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CACN Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité spécial sur la relation entre le Canada et la République populaire de Chine


NUMÉRO 006 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 1er novembre 2022

[Énregistrement électronique]

(1835)

[Traduction]

    La séance est ouverte. Bienvenue à la sixième réunion du Comité spécial de la Chambre des communes sur la relation entre le Canada et la République populaire de Chine.
     Conformément à l'ordre de renvoi du 16 mai 2022, le Comité se réunit pour étudier les relations entre le Canada et la République populaire de Chine, mettant l'accent sur les relations entre le Canada et Taïwan.
     La réunion d'aujourd'hui est en format hybride, conformément à l'ordre de la Chambre du 23 juin 2022. Les membres participent en présentiel, dans la salle, et à distance à l'aide de l'application Zoom.
     J'ai quelques observations à faire avant que nous entamions la séance de ce soir.
     Avant de prendre la parole, veuillez attendre que je vous nomme. Ceux qui participent par vidéoconférence doivent, avant de parler, cliquer sur l'icône du microphone pour activer celui‑ci et le mettre en sourdine lorsqu'ils ne parlent pas.
     En ce qui concerne l'interprétation, ceux qui sont sur Zoom peuvent choisir au bas de leur écran — petite icône de planète — entre le parquet, l'anglais ou le français. Ceux qui sont dans la salle peuvent utiliser l'oreillette et sélectionner le canal désiré.
     Je vous rappelle que toutes les interventions doivent être adressées à la présidence. Les membres dans la salle qui souhaitent prendre la parole doivent lever la main. Les membres sur Zoom doivent utiliser la fonction « lever la main ». La greffière et moi-même gérerons l'ordre des interventions du mieux que nous pourrons, et nous vous remercions de votre patience et de votre compréhension à cet égard.
     Membres du Comité, nous aurons une très courte séance de travail à la fin des témoignages ce soir. Il y a un point, un seul, au calendrier que nous devrons peut-être modifier.
     J'aimerais maintenant souhaiter la bienvenue à nos témoins de la première section.
     Du Bureau économique et culturel de Taipei au Canada, nous accueillons M. Harry Ho‑jen Tseng, représentant, Bryan Chiao‑Lu Ping, directeur général, et Ethan Han‑Ming Chen, directeur adjoint.
     Monsieur Tseng, vous avez cinq minutes pour votre déclaration liminaire. Bienvenue au comité sur les relations sino-canadiennes.
     Honorables président, vice-présidents et membres du Comité spécial, bonsoir.
     C'est un grand plaisir pour moi d'être invité à participer à l'audience d'aujourd'hui. À mon avis, le moment d'une telle audience ne saurait être plus propice, surtout à la suite du 20e congrès du Parti communiste chinois, qui s'est terminé il y a moins de deux semaines. Le rapport politique présenté par M. Xi Jinping le 16 octobre a envoyé un message glacial à tous les membres du groupe aux vues similaires, et je voudrais expliquer pourquoi des liens plus étroits entre Taïwan et le Canada seront dorénavant plus importants que jamais.
     Le Parti communiste chinois a vu en Xi un dirigeant de priorité absolue pour son troisième mandat et au‑delà. La nouvelle composition du comité permanent du politburo a tué tous les espoirs de perspectives économiques pour la Chine et le monde. La politique réaffirmée de zéro COVID continue à menacer sérieusement la croissance, il n'y a aucun espoir d'assouplir les règlements sur les plateformes Internet et l'industrie immobilière ne voit aucun revirement de politique. En bref, l'idée de prospérité commune de Xi va éloigner encore plus la Chine du marché mondial. Si les débats se poursuivent sur la meilleure stratégie à adopter face à la Chine — découplage ou engagement —, je pense que la réponse est de plus en plus claire.
     Pendant des années, la Chine a fixé des objectifs ambitieux pour sa croissance économique, mais à la fin du congrès, son porte-parole a déclaré que les chiffres de croissance ne seraient plus importants dorénavant. Le Parti communiste chinois a préféré privilégier l'égalité par opposition à la prospérité. En fait, cela signifie le retour à un communisme qui n'est pas loin de celui de Mao, et la Chine accélère son découplage au nom de l'autosuffisance et de l'autodépendance. Le Canada, comme tout autre pays du monde, devrait prendre garde à ce qui se dessine à l'avenir.
     Taïwan et le Canada sont des partenaires aux vues similaires. Nous partageons les mêmes valeurs: la liberté, la démocratie et le respect des droits de la personne et la primauté du droit. Nos valeurs et croyances communes sont les piliers de nos liens globaux et se manifestent dans divers aspects de nos relations bilatérales, notamment nos actions à l'appui de l'Ukraine dans sa lutte pour la liberté.
     Comme vous le savez, la paix et la stabilité dans le détroit de Taïwan ont été remises en question récemment. La Chine a utilisé la visite de la présidente de la Chambre des représentants des États‑Unis, Mme Pelosi, comme prétexte pour lancer un exercice militaire de grande envergure visant à intimider Taïwan. En ce moment crucial, la ministre des Affaires étrangères, Mélanie Joly, la ministre de la Défense nationale, Anita Anand et la ministre du Commerce, Mary Ng se sont levées respectivement pour exhorter la Chine à s'abstenir d'intensifier ses menaces militaires. Nous sommes reconnaissants de ces gestes opportuns de la part du Canada, ainsi que de ceux d'autres pays aux vues similaires, et nous pensons que le Canada devrait en faire davantage.
    D'une part, il est mutuellement bénéfique de promouvoir le commerce et l'investissement entre le Canada et Taïwan et de bâtir ensemble une chaîne d'approvisionnement résiliente entre démocraties. Nos échanges bilatéraux ont dépassé les 10 milliards de dollars canadiens en 2021, soit une croissance de 39 % par rapport à 2020. Taïwan se classe au cinquième rang des partenaires commerciaux du Canada en Asie, et c'est le seizième marché d'exportation du Canada dans le monde. Par conséquent, l'adhésion de Taïwan au PTPGP et les accords de promotion et de protection des investissements étrangers, ou APIE, avec le Canada porteront sans aucun doute nos relations économiques à un nouveau sommet et renforceront la résilience de notre chaîne d'approvisionnement.
     Pour dissuader les États autoritaires de prendre des mesures irresponsables, le Canada peut réitérer et démontrer son engagement ferme à maintenir la paix et la stabilité dans le détroit de Taïwan. Par la présente, j'exhorte le gouvernement canadien à se ranger du côté de Taïwan et à soutenir notre position comme suit.
(1840)
    Premièrement, Taïwan souligne que le maintien de la paix, de la stabilité et de la prospérité dans la région indopacifique est d'un intérêt considérable pour les pays de la région. Elle exhorte le Canada à continuer de soutenir le développement de relations pacifiques de part et d'autre du détroit de Taïwan grâce à des mécanismes bilatéraux et multilatéraux constructifs.
