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ACVA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des anciens combattants


NUMÉRO 029 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 3 novembre 2016

[Enregistrement électronique]

(1530)

[Traduction]

    Mesdames, messieurs, la séance est ouverte.
    Conformément à l'article 108(2), nous menons une étude de la santé mentale et de la prévention du suicide chez les anciens combattants. Aujourd'hui, nous entendrons trois groupes de témoins. Tout d'abord, nous accueillerons des représentants du ministère de la Défense nationale, soit le brigadier-général Hugh MacKay, médecin général et commandant du Groupe des Services de santé des Forces canadiennes, et le lieutenant-colonel Andrew Currie, chef de section du Programme de contrôle des maladies transmissibles et directeur, Protection de la santé des Forces. Un représentant du ministère de la Santé est également parmi nous, le Dr John Patrick Stewart, directeur général, Produits de santé commercialisés de la Direction générale des produits de santé et des aliments. Enfin, de l'Agence de la santé publique du Canada, nous recevrons la Dre Barbara Raymond, directrice générale intérimaire de l'Intégration de la sécurité sanitaire à la Direction générale de l'infrastructure de sécurité sanitaire.
    Je vous remercie de vous joindre à nous aujourd'hui. Nous entendrons les témoins à tour de rôle. Chaque groupe aura 10 minutes pour nous présenter un exposé, puis les membres du Comité leur poseront des questions.
    Nous débuterons avec le ministère de la Défense.
    Bonjour.
    Monsieur le président, je vous remercie, ainsi que les membres du Comité permanent des anciens combattants, de m'offrir l'occasion de m'adresser à vous au sujet de l'utilisation de médicaments pour la prévention du paludisme au sein des Forces armées canadiennes.
    Le personnel des Forces armées canadiennes peut être déployé dans des régions où le paludisme pose un risque considérable pour la santé des militaires et le succès de la mission. Le paludisme est une maladie infectieuse majeure, qui est transmise par un moustique porteur agressif et qui nous oblige à employer plusieurs approches pour prévenir la maladie.
    L'Organisation mondiale de la Santé estime qu'il y a eu 214 millions de cas de paludisme dans le monde en 2015, et qu'environ 438 000 personnes en sont décédées. En plus des mesures de protection individuelle, qui ne sont pas infaillibles et qui sont difficiles à appliquer en contexte opérationnel, il est indispensable de pouvoir compter sur la protection supplémentaire d'une chimioprophylaxie, ou médication, antipaludique. Utilisée adéquatement, la prophylaxie médicamenteuse peut réduire le risque de paludisme de plus de 90 %.

[Français]

     Pour définir notre stratégie de prévention et de traitement du paludisme, en plus de nos propres analyses, nous avons demandé l'avis et les conseils d'experts de ce domaine, dont le Comité consultatif de la médecine tropicale et de la médecine des voyages. Ce comité a mis au point des lignes directrices de pratique clinique qui sont fondées sur des preuves scientifiques.
    Ces pratiques médicales exemplaires tiennent compte de l'innocuité et de l'efficacité des médicaments employés pour faire face à la menace bien réelle que représente le paludisme. Le Comité consultatif, à l'instar des autorités similaires comme les Centers for Disease Control and Prevention aux États-Unis, Public Health England et l'Organisation mondiale de la Santé, recommande différents médicaments, dont la méfloquine, pour la prévention du paludisme, en fonction de la sensibilité des souches locales et de l'évaluation du patient.
(1535)

[Traduction]

    Depuis plusieurs décennies, conformément aux recommandations du Comité consultatif de la médecine tropicale et de la médecine des voyages et d'autres groupes d'experts, les Forces armées canadiennes ont inclus la méfloquine parmi les options qui sont offertes aux patients pour la prévention du paludisme. Nos deux autres principales options, à l'heure actuelle, sont la doxycycline et l'association atovaquone-proguanil, qui est commercialisée sous le nom Malarone. Ces médicaments ont tous des avantages et des inconvénients qui leur sont propres, ainsi que des effets secondaires potentiels.
    Les médicaments antipaludiques qui peuvent être utilisés au cours d'une mission sont choisis en fonction de l'évaluation de notre Direction de la protection de la santé de la Force. Cette évaluation vise à établir le risque de paludisme et l'existence d'une résistance aux médicaments dans la région. Les cliniciens discutent ensuite avec les patients des risques associés au paludisme, ainsi que des avantages, des inconvénients, des effets secondaires possibles et des précautions à prendre pour chacun des médicaments offerts. Les cliniciens procèdent également à une évaluation des contre-indications potentielles pour chaque patient. Les patients peuvent alors choisir en toute connaissance de cause le médicament qui convient le mieux, suivant leurs préférences et la situation.
    La survenue d'effets secondaires peut avoir une incidence sur le patient et sur son état de préparation opérationnelle, et c'est pourquoi il est si important que nous informions adéquatement le personnel des Forces armées canadiennes et que nous procédions à une évaluation médicale. Nous voulons que chaque militaire prenne une décision éclairée et justifiée sur le plan médical lorsqu'il choisit un médicament qui le protégera du paludisme.

[Français]

     Dans les Forces armées canadiennes, le recours à la méfloquine est en baisse depuis 10 ans. Au début des années 2000, la méfloquine était le médicament antipaludique le plus utilisé. Cette situation a commencé à changer au milieu des années 2000 et, désormais, la méfloquine est le médicament le moins souvent choisi. Elle représente environ 5 % de nos ordonnances d'antipaludiques actuelles, tandis que l'association atovaquone-proguanil, qui a été homologuée en 2002, représente environ 80 % des ordonnances. Les autres ordonnances concernent la doxycycline.

[Traduction]

    Plus de 17 000 employés des Forces armées canadiennes et des dizaines de millions de personnes dans le monde ont pris de la méfloquine depuis son homologation pour prévenir et traiter le paludisme. Nous connaissons les effets secondaires que la méfloquine peut engendrer à court terme. Cependant, malgré l'ampleur de son utilisation, elle n'a été que rarement associée à des effets neuropsychiatriques graves.
    Nous savons aussi que certaines personnes soutiennent que la méfloquine pourrait causer des troubles de santé mentale et des séquelles neurologiques persistantes, une théorie qui, de l'avis même de ces personnes, doit encore être étayée par des recherches. Selon notre évaluation, pour le moment, ces allégations ne sont pas soutenues par des preuves scientifiques directes qui justifieraient que nous retirions la méfloquine des médicaments offerts aux patients pour se protéger contre le paludisme, en particulier s'ils en ont déjà utilisé auparavant.
    Cette évaluation respecte les recommandations relatives à la chimioprophylaxie antipaludique du Comité consultatif de la médecine tropicale et de la médecine des voyages, des Centers for Disease Control and Prevention des États-Unis, de Public Health England et de l'Organisation mondiale de la Santé.
    Comme vous le savez probablement, un grand nombre de forces armées étrangères continuent d'offrir la méfloquine parmi les options de prévention du paludisme. Nous restons toutefois vigilants et prêts à étudier tout nouveau renseignement concernant la méfloquine et les autres médicaments antipaludiques.
    Nous sommes également persuadés que les responsables de la réglementation pharmaceutique et le Comité consultatif de la médecine tropicale et de la médecine des voyages mettront à jour leurs recommandations de manière rapide et opportune si de nouvelles données scientifiques et médicales crédibles sont portées à leur attention.
    Nous adapterons nos mesures de prévention du paludisme en conséquence, en privilégiant la rigueur scientifique et l'évaluation critique des données.
    Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de prendre la parole devant le Comité aujourd'hui.
    Merci.
    Nous entendrons maintenant le représentant du ministère de la Santé.
    Docteur John Patrick Stewart, nous vous écoutons.

