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SECU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de la sécurité publique et nationale


NUMÉRO 017 
l
3e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 11 mai 2010

[Enregistrement électronique]

(1530)

[Traduction]

    Je déclare la séance ouverte.
    Nous en sommes à la 17e séance du Comité permanent de la sécurité publique et nationale et nous tenons aujourd'hui une séance d'information sur le rôle du Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS) à l'échelle internationale.
    Les témoins que nous allons entendre au cours de cette première heure, représentent le Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité. Nous accueillons l'honorable Gary Filmon, président, et Susan Pollak, directrice exécutive.
    Merci d'avoir répondu à notre invitation. Comme vous le savez, vous allez disposer, conformément à l'usage, de 10 minutes pour présenter un exposé, après quoi nous passerons aux questions et aux observations.
    Monsieur, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président. J'aimerais d'abord vous remercier de m'avoir invité à prendre la parole devant vous aujourd'hui. Je suis heureux de me retrouver ici à titre de président du Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité. Je suis accompagné de Susan Pollak, notre directrice exécutive. Nous sommes en outre accompagnés de plusieurs de nos principaux collaborateurs qui sont ici à titre d'observateurs et, au cas où il y a quelque chose que nous aurions oublié, nous avons également demandé à Steve Bittle, notre directeur de la recherche de se joindre à nous, ainsi que Sylvie Roussel, notre conseillère juridique principale et plusieurs de nos analystes de recherche.
    J'aimerais profiter de l'occasion pour décrire brièvement le rôle et les responsabilités du CSARS. La dernière fois que des représentants du CSARS ont comparu devant ce comité était en 2009 et, comme la composition de votre comité a changé entre-temps, j'aimerais profiter de l'occasion pour décrire brièvement le rôle et les responsabilités du CSARS, après quoi, il me fera plaisir de répondre à vos questions.
    Je vous dirai d'abord qu'ayant servi près de neuf ans au CSARS — période durant laquelle j'ai été régulièrement en contact avec de nombreuses organisations aux mandats similaires — je suis convaincu que le modèle canadien est et est reconnu comme étant l'une des fonctions de surveillance les plus solides au monde. Cela ne veut pas dire que le CSARS est à l'abri des changements et des améliorations, mais simplement qu'il constitue un outil efficace pour aider à faire en sorte que l'agence du renseignement de sécurité du Canada, le SCRS, rend bien compte de ses activités.
     Comme vous le savez sûrement, le CSARS a vu le jour au même moment que le Canada a créé le SCRS, son service civil de renseignement de sécurité. Avec l'adoption de la Loi sur le SCRS en 1984, le Canada est devenu un des premiers gouvernements démocratiques du monde à établir un cadre juridique détaillé pour les activités de son service de sécurité. Tout aussi important, la Loi sur le SCRS prévoyait un cadre obligeant le SCRS à rendre compte de l'exercice de ces pouvoirs — un cadre qui, dans son intégralité, a résisté à l'épreuve du temps.
    Plus précisément, la Loi sur le SCRS définit le mandat de l'État et les limites du pouvoir dont il dispose pour mener ses activités de renseignement de sécurité. Elle décrit également la façon de surveiller le travail effectué par le service au moyen d'un système rigoureux de contrôles politiques et judiciaires, y compris deux organes — munis chacun d'un mandat distinct — chargés de surveiller le nouvel organisme.
     Je me garderai de décrire en détail le rôle de l'inspecteur général du SCRS, mais je dirai simplement qu'il s'agit d'un organisme interne qui procure au ministre de la Sécurité publique du Canada un service de surveillance expert à l'égard des activités du SCRS. De son côté, le CSARS est un organisme de surveillance externe qui n'est pas rattaché à un ministre, mais qui relève directement du Parlement, c'est-à-dire à vous, et par conséquent à tous les Canadiens et Canadiennes. Le rôle du CSARS est relativement simple à décrire, mais plutôt complexe à exécuter. Le comité exerce deux fonctions fondamentales: examiner les activités du SCRS et faire enquête sur les plaintes portées contre cet organisme. En vertu de la loi, le CSARS a le pouvoir absolu d'examiner toutes les activités du service et a libre accès à tous ses dossiers, quelle que soit leur classification. Seuls les documents confidentiels du Cabinet font exception.
    Nos études se font en évaluant les activités et les opérations du service par rapport à quatre instruments, qui forment ensemble le cadre législatif et stratégique du service. Ce sont la Loi sur le SCRS, les directives ministérielles, les exigences nationales en matière de renseignement de sécurité et les politiques opérationnelles du SCRS.
    Dans le cadre de chaque étude, le comité examine plusieurs questions essentielles, notamment: Le SCRS était-il fondé à suspecter une menace à la sécurité du Canada? Le niveau d'enquête était-il proportionnel à la gravité de la menace? Les échanges d'information entre le SCRS et ses partenaires canadiens et étrangers étaient-ils conformes aux ententes et aux mises en garde relatives à de tels échanges? Dernière question, mais non la moindre, l'enquête a-t-elle respecté les droits des personnes qui prenaient part à des activités légales comme des protestations ou des actes de dissidence?
     En règle générale, nos études durent plusieurs mois et comprennent la consultation de milliers de pages de documents par le personnel du CSARS, ainsi que de nombreuses discussions avec le personnel du SCRS. Une fois terminée, l'étude est envoyée au directeur du SCRS et à l'inspecteur général; dans certains cas, nous en faisons parvenir une copie au ministre de la Sécurité publique. Des résumés déclassifiés de ces travaux, qui sont expurgés afin de protéger la sécurité nationale et la vie privée des intéressés, figurent aussi dans le rapport annuel du CSARS au Parlement.
(1535)
     Si le rapport annuel du CSARS est notre premier véhicule de communications pour informer le Parlement et le public de nos travaux, le CSARS dispose également d'un modeste programme de communications. Nous répondons aux demandes d'information des médias et participons à des symposiums nationaux et internationaux qui se rapportent à notre travail; nous participons également à des séminaires présentés dans des universités canadiennes pour expliquer le rôle du CSARS aux étudiants qui font des études dans ce domaine ou dans des domaines connexes. Le site Web du CSARS est une autre source d'information utile au public. On y trouve en effet tous les rapports annuels du CSARS; des discours et présentations; des documents d'information et d'autres publications; et une description de ce que nous sommes et de nos activités.
     En ce qui concerne la question des plaintes, vous êtes sans doute au courant que le CSARS étudie les plaintes portées par des particuliers ou des groupes contre le SCRS. Ces plaintes se divisent en quatre catégories. Elles peuvent viser les activités du service, quelles qu'elles soient; les refus d'habilitations de sécurité à des fonctionnaires ou à des entrepreneurs au service du gouvernement fédéral; les plaintes liées à la sécurité nationale dont la Commission canadienne des droits de la personne peut saisir le CSARS; enfin, mais très rarement, les rapports ministériels relatifs à la Loi sur la citoyenneté.
    Lorsque le CSARS reconnaît sa compétence en la matière, l'examen de la plainte se fait lors d'une audience quasi-judiciaire présidée par un membre du comité dont le rôle est semblable à celui d'un juge. Une fois l'audience terminée, le membre responsable envoie un rapport contenant ses constatations et ses recommandations au ministre, au directeur du SCRS et, dans les cas concernant l'habilitation de sécurité, à l'administrateur général du ministère concerné. Nous fournissons également au plaignant un compte rendu déclassifié de notre enquête, dans lequel nous lui communiquons le maximum d'information possible sans déroger à notre obligation de protéger la sécurité nationale.
     Pour le CSARS, la réunion des études et des plaintes sous un seul organisme s'est révélée avantageuse. Les études nous apportent les connaissances nécessaires pour évaluer et approfondir les plaintes; de leur côté, les plaintes nous ouvrent une autre « fenêtre » sur les opérations du SCRS, particulièrement en ce qui concerne leurs répercussions sur la vie des Canadiens et des Canadiennes ordinaires. Dans certains pays, ces fonctions demeurent séparées, mais l'expérience canadienne nous donne à penser que leur réunion sous un même toit comporte des avantages réels.
    Qu'elles soient à propos des études ou des plaintes, les recommandations du CSARS ne sont pas exécutoires. Le plan du Parlement ne prévoyait pas que le CSARS se substituerait au directeur du SCRS, qui relève du ministre, ni au ministre, qui est comptable devant le Parlement. Néanmoins, le SCRS a mis en oeuvre la plupart des recommandations du CSARS et a reconnu publiquement que le CSARS avait fait de lui un meilleur organisme au fil des ans. À la fin de l'année 2003, le directeur du SCRS, Ward Elcock, a déclaré lors d'une conférence publique importante, et je cite:
« Vingt années de surveillance incessante ont donné lieu à de nombreuses recommandations sur la façon dont nous pourrions faire les choses différemment. Bon nombre de ces recommandations ont amené le Service à apporter des ajustements à ses procédures de gestion. Les observations du CSARS ont porté sur le fonctionnement même du Service, y compris la manipulation des sources, les méthodes d'enquête, les décisions en matière de ciblage et d'autres fonctions de base. » [...] « Partageons-nous toujours les vues du CSARS? Pas toujours, mais là n'est pas la question. Il s'agit de veiller à ce que le processus de surveillance continue de susciter le débat sur les façons d'assurer le respect des principes de la loi au fur et à mesure que nous évoluons et que nous nous adaptons aux nouvelles menaces. C'est ce que voulaient les législateurs. »
    Après cet aperçu du CSARS, j'aimerais prendre quelques minutes de plus pour vous parler de certains problèmes qui nous préoccupent, les membres du CSARS et moi-même, concernant des activités du SCRS à l'étranger.
     Je tiens d'abord à vous rappeler que tous les membres et le personnel du CSARS sont « astreints au secret à perpétuité », comme le prévoit la Loi antiterroriste adoptée en 2001. Par conséquent, bien que j'aie le droit de parler du travail du CSARS ainsi que de nos principales préoccupations et observations, je ne peux divulguer aucun détail opérationnel ni information classifiée. Malgré cette contrainte, je crois être en mesure de vous formuler des commentaires utiles pour orienter votre examen des activités du SCRS à l'étranger.
(1540)
     Premièrement, le gouvernement et le SCRS ont clairement indiqué qu'au cours des dernières années, le SCRS a élargi ses opérations à l'étranger conformément à son mandat en matière de renseignement de sécurité, c.-à-d. pour protéger la sécurité nationale au Canada. Cela n'a rien de surprenant étant donné l'envergure mondiale de la menace terroriste et la circulation sans limites de l'information et des biens dans le monde moderne. Pour moi, il ne fait aucun doute que la loi autorise le SCRS à agir de cette manière et qu'elle est fondée à le faire en vue d'exécuter son mandat, décrit à l'article 12 de la Loi sur le SCRS.
     Cela dit, le passage d'un rôle de simple liaison à un rôle lui permettant de se livrer à des opérations clandestines à l'étranger marque une rupture radicale avec la longue période où le SCRS se concentrait surtout sur le renforcement de la sécurité nationale depuis l'intérieur du pays. Du point de vue du CSARS, un certain nombre de critères entrent en ligne de compte pour que le SCRS puisse exercer efficacement ses activités en matière de renseignement de sécurité à l'étranger.
    D'abord, le SCRS a besoin que le gouvernement lui fournisse les directives appropriées pour exercer efficacement ces fonctions élargies et d'une manière conforme aux priorités gouvernementales.
