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ENVI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de l'environnement et du développement durable


NUMÉRO 018 
l
1re SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 19 octobre 2006

[Enregistrement électronique]

(0935)

[Traduction]

    J'aimerais commencer; je vous prie de m'excuser du retard. Je crois que vous savez tous où nous étions et la raison de ce retard ce matin à cause du dépôt de la Loi sur la qualité de l'air et la séance d'information a l'intention des députés. Je présente mes excuses aux témoins et nous allons commencer et entendre tous les témoignages.
    Je devrais peut-être à chacun de s'efforcer à ne pas dépasser 10 minutes, les députés poseront ensuite des questions et là aussi faisons en sorte de ne pas perdre de temps. Par exemple, ça s'est très bien passé mardi lorsque toutes les personnes qui ont fait une déclaration se sont limitées à environ à sept minutes et cela nous a beaucoup aidé. Si vous pouvez faire de même, cela nous sera très utile.
    Nous suivrons simplement l'ordre tel qu'il est dans le feuilleton et commencerons par la Protection environnementale des États-Unis.
    Monsieur Denison.
    Merci beaucoup, monsieur le président et messieurs les membres du comité de m'avoir invité.
    Je suis un scientifique principal à la Protection environnementale aux États-Unis. C'est l'autre Protection environnementale, celle qui s'écrit avec un s au lieu d'un c.
    Je suis ici pour décrire les résultats de mes recherches visant à comparer les politiques sur les produits chimiques d'usage industriel aux États-Unis, dans l'Union européenne et au Canada. Cette recherche est menée en collaboration avec Pollution Probe qui est basée au Canada. J'identifie ce que j'appelle les meilleures pratiques qui sont des éléments fondamentaux de chacun de ces trois systèmes et qui peuvent être soit combinés soit utilisés pour identifier la meilleure approche ou une meilleure approche si vous voulez, dans certains domaines.
    Je vais vous décrire certaines de ces meilleures pratiques. Les opinions que j'exprime sont strictement personnelles. Je travaille sur un rapport qui est en cours de révision et je serais heureux de le partager avec le comité quand il sera un peu plus élaboré.
    Chaque point que je soulève est lié au processus de catégorisation de la liste intérieure des substances. Le but est de renforcer la capacité d'agir à partir des nouveaux renseignements issus de ce travail. Permettez-moi de décrire en détail quelques-uns de ces points durant les quelques minutes dont je dispose.
    L'union européenne est sur le point de finaliser sa proposition REACH qui est une révision très importante de sa politique sur les produits chimiques. Elle remplacera plusieurs douzaines d'autres lois et visera un grand nombre de produits chimiques déjà commercialisés et des nouveaux produits chimiques qui vont être commercialisés. Les onze prochaines années suivant la mise en oeuvre verront une quantité énorme de nouveaux renseignements sur littéralement des dizaines de milliers de produits chimiques. Il est essentiel que les organismes canadiens aient accès à ces renseignements et les utilisent pour faire leur propre évaluation de ces produits chimiques. Il s'agit là d'une occasion incroyable dont devrait profiter l'examen de la LCPE.
    J'ai quelques propositions spécifiques à ce sujet. La première, c'est que les entreprises vont soumettre les renseignements aux autorités de l'Union européenne, la LCPE devrait obliger ces entreprises à soumettre aussi aux autorités canadiennes les renseignements sur les produits chimiques qu'elles fabriquent ou importent au Canada. Ce ne devrait pas être un fardeau supplémentaire puisque ces renseignements sont déjà fournis. Cela permettra aux autorités canadiennes d'avoir un accès direct à ces renseignements.
    Deuxièmement, il est important de prendre des mesures afin que les autorités canadiennes aient plein accès aux données collectées dans le cadre de la proposition REACH. Cela inclut les renseignements commerciaux confidentiels. À mon avis, la LCPE doit autoriser les autorités canadiennes à négocier avec l'Union européenne en vue d'obtenir le plein accès aux données REACH.
    La deuxième priorité pour l'examen de la LCPE serait d'assurer que les renseignements auxquels ont accès les organismes au Canada concernant la fabrication, l'importation et l'utilisation des produits chimiques soient à jour. Beaucoup d'entre vous savent que le processus de catégorisation de la LIS terminé récemment est fondé sur des données vieilles de vingt ans sur la production et l'utilisation de beaucoup des produits chimiques étudiés et ce, parce que la dernière mise à jour de ces renseignements remonte à l'époque de l'élaboration de la LIS entre 1984 et 1986.
    Il est essentiel que les renseignements soient mis à jour, et qu'ils le soient fréquemment, car des variances considérables au niveau de la production de produits chimiques particuliers sont amplement prouvées. Mon rapport examine cette question de manière très approfondie.

(0940)

    Il y a littéralement, et même d'une année à l'autre, une très importante variance, et il est essentiel que les organismes concernés qui essaient de faire un suivi de ces produits chimiques aient accès aux plus récents renseignements. Je recommande l'élaboration de rapports régulièrement et fréquemment et l'obligation pour les entreprises de signaler tout changement important dans la production ou l'utilisation des produits chimiques qu'elles utilisent.
    Troisièmement, il est très important, surtout dans le contexte du suivi de la catégorisation de la LIS de réduire le fardeau du gouvernement qui doit exiger des renseignements supplémentaires de l'industrie. Une grande partie du processus de catégorisation de la LIS a identifié des produits chimiques comme étant dans ou hors de la LIS à partir de renseignements peu fiables ou en n'étant pas capable de les catégoriser en raison d'un manque de renseignements. Il est très important, que les organismes canadiens puissent faire le suivi et exiger plus de renseignements pour compléter ce processus avant de passer à l'étape suivante.
    Malheureusement l'article 72 de la LCPE impose un fardeau assez lourd au gouvernement en stipulant essentiellement que sauf s'il y a des motifs de soupçonner que le produit chimique est potentiellement toxique, on ne peut pas demander des renseignements supplémentaires. Le gouvernement est alors dans un dilemne s'il veut obtenir plus de renseignements sur un grand nombre de produits chimiques. Bien que ce fardeau soit beaucoup moins lourd au Canada que dans d'autres pays, il empêche quand même le suivi de la catégorisation de la LIS de progresser.
    Quatrièmement, une innovation importante dans la proposition REACH de l'Union européenne vise une meilleure circulation des renseignements dans les chaînes d'approvisionnement des produits chimiques. Les fabricants de ces produits chimiques n'ont souvent pas pour le moment de très bons renseignements concernant l'utilisation de leurs produits chimiques, qui va les utiliser et à quelle fin. De même, les clients de ces fournisseurs n'ont souvent pas accès aux renseignements concernant les risques, les propriétés des produits chimiques, la façon dont ces produits chimiques doivent être manipulés.
    En fait, REACH contraint la circulation bidirectionnelle des renseignements. je crois que ces dispositions sont très innovatrices, elle saborde un problème très concret dans la gestion des produits chimiques dès lequel se fait dans le monde aujourd'hui, surtout dans un système beaucoup plus intégré globalement. Dans le cadre de l'examen de la LCPE on devrait examiner très attentivement ces dispositions et déterminer quels aspects pourraient être adoptés au Canada pour assurer vraiment la circulation des renseignements.
    Finalement, permettez-moi de conclure par un autre point. la catégorisation de la LIS a établi qu'un peu plus de 4000 produits chimiques de la LIS nécessitent une évaluation plus approfondie. Du point de vue historique, ce nombre est énorme et il est important que les organismes canadiens puissent évaluer ces produits chimiques rapidement et efficacement. C'est le travail des organismes responsables; il faut aussi reconnaître que le gouvernement peut jouer un rôle essentiel pour s'assurer que ce travail se fasse.
    Nous recommandons, dans le cadre de l'examen de la LCPE, d'envisager la nécessité d'imposer des échéances pour assurer que ce processus progresse rapidement et efficacement au plan des délais, et peut-être du nombre de produits chimiques qui nécessitent une évaluation dans une période donnée. Les organismes font déjà beaucoup d'efforts pour établir des priorités dans cette liste et essayer de s'occuper en premier des produits chimiques les plus préoccupants.
    C'était quelques-unes de mes premières réflexions. Je serais heureux de répondre aux questions et aussi de collaborer au cours des prochains mois avec le comité dans le cadre de son examen de la LCPE.
    Merci.