[Français]

    Bonjour à tous.
    Je vous remercie de m'avoir invité à prendre la parole aujourd'hui. Je suis heureux d'être ici pour vous parler de l'historique de la réglementation de la méfloquine.
(1540)

[Traduction]

    Le paludisme est une maladie grave qui peut être mortelle. Même avec des traitements modernes et efficaces ainsi que des soins intensifs, jusqu'à 20 % des patients meurent lorsqu'ils sont infectés par la forme la plus grave du paludisme. Au cours des trois dernières années, 65 cas de paludisme grave par année ont été enregistrés au Canada. La prévention de l'infection est une stratégie importante visant à réduire l'incidence de cette maladie pour les voyageurs.
    La méfloquine, un médicament d'ordonnance, fait partie des quelques options recommandées pour prévenir le paludisme par le Comité consultatif de la médecine tropicale et de la médecine des voyages, le CCMTMV, de l'Agence de la santé publique du Canada, et par la plupart des organismes compétents en matière de santé publique et de médecine du voyage du monde entier. La méfloquine se présente sous forme de comprimé à ingérer une fois par semaine seulement. Cette posologie peut s'avérer plus facile à respecter que celle d'autres médicaments qui doivent être pris tous les jours. Les autres options, qui comprennent le Malarone, la doxycycline et la primaquine, sont généralement tout aussi efficaces pour prévenir le paludisme, mais les effets indésirables peuvent être aussi graves. Le professionnel prescripteur doit évaluer les avantages et les risques de chaque option et, en fin de compte, la décision liée au médicament à prescrire revient au médecin, après en avoir discuté avec le patient.
    J'aimerais maintenant aborder la démarche qu'a suivie Santé Canada pour assurer la surveillance du profil d'innocuité de la méfloquine depuis sa mise en marché en 1993, et prendre des mesures au besoin pour mettre à jour ce profil d'innocuité dans la monographie canadienne du produit, c'est-à-dire le document d'information sur l'utilisation, la posologie et les effets secondaires du médicament.
    Les données de la monographie concernant les effets secondaires sont tirées d'essais cliniques du médicament et d'observations empiriques du marché. Les rares événements indésirables graves sont habituellement détectés seulement après la mise en marché d'un médicament, parce qu'un plus grand nombre de patients y sont exposés. Santé Canada se fonde sur plusieurs sources d'information, dont Canada Vigilance, sa base de données sur les effets indésirables des médicaments, les ouvrages publiés et les communiqués d'autres autorités réglementaires pour surveiller l'innocuité des médicaments commercialisés.
    Tout au long du cycle de vie de la méfloquine, Santé Canada a continuellement surveillé l'information sur son innocuité. Ainsi, le médicament a fait l'objet d'évaluations périodiques afin de déterminer si l'étiquetage actuel rend fidèlement compte du profil d'innocuité. La monographie originale, présentée en 1993, comprenait un avertissement selon lequel la méfloquine ne devait pas être prescrite comme médicament antipaludique aux patients ayant des antécédents de troubles psychiatriques et de convulsions. En janvier 1997, à la suite de rapports sur les effets indésirables observés après la commercialisation, cet avertissement a été intégré à la section des contre-indications de la monographie.
    En 1998, un article publié dans le Bulletin canadien des effets indésirables de Santé Canada faisait état de quatre signalements d'effets neuropsychiatriques associés à l'utilisation de la méfloquine.
    Cette mesure a été suivie en 1999 par un examen de l'innocuité fondé sur l'analyse de tous les effets indésirables associés à la méfloquine déclarés au Canada. À la suite de cet examen, les pensées suicidaires ont été ajoutées aux effets secondaires dans la monographie. Santé Canada a aussi décidé à l'époque d'évaluer tous les six mois l'ensemble des événements indésirables liés à la méfloquine.
    Des renseignements complémentaires sur les effets neurologiques et psychiatriques indésirables associés à la méfloquine, y compris la possibilité de leur persistance longtemps après l'arrêt du traitement, ont été ajoutés à la monographie en 2003. Une section d'information sur le patient a été ajoutée et une carte à glisser dans le portefeuille a été produite pour décrire les effets neurologiques et psychiatriques, et aviser les patients de consulter un médecin si ces effets se manifestent. Ces changements ont découlé d'une mise à jour semblable de la Food and Drug Administration des États-Unis.
    En 2005, les fabricants de méfloquine, en collaboration avec Santé Canada, ont publié deux avis, une Lettre aux professionnels de la santé et une Lettre aux pharmaciens sur le même sujet.

[Français]

     Le profil d'innocuité et l'étiquetage du produit ont été officiellement évalués de nouveau en 2006. Cet examen a conclu qu'aucune autre mesure d'atténuation du risque ne s'avérait nécessaire. Le ministère continue depuis de surveiller l'innocuité de la méfloquine de façon uniforme.

[Traduction]

    Comme je l'ai déjà mentionné, Santé Canada surveille et évalue les mesures prises par d'autres autorités réglementaires. En 2013, la Food and Drug Administration des États-Unis a publié un communiqué sur le risque mettant en évidence un avertissement encadré sur les effets neurologiques et psychiatriques indésirables dans les renseignements posologiques de la méfloquine aux États-Unis. Santé Canada a alors revu les données sur l'innocuité et déterminé que les questions entourant l'innocuité étaient adéquatement signalées dans la monographie du produit.
    En 2014, Santé Canada a présenté son initiative d'étiquetage en langage simple, qui établissait un nouveau format pour la monographie canadienne du produit. Santé Canada a ensuite demandé au promoteur de mettre à jour la monographie de la méfloquine pour refléter le nouveau format. La mise à jour, terminée en août 2016, a permis de clarifier la présentation de l'information. Par exemple, la nouvelle monographie du produit et la carte-portefeuille comprennent maintenant un avertissement encadré plus visible, où il est indiqué que la méfloquine peut causer des effets neurologiques et psychiatriques indésirables qui peuvent persister après la fin du traitement. Cet avertissement précise également qu'en cas de symptômes psychiatriques et neurologiques, le traitement à la méfloquine doit être interrompu et remplacé par un autre.
    Pour terminer, j'insiste sur la gravité de cette maladie. L'infection palustre peut conduire au décès dans 20 % des cas graves. La méfloquine est un médicament antipaludéen très efficace lorsqu'il est toléré par les voyageurs, et lorsqu'il est prescrit et utilisé selon les indications de la monographie du produit. Santé Canada continuera à surveiller ses risques et à prendre rapidement des mesures pour corriger les problèmes d'innocuité. Le profil avantages-risques de la méfloquine pour prévenir le paludisme, selon l'information actuelle, est considéré positif.
(1545)

[Français]

     Je tiens à remercier le Comité de m'avoir invité à prendre la parole aujourd'hui.

[Traduction]

