FINA Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Comité permanent des finances
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TÉMOIGNAGES
Le lundi 30 octobre 2023
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
La séance est ouverte.
Bienvenue à la 112e séance du Comité permanent des finances de la Chambre des communes.
Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement et aux motions adoptées par le Comité le jeudi 21 septembre 2023, ainsi que le lundi 21 novembre 2022, le Comité se réunit pour discuter du rapport de la Banque du Canada sur la politique monétaire et reprendre son étude des décisions relatives aux politiques gouvernementales et sur les forces du marché qui ont entraîné l'augmentation des coûts liés à l'achat ou à la location d'un logement au Canada.
La réunion d'aujourd'hui se déroule en format hybride, conformément au Règlement. Les membres sont présents, soit en personne dans la salle, soit à distance grâce à l'application Zoom.
Je vais faire quelques remarques à l'intention des témoins et des membres du Comité.
Veuillez attendre que je vous donne la parole nommément avant de parler. Si vous participez en ligne, cliquez sur l'icône du microphone pour activer votre micro, et désactivez‑le quand vous ne parlez pas.
Pour entendre l'interprétation sur Zoom, sélectionnez le plancher, l'anglais ou le français en cliquant sur l'icône au bas de votre écran. Dans la salle, vous pouvez porter l'oreillette mise à votre disposition et sélectionner le canal désiré.
Bien que cette salle soit équipée d'un système audio très perfectionné, des effets Larsen sont toujours possibles. Cela pourrait être extrêmement dommageable pour l'ouïe des interprètes et leur occasionner des blessures graves. La plupart des chocs acoustiques sont attribuables à des oreillettes approchées trop près du microphone. Nous demandons donc à tous les participants de faire preuve d'une grande prudence dans la manipulation de leur oreillette, surtout quand leur microphone ou celui du voisin est ouvert.
Afin de prévenir les incidents et de protéger la santé auditive des interprètes, j'invite les participants à parler dans le microphone dans lequel leur casque d'écoute est branché et à éviter de jouer avec les oreillettes en les plaçant sur la table, loin d'un microphone allumé.
Je vous rappelle que tous les commentaires doivent être adressés à la présidence. Si vous voulez prendre la parole, veuillez lever la main. Je demande aux députés sur Zoom d'utiliser la fonction « main levée ». Les greffiers et moi-même allons gérer l'ordre des interventions du mieux que nous le pouvons, et nous vous remercions d'avance de votre patience et de votre compréhension à cet égard.
Nous accueillons aujourd'hui le gouverneur de la Banque du Canada.
Bienvenue, gouverneur Tiff Macklem.
Le gouverneur est accompagné de la première sous-gouverneure Carolyn Rogers.
Vous allez pouvoir faire votre déclaration liminaire avant que nous passions aux questions des députés. Nous allons passer environ 1 heure 20 minutes avec vous, avant de prendre une pause et de siéger pour une autre heure.
Bonjour et merci. Je suis ravi d'être ici en compagnie de la première sous-gouverneure Carolyn Rogers pour parler de notre annonce et de notre décision de la semaine dernière à propos de la politique monétaire.
La semaine dernière, nous avons annoncé que nous maintenions le taux directeur à 5 %. Nous avons pris cette décision parce que la politique monétaire est en train de ralentir l'économie et d'alléger les pressions sur les prix, et parce que nous voulons lui laisser le temps de faire son travail. Cependant, la baisse de l'inflation devrait être lente, outre que les risques inflationnistes ont augmenté.
Avant de répondre à vos questions, je vais faire un survol du contexte économique et financier qui explique notre décision.
[Français]
Depuis notre dernière comparution, l’économie canadienne a ralenti. Selon les données disponibles, l’offre et la demande s’approchent du point d’équilibre.
Il est maintenant plus évident que la hausse des taux d’intérêt a eu pour effet de modérer les dépenses et les pressions sur les prix. La croissance économique est entrée dans une phase plus lente: depuis un an, elle tourne autour de 1 %, en moyenne. Nous prévoyons qu'elle va rester inférieure à 1 % jusqu'à la fin de 2024 et passer à 2,5 % en 2025.
L’offre devrait ainsi devenir excédentaire cette année et la croissance devrait rester faible pendant quelques trimestres. Par conséquent, l’inflation devrait continuer de diminuer graduellement pour retourner à la cible de 2 % en 2025. Cependant, les prix plus élevés de l’énergie et la persistance de l'inflation sous-jacente pourraient ralentir les progrès.
Les effets des taux d’intérêt plus élevés se font surtout sentir sur le prix des biens durables, souvent achetés à crédit, comme les meubles et les électroménagers. Ils s'observent aussi sur le prix des biens semi-durables, comme les vêtements et les chaussures, et sur de nombreux services autres que le logement.
En général, l’inflation dans ces catégories s'élève maintenant à 2 % ou moins. Le taux d’augmentation des prix dans les épiceries se situe à près de 6 %. Il est encore élevé, mais il a baissé et devrait continuer dans cette voie.
Le retour à un faible taux d'inflation fait face à des obstacles. Par exemple, la hausse des prix mondiaux de l’énergie fait grimper les prix à la pompe, ce qui fait remonter l’inflation, mesurée par l’indice des prix à la consommation, soit l'IPC.
Sur le marché du logement, les pénuries structurelles tirent les prix vers le haut. De plus, les attentes quant à l’inflation à court terme et à la croissance des salaires demeurent élevées. Les entreprises reprennent lentement leurs pratiques normales d’établissement des prix.
[Traduction]
Comme nous allons beaucoup parler du logement aujourd'hui, laissez-moi vous communiquer quelques détails tout de suite. La hausse des taux d'intérêt a tempéré la demande de logements. Depuis février 2022, les reventes ont en effet diminué de 33 % et les prix, d'environ 10 %. Néanmoins, l'augmentation des frais de logement s'est accentuée, dépassant 6 %. Elle s'est aussi généralisée, comme en témoignent une hausse des loyers et des autres dépenses pour le logement, sans compter la montée continue du coût de l'intérêt hypothécaire liée aux augmentations du taux directeur. De plus, les pressions structurelles sur le marché canadien du logement ralentissent le retour à la cible d'inflation. Nous serons heureux de revenir plus en détail sur cette dynamique avec vous tout à l'heure.
Vu l'effet combiné de ces pressions qui s'exercent sur l'inflation, nous prévoyons maintenant que celle‑ci oscillera autour des 3,5 % jusqu'au milieu de l'an prochain environ. En phase avec l'accroissement de l'offre excédentaire, l'inflation devrait diminuer en 2024, pour atteindre 2 % en 2025.
Dans l'ensemble, les risques inflationnistes ont augmenté depuis juillet. Selon les prévisions que nous avons publiées la semaine dernière, la trajectoire de l'inflation est plus accentuée que nous l'avions prévu cet été. Ajoutons également que la montée des tensions mondiales, particulièrement la guerre en Israël et à Gaza, a fait augmenter le risque que les prix de l'énergie grimpent et que les chaînes d'approvisionnement soient de nouveau perturbées, ce qui ferait monter l'inflation aux quatre coins du globe.
Sur la base de signes plus clairs que la politique monétaire fonctionne, mes collègues du Conseil de direction et moi-même avons jugé la semaine dernière que nous pouvions être patients et maintenir le taux directeur à 5 %. Cependant, pour avoir l'assurance que le taux directeur est assez élevé pour ramener l'inflation à 2 %, il faut que nos mesures de l'inflation fondamentale entraînent une baisse supplémentaire. Nous allons continuer d'évaluer si la politique monétaire est assez restrictive pour rétablir la stabilité des prix et allons surveiller les risques de près.
Notre décision de la semaine dernière témoigne aussi du fait que nous tentons de doser les risques de resserrement ou au contraire de desserrement excessifs de l'économie, mais nous ne voulons pas non plus que les Canadiennes et les Canadiens continuent de vivre avec une inflation élevée, ni que celle‑ci s'enracine. Et si les pressions inflationnistes persistent, nous sommes prêts à relever encore le taux directeur pour rétablir la stabilité des prix.
Pour résumer, nous avons fait beaucoup de progrès dans notre lutte contre l'inflation, mais nous ne pouvons pas encore crier victoire. Nous devons garder le cap, parce qu'une fois la stabilité des prix rétablie, l'économie fonctionnera mieux pour tout le monde.
Sur ce, je serai heureux de répondre à vos questions et de lancer la discussion.
Merci.
Merci, monsieur le gouverneur et madame la première sous-gouverneure.
Nous allons tout de suite passer aux questions. Au premier tour, chaque parti aura jusqu'à six minutes.
Monsieur Hallan, c'est à vous pour six minutes.
Merci, monsieur le président.
Monsieur le président, puis‑je m'interrompre pour déposer un avis de motion?
Chers collègues, la ministre des Finances n'a encore pas comparu devant le Comité en réponse à une motion que j'ai adoptée en novembre dernier pour qu'elle comparaisse devant le Comité à chaque trimestre jusqu'à ce que l'inflation atteigne le taux cible.
Cela dit, je donne avis de la motion suivante:
Que le Comité fasse rapport à la Chambre de sa censure de la vice-première ministre et ministre des Finances pour avoir ignoré les invitations du Comité à se présenter sur la crise du coût de la vie.
Merci, monsieur le président.
Avant de poser mes questions, monsieur le gouverneur, puis-vous demander de bien vouloir communiquer au Comité le nombre de prêts hypothécaires qui seront reportés d'octobre de cette année jusqu'à la fin 2025, selon une ventilation mensuelle.
Pouvez-vous me le confirmer, s'il vous plaît?
Nous connaissons le nombre d'hypothèques dans les institutions financières sous réglementation fédérale. Nous pourrions fournir cette information au Comité. On parle sans doute de la majorité...
D'accord.
Monsieur le gouverneur, la semaine dernière, lors de votre conférence de presse vous avez dit que les dépenses du gouvernement stimuleront davantage la demande que l'offre et que, dans un contexte où nous essayons de modérer les dépenses et d'infléchir l'inflation, une telle chose est inutile. Serait‑ce plus facile si le gouvernement n'ajoutait pas de nouvelles dépenses dans son énoncé économique de l'automne ou dans le budget de l'an prochain? Est‑ce que ce serait utile?
Permettez-moi de faire quelques observations générales sur la politique budgétaire.
N'importe quel manuel économique vous dira que si vous réduisez les dépenses gouvernementales, cela aura tendance à ralentir la croissance, à augmenter le taux de chômage et à réduire l'inflation. De même, si vous augmentiez les impôts, vous obtiendriez les mêmes résultats.
Ensuite, dans le contexte de ce que vous avez dit au sujet des dépenses du gouvernement — c'est bien ce que vous avez dit —, serait‑il utile de...
Permettez-moi de vous poser cette question: pourquoi cela vous paraît inutile?
D'après ce que nous avons constaté au cours de la dernière année — il y a différentes façons de le mesurer —, une façon de faire serait de...
Les deux politiques vont-elles dans des directions opposées? Répondez simplement par oui ou par non.
Pas durant la dernière année. Dans le courant de la prochaine année, si les plans de dépenses de tous les ordres de gouvernement devaient se concrétiser, nous estimons que les dépenses gouvernementales devraient augmenter plus rapidement que l'offre. En ce sens...
D'accord.
David Dodge, votre prédécesseur, a récemment dit que le gouvernement fédéral applique une politique particulièrement expansionniste, qu'il gonfle résolument ses dépenses, ce qui ajoute aux pressions inflationnistes et contraint la Banque à pratiquer une politique de resserrement. Le directeur parlementaire du budget a aussi récemment prédit que le déficit sera de 6 milliards de dollars supérieur à ce que le gouvernement a annoncé aux Canadiens dans son budget.
Comme le gouvernement a augmenté ses dépenses de 11,5 % au cours du dernier exercice, cette tendance à la croissance des dépenses gouvernementales ne vous préoccupe‑t‑elle pas? Celles‑ci sont-elles tout aussi inutiles?
Ce que j'ai dit et ce que nous avons indiqué dans notre rapport sur la politique monétaire, s'appliquent aux plans de dépenses gouvernementales, et ce que je viens de dire, c'est que, si vous additionnez les chiffres de tous ces plans, d'après nos estimations, l'inflation passera à 2,5 %. La croissance potentielle des extrants du côté de l'offre est de 2 % et elle augmente donc plus rapidement...
Pourrions-nous permettre à notre invité d'aller au bout de ses réponses? Il essaie de répondre à la question et on l'interrompt.
Il faut éviter d'être plusieurs à parler en même temps, monsieur Hallan. Nous ne voulons pas que vous parliez en même temps que le témoin. Permettez-lui de terminer sa réponse à votre question, s'il vous plaît.
D'accord.
Monsieur le gouverneur, est‑ce que l'augmentation de 6 milliards de dollars du déficit dont le directeur parlementaire du budget nous a parlé, fait partie des prévisions de votre banque?
Je n'ai pas le rapport du directeur parlementaire du budget sous les yeux, mais dans nos projections, nous regroupons le budget fédéral et tous les budgets provinciaux pour parvenir à la meilleure estimation possible des plans financiers. Ces éléments sont intégrés à nos projections...
Je suis désolée, mais le gouverneur n'a pas été en mesure de répondre complètement à la dernière question. Personne à l'écoute n'a pu comprendre la réponse.
Monsieur Hallan, s'il vous plaît, plus d'interférence de ce genre. Permettons au gouverneur de répondre complètement à votre question.
Nous savons que le gouvernement a déjà dépassé les 6 milliards de dollars. Est‑ce que cela vous aide dans vos projections en termes de baisse des taux d'intérêt?
Je ne vais pas commenter des plans financiers précis, des plans de dépenses précis. Ce que j'ai dit — et je l'ai dit très clairement —, c'est que l'ensemble des plans de dépenses gouvernementales pour l'année prochaine impliquent une croissance et des dépenses de 2,5 %...
Monsieur le président, j'invoque le Règlement. Je crois comprendre qu'à cause du temps limité dont nous disposons dans ce genre de comité, les témoins sont invités à répondre à chaque question dans le même temps qu'il en faut pour la poser.
M. Hallan pose des questions appelant des réponses par oui ou par non. Je trouve justifié que mon collègue cherche à obtenir une vraie réponse...
Ce n'est pas exact, monsieur Scheer. Ce que vous dites n'est pas exact. Le gouverneur doit avoir la possibilité de répondre à la question.
D'accord, mais avec tout le respect que je vous dois, vous avez dit avoir fait vos projections d'après les actuelles prévisions du gouvernement.
Nous savons que le déficit va déjà augmenter de 6 milliards de dollars de plus, selon le directeur parlementaire du budget. Est‑ce que cela vous aide dans vos plans de réductions des taux d'intérêt? Oui ou non?
Merci.
Votre temps est écoulé, monsieur Hallan. Nous passons maintenant à Mme Dzerowicz. C'est à vous pour...
J'invoque le Règlement, monsieur le président. J'ai chronométré et il me restait une minute complète.
Pas du tout. Nous avons ici 18 h 8.
M. Philip Lawrence: Vous n'avez pas suspendu pendant les rappels au Règlement.
La décision de la présidence est contestée.
(La décision de la présidence est maintenue par 7 voix contre 4.)
