que nos gens restent ici, elle voudrait qu'ils conservent leur emploi ici; elle veut des tas de choses; il n'en reste pas moins qu'elle vous a dit qu'elle voulait que des gens d'autres pays viennent ici. Peu importe de quelle façon; la ville veut que ces étrangers viennent à nos frais, aux frais des travailleurs civils de cette base, puisque nous avons perdu nos emplois.

Nous avons perdu notre gagne-pain, et qu'obtenons-nous en retour? Rien du tout. Aucune aide de quelque parti politique que ce soit. Cette fois-ci, ce n'est pas aux libéraux que je m'en prends; je m'en prends à vous tous, car vous êtes tous responsables. À notre connaissance, aucun d'entre vous n'est intervenu à la Chambre pour essayer de nous défendre. Le NPD a fait quelques commentaires et Lawrence n'a pas pu intervenir parce qu'il était malade. Quant à savoir s'il aurait pris notre défense à la Chambre comme il l'avait fait alors qu'il était encore malade, je n'en sais rien. Je suis cependant convaincu qu'il l'aurait fait. Cela lui aurait peut- être valu quelques ennuis et une petite réprimande de la part de son gouvernement.

• 1810

Revenons au sujet. Nous avons perdu énormément de monde. Nous avons perdu beaucoup sur le plan du revenu. Nous avons perdu le soutien des membres d'une collectivité qui ne s'intéresse plus à nous.

Les membres de cette collectivité ont prospéré—c'est ce qu'ont dit les témoins que vous avez entendus—et ils ont contribué à la prospérité de la collectivité parce qu'ils sont attachés à celle-ci. Ils veulent rester ici. Ils veulent continuer à jouir de la vie ici. Mais comment pourrions-nous apprécier une telle décision de notre grand gouvernement. Je l'ai déjà dit et je le répète, nous avons affaire à un gouvernement communiste car c'est un dictateur que nous avons à Ottawa. Je n'hésite pas non plus à le dire mais ça me fait de la peine de devoir le faire.

Nous avons à Ottawa un ministre de notre province de Terre- Neuve qui va se cacher dès qu'il y a une controverse. À la moindre alerte, il disparaît. Je crois que l'affaire de la LSPA le montre assez clairement, même s'il a déclaré à Gander qu'il avait fait des pieds et des mains pour régler cette question.

Libre à lui de le dire, mais si c'est comme cela qu'il travaille, il est permis de se poser des questions sur le reste des politiciens de notre pays. Je ne pense cependant pas que ces derniers agissent de la même façon que lui. Il peut aller se terrer quelque part en attendant le bon moment pour faire sa réapparition ou en attendant que quelqu'un le sorte de sa cachette à coups de pied dans le derrière—si je puis m'exprimer ainsi—pour l'obliger à dire quelque chose.

C'était assez évident lorsque nous sommes allés à Ottawa. Nous avions constitué une délégation qui a rencontré le ministre de la Défense à Ottawa. J'en faisais partie en tant que président de l'union; les autres membres de la délégation étaient le président de la Chambre de commerce et un des conseillers, des députés à la Chambre d'assemblée provinciale, des ministres. Le ministre a donc bien voulu nous rencontrer et je l'en remercie. Il a écouté ce que nous avions à dire. Beaucoup de gens ont l'impression que les politiciens n'ont rien dans la tête. Apparemment, le ministre n'a rien retenu; cela a dû rentrer par une oreille et sortir par l'autre.

J'espère que ce ne sera pas la même chose ici. Mais il me semble que ce que les partis disent au sujet de la fonction publique et du ministère de la Défense lui-même... Il faut lire entre les lignes; c'est ce que nous faisons.

Le gouvernement fédéral actuel crucifie les membres de la fonction publique. Nous savons que s'il s'agissait d'un gouvernement conservateur, il se passerait la même chose. Nous savons que si c'était un gouvernement réformiste, il en ferait de même. Quant au NPD, il ménage la chèvre et le chou. Voilà comment nous voyons les choses. On nous crucifie.

Pourquoi? Parce qu'il y a un déficit. D'accord, il y a un déficit, mais attaquons-nous à lui comme il faut. Si nous voulons faire des économies—c'est le fondement du processus du DMPS—débarrassons-nous du Sénat. Les pensionnés qui le composent sont grassement payés. Ils sont nommés par les gouvernements du moment, mais que font-ils exactement? Absolument rien. Ils se contentent de faire les poches des contribuables tels que moi et tous ceux qui sont ici.

Est-ce pour pouvoir augmenter encore les sénateurs et les gens comme vous que nous voulons faire des économies? Je ne le crois pas, mais c'est bien l'impression que cela donne. C'est comme cela que l'on nous traite.

Lorsque nous avons rencontré Eggleton, il nous a dit qu'il prendrait note de nos préoccupations. On m'avait cependant mis en grande avant la rencontre, et je vais vous dire tout de suite de quoi il s'agit. Ce qu'il faut, c'est une enquête. Le processus du DMPS a besoin d'être soumis à une enquête. Il n'a pas besoin d'une étude ou d'un examen, il a besoin d'une enquête. Je sais que vous autres politiciens avez horreur de ce mot. Je le sais pertinemment. Mais je tiens à déclarer officiellement que c'est ce qu'il faut faire pour régler la question et éviter que la situation ne se reproduise.

Il est très regrettable que cette collectivité serve de cobaye pour ce processus, mais ce sont des choses qui arrivent. Et quels remerciements recevons-nous? Une réduction de 20 ou 30 p. 100 des salaires; la perte de toutes nos prestations; nos congés de maladie et tout le reste; nous pouvons dire adieu à tout cela car vous nous êtes en train de nous l'enlever.

Voilà à quoi nous devons faire face. Nous avons perdu notre gagne-pain. Nous avons tout perdu. Je ne vois pas quel résultat le comité espère obtenir en venant ici aujourd'hui, car c'est fini. Nous sommes allés trop loin.

C'est l'an dernier que vous auriez dû venir. Vous auriez dû être ici lorsque vous avez créé le DMPS; vous saviez que le processus serait mis en oeuvre. Vous saviez que cette base serait clouée au pilori. C'est une base qui rapporte de l'argent, et pourtant, on nous crucifie. Mais où étiez-vous à ce moment-là. «Oh, disiez-vous, nous sommes obligés d'aller rendre visite à une autre base ou d'aller dans une autre région du pays. C'est plus important.» Pourtant, là-bas, la situation n'est pas comparable à la nôtre.

• 1815

Je ne m'en prends pas aux autres bases. Elles méritent d'être traitées comme nous méritons nous-mêmes de l'être, et j'espère pour elles qu'elles ne seront pas soumises au même processus. Je le dis franchement. De plus en plus de gens quittent cette collectivité. Où vont-ils? Ils vont dans d'autres bases qui seront soumises un peu plus tard au même processus. Est-ce ce que nous voulons? Je ne le pense pas.

Je sais que les fonctionnaires ne le veulent pas, mais que veulent les politiciens? Veulent-ils me punir encore un peu plus? Vous l'avez déjà fait. Pas de problème, je suis un grand garçon; mais combien de fois devrez-vous recommencer pour que je me transforme en petit garçon prêt à s'abaisser devant vous?

Je vais vous dire une chose: Jamais je ne voterai pour quelqu'un qui m'a fait perdre mon emploi. Je le dis en présence de Lawrence, et je n'hésite pas à le lui dire directement à lui aussi. Je savais que son gouvernement voulait me voler mon emploi et je ne voterai donc pas pour Lawrence, bien que ce soit un ami. Je le connais personnellement. Mais cela ne veut pas dire que je voterai pour lui, je vous le dis très franchement. Ceux qui veulent me prendre mon emploi n'auront jamais mon vote.

La même chose s'est passée avec le Parti conservateur. Il nous a annoncé qu'il allait également faire des coupures. Vous pourrez présenter autant de candidats conservateurs que vous le voulez ici. Jamais vous n'obtiendrez mon soutien. Et je n'hésiterai pas à le dire à tous les autres électeurs de ce district. Je leur dirai la même chose. Bien sûr, vous avez les jusqu'au-boutistes. Vous avez des gens qui ne voient pas la différence et qui disent, «Après tout, il est gentil.» Il est gentil même si son gouvernement est prêt à vous prendre votre emploi? Je sais que Lawrence n'est pas comme ça. Il l'a prouvé. Mais voilà le genre de gouvernement auquel nous avons affaire, et voilà ce qu'est le DMPS.

D'après ce qu'on m'a dit, nous avions nos chances. Nous avions des gens dans ce comité que cela préoccupait, mais ce n'étaient pas des syndiqués, en tout cas pas vraiment, parce qu'ils avaient été désignés par la direction.

Il y a quatre ou cinq ans, nous avons vécu un processus mis en place par Ottawa. Le gouvernement voulait une réduction de 25 p. 100 pour cette base. Croyez-moi, une réduction de 25 p. 100 ici ou pour n'importe quelle autre, ce n'est pas rien. Ce qu'il a décidé, c'est de demander à la direction de poser la question suivante au syndicat, «Voudriez-vous participer à ce processus?» Nous l'avons fait avec une certaine réticence, et les résultats ont été phénoménaux. Nous avons économisé plus de 25 p. 100 sans perdre un seul emploi. Si on nous avait demandé la même chose cette fois- ci...

Pour revenir à Eggleton, celui-ci a déclaré que nous aurions agi par l'intermédiaire de l'équipe interne chargée de faire une offre. Mais nous n'avons pas pu le faire. C'était impossible.

Pour revenir au sujet, si on nous avait demandé de réduire les dépenses ou de réaliser des économies, on aurait pu le faire dans le cadre du processus sans perdre d'emplois, ou du moins, en en perdant un minimum, mais pas autant que cela risque de se produire maintenant.

À la fin du processus, tout le monde a perdu son emploi, après quoi, il a fallu reposer sa candidature mais à condition d'accepter un salaire réduit. Est-ce cela la justice? Est-ce cela la démocratie? Je ne le crois pas. Mais après tout, je ne suis qu'un modeste électeur; je ne suis pas un homme politique. Étant donné les circonstances, je me sens très mal à l'aise de m'adresser à un groupe de politiciens.

À mon avis, ce que fait ce comité est un pur gaspillage de temps. Je trouve cela très frustrant. Cela m'a même paru encore plus frustrant tout à l'heure, lorsque j'écoutais le témoignage des représentants de la ville et de la chambre de commerce.

Vous êtes membres de ce comité, mais vous ne nous écoutez pas. «Eh, qu'est-ce qu'on va faire ce soir après que ce sera terminé? On ira prendre une bière?» Il y a quelqu'un qui parle, mais pendant ce temps-là, il y a en a deux ou trois, d'un côté ou de l'autre, qui bavardent eux aussi. Ils n'écoutent pas ce que dit le témoin. Voilà l'impression qu'ils donnent.

C'est ça, votre comité? J'espère que non. Si un témoin parle, ayez au moins la courtoisie de l'écouter. Ne tenez pas un petit conciliabule pour essayer de savoir ce qui va se passer plus tard ce soir, ce que vous avez l'intention de faire. Si c'est ainsi que les politiciens se comportent...

• 1820

Je l'ai vu. Je regarde la télévision, moi aussi, et je vois ce que font les politiciens. Pendant qu'une personne parle, il y en a cinq ou six derrière qui bavardent ou qui lisent le journal. Ils se moquent totalement de ce qui se passe.

Voilà la politique. Il n'y a pas à dire, vous faites des merveilles. Vous dirigez le pays avec les résultats que l'on sait. Nous nous endettons, mais pendant ce temps-là, il y a des politiciens qui gagnent gros à lire le journal. Ils se moquent de ce qui se dit. Encore un petit effort, et ils auront peut-être droit à un siège au Sénat.

Moi aussi, je devrais peut-être essayer d'obtenir un siège au Sénat. Je ne connais pas les salaires et je ne sais pas ce que sont les exigences, mais je suis sûr d'être capable de me montrer aussi intelligent qu'eux—je n'utiliserai pas le mot qui me vient à l'esprit—que certains des sénateurs actuels. Je sais que je suis aussi intelligent, sinon plus, que celui qui représente notre région.

Mais il est là par la grâce de Dieu, et ce sont les habitants de cette circonscription qui continuent à voter pour lui. C'est la vie. Les gens finiront bien par apprendre qu'il y a autre chose dans l'existence que d'être un libéral, un conservateur, un réformiste ou un NPD, mais peut-être apprendront-ils également qu'en fait, ce sont tous des communistes? Qui sait?

Revenons au sujet et à la manière dont nous allons régler la situation. Est-il possible de revenir sur la décision? Non.

Je travaille encore ici, mais je suis sur le point de partir. Serco prend progressivement la relève, ce qui est normal. Pourquoi, en effet, Serco ne prendrait-il pas le contrôle en douceur, semaine après semaine, jusqu'à ce qu'il ait l'affaire bien en main?

Chaque fois que Serco fait traîner les choses, ses gens nous disent, «Nous ne sommes pas prêts. Nous ne sommes pas certains de ce que nous devrions faire ici. Eh, les gars, pourrions-nous avoir deux semaines de plus? Pourrions-nous avoir un mois de plus?»

Voilà le processus de prise de contrôle que nous vivons. Quel genre d'existence pensez-vous que peuvent avoir les gens qui vont continuer à travailler sur la base? Ils sont obligés de subir le processus et disent, «Je voudrais bien qu'ils se dépêchent de prendre le contrôle pour que nous puissions savoir quoi faire ensuite.» Et en face d'eux, vous avez ceux qui travaillent pour Serco et qui disent, «Je voudrais bien qu'ils se décident et qu'ils nous disent ce que nous sommes censés faire ici, car nous n'en avons pas la moindre idée.» Personne ne veut prendre de décision, si bien que ces gens-là ne savent pas ce qu'ils doivent faire d'un jour à l'autre ou s'il faut qu'ils attendent deux semaines de plus pour qu'on leur donne le feu vert.

Voilà la situation dans laquelle nous nous trouvons. Cela crée des tensions incroyables. Les politiciens que vous êtes connaissent sans doute un peu de stress le jour des élections, lorsqu'ils ne savent pas encore s'ils vont être élus, mais c'est le seul moment où ils sont stressés.

En ce moment même, tous les membres de cette collectivité sont plus ou moins tendus, certains plus que d'autres. Je l'ai moi-même été. En tant que président de la section locale, j'ai trouvé extrêmement difficile d'essayer de régler les problèmes que les gens me présentent et auxquels je suis incapable de trouver une solution. C'est vous qui êtes responsables, mais c'est à moi que l'on demande une réponse.

Je fais de mon mieux pour leur en donner une; il se peut même que je trouve une solution, mais je ne reste pas passif. J'essaie sans relâche jusqu'à ce que j'aie épuisé toutes les possibilités, et je leur dis alors, écoutez, quand vous parlez à un politicien, autant parler à un mur; le résultat est le même.

Voilà le genre de stress auquel les membres de cette collectivité sont soumis. Ce sont des personnes qui travaillent directement pour la base. Ce sont des syndiqués. Ils ont perdu leur emploi, leur gagne-pain. Certains d'entre eux vont perdre leur logement.

Je suis très fier de pouvoir dire que nous n'avons encore perdu personne—je dis bien «encore». Je m'attendais à un ou deux suicides au moins. C'est dur de l'avouer, mais je crois qu'en agissant ainsi, le gouvernement leur a littéralement porté le coup de grâce.

Il y a là des gens qui ont été obligés de rentrer chez eux et de dire à leurs femmes et à leurs enfants, «Non, Serco ne m'a pas offert d'emploi».

«Qu'allons-nous faire? Nous arrivons déjà à peine à nous en sortir. Comment allons-nous vivre?»

«Je n'en sais rien, ma chérie. Tout ce qu'on peut faire, c'est de continuer à réfléchir et à évaluer toutes les possibilités.»

«Oh, on va nous verser un pécule. Formidable, on va nous verser un pécule, combien de temps penses-tu qu'il va durer?»

«Je n'en sais rien, ma chérie. Lorsque nous payons des impôts au gouvernement, avec le peu d'argent que nous avons investi dans notre REÉR et les quelques sous que nous avons pu mettre de côté, nous réussirons peut-être à tenir trois mois. C'est déjà ça.»

• 1825

Et après? Il y a toujours le bien-être social. On peut au moins compter sur le gouvernement pour ça. C'est cela que vous voulez? Vous voulez que tous les gens deviennent des assistés sociaux? C'est bien l'impression qu'on nous a donnée.

En tout cas, nos plaintes semblent bien être tombées dans l'oreille d'un sourd. Comme je viens de le dire, nous avons rencontré Eggleton qui nous a dit qu'il étudierait personnellement la question. Je lui accorde le bénéfice du doute. Il a fait deux ou trois voyages à l'étranger, mais, à l'en croire, il a trouvé le temps de se pencher sur la question. Il nous a donc fait une offre, en précisant bien que c'était la dernière.

Si l'on en juge d'après les propos de notre illustre premier ministre provincial cités dans le journal, si la contre-proposition du ministre fédéral n'était pas satisfaisante, il irait en parler personnellement au premier ministre. Étant donné que la contre- proposition de M. Eggleton n'était pas satisfaisante, on pourrait penser que c'est ce qui s'est effectivement passé. Bien entendu, il n'en a rien fait. Notre Jeannot tient les rênes du pouvoir mais peut-être qu'il les abandonnera un jour et c'est lui qui deviendra premier ministre.

À Dieu ne plaise. Il ne fait pas grand-chose pour la province, imaginez ce qu'il serait capable de faire pour l'ensemble du pays. On frémit rien que d'y penser.

Il a eu le culot de dire que nous devrions être bien contents de ce que nous avons obtenu. Nous devrions remercier notre bonne étoile.

Voilà un homme qui a grandi dans cette collectivité. Il sait parfaitement de quoi il ressort car il a quitté Stephenville lorsque la base a fermé. J'ai moi-même des doutes à ce sujet. Je crois qu'il était ici bien avant et qu'il a vécu cette situation lorsque les Américains sont partis. C'est une situation qui n'a rien de nouveau pour lui. Pourtant, il ne manifeste pas la moindre compassion.

Nous avons aussi un sénateur et un ministre fédéral qui se comportent de la même manière. Nous avons un sénateur qui a assisté à notre rencontre à Ottawa. Qu'a-t-il dit? «Art, vous ne pouvez pas laisser faire. Ne croyez pas que vous allez vous en sortir, cela ne marchera jamais. Il faut faire quelque chose. Il faut trouver une meilleure solution. Nous ne pouvons pas accepter que l'on fasse cela aux habitants du Labrador.»

Cette crapule qui était responsable de la situation avait le culot d'être assis en face de moi. Je ne sais pas si quelqu'un m'avait cloué les pieds au plancher, mais j'étais très tenté de contourner la table pour aller lui mettre la main sur la figure car il ne croyait pas un seul mot à ce qu'il disait. Je ne plaisante pas. Il n'en croyait pas un mot.

Je suis certain qu'après la rencontre, Art, Freddy et lui ont bien ri à nos dépens.

Quant à Freddy, il est arrivé alors que les trois quarts de la réunion étaient déjà passés. Qu'a-t-il dit? «Mon Dieu, Art»...

Le président: Monsieur Quinn, avez-vous presque terminé?

M. Terry Quinn: Je ne savais pas qu'il y avait une limite de temps, monsieur.

Le président: Non, il n'y en a pas, mais nous avons pas mal de témoins à entendre.

M. Terry Quinn: Je suis arrivé à 17 heures et j'étais près à parler jusqu'à 18 heures, mais on m'a dit de revenir à 19 heures.

Le président: Nous réservons habituellement 20 minutes à un exposé, et vous avez dépassé ces 20 minutes. Nous en sommes déjà à la période de questions.

M. Terry Quinn: D'accord. Je m'en tiendrai là. Cela confirme simplement ce que j'ai dit tout à l'heure, vous ne voulez pas nous écouter. Vous vous moquez de ce que les syndiqués ont à dire. Vous vous moquez des effets que tout cela a sur eux. Vous fixez à la limite qui vous plaît. Très bien, d'accord.

Le président: Non, si vous avez d'autres observations à faire... Je vous signalais simplement que nous accordons habituellement 20 minutes pour un exposé, mais si vous avez d'autres remarques à faire, faites-les; nous passerons ensuite aux questions car je sais que certains députés en ont à vous poser.

M. Terry Quinn: Non, cela suffit, monsieur. Je n'ai aucune envie de me retrouver dans ce genre de situation. Si quelqu'un veut que je me taise, très bien, je me tairai. Pas de problème.

Le président: Vous ne voulez pas répondre aux questions?

M. Terry Quinn: J'essayerai de le faire.

Le président: Nous voudrions simplement que cela soit inscrit au compte rendu. Pourriez-vous venir au micro?

M. Terry Quinn: Oh, il faut que je me lève et que je serve de cible à quelques attaques? D'accord, allez-y.

Le président: Monsieur Benoit.

M. Leon Benoit: Je peux vous assurer que je n'ai aucune intention de vous attaquer, monsieur Quinn.

Je vous remercie de votre exposé. J'aurais quelques questions à vous poser.

Vous avez dit qu'il y a cinq ans, le gouvernement avait déclaré qu'il faudrait réduire les coûts de 25 p. 100. Vous l'avez fait. Vous avez atteint cet objectif. Vous avez dit que vous vouliez qu'on vous donne une autre chance d'y parvenir. Croyez-vous que vous auriez pu encore une fois obtenir le même résultat?

M. Terry Quinn: Oui, j'en suis convaincu, mais il faudrait auparavant connaître l'importance des réductions exigées. Une réduction de 75 p. 100 serait peut-être difficile à réaliser. Mais si on nous avait demandé une autre réduction de 25 p. 100 par exemple, je suis convaincu que nous en aurions été capables.

• 1830

Je peux vous donner un exemple: l'infrastructure. Prenez cet édifice comme exemple. Je ne sais pas exactement combien sa construction a coûté, mais c'est de l'argent jeté par la fenêtre, car on aurait très bien pu s'en passer et on aurait ainsi réalisé des économies.

J'ai posé la même question à un des lieutenants-colonels qui se trouvaient ici à l'époque. Si nous construisions un édifice de l'autre côté de la rue et qu'on estime ne pas en avoir besoin, pourrait-on arrêter les travaux et économiser l'argent? Le lieutenant-colonel m'a regardé froidement et a dit, «Nous ne construisons pas d'édifices nouveaux.» Je lui ai répondu, «C'est une question purement hypothétique.» Il a dit, «Nous ne construisons pas de nouvel édifice donc, ce serait effectivement possible.»

M. Leon Benoit: Vous ne vouliez pas dire que vous auriez pu fournir des services prévus par le contrat de...

M. Terry Quinn: Rien n'aurait changé. C'eût été exactement la même chose. Nous aurions fourni le service requis; en fait les quatre commandants m'ont dit personnellement qu'ils étaient satisfaits du service et qu'ils étaient ravis de la manière dont les choses se passaient.

M. Leon Benoit: Vous avez dit ensuite que le ministre Eggleton avait déclaré que vous auriez pu utiliser le système d'appels d'offres interne. Mais vous avez déclaré que ce n'était pas possible. Pourriez-vous vous expliquer?

M. Terry Quinn: Je crois que cela a été expliqué un peu plus tôt. Il ne s'agissait pas de ne pas présenter d'appel d'offres. Ce à quoi je faisais allusion, c'était à des économies d'argent. Je lui ai donné l'exemple des 25 p. 100 et il a répondu, vous pourriez faire des économies grâce à l'équipe interne chargée de l'offre. Celle-ci était télécommandée par la direction. La direction avait nommé trois personnes. Il y avait un processus, mais comme des emplois risquaient d'être perdus, le syndicat ne pouvait pas participer, ce qui est l'évidence même pour tous ceux qui savent ce qu'est un syndicat. Lorsque vous risquez de perdre un emploi, vous vous battez pour essayer de le conserver. Dans ce cas particulier, cependant, la direction avait nommé des personnes au comité. Ils s'attendaient à ce que le syndicat déclare, «Nous allons fermer tel ou tel service, ce qui permettra de supprimer 150 emplois, moyennant quoi nous continuerons à travailler à la base.» Ce n'est pas ainsi que les choses se passent.