     Deuxièmement, le SCRS doit disposer des ressources nécessaires pour mener à bien ses opérations accrues à l'étranger. Il a besoin de fonds, mais aussi de formation.
     Troisièmement, l'étendue et la vitesse du passage d'activités principalement nationales à des activités internationales doivent être proportionnelles et adaptées à la menace. De plus, les avantages doivent être mesurables.
     Et enfin, la bifurcation des fonctions d'enquête du SCRS doit être contrôlée pour déterminer si elle crée un système réel ou perçu à deux composantes au sein de la communauté des agents du renseignement du service, c'est-à-dire ceux qui travaillent à l'étranger par rapport à ceux qui travaillent au pays, et si des problèmes risquent d'en découler à long terme.
     Je tiens à dire, pour conclure, que pendant plus de 24 ans, le CSARS s'est employé à accomplir son travail d'une manière objective, équitable et équilibrée. Nous sommes conscients que dans une société libre, nous devons utiliser toutes les ressources à notre disposition pour contrer les menaces à la sécurité de notre pays, la plus grave aujourd'hui étant le terrorisme. Mais nous devons en même temps maintenir les principes de la responsabilité, de l'équité, de la primauté du droit et du respect des droits individuels.
    J'avoue que cette tâche est plus difficile à assumer depuis le 11 septembre 2001, car des allégations d'abus des droits de la personne au nom de la lutte contre le terrorisme ont été rapportées dans de nombreux pays, et le Canada n'est pas exempt à ce chapitre. Le cas de Maher Arar, que le CSARS avait étudié avant que le gouvernement fédéral ne nomme une commission d'enquête indépendante, illustre parfaitement mon propos.
    Les membres et le personnel du CSARS sont très fiers de constater que depuis sa création en 1984, le comité a contribué à rendre le SCRS plus professionnel. Nous sommes aussi déterminés à atteindre cet objectif que nous l'étions à l'époque.
     Je vous remercie de votre attention et je serai heureux de répondre à vos questions.
    Je vous remercie.
    La parole est maintenant au Parti libéral qui dispose de sept minutes. Monsieur Holland.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Filmon, je vous remercie de votre exposé, du travail que vous accomplissez et du temps que vous nous consacrez.
    M. Coulombe, directeur adjoint en charge de la collecte à l'étranger a confirmé qu'il se peut que les renseignements transmis par la tristement célèbre police secrète afghane aient pu effectivement être tirés, sous l'effet de la torture, de détenus qui lui auraient été remis par les Forces canadiennes.
    Êtes-vous en mesure de nous dire si le CSARS, chargé envers le SCRS d'une mission de surveillance, s'est penché sur le rôle que le SCRS aurait joué dans cette affaire?
(1545)
    Comme vous le savez, notre plan de travail est établi sur un an, et le rôle qu'aurait joué le SCRS à l'égard des détenus afghans est justement un des sujets inscrits à notre plan de travail pour l'année.
    Vous entendez donc vous pencher sur la question?
    Oui.
    J'aimerais savoir qu'elle est, à première vue, votre impression. Je relève que vous n'avez pas, dans votre exposé, évoqué le cas de M. El Maati, de M. Nureddin ou de M. Arar.
    Le comité a accueilli M. O'Brian, dont les propos concernant la position du SCRS en matière d'échanges de renseignements avec des pays ou des individus qui ont pu se livrer à la torture, n'étaient pas des plus clairs. Est-ce, là encore, un sujet qui a retenu votre attention? Pensez-vous que les directives ministérielles à cet égard soient suffisamment précises? Compte tenu de ce qu'en ont dit M. O'Brian et M. Coulombe, et compte tenu de ce qui est arrivé à M. El Maati, à M. Nuredding et à M. Arar, est-ce, d'après vous, quelque chose qui continue?
    Je dois dire que c'est uniquement par voie de la presse que j'ai eu connaissance des commentaires auxquels vous venez de faire allusion.
    Mais vous avez bien lu les conclusions du juge Iacobucci?
    Non, j'en n'ai pas fait une lecture détaillée.
    Vous n'avez pas lu les conclusions du juge Iacobucci?
    Pas intégralement, je n'en ai lu que des résumés.
    Étant donné, monsieur, que vous exercez une mission de surveillance, ce que vous me dites là me préoccupe beaucoup. Si je pouvais obtenir de vous que vous preniez connaissance des conclusions du juge Iacobucci, qui s'est livré à un examen... On a beaucoup parlé de M. Arar... mais honnêtement, je trouve cela un peu choquant. Pourrais-je vous persuader de prendre connaissance de tout cela et d'y réfléchir à la lumière de la question que je vous ai posée?
    Auriez-vous l'obligeance de me la poser?
    Ma question est la suivante. En tant qu'organisme ayant pour mission de surveiller les activités du SCRS... Selon M. Coulombe, il est possible qu'en Afghanistan, les renseignements qui nous ont été transmis, aient été tirés, sous l'effet de la torture, de détenus remis aux autorités afghanes.
    Selon M. O'Brian qui, depuis plus de 30 ans, occupe des postes de responsabilité au sein du SCRS, on continue à échanger des renseignements avec des États qui se livrent à la torture.
    Nous avons les conclusions du juge Iacobucci, selon qui, trois Canadiens innocents ont été détenus et torturés à l'étranger, grâce en partie à des renseignements inexacts transmis par le renseignement canadien. Il y a l'affaire Arar.
    Vous venez de dire que la question est inscrite à votre plan de travail, mais je voudrais savoir pourquoi vous ne lui accordez pas une plus grande place dans l'ordre de vos priorités?
    Deuxièmement, compte tenu de ces diverses considérations, que pensez-vous du fait que le Canada procède à des échanges de renseignements avec des États qui se livrent à la torture?
    Je précise que nous nous sommes livrés à plusieurs examens des activités du service concernant ces divers individus et ce qui leur est arrivé. On m'a dit, et c'est sans doute aussi ce que vous ont dit plusieurs hauts responsables du service, que lorsqu'un renseignement nous parvient, il est souvent impossible de savoir comment il a été obtenu. C'est pourquoi, dans le cadre de nos enquêtes, nous veillons à ce que le service n'accepte pas les renseignements qui lui sont transmis sans chercher à les confirmer par des recoupements.
    Étant donné la nature de la mission dont ils sont chargés, et de leurs sources de renseignement, ils ne sont guère en mesure de savoir au moment où ils reçoivent un renseignement si celui-ci a été obtenu ou non par l'emploi de la torture.
    Ils ont eu à maintes reprises l'occasion de le rappeler publiquement. On ne peut pas dire que cela ait été révélé par le juge Iacobucci. Cette précision figurait déjà dans le rapport O'Connor et dans de nombreux autres rapports.
(1550)
    C'est vrai, mais la situation n'aurait à cet égard pas évolué. C'est justement là où je veux en venir.
    Non. Au contraire, les choses ont changé —
    Si vous me permettez de poser la question, d'après les conclusions du juge Iacobucci — qui viennent, effectivement, à la suite des conclusions du juge O'Connor — il est clair que des responsables du renseignement affirment que l'on ne peut pas savoir si tel ou tel renseignement a été obtenu sous l'effet de la torture.
    Si vous effectuez, sur la Syrie, une recherche Google, vous saurez que les autorités de ce pays pratiquent la torture. Il y a de fortes chances, donc, que les individus qui passent par une prison syrienne, soient torturés. Il n'est pas nécessaire pour le savoir de faire de longues recherches.
    Ce qui me préoccupe, c'est ce train de responsables que l'on continue à accueillir devant le comité, où ils tiennent des propos ambigus concernant nos relations avec des pays qui pratiquent la torture, comme on vient de le voir récemment au sujet des détenus que nous avons remis aux services afghans.
    Étant donné que vous êtes chargé d'une mission de surveillance et qu'il y a une directive ministérielle qui interdit d'échanger des renseignements dans de telles conditions, ne serait-il pas, d'après vous, important d'examiner de plus près la question? Ça ne vous gêne pas de voir que ça continue, malgré une directive ministérielle?
    Il vous faut d'abord, me semble-t-il, décider si vous êtes satisfaits ou non des propos ambigus qui vous ont été tenus. Une telle ambiguïté ne ressort pas, je crois, de ce que je vous ai moi-même dit.
    Les examens auxquels nous nous sommes livrés démontrent que les directives sont claires et que le service y est acquis. Cela dit, il s'agit là de choses...
    Une question s'il vous plaît? Il ne me reste pas beaucoup de temps. Si ce n'est pas à vous, en tant qu'organisme indépendant de surveillance, qu'il appartient de dissiper les ambiguïtés et de poser des questions embarrassantes, qui, autres que les membres de l'opposition, va pouvoir obtenir les réponses nécessaires?
    Nous estimons que la directive est claire et que l'approche du service en ce domaine est, elle aussi, claire.
    Son approche est peut-être claire, mais les résultats le sont moins...
    Je suis désolé, mais nous allons devoir nous en tenir là.
    Si on vous dit que dans tel ou tel cas, il n'a pas été possible de dire si... il faut les croire sur parole. Cela ne veut aucunement dire, cependant, qu'ils n'ont pas reçu à cet égard des directives claires.
    Madame Mourani, vous avez la parole pour sept minutes.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Filmon et madame Pollak, je vous remercie d'être présents tous les deux. Mme Pollak avait déjà comparu devant le comité en 2009 ou 2008, si ma mémoire est bonne. Vous disiez alors avoir des doutes au sujet des allégations de torture et du SCRS, mais ce n'est pas mon propos.
    J'aimerais qu'on parle du cas d'une citoyenne canadienne, journaliste et auteure. Il s'agit d'une personne qui a dénoncé les extrémistes islamiques et qui a porté plainte contre le SCRS. J'aimerais parler de cette plainte. Elle a déposé une plainte parce que le SCRS a consulté son dossier de crédit le 24 août 2004.
     La plainte a été retenue par vos services et plusieurs rencontres ont eu lieu. La citoyenne en cause est Mme Djemila Benhabib. Vous devez connaître le dossier puisque vous avez signé plusieurs rapports. Mme Benhabib a porté plainte contre le SCRS qui semble avoir enquêté sur elle, et qui a fait une demande à Equifax Canada sur son crédit. Le juge Speaker est arrivé à la conclusion que tout allait bien.
    J'ai lu le rapport et j'y ai vu énormément de complaisance. J'en suis arrivée à me demander si le Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité traitait correctement les plaintes. Je m'explique. D'une part, un document contient une entrevue avec les différentes parties en anglais, car Mme Benhabib n'a pas pu avoir de service en français. C'est inacceptable pour une institution fédérale. J'aimerais donc savoir pourquoi elle n'a pu obtenir de service en français.
    D'autre part, dans ce document, Mme Roussel, qui représente le Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité, lui dit en français qu'il y aura une entrevue et que le SCRS va témoigner sans qu'elle soit présente. Il s'agit donc d'une audience ex parte. Dans cette audience ex parte, un sommaire sera déclassifié et, dans la mesure du possible, on le lui remettra. Cela lui donnera un aperçu, compte tenu des contraintes de sécurité et des obligations légales de protéger l'information classifiée. On lui dit donc qu'elle aura un résumé.
    J'ai vu le rapport du juge. En ce qui a trait à la preuve présentée par le SCRS, tout ce qu'on pouvait lire, c'était des bouts de phrases comme: « Le témoin a déposé », « Le témoin a ajouté », « Le témoin a témoigné », « Il a indiqué que selon son expérience », et « Le témoin a dit ». Qu'est-ce qu'il a dit? On ne le sait pas. C'est tellement caviardé qu'on ne sait même pas ce qu'ils ont contre Mme Benhabib. On ne sait absolument pas ce que le SCRS a contre Mme Benhabib pour justifier une enquête sur elle.
    Ma question est simple. Le SCRS avait-il des motifs pour enquêter sur Mme Benhabib? Le SCRS avait-il des raisons de soupçonner une menace pour la sécurité du Canada selon l'article 12?
    Qu'en pensez-vous, madame Pollak?
    Monsieur le président, j'espère que ce silence n'est pas compté dans mon temps.
(1555)

