CHPC Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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38e LÉGISLATURE, 1re SESSION
Comité permanent du patrimoine canadien
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le lundi 4 avril 2005
¿ | 0925 |
La présidente (Mme Marlene Catterall (Ottawa-Ouest—Nepean, Lib.)) |
Mme C.V. Caryl Brandt (directrice générale, Manitoba Motion Picture Industry Association) |
Mme Carole Vivier (directrice générale, Manitoba Film & Sound) |
¿ | 0930 |
Mme C.V. Caryl Brandt |
Mme Carole Vivier |
¿ | 0935 |
Mme C.V. Caryl Brandt |
Mme Carole Vivier |
Mme C.V. Caryl Brandt |
¿ | 0940 |
Mme Carole Vivier |
¿ | 0945 |
Mme C.V. Caryl Brandt |
Mme Carole Vivier |
La présidente |
M. Victor Enns (directeur éxécutif, Winnipeg Film Group) |
¿ | 0950 |
¿ | 0955 |
À | 1000 |
À | 1005 |
À | 1010 |
La présidente |
M. Gary Schellenberger (Perth—Wellington, PCC) |
Mme Carole Vivier |
Mme C.V. Caryl Brandt |
M. Gary Schellenberger |
À | 1015 |
La présidente |
M. Maka Kotto (Saint-Lambert, BQ) |
Mme Carole Vivier |
À | 1020 |
M. Maka Kotto |
Mme Carole Vivier |
Mme C.V. Caryl Brandt |
La présidente |
M. Victor Enns |
À | 1025 |
La présidente |
M. Charlie Angus (Timmins—Baie James, NPD) |
À | 1030 |
Mme Carole Vivier |
Mme C.V. Caryl Brandt |
M. Charlie Angus |
À | 1035 |
La présidente |
M. Mario Silva (Davenport, Lib.) |
Mme C.V. Caryl Brandt |
M. Mario Silva |
À | 1040 |
Mme Carole Vivier |
La présidente |
Mme Bev Oda (Durham, PCC) |
À | 1045 |
Mme Carole Vivier |
Mme Bev Oda |
M. Victor Enns |
Mme Bev Oda |
À | 1050 |
La présidente |
M. Maka Kotto |
M. Victor Enns |
À | 1055 |
La présidente |
L'hon. Sarmite Bulte (Parkdale—High Park, Lib.) |
Á | 1100 |
M. Victor Enns |
L'hon. Sarmite Bulte |
Mme C.V. Caryl Brandt |
Mme Carole Vivier |
L'hon. Sarmite Bulte |
Mme Carole Vivier |
La présidente |
Á | 1105 |
Mme Carole Vivier |
La présidente |
La présidente |
Mme Valerie Creighton (directrice générale, Saskatchewan Film & Video Development Corporation) |
Á | 1125 |
Á | 1130 |
M. David Hayter (directeur des opérations, Saskatchewan Motion Picture Association) |
La présidente |
Mme Valerie Creighton |
La présidente |
M. Gord Brown (Leeds—Grenville, PCC) |
Á | 1135 |
Mme Valerie Creighton |
M. Gord Brown |
Mme Valerie Creighton |
Á | 1140 |
M. Gord Brown |
La présidente |
M. Mario Silva |
Mme Valerie Creighton |
M. Mario Silva |
Mme Valerie Creighton |
M. Mario Silva |
La présidente |
M. Gary Schellenberger |
Á | 1145 |
Mme Valerie Creighton |
M. Gary Schellenberger |
Mme Valerie Creighton |
Á | 1150 |
La présidente |
M. Charlie Angus |
La présidente |
M. Charlie Angus |
Mme Valerie Creighton |
M. Charlie Angus |
Mme Valerie Creighton |
Á | 1155 |
M. Charlie Angus |
Mme Valerie Creighton |
La présidente |
L'hon. Sarmite Bulte |
 | 1200 |
Mme Valerie Creighton |
L'hon. Sarmite Bulte |
Mme Valerie Creighton |
L'hon. Sarmite Bulte |
Mme Valerie Creighton |
L'hon. Sarmite Bulte |
Mme Valerie Creighton |
L'hon. Sarmite Bulte |
Mme Valerie Creighton |
L'hon. Sarmite Bulte |
Mme Valerie Creighton |
L'hon. Sarmite Bulte |
Mme Valerie Creighton |
L'hon. Sarmite Bulte |
Mme Valerie Creighton |
L'hon. Sarmite Bulte |
La présidente |
L'hon. Sarmite Bulte |
Mme Valerie Creighton |
L'hon. Sarmite Bulte |
 | 1205 |
Mme Valerie Creighton |
La présidente |
Mme Valerie Creighton |
La présidente |
Mme Bev Oda |
Mme Valerie Creighton |
Mme Bev Oda |
Mme Valerie Creighton |
Mme Bev Oda |
 | 1210 |
Mme Valerie Creighton |
Mme Bev Oda |
Mme Valerie Creighton |
Mme Bev Oda |
Mme Valerie Creighton |
Mme Bev Oda |
La présidente |
M. Maka Kotto |
Mme Valerie Creighton |
 | 1215 |
M. Maka Kotto |
Mme Valerie Creighton |
M. Maka Kotto |
La présidente |
M. Maka Kotto |
La présidente |
M. Mario Silva |
Mme Valerie Creighton |
La présidente |
 | 1220 |
M. Mario Silva |
La présidente |
Mme Valerie Creighton |
La présidente |
Mme Valerie Creighton |
La présidente |
M. Charlie Angus |
Mme Valerie Creighton |
 | 1225 |
La présidente |
Mme Bev Oda |
Mme Valerie Creighton |
Mme Bev Oda |
Mme Valerie Creighton |
 | 1230 |
Mme Bev Oda |
Mme Valerie Creighton |
La présidente |
L'hon. Sarmite Bulte |
Mme Valerie Creighton |
L'hon. Sarmite Bulte |
Mme Valerie Creighton |
L'hon. Sarmite Bulte |
La présidente |
CANADA
Comité permanent du patrimoine canadien |
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TÉMOIGNAGES
Le lundi 4 avril 2005
[Enregistrement électronique]
¿ (0925)
[Traduction]
La présidente (Mme Marlene Catterall (Ottawa-Ouest—Nepean, Lib.)): La séance est ouverte. Bienvenue à nos premiers témoins de la journée.
Jusqu'à 11 heures, nous entendrons les représentants de la Manitoba Motion Picture Industry Association, de la Manitoba Film and Sound et du Winnipeg Film Group. Nous sommes très occupés et je sais que ce sera une réunion très instructive. Bienvenue à tous. Merci beaucoup d'avoir accepté notre invitation.
Vous avez la parole.
Mme C.V. Caryl Brandt (directrice générale, Manitoba Motion Picture Industry Association): Bonjour, mesdames et messieurs. Je vous remercie d'avoir invité des représentants de la région des Prairies à vos audiences, quoique Carole et moi, nous nous demandions si ce n'était pas une punition, le lendemain des Juno, pour vous avoir demandé de tenir des audiences à Winnipeg.
Je m'appelle Caryl Brandt et je suis directrice générale de la Manitoba Motion Picture Industry Association, que nous appelons MMPIA. La MMPIA est une association à but non lucratif, à participation volontaire et dirigée par un conseil d'administration qui défend les intérêts de l'industrie du cinéma du Manitoba. Les 350 sociétés de production et de services, groupes syndicaux, industries, organisations et particuliers qui sont membres de l'Association représentent environ 1 400 personnes, de tous les horizons du milieu de la production au Manitoba.
Je suis accompagnée de ma collègue, Carole Vivier, commissaire à la cinématographie et directrice générale de la Manitoba Film & Sound Recording Development Corporation, quelquefois appelée MFS.
Mme Carole Vivier (directrice générale, Manitoba Film & Sound): Bonjour, mesdames et messieurs.
La Manitoba film & Sound est une société constituée en vertu d'une loi du gouvernement provincial du Manitoba. Nous participons au développement de l'industrie du cinéma manitobaine par le biais d'investissements en actions, de prêts, d'avances récupérables et de contributions financières dans les domaines du développement, de la production et du marketing, et à l'administration du crédit d'impôt provincial.
Outre l'industrie du cinéma—qui est celle que nous représentons ce matin—nous investissons également dans le développement de l'industrie du disque du Manitoba. Ceux et celles qui ont assisté hier soir à la cérémonie de remise des prix Juno ont pu voir le pot-pourri final sur la scène, avec les Wailin Jennys, Nathan, Waking Eyes, Fresh I.E.—tous ces artistes manitobains dans la musique desquels nous avons investi. Ce n'était qu'une parenthèse.
Nos deux organisations, la Manitoba Film and Sound et la MMPIA, représentent le soutien du gouvernement provincial et du secteur privé aux industries du cinéma et de la télévision au Manitoba. Nous sommes ici parce que nous sommes des sympathisants inconditionnels de l'industrie cinématographique au Manitoba et que nous sommes conscients du fait qu'il est important d'établir une politique fédérale dans ce domaine et de fournir les ressources financières et administratives corrélatives.
Nous sommes encouragés de constater que le gouvernement du Canada se donne la peine d'examiner la situation de cet important secteur culturel et sommes heureux d'avoir l'occasion de faire des commentaires.
¿ (0930)
Mme C.V. Caryl Brandt: Avant de présenter notre mémoire écrit, je voudrais vous donner une idée de la taille et de la portée de notre industrie en vous montrant une courte vidéo sur les projets de production de films et d'émissions de télévision qui ont été produits au Manitoba. Nous vous exposerons également quelques faits économiques saillants avant d'entamer notre analyse de la politique. N'oubliez pas de regarder la partie qui concerne les crédits.
[Vidéo]
Mme Carole Vivier: Comme vous pouvez le constater, l'industrie manitobaine a développé sa capacité de fournir les services nécessaires pour les productions hollywoodiennes de la liste A et de maintenir un environnement constructif et propice en ce qui concerne les productions manitobaines.
En ce qui concerne l'aspect financier, il est important de signaler que la collectivité de la production du Manitoba s'agrandit. Alors que le niveau de production a diminué ou qu'il s'est stabilisé à l'échelle nationale et dans d'autres provinces, le volume de production au Manitoba a augmenté de plus de 50 p. 100 au cours des cinq dernières années pour atteindre une valeur totale de plus de 107 millions de dollars au 31 mars 2004. En ce qui concerne l'emploi, il a augmenté de plus de 65 p. 100 pour atteindre un minimum de 500 postes équivalent temps plein au 31 mars 2003. La production provinciale a représenté en moyenne un chiffre d'affaires annuel de 30 millions de dollars au cours des quatre dernières années. Cette production est le fondement de notre industrie et le sujet principal de notre exposé.
¿ (0935)
Mme C.V. Caryl Brandt: Notre mémoire et notre exposé s'articulent autour de trois points principaux. Le premier est qu'une politique cinématographique nationale, comprenant des mécanismes de soutien, est nécessaire et essentielle au succès de l'industrie. Le deuxième est que toutes les régions du Canada doivent avoir un accès équitable au financement et aux programmes. Le troisième est que la mise en marché, la promotion et la distribution sont les plus grandes priorités de l'étape suivante de la mise en oeuvre de la politique cinématographique.
En s'appuyant sur les paramètres indiqués pour l'étude de la politique par le comité, la Manitoba Film & Sound et la MMPIA ont examiné les quatre objectifs actuels de la politique cinématographique, ainsi que des mécanismes de soutien, en particulier Téléfilm, le Fonds canadien de télévision et les crédits d'impôt. À la suite de notre examen, nous pensons que les quatre objectifs énoncés sont toujours pertinents aujourd'hui et qu'ils constituent un cadre de travail utile pour mettre en oeuvre la politique et y apporter des améliorations. Nos commentaires seront axés sur trois principaux points. Nous vous encourageons à lire les recommandations que nous faisons dans notre mémoire.
Mme Carole Vivier: Notre premier point important est que le financement provenant du Fonds du long-métrage du Canada est essentiel au succès de l'industrie et qu'il est nécessaire pour optimiser les investissements privés et provinciaux. Pour la plupart des producteurs, un long-métrage n'est pas rentable sans un investissement initial de Téléfilm Canada. En ce qui concerne les longs-métrages en langue anglaise, au cours de la dernière année financière, la contribution de Téléfilm a représenté environ 20 p. 100 du financement total. Si l'on se base sur des budgets de production moyens de 6,9 millions de dollars, cela signifie que 5,5 millions de dollars par projet ont été obtenus d'autres sources grâce à la participation de Téléfilm. Le nombre de projets de longs-métrages en langue anglaise inscrits s'élevant à 22, l'industrie a donc recueilli des fonds d'un montant total de 121 millions de dollars par l'intermédiaire du Fonds du long-métrage du Canada.
L'investissement de Téléfilm est d'une aide précieuse et le Fonds du long-métrage du Canada doit être renouvelé. Idéalement, son budget devrait être augmenté pour appuyer au moins les trois nouvelles initiatives ou améliorations : premièrement, accroître les fonds pour financer la formation d'un plus grand nombre de talents; deuxièmement, créer des programmes pour financer les talents qui proviennent des milieux autochtones et francophones hors Québec et, troisièmement, créer un fonds pour subventionner les longs-métrages documentaires.
En ce qui concerne les mécanismes de soutien, nous apprécions l'existence de Téléfilm Canada et signalons que cet organisme fait partie intégrante de l'infrastructure de l'industrie. Du fait que nous sommes Manitobains, nous insistons tout particulièrement sur la nécessité de maintenir les bureaux régionaux. En ce qui nous concerne, le bureau de l'Ouest donne à nos clients l'accessibilité aux programmes et au personnel, ainsi qu'une certaine représentation. Les deux rôles sont particulièrement pertinents dans une industrie basée sur les relations. À ce titre, les contacts demeurent une priorité pour nous et nous aimerions que les efforts dans ce domaine se poursuivent et s'intensifient.
En ce qui concerne le Fonds canadien de télévision, nous suggérons que le volet du Fonds du long-métrage du Canada administré par le Fonds canadien de télévision soit centralisé à Téléfilm, afin de faciliter le processus et l'administration pour ceux qui demandent des fonds. Nous manifestons en outre notre appui pour le maintien des programmes de crédits d'impôt à la production qui sont indispensables et nous suggérons des améliorations telles que des crédits accrus ou un bonus pour les longs-métrages, qui constitueraient une source de fonds supplémentaires pour cette industrie.
Mme C.V. Caryl Brandt: Notre deuxième suggestion est que l'accès équitable au financement et aux programmes de toutes les régions du Canada est essentiel à la croissance de l'industrie nationale. Tel que démontré dans la vidéo, le Manitoba possède une industrie active et en pleine croissance, quoiqu'à une échelle moindre que dans les grands centres urbains de Toronto, Montréal et Vancouver où l'industrie est bien établie.
Dans un contexte où les ressources financières et les relations personnelles fiables sont restreintes, les distributeurs et les fournisseurs de fonds sont tentés de rester dans leur zone de sécurité et de cesser d'aller voir plus loin que ce à quoi ils ont un accès immédiat pour leurs projets. Si nous insistons sur un accès équitable, c'est parce qu'il y a des personnes de talent à l'échelle nationale et qu'il est essentiel que des possibilités de reconnaître et de soutenir la diversité des talents soient en vue.
Au Manitoba, depuis une quinzaine d'années, nous produisons généralement un ou deux longs-métrages par an qui reçoivent des fonds de Téléfilm. La participation moyenne du Fonds du long-métrage du Canada représente 43 p. 100 de notre budget de production, soit davantage que la moyenne nationale de 20 p. 100. C'est une preuve de la difficulté qu'ont les producteurs régionaux à trouver des fonds à l'extérieur, où les budgets sont généralement plus restreints. Par conséquent, la participation de Téléfilm représente un pourcentage plus élevé, mais un montant réel de subventions inférieur à celui des subventions accordées aux membres de l'industrie du centre du pays.
À propos de l'accès équitable, il est important de signaler le lien entre des budgets de production accrus et les difficultés qu'éprouvent les producteurs régionaux à trouver tout le financement nécessaire. Nous estimons que l'augmentation des budgets est nécessaire pour accroître la valeur de la production des films canadiens mais que les structures de financement sont devenues plus complexes et risquent de devenir incertaines. Il est important de noter que John Dippong, directeur des programmes cinématographiques au bureau de l'Ouest de Téléfilm, a déclaré dans une allocution à Winnipeg que, durant l'année financière 2004-2005, 7 millions de dollars des fonds affectés à la production cinématographique de Téléfilm dans la région de l'Ouest ont été réaffectés à l'extérieur de la région parce que, même si les projets étaient solides sur le plan créatif et viables sur le plan de la production, ils ne pouvaient pas obtenir leur financement à temps.
Bien que nous ne puissions pas apporter de solution précise à cet égard, nos organisations tiennent à souligner l'incidence pour la région de l'Ouest des difficultés posées par l'augmentation des budgets de production et du temps requis pour obtenir le financement d'un projet. En outre, le problème du financement attire l'attention sur le rôle important que jouent les fonds fédéraux dans un accroissement de la capacité au Manitoba.
La note positive est que la contribution de 42 p. 100 de Téléfilm permet d'obtenir près de 15 p. 100 des fonds nécessaires du gouvernement provincial, qui appuie l'industrie, ainsi que 42 p. 100 d'autres sources.
En ce qui concerne plus spécifiquement la politique actuelle en matière de long-métrage, nous sommes en faveur de la création et de l'existence de la composante rendement et de la composante sélection. La composante rendement est valable pour accorder aux entreprises établies la latitude dont elles ont besoin pour réaliser les projets qu'elles appuient sans l'intervention d'une tierce partie. Ce qui est encore plus important, c'est qu'au Manitoba, la composante « sélection » est nécessaire pour que les films manitobains aient accès au financement fédéral. Comme l'industrie du Manitoba est relativement nouvelle par rapport à celles de l'Ontario et du Québec, aucune entreprise de la province n'est admissible à la composante « rendement ». Sans la composante « sélection », les films du Manitoba ne pourraient pas recevoir de subventions fédérales, et le public canadien n'aurait pas accès aux histoires racontées par nos cinéastes.
La MMPIA et la MFS aimeraient souligner que d'après la cible établie par Téléfilm, 75 p. 100 des fonds devraient être affectés à la composante rendement et que les résultats du rapport annuel 2003-2004 de Téléfilm indiquent que 24 p. 100 des fonds pour les films en langue anglaise ont été affectés à la composante rendement. La MFS et la MMPIA recommandent fortement que la division des fonds de production en langue anglaise ne change pas, de façon à financer la composante « sélection » dans la proportion actuelle de 75 p. 100. Tous les efforts déployés pour augmenter rapidement les affectations à la composante « rendement » auront probablement pour effet de restreindre l'accès des producteurs du Manitoba aux fonds fédéraux du long-métrage tant que ces derniers n'auront pas le temps d'établir le dossier de succès commercial nécessaire pour obtenir des fonds de rendement.
¿ (0940)
Mme Carole Vivier: Notre troisième et dernier point, et celui sur lequel nous voudrions particulièrement insister, est que la mise en marché, la promotion et la distribution doivent être les plus grandes priorités pour l'étape suivante de la mise en oeuvre de la politique en matière de long-métrage. Alors qu'à la suite de la politique de 2000, on a constaté des améliorations dans l'industrie en ce qui concerne la rédaction de scénarios et la production, la distribution est un élément essentiel qui est encore inadéquat et qui frustre au plus haut point les producteurs et, à mon avis, les investisseurs. Au Manitoba, de nombreux projets de long-métrage ont eu de la difficulté à survivre ou ont échoué en raison d'un soutien insuffisant à la mise en marché, à la promotion et à la distribution.
Nous avons cinq recommandations à faire pour relever les défis au niveau de la production. La première est que, pour pouvoir combler le retard, nous recommandons qu'un examen et une analyse en profondeur de l'industrie de la distribution et de la projection de films soient effectués pour compléter la politique cinématographique actuelle. Pour le seul niveau de la distribution, nous avons relevé les quatre défis suivants : le manque de distributeurs canadiens compétents, l'absence de participation créative de la part des maisons de distribution au stade du développement et le fait que le système actuel empêche la prise de risques financiers. La projection de films est un élément clé qui a dernièrement attiré l'attention du secteur de l'industrie qui assure le financement de la production et il est nécessaire d'en avoir une meilleure connaissance.
En outre, nous encourageons le comité à explorer des options pour accroître la projection de films canadiens sur les écrans canadiens. Conscient du fait que certaines suggestions ne sont pas réalisables—les quotas pour les salles de cinéma, par exemple—, le Manitoba voudrait que l'on tienne une discussion nationale pour stimuler l'éclosion de nouvelles idées qui pourraient être mises en oeuvre.
Deuxièmement, nous pensons que Téléfilm, en tant qu'agence fédérale pour le cinéma, doit être en mesure de tenir les distributeurs responsables de l'élaboration de plans de mise en marché et de promotion légitimes et viables. À titre d'investisseur financier, la Manitoba Film & Sound s'est rendu compte que des plans de mise en marché et de promotion des longs-métrages étaient rarement préparés d'avance et que, s'ils l'étaient, ils n'étaient jamais très détaillés ou ne se rapportaient pas particulièrement à un film précis. Il est arrivé qu'un producteur ait dû embaucher un expert-conseil de l'extérieur pour préparer un plan de mise en marché, parce que le distributeur n'en avait pas créé. Cette pratique est inacceptable dans une industrie qui se consacre à la vente et à la promotion de films, surtout lorsque des subventions fédérales sont octroyées, et il est absolument nécessaire d'apporter des changements positifs à cet égard.
Troisièmement, la politique fédérale devrait permettre aux distributeurs non canadiens au Canada d'élargir la capacité commerciale. Compte tenu du nombre limité de distributeurs au Canada et des fonds limités dont ils disposent, nous vous demandons instamment d'examiner diverses options pour élargir le marché canadien de façon à inclure des distributeurs non canadiens. La distribution est un milieu concurrentiel à l'échelle mondiale. Si un distributeur britannique, français ou américain est intéressé à appuyer un projet canadien et s'il dispose des ressources nécessaires, nous sommes convaincus que c'est un avantage pour l'industrie canadienne.
