Passer au contenu
;

SECU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain
Passer à la navigation dans le document Passer au contenu du document






Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la sécurité publique et nationale


NUMÉRO 042 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 27 octobre 2022

[Enregistrement électronique]

(1100)

[Traduction]

     Bienvenue à tous à la 42e réunion du Comité permanent de la sécurité publique et nationale de la Chambre des communes. Nous commencerons par reconnaître que nous nous réunissons sur le territoire traditionnel non cédé du peuple algonquin.
     La réunion d'aujourd'hui se déroule selon un format hybride, conformément à l'ordre de la Chambre du 25 novembre 2021. Les membres sont présents en personne dans la salle et à distance grâce à l'application Zoom.
     Conformément à l'ordre de renvoi du jeudi 23 juin 2022, le Comité reprend l'étude du projet de loi C‑21, Loi modifiant certaines lois et d'autres textes en conséquence (armes à feu).
     Aujourd'hui, nous avons deux groupes de témoins. Pendant la première heure, nous recevons des témoins par vidéoconférence.

[Français]

    Nous recevons tout d'abord Pierre Brochet, président de l'Association des directeurs de police du Québec.
    Nous recevons également Evan Bray, coprésident de la commission spéciale sur les armes à feu de l'Association canadienne des chefs de police.
    Enfin, nous recevons Brian Sauvé, président de la Fédération de la police nationale.

[Traduction]

    Nous accorderons à chaque groupe jusqu'à cinq minutes pour les remarques préliminaires, après quoi nous procéderons aux séries de questions.

[Français]

    J'invoque le Règlement, monsieur le président.
    Avant de passer aux présentations des témoins, pouvez-vous nous confirmer que les tests de son ont été faits pour tous les témoins? Je vois que les témoins d'aujourd'hui comparaissent par vidéoconférence, alors je veux m'assurer que les interprètes ont confirmé que le son était adéquat pour eux.

[Traduction]

    Absolument, et je vous en remercie. C'est un très bon point.
    Le greffier m'a assuré que les vérifications du son ont été faites et que tout le monde dispose de l'équipement approprié.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Nous allons commencer par M. Brochet, de l'Association des directeurs de police du Québec.
    Vous avez la parole pour cinq minutes.
    Je remercie le Comité d'avoir invité l'Association des directeurs de police du Québec à participer à la discussion.
    L'Association des directeurs de police du Québec regroupe 34 corps policiers qui agissent sur le territoire québécois. Cela inclut la Gendarmerie royale du Canada, le Service de police de la Ville de Montréal et la Sûreté du Québec, en plus de l'ensemble des corps de police municipaux.
    Avant de parler du projet de loi C‑21, je tiens à dire que nous, les directeurs de police du Québec, sommes extrêmement sensibles au fait que la violence par armes à feu fait des victimes, sans oublier leur famille et leurs amis.
    Nous saluons le renforcement du contrôle des armes à feu. Je pense que c'est un beau message à envoyer à l'ensemble des Canadiens. Comme société canadienne, nous passons un message fort quant à notre volonté de diminuer le nombre d'armes à feu en circulation. Principalement, nous désirons que cela contribue à réduire la violence intrafamiliale et les tueries de masse.
    Nous saluons aussi le rachat des armes d'assaut, un geste important qui aura certainement des conséquences positives. Évidemment, il faut mettre en place toute une logistique et en assurer la coordination, de concert avec les différents gouvernements provinciaux. Des coûts quand même importants seront associés à cette stratégie. Le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux devront donc avoir de bons échanges à cet égard.
    Nous saluons également le gel des armes de poing. Cela constitue une avancée importante. Cela dit, nous sommes conscients, comme vous, qu'il faudra attendre quelques générations avant d'en voir les répercussions réelles, car ceux qui possèdent des armes de poing les conservent. Nous considérons toutefois qu'il s'agit d'un pas dans la bonne direction.
    Tout le monde a certainement entendu parler de la violence urbaine dans la région de Montréal, principalement à Montréal et à Laval. Pour réduire la violence urbaine, nous devrons continuer à accentuer nos efforts en matière de trafic d'armes et sur le plan du contrôle à la frontière. En effet, dans la province de Québec, les armes saisies sur les criminels sont issues du trafic d'armes à feu en provenance des États‑Unis, essentiellement.
    Nous aimerions aussi demander une modernisation de la loi de façon à ce qu'on y ajoute les armes fantômes. Comme vous le savez peut-être, les armes fantômes sont de plus en plus courantes sur le marché. Les gens commandent des composantes d'armes à feu pour ensuite les assembler et produire ce qu'on appelle des armes fantômes. Nous pensons qu'on devrait réfléchir à la possibilité de rendre illégales certaines composantes d'armes à feu.
    Par ailleurs, nous saluons le principe du drapeau rouge lorsqu'il y a une ordonnance de protection. Cela permet de saisir les armes à feu d'une personne contre qui une ordonnance de protection a été donnée. Cela a évidemment des répercussions importantes, entre autres pour ce qui est des conflits intrafamiliaux.
    Nous saluons aussi le fait que les peines seront plus sévères. Selon l'Association, c'est une très bonne nouvelle qu'il y ait maintenant des peines maximales de 10 à 14 ans. Nous voulons toutefois souligner qu'on doit assurer la cohérence entre ce projet de loi et le projet de loi C‑5, qui vise notamment à retirer les peines minimales obligatoires pour plusieurs infractions qui sont reliées aux armes à feu.
    Nous soulignons aussi cette bonne nouvelle qu'est l'ajout de deux dispositions permettant aux corps policiers canadiens de faire de la surveillance électronique en lien avec la possession non autorisée d'armes à feu et la possession d'armes prohibées.
(1105)
    Merci, monsieur Brochet.
    Je laisse maintenant la parole pour cinq minutes au représentant de l'Association canadienne des chefs de police.

[Traduction]

    Merci beaucoup. J'apprécie beaucoup cette occasion. Bonjour à vous tous.
     Je m'adresse à vous ce matin au nom de l'Association canadienne des chefs de police. Je m'appelle Evan Bray. Je suis le chef de police de Regina, en Saskatchewan, et je suis le coprésident du comité spécial sur les armes à feu de l'ACCP. L'ACCP représente les chefs de police et les dirigeants des services de police de tout le Canada.
    L'ACCP estime que le projet de loi reconnaît que la lutte contre la violence armée nécessite une approche de l'ensemble de la société, y compris l'éducation et la prévention pour s'attaquer aux causes profondes, et l'application de la loi pour aider à arrêter les éléments criminels qui commettent des actes de violence dans nos communautés. Nous croyons que le projet de loi C‑21 aidera à prévenir la victimisation par arme à feu et à améliorer la sécurité publique.
    Je souhaite simplement approfondir deux ou trois points.
    Premièrement, en ce qui concerne les armes de poing, l'ACCP soutient une approche nationale, plutôt qu'une approche municipale disparate, pour gérer la question des armes de poing au Canada. Nous croyons qu'un gel des armes de poing est un moyen de réduire l'accès à ces types d'armes à feu, tout en permettant aux propriétaires d'armes de poing respectueux de la loi de pratiquer leur sport.
    Cependant, nous continuons à affirmer que la restriction de la possession légale d'armes de poing ne permettra pas de s'attaquer de manière significative au véritable problème: les armes de poing illégales obtenues aux États‑Unis qui ont conduit à la tendance actuelle inquiétante de la violence armée qui est largement liée aux gangs, aux gangs de rue et aux groupes criminels organisés plus sophistiqués.
    En ce qui concerne la contrebande et le trafic d'armes à feu, nous appuyons la mise en œuvre de nouvelles infractions liées aux armes à feu, l'intensification des contrôles frontaliers et le renforcement des sanctions pour aider à dissuader les activités criminelles et à combattre la contrebande et le trafic d'armes à feu, réduisant ainsi le risque que des armes à feu illégales se retrouvent dans les communautés canadiennes et soient utilisées pour commettre des infractions criminelles. L'ACCP accueille favorablement les changements qui fournissent de nouvelles autorisations et de nouveaux outils à la police pour accéder aux informations sur les détenteurs de permis dans le cadre d'enquêtes sur des personnes soupçonnées de mener des activités criminelles, comme l'achat par personne interposée et le trafic d'armes.
    En ce qui concerne les répliques d'armes à feu, l'ACCP est d'accord avec la mise en œuvre d'initiatives qui visent l'utilisation criminelle et le détournement d'armes à feu vers le marché illicite en interdisant l'importation, l'exportation et la vente de répliques d'armes à feu, plus précisément celles qui ressemblent à de vraies armes à feu et qu'on ne peut distinguer de près ou de loin des articles authentiques, ou qui peuvent être modifiées pour les transformer en armes mortelles. C'est ce que l'ACCP a demandé au gouvernement dans une résolution adoptée par nos membres aussi loin qu'en 2000, il y a de cela 22 ans.
    On retrouve des répliques d'armes à feu entre les mains des criminels pour l'extorsion au niveau de la rue, le vol, la protection personnelle contre d'autres criminels, et pour intimider ou terroriser les victimes lors de la perpétration d'une infraction. Par conséquent, il est regrettable que les policiers aient dû occasionnellement recourir à la force meurtrière dans des situations où ils pensaient que les répliques d'armes à feu étaient authentiques. Les préoccupations de la police en matière de sécurité publique s'expliquent également par le fait que les imitations d'armes à feu sont largement non réglementées et que les utilisateurs peuvent les acquérir facilement sans preuve d'âge, de permis ou de compétence.
    L'ACCP ne s'oppose pas aux activités récréatives impliquant l'utilisation d'armes Airsoft. Toutefois, ceux qui utilisent des répliques à des fins récréatives et qui soulignent l'importance de la « ressemblance » des imitations à des armes réelles et des capacités de tir à longue distance de plus de 500 pieds par seconde pour améliorer l'expérience de jeu ne se sont jamais retrouvés dans une situation réelle, face à un individu engagé dans une activité criminelle et armé d'une de ces armes.
    Réduire le nombre de décès liés à l'usage d'une arme à feu dans les cas de violence familiale et d'automutilation est un objectif facile à soutenir pour l'ACCP. La « Loi du drapeau rouge », la « Loi du drapeau jaune » et l'exigence de la remise des armes à feu lors d'une contestation juridique de la révocation du permis sont des moyens efficaces de contribuer à la réduction de la violence fondée sur le sexe, la violence entre partenaires intimes et l'automutilation en limitant l'accès aux armes à feu par ceux qui posent un risque pour eux-mêmes ou pour les autres.
    En ce qui concerne le programme de rachat obligatoire — et, bien sûr, celui‑ci a beaucoup fait jasé — ou l'exigence de rendre les armes de style d'assaut inopérantes de façon permanente, l'ACCP attend les détails sur la mise en œuvre d'un tel programme, les implications pour les services de police au Canada, ainsi que les attentes à leur égard. Cela dit, l'ACCP reconnaît et comprend les préoccupations exprimées par certaines provinces quant à l'utilisation des ressources policières canadiennes pour confisquer aux Canadiens des armes à feu acquises légalement.
    Au bout du compte, cette étape préliminaire du programme de rachat est essentiellement un processus administratif, et non une question policière. Par conséquent, un tel programme pourrait être géré par d'autres entités que les services de police, ce qui permettrait de concentrer les ressources policières sur ceux qui refusent de suivre la nouvelle loi et, plus important encore, sur les priorités en matière d'intégrité des frontières, de contrebande et de trafic.
(1110)
    En conclusion, l'ACCP appuie tous les efforts visant l'amélioration de la sécurité du public et des policiers de première ligne. Il faut équilibrer les exigences raisonnables imposées aux propriétaires d'armes à feu responsables avec des mesures de protection permettant d'atténuer l'impact des pires conséquences des armes à feu. Bien que nous soyons d'accord avec les changements proposés dans le projet de loi C‑21 en principe, nous devons maintenant nous concentrer sur ce qu'ils signifient en pratique et clarifier le rôle que les services de police sont appelés à jouer dans l'application de ces nouveaux règlements.
    Merci.
    Merci, monsieur.

[Français]

    Je cède maintenant la parole pour cinq minutes à M. Sauvé, de la Fédération de la police nationale.

[Traduction]