     Deuxièmement, Taïwan insiste sur le fait que tous les différends dans la région indopacifique devraient être réglés par des moyens pacifiques fondés sur le droit international, et qu'aucun pays ne devrait prendre de mesures unilatérales pour modifier le statu quo. Elle demande au Canada d'exhorter la République populaire de Chine à s'abstenir de toute nouvelle action militaire de l'autre côté du détroit de Taïwan.
    Monsieur Tseng, cela conclut votre temps de parole. C'était, en fait, un peu plus que les cinq minutes prévues pour votre déclaration liminaire. Si vous avez d'autres points à faire valoir, vous pourrez les ajouter à...
    Monsieur le président, j'invoque le Règlement. Pourrais‑je obtenir le consentement unanime pour que le représentant termine sa déclaration?
    Est‑ce que cela nous convient?
    Des députés: D'accord.
     Le président: Monsieur Tseng, veuillez poursuivre.
    Merci.
    Troisièmement, Taïwan aspire à participer pleinement aux organisations et aux activités internationales pertinentes pour apporter les contributions qui lui reviennent. Elle demande instamment au Canada de continuer à aider Taïwan à cet égard et de contribuer à la promotion d'un dialogue interprofessionnel propice à la paix, à la stabilité et à la prospérité de la région.
     Je vous remercie tous. Je serai heureux de répondre à vos questions.
    Merci beaucoup, monsieur Tseng.
    Avant d'entreprendre notre première série de questions, j'aimerais souhaiter la bienvenue à M. Kurek au Comité ce soir. Vous êtes ici pour un bon moment, pas pour longtemps, si j'ai bien compris. J'espère que nous vous ferons passer un bon moment ce soir.
     Pour nos six premières minutes, nous donnons la parole à M. Chong.
    Merci, monsieur le président.
     Merci, représentant Ho‑jen Tseng, de comparaître devant notre comité.
     Vous avez mentionné dans votre exposé qu'il y a un débat en cours sur le découplage ou l'engagement des démocraties envers la République populaire de Chine, et que la réponse devient de plus en plus manifeste.
     Croyez-vous qu'il est temps pour des démocraties comme le Canada et Taïwan de se découpler économiquement de la République populaire de Chine, particulièrement dans les cinq domaines sensibles que sont les minéraux essentiels, les semiconducteurs, la biotechnologie, les télécommunications et l'intelligence artificielle?
    À mon avis, le découplage est en cours, qu'on le veuille ou non, et une partie de ce découplage vient de Chine, comme l'indique très clairement le rapport politique du 20e Congrès du parti. Même s'il est en cours depuis quelques années, il se poursuit.
     Je pense qu'il n'est que sage de se préparer à ce que le découplage économique se rapproche et s'accélère.
    Je vous remercie de cette réponse.
     Le 15 octobre, dans une entrevue accordée au Toronto Star, vous avez conseillé aux dirigeants mondiaux de faire attention de ne pas accorder de crédibilité à l'argument de la République populaire de Chine selon lequel les récentes visites à Taïwan de législateurs étrangers, auparavant considérées comme routinières, sont maintenant de la provocation.
     De quelle manière les chefs de gouvernement ont-ils accordé de la crédibilité à l'argument de la RPC selon lequel les visites de législateurs, tels que ceux de la Chambre des communes canadienne, avaient pour but de provoquer la RPC?
(1845)
    À mon avis, les visites de parlementaires à Taïwan — en provenance du Canada ou d'autres pays — sont une réalité depuis de nombreuses années. Elles ne se sont arrêtées qu'à cause de la pandémie et parce que les contrôles frontaliers rendaient difficile une telle routine. Comme la plupart des pays du monde décident de vivre avec le virus et de lever les contrôles aux frontières, je pense que nous verrons davantage de délégations parlementaires venir à Taïwan pour démontrer leur soutien à ce pays.
    Bien sûr, la visite des parlementaires canadiens il y a quelques semaines s'est révélée être un grand succès. À mon avis, dans les médias ici et à Taïwan, tout est très positif, à l'exception de certaines réponses officielles de l'ambassade de Chine ici. Il est très clair, je crois, que leur objectif est de promouvoir le commerce et les investissements avec Taïwan. Le programme suivi à Taïwan a très bien démontré notre objectif.
    Croyez-vous que ces visites réduisent le risque d'une guerre entre la République populaire de Chine et Taïwan, autrement dit qu'elles augmentent le coût pour la Chine de déclencher une telle guerre?
    Je le crois. Les visites de dignitaires ou de politiciens étrangers à Taïwan pour montrer leur soutien sont, je suis désolé de le dire, quelque chose que la RPC n'aime pas. Si elle veut mettre fin à ce type de visites, c'est qu'elle ne veut pas que le monde montre son soutien à Taïwan. Elle croit qu'un soutien accru à Taïwan encouragera peut-être Taïwan à opter pour l'indépendance.
     Cela ne respecte absolument pas ce qui se passe à Taïwan. Ce n'est pas la politique du gouvernement actuel, et ce n'était même pas la politique du gouvernement précédent, que Taïwan cherche à obtenir l'indépendance en droit. Ce n'est pas notre politique.
    J'ai une dernière question.
     Vous avez dit récemment que le président Xi, qui vient d'obtenir un troisième mandat de cinq ans, chose sans précédent, utilisera ce troisième mandat pour forcer Taïwan, par des moyens militaires, à s'asseoir à la table des négociations. Comme vous le savez, le Canada a promis des discussions exploratoires avec Taïwan sur un accord de promotion et de protection des investissements étrangers en janvier dernier, il y a 10 mois, mais il n'a pas encore dit s'il est prêt à entamer ces discussions. Vous avez demandé à Ottawa d'entamer des négociations sur le libre-échange avec Taïwan pour démontrer son soutien à Taïwan.
     Pouvez-vous nous dire à quel point il est important que ces deux choses commencent — c'est‑à‑dire les négociations sur un accord de promotion et de protection des investissements étrangers et les pourparlers sur le libre-échange —, non seulement pour le bénéfice économique mutuel de nos deux pays, mais aussi parce qu'elles augmentent le coût pour la République populaire de Chine d'envahir Taïwan?
    Il y a à Taïwan deux piliers qui soutiennent le développement continu du pays: le développement économique et le développement national dans son ensemble. Il s'agit de notre croissance économique. Une croissance économique robuste est très importante pour Taïwan, car elle nous aidera à mieux bâtir nos capacités d'autodéfense. C'est pourquoi nous insistons tant sur le fait que l'accord sur la promotion et la protection des investissements étrangers entre nos deux pays et le partenariat transpacifique global et progressiste entre les partenaires transpacifiques sont très importants pour Taïwan. Nous avons travaillé pratiquement seuls pour développer une croissance économique robuste, mais nous entrons dans une nouvelle ère où il sera de plus en plus difficile de le faire seuls. Nous devons travailler avec des partenaires, en particulier des partenaires partageant les mêmes idées.