[Traduction]

    Il reste trois minutes.

[Français]

    Monsieur le président, on ne me répond pas.

[Traduction]

    Vos trois minutes commenceront au début de la réponse.

[Français]

    Pour l'instant, je n'ai pas obtenu de réponse et le temps passe.
    Madame Pollak, avez-vous une réponse?

[Traduction]

    J'aimerais, si vous me le permettez, répondre au nom du comité.
    Vous êtes au courant de la plainte qui a été formulée. Elle a été examinée par un membre du comité qui a rendu une décision à cet égard. Les renseignements qui pouvaient être rendus publics l'ont été.
    En ce qui concerne les renseignements pouvant être rendus publics à l'issue d'une séance à huis clos, nous sommes tous soumis à un certain nombre de contraintes se rattachant à la sécurité nationale. Vous avez tous les renseignements qui peuvent être rendus publics.

[Français]

    Monsieur Filmon, rien n'est rendu public, absolument aucune information n'a été donnée. Il y a eu une audience ex parte et Mme Benhabib n'a eu aucune information. Le rapport du juge Speaker ne contient rien, seulement les mots « le témoin a déposé » ou « le témoin a dit ». Je me demande très franchement si le comité de surveillance joue bien son rôle auprès du SCRS. J'en doute, monsieur Filmon, j'ai de gros doutes.
     J'aimerais savoir une chose. L'article 12 prévoit clairement que le SCRS doit faire des enquêtes strictement sur des personnes ou des organisations qu'il considère constituer une menace pour la sécurité publique du Canada. Est-ce exact?

[Traduction]

    Oui.

[Français]

    Alors, pourquoi a-t-on enquêté sur Mme Benhabib? Constitue-t-elle une menace pour la sécurité du Canada?

[Traduction]

    Nous ne sommes pas en mesure de vous le dire, mais nous pouvons vous assurer que ce renseignement a été communiqué au président de la Chambre, qui était chargé de s'en informer. Aucun renseignement ne lui a été refusé.

[Français]

    Je comprends donc que le SCRS est au-dessus des lois et des droits, et que le comité de surveillance ne fait pas son travail. C'est ce que je comprends, parce que Mme Benhabib, si...

[Traduction]

    Notre mission consiste à assurer que le SCRS ne se croit pas tout permis, qu'il respecte les dispositions en vigueur et c'est l'assurance que nous sommes en mesure de vous donner à l'issue de notre enquête.

[Français]

    Si le SCRS n'est pas au-dessus de la loi, selon l'article 12, Mme Benhabib constitue une menace pour la sécurité du Canada, n'est-ce pas? Vous ne pouvez pas répondre. Très bien, j'aimerais savoir pourquoi...
(1600)

[Traduction]

    La réponse est qu'effectivement nous avons enquêté sur la question et nous sommes en mesure de vous assurer que le SCRS a agi conformément aux lois en vigueur.

[Français]

    Je comprends que le SCRS se permet d'enquêter sur tout le monde et n'importe comment.
    Me reste-t-il une seconde, monsieur le président?

[Traduction]

    Il vous reste 30 secondes.

[Français]

    J'aimerais savoir pourquoi elle n'a pas eu droit à un juge francophone pour une cause aussi dure et aussi importante. Pourquoi?
    Une voix: Il y a consultation.
    Mme Maria Mourani: Pour savoir s'il y a un juge francophone? Ça va mal, monsieur le président!

[Traduction]

    Permettez-moi de demander à Mme Roussel, notre conseillère juridique principale, de vous expliquer cela.

[Français]

    Le comité a l'obligation de garder ses enquêtes secrètes. L'article 48 de la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité dit de façon spécifique que les enquêtes du comité sont tenues en secret. La loi dit également que les parties, lorsqu'elles sont devant le comité, n'ont pas un droit absolu de connaître les représentations de l'autre partie. Le comité a des règles qui prévoient qu'un membre, lorsqu'il a la preuve devant lui, doit tâcher de déterminer comment il va assurer l'équilibre entre les droits des parties et la sécurité nationale. Cet exercice se fait dans tous les cas de plainte, mais personne n'a le droit absolu de connaître l'information que l'autre partie va amener. Dans tous les cas, dans tous les dossiers, le comité tente de communiquer le plus d'information possible au plaignant. Il y a un exercice de caviardage qui se fait et on tente, dans la mesure du possible, de donner le plus d'information au plaignant.
    Pourquoi n'a-t-elle pas eu droit à un juge francophone? On ne répond pas à mes questions.
    En ce qui a trait à la question des juges francophones, cela dépend de la disponibilité des membres. De plus, il y a traduction simultanée lorsque les membres le demandent ou lorsqu'une partie ou un témoin le demande.
    Il n'y a pas eu de traduction dans ce cas. Il n'y a pas de juge à ce que je comprends.

[Traduction]