Le président: Merci. La décision est maintenue.
Nous passons maintenant à Mme Dzerowicz, pour six minutes.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Je remercie le gouverneur et la sous-gouverneure de leur présence.
Merci à vous deux pour votre travail extraordinaire, particulièrement en cette période très difficile et sans précédent.
Je commencerai par vous demander de clarifier une chose très rapidement, monsieur le gouverneur. En réponse à une question de mon collègue d'en face, vous avez dit que les plans de dépenses de tous les ordres de gouvernement pourraient entraîner une déconnexion entre la politique budgétaire et la politique monétaire.
Vous ai‑je bien compris? Pouvez-vous préciser que vous ne parlez pas seulement des dépenses du gouvernement fédéral? Si vous pouviez nous éclairer à ce sujet, ce serait formidable.
Je parle de tous les ordres de gouvernement, fédéral et provinciaux. Je ne crois pas avoir parlé de « déconnexion ».
D'accord. Merci.
Le taux d'inflation est passé par un pic de 8,1 % il y a quelque temps et, aujourd'hui, il est de 3,8 %. Personne ne dira que notre taux d'inflation n'est pas trop élevé. Pouvez-vous nous dire à quoi vous attribuez cette amélioration de l'inflation, s'il vous plaît?
Je pense qu'il y a deux séries de facteurs.
Une partie est mondiale. L'une des raisons pour lesquelles l'inflation a été si élevée, c'est qu'à l'échelle mondiale, la demande de biens a dépassé de loin la capacité de fourniture des économies, ce qui a entraîné une forte hausse des prix des biens à l'échelle mondiale. Puis, l'agression russe contre l'Ukraine a fait grimper les prix de l'énergie et des produits agricoles.
Les problèmes de la chaîne d'approvisionnement mondiale qui garrottaient le système ont été en grande partie résolus. Bien sûr, l'invasion de la Russie se poursuit, et nous avons maintenant un nouveau conflit au Moyen‑Orient qui est source d'incertitude, mais les prix de l'énergie ont baissé depuis leur sommet au début de la guerre. Les prix agricoles aussi ont diminué. Ces mesures ont atténué les pressions inflationnistes à l'échelle mondiale.
L'autre aspect, cependant, concerne davantage le marché intérieur, et c'est vraiment là que la politique monétaire a un effet. Quand l'économie a repris, la demande s'est redressée beaucoup plus rapidement que l'offre au point de la dépasser. L'économie était en surchauffe, ce qui a induit des pressions inflationnistes au pays.
Nous avons réagi vigoureusement en augmentant les taux d'intérêt plus rapidement que jamais. Nous constatons aujourd'hui que ces taux plus élevés agissent sur la dynamique économique. La croissance de l'économie a ralenti. L'économie était très surchauffée. La plupart des indicateurs indiquent que nous en sommes presque au point d'équilibre. Les pressions inflationnistes s'en trouvent affaiblies. Vous avez constaté que l'inflation, pour des raisons tant mondiales que nationales, a considérablement diminué.
Nous pensons que la croissance sera faible au cours des prochains trimestres, ce qui signifie que nous envisageons déjà d'autres mesures d'atténuation de l'inflation, et c'est bien sûr ce que nous souhaitons.
Je pense que tous les Canadiens conviendront que c'est ce qui est souhaitable.
Très rapidement, parce que j'ai deux ou trois autres questions à vous poser, monsieur le gouverneur, comment la situation économique actuelle du Canada se compare‑t‑elle à celle des autres pays du G7?
La comparaison fait intervenir de nombreuses dimensions. Dans tous nos pays, nous avons tous vécu la COVID‑19 pratiquement en même temps. Tous les pays ont été plongés en récession et tous en sont sortis. Nous avons tous connu une inflation beaucoup plus élevée, puis une baisse de l'inflation.
La reprise au Canada indique que nous nous sommes assez bien redressés, bien que pas aussi fortement que les États‑Unis à certains égards — certainement pas en fonction du PIB. Sur le plan de l'emploi, nous avons en fait connu une très forte reprise.
Notre reprise a été plus forte que celle de certains de nos amis européens. L'inflation au Canada n'a pas été aussi élevée qu'en Europe, même pas aussi élevée qu'aux États‑Unis. L'inflation a baissé dans tous nos pays, et elle n'est plus si différente dans la plupart des pays avancés.
Merci.
On croit, du moins c'est ce que me disent mes électeurs de la circonscription de Davenport, que si vous augmentez les taux, vous entraînez en fait une hausse de l'inflation. Que répondriez-vous aux résidants de Davenport qui pourraient dire cela?
Les habitants de Davenport ont raison de dire que l'augmentation des taux d'intérêt provoque une augmentation des coûts d'emprunt. De nombreux ménages, surtout s'ils ont une hypothèque à taux variable ou ayant été renégociée récemment, ont constaté une augmentation très nette des coûts de remboursement de leur hypothèque. Il y a cet effet direct, nous en tenons compte et nous l'intégrons à notre analyse.
Cependant, la hausse des coûts d'emprunt ralentit les dépenses pour une vaste gamme de biens et de services. Cela ralentit le marché de l'habitation. Cela ralentit les dépenses en biens durables, et nous avons constaté que cela commence à se propager aux services. On voit très clairement — et c'est en fait ce que nous disons dans le « Rapport sur la politique monétaire » — que les secteurs où les taux d'intérêt sont les plus élevés sont ceux où l'inflation est la plus faible. Les prix de nombreux biens durables, comme les meubles et les appareils ménagers, ont en fait diminué.
Dans le cas de nombreux produits semi-durables comme les vêtements et les chaussures, l'inflation a considérablement diminué, et les prix de nombreux services, à l'exclusion de ceux du logement, qui est un sujet distinct, ont diminué. Dans toutes ces catégories, l'inflation se situe actuellement à 2 % ou moins.
Vous pouvez voir que les taux d'intérêt plus élevés contribuent à atténuer les pressions sur les prix. Nous avons encore du chemin à faire, comme vous l'avez laissé entendre, mais si les taux d'intérêt n'avaient pas augmenté, l'inflation serait plus élevée.
Dans mon dernier rappel au Règlement, j'ai indiqué au président qu'une règle avait été adoptée, soit que le temps de réponse devait être proportionnel au temps pris pour poser la question. Vous avez dit que j'avais tort. Je veux simplement attirer votre attention sur une motion qui a été adoptée le jeudi 16 décembre dernier et qui dit ceci au paragraphe e):
Que, lors de l'interrogation des témoins à toutes les audiences futures, le président du Comité applique la règle suivante, à savoir que le temps de réponse à chaque question ne dépasse pas le temps de parole accordé pour la poser, à moins qu'avec la permission du député qui a la parole...
Cette motion a été adoptée.
Je voulais simplement vous le rappeler pour les prochaines réunions.
Merci, monsieur Scheer.
Monsieur Scheer, je sais que vous n'êtes pas un habitué de ce comité et je ne sais pas combien de fois vous y avez participé, mais les membres du Comité savent très bien que nous avons autorisé à ce que les questions soient posées et les réponses données de façon très respectueuse. J'ai également permis aux députés de dépasser le temps alloué pour les questions, selon le moment où la question était posée et celui où la réponse était donnée. Si quelqu'un posait une question au bout de cinq minutes et 50 secondes de son intervention, sur une plage de six minutes, je permettais qu'une réponse soit donnée, quitte à aller jusqu'à 6 minutes 30, comme dans le dernier cas.
C'est ainsi que nous menons nos travaux ici avec l'appui des membres. C'est ainsi que nous avons tenu toutes nos réunions ici, monsieur Scheer, et je m'en remets à la volonté des membres du Comité pour continuer de tenir nos réunions comme nous l'avons fait. Que ce soient les conservateurs, les bloquistes, les néo-démocrates ou les libéraux, je pense que tout le monde a aimé la façon dont nous avons mené ces réunions.
Nous passons maintenant à M. Ste‑Marie.
[Français]
Merci, monsieur le président.
D'abord, je salue le gouverneur de la Banque du Canada, M. Macklem, et la première sous-gouverneure de la Banque du Canada, Mme Rogers. Je les remercie de venir témoigner aussi fréquemment devant le Comité pour répondre à nos questions. Je les remercie également d'avoir fait une grande partie de leur présentation en français. Je leur en suis reconnaissant, comme toujours.
Je veux d'abord revenir aux questions qui ont été abordées précédemment par mes deux collègues concernant votre déclaration du 25 octobre dernier, qui donnait à penser que les dépenses du gouvernement fédéral alimentent l'inflation.
Est-ce bien ce que vous dites? Pouvez-vous, en lien avec les réponses que vous avez déjà données, nous dire si c'est le cas à l'heure actuelle?
À l'heure actuelle, le taux de croissance des dépenses du gouvernement se situe en deçà de 2 %. De son côté, le taux de croissance potentiel de l'offre dans l'économie est d'environ 2 %. Si la croissance des dépenses budgétaires demeure en dessous de ce taux, elle ne contribue pas de façon importante à l'inflation.
Ce que je dis, c'est qu'après avoir examiné les plans des gouvernements fédéral et provinciaux pour l'année 2024, nous estimons que le taux de croissance des dépenses budgétaires sera d'environ 2,5 %, ce qui est supérieur à notre prévision du taux de croissance de la production potentielle.
Si tous ces plans se réalisent, les dépenses budgétaires risquent de croître plus vite que l'offre et cela n'aiderait pas à réduire l'inflation.
C'est très clair. Je vous remercie beaucoup.
Si un tel scénario se réalisait et que les dépenses budgétaires dépassaient les prévisions d'un demi-point pour atteindre 2,5 % plutôt que 2 %, les répercussions sur l'ensemble de l'économie seraient-elles importantes?
Vous avez raison, un demi-point, ce n'est pas beaucoup, mais cela représente quand même un risque. Surtout si les gouvernements ajoutent d'autres dépenses, ce chiffre pourrait alors encore grimper. À un certain moment, il pourrait devenir difficile de réduire l'inflation.
Merci beaucoup.
Pour passer à un autre sujet, je me réfère à un article paru dans le Journal de Montréal il y a trois jours, qui rapporte les propos d'une entrevue que vous avez accordée à CBC. Je vais parler brièvement de cet article et je vous poserai ensuite mes questions.
Le titre de l'article est: « La Banque du Canada croit en avoir fini avec les hausses du taux directeur ». La première phrase de l'article est celle-ci: « Le gouverneur de la Banque du Canada croit qu'il n'aura plus besoin de hausser le taux directeur afin de mater l'inflation au pays ».
Ensuite, on cite vos propos, qui ont été traduits. Ce qu'on en comprend, c'est que le taux actuel pourrait être maintenu assez longtemps. La Banque du Canada pourrait envisager de le baisser seulement, et je cite les propos traduits, « lorsque nous verrons des signes clairs que nous sommes en voie de retourner à un taux d'inflation de 2 %, là nous pourrons commencer à discuter d'une diminution du taux directeur ». Ce ne sera donc pas avant ça. Cependant, vous dites qu'il ne serait plus nécessaire de hausser les taux.
Le contenu de l'article et les propos qui y sont relatés sont-ils conformes à votre pensée? Pouvez-vous ajouter quelques commentaires?
Je vais ajouter quelque chose à votre résumé.
L'un des scénarios envisagés est que, comme nous avons suffisamment haussé les taux d'intérêt pour être bientôt en mesure d'observer une diminution de l'inflation tendancielle, nous serons alors plus sûrs d'en avoir fait assez. Cela dit, comme nous l'avons souligné dans notre rapport et dans tous mes commentaires, il existe des risques de remous inflationnistes.
L'autre scénario est que le taux d'inflation demeure trop élevé et qu'on n'observe aucune diminution de l'inflation fondamentale. S'il se réalise, nous sommes prêts à augmenter encore nos taux d'intérêt pour abaisser l'inflation à la cible de 2 %.
Notre conclusion de la semaine dernière, c'est qu'on perçoit des signes encourageants indiquant que nos mesures fonctionnent, que nous avons été patients, mais, si les risques de remous se produisent, nous serons prêts à augmenter les taux d'intérêt.
Je vous remercie encore de votre réponse.
J'ai une dernière très brève question à vous poser.
Il y a cinq jours, un article ayant pour titre « Le gouverneur de la Banque du Canada sermonne des premiers ministres provinciaux » est paru dans Le Devoir, en référence à ceux qui vous avaient écrit pour vous demander de ne pas hausser les taux d'intérêt.
Vous leur avez répondu qu'il fallait faire attention de ne pas compromettre l'indépendance de la Banque.
Pouvez-vous commenter ce risque et l'importance de maintenir l'indépendance de la Banque?
Comme vous venez de le mentionner, j'ai reçu il y a six ou sept semaines plusieurs lettres de quelques premiers ministres qui voulaient influencer ma décision. Je leur ai répondu que nous sommes très contents d'entendre des premiers ministres nous parler des effets qu'ont l'inflation et la hausse des taux d'intérêt dans leur province et de la façon dont ces développements affectent leurs concitoyens.
Toutefois, je leur ai aussi répondu que, quand ils nous donnent des instructions sur la façon dont nous devrions traiter les taux d'intérêt, ce n'est pas utile. Il en est ainsi parce que cela pourrait créer l'impression que la politique monétaire n'est pas indépendante des gouvernements. Or je crois que tout le monde est d'accord sur l'inutilité de ces instructions.
L'indépendance de la Banque centrale est importante si on veut maintenir l'accessibilité des prix.
Merci beaucoup.
Merci, monsieur le gouverneur, pour votre présence.
Je vais commencer par vous demander à quel point vous pensez que la demande de logements est élastique ou inélastique pour les Canadiens. Peu importe ce qu'il advient des prix, même s'ils grimpent en flèche, il est juste de dire que les Canadiens ont toujours besoin d'un toit, peu importe le prix. Est‑ce une évaluation juste?
Les gens ont besoin d'un abri, bien entendu, mais s'ils n'en ont pas les moyens, ils ne peuvent pas l'acheter.
Bien sûr, mais le besoin ne disparaît pas. Diriez-vous qu'en ce moment, il y a une grave pénurie de logements au Canada?
Il y a une pénurie de matériaux de construction depuis au moins 10 ans. L'offre de logements ne suit pas la croissance de la demande, ce qui aggrave le problème.
Diriez-vous que, depuis que les taux d'intérêt ont augmenté, les mises en chantier sont moins nombreuses et que nous voyons moins de nouveaux logements dans ce contexte de hausse des taux d'intérêt?
La hausse des taux d'intérêt a freiné la demande de logements. En fait, le marché du logement était en surchauffe. Le prix des maisons a augmenté très rapidement quand les taux d'intérêt étaient très bas. Au fur et à mesure que nous les avons augmentés, le prix des maisons a baissé. Cependant, les taux d'intérêt élevés augmentent le coût des hypothèques, ce qui n'améliore pas l'abordabilité.
Des témoins experts de l'industrie financière et de l'industrie du logement nous ont dit que la crise du logement ne se réglera pas sans un niveau important d'investissement et de contribution du gouvernement. Êtes-vous d'accord avec cette évaluation?