     L'APIE, l'accord sur la promotion et la protection des investissements étrangers, est, en quelque sorte, un accord de libre-échange sous un autre nom. C'est manifestement important pour nous. Cela va de soi. Il y a aussi le PTPGP. Nous avons demandé à nous joindre au PTPGP en septembre de l'année dernière. Il s'agit d'une norme élevée pour un bloc commercial, plus élevée que celle établie par l'Organisation mondiale du commerce...
(1850)
    Monsieur Tseng, je dois vous interrompre. M. Chong n'a plus de temps pour ses questions.
     Nous passons maintenant à M. Fragiskatos pour six minutes ou moins.
    Monsieur, il me semblait que vous étiez à la fin de votre réponse. Si vous voulez terminer, allez‑y, je vous en prie.
    Non, c'est bon.
    Bien.
     Dans votre déclaration liminaire, vous avez parlé de chaînes d'approvisionnement résilientes entre les démocraties. Je crois que c'est un point très important et convaincant.
     Je me demande si vous pourriez nous en dire plus sur la façon dont les relations entre le Canada et Taïwan, particulièrement les relations économiques, pourraient s'intégrer, la façon dont les chaînes d'approvisionnement pourraient s'imbriquer davantage et la façon dont cela pourrait se produire dans les relations entre nos deux pays.
    Je ne suis pas économiste, mais si j'ai bien compris, la ministre Champagne a mentionné il y a quelques jours à peine la construction d'une ceinture économique de New York à Montréal. Je crois qu'elle a vu la force de Montréal en tant que centre de conception d'intelligence artificielle. Cette nouvelle ceinture économique s'intéresse peut-être aux véhicules électriques.
     Je n'ai compris que récemment que les voitures traditionnelles à combustibles fossiles que nous conduisons ne requièrent que 18 puces, mais que chaque véhicule électrique, ou VE, a besoin de 250 puces. Ce besoin en puces est 13 fois supérieur à celui d'une voiture traditionnelle.
     Vous êtes très doués pour l'écologie de l'IA, en combinant différentes IA dans un très beau design. Nous sommes très bons dans la fabrication de puces. Je crois qu'il y a là un grand potentiel de coopération. Si nous pouvons travailler ensemble en utilisant les points forts de la fabrication de puces de Taïwan et vos points forts sur le plan de l'IA de conception, nous pouvons porter nos relations économiques à un nouveau sommet.
    C'est un point très intéressant, et il est lié à ma deuxième question, qui concerne la deuxième voie de la diplomatie, comme on l'appelle parfois, ou les liens de citoyen à citoyen qui peuvent parfois renforcer les relations.
     Pouvez-vous nous en parler, ainsi que des liens qui existent dans le domaine de l'éducation et des affaires? Je crois également savoir que le Canada et Taïwan s'engagent sur les questions autochtones. Je me demande si vous pouvez en parler et donner votre avis. Dans quelle mesure cela pourrait‑il contribuer à stimuler l'entrelacement des chaînes d'approvisionnement? Vous avez donné un exemple précis, mais je pense que la deuxième voie de la diplomatie est toujours utile pour faire avancer les grands objectifs.
    Je trouve cela très inspirant. La diplomatie interpersonnelle, ou ce que vous appelez la deuxième voie de la diplomatie, est l'épine dorsale des relations. Vous ne pouvez pas avoir de relations politiques sans relations interpersonnelles. Elles seraient faibles et vides.
     Cette diplomatie ou cet engagement interpersonnel a en quelque sorte été affecté par la pandémie. Si nous regardons seulement deux ou trois ans en arrière, nous serions perplexes de voir à quel point nos contacts de citoyen à citoyen ont changé. Avant la pandémie, le nombre de touristes taïwanais au Canada et vice versa augmentait. C'est un peuple qui est si bien accueilli et si bien reçu à Taïwan. À Taïwan, il est très courant de trouver dans chaque famille un membre ou un ami de la famille qui a des liens avec le Canada. Ils ont un parent, un ami ou un camarade de classe au Canada.
     C'est peut-être la raison pour laquelle, même pendant la pandémie, deux ministres ont visité le Canada cette année. L'un est notre ministre des Affaires communautaires à l'étranger. L'autre est notre ministre des Affaires autochtones. Tous deux s'occupent des relations entre les peuples, ou affaires populaires. Il ne s'agit pas tant de parler des questions de sécurité ou de commerce que j'ai mentionnées. C'est une indication qui vous dit que les relations interpersonnelles entre nos deux pays sont effectivement complètes et profondes.
(1855)
    Notre président me lance ce regard. Je ne pense pas avoir plus de temps.
     Si c'était le cas, je vous poserais une question sur la désinformation et la façon dont elle se matérialise à Taïwan par suite des efforts de la Chine. Que peut faire le Canada pour aider Taïwan à lutter contre la désinformation? Peut-être aurons-nous l'occasion de parler de cela au cours de la réunion, ou peut-être d'autres collègues voudront-ils mettre la question sur la table.
     Merci beaucoup de votre temps.
    Nous avons donné beaucoup de latitude à M. Chong, alors monsieur Tseng, si vous voulez répondre assez brièvement, ce serait bien.
     Merci, monsieur le président.
     La désinformation est une chose à laquelle nous sommes confrontés quotidiennement. À Taïwan, la désinformation provient principalement de la Chine. Il devient si facile pour la désinformation de se répandre à cause des médias sociaux, et tout le monde a un téléphone cellulaire maintenant.
    Nous avons développé une stratégie pour contrebalancer l'effet négatif de la désinformation. C'est une manière très complète de s'y attaquer. Je ne pense pas avoir assez de temps, mais nous faisons appel au système de porte-parole du gouvernement, ainsi qu'à nos systèmes de collecte de renseignements, pour discerner en temps réel quelles sont les fausses nouvelles qui circulent sur les médias sociaux. Si vous laissez une fausse nouvelle devenir virale pendant 10 minutes, il est déjà trop tard. Nous avons tiré les leçons de nos expériences.
     C'est un domaine que nous pensons pouvoir partager avec vous et avec les pays de l'Union européenne, par exemple, dans le...
    Merci, monsieur Tseng. Nous aurons du temps. Tous les membres du Comité disposent d'une période de questions supplémentaire ce soir. Cela semble être un domaine fascinant sur lequel vous voudrez peut-être vous attarder un peu plus.
    Monsieur Bergeron, je dirai que vous avez six minutes ou moins, mais si vous avez une bonne question, nous vous laisserons un peu plus de temps.