M. Leon Benoit: Mais la direction vous a demandé de participer au processus d'appel d'offres...

M. Terry Quinn: Oui.

M. Leon Benoit: ...et vous avez carrément décidé que vous ne pouviez pas le faire.

M. Terry Quinn: Comme je l'ai dit tout à l'heure, c'est parce que la politique syndicale veut que lorsque des emplois risquent d'être perdus, vous ne pouvez pas vous permettre d'annoncer froidement à certains qu'ils vont perdre leur emploi et à d'autres qu'ils vont le garder.

M. Leon Benoit: Mais si votre offre était acceptée et qu'elle permettait de sauver un certain nombre d'emplois, ne devriez-vous pas...? N'est-ce pas votre responsabilité de participer?

M. Terry Quinn: Non. S'il s'agit de sauver des emplois, d'accord. Mais s'il s'agit d'en sauver quelques-uns en en sacrifiant d'autres, ce n'est pas notre rôle. C'est pourquoi nous n'entrons pas dans le jeu. À titre d'exemple...

M. Leon Benoit: J'ai vraiment du mal à comprendre. Peut-être quelques emplois auraient-ils été perdus. Je n'en sais rien. Mais si vous deviez en perdre encore plus en ne participant pas, il me semble que vous avez mal misé.

M. Terry Quinn: Supposons que nous ayons une entreprise de 100 personnes et que quelqu'un vienne nous dire, il faut que vous fassiez des économies, mais pour cela, il faudrait sacrifier 25 empois? Qui va choisir ces 25 personnes? Les syndicats vont-ils faire ce travail et dire aux intéressés, voilà la porte, prenez-la? Non. C'est pourquoi nous refusons de participer, car nous ne pouvons être parties à un processus dans lequel on vous dit, nous vous garderons tant que tout marchera bien, mais sans garantie. Ce n'est pas ainsi que fonctionne un syndicat. Un syndicat est là pour protéger tous les travailleurs.

M. Leon Benoit: Combien de vos membres ont-ils trouvé un emploi chez Serco? Quel est, en gros, le pourcentage ou le nombre de...

M. Terry Quinn: En fait, je n'ai pas encore ce chiffre. Je devrais l'obtenir d'ici une quinzaine de jours. À mon avis, le pourcentage est probablement de 60 p. 100 environ, mais je n'en suis pas du tout certain. Même si le pourcentage est plus élevé, ce sont des gens qui ont accepté un emploi moyennant une baisse de salaire. Qu'ont-ils gagné, sinon de pouvoir dire «Au moins, cela me permettra de gagner un peu d'argent»?

M. Leon Benoit: Merci.

Le président: Monsieur Price.

M. David Price: Merci, Terry. Je ne vous poserai pas de question sur l'ensemble de la situation. Je crois qu'avec ce que j'ai moi-même vécu et ce que vous m'avez appris, j'ai une idée assez complète de ce qui se passe.

• 1835

Je voudrais cependant une précision. Vous avez dit que nous n'avions pas posé de questions à la Chambre, c'est faux. Deux jours de suite, j'ai posé deux questions au sujet du DMPS dans le cas qui nous intéresse.

Je voudrais également préciser autre chose, et je n'ai aucune objection à ce que cela soit inscrit au compte rendu. Vous avez dit que le DMPS était... Je sais qu'il a joué un rôle dès le début. J'ai demandé aux responsables de participer avec nous aux journées où on pouvait poser des questions. Nous leur avons demandé à deux reprises et ils nous ont assuré qu'ils participeraient, mais ils en n'ont rien fait. Je tenais à le préciser.

D'autre part, le directeur du programme des DMPS a comparu devant le comité et nous l'avons interrogé sur le processus. Je disposais de dix minutes pour lui poser des questions et j'ai essayé d'obtenir le maximum de renseignements. Tout cela est inscrit au compte rendu. Les réponses sont là, et vous pouvez les consulter.

Certes, ce n'était pas les réponses que nous voulions entendre. Tout ce qu'il a accepté de nous dire, c'est que cela ne se passerait plus jamais de cette façon, ce qui montre bien qu'il y a des problèmes. Cela n'a pas marché comme prévu.

On a également mentionné le nom de SNC-Lavalin. Nous n'avons trouvé aucune trace de dépôt d'offre.

Nous avons donc étudié la question, mais comme je vous l'ai dit au début, le processus était déjà trop engagé pour que nous puissions l'arrêter. Compte tenu de tout ce qui s'est passé, je crois que nous avons réussi à obtenir quelque chose du ministre, grâce à votre propre député ici, qui a exercé de fortes pressions, et grâce aussi, à votre intervention, entre autres choses. Cela a un peu ouvert les yeux du ministre, mais manifestement, il reste encore beaucoup de choses à faire.

Comme je l'ai dit, j'ai vraiment l'impression que vous avez été les cobayes. C'est très regrettable, mais cela aidera peut-être les autres.

M. Terry Quinn: En ce qui concerne les questions posées à la Chambre, les médias n'ont pas précisé qui avait posé des questions et qui n'avait rien dit. C'est cela le plus gros problème.

M. David Price: Malheureusement, c'est un problème quotidien à la Chambre. Cela dépend de ce qui se passe ce jour-là. Certains jours, les sujets de débat n'intéressaient pas du tout les médias. Lorsque quelque chose de beaucoup plus important se produit ce jour-là, on vous oublie complètement.

M. Terry Quinn: Dans une collectivité aussi isolée que la nôtre, nous avons besoin de ce genre d'information à cause des circonstances. Certes, nous vivons dans un vaste pays, et il est probable que nous n'aurions jamais fait les manchettes, mais même si les journaux locaux l'avaient relevé...

M. David Price: J'en accepte la responsabilité. J'aurais probablement dû communiquer mes questions aux journaux locaux, ou vous les envoyer directement.

Merci, monsieur le président.

Le président: Monsieur Hanger.

M. Art Hanger: Merci, monsieur le président.

Merci, monsieur Quinn, de votre exposé.

Je vous crois lorsque vous dites que vous et beaucoup d'autres avez été soumis à de fortes tensions. Il est effectivement stressant d'être obligé de donner satisfaction à ceux que vous représentez. Je comprends que vous fassiez ce genre de commentaires. Je ne suis peut-être pas tout à fait d'accord, avec, mais je comprends que quelque chose de très important est en train de se passer.

Je voudrais des éclaircissements sur une des autres remarques que vous avez faites. Vous avez dit que certains membres bavardaient pendant les témoignages. Ce n'est pas par manque de respect à l'égard des intervenants, mais il m'arrive de parler de temps en temps à mon collègue d'autres questions qu'il pourrait poser lorsque c'est son tour d'intervenir. Je crois qu'il est important de le faire, comme ce l'est, je l'imagine, pour ceux qui se trouvent de l'autre côté de la table. Je leur laisse cependant le soin de vous répondre directement.

Il ne s'agit donc pas de manque de respect à l'égard des témoins. Je veux que cela soit bien clair pour tout le monde. Nous prenons votre tâche très au sérieux, sans quoi nous ne serions pas ici.

Au tout début de votre exposé, vous avez dit que la municipalité avait un peu manqué de franchise, qu'elle ne souciait guère de ce qui allait arriver aux fournisseurs du service et que la seule chose qui comptait c'était ce qui arriverait à la ville elle-même.

Pourriez-vous préciser cette remarque?

M. Terry Quinn: Je crois que vous avez entendu M. Bowles dire dans son exposé que leur objectif est de commercialiser la collectivité. Ils veulent attirer d'autres pays et fournir un service plus complet.

Je n'ai rien à reprocher à une telle déclaration; ce qui ne me plaît pas, c'est que tout cela se fait aux dépens du fonctionnaire que je suis. Je perds mon emploi, comme l'ont fait tous les autres, et la ville déclare que son intention est attirer plus de gens, qu'elle se soucie peu de ceux qui viennent de perdre leurs emplois. Elle prétend bien sûr qu'il n'en est rien, mais ce qu'elle veut faire c'est attirer toujours plus de monde. C'est pourquoi j'ai dit que les déclarations des représentants de la ville manquaient de franchise. La ville veut réaliser son projet à mes dépens et aux dépens de tous ceux qui ont actuellement un emploi à la base.

• 1840

M. Art Hanger: Quels étaient les rapports entre la ville et l'union pendant tout le processus? Les liens étaient-ils étroits ou se sont-ils relâchés, et maintenant que les choses se sont calmées, existent-ils même encore?

M. Terry Quinn: Les choses se sont effectivement calmées jusqu'à un certain point, mais nous avons quelques personnes très énergiques au sein de notre conseil. Je laisserai de côté leurs allégeances politiques mais il est toujours possible d'approcher les conseillers. On peut leur parler et ils sont prêts à prendre position, le cas échéant, sur les questions qui préoccupent les membres de l'union.

Mais nous en arrivons maintenant au point où sur cette base, il n'y aura plus que 25 à 30 membres du syndicat qui sont des fonctionnaires. Je n'ai pas la moindre idée de ce qui arrivera aux autres. S'il y a un syndicat qui se démène pour venir organiser le personnel de Serco—et je le souhaite vivement—j'espère qu'il agira sans tarder. Mais j'imagine que ces gens-là auront à leur tour les mêmes possibilités de s'adresser au conseil et obtiendront les mêmes réactions des conseillers que nous.

M. Art Hanger: Serez-vous de ceux qui resteront avec Serco?

M. Terry Quinn: Non, je ne travaillerai pas pour Serco. J'ai refusé le poste qu'on m'a proposé. J'ai demandé un poste dans un corps d'armée et je l'ai obtenu, mais je l'ai également refusé. J'ai accepté d'être transféré à Gagetown et j'espère que je pourrai y mener une vie plus agréable et plus tranquille que celle que j'ai connue jusqu'à présent à cause de ce gouvernement.

M. Art Hanger: Vous allez vous installer à Gagetown?

M. Terry Quinn: Oui.

M. Art Hanger: Que dit-on du DMPS là-bas?

M. Terry Quinn: Aux dernières nouvelles—et j'espère que ce n'est pas une simple rumeur—Gagetown est au point mort. D'après ce que je crois comprendre, on y a mis en oeuvre un processus de réduction de 25 p. 100 analogue à celui que nous avons vécu. La solution retenue est une sorte de coentreprise faisant appel à la participation du syndicat, de la direction et de la collectivité afin de renvoyer le processus du DMPS à l'endroit qu'il mérite, aux oubliettes.

M. Art Hanger: Il y a beaucoup d'employés civils au MDN. Il y a d'autres régions... On a mentionné Moose Jaw. Si vous étiez là cet après-midi, vous en avez probablement entendu parler. Un entrepreneur a récemment été chargé de prendre la relève. Quel rôle vous voyez-vous jouer là-dedans?

M. Terry Quinn: À Moose Jaw?

M. Art Hanger: Où n'importe quelle autre base?

M. Terry Quinn: Ce dont nous avons besoin, c'est de nous unir afin de montrer au gouvernement ce qu'est notre position et de lui rappeler que c'est nous qui vous l'avons porté au pouvoir.

Si les gens sont des syndiqués, comme ils le prétendent, nous pourrons réduire le pays à notre merci, si nous le voulons, mais pour cela, il faut agir de concert.

M. Art Hanger: C'est ce que vous voulez faire?

M. Terry Quinn: Compte tenu de la situation dans laquelle je me trouve maintenant, oui. Je veux mater ce pays. Je veux qu'il sache ce qu'il m'a fait personnellement, ce qu'il a fait aux habitants de cette collectivité, et ce qu'il va faire aux gens de tout le pays. Paul Martin a déjà indiqué dans son budget que la fonction publique va subir toute une série de compressions.

M. Art Hanger: Oui.

M. Terry Quinn: C'est précisément ce que le gouvernement libéral veut faire et le Parti réformiste aussi. Suis-je censé me laisser faire sans résister? Non. Ce n'est pas mon genre.

M. Art Hanger: Non. Il y a d'autres moyens de réagir aux problèmes de compression des effectifs.

M. Terry Quinn: Bien sûr.

M. Art Hanger: Ces compressions ont lieu dans le monde entier, mais il y a d'autres solutions.

Voilà à peu près toutes les questions que j'avais à vous poser, monsieur Quinn. Merci.

• 1845

Le président: Merci, monsieur Hanger.

Madame Longfield.

Mme Judi Longfield: Monsieur Quinn, plutôt qu'une question à poser, j'ai une déclaration à faire. Vous avez déclaré au début que vous étiez un ami de M. O'Brien. Vous avez mentionné le fait qu'il vous a défendu. Je crois que vous avez également dit que vous ne voteriez plus pour lui.

M. Terry Quinn: C'est exact.

Mme Judi Longfield: Monsieur Quinn, je suis scandalisée par votre remarque. Lorsque M. O'Brien luttait contre la mort à l'hôpital, il envoyait des messages au ministre par l'intermédiaire des membres de ce comité afin d'essayer de défendre votre poste. Je trouve inadmissible que vous puissiez déclarer ici que vous êtes son ami mais que vous ne le soutiendriez pas. Je tiens simplement à vous rappeler que lorsqu'il luttait ainsi contre la mort, c'est avant tout aux personnes de cette collectivité qu'il pensait. Je le sais pertinemment parce que j'étais à un dîner auquel participait le ministre lorsqu'un membre du comité, qui n'est pas ici aujourd'hui, a passé près de trois quarts d'heure à relater au ministre le contenu de sa conversation avec M. O'Brien. Je trouve votre réaction choquante. Je ne veux pas de commentaire. Je tiens simplement à vous dire ce que sont les faits.

M. Terry Quinn: Je les connais aussi. Je sais que c'est vrai.

Mme Judi Longfield: Cette collectivité et vous-même n'aurez jamais de meilleur représentant que l'homme qui est assis ici.

M. Terry Quinn: Je ne le conteste pas du tout, ma chère madame, mais il se peut que...

Mme Judi Longfield: Il mérite votre soutien.

M. Terry Quinn: Un instant. S'il fait partie d'un gouvernement qui veut m'enlever mon emploi, il n'est pas question que je vote pour lui.

Mme Judi Longfield: J'ajouterai que vous avez dit que vous pensiez que le NPD le ferait. Ce comité s'occupe du DMPS depuis le début. Or le NPD, qui a plus de membres que le Parti conservateur, a décidé de ne pas faire de ce comité une de ses priorités et n'y est pas représenté. Vous voyez donc qu'il ne se bat pas pour vous.

M. Terry Quinn: Contrairement à ce que vous pensez, je n'ignore rien de ce que vous dites. Je connais les problèmes de Lawrence. Je les connais parfaitement. En fait, je les connaissais probablement avant vous.

Je suis cependant aussi au courant de ce que fait le NPD. Je ne suis pas membre de ce parti. Je ne suis membre actif d'aucun parti politique. Mais lorsqu'un parti vient vous dire qu'il est prêt à se battre...

M. Price est lui aussi intervenu. Ces gens-là ont eu le courage de venir et de déclarer qu'ils allaient...

Mme Judi Longfield: Lawrence aussi.

M. Terry Quinn: Je ne le conteste pas. Je sais ce que Lawrence a fait, mais c'est son gouvernement qui est responsable de cette situation. Je crois que Lawrence connaît ma position. Ce n'est pas cela qui me préoccupe. Comme je l'ai déjà dit, Lawrence et moi, du moins en ce qui me concerne, sommes amis, mais s'il fait partie d'un gouvernement qui veut me priver de mon emploi, je ne voterai pas pour lui, un point c'est tout.

Le président: Merci beaucoup, Judi.

Lawrence.

M. Lawrence O'Brien: Merci, monsieur le président. Je vous remercie, Judi, mes chers collègues, et toi aussi, Terry. Il va falloir que je m'éclipse dans une minute ou deux, en partie pour les raisons auxquelles vous venez de faire allusion. Il arrive un moment de la journée où je n'en peux plus, et je suis pratiquement arrivé à ce point. Lorsque j'aurais fini de parler, je m'en irai. Croyez donc bien, ceux d'entre vous qui vont me succéder, ce n'est pas parce que je ne veux pas être ici—au contraire—mais parce que je suis bien obligé de suivre les instructions du médecin. Je n'y peux rien.

Terry, je comprends ton sentiment de frustration. Tu sais que je comprends. Tu n'ignore pas que j'ai aussi perdu mon emploi. Je me suis levé un beau matin dans cette ville et m'en suis allé gaiement au travail—je travaillais pour la province—pour apprendre ce jour-là que 23 postes avaient été supprimés au ministère, dont le mien.

J'ai essayé de faire bonne figure, un peu comme l'ont fait tous mes amis d'ici. Vers 8 h 30, on m'a annoncé mon renvoi et à 11 h, ma femme a téléphoné parce qu'elle avait besoin de quelque chose. Je lui ai dit que je ne tarderais pas à rentrer parce que j'avais perdu mon emploi. Elle ne m'a pas cru. Elle croyait que je plaisantais, comme je le fais parfois, comme nous le faisons tous.

Je suis rentré chez moi. J'ai vérifié les notes de mes enfants, deux adolescents qui passaient un examen cette semaine-là. Leurs notes s'étaient améliorées de plus de 10 p. 100 en moyenne.

C'était un 11 décembre. Et le 11 décembre est une date pénible pour moi. C'était le 11 décembre que le DMPS a été annoncé et c'est ce jour-là aussi, que j'ai perdu mon emploi.

• 1850

Le 5 janvier je suis entré au Parti libéral et cela a marqué le début de ma carrière politique. C'est grâce aux habitants du Labrador que je me trouve ici et j'ai vraiment le sentiment, comme vous le savez fort bien et comme Judi l'a très bien montré, que je représente l'intérêt supérieur des habitants de ma circonscription. Je pense, Terry, que c'est une chose que tu reconnais aussi.

Je crois, Terry, que tu nous as apporté quelque chose d'intéressant au sujet du problème. Tu as touché des cordes sensibles à plusieurs reprises autour de cette table; je l'ai bien senti dans les paroles de presque tous ceux qui ont parlé et je l'ai aussi vu dans leurs regards. Que l'on soit d'accord ou non avec la manière dont tu as présenté les choses, je crois que tu as bien montré ce que nous traversons actuellement, et ce que nous avons déjà vécu.

Je sais que le comité, sous la compétente direction du président et avec la participation de députés également compétents assis autour de cette table, a fort bien compris ce qui a été dit aujourd'hui et ce soir, et qu'il continuera à—et je sais que son rapport sera établi en conséquence. Comme mon cher ami John O'Reilly le disait si éloquemment... C'est ainsi qu'il parlait, et pas seulement lui, mais beaucoup d'autres. Il y a des gens qui se sont levés dans notre caucus libéral—nous ne parlons pas beaucoup de ce qu'il fait, mais je peux au moins dire ceci—et qui, en mon absence, ont parlé à maintes reprises en mon nom pour défendre ta cause. Il y a donc là quelque chose d'assez touchant.

Je me souviens du jour—et je conclurai là-dessus—où j'étais à l'hôpital; c'était la veille de mon opération. George Baker m'appelait constamment; et croyez-moi George et moi sommes très liés. Je crois d'ailleurs que George est un ami pour tout le monde. Il me téléphonait, et le cabinet du ministre me téléphonait également. L'infirmière qui devait m'endormir le lendemain matin est alors entrée. Elle allait me faire quelque chose au dos pour atténuer la douleur, et s'occuper de tout les détails qui accompagnent une grave opération. De mon lit d'hôpital, j'avais une féroce discussion avec le ministre. En plein milieu de notre discussion elle s'est retournée et m'a dit, «M. O'Brien, raccrochez-moi tout de suite ce téléphone.» C'est ainsi que je suis allé me faire opérer. Deux jours après l'opération, comme tu le sais très bien, je me suis lancé à nouveau à corps perdu dans la bagarre.

Cela n'a pas été facile, cet hiver. Cela a été la décision la plus difficile sur la question la plus difficile à laquelle j'ai jamais été confronté, au moment le plus difficile de ma vie, et ce n'est pas terminé. Il y a encore beaucoup de tensions et beaucoup de tristesse; je crois que le colonel Langdon y a fait allusion cet après-midi lorsqu'il a dit que nous tenons le coup mais que nous sommes une collectivité profondément blessée. Je tenais à le préciser. Encore une fois, merci, Terry.

Sur ces mots, je remercie le comité et toutes les personnes présentes, et je m'en vais.

Le président: Monsieur Clouthier.

M. Hec Clouthier: Terry, une petite remarque personnelle à propos de Lawrence. J'ai été élu en juin 1997, et je suis donc un nouveau au Parlement. Le whip du parti a pris contact avec moi et m'a dit «Hec, je voudrais que tu rencontres Lawrence O'Brien car vous avez des points communs.» Je me suis donc rendu à la Colline parlementaire, en août, je crois, et j'ai rencontré Lawrence. Ses premières paroles ont été, «Alors c'est vous le petit gars avec la grande base; moi je suis le grand type avec la petite base.» Il a ajouté «Si seulement vous aviez la chance»—il était beaucoup plus costaud à l'époque—«d'avoir la BFC Petawawa. Je ferais peut-être un échange de bases avec vous, mais à la seule condition que vous puissiez amener votre base dans ma circonscription, car j'adore ma circonscription.»

Terry et tous les amis présents, nous sommes censés ne rien dire de ce qui se passe ai caucus, mais croyez-moi, il m'a téléphoné, ainsi qu'à Judi et à d'autres pour nous demander «d'intercéder en son nom». Il m'a téléphoné de son lit d'hôpital et sa femme a été obligée de lui enlever le téléphone.

J'ajouterai, Terry, que si ce qui a été dit ici aujourd'hui vous paraît émouvant, ce n'est rien en comparaison de l'intervention de votre député devant le caucus libéral, après sa convalescence. Tout le monde, absolument tout le monde était en larmes. Croyez-moi Terry, tout ce que je peux espérer c'est de devenir un jour un député aussi bon et aussi loyal que lui. Tout ce que je peux vous dire c'est que je sais que vous êtes furieux contre le gouvernement, et que vous avez parfaitement raison de l'être.

Je me bats contre le DMPS dans ma circonscription, moi aussi, mais une des raisons pour lesquelles ce processus a fait l'objet d'un vote à Gagetown et à la BFC de Petawawa, dans ma circonscription, c'est à cause de l'intervention de votre député. J'étais avec lui lorsque nous avons rencontré Art Eggleton, et il lui a passé un terrible savon. J'ai dit ensuite à Art, «Et vous voulez maintenant que la même chose arrive à ma base?»

• 1855

La vérité, c'est que cet homme a été élu trop tard. Le processus était déjà en route. Tout ce que je vous demande c'est de ne pas tirer sur le pianiste. Vous avez un représentant extraordinaire au Parlement. Je sais que mes autres collègues sont de mon avis. Ils savent à quelles épreuves il a été soumis. Je sais que c'est une tragédie personnelle pour vous, Terry, et je compatis—ne confondez pas cela avec de la pitié, car elle n'a pas sa place ici—avec vous à cause de la situation dans laquelle vous vous trouvez, parce que je sais, moi aussi, ce qui se passe dans ma propre circonscription.

C'est tout, monsieur le président.

Des voix: Bravo! Bravo!

Le président: Monsieur Quinn, il n'y a pas d'autres questions. Je vous remercie de votre exposé.

Le second témoin est la caporale Theresa Ethier.