    Bonjour. Je vous remercie de m'avoir invité à comparaître.
     Je m'appelle Brian Sauvé et je suis le président de la Fédération de la police nationale, l'agent négociateur accrédité qui représente près de 20 000 membres de la GRC au Canada.
     La violence liée aux armes à feu est un problème complexe qui nécessite une approche gouvernementale holistique, notamment des améliorations aux programmes communautaires et sociaux, des investissements dans le système de justice pénale et une augmentation des ressources dans les soins et les politiques de santé. La FPN a formulé 11 recommandations dans son mémoire au Comité et je vais en souligner quelques-unes dans ma déclaration aujourd'hui.
     Premièrement, le projet de loi cible principalement les propriétaires légaux d'armes à feu qui ont suivi les règlements plutôt que de s'attaquer aux causes profondes de la violence liée aux armes à feu. Nous encourageons le gouvernement du Canada à élargir son champ d'action, car le projet de loi C‑21 se concentre étroitement sur l'outil — c'est‑à‑dire l'arme à feu — et non sur l'activité criminelle qui l'entoure. En ne s'attaquant qu'à l'outil, on ne s'attaque pas au problème de fond et le criminel continuera de commettre des infractions et de faire des victimes avec d'autres outils ou en ne tenant absolument pas compte de la loi, car les criminels obtiennent aujourd'hui des armes à feu de façon illégale.
     Entre 2016 et 2021, l'indice des crimes violents dans les provinces a augmenté de 30 % et l'indice de gravité des crimes a augmenté de 10 %. Les administrations ayant les taux les plus élevés de crimes violents liés aux armes à feu ont également des taux de criminalité relativement élevés en général. La réduction de la violence liée aux armes à feu est un enjeu clé et doit rester une priorité pour le gouvernement. Le Canada dispose déjà d'un régime strict de délivrance de permis pour l'achat d'armes à feu et les modifications proposées n'abordent pas les problèmes liés au crime organisé ou à la violence des gangs, à la contrebande d'armes illégales, aux causes systémiques de la criminalité et aux menaces émergentes telles que les armes fantômes imprimées en 3D.
     En outre, les services de police doivent être dotés de ressources adéquates. Sans ressources adéquates, l'élargissement des mandats de la police exerce des pressions supplémentaires sur le maintien de la sécurité publique. Le gouvernement doit reconnaître l'importance de fournir un soutien supplémentaire aux policiers afin qu'ils puissent se concentrer sur la sécurité publique et la prévention du crime. Ce projet de loi doit être accompagné de ressources supplémentaires pour les membres de la GRC et les services de police de tout le Canada.
     Deuxièmement, le gouvernement devrait établir des normes uniformes pour le traçage des armes à feu utilisées pour commettre un crime, en veillant à ce que les services de police disposent de ressources suffisantes pour renforcer leurs capacités de traçage. Actuellement, les armes à feu récupérées dans le cadre d'une enquête policière ne sont pas toutes envoyées pour être tracées. En 2020, seules 39 % des armes à feu utilisées dans des homicides par arme à feu ont été récupérées, et parmi celles‑ci, seules 69 % ont été envoyées aux fins de traçage.
     Troisièmement, nous devons juguler l'entrée illégale d'armes à feu au Canada. Bien que la GRC et l'ASFC interceptent de nombreuses armes à feu illégales à la frontière, les crimes commis avec des armes à feu sont de plus en plus fréquents. Sans ressources adéquates, les armes à feu continueront d'entrer au Canada. Les partenariats entre les administrations avec les juges, les procureurs et les représentants de l'État, en collaboration avec les forces de l'ordre, sont nécessaires pour faciliter l'échange de renseignements et découvrir les modèles de trafic d'armes à feu illégales et les organisations criminelles. Il faut renforcer le programme d'intégrité des frontières de la GRC pour lui permettre de mener des activités proactives d'enquête sur les armes et de démanteler les gangs et les organisations criminelles impliqués dans la contrebande d'armes à feu.
     Enfin, le projet de loi C‑21 ne répond pas à l'inquiétude croissante concernant la participation de personnes plus jeunes à des fusillades et à la violence armée. À Toronto, en 2021, l'âge moyen des personnes impliquées dans des fusillades, en tant qu'accusé, suspect ou personne d'intérêt, a chuté de 25 à 20 ans. On estime qu'il existe plus de 400 gangs de rue au Canada et qu'une approche pangouvernementale est nécessaire pour lutter contre les activités liées aux armes à feu et aux gangs. Les investissements visant à détourner les jeunes de l'adhésion à ces gangs doivent constituer une partie essentielle du plan.
     Les organismes d'application de la loi, les gouvernements, les écoles, les services sociaux, les dirigeants de quartier et les organismes communautaires doivent travailler de concert pour trouver et mettre en œuvre des outils et des programmes efficaces axés sur les jeunes à risque de violence armée. Le projet de loi C‑21 devrait s'attaquer aux problèmes systémiques qui permettent à la violence armée et liée aux gangs de se produire. Nous avons ici l'occasion de créer un système exceptionnel pour régler ce problème en renforçant les contrôles frontaliers et en imposant des peines plus sévères pour lutter contre la contrebande et le trafic d'armes à feu, ce qui réduit la présence d'armes à feu illégales dans les collectivités canadiennes et la fréquence à laquelle elles sont utilisées pour commettre des infractions criminelles.
(1115)
    Je vous remercie. Je suis prêt à répondre à vos questions.
    Merci à tous.
     Nous allons commencer nos séries de questions avec M. Lloyd.
     Monsieur Lloyd, allez‑y. Vous disposez de six minutes.
    Merci, monsieur le président, et merci à tous les témoins.
     Je vais m'adresser tout d'abord à la Fédération de la police nationale.
     L'ACCP nous a dit plus tôt dans la séance que la mise en oeuvre de tous ces nouveaux règlements sur les armes à feu tiendra surtout d'un travail administratif et non d'un travail policier. Cependant, nous savons que la GRC et de nombreux services de police à travers le pays sont confrontés à d'énormes problèmes de dotation en personnel.
     Pouvez-vous nous dire comment le fardeau réglementaire découlant de ce nouveau projet de loi du gouvernement pourrait avoir une incidence sur la capacité de la police à s'acquitter de son mandat de veiller à la sécurité du public?
    Bien sûr. Je vais commencer par faire une mise au point et dire que tous les agents de police du Canada, surtout les membres de la GRC, sont assez apolitiques. Ils font respecter et appliquer les lois adoptées par la législature et interprétées par la Cour suprême du Canada. Dans ce cas‑ci, peu importe la façon dont le projet de loi C‑21, un programme de rachat ou quoi que ce soit d'autre est mis en œuvre, lorsqu'ils sont appelés à faire leur devoir de récupérer auprès de propriétaires d'armes à feu des armes à feu qui peuvent être considérées comme non conformes à la loi, ils le feront.
     Cependant, cela ne fait qu'ajouter des tâches à leur mandat déjà en expansion, alors à quel prix pour la population canadienne? Cela élargit l'écran des répartiteurs. Cela crée plus de dossiers à consulter pour les membres. Envisageons-nous des temps d'attente plus longs pour d'autres présences policières...
    Merci. Je me demande si des ressources seront détournées de la lutte contre les crimes commis avec des armes à feu illégales pour être affectées à la lutte contre les propriétaires d'armes à feu respectueux de la loi qui se verront retirer leurs armes à feu.
    Je suppose que oui. Vous ajoutez une tâche aux agents de police de tout le Canada.
(1120)
    Lors de notre dernière réunion, nous avons entendu l'Alberta Mounted Shooters Association qui a déclaré que son sport, qui utilise principalement des revolvers à simple action, sera détruit à cause de ce gel des armes de poing.
     D'après votre expérience, le revolver à simple ou même à double action est‑il une arme ou une arme à feu de prédilection pour les criminels?
    Je ne suis pas un spécialiste des armes à feu. Il faudrait s'adresser à un expert en la matière qui analyse les crimes commis avec des armes à feu au Canada. Ce n'est vraiment pas à moi de répondre.
    D'accord.
     Pour l'ACCP, alors, les revolvers à simple action sont-ils les armes de poing qui vous inquiètent le plus et que les criminels utilisent?
    Je dirais pas principalement. Le fait est que les criminels qui vont utiliser une arme à feu pour commettre une infraction vont s'emparer de tout ce qu'ils peuvent trouver. Voilà pourquoi même les répliques d'armes à feu peuvent représenter un défi lors de la perpétration d'une infraction. Si vous examinez les types d'armes de poing utilisées, je dirais qu'il s'agit principalement d'armes de poing plus conventionnelles.
    Il ne s'agit donc pas de revolvers.
     En vertu de ce gel des armes de poing, comme certains intervenants me l'ont fait savoir, la reproduction d'armes à feu conçues avant 1898, y compris le pistolet à silex, que je suis sûr que les témoins peuvent voir ici... Un pistolet à silex à chargement par la bouche utilisant de la poudre noire pourrait aussi être interdit en vertu du projet de loi C‑21.
    D'après votre expérience en tant que professionnels de l'application de la loi, ces armes sont-elles utilisées dans les rues?
    J'invoque le Règlement, monsieur le président, simplement pour confirmer, et c'est simplement pour mon information personnelle, que nous sommes autorisés à utiliser des accessoires en comité.
    Une voix: Ce n'est pas un accessoire.
    Je ne pense pas qu'il y ait de règle à ce sujet. Nous ne pouvons pas utiliser d'accessoires à la Chambre, mais il arrive souvent que des témoins distribuent des échantillons de différentes choses et ainsi de suite. Je pense que ce n'est pas contraire au Règlement.
    Je vous remercie.
    Merci, monsieur le président.
    La question posée aux représentants des forces de l'ordre est la suivante: d'après votre expérience, ces armes à feu sont-elles utilisées dans la rue pour commettre des crimes?
    Je dirais que c'est rare.
    Y a‑t‑il des cas auxquels vous pouvez penser?
    Aucun ne me vient à l'esprit, mais cela ne veut pas dire qu'il n'y en a jamais eu. Je le répète, je pense que les criminels utiliseront pour commettre une infraction n'importe quoi qui imiterait... Je pense aux vols qui se produisent parfois simplement avec le canon d'une arme à feu, pas une arme à feu complète, peut-être enveloppé dans une couverture pour que le propriétaire du magasin ne sache pas à quoi il a affaire.
    Si vous tenez compte du risque, vous diriez que le type d'arme à feu que je viens de vous montrer présente un risque très faible ou presque nul.
    Je ne pense pas que c'est ce que je dirais. Je veux dire...
    Le risque est‑il faible?
    Ce que je dis, c'est que toute arme à feu brandie devant quelqu'un, si elle est utilisée pour commettre un vol, intimider ou menacer, présente un risque pour cette personne.
    C'est intéressant.
    Cela ne veut peut-être pas dire qu'ils vont l'utiliser pour faire feu sur cette personne, mais nous voyons régulièrement des crimes de représailles où une réplique d'arme à feu est utilisée dans un premier temps, puis la suite est une vraie arme à feu. Je pense que cela présente une forme de risque.
    C'est intéressant. Je vous remercie.
    Je vais revenir à la Fédération de la police nationale.
    Nous avons entendu récemment que vos membres doivent s'entraîner dans des champs de tir privés afin de maintenir leurs acquis. Nous avons aussi entendu que les cotisations obligatoires des propriétaires d'armes de poing sont essentielles à la viabilité financière de ces champs de tir et qu'ils fermeront si le projet de loi C‑21 est adopté.
    Comment la fermeture de ces champs de tir privés affectera‑t‑elle la capacité de vos membres à s'entraîner?
     Cela alourdirait la responsabilité de la GRC d'accroître sa capacité de formation et, au bout du compte, cela nous amènerait à demander à la GRC d'aménager des installations de formation approuvées par le gouvernement ou par la GRC partout au Canada. Il y a cet enjeu par opposition à la possibilité d'utiliser le champ de tir local.
    J'en arrive à mes dernières questions.
    Dans ce débat, nous avons entendu plusieurs témoins de tous les horizons politiques exprimer de nombreuses inquiétudes au sujet des dispositions dites du « drapeau rouge » dans ce projet de loi. Un chef de police a laissé entendre que si les gens s'adressaient au système judiciaire au lieu d'appeler le 911, ils pourraient courir un plus grand danger.
    Pensez-vous que ces dispositions du drapeau rouge sont nécessaires? La police ne répond-elle pas déjà aux appels de victimes en présence d'armes à feu?
    Oui, les policiers répondent aux appels concernant les armes à feu et les prennent très au sérieux. Cependant, du point de vue de nos membres, tout ce qui peut être fait pour renforcer la sécurité des victimes de crimes est une bonne chose.
     Maintenant, est‑ce que l'utilisation d'un drapeau rouge, d'un drapeau jaune et d'un drapeau vert est le bon système? Je ne sais pas, mais je pense que c'est une excellente initiative et un bon début.
(1125)
    Merci, monsieur Lloyd.
    Nous allons passer à M. Noormohamed.
    Monsieur Noormohamed, vous disposez de six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie tous d'être venus et, en fait, de tout ce que vous faites pour assurer la sécurité des Canadiens.
    J'aimerais adresser d'abord mes questions à M. Bray.
    Chef Bray, vous avez évoqué dans votre intervention des préoccupations liées aux armes et aux pièces fantômes. L'une des possibilités qui s'offrent à nous, je pense, dans le cadre de ce projet de loi est de réfléchir à la façon dont nous abordons les pièces, qu'il s'agisse des assemblages de glissière, des mécanismes de détente ou des canons, et de les réglementer pour veiller à ce que les gens ne puissent pas fabriquer leurs propres armes à la maison. Après avoir entendu le service de police de Vancouver et d'autres intervenants, je sais que c'est une préoccupation majeure. C'est certainement le cas dans ma communauté, dans le Lower Mainland, et je suppose que c'est le cas dans tout le pays.
    Selon vous, que devrions-nous faire pour régler ce problème dans le projet de loi C‑21? Pensez-vous que nous devrions consacrer un peu de temps et d'efforts pour nous assurer que la question des armes fantômes et de leurs pièces, en particulier la réglementation des pièces et de leur importation, est prise en compte? Qu'en pensez-vous?
    Je pense que c'est une partie importante de cette discussion. Au bout du compte, nous composons nous aussi dans les Prairies avec l'impression en 3D et la fabrication d'armes à feu. Le fait est que les gens peuvent imprimer les principales pièces d'une arme à feu. Ils peuvent commander en ligne des pièces d'une arme à feu qui, en elles-mêmes, qu'il s'agisse d'une détente ou d'une autre pièce d'une arme à feu, ne sont pas illégales à l'achat, et elles ne déclenchent pas vraiment une alarme si quelqu'un fait venir ce genre d'articles par la poste ou par d'autres moyens.
     Nous voyons de plus en plus la capacité d'assembler une arme à feu de cette nature. Nous avons mis en oeuvre quelques projets d'assez grande envergure ici en Saskatchewan et nous avons été en mesure de retirer ces types d'armes à feu de la rue. Je pense qu'elles deviennent un problème de plus en plus grand, et je suis absolument convaincu qu'il y a place pour un travail législatif visant à restreindre la capacité de fabriquer ce genre d'armes ou de réglementer la pratique dans la mesure du possible.
    Quel type de restriction ou de réglementation faciliterait la vie des policiers qui sont confrontés quotidiennement à ce problème et qui voient de plus en plus de ces armes fantômes employées pour commettre des crimes?
    Je pense qu'il y a probablement beaucoup de choses qu'il faudrait probablement approfondir un peu pour les comprendre. Je pense qu'à l'heure actuelle, si je commande un percuteur en Allemagne, cela ne laisse aucune trace. Il n'y a aucune exigence pour que cela soit réglementé de quelque façon que ce soit, alors que si je vais acheter une arme à feu, des munitions ou autres choses, dans la plupart des cas, il faut produire un certain permis qui montre que je suis autorisé à le faire.
     Nous avons eu une affaire récente en Saskatchewan où une personne était assez habile pour produire non seulement une arme à feu fabriquée principalement au moyen d'une imprimante 3D, mais une arme qui pouvait tirer 40 ou 50 fois tout en conservant son intégrité. Il suffit d'une seule décharge pour que l'arme soit fatale et utilisée dans un homicide.
     Je pense que si nous pouvions d'une manière ou d'une autre travailler sur l'importation de pièces, et peut-être y aura‑t‑il d'autres mesures... Je ne sais pas quelles sont les meilleures pratiques exemplaires en vigueur dans d'autres pays, mais, encore une fois, il s'agirait d'un travail exploratoire pour examiner cette question.
    Simplement pour confirmer, si nous devions trouver des moyens d'inclure la possession, la vente et l'importation des types de pièces utilisées pour fabriquer des armes fantômes, vous seriez d'accord.
    Je serais tout à fait d'accord.
    C'est fantastique.
    Vu le peu de temps dont je dispose, je voudrais maintenant aborder un sujet que vous avez évoqué plus tôt, à savoir toute la question des répliques d'armes à feu, comme les armes de type Airsoft, qui sont fabriquées pour ressembler à de vraies armes.
     L'une des questions que moi-même et d'autres membres de ce comité avons posées à l'industrie était de réfléchir à des moyens de faire en sorte que leurs armes ou leurs fusils jouets, peu importe comment vous les appelez, n'amènent pas leurs utilisateurs à être pris pour cibles et n'obligent pas les forces de l'ordre à réagir comme s'il s'agissait d'armes à munitions réelles pouvant tuer des gens.
     Dans quelle mesure est‑il important pour vous, en tant que policier, de veiller à ce que les jouets qui ressemblent à de vraies armes à feu soient retirés des rues? Que diriez-vous à l'industrie lorsqu'elle fabrique ce genre d'objets qui font que des gens se font tuer? Que pensez-vous que l'industrie devrait faire pour éviter de fermer ses portes?
(1130)
    J'ai eu des réunions et des discussions directes avec des gens de cette industrie à l'échelle internationale. La réalité, c'est que même si un jouet ressemble à une arme à feu dont le canon est muni d'un capuchon orange, ou s'il est d'une couleur complètement différente, ou s'il ressemble à un pistolet Nerf, il est possible de le convertir en arme réelle. Il n'y a pas de solution parfaite à ce problème, d'après ce que j'ai compris.
     Par exemple, lorsqu'un pistolet-jouet imitant fidèlement un Glock, le pistolet que nous portons au service de police de Regina, est brandi et utilisé pour commettre une infraction, la plupart du temps, dans le feu de l'action, même les policiers ne peuvent pas déterminer si l'arme à feu est réelle ou non. Elle représente une menace absolue. Souvent, les victimes qui se trouvent face au canon d'une de ces répliques d'armes à feu ont la même réaction que s'il s'agissait d'une arme réelle.
    Comme je l'ai mentionné, nous en voyons souvent les conséquences. Il y a une menace initiale lorsqu'une résidence est dévalisée et des personnes sont cambriolées, et une réplique d'arme à feu est utilisée. Puis, une semaine plus tard, nous avons un homicide en raison des représailles consécutives à cet incident initial. Cela constitue une menace à tous les niveaux.
     Je pense que plus nous pourrons éviter que des répliques imitent fidèlement de vraies armes à feu, mieux ce sera pour la sécurité de tous.
    Merci beaucoup.
    Merci, monsieur Noormohamed.