(0945)

    Merci, monsieur Denison. Vous avez parlé de votre rapport. Si vous pouvez en envoyer une copie au greffier, il pourra la distribuer à tous les membres.
    Avec plaisir.
    Merci.
    M. Lloyd de l'Association canadienne des fabricants de produits chimiques.
    Je voudrais remercier le comité de m'avoir donné l'occasion de participer à cette table ronde afin de discuter de la LCPE dans un contexte international.
    Lors de mon témoignage en mai et il y a deux semaines, j'ai décrit l'ACFPC et le programme de Gestion responsable, je ne me répéterai donc pas. Très brièvement, le programme de Gestion responsable est un ensemble d'initiatives lancées par l'ACFPC dans les années 1980 pour répondre aux préoccupations du public au sujet des produits chimiques et de leur impact. Je crois qu'il est important de faire remarquer que dans le contexte international, il est maintenant offert dans 52 pays. Il est aussi reconnu comme faisant partie de la stratégie internationale sur les produits chimiques, et plus récemment dans la déclaration de Dubaï sur l'approche stratégique de la gestion internationale des produits chimiques. Dans mes remarques écrites, j'ai mentionné des citations tirées de la Déclaration de Dubaï.
    Je discuterai de deux sujets aujourd'hui. La position du programme de gestion des produits chimiques et du Canada dans un contexte international et j'ajouterais des commentaires qui ne sont pas les miens. Je rejoins largement les propos de Richard et je pense qu'il y est possible de discuter. Je parlerai aussi brièvement de la modification de la LCPE afin que nous puissions reconnaître les évaluations faites par d'autres pays. Au cas où je n'en fais pas mention, Jack Soule en parlera de manière plus approfondie. Ce que je veux dire essentiellement, c'est qu'il s'agit d'une question importante et que nous appuyons ce qu'il va dire.
    Pour passer à la question principale concernant la LCPE et le contexte international, le Canada gère les produits chimiques de la même façon que les autres pays de l'OCDE. La plupart ont établi des exigences d'avis pour les nouvelles substances afin qu'elles soient évaluées par le gouvernement avant d'être commercialisées. Bien que les règlements puissent varier d'un pays à l'autre, ces programmes adoptent généralement la même approche et semblent généralement satisfaire le public en matière de sécurité des nouveaux produits chimiques.
    Comme le Canada, d'autre pays de l'OCDE ont établi des répertoires de substances bénéficiant de droits acquis qui étaient utilisés dans le secteur commercial avant que les exigences d'avis de nouvelles substances ne deviennent une loi. Souvent, elles sont appelées « substances existantes » afin de les différencier des « nouvelles substances ». Au Canada, ces substances bénéficiant de droits acquis sont énumérées sur la liste intérieure des substances (LIS).
    Dans les années 1990,un thème commun a fait surface au sein de l'OCDE. Même si le grand public avait confiance dans la sécurité des nouveaux produits chimiques, il était tout de même préoccupé par les évaluations effectuées sur les produits chimiques par d'autres pays. Mais la grande question était la préoccupation du public au sujet des produits chimiques bénéficiant de droits acquis -- s'ils avaient été évalués et si les données les concernant étaient suffisantes, les produits chimiques existants. Différentes approches ont été adoptées dans différents pays pour examiner cette question.
    D'abord, des efforts concertés ont été employés de la part de l'OCDE pour évaluer les substances chimiques produites en grandes quantités. Cette approche a été adoptée aux États-Unis et encouragée en partie par l'Environmental Defense Fund dans le rapport d'une organisation écologique et aussi par un accord avec l'industrie chimique américaine voulant que davantage d'efforts soient déployés. Les États-Unis ont donc dû maîtriser la production en grandes quantités. Un programme similaire, quoique moins ambitieux, a également été adopté par le Conseil international des associations chimiques, dont fait partie de l'ACFPC.
    Ce programme sur les substances chimiques produites en grandes quantités a permis de compléter et d'accélérer le travail de l'OCDE. L'initiative de production en grandes quantités des États-Unis a bien fonctionné. Elle s'est développée à l'échelle internationale et a obtenu des résultats importants. Au sein de l'OCDE, environ un millier de substances ont été évaluées. Le programme américain a permis de traiter plus de 2200 substances chimiques produites en grandes quantités et assurera l'évaluation de 500 autres; mais il y a une masse de renseignement qui circulera et qui sera accessible pour la catégorisation et l'évaluation préalable de la LIS.
    Au Canada, nous traitons de la question des produits chimiques existants par les exigences d'évaluation préalable et de catégorisation de la LIS. Lors de mon témoignage il y a deux semaines, j'ai fait état de ma compréhension de ce programme. Le gouvernement n'a encore fait aucune annonce sur ce programme. Peut-être se prononcera-t-il aujourd'hui dans le cadre de la Loi sur la qualité de l'air, peut-être pas -- nous verrons. Je ne répéterais pas ce que j'ai déjà dit, mais dans les notes que j'ai remises au comité, j'ai fait un résumé des résultats attendus.
    L'essentiel, à mon avis, c'est que dans la LIS, le Canada a adopté une approche pratique de l'application des critères tels que la persistance, la bioaccumulation, la toxicité intrinsèque et le potentiel d'exposition afin de déterminer quelles substances doivent faire l'objet d'une évaluation.