La caporale Theresa Ethier (témoigne à titre personnel): Bonsoir. Je suis la caporale Theresa Ethier. Je suis commis au SGR, et je suis employée à la salle des rapports de la 5e Escadre. Ce soir, je voudrais tout d'abord vous parler des couples de militaires et du BLFC. Je suis mariée au caporal Jacques Ethier, qui est un PM. Cette année, pendant la saison d'affectation, on nous a demandé à tous les deux quelles étaient nos préférences. Nous avons proposé les choix suivants: Greenwood, Trenton, Ottawa, Moose Jaw et Cold Lake. Nous n'avons pas obtenu ce que nous voulions et on nous a annoncé que nous serions tous deux affectés à la BFC Petawawa. Je sais que pour obtenir une promotion dans ma spécialité, ce qui est mon objectif ultime, il faudra que je serve en campagne. Cela ne me dérange pas du tout. Ce qui m'inquiète, c'est que mon époux et moi-même soyons obligés de servir simultanément en campagne. Jacques est affecté au 2e peloton de campagne de la PM et moi, au 1 RCR.

Après avoir fait part à mon adjudant-chef, à Goose Bay, de mes préoccupations au sujet du bien-être de mes enfants, on m'a dit que mon gestionnaire de carrières avait déclaré: «C'est un couple de militaires. Ils ont les moyens de s'offrir une gardienne.»

L'aspect financier de cette affectation n'a pas d'importance. Ce qui m'inquiète c'est que j'ai un enfant de cinq ans qui rentre à l'école cette année et un autre de 11 ans qui fréquente l'école intermédiaire. Après avoir étudié le Air Force Flight Plan à l'école de formation au sol, je croyais qu'on tiendrait un peu plus compte du bien-être de la famille. Mais est-ce pour un militaire ou pour un couple de militaires? N'a-t-on jamais envisagé, lorsqu'il s'agit d'un couple de militaires, d'en affecter un sur une base et l'autre à un poste en campagne? Si on l'avait fait, nous ne contesterions notre affectation.

Je tiens encore une fois à préciser que mon époux et moi-même sommes tout à fait disposés à accepter des affectations en campagne, mais pas simultanément.

Autre détail, la gestionnaire de carrières que j'ai cette année est celle que les commis d'administration ayant le grade de caporal-chef avaient l'an dernier. Je sais pertinemment que des trois caporaux-chefs affectés hors de Goose Bay, deux étaient célibataires et le troisième était marié à un militaire. Le gestionnaire de carrières lui a dit, «Je suis un parent seul. Si je suis capable de m'en sortir, tout le monde peut en faire autant.»

La question que je voudrais poser au comité est la suivante: Premièrement, les Forces canadiennes utilisent-elles cette méthode pour contraindre un des deux membres des couples de militaires à demander sa libération, ou s'agit-il simplement d'un gestionnaire de carrières vindicatif que la situation dans laquelle cette femme a placé mon mari, ma famille et moi-même la laisse totalement indifférente?

Je voudrais également vous parler ce soir du Bureau du logement des Forces canadiennes. Je tiens tout d'abord à dire combien j'ai apprécié les logements offerts à Goose Bay. Ce sont les meilleurs logements familiaux que ma famille a jamais eus. Le problème est que je quitte Goose Bay. Le BLFC a pour politique d'inscrire les militaires sur la liste d'attente de LF 60 jours avant la date de CE. Bien évidemment, plus le CE est proche, plus tôt vous êtes inscrit sur cette liste et meilleures sont vos chances d'obtenir un LF. Dans n'importe quelle base canadienne, si l'on dit à un militaire qu'il n'obtiendra pas de LF avant la fin de la PAA, voire même peut-être l'année suivante, le militaire a le choix entre se trouver un logement lui-même ou d'accepter une affectation avec restriction. Dans ce dernier cas, le militaire peut rejoindre sa nouvelle unité où il sera logé et nourri gratuitement ou il touchera une allocation de séparation en attendant de pouvoir faire venir sa famille lorsqu'un logement aura été trouvé.

• 1900

Les départs de Goose Bay ne sont assujettis à aucune restriction, et les affectations avec restriction ne sont pas autorisées à cause de notre isolement et d'autres complications administratives.

Bien que notre date d'entrée en fonction puisse être fixée à 30 jours avant ou après notre date de CE, le militaire qui quitte Goose Bay doit le faire avec sa famille et doit trouver un logement dans les 35 jours qui suivent son arrivée dans sa nouvelle unité. Si aucun LF n'est disponible, le militaire est obligé de trouver un logement en ville. C'est injuste, et c'est le résultat direct au fait qu'il quitte un poste isolé.

Je suis fermement convaincue que les militaires qui quittent Goose Bay devraient obtenir un LF en priorité. Si l'on ne tenait pas compte de la liste d'attente dans le cas du personnel de Goose Bay, les déménagements porte-à-porte seraient la norme et l'obligation d'assurer provisoirement le vivre et le logement des militaires serait réduite au minimum. Cela permettrait à l'État d'économiser des dizaines de milliers de dollars.

Pour placer cette suggestion en contexte, je précise que 183 militaires doivent quitter Goose Bay lors de cette ME, et que lorsque l'on considère l'ensemble des FC, l'impact sur chaque base serait minimal.

Pour envenimer encore les choses, mon transfert de Goose Bay doit se faire à la fin de la ME, le 30 juillet 1998. Je suis obligée de rester jusqu'à la fin pour aider tous les autres à partir. Comme le DMPS fait partie de ma spécialité, j'ai une toute petite chance d'obtenir un LF. Je sais qu'il s'agit d'un privilège et non d'un droit, mais à Goose Bay, nous n'avons pas les mêmes privilèges que les membres des autres bases. Nous ne bénéficions pas des mêmes droits. Nous sommes nettement désavantagés lorsqu'il s'agit d'obtenir un LF.

Je considère donc que l'on devrait donner la priorité aux militaires qui quittent Goose Bay et veulent obtenir un LF. J'espère qu'on le fera dès cette année—sinon l'an prochain—cela ne représente au total que 30 personnes par an. Je ne vois pas pourquoi ce serait impossible puisque cette mesure permettrait de réaliser une économie importante et de contribuer nettement à la qualité de vie du personnel.

Je vous remercie de votre attention.

Le président: Merci, caporal.

Je crois que quelqu'un veut poser une question.

Monsieur Benoit.

M. Leon Benoit: Merci, corporal, de votre exposé.

Vous avez posé une question à laquelle vous n'attendiez peut- être pas de réponse, mais je voudrais y revenir. Vous avez demandé si l'affectation simultanée de votre conjoint et de vous-même en campagne était une façon d'amener l'un de vous à demander sa libération, ou quelque chose du même genre.

À votre avis, quelle est la réponse?

Cpl Theresa Ethier: J'espère que ce n'est pas le cas, mais je demeure convaincue que les Forces armées canadiennes ne tiennent pas à ce que les femmes qui en font partie aient des enfants ou aient une vie de famille. Nous aurions dû signer une renonciation à notre entrée dans les forces armées. On aurait dû y penser. .

Des voix: Bravo! Bravo!

M. Leon Benoit: Depuis combien d'années faites-vous partie des Forces canadiennes?

Cpl Theresa Ethier: Depuis neuf ans.

M. Leon Benoit: Je vous pose la question car plusieurs personnes ont comparu devant nous—et d'autres sont venues me trouver—et nous ont dit qu'elles avaient pu continuer à fonctionner après avoir subi une blessure légère mais que, tout à coup, avant l'expiration des 20 années fatidiques, on considérait qu'ils étaient devenus incapables de fonctionner. Pourtant, rien n'avait changé. D'autres encore se trouvent dans des situations telles que la vôtre, dans lesquelles les affectations rendent la vie familiale presque impossible. Toutes ces personnes ont exprimé les mêmes inquiétudes que vous.

C'est une question que nous allons étudier. C'est un problème très grave. Si des militaires veulent avoir une famille, et si cela est jugé acceptable, il faut prendre des mesures raisonnables en conséquence, même s'il n'est pas toujours totalement possible de leur donner satisfaction.

Il s'agit donc d'une question qui a déjà été évoquée devant nous; j'estime qu'elle est extrêmement importante et qu'elle mérite que nous l'étudiions.

Je vous remercie.

Le président: Merci, monsieur Benoit.

Monsieur Pratt.

M. David Pratt: Merci, monsieur le président.

Caporale Ethier, vous avez utilisé quelques acronymes. J'ai assisté à des audiences dans bon nombre de villes mais c'est la première fois que je les ai entendus. Le premier était «PAA» et le second, «ME». Que signifient-ils?

• 1905

Cpl Theresa Ethier: PAA signifie période active des affectations et ME, modification de l'effectif, c'est-à-dire la date à laquelle vous prenez une autre affectation.

M. David Pratt: Très bien. On apprend tous les jours quelque chose ici.

Au sujet du thème général qui inspire vos commentaires, il y a une chose que nous avons entendue souvent dans les villes, et vous avez peut-être entendu ici dans la bouche de vos collègues c'est la phrase suivante «Si l'on avait voulu que vous ayez une famille, nous vous en aurions donné une.» Avez-vous déjà entendu cette remarque?

Cpl Theresa Ethier: J'ai effectivement déjà entendu ce commentaire.

Je sais que l'année qui vient de s'écouler a été très dure pour les Forces armées canadiennes. Cela devait être une PRA réduite, période active des affectations réduites, et je sais qu'il leur est difficile d'affecter au même endroit deux militaires, c'est-à-dire en particulier. Ce qui me préoccupe est ce que j'aimerais que l'un d'entre nous obtienne un poste sur le terrain, et que l'autre soit affecté à un poste statique, ce qui veut dire un travail de jour, pour pouvoir changer ensuite. Nous pourrions faire trois ans chacun de cette façon. Mais j'aimerais que l'on offre vraiment cette possibilité aux femmes qui font partie des Forces armées canadiennes, pour qu'elles ne soient pas obligées de quitter l'armée pour élever leurs enfants.

M. David Pratt: Très bien, merci.

Cpl Theresa Ethier: Bienvenu.

Le président: Merci beaucoup, M. Pratt.

Madame Longfield.

Mme Judi Longfield: J'aimerais poser une brève question qui porte sur ces gestionnaires de carrières. Depuis combien de temps relevez-vous de celui-ci?

Cpl Theresa Ethier: C'est ma première année avec ce gestionnaire de carrières.

Mme Judi Longfield: Il arrive souvent que les gens les désignent, et pas de façon affectueuse, sous l'appellation de destructeurs de carrières.

Vous avez posé la question, ce c'est cela les agissements d'un gestionnaire de carrières vindicatif? Je suis très troublée d'entendre les citations que vous attribuez à votre gestionnaire de carrières. C'est le genre de chose que notre comité entend depuis pratiquement le premier jour de nos audiences: l'impossibilité d'avoir un entretien utile avec un gestionnaire de carrières et le fait que celui-ci ne semble pas tenir compte de vos besoins particuliers.

Nous comprenons qu'il est nécessaire d'affecter les militaires et, comme vous l'avez dit, d'essayer de servir utilement les forces armées mais ils semblent parfois faire tout ce qu'ils peuvent pour rendre les choses aussi compliquées que possible et nous allons certainement devoir formuler des recommandations pour changer la situation.

Merci de nous avoir exprimer vos préoccupations.

Cpl Theresa Ethier: Merci.

Le président: Merci beaucoup.

Capitaine Barnes.

Le capitaine Boyd Barnes (témoigne à titre personnel): Salut. Je suis habitué à parler dans un microphone mais c'est habituellement à un avion que je parle, de sorte que si ma voix est un peu fêlée, n'y faites pas attention.

Cela fait 20 ans que je suis capitaine dans l'armée et j'ai un certain nombre de sujets de plaintes au sujet du nombre d'affectations que nous recevons et de la façon dont cela touche la famille.

En 20 ans, j'ai eu huit affectations. Ma femme a déménagé six fois et n'a jamais pu conserver un travail plus de deux ou trois ans.

J'ai une fille de 13 ans. Elle va commencer bientôt de fréquenter une cinquième école. Elle m'a demandé cette année d'écrire à mon gestionnaire de carrières pour lui demander de me laisser en poste jusqu'à ce qu'elle termine ses études secondaires. Cela n'est pas facile.

Chaque fois que nous déménageons, il faut bien entendu trouver une maison. Il y a plusieurs solutions, comme la caporale Ethier y a fait allusion. Vous pouvez vous faire inscrire sur la liste des logements familiaux et prendre ce qui vous est attribué pendant cette période de 60 jours ou vous pouvez faire ce qu'on appelle un voyage à la recherche d'un logement. C'est une autre possibilité.

Un voyage à la recherche d'un logement est un voyage de cinq jours durant lequel vous vous rendez dans une ville où vous n'êtes jamais allé, vous trouvez un agent immobilier, regardez toute une série de maisons, en choisissez une, négociez un prix, trouvez une hypothèque, trouvez un avocat en qui vous pouvez avoir confiance, tout cela en cinq jours. Cela n'est pas raisonnable, cela n'est pas juste.

• 1910

Vous avez donc trouvé une maison au cours de ces cinq jours et c'est le temps d'y aller. Toutes vos affaires sont dans des boîtes qui sont placées dans un camion. L'armée s'attend à ce que vous couvriez 500 kilomètres par jour, tous les jours, jusqu'à ce que vous arriviez à votre nouvelle destination. Parfait. Vous mettez la femme et trois enfants dans votre Honda Civic à Goose Bay et vous vous rendez à Comox. Vous êtes complètement sonné quand vous arrivez à destination.

Il n'y a pas de fin de semaine de congé. L'armée s'attend à ce que vous voyagiez tous les jours, les fins de semaine et le reste, les congés et tout cela. C'est clair? Pour tout remboursement, on vous paie une chambre d'hôtel tous les soirs. Vous avez droit à une indemnité de repas et à 9,5¢ du kilomètre pour le carburant. On ne tient pas compte des pannes, de l'usure de la voiture, de la fatigue du voyage, de l'assurance si vous avez un accident ou quelque chose du genre. Lorsque je leur dis que ce n'est pas suffisant, ils me disent que les autres ministères ne font pas davantage, alors pourquoi offriraient-ils mieux?

Il y a ces personnes à charge de malheur. Il y a des choses qui s'appellent conjointe et enfants à charge et ce genre de choses. Parlons un peu des conjoints. Ma femme, comme je l'ai dit, n'a pas pu conserver son travail. Vous connaissez leur réaction. Ils disent que son mari est dans l'armée et qu'ils recherchent quelqu'un de plus stable. Ils cherchent quelqu'un qui sera là l'année prochaine et l'année suivante. Elle est donc obligée d'accepter des postes qu'elle ne veut pas vraiment.

Nous faisons des progrès. Depuis quelques années, l'armée accepte de payer la préparation du curriculum vitae du conjoint. Mais s'il faut qu'il se déplace pour une entrevue ou quelque chose du genre, c'est à lui d'assumer les frais. Nous faisons des progrès mais il faudrait tout de même faire davantage pour aider maman.

Prenons l'indemnité d'affectation. Ils nous donnent une indemnité équivalente à un mois de salaire. C'est pour toutes les petites choses qui peuvent arriver au cours d'un déménagement. Je ne sais pas pourquoi on a pris l'équivalent d'un mois de solde. Je n'ai jamais réussi à comprendre pourquoi parce que si l'on regarde ce que gagne en un mois un soldat ou un caporal par rapport à ce que gagne un colonel ou un major, il y a toute une différence. Le caporal ne ramène pas chez lui une brouette pleine d'argent.

Des voix: Bravo, bravo!

Cpt Boyd Barnes: Ils font tous deux le même déménagement. Déménager d'ici à Trenton coûte autant au caporal qu'au colonel. Pourquoi est-ce que l'indemnité d'affectation ne pourrait pas être un genre de subvention? Pourquoi faut-il qu'elle soit imposable?

On raconte une histoire ici au sujet d'un caporal qui travaille pour moi et qui concerne l'indemnité d'affectation. En 1995, il devait quitter Moose Jaw pour venir s'établir ici. Cela s'est passé la même année que j'ai déménagé. L'indemnité d'affectation, après impôt, a tout juste suffi à couvrir les frais de la transmission de sa voiture vieille de 10 ans qui avait expiré en chemin. C'est un soldat qui ne gagne pas beaucoup d'argent, qui ne peut pas se permettre d'avoir une bonne voiture et ce genre de choses. Vous voyez où je veux en venir.

Parlons des logements militaires. Theresa, tu as parfaitement raison quand tu dis que Goose Bay a les meilleurs logements matrimoniaux que j'ai jamais vus. C'est effectivement vrai. Je suis un des heureux élus qui vit dans un de ces duplex avec un garage et il est vrai que j'aime bien mon logement ici.

Je ne dirais pas la même chose des autres bases sur lesquelles j'ai vécu. Dans la plupart des cas, je crois qu'on aurait dû les démolir il y a des années. Voilà ce que j'en pense.

Le MDN a fait beaucoup au cours des cinq dernières années au sujet des logements familiaux. Nous avons remplacé le bardage, les fenêtres et refait l'isolation. Les sous-sols ne sont toujours pas étanches, les égouts refoulent mais tout va bien.

Je veux simplement montrer que lorsqu'on a une boîte à chaussures de 800 pieds carrés qui a été construite en 1940, il n'y a rien à en tirer; cela sera toujours une boîte à chaussures de 800 pieds carrés dans les années 90. Elle a 50 ans et il faudrait la démolir.

Il faut soit les démolir à coups de bulldozer pour en construire d'autres ou alors ne pas s'occuper de logement.

• 1915

Au lieu de dépenser tout cet argent à réparer des vieilles maisons du temps de la guerre, mettez sur pied un vrai programme de guaranteed home sale qui ne soit pas aussi bureaucratique que le projet pilote qui existe actuellement. Offrez aux militaires des hypothèques à faible taux ou des choses du genre si vous voulez qu'ils soient mobiles et se déplacent pratiquement sans préavis d'un bout à l'autre du pays tous les trois ou quatre ans; il est normal d'aider ces gens à se trouver un logement.

Où en étais-je? Ai-je oublié quelque chose? J'ai oublié quelque chose au sujet du déménagement. Je vais y revenir si vous permettez.

Vous n'êtes pas obligé de conduire pour rejoindre votre affectation. Vous pouvez prendre une voiture ou votre camion ou votre véhicule, quel qu'il soit et le mettre dans le camion avec le reste de vos meubles et vos effets personnels. C'est là que vous mettez toutes les choses qui ne sont pas des personnes à charge. Cela est envoyé à votre nouvelle affectation et vous vous prenez l'avion.

Je trouve déraisonnable que le déménagement de vos meubles et vos effets personnels prenne 14 jours pour aller d'un bout à l'autre du pays. Une fois arrivé à votre nouvelle destination, vous n'avez pas droit de louer une voiture. Vous devez utiliser vos chaussures pour vous déplacer dans la base, vous inscrire et emménager dans votre maison. Vous savez ce que c'est: tous les cinq minutes, il y a quelque chose qui manque et vous voulez aller l'acheter au magasin. Si vous louez une voiture, c'est à vos propres frais.

Merci beaucoup de votre attention. Excusez ma voix qui m'a manqué au début. Je me sens un peu plus à l'aise maintenant et je suis prêt à répondre à vos questions.

Le président: Merci beaucoup, capitaine. Judi Longfield veut poser des questions.

Mme Judi Longfield: Merci, capitaine. Ce que vous venez de dire confirme tout ce que nous avons entendu depuis que nous avons commencé cette série d'audiences.

Il y a un aspect sur lequel j'aimerais vous interroger. Vous vous êtes demandé si l'armée ne devrait pas cesser de s'occuper du logement. Je partage votre avis au sujet de certains logements familiaux. Est-il vraiment important que les conjoints et les familles soient logés avec les autres militaires?

Cpt Boyd Barnes: Dans mon cas particulier, et je ne parle que pour moi, ce n'est pas très important. Chaque fois que j'ai eu l'occasion de vivre à l'extérieur et d'acheter une maison, cela ne m'a pas dérangé. Cela comprend l'affectation que j'ai eue en Europe, pendant laquelle j'ai loué mon logement bien entendu. J'ai loué dans un village où il n'y avait que trois autres familles canadiennes.

Mme Judi Longfield: Avez-vous été affecté ou envoyé loin de votre famille?

Cpt Boyd Barnes: À part des cours de trois ou quatre mois, non.

Mme Judi Longfield: Vous avez donc tout le temps déménagé avec votre famille, sauf dans la fois où votre femme n'a pu vous suivre à cause de son travail. Vous avez toujours voyagé en groupe.

Cpt Boyd Barnes: Je pourrais peut-être formuler la situation de cette façon: ma femme à charge est loin d'être une charge.

Mme Judi Longfield: Mon mari à charge est loin d'être une charge. Je comprends.

Cpt Boyd Barnes: Nous préférons nous adapter à la collectivité et nous y intégrer. En fait, Goose Bay représente une anomalie pour nous parce que nous n'avons comme voisins que des militaires.

Mme Judi Longfield: Merci.

Le président: Merci.

Monsieur Hanger.

M. Art Hanger: Merci, capitaine. J'aimerais vous poser une question au sujet de votre façon de vous déplacer. Si l'on vous envoie à Comox, à l'autre bout du pays, combien de temps vous donne-t-on pour y arriver?

Cpt Boyd Barnes: Il faudrait que je fasse la division mais il faut conduire 500 kilomètres par jour sans s'arrêter. On me dit que cela prend 17 jours, sans s'arrêter. Cela représente 500 kilomètres par jour pour vous et les trois enfants.

Est-ce suffisamment clair?

M. Art Hanger: Ce sont presque des vacances n'est-ce pas?

Cpt Boyd Barnes: Oui.

M. Art Hanger: Quel est le taux forfaitaire de base pour ces déplacements?

Cpt Boyd Barnes: Cela varie d'une province à l'autre mais c'est entre 9,5¢ ou 10¢ le kilomètre.

M. Art Hanger: Je ne pense pas que cela suffise pour couvrir les frais.

Cpt Boyd Barnes: Pour ma camionnette, c'est insuffisant.

M. Art Hanger: Oui, je comprends. Très bien, merci beaucoup, capitaine.

• 1920

Cpt Boyd Barnes: Très bien.

Le président: Merci beaucoup, capitaine.

Capitaine Crawley.

Le capitaine Art Crawley (aumônier): Monsieur le président et messieurs et mesdames les membres de SCONDVA, j'aimerais commencer par vous remercier d'être ici et de nous donner accès à cet important forum.

J'ai assisté à la séance de cet après-midi au cours de laquelle nous avons entendu les interventions du colonel Langdon et d'autres, et j'ai entendu les exposés qui viennent d'être présentés et que j'appuie totalement. Je ne vais pas répéter ce qui a été déjà fort bien dit au sujet de la vie au sein de l'escadre 5. Je vais plutôt m'aventurer, avec quelques hésitations, dans un domaine qui risque d'être laissé de côté.

Lorsque l'on recherche de résoudre les problèmes qui connaissent les membres des Forces canadiennes et leurs familles, on est tenté de s'attaquer au secteur qu'il est facile de quantifier comme l'augmentation des soldes et la qualité des logements. Il est certes important de tenir compte de ces irritants très réels, mais il existe une insatisfaction sous-jacente qui ne pourra être apaisée en prenant des mesures concrètes.

C'est pourquoi, sachant que vous allez formuler des recommandations pour améliorer les conditions de travail et de vie, j'invite le comité à aborder dans ses délibérations, considérations et recommandations des aspects moins concrets.

Avant d'aller plus loin, je devrais mentionner que je suis l'aumônier de l'escadre.

Une partie de cette insatisfaction vient des coups qui ont été assenés à notre fierté de soldat depuis cinq ans. Le fait que la solde n'ait pas été augmentée à cause non seulement des difficultés financières aux familles mais elle indique également aux militaires qu'on n'attribue pas une très grande valeur à leur contribution.

Vous avez entendu parler, j'en suis sûr, de la couverture qu'a faite la presse des divers scandales survenus en Somalie et autres lieux. Le travail héroïque qu'accomplit notre armée n'est guère reconnu et cela sape le moral. Cela a été atténué en par la couverture qui a été faite de la contribution des militaires à la lutte contre la tempête de glace et les inondations mais ce ne sont pas là les tâches qu'accomplissent les militaires quotidiennement et qui ne suscitent guère la gratitude du public.