Je dirais que nous avons un problème d'approvisionnement en logements depuis 10 ans. La première sous-gouverneure et moi-même sommes heureux de constater que tous les ordres de gouvernement se concentrent davantage sur cette question. Je ne pense pas qu'un seul ordre de gouvernement puisse résoudre ce problème. Il faudra que tous les ordres de gouvernement s'entendent. En fin de compte, c'est le secteur privé qui construira la plupart de ces maisons et de ces immeubles d'habitation. Ils devraient eux aussi être invités à la table.
Alors, je crois que ma question est la suivante. Lorsque vous parlez d'une augmentation des plans de dépenses de 2,5 % dans l'ensemble du gouvernement, afin de comprendre l'inflation, si nous cherchons un moyen de ramener notre marché de l'habitation au point où les prix baisseront pour les Canadiens et où ils auront accès à plus de logements abordables, ne serait‑il pas logique de faire la distinction entre les dépenses générales et les dépenses pour la construction de nouveaux logements? Qu'il s'agisse de logements abordables ou de logements sociaux ou d'un financement sur le marché qui facilite la construction de logements, n'est‑ce pas là un type de dépense totalement différent de l'augmentation générale des dépenses dans le contexte inflationniste actuel?
Vous avez tout à fait raison de dire que lorsqu'on examine les dépenses du gouvernement afin d'établir une correspondance entre les dépenses du gouvernement et leurs répercussions sur l'inflation, le montant est important, mais les types de dépenses sont importants eux aussi. Les différents types de dépenses ont des multiplicateurs différents. Certaines dépenses sont plutôt liées à la demande. D'autres s'ajoutent aux crédits. Plus les dépenses augmentent l'offre et non la demande, plus elles contribuent à modérer l'inflation. Alors, oui, je pense que dans la mesure où les dépenses gouvernementales augmentent l'offre, elles modéreront mieux l'inflation que si elles accroissent simplement la demande.
Un grand nombre de mesures pourraient améliorer la situation du logement. Certaines d'entre elles visent davantage à stimuler la demande, et d'autres stimulent l'offre.
Lorsqu'il y a un lien direct entre les dépenses du gouvernement et la création d'une unité, par opposition à une injection d'argent dans l'économie qui risque de faire monter les prix du parc de logements existant, on aurait tendance à considérer que cela est moins susceptible de provoquer l'inflation, et peut-être que cela pourrait même avoir un effet salutaire et aider à faire baisser l'inflation s'il y avait une meilleure offre sur le marché du logement. Est‑ce que j'interprète bien la situation?
Très bien. Je pense que c'est important, parce que certains de vos commentaires sont considérés comme des réflexions sur la politique financière, malgré tous vos efforts. Je pense qu'il est important que les Canadiens comprennent qu'il y a des types d'investissements gouvernementaux qui peuvent vraiment contribuer à réduire l'inflation tout en réglant certains problèmes importants et que toutes les dépenses gouvernementales ne sont pas égales à cet égard.
Il est très important que les gens comprennent cela en écoutant les conversations que nous tenons ici, sur la Colline du Parlement, au sujet de ce que le gouvernement devrait investir dans le logement. C'est particulièrement important, il me semble — et je ne m'attends pas à ce que vous ayez une opinion à ce sujet dans le cadre de la politique financière — dans le cas du logement social et du logement abordable, où l'investissement du gouvernement tend à être plus directement lié à la création de nouvelles unités, que certains mécanismes de financement et d'autres choses que le gouvernement offre parfois aux promoteurs privés. Ces mécanismes finissent par faciliter la construction de logements qui se trouvent souvent à l'extrémité supérieure du spectre sans contribuer à améliorer l'abordabilité.
N'est‑il pas vrai que le coût du logement est l'un des principaux facteurs de l'inflation?
C'est un moteur important de l'inflation et, comme je l'ai dit, la hausse continuelle des prix est l'un des facteurs qui entravent la baisse des taux d'inflation.
Merci.
Merci, monsieur Blaikie.
Chers collègues et témoins, nous allons passer à notre deuxième série de questions.
Monsieur Chambers, vous avez cinq minutes.
Merci, monsieur le président.
Bienvenue à nouveau, monsieur le gouverneur et madame la sous-gouverneure. Merci d'être venus.
Une chose m'intrigue un peu. Je constate un décalage par rapport à la politique monétaire dont vous avez déjà parlé, je crois. Constatez-vous un retard de la politique budgétaire?
La politique budgétaire accuse un certain retard. Encore une fois, cela dépend beaucoup de l'objectif. Pour un transfert financier versé directement aux ménages, le délai ne sera probablement pas très long. Cependant, dans le cas, disons, d'un programme de dépenses d'infrastructures, le délai sera probablement beaucoup plus long.
La différence entre la politique monétaire et la politique budgétaire, c'est que la politique monétaire comporte en fait une cible et un instrument. Nous relevons et abaissons les taux d'intérêt. Nous estimons relativement bien les délais. Oui, ces délais sont toujours incertains. Quant à la politique budgétaire, elle comporte de nombreux instruments différents.
Merci.
En effectuant l'analyse de la banque, avez-vous examiné ou considéré... Vous avez dit que les dépenses de cette année étaient inférieures à 2 % ou qu'elles s'élevaient à 2 %, mais l'année précédente, elles dépassaient de 25 % les niveaux prépandémiques. La Banque en a‑t‑elle tenu compte dans son analyse en déterminant si la politique budgétaire est expansionniste ou non?
Oui.
Nous avons traversé un cycle économique massif, un effondrement énorme de l'économie et une reprise très rapide. Le gouvernement a appliqué des mesures budgétaires énergiques au plus fort de la pandémie. Elles ont certainement assuré une reprise très rapide ainsi qu'une politique monétaire très expansionniste. Oui, nous avons examiné cela.
Nous avons également examiné... Comme nous l'avons déjà dit au Comité, nous avons été surpris de voir à quel point et à quelle vitesse l'inflation a grimpé. Nous avons examiné ces erreurs dans nos prévisions pour essayer de les comprendre et pour éviter de les reproduire.
Merci.
Pourriez-vous remettre au Comité l'analyse que vous avez effectuée sur les dépenses de tous les ordres de gouvernement? Pourriez-vous déposer cette analyse auprès du Comité? S'agit‑il d'une information que vous pouvez remettre au Comité?
En fait, cette analyse est du domaine public. Nous publions nos prévisions tous les trimestres. Nous comparaissons tous les trimestres devant ce comité pour les expliquer. Chaque fois que les gouvernements ont annoncé leurs plans financiers, nous les avons intégrés à nos prévisions.
Je comprends.
Je vais changer de sujet pendant quelques instants. Je repense à notre première conversation au Comité. L'un des objectifs de l'assouplissement quantitatif, si j'ai bien compris, était d'aider à maintenir un faible taux d'intérêt. Autrement dit, si la banque n'avait pas acheté la dette du gouvernement, les taux d'intérêt auraient subi des pressions à la hausse. Est‑ce que j'ai bien compris?
Merci.
Cette année, le gouvernement fédéral emprunte 421 milliards de dollars sur le marché libre, et la Banque n'achète pas cette dette. Est‑il juste de dire que cela contribue à la hausse des taux que nous avons observée récemment, même si la Banque n'a pas augmenté le taux directeur?
En fait, les emprunts du gouvernement sur les marchés publics ont diminué. Pendant la crise de la COVID‑19, il a eu un grand besoin d'emprunter. Au fur et à mesure qu'il a réduit ses dépenses, ces besoins d'emprunt ont considérablement diminué.
Je soulignerais qu'il est important de comparer le Canada à d'autres pays. Le ratio du déficit au PIB du Canada est le plus bas du G7. Les besoins d'emprunt du Canada sont beaucoup plus faibles que ceux de nombreux autres pays...
Monsieur le gouverneur, je dois vous interrompre.
Au cours de la conférence de presse de la semaine dernière, on nous a dit que le déficit des États-Unis a causé l'émission de beaucoup plus d'obligations et que, par conséquent, l'augmentation de l'offre doit être absorbée, ce qui entraîne une légère hausse des prix.
Les États-Unis empruntent 2 billions de dollars cette année. Le Canada emprunte 421 milliards de dollars. C'est un record, et personne ne dit que cela a contribué aux taux d'intérêt.
Madame Rogers, pourriez-vous nous dire si vous croyez que les emprunts du gouvernement sont un facteur qui fait augmenter les taux d'intérêt?
Eh bien, comme nous l'avons dit lors de la conférence de presse de la semaine dernière, nous faisons face à un certain nombre de choses. Vous mentionnez seulement la hausse marquée des taux de rendement à long terme des obligations.
Comme nous l'avons dit lors de la conférence de presse de la semaine dernière, un certain nombre de facteurs y contribuent. Le terme « étirement »... Nous avons parlé, comme vous l'avez dit... Je crois être l'auteure de cette citation. J'ai aussi dit que nous ne constatons pas cette même augmentation au Canada. Nous n'avons pas subi ce même effet à long terme...
Avec tout le respect que je vous dois, le taux sur cinq ans a augmenté de nombreux points de base sans que le taux directeur n'ait changé.
Merci, monsieur le président.
Merci à vous deux d'être venus.
Nous avons ici une excellente occasion d'examiner la multitude d'affirmations que nous entendons et d'obtenir votre point de vue sur l'inflation et sur plusieurs mesures que le gouvernement peut appliquer, et qu'il applique, pour continuer à aller de l'avant.
J'aimerais revenir sur une chose dont M. Blaikie a parlé, le lien entre l'offre et l'inflation. Je voudrais que nous parlions de programmes comme celui des services de garde d'enfants à 10 $ par jour, qui a vraiment aidé les gens, les femmes en particulier, à réintégrer le marché du travail. Je voudrais aussi que nous parlions des mesures que le gouvernement prend pour s'attaquer à la crise climatique.
Est‑ce que ces mesures nous aident à atteindre les niveaux d'inflation que nous souhaitons? Est‑ce que cela fait partie de l'offre et de la demande?
Ce sont là deux sujets bien différents, que je vais donc aborder séparément.
Les programmes de garderie ont permis d'accroître nettement la proportion de femmes, et notamment de jeunes femmes, présentes dans la population active à un moment où le marché du travail était vraiment sous tension. Pour reprendre la description que le gouverneur a proposée, je dirais que cet apport a accru l'offre. Dans un marché du travail en très forte tension, l'arrivée de ces femmes a amélioré l'offre de main-d'œuvre.
Les mesures de lutte contre les risques climatiques sont un bon exemple d'intervention qui met beaucoup de temps à donner ses fruits, comme le gouverneur l'a expliqué. Les effets du risque climatique sont plus indirects.
Prenons un phénomène climatique extrême, comme les feux de forêt que nous avons connus cet été. Nous estimons qu'ils ont retranché environ un demi-point de pourcentage au PIB pendant le deuxième trimestre. Les programmes à long terme qui atténuent ces risques permettront, avec le temps, dans la mesure du possible, de réduire le nombre de phénomènes climatiques extrêmes. Ce serait utile.
C'est un très bon exemple d'intervention qui met beaucoup de temps à donner des résultats et peut, à court terme, accroître davantage la demande que l'offre.
Merci.
Ma question s'adresse à l'un ou l'autre d'entre vous. Pourriez-vous nous parler de la résilience de la main-d'œuvre canadienne? Pourquoi ne dites-vous pas que la période actuelle se caractérise par la stagflation?
Stagflation est un terme qui suscite de vives réactions.
J'ai grandi dans les années 1970, et le gros problème était la stagflation. Tant l'inflation que le chômage étaient supérieurs à 10 %.
L'inflation est encore trop forte. À 3 ou 4 %, elle est trop élevée.
Vous entendez tous les réactions de vos électeurs. Ils ont du mal à surnager. L'accessibilité est un véritable problème, et nous devons abaisser le taux d'inflation. Les prix augmentent trop rapidement. Mais le taux ne dépasse pas les 10 %. Il n'atteint même pas les 8 %. Depuis l'époque, nous l'avons beaucoup fait reculer.
Le taux de chômage demeure relativement bas par rapport à ce qui était la norme par le passé. Il a légèrement augmenté, passant d'environ 5 % à quelque 5,5 %, mais c'est relativement faible par rapport à ce qu'on voyait autrefois.
À propos de la situation actuelle, je ne parlerais pas de stagflation. Il est vrai que, dans les perspectives que nous avons publiées la semaine dernière, nous avons révisé à la hausse les perspectives d'inflation à court terme et à la baisse les perspectives de croissance à court terme. Ce qui montre que la tâche est plus ardue que nous ne l'avions espéré, mais j'insiste sur le fait que notre intervention donne des résultats. Au fur et à mesure que les effets de taux d'intérêt élevés se propagent dans l'économie, l'inflation devrait se calmer et la croissance reprendre. Les Canadiens n'auront pas à vivre avec l'anxiété persistante de l'inflation.
Si vous me permettez d'intervenir, je dirai que les circonstances atténuantes que sont les cours du pétrole, les réalités géopolitiques et la tragédie qui se déroule au Moyen-Orient ont également une incidence sur l'inflation. Nous fixons les objectifs, mais il y a d'autres circonstances qui pèsent sur l'action du gouvernement en matière de budget et de politiques.
Oui. Le Canada, vous le savez, a une économie très ouverte. C'est un pays qui fait du commerce, qui exporte. Une grande partie de notre revenu provient de la vente de produits à l'étranger. Nous importons aussi beaucoup de marchandises. Les facteurs mondiaux ont une incidence sur l'économie des pays actifs au niveau mondial.
Oui, lorsque les cours mondiaux du pétrole sont à la hausse, les prix à la pompe augmentent. Les Canadiens le constatent. Mais nous sommes également un exportateur de pétrole, de sorte que nos sociétés énergétiques engrangent davantage de revenus lorsque les cours du pétrole s'élèvent. Il faut tenir compte de tous ces effets.
[Français]
Merci, monsieur le président.
Monsieur le gouverneur, je veux vous faire part d'une analyse de l'économiste Mohamed A. El‑Erian, effectuée ces derniers jours sur l'économie mondiale et, en particulier, sur l'économie américaine. J'aimerais entendre vos commentaires au sujet de l'économie canadienne, notamment.
M. El‑Erian écrit que, présentement, il y aurait un consensus chez les économistes, ou du moins la vision dominante, voulant qu'on se dirige vers un atterrissage en douceur. Or, selon lui, le risque que cela puisse basculer vers un atterrissage brutal au cours des semaines à venir existe toujours. Le risque principal et immédiat, selon ses propos, résiderait dans la récente flambée des coûts d'emprunts mondiaux qui, elle-même, dépend du choix de la Réserve fédérale américaine et des autres banques centrales, comme la Banque du Canada, de maintenir possiblement les taux d'intérêt élevés pendant une période prolongée, et ce, afin de lutter contre l'inflation.
Quels sont vos commentaires en lien avec cette analyse?
Depuis que nous avons commencé à hausser les taux d'intérêt, plusieurs économistes nous ont dit que nous allions créer une récession. Là où nous en sommes, il n'y a pas de récession. Bien sûr, nous traversons une période de faible croissance, mais elle est nécessaire pour réduire les pressions inflationnistes.