¿ (0945)
Mme C.V. Caryl Brandt: Quatrièmement, nous pensons que les diffuseurs canadiens ont un rôle à jouer dans l'industrie cinématographique, un point qui a été soulevé et souligné au cours de l'examen fédéral de la politique cinématographique en 1998. Nous suggérons d'explorer davantage les façons de mettre en place des possibilités de contribution pour les diffuseurs. Nous sommes intrigués par l'idée de Wayne Clarkson de faire des premières pour les longs-métrages à la télévision, puis de les vendre sur DVD et nous appuyons intégralement toute idée novatrice permettant aux longs-métrages manitobains de trouver une audience.
Cinquièmement, nous recommandons vivement qu'un fonds de mise en marché et de promotion soit créé afin d'aider les producteurs à assister aux festivals, à participer à la mise en marché et à la promotion de leurs films et (ou) à embaucher un représentant ou un agent des ventes pour les aider. La majorité des producteurs canadiens sont de petites entreprises disposant de ressources humaines et financières limitées. Souvent, elles n'ont ni le temps, ni les fonds, ni les compétences nécessaires pour suivre un projet sur tout le cycle de distribution et doivent plutôt consacrer leurs énergies à la production suivante. L'honneur d'être reconnu dans un festival international est assombri par les conditions logistiques et financières nécessaires pour y présenter le film, particulièrement dans le cas des nouveaux producteurs. Vu la difficulté actuelle de l'accès aux distributeurs et la qualité de service offerte par ces derniers, il est opportun et valable de soutenir les producteurs pour leur permettre de participer à la mise en marché et à la promotion.
Mme Carole Vivier: En conclusion, je signale que la Manitoba Film & Sound et la MMPIA sont des sympathisants inconditionnels d'une industrie en croissance et viable au Manitoba.
Au nom de l'association de l'industrie et de sa société de développement provinciale, nous vous demandons de ne pas oublier et d'examiner les trois points principaux suivants dans le cadre de l'examen de la politique cinématographique fédérale. Premièrement, une politique cinématographique nationale, comprenant des mécanismes de soutien, est nécessaire et essentielle au succès de l'industrie. Deuxièmement, toutes les régions du Canada doivent avoir un accès équitable au financement et aux programmes. Troisièmement, il est essentiel que la mise en marché, la promotion et la distribution soient les plus grandes priorités de l'étape suivante de la mise en oeuvre de la politique cinématographique.
Je vous remercie pour votre attention.
La présidente: Merci beaucoup.
Quel est le groupe de témoins suivant? Nous voulons d'abord entendre tous les exposés, puis nous passerons à la période des questions.
Monsieur Enns.
M. Victor Enns (directeur éxécutif, Winnipeg Film Group): Bonjour.
Je m'appelle Victor Enns. Je suis le directeur exécutif du Winnipeg Film Group. Je suis accompagné aujourd'hui de Carole O'Brien et de Kevin Nikkel, deux cinéastes qui sont également membres du conseil d'administration du Winnipeg Film Group.
Le Winnipeg Film Group a environ 350 membres, dont une centaine participent activement à la production de films. La plupart d'entre eux sont en début ou en milieu de carrière, quoique la réduction du coût de production de longs-métrages par les techniques numériques provoque de grands changements dans le domaine de la réalisation de films, puisque la technologie numérique fait baisser les coûts. Certains membres de notre organisation réalisent des longs-métrages à petit budget. En fait, le nombre de nos membres augmente.
Je ne suivrai pas nécessairement le modèle industriel dont vous avez entendu parler, mais j'exposerai les faits saillants en me basant sur le mémoire que nous avons préparé, d'après les recommandations des divers départements du Winnipeg film Group et d'après le modèle de production et de distribution de films.
Je tiens tout d'abord à remercier la ministre qui était ici hier et a fait des commentaires sur le soutien de la reconduction de « Un avenir en art ». C'est un programme très important pour le secteur culturel en général.
Nous avons été encouragés d'apprendre l'initiative suivante de la ministre consistant à élaborer du soutien pour le Conseil des arts du Canada. Localement, on a réussi à accroître le soutien aux arts et à la culture grâce à des initiatives qui ont accru les subventions accordées par le Winnipeg Arts Council et le Manitoba Arts Council, deux organismes subventionnaires importants au niveau de la production artistique dans la province. On attend toutefois toujours une initiative semblable au palier fédéral. Certaines des informations que nous vous donnerons sont en fait une demande d'accroissement des dépenses, surtout en ce qui concerne l'appui que nous sollicitons pour nos membres au Conseil des arts du Canada.
La question qui nous vient à l'esprit porte essentiellement sur le mandat de Téléfilm. Téléfilm a été raisonnablement généreux envers le Manitoba. J'ai parlé à des cinéastes qui sont membres du Winnipeg Film Group et qui ont reçu de l'aide de Téléfilm et ils m'ont dit qu'ils n'auraient pas pu réaliser leurs projets sans cette aide. Par conséquent, Téléfilm bénéficie d'un large appui dans la province, ainsi que l'initiative consistant à établir une politique cinématographique. Ce sont d'excellentes initiatives. Nous en sommes heureux et nous sommes contents que des audiences aient lieu et que l'on manifeste autant d'intérêt pour le développement de ce secteur, parce qu'il reste encore beaucoup à faire.
Le premier élément de la réalisation d'un film est lié au développement. Dans ce contexte, la recommandation que nous avons à faire est liée à l'importance de l'établissement d'une politique pour les producteurs de longs-métrages à petit budget, et, comme nous le mentionnons dans notre mémoire, de la présence d'un bureau régional à Vancouver pour faciliter l'accès et établir des contacts. Nos membres doivent se rendre à Vancouver pour rencontrer des représentants de Téléfilm et certains représentants de Téléfilm viennent parfois ici, ce qui est intéressant pour les cinéastes du Manitoba.
Le programme d'aide aux producteurs de longs-métrages indépendants à petit budget impose toutefois un plafond pour qu'un film soit classé dans la catégorie des films à petit budget. Le coût d'un film ne cesse d'augmenter et nous voudrions recommander que ce plafond soit porté à un montant supérieur à 1 million de dollars. Nous sommes en fait relativement raisonnables en recommandant que le budget maximum admissible passe de 750 000 $ à 1 millions de dollars. Il s'agirait toujours d'un film à petit budget, même si son budget dépassait ce plafond mais dans le contexte du Manitoba, ce serait déjà un progrès important.
Un des avantages pour nos membres est la participation du Conseil des arts du Canada à la réalisation de films. De nombreux cinéastes manitobains font des courts-métrages à leurs débuts. Le principal objectif des membres du Winnipeg Film Group est la création d'une oeuvre artistique plutôt que la production de produits industriels et commerciaux. Au Canada, c'est le Conseil des arts du Canada qui est l'organisme responsable de la création artistique.
Le problème en l'occurrence est que Téléfilm dispose d'un budget beaucoup plus élevé que le Conseil des arts du Canada pour soutenir la production cinématographique. Ce n'est pas nécessairement négatif, surtout si Téléfilm met à exécution ce qui est indiqué sur sa page Web et le mandat qui lui avait été confié à sa création, page sur laquelle Téléfilm se qualifie de « organisme culturel ». En fait, nous appuyons activement Téléfilm comme organisme culturel et estimons qu'il a un rôle culturel à jouer en appuyant la culture canadienne.
¿ (0950)
Ces derniers temps, on a constaté une tendance à mettre davantage l'accent sur la recette que sur le mérite artistique d'un projet. C'est notre interprétation de la politique et c'est ce qui est indiqué en toutes lettres. J'ai vérifié et ai examiné la question d'un peu plus près au lieu de me fier uniquement aux apparences; en fait, j'ai vérifié l'appui que le Conseil des arts du Canada accordait à des projets au Manitoba et l'aide que Téléfilm accordait pour voir s'il y avait un écart considérable entre ce que l'on considère comme une entreprise commerciale fondée sur les recettes en salle et ce que l'on considère en fait comme un projet artistique. J'ai constaté que de nombreux projets manitobains subventionnés par Téléfilm avaient également été soutenus à l'étape du développement par le Conseil des arts du Canada. Je pense que c'est un bon signe et que cela indique que Téléfilm interprète peut-être en pratique son mandat avec une plus grande liberté que le mandat exposé dans certains documents imprimés ou les objectifs énoncés sur son site Web. C'est très bien également.
Par la même occasion, nous examinons l'impact du soutien sur la rédaction de scénarios et de scripts. Un des aspects très importants de la création d'un film est de présenter l'idée d'une façon qui permette la production d'un film. À cette étape également, où il est nécessaire de tenir compte de la mise en marché, de la distribution et de la promotion de l'oeuvre, une ou deux idées y seront rattachées.
En ce qui concerne l'aspect de la production, lorsqu'on a appuyé le développement et le programme d'aide aux producteurs de longs-métrages indépendants à petit budget, il est nécessaire de soutenir la qualité créatrice et la diversité des films et le développement de notre identité culturelle par la réalisation de films culturels au Canada. Un autre commentaire rassurant que le ministre a fait hier concerne l'importance de la diversité culturelle dans un contexte mondial, ce qui veut dire que la culture canadienne est une des nombreuses cultures présentées à l'échelle planétaire et qu'il est nécessaire de soutenir l'identité culturelle par nos produits culturels ou par le type d'oeuvres artistiques et culturelles que nous créons, y compris un film.
Comme je l'ai déjà signalé, on craignait que la tendance à donner la priorité à des films commerciaux entraîne l'exclusion des films culturels, mais j'ai déjà fait de nombreux commentaires à ce sujet. J'ai signalé dans le mémoire quelles solutions avaient été adoptées à cet égard dans d'autres pays. Au Royaume-Uni par exemple, où l'on avait pris cette orientation, Derek Malcolm a signalé que faire des films attirant de nombreux spectateurs était à peu près aussi dangereux et souvent aussi frustrant que de tenter de faire des films que des critiques et des amateurs de cinéma d'art et d'essai admireront. En tant que financier et que producteur, il suffit d'identifier le talent et de le soutenir. Le talent est, bien entendu, une notion évasive et c'est pourquoi c'est un domaine où l'on prend de grands risques. Il est essentiel de tenir compte du fait que tous les projets ne seront pas une réussite et de prévoir une marge de manoeuvre pour le film occasionnel qui tombera dans l'oubli.
Le problème général, cependant, survient à une étape ultérieure du cycle, à celle de la distribution. Les trois orientations stratégiques de Téléfilm pour 2003 énoncées sont les suivantes : développement des auditoires, augmentation du potentiel de l'industrie et un nouveau Téléfilm. La culture n'a pas été mentionnée et c'est ce qui nous préoccupe. Je pense d'une façon générale qu'en raison de la taille des budgets dont dispose Téléfilm par rapport au Conseil des arts du Canada, il est essentiel de soutenir le mandat culturel par l'intermédiaire de Téléfilm et aussi par l'intermédiaire des possibilités que peut offrir le Conseil des arts du Canada, à moins que le budget dont dispose le Conseil des arts du Canada pour le cinéma n'augmente considérablement. Je pense toutefois que, compte tenu de la façon dont on procède actuellement et de l'appui dont jouit Téléfilm à l'échelle locale et dans les diverses provinces, ce dernier organisme est probablement l'outil le plus efficace et le plus avantageux.
¿ (0955)
Je pense qu'étant donné la genèse de la communauté cinématographique et l'importance de la production de films culturels, des centres des arts médiatiques auraient un rôle à jouer. En l'occurrence, je fais de la publicité pour des organisations comme le Winnipeg Film Group. Par conséquent, certaines considérations d'ordre commercial entrent en ligne de compte dans le rôle que des organismes comme celui-ci jouent dans la genèse de ce secteur.
Je suis membre du conseil d'administration de l'Alliance des arts médiatiques indépendants qui représente 80 organismes du milieu des arts médiatiques de partout au Canada et regroupe en fait de nombreux membres. Dans ce groupe, on note une forte représentation des centres d'art vidéo qui ne sont pas intéressés à la distribution de longs-métrages comme tels et qui ont une orientation totalement différente, ainsi que d'une douzaine d'organisations cinématographiques qui s'intéressent au long-métrage, à la politique cinématographique organisée et à la réalisation de longs-métrages. Par conséquent, cette alliance couvre tous ces domaines. Des centres d'art médiatique sont également financés par le Conseil des arts du Canada.
De nombreuses personnes actives dans ce secteur, surtout dans l'industrie manitobaine, ont débuté dans le Winnipeg Film Group. Au cours des 20 dernières années—et jusqu'à tout récemment en fait—, les universités pas trop éloignées de Winnipeg n'offraient pas de programmes de cours de formation cinématographique. Par conséquent, de nombreuses personnes se sont adressées au Winnipeg Film Group et ont suivi notre cours d'initiation à la réalisation de films, se sont entraidées dans le cadre de leurs diverses productions, ont appris sur le tas et ont acquis de l'expérience dans le secteur. Un grand nombre de personnes actives dans ce secteur actuellement ont donc acquis une expérience d'apprentissage liée au Winnipeg Film Group. C'est courant dans de nombreuses autres organisations, surtout dans les régions. Il est important de ne pas oublier que le développement de l'industrie dans les régions s'est fait de diverses façons.
Nous sommes aussi préoccupés que quiconque au sujet de la mise en marché, la distribution et la projection et un débat a eu lieu au sujet des quotas. J'ai fait un peu de recherche sur les quotas et je me suis rendu compte qu'en fait, aucun pays anglophone n'avait actuellement en place un système de quotas pour protéger son identité culturelle sur le marché. Cela m'a en fait quelque peu déçu. J'espérais qu'un ou deux pays donneraient ce type d'appui. Les Américains ont fait preuve d'une très grande efficacité dans leur lobbying auprès des diverses organisations. Je pense que le Royaume-Uni a été un des premiers pays, sous le gouvernement de Margaret Thatcher, qui ait éliminé le type d'appui qui avait été mis en place dans de nombreux pays après 1949. Après la Seconde Guerre mondiale, de nombreux pays avaient établi un système de quotas qui a été supprimé au cours des périodes de déréglementation des années 80.
L'histoire du développement de notre industrie à cette époque au Canada est intéressante. Il avait été question de faire la même chose au Canada en 1949. Des lobbyistes d'Hollywood étaient venus au Canada et avaient conclu une entente en vertu de laquelle nous renoncerions à instaurer un système de quotas, mais ils acceptaient de mentionner le Canada dans des films américains et de tourner des scènes dans notre pays, faisant ainsi la promotion du tourisme au Canada dans les films hollywoodiens, sous prétexte que ce serait beaucoup plus avantageux que le développement d'une industrie canadienne.
Je pense que c'était une décision très regrettable qui a eu pour effet que l'on trouve dans des films américains tournés au cours des années 50 de nombreuses allusions intéressantes au Canada—j'ai d'ailleurs trouvé un documentaire de CBC là-dessus. En fait, un commissaire à la cinématographie canadienne à Hollywood a fait le tour des studios et a encouragé les producteurs à tourner des scènes au Canada, ne fût-ce que pour les allusions au Canada faites dans leurs films. Je pense qu'il aurait été beaucoup plus avantageux que d'autres décisions aient été prises et qu'il est important que nous prenions conscience du fait que nous devons maintenir notre identité culturelle dans nos oeuvres culturelles et d'examiner les possibilités d'un projet comme l'établissement de quotas.
Je pense que la France est le pays qui a probablement le mieux réussi jusqu'à présent à maintenir un système d'intégrité culturelle dans les films artistiques et même dans les films commerciaux qu'elle produit. Les Américains s'appliquent à changer la situation également à cet égard. C'est un des pays où l'on n'a pas réussi à faire supprimer les quotas. En fait, un lobby très actif milite pour leur suppression, mais ses efforts sont minés par les initiatives commerciales.
À (1000)
Dans ce secteur, les discussions concernant le libre-échange et d'autres sujets analogues sont en quelque sorte délicates—en ce qui concerne les possibilités d'exclusion de la culture de ce type de discussions et sa protection pour le maintien de l'identité du pays.
Ces facteurs témoignent du potentiel d'accroissement de l'accès qu'ont les Canadiens aux films canadiens. Il ne suffit pas d'établir un quota et d'augmenter le nombre d'oeuvres projetées sur les écrans; c'est dans ce contexte qu'il est très important de faire des plans de promotion, de distribution et de marketing dès les premières étapes des projets; en effet, on veut non seulement voir des films portés à l'écran, mais on veut également que ces films soient vus. Nous ne voulons pas priver des auditoires de la possibilité de voir des oeuvres intéressantes sur le plan artistique ou qui contribuent au développement de notre identité culturelle.
On pourrait peut-être prendre certaines initiatives pour améliorer la distribution par les distributeurs présents sur le marché national et, en ce qui concerne la projection, en accordant un soutien pour une projection accrue de ces oeuvres. Je ne pense pas qu'il soit irréaliste de préconiser qu'un pourcentage du temps de projection soit réservé à des longs-métrages canadiens et qu'une telle initiative soit préconisée par le gouvernement ainsi que par des représentants de l'industrie. Je ne pense pas que ce soit une mauvaise idée d'avoir un objectif. Cela nous donnerait une raison de tourner des films.
Dans les années 80, si je ne me trompe, une étude canadienne avait recommandé un objectif de 7,7 p. 100; ce chiffre avait été choisi essentiellement parce qu'il représente une semaine par an. Par conséquent, en ce qui concerne le temps de projection réservé à des films canadiens dans les salles de cinéma faisant partie de chaînes, on encouragerait ces chaînes à projeter des films canadiens pendant au moins une semaine par an, ce qui n'est pas excessif.
Une idée intéressante, qui est peut-être naïve et irréaliste, est que le système des crédits d'impôt a été très efficace, au niveau de la production; il a joué un rôle très important, à l'échelle fédérale et à l'échelle provinciale et a stimulé beaucoup la production. Il serait peut-être possible de créer une mesure incitative semblable, sur une base ou sur une autre, pour encourager la distribution et la projection, en ne se fondant pas uniquement sur le nombre de jours de projection mais aussi—et c'est à ce niveau-là que cela pourrait être intéressant—de travailler au niveau des auditoires et de récompenser la distribution et la projection—afin de stimuler la production de films et d'inciter les gens à aller les voir plutôt que de se contenter de les mettre au programme.
Je voudrais faire une petite digression au sujet du rôle que pourraient jouer les centres d'arts médiatiques dans la distribution des oeuvres. C'est en fait—dans un cas du moins—une histoire déplorable supplémentaire. Une dizaine d'organisations appuyées par le Conseil des arts du Canada assurent la distribution des films—principalement des courts-métrages ou des films d'un type particulier—et ont leurs marchés de créneau au Canada. Une de ces organisations s'est lancée à fond dans la distribution de films long-métrage et a fait faillite cette année—il s'agit de Cinéma libre, de Montréal.
Un des facteurs regrettables est que cette organisation avait une collection importante de films qu'elle tente toujours de maintenir intacte, mais lorsqu'une organisation comme celle-là fait faillite, les cinéastes ont le droit de redemander leurs films. Cette énorme collection québécoise de films canadiens sera dispersée parce que les cinéastes réclament leurs films. Je pense que cette organisation a deux films de Caryl.
La faillite de ce distributeur... et je compte en fait me fonder sur ce cas pour expliquer que l'on pourrait demander à de petites organisations de faire la promotion et la distribution de films plus courts. Le seul cas que je connaisse est celui d'un distributeur de ce type qui a pris beaucoup d'expansion et qui a tenté de se lancer activement dans la promotion de longs-métrages, pour faire ensuite faillite. Par conséquent, des difficultés sont liée aux activités de petit distributeur, à une échelle modeste, qui évolue dans un contexte non commercial. En fait, tous ces distributeurs travaillent davantage dans un contexte non lucratif que dans un contexte lucratif.
Il serait toutefois possible que ces petits distributeurs—et il ne faut pas exclure cette possibilité—jouent un rôle dans la distribution de certains types de films, qu'il s'agisse de longs-métrages à petite budget... C'est un des changements dus, tout naturellement, à l'évolution dans le Winnipeg Film Group.
À (1005)
Certains cinéastes font des films comme The Saddest Music in the World. Je pense Guy Maddin est un de nos réalisateurs connus les plus reconnaissables qui ait maintenu ses liens avec le Winnipeg Film Group, ce dont nous lui sommes reconnaissants. Par exemple, il nous a donné son Et les lâches s'agenouillent, qui est un film très personnel d'une durée de 60 minutes, conçu seulement pour être présenté à la The Power Plan.
C'est un film dont nous assurons la distribution et une des tâches que nous faisons très bien est liée à la distribution de films à des festivals de cinéma, c'est-à-dire qu'ils ont un auditoire, mais ce n'est pas rentable et ça ne produit pas de recettes. Par conséquent, le film a un auditoire mais ne produit pas de recettes et c'est souvent le type d'activités auxquelles s'adonnent de petits distributeurs comme le Winnipeg Film Group et le type de travail que nous faisons dans le cadre de la promotion du film artistique et culturel au Canada.
Dans l'ensemble cependant, nous remercions le gouvernement du Canada pour l'appui qu'il a apporté à l'industrie cinématographique, surtout en ce qui concerne la création de la politique et le soutien de Téléfilm, ainsi que celui de la section des arts médiatiques du Conseil des arts du Canada.