Ce qui illustre mieux la situation sur cette base est le processus de DMPS que nous venons de connaître. On justifie le DMPS et la restructuration en disant que cela est conforme aux principes applicables lorsque nous disons des articles qui défendent le nouveau processus, nous constatons que ce sont des termes et des valeurs du monde des affaires qu'on introduit de force dans notre lieu de travail. Les valeurs économiques ne sont pas les valeurs qui ont attiré des hommes et des femmes à adopter l'uniforme et ce ne sont pas les valeurs que nos soldats, nos marins, nos aviateurs et aviatrices sont amenés à défendre dans l'accomplissement de leurs tâches.

Des programmes comme le DMPS sont uniquement fondés sur des valeurs économiques et nous sommes apparemment surpris lorsque cela se répercute sur l'éthique militaire. Devrait-on se surprendre de voir cette confusion et cette insatisfaction lorsqu'on demande aux militaires d'adopter une série de valeurs lorsqu'ils accomplissent leurs tâches alors que les décideurs ne s'embarrassent pas de ces valeurs lorsque les décisions et les politiques basées sur l'économie entraînent des désastres, comme dans la mise en oeuvre de ces nouvelles politiques dans les escadres et les bases militaires?

Il serait bon de nous rendre compte que nous sommes très proches de la situation de Ebenezer Scrooge qui justifiait ses actions en disant qu'elles étaient conformes aux principes économiques et il serait bon de prendre note des paroles du fantôme de Jacob Marley:

    «L'économie!» s'écria le fantôme [...] «L'humanité n'était qu'une économie. Le bien-être de tous était mon économie; charity, mercy, forbearance, and benevolence, were, all, my business. The dealings of my trade were but a drop of water in the comprehensive ocean of my business!'

Je pourrais peut-être en terminant aborder un aspect encore moins tangible. Il semble que l'on retrouve dans l'ensemble de la société, et non pas seulement ici, un esprit de méfiance et de critique. Je serais très surpris si les membres du comité me disaient que personne n'a jamais manifesté le moindre doute au sujet de l'efficacité de ses recommandations. Je sais maintenant que c'est une réalité; lorsque j'ai écrit cela, ce n'était qu'une hypothèse.

Quelle que soit la bonne volonté des dirigeants, il existe une grande méfiance envers eux dans tous les secteurs—politique, religieux et militaire. Il est vrai qu'on ne peut résoudre les problèmes qu'en les examinant d'un oeil critique mais je ne peux m'empêcher de me demander si les critiques maladroites ne font pas qu'aggraver les problèmes de moral au lieu de les atténuer.

J'ai essayé d'aborder des questions plus générales et globales et laisser les problèmes plus concrets à ceux qui s'en occupent déjà; je vous demande donc encore une fois de parler dans votre rapport des aspects qui, en raison de leur nature même, sont difficiles à saisir et qui risquent donc de passer inaperçus.

Merci de nous avoir donné de votre temps.

Le président: Merci, capitaine.

Monsieur Pratt.

M. David Pratt: Merci, monsieur le président.

• 1925

Mon père, il y a un aspect qui a été mentionné dans certaines bases que nous avons visitées, et c'est toute la question de la reconnaissance par la population du Canada du travail qu'accomplit l'armée canadienne. Je peux vous dire immédiatement que ce problème ne se pose pas dans ma circonscription parce que la moitié des électeurs n'ont pas eu d'électricité pendant une semaine et peut- être même davantage à cause de la tempête de glace et il y avait beaucoup de camions de l'armée qui sillonnaient le secteur. Il y avait des militaires dans un large secteur de l'est de l'Ontario. Les gens qui résident dans ma circonscription ont facilement constaté la contribution que ces personnes faisaient à la société canadienne.

Mais dans certaines bases, il a été mentionné que s'il n'y avait pas eu de tempête de glace, si vos électeurs n'ont pas connu un événement de ce genre, alors il est très probable qu'ils ne savent pas très bien ce que font exactement les Forces armées canadiennes, des missions de recherche à l'aide en cas d'urgence et à l'aide humanitaire, toutes ces tâches.

Que pensez-vous de la façon dont la population canadienne, dans son ensemble, perçoit l'armée? Je vous pose cette question parce que les comités sont dans l'ensemble représentatifs de la population canadienne. Nous sommes les membres élus de la Chambre des communes. Nous sommes «les gens du commun» qui siègent au Parlement, qui essaient de prendre des décisions.

Je dois dire que dans mon cas lorsque je suis arrivé pour siéger à ce comité en septembre dernier, je ne savais pas très bien ce que faisaient exactement les Forces armées canadiennes.

S'il n'y a pas cette compréhension, cette reconnaissance de la population, comment pouvons-nous avoir une bonne politique en matière de défense? Comment convaincre la population de dépenser des fonds pour la défense, pour que les personnes qui accomplissent les tâches qui sont les nôtres, tant à l'intérieur de nos frontières qu'à l'étranger, pour ce qui est de l'ONU, de l'OTAN et de NORAD...? Si les Canadiens ne connaissent pas cela, comment allons-nous pouvoir renforcer notre armée, augmenter son budget, veiller à ce que les soldats aient l'équipement nécessaire pour faire leur travail et pour régler tous les problèmes qui nous ont été exposés au cours des derniers mois?

Avez-vous des idées là-dessus?

Cpt Art Crawley: Il y a je crois deux domaines qui permettent au public de prendre connaissance de ce que fait l'armée et de l'excellent travail qu'elle accomplit. Il y a d'abord les efforts que peut déployer l'armée elle-même. Par sa nature, je ne pense pas que cela soit une institution qui cherche à se faire valoir de cette façon. L'autre dépend de ce que le Parlement et le gouvernement sont prêts à faire pour elle. Je crois que cela ne relève pas de mon domaine habituel mais que cela fait partie du vôtre.

M. David Pratt: C'est un des aspects que nous essayons de comprendre. Je crois que le message qu'ont reçu les membres du comité, message que nous a envoyé les gens est qu'il faut mieux faire comprendre aux Canadiens ce que nous faisons. Lorsque nous y serons parvenus, il sera alors peut-être possible d'obtenir les choses dont nous avons besoin pour veiller à ce que les militaires soient correctement payés, qu'ils disposent de logements adéquats et des avantages sociaux qui correspondent à vos besoins.

C'est pourquoi nous sommes à la recherche de suggestions sur les façons de faire passer ce message.

Cpt Art Crawley: Une des raisons pour laquelle la tâche du comité est difficile, ou pour ceux qui cherchent à résoudre les problèmes et les difficultés auxquels nous faisons face actuellement, c'est la méfiance. C'est ce qui explique en partie ces commentaires, il y a un manque de confiance à l'égard des dirigeants, quels qu'ils soient.

Le seul fait d'être un député veut dire, dans certains milieux, en fait je dirais dans beaucoup de milieux, que vous êtes, et excusez-moi de vous le dire, un méchant. Je crois que cela vaut pour la plupart des personnes qui exercent des pouvoirs importants. Un des défis auxquels vous allez devoir faire face est de trouver des façons de surmonter ces difficultés. Je ne suis pas en mesure de vous suggérer une solution.

M. David Pratt: C'est un problème difficile et nous essayons de découvrir une solution.

Le président: Merci, M. Pratt.

Monsieur Price.

• 1930

M. David Price: Merci, monsieur le président.

Merci, mon père, d'être ici. Habituellement nous dialoguons avec l'aumônier au cours de la séance de l'après-midi mais les choses se sont quelque peu prolongées cet après-midi.

Tout d'abord, cela fait combien de temps que vous êtes dans cette base?

Cpt Art Crawley: Cela va faire deux ans l'été prochain.

M. David Price: Cela m'amène à ma question suivante. Avez-vous constaté une augmentation de la demande de counselling à cause du DMPS? C'est sans doute la principale source de stress ici. Y a-t-il eu une augmentation importante?

Cpt Art Crawley: Je crois que l'on peut dire que... C'est difficile à dire parfois avec le counselling parce que l'on pense qu'il y a un lien.

M. David Price: Eh bien, peut-être pas seulement avec le counselling. Je dis simplement que vous êtes plus conscient que beaucoup d'autres personnes des causes de stress et des problèmes qui se posent. Cela ne veut pas toujours dire du counselling; c'est juste que vous êtes davantage au courant.

Avez-vous constaté une augmentation, approximative, par exemple en pourcentage?

Cpt Art Crawley: Je vais dire qu'il est difficile d'établir un lien direct entre le type de counselling que nous faisons, moi et le travailleur social qui heureusement n'a pu venir et, et les choses qui se passent à la base.

La demande de services de counselling a effectivement augmenté notamment pour ce qui est des difficultés et des problèmes liés au mariage, par exemple, mais je ne suis prêt à affirmer que c'est à cause des DMPS.

M. David Price: Très bien. J'imagine que vous avez reçu davantage de demandes d'aide reliées au congé pour raisons familiales, un sujet qui est peut-être relié à l'autre.

Avez-vous déjà travaillé dans une autre base?

Cpt Art Crawley: Oui.

M. David Price: Si l'on voulait comparer avec une autre base, je pense au fait que l'on pourrait dire qu'à Goose Bay, les congés spéciaux coûtent sans doute plus cher que dans la plupart des autres bases. Savez-vous si cela est un facteur ici? Peut-on dire que ces congés sont accordés moins fréquemment à cause de la situation de la base?

Cpt Art Crawley: Pour les congés spéciaux, il y a des lignes directrices très claires. Il y a des avantages ici à Goose Bay qui n'existe pas dans les autres bases. Il y a le congé spécial—absence temporaire, que vous connaissez peut-être, qui est accordé aux personnes en cas de décès d'un membre de la famille proche, par exemple. Ils peuvent prendre l'avion alors que quelqu'un qui se trouve à Halifax ne pourrait pas le faire. À Halifax, le militaire pourrait prendre un vol de l'armée en profitant d'une priorité mais ici les soldats reçoivent une indemnité à cause de la difficulté, voire l'impossibilité, de prendre des vols militaires.

M. David Price: Mais vous n'avez pas eu de problèmes à cause de ça, vous n'avez pas vu de personnes pour qui cela constituait un problème? Vous arrivez à trouver une solution, n'est-ce pas? Parce que c'est quelque chose que l'on nous a déjà dit que les congés spéciaux étaient difficiles à obtenir et que les gens avaient du mal à quitter la base.

Cpt Art Crawley: Oui, ces problèmes étaient plus fréquents à Halifax et à Trenton. Comme je l'ai dit, le congé temporaire est un avantage dont nous bénéficions ici.

Cela ne veut pas dire qu'il n'y a pas de problèmes. Il faut bien respecter certaines limites et dans les circonstances où il faut...

M. David Price: Je crois que vous avez répondu à ma question. Vous avez dit que ce problème était plus complexe à Halifax et à Trenton qu'ici.

Cpt Art Crawley: En particulier à cause du fait que depuis mon arrivée, on a modifié les règles applicables à l'utilisation des vols militaires et des conditions à remplir pour pouvoir les utiliser pour des congés spéciaux; c'est pour faciliter les déplacements des soldats, certains soutiennent le contraire. Il est devenu plus difficile de réserver des vols pour les congés spéciaux, parce que les vols militaires sont garantis pourvu qu'on donne un avis de 48 heures. Avec cette garantie, il est parfois plus difficile d'obtenir des sièges pour des congés spéciaux, parce qu'on ne dispose pas toujours d'un délai de 48 heures pour faire la réservation.

M. David Price: Merci.

Le président: Monsieur Hanger.

M. Art Hanger: Mon père, je suis heureux de vous voir ici. J'aimerais vous poser une question au sujet de quelque chose que vous avez dit vers la fin de votre exposé mais j'aimerais d'abord vous poser une question personnelle, si vous le permettez.

J'aimerais savoir depuis combien de temps êtes-vous dans l'armée et quelles sont les raisons qui vous ont amené là? Cela va préparer l'autre question que je voulais vous poser.

• 1935

Cpt Art Crawley: Je suis dans l'armée depuis 10 ans. J'ai été mis en contact avec l'armée lorsque j'étais ministre du culte à Greenwood. Avant cela, je ne m'intéressais pas du tout aux choses militaires. Les raisons qui m'ont amené à entrer dans l'armée sont un peu complexes. Je ne voudrais pas prendre votre temps pour vous en parler à moins que cela vous intéresse particulièrement.

M. Art Hanger: Il y a des gens qui aiment la vie militaire, bien entendu, et vous êtes manifestement placé ici aux premières loges. Vous êtes en contact avec tous les aspects de la vie militaire et des tâches que les militaires accomplissent.

Vous avez parlé dans votre exposé des solutions possibles aux problèmes de moral et il n'y a pas que la solde. Vous avez parlé du fait qu'on a beaucoup critiqué les militaires pour les événements qui se sont produits et je pense que si l'on regarde ce qui s'est passé ces dernières années on peut constater que ces critiques ont eu un effet très négatif sur les militaires.

Vous avez parlé d'ingratitude et aussi du DMPS, un programme de restructuration du fonctionnement de l'armée fondé sur des valeurs économiques et de ses effets sur l'éthique militaire. Cette dernière remarque me fait dire que vous êtes un homme qui réfléchissez, cela est évident, pour avoir formulé cette réflexion. Je crois que l'éthique militaire est un aspect qui n'a pas été véritablement abordé. Peut-être l'a-t-il été mais pas dans le contexte où vous le placez. J'aimerais que vous en parliez davantage, des effets qu'ont eus certains événements sur l'éthique militaire. Comment pensez-vous que la situation va évoluer? Comment l'éthique militaire va-t-elle changer?

Cpt Art Crawley: Il y a un terme qui revient de temps en temps dans la conversation, là encore, je parle de conversation générale et il est difficile de quantifier ces choses, mais c'est l'idée que je me suis engagé dans l'armée et je porte un uniforme parce que cela représente certaines valeurs dans lesquelles je crois, cela comprend le fait d'être prêt à sacrifier sa vie, cela comprend également le mot «devoir». L'éthique militaire regroupe toute une série de valeurs. Lorsque la haute direction prend des décisions qui s'expliquent uniquement pour des raisons économiques, je trouve cela troublant, et je ne suis pas seul à réagir de cette façon. Quelles sont les valeurs auxquelles on me demande d'adhérer lorsque les valeurs que semble valoriser l'institution ne coïncident plus. C'est je crois l'idée que j'essayais de communiquer.

M. Art Hanger: En d'autres termes, vous dites que d'après les commentaires que vous avez entendus et ce que vous avez vécu vous- même, l'idéal militaire semble compromis.

Cpt Art Crawley: L'idéal militaire est compromis, avez-vous dit, monsieur?

M. Art Hanger: L'idéal militaire n'est plus ce qu'il était au départ.

Cpt Art Crawley: Je ne suis pas sûr de comprendre ce que vous me dites.

M. Art Hanger: Je crois que je comprends ce que vous me dites; c'est que selon les valeurs qui composent l'éthique militaire, le soldat incarne un idéal. Il incarne un idéal et c'est cet idéal qui le guide. D'après ce que je comprends, vous dites que cet idéal est en grande partie compromis et qu'on le remplace parfois par d'autres choses, comme les valeurs économiques, quel que puisse être le sens de cette expression.

Cpt Art Crawley: Je crois que le message qu'on nous communique n'est pas clair.

M. Art Hanger: Effectivement.

Cpt Art Crawley: Je crois que la population, la haute direction et les autorités législatives s'attendent à ce que le soldat qui porte un uniforme représente certaines valeurs. C'est ce qu'on attend de lui. Parallèlement, on prend des décisions qui ne tiennent pas toujours compte de ces valeurs. Le message transmis n'est pas clair.

M. Art Hanger: Merci beaucoup.

Le président: Monsieur Clouthier, l'aumônier de notre comité.

• 1940

M. Hec Clouthier: Mon père, voulez-vous l'entendre en confession? Il ment encore.

Des voix: Oh, oh!

M. Hec Clouthier: Il est intéressant de noter que c'est un membre du clergé qui comparaît devant des députés. Cela fait réfléchir. Mais cela dit, mon père, je suis un député tout nouveau. Avant cela j'étais un homme d'affaires.

Avant que tout le monde se mette à m'injurier, je veux dire que lorsque je faisais des affaires, j'aimais gagner de l'argent. Cela dit, il y a deux façons de faire des affaires. La première consiste à agir uniquement en fonction de la rentabilité économique. L'autre façon, comme vous l'avez dit de façon si éloquente ce soir, mon père, consiste à travailler avec les gens. Vous avez établi un lien avec le DMPS, les différents modes de prestation de services, ce qui m'a l'air bizarre, mais quand même, il est vraiment dommage que M. Quinn ne soit pas ici ce soir parce que je ne crois pas que j'ai entendu quelqu'un d'autre décrire ces choses de façon aussi concise et claire comme vous l'avez fait ce soir.

Je viens du monde des affaires, et je sais que vous avez un des grands shibboleths, Ebenezer Scrooge, mais je peux peut-être mentionner un des grands hommes d'affaires de l'époque contemporaine, Andrew Carnegie. Je sais que vous le connaissez parce que vous lisez beaucoup. Il a été souvent accusé par d'autres entrepreneurs d'être trop gentil avec ses employés. Carnegie a dit une phrase célèbre que je vais essayer de retrouver. Il a dit, si vous prenez mes gens et laissez mes usines, bientôt l'herbe poussera sur le plancher de mes usines mais si vous prenez mes usines et me laissez mes gens je construirai avec eux des usines encore meilleures.

Je crois que c'est un peu ce que provoque ce DMPS. Personnellement, je l'ai critiqué. Je sais que ce programme a fait hurler votre député local. Il est pratiquement sur son lit de mort et même avec un pied dans la tombe, on peut encore l'entendre hurler contre ce programme.

Je pense que la plupart des gens qui sont touchés par le DMPS veulent faire leur travail. Ils savent qu'ils ne pourront peut-être plus le faire comme ils le faisaient avant mais ils veulent avoir l'occasion, ils veulent qu'on leur donne la possibilité, de montrer qu'ils peuvent le faire; qu'ils peuvent construire des usines encore meilleures; qu'ils peuvent le faire aussi bien qu'on le faisait avant, pourvu qu'on leur en laisse la possibilité.

Mon père, et mes amis qui sont ici ce soir, j'espère que ce comité, peut-être que c'est déjà trop tard pour Goose Bay et le Labrador, va recommander que l'on ralentisse la mise en oeuvre du DMPS parce que je suis d'accord avec vous quand vous dites que l'objectif suprême ne devrait pas être le dollar tout puissant. C'est le sentiment d'appartenir à un groupe qui partage le même idéal qui devrait nous guider. Je vous remercie beaucoup de votre intervention ce soir.

Le président: Merci beaucoup, capitaine Crawley.

Monsieur Al Babin.

M. Al Babin (témoigne à titre personnel): Bonsoir, monsieur le président et les membres du comité. Je m'appelle Al Babin et je suis l'administrateur des programmes de soutien au personnel de l'escadre. Je suis chargé d'administrer tous les programmes de soutien du personnel pour la 5e escadre, à l'exception de CANEX, le centre de ressources familiales et le conseil communautaire.

Je suis un ancien membre des Forces armées canadiennes où j'ai servi pendant 13 ans comme militaire du rang. Je vais vous exposer certains aspects qui méritent, d'après moi, d'être portés à votre attention. Si vous avez des questions, je vous demande d'attendre que j'aie terminé pour me les poser.

Voici ce dont je vais vous parler: effet des forces alliées sur le PSP, notamment son financement; le coût de la participation aux sports régionaux interbases; les problèmes des jeunes; l'effet du stress sur la communauté militaire de la 5e escadre et les répercussions du DMPS sur le personnel et les employés des programmes de soutien.

Le financement public du PSP est axé sur la récupération des coûts auprès des pays étrangers participant ici à la 5e escadre. Étant donné les différences qui existent entre les pays sur le plan social et sur celui des sports nationaux, il y a des programmes de sports de base, comme je les appelle, destinés aux FC qui sont en train de disparaître progressivement. Le recouvrement des coûts et le processus d'approbation des fonds a entraîné la fermeture de trois grandes installations de PSP ici à Goose Bay: la patinoire des Forces canadiennes, le club de curling et le 1er septembre, et le garage coopératif.

• 1945

Je comprends que les alliés ne soient guère disposés à donner de l'argent pour des installations qu'ils n'utilisent pas. Cela a toutefois pour effet de pénaliser les militaires canadiens affectés ici. Le recouvrement des coûts a non seulement des répercussions sur les installations existantes mais également sur les rénovations et les constructions futures.

Comme la plupart de vous le savent, l'Agence du soutien du personnel des Forces canadiennes a annoncé la mise en route d'un programme d'infrastructure du PSP qui va injecter 150 millions de dollars de dépenses en capital au cours des trois prochaines années.

Notre 5e escadre de Goose Bay ne figure pas parmi les bénéficiaires. Cela s'explique principalement par la lourdeur du mécanisme d'approbation qui prévoit la participation de trois organismes différents, l'Agence de soutien du personnel des forces armées, le comité exécutif du PSP, les autorités de la base et ensuite trois pays alliés différents. Comme vous pouvez l'imaginer, l'escadre, qui a subi une réduction de 25 p. 100 de sa capacité initiale il y a trois ans, n'a pas les moyens d'effectuer tout le travail administratif et les consultations nécessaires pour obtenir cette approbation.

J'aimerais maintenant attirer votre attention sur un autre point, celui du coût de la participation aux programmes sportifs régionaux interbases. Je suis un partisan convaincu du bien-fondé de la devise, un esprit sain dans un corps sain. C'est pourquoi les Forces canadiennes favorisent la participation au programme sportif militaire des FC.

Ici, la 5e escadre, nous avons un programme d'activités sportives interne qui permet de renforcer le moral, l'esprit de corps et la camaraderie par le biais de compétition amicale. Cependant, étant donné l'emplacement géographique de la 5e escadre, il nous est difficile de réunir dans nos locaux des athlètes de haute compétition.

En tant qu'escadre, nous ne participons pratiquement pas aux activités sportives régionales interbases. La 5e escadre est géographiquement située dans la région des sports de l'Atlantique mais elle est regroupée avec la région sportive du Québec. La principale raison qui explique cette anomalie est que les membres de notre escadre ont accès aux vols militaires pour participer à des compétitions régionales. Cela pourrait être un avantage si ce n'était le manque de fiabilité des vols réguliers des Hercules et du temps passé loin de la base que ces déplacements exigent.

Plus précisément, il est difficile pour un superviseur d'accorder à un subordonné un congé de sept jours pour participer à un événement sportif de trois jours. Compte tenu des restrictions financières et des coûts de déplacement considérables qu'entraîne le fait d'être affecté à Goose Bay, la seule façon d'envoyer nos athlètes participer à des compétitions régionales interbases est de recourir au transport aérien militaire. En deux mots, nous n'avons pas d'argent pour le faire.

Il faudrait débourser 20 000 $ pour envoyer une équipe de hockey aux compétitions régionales en utilisant les vols commerciaux. L'année dernière, la 5e escadre n'a pas été en mesure d'envoyer son équipe de hockey des anciens dans les régions du Québec. Cela s'explique pour deux raisons: il n'y avait pas de fonds pour prendre les vols commerciaux et deuxièmement un vol militaire a été annulé ce qui aurait amené les membres de l'équipe à rester loin de la base pendant deux semaines.

Les frais de participation aux activités régionales sont à la charge de l'unité qui envoie les athlètes mais il serait bon que les FC examinent la possibilité de financer tous les programmes sportifs qui exigent des déplacements. Cela éviterait aux bases et aux escadres d'avoir à accorder la priorité à leur fonds de déplacement pour permettre la participation des militaires à ce qui est, je le souligne, un programme encouragé par les FC. Je peux vous dire que le fait de ne pouvoir envoyer l'équipe de l'escadre a gravement affecté le moral des troupes. Cette décision a été prise en février et on en parlait encore hier.