(0950)

    L'industrie, les ONG. et le gouvernement collaborent pour rendre possible la catégorisation de la LIS. à l'étape suivante, l'étape de l'évaluation, qui sera encore plus difficile, nous espérons que ces efforts se poursuivront.
    L'approche canadienne présente des défis et soulève des préoccupations. L'un des principaux enjeux de l'ACFPC est le maintien par le gouvernement d'un processus rigoureux d'évaluation des risques. Nous croyons qu'il est possible de le faire tout en réalisant les évaluations nécessaires. Cela exigera une coopération au niveau international. Je rejoins pour la majeure partie les propos de Richard à ce sujet. Il est rassurant, que la LCPE et la politique gouvernementale de longue date présentent un fondement scientifique sain qui permet d'appuyer la rigueur, d'empêcher l'emprunt de raccourcis et de maintenir l'approche axée sur les risques des évaluations qui constituent le fondement des travaux en matière de produits chimiques au Canada et à l'échelle internationale.
    Après avoir parlé de l'OCDE, des États-Unis et du Canada, je vais aussi parler du projet REACH. C'est une autre importante approche des produits chimiques existants ou bénéficiant de droits acquis et qui a été adoptée par l'Union européenne -- et elle a duré plus de sept ans -- pour tenter d'élaborer ses lois.
    Le terme REACH signifie l'enregistrement, l'évaluation et l'autorisation des produits chimiques. Le Canada a adopté une approche pratique qui, selon nous, on traite pas l'évaluation d'environ 2000 substances lorsque les substances de la LIS qui ne sont plus utilisées auront été désignées. Je pense que le nombre de 4000 substances mentionnées par Richard sera probablement divisé par deux. comparer cela avec REACH. Apparemment, l'enregistrement et l'évaluation REACH s'appliqueront à plus de 30 000 substances.
    Certains points-clés soulèvent des questions sur son efficacité, son caractère pratique et son utilité. D'après ce que m'ont dit des homologues européens, je crois qu'il vise plus haut qu'il ne le peut et il est possible qu'en essayant d'en faire trop, il en fasse très peu.
    Le projet REACH n'est pas encore une loi. Chaque année, l'Union européenne répète que le projet sera mis au point l'année suivante. Je crois que cette année, ce sera vrai, mais qui sait? Nous avons déjà entendu ce discours. Éventuellement, il deviendra une loi, mais cela prend beaucoup de temps, alors qu'au Canada, nous avons déjà avancé et fait quelque chose.
    Les nombreuses entreprises qui enregistrent la même substance doivent se regrouper afin de partager les coûts, ce qui représente l'une des principales difficultés du projet REACH. Nos homologues européens disent que plus de 25 000 regroupements devront possiblement être établis au cours des 12 premiers mois suivant l'adoption du projet REACH. Une entreprise a déclaré qu'elle pourrait devoir établir 1000 regroupements. L'efficacité de cette initiative pourrait faire échouer le projet REACH.
    Les regroupements permettent de s'assurer que les frais pour l'obtention de renseignements, y compris la mise à l'essai, sur l'enregistrement seront assumées équitablement par les entreprises visant une substance donnée. Il est possible que cette situation empêche le Canada d'obtenir des renseignements qui pourraient être utilisés dans ses évaluations.
    Je conviens avec Richard que les renseignements obtenus de REACH nous aideraient beaucoup dans la LIS. La façon dont REACH est structuré pourrait nous en empêcher.
    Il a dit que nous devrions avoir une base de négociations avec l'Europe afin que le gouvernement obtienne des renseignements confidentiels. Eh bien, cela existe déjà dans notre législation. Il s'agit de l'article 316. L'industrie et le gouvernement canadiens ont pu convaincre l'Union européenne d'adopter un article similaire appelé l'article du Canada dans le projet REACH. Ainsi, la possibilité pour le Canada d'échanger des renseignements avec l'Europe existe déjà.
    Nous espérons que cela se fera. La façon dont ces regroupements traitent la circulation des renseignements peut s'avérer un obstacle.
    En comparaison, les programmes de production en grandes quantité des États-Unis et de l'OCDE ont facilité l'échange de renseignements à l'échelle internationale, ce qui a profité au Canada en matière d'exigences de la LIS et continuera de le faire. Le projet REACH pourrait malheureusement avoir l'effet contraire.
    Le projet REACH pourrait receler d'autres difficultés, incertitudes et questions non résolues, mais je n'en parlerais pas. Il faut vraiment être un spécialiste qui suive tous ces changements. L'ACFPC a conseillé à ses membres qui exportent vers l'Europe d'obtenir des conseils auprès de spécialistes européens, car c'est incroyablement compliqué.
    En conclusion, le Canada a établi des lois semblables à celles d'autres pays de l'OCDE pour les nouvelles substances. Pour les substances bénéficiant de droits acquis, le Canada, comme d'autres pays, tente d'accroître la confiance du public dans la sécurité des produits chimiques. Le Canada, contrairement à l'Europe, semble adopter une approche pratique qui devrait permettre d'obtenir des résultats plus positifs et plus efficaces. Le Canada devrait bénéficier de ce que les États-Unis et l'OCDE accomplissent en matière de substances chimiques produites en grandes quantités. Toutefois, nous adoptons également une approche plus globale en traitant bien plus que des questions de substance produite en grandes quantités, ce qui est vraiment un pas en avant.

(0955)