    Madame Mourani, je vous demande de respecter les règles du comité.
    La parole passe à M. Harris.
    Merci, monsieur le président.
    Je tiens à remercier nos témoins de l'exposé qu'ils nous ont présenté.
    J'aurais, pour commencer, une question d'ordre général, concernant la surveillance que vous exercez à l'égard des activités du SCRS. Nous respectons le fait que le CSARS est un organisme civil de surveillance qui, avec l'inspecteur général du service, joue un rôle que nous estimons essentiel. Je dirais même que cet organisme pourrait servir de modèle à la GRC ou à nos forces armées.
    Cela dit, pourriez-vous nous en dire un peu plus quant au fait que le SCRS est passé d'un simple rôle de liaison à un rôle lui permettant de se livrer à des opérations clandestines à l'étranger? Cela marque en effet une rupture radicale par rapport à la période précédente. La surveillance que vous exercez s'étend-elle à ces nouvelles opérations?
    La semaine dernière, M. Coulombe est venu témoigner devant le comité sur l'Afghanistan et a dit à cette occasion qu'il existe effectivement un accord ou un partenariat avec le NDS, organisation dont on sait qu'elle se livre, en Afghanistan, à des violations des droits de la personne. Est-ce là de quelque chose de nature à retenir votre attention afin justement de vous assurer que même à l'étranger le SCRS s'en tient aux directives?
    Merci.
    Je tiens à préciser que nous sommes un organisme de surveillance et non un organisme de contrôle. Si, en effet, nous étions un organisme de contrôle, nous aurions à l'oeil l'action du service au jour le jour alors que notre mission consiste à exercer une surveillance a posteriori. Parmi les diverses activités du service, nous nous penchons sur certaines questions qui retiennent effectivement notre attention. Nous finissons, comme cela, à nous pencher assez systématiquement sur tous les aspects de ses opérations.
    En ce qui concerne la question que vous avez posée au sujet de ses opérations à l'étranger, la réponse est que le service procède à la collecte de renseignements et que le public a fait une assez bonne idée de ses activités en Afghanistan. Pour contribuer à la sécurité des Canadiens en poste là-bas, le service recueille des renseignements essentiels concernant par exemple les récents enlèvements de citoyens canadiens. J'ajoute que de nombreux Canadiens se trouvaient au Liban lors d'une recrudescence des activités du Hamas et que la sécurité exigeait que l'on dispose de renseignements opérationnels.
    Au fil des ans, la sécurité des Canadiens a entraîné une évolution des besoins en matière de renseignement. Dans le cadre d'au moins trois examens distincts, nous avons pu nous assurer que l'action du service est conforme aux dispositions de la loi qui l'a créé, à ses politiques intenses, aux directives du ministre et aux exigences de la sécurité nationale.
(1605)
    Je dois néanmoins vous dire qu'en tant que Canadien je m'inquiète du fait qu'un service canadien de renseignement ait conclu un accord ou un partenariat avec une organisation telle que le NDS qui n'a pas bonne réputation. J'aurais voulu que le CSARS exerce son pouvoir d'examen indépendant non seulement pour examiner les plaintes dont il est saisi, mais pour se pencher sur la situation et voir s'il n'y aurait pas lieu de s'inquiéter de la manière dont fonctionne le service.
    Nous nous penchons sur tous les accords qu'il conclut — tant sur les accords de coopération que sur les accords d'échange de renseignements. Ces accords sont maintenant, si je ne m'abuse, au nombre de 278 et concernent plus de 140 pays.
    Y a-t-il lieu de distinguer, donc, entre ce que le SCRS fait à l'étranger actuellement, et ce que pourrait faire un service canadien de renseignement extérieur? Ou, en plus d'être un service de sécurité intérieur, le SCRS est-il un service de renseignement extérieur?
    C'est une question, je pense, que vous allez devoir poser au directeur au sujet des activités opérationnelles du service, dans la mesure où il peut, bien sûr, vous répondre sur ce point.
    Nous avons donc, pour les besoins de la sécurité nationale et de la sécurité des Canadiens, conclu des accords avec 140 pays et les activités du service s'étendent au monde entier. Ce n'est guère le SCRS tel qu'il était conçu en 1984.
    Je n'ai pas dit que le service opère dans le monde entier. J'ai simplement dit que nous avons conclu 278 ententes avec plus de 140 pays. Il s'agit d'échanges de renseignements. Vous vous souvenez qu'après les attentats du 11 septembre, les analyses et les rapports portant sur ces attentats portaient tous à conclure que cette catastrophe était due à des carences au niveau des échanges de renseignements, au fait que nous n'étions pas parvenus à tirer toutes les conséquences des indices recueillis. Nous n'étions pas parvenus à réunir cette masse de renseignements épars en un tout cohérent qui aurait peut-être permis d'éviter la catastrophe. Depuis, l'échange et le partage de renseignements sont devenus aux yeux de tous les services de renseignement et de sécurité absolument essentiels.
    Entendu. Arrêtons-nous un instant sur cette question d'échange de renseignements.
    Selon le juge Iacobucci, le renseignement concernant un chauffeur de camion muni d'une carte d'Ottawa édité à l'intention des touristes a été transmis à un service de renseignement étranger et ce simple fait est en partie responsable des sévices subis par Ahmad El Maati en Égypte, et peut-être aussi en Syrie. Est-ce une circonstance sur laquelle vous seriez susceptibles d'enquêter pour vous assurer que le problème qui en est à l'origine a été réglé?
    Oui. Dans le cadre de notre enquête sur ce qui est arrivé à Maher Arar, enquête qui, je le précise, a eu lieu avant les travaux de la commission d'enquête, nous avons fait part d'un certain nombre de préoccupations, non pas en ce qui concerne le SCRS, mais il est clair que certains renseignements ont été transmis à des services étrangers et cela, s'est-on aperçu par la suite, sans être accompagnés des réserves qu'ils auraient dû nous inspirer.
    Toutes ces ententes prévoient, en effet, que les renseignements échangés doivent, le cas échéant, être accompagnés de réserves et de conditions...
    Tout cela est prévu dans ces divers accords. La question n'est donc pas de savoir s'il existe dans ce domaine des accords, car il en existe effectivement et notre enquête a permis d'en constater la régularité. La question est plutôt de savoir dans quelle mesure ces accords sont respectés par les autres services, par nos partenaires étrangers.
    Monsieur MacKenzie.
    Merci, monsieur le président. J'entends partager mon temps de parole avec M. Norlock.
    Je tiens à remercier nos témoins.
    Nous comprenons tous fort bien que nous ne sommes plus en 1984. Le monde a changé et cette évolution a obligé le SCRS à changer lui aussi.
    Je tiens tout de même à apporter une petite précision au sujet de ce qui a été dit dans un comité antérieur — non pas le nôtre, mais le comité sur l'Afghanistan — au sujet des problèmes qui se sont posés. Je demande aux représentants de la presse ou à toute personne qui s'intéresse à la question, de prendre connaissance, dans les bleus du 5 mai, du témoignage du représentant du SCRS. Ils pourront constater qu'un peu avant 17 h 15, un des membres du comité, M. Dosanjh, a posé au représentant du SCRS une question de caractère hypothétique. Il l'a plusieurs fois réitérée, bien que le représentant du SCRS ait dit souhaiter ne pas répondre à une question hypothétique.
    L'échange s'est poursuivi sous cette forme et enfin, M. Dosanjh a dit ceci:
Donc, ce que vous dites, c'est que si vous essayez d'obtenir des éléments de preuve pertinents qui confirmeraient ceux qui ont été obtenus sous la torture et si vous n'y arrivez pas —parce que vous vous trouvez sur un champ de bataille dans un pays déchiré par la guerre —, et si vous avez ce sentiment persistant que quelque chose pourrait arriver à nos troupes... Si vous tentez d'obtenir ces renseignements, mais sans succès, vous intervenez quand même sur la foi des renseignements dont vous disposez déjà si la vie de nos troupes en dépend.
    Personne au Canada ne s'attendrait à ce que le SCRS ou quelqu'un d'autre écarte un tel renseignement si cela risquait de mettre des vies en péril.
    Mon collègue a évoqué des accords que nous aurions conclus avec le NDS. Cent quarante-trois Canadiens ont perdu la vie en Afghanistan. Il ne peut assurément pas s'attendre à ce que le SCRS ne recueille pas tous les renseignements nécessaires, non pas, certes, par l'emploi de la torture, mais par l'intermédiaire de services étrangers. On espère simplement que le CSARS, dans le cadre de la mission qui lui est confiée, exerce un certain contrôle sur ce genre de situation.
    Quelqu'un souhaite-t-il ajouter quelque chose à ce que je viens de dire?
(1610)
    Comme je viens de le dire, justement, nous avons examiné les ententes en question. Nous estimons qu'elles sont conformes aux exigences de la situation, qu'elles précisent dans quelles conditions doivent avoir lieu ces échanges de renseignement, le genre de renseignements en cause, les restrictions et réserves qui doivent y être apportées, enfin tout ce qui, dans le cadre d'un tel échange de renseignements, vise un seul et unique objectif, la sécurité et la sûreté des Canadiens.
    Je vous remercie.
    Je tiens à remercier l'ensemble de nos témoins, et en particulier M. Filmon pour son exposé et son témoignage.
    J'aurais quelques questions à poser. Elles sont de caractère assez général et je les pose au nom des citoyens canadiens qui suivent la retransmission de cette séance.
    Vous avez dit que 278 ententes ont été conclues avec les services de 140 pays. Les fonctions que vous exerciez naguère avaient un caractère plus partisan... En tant que premier ministre et dirigeant politique, vous savez qu'on voit parfois se manifester, dans certains domaines, un esprit partisan, et c'est même parfois le cas ici. Je vous pose donc une question très simple et très directe. En tant que citoyen canadien, décoré de l'Ordre du Canada, en tant qu'homme chargé d'une mission importante, en tant qu'homme qui est dorénavant au-dessus de simples considérations politiciennes, estimez-vous que les Canadiens peuvent être fiers du SCRS et de l'action de votre propre organisme chargé de veiller au respect des droits des citoyens de notre pays au niveau, notamment, des droits de la personne et, surtout, de veiller à leur sécurité?
    Votre manière de poser la question suggère la réponse, mais —
    Vous me pardonnerez, monsieur. La question peut paraître tendancieuse, mais le public a le droit de savoir.
    Je comprends fort bien ce que vous voulez dire. Je peux vous répondre qu'au cours de mes neuf années au sein du CSARS, d'abord en tant que simple membre, puis en tant que président, j'estime avoir exercé mes fonctions sans le moindre esprit partisan.
     Les membres du comité savent que j'ai été nommé au comité par le gouvernement libéral de M. Chrétien, puis nommé président par le gouvernement libéral de M. Martin et que notre comité comprend des gens de diverses tendances politiques. Le comité s'est toujours acquitté de sa mission dans un esprit non partisan, dans le respect des diverses obédiences politiques de ses membres.
    Nous sommes pleinement conscients des responsabilités qui nous incombent et je peux vous assurer que, lorsque nous nous penchons sur les activités du service, notre principal souci est de protéger les intérêts de tous les Canadiens. Il nous faut pour cela faire preuve d'un maximum d'indépendance, à la fois à l'égard de l'opinion et des divers autres motifs qui pourraient nous inspirer; malheureusement, nous avons parfois dû relever des manquements. Nous ne mettons aucunement en cause, cependant, les motifs ou le professionnalisme des personnes en question. Comme dans toute autre organisation, il y a parfois des erreurs et nous en faisons état dans notre examen et dans nos rapports annuels.
    Il me semble juste d'ajouter qu'avec le temps le professionnalisme des agents du service s'est accru, ce qui a entraîné une amélioration de la manière dont ils font leur travail, et si vous croyez au progrès, vous admettez, je pense, que ce service est un bon exemple de gens qui ne cessent de s'améliorer et je crois d'ailleurs que chacun en est convaincu.
    Cela ne facilite aucunement notre travail, car il ne nous faut jamais perdre de vue qu'il s'agit du comportement d'êtres humains et que, effectivement, des erreurs sont parfois commises.
(1615)
    Il vous reste une demi-minute.
    Je vous remercie. N'est-il pas vrai que certains députés ont fait partie du CSARS? C'est le cas de l'honorable Bob Rae, non?
    C'est exact.
    Je vous remercie.
    Monsieur le président, ma question suivante est longue et j'attendrai le tour suivant pour la poser.
    Monsieur Wrzesnewskyj, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Filmon, vous avez fait l'éloge, dans votre exposé, du cadre législatif et opérationnel du SCRS et du contrôle parlementaire que le CSARS nous permet d'exercer. Estimez-vous que notre législation confère au SCRS des moyens et des pouvoirs suffisants pour qu'il puisse mener à bien la mission dont il est chargé?
    Oui.
    Si je vous pose la question, c'est que dans un article récent, M. Reid Morden qui, a une certaine époque dirigeait le SCRS, a dit, comme vous l'aviez vous-même très bien dit que, selon lui, les arrestations et enquêtes judiciaires préventives vont au-delà de ce qu'exige la sécurité nationale et portent atteinte aux droits des citoyens.
    Passons, maintenant, si vous le voulez bien, à une autre question. Je crois savoir que le SCRS n'interroge plus de prisonniers en Afghanistan. Est-ce exact?
    C'est une question qu'il vous faudra, je pense, poser au directeur.
    Bon. Si vous n'avez pas pour l'instant la réponse, elle devrait pouvoir être transmise au comité ultérieurement.
    Êtes-vous en mesure de nous dire à peu près combien de prisonniers ont été interrogés par le SCRS dans le cadre de nos opérations en Afghanistan?
    L'examen de la question des détenus en Afghanistan est, comme je le disais tout à l'heure, prévu dans notre plan de travail, mais nous n'avons pas encore en main ce genre de renseignements.
    Lorsque ces renseignements vous parviendront, pourriez-vous les transmettre au comité?
    Pourriez-vous également nous préciser le nombre de prisonniers qui ont été remis au NDS, le tristement célèbre National Directorate of Security?
    Sous réserve de la discrétion que nous imposent des considérations ayant trait à la sécurité nationale, c'est très volontiers que je vous ferai parvenir de tels renseignements.
    Je ne vous demande pas de nous dire combien d'agents du SCRS nous avons envoyés là-bas, simplement le nombre de personnes qu'ils ont interrogées. Étant donné que d'autres partenaires de l'OTAN rendent public le nombre de personnes qu'ils ont détenues et remises aux autorités afghanes, je ne vois pas en quoi la sécurité nationale vous empêcherait d'en faire autant.
    Vous avez remis un rapport sur l'affaire Khadr. Allez-vous en faire autant au sujet de M. Abdelrazik? N'en avait-il pas été question?
    Nous sommes en train d'examiner la question, mais d'une manière générale, nous ne divulguons pas le nom des personnes dont nous examinons le cas ou sur lesquelles nous enquêtons.
(1620)
    Une enquête est-elle en cours au sujet d'un citoyen canadien qui a été détenu au Soudan, un des pays qui, sur le plan des droits de la personne, a très mauvaise réputation? D'ailleurs, le président al-Bashir a été mis en accusation devant le tribunal pénal international.
    Faites-vous enquête sur les allégations voulant que son arrestation au Soudan ait fait suite à une demande en ce sens formulée auprès du gouvernement Khartoum par le SCRS?
    Permettez-moi de répondre. De manière générale, le comité ne fournit aucun détail au sujet des plaines dont il serait saisi. En effet, aux termes de l'article 48, les enquêtes sur les plaintes sont tenues en secret. De manière générale, donc, nous ne confirmons pas que le comité ait été ou non saisi d'une plainte, et nous ne donnons aucune précision au sujet des enquêtes.
    Cela étant, permettez-moi de reformuler ma question. À supposer qu'une plainte en ce sens ait été déposée au printemps dernier, et que certains indices aient porté à penser que le CSARS allait effectivement rédiger un rapport, dans combien de temps pourrait-on normalement s'attendre à voir remettre le rapport, comme cela a été le cas dans l'affaire Khadr?
    Le rapport sur l'affaire Khadr ne concerne pas une plainte. S'agissant d'une plainte, le temps nécessaire pour rédiger le rapport varie naturellement en fonction de la plainte et de la nature des allégations devant faire l'objet d'une enquête.
    Vous exercez, pour le compte du Parlement, une mission de surveillance, mais il ne vous est même pas possible de nous dire si le CSARS mène effectivement une enquête alors que de graves allégations ont été formulées à l'égard du SCRS, à qui l'on reproche de s'être rendu complice de l'arrestation d'un citoyen canadien qui affirme avoir été torturé pendant deux ans? Or, ces plaintes ont été déposées il y a déjà longtemps, mais nous ne pouvons même pas savoir s'il fera l'objet d'un rapport. Dans ces conditions-là, je suis bien obligé de me demander si le fonctionnement du SCRS mérite effectivement les éloges formulés à son égard au début de la séance.
    Passons, si vous le voulez bien, à une autre question...
    Je suis désolé, mais votre temps de parole est épuisé.
    Je dirais que oui. La seule différence se situe peut-être au niveau des considérations politiques.
    M. Borys Wrzesnewskyj: M'accordez-vous trois secondes?
    Vous avez largement dépassé votre temps de parole.
    Très brièvement. Vous pourrez nous transmettre...
    Je suis désolé, Borys, il ne nous reste assez de temps que pour une dernière intervention.
    Madame Glover, vous avez la parole.
    Je tiens, moi aussi, à vous remercier d'avoir répondu à notre invitation.
    Je comprends le besoin de discrétion sur les questions intéressant la défense nationale. Je vous félicite de la manière dont vous faites votre travail. Je sais que votre tâche n'est pas facile et nous apprécions hautement la compréhension dont vous faites preuve vis-à-vis de nos questions.
    Ma question est d'ordre plus général. Je voudrais, monsieur Filmon, vous amener à effectuer une comparaison. Dans votre exposé, vous avez dit que notre système est un des plus performants. Pourriez-vous, après un moment de réflexion, comparer ce système à celui d'autres pays, en faisant ressortir les bons et les mauvais côtés de part et d'autre. Pourriez-vous nous donner quelques éléments de comparaison par rapport à ce qui se fait dans les autres pays?
    Vous savez, ce que je peux vous dire sur ce point ne sera de ma part qu'une simple opinion.
    Nous nous réunissons régulièrement, tous les deux ans au moins, avec les représentants d'organisations de divers pays qui font essentiellement le même travail que nous. J'entends par cela les 10 ou 12 pays avec qui nous entretenons des rapports particulièrement bons. Vous avez sans doute entendu parler des « cinq yeux », mais il y a de nombreux autres pays avec lesquels nous entretenons de bons rapports, des pays solidement démocratiques avec des organisations de sécurité et de renseignement très bien établis. Cela nous offre l'occasion d'effectuer des comparaisons au niveau du fonctionnement de ces diverses organisations.
    Une des choses que nos partenaires étrangers apprécient beaucoup chez nous c'est que nous avons voulu — et nous y sommes effectivement parvenus — faire abstraction de considérations politiques dans le cadre de notre examen de ce qui est sans doute, ici comme ailleurs, l'aspect à la fois le plus délicat et éventuellement le plus intrusif du domaine de la sécurité et du renseignement. Il existe, effectivement, le risque de porter préjudice à des personnes, de commettre de graves atteintes aux droits individuels et aux droits de la personne. C'est un domaine d'activité très délicat. Nous sommes parvenus dans une grande mesure à écarter les considérations d'ordre politique. Depuis plus de 25 ans, nous fonctionnons de manière efficace et non partisane. Nos collègues de l'étranger apprécient cela chez nous.
    Ils apprécient le fait que les membres et les collaborateurs de notre comité ont accès, hormis les documents confidentiels du Cabinet, à tout ce qui concerne les opérations du Service de renseignement de sécurité, et qu'aucun détail ne peut nous être caché. Cela va bien au-delà de ce qu'il en est dans la plupart des autres organismes de surveillance ou d'examen des autres pays. D'après eux, c'est un grand avantage qui n'existe pas, par exemple, lors des délibérations d'un comité du Congrès américain ou, au contraire, les considérations politiques interviennent et où de nombreux détails peuvent leur être cachés par les services opérationnels.
    À ce double égard, et en raison aussi d'un personnel qui a su acquérir avec le temps une excellente connaissance de la manière dont fonctionne le service, le comité est bien armé pour obtenir les renseignements dont il a besoin et en tirer les conclusions qui s'imposent. Nos homologues à l'étranger ont beaucoup d'estime pour la manière dont cela se passe au Canada.
(1625)
    Mais quelles sont les critiques que l'on pourrait formuler? Vous nous avez parlé des points forts, mais quelles seraient les faiblesses. Nos homologues étrangers ont-ils des critiques à formuler quant à la manière dont fonctionne notre mécanisme civil de surveillance?
    Je n'ai guère entendu de critiques. Je dirais que, dans tous les pays, les représentants élus souhaiteraient être mis au courant du moindre détail de l'activité des services de renseignement.
    Certains pays ont adopté à cet égard une sorte de système mixte dans le cadre duquel les parlementaires, en ce qui concerne les États-Unis, les membres du Congrès, ont accès à certains détails, mais pas à d'autres, ou bien sont astreints au secret comme nous le sommes nous-mêmes.
    Quelle est votre impression du SCRS dans l'optique à la fois de la législation applicable et des droits de la personne? Comment jugez-vous son action?
    J'aurais du mal à vous répondre sur ce point, étant donné que notre rôle consiste essentiellement à relever les manquements, puisque nous sommes un organisme de surveillance. Nous devons être très fermes dans la recherche des renseignements que nous estimons nécessaires et émettre, de temps à autre, des critiques. Je dois dire, cependant, que nos rapports sont très courtois et nous avons beaucoup d'estime pour leur probité et leur professionnalisme. Cela dit, ainsi que le démontrent nos rapports annuels, nous relevons les manquements éventuels et nous émettons des critiques lorsqu'elles nous paraissent justifiées.
    Je voudrais vous demander maintenant, compte tenu de ce que vous venez de dire, d'effectuer une autre comparaison.
    En quelques mots, comment notre service de renseignement de sécurité se compare-t-il à celui des autres pays?
    Je ne peux guère me livrer à une telle comparaison, mais je puis dire que, d'une manière générale, notre service jouit de l'estime des services étrangers.
    Très bien.
    Je vous remercie.
    Nous vous remercions d'avoir répondu à notre invitation. Cette séance a été courte, mais la prochaine le sera plus encore.
    Nous allons suspendre nos délibérations un instant en attendant notre prochain témoin.