Un des organismes dont nous n'avons pas encore beaucoup discuté est l'Office national du film, et c'est regrettable en quelque sorte. Il est actuellement considéré, par nos membres du moins, comme un organisme dont les activités sont axées sur le film documentaire, également spécialisé dans le film d'animation. Nos membres ne pensent pas que l'Office national du film joue un rôle important dans la production dramatique bien que cela pourrait être intéressant et que certains changements pourraient se produire à l'Office national du film si l'on envisageait cette possibilité. Cependant, compte tenu des dommages qui ont été causés à cet organisme depuis les années 80, il semblerait qu'un regain de vigueur qui lui permettrait de jouer à nouveau le type de rôle qu'il jouait notamment dans la production dramatique ne soit pas possible. Je pense que l'on a fait pencher la balance de façon marquée vers le soutien à la production indépendante, ce qui n'est pas nécessairement mauvais et que Téléfilm est chargé de soutenir ce type d'oeuvre. Je tenais toutefois à le mentionner et il est important pour ceux de nos membres qui sont documentaristes que ce type d'appui reste la responsabilité de l'Office national du film.
Je vous remercie pour votre attention. Nous sommes prêts à répondre à vos questions.
À (1010)
La présidente: Merci beaucoup, monsieur Enns.
Y a-t-il d'autres exposés? Dans ce cas, je donne la parole à mes collègues pour la discussion.
Monsieur Schellenberger.
M. Gary Schellenberger (Perth—Wellington, PCC): Je vous remercie. J'apprécie cette occasion d'être informé sur l'industrie cinématographique et je suis heureux d'être à Winnipeg.
Je n'ai que deux petites questions à poser. Le problème dont j'entends le plus parler—et, chose étonnante, j'en ai discuté également hier avec une habitante ou ex-habitante de ma circonscription alors que j'attendais mon avion pour Winnipeg à l'aéroport, dame dont la fille est productrice et a son bureau à Vancouver—et sur lequel vous avez insisté, est lié à la distribution et aux distributeurs. C'est une des remarques qu'elle a faites—et sa fille est productrice privée. Des restrictions sont imposées sur la distribution de films étrangers.
En voulant protéger nos distributeurs, ne causons-nous pas du tort à l'industrie cinématographique en refusant l'accès à la concurrence ou à certains distributeurs étrangers qui pourraient élargir le marché? C'est une de mes questions.
Mme Carole Vivier: Nous avons eu un système...
Je ne fais pas de reproches aux distributeurs canadiens. Le Canada est un petit pays. Un grand nombre de ces entreprises... il y a quelques très bons distributeurs au Canada, mais ils sont peu nombreux. Si l'on essaie d'accroître les recettes canadiennes, ce qui signifie un volume de films canadiens pertinents que les auditoires veulent voir, nous n'avons pas un nombre suffisant de distributeurs au Canada ayant les ressources financières, les compétences en marketing et la créativité nécessaires pour atteindre ce volume. C'est ce que nous avons pu constater au cours de cette période.
La politique qui consiste à faire des distributeurs canadiens ce que j'appelle les protecteurs de l'industrie cinématographique canadienne au Canada est maintenant en place depuis 20 ans. Nous avons la même discussion qu'il y a 20 ans.
Dernièrement, à l'Association canadienne de production de films et de télévision, j'ai fait la déclaration suivante : « Je signale que je ne tiens pas à revenir pour avoir à nouveau la même conversation ». Nous ne pouvons pas continuer à procéder comme nous le faisons. Ce n'est pas efficace. Je pense que nous ne servons pas les intérêts des cinéastes canadiens.
Nous avons eu de nombreux exemples de films. Il y en a un actuellement qui était au festival de Sundance; il a fait l'objet de nombreux articles dans Variety et dans le LA Times et a remporté des prix. Il a été projeté dans les salles de cinéma et on n'avait pas mis en place de plan de promotion et de marketing. Nous ne sommes pas aussi concurrentiels que nous devrions l'être sur ce marché.
Je dirais en fait qu'il y a un manque de contact entre les fabricants et les détaillants. Je pense que c'est la nature exacte de notre problème et qu'il est essentiel de le régler. Je ne dis pas qu'on y arrivera facilement, mais si nous n'essayons pas des tactiques différentes, nous ferions tout aussi bien d'abandonner le long-métrage canadien en langue anglaise—et je ne suis pas disposée à le faire parce que je sais que nous avons des créateurs très talentueux. Le problème, c'est que les auditoires n'ont pas accès à ces oeuvres.
Mme C.V. Caryl Brandt: Je voudrais abonder dans votre sens. Non seulement l'association de l'industrie approuve-t-elle entièrement les commentaires de Carole, mais nous pensons que la racine du problème pourrait être liée aux motifs que vous avez mentionnés. Nous pensions que nous aidions notre industrie en protégeant les quelques distributeurs canadiens. En fait, nous avons limité ces possibilités de façon très irrationnelle.
Nous aimons les coproductions. Nous voulons former les meilleurs partenariats possible pour pouvoir constituer des groupes extrêmement créatifs. Cependant, quand il s'agit de l'étape critique de la distribution, nous ne travaillons qu'avec un très petit nombre de distributeurs. C'est ridicule. Nous voulons que nos émissions soient vues à travers le monde et que nos films soient commercialisés de façon à ce que les gens aient l'envie de les voir et sachent qu'ils existent. La distribution ne devrait pas être assurée exclusivement par des distributeurs canadiens.
M. Gary Schellenberger: J'espère que nous pourrons élaborer une politique. Il semblerait que partout où nous allons, on ait besoin de plus d'argent. Il est essentiel que nous prenions de l'expansion et que nous changions les paramètres parce que les coûts augmentent et que tout devient très cher.
Je pense à un commentaire qui a été fait au sujet de l'organisation montréalaise qui a vu grand et qui a maintenant fait faillite. Je me souviens d'une remarque que mon père m'avait faite. Un jour que nous avions réalisé un assez gros contrat et que nous avions bien gagné notre vie, mon père m'a dit de ne jamais oublier les humbles travailleurs. Ce sont eux qui nous procurent la chemise que nous portons et les aliments que nous servons aux repas. Quand on soumissionne pour des travaux... Quand on fait de petits travaux et que l'on perd, on perd peu d'argent, mais quand on fait des travaux de grande envergure et que l'on perd, on fait faillite.
Je pense que les petits distributeurs peuvent occuper ce créneau et être très efficaces dans ce créneau. J'espère que nous pourrons élaborer une politique, mais pas une politique en vertu de laquelle on investira des fonds supplémentaires dans ce domaine. Si nous arrivons à obtenir davantage de fonds privés par le biais d'une politique efficace, j'espère que c'est l'option que nous choisirons. Je pense que d'autres personnes ont déjà fait cette suggestion.
Par conséquent, il est essentiel d'élaborer une politique et c'est ce que tous les témoins d'aujourd'hui ont dit. C'est créatif. Je pense qu'il est nécessaire de sortir un peu de son cocon et de ne pas être trop protecteur, mais qu'il faut égaliser les règles du jeu en espérant que nous pourrons prendre de l'expansion.
À (1015)
La présidente: Merci beaucoup, monsieur Schellenberger.
Monsieur Kotto.
[Français]
M. Maka Kotto (Saint-Lambert, BQ): Merci, madame la présidente.
Bonjour. Je vous poserai deux questions simples. Définir ou redéfinir une politique passe toujours par une vision. Je vais me faire l'avocat du diable. Pouvez-vous nous définir le rôle du cinéma en particulier et de la culture en général dans la collectivité? Est-ce une nécessité ou un gaspillage d'argent? Cela a-t-il une portée, un sens? C'est ma première question.
Deuxièmement, je vais vous demander de mettre votre réponse dans le contexte canadien, puis dans le contexte mondial, où la mondialisation néo-libérale tend à commercialiser la chose culturelle. Quelles sont vos réserves par rapport à cette tendance?
Pour terminer, j'aimerais que vous nous parliez des instruments indispensables pour soutenir le plus efficacement cette vision, si vision il y a.
[Traduction]
Mme Carole Vivier: En tout premier lieu, je pense qu'il est très important de continuer de soutenir l'industrie cinématographique au Canada. Les histoires que les cinéastes ont à raconter méritent de l'être, peu importe qu'elles viennent du Canada ou d'ailleurs.
C'est intéressant. Comment définissez-vous la culture? On a toujours pensé que la culture et le succès commercial en salle ne faisaient pas bon ménage. Je pense que ce n'est pas le cas. Il suffit de penser au succès de certains films étrangers comme Whale Rider ou My Left Foot. Ce sont des films très représentatifs de la culture de ces peuples.
Les cinéastes canadiens qui ont écrit et réalisé des films, avec tous les éléments qui sont réunis dans le cadre de ces projets, reflètent leur identité en tant que Canadiens, quelle que soit leur démarche. C'est cela, pour moi, la culture. C'est la culture du Canada qui est différente d'une région du pays à l'autre. C'est ce qui en fait, à mon avis, son caractère unique.
Ma vision est que les Canadiens—pour commencer—, lorsqu'ils entendent parler de la sortie d'un film canadien, voient ce film canadien en langue anglaise comme un film qu'ils veulent aller voir au cinéma. Les films canadiens en langue française ont indéniablement remporté un certain succès et c'est pourquoi je parle uniquement de longs-métrages en langue anglaise. En outre, ma vision est que le développement, la promotion et le marketing de ces films deviennent tellement efficaces que les foules se déplaceront pour les voir et pour soutenir ces cinéastes, et qu'elles pensent que ces films méritent d'être vus parce qu'ils sont le reflet d'une partie importante de leur milieu et de leur culture.
Je ne sais pas si j'ai répondu avec précision à votre question ou si ma réponse vous a aidé.
À (1020)
[Français]
M. Maka Kotto: Vous y répondez partiellement. Je veux surtout comprendre si on peut vivre sans culture, sans ce reflet que proposent les cinéastes et créateurs à leurs compatriotes ou à leurs concitoyens.
[Traduction]
Mme Carole Vivier: Je dirais non. Comme nous avons pu le constater hier soir à la cérémonie des Juno, je ne pense pas que nous puissions vivre sans musique, et en particulier sans musique canadienne. Je présume que ma vision est que nous célébrions le cinéma canadien comme nous avons célébré la musique canadienne hier soir. Par conséquent, je ne pense pas que nous puissions vivre sans cela, parce que c'est un média qui circule à travers le monde et qui reflète notre identité. Si nous ne contribuons pas à cet environnement et à ce marché sur le marché canadien et les marchés internationaux, nous n'aurons plus qu'un reflet des États-Unis et d'autres pays qui subventionnent leur industrie cinématographique. Si nous ne contribuons pas à cela, nos voix, nos histoires, nos cinéastes ne seront pas là pour montrer aux autres pays qui nous sommes en tant que Canadiens et comment nous nous représentons par rapport aux autres Canadiens.
Mme C.V. Caryl Brandt: J'aimerais faire quelques commentaires à ce sujet. Une grande partie de ce que l'on fait dans l'association de l'industrie au niveau régional est fondée sur la prémisse que le Canada est une mosaïque. C'est une des particularités qui nous différencient des États-Unis. Nous ne voulons pas être un creuset. Nous ne voulons pas fusionner les identités. Notre diversité est notre richesse et nous voulons la célébrer. Nous tenons à ce que nos concitoyens puissent nous entendre sur les ondes et dans la musique. Pour cela, il est essentiel d'avoir accès à l'écran et accès à la radio. Comme nous l'avons déjà mentionné, certains types d'aide accordée à l'industrie de la musique pour garantir l'accès ont été rentables. C'est inexistant dans l'industrie cinématographique mais c'est déjà un peu mieux dans le secteur de la télévision.
Est-ce essentiel pour l'identité canadienne? Absolument. Si nous voulons être des Canadiens dignes de ce nom, cela fait partie de notre identité. Notre culture joue un rôle essentiel dans notre identité.
A-t-on accès à des outils plus efficaces? Personne ne connaît la nature de ces outils, mais il est essentiel de réexaminer la façon de procéder pour avoir accès. Notre manque de visibilité sur nos écrans pose un gros problème. Dans des régions comme le Québec, où on est parvenu à sensibiliser la population, les gens aiment voir cela. Quand on ne sait pas que ça existe, on ne peut pas le voir. Si un film n'est à l'affiche que pendant une fin de semaine, on ne le voit pas. Il est essentiel de trouver des possibilités de donner accès aux films que nous produisons et à ceux que nous continuons de produire.
La présidente: Je vous donnerai la parole au second tour de questions, monsieur Angus.
Excusez-moi, voulez-vous répondre à cette question également? Allez-y.
M. Victor Enns: Je voudrais faire deux commentaires. L'un est l'importance pour les oeuvres canadiennes d'avoir un auditoire international. Ensuite, je voudrais parler de la reconnaissance des voix locales et de la diversité des voix dans la réalisation d'oeuvres de fiction et leur présentation non seulement à des auditoires canadiens, mais aussi à des auditoires étrangers.
Nos succès les plus récents... De bons liens ont été établis entre Winnipeg et Rotterdam dans la communauté artistique. Je ne sais pas très bien pourquoi Rotterdam plutôt que d'autres villes européennes, mais des représentants de la communauté des arts visuels ont fait des déplacements dans les deux directions entre le Canada et Amsterdam, avec Agnetha Dyck, Wanda Koop et d'autres personnes semblables qui entretiennent ces contacts depuis un certain temps. Plus récemment, une rétrospective des oeuvres du Winnipegois Guy Maddin a été organisée à Amsterdam.
Un film produit par l'intermédiaire du Winnipeg Film Group et de Video Pool, qui est une organisation parallèle à la nôtre et qui a ses bureaux dans le même édifice que nous, a remporté un vif succès. Il est intitulé Trains of Winnipeg et a été réalisé par Clive Holden. Il s'agit de 14 petits films qui ont été montrés pour faire un long-métrage. C'est une oeuvre extraordinaire incorporant toutes les techniques, depuis le film 8 mm jusqu'aux méthodes numériques d'enregistrement d'images les plus modernes, et faisant appel à des effets spéciaux, qui en font une authentique oeuvre d'art. Ce film a fait salle comble à trois des quatre projections à Rotterdam.
Ce film met la culture du pays dans un contexte international. Un des facteurs qui le rendent intéressant est qu'il est différent d'un produit hollywoodien. Il est un reflet particulier du lieu où il a été créé et ce, à un point tel qu'il est intitulé Trains of Winnipeg. Ce film a été distribué à l'étranger, notamment aux États-Unis... Il ne produira pas des recettes colossales, mais il est important pour l'image qu'ont les étrangers du Canada, dans un contexte plus large. C'est un succès auprès de la critique.
Des oeuvres comme celle-là peuvent être des oeuvres de pratiquement n'importe quelle échelle, y compris des courts-métrages qui participent régulièrement ou qui ont notamment déjà participé à des festivals comme celui de Cannes ou... L'année dernière, nous avions un court-métrage réalisé par un processus manuel expérimental qui est en fait très vieux. Il a été projeté à la Biennale de Venise. Nous avions deux films au Festival du film de Venise, mais c'était un exemple de petite oeuvre qui précédait une autre oeuvre de Guy Maddin également projetée dans le cadre de ce festival. Il était important d'avoir des histoires canadiennes afin de présenter la culture canadienne dans un contexte international.
Une autre initiative de l'Office national du film et de la Manitoba Film and Sound, pour laquelle je voudrais les féliciter, est un projet appelé First Stories dans le cadre duquel on produit des scénarios autochtones et on présente des oeuvres autochtones. C'est une initiative que nous appuyons; elle fait partie également des activités du Winnipeg Film Group. L'Office national du film a joué un rôle en payant les frais de cotisation et de participation aux ateliers pour les réalisateurs autochtones, afin que les Canadiens d'ascendance autochtone puissent notamment venir au Winnipeg Film Group sans se heurter à divers obstacles, pour suivre une formation de base et des ateliers et commencer à réaliser des films pour présenter des points de vue différents qui ont été trop longtemps négligés dans l'histoire de notre pays.
Dans certains cas, ils commencent au début et commencent à un endroit approprié, c'est-à-dire à Winnipeg, où se trouvent les locaux de l'Aboriginal Peoples Television Network. En l'occurrence, c'est l'Office national du film et la Manitoba Film and Sound qui sont les principaux promoteurs du projet.
Un des appuis que nous recevons de la Manitoba Film and Sound—qui est un de nos fondateurs... Nous octroyons des subventions à la production dans le cadre d'un programme appelé First film Fund et trois des quatre derniers bénéficiaires de ces subventions sont d'origine autochtone. Leur arrivée au sein d'une organisation et la diversification des membres... C'est ainsi que l'on se lance et c'est un autre soutien important qui est nécessaire pour faire entendre cette voix au public canadien, puis au public étranger.
Je vous remercie pour votre attention.
À (1025)
La présidente: Merci beaucoup.
Monsieur Angus.
M. Charlie Angus (Timmins—Baie James, NPD): Merci beaucoup. [Note de la rédaction : Inaudible]... et mes propos paraîtront probablement vaguement incohérents.
Je me suis très bien conduit hier soir; les enjeux que nous examinons se bousculent tellement dans mon esprit que je poserai environ cinq questions, qui seront enchevêtrées. Vous aurez probablement beaucoup de difficulté à comprendre.
Ma formation est dans le domaine de la musique—j'ai vu le succès qu'elle avait à la cérémonie des Juno—et, par conséquent, je ne peux pas résister à la tentation de comparer la musique au cinéma au Canada. Je vois des recommandations concernant les quotas ou un accroissement du financement, mais je me demande s'il ne conviendrait pas, avant d'envisager toutes ces options, de régler certains problèmes structurels fondamentaux de l'industrie.
Par exemple, la dichotomie entre le succès artistique et culturel et le succès commercial subsiste toujours dans l'industrie cinématographique. Elle était très présente dans le secteur de la musique lorsque nous avions de la difficulté à obtenir du succès à l'étranger. Cet aspect a disparu de la musique. Billy Talent peut vendre un million de disques ou être un groupe de club très en vogue et aucun de ces deux facteurs ne pose de problème. Si Billy Talent vend un million de disques, il aide les maisons de disques à lancer de nouveaux artistes.
Je mettrai surtout l'accent sur l'aspect commercial parce que j'estime que tant qu'il n'y a pas réussite commerciale, tout le reste... Pourquoi un produit pourtant excellent n'est-il pas un succès commercial?
On m'a notamment dit, à moi et à quelques collègues, que nous n'avions pas encore d'auditoire au Canada pour les grands films parce que nous n'avions pas encore mis en place de système de vedettariat. Nous n'avons pas de système de promotion lié à la télévision qui permettrait aux Canadiens de connaître les acteurs qu'ils vont voir. Nous n'avons pas de système vigoureux de promotion dans l'industrie de la télévision—des émissions d'une demi-heure, des comédies, des dramatiques, etc.—et, par conséquent, nous n'avons pas fait le travail de sensibilisation qui permettrait à un auditoire d'aller naturellement voir un film canadien au cinéma.
Je ne sais pas si vous considérez que l'absence de système de vedettariat ou de système d'alimentation par la télévision pose un problème.
À (1030)
Mme Carole Vivier: En tout premier lieu, pour revenir à un de vos premiers commentaires, à savoir que des problèmes fondamentaux se posent au niveau de l'infrastructure, je suis entièrement d'accord. Il n'y a pas de remède facile. Je pense que c'est une lacune fondamentale du système.
Il faut d'abord agir au niveau du développement. Il est essentiel que nous investissions davantage d'énergie et de ressources dans le développement. On a beau investir des fonds supplémentaires, cela ne changera rien si l'on n'apporte pas des modifications fondamentales et profondes au système.
Je répète que nous ne demandons pas seulement davantage de fonds; je ne serais pas en faveur d'une telle requête si l'on n'apportait pas de changements radicaux au système. Il convient d'abord d'apporter des changements au niveau du développement des scripts. C'est une industrie commerciale et la Manitoba Film & Sound est un investisseur en actions. C'est une entreprise du secteur du spectacle. Je pense qu'il y a de nombreux scripts et de nombreuses places pour de nombreux films mais que, pour l'essentiel, nous investissons dans le cinéma parce que nous voulons que les films soient un succès de salle.
En fin de compte, les films ne seront pas tous un succès commercial. Il est essentiel de donner à de nombreux cinéastes l'occasion de se perfectionner. C'est en pratiquant son métier sans relâche que l'on se perfectionne. Les réalisateurs n'ont toutefois pas l'occasion de réaliser plusieurs films coup sur coup pour se perfectionner.
La distribution des rôles en fait partie. Je pense qu'avoir un système de vedettariat... À Hollywood, ça n'est même pas efficace pour eux. Ils ont des films dans lesquels jouent les plus grandes vedettes du box office et ce sont des bombes. Cela nous ramène à l'histoire. Tout est dans le matériel de création. Voyez Risky Business, pour ne citer qu'un exemple. Pour Tom Cruise, c'est le film qui en a fait une vedette. Personne ne connaissait Tom Cruise avant cela.
Je pense que le film peut créer les vedettes, mais il est essentiel qu'il soit basé sur un bon scénario et que ce bon scénario soit réalisé avec tout ce qui est nécessaire pour réaliser un film. Il est essentiel d'avoir des ressources suffisantes et de s'assurer que le budget n'est pas compromis pour avoir un nombre suffisant de journées de tournage et de temps pour les travaux préparatoires. Voilà les éléments. En fin de compte, on peut obtenir un film brillant qui devient un échec en raison de lacunes dans le marketing et la promotion. Pour moi, c'est l'aspect frustrant.
Seven Times Lucky est un film dont le scénario a été écrit, qui a été réalisé et qui a été produit au Manitoba. C'est un superbe film. Il a indéniablement du potentiel commercial. Savez-vous quoi? Sa campagne de marketing était pathétique. Elle avait été organisée par le distributeur. En tant qu'investisseur, je ne suis pas contente et une campagne de marketing ratée est un mauvais service que l'on rend au cinéaste et aux producteurs—qui se sont donnés à fond dans l'élaboration de ce projet pendant trois ans et qui ont revu et corrigé sans cesse le script.
Je pense que nous avons davantage d'influence que nous pensons au Canada, mais nous ne l'exploitons pas. En fin de compte, c'est une question de responsabilité. Il est essentiel d'avoir un responsable. Il est essentiel que quelqu'un dans le système soit responsable des décisions qui sont prises. Je pense que c'est le cas dans le secteur de la musique, et dans celui de la télévision, en ce qui concerne les radiodiffuseurs—au sujet de leurs annonceurs—mais pas dans l'industrie cinématographique.