Comme vous l'avez dit, les taux d'intérêt à long terme, surtout aux États‑Unis, ont augmenté de manière très importante au cours des derniers mois. Comme la sous-gouverneure vient de le mentionner, plusieurs facteurs peuvent expliquer cette situation. Cependant, il est difficile, en ce moment, de dire précisément lesquels sont les plus importants.
Dans les prévisions que nous avons publiées la semaine passée, nous avons inclus une augmentation des taux d'intérêt à long terme. Cela fait donc partie de nos prévisions. Le risque que ces hausses puissent être encore plus prononcées existe effectivement. Si cela se produisait et, surtout, si cela reflète des primes dans le cours du rendement, cela pourrait encore réduire le taux de croissance de l'économie mondiale. Bien sûr, au Canada, nous serions touchés, car nous avons une économie très ouverte.
C'est donc un risque qu'il faut suivre de près.
[Traduction]
Merci.
Au cours de nos consultations prébudgétaires, nous avons entendu un certain nombre d'économistes, dont les points de vue divergent. On nous a dit récemment qu'au cours des deux dernières années, les bénéfices des sociétés ont augmenté en termes absolus, mais aussi qu'ils ont progressé considérablement comme part du PIB.
Est‑ce conforme à l'analyse de la Banque du Canada?
Je n'ai sous la main aucune analyse des bénéfices comme pourcentage du PIB, mais nous nous sommes intéressés à la question. En fait, un de nos collègues, le sous-gouverneur Nicolas Vincent, a récemment consacré un discours à la question des bénéfices des entreprises.
Dans un contexte où la demande dépasse l'offre, il est plus facile pour les entreprises d'augmenter les prix. Comme l'inflation les décourage, les consommateurs renoncent à comparer les prix. Dans ce contexte, s'il y a une demande excédentaire et que les consommateurs sont moins enclins à comparer les prix, il est plus facile d'imposer des hausses. C'est exactement ce que les entreprises nous disent faire. Selon notre Enquête sur les perspectives des entreprises, elles disent majorer leurs prix plus souvent et de façon plus marquée qu'auparavant. La tendance s'est un peu atténuée récemment. Elles disent maintenant qu'à mesure que l'économie se rétablit et que la demande et l'offre se rapprochent, elles réduisent à la fois le rythme et l'ampleur des hausses.
Nous avons encore du chemin à faire. Les prix sont toujours supérieurs ce qu'ils étaient avant la pandémie. C'est un élément que nous allons surveiller. Dans nos communiqués et dans bon nombre des observations du gouverneur, nous disons toujours quels paramètres nous prenons en compte pour savoir quand l'inflation sous-jacente sera revenue là où elle doit être pour que l'inflation globale recule. Le comportement des entreprises en matière de prix est l'un des éléments que nous surveillons de près.
Je peux vous dire à ce sujet qu'une des choses qui donnent vraiment au simple citoyen l'impression que le système joue contre lui, c'est qu'il se fait escroquer par les sociétés en période de difficultés économiques. Elles majorent leurs prix, ce qui fait augmenter le taux d'inflation, et la réaction est de relever les taux d'intérêt. Les consommateurs qui se sentaient coincés par les bénéfices démesurés des sociétés se retrouvent aussi coincés à cause de leurs versements hypothécaires et de l'achat de divers produits pour lesquels il faut recourir au crédit.
Les Canadiens sont doublement pénalisés, coincés au milieu de ces forces qui les dépassent. D'un côté, ils se font exploiter par les sociétés et, de l'autre, ils sont asservis à des taux d'intérêt plus élevés. Les sociétés qui détiennent de gros avoirs peuvent en fait gagner plus sur ces avoirs en travaillant moins, simplement en thésaurisant ou en achetant des obligations ou d'autres titres, profitant de la hausse des taux d'intérêt. On dirait que le système est conçu pour aider les riches à s'enrichir au détriment de tout le monde.
Merci.
Il ne reste plus de temps pour recevoir une réponse à cette question. Elle viendra peut-être au prochain tour.
Merci, monsieur le président.
Monsieur le gouverneur, j'ai eu l'occasion d'examiner l'indice d'accessibilité à la propriété publié par votre banque. Très intéressant. En 2015, vers la fin du mandat de M. Harper, l'indice était de 32 %. Aujourd'hui, sous le gouvernement libéral en place, il est de 51 %. Voilà qui fait nettement ressortir le problème, à savoir que nous sommes en pleine crise du logement.
Vous avez dit une chose intéressante la semaine dernière, à moins que ce ne soit la sous-gouverneure Rogers qui l'ait dite. Il y a normalement, on l'a vu par le passé, une corrélation entre les taux d'intérêt et les prix des logements. Si les taux d'intérêt augmentent, le prix des logements diminue quelque peu; s'ils baissent, le prix des logements monte quelque peu.
Vous avez dit une chose intéressante et je voudrais que vous précisiez. Vous avez attribué à la pénurie structurelle de logements le fait que le prix des logements ne diminue pas comme on pourrait s'y attendre.
Que vouliez-vous dire au juste? Soyez bref, s'il vous plaît. Mon temps de parole est limité.
Il y a un problème structurel d'offre lorsque la demande est devenue et reste bien supérieure à l'offre. Comme le gouverneur l'a dit plus tôt, c'est un problème qui existe depuis au moins une décennie. La situation a été exacerbée par la crise de la COVID‑19, car nous passions tous plus de temps à la maison et voulions avoir plus d'espace ou déménager. Les prix ont flambé.
Pour être clair, un certain nombre de facteurs peuvent expliquer une pénurie structurelle de logements, et les taux d'intérêt élevés en feraient partie, n'est‑ce pas?
C'est un de ces facteurs, effectivement. Il y a aussi les problèmes de zonage, les pénuries de main-d'œuvre, le coût des matériaux, etc.
Merci.
À propos de cette corrélation, un aspect m'intéresse plus particulièrement. Vous avez dit que les prix du logement diminuent lorsque les taux d'intérêt sont à la hausse, mais que ce n'est pas ce qu'on observe en ce moment à cause du problème structurel d'offre.
Qu'adviendra‑t‑il des prix du logement lorsque vous commencerez à abaisser les taux, vu l'inélasticité de l'offre et le problème structurel de la construction résidentielle au Canada? Qu'en pensez-vous? Qu'arrivera‑t‑il, selon vous?
Toutes choses égales par ailleurs, nous pourrions assister à une nouvelle hausse de la demande de logements.
Comme le gouverneur l'a dit, nous sommes très heureux de voir que les divers ordres de gouvernement coordonnent leurs efforts pour essayer de régler certains des problèmes d'offre. Pour résoudre le problème de pénurie de logements, il ne suffira pas d'agir sur les taux d'intérêt.
J'ajouterai ceci: nous savons ce qui s'est passé lorsque, d'urgence, nous avons abaissé les taux à des niveaux très bas pendant la pandémie. Les prix du logement ont monté de 50 % en deux ans. C'est en partie parce que tout le monde était à la maison toute la journée et voulait plus d'espace. Cependant, c'est aussi en partie parce que les taux d'intérêt étaient extrêmement bas et que le crédit ne coûtait pas cher.
Nous ne prédisons pas tous les prix des actifs ou tous les prix dans l'économie, mais cela montre effectivement que nous avions un problème d'offre lorsque les taux d'intérêt étaient bas et que le problème subsiste, maintenant qu'ils sont élevés.
De toute évidence, les taux d'intérêt ont une grande incidence sur le secteur du logement, qui y est très sensible, mais nous n'allons pas résorber la pénurie de logements en agissant sur les taux d'intérêt.
J'ai une question à vous poser.
Il n'y a là rien d'ésotérique. Vous avez probablement lu la manchette du National Post, aujourd'hui, qui dit que, d'après la Banque Royale, le choc des paiements est imminent pour la plupart des Canadiens qui ont des hypothèques. « D'ici 2026, lorsque 400 milliards de dollars de prêts hypothécaires seront renouvelés, la hausse des versements mensuels pourrait atteindre 48 %. » L'article ajoute que d'ici 2025, « les pertes sur créance augmenteront inévitablement ». Cela touche en temps réel des personnes en chair et en os.
Voici l'une de mes questions: supposons que vous estimiez que les facteurs du marché permettent de commencer à abaisser les taux à un moment donné. Attendriez-vous la publication d'un rapport sur la politique monétaire ou d'un rapport trimestriel pour intervenir, ou le feriez-vous plus tôt, dès que cette information vous parviendrait?
Normalement, à moins d'une urgence très immédiate, nous agissons selon nos dates d'intervention fixes, qui sont de huit fois par année. Là‑dessus, il y a quatre rapports sur la politique monétaire.
Nous avons toujours montré que nous pouvons modifier les taux d'intérêt lors de réunions sans attendre un rapport sur la politique monétaire. Je répondrai donc par l'affirmative.
C'est bon à savoir.
Je profite des 20 secondes qu'il me reste pour poser une dernière question. La semaine dernière, Robert Asselin a témoigné. Il a dit une chose très intéressante: comme la croissance économique est très faible, à moins de 1 %, et que la croissance est anémique dans un contexte de taux d'intérêt élevés, nous ne pourrons plus nous permettre nos programmes sociaux.
A‑t‑il raison?
Une croissance plus faible et des taux d'intérêt plus élevés auront certainement un impact sur le budget de l'État. Je ne pense pas pour autant que la politique budgétaire du Canada rende les programmes sociaux non viables. Il me semble néanmoins important de protéger notre excellente situation financière. C'est important pour les programmes sociaux. C'est important pour la prospérité de notre pays.
Merci.
Merci, monsieur Morantz.
Chers collègues, les micros sont très sensibles. Évitez de les toucher de quelque manière. Cela complique le travail des interprètes.
Nous passons maintenant à M. Baker. Cinq minutes. Je vous en prie.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Monsieur le gouverneur Macklem et madame la première sous-gouverneure Rogers, je vous remercie de comparaître de nouveau devant le comité des finances.
Comme je vous l'ai dit pendant que nous discutions juste avant le début de la séance, je représente une collectivité, Etobicoke-Centre, qui est une banlieue située du côté ouest de Toronto.
Cet été en particulier, j'ai passé beaucoup de temps à faire du porte-à-porte et à discuter avec les gens. Je leur ai demandé comment je pouvais les aider et quelles étaient leurs difficultés. Beaucoup m'ont dit qu'ils étaient nombreux à avoir des prêts hypothécaires. Dans certains cas, le taux est variable, et il a augmenté. Dans d'autres cas, il est fixe et le moment est venu de renouveler le prêt.
Beaucoup m'ont demandé quand les taux d'intérêt allaient baisser.
C'est la question que je vous pose au nom de mes électeurs. Quand les taux fléchiront-ils?
Vos électeurs ne sont guère différents de la plupart des Canadiens. La question en préoccupe beaucoup, en particulier les Canadiens qui ont des prêts hypothécaires, soit environ 35 ou 38 % de la population.
La réponse courte, c'est qu'il faut que l'inflation diminue, et nous pourrons ensuite abaisser les taux d'intérêt. Dans nos prévisions, nous précisons quand nous entrevoyons le retour de l'inflation dans la fourchette cible.
Comme le gouverneur vient de le dire, la politique monétaire est axée sur l'avenir. Nous n'avons donc pas besoin d'attendre que l'inflation revienne à 2 %. Si des indications nous permettent de croire qu'elle va se replier durablement, nous allons commencer à songer à une baisse des taux d'intérêt. Nous n'en sommes pas encore là.
Le conseil d'administration n'a pas commencé à discuter du moment où nous réduirons les taux d'intérêt. Nous ne voulons pas non plus donner de fausses précisions. Nous voudrions bien annoncer aux Canadiens une date exacte. Nous ne demandons pas mieux que d'être surpris, quitte à admettre que nous avons été trop pessimistes, et que nous pourrons faire baisser les taux plus tôt. Nous espérons autant que les autres Canadiens ramener les taux d'intérêt à un niveau plus neutre. À l'heure actuelle, notre priorité est de combattre l'inflation.
Je comprends.
Il me reste quelques questions et seulement deux minutes et demie. Je vous invite donc à la plus grande concision.
Selon vos prévisions, à peu près quand l'inflation devrait-elle être ramenée à des niveaux normaux pour que les taux d'intérêt puissent amorcer un repli?
Nous estimons que l'inflation reviendra essentiellement à la cible vers la fin de 2025. Je le répète, la politique monétaire est axée sur l'avenir. Nous n'avons pas besoin que l'inflation revienne au niveau cible. Nous devons tout de même avoir l'assurance qu'elle est en voie de revenir à sa cible de façon durable.
Je comprends. Ce sera utile pour mes électeurs, car ils auront une idée de ce que vous envisagez et prévoyez.
Un débat qui fait rage au Parlement et qui suscite des questions chez beaucoup de mes électeurs porte sur les causes de pareille hausse des prix. Pourquoi sont-ils si élevés?
Pourquoi les prix ont-ils augmenté autant au cours des dernières années?
On n'en arrive pas à un taux d'inflation de 8 % à cause d'un facteur unique. Il y a tout un ensemble de facteurs. En réponse à une question, tout à l'heure, j'ai dit qu'il y avait à la fois des facteurs mondiaux et des facteurs nationaux.
Deux choses ressortent vraiment. Premièrement, presque tous les pays du monde ont subi une forte hausse de l'inflation à cause de la COVID‑19. Ce fut le cas dans tous les grands pays avancés et certainement dans tous les pays du G7. C'est parce que, dans tous nos pays qui ont pu vacciner la population et surmonter la pandémie, la demande s'est rétablie beaucoup plus rapidement que l'offre.
Lorsque la demande dépasse de loin l'offre, il y a deux conséquences. On ne peut pas obtenir ce qu'on veut acheter, et c'est ce que les Canadiens ont constaté. Le consommateur qui veut acheter un produit qui n'est pas disponible doit prendre place dans une longue liste d'attente. En pareille situation, les entreprises ne tardent pas à majorer les prix. Nous avons vu cette flambée de l'inflation partout dans le monde. Je le répète, cela a eu une incidence sur les cours mondiaux, ce qui s'est répercuté sur le Canada, et la même chose s'est produite au Canada pour les produits dont les prix dépendaient davantage des conditions de l'économie canadienne.
Les banques centrales du monde entier ont relevé les taux rapidement pour freiner la demande et laisser l'offre la rattraper, et cela fonctionne. Ce n'est pas aussi rapide ou indolore que tous le souhaiteraient, mais cela fonctionne. L'inflation a beaucoup diminué. Nous pensons qu'il y a d'autres baisses en vue.
Je comprends.
Pourriez-vous énumérer rapidement certains des principaux facteurs à l'échelle mondiale qui ont poussé les prix à un tel niveau au cours des dernières années?
Je dirais qu'il y a deux grands facteurs au niveau mondial. Tout d'abord, pendant la pandémie de COVID‑19, nous n'avons pas pu acheter bon nombre des services que nous voulions. Nous ne pouvions pas aller au restaurant, partir en vacances, ni fréquenter la salle de sport. Les consommateurs ont eu tendance à remplacer les services par des biens. Celui qui ne pouvait aller à la salle de sport a voulu acheter de l'équipement d'exercice, mais bien sûr, il fallait le fabriquer et l'expédier. Tout à coup, la pression sur l'ensemble du secteur des biens s'est beaucoup accentuée. Au moment où les activités de fabrication et de transport étaient en difficulté, les travailleurs contractaient la COVID‑19, il y avait des mesures de confinement, des restrictions et le travail n'était pas aussi efficace que d'habitude. Les entreprises avaient du mal à produire pour assurer une offre suffisante, et la demande était loin devant.