[Français]

     Merci, monsieur le président. Je ne doute pas que j'aurai des questions qui sauront fasciner mes collègues.
    D'abord, je vous remercie infiniment d'être des nôtres ce soir. Nous vous en sommes très reconnaissants. Je pense que, jusqu'à présent, vous avez pu sentir, dans les commentaires de mes collègues, toute la solidarité que nous éprouvons à l'égard de Taïwan et de son peuple.
    Dans un article publié dans le Globe and Mail, le 25 octobre dernier, vous avez déclaré qu'une partie de votre travail, en tant que représentant de Taïwan au Bureau économique et culturel de Taipei au Canada, consiste à ne pas laisser la guerre se produire en convainquant les pays occidentaux d'augmenter les coûts infligés à la République populaire de Chine si elle tente de prendre l'île. Vous avez ajouté que, si l'on veut aider Taïwan, il faut parler moins et agir plus.
    Comme introduction à ma question, j'aurais envie de vous parler d'échanges que j'ai eus avec des Ukrainiens quelques jours avant l'invasion de février. À ce moment-là, même les gens en Ukraine considéraient qu'une attaque provenant de la Russie était absolument improbable, estimant que le coût pour celle-ci serait trop élevé. On voit bien que c'est le cas, effectivement. Malgré tout, cela n'a pas empêché Vladimir Poutine d'envahir l'Ukraine. En effet, ce qui nous apparaît, à nous, comme étant raisonnable n'est pas nécessairement dans le prisme logique d'un individu comme Valdimir Poutine.
    De la même façon, à quel point le prix pourrait-il être élevé pour empêcher un individu comme le président de la République populaire de Chine, Xi Jinping, de faire exactement la même chose?
    Quand vous nous demandez de parler moins et d'agir plus, qu'attendez-vous du Canada?
(1900)

[Traduction]

    Vous avez raison. Il est vraiment très difficile de prévoir ce qu'un dictateur fera. L'état d'esprit d'un dictateur est imprévisible. Cela s'applique à M. Poutine. Et après le 20e Congrès du parti, il semble que la Chine soit de plus en plus sous le contrôle d'un seul homme. Il serait très difficile de prédire ce que Xi Jinping va faire.
     Mon travail ici est de ne pas laisser une guerre se produire, comme vous l'avez dit. C'est tout à fait vrai. Cependant, pour les décideurs à Taïwan, nous devons nous préparer à un tel pire scénario. Ce n'est donc pas une question de si, mais de quand. Il a été écrit dans leur rapport politique, non seulement cette fois‑ci, mais aussi il y a cinq ans, lors du 19e Congrès du parti, qu'ils aimeraient avoir une réunification avec Taïwan et qu'ils verraient cela comme le rajeunissement d'une grande nation chinoise. C'est déjà dans leur feuille de route, et ce n'est pas une question de probabilité; c'est seulement une question de temps, donc nous devons nous préparer à Taïwan.
     Quant à savoir comment nous aimerions que le Canada aide Taïwan, nous sommes pragmatiques et connaissons la position actuelle de votre politique. Les trois points que j'ai mentionnés dans la partie finale de mon exposé sont ce que nous vous demandons. Nous savons que nous ne pouvons pas nous attendre à ce que vous fassiez ce que les États-Unis font avec nous, mais je pense que si vous prenez le temps d'examiner les trois points de la conclusion de ma déclaration liminaire, vous verrez que ces choses s'inscrivent dans le cadre de votre politique actuelle.
     Lorsque je dis moins de paroles et plus d'action, j'espère que nos amis ici ne se trompent pas. Je ne veux pas critiquer le gouvernement canadien, mais je pense qu'il est possible d'en faire plus. Quand je dis moins de paroles et plus d'action, je fais en fait référence au commerce, à l'APIE. Nous avons beaucoup parlé de l'APIE. Nous devons probablement nous asseoir et parler réellement des détails, des problèmes, des négociations et des concessions, comme dans toute négociation commerciale sérieuse. C'est de cela que je parle. Je ne fais pas référence aux questions de sécurité en disant cela.
     Cependant, il y a une chose que le Canada fait beaucoup. Au moins une fois par an, vos navires de guerre effectuent des exercices de libre passage, y compris le passage en haute mer dans le détroit de Taïwan. Compte tenu des fortes tensions qui existent actuellement entre la Chine et Taïwan, je crois que nous vous serions reconnaissants de continuer à effectuer ces passages en haute mer. Si vous pouviez augmenter le nombre de fois où vous faites ce genre d'exercice naval, nous serions très heureux, car cela démontrerait votre engagement à maintenir la paix et la stabilité dans cette partie du monde.
(1905)