Mme C.V. Caryl Brandt: Pourrais-je faire des commentaires également? Je voudrais en fait en faire deux.
Pour les personnes qui ne sont pas bien informées sur l'industrie cinématographique et qui ont généralement tendance à affirmer que personne ne regarde les films canadiens, je voudrais faire une comparaison avec un magasin Safeway. Si les films canadiens sont dans un magasin Safeway, qu'on leur accorde un quart des tablettes du bas, au fond du magasin, et si la clientèle les remarque et veut les essayer, il lui faudra peut-être attendre une semaine pour les obtenir. L'accès que nous avons est donc très mauvais. Peu importe que l'on ait le meilleur produit au monde, si personne n'en entend parler et n'y a accès, on ne le regardera pas. C'est un problème structurel.
Je pense que le système de vedettariat est une partie de solution. Je suis d'accord avec Carole. La solution est toutefois davantage liée au scénario et à tous les autres éléments. Je trouve intéressant que la chaîne Bravo! et la chaîne Star!—du même groupe de stations—se soient mises à dérouler le tapis rouge au Canada. Je suis étonnée par la différence que cela fait en si peu de temps; on apprend soudainement qu'il y a des personnes qui font des films au Canada et je sais à quoi elles ressemblent et ai entendu leurs commentaires. Une initiative aussi simple que cela fait une différence.
Il y a des besoins structurels, je le reconnais. Il ne s'agit pas uniquement d'une question d'argent ou de quotas. L'enjeu auquel nous faisons allusion dans la recherche d'une solution est la possibilité de s'assurer, quand on prépare les scénarios, que l'on est en contact avec le public.
M. Charlie Angus: J'apprécie beaucoup la franchise au sujet de la distribution. En ce qui concerne la musique, je trouve choquant qu'au Canada... Pourquoi faire le produit si l'on ne veut pas le faire connaître à l'auditoire? On n'a pas mis en place de plan de marketing. Que se passe-t-il, bon Dieu? J'aimerais que l'on fasse quelques commentaires à ce sujet également.
Je voudrais en faire un autre qui...
À (1035)
La présidente: Je suis désolée, monsieur Angus. Je vous ai laissé dépasser largement le temps dont vous disposiez et c'est maintenant au tour de M. Silva.
M. Mario Silva (Davenport, Lib.): Je suis désolé, monsieur Angus. Ce n'était pas de ma faute.
On a toujours de la difficulté à concevoir quelle serait la solution idéale en l'occurrence. Tout cela est en grande partie expérimental.
Nous avons parlé des vedettes. Le Canada a des vedettes formidables et d'excellents réalisateurs, mais il sont tous aux États-Unis. Les États-Unis seront toujours simultanément un défi et un débouché. C'est un débouché parce qu'un grand nombre de productions américaines de grandes compagnies de tournage sont tournées au Canada. Ça représente un marché énorme. Tous les aspirants qui débutent au Canada et veulent être connus à l'étranger déménagent aux États-Unis. C'est aussi simple que cela. Ils ne veulent pas rester comme acteurs au Canada et pensent qu'ils ne pourront pas devenir de grandes vedettes internationales sans percer sur le marché américain. Le même raisonnement s'applique aux réalisateurs et la plupart de nos scénaristes vont également s'établir aux États-Unis. Les Américains peuvent offrir davantage de fonds; ils ont une population plus nombreuse; ils ont un marché plus vaste et un plus vaste réseau de distribution. Nous n'arriverons jamais à faire concurrence à ce marché. Il n'est même pas réaliste d'y songer.
Ce que nous devons déterminer, ce sont les domaines où nous excellons et comment nous pouvons y améliorer notre performance. Nous excellons dans quelques domaines, que ce soit dans celui du documentaire, ou dans l'art de conter... C'est un défi de trouver une possibilité de développer ce marché de créneau et d'exporter les produits à l'étranger.
J'ai vu quelques-unes des recommandations qui ont été faites. Elles seront probablement identiques à celles qui seront faites dans toutes les autres régions du pays mais, en ce qui concerne certains des changements fondamentaux, je tiens à ce que nous soyons réalistes dans nos ambitions, en tant qu'industrie cinématographique canadienne, ce que je n'ai pas encore eu l'occasion de percevoir dans les commentaires que j'ai entendus jusqu'à présent.
Je voudrais savoir si vous pensez que je suis entièrement à côté de la question. Je pense que ce sera toujours le défi que nous aurons à relever. Le marché québécois a prospéré. Pourquoi? Je ne pense pas qu'un acteur canadien français estime qu'il soit essentiel d'être connu aux États-Unis ou à l'étranger, mais la plupart des acteurs non francophones, et je fonde mon jugement sur les personnes que je connais, sont convaincus que si l'on veut réussir, être un bon scénariste ou être un réalisateur ou un acteur de renommée internationale, il est essentiel de réussir sur le marché américain, et pas au Canada.
Mme C.V. Caryl Brandt: Quoi qu'il soit vrai que ce marché sera toujours de plus en plus vaste et que c'est un des pays où l'on peut se faire connaître, je pense que des gens comme Cronenberg et Norman Jewison ont prouvé qu'il n'était pas nécessaire pour autant de se tenir à l'écart du Canada et de ne pas continuer à faire des produits canadiens.
L'autre facteur qu'il est important de ne pas oublier est que c'est une question de masse critique. Chaque fois que j'entends quelqu'un se plaindre d'un mauvais film canadien, je suis tentée de dire ceci : « Affirmez-vous que toute la littérature canadienne est mauvaise parce que vous avez lu un mauvais livre? ». Si l'on a un volume suffisant et que 10 p. 100 de ce volume est représenté par des bons films qui sont connus, cela suffit amplement. Je ne mentionne pas un pourcentage arbitraire. Nous produisons un si petit nombre de films et avons un accès tellement restreint que nous ne pouvons pas avoir un nombre suffisant de films en vue pour nous donner de la visibilité. Si le succès et les acclamations ont un lien quelconque avec ce profil à l'échelle internationale, pour moi, une partie de la solution se trouve dans la constitution d'une masse critique.
M. Mario Silva: Je voulais dire que je ne partageais pas nécessairement l'avis que pour être bon, il faut être meilleur et être plus connu qu'aux États-Unis. C'est un commentaire que j'ai entendu de nombreuses fois de la bouche de divers membres de ce secteur et c'est tout un défi. Je pense que cela s'applique non seulement à l'industrie cinématographique mais également aux sports et aux autres talents canadiens. La plupart de nos titulaires d'une maîtrise ont également tendance à aller s'établir aux États-Unis parce qu'ils veulent être sur ce marché.
Je pense que c'est Mme Vivier qui a mentionné qu'un accès équitable de toutes les régions du Canada au financement et aux programmes était essentiel. Je voudrais obtenir des clarifications à ce sujet parce que je pense qu'il est nécessaire d'établir certains centres d'excellence. Faut-il essentiellement subdiviser le fonds et accorder une part du gâteau à toutes les villes canadiennes qui veulent une politique cinématographique ou faut-il que seulement quelques centres importants du Canada s'y intéressent et ne se lancent pas dans tous les types de production cinématographiques possibles et imaginables?
À (1040)
Mme Carole Vivier: Je répondrai à cette question. Je ne pense pas que l'on trouve des personnes de talent uniquement dans les grandes villes. Le talent est unique. Je ne préconise pas que le Manitoba mérite un pourcentage des fonds parce que nous représentons un certain pourcentage de la population. Ce n'est pas cela du tout. Si on ne cherche pas activement les meilleurs scénarios, on ne les trouvera pas. Par conséquent, l'accès équitable est lié au talent. Le programme devrait être admissible à tous les Canadiens, à travers le pays. On ne devrait pas obtenir des fonds uniquement parce qu'on habite à un certain endroit, mais parce qu'on a une brillante idée et qu'on est un cinéaste enthousiaste. Votre travail est aussi valable que celui d'un cinéaste de Toronto, de Montréal, de Halifax, de Regina ou de Saskatoon. Votre lieu de résidence m'importe peu. Il s'agit de raconter des histoires canadiennes. C'est du financement canadien et il s'agit de veiller à ce que ce financement soit accessible à des cinéastes canadiens de talent, pour leur permettre de vivre leur vie de créateurs et d'avoir la possibilité de réaliser leurs projets.
En ce qui concerne les centres d'excellence, Winnipeg en est un également et, par conséquent, le nombre de cinéastes y est très élevé. Un de nos films était un des deux seuls films canadiens invités à participer au Festival du film de Venise cette année. L'année dernière, au Festival de Sundance, nous avons été invités à présenter deux longs-métrages. Pour une ville de la taille de la nôtre, c'est extraordinaire. Nous avons présenté le film de Guy Maddin intitulé The Saddest Music in the World avec pour vedette Isabella Rossellini et nous avons également présenté le film de Gary Yates intitulé Seven Times Lucky avec Kevin Pollack, dans lequel jouent également de nombreux excellents acteurs manitobains. Par conséquent, c'est à mon avis une question de talent et pas de lieu. Il s'agit de soutenir le talent au Canada.
La présidente: Merci beaucoup, monsieur Silva.
Madame Oda.
Mme Bev Oda (Durham, PCC): Merci beaucoup.
Je vous remercie d'avoir accepté notre invitation.
Je tenais à vous féliciter pour vos exposés parce que vous nous avez fait des suggestions très concrètes. Vous avez signalé qu'il y avait quelques idées nouvelles à explorer et que ce n'était peut-être pas uniquement un besoin croissant de fonds.
Une des idées que j'avais soumises il y a environ une semaine concernait l'accessibilité des distributeurs étrangers. Je sais que vous aurez des discussions avec les groupes locaux à travers le pays et, par conséquent, au lieu d'examiner cette idée sur-le-champ, nous pouvons la laisser mûrir au cours de nos déplacements à travers le pays.
L'autre question concerne également les distributeurs étrangers. À l'instar de mes collègues... à la suite de cette fin de semaine musicale que nous avons passée ici, nous constatons que certains artistes canadiens passent des contrats avec des maisons de disques étrangères qui investissent pour eux dans le marketing et la promotion. C'est peut-être à mon avis un des facteurs du succès que connaît la musique canadienne depuis des années. C'est maintenant l'industrie cinématographique qui doit relever ce défi.
C'est une idée.
Une idée dont je voulais discuter avec vous et qui, j'espère, aura l'occasion de germer pendant nos déplacements à travers le pays, est liée au défi que pose le financement provisoire. Vous avez mentionné que l'accès que vous avez au financement est restreint et qu'en réalité, les fonds qui étaient destinés au Manitoba ont été réaffectés à d'autres régions. Je sais que le financement provisoire pose un défi. La capacité de trouver du préfinancement est très restreinte et c'est un facteur décisif dans la réalisation ou l'abandon d'un projet.
Je ne veux pas nier l'aspect culturel de la cinématographie. Je voudrais vous poser une question à laquelle vous pourrez réfléchir.
Quels seraient les critères utilisés pour définir un produit culturel... Vous avez fait allusion dans votre exposé oral à l'admissibilité au statut de produit culturel, mais quels seraient les critères mesurables qui permettraient de prendre des décisions non arbitraires et non subjectives?
Avant de répondre à cette question-là, j'aimerais que vous fassiez des suggestions sur les options que l'on pourrait examiner en ce qui concerne le financement provisoire.
À (1045)
Mme Carole Vivier: Le financement provisoire pose un défi intéressant. Avant que les crédits d'impôt ne soient mis en place, il y avait le fonds d'investissement. Certaines personnes se sont enrichies grâce à ce fonds. Ensuite, le crédit d'impôt a été instauré et maintenant, ce sont les banques qui s'enrichissent, grâce au financement provisoire. C'est le délai de remboursement qui pose un défi. Les producteurs vont puiser dans leurs honoraires et dans leurs frais généraux pour combler l'écart du financement provisoire. En cas de dépassement des échéances de production, la réserve qu'ils se sont constituée pour payer les intérêts sur ce financement provisoire s'épuise en peu de temps et ils doivent alors puiser dans leurs propres honoraires. Par conséquent, nous devons trouver des possibilités d'aider ces petites entreprises à trouver des capitaux, ce qui pose un défi.
Je pense que ce n'est pas possible, mais vous pouvez établir des critères... Vous pourriez décider par exemple d'accorder une avance équivalant à 75 p. 100 du crédit d'impôt sur la partie A, au début des prises de vue principales, au début des travaux préparatoires—c'est alors que les réalisateurs ont besoin d'argent et que des fonds de roulement sont nécessaires; cela aiderait beaucoup les cinéastes. Il existe de nombreuses possibilités de mettre en place des contrôles de sécurité pour s'assurer que personne ne détourne les fonds et ne les utilise pour faire le tour du monde ou à d'autres fins.
Je pense que cela aiderait beaucoup les cinéastes. Si nous pouvions leur avancer les fonds pour la partie A, ils ne devraient pas s'adresser aux banques pour du financement provisoire. Ce ne sont pas uniquement les frais d'intérêt qui sont coûteux; les frais de mise en train sont également très élevés. Par conséquent, quand un cinéaste demande du financement provisoire, la banque a recours aux services d'un avocat—et je ne sais pas si les gens sont au courant de cela. Le réalisateur doit également payer un avocat. Il paie l'avocat de la banque et son propre avocat pour qu'ils examinent ces ententes. Les coûts sont astronomiques.
Nous avons examiné la question ici. Y aurait-il possibilité pour nous d'avancer des fonds pour la partie A... dans une proportion de 75 p. 100—car nous avons fait un examen chronologique des montants que représentent les crédits d'impôt accordés, tant des montants prévus que des montants réels—, ce qui laisserait une marge de sécurité très raisonnable? Une telle initiative ferait une énorme différence pour les cinéastes. Je pense que c'est théoriquement une des possibilités que vous avez de les aider.
Mme Bev Oda: Je vous remercie.
M. Victor Enns: C'est une occasion intéressante. Je suis enthousiasmé par votre question parce qu'elle me permet de parler, quoique brièvement, de l'importance de l'art, sujet qui me tient particulièrement à coeur. En effet, il s'agit d'examiner les différents emplois dans la culture et l'art populaire. L'art peut être instructif et divertissant. L'art divertissant est parfaitement justifié. Si un film fait des recettes de 100 millions de dollars en salle, ce n'est pas là une preuve que c'est une oeuvre d'art; c'est tout simplement que ce projet précis a permis de faire des recettes de 100 millions de dollars.
Oui, il y a deux approches différentes. Je pense que du côté de Téléfilm, à l'étape du développement, comme l'a mentionné Caryl dans son exposé, il sera essentiel que quelqu'un porte un jugement sur le scénario. Même si on examine le projet en le considérant uniquement comme un produit commercial, il est essentiel de faire un choix entre plusieurs scénarios et ce choix est dans une certaine mesure arbitraire et subjectif.
Mme Bev Oda: Oui, monsieur Enns, je comprends le processus.
Je me demande si vous ne pourriez pas nous proposer des critères précis que nous pourrions recommander. Il s'agit d'un projet à caractère non commercial et davantage culturel qui pourrait être appuyé en ayant recours à des mécanismes différents de ceux qui sont en place pour un projet commercial. Nous ne tenons pas à abandonner les projets culturels ou artistiques pour des projets exclusivement commerciaux, mais je pense qu'il est essentiel de veiller à mettre en place des critères très clairs sur lesquels les fonctionnaires, Téléfilm ou tout autre organisme qui financeront les projets, pourront fonder leurs décisions.
Si vous n'êtes pas en mesure de répondre immédiatement, vous pourriez peut-être donner les réponses par écrit après en avoir discuté.
Madame la présidente, je sais que mon collègue, M. Brown, voudrait poser une brève question.
À (1050)
La présidente: Je suis désolée, madame Oda, mais vous avez dépassé le délai de trois minutes dont vous disposiez et, par conséquent, je dois donner la parole à M. Kotto, puis à Mme Bulte.
Par souci d'équité, je vous interromps brièvement, monsieur Kotto, parce que vous et votre collègue serez probablement les derniers à poser des questions.
[Français]
M. Maka Kotto: Merci, madame la présidente.
Je vais revenir sur un petit commentaire relativement au star-système. Madame Vivier, vous avez dit tout à l'heure que, même aux États-Unis, ce n'était plus une garantie de succès pour un film. Il est vrai que le marché est saturé de ce côté, et c'est peut-être l'explication. Il y a un goulot d'étranglement qui fait qu'aujourd'hui, le client a l'embarras du choix et ne sait plus où donner de la tête. Cependant, au Québec, c'est un système qui marche au niveau de la presse écrite, des émissions de télévision et de radio. Il y a un soutien promotionnel très bien assis. En France, c'est pareil.
M. Enns mentionnais qu'en France, il y a une politique de billetterie qui fonctionne depuis des années déjà. On « taxe » le cinéma américain, ce qui permet à la France de financer son propre cinéma. On a essayé de faire la même chose au Québec et au Canada, mais cela n'a pas fonctionné.
Je reviens à l'essentiel. Je retiens qu'il y a un problème sur le plan des moyens de financement, de production et de distribution, ce qui limite l'accessibilité dans le réseau. Que pensez-vous de l'idée d'un réseau de diffusion numérique, dont l'exploitation serait moins coûteuse et qui redonnerait une sorte de souveraineté nationale à des États qui n'ont pas les moyens de concurrencer Hollywood? En amont, également, il faut voir l'impact que pourrait avoir un tel réseau sur le plan de la production. Les coûts de fabrication, de production et de réalisation en numérique sont beaucoup moins élevés que les coûts de production en film. J'aimerais entendre vos commentaires à ce sujet.
Parlons maintenant de l'accessibilité au marché canadien ou québécois des distributeurs étrangers et des sociétés étrangères. Ce sont des multinationales qui sont derrière cela, dont l'objectif essentiel est le profit, le profit et le profit. Est-ce qu'on ne risquerait pas à ce moment-là de fragiliser l'identité canadienne, compte tenu du fait que ces personnes seraient enclines, d'une part, à s'appuyer sur les moyens qui seraient mis à leur disposition par le gouvernement canadien et, d'autre part, à aller vers ce qui est le plus facile à vendre et donc à abaisser le degré de tout ce qui est substance, de ce qui pourrait projeter dans l'inconscient collectif un sentiment d'appartenance au niveau canadien et au niveau québécois?
[Traduction]
M. Victor Enns: Je répondrai brièvement à la dernière question en établissant un parallèle avec le secteur de l'édition. En fait, cela concerne également la question du vedettariat dont il a été question plus tôt. Margaret Atwood et Alice Munro habitent toujours au Canada. Cela leur est possible grâce en grande partie au fait que l'industrie canadienne de l'édition a été appuyée mais aussi maintenant parce que leurs ouvrages sont distribués par une entreprise étrangère. Des producteurs d'une oeuvre d'art comme Margaret Atwood ou Alice Munro conservent intégralement leur identité, mais cette oeuvre est diffusée par des distributeurs étrangers et par des distributeurs canadiens.
J'essaie d'une part de démontrer qu'il est possible pour un artiste de vivre dans n'importe quelle localité canadienne où se trouvent des moyens de production et de produire une bonne oeuvre d'art qui est exportable partout au Canada et à l'étranger, mais qu'il est parfois nécessaire d'élargir la distribution pour qu'elle ne soit pas restreinte à ce qui est disponible dans le cadre de nos systèmes canadiens. Cette nécessité est liée en grande partie à l'écart substantiel entre la population d'un pays comme le Canada et celle d'autres pays dont les habitants, en ce qui concerne par exemple le secteur de l'édition, lisent des oeuvres en anglais.
Si vous voulez vraiment faire une percée sur ce marché, vous trouverez des options efficaces. L'édition a de toute apparence trouvé une possibilité de le faire. Je n'aime pas beaucoup ce système, mais il semblerait qu'il soit efficace et même nécessaire. En d'autres termes, ma préférence—je suis très Canadien et mes antécédents sont canadiens—serait en fait que le système de distribution canadien s'améliore et que les distributeurs canadiens puissent distribuer nos produits à l'étranger avec succès. Ce serait ma préférence.
Si je me base sur ce qui se fait en matière de distribution dans d'autres secteurs, même dans celui de la musique, la distribution à l'étranger—le marketing et la promotion à l'étranger—est nécessaire pour élargir l'auditoire et créer un accès accru au produit.
C'est ainsi que j'envisage la situation. Elle m'attriste quelque peu, mais je n'ai pas de meilleure suggestion à faire et je ne vois pas de meilleure possibilité.
À (1055)
La présidente: Je vais devoir vous interrompre ici. Il nous reste seulement deux minutes et Mme Bulte attend impatiemment l'occasion de participer aux discussions.
L'hon. Sarmite Bulte (Parkdale—High Park, Lib.): Je vous remercie d'avoir accepté de participer à nos audiences.
Je suis comme M. Angus, à savoir que vous avez abordé un si grand nombre de questions et de sujets que nous tombons toujours à court de temps. Par conséquent, je voudrais très rapidement... Si vous ne pouvez pas répondre immédiatement, vous pourriez peut-être donner une réponse par écrit.
Pourriez-vous donner des précisions supplémentaires sur la différence entre la composante production et la composante performance? Je ne l'ai pas très bien comprise. Je comprends vos chiffres, mais je voudrais savoir quelle est la différence. Je ne comprends pas les deux concepts et, par conséquent, j'aimerais que vous les clarifiiez, car nous sommes des néophytes dans ce domaine.
En ce qui concerne la participation du Conseil des arts du Canada, je suis très heureuse que vous en ayez parlé parce que certaines personnes pensent qu'il ne devrait pas participer. Je suis très heureuse que vous... parce que j'ai entendu dire que le Conseil des arts du Canada n'avait que très peu de fonds à octroyer à ce secteur et qu'on ne les voyait même pas. Pourquoi participe-t-il? Le Conseil des arts du Canada a des activités très utiles. Cela ne devrait peut-être pas faire partie de son mandat. L'opportunité de sa participation dans ce secteur fait l'objet d'un tout autre type de discussion.