(1630)
    Nous poursuivons notre étude du Service canadien de renseignement de sécurité.
    Nous accueillons son directeur, M. Richard Fadden, et M. Michel Coulombe, directeur adjoint en charge de la collecte à l'étranger.
    Messieurs, soyez les bienvenus. Si vous souhaitez présenter un exposé, vous disposerez pour cela d'environ 10 minutes. Après cela, nous passerons aux questions et aux observations.
    Monsieur, vous avez la parole.
    Je suis heureux de me trouver parmi vous aujourd'hui pour vous parler du rôle que le SCRS joue à l'étranger afin de protéger les intérêts du Canada en matière de sécurité nationale.
     Cela fera bientôt un an que j'ai été nommé directeur du SCRS, et j'aimerais souligner l'importance d'entretenir un dialogue éclairé et ouvert sur la sécurité nationale au Canada. Il n'y a pas de meilleur endroit que le Parlement pour faire progresser ce dialogue, et je suis donc très heureux d'avoir été invité ici aujourd'hui.
    Comme vous le savez, le directeur adjoint de la Collecte à l'étranger du SCRS, mon collègue, M. Coulombe, a pris la parole la semaine dernière devant le Comité spécial sur la mission canadienne en Afghanistan, et il est certain que ses propos et nos délibérations aujourd'hui se recouperont en partie. Je préciserai volontiers tout point soulevé à la suite de son témoignage de la semaine dernière.

[Français]

    Mon allocution aujourd'hui se divisera en trois volets. Je vous donnerai d'abord un bref aperçu de ce que le SCRS est autorisé à faire à l'extérieur du Canada, parce que je ne crois pas que cela a toujours été bien compris, même par les observateurs de l'appareil du renseignement de sécurité. Je vous expliquerai ensuite pourquoi, à mon avis, le SCRS doit être actif à l'extérieur du Canada, dans le cadre de son mandat général qui consiste à assurer la sécurité du Canada. Enfin, je vous donnerai une idée de ce que le SCRS fait à l'étranger, afin de fournir au comité des exemples concrets pour éclairer les travaux d'aujourd'hui.

[Traduction]

    Les principales fonctions du SCRS sont définies à l'article 12 de la Loi sur le SCRS. Nous devons recueillir, analyser et conserver des informations et des renseignements sur les activités dont il existe des motifs raisonnables de soupçonner qu'elles constituent des menaces envers la sécurité du Canada. L'expression « renseignements de sécurité » désigne ce type de renseignements. Nous devons ensuite faire rapport de ces renseignements au gouvernement du Canada et le conseiller à cet égard.
    Exerçant ces pouvoirs généraux, le SCRS recueille des renseignements sur diverses menaces particulières pesant sur la sécurité du Canada, qui sont définies au sens large dans la Loi sur le SCRS et précisées dans les directives du ministre de la Sécurité publique. Le terrorisme, l'espionnage et les activités influencées par l'étranger font partie de ces menaces.
    Le fait que la Loi sur le SCRS ne limite pas le territoire où le service peut recueillir des renseignements de sécurité est particulièrement pertinent par rapport à nos délibérations d'aujourd'hui. Bref, si une menace pèse sur la sécurité du Canada, nous pouvons recueillir des renseignements sur celle-ci au pays ou à l'étranger. C'est là un point crucial, car, comme je l'expliquerai plus tard, les menaces sont rarement confinées de façon pratique dans cet espace géographique distinct qu'on appelle « le Canada ». Les menaces, comme la pollution de l'air ou les espèces migratrices, restent rarement longtemps au même endroit et ont tendance à ne pas respecter les frontières. Elles se déplacent, et le SCRS doit donc bouger lui aussi.
     Ceux qui ont rédigé la Loi sur le SCRS ont reconnu ce fait important. L'idée que le SCRS doit pouvoir être actif à l'étranger s'est toujours imposée. D'ailleurs, la Commission McDonald, qui a fourni un rapport exhaustif en 1981 sur ce à quoi devrait ressembler un service canadien de renseignements de sécurité, a déclaré ce qui suit:
« Nous ne croyons pas que [le Service] doive limiter ses contre-mesures et la collecte de renseignements au seul territoire canadien. Si les enquêtes de sécurité amorcées au Canada doivent s'arrêter aux frontières, nous risquons de perdre des sources d'information et des renseignements importants pour la sécurité nationale. »
    De même, en avril 1984, le Solliciteur général de l'époque, Robert Kaplan, a déclaré ce qui suit lorsqu'il a comparu devant un comité de la Chambre des communes pour soutenir l'adoption de la Loi sur le SCRS:
« Rien n'oblige, de par la loi, que toutes les activités du Service canadien du renseignement de sécurité se déroulent au Canada. Je crois que ce serait beaucoup trop restrictif [...] »
    Le Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité, avec les représentants duquel vous venez de vous entretenir, a également reconnu notre mandat de collecte de renseignements à l'étranger. Dans son rapport annuel 2003-2004, le CSARS rend compte de son examen des opérations du SCRS à l'étranger et explique qu'il a « déterminé que [la Loi] confère clairement au SCRS le mandat de mener des activités d'enquête à l'étranger et [...] conclu que de telles opérations se multiplieront sans doute à mesure que s'aggravera la menace du terrorisme international. »
    La situation est semblable pour bon nombre de nos pendants internationaux qui, comme le SCRS, sont conscients que la collecte de renseignements de sécurité doit être définie de façon thématique — en fonction de la menace — et doit être indifférente à la source ou à l'emplacement de ces menaces. Tout simplement, les fonctions du service s'étendent au-delà des frontières canadiennes parce que le Canada a des intérêts au-delà de ces frontières, et que les menaces savent nous trouver où que nous soyons.
(1635)

[Français]

    Il existe plusieurs raisons essentielles pour lesquelles le SCRS doit consacrer une quantité croissante de ses ressources à la collecte à l'étranger. Premièrement, comme je l'ai déjà mentionné, les menaces se déplacent. Compte tenu de la mondialisation, notre monde est lié et interconnecté. Les affaires internationales ne relèvent plus exclusivement des États et des ministères des Affaires étrangères. L'explosion des relations sociales, commerciales et politiques soude le monde et nous rend plus interdépendants que jamais. Si l'interdépendance peut être une formidable source de puissance, elle apporte aussi son lot de difficultés. Sous l'impulsion de nombreuses forces mondiales, nos frontières deviennent plus poreuses. Pour protéger notre sécurité nationale, nous devons les renforcer et les surveiller de plus loin.

[Traduction]

    Il ne s'agit pas là d'une simple théorie de sciences politiques, mais d'une dure réalité, que je peux illustrer au moyen de quelques exemples.
    Internet a permis aux terroristes de se servir des technologies de réseautage social pour accroître leur force de frappe, puisqu'ils peuvent se réunir dans le monde virtuel pour faire du recrutement, élaborer des plans et exécuter des actes de terrorisme. Cependant, ce déploiement des tentacules d'Internet dans toutes les sociétés, tous les ordinateurs et tous les foyers a d'énormes répercussions. Jamais encore un aussi grand nombre de personnes mal intentionnées n'avaient eu un accès instantané et complet à tous les coins du monde. Il est devenu beaucoup plus facile pour ceux qui se trouvent à l'étranger de planifier et d'organiser des attentats contre le Canada ou ses alliés. Il est aussi plus facile pour les jeunes Canadiens, excités par un appel à l'action pervers, de se radicaliser et de commencer à susciter des préoccupations sur le plan de la sécurité, au Canada ou à l'étranger. Cela dit, je ne voudrais pas donner l'impression que je suis hostile à l'Internet. C'est simplement qu'il nous faut faire face aux conséquences de certaines utilisations.
    De tous ces sujets de préoccupation en matière de sécurité, la menace que représentent al-Quaïda, les groupes qui y sont affiliés et ses partisans reste notre priorité numéro un. Naturellement, nous nous intéressons surtout à ceux qui, au Canada, souscrivent à de tels mouvements et prônent le recours à la violence comme moyen d'atteindre leurs objectifs. À cet égard, je peux vous dire qu'en ce moment, le SCRS fait enquête sur plus de 200 personnes dans notre pays dont les activités satisfont à la définition de terrorisme telle qu'énoncée dans la Loi sur le SCRS.
     En plus du travail qu'il fait pour contrer la menace que ces individus représentent pour le Canada, le SCRS joue un rôle international important en protégeant d'autres personnes contre les menaces en provenance du Canada. Par exemple, l'implication de citoyens canadiens dans des organisations terroristes étrangères — dont bon nombre sont inscrites sur la liste des entités terroristes en vertu du Code criminel du Canada — est un phénomène relativement nouveau. Certains Canadiens jouent même des rôles de premier plan dans de telles organisations. Le Canada a une obligation internationale de collaborer avec ses partenaires pour s'assurer que ses citoyens ne planifient ni n'exécutent des actes de terrorisme à l'étranger.
     Certains d'entre vous pourraient être surpris d'apprendre que le SCRS s'intéresse dans le cadre de ses enquêtes à un nombre inquiétant de citoyens canadiens ou de résidents permanents qui sont allés à l'étranger pour participer à des activités terroristes. Les présumées allées et venues de ces individus couvrent toute la planète, touchant des pays qui se situent principalement au Moyen-Orient, dans certains secteurs de l'Afrique et en Asie du Sud, mais aussi en Europe et dans les Amériques.
    Il convient également de mentionner que le service s'intéresse activement aux activités liées à la menace d'un certain nombre de non-citoyens qui ont des liens avec le Canada — parce qu'ils ont déjà résidé ici ou parce qu'ils y ont de la famille.