[Français]

    Madame Michaud, vous avez la parole pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie beaucoup les témoins de leur présence.
    Monsieur Brochet, je vous remercie d'avoir accepté notre invitation à témoigner devant le Comité.
    Dans votre allocution d'ouverture, vous avez salué quelques éléments du projet de loi C‑21, notamment l'augmentation des peines maximales pour le trafic d'armes. Vous avez cependant émis des réserves concernant le projet de loi C‑5, qui abolit les peines minimales obligatoires pour des crimes commis par arme à feu. Il y a quand même un lien à faire entre les deux.
    Je prends souvent l'exemple de William Rainville, dont vous connaissez probablement l'histoire. Ce Québécois de 25 ans a fait passer illégalement à la frontière près de 250 armes. Il a été condamné à cinq ans de prison, mais il a obtenu sa semi-liberté moins d'un an plus tard. Cela démontre que les gens qui font du trafic d'armes ne sont pas nécessairement des criminels endurcis ni des gens ayant un casier judiciaire. Souvent, il s'agit pour eux d'une première infraction. Selon moi, c'est très rare qu'ils reçoivent la peine maximale ou la plus grande peine prévue pour leur crime.
    Selon votre expérience, est-ce qu'il arrive souvent que des personnes obtiennent de très lourdes peines pour avoir fait du trafic d'armes? Cette augmentation de la peine maximale aura-t-elle vraiment un effet positif?
    Je crois que l'augmentation de la peine maximale touchera des cas d'exception. Je pense entre autres à des personnes qui ont fait à plusieurs reprises du trafic d'armes de haut niveau. Il est quand même important de passer un message en ce sens.
    Pour ce qui est du projet de loi C‑5, j'ai déjà témoigné devant un autre comité parlementaire à ce sujet. Comme nous l'avons expliqué dans ce contexte, nous comprenons bien le fondement de ce projet de loi, qui tente de régler le problème de la surreprésentation des communautés autochtones et des groupes racisés dans les pénitenciers. Ce sont des aspects que nous comprenons très bien. Cependant, nous vivons dans l'ensemble du Canada une situation préoccupante en lien avec l'usage des armes à feu par les membres du crime organisé et de gangs de rue. Cette situation nous préoccupe grandement, tout comme elle préoccupe beaucoup la population. Pour ma part, je suis le directeur du Service de police de Laval. Quand il y a des fusillades sur le territoire, les citoyens me disent qu'ils pensent déménager dans une autre ville. Ces fusillades, dont les suspects sont de plus en plus jeunes, soit dit en passant, ont donc des répercussions majeures.
    Le projet de loi C‑5, par lequel on veut abolir les peines minimales obligatoires pour certaines infractions, envoie un très mauvais message, selon nous. Non seulement nous ne sommes pas d'accord sur l'abolition de ces peines minimales obligatoires, comme nous l'avons dit, mais nous avons même proposé une clause dérogatoire. Autrement dit, un principe de peine minimale obligatoire serait conservé dans le cas des infractions liées aux armes à feu, mais il serait possible de recourir à une clause dérogatoire, selon certains critères. Cela se fait dans plusieurs pays. Le juge pourrait donc, selon certains critères, recourir à une clause dérogatoire et ne pas appliquer la peine minimale obligatoire dans certaines situations.
    C'est donc un élément important. Comme vous le savez, il y a tout un processus. On a beau procéder à des arrestations et à des saisies, les gens risquent fort de récidiver s'ils sont libérés rapidement. En effet, le taux de récidive est élevé. En outre, le message qu'on envoie aux autres criminels manque de force. On donne l'impression que la population ne prend pas au sérieux les situations de ce genre.
(1135)
    Je vous remercie. C'est intéressant.
    Vous parlez des jeunes et des fusillades qui ont lieu dans la métropole. Votre organisation siège à la Table provinciale de concertation sur la violence, les jeunes et le milieu scolaire. Dans ce contexte, avez-vous entendu parler d'autres solutions qui pourraient contribuer à résoudre ce problème?
    On entend souvent dire que le projet de loi C‑21 ne réglera pas le problème du trafic d'armes illégales. Dans la grande majorité des cas, ce sont effectivement des armes illégales qui se retrouvent entre les mains des jeunes qui font partie de gangs de rue, à Montréal et dans les autres grands centres au pays.
    Je vous ai entendu mentionner d'autres mesures qu'il faudrait prendre, parallèlement à celles prévues dans le projet de loi C‑21. Par exemple, à la frontière, il faudrait renforcer la collaboration entre les divers corps de police et l'Agence des services frontaliers du Canada.
    Pouvez-vous nous parler d'autres solutions que le gouvernement pourrait mettre en œuvre?
    Dans le cas de la frontière, il faudrait évidemment considérer la mise en place d'équipes mixtes et consacrer davantage de ressources à la question du trafic. C'est de première importance. Sinon, on ne s'en sortira pas et on aura toujours des armes à profusion sur le terrain.
    Nous siégeons effectivement à la table de concertation au sujet des gangs de rue. Nous bénéficions présentement du Fonds pour bâtir des communautés plus sécuritaires, selon une entente avec le fédéral. Dans ce cadre, la Ville de Laval reçoit une subvention de plus de 4 millions de dollars. Cela nous donne vraiment la possibilité de mettre sur pied des stratégies de prévention. À court terme, il y a les enquêtes, les arrestations et les activités de visibilité, mais l'Association des directeurs de police du Québec est d'avis qu'un problème de fond demeure: les suspects qui ont des armes à feu en leur possession sont de plus en plus jeunes. M. Sauvé en a parlé. Il n'est pas normal qu'un jeune de 16 ans soit en possession d'une arme à feu. À la rigueur, ce n'est même pas un problème de police, mais un problème de société. C'est pourquoi nous voulons utiliser ce financement, et peut-être d'autre financement à venir, pour adopter une stratégie intégrée en matière de violence. En effet, il faut travailler avec nos partenaires de la santé, de l'éducation, de la municipalité, du Service de police de Laval, bien sûr, et des groupes et organismes communautaires. Nous travaillons vraiment sur une stratégie de fond. Nous voulons établir un plan sur un horizon de 5 à 10 ans. Cela ressemble un peu à ce qui s'est fait à Toronto dans le cadre de la mise en œuvre du projet SafeTO. Nous trouvons que c'est une formule intéressante si nous voulons nous attaquer à la situation à long terme.
    Merci, madame Michaud.

[Traduction]