Par ailleurs, d'après les notes que j'ai prises pendant votre exposé, je me demande pourquoi vous n'avez pas fait de commentaires au sujet de l'Office national du film. Je présume que dans ce cas également, certaines personnes pensent que c'est Téléfilm qui devrait assurer le financement ou qu'il faudrait établir une agence et coordonner davantage l'approche dans ce domaine. Il est possible que ce ne soit pas Téléfilm, mais un autre organisme. Il est possible que ce soit un rétablissement du rôle initial de l'ONF. Par conséquent, j'aimerais que vous donniez des informations supplémentaires sur les débats sur l'opportunité que le Conseil des arts du Canada intervienne dans ce domaine.
Toujours en ce qui concerne le marketing, je dois dire que dans le cadre de mes fonctions de parlementaire, j'ai pris la semaine dernière la parole devant un groupe d'adolescentes dans une école secondaire et je leur ai parlé de mon voyage à Winnipeg pour participer à ces discussions sur le cinéma. Ces adolescentes de 11e année m'ont demandé où l'on pouvait voir des films canadiens. Je leur ai demandé de me citer le titre d'un film canadien. Ce qui est intéressant, c'est que le seul titre qu'elles m'aient donné était La grande séduction. J'étais vraiment... Je venais à la cérémonie de remise des Juno et, par conséquent, je leur ai demandé de me citer le nom d'un artiste canadien et là, elles n'ont eu aucune difficulté; elles pouvaient faire défiler des noms.
Par conséquent, je voudrais que vous m'aidiez à savoir comment on pourrait procéder pour le marketing.
Madame Vivier, vous avez dit qu'il était nécessaire d'examiner la question, comme il y a dix ans. La politique cinématographique a été mise en place il y a moins de cinq ans; je ne pense pas que sa création remonte à dix ans. Que s'est-il passé. Pourquoi n'y a-t-on pas pensé alors? Comment cette question est-elle passée par les mailles du filet? Il n'y a pas dix ans, mais plutôt cinq ans que le Fonds du long-métrage du Canada a été mis en place. Par conséquent, à quel niveau le système n'a-t-il pas fonctionné et que n'avons-nous pas compris pour qu'il demeure aussi inefficace? Pourquoi n'avons-nous pas apporté les rectificatifs nécessaires il y a cinq ans?
À propos de l'avance pour la partie A que vous avez suggérée, je connais des personnes qui trouvent cette idée géniale en ce qui concerne les chèques fédéraux. C'est formidable, soyez bénis; vous avancez des fonds ou vous permettez aux producteurs de réaliser leurs projets. J'ai toutefois entendu en Ontario des personnes qui prétendent avoir attendu leurs crédits d'impôt pendant de longs mois et, pendant ce temps, elles finançaient personnellement les films qu'elles réalisaient. Ensuite, il y a des personnes comme Veronica Tennant, que j'ai rencontrée dernièrement... Les délais d'attente sont... Vous pourriez avoir des informations à ce sujet sur papier. Comment procéder pour que ce soit efficace?
Un dernier point. Nous avons discuté en 2003 de la possibilité que Téléfilm n'ait pas de volet culturel et, par conséquent, je me suis basée là-dessus, mais nous avons maintenant un nouveau directeur général. Je pense que c'est un changement important et, par conséquent, cette déclaration de 2003 n'est probablement plus valable. J'ai été enchantée d'apprendre que M. Clarkson, dont je suis une grande admiratrice, a dit que la diffusion de films à la télévision... Le DVD opère le retour au vedettariat qui a été suggéré.
Á (1100)
M. Victor Enns: Oui, nous sommes très enthousiasmés par la nomination de Wayne Clarkson à la tête de cet organisme, nomination que nous considérons comme un choix judicieux pour le type d'initiatives qui intéressent le Winnipeg Film Group.
Je ferai quelques brefs commentaires au sujet du Conseil des arts du Canada avant de passer la parole à mes confrères et consoeurs qui se trouvent à l'autre extrémité de la table. Cela concerne en quelque sorte également la question des critères.
William Gass, le philosophe de St. Louis—qui est Américain, en fait—a fait une distinction intéressante lorsqu'il a déclaré que la culture populaire est souvent créée pour anesthésier le peuple, alors que la création artistique a pour objet de nous faire prendre conscience du monde qui nous entoure. Je pense que c'est une distinction cruciale. Je ne vois pas d'autre organisme que le Conseil des arts du Canada qui puisse soutenir ce type d'initiative parce que, pour éveiller la conscience et pour appuyer la vérité et toutes sortes de grandes idées artistiques, il faut bien prendre des décisions arbitraires. Les décisions sont généralement prises par un groupe; c'est généralement une bonne façon de procéder et, en fait, la seule. C'est la raison pour laquelle il est très important que le Conseil des arts du Canada dispose de fonds, de plus de fonds qu'il n'en a actuellement, pour soutenir la création de l'oeuvre qui a pour but d'accomplir cette tâche très importante dans la société.
L'hon. Sarmite Bulte: Je suis une adepte inconditionnelle du Conseil des arts du Canada... [Note de la rédaction : Inaudible].
Mme C.V. Caryl Brandt: Je voudrais faire une toute petite remarque, parce que nous avons commencé tard et que je savais que nous ne disposions pas de beaucoup de temps. Vous constaterez en lisant le mémoire écrit sur lequel était basé l'exposé verbal que nous avons examiné certains points sans entrer dans les détails. Vous trouverez notamment dans ce document des commentaires sur la nécessité de soutenir les documentaires long-métrage—tâche qui pourrait être aisément confiée à l'ONF—et de soutenir le développement de talents autochtones et francophones hors du Québec. Vous trouverez la réponse à certaines des questions que vous avez posées dans les deux pages que nous n'avons pas lues. Vous trouverez également la réponse dans les mémoires initiaux.
Mme Carole Vivier: Toujours à propos du Conseil des arts du Canada, voyez par exemple le cas de Guy Maddin. La plupart des films antérieurs de Guy Maddin ont bénéficié du soutien du Conseil des arts du Canada et, par conséquent, je pense que c'est également un organisme qui peut beaucoup aider les artistes à leurs débuts. Lorsque leur carrière progresse, ils peuvent avoir recours à d'autres mécanismes de financement. Le Conseil des arts du Canada a toutefois largement contribué à permettre à des cinéastes comme Guy d'avoir accès à des fonds et je pense par conséquent qu'il devrait poursuivre ses activités dans ce domaine.
L'hon. Sarmite Bulte: Un des commentaires qui ont également été faits par les personnes qui ont témoigné est que le Conseil des arts du Canada aide les nouveaux artistes, même s'il est nécessaire d'avoir quelques antécédents avant d'arriver à obtenir des fonds. Il y a ensuite les films long-métrage qui sont une étape intermédiaire. Comment peut-on passer de l'étape du premier film... Comment cela se passe-t-il quand on passe à l'étape du long-métrage? Le passage entre les quelques premiers films et un long-métrage représente un grand pas et il semblerait que ce soit le chaînon manquant. Il semblerait qu'aucun organisme n'intervienne à cette étape.
Mme Carole Vivier: Je pense qu'entre les deux, il y a des organismes comme l'Institut national des arts de l'écran, par exemple, qui est l'organisme de formation national, auquel on puisse s'adresser. On peut le considérer comme un mécanisme de formation virtuelle. Cet institut a son siège à Winnipeg, mais il assure la formation de cinéastes de toutes les régions du pays. Il a institué un prix pour la meilleure oeuvre dramatique dans la catégorie du premier court-métrage et il a mis en place un projet concernant les longs-métrages qui aide à faire la transition vers votre premier long-métrage. Entre les deux, il y a la télévision, puis le long-métrage.
La continuité entre le premier film et les autres étapes pose un défi. Téléfilm a mis en place des lignes directrices concernant le long-métrage à petit budget et tente actuellement de répondre aux besoins des réalisateurs émergents qui ont réalisé deux ou trois courts-métrages et qui veulent passer à leur premier long-métrage. Par conséquent, de nombreux programmes sont en place à travers le pays pour aider les cinéastes à faire cette transition.
La coordination pourrait-elle être plus efficace? Absolument. Je pense que des fonds supplémentaires sont nécessaires à cette étape de transition parce que c'est l'étape à laquelle on veut que les créateurs prennent des risques et que le talent se révèle. Au lieu de réaliser un film avec un budget de 50 millions de dollars, il serait possible de le réaliser avec un budget beaucoup plus restreint, ce qui donnerait aux cinéastes la possibilité de faire davantage de films dans ce domaine. Par conséquent, je pense que le financement de films à petit budget contribue à répondre à ce type de besoins.
La présidente: Merci beaucoup.
Je souhaiterais que nous disposions de beaucoup plus de temps. Quand vous repenserez aux commentaires qui ont été faits au cours de la dernière heure et demie, je suis certaine que vous souhaiteriez faire des commentaires supplémentaires. N'hésitez surtout pas à communiquer avec le comité.
Personnellement, j'apprécierais que vous fassiez des suggestions plus précises sur une chose en particulier. L'attention a été principalement concentrée sur le temps de projection—le temps de base, en quelque sorte—, mais ce que vous avez appris ici, c'est que ça représente à peine 10 p. 100 des recettes canadiennes et que ça ne concerne que 10 p. 100 des cinéphiles canadiens. Par conséquent, j'apprécierais beaucoup vos suggestions sur les possibilités d'élargir l'auditoire canadien par l'intermédiaire de l'achat et de la vente de DVD pour le visionnement à domicile.
Pendant que je suivais la cérémonie de remise des prix Juno hier soir, je pensais que je m'étais trompée. Lorsque les règlements sur le contenu canadien ont été instaurés, je pensais qu'ils étaient quelque peu condescendants à l'égard des artistes canadiens, mais il m'a suffit de deux ou trois années pour me rendre compte que c'était la meilleure initiative qui ait jamais été prise dans ce domaine. Quand j'ai vu défiler les noms hier soir, je pensais que j'avais appris une leçon. Tout autre commentaire à ce sujet pourrait être utile.
Á (1105)
Mme Carole Vivier: Je suis entièrement en faveur de méthodes de diffusion différentes comme les DVD, mais j'insiste toutefois sur le fait qu'elles ne seront efficaces que si on en fait la promotion et la commercialisation et que si l'on crée des histoires brillantes, ce qui nous ramène à l'étape du script.
La présidente: Merci beaucoup.
À ce propos, je voudrais que les personnes qui suivent les discussions à titre d'observateurs signent le registre. Je pense qu'il serait intéressant de savoir qui s'intéresse aux travaux du comité sur cette question.
Nous allons faire une pause de cinq minutes pendant le changement de témoins.
Á (1106)
Á (1120)
La présidente: Merci beaucoup pour votre patience. Je vous remercie également d'avoir accepté notre invitation. Nous sommes impatients d'entendre ce que vous avez à dire au nom de la Saskatchewan Film and Video Development Corporation et de la Saskatchewan Motion Picture Association.
Mme Valerie Creighton (directrice générale, Saskatchewan Film & Video Development Corporation): Mesdames et messieurs, je vous remercie pour cette occasion de témoigner devant votre comité. Je tiens à signaler, au nom des Prairies, que nous apprécions beaucoup le fait que vous ayez pu tenir des audiences pour les provinces des Prairies. Cela nous aide beaucoup en ce qui concerne les déplacements et nous fait gagner du temps.
Avant d'entamer mon exposé formel, je tiens à signaler l'investissement considérable que le gouvernement du Canada fait depuis plus de 30 ans dans l'industrie de la cinématographie et de la télévision. Nous l'apprécions beaucoup; cet investissement a aidé cette industrie à prendre de l'expansion à l'échelle nationale et il a notamment aidé le secteur de la production de la Saskatchewan. Nous tenons à témoigner notre reconnaissance. Après une trentaine d'années et la mise en place de plusieurs institutions et mécanismes très efficaces, nous sommes heureux d'avoir de l'appui et apprécions beaucoup l'examen et l'analyse en cours.
Pour parler un peu de la Saskatchewan, l'industrie cinématographique de la province est relativement jeune comparativement au reste du Canada. L'industrie doit principalement son existence à SaskFilm, créé en 1989 et au SCN, le Saskatchewan Communications Network, créé en 1991. SaskFilm a été mis sur pied à une époque critique pour la province, tout de suite après la fermeture des bureaux de l'Office national du film de la Saskatchewan. Grâce à l'appui du gouvernement de la Saskatchewan, SaskFilm est devenu un moteur de la croissance de l'industrie provinciale du film et de la télévision.
Le volume des productions est passé de 5 millions en 1990 à près de 65 millions en 2004, soit une augmentation de 1 300 p. 100 en 14 ans. L'année dernière, le volume des productions a augmenté de 56 p. 100 alors que de nombreux centres du pays enregistraient une baisse considérable à ce chapitre. En Saskatchewan, la production est essentiellement constituée de documentaires, de séries télévisées, des films de la semaine et de mini-séries.
La production de longs-métrages n'a pas encore dépassé le stade initial. Quatre longs-métrages ont été produits dans la province depuis 2001. L'un de ces longs-métrages a été réalisé en coproduction avec l'Ontario; un autre est une coproduction-coentreprise et deux sont des réalisations à petit budget rendues possibles grâce aux programmes de SaskFilm.
Il est intéressant de signaler que depuis 2001, les producteurs de la Saskatchewan ont obtenu de 0,5 à 2 p. 100 du Fonds du long-métrage du Canada. En outre, de 2001 à 2004, nous avons reçu 1,4 p. 100 par année financière du Programme de droits de diffusion et du Programme de participation au capital de Téléfilm Canada, moins de 1 p. 100 par an d'autres programmes de Téléfilm, une moyenne de 0,3 p. 100 de l'Office national du film et 2,7 p. 100 du Conseil canadien de arts. Les statistiques nationales du ministère du Patrimoine canadien révèlent qu'en moyenne, 86 p. 100 du financement fédéral de Téléfilm Canada, du Fonds canadien de télévision et de l'Office national du film est accordé à l'Ontario, au Québec et à la Colombie-Britannique, ce qui laisse 14 p. 100 pour les sept autres provinces et les trois territoires. C'est naturellement un dilemme dont il est difficile de sortir.
Au début, le motif généralement cité pour le manque de participation fédérale en Saskatchewan était l'évaluation du volet création. Cependant, ce n'est plus le cas. La province offre maintenant aux auditoires canadiens la série télévisée la plus populaire au pays, Corner Gaz. Notre province a été choisie comme lieu de production de longs-métrages de haut calibre comme Tideland de Terry Gilliam, l'année dernière. Nos documentaristes continuent de recevoir des éloges à l'échelle internationale pour leurs oeuvres. Un prix Emmy international a été accordé à un documentaire d'une heure intitulé Thirteen Seconds:The Kent State Shootings.
Si tout semble indiquer que le milieu de la production cinématographique de la province est capable de créer des oeuvres commercialisables, susceptibles d'intéresser le public, il demeure que les producteurs de longs-métrages ne parviennent pas à obtenir un financement suffisant des sources fédérales. Les productions qui ont été soumises par les producteurs de la province depuis l'adoption de la politique cinématographique canadienne ont régulièrement reçu l'appui du marché et satisfait à tous les critères énoncés dans les lignes directrices. Les producteurs ont mentionné un manque de transparence dans le processus d'évaluation. Dans tous les cas, les rejets ont été décidés sur la base d'un examen subjectif de l'aspect créativité et, malgré l'intérêt très net affiché par le marché, pas un seul projet de long-métrage dont Téléfilm a subventionné le développement en Saskatchewan n'a atteint l'étape de la production. Or, sans ce type de financement, il est malheureusement impossible d'accompagner une industrie naissante.
Si les productions de la Saskatchewan ne cessent d'augmenter en nombre et de s'améliorer en qualité depuis 2000, il convient de mentionner que la plupart d'entre elles sont réalisées par des sociétés de production de la Saskatchewan, sans la participation de Téléfilm ou du Fonds canadien de télévision. Cette situation a obligé les producteurs à se tourner vers d'autres sources de financement. La plupart des productions sont maintenant réalisées dans le cadre de projets qui échappent aux règles de contenu canadien et les producteurs ont noué des liens avec des sources de financement américaines. Si cette activité est économiquement intéressante pour la province, elle ne favorise pas la diversité cinématographique canadienne et ne permet pas non plus d'élargir l'auditoire pour nos créations.
Á (1125)
Nous avons cru comprendre que si cette situation perdurait dans l'Ouest, seuls deux projets de longs-métrages pourraient être financés cette année à cause d'un manque de ressources.
Les producteurs de la Saskatchewan sont frustrés par les tentatives infructueuses qu'ils déploient en vue d'instaurer des relations pour faire distribuer leurs produits. Ce n'est pas un cas exceptionnel dans le pays. Étant donné que la plupart des distributeurs canadiens se trouvent dans le centre du pays et que la grosse majorité du financement fédéral est accordée à des productions produites dans le centre, rien n'incite les distributeurs de longs-métrages canadiens à acheter des produits canadiens hors de l'Ontario et du Québec.
L'aide fédérale à la mise en marché, assurée par le truchement du Fonds du long-métrage du Canada, est consentie presque exclusivement aux producteurs de l'Ontario et du Québec. La priorité est donc accordée aux réalisations produites et vues dans ces provinces. En dépit des politiques visant à élargir les auditoires au Canada pour les productions canadiennes et à faire en sorte que les films canadiens soient vus dans tout le pays, les longs-métrages canadiens sont rarement vus sur les écrans de la Saskatchewan.
En finançant des produits susceptibles d'être des succès commerciaux, les producteurs continuent de se heurter aux restrictions découlant de l'application des règles du contenu canadien. Mentionnons à cet égard qu'il est nécessaire de s'appuyer sur un système de vedettariat canadien qui est inexistant. Une modification des règles sur le contenu canadien grâce à laquelle les producteurs pourraient engager de véritables têtes d'affiche, sans égard à leur citoyenneté, leur permettrait de rentrer dans leurs frais grâce au nombre d'entrées.
La Saskatchewan est, en grande partie, servie par le bureau de Téléfilm Canada de l'Ouest, installé à Vancouver, en Colombie-Britannique. Si cette présence est très appréciée par les producteurs de notre province, ils continuent à douter de son efficacité surtout parce que le bureau donne l'impression qu'il n'est pas en mesure de prendre des décisions à son niveau. Le bureau de la Colombie-Britannique essaie de servir les quatre provinces de l'Ouest, à savoir la Colombie-Britannique, l'Alberta, la Saskatchewan et le Manitoba, sans disposer pour autant des ressources humaines ou financières dont il aurait besoin et sans avoir un mandat qui lui permettrait de servir équitablement les quatre provinces.
Personne ne remet en question le succès indéniable du cinéma québécois et, dans une moindre mesure, du cinéma ontarien. À l'évidence, il existe toutefois un lien étroit entre les ressources mises à la disposition de ces provinces et les résultats qu'elles ont obtenus.
Il convient de signaler qu'aucune compagnie de production des trois provinces des Prairies n'est admissible à une enveloppe de performance. Sans les ressources ni le mandat appropriés, l'aliénation de l'Ouest se poursuivra, surtout dans les provinces des Prairies.
Depuis 2000, SaskFilm travaille en partenariat avec Téléfilm Canada, Patrimoine canadien, le ministère des Affaires étrangères et tous les autres organismes provinciaux pour participer à divers festivals et être présent sur divers marchés en Amérique du Nord et en Europe. Ce partenariat s'est avéré très intéressant pour les producteurs de la Saskatchewan parce qu'il a permis d'augmenter les possibilités de coproduction, de les aider à exporter leurs produits et d'améliorer leur présence sur les marchés internationaux. Nous pensons que c'est en partie la raison pour laquelle le volume de nos productions a augmenté dans des proportions aussi considérables au cours des dernières années.
Voici quelques-unes des recommandations dont nous avons discuté en Saskatchewan et que nous soumettons à l'attention de votre comité.
Nous recommandons que des ressources suffisantes soient consacrées au développement et à la production de longs-métrages dans toutes les régions du pays. Cela permettra de financer la création partout au Canada. Après tout, cela nous ramène à la question du script et, comme nous le savons—Corner Gas est un exemple de tout premier choix—, personne n'a le monopole d'une bonne idée de création.
Nous recommandons que les enveloppes de performance soient redistribuées pour que les ressources financières accordées en fonction des critères subjectifs soient augmentées. Ainsi, davantage de ressources aboutiront dans des projets entrepris par de jeunes créateurs prometteurs et le système gagnera en souplesse.
Nous recommandons que les règles de contenu canadien soient modifiées pour permettre plus de souplesse dans le choix de la distribution, sans égard à la citoyenneté des vedettes. Ce faisant, il sera possible d'améliorer les chances de financement des films et d'élargir l'auditoire des projets canadiens.
Nous recommandons que l'on assouplisse également le système pour que les distributeurs non canadiens puissent commercialiser et vendre des produits canadiens sans être pénalisés. Ce faisant, les films canadiens seront vus par un auditoire plus important et pourront gagner la critique et être des succès commerciaux.
Nous recommandons que le crédit d'impôt fédéral soit amélioré pour inclure un pourcentage accordé à la production de longs-métrages. Cette mesure permettra d'encourager la production et d'ouvrir d'autres possibilités de financement.
Nous recommandons que les projets présentant un intérêt commercial, confirmés par des garanties de distribution ou des avances, bénéficient de plus de points dans le système d'évaluation. Ainsi, ce sont les projets présentant un fort potentiel commercial qui seront financés.
Nous recommandons que la nature subjective de l'évaluation de la partie créativité dans les demandes soit modifiée pour garantir la transparence du processus décisionnel.
Nous recommandons que le pouvoir et le contrôle du processus décisionnel soient décentralisés et que le bureau fédéral qui sert les producteurs canadiens reçoive pour mandat de veiller plus particulièrement à l'égalité d'accès.