[Français]

    De façon beaucoup plus générale, évidemment, énormément de gens entrent au Canada et en sortent. Comme le fait remarquer le ministre de la Citoyenneté, de l'Immigration et du Multiculturalisme dans son rapport annuel de 2009, le Canada peut être fier de sa tradition d'ouverture envers les nouveaux immigrants venus de partout dans le monde. Le Canada a le plus haut niveau relatif d'immigration parmi les grands pays occidentaux. En 2010, nous comptons accueillir environ 250 000 résidents permanents. Cette ouverture sur le monde est une caractéristique du Canada. Elle constitue une facette essentielle de notre identité.
    Toutefois, de plus en plus de citoyens canadiens ont de solides attaches à leur patrie. Il s'agit souvent de pays en crise, de quasi-États ou de refuges de groupes terroristes. Le Canada est donc de plus en plus actif dans un monde plus complexe et turbulent. Pour protéger notre sécurité nationale, nous devons connaître ce monde, ce que nous ne pouvons pas faire simplement en lisant des articles spécialisés. Nous devons recueillir des renseignements à l'extérieur du Canada pour bien comprendre ce qui se passe. Tout comme nous entretenons d'étroites relations sociales, commerciales et diplomatiques, nous devons nouer d'excellents rapports dans le secteur du renseignement.
(1640)

[Traduction]

    Le récent épisode d'enlèvements par des terroristes est probablement l'exemple le plus tangible de l'importance de notre travail à l'étranger. Malheureusement, ces incidents se sont produits dans des parties du monde où le Canada a une faible présence diplomatique ou dans des endroits où les liens diplomatiques de quelque nature que ce soit sont rares.
     Notre absence d'engagement diplomatique dans certains pays fort turbulents ne devrait cependant pas nous limiter dans nos interventions pour aider nos citoyens en détresse. Nous devons trouver des façons d'entrer en contact avec les entités étrangères en pareille situation. C'est en cela que le SCRS peut être efficace et l'a été.
    Au cours des trois dernières années, un nombre alarmant de citoyens canadiens ont été enlevés par des éléments extrémistes dans certaines des régions les plus dangereuses du monde. Dans plusieurs cas, on confie à des services du renseignement clés la tâche d'obtenir la libération des otages étrangers. Il n'est pas inhabituel pour ces services d'insister pour que le SCRS soit le point de contact exclusif pour le Canada.
    Bien que nos arrangements avec certains organismes étrangers aient parfois fait l'objet de critiques, la confiance que nos homologues étrangers accordent à nos services a mené directement à la libération sécuritaire de citoyens canadiens détenus à titre d'otages à l'étranger. Dans certains cas spécifiques comme les enlèvements par des terroristes, le gouvernement du Canada, par l'entremise du SCRS, n'a d'autre choix que d'engager des pourparlers avec d'organismes étrangers du renseignement étrangers, où qu'ils se trouvent, s'il s'agit de protéger des Canadiens. C'est la raison pour laquelle le SCRS doit continuer de cultiver et de maintenir un réseau aussi vaste de relations dans le domaine du renseignement, qui compte actuellement plus de 275 organismes dans quelque 150 pays du monde.
    À mon avis, le fait de reculer devant de tels engagements constituerait une forme de désarmement unilatéral dans un monde dangereux. Cela nous rendrait hautement inefficaces. Ce serait un peu comme d'être assis dans la section non fumeur d'un restaurant minuscule, de se sentir fier d'avoir fait autant de progrès en matière de santé alors que la fumée se dirige vers soi. Dans un monde dangereux, je soutiens que cette approche ne serait pas réaliste.

[Français]

    Des agents du service à l'étranger recueillent des informations et entretiennent des relations avec les services de renseignement étrangers tirant partie de ces relations pour protéger le Canada et d'autres pays contre les menaces qui pèsent sur leur sécurité. Il s'agit d'un élément essentiel de tout système international d'échanges de suivis de renseignements. Le Canada peut ainsi...

[Traduction]

    Puis-je vous interrompre un moment? Pensez-vous que vous pourriez résumer le reste dans vos propres mots? Nous avons le texte de ce que vous dites et les gens peuvent le lire. Vous avez dépassé le temps qui vous était alloué et...
    Bien sûr, je serai heureux de le faire.

[Français]

    Monsieur le président, nos agents à l'étranger sont également chargés de conseiller Citoyenneté et Immigration Canada en matière de filtrage de sécurité. Au cours de la dernière année, on a eu 329 000 demandes de filtrage de sécurité dans le cadre du processus d'immigration. Il vise les visiteurs, les demandeurs du statut de réfugié. Il est important que le Canada puisse repousser ses frontières.

[Traduction]

    Avant de terminer, j'aimerais dire quelques mots au sujet de l'Afghanistan.
    Lorsque les gens apprennent que le SCRS mène des opérations en Afghanistan, ils sont souvent étonnés et même parfois carrément abasourdis. Cette attitude me laisse perplexe, puisqu'il semble logique qu'un gouvernement qui s'engage dans un projet aussi complexe, dangereux et ambitieux que la mise en déroute d'al-Qaida et l'établissement d'institutions démocratiques en Afghanistan veuille tirer pleinement avantage de toutes les ressources à sa disposition.
    Il semble y avoir un sentiment général parmi...
    Je pense que les membres sont en train de lire le reste de votre rapport, alors...
    D'accord, c'est parfait.
    Merci et je compte bien entendre vos questions.
    Merci beaucoup. Nous apprécions que vous ayez pris le temps de préparer tout cela, mais malheureusement, le temps dont nous disposons est fort limité.
    Nous passons immédiatement aux questions et aux observations.
    Monsieur Holland, je vous en prie.
    Je remercie les témoins qui comparaissent aujourd'hui.
    Je passe directement à la question de l'Afghanistan.
    Monsieur Coulombe, vous avez confirmé qu'il est possible que des renseignements reçus des services secrets de la police afghane aient pu être obtenus sous la torture dans le cas de détenus transférés par les Canadiens.
    Plus loin, vous dites, et je vous cite:
Quand nous recevons des renseignements d'une agence quelconque et qu'il y a des doutes concernant le respect des droits de la personne, il faut bien comprendre que cela ne signifie pas que tous les renseignements reçus de cet organisme l'ont été sous la torture.
    J'aimerais savoir comment vous en êtes venu à affirmer cela. Comment faites-vous le partage entre ce qui est obtenu sous la torture et ce qui ne l'est pas, particulièrement lorsqu'il y a une directive ministérielle qui va à l'encontre du partage de renseignements obtenus sous la torture?
(1645)

[Français]

    Monsieur le président, j'aimerais souligner qu'en certaines occasions, il est impossible de savoir si cela a été obtenu par la torture. Par contre, à d'autres occasions, selon la nature de l'information, c'est évident. Par exemple, on peut savoir si l'information a pu être obtenue grâce à de l'interception technique et d'autres techniques d'enquête, par la filature, ou s'il s'agissait de données qui étaient déjà dans les fichiers du service en question. Quand il y a des doutes, on peut aussi tenter d'en savoir un peu plus sur la façon dont l'information a été obtenue, en retournant au service et en posant des questions. Toutefois, il arrive qu'il soit impossible de déterminer avec certitude si l'information a été obtenue par la torture.

[Traduction]

    Il est souvent impossible d'établir des limites claires. Permettez-moi de parler du cas particulier de MM. Arar, Nureddin, Almalki et El Maati, tous citoyens canadiens. Les juges O'Connor, dans un cas, et Iacobucci, dans l'autre, ont dit que le Canada se faisait complice de la détention de ces personnes et de leur torture spécifiquement parce qu'ils ont constaté que nous ne respections pas ces limites.
    Si vous me dites qu'il est impossible dans plusieurs cas de savoir s'il y a partage de renseignements avec des groupes ou avec des gouvernements qui échangent des renseignements sur la torture, qu'il est impossible de savoir si vous obtenez des renseignements qui ont été obtenus sous la torture, alors que certains rapports en font état ou que probablement une recherche sur Google vous permettrait de le savoir, il y a de fortes chances qu'il y ait torture pour obtenir ces renseignements, est-il approprié, selon vous de violer une directive ministérielle? Estimez-vous plutôt que la directive ministérielle, qui est assortie d'une clause échappatoire rédigée par le ministre précisant « se fier à son insu sur des renseignements », sous-entend aussi comprend « se fier à son insu sur des renseignements » lorsqu'il est impossible de le savoir? Est-il acceptable d'utiliser des renseignements obtenus sous la torture dans ces circonstances?
    Non. En cas de doute, nous ne nous fions pas sur ces renseignements, dans la mesure où...
    D'accord. Vous pouvez comprendre mon hésitation à le croire quand il existe des rapports préparés par des juges qui disent que cette excuse a déjà été utilisée et que vous me dites que parfois, il est impossible de le savoir et que parfois il est possible de le savoir.
    Prenons le cas particulier de l'Afghanistan. Comment pouvez-vous savoir que les renseignements sont obtenus par la torture ou qu'ils ne le sont pas? Comment pouvez-vous le savoir? Vous parlez ici de la police secrète, un organisme bien connu pour pratiquer régulièrement la torture, et vous ajoutez qu'il y a échange de renseignements. Comment pouvez-vous établir la limite, particulièrement lorsque nous savons que les juges O'Connor et Iacobucci ont dit que cette limite n'a pas été établie de manière appropriée par le passé?

[Français]

    Monsieur le président, dans le cas de l'Afghanistan, il y a des allégations de torture, mais ce ne sont que des allégations. J'ai expliqué plus tôt comment on tente de confirmer l'origine des renseignements ou la façon dont ils ont été obtenus. Ce que j'expliquais s'applique à l'Afghanistan. Parfois, il est évident que cela découle d'autres techniques d'enquête où l'on va demander plus d'information, mais ce n'est pas toujours possible de confirmer l'origine de l'information ou la façon dont elle a été obtenue.

[Traduction]

    Permettez-moi de vous poser une question très directe concernant la police secrète en Afghanistan. Pensez-vous qu'il est approprié d'échanger des renseignements? Est-ce que le SCRS devrait échanger des renseignements avec une agence comme celle-là, que l'on sait pratiquer la torture?

[Français]

    Monsieur le président, ma réponse est oui, en raison des paramètres en place, des directives ministérielles, des lois et des politiques internes du service.

[Traduction]

    D'accord. Nous y reviendrons plus tard. Manifestement, j'estime qu'il y là une violation claire de la directive ministérielle lorsque vous dites savoir que ces gens pratiquent la torture. Mais nous y reviendrons dans un moment.
    Monsieur Coulombe, vous avez dit aujourd'hui que vous estimez que le SCRS a toute l'autorité légale de fonctionner à l'étranger. Pouvez-vous être un plus précis et expliquer la nature particulière du travail du SCRS dans ses rapports avec des pays étrangers?

[Français]

    En ce qui a trait au mandat légal, l'article 12 de la loi définit le mandat du service. Il n'y a aucune restriction géographique. Le service fait la cueillette d'information lorsqu'il a des raisons de soupçonner que les activités sont liées à une menace, conformément à la définition contenue à l'article 2 de la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité. Par contre, cette loi n'impose absolument aucune limite géographique pour la cueillette du renseignement de sécurité. Nos activités à l'étranger consistent, entre autres, en la cueillette de renseignements de sécurité, donc des renseignements au sujet d'activités qui sont une menace envers la sécurité du Canada.
(1650)

[Traduction]

    J'aurais une dernière question si vous me le permettez. Le rapport du juge Iacobucci conclut que MM. Nureddin, Almalki et El Maati ont été détenus et torturés à l'étranger et que le Canada a été complice de leur torture. Le gouvernement a refusé de formuler des excuses et d'assurer un suivi. Ces hommes doivent continuer à vivre avec ce nuage de méfiante qui flotte autour d'eux. Le SCRS et la GRC n'ont pas formulé d'excuses. J'aimerais vous offrir la possibilité de le faire aujourd'hui, si vous le voulez, et de reconnaître que ces personnes ont été maltraitées. Vous aideriez ainsi à rétablir leur réputation.