    Permettez-moi d'aborder brièvement mon deuxième point. Je recommande également la modification de la LCPE afin que le Canada puisse reconnaître les évaluations des autres pays. L'article 75 de la LCPE permet au Canada de reconnaître les évaluations lorsque d'autres administrations évaluent de substances et la restreignent considérablement. La LCPE devrait également permettre de reconnaître les évaluations lorsque d'autres pays approuvent des substances. Le Canada fait figure de pionnier dans la catégorisation et l'évaluation préalable de la LIS et d'autres pays devraient suivre son exemple. L'Australie a été le premier à reconnaître les évaluations d'autres administrations, et le Canada devrait lui emboîter le pas. Mon collègue, Jack Soule, en discutera plus en détail.
    Si vous voulez, je pourrais aussi parler d'un autre point soulevé lors de ma dernière comparution devant le comité, c'est-à-dire l'utilisation du terme « toxique » et si sa modification au Canada le rendrait moins conforme aux traités internationaux. Vous avez mentionné, monsieur le président, que cette question pourrait être débattue plus longuement aujourd'hui. Je l'ai examinée plus en détail et je peux en parler plus si le comité le souhaite.
    Voilà ce que j'avais à dire. Merci beaucoup.
    Merci, monsieur Lloyd.
    Cette petite boîte grise me dit que vous avez parlé pendant 10 minutes et 52 secondes.
    Je vous prie de m'excuser pour les 52 secondes.
    Seulement pour que vous sachiez que je suis ce que vous faites.
    Des voix: Oh, oh!
    Je regardais ma montre aussi.
    Souhaitons un bon retour à M. Soule du Groupe de coordinations de l'industrie pour la LCPE.
    Merci beaucoup, monsieur le président, et merci aux membres du comité d'avoir donné l'occasion au Groupe de coordination de l'industrie pour la LCPE de présenter d'autres idées de possibilités dans le cadre de la LCPE.
    Ainsi que je l'ai déjà dit, le Groupe de coordination de l'industrie pour la LCPE est un réseau d'environ 24 association qui participent à des discussions très détaillées avec Environnement Canada et Santé Canada sur des questions relatives aux substances existantes et nouvelles. Nous ne représentons pas l'ensemble de l'industrie, mais un groupe intersectoriel très large.
    Le Groupe de coordination de l'industrie pour la LCPE a également participé aux côtés d'Environnement Canada et de Santé Canada à des discussions internationales, dont ont résulté des ententes formelles et informelles sur la communication des données inhérentes aux évaluations entre les organismes de contrôle, en vue de simplifier les processus de déclaration et d'évaluation des substances nouvelles.
    De très importants changements ont eu lieu dans ce domaine. Des ententes bilatérales ont été établies tant avec l'EPA américaine qu'avec l'instance australienne, le NICNAS. Nous avons commencé par une entente, l'entente Four corners, qui permet un large partage des données entre environnement Canada, Santé Canada et l'EPA américaine. Cela a fonctionné relativement bien, sauf, comme nous l'avons mentionné mardi, que l'EPA américaine a eu des problèmes pour fournir des renseignements confidentiels au Canada.
    Un programme très actif a été mis en oeuvre avec l'Australie; nous avons échangé des évaluations. Lorsque le Canada fait une évaluation, l'entreprise qui veut introduire la même substance en Australie peut envoyer aux représentants australiens le dossier préparé par Environnement Canada. Le traitement se fait assez rapidement du côté australien et les frais de déclarations sont moins élevés. Donc, les résultats de ce processus sont plutôt positifs.
    Nous avons beaucoup appris du Groupe de travail sur les nouvelles substances chimiques de l'OCDE poursuit ses travaux. L'échange de données entre ces instances gouvernementales leur a permis d'apprendre beaucoup sur leurs systèmes mutuels et leurs méthodes d'évaluation et de faire des progrès considérables dans le domaine de l'évaluation.
    Il existe toutefois une lacune dans l'actuelle LCPE qui empêche le Canada d'optimiser les avantages de ces relations. Comme je l'expliquerai plus tard, nous devrions tirer une leçon de la méthode australienne et moderniser la LCPE afin de permettre la reconnaissance des évaluations étrangères. Lorsqu'une nouvelle substance chimique est mise sur le marché international, une succession de déclarations semblables, mais non identiques, sont produites dans les différents pays où le promoteur souhaite la commercialiser cette substance.
    Chaque pays a ses exigences propres en matière de déclarations qui ont pour but de déterminer si une telle substance nouvelle est sécuritaire pour les utilisations à venir. Gordon a mentionné qu'il y a une grande similarité, car beaucoup de pays sous l'égide de l'OCDE ont des mécanismes de déclaration et qu'ils ont tendance à adopter une approche commune en ce qui concerne les exigences en matière de soumission d'une déclaration d'une nouvelle substance. Mais, les États-Unis ont une approche différente, et il y a d'autres différences.
    Bien qu'une analyse comparative des évaluations des mêmes substances ait été faite, quelques pays de l'OCDE ont procédé à un examen des évaluations afin de déterminer les éventuels écarts qui sépareraient les décisions qu'ils avaient pris unilatéralement sur les mêmes substances dans des circonstances différentes. Ils ont conclu que, même si des pays au départ ont des dossiers et des approches légèrement différents, les résultats sont généralement similaires.
    Une certaine confiance s'est établie dans ce processus, étant donné que même si les approches concernant les substances sont légèrement différente, les résultats sont très similaires. Donc le concept de l'examen des substances et du jugement qui sont relativement équivalents semble être très bon.
    Le Groupe de travail sur les nouvelles substances chimiques de l'OCDE poursuit ses travaux, ceux-ci sont actuellement sous la forme d'un modèle de travail partagé, appelé le processus parallèle, pour des substances potentielles, de nouvelles substances venant d'être commercialisées et qui permet d'évaluer directement les déclarations afin de déterminer la possibilité d'arriver plus rapidement à des conclusions qu'accepteraient de nombreux pays. L'objectif de ces initiatives est l'acceptation mutuelle des déclarations, une étape supplémentaire vers des ententes actuelles de reconnaissance.

(1000)

    Durant les consultations multilatérales portant sur le Règlement sur les renseignements concernant les substances nouvelles qui ont eu lieu en 1999 et en 2000, il y a eu un soutien général en faveur de la continuité du rôle prépondérant qu'Environnement Canada et Santé Canada ont joué internationalement, en particulier dans le programme de l'OCDE.
    Selon l'une des recommandations issues de ces consultations, les deux ministères devraient officialiser leur stratégie en vue de leur prochain rôle international pour s'assurer d'un appui constant. Un document consécutif intitulé « À la recherche d'un terrain d'entente » a été publié par Environnement Canada. Il se trouve aussi dans le site Web de ce ministère et un extrait document est joint à l'annexe. Ce document très ambitieux est porteur de beaucoup d'espoir et de grandes valeurs. le Canada est perçu comme étant au premier plan dans ce domaine au sein de l'OCDE, en tant que défenseur de l'échange des données et de progrès dans ce processus de déclaration.
    Un autres aspect des activités internationales a été l'établissement d'ententes bilatérales officielles que j'ai mentionnées sur la communication des données inhérentes à l'évaluation de nouvelles substances, de façon à protéger les prétentions au secret des fabrications industrielles.
    Les deux plus importantes l'entente en la matière ont été établies avec l'EPA et le NICNAS australien. Grâce au dialogue avec l'Australie nous avons compris que ce pays avait prévu l'intérêt de convenir du programme d'évaluation de pays tiers en obtenant la réciprocité pour son propre programme. Cela est un résultat de l'échange des données. Ils ont compris que ce processus était viable et ils ont voulu en tirer profit. Le NICNAS les nomme « mécanismes étrangers approuvés ». Ils ont inséré dans leur réglementation des articles qui leur permettent de tirer le maximum de profits des travaux d'évaluation de pays tiers, sans compromettre leur souveraineté. le gouvernement a encore la capacité de décider s'il accepte ou non, mais s'il veut l'accepter, le processus du jugement en est accéléré. Vous trouverez à l'annexe 2, l'un de ces principaux articles.
    Ainsi, le Groupe de coordination de l'industrie pour la LCPE recommande de saisir l'occasion de l'examen de la LCPE pour ajouter du texte au prochain examen, ce qui permettrait à Environnement Canada et à Santé Canada de bénéficier des évaluations effectuées par d'autres pays, dans la mesure où les ministères le jugent approprié, pour éventuellement les accepter intégralement. La reconnaissance de la crédibilité ou de l'équivalence des capacités d'évaluation d'un autre gouvernement serait très utile pour améliorer l'efficacité de la déclaration des substances nouvelles sans diminuer la souveraineté du Canada, selon ce processus.
    C'est ce que le groupe de coordination de l'industrie de la LCPE voudrait promouvoir. L'idée qu'il reviendrait au seul gouvernement de décider s'il veut reconnaître un pays comme tel. Cette décision sera fondée sur l'examen de l'évaluation faite par ce pays et sur la conclusion que cette évaluation est relativement équivalente à celle du Canada.
    Je vous remercie de votre attention.