    Nous allons maintenant donner la parole à M. MacGregor pour six minutes.
     Merci beaucoup, monsieur le président, et merci à tous nos témoins d'aider à nous guider dans notre étude du projet de loi C‑21.
     Chef Bray, j'aimerais commencer par vous. Vous avez fait des commentaires sur les dispositions relatives au drapeau rouge, et je sais que dans son site Web, l'ACCP indique qu'elle est favorable aux dispositions relatives au drapeau rouge et à « son objectif de contribuer à réduire la violence fondée sur le sexe, la violence entre partenaires intimes et l'automutilation en limitant l'accès aux armes à feu par ceux qui posent un risque pour eux-mêmes, ou pour les autres ».
     Nous avons reçu de nombreux témoignages sur le projet de loi relatif au drapeau rouge, et certains articles du projet de loi C‑21 posent un problème pour beaucoup de groupes. Ils craignent qu'il incombe trop souvent à une victime potentielle de se soumettre à un long processus judiciaire alors qu'il serait préférable qu'elle s'adresse à la police.
    Notre système actuel comporte‑t‑il des lacunes qui justifient que nous ajoutions cette disposition au Code criminel? Autrement dit, dans quel cas est‑il préférable qu'une personne s'adresse aux tribunaux pour obtenir une ordonnance d'interdiction d'urgence au lieu de s'adresser à la police?
    C'est un équilibre important, et je vous remercie pour la question.
     En Saskatchewan et dans de nombreuses provinces, les familles ont la possibilité d'aider des jeunes qui ont des problèmes d'alcool. En Saskatchewan, nous avons ce qu'on appelle le mandat de désintoxication pour les jeunes, qui permet à une famille de s'adresser directement au tribunal et de dire qu'un de ses enfants ou un enfant dont elle a la charge a un problème avec une substance quelconque. Elle fait une demande pour qu'il soit pris en charge dans un cadre thérapeutique. Il s'agit d'une mesure préventive, au lieu d'attendre que cet enfant commette un crime et que nos agents s'en occupent, pour essayer ensuite de lui obtenir de l'aide par l'entremise des tribunaux.
     Je considère que les dispositions relatives au drapeau rouge sont très similaires. Elles ne remplacent en aucun cas la nécessité d'une intervention immédiate, et j'ai eu des conversations à ce sujet. Certains craignent que les gens aient l'impression de devoir passer par ce long processus administratif et qu'ils se mettent potentiellement en danger. S'il y a un risque immédiat, vous devez appeler la police; cela ne fait aucun doute. Cependant, s'il existe un moyen de ne pas devoir attendre qu'un événement se produise avant que la police n'intervienne pour restreindre l'accès à des armes à feu et que nous puissions le faire de manière constructive en amont dans un environnement sûr et sécurisé, je pense que ce n'est qu'un outil de plus dans le coffre à outils.
(1140)
     Je vous remercie de ces commentaires.
    Pour en revenir au gel des armes de poing, vous avez dit que l'Association canadienne des chefs de police est pour une approche nationale afin de gérer la question des armes de poing au Canada. Vous pensez qu'un gel des armes de poing est une méthode pour réduire ce type d'armes, mais ce qui m'a frappé dans la deuxième partie de votre déclaration, c'est que vous avez dit « tout en permettant aux propriétaires d'armes de poing respectueux de la loi de pratiquer leur sport ».
    Je sais que pour être autorisé à posséder une arme à feu à autorisation restreinte telle qu'une arme de poing, il faut prouver qu'on l'utilise ou qu'on participe à des compétitions dans un club ou un champ de tir agréé. Le projet de loi C-21 prévoit des exemptions pour les tireurs de niveau olympique et paralympique, mais d'autres disciplines de tir craignent d'être exclues en raison du libellé actuel du projet de loi C‑21.
     L'Association canadienne des chefs de police dit souhaiter que les propriétaires d'armes de poing respectueux de la loi puissent pratiquer leur sport. Pensez-vous qu'une solution intermédiaire consisterait à exiger des personnes pratiquant ces autres disciplines qu'elles fournissent davantage de preuves qu'elles participent activement à leur sport? En d'autres termes, devraient-elles fournir une preuve tangible qu'elles ont besoin de posséder une arme de poing?
    En bref, oui. Je crois qu'en fin de compte, la notion d'armes à feu elle-même est une question qui est une grande source de discorde au Canada, et qu'il y a probablement, même dans certaines communications de l'ACCP, un certain équilibre. Nous reconnaissons que c'est un sport que les gens pratiquent, et la compétition olympique ou internationale en est un bon exemple.
     Je vais m'en tenir à une déclaration que j'ai l'impression d'avoir répétée 200 fois au cours de la dernière année et demie, à savoir que les propriétaires et détenteurs d'armes à feu respectueux de la loi ne sont généralement pas le problème. La plupart du temps, ce ne sont pas eux qui causent le problème. Le problème, ce sont les criminels ou les personnes qui les utilisent à des fins criminelles et qui ne sont pas vraiment disposés à respecter la loi en premier lieu. Je pense que tout ce que vous pouvez faire dans la loi qui permet des exemptions, comme les exigences législatives qui garantissent que des mesures de sécurité supplémentaires sont suivies, est une bonne chose.
    Du point de vue de la police, il s'agit de s'assurer qu'il y a des exemptions pour d'autres disciplines de tir, mais aussi d'ajouter des exigences plus strictes concernant la preuve d'une participation active dans un sport et du besoin démontré de posséder une arme de poing. Est‑ce exact? Est‑ce que je vous interprète bien?
    Oui, c'est exact. Je pense que c'est un bon équilibre.
    D'accord. Je vous remercie.
     En ce qui concerne les armes airsoft, je vous remercie de vos témoignages précédents en réponse à d'autres questions. Je pense que les membres du Comité se rendent compte que le projet de loi C-21, tel qu'il est actuellement rédigé, pourrait être modifié.
     Vous convenez qu'il y a lieu de tenter de mettre en place des exigences qui les distinguent en fin de compte de l'apparence d'une véritable arme à feu, et d'inclure dans la loi toute mesure qui précise cela afin de donner aux services de police une plus grande tranquillité d'esprit lorsqu'ils sont appelés à intervenir.
    C'est exact. Oui.
    Merci.
    Cela m'amène à la fin.
    Merci beaucoup, monsieur MacGregor.
     Cela met fin à notre premier tour. Avant de passer au deuxième tour, je signale que je me suis entretenu avec le greffier au sujet du rappel au Règlement de M. Schiefke sur les accessoires. De manière générale, nous devons suivre la procédure de la Chambre, qui interdit les accessoires à la Chambre. Par conséquent, nous ne devons pas utiliser d'accessoires ici non plus.
     Merci, monsieur Schiefke. Je reconnais mon erreur.
     Nous n'aurons pas le temps de faire un deuxième tour complet. Comme d'habitude, nous sommes un peu limités par le temps, donc nous ferons une série de questions par parti.
    Nous allons commencer avec M. Motz, pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président, et merci aux témoins d'être ici.
     Je suis heureux de vous revoir, monsieur Sauvé et chef Bray. Ça fait un moment, déjà.
     Il est intéressant de voir à quel point les différents responsables de police de tout le pays ont des points de vue différents. Comme le chef Bray l'a mentionné, je crois, même au sein de l'ACCP, il y a un large éventail de points de vue quant à l'application de la législation sur les armes à feu, qu'il s'agisse du projet de loi C-21, de décrets ou autres découlant du passage du projet de loi C‑21 au cours de la législature précédente.
     Ma question est simple: les criminels respectent-ils la loi?
(1145)
    Cette question s'adresse-t-elle à moi, monsieur?
    Oui, bien sûr. Je veux dire, je vais vous faire gagner du temps. Nous savons que les criminels ne respectent pas la loi. Vous avez un peu abordé ce sujet.
     Est‑ce que le fait d'avoir des lois qui ciblent principalement les propriétaires d'armes à feu respectueux de la loi, comme vous l'avez dit tous les deux dans ce témoignage particulier, améliore vraiment la sécurité publique au degré dont nous avons besoin?
    Je vous remercie de votre question.
     Le Canada a de très bonnes et solides lois et règlements sur les armes à feu. Lorsque vous nous comparez à de nombreux autres pays, y compris celui au sud de nous, nous les devançons avec ce que nous avons. Nous faisons un bon travail en essayant de restreindre les armes à feu et l'accès aux armes à feu parmi ceux qui ont un permis et qui ont légalement le droit d'en posséder, mais je crois que nous devons nous concentrer sur le fait que les propriétaires d'armes à feu respectueux de la loi ne sont pas le problème que nous avons lorsque nous parlons de cette forte augmentation des crimes liés aux armes à feu. Ce sont les criminels.
    Oui. Je vous remercie pour cela.
     Monsieur Sauvé, j'ai quelques questions à vous poser.
     J'ai bien aimé certaines de vos remarques disant que le projet de loi C-21 est mal ciblé — je paraphrase ce que vous avez dit —, ainsi que les commentaires auxquels M. Lloyd a fait allusion. M. Bray parle de l'aspect municipal. Vous parlez de la confiscation des armes à feu, que le gouvernement veut appeler le programme de rachat, et de l'impact de cette mesure sur les ressources. Si le gouvernement s'attend à ce que les forces de l'ordre rassemblent ces armes à feu, il y aura des répercussions sur la sécurité publique puisque des ressources seront occupées à faire cela plutôt qu'à répondre aux problèmes de sécurité publique dans les rues.
     Monsieur Sauvé, tout d'abord, si la GRC est tenue de confisquer les armes à feu, quel impact entrevoyez-vous sur vos agents de première ligne, sur votre capacité à répondre aux appels 911, par exemple, et sur la sécurité publique?
    C'est évidemment une bonne question. Je pense que c'est un point de débat que cette loi néglige.
    Nous avons dit à plusieurs reprises que les services de police au Canada, y compris la GRC, fonctionnent déjà à des niveaux minimaux. Nous avons des difficultés à recruter, à retenir et à attirer des gens dans la profession de policier. Chaque fois que nous augmentons le mandat des agents de police dans la rue, il doit y avoir quelque chose qui cède. Cela signifie-t‑il que nous ne répondrons pas à un appel de santé mentale d'une personne en crise au milieu de la rue parce que les agents de police sont maintenant occupés à aller chercher des armes à feu dont la possession n'est plus légale?
     Il y a des répercussions. En fin de compte, laissons-nous, comme l'a dit le chef Bray, à une autre agence le soin de l'appliquer? La loi ne le précise pas. Il n'en est pas question dans le programme de rachat. C'est aux policiers dans les rues et aux membres de la GRC qu'il reviendra de le faire. Sans ressources soutenues, il y aura forcément quelque chose qui sera négligé.
    Je suis d'accord. Je pense que ce que nous avons vu avec une grande partie des lois du gouvernement actuel — certainement en ce qui concerne les armes à feu — c'est que tout est dans les détails, et il n'y a aucun détail de précisé pour traiter cette question.
    Chef Bray, je pense que vous conviendrez que les ressources de Regina et des organismes municipaux de tout le pays sont dans le même bateau que la GRC et que le processus de confiscation sera problématique pour vos appels de service déjà surchargés.
    Oui, je suis tout à fait d'accord.
     Puis‑je ajouter une petite chose? Je sais que vous êtes à court de temps.
     Voici mon autre préoccupation. Si nous continuons à donner la priorité aux appels — ce qui signifie que nous allons répondre aux urgences en matière de santé mentale et aux agressions en cours — et que ce travail administratif tombe plus bas sur l'échelle des priorités, je m'inquiète de l'effet que cela peut avoir sur les propriétaires d'armes respectueux de la loi qui deviennent des criminels une fois la période d'amnistie terminée. Si on ne lui accorde pas une priorité suffisante, il pourrait y avoir un effet contraire et nous aurons des problèmes en fin de parcours également.
    Exactement. C'est le problème de cette loi. Le projet de loi C-21 criminalise des gens qui ne sont pas des criminels.
(1150)
    Merci, monsieur Motz.
     Nous passons maintenant à Mme Damoff.
     Madame Damoff, vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
     Je vais commencer par une observation. Si la possession d'armes à feu améliorait réellement la sécurité publique, les États-Unis seraient le pays le plus sûr du monde, et nous savons que ce n'est tout simplement pas le cas.
     Chef Bray, vous parliez de la façon dont les lois sur le drapeau rouge et le drapeau jaune ne sont qu'un outil dans la boîte à outils. Je sais que c'est la façon dont notre gouvernement voit les choses. Ce n'est pas la solution pour la violence sexiste ou les personnes qui envisagent le suicide. C'est un outil parmi d'autres.
    La loi a été modifiée de sorte qu'un refuge pour femmes, par exemple, peut s'adresser au tribunal au nom d'une femme afin que celle‑ci puisse rester anonyme. Si la police d'Halton reçoit un appel du Halton Women's Place, est-elle en mesure de répondre, ou est‑ce que c'est la femme elle-même qui doit appeler la police?
    Non. Ils seraient certainement en mesure de répondre à cet appel.
    D'accord.
    J'ai parlé avec le Dr Alan Drummond, qui est médecin urgentiste. Il m'a dit que lorsqu'il y a un danger imminent, il est facile pour lui de réagir, notamment en ce qui concerne le suicide, mais que lorsqu'il s'agit d'une possibilité, il a des doutes.
     J'ai entendu cela de la part d'organisations de femmes lorsqu'il y a eu un contrôle coercitif, par exemple, et que quelqu'un menace d'abattre un animal de compagnie, comme un chien. La femme n'a pas été visée par des coups de feu et n'a pas reçu de coups de poing, mais il y a un contrôle coercitif. C'est beaucoup plus difficile, et je m'attendrais à ce qu'il soit plus difficile pour les agents de police de répondre à cela aussi.
    Oui, bien sûr. C'est certainement un facteur. C'est pourquoi lorsque vous avez des défenseurs et d'autres personnes qui aident les personnes en situation de violence familiale, il y a une très forte volonté de la part des forces de l'ordre et du système judiciaire en général d'utiliser ces défenseurs et leur influence pour essayer d'améliorer la sécurité.
    J'ai des questions très précises sur les armes airsoft. Airsoft in Canada a comparu ici, et je sais que vous avez témoigné que vous aimeriez que ces armes ne ressemblent pas du tout à de vraies armes. Ses représentants ont dit qu'ils appuieraient les dispositions exigeant que l'achat soit limité aux personnes de plus de 18 ans, ainsi que les dispositions concernant l'entreposage et le transfert sécurisés et l'obligation d'obtenir un permis pour acheter une arme airsoft.
     Pensez-vous que ce soit une solution en ce qui concerne l'intervention de la police?
    Je dirais que c'est un pas dans la bonne voie. C'est ce que vous nous avez entendus dire, je crois, lorsque nous avons parlé des répliques d'armes à feu. À l'heure actuelle, elles ressemblent exactement à des armes à feu, et n'importe qui peut en acheter. Il n'y a pas d'enregistrement des renseignements. Il n'y a pas d'exigence d'âge. Il n'y a rien qu'il faut prouver.
     Je crois que toutes les mesures que nous pouvons prendre pour limiter l'accès à ces armes et qui nous permet de faire tout ce que nous pouvons pour nous sécuriser... Je suis toujours d'avis que la question de la similitude est un gros problème. Je ne veux pas m'attarder sur le sujet, mais on peut transformer n'importe quoi en arme à feu. Un stylo à bille peut être transformé en une arme à feu. Je reconnais que ce n'est pas parce qu'il est violet et semble être un pistolet Nerf que ce n'est pas une vraie arme à feu, car il peut être converti. Cependant, je pense qu'il est moins probable que cela se produise que le contraire.
    Je parlais avec mon chef de police ici, à Halton, et il a soulevé un point opposé, auquel je n'avais pas pensé, à savoir que si ce n'était qu'une question de couleur, on pourrait faire en sorte qu'un vrai pistolet ressemble à une réplique.
    Oui.
    Monsieur Brochet, je me demande si vous voulez ajouter quelque chose sur airsoft. Que pensez-vous de ces exigences par rapport à la modification de l'arme elle-même?

[Français]

    Je suis tout à fait d'accord avec le chef Bray: c'est un enjeu important.
    Nous faisons régulièrement des interventions sur le terrain, et il s'agit souvent d'interventions à risque. Dans certains cas, il s'avère que la personne a une imitation d'arme ou une arme à air comprimé. Effectivement, c'est extrêmement risqué à la fois pour le policier et pour la personne, car il y a un risque qu'on fasse feu sur cette personne. Cela risque donc de créer des victimes.
    Si l'on trouvait une façon de légiférer pour avoir un meilleur contrôle de ce type d'armes, ce serait un pas dans la bonne direction.

[Traduction]

     Il ne me reste que 30 secondes.
     Chef Bray, je vais peut-être vous demander ceci. Pensez-vous que les peines actuelles pour le trafic d'armes fantômes sont suffisantes?
    Je ne sais pas. Surtout dans le domaine des armes fantômes, je pense que nous sommes déficients.
(1155)
    D'accord. Je vous remercie beaucoup.
    Merci à tous nos témoins.
    Merci, madame Damoff.
     Nous passons maintenant à Mme Michaud.

[Français]

    Vous avez la parole pour deux minutes et demie.
    Merci, monsieur le président.
    J'ai une question pour vous, chef Bray.
    Vous savez comme moi que le gouvernement a déposé, en mai 2020, un décret pour interdire 1 500 modèles d'armes d'assaut de type militaire. Il a aussi promis, par la même occasion, un programme de rachat visant ces armes.
    Selon ce que j'ai pu entendre dans les couloirs du Parlement, si le gouvernement met autant de temps à instaurer un programme de rachat, c'est qu'il n'a aucune idée de la façon de s'y prendre et qu'il ne sait pas à quel organisme confier la tâche.
    Je crois vous avoir entendu dire, pendant votre allocution d'ouverture, que ce n'était pas aux corps policiers qu'il faudrait confier ce type de responsabilité. Or, dans l'imaginaire collectif, du moins c'est l'impression qu'ont les propriétaires d'armes de ce type, les policiers vont défoncer la porte de leur maison pour venir chercher ces armes qui, du jour au lendemain, seront devenues illégales. Cependant, le gouvernement n'a pas vraiment dévoilé ses intentions. On ne sait pas si la responsabilité d'un tel programme incombera aux policiers ou à une autre organisation.
    Pouvez-vous clarifier vos propos là-dessus et nous dire pour quelle solution vous opteriez, si vous étiez à la place du gouvernement?

[Traduction]

    Je pense vraiment que l'importance est dans les détails de la façon dont cela sera mis en place. Les services de police et les agents de police, comme l'a dit M. Sauvé, suivront et appliqueront la loi. Le programme de rachat est un processus administratif. À la fin de la période d'amnistie, la loi devient la loi. Les agents de police participeront à ce processus pour faire respecter la loi à ce moment‑là.
     Dans le cadre de ce processus administratif, je pense qu'il y a de nombreuses façons — et l'Association canadienne des chefs de police, ou l'ACCP, préconise d'autres façons — de trouver ces armes à feu à soumettre au programme de rachat plutôt que d'utiliser les ressources de la police. Pourrait‑on les utiliser par une sorte de système de messagerie ou de courrier? Une autre organisation pourrait-elle se rendre sur place et recueillir ces armes à feu retournées?
     La partie administrative du processus représente une énorme quantité de travail. Peu importe où l'on se trouve au Canada, nos agents de première ligne sont débordés. Ils sont surchargés. Les attentes de leurs collectivités sont beaucoup plus élevées que ce que nos agents sont en mesure de fournir. Malheureusement, nous faisons ce travail, mais au détriment de nos agents, en raison de la pression qu'ils subissent et de leur santé mentale.
    Je pense qu'il faut, dans la mesure du possible, détourner ailleurs ces tâches supplémentaires plutôt que d'utiliser les ressources de la police.