Le deuxième facteur important à l'échelle mondiale a été, bien entendu, l'invasion non provoquée de l'Ukraine par la Russie. La Russie est un grand exportateur de pétrole et de gaz naturel. Cela a eu un effet très important sur les cours mondiaux de l'énergie. L'Europe a été particulièrement touchée. En Amérique du Nord, nous étions un peu à l'abri parce que nos prix du gaz naturel n'étaient pas aussi touchés que ceux de l'Europe. Bien sûr, l'Ukraine et la Russie, dans une certaine mesure, sont aussi d'importants exportateurs de blé. Il y a eu une forte hausse des prix de cette céréale.
À regarder ce qui s'est passé, la poussée inflationniste est venue d'abord de causes mondiales. Des facteurs nationaux se sont ajoutés. Notre économie a été en surchauffe parce que les consommateurs voulaient acheter plus de marchandises que l'économie ne pouvait en produire.
Merci, monsieur Baker et monsieur le gouverneur.
Nous n'avons pas assez de temps pour un tour complet. Ce que nous allons donc faire, c'est partager également le temps qu'il reste. Chaque parti aura trois minutes avant la pause-santé. Au retour, nous consacrerons une heure à notre étude sur le logement. Nous remercions le gouverneur de rester parmi nous. L'accent sera mis sur le logement.
M. Hallan a la parole pour trois minutes.
Merci, monsieur le président.
Monsieur le gouverneur, vous-même, votre prédécesseur, David Dodge, et même l'actuelle ministre des Finances, Chrystia Freeland, avez tous dit que les dépenses du gouvernement poussent la demande au‑dessus de l'offre. Autrement dit, le gouvernement alimente l'inflation.
Depuis mars de l'an dernier, vous avez dû augmenter les taux 10 fois, les faisant passer de 0,25 % à 5 % aujourd'hui. C'est une augmentation de 1 800 %. Le FMI a également lancé un avertissement: le Canada est le pays du G7 qui risque le plus de faire face à une crise de défauts de paiement sur le marché hypothécaire. Cela et la crise de défauts de paiement vous préoccupent-ils?
Notre plus grande préoccupation — et nous avons été très clairs à ce sujet —, c'est que l'inflation est trop élevée. Ce qui nous inquiète le plus, c'est que les Canadiens ont du mal à joindre les deux bouts. Cela crée de l'anxiété. Comment vont-ils payer leur hypothèque? Comment vont-ils mettre du pain sur la table? Vous avez constaté une forte augmentation de la demande dans les banques alimentaires. Il faut que cela cesse.
La solution, c'est de faire reculer l'inflation. C'est le principe qui nous guide et c'est là‑dessus que se concentrent nos efforts.
Quant à la stabilité financière, nous avons de la chance dans notre pays. Nous avons un secteur bancaire solide et bien réglementé...
Je n'ai que trois minutes. Je comprends votre réponse et je suis d'accord avec vous pour dire que l'inflation doit baisser.
Selon ce que vous avez dit au sujet du renforcement de la demande attribuable aux dépenses gouvernementales, dans un contexte où il faut freiner les dépenses et où l'inflation doit reculer, les dépenses gouvernementales ne vous aident pas. Qu'est‑ce qui vous serait utile, compte tenu du gouvernement que nous avons actuellement, pour éviter cette crise de défauts de paiement sur le marché hypothécaire?
Les gouverneurs ne donnent habituellement pas de conseils au gouvernement sur la politique budgétaire...
Étant donné que l'inflation reste supérieure à la cible, il serait utile que tous les ordres de gouvernement soient plus soucieux des conséquences inflationnistes de leurs décisions en matière de dépenses et il serait avantageux de mettre davantage l'accent sur les politiques gouvernementales qui augmentent l'offre et pas seulement la demande.
Cela nous aiderait à réduire l'inflation, et lorsque l'inflation baisse, les taux d'intérêt peuvent baisser...
Merci, monsieur le président.
Merci, monsieur Macklem et madame Rogers, d'être là et de répondre à nos questions.
Vous avez dit dans les rapports sur la politique monétaire que les perspectives d'inflation jusqu'à la fin de 2024, selon l'indice des prix à la consommation, ont été révisées à la hausse et qu'environ la moitié de cette hausse repose sur l'hypothèse que les prix du pétrole seront plus élevés. Pouvez-vous expliquer au Comité l'impact qu'aurait une réduction de notre dépendance aux combustibles fossiles et l'incidence que cela aurait sur l'inflation?
C'est une question vraiment compliquée, et j'aimerais pouvoir vous donner une réponse satisfaisante.
Tout ce que je peux vous dire, c'est que nous commençons à examiner les répercussions macroéconomiques des changements climatiques. Nous avons beaucoup examiné les risques que posent les changements climatiques pour la stabilité financière. Ce travail est bien avancé, et nous essayons maintenant d'élaborer des modèles économiques pour commencer à comprendre les conséquences. C'est une question très complexe.
De plus, différents pays ont adopté des politiques très différentes, qui ont également des répercussions différentes sur l'économie. Je crains bien que... Nous nous penchons sur cette question, comme bien d'autres, mais je ne peux pas vous donner de réponse pour l'instant.
Merci.
M. Blaikie avait quelques questions à ce sujet tout à l'heure. Dans votre témoignage de la semaine dernière, lors de la conférence de presse pour la mise à jour du rapport sur la politique monétaire, vous avez mentionné que les prix des sociétés ne sont pas normaux à l'heure actuelle et vous avez parlé de certains des facteurs qui expliquent cette situation dans un contexte inflationniste. Pourriez-vous nous donner une idée du genre de contribution que vous voyez dans ce comportement anormal des prix des sociétés par rapport à l'inflation au Canada à l'heure actuelle?
Je ne pense pas que nous puissions chiffrer cette contribution, mais ce que nous pouvons dire avec une certaine confiance, c'est que lorsque l'inflation était faible et stable... Nous avons connu de gros chocs aux prix des intrants et de grandes fluctuations des prix de l'énergie au cours des 25 dernières années, et lorsque ces choses se sont produites, les entreprises ont été très prudentes à l'idée de répercuter la hausse des prix de l'énergie sur les prix qu'elles facturaient, non pas pour l'essence, mais pour d'autres biens et services. Lorsque nous leur posions des questions à ce sujet, elles nous répondaient qu'elles ne pouvaient pas transférer ces augmentations au client sans risquer de les perdre, ce qu'elles voulaient évidemment éviter à tout prix.
Cependant, lorsque l'inflation a grimpé en flèche dernièrement, les entreprises ont commencé à nous dire qu'il était beaucoup plus facile de répercuter ces hausses de prix. C'est exactement ce que vous voyez dans les données. Lorsque le prix des intrants a augmenté — le coût de l'énergie, par exemple —, ces augmentations se sont répercutées beaucoup plus rapidement sur le prix final des biens. Les ménages subissent l'effet inflationniste beaucoup plus rapidement. C'est ce qu'indiquent assez clairement les données.
[Français]
Merci, monsieur le président.
Monsieur le gouverneur, on sait que la Banque HSBC Canada veut vendre ses actifs dans plusieurs territoires, y compris au Canada. Jusqu'à maintenant, la Banque royale du Canada se serait manifestée.
Est-ce vraiment seulement le Bureau du surintendant des institutions financières, ou BSIF, qui évalue cela? La Banque du Canada a-t-elle aussi évalué l'incidence de cette possible transaction sur l'économie canadienne?
La Banque du Canada ne fait pas d'évaluation de ces transactions. Cela relève vraiment du BSIF, comme vous le dites, et du Bureau de la concurrence.
D'accord, merci.
Je passe maintenant à un tout autre sujet. En parlant du besoin d'adopter des infrastructures plus résilientes devant les changements climatiques dans les pays en développement, pour qu'ils puissent en atténuer les effets et s'y adapter, l'économiste américain Joseph Stiglitz a suggéré, il y a quelques jours, une approche assez originale. J'aimerais entendre vos premières réflexions à ce sujet.
Le Fonds monétaire international, ou FMI, émet des droits de tirage spéciaux. Ce sont surtout les pays riches qui les ont et qui en bénéficient. Selon M. Stiglitz, si je résume bien ses propos, ceux-ci n'en ont pas vraiment besoin. Il suggère donc d'autoriser les pays en développement à utiliser ces droits à titre de subventions ou de prêts à taux d'intérêt faible ou nul, pour des investissements climatiques. Pour le faire, il faudrait l'accord des pays riches.
Avez-vous une opinion à ce sujet? Pensez-vous que c'est une piste de solution prometteuse pour les pays en développement?
Franchement, c'est très loin de la politique monétaire, et je n'ai pas d'opinion là-dessus. Il faudrait poser cette question au FMI.
D'accord. Je me demandais si la Banque du Canada se penchait là-dessus, étant donné que cela touche certains éléments monétaires. Je vais donc poser une troisième question.
Je reviens à l'article de M. Mohamed El‑Erian.
Selon lui, « l'économie mondiale et les marchés financiers clés tels que celui des obligations d'État américaines manquent désormais d'ancrages verticaux essentiels, de type dynamique de croissance, confiance dans les signaux de politique économique, et flux financiers stabilisateurs. »
Voit-on cela dans l'économie canadienne aussi? Quels seraient vos commentaires?
Bien sûr.
Selon M. El‑Erian, « les marchés financiers clés tels que celui des obligations d'État américaines manquent désormais d'ancrages verticaux essentiels, de type dynamique de croissance, confiance dans les signaux de politique économique, et flux financiers stabilisateurs. »
La situation budgétaire du Canada, si on la compare à celle d'autres pays du G7, possède un grand avantage. L'Allemagne et le Canada sont les seuls à avoir une cote de crédit AAA, et il faut protéger cela. C'est un avantage du Canada. Cela réduit les taux d'intérêt à long terme pour les gouvernements, les entreprises et les ménages. Cela encourage également l'investissement, et c'est bon pour le taux de croissance du PIB potentiel.
Il est évident qu'ailleurs dans le monde, certains pays font face à des difficultés plus importantes, les dettes souveraines posent effectivement certains risques internationaux.
[Traduction]
Merci, M. Ste-Marie.
Ce sera notre dernier intervenant jusqu'à la pause-santé, puis nous reviendrons.
Monsieur Blaikie a maintenant la parole pour trois minutes.
Merci, monsieur le président.
Je veux simplement revenir à notre échange précédent — je sais que vous aviez commencé à répondre — et exposer de nouveau le problème, à savoir que les Canadiens ont été considérablement floués, je crois, dans certains secteurs dont ils ne peuvent se passer, et la réponse a été de relever les taux d'intérêt pour lutter contre l'inflation.
Vous pouvez voir à quel point les Canadiens se sentent coincés entre deux situations impossibles, alors je me demande dans quelle mesure les principes d'équité et de justice sont pris en compte dans l'établissement de la politique monétaire. D'autres banques centrales ont eu mandat de tenir compte de facteurs comme le prix des maisons et les objectifs climatiques dans la façon dont elles fixent leurs taux.
Je comprends que vous n'avez pas pour mandat à l'heure actuelle de vous soucier de ces questions d'équité et de justice, mais je dirais que vous devriez tout de même en tenir compte, et je pense que beaucoup de Canadiens seraient probablement d'avis qu'il devrait y avoir lieu d'en tenir compte. Comment pouvez-vous imaginer les mandats des banques centrales ou d'autres outils qui permettraient d'intégrer une partie de cette question d'équité et de justice dans les décisions concernant les taux à la Banque du Canada?
Pour ce qui est de notre mandat, nous avons déjà un gros travail à faire, qui consiste à contrôler l'inflation, et je pense qu'il est très utile d'avoir un mandat qui indique clairement que le travail de la banque centrale consiste à assurer la stabilité des prix.
Les questions que vous avez soulevées sont importantes, mais elles relèvent des gouvernements élus et, en fin de compte, du Parlement. Dans la plupart des démocraties, la banque centrale est chargée de contrôler l'inflation et elle a l'indépendance opérationnelle nécessaire pour utiliser son taux d'intérêt à cette fin. C'est assez extraordinaire, et le travail de la banque centrale devrait être circonscrit à cet outil.
Cela ne veut pas dire que nous ne nous soucions pas de l'équité. En fait, l'une de nos sous-gouverneurs, Sharon Kozicki, a récemment prononcé un discours dans lequel elle a souligné qu'avec la disponibilité d'ensembles de données plus détaillés, nous pouvons maintenant mieux évaluer l'incidence de nos politiques sur différents segments de la société.
Au bout du compte, nous avons un objectif et un instrument. Nous n'avons pas de taux d'intérêt différents pour différentes personnes ou différents secteurs...
Pourrais‑je poursuivre dans la même veine, monsieur le gouverneur?
M. Tiff Macklem: Oui.
M. Daniel Blaikie: Quand on parle de projets d'exploitation des ressources maintenant, il est beaucoup question d'acceptabilité sociale. Ne craignez-vous pas qu'il y ait un problème d'acceptabilité sociale pour des institutions importantes qui ont la main sur des leviers importants de l'économie si la correction économique semble toujours se faire sur le dos des travailleurs et des Canadiens de la classe moyenne, surtout lorsque les problèmes ont été causés en grande partie par des entreprises et des particuliers fortunés qui ont les mains sur des leviers économiques importants, soit l'accès au capital?
Eh bien, je dirai deux choses.
Premièrement, la concurrence est une bonne chose. Je ne voulais pas avoir l'air désinvolte à ce sujet tout à l'heure.
Si vous regardez l'économie canadienne, une des choses que nous savons, c'est que les entreprises axées sur l'exportation ont tendance à afficher une productivité plus élevée que les entreprises davantage tournées vers l'intérieur. Cela donne à penser que la différence réside dans la concurrence, et le Bureau de la concurrence a récemment effectué une étude assez vaste à ce sujet, et je pense qu'il y a là une analyse utile.
L'autre chose, c'est que la concurrence entraîne une plus forte croissance de la productivité. Une croissance plus forte de la productivité entraîne une hausse des salaires. Une plus forte croissance de la productivité soutient un niveau de vie plus élevé, et il serait formidable d'avoir une plus forte croissance de la productivité au Canada. Cela facilite les choses dans leur ensemble.
Pour revenir à la politique monétaire et à ce que vous avez dit au sujet des plus vulnérables et des inégalités, je dirai deux choses.
Tout d'abord, ce sont les membres les plus vulnérables de la société qui souffrent le plus de l'inflation élevée. Ils sont les plus durement touchés par l'abordabilité. Ils ne peuvent pas descendre plus bas sur le marché. Ils sont déjà au bas de l'échelle. Une grande partie de leurs dépenses est déjà consacrée aux nécessités de la vie. Ils ne peuvent pas faire de compressions à cet égard. C'est pourquoi il est si important de réduire l'inflation. L'inflation est une taxe qui touche de façon disproportionnée les membres les plus vulnérables de la société.
Merci.
Merci, monsieur Blaikie.