Nous recommandons que les ressources en ce qui concerne la commercialisation soient attribuées à des sociétés de production pour louer les services de sociétés de distribution. Nous pensons que ce faisant, on renforcerait le lien entre la société de production et la société de distribution et qu'on assurerait la mise en marché efficace du film.
Á (1130)
Cette dernière recommandation ne se trouve pas dans notre mémoire. C'est une idée dont viennent de discuter nos producteurs de la Saskatchewan et quelques autres producteurs de l'ouest du Canada.
Ce sont là toutes les observations liminaires que nous voulions faire, qui sont extraites du mémoire que nous vous avons remis.
Je voudrais encore faire une observation personnelle. Je suis arrivée à Winnipeg hier en fin de soirée et j'ai regardé les Juno à la télévision. Cela faisait chaud au coeur de voir tous ces musiciens des diverses régions du pays récompensés pour leur talent. Je n'ai malheureusement pas pu m'empêcher de faire une comparaison avec la récente remise des prix Génie qui a été dominée, naturellement, par l'industrie québécoise, grâce à l'énorme succès qu'elle a connu dans le secteur du long-métrage. Je n'ai pu m'empêcher de me demander avec tristesse ce qui se passait ici. Pourquoi le Québec réussit-il si bien ou que fait-il que l'on ne fait pas dans les autres régions du pays? Serait-il possible d'examiner d'autres programmes ou d'autres secteurs pour y apporter des modifications afin que nos scénarios et nos idées pleines de créativité aient un accès égal au système fédéral?
D'autres pays aussi petits que le Canada—comme la Nouvelle-Zélande ou même l'Irlande—remportent un énorme succès avec leurs longs-métrages en dépit du fait qu'ils sont à côté de pays possédant une industrie très puissante. Que font-ils et comment pourrions-nous les imiter?
Je vous remercie pour votre attention et vous remercie tout particulièrement pour vous être déplacés dans les Prairies. David ou Cynthia auront peut-être quelques commentaires supplémentaires à faire.
M. David Hayter (directeur des opérations, Saskatchewan Motion Picture Association): Je vous remercie encore de nous avoir invités. Je signale très brièvement que Valerie, de SaskFilm, et que Cynthia travaillent en étroite collaboration et que pratiquement tout ce qu'elle a dit aujourd'hui est une voix... Il est un fait certain que l'industrie cinématographique se développe de plus en plus dans les Prairies et surtout en Saskatchewan. Cynthia administre un programme de formation auquel participe un nombre sans cesse croissant de personnes. Ce qui nous manque malheureusement, ce sont des fonds. Nous avons donc une occasion de tenter de régler ce problème au cours des prochains mois.
Merci beaucoup.
La présidente: Je vous remercie.
Je voudrais vous remercier et remercier plusieurs autres porte-parole des Prairies qui ont été très persuasifs et nous ont convaincus de l'impérieuse nécessité de prévoir une autre journée d'audiences.
Mme Valerie Creighton: Nous ne voulions pas insister trop lourdement, mais nous sommes heureux que vous soyez venus.
La présidente: Je ne dirais pas que vous avez insisté lourdement, mais vous avez été très convaincants. Je vous remercie.
J'ai M. Brown sur ma liste.
M. Gord Brown (Leeds—Grenville, PCC): Je vous remercie, madame la présidente.
C'est très agréable d'être à Winnipeg et d'écouter les représentants de la Saskatchewan. Je pense que ce fut un voyage qui m'a ouvert les yeux et qui m'a permis de constater de visu l'influence de l'industrie musicale grâce aux Juno et le système de vedettariat qui a été instauré dans cette industrie.
J'observe de nombreux autres événements dont certains sont apparemment liés aux décisions stratégiques du gouvernement, comme celle qui concerne le contenu canadien, mais la croissance des dernières années est due en grande partie à l'influence d'un des réseaux qui passe des émissions comme Idole canadienne et, naturellement, eTalk, qui aident l'industrie musicale. Je ne vois rien de semblable dans l'industrie cinématographique, cependant. De toute évidence, un grand nombre de personnes s'y intéressent, mais pas le grand public.
Ma première question, qui concerne la distribution et la mise en marché et que j'ai déjà posée à de nombreux témoins, est la suivante : pourrions-nous prendre, ou recommander dans notre rapport de prendre, certaines décisions stratégiques qui, à votre avis, aideraient l'industrie, surtout en Saskatchewan?
Á (1135)
Mme Valerie Creighton: Je ne sais pas en ce qui concerne spécifiquement la Saskatchewan. La distribution est probablement le plus grand défi qui se pose au milieu de la production au Canada. C'est une situation difficile. Les distributeurs disent qu'ils font face à la concurrence sur le marché mondial sans compter les dépenses et les coûts particulièrement élevés dans ce secteur. Par conséquent, c'est un problème extrêmement complexe et délicat auquel il n'y a pas de solution très simple.
Je ne peux que faire des observations personnelles, monsieur Brown. Ma profession m'a amenée à travailler en étroite collaboration avec le secteur de la production et avec les maisons de production elles-mêmes. Nous n'avons pas une collaboration aussi étroite avec le milieu de la distribution—il n'y a pas de maison de distribution en Saskatchewan et lorsque nous avons des contacts avec des maisons de distribution, ceux-ci sont ponctuels et concernent des projets bien précis. Ce que j'ai toutefois pu observer au sujet de l'approche des maisons de production, c'est que, lorsqu'elles acceptent un projet, pendant une période pouvant aller de deux à sept années, elles s'occupent de la rédaction du scénario, du développement, du financement et, enfin, de la production de ce projet. Ensuite, c'est le trou noir et son avenir est incertain.
Je pense que, d'après les producteurs avec lesquels j'en ai parlé, le système est caractérisé par une certaine déconnexion, voire par des relations très malsaines dans de nombreux cas, entre la maison de production et la maison de distribution. Je ne sais pas pour quelles raisons. On vous donnera une foule d'opinions à ce sujet, mais je pense que le sens de la propriété et l'enthousiasme passionné que suscite un produit canadien de la part de la maison de production ne se retrouvent pas toujours au niveau de la maison de distribution lorsqu'elle reprend le flambeau. Est-ce lié à la facilité ou à la difficulté d'obtenir du financement? Qui connaît la réponse à cette question?
Je pense toutefois, après avoir observé la situation pendant environ sept ans, que s'il existait des relations saines entre les deux et si l'enthousiasme de la maison de production, qui a donné naissance à cette création... et si les maisons de production avaient accès à des ressources suffisantes pour engager les services de maisons de distribution de façon plus efficace ou mieux connectée, cela pourrait aider à accélérer la mise en marché de ce produit.
Je vous citerai un exemple qui concerne la Saskatchewan. On y a tourné, il y a trois ans, je pense, un film intitulé Les anges déchus, qui est une coproduction entre l'Ontario et la Saskatchewan. Le scénario de ce film est absolument exquis et il est fondé sur un roman de Barbara Gowdy. On ne parlait que de ce film dans les festivals, en tout cas à celui de Toronto, et il a remporté des prix à travers le pays. Les producteurs et ceux d'entre nous qui sont actifs à un niveau très fondamental pensaient que ce film devrait être d'abord projeté dans de petits centres du Canada, dans des villes comme Hamilton, voire Moose Jaw—de petites villes—, gagner de la notoriété puis être projeté dans les grandes villes. C'était parce que le coeur de l'action se passait dans de petites agglomérations. Nous pensions que si cette stratégie avait été adoptée, ce film aurait été un très gros succès commercial et qu'il aurait été acclamé par la critique.
Il a malheureusement été décidé—et j'ignore les motifs de cette décision—qu'il sortirait sur les écrans à Toronto et à Vancouver. Il est resté au maximum une semaine au programme, puis est tombé dans l'oubli. C'est extrêmement déplorable. Tous les Canadiens qui ont eu l'occasion de voir ce film—et si vous ne l'avez pas vu, je vous le recommande—estiment que c'est une histoire universelle. Elle a été tournée en Saskatchewan, mais tous les Canadiens s'y identifient et elle est fondée sur thème universel.
Est-il par conséquent possible de prendre des mesures précises?
Je ne suis pas experte en matière de distribution, mais je pense que c'est le principal problème qui se pose au Canada. Les enjeux fédéraux qui entourent cette question sont liés à la question de savoir si nos distributeurs sont efficaces sur le marché international. Le Canada est-il un trop petit pays? Quelles autres relations et liens pourraient être développés?
Je n'ai toutefois pas de réponse précise à votre question, à l'exception de ces quelques opinions personnelles.
M. Gord Brown: Bien.
Nos témoins du Manitoba ont mentionné qu'il était essentiel que les sociétés chargées de faire la mise en marché rendent davantage de comptes; je n'ai d'ailleurs pas eu l'occasion de leur poser des questions à ce sujet. Pouvez-vous faire des commentaires sur les possibilités dans ce domaine?
Mme Valerie Creighton: Je pense que le film Les anges déchus est un exemple de tout premier choix. Qui décide des lieux où le film fera sa sortie? Quelle est la stratégie dans ce domaine? C'est une question qui est liée à la mise en marché. Dans combien de salles? Dans quels endroits aura lieu la sortie générale? Quel suivi fait-on? Quand le DVD sera-t-il lancé sur le marché? Quelle est la stratégie de marketing sur laquelle reposent toutes ces décisions? La plupart de ces décisions sont prises par le distributeur. Je ne dis pas que les distributeurs ne font pas bien leur travail. La plupart d'entre eux font de l'excellent travail, compte tenu des ressources dont ils disposent et de leur capacité de travailler dans le système international.
Tout ce que je peux dire, c'est que j'ai observé que compte tenu de l'enthousiasme dont font preuve le réalisateur et la maison de production, il me semble qu'une déconnexion se fait en quelque sorte à l'étape de la mise en marché et de la distribution. Par conséquent, si l'on pouvait établir des liens plus solides entre ces deux entités, cela pourrait peut-être aider à résoudre le problème. Cela pourrait peut-être contribuer à la reddition de comptes, tout en mettant l'accent sur le marketing et sur les opinions des personnes les plus engagées dans le projet au sujet du lieu de sortie du film qui lui permettrait de toucher un large auditoire.
Á (1140)
M. Gord Brown: Je vous remercie.
La présidente: Merci beaucoup, monsieur Brown.
Je donne à nouveau la parole à M. Silva.
M. Mario Silva: Nous avons entendu ce message maintes et maintes fois. Tout se joue à l'étape de la distribution et, bien entendu, à celle du marketing. Je me demandais si mon pourcentage est exact. Je pense que le gouvernement n'investit qu'environ 2 p. 100 de ses dépenses totales dans la distribution, ce qui est peu comparativement au pourcentage que les États-Unis investissent dans la distribution.
Mais abandonnons la distribution qui est, j'en suis conscient, un objectif important et une question à examiner, pour entamer une brève discussion sur l'enveloppe de performance. J'aimerais savoir ce que cela signifie exactement et ce qui doit être amélioré... [Note de la rédaction : Inaudible]
Mme Valerie Creighton: L'enveloppe de performance est un volet de financement par l'intermédiaire de Téléfilm qui est fondé sur le succès commercial des projets antérieurs des maisons de production. Je pense que c'est un indicateur très révélateur. De toute évidence, si une maison de production peut réaliser un film et le commercialise efficacement et que ce film est un succès commercial, elle mérite une récompense. Par conséquent, je ne voudrais pas que l'on interprète mes observations de telle façon que l'on pense que nous sommes opposés aux enveloppes de performance. Je pense que c'est un outil très important. C'est un mécanisme qui récompense la réussite.
Le problème dans les Prairies est, je le rappelle, que, quand le solde du financement a été réaffecté à l'extérieur de la région, il est très difficile de trouver une possibilité d'amorcer la croissance d'un secteur émergent et c'est ce qu'est notre secteur, en Saskatchewan. Nous ne prétendons pas égaler les histoires de réussite du centre du Canada. Cependant, dans notre province... J'ai travaillé pendant de nombreuses années avec Victor Jerrett Enns, qui était ici avec le groupe de représentants du Manitoba. J'ai été directeur du Saskatchewan Arts Board, le pendant du Conseil des arts du Canada, pendant 15 ans et c'est en Saskatchewan que le pourcentage de récipiendaires du prix de littérature du gouverneur général était le plus élevé par habitant. Par conséquent, le problème n'est pas dû à un manque d'idées et d'histoires ni à un manque de créativité.
La capacité de porter ces oeuvres à l'écran et de disposer de ressources suffisantes... Il est très difficile de trouver des ressources dans le secteur privé pour amorcer le processus de développement et de création. Par conséquent, afin de laisser une plus grande marge de manoeuvre au système à l'échelon fédéral, ne serait-il pas possible de revoir les enveloppes de performance et la répartition globale des fonds afin de récompenser les entreprises qui ont de grands succès commerciaux mais également pour donner plus de marge de manoeuvre dans ce que Téléfilm appelle la « catégorie subjective » qui représente l'autre moitié—c'est-à-dire toutes les sociétés de production du pays qui n'ont pas atteint le niveau de ce que l'on considère comme un succès commercial mais qui sont encore actives.
Le problème, c'est que lorsqu'on réserve un pourcentage très élevé des ressources aux grosses sociétés et à celles qui ont réussi, il ne reste plus que des ressources très restreintes pour les jeunes maisons de production en plein développement et pour les idées nouvelles.
Par conséquent, il s'agit de faire une comparaison entre le système de performance et le système subjectif à Téléfilm et de voir comment il fonctionne et ce qui a été efficace, pour conserver ce qui est bien tout en augmentant la marge de manoeuvre.
M. Mario Silva: Savez-vous combien d'entreprises cela représente?
Mme Valerie Creighton: À l'échelle nationale? En ce qui concerne l'enveloppe de performance? Je suis désolée, mais je ne suis pas en mesure de citer le chiffre de mémoire. Téléfilm serait certainement en mesure de répondre à cette question, mais je ne suis pas capable de le faire de mémoire.
Je sais que dans les provinces des Prairies, pas une seule société n'a une enveloppe de performance. Je pense qu'il y en avait une en Colombie-Britannique, mais je ne peux pas l'affirmer. Il y a très peu de sociétés dans l'ouest du Canada. Il y en avait en tout cas moins de trois qui ont réussi au niveau de l'enveloppe de performance la dernière fois que nous avons examiné le document de politique avec Téléfilm. Cela remonte à quelques années.
M. Mario Silva: Je vous remercie.
La présidente: Merci, monsieur Silva.
Monsieur Schellenberger.
M. Gary Schellenberger: Je voudrais revenir à la question de l'enveloppe de performance. Est-ce que les critères sont trop stricts et est-ce que ce pourrait être la raison pour laquelle trois sociétés seulement... [Note de la rédaction : Inaudible] Pourriez-vous m'expliquer en quoi consiste l'enveloppe de performance?
Á (1145)
Mme Valerie Creighton: Ce que je sais au sujet de l'enveloppe de performance—et n'oubliez pas que je ne travaille pas pour Téléfilm—est qu'elle est fondée sur le succès commercial. Par conséquent, lorsqu'on veut développer un secteur émergent, je pense que Téléfilm s'est appliqué à trouver, dans le cadre du programme concernant les longs-métrages à petit budget, des mécanismes pour les producteurs, les maisons de production et les réalisateurs qui n'arrivent pas à atteindre le seuil fixé pour l'enveloppe de performance. Ce seuil est-il trop élevé? Probablement pas si l'on veut atteindre un bon succès commercial au Canada. Ce sont les sociétés qui le font. C'est un mécanisme très efficace.
Le dilemme est que si elles atteignent un seuil de ce niveau, que faut-il faire en ce qui concerne le reste? Le problème que j'ai relevé en ce qui concerne le programme d'aide aux longs-métrages à petit budget quand les témoins du Manitoba faisaient leur exposé est le manque de continuité. Par conséquent, on ne dispose pas de fonds suffisants dans le système en général pour soutenir un processus très vigoureux de rédaction de scripts et de développement pour faire passer ces nouvelles histoires et idées dans la conscience collective.
Sans le Conseil des arts du Canada, comment des créateurs comme Guy Maddin auraient-ils pu démarrer? Il s'agit à bien des égards d'un système très intégré et je pense que nos institutions fédérales, à savoir, le Conseil, l'ONF et Téléfilm, ont été très efficaces, mais que le problème est lié à une déconnexion entre elles. C'était particulièrement visible entre le Fonds canadien de télévision et Téléfilm et les deux émissions administrées conjointement. Le problème a été rectifié mais, pendant de nombreuses années, une maison de production obtenait l'accord du Programme des droits de diffusion sans obtenir l'accord du Fonds de participation au capital pour le même projet.
Les deux organismes se sont appliqués à faire disparaître ces incohérences, mais je pense que les enveloppes de performance sont une bonne initiative. Nous voulons tous un plus grand succès commercial pour nos projets. Le dilemme est que lorsqu'on amorce le développement d'un secteur, il est nécessaire de disposer de ressources pour permettre au créateur de s'exprimer. D'où vient le problème? Je pense—et je suis sûr que vous en avez assez d'en entendre parler—que l'on ne dispose probablement pas de ressources suffisantes à ce niveau du système.
M. Gary Schellenberger: Un sujet dont nous avons déjà discuté un peu au comité est celui du traité de l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI). La ratification de ce traité aiderait-elle notre industrie? Nous apporterait-elle des lignes directrices? Le traité de l'OMPI poserait-il un problème ou pourrait-il être une solution pour notre industrie cinématographique? Je pense qu'il a été signé en 1996 et près de dix ans plus tard, on hésite toujours à le ratifier.
Mme Valerie Creighton: Je ne connais pas suffisamment le contenu du traité pour répondre à cette question de manière intelligente. Je pense que tous les mécanismes que l'on peut examiner et qui sont susceptibles de nous permettre d'ajuster notre système... Nous pouvons être très radicaux dans l'Ouest, comme vous l'avez certainement déjà entendu dire, surtout en Alberta, quoique les représentants de cette province auront bientôt leur tour et pourront certainement vous l'expliquer.
Lorsque nous avons comparé la situation dans l'ouest du Canada et dans le reste du pays, il y a une question qui nous a frappés. J'ai réexaminé les chiffres hier. Le fait que 86 p. 100 des ressources fédérales de nos trois principales institutions soient attribués au Québec et à l'Ontario—la Colombie-Britannique n'en reçoit que 9 p. 100 et le reste va au Québec et à l'Ontario—crée une situation vraiment difficile. Que faire pour permettre aux sept autres provinces et aux trois territoires de développer ces scénarios et est-il possible de trouver des mécanismes plus efficaces?
Dans l'Ouest, nous avons décidé à un certain moment qu'il fallait renoncer complètement. Je pense que le gouvernement fédéral a investi des ressources considérables dans l'industrie au cours des 30 dernières années. Le problème n'est pas lié à un manque de fonds mais plutôt à la répartition ou à l'affectation des fonds, à l'établissement des priorités. Le Canada a eu quelques belles histoires de réussite.
Je voudrais faire quelques commentaires au sujet de Corner Gas, bien que ce ne soit pas un long-métrage, mais une série télévisée. Cela pourrait vous intéresser parce que c'est un projet qui attire deux millions de téléspectateurs par semaine à l'échelle nationale. Cela ne s'était jamais vu dans les milieux canadiens de la radiodiffusion. Ce projet, à sa sortie, n'avait pas reçu de fonds du Programme de droits de diffusion ni du Programme de participation au capital. Il avait été financé uniquement par le radiodiffuseur et par les fonds fédéraux que le radiodiffuseur obtient dans son enveloppe. M. Stursberg a annoncé cette année—devant tous nos organismes—que nous devions faire quelque chose au sujet des téléspectateurs au Canada. Nous avons atteint 5 p. 100 en ce qui concerne les longs-métrages. Il est maintenant nécessaire de faire quelque chose au sujet des téléspectateurs. Nous devons attirer un plus grand nombre de téléspectateurs pour les émissions dramatiques et les comédies canadiennes.
J'ai parlé de Corner Gas à titre d'exemple. Il s'agit d'un projet modeste sorti de nulle part et qui n'a pas été financé par des crédits fédéraux et qui, malgré cela, a produit l'effet d'un raz-de-marée à l'échelle nationale. En Ontario, on entend des jeunes de 14 ans parler de Corner Gas dans les autobus. Je suis originaire d'une localité rurale. Outre cet emploi, je fais aussi de la culture agricole et à la coopérative de Stoughton, un de mes amis avait une casquette Corner Gas et tous les agriculteurs de l'endroit sautaient sur lui pour voir cette casquette. C'est presque un phénomène d'hystérie collective. En fait, c'est un modèle. Cela signifie que personne n'a le monopole d'une bonne idée. On a beau faire des investissements considérables dans un système, si l'on n'a pas de bons scénarios, l'auditoire ne regardera pas l'émission ou le film. Les auditoires sont devenus très sophistiqués, surtout lorsqu'on est en concurrence avec un pays comme les États-Unis.
En fin de compte, je pense qu'il est essentiel de trouver au Canada une possibilité d'investir davantage dans l'élaboration de scripts sans que les décideurs dans les institutions fédérales n'y mettent une série d'obstacles. Vous pourriez penser que c'est une critique, mais non. Je pense seulement qu'il est essentiel que les créateurs aient une forme d'accès plus libre. Brent Butt serait le premier à dire que la liberté créatrice qu'il a eue à l'étape de la rédaction du scénario de Corner Gas, sans ingérence excessive du radiodiffuseur, est la clé du succès de la série. Par conséquent, si l'on se base sur ce modèle pour trouver d'autres possibilités de permettre à cette créativité de s'exprimer... au Canada, on a consacré beaucoup de temps à faire obstacle à cette créativité.