[Français]

    Merci, madame Michaud.

[Traduction]

    Nous passons à M. MacGregor. Allez‑y, monsieur, pour deux minutes et demie.
    Merci, monsieur le président.
     Pour cette question, je pense que je vais m'adresser à M. Sauvé. Elle portera à nouveau sur le sujet des lois sur les drapeaux rouges.
     J'aimerais connaître votre point de vue, car nous avons entendu le chef Bray de l'ACCP dire que c'est une autre avenue. Nous essayons d'équilibrer cela avec les témoignages de plusieurs groupes — et nous avons également reçu des lettres et des mémoires — selon qui il est très troublant d'imposer à une personne qui risque d'être victime d'une arme à feu ou d'un autre dispositif dangereux à la maison le fardeau de se soumettre à un long processus judiciaire.
     Je comprends que dans les situations d'urgence, la police aime souligner qu'il faut toujours appeler la police si l'on croit que la vie de quelqu'un est en danger, surtout en ce qui concerne une arme à feu. Cependant, si l'on regarde les dispositions du projet de loi C‑21 et la création de ce nouveau système où une personne peut passer le système judiciaire et rester anonyme, y a‑t‑il des cas, à votre avis, où ce système judiciaire est justifié? Êtes-vous pour cette possibilité supplémentaire pour les gens?
    Je pense que tout ce que nous pouvons faire au Canada pour lutter contre la violence entre partenaires intimes et ses menaces est une bonne chose. En ce qui concerne les défis que nous avons cernés, comme je l'ai mentionné, je ne pense pas que le projet de loi C‑21 aille assez loin, et je ne pense pas que nous examinions les activités en aval de celui‑ci. Par exemple, nous avons déjà parlé des forces policières surchargées, des attentes de la collectivité et des mandats ajoutés aux agents de police.
     Cela créera‑t‑il un fardeau supplémentaire dans notre système judiciaire déjà surchargé? Nous constatons dans un certain nombre de provinces qu'il n'y a pas assez de procureurs de la Couronne, qu'il n'y a pas assez de juges et qu'il n'y a pas assez d'espace pour les procès. Même si nous nous retrouvons dans une procédure judiciaire pour un drapeau rouge ou un drapeau jaune, quelle qu'en soit la forme, est‑ce que le problème sera réglé en temps opportun? Si ce n'est pas le cas, cette personne est-elle continuellement en danger? Nous devons tenir compte des répercussions en aval.
(1200)
    Merci.
    Merci, monsieur MacGregor.
     Voilà qui met fin à ce groupe de témoins.
     J'aimerais remercier tous les témoins d'avoir partagé leur temps avec nous et de nous avoir fait profiter de leurs connaissances expertes dans le cadre de notre étude sur ce projet de loi.
     Je vais maintenant suspendre la séance pendant quelques minutes, le temps d'accueillir le prochain groupe de témoins.
(1200)

(1205)
    Nous reprenons nos travaux.
     Dans le groupe de témoins de la deuxième heure, nous accueillons par vidéoconférence, à titre individuel, M. André Gélinas, sergent-détective à la retraite, et Stéphane Wall, superviseur à la retraite, tous deux du Service de police de la Ville de Montréal.
     Vous disposerez d'un maximum de cinq minutes pour vos déclarations liminaires, après quoi nous passerons aux questions.

[Français]

    Je vous souhaite tous les deux la bienvenue.
    Monsieur Gélinas, je vous invite à faire votre allocution d'ouverture. Vous disposez de cinq minutes.
    Je suis André Gélinas, sergent-détective à la retraite. J'ai travaillé à la Division des renseignements du Service de police de la Ville de Montréal. On m'a demandé de comparaître devant vous aujourd'hui afin de vous faire part de mon expertise sur différents aspects du projet de loi C‑21.
    Avant d'aborder les sujets qui nous intéressent, je tiens à préciser quelques points. Ma présence ici est apolitique et non partisane. Depuis les deux dernières années, je suis analyste d'actualité policière dans différents médias, que ce soit à la télévision, dans la presse écrite ou à la radio. Je ne suis membre d'aucun lobby ni d'aucun groupe de pression. Durant la dernière année, j'ai rencontré des parlementaires fédéraux de tous les partis afin d'apporter mon expertise et mon appui à certains de leurs projets et de leurs initiatives.
    Le projet de loi C‑21, à mon humble avis, rate l'objectif très noble d'augmenter la sécurité de nos concitoyens en assurant un contrôle des armes à feu efficace, judicieux et basé sur une analyse pragmatique de la situation.
    Ce projet de loi laisse entendre qu'un gel de la vente et de l'importation des armes de poing légales pour le tir à la cible et destinées à des détenteurs de permis aura un effet considérable sur la situation sécuritaire qui se dégrade actuellement dans les grandes métropoles de notre pays.
    De surcroît, en ayant choisi de faire l'annonce publique du projet de loi en grande pompe à Montréal‑Nord, un arrondissement particulièrement touché par les gangs de rue, on sous-entend qu'il existe un lien causal entre la violence dans ce quartier et les armes de poing légales acquises légalement et utilisées pour des activités sportives sécuritaires et hautement encadrées. Or, cette affirmation est fausse. C'est le résultat d'un lobbyisme basé sur une analyse émotionnelle et idéologique, et certainement pas sur des faits observables par les policiers sur le terrain.
    Il est important pour vous, les parlementaires, de comprendre que cette situation n'aura certainement pas l'effet escompté ou annoncé. Dans une écrasante proportion, les armes de poing qui sont utilisées par les criminels et saisies par les forces policières lors de fusillades et d'exactions perpétrées par les gangs de rue, les motards criminels et la mafia italienne ont été illégalement acquises et sont originaires des États‑Unis, pays où la vente d'armes est pratiquement sans restriction, grâce à un droit constitutionnel.
    Seuls un durcissement considérable et réel du contrôle à la frontière et le rétablissement de l'application de la loi par la police dans certains territoires autochtones pourront nous faire espérer une amélioration. C'est la seule façon pour les corps policiers de venir à bout, un jour, du problème de l'approvisionnement en armes illégales, dont la demande augmente de jour en jour. Présentement, si ces mesures ne sont pas rapidement mises en place, nous ne serons jamais capables de maîtriser la situation et il y aura toujours plus d'armes qui entreront au pays que ce que nous serons capables de saisir. Ce serait comme tenter de vider le fleuve Saint‑Laurent à l'aide d'un seau.
    Ce projet de loi cible des armes légales qui sont utilisées par des citoyens répondant à des critères élevés de sélection et de formation imposés par notre gouvernement et sous la surveillance des corps policiers, alors que nous savons pertinemment que ce sont les armes de poing illégales qui sont le véritable problème. Aucun criminel digne de ce nom ne souhaite se procurer une arme de poing légale, et donc traçable. Ce n'est tout simplement pas dans son intérêt. On veut donc régler le problème des fusillades, mais on ne cible pas les bonnes armes. Ce projet de loi n'aura absolument pas l'effet qu'on lui prête, et la situation restera sensiblement la même ou se dégradera si on n'adopte pas des solutions pragmatiques et inspirées d'une analyse adéquate de la situation.
    De plus, on édicte des mesures de signalement des inquiétudes, c'est-à-dire le principe des drapeaux, afin d'assurer un suivi des propriétaires d'armes. C'est excellent et hautement souhaitable. Cependant, n'importe quel policier ayant le moindrement d'expérience opérationnelle sait pertinemment que cette façon de faire existe depuis des décennies. Les signalements ont toujours existé, de même que les saisies préventives et les suspensions de permis. En 1998, alors jeune constable, j'ai saisi préventivement des armes à feu lors d'interventions en matière de violence conjugale. Il n'y a donc rien de nouveau dans ce projet de loi et on ne réinvente absolument pas les façons de faire. Bref, il n'y a rien de nouveau sous le soleil.
    Par ailleurs, on propose de créer une nouvelle infraction criminelle pour quelqu'un qui modifierait un chargeur pour lui faire dépasser la capacité légale. Cette infraction est inutile, car la simple possession d'un chargeur à haute capacité est déjà sanctionnée par le Code criminel. Aucun criminel ne se spécialise dans la modification de chargeurs. Les utilisateurs le font eux-mêmes. C'est une modification très simple. Cette nouvelle infraction est une solution à un problème inexistant.
    On propose aussi de faire passer de 10 à 14 ans la peine maximale pour les individus qui seraient déclarés coupables de trafic d'armes à feu. Bien qu'à première vue, cela puisse sembler louable, aucun accusé ne s'est vu imposer la peine maximale actuelle de 10 ans pour cette infraction. Cette mesure n'aura aucun effet réel. C'est un autre bel exemple d'une mesure qui sera inefficace.
    Ensuite, on propose de permettre l'obtention d'un mandat d'écoute électronique pour de nouvelles infractions de possession d'armes à feu prévues aux articles 92 et 95 du Code criminel. Encore une fois, c'est une bonne idée sans effet réel. Ces enquêtes sont toujours entreprises parce que les armes en question sont reliées à d'autres infractions criminelles qui, elles, autorisent l'utilisation de l'écoute électronique.
    En dernier lieu, je souligne les effets négatifs sur les clubs de tir et les tireurs sportifs. Des emplois seront perdus et aucune relève ne sera possible pour ce sport.
(1210)
    Merci beaucoup de m'avoir écouté. Je suis disposé à répondre à vos questions.
    Merci, monsieur Gélinas.
    J'invite maintenant M. Wall à faire son allocution d'ouverture.
    Vous disposez de cinq minutes.
    Je suis un superviseur retraité du Service de police de la Ville de Montréal. Je collabore avec les médias et les élus pour expliquer le métier de policier et la réalité du terrain. Je suis un des trois membres fondateurs de la Communauté de citoyens en action contre les criminels violents, soit la CCACV, qui a proposé, le 26 janvier dernier, 16 actions aux différents paliers de gouvernement, dont le fédéral. Vous venez d'entendre André Gélinas, un autre membre fondateur de la CCACV. Mme Anie Samson, qui a été vice-présidente du comité exécutif de la Ville de Montréal, complète notre trio.
    Les victimes de crimes violents et leurs proches sont notre inspiration. Nous croyons qu’au Canada, les droits et libertés des victimes et de leurs proches en ce qui a trait à la vie, à la santé et à la sécurité devraient prévaloir sur les droits et libertés des criminels violents.
    Nous croyons qu'un législateur responsable doit adopter des lois et des règlements qui viseront les bonnes cibles, soit les criminels violents, notamment les membres de gangs de rue et du crime organisé, qui utilisent presque toujours des armes à feu illégales pour faire leurs fusillades, souvent à partir de véhicules en mouvement.
    À notre avis, lorsqu'il se montre complaisant devant les crimes graves des criminels qui sont en possession d'armes, qui déchargent une arme à feu ou qui braquent une arme à feu, comme il le fait avec le projet de loi C‑5, dans le cadre duquel nous avons également témoigné en comité, le législateur peut être assuré qu'il y aura deux répercussions sociales majeures. Premièrement, il y aura une augmentation du sentiment d'impunité, dont les membres de gangs de rue se vantent déjà sur les réseaux sociaux et dans leurs vidéos propageant la culture du gangsta-rap. Deuxièmement, il y aura une augmentation fulgurante du nombre de victimes qui sont déjà surreprésentées, selon les chiffres de Statistique Canada de 2021, et qui proviennent des mêmes milieux communautaires que les criminels violents. Cela inclut les personnes à la peau noire, qui représentaient 49 % des victimes d'homicide en 2021, et les peuples autochtones, pour lesquels le taux d'homicide était six fois plus élevé que pour les personnes non autochtones en 2021.
    Le projet de loi C‑21 ne vise pas la bonne cible. C'est une mesure superficielle qui ne fera aucunement diminuer le nombre de fusillades commises par des criminels violents, qui utilisent presque toujours des armes à feu illégales. Au lieu de frapper sur le bon clou, soit le trafic d'armes illégales qui passent par la frontière et les réserves autochtones, on frappe sur un clou qui ne changera rien. On s'attaque aux personnes qui possèdent des armes à feu et les permis nécessaires pour pratiquer en toute légitimité la chasse ou le tir sportif.
    Reprenons ensemble quelques mesures proposées par le législateur pour contrer le trafic des armes à feu.
    Premièrement, on fait passer de 10 à 14 ans la peine d'emprisonnement maximale pour les infractions liées aux armes à feu, dont le trafic. En réalité, les tribunaux ne donnent presque jamais la peine de 10 ans. Pourquoi donc donneraient-ils soudainement une peine de 14 ans? Par exemple, le jeune William Rainville, arrêté à Dundee en possession de près de 250 pistolets Polymer80 et de carcasses d'armes à feu, a écopé d'une peine d'emprisonnement de cinq ans, mais a été libéré à peine un an plus tard.
    Deuxièmement, le projet de loi veut interdire aux entreprises de faire la promotion de la violence armée dans la vente ou le marketing. Ne faudrait-il pas plutôt interdire aux membres de gangs de rue de faire la promotion de la violence armée sur leurs réseaux sociaux, où ils menacent leurs ennemis avec des armes à feu, exhibent leur impunité judiciaire, leur invincibilité, leur argent et leurs victimes de proxénétisme?
    Osons une comparaison. En utilisant la même logique que celle qui sous-tend le projet de loi C‑21, on pourrait décréter que, pour régler le problème de l'alcool au volant et empêcher ces criminels de la route de causer beaucoup de décès, la solution du législateur serait d'interdire à tout le monde de posséder une automobile, même aux automobilistes qui sont respectueux des règlements et qui ont un permis de conduire. On peut facilement constater l'incohérence entre le problème et la solution.
    Dans quelle proportion les armes de poing utilisées dans des crimes proviennent-elles du Canada? Les chiffres que je vais donner sont tirés d'une présentation en ligne de la GRC, en septembre 2022, au groupe national de travail sur les armes à feu. En 2021, 10 % des armes de poing utilisées dans les crimes provenaient du Canada. Elles étaient donc légales. Les 90 % restants étaient constitués d'armes provenant des États‑Unis, soit des armes dont on ne pouvait pas tracer la provenance ou des armes à feu fantômes conçues pour contourner la loi. C'est donc dire qu'en 2021, parmi tous les crimes impliquant des armes de poing, 9 crimes sur 10 ont probablement été causés par des armes de poing illégales. Depuis le début de 2022, 16 % des armes utilisées proviennent du Canada. Autrement dit, parmi tous les crimes impliquant des armes de poing, 8,4 crimes sur 10 sont causés par des armes de poing illégales.
    Comment le législateur pourrait-il s'attaquer à ces armes illégales? Il faudrait notamment assurer une meilleure surveillance à la frontière et en périphérie de la réserve d'Akwesasne. Pour ce faire, il faudrait ajouter des caméras, des drones, des appareils de surveillance électronique et des bateaux à haute vitesse, ainsi que des patrouilles et des postes de contrôle de l'Agence des services frontaliers du Canada, de la GRC, de la Sûreté du Québec et de la Police provinciale de l'Ontario. Il faudrait aussi augmenter le nombre d'inspections de véhicules sur les routes près de la frontière et le nombre d'inspections de tout type de véhicule à moteur sortant de la réserve autochtone par voie terrestre, maritime ou aérienne. De plus, il faudrait mettre en place une procédure obligeant l'ASFC à déposer des accusations criminelles pour chaque saisie. Actuellement, les poursuites judiciaires sont très rares. Par ailleurs, il faudrait augmenter la collaboration de la GRC avec les autorités américaines pour les enquêtes. Finalement, il faudrait mieux financer le réseau d'informateurs et de sources criminelles habitant près de la frontière et dans les réserves autochtones.
(1215)
    En conclusion, le législateur doit viser la bonne cible, et non les tireurs sportifs ou les chasseurs détenant les permis nécessaires. En plus des chasseurs, le législateur devrait au minimum exempter les tireurs sportifs qui s'entraînent régulièrement, qui sont inscrits dans un club de tir reconnu et qui font au moins une compétition par année pour garder leurs acquis.
    Je vous remercie de votre écoute.
    Merci, monsieur Wall.