(1005)

    Merci beaucoup, monsieur Soule.
    Nous passons maintenant à Mme Thorpe de Clean Production Action.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je me nomme Beverly Thorpe et je travaille pour Clean Production Action à Montréal. Mon organisation est enregistrée aux États-Unis et nous travaillons dans le monde entier. Notre organisation a pour mission la promotion de produits viables et la chimie verte, nous collaborons avec des entreprises progressistes, des gouvernements, des travailleurs, des groupes de citoyens et pratiquement tous ceux qui réclament des matériaux et des substances chimiques plus sûrs.
    Je suis un membre fondateur du programme pour une production plus propre du PNUE et je fais partie du comité consultatif du réseau de chimie verte de l'Université de York au Royaume-Uni. J'ai suivi, pendant presque sept ans, la politique européenne sur les substances chimiques, particulièrement au cours des derniers mois de négociations du projet REACH.
    J'aimerais parler durant les quelques minutes qui suivent de la question de substitution qui découle en quelque sorte de la discussion sur l'évaluation. Je crois que nous pourrions renforcer la LCPE en établissant le principe de substitution et en expliquant plus clairement ce que signifie la prévention de la pollution.
    La Loi canadienne sur la protection de l'environnement définit la prévention de la pollution comme une gamme d'options, mais n'accorde aucune priorité au principe de substitution. En conséquence, les utilisateurs de produits chimiques pourraient ainsi continuer à utiliser des produits dangereux. La planification de la prévention de la pollution, engendrée dans le cadre de la LCPE par la désignation d'un produit chimique toxique aux termes de la LCPE, constitue notre principal outil pour l'adoption de produits chimiques plus sûrs. La prévention de la pollution est définie comme étant l'utilisation de procédés, de matériaux ou de produits qui empêchent ou réduisent au minimum la production de polluants ou de déchets. Il n'existe aucune référence explicite à un réel remplacement des matières. La réaction à une substance toxique aux termes de la LCPE pourrait donc facilement être l'adoption d'une mesure de contrôle « au point de rejet » afin de minimiser les émissions.
    Qu'est-ce que le principe de substitution et en quoi diffère-t-il? La définition que je donne dans mon document est plus ou moins acceptée en Europe : le terme « substitution » signifie la réduction des substances dangereuses dans les produits ou les procédés ou le remplacement de ces substances par d'autres plus sûres ou non dangereuses en obtenant une fonctionnalité équivalente par des mesures technologiques ou organisationnelles. En d'autres termes, un produit chimique dangereux peut être remplacé par un produit plus sûr ou non dangereux, ou la fonction du produit chimique dans le produit ou le procédé peut être réalisée par la reformulation du produit ou un changement de système.
    Je ne dispose pas de suffisamment de temps pour parler du travail que nous faisons avec les entreprises qui sont passées à la chimie verte et à un changement de paradigme totalement différent dans les substances chimiques plus sûres, mais la seule chose qui revient dans une grande partie du travail que nous faisons avec des entreprises progressistes, c'est le peu de soutien, de catalyse ou d'encouragement de la part des organismes de réglementation au niveau de l'égalité des chances avec les autres entreprises.
    En ce qui concerne le problème de la prévention de la pollution comparée au principe de substitution, je cite, dans mon document, l'exemple de l'utilisation du PERC dans le nettoyage à sec au Canada. Le PERC était inscrit sur la Liste des substances d'intérêt prioritaire depuis 1989 en raison de son omniprésence dans l'eau souterraine et de sa toxicité pour les humains. Il est toxique pour le foie et le système nerveux central, peut s'accumuler dans le corps et est possiblement cancérogène pour les humains, c'est d'ailleurs la raison pour laquelle il est désigné toxique par la LCPE. Il se retrouve dans le souffle et le lait maternel des mères allaitantes qui travaillent dans des établissements de nettoyage à sec, et contamine le pain, la viande et le beurre des commerces voisins.
    En 2000, le PERC a été ajouté à la Liste des substances toxiques de la LCPE (999) et en février 2003, ses règlements ont été établis. Cependant, l'objectif des règlements est de réduire les émissions de PERC dans l'environnement provenant des établissements de nettoyage à sec, et non d'encourager la substitution. Les règlements ne mentionnent aucun solvant ou procédé de rechange, mais soutiennent qu'il est possible de réduire les émissions en exigeant l'utilisation de machines de nettoyage à sec plus récentes et efficaces (et coûteuses), en minimisant les déversements de PERC et en gérant la collecte et l'élimination des résidus et des eaux résiduaires.
    Je peux comprendre que l'intention était bonne, mais pour moi le problème au niveau des règlements était qu'il existe, comme les propres recherches d'Environnement Canada l'ont démontré, des solutions de rechange comme le nettoyage à l'eau et des machines au dioxyde de carbone; il y a un manque de communication active des renseignements ou de formation dans le secteur du nettoyage à sec.

(1010)