Le sujet suivant dont j'aimerais vous entretenir est celui des problèmes que connaissent les jeunes. Il existe de nombreux programmes destinés aux adultes et aux jeunes enfants mais les adolescents de la 5e escadre sont gravement désavantagés. J'ai un fils de 13 ans et je peux vous en parler d'expérience. En tant que groupe, la communauté militaire que constitue la 5e escadre qui regroupe la police militaire, les officiers de service social, les écoles, l'aumônier, le SRC, le conseil communautaire et le personnel de BSP collaborent étroitement pour essayer de résoudre ce problème. Le principal obstacle demeure toutefois le financement.

À notre époque de coupures budgétaires, il est très difficile de trouver du financement pour des programmes destinés aux jeunes. Les FC ont officiellement déclaré vouloir améliorer la qualité de vie des membres des FC et de leur famille. Plusieurs initiatives ont été prises en ce sens mais aucun crédit n'a encore été affecté aux programmes pour les jeunes.

• 1950

La décision d'accorder ce financement aurait non seulement pour avantage d'améliorer la qualité de vie des militaires et de leur famille mais cela entraînerait une réduction de la criminalité dans les zones de logement militaire.

Pendant les mois d'été de 1997, le personnel du PSP de la 5e escadre a mis sur pied toute une série de programmes destinés à occuper les adolescents. La police militaire m'a informé que pendant cette période le nombre des infractions commises avait chuté. Il est difficile de savoir si cela est directement attribuable aux programmes du PSP mais j'ai tendance à le croire.

J'en viens maintenant au stress qui règne dans la collectivité militaire de la 5e escadre. En tant que chef de la section qui a sans doute l'effet le plus important sur la qualité de vie du personnel qui gravite autour de la 5e escadre, ma principale préoccupation est la lutte contre le stress et le surmenage. Comme les témoignages que vous avez entendus aujourd'hui l'indiquent certainement, les membres du personnel de la 5e escadre, tant militaires que civils, sont de gros travailleurs et ils se dévouent à leur travail et à leur collectivité. Vous auriez du mal à trouver un superviseur qui ne fait pas d'heures supplémentaires pour veiller à ce que soient respectés les nombreux délais qui leur sont imposés.

Je peux vous dire franchement que la rapidité des changements, la restructuration et la réduction de personnel va entraîner l'épuisement professionnel de ces gens dévoués.

Je peux ajouter que lorsque je suis entré dans les FC en 1982, on avait déjà commencé à restructurer et à réduire le personnel, mesure qui devait être temporaire. Nous voici aujourd'hui, 16 ans plus tard, et le changement ne fait que s'accélérer. Il semble que la seule chose dont on puisse être sûr au MDN est que les choses vont continuer à changer.

Venons-en à l'effet du DMPS sur le personnel. Avant d'arriver dans la 5e escadre de Goose Bay, je faisais partie de l'équipe de mise en oeuvre du programme de soutien de personnel au quartier général de la Défense nationale. La mise en oeuvre du PSP était en fait une initiative interne de DMPS. Cela a débouché sur la fermeture de la direction des loisirs et de l'éducation physique et une suppression des classifications et des GPM connexes, ce qui a entraîné la conversion d'environ 575 postes militaires en 500 postes rémunérés par des fonds non publics.

L'initiative du DMPS a certes permis au ministère d'épargner des sommes importantes mais cela n'a été obtenu qu'à un prix très lourd pour le personnel. La mise en oeuvre a été directement axée sur la communication et l'indemnisation. Cela n'a toutefois pas évité de créer beaucoup de stress pour les personnes visées par cette initiative.

Pouvez-vous vous imaginer comment se sent la personne qui sait aujourd'hui qu'elle reçoit une solde et des avantages sociaux confortables et qui apprend le lendemain qu'elle va perdre la plupart de ses avantages et qu'en prime, votre rémunération va être réduite? On a bien réalisé des épargnes et amélioré l'efficacité mais à quel prix, je vous le demande?

Les Forces canadiennes ont commencé à adopter le DMPS. Tous les postes doivent passer le test du DMPS. Mais il faut examiner chaque cas selon ses mérites en tenant compte de tous les facteurs, y compris la réduction des dépenses, l'efficacité, et surtout, l'élément humain.

Mon dernier point concerne les employés du PSP. Il y a à la 5e escadre huit postes PSP rémunérés par des fonds publics; avec la mise en oeuvre du DMPS, ce chiffre est passé à six. Nous subissons également une réduction de personnel, même si nous faisons partie de l'initiative DMPS.

J'ai soulevé la question des employés du PSP pour signaler l'insuffisance des avantages sociaux qui sont accordés aux personnes qui travaillent à la 5e escadre. Tout d'abord, il faut préciser que le commandant de l'escadre est notre employeur officiel, comme il l'est pour les employés civils du MDN et le personnel militaire.

C'est l'Agence de soutien de personnel des Forces canadiennes, une unité du personnel administratif, qui transmet au fonds de l'escadre des fonds correspondants à nos postes. Nous ne sommes pas des fonctionnaires nommés en vertu de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique du Canada mais c'est la Couronne qui verse nos salaires.

L'aspect intéressant de ce système est que si nous avons le même employeur, les employés du PSP payés à même les fonds publics n'ont pas droit aux mêmes avantages sociaux et indemnités que les employés civils du MDN ou les militaires des FC. Plus précisément, les employés du PSP n'ont pas droit à l'indemnité pour l'environnement du Nord, à l'indemnité de voyage pour congé, ils n'ont pas accès aux vols militaires ni droit à l'indemnité de déplacement pour visites médicales. Il est assez ironique de constater que notre rémunération provient du même organisme mais avec des avantages sociaux complètement différents. Ces indemnités reflètent les directives qu'a adoptées le Conseil du Trésor en matière d'indemnités de poste isolé.

Je peux vous dire que cet aspect préoccupe beaucoup pour ce qui est de l'équité en matière d'emploi et constitue un sujet extrêmement délicat avec les autres membres du PSP qui travaillent ici à la 5e escadre. Le problème que posent ces indemnités ici ne se poserait pas dans la plupart des autres bases. Cependant, elles se posent ici à cause de l'isolement de Goose Bay.

• 1955

En conclusion, mesdames et messieurs, j'espère vous avoir donné une idée de ce que sont d'après moi des sujets de préoccupation ici à Goose Bay. Cela fait maintenant un an que je suis à Goose Bay avec ma famille et je dois reconnaître que nous sommes très heureux de vivre dans cet environnement. Les gens du Labrador et de la 5e escadre nous ont très bien accueillis.

J'ai le privilège d'avoir un poste très dynamique qui touche la qualité de vie non seulement des personnes affectées ici mais également celles des civils. Le personnel des PSP qui a été déployé ici depuis l'année dernière a un seul objectif, améliorer la qualité de la vie avec les ressources dont il dispose.

J'insiste sur la nécessité de maintenir, voire dÂaméliorer, les ressources du ministère destinées à ceux qui sont affectés ici aux pays des aurores boréales. Merci.

Le président: Monsieur Price.

M. David Price: Merci, monsieur le président. J'ai plusieurs questions à poser. Premièrement, vous avez dit que vous aviez été dans les forces armées environ 13 ans?

M. Al Babin: En effet, monsieur.

M. David Price: Et pourquoi êtes-vous parti?

M. Al Babin: Pourquoi suis-je parti? C'est très simple. Je n'avais pas l'impression de pouvoir faire confiance aux bureaucrates et à la direction des Forces canadiennes à l'époque et que je ne pouvais pas les appuyer.

M. David Price: Très bien. Qu'est-ce qui vous a incité à revenir?

M. Al Babin: Il est intéressant qu'à titre de civil... Quand j'étais dans l'armée, j'ai travaillé au PSP et ce programme me semblait très dynamique et très nécessaire dans les Forces canadiennes. Pour ce qui est de quitter les Forces et de travailler dans le secteur civil, l'occasion s'est présentée de travailler au sein de l'équipe de mise en oeuvre du PSP, et je l'ai saisie.

À cette époque, j'ai vu quelque chose qui me paraissait prometteur. Nous allions mettre fin à l'hémorragie provoquée par toutes les réductions apportées aux programmes du PSP.

Eh bien, c'est ce qui s'est passé. L'hémorragie s'est arrêtée, mais c'est toujours la même histoire. Nous devons nous renflouer un peu, maintenant. J'ai l'impression que j'ai eu beaucoup de chance de participer à ce processus et de pouvoir améliorer la qualité de vie des militaires.

M. David Price: Approximativement, quand êtes-vous entré en fonction au PSP? Est-ce que c'était peu après votre départ des forces armées que l'on a effectivement ouvert...

M. Al Babin: De fait, c'était à peu près huit mois après mon départ.

M. David Price: Très bien. Et vous avez mentionné un déploiement... Vous êtes ici maintenant. Est-ce que vous avez été déployé ici?

M. Al Babin: Avant de venir ici, je travaillais à Ottawa, et j'ai demandé un poste ici.

M. David Price: Très bien, vous avez demandé un poste et...?

M. Al Babin: En effet, monsieur.

M. David Price: Vous n'êtes pas très loin des militaires, n'est-ce pas?

M. Al Babin: Non. Ce qu'il y a d'intéressant, c'est que parfois je me traite moi-même de civil à cheveux longs et à pieds plats. J'ai beaucoup plus de latitude comme civil que comme militaire. Et cela profite à la personne que je sers et à mon client, c'est-à-dire les Forces canadiennes.

M. David Price: Très bien, merci.

Le président: Merci beaucoup, monsieur.

Madame Laverne Suppa.

Mme Laverne Suppa (témoigne à titre personnel): Je n'ai pas de mémoire à vous lire. J'ai simplement de nombreux points à soulever. Premièrement, je figure dans les papiers de mon mari à la rubrique PC, M&E: personnes à charge, meubles et effets—une catégorie où je suis en bonne compagnie.

Je gravite autour des Forces canadiennes depuis près de 30 ans et j'accompagne mon mari de base en base, dans tous ces lieux de villégiature où le devoir nous amène.

J'ai pu être témoin de la détérioration du moral des troupes. Je vois à quel point cela a touché mon mari. Je vois à quel point cela touche les jeunes qui entrent dans les forces armées.

Vous savez, nous avons eu droit à toute une augmentation en décembre: 1,47 p. 100. On se demande combien de temps il a fallu à un fonctionnaire pour arriver à ce chiffre dans un bureau à Ottawa. Lorsque nous avons reçu cette augmentation, en décembre, le fisc était déjà passé et il restait à peine assez d'argent pour couvrir tous les autres frais. Alors nous n'avons perçu aucune différence en janvier.

Cela fait un peu l'effet d'une gifle de voir que des gens, vous savez les généraux, etc., touchent une prime de 4 000 $ pour leur dur labeur. Et qu'est-ce que l'on accorde aux simples soldats et aux caporaux qui, concrètement, mettent en oeuvre les décisions de ces responsables? Personne ne leur octroie de prime. On leur consent une augmentation de 1,47 p. 100.

Le loyer des LF augmente chaque année. Le gouvernement est notre propriétaire, mais il ne nous accorde pas d'augmentations pour couvrir la hausse du loyer. L'électricité augmente. Tout augmente, sauf la solde.

Nous touchons une prime d'éloignement ici, environ 450 $ par mois, mais c'est un montant imposable, alors il nous reste un peu plus de 200 $.

• 2000

Prenez le cas des LF. Quand vous touchez une indemnité de subsistance, vous avez un avantage non imposable qui vous aide à absorber le coût de la vie lié à votre emploi. Pourtant, quand on nous affecte ici, notre indemnité de vie dans le Nord est imposable.

À l'heure actuelle, à l'épicerie, vous payerez près de 5 $ pour deux litres de lait et 4 $ pour une petite laitue pommée. Cela... Quand les gens viennent ici avec de jeunes enfants, cela peut constituer un handicap.

Et puis il y a les impôts. Demandez à quelqu'un qui est affecté en Alberta. S'il vient ici en août, par exemple, à Terre- Neuve, où le taux est de 69 p. 100, il devra aussi payer des impôts au gouvernement de Terre-Neuve à la fin de l'année. Il aura un bon montant à payer à la fin de l'année fiscale.

Il serait bon que l'on adopte un taux d'imposition uniforme dans l'ensemble du pays, et cela profiterait aux forces armées, car quand nous passons d'une province à l'autre nous n'aurions pas à supporter des difficultés supplémentaires. C'est un détail qui peut vraiment faire du tort à quelqu'un.

Il y a les coûts de déplacement entre Goose Bay et l'extérieur. Oui, nous avons droit à une indemnité de transport en congé par année, pour payer une partie du coût du billet, mais tout est fonction de la région du pays où vous allez et de la possibilité d'avoir un billet à prix réduit, si vous voulez allez dans l'Ouest. Dans certaines régions, il en coûte moins d'aller en Europe que ce qu'il me faut payer pour aller d'ici à Halifax.

Donc, vous affectez des gens ici et vous leur dites, eh bien, nous allons vous donner une indemnité de transport en congé, nous allons vous donner 1 100 $ une fois par an pour vous aider à sortir un peu, mais le reste de l'année, n'y pensez même pas. Débrouillez- vous.

Nous avons une route ici que l'on appelle la Route translabradorienne. Je crois qu'un sentier de chèvre au Tibet est sans doute en meilleur état que ce chemin pendant la plus grande partie de l'année.

Il y a aussi la façon dont on traite certains jeunes. Je vais vous donner l'exemple de ma fille. Son mari est parti six mois en formation en vue d'un reclassement. Ils étaient basés à Gagetown et son mari a été affecté à Petawawa. Cette affectation entrait en vigueur tout de suite après la date à laquelle il aurait dû rentrer à Gagetown. Les responsables des forces armées ont décidé de l'affecter directement de Chilliwack à Petawawa—pas de voyage à la maison, rien.

Ma fille et son mari devaient prendre certaines dispositions: enlever des clôtures, emballer les effets, etc. Alors les autorités leur ont dit très bien, prenez un congé et nous allons vous payer votre billet jusqu'en Ontario, mais ensuite, débrouillez-vous.

Par conséquent, il a dû payer de sa poche son billet d'avion pour Halifax. Ma fille a dû aller le chercher en voiture. Leurs frais d'hébergement pour la nuit, ils les ont aussi payés eux- mêmes.

Ensuite, pour aller de Gagetown à Petawawa, mon gendre a dû payer lui-même, simplement pour pouvoir passer une semaine là-bas à collaborer aux préparatifs avant l'arrivée des déménageurs.

Vous savez, ce sont des choses comme celles-là qui font que les gens se disent et pourquoi? Cela n'en vaut tout simplement pas la peine parfois, quand on se rend compte de toutes les difficultés qu'il faut surmonter.

Nous avons été à Gagetown sept ans, et je présidais un comité de collecte de fonds pour la banque d'alimentation. Permettez-moi de vous dire que nombre de familles de militaires utilisent cette banque d'alimentation.

Les loyers très élevés sont un autre problème. Vous allez d'une base à l'autre et, en principe, les taux sont fixés en fonction de la région où vous habitez. Dans certains endroits, un LF coûte 700 $ par mois. Vous allez ailleurs, et le logement vous coûte 350 $.

Alors quand vous habitez un logement de 350 $... Vous vous dites chouette, je pense que je peux m'offrir une voiture neuve cette année. Votre vieille voiture tombe en morceaux, alors vous achetez une voiture neuve.

On vous affecte ailleurs, là où le loyer est de 700 $. Vos impôts augmentent comme tout le reste, et les forces armées ne vous offrent pas de dédommagement financier pour vous rendre la vie un peu plus facile.

Il y a bien des petits détails de ce genre. Je pense par exemple au ST, quand les militaires partent en ST ils touchent 4 $ par jour au titre des frais de subsistance. Je ne sais pas ce qu'il en est dans votre cas, mais 4 $ par jour en service temporaire c'est tout simplement... Pas à notre époque.

C'est une accumulation de petits irritants. En ce qui concerne les affectations des familles, quand j'étais à Gagetown j'ai vu des gens rentrer de Bosnie et les difficultés que leurs familles ont éprouvées... Je travaillais à l'école là-bas et, je peux vous le dire, il y a bien des familles qui ont des problèmes à l'heure actuelle—un grand nombre d'entre elles. Leurs enfants ont beaucoup de problèmes.

À deux pas de chez moi, il y avait une jeune femme dont le mari était parti. Elle a accroché un ruban jaune à sa porte et elle a déclaré qu'elle l'enlèverait quand son mari rentrerait. Son mari est mort là-bas. Il est mort en service. Un mois plus tard, les responsables de la base se sont finalement dit qu'il fallait peut- être aller enlever le ruban jaune de la porte de cette pauvre femme.

• 2005

Il y a trop de ces irritants. La qualité de la vie, c'est une véritable blague. Les responsables disent toujours oh, nous avons beaucoup à offrir, mais lorsqu'il faut vraiment mettre les programmes en oeuvre il se passe toujours quelque chose et rien n'aboutit. Ce n'est pas vrai.

C'est tout ce que je voulais vous dire. J'en ai déjà dit assez.

Le président: Merci beaucoup. M. Hanger a une question à vous poser.

M. Art Hanger: Madame Suppa, vous êtes en milieu militaire depuis 30 ans ou depuis plus longtemps?

Mme Laverne Suppa: De fait, depuis plus longtemps. J'ai grandi chez les militaires, j'étais gosse de militaires, puis j'en ai épousé un. Dans un moment de faiblesse.

M. Art Hanger: J'imagine que vous avez été témoin de bien des changements.

Mais vous parlez ici de la façon dont certains des jeunes militaires, ceux qui viennent de commencer leur carrière, sont traités. Est-ce que vous constatez un changement notable d'attitude à l'égard des jeunes...?

Mme Laverne Suppa: J'ai deux gendres qui sont tous deux militaires. Alors je vois, et j'entends, beaucoup de choses. Là où je travaillais auparavant, je voyais les soldats qui rentraient à la fin de leur journée. Ils s'asseyaient et parlaient de bien des choses.

Pour être franche, très souvent je pense que les responsables n'écoutent pas, ou qu'ils ne veulent même pas écouter, ce qui se passe dans les grades inférieurs. Ils sont assis à leur bureau pendant la journée, ils conçoivent toutes ces choses et ils se désintéressent de la façon dont cela est mis en oeuvre et à quel coût.

D'abord que le travail est fait, tant qu'ils peuvent toucher leur prime de 4 000 $ à la fin de l'année et se pavaner. Là encore, la qualité de la vie s'est beaucoup détériorée.

M. Art Hanger: Je pense que c'est ce que je vous demande. En comparaison de votre vie, quand vous vous êtes mariée et que vous avez vécu avec votre mari. Évidemment, les choses ont beaucoup changé depuis?

Mme Laverne Suppa: Oui, énormément.

Je suis presque désolée que mes filles aient épousé des militaires et que cela est la vie qu'elles... en raison de la situation actuelle.

Croyez-moi, je peux vous dire qu'à mon avis, ils sont rares ceux qui restent chez les militaires par amour pour l'institution. Ils restent pour la pension, et aussi pour la sécurité. Du moins, ils savent qu'ils toucheront quand même un chèque aux deux semaines. Ce n'est pas beaucoup, mais c'est déjà quelque chose.

Les relations publiques laissent à désirer dans les forces armées, vous savez. Les erreurs sont largement commentées, par exemple ce qui s'est passé dans ce petit groupe de militaires quand les choses se sont gâtées en Somalie. Mais qu'en est-il des milliers d'autres militaires de notre pays?

Vous savez, parfois, quand mes enfants passent d'une collectivité à l'autre... Dans certains endroits, nous étions vraiment les bienvenus, mais ailleurs, on nous traitait pratiquement comme des criminels, parce que nous étions militaires. Les enfants rentrent de l'école pendant la journée parce qu'ils ont entendu des choses au sujet du travail de leur père. Vous savez, il est militaire, il est... Je dois réconforter mes enfants et leur dire que leur père est bon, que le voisin est bon, et qu'il ne faut pas s'occuper... Ces gens sont ignorants. Ils ne connaissent pas la vérité. Il faudrait les prendre en pitié parce qu'ils ont l'esprit si étroit.

C'est un travail très difficile de nos jours que d'essayer d'élever une famille dans les forces armées, parce qu'il y a trop de pressions qui s'exercent sur vous, de toutes parts.

M. Art Hanger: Merci beaucoup.

Le président: Merci, monsieur Hanger.

Madame Longfield.

Mme Judi Longfield: Madame Suppa, j'ai demandé à l'un de nos témoins précédents ce qu'il pensait des logements militaires et de l'importance de se tenir les coudes dans les forces armées. Pourriez-vous me dire ce que vous en pensez? Vous avez 30 ans d'expérience militaire, sinon plus.

Mme Laverne Suppa: Nous arrivons à l'étape de notre vie où notre plus jeune part pour l'université à l'automne. J'en suis maintenant au point où il m'est indifférent d'habiter ou non dans un milieu militaire.

Je pense que certains métiers... Mon gendre est membre du RCR et il sait déjà qu'il sera déployé en Bosnie en janvier. Je pense donc qu'il est très important pour ces personnes, pour les jeunes familles, d'habiter au sein d'une communauté militaire où ils trouvent du soutien. Vous savez, on entend toutes sortes de choses aux informations, et il vaut mieux avoir un réseau de femmes qui éprouvent les mêmes inquiétudes au sujet de leurs maris, en compagnie de leurs enfants.

Alors à mes yeux il est très important que ces personnes puissent vivre dans une communauté militaire. Peut-être que cela n'est pas aussi important quand on travaille ailleurs.

• 2010

Mme Judi Longfield: C'est mon impression, et pourtant, parce que je n'ai pas vécu moi-même cette situation, j'ai besoin de poser souvent la question.

Vous avez mentionné qu'il vous fallait prévenir vos enfants de ce qu'ils pourraient entendre à l'école. J'imagine que de temps à autres, quand le conjoint est déployé, le fait que papa ou maman soit parti pendant de longues périodes doit être très difficile pour les enfants. J'imagine que s'ils savaient que les autres enfants avec qui ils jouent ou qu'ils voient régulièrement vivent la même chose, ils se sentiraient peut-être moins abandonnés par un parent.

Mme Laverne Suppa: Je ne veux pas que mes enfants grandissent en s'appuyant entièrement sur la communauté militaire, car il est important qu'ils sachent qu'il y a une autre vie, de l'autre côté de la clôture. Par ailleurs, ils ont besoin d'un certain soutien de la part de leurs semblables—je ne trouve pas d'autres mots—, de la part de quelqu'un qui comprend ce qu'ils éprouvent.

Vous n'avez pas vu votre mari depuis cinq mois, la lessiveuse est en panne, les enfants sont malades... Bien souvent, vous tenez le rôle des deux parents dans une famille de militaire. Bien souvent, j'ai dû être à la fois la mère et le père. On vous affecte sur une côte tandis que votre famille est sur l'autre. Le mari est parti pendant six mois, vous avez les enfants, l'école, tous les problèmes à régler. Il est réconfortant de savoir que ce que votre mari est parti faire présente au moins une certaine valeur pour quelqu'un d'autre.

Mme Judi Longfield: En effet, je le reconnais. Je vous remercie infiniment.

Le président: Merci beaucoup.

M. David Pratt: Monsieur le président, j'ai une question à poser.

C'est peut-être une question piège, mais vous semblez avoir une grande expérience de la vie militaire et de la façon dont les choses ont évolué au fil des ans, et j'ai envie de vous poser cette question. D'après votre connaissance des diverses branches... Vous avez un gendre dans le RCR et vous semblez avoir une certaine connaissance de la force aérienne, n'est-ce pas?

Mme Laverne Suppa: En effet.

M. David Pratt: Quel élément des Forces canadiennes, à votre avis, connaît la situation la plus difficile par les temps qui courent en ce qui concerne les familles?

Mme Laverne Suppa: Les deux.

Des voix: Oh, oh!