    Je cède maintenant la parole à Barbara Raymond, de l'Agence de la santé publique du Canada.
    Merci.
    Docteure Raymond, à vous la parole.
    Bonjour. Je vous remercie de me donner l'occasion de parler du Comité consultatif de la médecine tropicale et de la médecine des voyages, de son rôle et du processus d'élaboration de conseils médicaux, scientifiques et de santé publique concernant les maladies tropicales et les risques de santé associés aux déplacements à l'étranger.
    Le Comité consultatif de la médecine tropicale et de la médecine des voyages, plus communément appelé le CCMTMV, est un organe consultatif d'experts de l'Agence de la santé publique du Canada. Il regroupe des professionnels de la santé, tous bénévoles, des domaines de la médecine tropicale et des voyages, des maladies infectieuses et de l'épidémiologie. Il inclut aussi des membres qui assurent la liaison avec des associations diverses telles l'Association pour la microbiologie médicale et l'infectiologie Canada et la Société canadienne de pédiatrie. De plus, des représentants de Santé Canada et du ministère de la Défense nationale participent d'office aux activités du comité.
    Aux fins de l'élaboration de lignes directrices, le CCMTMV procède à une recension exhaustive de la documentation scientifique, de même que des recherches récentes et des données épidémiologiques internationales et nationales avant d'adapter ses recommandations au contexte canadien. Les facteurs déterminants à la base des recommandations comprennent les traitements médicamenteux disponibles au Canada, les habitudes de déplacement propres au Canada et l'épidémiologie, ou le schéma, des maladies connexes.
    Le CCMTMV met en balance la nécessité d'une protection avec les risques d'effets indésirables des traitements et des mesures de prévention, ainsi les valeurs et les préférences des voyageurs canadiens et des fournisseurs de soins de santé. Il révise et met à jour régulièrement ses lignes directrices lorsque de nouvelles données sont publiées afin que les fournisseurs de soins de santé au Canada disposent de toute l'information voulue pour conseiller adéquatement les voyageurs.
    Les plus récentes Recommandations canadiennes pour la prévention et le traitement du paludisme ont été mises à jour et publiées par le CCMTMV en 2014. Le CCMTMV inclut la méfloquine, la doxycycline et l'atovaquone-proguanil comme médicaments de choix pour la prévention du paludisme chez les voyageurs qui se rendent dans les régions où des souches du parasite du paludisme sont résistantes à la chloroquine, un autre médicament utilisé contre certaines souches du parasite.
    Selon les lignes directrices actuelles du CCMTMV, que la méfloquine est généralement bien tolérée et les réactions graves sont rares. Elles stipulent également que l'évaluation du risque pour une personne est nécessaire avant l'utilisation, et l'Agence de la santé publique du Canada recommande aux voyageurs qui vont visiter des régions touchées par le paludisme de discuter des avantages d'un traitement antipaludique avec un professionnel de la santé, de préférence six semaines avant leur départ.
    Dans le cadre de son programme d'examen régulier, le CCMTMV se penche actuellement sur les lignes directrices relatives aux médicaments antipaludiques, y compris la méfloquine. Il est prévu que la révision des lignes directrices du CCMTMV concernant le paludisme sera achevée en 2017 et, par la suite, l'Agence de la santé publique du Canada examinera ses conseils aux voyageurs canadiens en fonction des recommandations mises à jour du CCMTMV.
    Merci pour votre attention.
    Merci.
    Sur ce, nous allons entamer la période des questions.
    Monsieur Kitchen, à vous la parole.
(1550)
    Merci, monsieur le président. Merci également à vous tous qui vous êtes déplacés aujourd'hui. J'ai trouvé vos exposés très intéressants.
    Je viens d'une famille de militaires. Mon père a occupé des fonctions d'attaché militaire au Pakistan, en Afghanistan et en Iran, où il travaillait au haut-commissariat. Quand ma famille a déménagé là-bas, j'étais un adolescent. Tout ce qu'on nous a dit, c'est que si vous allez dans ces régions, vous devez prendre des médicaments contre le paludisme.
    Mes deux fils ont voyagé en Afrique. L'un d'eux avait un médecin sud-africain qui connaissait bien le paludisme et qui lui a suggéré de prendre de la doxycycline. Mon autre fils a reçu une ordonnance de méfloquine. Ce sont des choses qui arrivent — les médecins prescrivent le médicament qu'ils préfèrent.
    Cela étant dit, j'aimerais vous poser une question sur le consentement éclairé. Général, pouvez-vous nous expliquer le processus suivi pour obtenir le consentement éclairé des soldats qui se rendent sur un théâtre d'opérations?
    Le processus dépend de l'ampleur et de la nature du déploiement.
    Par exemple, si un petit groupe de militaires est dépêché pour une mission d'observation de l'ONU, un technicien en médecine préventive leur donne une séance d'information sur les risques propres à leur destination, y compris le risque d'infection paludique s'il y a lieu. Ensuite, chacun aura une rencontre avec un médecin ou un pharmacien pour discuter des traitements antipaludiques possibles pour une région donnée.
    La discussion peut porter sur les médicaments disponibles, leurs avantages, le schéma posologique pour chaque type de médicaments, les risques d'effets indésirables et la nature des effets associés aux médicaments envisagés. Ensuite, le militaire peut être invité à préciser ses préférences, qui seront examinées en fonction des avantages et des inconvénients, ainsi que des effets indésirables possibles, et un médicament est choisi.
    Si un groupe est plus nombreux, une séance d'information plus globale peut être présentée à chaque compagnie ou peloton par un professionnel de la santé, souvent un pharmacien. Les militaires n'ont pas de rencontre individuelle, mais ils remplissent un questionnaire dans lequel ils doivent indiquer les facteurs de risque qui doivent être pris en compte pour chaque médicament. Les facteurs de risque déclarés sur le formulaire sont alors examinés en vue du choix d'un traitement antipaludique. Les militaires rencontrent ensuite un professionnel de la santé pour recevoir leurs médicaments.
    Est-ce que ces politiques étaient déjà en vigueur à l'époque de la mission en Somalie?
    Tout ce que je sais, c'est que cette politique est en place depuis 2004. Je ne sais pas quelle politique était en vigueur lors du déploiement en Somalie. Par contre, je crois que les examens du vérificateur général et de la commission d'enquête sur la Somalie ont révélé que ces processus n'ont pas été suivis à ce moment.
    Est-ce qu'il existe des preuves documentaires? Sont-elles encore accessibles? Ont-elles été archivées? Ces preuves se trouvent-elles dans des dossiers médicaux?
    Je ne sais pas grand-chose au sujet des données qui ont servi de base aux évaluations de ces rapports. Si un militaire rencontre un professionnel de la santé pour qu'il lui recommande un médicament et leur donne une ordonnance, ce devrait être noté au dossier médical. J'imagine qu'à l'époque, une politique exigeait de noter cette information au dossier médical.
    Pour ce qui est des discussions sur la prophylaxie antipaludique, je ne sais pas vraiment quelle était la politique à ce moment.
(1555)
    Je pourrais peut-être consulter les archives pour savoir quel médicament j'ai pris en 1972-1973. Je ne m'en souviens pas. Les dossiers existent, mais ils sont probablement archivés.
    Oui, il se peut très bien que les dossiers médicaux aient été archivés.
    Il vous reste une minute.
    Docteure Raymond, j'aimerais parler rapidement des problèmes de santé publique associés à la méfloquine, puisque ce médicament a aussi été utilisé par des civils, pas seulement par les anciens combattants. Nous avons entendu des histoires de gens qui ont subi des effets secondaires très graves.
    Est-ce qu'il serait intéressant pour l'Agence de la santé publique de faire une étude nationale à long terme et de tenir un registre des effets secondaires rapportés pour savoir ce qui se passe exactement avec ce médicament?
    Le rôle de l'Agence de la santé publique dans ce dossier est d'élaborer des lignes directrices et des recommandations qui indiquent aux professionnels qui prescrivent les médicaments de prendre en compte tous les problèmes d'une personne, notamment. L'Agence ne fait pas d'études de surveillance à long terme de l'utilisation d'un médicament ou de ses effets indésirables.
    Docteur Stewart, est-ce que cela pourrait être intéressant pour Santé Canada?
    Oui, ce genre d'information aurait un grand intérêt. Cependant, selon le mandat que lui confèrent la Loi sur les aliments et drogues et son règlement, Santé Canada ne fait pas de recherche. Le ministère peut soutenir financièrement la recherche par l'intermédiaire des Instituts de recherche en santé du Canada mais, de manière générale, pour ce qui concerne les lignes directrices en matière de pratique et d'autres documents du genre, les recherches sont faites à l'extérieur de Santé Canada. Les promoteurs peuvent fournir des données en vue de la mise à jour des monographies de leurs produits, et peuvent donc mener leurs propres recherches. Actuellement, ce n'est pas le mandat de Santé Canada.
    Merci.
    Monsieur Bratina.
    Voici une observation du général MacKay :
Nous savons aussi que certaines personnes soutiennent que la méfloquine pourrait causer des troubles de santé mentale et des séquelles neurologiques persistantes, une théorie qui, de l'avis même de ces personnes, doit encore être étayée par des recherches. Selon notre évaluation, pour le moment, ces allégations ne sont pas soutenues par des preuves scientifiques directes qui justifieraient que nous retirions la méfloquine des médicaments offerts aux patients...
    Docteure Raymond, selon vous, cette affirmation du général MacKay est-elle raisonnable?
    Comme je l'ai souligné, le CCMTMV procède à une analyse extrêmement rigoureuse des données scientifiques publiées. Si les données étaient accessibles, les recommandations en tiendraient compte.
    Actuellement, l'information disponible ne permet pas de tirer cette conclusion.
    Le Comité a entendu des témoignages troublants concernant les effets subis par nos anciens combattants, dont le Comité se préoccupe au premier chef, de toute évidence.