    En ce qui concerne la substitution, j'ai remis à Eugene une copie que je trouve très intéressante. Difficile à croire, mais Chemical Industries Association, la Confederation of British Industry et Greenpeace ont tous convenu que les substances qui nécessitent une autorisation dans le cadre du projet REACH... devraient être remplacées par des substances moins dangereuses où et quand c'est possible.
    Cette déclaration a été beaucoup utilisée au sein du Parlement européen et par beaucoup d'entreprises, de détaillants, de syndicats et de travailleurs des secteurs de la santé et de la sécurité. ils réclament l'incorporation de l'article ferme dans le projet REACH. Seulement la semaine dernière, le Parlement européen a fait une deuxième lecture du projet et il doit se prononcer sur la nouvelle loi le 14 novembre. le 4 décembre, les gouvernements de l'union européenne au fond voteront sur la question. Les gens espèrent qu'il y aura un accord afin que le projet REACH soit mis en oeuvre au mois d'avril de l'an prochain.
    J'ai aussi pris la position commune du Conseil européen et étudié la déclaration du Parlement européen de la semaine dernière, en anglais et en français. J'ai souligné la référence à la substitution dans le cadre du processus d'autorisation. Le processus d'autorisation vise les substances chimiques cancérogènes, mutagènes et les agents toxiques pour la reproduction. Ce qui inclut les dérégulateurs endocriniens et les produits chimiques toxiques rémanents et bio-accumulables.
    Toute substance chimique de ce type doit passer par le processus d'autorisation. Que se passe-t-il dans le processus d'autorisation? Si vous êtes un fabricant ou un utilisateur de l'une de ces substances chimiques, vous devez demander une autorisation. La demande d'autorisation doit inclure des renseignements sur l'identité, plus une analyse des produits de rechange qui prennent en compte les risques et la faisabilité technique et économique des produits de rechange. Le principe de substitution différent mais explicite est présent tout au long de l'examen et des évaluations des autorisations.
    Il faut noter que cela est déjà convenu par les socialistes au sein du Parlement européen et les associations d'industries. La position commune vise le bon fonctionnement du marché interne tout en s'assurant que les risques des substances très préoccupantes soient bien contrôlés, et que ces substances soient éventuellement remplacées par des substances ou des technologies alternatives appropriées quand celles-ci sont économiquement et techniquement viables.
    Le document que je vous ai remis souligne la grande importance accordée aux besoins d'une planification de la substitution, le besoin de prouver qu'il n'y a pas de solution de rechange plus sûre dans le marché. Comment définir « plus sûre »? Beaucoup de documents d'orientation traitent de cette question. Une définition serait que la substance en question ne satisfait pas aux critères d'autorisation. Ils renvoient au processus d'obtention de renseignements sur des substances chimiques plus sûres dans Internet et des données fournies par des tiers.
    La semaine dernière, le Parlement européen a confirmé la position qu'il avait adoptée à la première lecture en novembre 2005. Le comité de l'environnement a déclaré que les substances qui causent le cancer, des problèmes de reproduction et des problèmes persistants dans le corps humain ne devraient pas être autorisés à moins de remplir trois conditions : premièrement, « s'il n'existe pas de substances, de technologies alternatives appropriées »; deuxièmement, « si les avantages sociaux-économiques l'emportent sur les risques qu'entraîne l'utilisation de ces substances pour la santé et l'environnement »; troisièmement « si ces risques peuvent être valablement maîtrisés ». Par ailleurs, l'autorisation donnée à l'utilisation des substances devrait être limitée à cinq ans.

(1015)

    En conclusion, j'appuie l'adoption d'une définition claire du terme « substitution ». Ainsi nous éviterons le contrôle au point au rejet, mais nous adopterons une chimie innovatrice. En Europe, de gros efforts sont faits pour passer à l'utilisation de produits chimiques plus sûrs. Nous constatons aussi que beaucoup d'utilisateurs subséquents de substances chimiques demandent plus de renseignements non seulement sur les substances chimiques qu'ils ajoutent à leurs produits, mais aussi sur les solutions de rechange disponibles. Nous croyons que l'établissement d'une exigence plus rigoureuse pour la planification de la substitution dans la LCPE suscitera une plus grande innovation et l'adoption de la chimie verte au Canada.
    Je vous remercie.
    Merci beaucoup, madame Thorpe.
    La parole est à notre dernier témoin, M. Cook du Groupe de travail sur l'environnement (É.-U.).
    Je m'appelle Ken Cook et je suis président du groupe de travail sur l'environnement, un organisme de défense et de recherche sans but de lucratif de Washington, D.C. Je suis enchanté et honoré de pouvoir témoigner devant vous aujourd'hui et je suis très heureux d'avoir l'occasion de le faire.
    Comme je l'ai dit, l'organisme que je préside utilise la recherche pour faire connaître des problèmes dans le domaine public. Au Canada, il est possible que nous soyons mieux connus pour une base de données que nous avons préparée et que nous avons mise sur le site Web et qui donne le nom de tous les bénéficiaires de subventions en agriculture aux États-Unis ainsi que la somme d'argent qu'ils ont reçue. Ce site Web est très populaire auprès des agriculteurs canadiens.
    Il n'y a pas très longtemps, notre organisme a commandé les analyses de laboratoire les plus poussées jamais réalisées pour déterminer dans quelle mesure les produits chimiques industriels toxiques, les pesticides et les polluants se retrouvaient dans l'organisme humain. Les scientifiques ont étudié la pollution de l'air, de l'eau et dans le sol pendant des décennies, il va sans dire, mais ce n'est que depuis relativement peu de temps que nous avons porté notre attention sur les types de polluants qui entrent dans notre organisme à tous.
    Nous avons envoyé des échantillons de sang de dix Américains à un laboratoire canadien de Colombie-Britannique pour déceler la présence de plus de 400 produits chimiques toxiques -- composés industriels synthétiques, pesticides et autres polluants. Uniquement chez ces dix personnes, nous avons trouvé 287 toxines industrielles; en moyenne, nous en avons décelé environ 200 par personne. Si nous avions investi plus de 10 000 $ par échantillon, il ne fait aucun doute que nous aurions trouvé beaucoup plus de contaminants chez ces personnes.
    Nous avons décelé la présence des tristement célèbres dioxines et furanes, des composés hautement cancérogènes, qui sont des produits de la combustion des déchets industriels et de la production du vinyle. Nous avons décelé des produits ignifuges persistants, dont on a constaté, dans des études animales, qu'ils provoquaient des troubles de l'attention, de la mémoire et du système nerveux à des concentrations extraordinairement faibles . Nous avons trouvé des produits chimiques qui sont utilisés depuis des décennies pour résister aux taches et pour imperméabiliser des tissus et des tapis et qui, chose assez intéressante, semblent ne jamais se dégrader dans l'environnement, contrairement à des produits aussi dangereux que les dioxines, le DDT et les BPC. Nous avons également décelé des produits de dégradation du DDT et des BPC, même si l'utilisation de ces composés est interdite depuis des décennies aux États-Unis. Nous avons trouvé des métaux lourds, comme le mercure et le plomb, qui peuvent provoquer des lésions irréversibles dévastatrices dans les tissus cérébraux et dans le système nerveux à des concentrations très faibles. En fait, plus nous étudions ces produits, plus nous sommes inquiets que des concentrations de plus en plus faibles puissent tout de même causer des dommages.
    Nous ne savons pas grand-chose de ces dix Américains. Il s'agissait de donneurs anonymes. Nous avons reçu les échantillons de sang par l'intermédiaire du programme de recherche de la Croix-Rouge américaine. Il ne s'agissait pas de travailleurs de l'industrie. Nous sommes certains qu'ils n'ont pas été exposés pendant qu'ils travaillaient sur la ferme. Nous savons qu'ils n'ont pas été exposés par le biais d'un produit de consommation quelconque qu'ils ont acheté, par l'eau qu'ils ont consommée ou par quelque exposition que ce soit qui pourrait être lié à l'endroit où ils ont choisi de vivre.
    La seule chose que nous sachions avec certitude au sujet de ces dix personnes, c'est qu'elles sont nées au mois d'août et de septembre 2004. Vous voyez, nous avons trouvé ces 287 polluants chimiques dans le sang de cordon ombilical de nouveau-nés.
    Lorsque les expositions ont eu lieu, ils rassemblaient à quelque chose comme ceci. Lorsque nous avons rendu notre rapport public, j'ai apporté des affiches qui montraient ces images au Capitole des États-Unis et je me suis fait arrêter par les gardes du Capitole qui m'ont dit que ce genre de matériel était interdit. Nous avons dû compter sur une escorte de la membre de la Chambre des représentants Louise Slaughter, membre senior du Congrès, pour entrer dans l'immeuble. Comme je ne connais pas bien les coutumes canadiennes -- bien que je sache que vous êtes reconnus pour être polis --, aujourd'hui, j'ai apporté les photos sur ordinateur.
    En Amérique, la pollution industrielle commence dans le sein de sa mère. Mes distingués collègues -- je suis fier de faire partie aujourd'hui du même groupe qu'eux -- de l'industrie chimique seraient bien incapables de vous dire lesquels des produits chimiques fabriqués par les entreprises qu'ils représentent se retrouvent dans le sang du cordon ombilical des bébés Canadiens. Ils en seraient absolument incapables.