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Selon l'indice de démocratie de l'organisme The Economist Intelligence Unit, Taïwan se classe à la huitième position du classement des démocraties, soit quatre places devant le Canada.
    Lors de son récent discours à Washington, la vice-première ministre a insisté, selon CBC, sur le fait que nous devrions cesser de soutenir les autocraties telles que la Russie et la Chine et nous concentrer sur le commerce et les investissements dans les pays de nos alliés démocratiques.
    Justement, Taïwan a des attentes à l'égard du Canada concernant l'arrangement sur la promotion et la protection des investissements étrangers.
    Selon vous, est-ce que les négociations se déroulent à un rythme satisfaisant pour en arriver à une conclusion prochaine souhaitée?

[Traduction]

    Je pense que l'APIE évolue positivement. Ce dont nous avons besoin, c'est de la volonté politique des deux parties de s'asseoir et de discuter. Nous espérons que des mesures importantes pourront être prises par les deux parties. L'élan est là, et j'ai l'espoir qu'avec l'élan actuel des deux côtés, nous pourrons faire avancer l'APIE véritablement.
    Merci beaucoup.
     Merci, monsieur Bergeron.
     Nous passons maintenant la parole à Mme McPherson pour six minutes ou un tantinet plus.
    Merci, monsieur le président, et merci aux représentants d'être ici aujourd'hui.
     Bien sûr, c'est un plaisir de vous revoir tous. J'aurais aimé pouvoir être là en personne.
     Merci, comme toujours, d'informer ce groupe de parlementaires et d'être toujours disposé à me rencontrer. Merci beaucoup pour cela.
    Nous considérons Taïwan comme une démocratie forte et comme une démocratie qui partage de nombreuses valeurs avec le Canada, comme le soutien à la réconciliation des Autochtones, la protection de l'environnement, la démocratie et le soutien aux femmes. Le travail que fait Taïwan sur les objectifs de développement durable est admirable. Je pense vous avoir déjà dit que j'aimerais que nous soyons aussi avancés sur les objectifs de développement durable au Canada que vous l'êtes à Taïwan.
     J'aimerais obtenir plus de clarté sur une chose. Nous avons tous observé avec une certaine appréhension ce qui se passait en Chine à l'occasion du 20e Congrès national. Vous avez parlé aujourd'hui du message effrayant que cela a constitué pour vous.
    Je me demande si vous pouvez nous dire ce que vous pensez de ce que nous avons entendu du congrès national. Que cela signifie‑t‑il pour Taïwan? Qu'en avez-vous entendu? Que cela signifie‑t‑il pour le reste du monde et pour le Canada en particulier?
    Je crois que ce qui se passe actuellement en Chine va toucher tous les pays du monde. Cela indique que la Chine en tant que marché devient plus incertaine. Les choses deviennent plus risquées pour le Canada et pour d'autres pays, parce que nous allons traiter avec quelqu'un qui met l'accent non pas sur le profit, mais sur le contrôle politique. C'est vraiment très inquiétant pour nous.
     Nous continuons à constater que la politique zéro COVID était très fortement ancrée dans la politique du Parti communiste chinois. Les dirigeants chinois sont catégoriques sur ce point. Cela n'apporte rien de bon à l'économie chinoise, et je pense que c'est un point dont nous devons être très conscients.
    Pour Taïwan, cela va plus loin. Cet aspect n'est peut-être pas encore très présent ici au Canada, mais j'espère qu'il sera mieux pris en compte au fil du temps. Il s'agit de l'aspect sécurité.
     Beaucoup de gens ont déjà lu le rapport. Cette fois, dans le rapport politique, Xi Jinping a utilisé le terme « sécurité » plus de 75 fois. La pression interne semble provenir d'une intervention extérieure, et c'est une question de sécurité pour eux. Plus la Chine insistera sur la sécurité, plus elle se renfermera sur elle-même et plus le contrôle politique sera serré. Les effets se font déjà sentir en Chine. Je crois que ce message devrait être pris en compte par chacun d'entre nous afin que nous soyons mieux préparés à toutes sortes de conséquences éventuelles.
(1910)
    C'est ce que nous constatons. Récemment, des représentants du Service canadien du renseignement de sécurité étaient présents au Comité de la procédure et des affaires de la Chambre pour dire à quel point ils sont de plus en plus inquiets. Vous parlez de l'internalisation de l'influence de la Chine, mais cette influence de la Chine s'étend. Les campagnes de désinformation auxquelles nous assistons, les rapports de postes de police, l'influence électorale, l'impact sur nos médias et les menaces à l'endroit des Canadiens d'origine chinoise sont autant de choses qui se produisent.
     Avez-vous des observations sur ce que le Canada devrait faire pour s'assurer que ces menaces sont atténuées?
    Encore une fois, je pense que cette campagne de désinformation que vous percevez au Canada n'est peut-être qu'une partie de l'effort chinois pour étendre son influence à l'étranger. La façon dont la Chine exerce son contrôle à l'étranger est d'étendre ses pouvoirs judiciaires dans un pays tiers. Nous trouvons cela très inquiétant. En fait, à Taïwan, nous sommes confrontés à un défi semblable. La campagne de désinformation à Taïwan, comme je viens de le dire, fait partie de notre vie, car c'est ainsi que la Chine a essayé d'infiltrer notre société.
     Même aujourd'hui, comme nous l'avons vu lors du 20e Congrès du parti, la Chine, dans l'esprit de ses dirigeants politiques, pense que s'emparer de Taïwan sans prendre les armes est le moyen le plus économique d'y parvenir. Pour ce faire, elle recourt à toutes sortes de cyberattaques, de tactiques de zone grise, de menaces hybrides et toutes sortes d'approches possibles, et notamment des campagnes de désinformation.
    Heureusement, c'est un processus de socialisation. Nous avons une éducation sociale à Taïwan pour dire à notre peuple de mieux se préoccuper des nouvelles. Lorsqu'une nouvelle voit le jour, vous devez probablement vérifier si elle n'est pas vraie. Comment sommes-nous capables de faire cela? Le gouvernement a pour politique de créer des centres de vérification des faits.