M. David Pratt: Peut-être que la question est trop personnelle.

Mme Laverne Suppa: Mon mari était dans la marine.

M. David Pratt: Alors vous avez l'expérience des trois éléments.

Mme Laverne Suppa: Nous avons vécu sur une base de la force aérienne pendant un an, et la force aérienne... Je ne peux vraiment rien dire au sujet de cet élément...

À mes yeux, la vie est plus facile pour les familles affiliées à la force aérienne. C'est certain. Les militaires ont pratiquement des emplois de neuf à cinq. J'en connais qui ne seraient pas d'accord avec moi.

Les membres de la force maritime partent sillonner la grande bleue. Pensez à ce petit incident qui s'est produit il n'y a pas très longtemps, quand les conjointes ont appris par les médias, par la télévision, que leurs maris se dirigeaient à nouveau vers le golfe Persique. Cela vous fait plus d'effet qu'une tasse de café. Vous n'avez plus envie de dormir. Les maris sont souvent partis.

Mon mari ne travaillait pas en campagne à l'époque où nous habitions dans une base de l'armée. Il avait des heures de travail régulières. Souvent, cependant, les jeunes militaires de l'armée n'ont pas la vie facile. Je peux franchement dire que c'est sans doute dans l'armée que c'est le plus difficile.

Des voix: Bravo!

M. David Pratt: Merci.

Le président: Merci.

Madame Cavelle Barker. Elle n'est pas ici.

Sergent Joe Buckle.

Le sergent Joe Buckle (témoigne à titre personnel): Bonsoir, mesdames et messieurs. Je ne suis pas un orateur, alors je vous demande de l'indulgence.

La raison pour laquelle j'ai demandé à vous rencontrer... De fait, j'espérais un peu que le chef Bouzane aborderait la question cet après-midi, mais comme il n'en avait pas le temps il m'a demandé de présenter moi-même mon cas.

À l'heure actuelle, j'attends une décision au sujet d'une procédure de grief que j'ai entamée pour perte d'avantages découlant de ma dernière affectation. En 1996, j'ai été muté de Trenton à Goose Bay et j'ai dû vendre ma maison à Trenton. J'ai demandé qu'on m'inscrive au programme de vente de domicile garantie qui avait été annoncé ce printemps-là. Ma demande a été acceptée, mais en raison de difficultés d'ordre administratif et de retards dans la mise en oeuvre du programme—chose courante chez les militaires—, mon domicile n'a été pris en charge par le personnel du programme qu'en novembre 1996.

• 2015

À cette époque, le bureau du coordonnateur de la planification, à Ottawa, m'a informé que ma demande de remboursement de la pénalité découlant de la libération de l'hypothèque avait été refusée parce qu'elle était considérée comme une différence d'intérêt hypothécaire plutôt que comme une pénalité. D'après le Conseil du Trésor, la différence d'intérêt hypothécaire n'est pas remboursable.

Je demandais 2 813,11 $. Cela aussi est irritant, la simple pénalité d'intérêt. D'après mes calculs, au taux d'intérêt que je payais à l'époque, quand l'hypothèque a été acquittée, si j'avais payé une pénalité de six mois j'aurais eu droit à un maximum de 3 261 $. Je réclamais en fait environ 447 $ de moins que le maximum auquel j'aurais eu droit si le libellé de mon hypothèque avait été un peu différent.

Quand tout a été réglé, j'attendais le certificat d'acquittement de l'hypothèque que mon avocat devait m'envoyer. Ici, à mon poste de planification des mouvements—nous sommes l'autorité administrative locale pour les services d'enlèvement du gouvernement—, j'ai pu me livrer à un petit calcul hypothétique du coût du transport de tous les bien que j'avais mis en entreposage à Trenton. D'après ce que j'avais en entrepôt, le poids estimatif de ce que j'avais entreposé, j'ai calculé ce qu'il en aurait coûté de transporter mes effets en 1996, aux taux de 1996, jusqu'à Goose Bay et ce qu'il en aurait coûté de les transporter à la fin d'une affectation de trois ans. Parce que j'ai laissé mes meubles en entrepôt à Trenton pendant trois ans, le gouvernement a économisé environ 20 000 $.

Pourtant, je n'ai pas le droit de demander 2 800 s$ de remboursement au titre d'une hypothèque que je n'ai pas transférée lorsque j'ai dû m'installer dans les logements militaires ici parce que je n'avais pas assez de meubles pour recourir au marché résidentiel local.

Après avoir rassemblé tous les documents, en mars 1997, j'ai présenté ma demande de redressement de grief. Ce grief suit la filière depuis quelque 14 mois. Aujourd'hui, de fait, j'ai finalement reçu un avis d'Ottawa m'informant que le dossier vient d'être présenté au chef d'état-major de la Défense et que je devrais connaître bientôt la décision finale.

Il est toutefois intéressant de noter que le bureau d'Ottawa m'a envoyé ce dossier le mois dernier et que, dans tout le document, il n'y avait aucune mention, aucune indication que ma demande était examinée; j'étais sans nouvelle. On me traitait comme si j'étais un membre régulier des Forces canadiennes, ou même un fonctionnaire que l'on mutait ailleurs au pays avec tous les avantages accordés au titre de la réinstallation.

En 1996, il y a eu environ 15 000 déplacements au sein du gouvernement fédéral dans l'ensemble du pays, dont seulement 71 vers Goose Bay. Je pense que nous avons droit à un traitement juste et équitable.

Monsieur, c'est tout ce que je voulais vous soumettre.

Le président: Monsieur Hanger, vous avez une question?

M. Art Hanger: De fait, monsieur le président, j'aimerais demander au témoin s'il a un résumé de ce processus qu'il a suivi, sous une forme qu'il pourrait remettre au comité.

Sgt Joe Buckle: J'ai tout le dossier, monsieur. Le dossier m'a été remis accompagné d'une lettre. En ce qui concerne l'accès à l'information et la confidentialité, ce genre de choses, je vais transmettre le dossier à l'adjudant-chef de mon escadre, qui décidera si je peux ou non vous le communiquer. Je ne suis pas certain que j'en ai le droit, que je peux divulguer de l'information.

M. Art Hanger: Je ne songeais pas vraiment à l'ensemble du dossier. Vous parlez d'une préoccupation, comme vous nous l'avez indiqué au début de votre intervention, au sujet d'un grief. Vous n'étiez pas satisfait de cette expérience. Je crois qu'en résumé, c'est le processus lui-même, et s'il était possible de soumettre...

Sgt Joe Buckle: J'ai les notes de breffage que j'ai constituées hier soir et dont je viens de parler, j'y expose les procédures, les divers coûts que j'ai encourus, etc. Je ne sais pas si c'est cela que vous voulez, monsieur, mais je peux vous le remettre.

M. Art Hanger: Je crois qu'on y trouverait sans doute suffisamment de détails, en effet. Si vous pouviez nous le remettre, nous vous en serions reconnaissants.

Sgt Joe Buckle: Très bien, monsieur.

Le président: Merci, monsieur Hanger.

Vous pouvez laisser ce document au greffier.

Une voix: Il n'y a pas de raison pour que vous ne puissiez pas lui donner tout le dossier.

Sgt Joe Buckle: Je vais photocopier le document et vous le remettre demain matin, monsieur.

Le président: Merci beaucoup.

Monsieur Pratt.

M. David Pratt: Je suis curieux. Vous avez mentionné que votre dossier avait été transmis au CEMD.

• 2020

Sgt Joe Buckle: Mon dossier vient de parvenir au CEMD, monsieur. Il a suivi la chaîne de commandement jusqu'au commandant de la force aérienne, qui a appuyé ma position. De là, il a été transmis au directeur des avantages sociaux et de la solde. Le Conseil du Trésor a décidé qu'en raison du libellé de l'hypothèque, l'hypothèque prévoyait une différence d'intérêt. C'est quelque chose que j'aurais sans doute dû payer, même si je n'étais pas parti pour des raisons d'ordre militaire. Pour cette raison, on n'a pas appuyé mon grief.

Par la suite, le dossier m'est revenu. Il me restait la possibilité de présenter des commentaires supplémentaires. À cette étape, j'ai adressé le dossier au CEMD, aux fins de décision. J'ai alors fait remarquer que j'étais l'une des 71 personnes dans l'ensemble du gouvernement fédéral à qui on avait imposé de telles contraintes. Cela ne constitue pas un traitement juste et équitable.

Le dossier est maintenant devant le CEMD. Tout ce que je sais aujourd'hui, c'est que je connaîtrai bientôt la décision. J'ignore quand; cela pourrait être demain ou dans six mois. Tout dépend du moment où le CEMD aura le temps d'examiner le dossier.

M. David Pratt: Cela me semble terriblement bureaucratique, monsieur le président, qu'un dossier de ce genre... Il me semble qu'il s'agit d'une question relativement simple, mais il est horriblement bureaucratique que le dossier circule dans l'ensemble du système pour finalement arriver sur le bureau du CEMD.

Sgt Joe Buckle: Une question qui relève de la compétence d'un commandant intermédiaire doit aller jusqu'au sommet et, finalement, jusqu'au bureau du ministre pour être approuvée. Nous avons ce que l'on appelle la chaîne de commandement militaire qu'il faut suivre, même si les intermédiaires ne sont pas nécessairement en mesure de prendre des décisions.

M. David Pratt: Merci.

[Français]

Le président: Le prochain témoin sera le capitaine Brian Quick.

[Traduction]

Le capitaine Brian Quick (témoigne à titre personnel): Bonsoir, mesdames et messieurs, monsieur le président. Je suis le capitaine Brian Quick et je suis l'officier d'administration du personnel de la 5e Escadre. J'occupe ce poste depuis juillet 1997. J'ai dix années d'expérience pour faire mon travail ici, à Goose Bay.

Je vous parle ce soir en tant que simple militaire et non pas à titre officiel. Il s'agit de mes propres réflexions, fondées sur mon expérience ici et dans les FC en général. Ce soir, j'aimerais attirer votre attention sur les points suivants: la solde, l'attitude du QGDN à l'égard de Goose Bay, les perspectives d'emploi des conjoints, la qualité de la vie par opposition à la réalité.

Mesdames et messieurs, je suis sans doute la première personne qui se présente devant vous pour affirmer qu'elle ne demande pas une solde plus généreuse. Je suis disposé à accepter une augmentation, mais la solde n'est pas ma préoccupation première. J'appuie les initiatives du CEMD qui cherche à assurer le rattrapage et des augmentations liées au coût de la vie, et j'admets sans réserve que la fonction publique dans son ensemble a pris tellement de retard que depuis quelques années elle perd de l'argent. Il est impérieux que nous reprenions le terrain perdu. Toutefois, en tant que capitaine, avec les responsabilités et les fonctions qui sont les miennes, je considère que ma solde est adéquate.

Je veux aussi parler de l'attitude du QGDN à l'égard de Goose Bay. Rien n'est simple à la 5e Escadre. Les affectations sont complexes en raison de leur nature très générale; les problèmes personnels deviennent les problèmes du service; notre effectif est limité, ce qui signifie que chaque personne a des responsabilités et des compétences précises, qui ne peuvent pas être transférées à quelqu'un d'autres.

Jusqu'à maintenant, cette année, le DRAS m'a affirmé que notre PAA sans précédent n'a rien d'extraordinaire et que toute demande présentée au DRAS sera examinée en temps et lieu. Cela ne répond pas aux besoins d'un caporal affecté à Esquimalt en avril, quand la route est fermée et que le traversier n'est pas encore en service. Ce caporal est alors à la merci du DRAS pour approuver ses frais de location de voiture pendant qu'il attend que son propre véhicule soit expédié à sa nouvelle unité. Cela ne suffit pas.

Personne au QGDN n'a la moindre idée de ce que c'est que de vivre dans un endroit isolé. Gander est une petite ville et tout y est cher, mais au moins vous pouvez voyager à l'extérieur. Goose Bay est aussi un petit centre et tout y est cher, mais il est difficile d'aller se reposer ailleurs. Évidemment, le Hercules vous emmène à Trenton, mais si vous n'avez pas de famille en Ontario le vol gratuit entraîne des dépenses de 1 000 $ pour l'hôtel, les repas, la voiture de location, etc.

• 2025

Sur le plan de la carrière, la situation n'est guère meilleure. À mon avis, nombre de militaires affectés à la 5e Escadre cet été ont eu droit à l'affectation qu'ils souhaitaient le moins. Aucun des membres de mon personnel n'est heureux. Certains croient que Goose Bay équivaut à une affectation à l'étranger et qu'on se bouscule pour y venir—sommes-nous vraiment si chanceux? À quel point sommes-nous chanceux d'avoir connu Goose Bay? Si nous avons tant de chance, alors pourquoi est-ce que les gestionnaires de carrières ne se précipitent pas tous ici après leur affectation au QGDN?

La 5e Escadre n'est plus ce qu'elle était il y a dix ans. Demandez-le à n'importe qui ici. L'unité est plus petite, elle doit accomplir plus de travail et elle a moins d'installations de loisir. Les avantages disparaissent avec les années. Ceux qui terminent une affectation à Goose Bay ont droit à un répit et devraient recevoir un dédommagement quelconque pour le temps passé dans un lieu isolé. Je me suis porté volontaire pour venir à la 5e Escadre et je suis certain que j'ai ainsi évité au gestionnaire de carrières de devoir infliger à quelqu'un une affectation ici. Je suis venu, attiré par le défi, et je l'ai accepté sans réserve. Ma vie serait cependant plus facile si j'avais accepté un poste ailleurs au Canada. Goose Bay n'est pas dénuée de charme, mais j'espère sincèrement que mon gestionnaire de carrières m'offrira quelque chose d'un peu plus près de ce que je demande pour ma prochaine affectation.

Je veux aussi parler des perspectives d'emploi des conjoints. Quand j'ai accepté cette affectation, nous avons quitté Winnipeg et mon épouse a laissé son emploi, comme nos conjoints doivent si souvent le faire. Une partie du processus de sélection porte sur la capacité financière d'absorber une baisse de revenu, et nous pouvions nous en tirer avec un seul salaire, quoique notre style de vie serait plus modeste. Nous vivons dans une société où il est normal d'avoir deux revenus, et ma famille n'est pas différente des autres. Il ne faut pas non plus oublier l'importance de l'emploi pour l'estime de soi et la confiance en soi du conjoint. Mon épouse a cherché du travail, et une entreprise locale lui a répondu qu'elle n'embauchait que «des gens de la vallée». Cela signifie qu'on n'envisage que les candidatures des habitants de l'endroit et non pas celles des conjoints des militaires.

Un autre conjoint de militaire m'a fait part d'une expérience similaire. Les occasions d'emploi sont limitées dans la base, en raison de l'application du programme DMPS, et mon épouse a posé sa candidature auprès d'employeurs mais elle a attendu en vain les réponses. Est-ce que nos conjoints doivent se résigner à s'inscrire à l'assurance-emploi ou à accepter des postes dans la restauration- minute?

Finalement, j'aimerais aborder la question de la qualité de la vie par opposition à la réalité. Je suis un militaire affecté à une base isolée. J'accepte le fait que la 5e Escadre se trouve au sein d'une petite collectivité où certaines entreprises ferment encore à l'heure du déjeuner et où les services à la clientèle sont un concept parfaitement inconnu. Je me suis résigné au fait que le lait coûte 3,20 $ en saison et 4,09 $ quand les routes sont fermées. Je me fais peu à peu à l'idée d'une collectivité civile qui me reproche mon existence et qui me reproche le DMPS, comme si j'y étais pour quelque chose, mais qui se plaint de ne pas avoir droit aux mêmes privilèges que moi et qui aimerait pouvoir faire ses emplettes au CANEX.

Je ne me demande plus pourquoi mon épouse ne peut pas trouver d'emploi dans la vallée alors que les postes de la base sont offerts à tous. Je ne me demande même plus pourquoi, en 1998, dans une collectivité où il y a trois bureaux de poste, il est impossible d'expédier son courrier à la fin de la journée de travail et ensuite d'aller chercher un colis à l'autre bureau de poste avant l'heure de fermeture.

Mesdames et messieurs, le style de vie qui vous paraît normal n'est qu'un rêve ici. Notre qualité de vie est tout à fait différente de la vôtre et elle ne cesse de se détériorer à mesure que la base elle-même perd de l'importance. Mon niveau de vie et ma qualité de vie n'ont cessé de se détériorer depuis que nous avons quitté Winnipeg pour venir ici. Je suis mieux payé et j'ai droit à une allocation de vacances, mais il me coûte beaucoup plus cher de vivre ici et il est bon d'effectuer plus d'un voyage pour visiter sa famille ou simplement pour échapper à l'isolement. N'était de l'excellent poste que j'occupe ici, je serais très malheureux.

Je dois ajouter que je ne comprends pas très bien ce qui se passe ici ce soir. Est-ce que M. Quinn est un militaire ou une personne à charge, car j'avais cru comprendre que c'était l'objet de la séance de ce soir. Est-ce que le comité examine le DMPS ou la situation du personnel militaire?

• 2030

Je peux vous fournir un autre exemple. L'exposé de ce soir, qui a béni 60 minutes de mon existence, illustre à nouveau le fait que nous, militaires, sommes accessoires à la 5e Escadre. M. Quinn a parlé de ce beau bâtiment inutile... C'est le mess dont ma qualité de vie est tributaire, mais c'est un bâtiment inutile.

Je me rends parfaitement compte que rien ne peut être fait au sujet de ce qui précède. Toutefois, je parle de la réalité de ce que j'appelle la vie à Goose Bay pour indiquer que la qualité de vie est une notion subjective.

Bien sûr, j'accepterais une augmentation de solde de 1 000 $ par mois, mais je n'arriverais toujours pas au bureau de poste avant l'heure de fermeture et le lait écrémé me coûterait encore un prix exorbitant la plupart du temps. Ce que je veux, c'est que le QGDN reconnaisse que Goose Bay est un lieu bien particulier et que nous avons droit à certains égards.

Toujours au sujet de la qualité de la vie, je crois qu'il faut souligner le dévouement au service, par opposition à la survie. J'ai travaillé au quartier général du commandement aérien, sous le leadership éclairé du lieutenant-général DeQuetteville. La détermination de ce grand visionnaire en matière de qualité de la vie se heurtait souvent à la réalité des exigences du service. Ici, à Goose Bay, notre travail est axé sur les personnes, et un geste de ma part a des effets directs et personnels sur un autre militaire. Vous ne pouvez jamais vous absenter du boulot, parce que la collectivité est petite, et vous êtes vraiment en service 24 heures par jour et sept jours par semaine. C'est cela, la vie d'un administrateur de petite unité et, en effet, c'est la raison pour laquelle j'aime mon travail.

J'en ai, toutefois, contre cette idée absurde qu'on peut tout faire. En tant que militaire, j'ai l'impression de ne pas pouvoir refuser une demande ou une mission. Huit heures au bureau ne suffisent tout simplement pas pour exécuter tout le travail quotidien, même si on fixe des priorités, qu'on délègue des tâches et qu'on élimine les inefficacités. Les FC en sont réduites au point où nous avons ce que j'appelle une organisation squelettique, où des responsabilités précises reposent sur les épaules de chaque militaire et que si cette personne s'absente le travail ne peut pas être accompli.

Quand j'étais au quartier général du commandement aérien, j'étais «trop important» pour qu'on m'autorise à suivre un cours de français que j'ai pourtant demandé à plusieurs reprises. Et vous savez quoi? Mon gestionnaire de carrières m'a dit lors de ma dernière entrevue que j'aurais de bien meilleures chances d'être promu si je pouvais améliorer mes connaissances en français. Voilà ce que l'on pense du bien-être des subordonnés.

À l'époque où j'étais au quartier général du commandement aérien, je me suis marié. Mon général et mon colonel m'ont fait de longs discours au sujet des heures de travail, de mon engagement envers mon épouse, de la vie au foyer qui devait être ma priorité absolue, etc. Ajoutez à cela qu'il faut être en bonne forme physique, c'est-à-dire aller régulièrement au gymnase. Tout cela est très joli, mais le travail n'arrête pas et si vous n'acceptez pas et n'accomplissez pas chaque tâche avec la dernière des énergies, vous semblez manquer d'ardeur.

C'est particulièrement troublant à une époque où les promotions sont si rares. Vous devez fournir 110 p. 100 de votre capacité tous les jours pour obtenir un bon RAR—un rapport d'évaluation du rendement—et espérer passer en tête de la liste des candidats par ordre de mérite pour être promu. Nous finirons par y laisser notre peau. Nous travaillons dur, ici, à Goose Bay. J'ai travaillé très fort au quartier général du commandement aérien, et devinez? J'ai prédit que je travaillerais très fort dans mon prochain poste. Pourquoi? Parce que nous avons énormément de travail à abattre et bien trop peu de gens pour l'accomplir.

Quelque chose doit céder. Ce qui m'inquiète, c'est que les compressions se poursuivront dans les forces armées et les professionnels qui triment dur ne seront plus capables de suivre le rythme, ils ne seront pas promus et ils perdront toute motivation, à moins qu'ils ne se rendent simplement compte que rien n'est plus important que la famille et qu'ils se contentent de travailler huit heures par jour.

J'ai rencontré des travailleurs extraordinaires chez les militaires; ils travaillent sans relâche pour atteindre des objectifs parfois futiles, simplement parce qu'on le leur demande. La Reine et le pays sont des symboles très vivants pour ceux qui portent l'uniforme. J'aime mon travail, ma Reine et mon uniforme. Je souhaite simplement que le gouvernement nous accorde le soutien que nous méritons. Il est inutile de parler de qualité de vie lorsque la réalité est totalement différente. Vous ne pouvez pas me dire de prendre le temps de vivre et, deux secondes plus tard, me donner deux dossiers urgents à régler, me demander où en sont les grands projets dont je suis responsable et partir en service temporaire en me confiant toutes vos responsabilités. C'est pourtant ce qui se passe dans notre monde.

• 2035

Je veux rester au sein des FC. Je veux progresser dans ma carrière et m'épanouir. Je suis prêt à travailler très fort pour y parvenir, mais j'aimerais bien avoir la même épouse quand j'atteindrai 55 ans. Je veux aussi être en santé et heureux à l'âge de 55 ans. Mon père a travaillé comme un forçat, il a pris sa retraite et il est mort. Est-ce que je serai en forme, marié et heureux quand j'arriverai à 55 ans si les pressions actuelles dans les FC se maintiennent?

Mon RAR—depuis que je suis capitaine, j'ai obtenu une fois la cote satisfaisant, trois fois la cote supérieur et trois fois la cote exceptionnel. Je pense que c'est un dossier solide, mais je viens encore au onzième rang sur la liste des candidats par ordre de mérite, je suis encore loin d'une promotion dans mon métier. Très loin. Il faudrait qu'une bombe explose pour que je sois promu. J'ai fait mes preuves face à mes subordonnés, comme leader compétent, face à mes pairs et face à mes supérieurs, et voilà où j'en suis, je travaille comme un damné.

Je me considère privilégié de pouvoir m'adresser au comité ce soir et je crois sincèrement que vos recommandations seront bénéfiques pour les FC. Cependant, je tiens à vous quitter sur un exemple de la façon dont nous sommes utilisés à la limite de nos capacités et dont, chaque fois qu'un nouveau projet de présente, nous en ressentons l'impact. Votre comité et son travail sont très importants, et tous ceux qui sont présents ici ce soir vous en sont très reconnaissants, mais est-ce que vous vous rendez compte du temps qu'il m'a fallu pour préparer cette visite d'aujourd'hui? C'est du temps que je n'ai pas pu consacrer à ma famille ni à la longue liste de choses à faire qui m'attend au bureau. Le capitaine Barnes a demandé une voiture de location—c'est une question dont mon bureau est responsable. S'il n'a pas encore reçu de réponse, c'est que je devais venir ici ce soir.

Heureusement, je considère que c'est là un investissement qui amènera des changements qui, au bout du compte, nous seront profitables. Les choix et les conséquences sont une réalité à laquelle moi, militaire type, je suis confronté chaque jour. Il n'y a rien de superflu au sein de l'organisation, et chaque décision se répercute sur un autre service ou un autre militaire.