(1020)

    Évidemment, la quantité de ces toxines présente dans le sang de cordon ombilical est assez faible -- parfois à de l'ordre des parties par milliard -- mais au cours des dernières décennies, nous avons appris en toxicologie et en chimie analytique que même des concentrations très faibles de composés chimiques, si la dose est administrée au mauvais moment au cours de développement d'un foetus, par exemple, peuvent causer des lésions sérieuses. Alors, ne laissez personne vous dire que c'est la dose qui fait le poison, jusqu'à ce que cette personne vous dise également clairement que le moment où la dose est administrée et que la vulnérabilité génétique de la personne, ou du sujet, qui reçoit cette dose ne sont pas importants non plus.
    Je pense que la véritable question que nous devons nous poser à l'heure actuelle, c'est pourquoi, alors que la révolution chimique a débuté il y a des décennies, nous ne faisons que commencer à apprendre des choses aussi élémentaires que les types et les quantités de polluants auxquels même les bébés sont exposés dans le sein de leur mère? Pourquoi est-ce si nouveau, des décennies plus tard? Comment se fait-il que même cette information de base concernant l'innocuité de ces expositions à des toxines individuelles fasse défaut? Comment se fait-il que nous ayons si peu d'information sur les risques potentiels pour les personnes exposées, même dans le sein de leur mère, à des agents cancérogènes multiples comme ceux que nous avons trouvés dans cette étude; à des neurotoxines multiples comme ceux que nous avons trouvées dans cette étude; à des agents multiples qui perturbent le système hormonal? Pourquoi est-ce le cas? Et ensuite, évidemment, il y a la grande question que tous les membres du groupe ont traité: pourquoi avons-nous exposé des bébés dans le sein de leur mère à des produits chimiques industriels avant d'être certains que ces expositions sont sans danger?
    Toutes ces questions nous amènent à féliciter nos collègues d'Environmental Defence Canada pour les études de surveillance biologique qu'ils ont réalisées -- et je sais qu'ils en ont d'autres en cours -- dans leur série de rapports intitulée Toxic Nation. Ils ont souligné la nécessité de protéger les populations vulnérables, notamment les plus vulnérables, qui sont également les moins en mesure de se protéger: les bébés dans le sein de leur mère, et les jeunes enfants.
    Le travail d'Environmental Defence et notre travail montrent clairement la nécessité d'avoir des calendriers efficaces pour l'action de réglementation visant à imposer à l'industrie le fardeau de démontrer l'innocuité des produits chimiques, et non pas au gouvernement de démontrer les torts qu'ils causent des décennies après qu'ils ont été mis sur le marché. À cet égard, je vous encourage à jeter un coup d'oeil sur la législation qui a été présentée l'an dernier aux États-Unis et qui se veut le miroir de la loi de 1996 qui a réformé nos politiques régissant les pesticides. Ce texte législatif s'appelle Child, Worker, and Consumer-Safe Chemicals Act.
    Le principal point que je veux faire ressortir concernant cette loi -- et je terminerez là-dessus, monsieur le président --, c'est qu'il y a des entreprises chimiques aux États-Unis qui fabriquent des pesticides et qui fabriquent des produits chimiques industriels à toutes sortes de fins, la même entreprise. D'un côté de l'immeuble, si vous voulez, ces entreprises doivent réaliser plus d'une centaines d'études de santé et sécurité avant que la mise en marché du pesticide soit autorisée, parce que nous savons qu'ils seront consommés par les gens dans les aliments ou qu'ils seront inhalés s'ils sont utilisés au foyer, ou dans le jardin, ou sur la ferme. Alors, ces études sont réalisées. De l'autre côté de l'immeuble, dans ces mêmes entreprises, il n'y a virtuellement aucune exigence pour des analyses sérieuses préalables à la mise en marché pour les composés industriels dont la présence dans du sang de cordon ombilical, et dans d'autres populations humaines, a été révélée, tardivement, par notre étude -- ainsi que de nombreux autres études ont maintenant commencé à le faire --, et pourtant, nous n'avons que très peu d'information sur leur innocuité.
    Alors, je vous encourage à voir ces délibérations, certainement comme je les vois moi-même, c'est-à-dire comme une occasion historique de moderniser la science, de la mettre à jour et de faire en sorte qu'elle protège la santé publique. Nous comptons certainement sur le Canada pour jouer un rôle de chef de file dans le monde dans ce domaine.
    Monsieur le président, merci beaucoup de votre temps.

(1025)