     Toute personne chez qui certaines nouvelles diffusées sur les médias sociaux éveillent des doutes et qui soupçonne qu'elles peuvent être malveillantes et suspectes peut simplement les transmettre à ce centre de vérification des faits. Ce n'est qu'une adresse IP. Cette adresse répond immédiatement pour dire quelle partie du reportage ou de l'histoire est fausse. Le résultat peut être très rapide, car il y a de fortes chances que de nombreuses personnes ont les mêmes soupçons. Lorsque les mêmes nouvelles sont soumises à ce centre de vérification des faits, il apprend à obtenir les faits par lui-même. Nous avons appris à le faire. C'est quelque chose que nous pouvons partager avec d'autres pays.
    Dans l'ensemble, ce que fait la Chine est contraire aux normes et aux règles de la communauté internationale. Qu'il s'agisse d'un poste de police dans un pays tiers ou d'une campagne de désinformation de quelque nature que ce soit, je crois que cela va à l'encontre de toute bonne gouvernance.
    J'espère que nous pourrons travailler ensemble.
(1915)
    Merci, monsieur Tseng.
     Nous allons maintenant faire une pause et donner la parole à M. Seeback pour six minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Monsieur Tseng, vous avez parlé de l'APIE, l'Accord sur la promotion et la protection des investissements étrangers. Vous dites qu'il faut une volonté politique forte. Je sais que c'est un sujet délicat. Il me semble que vous avez la volonté politique et que vous voulez que cela avance rapidement.
    Y a‑t‑il un manque d'urgence de la part du Canada à conclure cet accord?
    Merci, monsieur.
     Je pense qu'avant de répondre à cette question, je dois vous signaler, mesdames et messieurs, que les relations entre nos deux pays évoluent dans la bonne direction. Il y a une amélioration croissante entre nos deux pays, y compris dans les relations sur les questions économiques et d'investissement.
     Nous comprenons que l'Accord sur la promotion et la protection des investissements étrangers et le Partenariat transpacifique global et progressiste sont des questions très complexes. Nous nous parlons en toute bonne foi. Depuis janvier de cette année, nous avons déjà tenu trois discussions exploratoires. Les deux parties sont très satisfaites du résultat.
     Nous attendons de passer à la phase suivante, et c'est pourquoi nous sommes d'avis qu'il doit y avoir un certain degré de détermination pour que cela se fasse. Je comprends que les questions commerciales doivent passer par différents consentements sectoriels et que vous voulez vous assurer que vous ne signez pas un accord au détriment de votre milieu des affaires. Nous comprenons cela. Cependant, si vous ne parlez pas, vous ne pouvez pas atteindre l'objectif de ne pas sacrifier votre peuple.
     Ce que les Taïwanais demandent, c'est que l'on s'attable et tienne une vraie discussion, pas des discussions préalables avant la vraie discussion, sans aucune crainte de négocier.
    Aimeriez-vous voir des discussions plus substantielles sur l'APIE, alors?
    C'est exact.
    Je sais que pour certaines de ces questions, vous ne voulez pas parler en mal de certains de vos travaux sur l'accord, mais ce comité doit présenter des recommandations, alors je pose des questions qui peuvent être un peu inconfortables.
     En ce qui concerne le Partenariat transpacifique, tous les pays concernés devraient approuver votre adhésion à l'accord. C'est ce que j'ai compris. La Chine a également présenté une demande d'adhésion au Partenariat transpacifique très peu de temps avant vous.
    Que peut faire le Canada pour faire avancer votre demande? Y a‑t‑il d'autres pays en particulier avec lesquels nous devrions parler pour essayer d'obtenir un consentement unanime pour que cette demande aille de l'avant?
    Je pense que les deux parties le savent très bien. Le Partenariat transpacifique est une plateforme multilatérale, donc au moment où je vous parle, tous mes autres collègues dans différentes missions parlent également à leurs homologues.
    Pour obtenir le soutien multilatéral, nous commençons par un soutien bilatéral. Je demande au gouvernement canadien de faire au moins le geste positif d'accueillir la candidature de Taïwan au Partenariat transpacifique. Ensuite, le Partenariat mettra en place, au moment opportun, un groupe de travail pour discuter de notre adhésion.
     À l'heure actuelle, bien sûr, la seule question débattue est celle de l'adhésion du Royaume-Uni. Nous comprenons tout cela, mais ce que nous demandons avec le Partenariat transpacifique, c'est que vous compreniez et souteniez le fait que nous sommes en mesure de répondre à toutes les exigences et normes élevées du Partenariat. C'est à nos partenaires commerciaux de décider si nous sommes déjà à la hauteur. Il doit y avoir ce genre de conversation et ce genre de consultation avant de décider si Taïwan est à la hauteur ou non. Nous demandons une chance équitable.
(1920)
    Savez-vous si le Canada appuie votre demande? Le Canada a‑t‑il clairement exprimé sa position sur votre demande d'adhésion au Partenariat transpacifique?
    Nous recevons des réponses très polies du Canada. Nous comprenons, comme je l'ai dit, que les 11 membres du Partenariat transpacifique consacrent leur temps à la question de l'adhésion du Royaume-Uni, et que toutes les autres questions, y compris la demande de la Chine, ont été mises en veilleuse.
     Nous espérons qu'il y aura quelque chose à venir en ce qui concerne notre demande. Celle‑ci ne doit pas être prise en compte en parallèle avec celle de la Chine. Cette évaluation devrait se fonder sur les crédits. Ensuite, notre adhésion pourrait être établie en fonction de notre propre mérite.
    Brièvement, comme j'ai très peu de temps, comment le Canada peut‑il aider à contrer les pressions exercées sur les pays pour qu'ils ne reconnaissent pas officiellement Taïwan? La Lituanie, par exemple, fait l'objet de sanctions commerciales de la part de la Chine en raison de ses relations bilatérales avec vous. Comment le Canada peut‑il aider sur ce plan?
    S'il vous plaît, monsieur, donnez une réponse très brève.
    Les relations de la Lituanie avec Taïwan sont très particulières. Le pays continue de traiter avec Taïwan, et nous l'avons aidé à surmonter ses difficultés lorsque la Chine a utilisé la coercition économique en guise de représailles pour avoir accueilli le nouveau bureau de Taïwan à Vilnius.