[Français]

    Monsieur le président, j'aimerais apporter une clarification. Le commissaire Iacobucci a clairement dit

[Traduction]

Aucune mesure prise par les fonctionnaires canadiens n'a entraîné directement le mauvais traitement de quelque personne que ce soit.
    De plus, je crois qu'il ne serait pas approprié pour moi de commenter ces trois cas.
    Mais il a dit qu'il y avait eu complicité. Il a fait l'objet d'un interrogatoire plutôt serré. Vous dites maintenant qu'il n'y a pas eu de défaillance du renseignement dans ces cas et vous n'êtes pas d'accord avec les conclusions de M. Iacobucci, n'est-ce pas?
    Je suis d'accord avec M. Iacobucci, y compris avec l'extrait de l'énoncé dont je vous ai donné lecture.
    Je suis désolé, mais si vous n'acceptez pas ces conclusions et que vous cherchez à vous en sortir en disant qu'il n'y avait pas d'engagement direct, comment pouvons-nous vous croire sur d'autres questions de torture?
    Merci beaucoup.
    Madame Mourani, je vous en prie.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Messieurs Coulombe et Fadden, je vous souhaite la bienvenue.
    Dans le rapport additionnel de M. Iacobucci, il est mentionné très clairement que vos services ont vraisemblablement contribué indirectement aux sévices exercés à l'endroit de M. Abou-Elmaati en Égypte. Au point 5, il dit que le SCRS et la GRC estiment qu'il n'incombe pas aux renseignements ou à l'application de la loi de se soucier des droits de la personne d'un détenu canadien.
    J'aimerais avoir vos commentaires à ce sujet. Êtes-vous tenus de respecter les droits de la personne lors de vos enquêtes?
    Je ferai une déclaration générale, tout comme mon collègue. M. AlMaki, M. Abou-Elmaati et M. Nureddin ont poursuivi la Couronne. Je ne pense pas que ce serait approprié pour nous de commenter plus en détail.
    Non, je veux simplement savoir si vous respectez les droits de la personne lorsque vous effectuez vos enquêtes.
    Oui, madame.
    Est-ce que vous respectez les droits des enfants aussi?
    Oui, madame.
    Très bien.
    Je passe à un autre dossier, celui d'Omar Khadr. Lorsque vos enquêteurs se sont retrouvés à Guantanamo en face de ce jeune enfant, et qu'il a enlevé sa chemise — on le voyait très bien dans la vidéo — pour montrer qu'il avait été victime de sévices, de torture, pourquoi n'avez-vous absolument rien fait, pourquoi vos services n'ont-ils rien fait à ce sujet? Avez-vous utilisé l'information rapportée par Omar Khadr?
    Monsieur le président, il faut se souvenir qu'il y a eu divers épisodes en ce qui concerne la détention de M. Khadr à Guantanamo Bay. Premièrement, lorsqu'on est allés l'interviewer, il n'y avait pas tant d'allégations, de vidéos, les tribunaux ne s'étaient pas penchés sur ce qui s'était passé, soit à Guantanamo Bay généralement, soit contre M. Khadr en particulier. On est allés le voir parce qu'on croyait qu'il avait des informations touchant la sécurité du Canada. Dans ce contexte, on mettait en exécution une décision du gouvernement en général. Ce qu'on a fait, c'est lui parler. Nos agents n'ont vu aucune indication de torture ou de traitement inapproprié.
    Il vous a montré ses blessures.
    Non, madame.
    Donc, ce qu'on voit dans les vidéos, c'est de la...
(1655)
    Cela dépend de quand il s'agit, madame.
    C'était en février 2003. C'est un rapport du comité de surveillance. L'enquêteur du SCRS est en présence d'Omar Khadr. Le jeune enlève sa chemise, montre des blessures. Il vous dit notamment qu'il a été victime de mauvais traitements, qu'à ceux qui l'avaient interrogé, il avait dit des mensonges, arrachés sous les mauvais traitements. Ce que je veux savoir, c'est si vous utilisez l'information obtenue par la torture. Vous dites que non, que vous ne pouvez pas vraiment l'analyser, parfois vous ne savez pas trop. Mais dans ce cas, un jeune vous montre qu'il est blessé alors qu'il est détenu à Guantanamo. De prime abord, Guantanamo n'est pas pour les enfants. Comment se fait-il que ce jeune n'avait même pas d'avocat? Selon vos directives, vous êtes normalement tenus de mener vos interrogatoires en présence d'avocats.
    Non, madame.
    Vous n'y êtes pas tenus?
    Absolument pas. Ce n'est pas une enquête criminelle. Si on était une agence d'exécution de la loi, la présence d'avocats serait requise. La présence d'un avocat n'est aucunement requise lorsqu'on mène des interviews avec des individus.
    Cela inclut les mineurs?
    C'est une politique générale.
    D'accord, elle s'applique aux mineurs aussi.
    Par ailleurs, au Canada, lorsque vous menez des interrogatoires avec des individus que vous estimez peut-être intéressants, êtes-vous accompagnés d'avocats, devez-vous avoir un mandat ou non?
    Non, madame.
    Très bien.
    Je vous renvoie maintenant au Rapport de la coalition pour la surveillance internationale des libertés civiles. J'ai reçu des témoignages de jeunes Canadiens, Montréalais et Québécois d'origine arabe ou musulmane qui disent recevoir des appels du SCRS qui leur donne rendez-vous dans des cafés, qui leur demande de travailler pour le service comme agents d'infiltration. Ce sont des jeunes du cégep et de l'université. Et quand ils ne veulent pas, il y a des représailles.
    Je vais vous citer des exemples. Un jeune Canadien d'origine palestinienne a reçu la visite de deux agents du SCRS chez lui. Ils l'ont mené dans un café, l'ont interrogé, ils n'avaient pas de mandat. Ils lui ont demandé de venir sans avocat, qu'ils avaient des informations sur sa famille qui pouvaient entraîner des problèmes dans son pays d'origine, qu'ils pouvaient les utiliser s'il ne coopérait pas. Deux jours plus tard, il était sur la no-fly list. Cela vous dit-il quelque chose? Cela fait-il partie des pratiques du SCRS?
    Absolument pas, on n'a pas besoin de mandat pour parler aux Canadiens. Ce dont on a besoin, c'est un soupçon nous laissant croire qu'ils pourraient représenter un danger pour la sécurité publique. On n'a pas d'avocats, parce que ce n'est pas une enquête criminelle. On parle aux gens; on ne peut pas les arrêter, ni les mettre en prison, ni déposer une accusation criminelle contre eux. Ce qu'on peut faire avec eux, c'est leur parler. Dans ce contexte-là, on n'a pas besoin d'avocats.
    Je comprends, monsieur Fadden. Pensez-vous cibler certaines communautés? On me rapporte qu'il y a du profilage racial, que certaines communautés sont plus ciblées. D'ailleurs, votre site Internet était en arabe, à un certain moment. Ça a été enlevé, je l'ai constaté. Est-ce que vous faites du profilage racial dans vos analyses?
    Je lisais aussi une autre décision d'un juge, le juge Montigny, qui a carrément décidé que votre rapport était non concluant, parce qu'il considérait que la fiabilité des recherches menées sur Wikipédia et d'autres sites Web était plutôt non concluante. Je me posais la question suivante. On paie un demi-milliard de dollars pour vos services, alors est-ce qu'on peut s'attendre à un certain professionnalisme de votre part? Si oui, j'aimerais le savoir.

[Traduction]

    Vous devrez poser votre question.

[Français]

    Pourquoi avez-vous fait une enquête sur Mme Djemila Benhabib? Constitue-t-elle une menace à la sécurité du Canada, selon l'article 12?
    Monsieur le président, si je me souviens bien, Mme Benhabib faisait l'objet d'une enquête aux fins de l'obtention d'une cote de sécurité. Alors, la réponse à votre question est non.
    D'accord, merci.

[Traduction]