    En passant, j'ai trouvé très intéressant d'entendre un militaire en uniforme raconter, à l'occasion d'un événement militaire, qu'il avait voyagé dans des régions touchées par le paludisme et qu'il avait pris de la méfloquine, mais qu'il avait conclu après trois ou quatre fois que les mauvais rêves n'étaient vraiment pas son truc, ou quelque chose comme ça.
    Général MacKay, existe-t-il des rapports cohérents sur les réactions de différentes personnes qui ont pris des médicaments, la méfloquine en occurrence? Avez-vous constaté que des militaires qui sont allés dans des régions où le paludisme est endémique au cours de leur carrière ont pris des médicaments et n'ont pas été infectés, mais que certains ont subi de terribles effets secondaires, qui apparemment ont persisté, selon les témoignages entendus ici, et que ce n'est pas le cas de tous? Est-ce que ces témoignages correspondent à ce que vous savez de la situation?
    Comme c'est toujours le cas pour les médicaments qui peuvent avoir des effets indésirables, nous savons que des patients qui ont pris de la méfloquine n'ont pas aimé les effets secondaires, et les rêves en particulier. D'autres se sont plaints de nausées et d'étourdissements. Nous offrons toujours une solution de rechange pour assurer une protection continue contre l'infection paludique.
    Nous avons eu des patients qui ont demandé un autre médicament à cause des effets indésirables.
(1600)
    Évidemment, nous nous intéressons aux questions qui touchent les anciens combattants, soit les militaires qui ont été libérés du service ou mis à la retraite, dans certains cas possiblement à cause d'effets directement liés à la méfloquine. Le stress post-traumatique est un trouble différent, très grave et très complexe.
    Peut-être pourrais-je poser la question à la Dre Raymond. Existe-t-il une façon d'aborder les problèmes liés au stress post-traumatique, ou les problèmes consécutifs à la prise de médicaments, dans le cadre de thérapies ou de traitements offerts aux anciens combattants? Est-ce que cette question est légitime?
    En réalité, cette question n'est pas vraiment du ressort de l'Agence de la santé publique du Canada. Je peux toutefois affirmer, concernant votre analyse des liens entre ces problèmes et la méfloquine, que la preuve n'est pas concluante.
    J'aimerais préciser aussi qu'il ne faut pas confondre le trouble de stress post-traumatique et la toxicité d'origine médicamenteuse. Ce n'est pas la même chose.
    Bien. Merci.
    Du côté des militaires en service, les chiffres sont étonnants. La méfloquine est prescrite dans 5 % des cas, ce qui en fait le médicament antipaludique le moins souvent choisi. Cependant, selon l'évaluation globale de ce médicament, il semble qu'un très faible pourcentage des militaires qui en ont pris ont eu des effets secondaires graves et imprévus. N'est-ce pas ce que disent les chiffres? Que les effets très graves ont été très rares?
    Je tente de faire des extrapolations à partir du matériel que vous nous avez remis. Dans quelle mesure est-il difficile...
    Allez-y.
    Pour ce qui est du taux de 5 %, de la baisse du taux d'utilisation de très élevé à très faible, je ne saurais vous dire ce qui s'est passé au juste.
    Je pense que ce qui est en cause, c'est l'éducation donnée aux patients sur les risques du paludisme, de même que sur les avantages et les effets indésirables possibles des médicaments. La publicité autour de la méfloquine influence les décisions des gens. Le risque, comme nous l'avons vu après les déclarations sur l'immunisation et les campagnes antivaccination, est que les gens interprètent l'information de manière trop radicale et qu'ils fassent des choix qui ne sont pas forcément fondés sur des données scientifiques, mais plutôt sur des opinions véhiculées par le débat populaire.
    M. Bob Bratina: Merci beaucoup.
    Merci.
    Madame Mathyssen.
    Merci, monsieur le président.
    Merci pour toute cette information. Il est important pour nous d'avoir la meilleure information possible, et je vous suis très reconnaissante.
    J'ai plusieurs questions.
    Premièrement, lorsque de la méfloquine leur était prescrite, quel type d'information les militaires recevaient-ils? Quelle information leur était donnée à l'époque sur les effets secondaires possibles? Et aujourd'hui? Auparavant, d'autres médicaments antipaludiques leur étaient-ils proposés? J'imagine que ma question vaut pour aujourd'hui aussi.
    Est-ce que la question m'est adressée?
(1605)
    Elle s'adresse à quiconque peut y répondre.
    Je peux seulement parler du contexte militaire. Je ne sais pas ce qui était dit au personnel quand la méfloquine a commencé à être prescrite, vers 1992, je crois.
    Par contre, je peux affirmer qu'actuellement, nous transmettons l'information qui vient des monographies de chaque médicament. Comme je l'ai déjà dit, nous parlons des risques, des avantages et des effets secondaires connus, notamment du pourcentage de personnes qui peuvent éprouver ces effets. Nous discutons aussi du risque réel de contracter une infection paludique dans la région où ils se rendent, qui peut être très élevé dans certains cas. Ce sont les conseils d'usage que nous donnons pour le choix d'un médicament dans ce cas.
    Selon l'échange de tout à l'heure sur les dossiers, j'en déduis que les dossiers de 1992 ne nous renseigneraient pas vraiment sur l'information donnée aux patients. Est-ce bien ce que vous avez dit?
    Je ne peux pas vraiment me prononcer sur le contenu des dossiers.
    Souvent, après avoir donné des conseils à un patient, le médecin inscrit des remarques au dossier concernant la teneur de la discussion, mais pas forcément un compte rendu détaillé des effets indésirables discutés. C'est souvent ce que le médecin écrira dans ses notes cliniques après la rencontre. Nos anciens dossiers papier étaient très différents des dossiers médicaux actuels sur support électronique. À mon avis, nous sommes en mesure de prendre des notes de bien meilleure qualité dans les dossiers électroniques. Il est beaucoup plus facile de retracer l'information consignée dans les dossiers médicaux sur support électronique.
    Merci.
    Que se passe-t-il si un membre des Forces canadiennes qui s'apprête à participer à une mission dans une région où le paludisme est endémique déclare qu'il n'est pas prêt à prendre les risques dont il a été informé au sujet des médicaments proposés — qu'il n'a pas le choix de prendre, j'imagine, s'il veut s'embarquer?
    Si le risque de contracter une infection paludique est assez élevé... Comme le paludisme est associé à des risques importants de morbidité et de mortalité, il est fort probable que nous n'autoriserions pas le déploiement d'un membre non immunisé dans une région où il serait exposé au parasite.
    Et un militaire qui refuse de prendre un médicament et qui ne peut donc pas être déployé compromet-il sa carrière?
    Il faudrait déterminer, à l'échelon du personnel ou de la chaîne de commandement, s'il s'agit d'une décision raisonnable, compte tenu de la situation personnelle du membre. Concrètement, une mesure pourrait être prise s'il est décidé que le critère de l'universalité du service n'est plus rempli par le membre qui a refusé les traitements préventifs requis pour participer à un déploiement.
    Si je comprends bien, un militaire qui refuse catégoriquement de prendre des médicaments proposés met sa carrière en péril.
    Comme je ne prends pas de décisions qui pourraient mettre fin à la carrière de quiconque — c'est le rôle du secteur du personnel —, permettez-moi d'y aller de prudence. Je sais qu'une évaluation serait faite pour déterminer si le membre continue de satisfaire au critère de l'universalité du service. Si ce n'est pas le cas, il pourrait y avoir des incidences sur la suite de sa carrière.
    Merci.
    Docteure Raymond, vous avez affirmé que les professionnels de la santé sont informés des préoccupations ou des problèmes associés à un médicament.
    Quelle est la procédure suivie? Comment les médecins sont-ils informés au sujet des préoccupations ou des modifications apportées aux recommandations liées à ce genre de médicaments très importants, mais qui peuvent néanmoins avoir des effets nocifs?
    Les professionnels de la santé ont accès aux monographies des produits, qui sont contrôlées par Santé Canada. Quant aux lignes directrices du CCMTMV, elles sont publiées en ligne et mises à la disposition des médecins, et une stratégie de communication assure que l'information parvient aux médecins qui rencontrent des voyageurs et qui exercent dans le domaine de la médecine du voyage, notamment. Il s'agit d'une ressource de base et universellement connue des professionnels de la santé qui donnent des conseils aux voyageurs.
(1610)
    Est-ce que quelqu'un d'entre vous est au courant des directives que Santé Canada a données au MDN pour ce qui concerne la surveillance et la consignation des effets attribuables au médicament, et si un suivi étroit des incidences a été fait?
    Je vous prierais de répondre très rapidement à cette question.
    Selon les exigences et la réglementation découlant de la Loi sur les aliments et drogues, le fabricant du médicament est tenu de signaler toute réaction indésirable grave et inattendue.
    Il existe un mécanisme de déclaration volontaire. Les utilisateurs d'un produit, soit les médecins, les hôpitaux et les pharmaciens, peuvent signaler les effets indésirables d'un médicament directement à Santé Canada. Toutefois, les rapports concernant l'utilisation d'un médicament après son homologation sont la responsabilité du fabricant.
    Monsieur Fraser.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je vous remercie tous d'être venus aujourd'hui et de nous informer de façon si édifiante. Vos témoignages nous permettront de comprendre un peu mieux de quoi il retourne.
    J'ai bien compris, comme nous tous je crois, que le paludisme présente des risques et que la protection des membres des Forces canadiennes et des anciens combattants contre cette maladie a toujours été primordiale dans les théâtres d'opérations en région tropicale. Je comprends le contexte.
    Concernant les médicaments antipaludiques qui sont prescrits actuellement, est-il possible d'avoir des chiffres approximatifs sur le nombre de membres des Forces qui prennent de la méfloquine et le nombre de ceux à qui d'autres médicaments sont administrés actuellement?
    Andrew est le spécialiste dans ce domaine. La méfloquine a été prescrite à 51 personnes en 2013, et ce chiffre a baissé à 42 après une discussion avec un clinicien. Le Malarone a été administré 16 fois plus souvent.