     Je ne crois pas que ce soit la même chose pour ce qui est des relations entre le Canada et Taïwan.
    Merci beaucoup.
     Nous passons maintenant à Mme Yip, pour six minutes.
    Je vous remercie d'être venus ce soir.
    Le Canada a toujours soutenu l'importante contribution de Taïwan aux discussions mondiales où l'absence de Taïwan est remarquée. La santé mondiale et l'aviation civile sont deux exemples récents où le Canada a préconisé la participation de Taïwan.
     Pouvez-vous nous donner un aperçu du rôle que joue le Canada pour soutenir Taïwan à cet égard? Dans quelle mesure est‑il important que la voix de Taïwan soit entendue à l'échelle mondiale?
    En fait, le Canada a joué un rôle très important pour soutenir la participation internationale de Taïwan, et vous êtes à l'origine de ce soutien. Je parle des trois motions adoptées par ce Parlement. Cette année, trois motions visant la participation internationale de Taïwan et provenant de différents comités ont été adoptées, et une motion venait de la Chambre.
     Vous n'êtes probablement pas au courant des nombreux reportages à Taïwan qui célébraient l'adoption de chacune de ces motions. Notre peuple est ravi de savoir qu'il n'est pas seul et il est reconnaissant au Canada pour son soutien.
     Je vous en prie, ne dépréciez pas les efforts que vous déployez dans vos travaux parlementaires, car ce genre de moral pour un pays comme Taïwan compte énormément. C'est pourquoi, lorsque la récente délégation parlementaire s'est rendue à Taïwan, elle a reçu notre gratitude et notre reconnaissance lors des différentes réunions que nous avons eues. Nous avions fortement le sentiment que le Parlement fait vraiment quelque chose pour aider Taïwan.
    Je suis désolée de vous interrompre, mais pour nos téléspectateurs à la maison, pouvez-vous nous dire quelles sont les trois motions?
(1925)
    Les motions adoptées par les différents comités visent principalement à soutenir la participation de Taïwan à l'Organisation mondiale de la santé.
    Merci.
     Désolée, vous alliez en dire plus sur cette question?
    Le message le plus important que j'essaie de transmettre, c'est que le Canada a joué un rôle très important, et nous espérons que le Parlement posera d'autres gestes de soutien. Je remercie de leur aide les députés individuels, dont bon nombre sont présents ce soir.
    Je vous remercie.
     Dans votre déclaration liminaire, vous avez parlé de paix et de stabilité dans la région. Que peut faire le Canada pour assurer le maintien de la paix dans le détroit de Taïwan?
    Encore une fois, tout comme dans le cas du Partenariat transpacifique, le Canada ne peut y parvenir seul. Le Canada est un pays très important qui contribue au maintien de la paix et de la stabilité dans notre partie du monde, mais il ne peut pas le faire seul. Je pense que nous avons mentionné à maintes reprises les pays aux vues similaires, y compris dans ma déclaration liminaire.
    Un pays qui partage les mêmes idées est un concept très vague. Il faut qu'il y ait un chef de file. Je pense que l'orientation vient le plus logiquement des pays du G7. Le Canada, les États-Unis et le Japon représentent certains secteurs des pays aux vues similaires. Les quatre autres pays du G7 viennent d'Europe. Ils dirigent les pays qui partagent les mêmes idées dans cette partie du monde.
     Il est très important que le Canada ait exprimé son soutien et ses préoccupations dans la déclaration des ministres des Affaires étrangères du G7 et au sommet du G7 en disant que la paix et la stabilité dans le détroit de Taïwan sont de la plus haute importance pour le monde. Plus vous réitérerez ce genre de position, plus la Chine y réfléchira à deux fois, car elle sait qu'elle défie la volonté internationale de paix et de stabilité dans cette partie du monde.
    Comme l'a déjà mentionné mon collègue M. Fragiskatos, le Canada se classe au quatrième rang des destinations d'études. Quels sont certains des défis que vous voyez pour les étudiants taïwanais au Canada et les étudiants canadiens à Taïwan?
    En effet, le Canada est l'un des pays les plus prisés par nos jeunes, qui viennent y chercher un diplôme supérieur et des études plus poussées. Cette activité a été interrompue par la pandémie. Les programmes d'échange entre les universités ont dû être suspendus pendant trois ans et pas seulement deux ans dans certains cas. J'espère vivement que ce genre de programmes d'échange pourra reprendre le plus rapidement possible.
    Du point de vue du gouvernement, je pense que nous aimerions faciliter l'envoi d'étudiants du Canada à Taïwan pour y étudier et, de même, de Taïwan au Canada. D'autres moyens et d'autres projets peuvent également contribuer à l'augmentation de ce genre de modalités d'étude. Je parle du programme de vacances-travail. Nous avons un programme de vacances-travail entre nous qui fonctionne très bien, bien que je parle de la période précédant la pandémie.
    Espérons que maintenant, en cette ère postpandémique, la situation reprendra comme avant. Il s'agit d'un projet permettant aux jeunes des deux pays âgés de 18 à 35 ans de se rendre dans le pays de l'autre sans avoir besoin d'un permis de travail. Ils peuvent travailler dans le cadre du programme vacances-travail. Comme ce genre d'amitiés se noue lorsque les gens sont jeunes, ils ont tendance à les maintenir toute leur vie. C'est très bien, et cela facilitera la venue d'un plus grand nombre de jeunes dans le pays de l'autre pour des études supérieures.
    Merci, monsieur Tseng.
     Merci, madame Yip. Votre temps de parole est écoulé.
     Au deuxième tour, M. Bergeron et Mme McPherson auront chacun cinq minutes.
     Vos cinq minutes commencent maintenant, monsieur Bergeron.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Dans les colonnes du journal Le Devoir du 17 octobre, vous expliquez ceci: « Du point de vue de Taïwan, nous aimerions certainement voir des membres seniors du Conseil des ministres du Canada visiter Taïwan au moment opportun. »
    La dernière visite d'un ministre canadien à Taïwan remonte à 1998, lorsque John Manley, à l'époque ministre libéral de l'Industrie, a fait une telle visite.
    Selon vous, pourquoi la visite d'un ministre serait-elle importante pour Taïwan?
(1930)