J'ai participé à la production d'un long-métrage il y a une dizaine d'années et, dans les bureaux de l'Ouest de Téléfilm, on nous a dit, à la suite de l'analyse du script, que l'épine dorsale de l'histoire n'avait pas suffisamment de piquant. Comment interprétez-vous cela? Je ne sais pas du tout ce que ça signifie. C'est ce qu'on se fait dire par un bureaucrate—et je travaille dans un bureau également; nous avons un programme de développement et c'est le genre de commentaire que nous entendons constamment. Comment trouver un moyen de s'assurer que si des fonds fédéraux ou provinciaux sont disponibles, il est possible de conjuguer les efforts pour soutenir le créateur et l'auteur du scénario? En fin de compte, si ce n'est pas bon à ce niveau-là, l'infrastructure ou les crédits d'impôt, ou toutes les autres formes d'aide, ne serviront à rien.
Á (1150)
La présidente: Merci beaucoup.
Je présente mes excuses à M. Angus. Je l'ai oublié au cours du tour précédent.
M. Charlie Angus: Je vous remercie, madame la présidente.
La présidente: Ce n'était pas volontaire.
M. Charlie Angus: Je ferai à nouveau une comparaison avec l'industrie musicale, parce que ce sont mes antécédents. Avant que Sloan ne mette Halifax sur la carte, il n'existait que deux orchestres au monde. L'Orchestre de Toronto et l'Orchestre de Vancouver et comme nous faisions partie de l'Orchestre de Toronto, nous nous pensions toujours meilleurs que l'Orchestre de Vancouver. Nous voulions aller à Vancouver pour montrer que nous étions meilleurs que l'Orchestre de Vancouver. L'Orchestre de Vancouver voulait venir à Toronto pour nous montrer qu'il était le meilleur et les Prairies sont là entre les deux; on y faisait le plein d'essence en route.
Quelque chose d'amusant s'est passé en ce qui concerne les tournées des orchestres au Canada. Ils ont découvert les Prairies et ils se sont aperçus que la collectivité des Prairies offrait un créneau particulier en ce qui concerne les voix. J'ai un parti pris très particulier pour la Saskatchewan parce que c'est là que j'ai joué et que les voix y ont un timbre bien particulier. Cela dit, nous discutions d'un problème dans l'industrie cinématographique, qui revient comme un mantra. Nous parlons d'entendre les voix canadiennes et de les soutenir. C'est le mantra qu'entend le gouvernement.
Si je comprends bien, la Saskatchewan ne reçoit absolument rien pour la mise en marché, d'après vos—nous sommes mêmes...
Mme Valerie Creighton: Et pour la production.
M. Charlie Angus: Oui, j'arriverai bientôt à la production. Nous ne recevons rien pour la production, rien pour la mise en marché, rien pour les acquisitions et 14 998 $ pour le développement. Je pense que cela ne vaut pas la peine de continuer. Si c'est l'attitude que nous avons envers l'industrie cinématographique au Canada...
Je suis soufflé en voyant ces chiffres. Nous avons mentionné le succès retentissant du Québec, auquel on a réservé 8 millions de dollars pour la mise en marché alors que la Saskatchewan ne reçoit pas un sou. Comment peut-on faire entendre notre voix? Comment peut-on, à votre avis, faire entendre notre voix sans investir un sou dans la mise en marché?
Mme Valerie Creighton: C'est difficile. Si j'étais productrice au Québec—prenons l'exemple de Denise Robert et de sa réussite retentissante à l'échelle mondiale—, je voudrais tous les fonds également. Nous ne contestons absolument pas cela.
Le dilemme dans lequel nous sommes est de savoir comment remédier à cette lacune. En Saskatchewan, notre frustration est... Nous pensons qu'au cours des quatre dernières années—et je le répète, nous sommes une industrie nouvelle dans le domaine du long-métrage, mais je ferai une comparaison avec nos statistiques nationales en ce qui concerne nos scénaristes et nos créateurs. Comment établir ce lien? Croyez-moi, personne n'est plus frustré au sujet de cette situation que nous, au niveau du financement provincial.
Nous avons essayé divers mécanismes. Nos producteurs me disent que lorsqu'ils se présentent devant les organismes fédéraux, ceux-ci manifestent quelquefois de l'intérêt. Comme vous pouvez le constater d'après les tableaux, des fonds de développement ont été investis dans ce projet. On nous a toutefois dit un jour—et c'est une anecdote—qu'il est extrêmement facile de refuser quelque chose à la Saskatchewan parce que nous sommes beaucoup trop polis.
Malheureusement, après des années de rejet, étant donné que pas un seul de ces projets qui étaient, je pense, des projets de long-métrage, n'a eu la possibilité d'être réalisé... Les scénaristes et des réalisateurs de la Saskatchewan y participaient. Nous pensons qu'après avoir été polis pendant plusieurs années, nous pourrions devenir un peu plus grincheux et un peu plus visibles. En fin de compte cependant, le système ne change pas.
À la suite de mes discussions avec mes homologues des autres provinces de l'Ouest... nous avons formé une coalition très vigoureuse entre les quatre organismes de financement, celui du Manitoba, celui de la Saskatchewan, celui de l'Alberta et celui de la Colombie-Britannique, appelée CanadaWest. Nous mettons la dernière main à une étude que nous avons entreprise avec Diversification de l'économie de l'Ouest sur l'état de santé de l'industrie du film et de la télévision de l'ouest du Canada, son potentiel d'exportation, ses réalisations, l'orientation qu'elle doit prendre et les corrections que nous devons y apporter.
J'espère que cette étude nous apportera des réponses plus concrètes au type de questions que vous posez. Nous sommes très frustrés. C'est indéniable. Nous pensons que l'argent nécessaire est là dans l'Ouest... Il ne s'agit pas de ramasser tous les fonds disponibles. Nous n'exigeons même pas... 10 p. 100 serait déjà très bien. Cependant, en fin de compte, si le système ne nous offre rien sur le plan de la production, nous n'avons aucune possibilité de progresser.
Par conséquent, si l'on pouvait examiner le système et trouver davantage de fonds... parce que c'est très difficile quand on est dans une position comme la mienne. On ne tient pas à ce que l'on retire des fonds à des projets solides du Canada français. C'est formidable que ces projets nous représentent dans le monde. Cependant, quand on pense aux ressources qui ont été investies dans les maisons de production, il serait temps qu'elles laissent maintenant leur empreinte parce qu'elles ont bénéficié d'une aide considérable au fil des années.
Quand et comment aurons-nous la possibilité de participer? Je le répète, nous pensons que les fonds doivent être investis au niveau du développement créatif, de la rédaction des scripts, du développement mais, comme l'ont mentionné nos producteurs, ils doivent répondre aux critères. En fait, tous ces projets bénéficiaient de plus d'une possibilité de participation à l'étape de la distribution ou de la diffusion lorsqu'ils ont été présentés à Téléfilm pour obtenir du financement, mais ils ont malgré cela été rejetés. Les motifs de ce rejet sont donc assez mystérieux. S'il a un potentiel commercial, l'organisme de financement devrait alors soutenir ce projet.
C'est pourquoi une de nos recommandations est d'accorder davantage d'importance aux projets qui suscitent beaucoup d'intérêt sur le marché, parce qu'alors, si l'on a un distributeur ou un radiodiffuseur de son côté, on a de meilleures chances d'avoir un auditoire.
Á (1155)
M. Charlie Angus: Une de mes autres préoccupations extrêmement troublante qui se dégage de ces audiences est la déconnexion entre les maisons de production et... [Note de la rédaction : Inaudible]
Dans l'industrie musicale, un petit groupe indépendant signe un contrat avec une petite maison de disques indépendante, mais la mise en marché est confiée à Sony ou à Warner. Même si l'on ne dispose que d'un très petit budget de marketing, les responsables du marketing veilleront à ce que la chanson soit diffusée par une station de radio d'un collège et à ce que des interviews soient organisées, à faire connaître Ben Mulroney ou Sheilagh Rogers ou encore un autre chanteur pour qu'on commence à en parler. J'apprends qu'on ne procède pas ainsi pour nos films.
Je le répète, pourquoi se donne-t-on la peine de produire un film quand on n'a pas de plan de distribution et de marketing? Cela me sidère. Comment peut-on rester en affaires si c'est le modèle que vous devez suivre?
Mme Valerie Creighton: Je pense que c'est vrai. Il est essentiel que nous réfléchissions de façon créative pour établir quelques nouveaux modèles.
La puissante industrie cinématographique américaine domine nos écrans, en ce qui concerne les longs-métrages, depuis les années 20 ou depuis l'époque où les premiers longs-métrages ont été projetés au Canada. C'est un problème très complexe, lié aux complexités du libre-échange, mais le système actuel n'est pas efficace, un point c'est tout. Nous n'avons aucun droit de décision. Par conséquent, quelles sont les possibilités que nous avons de régler ce problème et quels sont les nouveaux mécanismes?
Il est question d'une expansion du marché de la vidéo sur demande et du DVD. C'est bien beau, mais en fin de compte, si nous ne trouvons pas une possibilité d'en faire une mise en marché efficace, les Canadiens n'y auront pas accès. Il n'y a rien de mal à cela, mais si nous n'arrivons pas à augmenter de 5 à 10 p. 100 le nombre de films canadiens projetés sur nos écrans, surtout au Canada anglais—le Québec est un modèle très différent, comme vous le savez—, n'est-il pas vain de produire des longs-métrages? On aurait peut-être alors tout intérêt à cesser d'encourager les gens à écrire des scénarios pour longs-métrages. Il suffirait de les encourager à continuer de produire des films de la semaine ou à continuer d'aller chercher du financement à l'étranger parce que c'est la seule option qui a permis aux producteurs de la Saskatchewan de réaliser leurs projets.
La présidente: Je vous remercie, monsieur Angus.
Madame Bulte.
L'hon. Sarmite Bulte: Comme l'a signalé M. Angus, à propos du tableau que vous avez préparé, où se trouve le montant affecté à l'enveloppe de performance?
 (1200)
Mme Valerie Creighton: Voyons cela.
L'hon. Sarmite Bulte: Je vois production, mais où est...
Mme Valerie Creighton: Je pense que cela devrait être inclus dans la production. Si vous regardez...
L'hon. Sarmite Bulte: Mais les chiffres n'ont pas été ventilés pour la performance ou pour la production.
Mme Valerie Creighton: Non. Pas en ce qui concerne cela. Cela varie d'une année à l'autre.
L'hon. Sarmite Bulte: Est-ce que tous ces zéros pour la Saskatchewan sont dus aux politiques du Fonds du long-métrage du Canada?
Mme Valerie Creighton: En partie, je présume. Je ne peux vous donner la raison précise. Ce sont les résultats.
Nos producteurs nous font un rapport. Ils pensaient remplir les critères officiels quand ils ont présenté leur demande de fonds, et leurs projets suscitaient un intérêt commercial. La plupart des décisions qui ont été prises ont toutefois été fondées sur une évaluation subjective de la partie créativité, en dépit de l'intérêt commercial. C'est tout ce que je sais.
L'hon. Sarmite Bulte: Bien, mais en ce qui concerne la performance...
Mme Valerie Creighton: Nous n'avons pas une enveloppe de performance et, par conséquent...
L'hon. Sarmite Bulte: Vous ne l'obtenez pas à cause des lignes directrices. Je présume que c'est cela. Par conséquent, les lignes directrices ont une influence...
Mme Valerie Creighton: Absolument.
L'hon. Sarmite Bulte: J'essaie de déterminer à quel niveau il est nécessaire d'apporter des modifications à la politique.
Mme Valerie Creighton: Nous pensons qu'il est essentiel de prévoir davantage de fonds dans le volet subjectif du Fonds.
L'hon. Sarmite Bulte: Bien. J'ai toute une série de questions à poser.
Vous avez recommandé par ailleurs que les lignes directrices soient modifiées de façon à ne plus tenir compte de la non-citoyenneté ou de la citoyenneté étrangère des vedettes. Quand nous établissons une politique gouvernementale, il est essentiel de s'assurer que des organismes comme l'ACTRA et comme la Canadian Actors' Equity Association soient d'accord, sinon, ils prétendent que ça enlève des emplois aux Canadiens.
Il est essentiel que vous fassiez front commun parce qu'il n'y a rien de plus néfaste que l'absence de consensus quand on veut modifier des règles.
Mme Valerie Creighton: Je pense que, par l'intermédiaire de l'Association canadienne de production de film et de télévision, un nouveau modèle est proposé au palier fédéral, en ce qui concerne les règles du contenu canadien, modèle qui, au lieu d'être fondé sur une approche ponctuelle, est davantage basé sur des secteurs d'activité. Par conséquent, il y a l'aspect créatif, la position des équipes... et un mélange différent. Il s'agit apparemment d'une approche très intéressante et très curieuse à ce dilemme.
Par conséquent, nous ne recommandons pas que tous les longs-métrages canadiens soient truffés de vedettes américaines. Une telle approche entraverait le développement de nos propres créateurs, c'est-à-dire de nos scénaristes et de nos acteurs, voire de nos réalisateurs. Ce que nous voulons dire, c'est que dans le secteur du long-métrage, il est essentiel de remporter un succès commercial, d'établir un système de vedettariat et de tenir compte de Hollywood. Il est absolument impossible d'éviter cette discussion. Par conséquent, y a-t-il une possibilité d'assouplir notre système de façon à ce que l'on puisse inclure des vedettes américaines, même dans des seconds rôles, avec une série d'acteurs canadiens, en laissant une certaine marge de manoeuvre à la maison de production? Sinon, on n'arrive pas à obtenir le financement nécessaire pour le film.
L'hon. Sarmite Bulte: J'ai deux autres brèves questions à poser sur des sujets que vous avez abordés. Je ne sais pas si vous pouvez nous donner...
La présidente: Il vous reste encore assez de temps.
L'hon. Sarmite Bulte: Bien. Je commençais à paniquer parce que je me disais que mon temps était limité.
Une des idées que j'ai prise en note pendant votre exposé concerne la sortie dans des petits centres—et mes antécédents de théâtre refont surface. En fait, c'est une situation semblable à celle qui consiste à monter un spectacle ailleurs qu'à Broadway, sauf que la différence est que l'on s'arrange pour que ce soit...
Comment ce système fonctionnerait-il? C'est ma première question.
Ensuite, en ce qui concerne les maisons de distribution, je voudrais vous poser la question suivante. Nous ne connaissons pas bien votre branche d'activité. Pouvez-vous nous citer le nom de quelques maisons de distribution?
Un autre point est que lorsque Doug Frith et Susan Peacock, de l'Association canadienne des distributeurs de films, ont témoigné, ils ont déclaré qu'à cause des règlements de Téléfilm, les clients qu'ils représentent ne peuvent pas faire de distribution au Canada. Pourtant, quelqu'un m'a dit qu'ils avaient en fait des contrats. Ces soi-disant distributeurs ont des contrats avec l'Association canadienne des distributeurs de films et ils ont en quelque sorte des droits acquis. Je ne sais pas si vous pouvez nous aider à comprendre.
Quelle était déjà ma dernière question?
Mme Valerie Creighton: Je dois prendre note de vos commentaires, parce que je m'y perds.
La première question portait sur les petits centres. Est-ce bien cela?
L'hon. Sarmite Bulte: Les petits centres, les maisons de distribution. Comme nous avons pu le constater à propos de la question de Mme Oda, il y avait des distributeurs étrangers ici, mais vous n'avez peut-être pas encore fait affaire avec les distributeurs actuels. Si nous avons déjà eu recours à leurs services, comment pourrions-nous les obliger à rendre des comptes?
Une dernière question. Nous avons beaucoup parlé de l'industrie musicale, des Juno et nous en avons fait l'éloge. Un facteur qui était très important dans cette enveloppe de réussite est le fait que le CRTC mandate le radiodiffuseur. Il s'assure que la musique est passée pendant les heures de grande écoute. Je sais qu'ils ont lutté farouchement parce qu'ils n'en voulaient pas. À propos de marketing et de distribution, je pense que nous avons divers outils à notre disposition. Comment peut-on mandater les radiodiffuseurs pour qu'ils passent les bandes-annonces des films à la télévision, comme l'a recommandé Wayne Clarkson? Les radiodiffuseurs jouent un rôle important et il est essentiel que nous en fassions nos partenaires.
 (1205)
Mme Valerie Creighton: En ce qui concerne les petits centres, je ne sais pas comment cela fonctionnerait au juste. Ce système ne s'appliquerait pas à tous les films. Ce serait une stratégie et cela dépendrait des relations entre une maison de production et une maison de distribution. Cela aiderait à déterminer où les films ont le plus de chance d'être un succès commercial.
Je voudrais vous raconter une autre anecdote intéressante. J'ai eu un entretien avec Denise Robert il y a environ un an. Elle racontait qu'au début, lorsque sa compagnie produisait un film, il était projeté dans les petites villes du Québec et dans diverses petites localités. On servait une collation et c'était un grand événement public. De nombreuses personnes assistaient à la projection. Le bouche à oreille fonctionnait à travers la province et soudain, toute la population s'intéressait au projet. Par conséquent, je pense que l'idée de projeter un long-métrage dans les petits centres a quelque mérite.
Il y a quelques années, un long-métrage avec Andy Garcia et Drew Barrymore comme acteurs principaux a été tourné en Saskatchewan. Les habitants de Moose Jaw, de Prince Albert et de La Ronge ne cessent de me demander quand ils pourront voir ce film, mais ils ne pourront jamais le voir à l'écran. Lorsqu'il sortira en DVD ou en vidéo, ils pourront le louer. Je pense que l'idée de la sortie d'un film dans des petits centres doit être examinée dans le contexte global de la distribution de chaque projet. Cette façon de procéder ne sera peut-être pas efficace pour tous les projets. Pour certains longs-métrages, elle sera efficace, mais pour d'autres, elle ne tient pas debout. Voilà ce que je pense au sujet des relations entre la maison de production et le distributeur.
En ce qui concerne les maisons de distribution au Canada, je me torturais les méninges lorsque vous m'avez posé la question... [Note de la rédaction : Inaudible]
La présidente: Vous ne parlez pas dans le microphone. Les interprètes n'entendent pas.
Mme Valerie Creighton: Donc, les maisons de distribution sont Alliance Atlantis, Mongrel Media, Christal, Seville, Lions Gate, Odeon, TVA, THINKFilm.
En ce qui concerne votre question sur les relations entre la projection... Je ne peux pas y répondre. Je ne suis pas au courant d'éventuels pactes secrets et cela dépend de qui vous parlez. Nous savons qu'un problème se pose. Les organismes provinciaux interviennent davantage au niveau de la projection. Nous nous mettons à assister aux événements annuels des exploitants de salles de cinéma. Nous tentons de faire des percées dans ce secteur. C'est un système assez intéressant.
La présidente: Je vous remercie.
Madame Oda, c'est votre tour, puis ce sera le tour de M. Kotto et de M. Silva.
Mme Bev Oda: Merci beaucoup.
En ce qui concerne le tableau et les chiffres, je serais, moi aussi, préoccupée par tous les zéros. Je voudrais examiner la question d'un peu plus près. Dans toutes ces catégories, les diverses lignes représentent le montant des fonds publics qui sont alloués. Est-ce exact?
Mme Valerie Creighton: Oui.
Mme Bev Oda: Et, dans chaque cas, cela fait partie d'un programme fédéral?
Mme Valerie Creighton: Oui, c'est exact. Ce sont des fonds qui viennent du Fonds du long-métrage du Canada. Ce sont les montants alloués à la province.
Mme Bev Oda: Serait-il juste de dire qu'en ce qui concerne certaines de ces lignes, les critères sur lesquels on se base... À propos de ces nombreux zéros, je pense que, s'il s'agit de fonds publics, il doit bien y avoir un système de critères sur lesquels sont fondées les décisions concernant leur attribution. Si les critères sont les mêmes à l'échelle nationale—et pourtant, nous voyons tous ces zéros, je me demande si vous pensez que les critères vous désavantagent beaucoup plus dans certaines catégories que dans d'autres. Ma première question est la suivante : est-ce que certains de ces critères ne servent pas nécessairement à prendre des décisions en ce qui concerne l'attribution des fonds publics? Ma deuxième question est la suivante : y a-t-il des critères pour lesquels vous pouvez suggérer des amendements qui accroîtraient les chances non seulement de la Saskatchewan, mais aussi du Manitoba, qui a également réclamé un accès plus équitable, d'obtenir des réponses favorables.
Quelque chose me dit qu'il serait peut-être possible d'apporter, au niveau des critères sur lesquels sont fondées les décisions en matière d'attribution des fonds publics, des changements qui vous permettraient d'obtenir un pourcentage plus équitable des fonds distribués.
 (1210)
Mme Valerie Creighton: C'est une question très intéressante, et je vous en remercie. Je ne peux pas y répondre immédiatement, mais j'aimerais faire, si possible, un examen des critères qui, à notre avis, nous sont défavorables. Nous pourrions peut-être le faire avec les quatre provinces de l'Ouest, dans le cadre d'une initiative CanadaWest.
Dans ce tableau, les chiffres ne sont pas ventilés pour les provinces de la Colombie-Britannique, du Manitoba, de l'Alberta et de la Saskatchewan. Nous avons indiqué un chiffre global pour les provinces de l'Ouest. Comme vous pouvez le constater, le nombre de zéros est tout aussi impressionnant en ce qui concerne l'Ouest. Je pense même que dans certains domaines, comme ceux du développement et de la production, si l'on retire la Colombie-Britannique, le dilemme se situe au niveau des trois provinces des Prairies.
Mme Bev Oda: Comme vous pouvez le constater, plus nous aurons une vue précise de la situation et plus nos questions seront précises et éclairées.
Je voudrais également m'assurer que si on nous dit constamment que tout un secteur ou l'intégralité du programme doit être révisé... Si, pendant les six premières semaines, la seule chose que nous entendons, c'est que le programme doit être révisé, nous pouvons faire immédiatement une recommandation à cet effet mais, alors, nous devrons attendre encore un an pour obtenir des propositions concrètes concernant les changements à y apporter. Je m'efforce d'accélérer un processus qui est lent pour qu'il devienne plus ciblé. Nous pourrions peut-être aider l'industrie en faisant des propositions et des recommandations très concrètes et très précises qui pourraient être mises en oeuvre dans un délai beaucoup plus court que si nous recommandions seulement un examen général de ce programme.