    Donc, le nombre de militaires à qui d'autres médicaments sont administrés est nettement plus élevé.
    La méfloquine compte pour 4,3 % à peine, ou quelque part par là, des ordonnances de médicaments antipaludiques. Le Malarone est administré dans la très grande majorité des cas, suivi de la doxycycline. Comme je l'ai mentionné, il y a très peu d'utilisateurs de la méfloquine, soit 43, contre 800 qui ont pris d'autres types d'antipaludiques.
    Savons-nous si, parmi ceux qui ont reçu une ordonnance de méfloquine et qui en prennent actuellement, ou qui en ont pris récemment, certains avaient utilisé d'autres types de médicaments antipaludiques et, pour une quelconque raison, ont dû s'en remettre à la méfloquine en derniers recours à cause des effets secondaires des autres médicaments? Savons-nous combien de militaires qui prennent actuellement de la méfloquine ont pris d'autres médicaments avant?
    Je n'ai pas ces données.
    Est-il possible de les trouver?
    Oui, notre personnel pharmaceutique fait ce genre de suivi. Je n'ai pas les chiffres ici, mais je sais qu'une ou deux personnes ont fait cette transition.
    Il est intéressant de souligner que des personnes font cette transition parce qu'elles ne tolèrent pas un autre médicament, ou parfois parce qu'elles aiment mieux la posologie de la méfloquine. D'autres personnes font aussi une transition vers un autre médicament, parfois après leur arrivée sur le théâtre des opérations.
    C'était ma question suivante. La méfloquine est prise une fois par semaine seulement.
    C'est exact.
    Certaines personnes préfèrent ce régime, et feront la transition vers la méfloquine, ou d'un type à l'autre.
(1615)
    C'est exact.
    L'autre facteur à prendre en compte est la longueur du séjour. Par exemple, si une personne doit rester 10 jours à un endroit, il serait sans doute mieux qu'elle prenne une dose quotidienne qu'une...
    Tout à fait.
    Peut-être trouverez-vous ma question stupide, mais comment le médicament est-il prescrit? Quel médecin les membres doivent-ils rencontrer pour obtenir une ordonnance, et combien de médecins prescrivent ce produit avant que les forces s'embarquent pour le théâtre d'opérations?
    Tout dépend de la mission.
    N'importe lequel de nos médecins peut être appelé pour prescrire des médicaments antipaludiques. Et depuis quelque temps, dans plusieurs provinces, des pharmaciens peuvent rencontrer les patients et leur prescrire une chimioprophylaxie antipaludique.
    Avant d'obtenir une ordonnance, j'imagine qu'une personne doit rencontrer un médecin des Forces pour discuter des effets secondaires possibles, de même que des avantages et des inconvénients des différents types d'antipaludiques. Est-ce que c'est la pratique courante?
    Deux procédures sont possibles. Si le groupe déployé à l'étranger est peu nombreux, comme je l'ai dit, chaque personne aura probablement une rencontre individuelle avec un médecin.
    Toutefois, si beaucoup de militaires partent pour l'étranger, un médecin ou un pharmacien fera une présentation de groupe sur tous les aspects de la médicamentation, soit le dosage, les avantages, les inconvénients et les effets indésirables. Ces personnes doivent également remplir notre formulaire d'évaluation, et chaque formulaire est ensuite examiné. Elles rencontrent ensuite un clinicien, soit un médecin ou un pharmacien, qui leur remet leur médicament.
    Merci.
    Docteur Stewart, ma prochaine question s'adresse à vous. Vous avez parlé de la méfloquine et du fait que l'un de ses avantages est qu'elle est prise une fois par semaine seulement. Existe-t-il d'autres raisons pour lesquelles une personne pourrait préférer la méfloquine à un autre produit?
    Chaque traitement préventif du paludisme comporte ses avantages et ses inconvénients. Comparativement à d'autres traitements, chez les personnes qui ont des problèmes rénaux, de photosensibilité, des allergies ou des maladies cardiaques, la méfloquine peut s'avérer un meilleur choix. Il faut en discuter avec le patient.
    De plus, chaque traitement a son propre profil d'effets secondaires. Dans la monographie, Santé Canada donne les indications d'un médicament, la posologie, les mises en garde, les précautions, les contre-indications, etc. Le médecin et le patient doivent faire considérer les options et déterminer celle qui convient le mieux.
    Plusieurs facteurs entrent en ligne de compte. Tous les médicaments ont des effets secondaires, sans exception. Il faut analyser les facteurs pour chaque patient, c'est-à-dire sa situation, la durée du séjour, etc.
    Je suis désolé, votre temps de parole est écoulé.
    Monsieur Eyolfson.
    Merci à vous tous pour vos témoignages. Ma première question est destinée au Dr Stewart. Votre réponse est une excellente entrée en matière au sujet que je voulais aborder.
    Nous avons amplement discuté des effets secondaires rares, mais graves, de la méfloquine. Pourriez-vous nous éclairer au sujet des effets secondaires les plus graves du Malarone et de la doxycycline? Je sais que la photosensibilité est l'un des effets liés à la doxycycline.
    La liste des effets figure dans la monographie du produit, et ils varient. Ils sont énumérés selon les systèmes organiques. Des réactions allergiques graves et mortelles sont possibles, de même qu'une toxicité élevée, des réactions cutanées, des réactions gastro-intestinales comme des vomissements, des diarrhées. Le Malarone peut causer une toux chronique. La doxycycline est un antibiotique, et elle peut donc aussi entraîner des effets secondaires gastro-intestinaux — Clostridium difficile, diarrhées, etc.
    Les deux peuvent causer de la photosensibilité. Or, dans beaucoup de régions où le paludisme est endémique, l'exposition au soleil est très importante. Il faut en tenir compte.
    C'est pourquoi il est important que les médecins qui prescrivent ces médicaments soient bien au fait de leur profil d'effets secondaires. Plusieurs des risques graves associés à ces produits sont plutôt rares mais, lorsqu'ils se manifestent, les conséquences sont importantes. Il faut le savoir et il faut informer le patient qu'il doit demander conseil au clinicien. C'est pourquoi des lignes directrices sont données. Le document publié par le CCMTMV donne les listes des facteurs à prendre en compte pour chaque médicament, qui sont tirées de la monographie publiée par Santé Canada ou d'autres publications internationales. Cependant, c'est vraiment entre le médecin et le patient que la décision sera prise quant à la meilleure option et à la stratégie à suivre si jamais les résultats ne sont pas optimaux après le début du traitement.
    C'est certain.
    Je vais maintenant vous poser une question à laquelle il est très difficile, voire impossible, de répondre. De manière générale, si vous tenez compte du profil risques-avantages, les trois médicaments sont-ils équivalents? Même s'ils sont rares, diriez-vous que les effets secondaires de la méfloquine sont plus nombreux ou plus fréquents? Je suis moi-même médecin et je déteste ce genre de questions, mais lorsque vous devez prescrire un médicament et donc comparer les risques et les avantages des trois, est-ce que l'un d'eux présente un meilleur bilan?
    Je représente Santé Canada. Or, ce que vous me demandez de faire ne relève pas de Santé Canada. Son rôle est de diffuser efficacement l'information. Cette décision se prend avec le patient, compte tenu de plusieurs facteurs, y compris la tolérance du patient, les effets secondaires, son état de santé, l'aspect économique, tout ça. Je ne peux donc pas affirmer qu'un médicament est mieux qu'un autre.
    C'est pourquoi des organismes nous avons des organismes comme le CCMTMV... Des spécialistes doivent se réunir pour étudier le dossier et formuler des recommandations. Je ne pense pas que Santé Canada puisse recommander un médicament plus qu'un autre. Son rôle est d'expliquer les données probantes recueillies sur chaque produit. Ensuite, des lignes directrices en matière de pratique sont établies, notamment pour informer les cliniciens sur les facteurs à prendre en considération pour une maladie donnée, les produits offerts et ce qu'il faut comprendre avant d'en choisir un.
    Il ne serait pas juste de dire qu'un produit vaut mieux qu'un autre.
(1620)
    Non, je comprends.
    Mon général, pardonnez-moi si je pose encore une question difficile, et je ne sais pas s'il existe des données à ce sujet. Nous savons que le trouble de stress post-traumatique, ou TSPT, fait partie des risques malheureux et tragique courus par les militaires déployés dans des situations de combat. Nos militaires sont déployés dans différents théâtres à l'échelle de la planète, qui ne sont pas tous des foyers de paludisme et qui ne justifient donc pas qu'une prophylaxie antipaludisme soit prescrite.
    Avez-vous des données sur la proportion de soldats qui ont reçu un diagnostic de TSPT après un déploiement dans un théâtre où le paludisme n'était pas un risque et pour qui aucune prophylaxie antipaludique n'a donc été utilisée, par rapport aux théâtres où cette prophylaxie était requise?
    Malheureusement, nous faisons un suivi des troubles de santé mentale depuis 10 ou 15 ans seulement. Nos meilleures données sur les troubles de santé mentale consécutifs à un déploiement remontent à peu près à la mission en Afghanistan. Je sais toutefois qu'aucun traitement médicamenteux antipaludique n'a été prescrit aux militaires déployés en Bosnie, et que certains parmi eux ont été affectés par des troubles de santé mentale. Nous avons très peu utilisé de médicaments antipaludiques en Afghanistan, après une évaluation du risque très rigoureuse par l'intermédiaire de la Direction de la protection de la santé des Forces. Bien que les membres des Forces américaines prenaient presque tous des antipaludiques, nous les donnions uniquement aux militaires qui faisaient des patrouilles à pied dans de petites zones où il pouvait y avoir du paludisme. Et, malgré l'utilisation très limitée d'antipaludiques, dont le Malarone et la doxycycline essentiellement, la mission en Afghanistan a donné lieu à un nombre assez important de cas de maladies mentales.
    Très bien. Merci beaucoup.
    Monsieur Brassard.
    Merci, monsieur le président.
    Je constate avec satisfaction que ce sujet est maintenant vu comme étant d'intérêt national, parce que nous recevons de plus en plus de témoignages comme quoi un nombre croissant de nos anciens combattants et de militaires en service en ont été victimes.