[Traduction]

    Nous commencerons notre premier tour de questions avec Mme Dancho.
     Madame Dancho, vous avez six minutes.
    Merci, monsieur le président.

[Français]

    Je vous remercie beaucoup, messieurs Wall et Gélinas, de nous faire profiter de votre expertise en matière criminelle.
    J'ai plusieurs questions à vous poser à tous les deux.
    Depuis 2015, nous avons observé une hausse de 32 % du nombre de crimes violents à l'échelle du pays. Nous savons que les armes à feu utilisées pour commettre des crimes sont principalement des armes obtenues de façon illégale.
    Mes questions sont les suivantes.
    Premièrement, le projet de loi C‑21 pourra-t-il réellement contrer la hausse des crimes violents dans nos communautés?
    Deuxièmement, quelles sont les mesures qui pourraient réellement contrer cette hausse de crimes violents?
    Je vais répondre à la question, si vous le permettez.
    Dans votre préambule, vous avez tout à fait raison. En effet, le projet de loi C‑21 ne règlera absolument rien, parce que, comme l'a mentionné mon collègue M. Wall, la quantité d'armes de poing provenant du Canada est vraiment très faible par rapport à ce qui vient d'au-delà de la frontière. C'est tout à fait disproportionné.
    Les solutions sont quand même assez claires. Nous devons nous concentrer sur la frontière et sur certains territoires, notamment celui d'Akwesasne, où la police canadienne ne peut pas intervenir. Elle n'est pas autorisée politiquement à y aller. C'est effectivement de là que proviennent de nombreuses armes à feu.
    L'expérience policière nous démontre que les armes de poing illégales sont très présentes dans des villes comme Montréal et Toronto. Sur le plan géographique, les provinces du Québec et de l'Ontario ont comme dénominateur commun la réserve d'Akwesasne, qui touche aussi les États‑Unis, qui sont considérés comme le berceau mondial de la production d'armes à feu. Évidemment, nous serons toujours un peu victimes de cela, car la frontière canado-américaine est la plus longue frontière terrestre au monde séparant deux pays, et elle est non gardée. Évidemment, nous n'avons pas de capacité d'intervention aux États‑Unis. Autrement dit, nous n'avons pas la possibilité de les inciter à légiférer autrement pour régler leurs problèmes d'armes à feu.
(1220)
    Vous avez mentionné que 90 % des armes à feu obtenues illégalement provenaient des États‑Unis. Comment procède-t-on au traçage des armes à feu illégales qui sont saisies? Comment cela s'applique-t-il dans le cas des armes à feu fantômes?
    D'un point de vue technique, lorsqu'une arme à feu est saisie par la police et qu'elle porte un numéro de série, il suffit de 15 secondes pour déterminer si elle provient du Canada. Rappelons qu'au Canada, les armes de poing sont enregistrées depuis les années 1930. Si l'arme n'est pas enregistrée au Canada, nous pouvons alors communiquer avec nos partenaires américains et leur soumettre le numéro de série. Ce numéro va nous permettre d'obtenir, le cas échéant, le nom de la personne qui a acheté l'arme à feu d'un détaillant autorisé aux États‑Unis, c'est-à-dire d'un détaillant d'armes à feu détenant un permis fédéral américain. C'est ainsi que nous obtenons l'information que nous cherchons. Dans ce cas, nous avons alors la certitude que l'arme provient des États‑Unis.
    Or, le problème tient au fait qu'aucune infraction n'a été commise aux États‑Unis. Cette personne a acquis l'arme légalement et a pu la revendre à n'importe qui, sans aucune vérification d'antécédents, conformément à la loi aux États‑Unis.
    Lorsque nous saisissons des armes fantômes, évidemment, il n'y a pas de numéro de série. Cependant, ce qui nous permet d'être pratiquement certains qu'une telle arme provient des États‑Unis, c'est l'examen de son châssis. Le châssis est la poignée de l'arme, et c'est en fait ce qui constitue l'arme, au sens de la loi. La majorité des armes fantômes possèdent un châssis fabriqué par la compagnie Polymer80. Cette compagnie a pignon sur rue aux États‑Unis, mais la vente de ses produits est illégale au Canada. Donc, lorsque nous trouvons une arme fantôme qui possède un châssis de Polymer80, nous pouvons être certains qu'elle provient des États‑Unis.
    Encore une fois, c'est une façon de savoir pratiquement hors de tout doute que la très grande majorité des armes à feu provient de ce pays.
    Le projet de loi C‑5, présenté par les libéraux, élimine les peines d'emprisonnement obligatoires pour les crimes violents commis avec une arme à feu et permet à ces criminels d'être assignés à résidence dans nos communautés.
    Quelles conséquences les politiques comme celles contenues dans le projet de loi C‑5 ont-elles sur la sécurité des communautés au Canada? Cela contribue-t-il à la hausse des crimes violents au pays?
    En fait, le projet de loi C‑5 discrédite un peu notre système judiciaire et fait augmenter énormément l'arrogance des groupes criminels. Ces gens aussi font une lecture de l'environnement et reçoivent les conseils d'avocats. Or, lorsqu'ils se font dire qu'il n'y a plus de peines minimales obligatoires, l'élément dissuasif est complètement absent.
    L'autre élément à cet égard, c'est que les criminels regardent ce qui se passe. Quand je vous dis qu'ils font une lecture de l'environnement, c'est qu'ils examinent le projet de loi C‑21 et réalisent qu'on cible des gens qui possèdent des permis et qui, dans la très grande majorité des cas, ne posent pas de problèmes. Le message que cela envoie aux criminels, c'est que le gouvernement ne cible pas les bons problèmes. Il abolit les peines minimales obligatoires et continue d'intervenir à des endroits où les problèmes semblent inexistants.
    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Je vous remercie.
    Nous passons maintenant à M. Schiefke. Vous avez la parole pour six minutes, monsieur.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Monsieur Gélinas et monsieur Wall, j'aimerais d'abord vous remercier du travail que vous faites pour nos familles et nos communautés.
    J'aimerais aborder le sujet des armes fantômes. Comme on le sait, il y a une prolifération des armes fantômes en raison des imprimantes 3D et de l'accessibilité à des composantes d'armes à feu en ligne. Pour régler ce problème, on cherche des solutions, que ce soit par l'entremise du projet de loi C‑21 ou de la réglementation.
    Messieurs Gélinas et Wall, seriez-vous en faveur de mesures pour réglementer la possession, la vente et l'importation de composantes d'armes à feu, telles que les canons et les glissières, qui sont utilisées pour fabriquer des armes fantômes?
    Oui, tout à fait.
    Il est aberrant de savoir qu'une personne ayant certaines connaissances techniques peut aujourd'hui imprimer un châssis d'arme 3D, ou se le procurer de façon illégale, et qu'il peut aussi se procurer le canon, la glissière, les chargeurs, la détente, soit toutes les composantes périphériques qui permettent à une arme de fonctionner lorsqu'on a un châssis 3D.
    Si on avait vraiment voulu agir concrètement, le minimum aurait été d'exiger que les marchands au Canada vérifient le permis d'acquisition et de possession d'armes à feu de toute personne souhaitant se procurer des composantes d'armes à feu. En fait, aucun tireur sportif ou chasseur ne se serait opposé à une telle mesure, parce que c'est simplement de la grosse logique. Il est inadmissible que quelqu'un qui ne possède pas de permis d'acquisition d'armes à feu et qui n'est ni un chasseur ni un tireur sportif puisse se procurer des chargeurs et des composantes d'armes. Cela n'a aucun bon sens. C'est d'une telle évidence, qu'on se demande comment il se fait que cela n'ait jamais été fait auparavant.
(1225)
    Merci, monsieur Gélinas.
    Seriez-vous également d'accord sur de telles mesures, monsieur Wall?
    Oui.
    J'ai une deuxième question. Cela dit, je pense que M. Gélinas y a déjà répondu.
    Seriez-vous également favorables à une réglementation qui préciserait le nombre de composantes d'armes à feu que les propriétaires autorisés pourraient importer et qui limiterait aux détenteurs de permis la possibilité d'acheter des composantes d'armes à feu?
    Ma réponse est la même que celle que vient de donner M. Gélinas.
    Effectivement, c'est un impératif. Il faut absolument qu'un projet de loi s'attaque à cette question. On ne peut pas passer à côté de cela. Posséder un permis d'armes à feu amène certains privilèges. Si on fait comme si le problème n'existait pas et qu'on ne fait rien pour régler la situation, on va passer à côté du problème.
    Alors, ma réponse est oui.
    J'aimerais aussi aborder l'enjeu des fusils à air comprimé.
    De nombreux experts et policiers de partout au pays ont demandé l'interdiction de la vente de fusils à air comprimé, car ils ressemblent trop à de vraies armes à feu. C'est une proposition à laquelle s'opposent les utilisateurs de fusils à air comprimé, qui sont d'ailleurs nombreux dans la communauté de Vaudreuil—Soulanges. Ils aimeraient trouver une solution, mais ils jugent qu'une interdiction va trop loin.
    Une autre solution proposée serait de réglementer les fusils à air comprimé de la même manière que sont réglementées les armes à feu actuellement.
    Seriez-vous favorables à l'idée de limiter la vente de fusils à air comprimé aux personnes âgées de 18 ans et plus?
    Oui, vous avez tout à fait raison. Ce serait une solution ou, du moins, un bon début. Ce n'est pas normal que de jeunes adolescents puissent se procurer des armes à air comprimé. D'ailleurs, les policiers trouvent souvent ce type d'armes entre les mains des membres de gangs de rue, qui les utilisent justement parce qu'elles ressemblent à de vraies armes. Or, comme il a été mentionné par les intervenants précédents, cette confusion peut aussi amener un policier à faire feu.
    Cela dit, l'âge devrait être un critère. Je vous dirais même que je ne serais pas contre l'idée que les adultes qui utilisent des armes à air comprimé doivent aussi se procurer un permis d'armes à feu. Cela permettrait justement...
    Vous venez de répondre à ma prochaine question, monsieur Gélinas, alors je vous remercie.
    Qu'en est-il de vous, monsieur Wall?
    Je suis tout à fait d'accord, moi aussi. Je vais continuer sur la lancée de M. Gélinas.
    J'ai longtemps été superviseur de quartier et patrouilleur sur le terrain. Effectivement, il arrivait que nous recevions des appels et que nous interpellions des gens ayant en leur possession une arme à air comprimé qui était une imitation d'arme à feu. Pour les patrouilleurs, cela peut certainement occasionner de la confusion. Bien qu'on n'ait pas rapporté énormément de cas où des policiers avaient dû neutraliser une personne qui exhibait une arme à air comprimé, c'est déjà arrivé. Il faut absolument éviter ces situations.
    Un jeune de 16 ans qui a une arme à air comprimé à la ceinture pourrait simplement vouloir s'en débarrasser devant les policiers, sans nécessairement faire de gestes provocants. Comme l'analyse de la situation est une question de secondes, si l'arme ressemble beaucoup à une arme réelle, il peut arriver des accidents malheureux. C'est arrivé à quelques reprises dans l'histoire du Canada. Il faudrait donc éviter ces situations.
    Un peu plus tôt dans les débats, on a évoqué la possibilité de modifier la façon dont ces armes sont fabriquées, afin qu'elles ne ressemblent pas aux armes à feu originales. Il faudrait toutefois que la différence dans la fabrication soit vraiment grande. Même si on apposait des couleurs sur une arme factice ou une arme-jouet, un jeune pourrait simplement la repeinturer en noir, par exemple. Il faut donc des mesures beaucoup plus contraignantes.
    Peut-être faut-il aussi conscientiser les parents quant aux conditions particulières que leurs enfants doivent respecter lorsqu'ils utilisent des armes à air comprimé. Ce serait un pas de plus.
(1230)
    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Merci, monsieur Schiefke.