Bref, les hommes et les femmes de la 5e Escadre Goose Bay méritent un peu de répit. À mon avis, le QGDN doit mieux répondre à nos besoins et les gestionnaires de carrières doivent récompenser le dévouement et le travail des militaires affectés à la 5e Escadre. Je ne veux plus entendre parler de «qualité de la vie». Même les efforts herculéens du général DeQuetteville n'ont pas réglé tous nos problèmes. Ce qu'il nous faut, c'est plus de personnel pour exécuter le travail, moins d'interruptions pendant que nous essayons d'y parvenir et plus de soutien de la part du gouvernement du Canada en général.

Mesdames et messieurs, je vous remercie sincèrement de m'avoir donné l'occasion de vous parler ce soir et je vous remercie de votre attention. Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions ou de préciser certains points si vous le désirez.

Le président: Merci, capitaine. Je pense que vous avez été fort clair.

Cpt Brian Quick: Merci, monsieur.

Le président: Monsieur Pratt.

M. David Pratt: Capitaine, à Cold Lake, quelqu'un dans une situation semblable à la vôtre a fait remarquer qu'à moins qu'un car complet de majors ne tombe dans un précipice, il n'avait aucune perspective d'avancement. Quel âge avez-vous, si vous me permettez de vous poser cette question, et dans votre situation, à l'heure actuelle, à quel moment pensez-vous que vous serez promu?

Cpt Brian Quick: C'est une question facile, monsieur. Je me suis enrôlé en 1988. J'ai 33 ans. Vous connaissez mes antécédents et mes évaluations de capitaine. Je suis très fatigué. Je suis onzième sur la liste des candidats par ordre de mérite. Je m'absente du travail pour suivre un cours de français parce que la concurrence est si féroce dans cette liste que même si quatre majors affectés à l'administration du personnel prenaient leur retraite je ne serais pas promu. J'ai besoin de mon certificat de français. Les autres exigences, j'y satisfais déjà.

Mon patron, le major Rochette, lorsque je l'ai supplié de me laisser suivre ce cours de français... C'est un brave homme. Je lui ai expliqué que c'était ce qu'il me fallait pour progresser, et même si cela signifie que je serai absent du bureau pendant dix semaines, il m'a dit d'aller suivre ce cours. Pendant quatre ans, j'ai supplié le commandement aérien, foyer de la qualité de la vie dans la force aérienne, de me laisser suivre ce cours, et si le général DeQuetteville avait entendu les arguments spécieux que l'on m'a présentés, il aurait eu une attaque.

• 2040

Pour répondre à votre question, cela est fonction du nombre de postes vacants, cela est fonction de la façon dont je peux m'améliorer. De toute évidence, je ne peux me permettre un seul jour de faiblesse pour obtenir la cote exceptionnel chaque année aussi longtemps qu'il le faudra. J'ai besoin de mon certificat de français et de tous les autres atouts que je peux m'assurer pour être plus concurrentiel. Mais il faut qu'il y ait des postes vacants. Si tous les majors demeurent en poste, et nous comptons un grand nombre de jeunes majors à l'heure actuelle... Tous les vieux sont partis. Vous avez entendu parler du programme de réduction des effectifs. Les vieux sont partis. Ceux qui avaient 30 ans d'ancienneté sont partis. Mon ami est major. Quel âge a-t-il, 30, 34 ans? Il a 33 ans; il a été promu l'an dernier. Nombre de mes amis sont dans la trentaine et ils sont majors. Ce sont des personnes exceptionnelles, ils méritent les promotions et resteront longtemps dans les Forces, ce qui est à notre avantage à tous. Malheureusement, cela signifie que je ne peux pas progresser.

Pour répondre rapidement à votre question, monsieur, pas prochainement.

M. David Pratt: Merci.

Le président: Merci beaucoup, capitaine.

Cpt Brian Quick: Merci, monsieur.

Le président: Le caporal-chef Phil Woodhead.

Le caporal-chef Phil Woodhead (témoigne à titre personnel): Bonsoir. Je m'appelle Phil Woodhead, je suis policier militaire à Goose Bay.

J'écoutais le capitaine Quick. Cela m'a rappelé un bon mot que j'ai entendu pour la première fois quand je me suis enrôlé, en 1976. J'avais 17 ans. Je le tiens d'un sergent d'infanterie. Le voici. Nous, les bonasses, sous la direction des ignorants, nous avons tellement fait depuis si longtemps avec si peu que nous avons maintenant la compétence de faire n'importe quoi avec rien. Aujourd'hui, cela est encore plus vrai que par le passé.

J'ai parlé à mon gestionnaire de carrières il y a environ un mois. Je voulais savoir où je me situais dans la liste des candidats par ordre de mérite. Il m'a répondu que je n'y figurais pas. J'avais sombré dans l'anonymat. Je ne comprenais pas pourquoi. J'ai dit à mon gestionnaire que j'avais des RAR de l'ONU en Yougoslavie, que les deux portaient la mention exceptionnel, et que j'avais obtenu un très bon RAR à Calgary en 1996. Il m'a dit que les RAR de l'ONU n'entrent pas en ligne de compte. Tout le monde sait qu'ils sont gonflés. Alors je ne savais trop quoi faire, je sentais la moutarde me monter au nez, et mon adjudant était là. Je pense qu'il était là pour m'empêcher de manger le téléphone, parce qu'il sait qu'il ne pourra pas en obtenir un autre. Alors j'ai dit «Vous m'affirmez que si j'étais resté au Canada et si j'avais suivi des cours au niveau collégial je serais en meilleure posture que je ne le suis après avoir servi mon pays à l'étranger». Le gestionnaire n'a rien trouvé à me répondre. Les mots étaient inutiles.

En 1993, lors de ma première affectation à la 1re Brigade, à Calgary, nous avions un problème. Nous allions à la rencontre du loup sous la forme de Serbes, de Croates et de Musulmans. Mais eux ils avaient des armes qui fonctionnaient; pas nous. Les magasins de plastique qui nous sont distribués ne valent rien, et tout le monde le sait depuis la fin des années 80, depuis que l'arme a été adoptée par les Forces canadiennes. Nous avons soumis des rapports de défaillance; tous les gens que je connais savent que ces armes n'ont jamais fonctionné. Et nous allions nous mesurer à des gens qui avaient de vraies armes. Je me suis dit que cela ne marcherait pas. Je suis donc allé à Calgary, dans une armurerie, et j'ai acheté moi-même quatre magasins de 30 balles, en métal. J'aurais pu avoir des ennuis pour cela; ce n'est pas le matériel réglementaire. Mais je me suis dit au diable. À tout prendre, j'aime mieux passer en cour martiale que d'assister à mes funérailles.

Des voix: Bravo!

Cplc Phil Woodhead: Je les ai peints pour leur donner l'apparence du plastique et je les ai rangés dans un havresac pour qu'on ne puisse pas les voir. Outre-mer, j'étais chef d'équipage. J'avais une équipe de sept personnes. Je commandais quatre jeeps. Nous avons mené le défilé qui a quitté Sarajevo et nous habitions dans une maison sans toit où les puces de mer nous dévoraient, c'était ça ou un cours de niveau collégial. J'avais pour mission d'amener sept personnes, à bord de quatre jeeps et de quatre remorques, jusqu'à un lieu appelé Sveti Rok, où nous devions arriver avant le bataillon. C'était là que le bataillon devait s'installer.

• 2045

Je devais veiller à ce que ces sept personnes arrivent vivantes. La plupart d'entre elles étaient des réservistes venus d'un peu partout au Canada, des jeunes de 18 et de 20 ans. Moi, le vieux, j'ai un stock de magasins, et eux ils ont les magasins de plastique. Je n'avais pas l'intention de les suivre là-bas; je les ai rejoints là-bas. Et nous avons traversé les collines en jeep, et ces collines étaient en flammes et je me disais que c'était un peu comme un film, comme Platoon ou quelque chose du genre. Les collines étaient couvertes d'incendies allumés par les tirs de mortier.

Au cours des nombreux groupes d'ordres auxquels j'assistais avec des capitaines et des sergents-majors, j'étais le plus haut gradé des PM là-bas—nous entendions les tirs d'artillerie, les duels entre les Croates et les Serbes. Et pendant ce temps, à Ottawa, il y avait un type pour me dire que cela n'entrait pas en ligne de compte. Cela m'a mis en rogne. Je me suis dit que la prochaine fois je dirais aux policiers militaires qu'ils pouvaient accepter des affectations à l'ONU et s'y coller et que j'allais rester au Canada et suivre un cours au collège. De cette façon, je progresserais sur la liste des candidats par ordre de mérite et j'obtiendrais peut-être une promotion avant de mourir. Mais cela n'arrivera jamais. Je suis certain que je vais mourir à mon niveau, et je l'accepte. Je suis un vieux soldat, mais je ne vais pas mollir. On se souviendra de moi.

Monsieur O'Brien a mentionné quelque chose aujourd'hui que j'avais inscrit sur mon pense-bête. J'ai été affecté à l'ambassade pendant trois ans, j'étais aussi en Yougoslavie de 1989 à 1992. À peu près tous les six mois, nous faisions une étude du coût de la vie, c'est-à-dire que les personnes à charge des militaires, les épouses—les gens des Affaires étrangères assistaient à des garden- party pendant que nos épouses sortaient et faisaient le travail—, allaient dans les magasins et notaient les prix de tout, de l'essence, de n'importe quoi. C'est ce qu'il faudrait faire ici. Nous l'avons fait pour les Affaires étrangères, et grâce à cela notre allocation de coût de la vie, la différence accordée en raison du poste, est passée du niveau trois au niveau quatre, parce que la guerre a commencé à l'époque où j'étais là-bas, nous sommes partis pendant la guerre, et il était très difficile de trouver quoi que ce soit en raison des embargos et de tout cela, et nous recevions plus d'argent d'Ottawa en raison de la situation dans le pays. Il faudrait faire cela ici aussi.

Lorsque je suis venu d'Alberta, en 1996, j'ai fait une erreur. J'ai emmené un camion avec un moteur diesel. En Alberta, comme ces deux messieurs le savent, le carburant diesel est bon marché. Il coûte 38, 39c, peut-être 41; ici, il coûte 80c du litre. Je ne pouvais pas me payer la dynamite nécessaire pour faire sauter le camion. Parce qu'il fallait y mettre du carburant pour aller dans les dunes de sable, je ne pouvais pas m'en servir. Alors j'ai encore le camion et le carburant est toujours 80c. le litre. Est-ce que vous comprenez ce que je dis? Vous venez d'un endroit comme l'Alberta, le paradis terrestre, merci, et vous arrivez ici.

J'aime bien Goose Bay, j'ai demandé d'y venir, mais il faut faire quelque chose, il faut faire quelque chose de concret. Assez de promesses en l'air, il faut nous dire très bien, voici les formulaires, réalisez une étude du coût de la vie et nous allons prendre des mesures dès maintenant. Ne restez pas assis à Ottawa à dire qu'il s'agit d'un poste en or, que l'on va s'y plaire. Comme l'a dit le capitaine, c'était peut-être vrai il y a 10 ans, mais aujourd'hui les choses ont bien changé.

Finalement, j'aimerais aborder un dernier point avant de terminer. Je veux parler du maintien de l'ordre dans la base. La police militaire l'assure à l'heure actuelle. À compter du 1er juillet, la GRC va prendre le relais. Je parle régulièrement à des membres de la GRC, à des sergents-majors, à des agents et à des caporaux. Ils ne viendront pas. Si quelqu'un entre par effraction dans votre domicile et vole pour moins de 5 000 $, vous obtiendrez un numéro de rapport par téléphone et, s'ils ont le temps, ils passeront peut-être. Ce n'est pas ainsi que procède la police militaire. Nous répondons à tous les appels. À l'heure actuelle, nous sommes 17, mais quand le DMPS entrera en vigueur, il n'y aura plus que huit policiers. Nous serons affectés à l'aire d'opération nous ne ferons rien d'autre.

Je pense donc qu'il y aura de graves problèmes de moral dans la base, parce que si vous oubliez un objet à l'extérieur rien qu'une minute il va disparaître. La GRC nous a dit qu'il y avait dans le secteur des éléments qui n'attendent que notre départ parce qu'ils savent que la GRC ne peut pas venir ici, faute d'effectifs. La GRC est déjà trop occupée. Elle n'a pas le temps d'assurer l'ordre dans la base. Et elle ne va pas le faire. On nous l'a dit. Je pense donc que c'est une grave erreur que de réduire les effectifs de la police militaire à tel point que nous ne pouvons plus assurer les services que nous voulons vraiment fournir aux militaires et à tous ceux qui vivent dans les logements familiaux. Nous ne le pouvons pas; on nous a ramenés au strict minimum, et il n'y a pas à discuter.

C'est tout ce que j'avais à vous dire.

Le président: Monsieur Hanger.

M. Art Hanger: Cette politique relative au maintien de l'ordre, est-ce qu'elle va être courante maintenant dans certaines bases, dans toutes les bases, que ce passera-t-il?

Cplc Phil Woodhead: Cela est déjà fait dans d'autres bases. Je crois que c'est en vigueur à Kingston, en Ontario. La sécurité a été confiée à la Police provinciale de l'Ontario. Déjà la police provinciale ne suffisait pas à la tâche, car quand j'étais à Kingston nous répondions à des appels à la place des policiers de l'Ontario parce qu'il n'y avait pas suffisamment de policiers en service. Apparemment, la PM vient de récupérer les LF parce que personne n'était satisfait du service.

• 2050

À Gagetown, j'ai entendu dire que la même chose s'était produite. On a confié le travail à la GRC. Le problème, c'est que les agents de la GRC sont très bons, mais qu'ils ne sont pas très nombreux et ne peuvent répondre qu'aux incidents les plus graves. N'ai-je pas raison? Pour ce qui est des petites attentions que les policiers militaires et les militaires considèrent comme normales, ils n'en auront pas le temps. Ils ne viendront pas. Ils me l'ont dit. Ils ont dit à tous les PM qu'ils ne viendraient pas. Vous les verrez entrer et sortir de leur domicile—ils vivent dans la base—mais c'est tout. Ils vont répondre aux incidents graves, rien de plus.

Je crois qu'à Gagetown, les PM reviennent dans les LF parce que les habitants ne sont pas satisfaits du service. C'est ce qui va se produire ici aussi.

M. Art Hanger: Je comprends certainement l'importance de la présence de policiers dévoués dans la base. J'ai été étonné d'apprendre que la GRC ou la police provinciale de l'Ontario avait pris la relève des services de sécurité dans certaines bases. Il me paraît évident que la différence doit être notable.

Cplc Phil Woodhead: Ici, ce sont des postes, et les postes représentent de l'argent.

M. Art Hanger: En effet.

Cplc Phil Woodhead: Lorsque je suis arrivé ici en 1996, il y avait environ 32 PM. L'an dernier, nous n'étions plus que 17. Cette année, il en restera huit. Je suis un des huit qui vont rester. Nous allons faire du mieux que nous pouvons, mais nous allons être affectés à l'aire d'opération. Je ne pense pas que les habitants des LF seront satisfaits. J'en suis convaincu. Je ne pense pas que les alliés vont être satisfaits non plus. Ils ne savent tout simplement pas ce qui les attend. Mais ils verront bien la différence. Ils la constateront cet hiver, quand la moitié des motoneiges auront été volées dans les LF.

M. Art Hanger: Pourriez-vous préciser ce que vous entendez par l'«aire d'opération»? De quoi parlez-vous?

Cplc Phil Woodhead: Très bien, je parle de la zone d'entretien du matériel volant. C'est là que tous les chasseurs sont garés. Cela constitue notre seule et unique responsabilité, pour ainsi dire. Nous serons sur l'aire de stationnement des aéronefs pendant 12 heures, et nous ferons tout ce qu'il faut faire dans ce secteur.

Nous pouvons répondre à certains appels dans les bâtiments du MDN, mais pour ce qui est des LF, nous n'y assurons plus la sécurité. Nous ne le ferons plus à compter du 1er juillet.

M. Art Hanger: Merci.

Le président: Sergent Ron Langevin.

Le sergent Ron Langevin (témoigne à titre personnel): Bonsoir, mesdames et messieurs. Je suis le sergent Ron Langevin. Je suis technicien en recherche et sauvetage et je remplis actuellement les fonctions de chef adjoint de l'escadre à la base.

Vous avez déjà entendu d'excellents témoignages, et il sera difficile de faire aussi bien, mais je vais essayer.

J'aimerais d'abord parler des LF. Je suis dans les forces armées depuis 23 ans. J'ai été à Gagetown, à Trenton, à Summerside, à Cornwallis, à Comox, puis ici, et j'ai aussi été affecté à Chypre et en Allemagne.

Je peux vous dire que je n'ai jamais acheté tant de meubles de toute ma vie. Les LF ne sont jamais semblables. Lorsque vous passez d'un LF à un autre, vous devez acheter de nouveaux meubles parce que ceux que vous aviez ne font plus. J'ai aussi eu des problèmes lors de ma dernière affectation, à Comox. J'ai acheté des meubles modernes, et il a fallu les entrer par la fenêtre, parce que les portes étaient trop étroites. Les meubles modernes sont difficiles à placer dans nos logements.

Nous avons aussi des problèmes dans les LF de la base. Dans certains logements, il y a des fuites. Dans d'autres, le système électrique est défectueux et les congélateurs se sont arrêtés. Par conséquent, toute la viande a été perdue. On a signalé la chose au BLFC qui a répondu qu'il faudrait attendre de six mois à un an pour qu'une décision soit prise au sujet d'un remboursement. Cela est-il acceptable?

Nos conjointes—cela se produit à peu près partout au Canada—ont de la difficulté à trouver du travail parce qu'elles ont épousé un militaire. C'est décevant. C'est un problème que nous devons examiner partout au Canada, à mon avis.

Nous entendons parler des politiques nationales au sujet du ST—le service temporaire—et des indemnités de transport en congé. Mais si l'on regarde ce qui se fait dans divers organismes du gouvernement fédéral, la GRC, la Garde côtière canadienne, quoi que ce soit, chacun a sa propre définition de ce qu'est la politique nationale. Je peux demander un remboursement de frais de taxi jusqu'à concurrence de cinq dollars sans reçu; le fonctionnaire peut demander huit dollars. Je ne sais pas pourquoi, mais il a droit à trois dollars de plus. De simples choses comme celles-là troublent les membres des forces armées.

• 2055

Je rentre tout juste de Comox, où j'ai fait un rappel para sur place, et pendant que j'étais là-bas mon supérieur au 1 CAD a tenu une séance d'information. Ils nous a dit qu'en raison de la politique et des compressions budgétaires les promotions se feraient différemment; si quelqu'un se trouve au bon endroit et qu'il y a une promotion à faire, il sera promu. Cependant, s'il est inscrit sur la liste des candidats par ordre de mérite et qu'il n'est pas au bon endroit, il passera son tour, ce qui me paraît ridicule.

Lorsque les familles de militaire sont affectées, elles ont le droit de faire un voyage à la recherche de logement à condition d'avoir déjà une hypothèque garantie et approuvée par l'organisme financier. Je n'en veux pas à nos homologues civils, mais il n'est pas nécessaire pour eux de respecter cette politique. Ils peuvent aller chercher un domicile sans avoir d'hypothèque approuvée, etc.

Ce que certains disent, entre autres, c'est que si vous partez à la recherche d'une résidence, vous ne pouvez pas visiter les LF pour vérifier s'ils vous conviennent? Alors vous devez aller chercher une résidence et faire le tour du marché pour voir si vous pouvez trouver quelque chose. Si vous le faites, on vous élimine de la liste d'attente des LF. Pourquoi? Je l'ignore. J'imagine que si vous cherchez une maison vous n'avez pas droit à un LF.

Les choses de ce genre sont ce qui irrite le plus les membres des forces armées, et je pense que vous devriez vous pencher là- dessus et voir si vous pouvez apporter des corrections.

Merci.

Le président: Monsieur Hanger.

M. Art Hanger: À la fin de votre intervention, vous avez dit que si vous alliez à la recherche d'un logement votre nom disparaissait de la liste d'attente des LF que ou vous n'aviez pas le droit de visiter un LF pour voir s'il répond à vos besoins. Est- ce une politique?

Sgt Ron Langevin: Si vous allez à la recherche d'un logement, votre nom recule sur la liste d'attente des LF. Je crois que l'idée c'est que puisque vous devez acheter ou louer quelque chose on accorde le logement à quelqu'un d'autre qui ne cherche pas de résidence et on donnera le LF à cette personne. Cependant, si vous n'achetez rien et si vous ne louez rien, vous êtes bien forcé de trouver quand même quelque chose sur le marché civil.

M. Art Hanger: Mais est-ce une politique que d'éliminer les noms de la liste? S'il y a un LF et que vous allez le visiter, vous dites...

Sgt Ron Langevin: Je ne peux vous donner de réponse sûre, mais je sais qu'au cours de mes affectations passées, en effet, mon nom descendait dans la liste d'attente.

M. Art Hanger: Très bien.

Vous avez été affecté à Comox. Combien de temps y avez-vous passé?

Sgt Ron Langevin: J'y ai été cinq ans.

M. Art Hanger: Et où êtes-vous allé ensuite?

Sgt Ron Langevin: Je suis venu ici, monsieur.

M. Art Hanger: Est-ce que vous avez traversé le pays en voiture?

Sgt Ron Langevin: Oui, c'est ce que nous avons fait.

M. Art Hanger: Je ne croyais pas que l'on pouvait effectivement vous affecter d'un bout à l'autre du pays et qu'il faudrait faire le trajet en voiture, mais je pense bien avoir devant moi un homme qui a connu tout cela. On vous paie 500 kilomètres par jour au tarif de 9,5c du kilomètre?

Sgt Ron Langevin: En effet, monsieur. J'ai une Neon, et mon fils fait six pieds et sept.

M. Art Hanger: Vous avez dû faire tout un voyage. Merci.

Le président: Le caporal-chef Wade Walsh.

Le caporal-chef Wade Walsh (témoigne à titre personnel): Bonsoir, mesdames et messieurs les membres du comité, bonsoir monsieur le président. Je ne vais même pas tenter de faire aussi bien que certains des témoins précédents.

Je m'appelle Wade Walsh, comme vous venez de le dire. Je suis gestionnaire de la cuisine, ici, à Goose Bay, ou du moins je l'étais.

Si vous me le permettez, je vais aborder certains points que moi et nombre de mes amis du même grade ou des grades voisins avons discutés. Cela se trouvait dans une brochure de dix pages, et nous l'avons résumé en huit points communs.

Le plus important est la solde. Pour les militaires de mon grade, pour un sergent ou pour un militaire de grade inférieur, c'est la solde. Nous pouvons en rire, mais dans le cas des sergents et des militaires des grades inférieurs, c'est la solde. Comme l'a dit le capitaine Quick, un capitaine est satisfait de sa solde.

• 2100

Regardez la différence entre la solde d'un capitaine et celle d'un caporal. Je sais que le travail est plus stressant et qu'un capitaine a fait des études, qu'il a des diplômes, etc. J'en suis conscient. Mais quand le Maclean's publie un article où l'on dit qu'un jeune de 18 ans peut quitter l'école cette année, devenir policier dans une ville quelconque et toucher 2 000 $ de plus que ce que je reçois à l'heure actuelle, moi qui ai plus de 17 ans d'expérience dans les forces armées et qui ai eu droit à quatre périodes de services, c'est décourageant—très décourageant. Un jeune de 18 ans gagne plus que moi, qui suis marié, qui ai deux enfants et qui risque ma vie depuis 17 ans.

Pour commencer, il n'y a personne qui veuille rester ici ou qui ait manifesté ce désir plus que moi, comme certains des officiers subalternes peuvent en témoigner. J'ai présenté des notes de service à pratiquement tous ceux qui voulaient bien m'écouter pour pouvoir rester ici. Une des principales raisons, c'est que la paie est meilleure. Je n'ai pas besoin de payer une maison ici. La principale raison, c'est l'argent.