    Brigadier-général MacKay, j'essaie d'établir la chronologie des événements. Dans votre témoignage, vous avez notamment affirmé que la méfloquine est de moins en moins choisie depuis une dizaine d'années. Au début des années 2000, la méfloquine était l'antipaludique le plus souvent utilisé. Les choses ont commencé à changer au milieu des années 2000. Vers 2005, je pense. Vous avez dit aussi, dans votre réponse sur les raisons de ce tournant, que c'était probablement une conséquence de la publicité.
    Le problème a commencé à susciter de plus plus d'attention autour de 2013, et nous sommes maintenant en 2016. En 2013, le problème des suicides a commencé à faire surface. C'est M. Dowe qui a lancé l'alarme, et il était ici la semaine dernière pour nous en parler. Pourquoi le recours à la méfloquine a-t-il connu un tel recul dans les Forces durant cette période? Avec tout votre respect, je ne crois pas que la publicité soit en cause. Je crois que c'est parce que les effets du médicament commençaient à être mieux connus.
    J'aimerais vous entendre un peu plus sur le sujet précis de ce recul.
(1625)
    Tout à l'heure, lorsque j'ai parlé de la baisse du recours à la méfloquine, je ne faisais pas référence aux médias. Je voulais dire que, en 2004, nous avons commencé à faire de l'éducation en bonne et due forme auprès des patients quant aux risques, aux avantages et aux effets indésirables possibles de tous les antipaludiques offerts. C'est, selon moi, ce qui a fait la différence.
    La méfloquine a suscité des controverses à partir des années 1990. C'est ce que nous avons constaté après les enquêtes sur la Somalie et le débat autour de la méfloquine à cette époque. Mon observation concernant l'influence des médias ne s'applique pas seulement à la période à partir de 2013 — je crois que c'est l'année que vous avez donnée —, mais à toute la période qui a suivi le début des discussions. Pendant toutes les années 1990 et 2000, la méfloquine a suscité des controverses qui, à mon avis, ont influencé les décisions de certaines personnes. Mais il ne faut pas oublier, comme je l'ai dit, l'éducation des patients et les discussions qui ont débuté plus formellement en 2004.
    Merci, brigadier-général MacKay.
    Docteur Stewart, nous avons eu l'occasion de discuter de ce sujet avec le Dr Remington Nevin la semaine dernière. Il nous a parlé plus particulièrement de la situation aux États-Unis, et du fait que le Special Operations Command a donné un ordre dans lequel il reconnaît que les effets de la méfloquine peuvent brouiller le diagnostic de TSPT et de lésions cérébrales acquises. Par ailleurs, les commandants et le personnel médical sont enjoints à considérer et à évaluer la possibilité d'incidences de l'intoxication à la méfloquine chez les militaires.
    Général MacKay et docteure Raymond, étant donné que la monographie du produit a été modifiée, quelles instructions pourraient être données aux militaires ou à ceux qui prescrivent la méfloquine? Quel est le processus suivi?
    La monographie du produit est un document qui donne de l'information sur les indications, l'utilisation, les contre-indications, les mises en garde, les précautions et les effets secondaires. Elle contient une deuxième partie, qui donne de l'information aux patients, et elle comporte un volet primordial où figurent les données probantes à l'appui de l'autorisation de commercialisation.
    Comme je l'ai dit dans mon exposé, il s'agit d'un document dynamique, qui évolue au fur des découvertes, puisque l'exposition accrue d'une population élargie à la méfloquine permet de mieux comprendre les effets secondaires. Le document a été mis à jour et des éléments de la version originale ont été modifiés.
    Les antécédents de troubles psychiatriques ou neurologiques, qui faisaient partie des mises en garde, ont été inscrits dans les contre-indications. Le risque d'apparition d'idées suicidaires a également été ajouté. La persistance possible des effets secondaires après l'arrêt du traitement a aussi été incluse.
    Si vous comparez la chronologie des modifications apportées à la monographie du produit aux États-Unis et au Canada, vous constaterez qu'elle est très similaire.
    Nous nous adressons aux professionnels prescripteurs uniquement pour leur annoncer que la monographie a été mise à jour ou, comme je l'ai évoqué dans mon exposé et comme nous l'avons fait en 2005, nous pouvons diffuser un avis, de concert avec les fabricants, pour nous assurer que les professionnels de la santé sont informés du changement. Il appartient aux prescripteurs de rester à l'affût des changements, de s'intéresser au débat sur l'innocuité des médicaments et d'adapter leurs pratiques de prescription en conséquence.
(1630)
    Comment déterminez-vous que des effets pourraient se manifester trois ans après un traitement? Vous appuyez-vous sur les études d'autres pays qui ont été portées à votre attention à ce moment? D'où viennent les données concernant les effets possibles trois, quatre ou cinq ans après qu'une personne a cessé de prendre le médicament?
    De nouveau, je vous réfère à ma déclaration préliminaire. Nous examinons les effets indésirables qui nous sont signalés, ce qui est rapporté dans la documentation et par les autorités réglementaires étrangères, et l'information que le fabricant nous fournit. Dans les rapports en provenance d'autres pays aussi bien que du Canada, nous commencions à voir des descriptions de réactions graves, de même que des remarques sur leur persistance après l'arrêt du médicament. Il est extrêmement complexe de départager les données et de déterminer s'il existe un lien de causalité ou une association directe entre l'utilisation d'un produit et les symptômes décrits par les patients, car les facteurs en jeu sont multiples.
    Par exemple, le diagnostic de dépression n'est pas réservé aux sujets qui prennent le médicament. Si l'état dépressif coïncide avec la prise du médicament et perdure après, celui-ci peut jouer un rôle. Cependant, d'autres facteurs psychosociaux et génétiques peuvent être en cause. Nous savons que la maladie mentale touche aussi la population qui ne prend pas le médicament, de sorte qu'il est difficile d'établir, à partir d'un rapport, qu'il y a un lien causal avec le médicament. Par contre, si les signalements se multiplient, nous ferons une analyse pour établir si l'information doit figurer sur l'étiquette et s'il y a lieu d'avertir les médecins qu'il pourrait y avoir un lien de cause à effet.
    Certains signalements d'effets indésirables tels des symptômes neuropsychiatriques font état de la persistance des symptômes. Il n'est pas clair si le médicament est en cause, mais l'observation a été faite et la monographie avertit les cliniciens qu'ils doivent en tenir compte lorsqu'ils prescrivent un médicament.
    Merci, monsieur le président.
    Madame Lockhart, je pense que vous allez partager votre temps de parole.
    Merci pour vos témoignages, ils sont très édifiants.
    Supposons que le patient a reçu l'information et qu'il a fait un choix. Après qu'un médicament a été prescrit, est-ce qu'il y a un suivi quelconque de l'état de santé mentale et des effets du médicament une fois que le patient est sur le théâtre des opérations?
    Habituellement, lorsqu'un médicament est prescrit et qu'il est pris par les membres des Forces armées canadiennes alors qu'ils se trouvent sur le théâtre des opérations, ils sont avertis que s'ils ressentent des effets qui pourraient être liés au médicament, ils doivent nous en parler. Nous pouvons déterminer ainsi s'il y a un lien ou si les effets sont plutôt dus à un autre facteur parasite attribuable au déploiement.
    Nous ne faisons pas de suivis systématiques auprès des personnes à qui de la méfloquine a été administrée. Ce n'est pas prévu.
    Pour ce qui concerne la santé mentale, tout dépend de la taille du contingent déployé. En Afghanistan, notre hôpital de rôle 3 comptait un psychiatre, un travailleur social et une infirmière en santé mentale qui étaient au service des personnes aux prises avec des symptômes de santé mentale.
    Par contre, souvent dans le cas de missions de moindre envergure, des auxiliaires médicaux ou des médecins peuvent venir en aide aux personnes qui éprouvent des problèmes de santé mentale, du moins au début, et décider si elles ont besoin de soins plus spécialisés.
    Donc, il n'y a pas de contrôles ou de suivis systématiques de l'état de santé mentale? Ils sont effectués au besoin seulement. Est-ce exact?
    En fait, une évaluation exhaustive est effectuée systématiquement entre le troisième et le sixième mois après le retour d'un déploiement. Nous ne procédons pas à des évaluations particulières sur le terrain. Les membres savent que des professionnels de la santé sont à leur disposition s'ils ressentent des symptômes qui les préoccupent.
    Avant leur départ du théâtre des opérations, nous les préparons en vue des changements qu'ils pourraient rencontrer après leur retour à la maison. Une partie de l'information qui leur est donnée concerne l'incidence possible sur leur santé mentale. Puis, comme je l'ai dit, entre trois et six mois après leur retour à la maison, nous faisons une évaluation individuelle afin de dépister les répercussions postdéploiement sur leur santé mentale.
    Nous avons constaté que la moitié environ de ceux chez qui des répercussions possibles sur la santé mentale sont dépistées lors de l'évaluation postdéploiement ont déjà demandé des soins. Nous en déduisons que nos efforts de sensibilisation et de communication sur la santé mentale portent leurs fruits.
(1635)
    Merci.
    Monsieur Rioux.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins de venir nous donner leurs opinions scientifiques.
    Docteur Stewart, on dit ici qu'en 1993, le médicament ne devait pas être prescrit aux patients ayant des antécédents de troubles psychiatriques et de convulsions. Par la suite, il y a eu quatre rapports d'effets indésirables neuropsychiatriques. Après des examens, on a constaté qu'il provoquait des pensées suicidaires et que ces effets pouvaient persister bien après l'arrêt du traitement.
    La semaine dernière, nous avons reçu des gens, et ce fut très émouvant. Des médecins nous ont dit qu'on avait déterminé qu'ils souffraient du trouble de stress post-traumatique, mais que le diagnostic était bien différent, à savoir que c'était attribuable directement à la prise du médicament.
    Compte tenu de la situation, faudrait-il faire davantage de recherche? D'après ce qu'on nous a dit la semaine dernière, il semble y avoir une ouverture aux États-Unis en ce sens.
    Je vous remercie de la question.