Nous allons maintenant suspendre la séance pendant une dizaine de minutes pour une pause santé, puis nous reviendrons avec le gouverneur et la première sous-gouverneure pour une autre heure.
Chers collègues, chers témoins, nous allons reprendre nos travaux. Nous sommes de retour.
C'est toute une séance marathon. Nous remercions le gouverneur et la première sous-gouverneure de rester avec nous pendant ces deux heures et demie.
Cette partie de la réunion porte sur le logement, bien qu'il soit possible de s'éloigner du sujet.
Nous commençons le premier tour, qui est de six minutes par parti.
Monsieur Lawrence, vous avez six minutes.
Merci, monsieur le président.
Merci, monsieur Macklem et madame Rogers, d'être venus.
Quelles que soient les critiques auxquelles vous pourriez faire face, je ne pense pas que l'on puisse vous accuser d'un manque de communication. Merci d'être ici.
Mes questions porteront sur la taxe sur le carbone et, si j'en ai le temps, sur la productivité.
Nous nous connaissons depuis un certain temps, gouverneur Macklem. Nous avons eu un échange au printemps 2022. Je vous ai posé une question sur l'impact inflationniste de la taxe sur le carbone. Des politiciens et des journalistes l'ont mal cité. J'aimerais mettre les choses au clair.
Ce que vous avez écrit, et je vais le lire ici pour que tout le monde s'y retrouve, c'est: « Selon les calculs de la Banque, si la redevance devait être retirée des trois principales composantes de l’indice des prix à la consommation (essence, gaz naturel et mazout), cela réduirait le taux d’inflation de 0,4 point de pourcentage. »
Ce qui a été cité tout au long du processus, par les politiciens comme par les journalistes, c'est l'augmentation dont vous avez parlé, qui serait de 0,1 %, ou 0,15 %, ce que j'ai vu également.
Nous avons déjà eu une augmentation. Si je pouvais ajouter 0,4 % au 0,1 % ou au 0,15 % que j'ai également vu, cela donnerait 50 ou 55 points de base.
Vous ai‑je bien compris?
Oui, c'est très bien. Je vais vous donner les chiffres à jour.
Il y a en fait deux questions distinctes.
La taxe sur le carbone augmente avec le temps. On peut se demander dans quelle mesure les augmentations de la taxe sur le carbone s'ajoutent à l'inflation chaque année. Ce chiffre correspond à environ 0,15 point de pourcentage de l'inflation. C'est l'effet direct sur ces trois éléments.
La deuxième question que vous m'avez posée portait sur l'effet de l'élimination de la taxe sur le carbone sur l'inflation. Cela entraînerait une baisse ponctuelle de l'inflation de 0,6 point de pourcentage, qui durerait un an. Comme on ne peut l'éliminer qu'une seule fois, l'année suivante, cela n'aurait aucun effet sur l'inflation.
Bien sûr. Espérons que l'inflation de l'an prochain ne sera pas aussi préoccupante qu'elle l'est cette année.
Pour répéter ce que vous avez dit, cela donnerait 60 points de base ou 0,6 %. À l'heure actuelle, le taux d'inflation est de 3,8 %, ce qui équivaut à près de 15 %, si je peux faire le calcul rapidement.
Ce serait une baisse importante de l'inflation. Cela ferait en sorte que votre travail... Pour vous citer, « ce serait utile ». Est‑ce exact?
Comme vous l'avez dit, monsieur Macklem, et comme vous l'avez prévu, l'inflation, selon vos prévisions, ne sera pas un problème aussi important qu'elle l'est dans l'année en cours. Si nous pouvons obtenir une année de répit, cela signifie que les Canadiens pourront garder leur maison, qu'ils pourront accéder au marché hypothécaire, et qu'ils pourront se nourrir grâce à une réduction de 10 % de l'inflation.
N'est‑ce pas, monsieur Macklem?
Merci beaucoup. Je vous remercie.
L'autre question dont je veux parler un peu, c'est la taxe sur le carbone et son incidence sur la productivité, et de la productivité en général.
Bien sûr, l'inflation se produit — comme vous l'avez dit et comme on peut le lire dans les manuels d'initiation à l'économie — lorsque la demande et l'offre ne sont plus équilibrées. La conversation a porté presque entièrement sur la demande. Je comprends que vous êtes là pour contrôler la demande afin de réduire l'inflation, mais l'offre joue aussi un rôle important.
Comme vous l'avez écrit dans votre rapport, la productivité du Canada a stagné au cours des huit dernières années, ce qui contraste avec celle des États-Unis, dont la productivité a connu une croissance assez forte. Êtes-vous préoccupé, dans la mesure où vous pouvez le dire — et je sais que cette mesure peut être limitée —au sujet des problèmes de productivité du Canada et de l'incidence qu'ils pourraient avoir sur l'offre?
Nous sommes préoccupés par les problèmes de productivité du Canada.
Il ne s'agit pas d'un problème apparu au dernier trimestre, dans la dernière année ni même dans les dernières années. C'est un problème qui dure depuis 20 ans.
La croissance de la productivité au Canada est à la traîne depuis une vingtaine d'années. Si vous regardez comment le Canada s'est développé, vous verrez que notre pays a très bien réussi à croître en ajoutant des travailleurs. Nous affichons des taux très élevés de participation à la population active et la participation des femmes au marché du travail est beaucoup plus élevée au Canada qu'aux États-Unis. Nous avons un bon système d'immigration. Les entreprises sont douées pour embaucher des travailleurs et les intégrer au marché du travail. C'est vraiment la clé de notre croissance.
Ce qui est décevant, c'est que nous avons beaucoup moins réussi à accroître la production ou la productivité par travailleur. La raison pour laquelle c'est vraiment important, c'est parce qu'une productivité plus élevée permet de payer des salaires plus élevés; c'est la source d'une augmentation soutenue de notre niveau de vie.
Cela nous préoccupe, mais nous n'avons pas vraiment de leviers qui influent sur la croissance de la productivité. Nous exerçons une influence sur la demande.
Pour ce qui est de l'effet inflationniste de la taxe sur le carbone, je crois, gouverneur Macklem, que nous devons essayer d'éviter toute entrave à la productivité.
La taxe sur le carbone ajoute une autre entrave du fait que les entreprises, à la différence des particuliers, n'obtiennent aucun remboursement. Cela va nous rendre de moins en moins productifs. C'est une taxe terrible à cause de ce qu'elle fait aux membres les plus vulnérables de nos collectivités, mais c'est aussi une taxe terrible d'un point de vue économique en ce sens qu'elle fait baisser notre productivité au moment où nous pouvons le moins nous le permettre.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Merci, gouverneur Macklem, de votre présence et de votre patience.
Je vais vous poser une question au sujet des commentaires que vous avez faits à savoir que l'inflation mesurée par l'indice de référence s'est révélée plutôt tenace. Je vais ensuite parler de certains des problèmes structurels sous-jacents, puis faire le lien avec une chose que nous entendons au sujet du logement.
L'une des choses que j'ai du mal à comprendre, c'est que lorsque je parle aux résidants de Davenport, ils me disent tous que tout coûte si cher. Je leur dis que nous avons mis en place un programme national de garderies et que nous prenons des mesures énergiques pour lutter contre les changements climatiques, et que nous offrons l'incitatif climatique. Nous offrons l'Allocation canadienne pour enfants, nous avons augmenté la Sécurité de la vieillesse. Nous avons réduit les impôts il y a plusieurs années. Nous avons accordé un soutien extraordinaire à la classe moyenne et à la classe ouvrière, sans même parler de l'Allocation canadienne pour les travailleurs, que nous avons augmentée à plusieurs reprises, et toutes ces mesures visent à contrer l'inflation.
On serait porté à croire que les gens devraient s'en sortir. Nous savons que le prix des aliments a augmenté plus que l'inflation. Nous savons que le prix de l'énergie a augmenté et qu'il a baissé de nouveau, et nous savons ce qu'il en est du logement.
L'une des autres choses dont nous entendons parler dans notre étude sur le logement, c'est qu'il y a des problèmes... En Ontario, si quelqu'un quitte son appartement, le taux d'augmentation moyen qui fait suite à l'inoccupation est d'environ 29 %.
J'aimerais donc savoir si un problème structurel ferait en sorte que notre taux d'inflation de base refuse de baisser. Je parle ici d'un problème structurel au niveau provincial qui doit être corrigé.
Votre question comporte deux volets, madame Dzerowicz.
Je commencerai par dire que nous avons parlé plus tôt de la pénurie structurelle de logements. Je pense que c'est probablement la première chose qui contribue à maintenir les coûts de logement généralement élevés, et le loyer en particulier.
Je pense que la situation que vous décrivez, cependant, est... Quand...
Je parle de l'effet du contrôle de l'inoccupation sur les loyers. S'il n'est pas en vigueur, s'agirait‑il d'un problème structurel?
Dans la mesure où la demande de logements locatifs est supérieure à l'offre, cela contribue à l'augmentation des prix.
Je pense que ce que vous décrivez, cependant, avec cette augmentation importante... Lorsqu'il y a un contrôle des loyers, le propriétaire a la possibilité d'augmenter le loyer lorsqu'un appartement ou un immeuble locatif devient inoccupé. Il y a souvent, à ce moment‑là, un léger rattrapage ou une forte hausse des prix. Cependant, encore une fois, la solution consiste à accroître l'offre.
Je dirais qu'il faut accroître l'offre, mais je dirais aussi qu'il y a un contrôle des loyers dans plusieurs autres provinces. Je pense que cela aide à maintenir les augmentations de loyer à environ 3 %, 4 % ou même 5 % — pas 29 %, soit la moyenne des augmentations en Ontario quand un logement devient inoccupé. C'est ce que nous entendons au Comité des ressources humaines.
Monsieur le gouverneur, pouvez-vous nous parler de la situation financière des provinces et des territoires par rapport à celle du gouvernement fédéral?
Aucun problème. Je pensais que vous auriez peut-être une réponse à cette question.
Ma prochaine question porte sur l'inflation des prix du logement.
Aux pages 27 et 28 du « Rapport sur la politique monétaire », vous indiquez que l'« on s’attend à ce que la hausse des frais de logement ralentisse par rapport à son taux actuel. ».
Pouvez-vous nous dire comment et pourquoi vous croyez cela?
Ce que nous avons indiqué dans le « Rapport sur la politique monétaire », c'est qu'étant donné que le problème est surtout lié à l'offre et que le problème s'aggrave depuis au moins une décennie, il ne va pas...
Nous sommes très heureux de constater que tous les ordres de gouvernement travaillent avec l'industrie pour s'attaquer à ce problème, mais même dans le meilleur des cas, il ne sera pas réglé rapidement. Le gouvernement doit certainement s'efforcer de résoudre le problème, mais c'est une pression avec laquelle nous devrons composer pendant un certain temps. Nous avons dit que c'était l'un des obstacles à la réduction de l'inflation. La faiblesse de l'offre ralentit la baisse de l'inflation. Cependant, quand on examine tout le reste, on constate que nos taux d'intérêt atténuent l'inflation.
Comme on l'a dit en réponse à des questions précédentes, les effets de la politique monétaire ne sont pas instantanés. Lorsque les gens renouvellent leur emprunt hypothécaire, ces taux d'intérêt plus élevés alimentent l'économie. Nous pensons qu'il y aura d'autres solutions. L'inflation finira par baisser, même si cela prend un peu plus de temps que nous l'avions espéré.
Vous dites qu'au bout du compte, cela réduira aussi la hausse des frais de logement, juste pour conclure...
Non. Ce que je veux dire, c'est que nous n'essayons pas de contrôler tous les prix. Il s'agit de faire baisser l'inflation globale...
Je ne comprends simplement pas ce que vous dites au sujet du ralentissement prévu de la hausse des frais de logement.
Ce que nous avons dit, c'est que la hausse des frais de logement contribuera probablement davantage à l'inflation globale pendant un certain temps, jusqu'à ce que la question de l'offre soit réglée.
[Français]
Merci, monsieur le président.
Monsieur le gouverneur et madame la première sous-gouverneure, en ce qui a trait au logement, le Canada vit-il actuellement une bulle immobilière?
Au cours des dernières années, nous avons vu une forte hausse de la pression sur le marché du logement. Au Canada, le prix des maisons a augmenté en moyenne de 50 %. Vu les hausses des taux d'intérêt, le marché du logement est maintenant plus équilibré. Les hausses des taux d'intérêt ont eu un effet assez rapide sur la demande de logements, qui a diminué.
Nous avons un grand pays, et on y trouve plusieurs marchés du logement, selon les différentes villes. Toutes les villes vivent une situation un peu différente, mais, dans l'ensemble, le marché est plus équilibré aujourd'hui qu'il ne l'était. Cependant, il reste toujours un problème d'abordabilité du logement.
À ce sujet, comment se compare le marché canadien du logement par rapport à celui des autres pays de l'Occident?
Il y a des données techniques dans l'encadré 2 du Rapport sur la politique monétaire. Vous pouvez y lire que plusieurs pays ont connu d'importantes fluctuations en matière de logement au cours de la pandémie. Ce n'est pas vraiment surprenant, vu que, dans l'ensemble des pays, tout le monde était à la maison. Dans tous les pays industrialisés, on a réduit les taux d'intérêt à des niveaux exceptionnellement bas.
Le marché du logement est très local. Ce n'est pas un marché international, et les prix peuvent varier beaucoup d'un pays à l'autre. La situation varie donc un peu selon le pays.
En ce qui concerne l'effet qu'a cette situation sur l'inflation, il faut souligner que la méthode utilisée par les organismes chargés d'établir des statistiques pour tenter de quantifier l'inflation dans le secteur du logement varie d'un pays à l'autre. Il y a au moins trois approches différentes. Cela implique des différences dans la façon dont c'est incorporé aux statistiques liées à l'inflation.
D'accord. Merci.
Un peu plus tôt, en réponse à des questions, vous avez parlé de la crise d'inflation des années 1970 et 1980. Il y avait des taux d'inflation à deux chiffres et des taux d'intérêt en conséquence. Les gens qui achetaient une maison payaient donc des intérêts très élevés sur leur hypothèque.
Si on considère le marché canadien du logement et de l'immobilier comme un tout, selon vous, était-il plus facile d'acheter une maison à cette époque que ce l'est aujourd'hui ou est-ce l'inverse? Comment cette différence s'explique-t-elle?
Je n'ai pas sous la main les statistiques sur l'abordabilité des années 1960 et des années actuelles. Par contre, je peux dire que, durant les années 1970, après 10 ans d'inflation très élevée et très volatile, la solution a été de faire grimper les taux d'intérêt à plus de 20 %. Cette mesure a entraîné une crise de l'abordabilité pour ce qui est des maisons. Le coût d'une hypothèque a augmenté considérablement.
En augmentant les taux d'intérêt rapidement et en essayant de régler le problème d'inflation avant qu'il ne devienne trop grave, c'est exactement ce que nous tentons d'éviter. Je sais que les taux d'intérêt élevés causent des difficultés à bien des gens. Cependant, les taux d'intérêt sont haussés rapidement afin d'éviter que l'inflation s'enracine dans l'économie, comme ce fut le cas pendant les années 1970.