Je vais passer en revue les huit points que j'ai inscrits ici. Nous, les sergents et les militaires des grades inférieurs, dans le groupe dont je parle, il y a 30 ou 50 personnes qui nous ont dit cela, que cela irrite. Chaque fois que quelque chose de ce genre survient, il y a des personnes, comme nous l'avons un peu vu ce soir, qui en profitent pour faire valoir des questions politiques alors que vous essayez de nous aider. Des intervenants arrivent avec des motifs politiques et essaient de défendre un point de vue qui n'a rien à voir avec la question.

Je suis convaincu que leurs préoccupations sont légitimes, mais à mon avis—et seulement à mon avis—ils ont la possibilité d'aborder leurs questions ailleurs et il y a des moyens de le faire. C'est sans doute la seule occasion que j'aurai jamais de parler de la question.

Voilà pour ce qui est de mon premier point, certains en profitent pour poser des gestes politiques et faire des déclarations et des discours.

Lorsqu'il s'agit de nos logements, quelqu'un a parlé aujourd'hui du fait que certains des civils qui travaillent dans la base à n'importe quel titre—spécialistes ou ouvriers, n'importe quoi—travaillent pendant 20 ans ici dans la base. Ils ont une maison, ils s'achètent un bateau, une motoneige. Ils font leur vie. Leurs enfants vont à l'école et fréquentent les mêmes amis. Ils vont à l'université et ils vivent leur vie—contrairement à nous. Tous les quatre ans... Mes enfants ont quitté Petawawa l'été dernier, et je pense que chaque jour ils souhaitent y retourner. Qu'est-ce que nous pouvons faire?

Lorsque nous achetons et vendons nos maisons, la plupart des gens ici ont acheté et vendu des maisons cinq ou dix fois. Parfois vous faites un peu d'argent, mais si vous êtes comme moi, la plupart du temps vous perdez de l'argent. Comme M. Clouthier le sait bien, dans la région de Petawawa, c'est bien ma chance, les prix ont chuté juste au moment où je devais vendre. Les forces vous donnent un pourcentage pour vous dédommager si la baisse atteint 10 p. 100. À l'époque où j'ai vendu, la différence était de neuf pour cent, alors j'ai tout perdu.

La différence d'hypothèque est un autre point en litige. Si vous examinez cette question, je vous parie que de 30 à 50 personnes qui ont quitté Petawawa l'été dernier ont dû débourser entre 1 500 et 3 000 $ à ce titre. Je peux vous assurer qu'il y avait au moins ce nombre de personnes. Après mon départ, un ami m'a dit que la différence a excédé 10 p. 100. Il avait acheté à 137 000 $, je crois, et il a vendu 108 000 $.

Les forces font venir des agents qui font deux évaluations de votre maison pour vous aider. Ma maison était évaluée à 139 900 $ lorsque je l'ai achetée. J'ai acheté à Noël, alors j'ai fait une très bonne affaire. J'ai eu la maison pour 115 000 $. Lorsqu'on est venu l'évaluer, on a fixé le prix à 102 000 $. Nous parlons d'une maison complètement terminée—avec allée double et tout.

C'est le genre de choses auxquelles nous sommes constamment confrontés. Lorsque j'ai déménagé, il a fallu que j'absorbe la différence, que j'absorbe la baisse de l'immobilier—cela n'en finit plus. Tout le monde ici pourrait vous raconter de telles histoires.

• 2105

Quelqu'un a mentionné les allocations d'affectation. Ces allocations doivent vous aider à acheter des choses comme les rideaux, des articles pour la maison, quand vous vous installez. Ma femme pourrait vous en dire plus à ce sujet; en règle générale, je ne suis jamais là. Vous emménagez, et cette allocation d'affectation doit vous aider, alors je ne comprends pas pourquoi il y a une telle différence entre un caporal et un colonel à cet égard. Cet argent doit aider le caporal aussi bien que le colonel. À moins que le colonel ait des rideaux en or, je ne comprends pas...

À mes yeux, si on réduisait celle du colonel et si on relevait un peu celle du caporal, cela serait plus logique. Je sais bien qu'un colonel effectue un travail beaucoup plus important que le mien. Il dirige la base et je dirige une cuisine, mais je ne pense pas que ses rideaux soient à ce point plus chers que les miens.

La même chose s'applique lorsque nous sommes affectés, tous les quatre ans ou autrement. J'ai été basé à Halifax, à Gander, à Kingston, à Petawawa, à Sydney, puis ici. À chaque nouvelle affectation, vous essayez de vous intégrer à la collectivité. À Petawawa, on faisait du bateau. La rivière Petawawa est extraordinaire. Si jamais vous avez l'occasion d'y aller, vous le verrez bien. Tout le monde là-bas a de gros bateaux, d'énormes bateaux. Alors nous nous sommes acheté un petit bateau de 1 200 $ pour nous balader sur l'eau. Si vous êtes affecté ailleurs et vous devez partir dans un mois ou deux, vous n'obtenez que 600 $ pour votre bateau de 1 200 $, c'est-à-dire que vous achetez toujours à prix fort et que vous vendez toujours à perte.

Je suis ici depuis moins d'un an. J'ai acheté deux motoneiges neuves—à vrai dire pas vraiment des motoneiges neuves; j'ai acheté deux motoneiges d'occasion. Je les ai achetées à bon prix, et maintenant il y en a 1 500 à vendre sur le marché. Il n'y a rien à faire, je ne gagne jamais. Comme je l'ai dit, tout est une question d'argent pour les sergents et les militaires des grades inférieurs.

Quelqu'un a parlé du travail des conjoints. Ma femme est infirmière, et je ne connais personne qui travaille plus dur, qui prenne aussi bien soin d'une famille, qui soit mère aussi accomplie, qui soit meilleur camarade que mon épouse. À Petawawa, elle travaillait à l'hôpital Civic à Pembroke et elle travaillait aussi à Deep River. Elle faisait des heures régulières, mais elle était en disponibilité. J'étais en Bosnie. Évidemment, cela aide un peu. Quant à mes enfants, ma mère est venue de Terre-Neuve pour s'en occuper pendant quelques temps, puis ma soeur est venue, puis la soeur de ma femme. Cela n'a pas de fin. Si ma femme ne travaillait pas, nous ne pourrions pas nous payer un bateau de 1 200 $. Faut-il en dire plus? Nous avons besoin de son salaire.

C'est une question que bien des gars soulèvent. Quelqu'un a parlé des mess ici, aujourd'hui ou ce soir. Nous avons trois mess: le mess des officiers, le mess des sergents et le mess des caporaux et soldats. Il n'y aura plus que 91 militaires ici. Tout sera regroupé dans un seul bâtiment et, en principe, il y aura un seul bar et trois mess. Là encore, quand j'en ai parlé avec mes camarades, à mes yeux et aux leurs, cette époque est révolue.

En raison des promotions et d'autres causes, j'ai aujourd'hui des amis... Comme l'a dit le capitaine Quick, j'ai dû obtenir la cote exceptionnel pendant six ans pour en arriver où j'en suis. Six années. Il n'en faut en principe qu'une ou deux pour être promu au grade de caporal-chef. Il m'a fallu six ans, et j'ai finalement réussi. Maintenant, j'ai deux évaluations où j'ai obtenu la cote exceptionnel et j'espère en avoir une autre cette année, mais comme je l'ai dit, l'avenir ne me réserve aucune promotion.

Les promotions, pour nous, maintenant, ce n'est pas pour le prestige ni quoi que ce soit d'autres, c'est pour l'argent. Pour nous, tant que nous ne sommes pas adjudant, nous ne faisons pas d'argent. Nous touchons assez pour survivre, pour payer les dépenses principales et acheter un bateau de 1 200 $. Si votre femme ne travaille pas, votre salaire suffit à peine à payer l'essentiel. Chaque fois que vous avez une nouvelle affectation, vous devez payer l'immatriculation de votre voiture, des comptes de téléphone, l'installation du câble, toutes ces choses. J'ai changé d'affectation l'an dernier et à nouveau cette année. Cela fini par compter.

Pour en revenir à la question des mess, j'ai presque 18 ans d'ancienneté et certains de mes amis ont eu la chance de progresser dans leur carrière; certains sont maintenant adjudants. J'ai des amis qui sont sortis du rang et qui sont maintenant majors. Mais dans cette base ou dans n'importe quelle autre base, pour pouvoir prendre un verre avec eux je dois aller en ville.

• 2110

Cet hiver, nous avons joué au hockey ensemble—moi, le colonel Langton, l'adjudant O'Shea, qui est mon patron, et des tas d'autres camarades. Nous ne pouvions pas revenir à la base et prendre un verre. Un centre communautaire a été ouvert et j'étais très heureux, tout comme mes camarades, car cela fonctionnait plutôt bien, mais il a dû fermer.

Dans la société d'aujourd'hui, alors que de plus en plus de gens sont instruits et vont chercher des diplômes, il faut qu'il y ait un lieu où vous pouvez aller dans la base et où tout le monde peut se réunir.

Je veux aussi parler des affectations à l'ONU et des affectations dans des endroits comme la Bosnie. Je suis allé deux fois à Chypre. J'ai été en Bosnie avec l'IFOR quand cette opération a commencé, puis l'ONU est partie et nous l'avons remplacée. C'était une affectation difficile. J'étais là-bas. J'étais en état d'alerte.

Bien souvent, un grand nombre de camarades—et je sais que c'est vrai, parce que je l'ai entendu de mes subordonnés—, parce qu'à Petawawa vous avez l'occasion de faire cela, ce qui se passe c'est qu'ils vont s'acheter un bateau de 1 200 $ et qu'ils vont s'acheter une motoneige. Ils le font pour l'année et demi ou les deux ans qu'ils vont passer là, puis ils demandent une affectation et laissent leurs femmes et leurs enfants pour pouvoir payer leurs factures. Je sais que les choses se passent ainsi. C'est ce qui se passe.

Quelqu'un a dit ici que c'est dans l'armée que la situation est le plus difficile. J'ai été deux ans dans la marine. J'ai été à Gander et à Sydney, mais j'ai surtout été en campagne. La force aérienne, c'est ce qu'il y a de mieux, je vous le dis. J'ai voulu venir ici et je veux rester ici. J'ai été trois ans affecté à l'équipage d'un navire, et nous étions toujours partis. Quand j'étais à Petawawa, j'étais toujours parti. J'ai eu trois affectations en sept ans, sans parler du temps passé en campagne.

Nous avons beaucoup d'avantages ici, nous avons un excellent commandant d'escadre et un excellent chef d'escadre. Ils se soucient vraiment de ce genre de choses. La semaine dernière, je suis allé à Trenton suivre un cours de perfectionnement, et c'est le genre de choses dont on a discuté aussi. C'est pourquoi ce que je vous dis aujourd'hui correspond à ce que je pense, mais aussi à ce que pensent nombre de mes camarades.

C'est à peu près tout. Je vous remercie de m'avoir écouté et je répondrai à vos questions si vous en avez.

Le président: Monsieur Benoit.

M. Leon Benoit: Merci, monsieur le président.

J'ai une question à poser. Premièrement, de toute évidence vous allez obtenir une augmentation grâce à ce que vous avez dit au sujet du commandant d'escadre. Vous devez être sur le point d'être promu.

Cplc Wade Walsh: Bien sûr.

Des voix: Oh, oh.

M. Leon Benoit: De fait, c'est exactement l'objet de ma question. Vous avez dit que les promotions étaient importantes pas pour la gloire mais pour l'argent. Cela me paraît fort triste.

Cplc Wade Walsh: C'est très triste.

J'étais en Bosnie, et il est établi que j'ai reçu une mention élogieuse du commandant pour cela. J'ai pratiqué la réanimation cardiorespiratoire sur une jeune femme pendant que j'étais en Bosnie. Apparemment, cela l'a aidée, lui a sauvé la vie, quelque chose comme ça. Cette année-là, j'ai aussi conduit un camion depuis Split, en Croatie, jusqu'à Coralici, en Bosnie, sous le feu ennemi. Nos camions étaient criblés de balles, ce genre de choses. C'était vilain, là-bas. Pendant six mois, les balles ont sifflé au-dessus de nos têtes. Comme le policier militaire l'a dit, toutes sortes de choses se produisaient.

Lorsque je suis rentré à Petawawa, mon RAR—et je peux montrer à n'importe qui nos évaluations—, en raison de certains quotas fixés, du fait que seulement un certain nombre peuvent obtenir la cote exceptionnel, malgré tout ce que j'avais fait, j'ai obtenu la cote supérieur, tandis qu'un type qui était resté à l'unité et n'avait jamais été en campagne, qui n'était jamais allé nulle part, n'avait jamais rien fait, a obtenu la cote «exceptionnel», en raison de la bureaucratie.

Quand de telles choses se produisent, après 18 ans d'expérience de ce genre, vous vous fatiguez. J'en suis là maintenant. Je suis fatigué. C'est la raison pour laquelle j'ai dit cela.

M. Leon Benoit: Votre travail ne signifie plus rien, dans ce cas, c'est un job.

Cplc Wade Walsh: L'argent. Je veux pouvoir donner à mon adolescente un jeans de 78 $ comme en ont ses amies. Je pense que les gens pour qui je travaille vous diront que je m'acquitte encore de mes fonctions, et j'aime à croire que je fais bien mon travail, mais le coeur n'y est plus. Maintenant, c'est seulement un job.

• 2115

Je veux être promu. Je travaille jour et nuit, mais ce n'est pas pour la Reine ni pour mon pays, c'est pour l'argent. Nous allons à ces dîners. Je suis certain que vous avez assisté à ces dîners militaires dans les bases que vous visitez, des activités de ce genre. Nous sommes payés pour cela. La plupart des militaires se portent volontaires constamment, pour l'argent, même si cela vous éloigne de la famille ou de vos autres activités, parce que vous voulez joindre les deux bouts, en particulier si votre femme ne travaille pas.

Le président: Merci beaucoup.

Cplc Wade Walsh: Je vous en prie, monsieur.

Le président: Monsieur Clouthier.

M. Hec Clouthier: Caporal, je suis peut-être un peu égoïste, mais nous serions heureux de vous revoir à Petawawa, je peux vous l'affirmer.

Pour ce qui est de ce bateau de 1 200 $, un ami de mon fils de 19 ans m'a dit qu'il avait acheté un bateau pour 600 $ et qu'il partait à l'université cette année, alors il a placé une petite annonce dans le journal et il l'a vendu pour 1 500 $. J'espère qu'il ne s'agit pas de votre bateau.

Des voix: Oh, oh.

M. Hec Clouthier: Je suis heureux que vous et les autres témoins soyez venus nous parler ce soir. Je vous assure, caporal, et je l'ai dit partout où nous nous sommes arrêtés, nous ne pouvons rien vous promettre, mais je peux vous garantir que vos préoccupations figureront dans notre rapport et qu'on y prêtera attention. Je reconnais tout ce que vous et les autres témoins avez fait au sein des forces armées. Nous ne sommes pas payés pour venir ici—nous touchons notre traitement de député—mais chacun d'entre nous, y compris mes collègues des autres partis, s'intéresse à cette question et s'est porté volontaire. Je vous remercie sincèrement.

Cplc Wade Walsh: Nous ne pouvons rien demander de plus.

Le président: Caporal, je crois que M. Benoit a une autre question à poser, mais avant de lui accorder la parole, je veux mentionner que, comme vous l'avez dit, la rivière Petawawa est une belle rivière, je suis d'accord avec vous, mais je crois que la rivière des Outaouais est encore plus belle. Je veux aussi préciser que je crois tout ce que vous nous avez dit, parce que les hommes qui portent la barbe m'inspirent confiance.

Monsieur Benoit.

M. Leon Benoit: Ce qu'elle a de mieux, la rivière des Outaouais, c'est qu'elle sort d'Ottawa. Ottawa est une belle ville. Une superbe ville.

Je veux vous dire, caporal, que je n'ajoute pas foi à une de vos affirmations de ce soir. Vous avez dit que vous restiez dans les forces armées seulement pour l'argent. Cela n'est pas vrai. À vous écouter, je peux le dire, c'est faux. La solde laisse peut- être à désirer, c'est peut-être le problème que vous aimeriez que l'on règle, mais vous ne travaillez pas pour l'argent.

Cplc Wade Walsh: C'est aussi ce que dit ma femme.

Le président: Merci.

Notre dernier témoin est le caporal Joe Kristiansen.

Le caporal Joe Kristiansen (témoigne à titre personnel): Bonsoir, mesdames et messieurs. Je vous promets d'être bref, car il se fait tard.

Il n'était pas prévu que je prenne la parole. Je vous présente simplement quelques notes que j'ai jetées sur le papier toute la journée au sujet de différents points dont j'ai entendu parler ou, peut-être, qui ont été traités trop rapidement ou négligés.

Le député de Labrador, M. O'Brien, a mentionné que nous faisons plus avec moins, quelque chose dans cette veine, que nous réalisons peut-être des économies mais que nous faisons damner les gens. Je crois que c'est précisément le prix que paient les militaires, et cela ne s'exprime peut-être pas en dollars et en cents ni même en terme d'ardeur au travail. Je me suis enrôlé en 1984, à l'époque du slogan «Si la vie vous intéresse». Cette campagne publicitaire a pris fin il y a des années. J'ai toujours trouvé amusant que l'on ne ressorte plus ces publicités, parce que je me suis enrôlé à l'époque où les forces armées étaient prospères et où les promotions... Lorsque j'ai commencé dans l'artillerie, c'était facile d'avoir une promotion: si vous pouviez lacer vos chaussures deux jours de suite, vous avanciez dans votre carrière.

J'ai passé six ans de ma vie en campagne. Je m'amusais bien et j'ai rencontré des tas de gens intéressants, mais un jour j'ai décidé d'aller voir un peu où l'on cachait les avions quand le soir tombait, et j'ai rejoint les rangs de la force aérienne. Depuis cette époque, nous avons connu la période des compressions. Je pense que le colonel connaît les chiffres exacts, mais j'utilise des chiffres que j'ai vus auparavant. Nous effectuons 90 p. 100 des tâches ou des missions que nous remplissions avant les compressions dans l'ensemble des forces armées avec environ 60 p. 100 du personnel. Est-ce que c'est à peu près juste?

• 2120

Nous en sommes très fiers. Je sais que les gens dans la base sont fiers de cela, compte tenu des compressions qui ont été effectuées partout ces dernières années. Mais je pense que bien des gens consacrent plus de temps au travail où qu'ils apportent du travail à la maison. Je rentre chez moi le soir et je m'assois au salon avec mon épouse et mes enfants, mais je rédige un rapport sur mon ordinateur alors je ne suis pas tout à fait présent. Je suis là de corps, mais je ne porte pas beaucoup attention à ce qui se passe.

Les autres politiques... Il y a une directive du commandement aérien selon laquelle nous devons utiliser tous nos congés chaque année. Nous avons droit à une aide financière pour un seul voyage, et je passe généralement la plus grande partie d'un mois assis dans mon LF, en congé, ce qui signifie que je vais souvent au bureau deux ou trois heures par jour simplement pour sortir et pour laisser un peu de place à ma femme. Elle n'aime pas que je traîne à la maison, pas tous les jours. Elle dit que je prends trop de place au bout de trois ou quatre jours. Alors nous prenons ces congés et nous faisons du travail à la maison où nous allons au bureau même si nous sommes en congé, et cela finit par laisser des traces chez les militaires.

Pour ce qui est de la solde, lorsque je suis entré dans les forces armées on m'a dit que nous pouvions être appelés à faire des choses que les autres secteurs de la société n'ont jamais l'occasion de faire. On m'a dit que les autres ne feraient jamais ce que j'aurais à faire et que 90 p. 100 du temps je ne serais même pas remercié, si ce n'est par mes pairs, pour avoir été là et avoir prêté main forte. Essentiellement, c'est vrai. Je ne pense pas que les militaires s'attendent à une grosse accolade de la part de la société canadienne, mais peut-être un signe de tête ou une reconnaissance quelconque de l'importance du travail seraient bienvenus.

Je pense que personne ne s'enrôle avec l'intention de faire fortune dans les Forces canadiennes. Ce n'est pas une bonne politique. Je sais que ce n'est pas mon cas, mais depuis quelques années je compte le temps qui me sépare de la retraite. Je n'ai aucun espoir de promotion. Mon gestionnaire de carrières m'a dit essentiellement que je me déplaçais trop parce que j'allais là où on m'envoyait. Il m'a dit que je devrais passer plus de temps au même endroit ou peut-être suivre un cours de niveau collégial. Il y a beaucoup de collèges ici, à Goose Bay.

J'ai donc vécu nombre des expériences que les forces armées peuvent offrir. La semaine dernière, j'ai dépensé l'équivalent de trois fois mon salaire annuel, et il m'a fallu moins de temps pour prendre cette décision que pour choisir la carte de son que je vais installer dans mon ordinateur. Je crois que je ne ferai plus jamais de voyage de recherche de logement. Je vais prendre les choses comme elles viennent. Je vais m'installer dans un LF et me donner un an pour connaître la région. Cinq jours ne suffisent pas pour prendre une saine décision financière dans ce domaine. Dans un an ou deux, je serai en mesure de vous dire si j'ai fait le bon choix, mais l'idée me paraît bonne.

C'est à peu près tout ce que je voulais vous dire aujourd'hui.

Le président: Merci.

Monsieur Hanger.

M. Art Hanger: Nous avons entendu beaucoup de choses au sujet des gestionnaires de carrières. Je mets en doute nombre des commentaires qu'on nous dit avoir été adressés aux militaires, peut-être aux candidats à une promotion ou aux personnes qui croient avoir droit à une promotion. Parler de façon aussi cavalière—est-ce une pratique courante?

Cpl Joe Kristiansen: Je ne discutais pas vraiment avec mon gestionnaire de carrières. Il est trop coûteux d'envoyer un gestionnaire de carrières du bureau de la marine jusqu'ici, alors on envoie un gestionnaire de la force aérienne pour tous les membres de la force aérienne et pour tout le personnel de la base. Le gestionnaire de carrières de l'aviation avait en main deux ou trois notes de mon gestionnaire de carrières et il m'a suggéré de rester un peu au même endroit, parce que cela pourrait m'aider. Je n'aurais jamais cru que je m'adresserais un jour à un comité parlementaire quand j'ai discuté avec mon gestionnaire de carrières. Peut-être que ce n'est pas très bon pour ma carrière.

• 2125

M. Art Hanger: Vous êtes dans les forces armées depuis...?

Cpl Joe Kristiansen: J'y suis depuis 14 ans maintenant.

M. Art Hanger: Et de votre point de vue, vous n'avez guère de chances de promotion.

Cpl Joe Kristiansen: L'an dernier, en raison de la politique qui veut que seulement un certain pourcentage soit promu, j'ai été refoulé dans le vaste groupe des personnes qui n'ont pas la cote exceptionnel. Cette année, mon RAR est signé—j'ai obtenu la cote exceptionnel. Je serai donc en lice pour les trois prochaines années, mais dans mon métier, cette année, 187 personnes se disputaient six promotions.

M. Art Hanger: Alors il n'y a pas beaucoup de possibilités.

Cpl Joe Kristiansen: Dans six ans, j'aurai 20 ans d'ancienneté et j'imagine que c'est à peu près le moment où je recevrai une montre et tirerai ma révérence.

M. Art Hanger: Merci, caporal.

Le président: Merci, mesdames et messieurs, d'être venus ce soir. Vous nous avez beaucoup aidés à préparer notre rapport.

J'ai oublié de vous expliquer quelque chose au début de la séance. Notre rapport devrait être publié d'ici la fin de l'été. Nous le déposerons début septembre, quand la session reprendra, et d'une façon ou d'une autre nous veillerons à ce que vous en receviez un exemplaire. Merci beaucoup.

La séance est levée.