    Monsieur Comartin.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur Fadden et monsieur Coulombe.
    Monsieur Fadden, pour vous donner une image plus générale de l'expansion de notre rôle international, j'ai oeuvré en 2004-2005 au sein d'un comité qui se voulait donner un aperçu parlementaire de tous nos services du renseignement, et non seulement du travail que fait le CSARS. Je pense que tous nos alliés traditionnels, c'est-à-dire les États-Unis, l'Angleterre, l'Australie, disent, non pas publiquement mais en privé, qu'il y a des plaintes régulières concernant le fait qu'au plan international le Canada n'assume pas sa part du fardeau comme le font les autres.
    Est-ce que vous étiez au courant de ce genre d'observations de la part de nos alliés au cours de cette période?
(1700)
    Oui, monsieur le président.
    Est-ce que cela se poursuit aujourd'hui?
    Je pense, monsieur le président, que la situation est moins pire. Il ne fait aucun doute que le Canada reçoit bien davantage de renseignements qu'il n'en fournit. Je crois que c'est là une conséquence de notre taille et de notre emplacement, mais depuis que je suis avec le SCRS, je suis frappé par la quantité de travail que nous fournissons, comparativement à ce qui se faisait il y a quelques années.
    À cet égard, passons à l'aspect financier pour un moment. Après les événements de septembre 2009, les budgets du SCRS ont été grandement accrus. Pouvez-vous nous donner des chiffres, un pourcentage? Où en sommes-nous par rapport à ce qu'il y avait durant l'année qui a suivi les événements de septembre 2001?
    Permettez-moi de réfléchir. Depuis 2001, notre budget s'est accru de 72 p. 100.
    Pouvez-vous nous dire quelle proportion du budget a été utilisée pour l'élargissement du travail que nous faisons à l'échelle internationale, par rapport à ce que nous faisons au pays?
    Je ne puis vous le dire directement, non pas parce que je ne le veux pas, mais simplement parce que je ne sais pas comment nous comptabilisons cet aspect du travail.
    Pour vous donner une idée de la façon dont nous dépensons notre argent, je vous dirais qu'une grande part de notre budget est consacrée à la lutte contre le terrorisme à l'étranger, je dirais de l'ordre de 45 p. 100 de notre budget.
    D'accord.
    Les renseignements que j'ai, du moins jusqu'à aujourd'hui, sont à l'effet qu'il y a des secteurs logiques où nous devons étendre nos activités, surtout en raison de la présence de représentants des Affaires étrangères, à cause de nos intérêts économiques dans certains secteurs, particulièrement en Amérique du Sud et en Afrique. Sans divulguer de détails, est-ce que ces deux continents ont été ciblés dans l'expansion de vos activités au cours des cinq à sept ans écoulés?
    Je crois qu'il est équitable de dire, monsieur le président, que les expansions les plus marquées ont été au Moyen-Orient et en Afrique, mais cela ne laisse pas entendre que nous n'avons pas pris d'expansion ailleurs. Mais j'ai tenté de répondre à votre question.
    D'accord. Pour en revenir...
    Monsieur Coulombe, je ne sais pas si vous allez répondre à ma question.
    L'article 12 a servi de base à ce type d'expansion des activités. Mais je sais qu'à un certain moment, on s'est demandé si cela était suffisamment large alors qu'il y avait, à l'interne, au SCRS, un désir de modifier la loi afin de clarifier notre capacité de recueillir des renseignements à l'échelle internationale.
    Est-ce que vous savez si cela était une position interne du SCRS à un certain moment, et dans l'affirmative, est-ce que cela est toujours le cas aujourd'hui? Est-ce que vous aimeriez faire modifier l'article 12 de la loi?
    J'y répondrai, si vous permettez. Je comprends qu'à cette époque, c'est-à-dire entre l'entrée en vigueur de la loi et aujourd'hui, il y a eu des discussions pour savoir si elle était suffisamment claire.
    Je pense qu'aujourd'hui il n'y a rien à redire à ce sujet. Comme j'ai essayé de le dire dans mon introduction, l'autorisation de mener des opérations de collecte de renseignements de sécurité ne se limite pas au Canada, contrairement à notre mandat relatif au renseignement étranger, qui se limite au Canada. De notre point de vue et du point de vue de nos avocats comme je l'ai fait remarquer dans mon introduction, il est assez clair que nous avions cette autorité à l'époque où il y avait des discussions au Parlement.
    Je ne suis pas sûr que cela soit possible, mais n'y a-t-il jamais eu des recours aux tribunaux pour contester les activités de renseignement international au Canada?
    Je crois comprendre que tel n'a pas été le cas, du moins pas directement, monsieur le président.
    Pour explorer le rôle de collecte de renseignements...
    De fait, je passe mon tour, monsieur le président.
    Est-ce que vous donnez votre temps à quelqu'un de l'autre côté de la table, monsieur Comartin?
    Je suis désolé, monsieur le président. Borys demande à utiliser mes deux minutes, et je serais assez disposé les lui céder.
    Le président: Il vous reste une minute et demie. Allez-y, rapidement.
(1705)
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Fadden, croyez-vous que le SCRS a suffisamment de pouvoirs législatifs pour faire son travail, à la condition bien entendu que les ressources appropriées lui soient fournies?
    De manière assez large, je le crois, monsieur le président.
    Merci.
    Est-ce que cela voudrait dire que vous n'avez pas besoin de procéder à des arrestations préventives ni à des audiences d'investigation pour faire votre travail?
    La question est intéressante. Je dirais que mon collègue, le commissaire de la GRC, serait plus en mesure que moi de répondre à votre question.
    De notre point de vue, nous cherchons à recueillir des renseignements et à les mettre à la disposition des services de police et autres services, qui doivent ensuite déterminer s'il y a lieu d'intervenir pour contrer ou interrompre la menace. De mon point de vue général, ce seraient là des outils supplémentaires utiles, mais je crois que tout cela revient davantage au service de police, qui ferait usage de ces instruments supplémentaires.
    Votre prédécesseur, l'ancien directeur Morden, a dit qu'il ne croyait pas que ces pouvoirs soient nécessaires et que, dans les faits, ils dépassent un peu les limites — « L'imposition de ces deux pouvoirs franchit une limite entre sécurité de l'État et droits des citoyens ». Il a été assez clair à cet égard concernant le SCRS: le SCRS n'a pas besoin de ces pouvoirs législatifs supplémentaires pour faire son travail. De manière générale, êtes-vous d'accord avec cette affirmation?
    Pourvu que ce ne soit pas des pouvoirs que nous devions utiliser. Ils seraient utilisés par le procureur général ou par la GRC, mais nous ne les utiliserions pas. Ces intervenants se serviraient des renseignements que nous leur fournirions et détermineraient s'il y a lieu de les utiliser.
    De manière générale, je pense qu'ils sont utiles parce qu'ils envoient le message qu'en cas de problème réel — et si je comprends bien, ces pouvoirs n'ont jamais été utilisés au cours des cinq premières années — et si vous pouvez faire en sorte qu'un juge et un procureur général s'entendent, vous pouvez obliger une personne à témoigner dans des cas particuliers. Il s'agit là d'un outil utile, mais au risque de me répéter et de mon point de vue limité, il ne s'agit pas d'un outil que nous utiliserions. Ce sont plutôt d'autres intervenants qui s'en serviraient.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Nous passons maintenant du côté du gouvernement.
    Monsieur McColeman, je vous prie.
    Merci, et merci à vous d'être venus aujourd'hui.
    Il y a eu des discussions au sujet de l'Afghanistan et du rôle d'y joue le SCRS. J'aimerais vous donner lecture d'une partie de votre présentation que vous n'avez pas eu le temps d'aborder faute de temps. Je me reporte vers la fin de votre document et je lis ceci:
[...] le SCRS apporte un soutien essentiel aux trois piliers de la mission du Canada en Afghanistan: la défense, la diplomatie et le développement.
Comme mon directeur adjoint de la Collecte à l'étranger l'a déclaré la semaine dernière, les informations recueillies par le SCRS ont permis de sauver des vies. Nous avons réussi à déstabiliser et à démanteler des réseaux d'insurgés qui étaient sur le point de commettre des attaques à l'engin explosif improvisé (EEI) et au véhicule piégé contre des cibles militaires et civiles.
Nous sommes très fiers de notre rôle dans la protection des troupes. Pendant qu'ils sont en Afghanistan, nos employés sont prêts à courir les mêmes risques auxquels font face les militaires des Forces canadiennes.
Les renseignements du SCRS contribuent au succès de l'ensemble de la mission du Canada en Afghanistan.
    Aujourd'hui, monsieur Fadden, dans le contexte de ce qui a été décrit par certains des témoins aujourd'hui, pensez-vous qu'une partie de votre travail est de simplement être dur à l'endroit des personnes, de manière indue. Nous avons perdu 143 Canadiens, hommes et femmes, en Afghanistan. Vous êtes là pour protéger la vie de Canadiens, si je comprends bien. Parlez-moi un peu des gens que vous interviewez.
    Je me reporte à un autre passage de votre exposé où vous précisez que « le SCRS fait enquête sur plus de 200 personnes dans notre pays dont les activités satisfont à la définition de terrorisme telle qu'énoncée dans l'alinéa 2c) de la Loi sur le SCRS ».
    Parlons de ce qui est vraiment important en termes de sécurité du public et de protection des Canadiens et de ce que vous faites en Afghanistan. Quand vous voulez obtenir des renseignements, ne parlez-vous pas à des personnes qui peuvent être des terroristes, des criminels, des meurtriers? Est-ce que ce sont là des choses que vous faites pour protéger nos gens qui sont en Afghanistan?
(1710)
    Merci, monsieur le président.
    En Afghanistan, nous cherchons essentiellement à parler des personnes qui pourraient avoir des renseignements concernant des menaces pour le Canada et pour nos alliés. D'entrée de jeu, il peut s'agir de terroristes, d'insurgés talibans ou de personnes qui connaissent des choses à ce sujet. Notre travail consiste donc à chercher à obtenir ce genre de renseignements, d'une façon ou d'une autre.
    Une des catégories de gens auxquelles nous parlons, monsieur le président, comprend des insurgés talibans potentiels qui ont été mis en détention par les Forces canadiennes dans le cadre d'une opération menée par elles. Au cours des premières années de leur présence en Afghanistan, les Forces armées canadiennes n'étaient pas organisées pour interviewer ces gens. Ainsi, dans le cadre d'un programme d'interrogation relativement structuré des Forces canadiennes, nous étions fréquemment appelés à poser des questions, généralement pour chercher à connaître l'identité de gens, pour savoir à quoi ils s'intéressaient. Dans la plupart des cas, ces entrevues duraient moins de 15 ou 20 minutes. Ensuite, ces personnes étaient transférées aux autorités afghanes, selon la décision des Forces canadiennes.
    Oui, notre travail consiste à parler à des gens en Afghanistan qui pourraient chercher à s'en prendre à des Canadiens et d'utiliser ces renseignements et de les fournir aux autorités canadiennes et afghanes pour freiner les attaques contre les Canadiens et les forces alliées.
    Donc, vous travaillez de concert avec les Forces canadiennes pour obtenir des renseignements dont vous avez besoin pour protéger la vie des soldats canadiens. Est-ce bien cela que vous me dites?
    C'est exact, et il y a des exemples spécifiques dont je ne puis malheureusement parler où nous avons fait cela. Nous avons sauvé la vie de Canadiens.
    Puis-je le dire de manière différente? Il ne s'agit pas d'un travail très plaisant. Il s'agit d'aller chercher les renseignements dont vous avez besoin pour protéger la vie de nos soldats canadiens qui doivent aller en mission à l'extérieur de Kandahar ou pour faire autre chose, et c'est là une partie de votre rôle et c'est la raison pour laquelle vous êtes en Afghanistan. Vous n'êtes pas là pour jouer les méchants. Vous êtes là pour aider à protéger des vies.
    Non, absolument pas. Nous sommes là pour obtenir des renseignements. Nous n'avons aucune autorité exécutive. Nous n'arrêtons pas, nous ne détenons pas et nous n'emprisonnons pas les gens. Notre travail est de recueillir des renseignements que les Forces canadiennes, la FIAS et nos autres alliés peuvent utiliser pour sauver des vies canadiennes ou d'alliés. La seule façon d'y parvenir est de communiquer avec les gens qui sont au courant de complots potentiels en vue de blesser des Canadiens et des alliés. Il ne s'agit pas d'intervenir violemment. À mon sens, il s'agit là d'un bon travail.
    Je veux vous remercier pour cela.
    S'il me reste un peu de temps — deux minutes — j'aimerais le céder à M. MacKenzie.
    Je dirais en toute équité que c'est là l'essentiel de ce à quoi les Canadiens s'attendent de vous et nous vous en remercions.
    Il y a des choses que nous observons dans les rapports avec nos voisins les plus près au Sud... Personne ne veut savoir que vous menez des activités dans la région où vous vous trouvez, particulièrement quand tout est sécuritaire. Il semble que le service du renseignement de nos voisins américains ait connu quelques incidents récents. Il y a eu défaillance parce que le service n'a pas su recueillir les renseignements qui auraient pu sauver des vies lors de ces deux incidents.
    Je pense que c'est là l'essentiel de ce que dit M. McColeman. Les Canadiens s'attendent à cela. C'est ce qu'ils veulent que l'on fasse. Je pense que nous devrions percevoir votre travail là-bas comme si vous étiez des agents de police. Pour capturer les voleurs de banque, il faut parler à des voleurs de banque et ainsi de suite.
    Outre ce que vous faites en Afghanistan et ces 200 personnes que vous avez déjà mentionnées, ce sont là les problèmes qui pourraient survenir dans ce pays. Je me demande si vous pouvez ajouter quelque chose sans entrer dans les détails.
    Merci, monsieur le président.
    Dans ce regroupement, il y a un certain nombre de personnes qui se livrent à de l'espionnage et quelques-unes qui font de l'interférence étrangère, mais je dirais que le groupe dont j'ai envie de parler un peu plus est celui des gens qui ont été radicalisés au pays. C'est là une caractéristique que nous retrouvons au Canada, aux États-Unis, au Royaume-Uni et en Australie.
    Habituellement, il s'agit de Canadiens de deuxième ou de troisième génération qui, d'une certaine façon, sont relativement bien intégrés économiquement et socialement au Canada et qui, pour une raison ou pour une autre, ont établi des rapports avec leur ancienne mère patrie. Ils sont fortement désenchantés et sont incités à envisager la violence soit au Canada ou contre des Canadiens, soit contre quelqu'un d'autre à l'étranger.
    L'exemple public de cela est le groupe des 18 de Toronto. La plupart des membres du groupe ont soit plaidé coupable, soit sont à la veille d'être condamnés. Ce sont des gens qui sont devenus fortement désenchantées par la façon dont nous voulons structurer notre société. Ils rejettent la règle de droit, veulent imposer la loi de la Sharia et faire un tas d'autres choses.
    Il y a un certain nombre de tels groupes au Canada sur lesquels nous faisons enquête; il en va de même aux États-Unis et en Grande-Bretagne. C'est la partie la plus perturbante, je dirais, de notre travail aujourd'hui. Ce sont des gens qui sont au Canada depuis assez longtemps et qui rejettent l'essence même de ce que nous sommes au Canada.
(1715)
    Merci.
    Il s'agit d'une session abrégée. Nous devons voter dans 15 minutes. Je vous remercie beaucoup.
    Monsieur le président, il reste 16 minutes et il faut 30 secondes pour nous rendre à la Chambre des communes.
    Je dois lever la séance à 17 h 15 comme nous le faisons normalement.
    Monsieur le président, cela ne me plaît pas, mais je suis en désaccord avec votre décision. Il n'y a aucune raison de la rendre. Nous sommes à 30 secondes de la Chambre des communes.
    Une voix: S'il y a consensus autour de la table... Il faut quelques minutes pour nous rendre à la Chambre.
    Il faut quelques minutes, mais certains d'entre nous ont des choses à faire.
    Monsieur le président, je suis désolé. Si nous avons des choses à faire... La réunion est prévue pour 17 h 30 et nous n'avons pas encore entendu la cloche. Quand la cloche sonne, il reste 15 minutes et nous sommes à 30 secondes de la Chambre.
    Le prochain tour de table prendra plus de 10 minutes.
    Le prochain tour de table prendra cinq minutes.
    Ce n'est que pour un témoin.
    Bien, cinq, puis 10.
    Comme je l'ai dit, nous pouvons être très généreux envers nous-mêmes et nous accorder cinq minutes pour nous rendre à la Chambre des communes, mais je ne comprends pas. La cloche ne s'est même pas fait entendre et nous abrégeons une séance sans raison apparente. Il est prévu que nous y allions à 17 h 30. La cloche ne s'est même pas fait entendre et nous ne sommes pas capables de poser des questions.
    Monsieur MacKenzie.
    Avec tout le respect que je dois à mon ami d'en face, qui a toujours des problèmes dans ses rapports avec le président, je dirais que la pratique normale en ces lieux est que lorsque la cloche se fait entendre, la séance est levée. C'est la façon dont nous comprenons le fonctionnement de tous les autres comités, et je pense qu'elle devrait être la même ici.
    Nous venons de gaspiller deux minutes avant que la cloche ne se fasse entendre.
    On nous convoque. Je crois que vous devriez lever la séance, monsieur le président.
    J'avais demandé l'accord du comité afin que nous ayons la possibilité de poser quelques questions supplémentaires.
    Nous ferons ce que nous faisons toujours. Nous ne ferons pas d'exception à ce stade-ci, parce que cela créerait un précédent. Vous n'aimez peut-être pas cela, mais c'est ce que tous les comités font.
    La séance est levée.
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