[Traduction]

    Il est important de souligner que pour tout médicament, une fois que la commercialisation est autorisée, l'exposition au médicament augmente à cause du nombre accru d'utilisateurs. Pendant les essais cliniques du traitement, il peut y avoir eu de petits signaux d'alerte. Toutefois, la plus grande exposition au médicament et son utilisation continue nous ont permis d'en apprendre davantage, et les effets secondaires neuropsychiatriques associés à la méfloquine se sont précisés et ils ont été mieux définis.
    De nombreux pays ont ajouté un avertissement de ne pas prescrire le médicament aux personnes qui ont des antécédents de troubles neuropsychiatriques sur l'étiquette. Nous avons commencé à entendre parler d'un petit nombre de personnes qui ont développé des troubles neuropsychiatriques alors qu'elles ne semblaient pas en avoir eu avant de commencer à prendre le médicament. Cela suggérait que non seulement le médicament ne devait pas être donné à des personnes présentant des antécédents de troubles neuropsychiatriques mais que, selon les signalements reçus, le médicament pouvait induire des troubles, graves dans certains cas, chez un petit nombre de personnes sans antécédents. De là les mentions sans cesse plus restrictives sur l'étiquette.
    Je suis d'accord pour qu'on poursuive les recherches dans ce domaine, c'est crucial. La question est toutefois de savoir qui devrait mener ces recherches. Le rôle de Santé Canada est de surveiller chaque médicament et l'information que nous avons à son sujet, et de s'assurer qu'elle figure sur l'étiquette. Si jamais le profil avantages-risques bascule du mauvais côté, Santé Canada prendra les mesures qui s'imposent. Actuellement, étant donné que la méfloquine fait encore partie des médicaments offerts pour traiter le paludisme à P. falciparum dans les régions où il résiste à la chloroquine, il semble que le profil ne soit pas trop défavorable. Toutefois, il est clair que nous appuierons et encouragerons la poursuite des recherches dans ce domaine.
    Merci.
    Monsieur Clarke, nous vous écoutons.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    C'est un grand honneur d'être ici aujourd'hui.
    Bonjour à vous tous.
    Monsieur le brigadier-général, ma première question sera pour vous. J'imagine que le groupe des Services de santé des Forces canadiennes comprend des psychologues et des psychiatres. Est-ce bien le cas?
    Oui, parfait.
    Les officiers de vos troupes qui sont psychologues et psychiatres font des diagnostics, rencontrent des militaires et produisent des rapports, qui sont confidentiels, bien entendu. En tant que commandant, recevez-vous des comptes rendus statistiques? Par exemple, un rapport qui dirait que 31 % des membres qui sont venus dans la dernière année souffriraient de syndrome de stress post-traumatique ou bien que 15 % des membres seraient déprimés. Recevez-vous de tels comptes rendus statistiques provenant du corps médical que vous commandez?
(1640)