Si cela se reproduit, il faudra de nouveau augmenter les taux d'intérêt pour régler l'inflation, et c'est exactement ce que nous voulons éviter.
Merci beaucoup.
En 2000, les bénéfices après impôt des sociétés en pourcentage du PIB représentaient moins de 10 % du PIB. En 2018, ils se chiffraient autour de 15 %, et aujourd'hui, en cette ère post-pandémie, ils se situent à environ 20 %. Je vous suis reconnaissant et je vous crois sur parole lorsque vous dites que vous pesiez bien vos mots en disant que la concurrence est l'une des solutions à ce problème dont disposent les Canadiens. Lorsque je regarde le transport de passagers au Canada et le secteur pétrolier et gazier, le secteur des télécommunications, le secteur de l'épicerie et le secteur financier, je constate qu'aucun de ces secteurs canadiens n'est reconnu pour l'abondance de concurrents, mais ils sont toutefois reconnus pour être des industries où le coût d'entrée est élevé.
Étant donné que les Canadiens n'ont pas vraiment beaucoup d'options à cet égard, quelles autres façons pourrions-nous envisager pour offrir aux Canadiens un allégement pour la partie très réelle et substantielle de l'inflation qu'ils subissent et qui est attribuable aux profits démesurés des sociétés? Même si je pense que la concurrence, si elle existait, pourrait aider, elle n'aide pas vraiment dans certaines industries clés qui fixent les prix de biens et services dont les Canadiens ne peuvent pas se passer.
La Banque du Canada a un outil pour contrôler l'inflation.
Nous avons parlé des effets de différents types de politiques sur l'offre et la demande. Ce sont des décisions des gouvernements élus. Nous allons en tenir compte. Plus l'offre augmente, moins nous avons besoin de refroidir la demande pour réduire les pressions inflationnistes.
Les dépenses gouvernementales contribuent également à la demande. Si elles croissent plus rapidement que l'offre, il sera plus difficile d'équilibrer l'offre et la demande et de réduire les pressions inflationnistes.
Toutes ces décisions vous reviennent. Nous allons tenir compte des décisions stratégiques qui ont été prises, et nous allons utiliser l'outil dont nous disposons pour nous acquitter de notre mandat pour les Canadiens.
Si vous regardez la période de 20 ans, du début du siècle jusqu'à maintenant... J'ai parlé de la part croissante du PIB que représentent les profits des sociétés, mais l'investissement des entreprises au Canada est passé de 6 % à 3 %. Au cours de la même période approximative, le taux d'imposition des sociétés est passé de 28 % à 15 %, ce qui donne à penser, je crois, qu'il n'y a certainement pas, dans le contexte canadien, de corrélation entre la baisse de l'impôt des sociétés et l'augmentation de l'investissement des entreprises. En fait, s'il y a une corrélation, c'est l'inverse. Nous avons observé une stagnation ou une réduction de la productivité semblable au Canada par rapport à nos concurrents au cours de la même période.
Lorsque nous parlons de la nécessité d'augmenter les investissements des entreprises pour accroître la productivité afin d'aider les Canadiens à lutter contre les effets néfastes de l'inflation, n'est‑il pas juste de dire que les réductions de l'impôt des sociétés n'ont pas aidé à cet égard au cours des 20 dernières années?
Je vais laisser au ministre des Finances et au ministère des Finances le soin de répondre aux questions de nature fiscale.
D'accord.
Nous avons donc parlé un peu de la fusion RBC-HSBC, et je comprends... Je pense que vous avez dit à mon collègue que vous n'aviez pas fait d'analyse de cette transaction, ce qui est compréhensible. Je comprends que ce n'est pas le rôle de la Banque du Canada. Cependant, je me demande, en vous fondant sur le principe général que vous avez énoncé plus tôt — à savoir que la concurrence est une excellente chose — si vous avez l'impression qu'il y a un joueur financier de moins dans ce qui est déjà un très petit secteur, l'industrie financière canadienne. Qu'est‑ce que cela signifiera pour les consommateurs canadiens, surtout lorsque l'institution financière qui se fait dévorer dans ce cas‑ci est l'une des institutions qui offrent des taux hypothécaires plus bas que la RBC?
Je ne pense pas que vous serez surpris, mais je ne vais pas faire de commentaires sur une transaction financière individuelle entre deux entreprises du secteur privé.
En ce qui concerne le marché de l'habitation — nous y revenons —, que doit‑il se passer à votre avis pour que...? Quelles mesures faut‑il prendre, que ce soit dans le secteur privé ou par le gouvernement, pour commencer à voir une dépréciation du coût des logements existants, ou du moins pour que le logement cesse d'être l'un des principaux moteurs de l'inflation au Canada aujourd'hui?
Je ne pense pas que nous puissions ajouter grand-chose à ce que nous avons déjà dit. Nous ne sommes pas les experts en matière de logement. Nous ne nous occupons pas de politique du logement. Le logement est une partie importante de l'économie, mais ce n'est qu'un aspect. Il faut considérer l'ensemble de l'économie.
Je pense que ce que nous pouvons dire avec une certaine confiance, d'après ce que nous avons vu au cours de la dernière décennie, c'est que le problème fondamental est l'offre. Ce que nous avons vu au cours de la dernière décennie, c'est... Au début, nous — je dis « nous », mais je parle surtout du BSIF et, dans une certaine mesure, du ministère des Finances, du système fédéral — avons utilisé une série de mesures macroprudentielles pour renforcer la stabilité du système. Ces mesures ont surtout érodé la demande. Lorsqu'elles ont été mises en place... par exemple, elles ont abaissé la période d'amortissement maximale et mis en place de meilleures simulations de crise. Au BSIF, la première sous-gouverneure a participé directement à certaines de ces activités dans le cadre de ses fonctions antérieures. Ces mesures ont nui à la demande, et elles ont permis d'équilibrer temporairement le marché, mais comme l'offre n'augmentait pas assez rapidement, la demande a fini par reprendre le dessus et nous nous retrouvons aujourd'hui dans une situation semblable.
Nous avons haussé les taux d'intérêt de façon très vigoureuse. Cela a eu un effet très direct sur le marché de l'habitation, qui est très sensible aux taux d'intérêt. Le marché a ralenti et le prix des maisons a baissé d'environ 10 %, mais cela ne fait qu'influer sur la demande. Cela ne règle pas les problèmes fondamentaux de l'offre. Le message clair de l'expérience de la dernière décennie, c'est que nous ne réglerons pas ce problème en nous attaquant à la demande; nous devons nous concentrer sur l'offre.
Merci.
Merci, monsieur Blaikie.
Chers collègues et témoins, nous en sommes à notre deuxième série de questions. Monsieur Scheer, vous avez cinq minutes.
Merci beaucoup.
Je voudrais simplement préciser certains termes. L'inflation est évidemment un problème énorme pour les Canadiens, tout comme les taux d'intérêt qui augmentent pour l'enrayer. Quand on parle de politique monétaire et de politique budgétaire, je tiens à être clair et à ce que ce soit clair pour tous ceux qui nous regardent: la politique monétaire, c'est vous. C'est la Banque du Canada. Vous avez des outils à votre disposition. Il y a les taux d'intérêt. Et il y a l'assouplissement ou le resserrement quantitatif. C'est de votre ressort, n'est‑ce pas?
Très bien.
Et la politique budgétaire, c'est le gouvernement. Ce sont les décisions du gouvernement en matière de dépenses, de fiscalité, d'emprunt, etc. Ça, c'est la politique budgétaire.
Quand vous dites que vous contrôlez la politique monétaire et que l'un des principaux objectifs de la Banque du Canada... Voici ce qu'on peut lire sur votre site Web: « Nous influons sur la quantité de monnaie en circulation dans l’économie et utilisons notre cadre de conduite de la politique monétaire pour maintenir l’inflation à un niveau bas et stable. » C'est votre principal objectif. Il s'agit d'atteindre votre cible d'inflation.
Vous utilisez vos outils, vous augmentez les taux d'intérêt et vous resserrez la masse monétaire, mais vous dites maintenant que la politique budgétaire — la politique du gouvernement, sa politique de dépenses — n'aide pas. Est‑ce que je me trompe?
J'ai dit qu'au cours de la dernière année, les dépenses gouvernementales, aussi bien fédérales que provinciales, auraient, selon nos estimations, augmenté de moins de 2 %. Cela n'a pas empêché de faire baisser l'inflation.
Pour l'avenir, nos estimations indiquent que la croissance sera légèrement plus rapide que l'offre. Dans ce contexte, oui, il pourrait être plus difficile de faire baisser l'inflation.
Donc, cela va « annuler » vos mesures.
Je comprends que le passé, c'est le passé. Nous sommes ici pour conseiller le gouvernement. Nous sommes ici pour présenter des mémoires dans la perspective de l'énoncé économique de l'automne et du budget. L'augmentation des dépenses va vous rendre la tâche plus difficile et annuler une partie du travail que vous avez fait au moyen des taux d'intérêt.
Merci beaucoup de ces précisions.
Supposons que vous puissiez atteindre le taux cible plus tôt, que vous puissiez réduire l'inflation, compte tenu des hausses de taux d'intérêt qui touchent tous les Canadiens ayant des dettes, des hypothèques ou des marges de crédit, pourriez-vous envisager de commencer à réduire les taux d'intérêt?
Oui. Plus vite nous aurons la preuve que l'inflation se rapproche de la cible de 2 %, plus vite nous pourrons commencer à discuter de la réduction des taux d'intérêt. Nous n'avons pas besoin d'attendre que le taux soit revenu à 2 %, mais nous devons attendre d'être clairement en bonne voie.
D'accord.
Vous avez déjà dit que la taxe sur le carbone permettrait de réduire l'inflation de 0,6 %, n'est‑ce pas?
Mais il faut se rappeler que l'inflation est cumulative. Ce n'est pas comme si on enlevait la taxe sur le carbone et que l'inflation surgissait automatiquement l'année suivante.
Eh bien, ce sont les prix qui sont cumulatifs. L'inflation est le taux de variation des prix.
L'hon. Andrew Scheer: Désolé. Oui. Les prix...
M. Tiff Macklem: La situation revient à la case départ au bout d'un an.
Je vois. C'est une précision importante.
Avez-vous un objectif de croissance des dépenses gouvernementales qui serait favorable? Vous avez dit que le taux d'augmentation des dépenses prévues par le gouvernement n'aidera pas. Quel serait l'ordre de grandeur d'une augmentation des dépenses qui serait plus favorable?
Je tiens à être très clair. Nous avons un énorme travail à faire. Vous avez un énorme travail à faire. En fait, votre travail est beaucoup plus important que le nôtre. Vous avez beaucoup de priorités — les soins de santé, l'éducation, la sécurité, et la protection des plus vulnérables. Les décisions budgétaires appartiennent au gouvernement et au Parlement.
Pour ce qui est de...
Excusez-moi, mais je n'ai pas beaucoup de temps. Je ne vous demande pas de nous dire où dépenser ou comment dépenser, mais simplement si vous avez un taux de croissance cible.
Compte tenu de la contribution directe des dépenses gouvernementales en biens et services, nous pensons que l'économie pourrait connaître une croissance d'environ 2 %. Si les dépenses augmentent de 2 % ou moins, elles n'ajouteront pas de pressions inflationnistes indues.
Merci, monsieur le président.
Merci d'être parmi nous aujourd'hui, monsieur le gouverneur.
Je vais reprendre là où M. Scheer s'est arrêté.
Vous venez de dire que des dépenses inférieures à 2 % n'entraîneraient pas de pressions inflationnistes indues. Monsieur le gouverneur, je crois que vous avez dit quelque chose de très semblable la semaine dernière à la conférence de presse: « Les dépenses du gouvernement au cours de la dernière année ont été inférieures à 2 % et ne semblent pas avoir créé de pressions inflationnistes indues depuis environ un an. »
Il semble que ce soit toujours votre avis.
Monsieur le gouverneur, dans votre témoignage d'aujourd'hui, vous avez également dit que toutes les dépenses ne sont pas égales. Certaines dépenses pourraient être inflationnistes, mais vous avez souligné que d'autres ne le sont pas, notamment en matière de logement.
Madame Rogers, vous en avez parlé également. Vous avez dit: « Nous sommes très heureux de constater l'importance qu'accordent les gouvernements à cet enjeu en ce moment. Ce sera utile. » Puis vous avez poursuivi votre allocution, madame Rogers.
Monsieur le gouverneur, pourriez-vous aider les Canadiens à mieux comprendre?
Pourquoi toutes les dépenses ne sont-elles pas égales? Pourriez-vous expliquer en quoi certaines dépenses, notamment du côté de l'offre de logements, contribueraient à réduire l'inflation?
Pourquoi les différents types de dépenses ont-ils des répercussions différentes? Il vaudrait probablement mieux adresser cette question au ministère des Finances. Nous faisons de notre mieux pour tenir compte des éléments généraux des budgets fédéral et provinciaux et des effets des différents types de dépenses.
Je vais vous donner des exemples.
Si on investit dans un grand projet d'infrastructure dont la réalisation prendra plusieurs années, les conséquences de ces dépenses seront étalées sur une longue période. Il faut examiner le profil du temps. Il faut aussi tenir compte du projet proprement dit. Si le gouvernement construit un nouvel immeuble, tout est dépensé. L'impact des dépenses directes est plus important.
Si on réduit les impôts, les ménages auront plus d'argent à leur disposition, mais ils ne dépenseront pas tout. Ils vont en épargner une partie. Une partie de cet argent est dépensée, une autre s'ajoutera à la demande, et une autre à faire des économies.
Vous avez parlé du subventionnement des garderies par le gouvernement, pour employer un exemple déjà donné. Cela a des effets à la fois sur la demande et sur l'offre. Cela facilite l'entrée sur le marché du travail des femmes qui ont de jeunes enfants — des hommes qui ont de jeunes enfants aussi, mais cela touche surtout les femmes. Cela augmente l'offre de main-d'œuvre. Bien entendu, les nouveaux travailleurs ont de nouveaux revenus. Ils vont dépenser cet argent, ce qui fait également augmenter la demande. C'est ainsi que différentes politiques peuvent avoir des effets différents.
En matière de logement, supposons qu'un gouvernement donne de l'argent aux gens pour qu'il soit plus facile d'acheter une maison. Cela va évidemment stimuler la demande de logements. Mais cela ne va pas créer plus de maisons. Dans le contexte actuel, où c'est l'approvisionnement qui est problématique, cela aggraverait probablement la situation. Cela dit, les mesures qui améliorent l'offre de logements permettront de mieux équilibrer l'offre et la demande.
Certaines de ces mesures sont d'ordre budgétaire, d'autres non. Cela dépend du mode d'approbation. Cela dépend de la collaboration entre les provinces, les municipalités et le gouvernement fédéral. Cela ne concerne pas tous les postes budgétaires.
Monsieur le gouverneur, l'un des principaux rôles de la Banque est d'assurer la prospérité économique et financière du Canada. Pourriez-vous nous expliquer pourquoi il est important de protéger le Régime de pensions du Canada?
Je crois savoir que le RPC représente plus de 409 milliards de dollars d'actifs canadiens. Selon vous, le Régime est‑il important pour la santé et l'efficacité du système financier du Canada?