[Français]

    Madame Michaud, vous avez la parole pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Messieurs, je vous remercie d'avoir accepté notre invitation à venir témoigner devant le Comité. Nous vous sommes reconnaissants de mettre votre expertise à notre disposition. Vos positions semblent assez claires et assez similaires. Vous dites que le projet de loi C‑21 ne répond pas au problème du trafic des armes illégales, et je suis plutôt d'accord avec vous.
    Monsieur Wall, vous avez énuméré plusieurs autres solutions qui, à mon avis, ne se traduiraient pas nécessairement par un changement législatif. Investir davantage et affecter plus de ressources à la frontière, ce sont des choses qui peuvent être faites de façon parallèle.
    Monsieur Gélinas, vous avez mentionné les articles du projet de loi que vous jugiez inefficaces, notamment ceux concernant la modification des chargeurs et l'augmentation des peines maximales. J'ai envie de vous demander quels articles du projet de loi C‑21 vous appuyez ou trouvez véritablement utiles, mais je n'ai pas l'impression que vous me donneriez une très longue réponse.
    Alors, pour vous mettre sur une piste, je vous informe que j'ai envie de proposer un amendement au Comité, lorsque nous serons rendus à l'étude article par article du projet de loi, afin d'inclure dans le Code criminel une définition plus claire des armes d'assaut de type militaire. Étant donné la façon dont a procédé le gouvernement lorsqu'il a publié en 2020 un décret prohibant 1 500 modèles d'armes, il y a encore de ces armes sur le marché, notamment la carabine SKS, un modèle qui a été utilisé récemment pour tuer des policiers.
    Pensez-vous qu'on pourrait renforcer le projet de loi C‑21 en y incluant des dispositions sur les armes d'assaut, ou encore sur les armes fantômes et le traçage, comme on en a parlé un peu plus tôt? À votre avis, quels changements législatifs pourraient être nécessaires ou utiles, dans le cadre de ce projet de loi?
    J'invite M. Wall à répondre en premier. Ensuite, M. Gélinas pourra répondre aussi.
    Je vais répondre à la première partie de votre question.
    Lesquelles des modifications proposées dans le projet de loi ont du sens à nos yeux? Je vous dirais que ce sont les articles qui visent à donner plus de pouvoirs aux agents des services frontaliers lorsqu'ils étudient des dossiers d'immigrants qui entrent au Canada, que ce soit ceux qui passent par le chemin Roxham ou ceux qui attendent d'obtenir leur statut. Si certaines de ces personnes sont impliquées dans un crime commis au Canada, ce serait bien que les agents des services frontaliers aient rapidement accès à cette information lorsqu'ils traitent leur dossier. Ce sont des articles logiques qui pourraient être bénéfiques à moyen ou à long terme.
    C'est intéressant. Merci, c'est bien noté.
    Monsieur Gélinas, qu'en dites-vous?
    Comme M. Wall l'a expliqué, toutes les dispositions relatives à l'immigration, c'est-à-dire celles qui empêchent que des individus violents ayant utilisé des armes deviennent des citoyens de notre pays, sont incontournables. Nous nous devons de les saluer.
    Comme vous l'avez mentionné, je ne crois pas que ce projet de loi contienne grand-chose d'autre que des mesures superficielles et basées sur une analyse idéologique et émotionnelle. Je crois que beaucoup de choses pourraient être faites, notamment du renforcement à la frontière, comme nous en avons parlé. C'est un secret de Polichinelle: les policiers ne peuvent pas intervenir dans certaines réserves autochtones, où la règle de droit ne s'applique tout simplement pas. Les trafiquants ont le loisir de choisir l'endroit de la frontière, qui s'étend sur près de 6 000 à 7 000 kilomètres, où ils veulent faire entrer des marchandises illégales au Canada. Évidemment, il y a des endroits où c'est beaucoup plus facile, parce que la police n'y a pas accès et n'est pas autorisée politiquement à y intervenir. Il faut donc comprendre que les trafiquants vont favoriser ces endroits. Ils vont payer des membres du crime organisé sur ces territoires et ainsi s'assurer que leurs marchandises seront protégées. Nous avons beau nous mettre la tête dans le sable et faire comme si le problème n'existait pas, ce sont les armes qui passent la frontière par ces territoires qui tuent et blessent les gens dans les rues de Montréal et de Toronto, principalement.
(1235)
    Souhaitez-vous ajouter quelque chose, monsieur Wall?
    Oui, permettez-moi d'ajouter un dernier élément pour compléter la réponse de M. Gélinas.
    En tant qu'anciens policiers, nous comprenons la réticence des autorités à intervenir dans une réserve autochtone. Comme il y a eu des crises par le passé, le sujet est très délicat. Cependant, nous proposons de travailler en périphérie des réserves. Il faut s'assurer de bien surveiller toutes les routes qui mènent aux réserves et de faire énormément d'inspections. Nous suggérons d'augmenter le nombre d'inspections de véhicules qui sortent des réserves et s'en vont vers Toronto ou Montréal. Il faut également mener plus d'inspections sur les cours d'eau situés près des réserves et intercepter un plus grand nombre de bateaux. Il s'agit de donner aux policiers de la Police provinciale de l'Ontario, de la Sûreté du Québec et de la GRC qui patrouillent sur ces cours d'eau plus de moyens logistiques leur permettant d'intervenir.
    De plus, il faut conclure des ententes de collaboration avec les Américains. Nous savons pertinemment que, si un contrebandier d'armes à feu qui se trouve sur l'eau décide de se sauver de la police, une fois qu'il sera rendu aux États‑Unis, les policiers vont rebrousser chemin et abandonner leur poursuite.
    En résumé, il faut mieux collaborer, mettre en place les moyens logistiques nécessaires et travailler en périphérie des réserves, si nous n'avons pas l'intention de causer une crise politique au sujet des réserves autochtones. Il reste qu'il faut faire quelque chose de ce côté.
    Merci, madame Michaud.

[Traduction]

    Allez‑y, monsieur MacGregor, pour six minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
     Monsieur Gélinas, j'aimerais commencer par vous, s'il vous plaît.
     Dans votre déclaration liminaire, vous avez abordé de nombreuses parties du projet de loi C‑21. Vous avez mentionné le fait qu'il y a des dispositions relatives aux signaux d'alarme dans le Code criminel, et c'est vrai. Aux articles 109 et 110 existants, il y a des ordonnances d'interdiction obligatoires et des ordonnances d'interdiction discrétionnaires.
     Je pense que les témoignages que nous avons entendus sur l'ajout proposé par le projet de loi C‑21 avec ses signaux d'alarme sont probablement ce qui pose le plus de problèmes au Comité. Un certain nombre de témoins sont très préoccupés par le fait que les dispositions du projet de loi C‑21 vont injustement imposer à une personne qui pourrait être victime de violence liée aux armes à feu le fardeau de passer par un système judiciaire déjà surchargé.
     Nous avons certainement entendu les services de police nous dire quel est leur souhait principal: si une personne est menacée, elle doit toujours s'adresser à la police en premier. Dans notre groupe de témoins précédent, le chef Evan Bray, de l'Association canadienne des chefs de police, a déclaré qu'il fallait absolument faire appel à la police en premier. Toutefois, il voyait également d'un bon œil que d'autres moyens soient mis à la disposition des gens.
    Voyez-vous des cas où les dispositions du projet de loi C‑21 — ces nouvelles dispositions sur le drapeau rouge et le recours au système judiciaire — pourraient être préférables au recours à la police?

[Français]

    Comme vous l'avez mentionné, en pratique, la majorité des dispositions relatives au drapeau rouge existent déjà. Par exemple, quand une personne appelle au Centre des armes à feu Canada, une des premières choses qu'on lui demande, c'est si elle a des inquiétudes relativement à son conjoint ou à quiconque. Le cas échéant, elle sera immédiatement mise en communication avec les autorités compétentes.
    Cela dit, j'appuie pleinement la position des autres policiers qui ont comparu avant moi: en situation de danger, les premières personnes à joindre, ce sont toujours les policiers, assurément. Se présenter devant la cour pour tenter d'obtenir la suspension d'un permis d'armes à feu, comme le proposent ces nouvelles dispositions, prendrait un temps fou, et les tribunaux sont déjà débordés.
    Le problème que j'y vois, c'est que des gens peuvent se présenter à la cour pour expliquer les choses de bonne foi, mais on n'aura pas le point de vue des policiers. En effet, les policiers possèdent des informations auxquelles le juge n'a pas accès à ce moment. Par exemple, le juge n'a pas accès aux banques de données ou à l'expertise policière. Il devra donc se fier seulement à la personne qui est venue exposer ses inquiétudes.
    Enfin, je ne peux m'empêcher de souligner que ce dispositif pourrait aussi être utilisé à des fins mensongères ou pour exercer une vengeance, notamment lors de conflits entre ex-conjoints. Comme on le sait, toutes les façons sont bonnes pour nuire à un ancien conjoint, malheureusement. Ce pourrait être une façon de...
(1240)
    Merci, monsieur Gélinas.

[Traduction]

    Je suis désolé, mais je dois passer à une autre question. Je vous remercie de cette réponse.
     Monsieur Wall, j'aimerais m'adresser à vous.
     Dans votre déclaration liminaire, vous avez mentionné le fait que les tireurs sportifs qui appartiennent à des clubs et s'exercent régulièrement avec leurs armes de poing devraient être exemptés du projet de loi C‑21. Le chef Evan Bray, de l'Association canadienne des chefs de police, a confirmé la même chose. Il est d'avis qu'un gel des armes de poing est un moyen de réduire l'accès à ces types d'armes à feu, mais il appuie la capacité des propriétaires d'armes de poing respectueux de la loi de pratiquer leur sport.
     Je lui ai demandé si nous pouvons trouver un juste milieu en imposant des conditions d'adhésion plus strictes, en démontrant un besoin réel de l'arme de poing par une pratique régulière, etc. Avez-vous d'autres observations sur le terrain d'entente que nous essayons d'atteindre en ce qui concerne les dispositions du projet de loi C‑21?

[Français]

    En fait, je suis d'accord avec le chef Bray.
    Pour ce qui est des accommodements ou des amendements à apporter au projet de loi, si ce dernier devait être adopté tel quel, il faudrait à tout le moins des mesures d'adaptation pour les chasseurs et pour les tireurs sportifs. Les tireurs sportifs sont déjà membres d'un club de tir. Pourrait-on augmenter les critères nécessaires, par exemple exiger que les tireurs sportifs, en plus de leurs entraînements réguliers, participent obligatoirement à au moins une compétition de tir par année? Ainsi, les tireurs sportifs qui possèdent déjà un permis et qui pratiquent réellement leur sport pourraient être exemptés de l'ensemble des mesures comprises dans le projet de loi.
    Je reviens à la base: on a un projet de loi sur les armes de poing, mais est-ce bien là le problème à régler, au Canada? Le problème est connu et il faut s'y attaquer directement. Le problème est que, dans toutes les grandes villes canadiennes, neuf fois sur dix, les membres de gangs de rue et du crime organisé utilisent des armes illégales pour commettre leurs crimes. C'est donc sur cela que le législateur doit axer ses mesures.

[Traduction]

    Merci, monsieur MacGregor.
     Nous passons maintenant au deuxième tour. Encore une fois, ce tour devra être abrégé.
    La parole est à M. Shipley pour cinq minutes. Allez‑y, monsieur.
    Merci, monsieur le président.
     Merci à nos témoins d'être ici aujourd'hui, et merci pour les services que vous rendez depuis de nombreuses années.
     Je suis sûr qu'au cours des nombreuses années où vous avez travaillé, vous avez entendu dire à quel point il est difficile d'obtenir suffisamment de ressources pour faire votre travail, et cela n'a pas changé. Nous avons beaucoup entendu au cours de ces audiences que c'est de plus en plus difficile, alors j'aimerais avoir votre opinion à ce sujet, s'il vous plaît.
     En 2021, le Service de police de la Ville de Montréal a créé une nouvelle unité policière, l'équipe intégrée contre le trafic d'armes à feu. Entre février et août 2021, elle a effectué 19 perquisitions, procédé à 17 arrestations et saisi 27 armes illégales, ce qui est évidemment du bon travail.
     Pensez-vous que le projet de loi C‑21 pourrait donner lieu à une utilisation de ressources policières déjà limitées et pourrait en fait empêcher des équipes ciblées comme celle‑ci de faire leur travail en leur retirant des ressources?

[Français]

    Si vous le permettez, je vais répondre à cette question.
    Le projet de loi C‑21 ne répond absolument pas aux besoins de la police. Vous avez tout à fait raison sur ce point. Les policiers sont en manque d'effectifs. Chaque année, on ne parvient même pas à remplacer les policiers qui partent à la retraite. Lorsqu'on crée des unités spéciales pour répondre à des situations urgentes, on enlève des effectifs à d'autres unités qui sont jugées moins cruciales, mais qui sont, somme toute, importantes.
    Effectivement, les saisies des policiers doivent être saluées et encouragées. Cependant, on se rend compte qu'on ne prélève qu'une infime portion de toutes les armes qui entrent au pays. Comme mon collègue l'a mentionné, un individu a été intercepté, l'année dernière, alors qu'il avait 249 armes en sa possession. Vous savez, les criminels n'ont qu'à être chanceux une fois, tandis que nous, les policiers, devons être chanceux tout le temps. Évidemment, lorsqu'un individu est intercepté alors qu'il a 249 armes à feu en sa possession, on ne peut qu'imaginer la quantité astronomique d'armes qui entrent au pays sans être interceptées. Évidemment, en ce sens, nous serons toujours en déficit.
(1245)

[Traduction]

     Pensez-vous que l'une des conséquences négatives du projet de loi C‑21 est que nous pourrions assister à une augmentation des opérations de contrebande, puisqu'il ne serait pas possible d'acheter des armes de poing légales? Pensez-vous que cela pourrait entraîner une augmentation de la contrebande?
     Je vais peut-être demander à M. Wall de répondre à cette question.

[Français]

    Non, je ne pense pas que les mesures qui se trouvent dans le projet de loi actuellement auront une influence importante à cet égard.

[Traduction]

    Monsieur Gélinas, vous avez mentionné dans votre déclaration liminaire qu'aucun contrebandier n'avait reçu la peine maximale actuelle de 10 ans, donc ajouter des années ne fait vraiment rien. Je suis très intéressé d'entendre cela. C'est la première fois que je l'entends.
    Avez-vous d'autres données à ce sujet? Où avez-vous trouvé cette ressource? Quels types de peines sont infligées pour la contrebande?

[Français]

    Je n'ai pas de données précises, mais je peux vous en parler en me fondant sur mon expérience et sur mes discussions avec plusieurs collègues qui sont aussi des spécialistes en armes à feu et qui exercent toujours le métier.
    Je vous donne l'exemple du cas survenu l'an dernier, dont je parlais tout à l'heure. William Rainville a été condamné à quatre ou cinq ans de prison, mais n'a purgé qu'un an dans un pénitencier fédéral.
    Évidemment, les peines maximales prévues dans le Code criminel sont rarement infligées, pour ne pas dire presque jamais. Cela est imputable à la jurisprudence; les juges sont liés par les décisions antérieures. Le fait d'augmenter la peine maximale à 14 ans peut sembler très louable, mais comment peut-on penser que cette mesure aura un impact, alors qu'on n'inflige pratiquement jamais des peines de 10 ans?
    Je dirais que c'est la même chose pour n'importe quel acte criminel. Les peines maximales sont imposées seulement dans des cas d'exception.