[Traduction]

    Pour bien comprendre la situation de la santé mentale à l'échelle des Forces armées canadiennes, nous avons demandé à Statistique Canada de mener une enquête importante auprès des membres, afin d'identifier ceux qui présentaient un complexe de symptômes révélateurs de troubles mentaux. L'enquête a révélé que la prévalence du trouble de stress post-traumatique après 12 mois était passée de 2,7 % en 2002 à 5,4 % en 2013. Cependant, aucun changement notable n'a été observé dans la proportion de membres des Forces armées canadiennes souffrant de dépression, qui constitue encore la principale cause de maladie mentale chez les militaires et qui s'établissait autour de 8 % en 2002 et en 2013. Je ne reçois pas de rapport statistique annuel.
    À la page 2, par exemple, vous évoquez les effets neuropsychiatriques de la méfloquine, en précisant qu'ils sont rares. Comment s'exprimerait la notion de rareté en chiffres? Pouvez-vous nous donner des statistiques?
    Je me reporte à l'information à notre disposition, qui ne vient pas exclusivement des Forces armées canadiennes. Je crois que, globalement, parmi les personnes qui ont pris de la méfloquine, des effets graves peuvent se manifester chez 1 personne sur 11 000 ou sur 13 000.
    Donc, la rareté veut dire une personne sur 11 000?
    Oui.
    Avez-vous dit sur 1 100?
    Non, c'est une personne sur 11 000.
    D'accord.
    La semaine dernière, je n'étais pas ici, mais je sais que des anciens combattants sont venus témoigner des répercussions que la méfloquine a eues dans leur vie. Je sais aussi que l'un d'entre eux a dit, du moins à moi, que l'utilisation de la méfloquine est liée au comportement criminel de certains de nos militaires en Somalie.
    Vos officiers ont-ils souvent entendu parler de cette association? Est-ce que c'est quelque chose dont parlent les commandants?
    Nous n'entendons pas souvent ce genre d'histoires. Nous entendons souvent parler des répercussions de nos opérations, que ce soit dans des zones de conflit ou dans le cadre de missions d'aide humanitaire et d'intervention en cas de catastrophe naturelle, sur la santé mentale. C'est pourquoi il est si difficile d'affirmer que les problèmes de nos membres en service et de nos anciens combattants — et la raison de notre passage ici est que nous faisons tout pour les soigner — sont dus à la méfloquine plutôt qu'à la somme des événements vécus en Somalie.
    Il ressort très clairement du rapport de la commission d'enquête sur la Somalie que cette unité était aux prises avec des problèmes importants de leadership et de discipline bien avant l'administration de méfloquine, qui se sont accumulés tout au long de l'opération.
    Je vois. C'est intéressant.
    Il existe donc des facteurs parasites qui doivent être pris en considération.
    Merci beaucoup, brigadier-général.
    Docteur Stewart, docteure Raymond, avez-vous de l'information concernant le lien entre la méfloquine et des actes de violence physique?
    Nous avons reçu des signalements d'effets indésirables mettant en cause des comportements neuropsychiatriques chez des personnes qui prenaient de la méfloquine. De tels rapports ont été faits non seulement à Santé Canada, mais à d'autres autorités aussi. Je ne sais pas si la violence fait partie de ces comportements, car je n'ai pas cette information ici, mais des signalements de différents types ont été faits. Les états dépressifs, l'agressivité, les psychoses, l'agitation, la fébrilité et les hallucinations comptent parmi les effets signalés.
(1645)
    Y a-t-il eu des signalements d'actes de violence extrême?
    Je ne peux pas répondre. Je ne sais pas.
    Merci.
    Madame Mathyssen.
    J'aimerais revenir à une question que j'ai déjà posée.
    Je comprends ce que le Dr Stewart nous a expliqué concernant les renseignements de toute sorte sur le médicament. Seulement, quand la méfloquine a été administrée aux membres des FC dans le cadre d'un essai médical, quelle a été l'information qui leur a été donnée? Est-ce qu'ils ont été informés des effets secondaires possibles? Ont-ils reçu l'information qui est actuellement transmise aux membres des FC?
    Ont-ils été informés?
    Je ne sais pas ce qui s'est passé dans le cadre de l'essai clinique supervisé par le MDN. L'information dont je dispose est que Santé Canada a donné le feu vert à cet essai. L'essai avait été proposé par le fabricant, Hoffmann-La Roche, et un protocole a été suivi, il y avait des documents de consentement éclairé. Il incombait au fabricant ou au promoteur de l'essai de le réaliser conformément au protocole, qui incluait un consentement éclairé.
    L'expérience de l'Europe et des États-Unis, où le produit était déjà commercialisé, indiquait qu'il pouvait y avoir des problèmes chez les personnes qui avaient des antécédents neuropsychiatriques. J'imagine que l'information figurant dans les monographies du produit publiées dans ces pays se trouvait dans le consentement éclairé.
    Je n'ai jamais vu ce document, mais il appartenait aux coordonnateurs du site d'essai clinique ou aux chercheurs d'informer les patients qui y participaient. Je ne sais pas comment l'information a été transmise aux militaires qui ont participé à l'essai.
    C'est ce manque de clarté qui me dérange. Vous avez mentionné que le MDN se trouvait sur le terrain. Je me demande si le ministère avait un registre. Est-ce qu'il a recueilli des données?
    Quelqu'un sait-il si le MDN surveillait ce qui se passait avec ces militaires et a-t-il recueilli des données en vue de faire un suivi?
    Quelqu'un parmi vous le sait-il?
    Personnellement, je ne sais pas ce qui s'est réellement produit dans le cadre de l'essai clinique. J'ai lu le rapport du vérificateur général, et je n'ai aucune raison de ne pas ajouter foi à ce qu'il dit concernant l'essai. C'est encore lié aux registres, je crois.
    Qui pourrait nous donner cette information? À qui pourrions-nous nous adresser pour avoir la réponse à cette question?
    Il se peut que les dossiers médicaux des patients indiquent s'ils ont rencontré un médecin dans le cadre de l'essai clinique. Autrement, je ne vois pas très bien où vous pourriez regarder.
    D'accord.
    Ce que je peux vous dire, c'est que le rapport du vérificateur général recommandait à Santé Canada d'améliorer le mécanisme de surveillance des essais cliniques. En 2001, le gouvernement fédéral a ajouté le titre 5 au règlement, qui resserre les obligations de surveillance du promoteur des essais cliniques. L'année suivante, un programme d'inspection des sites d'essai clinique a été instauré. Donc, depuis 2002, Santé Canada s'appuie sur un bon programme d'inspection des pratiques cliniques. Certaines modifications apportées au titre 5 et dans les pratiques d'inspection donnaient suite aux recommandations du rapport visant Santé Canada. Je ne peux pas dire ce qu'il en est pour le MDN.
    Merci. Cela met fin à notre période de questions.
    Nous allons donner une minute environ aux groupes qui souhaitent apporter une conclusion. Nous pouvons commencer avec la Dre Barbara Raymond, de l'Agence de la santé publique.
(1650)
    J'aimerais simplement vous remercier pour votre attention et pour vos questions, et je tiens à réitérer que les recommandations font actuellement l'objet d'une revue exhaustive. Nous prévoyons publier la prochaine version des recommandations sur la prévention et le traitement du paludisme dans le courant de 2017.
    Merci.
    Merci.
    Je donne maintenant la parole au brigadier-général MacKay, du ministère de la Défense nationale.
    À mon tour, je voudrais réitérer mes remerciements pour l'occasion que vous nous avez donnée de témoigner et pour l'intérêt que vous portez à la santé et au bien-être de nos anciens combattants. Nous collaborons très étroitement avec Anciens Combattants Canada pour faire en sorte que les personnes qui sont malades à cause de leur travail au sein des Forces armées canadiennes reçoivent les meilleurs soins possible.
    Comme je l'ai dit, nous sommes très au fait des travaux de recherche sur la méfloquine et des opinions qui circulent. Nous nous tenons à l'affût des développements afin d'être en mesure, de pair avec notre autorité réglementaire et le comité consultatif, de prendre les décisions qui s'imposent au sujet de la chimioprophylaxie antipaludique. Merci.
    Merci.
    Et maintenant, nous entendrons le Dr John Patrick Stewart, représentant le ministère de la Santé.
    À l'instar de mes deux collègues, je tiens à remercier le Comité de nous avoir donné la possibilité de venir expliquer le rôle de Santé Canada dans la surveillance des produits, ainsi que la démarche du ministère au fil de l'évolution du profil de l'innocuité d'un médicament pour que l'étiquette rende compte de l'état des connaissances sur les avantages et les risques. Nous espérons que l'information que nous avons fournie sera utile au Comité. L'étude que vous avez entreprise est très complexe et nous avons très hâte de prendre connaissance de vos recommandations.
    Merci.
    J'aimerais vous rappeler, chers témoins, que si vous avez quoi que ce soit à ajouter à votre témoignage, vous pouvez transmettre un document par courriel au greffier, qui se chargera de le distribuer aux membres du Comité.
    Au nom de mes collègues, je vous remercie tous de ce que vous avez fait pour les femmes et les hommes qui ont servi notre pays, et d'être venus nous rencontrer aujourd'hui.
    Je veux souligner par ailleurs que nous avons lancé aujourd'hui, à la Chambre du Sénat, la 21e Semaine des anciens combattants. Tous les députés ici présents se rendront dans leur circonscription la semaine prochaine pour remercier les femmes et les hommes qui ont contribué à la grandeur de notre merveilleux pays. Au nom du Comité, je voudrais dire merci à ces femmes et à ces hommes qui ont servi notre pays.
    Nous allons faire une pause de cinq minutes, puis nous continuerons la séance à huis clos.
    [La séance se poursuit à huis clos.]
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