Nous ne nous occupons pas vraiment de la politique sur les pensions.
Je pense que le régime de pensions du Canada fait l'envie du monde entier et qu'il est très avantageux pour les Canadiens, mais je n'ai pas d'opinion sur les diverses propositions d'ordre politique à l'étude ou proposées.
[Français]
Merci, monsieur le président.
En ce qui a trait au marché du logement, on a souvent mentionné les problèmes du côté de l'offre, par exemple le fait qu'il fallait en arriver à construire davantage de logements plus rapidement. Évidemment, tout cela peut être plafonné.
J'aimerais entendre vos commentaires sur un problème qui touche la demande, c'est-à-dire la forte croissance de la population actuelle. Statistique Canada a fait une mise à jour de ses chiffres à ce sujet.
Avez-vous analysé l'impact que la demande a sur le marché de l'habitation, plus précisément la partie de la demande causée par la croissance de la population?
Oui, nous avons analysé les effets sur l'économie de l'immigration, qui sont multiples.
En ce qui concerne le secteur du logement, évidemment, s'il y a plus de gens au Canada, il nous faut plus de maisons. Par ailleurs, une partie de la forte augmentation de l'immigration est formée de résidents permanents, mais il y a aussi de nombreux résidents temporaires. De plus, il y a une forte augmentation du nombre d'étudiants étrangers. Ces gens utilisent surtout le marché de la location. Cela a des effets sur le marché des maisons et sur le marché locatif. S'il y a plus de gens au Canada, la demande va augmenter.
Il y a un autre effet. S'il y a plus de gens, il y a plus de travailleurs. Nous faisons régulièrement des sondages auprès des entreprises et, l'an dernier, il y avait une très forte pénurie de main-d'œuvre. Plus récemment, on a pu constater que cette pénurie a beaucoup diminué.
Plusieurs indicateurs du marché du logement démontrent qu'il est encore serré, mais qu'il l'est beaucoup moins qu'auparavant. Je pense que la forte augmentation de la main-d'œuvre est liée à l'immigration et à une forte participation des Canadiens qui sont déjà ici.
C'est ce qui a aidé à réduire la surchauffe dans le secteur de la main-d'œuvre.
Merci, monsieur le président.
Jim Stanford, du Centre for Future Work, a déclaré que, depuis 2019, les bénéfices des sociétés pour chaque dollar de production réelle dans l'économie ont augmenté de 50 %. C'est une autre mesure utilisable pour évaluer dans quelle mesure les bénéfices des sociétés sont à l'origine de l'inflation au Canada.
Pour la taxe sur le carbone, on a un chiffre. Si on élimine la taxe sur le carbone, on obtient une baisse de 0,6 % de l'inflation pendant un an. Avez-vous calculé l'incidence sur l'inflation d'une situation où le comportement des sociétés en matière de tarification changerait de façon à ce que les coûts unitaires des bénéfices soient ramenés aux niveaux d'avant la pandémie au lieu du niveau d'augmentation actuel de 50 %?
Je n'ai pas de chiffres à ce sujet. C'est beaucoup plus difficile à calculer. La taxe sur le carbone est une taxe très précise. On peut voir exactement à quoi elle s'applique et on peut fournir un chiffre. Ce chiffre n'est que l'effet direct. Les effets secondaires sont probablement assez minimes, et il s'agit donc d'une approximation raisonnable, mais...
Est‑ce que la Banque pourrait évaluer l'effet des coûts unitaires des bénéfices sur l'inflation et en rendre compte?
Nous avons étudié... Comme elle l'a expliqué notre collègue, la première sous-gouverneure a prononcé un discours complet sur cette question. Ce que nous pouvons constater, c'est qu'il s'agit davantage de la vitesse à laquelle des coûts plus élevés d'intrants sont transférés...
N'est‑il pas vrai que, si cela ne faisait que se répercuter sur les coûts d'intrants, les profits n'augmenteraient pas? Le profit n'augmente‑t‑il pas seulement si les augmentations de prix dépassent les coûts supplémentaires d'intrants?
C'est exact.
Mais je crois que l'examen de la part des profits dans l'économie révèle une tendance à long terme, sur de nombreuses années. On constate une augmentation de cette part. Le rendement du capital au fil du temps a tendance à augmenter, et le rendement du travail a tendance à diminuer. C'est une question de long terme. Ce n'est pas quelque chose qui s'est produit dans l'année.
Mais ce n'est pas une politique budgétaire à long terme qui a offert une baisse du taux d'imposition des sociétés dans un contexte de déclin des investissements des entreprises. Peut-être que nous ne parlons pas exactement de la même chose quand nous parlons de long terme. Ce n'est pas comme si cela n'arrivait pas, étant donné qu'il n'y a pas eu de fervents partisans de certaines politiques budgétaires pour créer ce contexte.
Je ne parle pas de long terme comme si c'était un phénomène hors sol. Cela peut être une tendance sur de très nombreuses années.
Merci, monsieur Macklem.
Merci à vous, monsieur Blaikie.
C'est votre tour, monsieur Chambers, allez‑y.
Merci, monsieur le président.
Madame la première sous-gouverneure, j'aimerais obtenir des précisions au sujet de quelque chose dont nous avons un peu discuté au dernier tour. Si j'ai bien compris ce que vous avez dit, il est possible que le marché exige un taux d'intérêt plus élevé pour absorber le montant record de toute la dette du gouvernement.
Je souligne que la majeure partie de la dette que le gouvernement fédéral a reportée cette année est une dette qu'il a contractée pendant la pandémie de COVID‑19, en empruntant à court terme par négligence.
N'est‑il pas possible, ou pensez-vous, que le marché exige effectivement un taux d'intérêt plus élevé parce qu'il doit absorber ce montant d'emprunt?
Merci beaucoup.
Monsieur le gouverneur, vous avez dit, au cours de la conférence de presse de la semaine dernière, que la piste qui permettrait un atterrissage en douceur est maintenant plus étroite.
À mon avis, le risque est plus grand maintenant que se produit un événement économique ou que s'installe une incertitude économique qui, en temps normal, exigerait une baisse du taux d'intérêt. Il semble que cela pourrait se produire en 2025. Mais, si on ne peut pas faire baisser l'inflation avant et s'il n'y a pas de raison de réduire le taux avant 2025, avant que l'inflation ne diminue, il ne sera pas possible de réduire le taux directeur pour faire face à ce choc économique.
N'est-ce pas?
Vous dites que, si l'inflation reste élevée jusqu'en 2025, cela empêchera la Banque d'agir pour soutenir l'économie si on ne maîtrise pas l'inflation, c'est bien cela?
Ce sera plus difficile. Évidemment, cela dépend de l'ampleur du choc. Si le choc est assez important, la pression à la baisse qui en résulterait sur l'inflation pourrait nous amener à revoir nos taux, mais, effectivement, je suis en grande partie d'accord pour dire que, quand on part d'une situation où l'inflation est au-dessus de la cible — et c'est le cas depuis deux ans —, on a moins de latitude pour réduire les taux d'intérêt et stimuler la croissance.
Il est donc important que les gouvernements de tous les paliers prennent toutes les mesures nécessaires pour réduire l'inflation et faire en sorte que la Banque puisse agir en cas de besoin.
N'est‑ce pas?
Quand les premiers ministres provinciaux vous ont écrit, est‑ce que vous avez eu envie de leur crier: « Arrêtez de dépenser »?
À ce propos, je sais que vos électeurs vous font savoir ce qu'ils pensent. Je sais que les premiers ministres provinciaux sont informés par leurs électeurs. Cela souligne l'importance de l'inflation. Cela souligne l'importance des taux d'intérêt, et c'est une bonne chose.
Comme je l'ai dit, il serait utile que tous les paliers de gouvernement tiennent compte des conséquences inflationnistes de leurs décisions budgétaires.
Statistique Canada va publier les derniers chiffres sur le seuil de pauvreté au début de l'année prochaine, en janvier ou février, je crois. Le nombre de ménages ou de personnes qui se retrouveront sous le seuil de la pauvreté en raison de l'inflation sera très élevé... Je soupçonne, comme vous l'avez dit, que c'est aux personnes vulnérables que l'inflation nuit le plus, et il faut donc savoir que, si nous ne faisons pas ce qu'il faut, ce sont elles qui en souffriront le plus.
N'est‑ce pas?
J'ai appris avec beaucoup d'intérêt que la Banque a recruté Nick Leswick, qui travaillait au ministère des Finances. Nous le connaissons; je sais qu'il fera un excellent travail pour vous et je suis heureux qu'il soit maintenant à la Banque.
Merci de votre visite aujourd'hui. Merci d'être disponible pour répondre aux questions et de le faire avec transparence. Je pense que cela améliore la confiance des Canadiens dans l'institution.
Merci, monsieur le président.
Merci, monsieur Chambers.
Notre dernier intervenant sera le député Baker, pour les cinq dernières minutes.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Monsieur le gouverneur et madame la première sous-gouverneure, je vous remercie d'être parmi nous aujourd'hui.
Tout à l'heure, je vous ai posé une question sur les causes de la hausse des prix, sur les causes de l'inflation. Je vais récapituler certains de vos propos, puis j'aurai quelques questions à vous poser.
Quand vous avez parlé de la cause première de l'inflation, j'ai noté trois choses. Vous avez parlé de certains goulots d'étranglement dans la chaîne d'approvisionnement pendant la crise de la COVID, qui n'ont pas permis à l'offre de répondre à la demande. Vous avez parlé de l'invasion de l'Ukraine par la Russie et de ses répercussions sur les prix de l'énergie et des aliments à l'échelle mondiale, mais vous avez également parlé du fait que la demande intérieure au Canada a rebondi plus rapidement que prévu après la COVID.
Est‑ce un bon résumé des trois facteurs les plus importants qui ont entraîné une hausse des prix dans les dernières années?
Merci.
Vous avez dit, dans votre témoignage d'aujourd'hui, que l'inflation est un phénomène mondial, et nous venons de parler de certains de ces facteurs mondiaux, mais elle a également touché des pays du monde entier, dont nos homologues du G7, comme les États-Unis et les pays européens.
N'est‑ce pas?
À mesure que les prix ont augmenté, le gouvernement du Canada a pris certaines initiatives pour aider les gens à faire face à ce problème. Ces initiatives visaient notamment les causes sous-jacentes.
Dans la mesure de nos capacités, nous montrons un soutien extraordinaire au peuple ukrainien dans sa lutte. Nous avons essayé de prendre des mesures pour éliminer certains goulots d'étranglement dans la chaîne d'approvisionnement, parce que le gouvernement peut le faire, mais, nous avons aussi, et c'est peut-être plus important, fourni des soutiens aux gens, surtout aux personnes les plus vulnérables de notre société, grâce à des programmes pour les aider à faire face au coût de la vie, par des moyens dont nous avons parlé aujourd'hui, comme les garderies ou les soins dentaires, une réduction des frais d'épicerie,¦etc.
Et pourtant, à ce que vous dites aujourd'hui, les dépenses du gouvernement n'ont pas jusqu'ici contribué à l'inflation. C'est bien cela?
J'ai dit que les dépenses du gouvernement au cours de la dernière année n'ont pas empêché la baisse de l'inflation.
Merci.
L'inflation est le produit de forces mondiales et de forces intérieures. Elle touche des pays du monde entier, et les difficultés que les Canadiens éprouvent en raison du coût de la vie sont également celles que connaissent d'autres pays dans une grande mesure, voire une plus grande mesure, mais les dépenses gouvernementales de la dernière année n'ont pas contribué à l'inflation. C'est ce que je comprends.
Jusqu'à présent, ce que je dis est‑il exact?
Merci.
L'une des questions qui vous ont été posées par un collègue ici au Comité portait sur l'incidence de l'élimination de la tarification de la pollution ou de la taxe sur le carbone, et je crois que vous avez estimé qu'il y aurait un avantage ponctuel de 0,6 % sur les prix.
C'est bien cela?
Ce serait une réduction ponctuelle de 0,6 % sur les prix. Merci.
Pourriez-vous nous parler du coût, économique ou autre, de l'inaction face aux changements climatiques?
La question des changements climatiques n'entre pas dans le mandat de la Banque du Canada. Ces changements représentent déjà une force, et leur importance ne fera qu'augmenter pour l'économie.
Notre mandat est de contrôler l'inflation, et, pour ce faire, il nous faudra comprendre les effets des changements climatiques. Il y a deux types d'effets. Il y a d'abord les effets physiques. C'est ce que les gens voient — ce dont ils font l'expérience, comme les feux de forêt, les inondations ou les tempêtes extrêmes. Cela perturbe leur vie. Cela perturbe l'activité économique, et il nous faut comprendre comment cela se répercute sur l'économie.
Il y a ensuite la transition. Nous allons passer à la carboneutralité. Cela va toucher presque tous les secteurs de l'économie canadienne. Il faudra investir massivement dans les énergies renouvelables. C'est une grande transition qui aura divers effets. Cela va ajouter de nouveaux coûts et créer de nouvelles possibilités. Là aussi, il nous faut comprendre comment cela va se répercuter sur l'économie et sur l'inflation. Nous n'en sommes qu'au tout début, mais la politique sur les changements climatiques est entre les mains des gouvernements, et c'est à eux qu'elle incombe.
Tout à l'heure, la première sous-gouverneure a fait allusion au fait que les feux de forêt ont entraîné une réduction de 0,5 % du PIB au dernier trimestre. C'est bien cela?
Au deuxième trimestre.
Nous comprenons évidemment que les changements climatiques augmentent la probabilité et l'intensité de certains événements climatiques extrêmes comme les feux de forêt.
À mon avis, cela nous donne une idée de l'ampleur des répercussions économiques et des conséquences auxquelles nous allons faire face si nous n'agissons pas.
Je vous remercie d'être ici aujourd'hui.
Oui. J'ai une brève question.
Le gouverneur pourrait‑il faire un suivi par écrit pour nous dire si la réduction de 0,6 % de l'inflation ne suppose pas une augmentation correspondante des prix?
Quelqu'un d'autre a levé la main.
Écoutez, nous devons mettre fin à cette réunion. Nous avons atteint la ligne d'arrivée de cette très intéressante séance...
Il n'y a pas d'autres effets secondaires. C'est un calcul pur et direct.
Le président: Monsieur Hallan...
Le Comité pourrait‑il obtenir des nouvelles du rapport qui devait être déposé au sujet de la motion adoptée la semaine dernière, sans l'appui des libéraux, qui visait à demander au ministre des Finances de rejeter le rapport HSBC-RBC? Savez-vous quand il sera déposé à la Chambre?
J'invoque le Règlement. A‑t‑on prévu d'entendre Chrystia Freeland?
J'invoque le Règlement. Est‑ce qu'on a prévu d'entendre la ministre Freeland? Peut-être que M. Baker aimerait répondre à cette question.
Non, en effet.
Écoutez, il est temps de remercier le gouverneur et la première sous-gouverneure d'avoir participé à cette séance marathon — cela fait plus de deux heures et demie — et d'avoir répondu à beaucoup des questions des députés sur la politique monétaire et en lien avec notre étude sur le logement.
Merci à vous deux. Nous vous sommes vraiment reconnaissants.
La séance est levée.
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