Mme Valerie Creighton: Je ne pense pas que nous soyons disposés à attendre encore un an et demi pour faire une étude qui restera sur les tablettes. Je serais toutefois très intéressée à en discuter avec mes homologues du Manitoba et de l'Alberta, en particulier, et aussi avec ceux de la Colombie-Britannique, étant donné que nous avons une collaboration très étroite, par l'intermédiaire de CanadaWest, pour faire une analyse plus approfondie et revenir vous faire des recommandations précises.
Mme Bev Oda: Je sais que la présidente et que le comité sont tout disposés à recevoir des propositions par écrit ultérieurement...
Mme Valerie Creighton: Certainement. Ce serait bien.
Je vous remercie.
Mme Bev Oda: Je n'ai plus de question à poser, madame la présidente.
La présidente: Je vous remercie.
Monsieur Kotto.
[Français]
M. Maka Kotto: Merci, madame la présidente.
Est-ce que le fait de centraliser et d'uniformiser face à la mosaïque culturelle que constituent le Canada et le Québec, face à la diversité culturelle, est une voie qui correspond à quelque avantage que ce soit relativement au développement cinématographique en particulier et au développement culturel en général dans votre région? Je parle de la centralisation par l'uniformisation et je parle des pôles de décision en matière de culture.
[Traduction]
Mme Valerie Creighton: Nous pensons que la capacité décisionnelle du bureau de l'Ouest de Téléfilm a grand besoin d'être renforcée. Je pense qu'autrefois, ce bureau avait beaucoup plus d'autonomie en ce qui concerne l'approbation de l'octroi de fonds destinés à la production mais, depuis quelques années, il en a de moins en moins. La plupart des décisions sont maintenant prises dans le centre du Canada.
Nous pensons qu'il serait très utile que le bureau de Téléfilm dispose d'une plus grande autonomie et ait davantage de ressources pour s'assurer qu'un plus grand nombre de projets de l'ouest du Canada soient soutenus.
Ai-je bien répondu à votre question? Je suis désolée, mais je n'en ai pas compris le premier volet. Je comprends très mal le français.
 (1215)
[Français]
M. Maka Kotto: Vous y avez répondu partiellement. Mon idée est d'aborder le sujet de la gestion de proximité du dossier culturel au sens large. De votre point de vue, ne serait-il pas judicieux de décentraliser le dossier de la culture vers les provinces canadiennes? Le rapatriement de la maîtrise d'oeuvre ne ferait-il pas en sorte que vous ne seriez pas subordonnés aux autres, surtout que vous vivez dans des régions éloignées des grands centres et que vous êtes plus ou moins pénalisés à cause de la proximité linguistique?
On demandait tout à l'heure pourquoi et comment le Québec avait réussi. Il a réussi parce qu'il est unique dans cet ensemble en raison de sa langue et de sa culture, alors que vous avez cet obstacle que constitue la proximité linguistique avec les autres provinces. Est-ce que le rapatriement aux provinces de la maîtrise d'oeuvre en matière de culture ne serait pas une bonne idée?
[Traduction]
Mme Valerie Creighton: Oui, je le pense, pour répondre de façon très simple. La présence d'une entité nationale suprême est, je le répète, essentielle pour surveiller tout ce qui se passe dans le pays, mais les différences entre l'industrie au Québec et au Canada anglais sont manifestes. Il serait certainement intéressant pour l'ouest du Canada que le processus décisionnel soit davantage décentralisé.
[Français]
M. Maka Kotto: Merci.
[Traduction]
La présidente: Il vous reste deux minutes.
[Français]
M. Maka Kotto: Non, c'est bon. Je peux patienter.
[Traduction]
La présidente: Monsieur Silva.
M. Mario Silva: Je voudrais poser une question au sujet des recommandations qui ont été présentées. La recommandation 7 est que la nature subjective de l'évaluation de la partie créativité dans les demandes soit modifiée pour assurer la transparence du processus décisionnel. Comment vous y prendriez-vous pour assurer la transparence?
Mme Valerie Creighton: Dans notre domaine, la subjectivité intervient toujours. Quand nous examinons des projets en Saskatchewan, nous avons maintenant tendance à faire appel à un jury de pairs pour nous aider dans le processus décisionnel parce que nous estimons que le système actuel fait toujours surgir plus d'une opinion subjective et que l'on a alors une discussion saine et approfondie lorsqu'on prend des décisions au sujet de projets.
Nos producteurs nous signalent que le processus décisionnel de Téléfilm, quand un projet est refusé, est toujours le même : le projet est refusé en raison de problèmes dans la partie créativité. On ne leur donne pas des explications précises sur les motifs du refus, alors que ces projets suscitaient un certain intérêt commercial. Par conséquent, en ce qui concerne les possibilités de rendre le processus plus transparent, je pense qu'il est nécessaire d'élaborer et de publier des critères bien précis sur la façon de procéder à l'évaluation de la partie créative. Il existe de nombreux modèles au Canada. Notre organisme provincial y a recours et d'autres également.
Cela dit, il y a toujours une certaine dose d'intelligence, d'expérience et de savoir professionnels qui entrent en jeu dans le processus décisionnel. Nous n'éliminerons jamais entièrement cet aspect. Cela ne fait aucun doute. Cependant, nous avons constaté en Saskatchewan que, lorsque nous sommes transparents dans les discussions avec nos producteurs, quand nous refusons leur projet—et cela nous arrive souvent—, ils n'apprécient toujours pas la réponse, même s'ils en comprennent les motifs et s'ils sont au courant de la nature des discussions du jury. Cependant, cette information les aide généralement à améliorer leur projet pour la demande suivante. Par conséquent, la transparence consiste tout simplement à exposer clairement les critères sur lesquels la décision est basée et la façon dont elle a été prise, puis à communiquer cette information en toute honnêteté à la personne qui a présenté une demande.
La présidente: Il nous reste peut-être encore deux ou trois minutes.
Monsieur Silva, il vous reste encore du temps si vous voulez l'utiliser.
 (1220)
M. Mario Silva: Non, ça va.
La présidente: J'aimerais poser deux questions à des fins de clarification. Vous ne pourrez peut-être pas répondre immédiatement, mais vous pourrez répondre un peu plus tard, si vous voulez.
Je pense que vous avez entendu la question que j'ai posée aux témoins précédents au sujet de l'opportunité de voir au-delà du succès commercial et des recommandations qu'il faudrait faire dans ce domaine. Je pense qu'il est juste de signaler que les endroits et la façon dont les Canadiens voient les films canadiens ont beaucoup changé. Que peut-on faire pour exploiter ce changement? L'objectif de la politique est non seulement de permettre la réalisation de films et de permettre leur projection, mais aussi de donner aux Canadiens l'occasion de les voir. Ils ont toutefois de moins en moins l'occasion de les voir dans les salles de cinéma.
Deuxièmement, il y avait deux ou trois points qui me semblent contradictoires dans les recommandations que contient votre mémoire. D'une part, vous voudriez que l'on accorde un peu moins d'importance aux enveloppes de performance, ce que je comprends bien, car cette façon de procéder désavantage les productions plus récentes, les talents neufs. Par contre, dans la sixième recommandation, vous dites qu'il est important que les projets suscitent un vif intérêt commercial. Qu'avez-vous à nous proposer pour éviter que l'on se base uniquement sur la performance antérieure tout en accordant de l'importance à un vif intérêt commercial? Ce sont les deux principaux points qui sont légèrement contradictoires, à mon avis.
Mme Valerie Creighton: Les enveloppes de performance sont fondées sur la performance antérieure. Une société qui répond à ces critères a dès lors la garantie d'obtenir un certain montant.
L'autre aspect est que, comme je l'ai mentionné, nous examinons des projets dont les producteurs n'ont pas accès à l'enveloppe de performance mais qui suscitent un vif intérêt commercial lorsqu'ils nous sont présentés. Si l'on a mis en place un système dans lequel les enveloppes de performance sont basées sur l'intérêt et le succès commerciaux, lorsqu'on évalue un nouveau projet auquel n'est associée aucune enveloppe de performance, il faudrait tenir compte de l'intérêt commercial qu'il suscite.
La présidente: Vous pourriez peut-être y réfléchir et nous faire une suggestion plus tard. Pour ce qui est de permettre à des distributeurs non canadiens d'investir dans des films canadiens, imposeriez-vous certaines conditions en ce qui concerne la commercialisation des films et leur projection en salle? Je suis justement en train de penser qu'il y a au Canada des millionnaires et des multimillionnaires qui investissent avec frénésie dans les sports, pour y perdre généralement de l'argent. Comment pourrions-nous susciter chez eux de l'intérêt pour l'investissement dans le cinéma?
Mme Valerie Creighton: En tant que pays, il faudrait imposer certaines conditions. Quelles devraient être ces conditions? C'est une question à laquelle je ne voudrais pas répondre maintenant sans y avoir réfléchi un peu plus et sans avoir examiné la question de plus près, mais le dilemme est que si notre produit n'est pas vu par des auditoires à l'échelle internationale, et à plus forte raison au Canada, comment pourrait-on améliorer la situation, accroître l'efficacité dans ce domaine et établir des relations avec... [Note de la rédaction : Inaudible]
La présidente: M. Angus a une autre question à poser.
M. Charlie Angus: Je vous remercie.
J'aurais voulu la poser au cours du tour précédent, aux témoins du Manitoba, mais c'est une question que je pose à tous les témoins.
Vous avez dit que c'est bien de produire les films sur DVD mais que s'ils ne sont pas projetés dans les salles de cinéma, cela pose un problème. Ce que je trouve fascinant au sujet du marché des DVD, c'est qu'il nous permet d'avoir accès à des films auxquels nous n'aurions jamais eu accès. Je vis dans une petite ville d'environ 5 000 habitants et il y a une dizaine de films canadiens sur les étagères. Ce n'est peut-être pas beaucoup, mais cela fait tout de même dix films canadiens auxquels nous n'aurions jamais eu accès dans notre localité.
On a un peu l'impression de se trouver dans un rond-point, mais parlons de quotas. Si nous voulons imposer des quotas sans faire de marketing, et sans avoir un auditoire établi, nous créerons les conditions qui mèneront à un échec et ce sera encore pire qu'avant. Cependant, que pensez-vous d'un quota de publicité dans les salles de cinéma? C'est une question qui relève de la compétence des provinces, mais le gouvernement fédéral pourrait s'arranger avec diverses provinces pour que 10 p. 100 de la publicité concernant les films soit de la publicité portant sur des films canadiens, afin de susciter de l'intérêt chez les Canadiens et de les inciter à les voir. Ce principe pourrait même être applicable aux bandes-annonces des DVD vendus au Canada. Une garantie que 10 p. 100 de la publicité doit concerner des productions canadiennes aiderait à accroître l'intérêt de l'auditoire; si le film n'est pas à l'affiche dans une grande salle de cinéma, on pourra toujours le trouver dans les magasins de location de vidéos. Est-ce une recommandation réaliste?
Mme Valerie Creighton: Vous avez peut-être dix films canadiens sur les étagères du magasin de votre localité et c'est la même chose dans la mienne. Toutefois, bien souvent, les clients n'ont jamais entendu parler de ces films. Ils les examinent et vous pouvez être sûr que ce sont ceux qu'ils ne loueront pas s'il y a une feuille d'érable sur la boîte et s'il y est indiqué que ce sont des films canadiens.
Par conséquent, il faudrait informer le public, que ce soit en imposant un quota sur la publicité dans les salles de cinéma ou, comme je l'ai mentionné, en cherchant avec l'aide des radiodiffuseurs, des possibilités de susciter l'intérêt des Canadiens à travers le pays pour les longs-métrages réalisés au Canada...
Je n'aime pas citer constamment le même exemple, mais si l'on prend le cas de Corner Gas, et même la façon dont CTV établit son image de marque et commercialise ses projets, si vous allumez la télévision et que vous voyez les petites balles danser, vous savez immédiatement de quelle émission il s'agit. Vous savez que le personnage associé à ce petit truc publicitaire tout simple est là dans une émission que l'on va annoncer. Quand vous voyez Brent Butt avec les vedettes américaines, quand vous ouvrez la télévision ou que vous zappez, cela donne un mélange assez intéressant. Par conséquent, s'il y a une possibilité d'éveiller la curiosité des Canadiens...
Je pense que l'intérêt existe. Si les gens pouvaient voir certains des longs-métrages réalisés en Saskatchewan, ceux qui ont été réalisés au Manitoba et en Colombie-Britannique, qui ne sont pas des grandes productions, mais qui sont le reflet de nos collectivités locales, si la plupart des Canadiens étaient au courant...
Je citerai un exemple qui concerne la région de l'Atlantique. Le film New Waterford Girl a été acclamé par la critique et pourtant, dans aucune localité de la Saskatchewan, il n'est resté à l'affiche plus d'un jour. Si l'on pouvait trouver un moyen de susciter l'intérêt et l'enthousiasme chez nos concitoyens, cela aiderait beaucoup l'industrie. Si l'on n'arrive pas à les faire mettre à l'affiche dans les salles de cinéma, on a au moins des revenus d'appoint grâce à la vente de DVD ou même à Internet. Au moins, l'auditoire est sensibilisé.
 (1225)
La présidente: Vous voyez, vous avez dû nous convaincre de tenir des audiences dans les Prairies et, maintenant, vous n'arrivez plus à vous débarrasser de nous.
Mme Oda voudrait poser une autre question, et Mme Bulte aussi.
Mme Bev Oda: Je vous remercie. Il s'agit d'une question à laquelle vous devrez peut-être réfléchir.
Dans la foulée de la première question, lorsque vous parliez des recettes non liées à la diffusion ou à la projection en salle, où devraient-elles être incluses? Devraient-elles être incluses? Devraient-elles être exclues? Quand une maison de distribution obtient les droits de distribution, ne sont-ils pas négociés en même temps? Je pense qu'à propos de distribution, surtout non canadienne, il est important de savoir quels volets de la distribution...
Je sais que vous devez présenter des plans de financement pour... Ces recettes sont-elles incluses dans les plans de financement? Devraient-elles être exclues ou incluses? Je pense qu'il est nécessaire d'y réfléchir davantage...
Je comprends très bien ce que vous voulez dire en parlant de déconnexion entre l'enthousiasme des créateurs et... Nous pouvons établir des règles—je sais que nous avons un contenu canadien—et vous les connaissez mais, si l'on n'est pas enthousiaste, on les fera de façon minimaliste. Nous aimerions beaucoup pouvoir légiférer en matière d'enthousiasme et de motivation, mais je ne sais pas comment nous pourrions nous y prendre. Corner Gas est une merveilleuse histoire de réussite, mais il est regrettable que ce soit la seule que nous ayons à raconter après tant d'années.
Hier, nous avons eu l'occasion de discuter de certaines initiatives de CTV. Est-ce que le fait d'investir dans une émission comme eTalk, d'investir dans l'augmentation du temps d'antenne pour le tapis rouge de la cérémonie de remise des Juno, de comprendre que c'est la façon d'attirer les gens, de créer des vedettes, etc., et de susciter l'enthousiasme pour les Juno, de savoir que lorsqu'on organise la cérémonie des prix Juno à Toronto, ce n'est qu'un événement parmi tant d'autres, mais que si on le déplace à Winnipeg, cela devient le grand événement... Les habitants de Toronto prétendent qu'ils auraient voulu être là. Ils prétendent qu'ils auraient voulu être là. Ils auraient voulu être à Winnipeg. C'est donc le type de démarche intellectuelle. On a de la difficulté à légiférer en ce qui concerne ce type de démarche intellectuelle novatrice. Même la formation de l'équipe qui permet cela—comment peut-on légiférer dans ce domaine? Comment faire?
Mme Valerie Creighton: Je ne sais pas s'il est possible de légiférer. Je ne pense pas qu'il faille légiférer en matière d'enthousiasme parce que cela l'étoufferait à coup sûr. Cela ne fait aucun doute.
Mme Bev Oda: Ce que je trouve toutefois frustrant dans nos discussions, quand on cite l'exemple de la réussite de Corner Gas, c'est que bien d'autres facteurs interviennent. Pour être réalistes au sujet des projets que nous envisagerons, il faut tenir compte du fait qu'il y a ce facteur que nous ne serons jamais en mesure de maîtriser par le biais d'un programme ou d'une loi du gouvernement.
Mme Valerie Creighton: C'est vrai. Je voudrais examiner brièvement le cas de Corner Gas, parce que c'est un bon modèle; malheureusement, c'est le seul jusqu'à présent. Il est à espérer que l'on examinera les facteurs de cette réussite et que l'on tentera de déterminer comment on peut en tirer des conclusions pour appliquer cette approche dans d'autres régions. C'est un cas où le radiodiffuseur, qui avait le pouvoir parce qu'il avait l'argent nécessaire, a pris des décisions judicieuses au cours du processus.
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Mme Bev Oda: Étant donné que j'ai travaillé dans le milieu et avec d'autres grands radiodiffuseurs nationaux, je pense qu'il ne suffit pas que le radiodiffuseur ait les fonds nécessaires. C'est davantage que la simple capacité d'avoir les fonds nécessaires. Il faut faire preuve de détermination et avoir le goût du risque, qualités que l'on n'a pas automatiquement parce qu'on a les fonds nécessaires ou que l'on est une grosse société.
Mme Valerie Creighton: Le radiodiffuseur a toutefois pris la décision d'affecter des ressources précises à ce projet. Il a procédé de façon très intelligente. Voyez les relations qu'il a établies avec les producteurs de Corner Gas—Vérité en Saskatchewan et David Storey à Toronto—et la façon dont ils ont exploité Brent pour le marketing. Il y avait des promotions d'essence gratuite à travers le pays. Il y avait une vedette qui était disposée à participer à la mise en marché de ce projet créatif afin de s'assurer que l'on en parle partout avant qu'il ne soit diffusé.
Après la promotion basée sur la distribution gratuite d'essence, tout le monde pensait que c'était l'idée la plus folle dont on ait jamais entendu parler. Les relations qui ont été établies entre le radiodiffuseur, l'équipe de production et les éléments de création ont contribué à sensibiliser la population. On ne peut pas légiférer ce type d'approche. C'est impossible. Il est essentiel d'avoir affaire à une industrie qui a la fierté de son produit et de ses investissements et qui a l'enthousiasme nécessaire. Le système a été efficace dans le cas de Corner Gas. Il ne reste plus qu'à espérer que d'autres grands radiodiffuseurs considéreront cette réussite comme un modèle et prendront des décisions qui sortent de l'ordinaire. Ce n'est pas quelque chose que l'on peut légiférer.
La présidente: Madame Bulte, une toute dernière question avant que nous suspendions la séance pour le dîner.
L'hon. Sarmite Bulte: Une autre question m'est venue à l'esprit pendant que nous parlions des possibilités de faire projeter certains films dans les salles en Saskatchewan ou dans les petites localités. Le Festival international du film de Toronto offre un circuit de distribution et une initiative semblable a été mise en place dans l'Ouest.
Nous pourrions peut-être encourager des initiatives comme celles-là. Le Festival international du film de Toronto offre un circuit de distribution en Ontario et compte l'offrir à l'extérieur de la province. Ces pratiques exemplaires et les initiatives qui sont efficaces pour faire distribuer les films dans toutes les localités—et cela rappelle la question de la sortie d'un film dans les petites localités—peuvent présenter un double avantage. Je sais que l'on s'est efforcé d'obtenir les fonds nécessaires pour cela.
Est-ce qu'une initiative de ce genre serait utile?
Mme Valerie Creighton: Je pense que oui, et je pense que nous pouvons prendre exemple sur d'autres pratiques exemplaires. Il faut quelqu'un sur place et il faut du temps. Par exemple, est-ce que dans l'ouest du Canada, on pourrait mettre en place un mécanisme ayant pour objet d'accroître la distribution dans les provinces de l'Ouest de longs-métrages tournés dans l'Ouest? Probablement. Il faut toutefois une certaine organisation et un groupe de personnes enthousiastes ayant l'argent nécessaire pour le faire.
Chose intéressante, j'ai rencontré la semaine dernière un très jeune cinéaste de la Saskatchewan. Il a déjà réalisé deux courts-métrages et il mettra en place son propre système de projection à travers la province cet été. Il a fait des réservations dans toutes les salles de cinéma avec prévente des billets. Les billets ont tous été vendus. On organise de petits événements locaux en rapport avec cette initiative. C'est un modèle unique très curieux et très modeste et nous verrons bien les résultats.
En ce qui concerne les festivals, ce sont les principaux outils et c'est là que les films ont une grande visibilité, mais si l'on veut s'inspirer de certaines pratiques exemplaires et d'autres façons d'élargir les auditoires, c'est peut-être par là qu'il faut commencer.
L'hon. Sarmite Bulte: Je pense par ailleurs qu'en ce qui concerne une politique cinématographique nationale, alors que la distribution des films en Ontario et en Saskatchewan par exemple est importante, j'aimerais également que des films de la Saskatchewan ou de la région de l'Atlantique soient projetés en Ontario.
C'est faire en quelque sorte de l'esprit de clocher et cela peut entraîner l'isolement. On constate parfois une déconnexion entre le nord et le sud de l'Ontario. Je pense qu'il faut voir au-delà des frontières, car la distribution de films ne devrait pas se limiter à la province.
Mme Valerie Creighton: Absolument pas. Si nous pouvions avoir une stratégie nationale plus efficace, ce serait naturellement ce que nous ferions. Il n'y a pas de raison de projeter un film uniquement en Saskatchewan. Il sera vu tout au plus par un million de personnes, pour autant que toute la population aille le voir.
En fin de compte, il est impératif de mettre en place une stratégie nationale, mais il faut commencer quelque part, avec quelqu'un.
L'hon. Sarmite Bulte: Je vous remercie.
La présidente: Merci beaucoup.
Nous suspendons la séance pour reprendre nos travaux à 14 h 30, dans cette pièce.