[Traduction]

    J'aimerais adresser ma dernière question, dans le temps qui reste, à M. Gélinas et à M. Wall, car vous avez tous deux fait des observations très intéressantes. Vous les avez chacun formulées un peu différemment, mais dans vos déclarations liminaires, vous avez tous deux fait des observations très semblables.
     Monsieur Gélinas, vous avez dit que le projet de loi C‑21 devrait viser les armes réelles. J'espère que rien n'a été perdu dans la traduction, mais c'est ce que j'ai compris. M. Wall, vous avez dit que le projet de loi C‑21 ne visait pas la bonne cible. Peut-être pourriez-vous développer ces deux déclarations, messieurs.

[Français]

    Comme je l'ai déjà mentionné, seulement de 10 à 16 % des armes qui sont saisies à la suite d'infractions criminelles commises sont des armes de poing provenant du Canada. Pourtant, toutes les mesures du projet de loi ciblent des gens qui ont des permis, qui ont été sélectionnés et qui sont très rarement impliqués dans des crimes, bien que le risque zéro n'existe pas. Je pense qu'on rate la cible. On a aboli des peines minimales obligatoires pour les criminels et on ne prévoit pas de ressources à la frontière alors que c'est par là qu'entrent les armes: je pense qu'on ne cible tout simplement pas les bonnes choses.
    Pour ma part, je reviens...

[Traduction]

    Merci, monsieur Shipley.
     Monsieur Wall, vous pouvez terminer votre réponse rapidement.

[Français]

    Pour ma part, je reviens sur la comparaison avec les accidents de la route causés par des conducteurs en état d'ébriété, des criminels au volant. C'est un fléau. Chaque année, de nombreux décès sont causés par l'alcool au volant. Cependant, il serait complètement incohérent que le gouvernement décide de bannir des routes tous les véhicules et tous les bons conducteurs qui ont un permis de conduire.
    Il faut cerner le problème et trouver la solution qui est la bonne, et non pas viser l'ensemble d'une population.
(1250)
    Merci, monsieur Shipley.

[Traduction]

     Nous passons maintenant à M. Van Bynen pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Avant de poser mes questions, je veux être absolument certain que les preuves fournies ici et examinées par ce comité sont réellement fondées sur des faits et non sur des opinions. À mon avis, il n'y a aucune preuve d'anarchie dans les réserves. En fait, les services de police ont témoigné sur le sujet des armes à feu et des gangs, et rien ne prouve qu'il y ait plus d'anarchie dans les réserves que dans n'importe quelle zone urbaine ou population. En outre, rien ne prouve qu'il y ait une épidémie de crimes commis avec des armes à feu par des immigrants qui traversent à Roxham Road. Je veux simplement m'assurer que ce compte rendu présente des faits réels et pas seulement des opinions.
     Cela dit, je vais poser une question à M. Wall.
     Le conseil municipal de la Ville de Montréal a adopté une mesure d'abord proposée par votre organisation, la Communauté de citoyens en action contre les criminels violents, ou CCACV, pour créer une ligne d'écoute pour les parents. Ayant à l'esprit que la prévention est importante, cette ligne d'écoute visait à s'assurer que s'il y avait un risque que les enfants sombrent dans la violence, il y avait de l'aide pour eux.
     Pensez-vous qu'il serait utile d'avoir ce type de projet à l'échelle nationale?

[Français]

    Je vous remercie de la question. Je vois que vous avez fait des recherches.
    Effectivement, le 26 janvier dernier, la CCACV a envoyé deux lettres aux médias et donné par la suite une conférence de presse pour proposer certaines mesures aux trois paliers de gouvernement afin de contrer la violence armée. Nous avons présenté des mesures de prévention et des mesures de répression.
    Par exemple, en matière de prévention, une des premières mesures que nous avons proposées visant la Ville de Montréal a été acceptée dans les trois semaines qui ont suivi notre conférence de presse. Il s'agit d'une ligne d'écoute, d'entraide et d'accompagnement pour les parents qui voient leurs enfants sombrer dans la violence.
    En réalité, les parents ne suivent pas la technologie à la même vitesse que leurs enfants. Les enfants sont en avance; ils utilisent les réseaux sociaux et ils font des tractations et du réseautage que les parents ne sont pas capables de suivre. Cependant, il peut arriver qu'un parent se rende compte que son enfant a des sommes d'argent qu'il n'avait pas auparavant, qu'il commence à ne plus répondre à ses consignes ou à celles de la maison, qu'il présente un changement de comportement ou d'attitude ou qu'il dégage une odeur associée à la consommation de stupéfiants. Dans ce genre de situations, le parent se sent souvent démuni. S'il y avait une ligne d'écoute gérée par un centre spécialisé, avec des intervenants, les parents pourraient composer ce numéro et recevoir des conseils.
    La Ville de Montréal est en train d'analyser la situation pour déterminer quel organisme gérera cette ligne d'écoute. Nous espérons que l'organisme sera choisi dans les prochaines semaines ou les prochains mois et qu'il y aura une campagne de publicité afin d'informer les parents de l'existence de ce centre. Ces ressources pourront les aider à comprendre les enjeux reliés aux jeunes avant qu'ils ne deviennent des criminels violents. C'est un choix à faire. Nous devons aider les parents à agir de façon responsable dès le plus jeune âge de leur enfant. Ils doivent être à l'écoute. Si jamais ils voient l'état de leur enfant se dégrader et qu'ils se tournent vers ce centre pour recevoir des conseils, cela permettra d'éviter que beaucoup de jeunes s'enfoncent dans la criminalité.

[Traduction]

    Approuveriez-vous l'idée que le gouvernement du Canada investisse dans des organismes communautaires de première ligne qui pourraient aider à assumer le fardeau de la sécurité communautaire? Par exemple, appuyez-vous l'investissement d'environ 565 millions de dollars à l'appui de 684 interventions financées dans le cadre de la stratégie nationale pour la prévention du crime?

[Français]

    Oui, tout à fait. Il faut investir en prévention.

[Traduction]

    Appuieriez-vous les 122,7 millions de dollars qui ont soutenu 47 projets de prévention et de déjudiciarisation des gangs, financés par le Fonds de lutte contre les activités des gangs de jeunes, depuis 2017?
     Appuieriez-vous également l'investissement de 250 millions de dollars que le gouvernement a fait par l'entremise du Fonds pour des collectivités plus sûres, qui fournit un financement direct aux municipalités pour renforcer les efforts locaux et contrer les conditions sociales qui mènent à des comportements antisociaux?
     Est‑ce que tous ces programmes ont un sens pour vous, monsieur?
(1255)

[Français]

    Je ne les connais pas tous, mais je dirais que tous les investissements en prévention sont nécessaires.
    D'après ce que nous connaissons des organismes communautaires, c'est le fait que le financement ne soit pas récurrent qui pose problème. Il faut vraiment que les gouvernements accordent à des projets du financement à long terme, plutôt que pour un an ou deux seulement. Ainsi, les organismes ne seraient pas obligés de toujours recommencer le processus des demandes de subventions. Le financement doit être récurrent et assorti d'une obligation de rendre des comptes. C'est très important.

[Traduction]

    Je vous remercie pour cela.
     Je pense que la durabilité de ces organisations est importante.
    Merci, monsieur Van Bynen.

[Français]

    Madame Michaud, vous avez la parole pour deux minutes et demie.
    Merci, monsieur le président.
    Messieurs, j'aimerais reprendre là où nous nous sommes arrêtés tout à l'heure, lorsque nous parlions de la question plutôt délicate des interventions dans les communautés autochtones.
    À plusieurs reprises, j'ai proposé au ministre de la Sécurité publique de mettre en place, si cela n'existait pas déjà, une espèce d'escouade mixte composée notamment des corps policiers que vous avez mentionnés un peu plus tôt, à savoir la Sûreté du Québec, la Police provinciale de l'Ontario, la police d'Akwesasne, sans oublier la police de New York. Comme on le sait, les territoires autochtones sont très complexes, alors plusieurs personnes doivent travailler ensemble, et cela inclut aussi les agents des services frontaliers.
    Cette escouade pourrait être créée un peu à l'image de la stratégie québécoise CENTAURE. Le gouvernement du Québec a investi dans cette stratégie et a fait d'autres investissements qui semblent plus concrets dans l'imaginaire des Québécois. J'ai effectivement l'impression que c'est plus concret lorsqu'on dit qu'on achète, par exemple, un bateau pour permettre aux policiers de faire de la patrouille sur les cours d'eau, parce que les armes peuvent arriver par voie fluviale, ou encore qu'on achète une motoneige, parce qu'il se fait quand même du trafic d'armes en hiver.
    Cependant, il faut se rappeler que le contrôle de la frontière est de compétence fédérale. Alors, ne serait-ce pas plutôt au gouvernement fédéral de faire ce genre d'investissements, de créer ce genre d'escouade mixte où tous les intervenants concernés doivent se parler? Je crois néanmoins que ce qu'a fait le Québec est très bien, mais ne serait-ce pas plutôt ce genre de mesure que devrait prendre le gouvernement fédéral? J'aimerais obtenir vos commentaires à cet égard.
    Évidemment, la frontière est de compétence fédérale, de même que tout ce qui touche le monde autochtone.
    J'ai entendu un des intervenants dire qu'il n'y avait aucune preuve que la loi ne s'appliquait pas dans les réserves. À mon avis, c'est une insulte à l'intelligence des policiers. J'aimerais me souvenir d'une opération de saisie d'armes à feu dans une réserve, mais j'en suis incapable.
    Vous avez effectivement raison de dire que la réponse passe par la création de groupes mixtes et multipartites. Par souci d'acceptabilité sociale, nous devons intégrer la police autochtone aux forces fédérales, municipales et provinciales. Comme nous manquons d'effectifs, l'union fait la force, et les gens pourraient ainsi apporter toute leur expertise.
    Permettez-moi de compléter la réponse.
    Le Québec a effectivement lancé une bonne stratégie. Nous avons un bateau, une motoneige et six policiers autochtones de plus pour la réserve d'Akwesasne. Ce n'est toutefois pas suffisant, étant donné que le cours d'eau est large et que les contrebandiers autochtones possèdent des bateaux à haute vitesse. Donc, lorsque le bateau de la police s'éloigne d'un côté, les contrebandiers filent à toute vitesse de l'autre côté en emportant leur chargement. Il est question ici d'armes à feu, mais il s'organise aussi d'autres types de trafic entre les contrebandiers autochtones, le crime organisé et les gangs de rue, dont le trafic de stupéfiants. Ces gens travaillent ensemble. Or, les premières victimes des crimes commis par les contrebandiers autochtones, bien que ces derniers représentent une minorité parmi la communauté, ce sont les Autochtones qui demeurent dans la réserve. Il faudrait donc penser à ces victimes au moment de créer les lois et les stratégies communes que vont appliquer les différents corps de police.
    Merci, madame Michaud.

[Traduction]

    Nous passons maintenant à M. MacGregor pour les dernières questions.
     Vous avez deux minutes et demie.
    Merci, monsieur le président.
     Monsieur Gélinas, j'aimerais me tourner vers vous.
     J'ai lu un mémoire de l'Association canadienne des médecins d'urgence, et ils ont noté que le Canada a l'un des taux les plus élevés de suicide par arme à feu parmi les pays développés. Environ 75 % des décès par arme à feu au Canada sont en fait des suicides. Cela éclipse complètement les décès par homicide. Bien sûr, ils notent aussi que les armes à feu sont une méthode particulièrement meurtrière. Elles ont un taux de létalité de plus de 90 %, ce qui signifie que neuf tentatives de suicide par arme à feu sur dix sont réussies.
     Cela rejoint le thème de la loi du drapeau rouge. L'Association canadienne des médecins d'urgence a toujours demandé la mise en place d'un mécanisme de point de service permettant aux médecins d'urgence de signaler directement aux autorités policières toute personne dont l'état de santé augmente considérablement le risque d'utilisation inappropriée d'une arme à feu et le risque de blessure ou de décès par arme à feu.
     D'après votre expérience, quelle est actuellement la relation entre la police et le personnel médical? Que pensez-vous de ce qu'ils demandent? De quelle façon nos lois doivent-elles être renforcées pour que les médecins puissent signaler plus efficacement à la police qu'une personne risque d'utiliser une arme à feu, que ce soit contre elle-même ou contre une autre personne?
(1300)

[Français]

    La question est appropriée. J'ai moi-même un ami médecin qui a dû faire ce genre de signalement, et cela a été très ardu. Ce que je propose, c'est qu'une ligne directe soit mise à la disposition des professionnels de la santé. Il leur serait alors possible de communiquer directement avec les autorités compétentes pour qu'on évalue si une intervention est justifiée et, le cas échéant, pour qu'on la planifie.
    Dans la situation dont je vous parle, mon ami a dû passer par environ 10 personnes avant qu'un patrouilleur ne l'appelle enfin, et celui-ci ne comprenait pas trop la situation. Il s'apprêtait à aller rencontrer immédiatement la personne, alors que cette situation mettait le médecin en danger. Évidemment, on se doit de protéger la personne qui est à l'origine de la dénonciation. Pour leur part, les médecins ne sont plus tenus au secret professionnel, selon le Collège des médecins du Québec, lorsqu'il y a une raison de croire qu'il y a un danger lié à des armes à feu.
    Je crois qu'il doit y avoir un canal privilégié pour que les médecins puissent communiquer directement avec les autorités compétentes, sans attendre et sans être renvoyés à une personne et à une autre. Il faut qu'ils puissent tout de suite tomber sur une personne qui connaît effectivement le régime des permis ainsi que les diverses possibilités d'intervention.

[Traduction]

    Merci, monsieur MacGregor.
     Merci à tous les témoins d'avoir partagé leur temps et leur savoir expert avec nous aujourd'hui et de nous avoir aidés dans notre étude. Cela met fin à notre réunion. Je vous remercie tous de votre temps et de votre attention.
     Sur ce, la séance est levée.
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication
ParlVU