    Merci, monsieur Cook.
    J'ai oublié de présenter deux participants ici. MM. Arseneau et Clarkson, respectivement d'Environnement Canada et de Santé Canada. Comme vous le savez, vous faites partie de toute discussion qui a lieu ici et les membres du comité peuvent vous adresser des questions.
    En raison du peu temps dont nous disposons, je demanderais aux membres d'être vraiment précis dans leurs questions. Essayons de poser le plus grand nombre de questions possibles dans le temps que nous avons et si vous estimez que vous n'êtes pas obligés d'utiliser les 10 minutes, ne les utilisez pas.
    Nous allons commencer par M. Silva et M. Godfrey qui partagent leur temps.
    Merci, monsieur le président.
    Je veux remercier tous les témoins de leur comparution. J'ai beaucoup aimé ces discussions.
    Peut-être que nos invités américains ici présents, en particulier M. Denison et peut-être M. Cook, pourraient répondre à ces questions.
    Lorsqu'on regarde ce que les Européens ont fait, lorsqu'on regarde la Loi canadienne sur la protection d'environnement et lorsqu'on regarde ce que les Américains envisagent de faire, les différences pour ce qui est de la manière que nous pouvons, en fait, aborder la question, à savoir si le fardeau de la preuve doit reposer sur l'industrie ou sur le gouvernement, j'imagine que l'on serait davantage d'accord avec le système européen. Mais quels sont les avantages et les inconvénients des deux systèmes?
    Je vous remercie de cette question.
    Je dirais qu'il y a des différences importantes en ce qui concerne le rôle relatif de l'industrie et du gouvernement dans ces propositions différentes. Une différence avec la proposition REACH, qui est vraiment assez révolutionnaire dans son approche, c'est d'imposer à l'industrie le fardeau non seulement de produire l'information, mais également d'évaluer cette information et de décider quelles mesures de gestion du risque sont nécessaires. Ces deux derniers éléments sont traditionnellement des fonctions du gouvernement et font partie intégrante de tous les programmes sur les produits chimiques, peu importe qu'il s'agisse de pesticides, de produits pharmaceutiques ou de quoi que ce soit d'autre.
    Le rôle du gouvernement dans la proposition REACH sera en grande partie un rôle de surveillance, pour vérifier que cette information est exacte. Une de mes préoccupations face à cette proposition, pour dire la vérité, c'est que le processus d'évaluation des présentations de l'industrie ne comporte pas de calendrier et qu'il n'y a pas de cadence particulière imposée pour la réalisation de ce travail. Je pense, en fait, qu'il y a beaucoup d'aspects novateurs dans la proposition REACH, mais il y a des éléments comme celui-là qui sont vraiment une source de préoccupation pour moi. C'est vraiment une question d'essayer de trouver les meilleures caractéristiques de ces systèmes différents et de les combiner et de s'assurer qu'ils fonctionnent dans le contexte culturel et réglementaire d'un pays. C'est là le défi et mon rapport tente en réalité de cerner ce problème
    Il y a des systèmes complètement différents en jeu: le système européen, le système américain et le système canadien.
    En termes de niveau d'exposition, est-ce que les Canadiens ou les Américains sont plus susceptibles d'être exposés à des produits chimiques que les Européens?
    Je suis désolé, je n'ai pas très bien entendu la question.
    En termes de niveau d'exposition aux produits chimiques -- et vous avez fait vos études des systèmes européen, canadien ou américain --, est-ce que les Américains ou les Canadiens sont plus exposés aux produits chimiques en vertu du régime que nous avons actuellement?
    La vérité, c'est que nous en sommes dans les premiers balbutiements pour ce qui est de comprendre ces choses. Je crois comprendre que Santé Canada mettra en oeuvre un programme de surveillance biologique très prochainement, alors nous allons commencer à avoir certaines mesures pour le Canada, des mesures très importantes. Je les félicite d'entreprendre ce travail et de l'appui qu'il y a derrière cette entreprise.
    Nous ne faisons vraiment que commencer à essayer de comprendre ce qui se passe. Laissez-moi vous donner un bon exemple. Il y a un produit chimique appelé PFOS. Il s'agit d'un des ingrédients utilisés dans la fabrication du Téflon. Il y a un composé semblable, le PFOA, qui est utilisé dans la fabrication du Scotchgard. Lorsqu'elles ont commencé à examiner leur ingrédient Scotchgard, des entreprises, en particulier 3M, ont entrepris une étude parce qu'elles voulaient évaluer leurs travailleurs; elles savaient qu'ils étaient exposés et que ce produit chimique était présent dans leur sang; elles voulaient comparer les résultat avec du sang propre provenant de la population générale. Elles ont acheté du sang dans des banques de sang partout aux États-Unis. Lorsqu'elles ont envoyé ces échantillons au laboratoire, il n'y avait pas de sang propre. Alors, elles sont allées en Europe. Elles sont allées en Chine. Le sang propre qu'elles ont trouvé, qu'elles étaient le plus à l'aise d'utiliser pour comparaison avec le sang des travailleurs a été le sang qui a été prélevé chez des recrues de l'armée durant la guerre de Corée et qui avait été archivé.
    Ce que nous avons vraiment ici, c'est le tout début de l'étude de la pollution chez les humains. Nous devons en savoir beaucoup plus sur cette question. Nous devons savoir quand la contamination commence. Pendant de nombreuses années, nous avons cru que la plupart de ces polluants ne traversaient pas le placenta, qu'il assurait une protection. Ce n'était pas le cas.
    Pour être honnête, lorsqu'un petit organisme sans but lucratif comme le mien, doté d'un budget de moins de 4 millions de dollars, réalise la première étude détaillée et poussée sur du sang de cordon ombilical, cela en dit long sur la situation désolante de la science dans l'industrie, si vous me posez la question. Alors, on ne fait que commencer à savoir, monsieur.

(1030)

    Je veux que vous sachiez qu'au Canada, nous utilisons les députés pour tester ces choses. On a pris des mesures dans mon sang. Je participe au concours du politicien le plus toxique du pays. En voilà un que je ne veux pas gagner.
    Je vais faire deux suppositions, M. Denison, et ensuite, je vais adresser ma question à M. Arseneau.
    Je suppose -- en effet, je supposerais que cela est généralement vrai pour le groupe -- qu'il y a un énorme avantage industriel à avoir des régimes communs, lorsque la chose est possible, sur de grandes superficies, c'est-à-dire que si vous pouvez avoir quelque chose qui est bon pour les États-Unis, bon pour l'Union européenne et bon pour le Canada, c'est là un avantage industriel. Et je suppose également que, fondamentalement, les trois systèmes qui sont en place sont des systèmes de bonne volonté, c'est-à-dire qu'ils ne sont pas corrompus. Nous pouvons fondamentalement avoir une certaine confiance à la fois dans les données et dans les évaluations, bien qu'elles puissent être réalisées de façons différentes, ce qui signifie qu'alors, nous pourrions avoir une certaine confiance, si nous les partagions.
    S'agit-il d'une bonne supposition d'entrée de jeu, M. Denison?
    Oui, je le dirais.
    Très bien. Et maintenant, ma question à M. Arseneau.
    Si c'est vrai, et que vous regardez les suggestions de M. Denison au sujet de l'accès aux données, lorsque vous examinez tout cela, y a-t-il une raison quelconque pourquoi nous ne devrions pas faire ce genre de choses? Deuxièmement, est-il techniquement possible d'en arriver à un niveau de partage de manière que nous puissions éviter l'ambiguïté, de manière que nous puissions adapter nos systèmes pour qu'ils puissent prendre ce genre d'information en compte? Troisièmement, pouvons-nous faire cela principalement par le biais de la réglementation ou est-ce que ce partage de données et d'évaluations exigera nécessairement une modification de la loi?
    De toute évidence, il y a des avantages à pouvoir avoir accès aux résultats des analyses et à l'information sur les produits chimiques qui sont produits à l'échelle internationale. Le travail du Canada dans ce domaine, jusqu'à présent, a été, en fait, assez ambitieux, pour être en mesure d'avoir accès à l'information internationale concernant les effets toxiques, les utilisations des produits chimiques, la production, etc. et de l'utiliser.
    Dans le cadre de l'OCDE, nous travaillons en étroite collaboration avec d'autres pays pour...
    Monsieur le président, je n'ai pas planifié cette alerte d'incendie.
    Un greffier est allé voir ce qui se passe.
    Je suis désolé, nous allons devoir partir. Nous devrons probablement ajourner nos travaux. Je dois vraiment présenter toutes mes excuses à nos invités.
    La séance est levée.