[Traduction]

    Merci de poser cette question.
    Pourquoi la visite d'un ministre serait-elle importante pour Taïwan? Elle serait importante parce que je ne crois pas qu'il soit aisé d'organiser une telle visite.
    La visite d'un ministre dans un pays suppose généralement la visite de subalternes… Habituellement, une réunion avec le ministre donne des résultats concrets. Pour notre service extérieur, la visite d'un ministre n'est pas comparable à celle de fonctionnaires subalternes. Ce n'est pas seulement symbolique. Une réunion avec un ministre débouche toujours sur quelque chose de concret et d'utile pour les relations bilatérales. C'est pour cette raison que Taïwan voit toujours les visites ministérielles d'un aussi bon œil.

[Français]

    Croyez-vous que l'une des raisons pour lesquelles aucun ministre, depuis 1998, n'est allé à Taïwan s'explique par la crainte de représailles de la part de la République populaire de Chine?
    À quel type de représailles s'exposerait le Canada, si d'aventure un ministre décidait de se rendre à Taïwan?

[Traduction]

    La réaction ou les représailles de la Chine si jamais… Nous parlons d'une situation hypothétique. Je pense que l'ambassade chinoise au Canada réagirait fortement et multiplierait ses interventions. Des fonctionnaires d'Affaires mondiales Canada subiraient certainement les foudres des représentants chinois. Ce ne serait rien de nouveau.
    L'autre chose qui me vient en tête rapidement serait l'annulation d'une visite de représentants du Canada en Chine. Selon mon expérience, ce ne serait pas du tout surprenant.
    Comme je l'ai dit, il faut du courage. C'est une décision qui ne peut pas être prise à la légère, mais elle est très importante. Du point de vue de Taïwan, la visite d'un ministre canadien serait certainement très bien accueillie.
    Très franchement, je crois qu'il est possible de faire preuve de créativité. Nous pouvons recevoir vos ministres de la même façon que nous avons accueilli le ministre John Manley en 1998. Sa visite n'a pas provoqué de répercussions graves. Au contraire, à son retour au Canada, il a dit à ses amis qu'il n'avait senti aucune pression après sa visite à Taïwan. La pression était sans doute plus forte avant qu'après sa visite.
    J'espère que nos inquiétudes n'auront pas raison de notre courage moral et que nous nous tiendrons debout. C'est la manière dont je vois les choses.

[Français]

     Si les principales représailles auxquelles pourrait s'exposer le Canada, c'est l'annulation ou le retardement de visites déjà prévues entre le Canada et la République populaire de Chine, je pense qu'il s'expose à peu. À ce que je sache, il y a fort peu de visites planifiées de part et d'autre depuis déjà un certain nombre de mois.
    Sortons de la sphère hypothétique…

[Traduction]

    Monsieur Bergeron, nous sommes malheureusement à la fin de votre temps de parole. Il semble que cinq minutes filent aussi vite que deux minutes et demie.
(1935)

[Français]

    D'accord, merci.

[Traduction]

    Vous aviez cinq minutes, mais vous aurez un autre tour de parole. Réservez votre question.
    Madame McPherson, vous êtes la suivante. Vous avez cinq minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Les questions concernant les visites ministérielles à Taïwan étaient fort intéressantes. Comme vous le savez, une stratégie indopacifique sera présentée sous peu et nous sommes impatients d'en apprendre plus à ce sujet.
    Monsieur Tseng, que penseriez-vous d'une visite du Comité à Taïwan dans le cadre d'une tournée de la région indopacifique? Si nous nous rendons dans divers pays de la région, seriez-vous favorable à notre passage par Taïwan?
    Indéniablement. Les membres du Comité spécial seraient plus que les bienvenus à Taïwan. Je crois qu'une telle visite serait très utile en vue de l'établissement de la version définitive de la stratégie indopacifique.
    Vous avez exposé vos trois demandes au Canada en termes on ne peut plus clairs. Merci de cette clarté.
    J'aimerais en apprendre davantage sur la réponse du gouvernement canadien à ces demandes jusqu'ici. Vous avez mentionné quelques aspects qui selon vous mériteraient des mesures un peu plus concrètes de sa part, et d'autres où nous pouvons considérer qu'il a fait du bon travail. Je crois que vous serez d'accord avec moi pour remercier les parlementaires pour tout le soutien apporté à Taïwan. Cela dit, concernant la réponse du gouvernement canadien à ces trois demandes, existe‑t‑il des domaines précis dans lesquels il devrait en faire davantage selon vous?
    Très honnêtement, je n'ai pas consulté vos fonctionnaires avant de parler de ces trois demandes dans la déclaration préliminaire. À mon avis, elles sont compatibles avec les politiques en vigueur puisque l'accent est mis sur la paix, la stabilité et la prospérité. L'objectif est de favoriser l'aide multilatérale pour maintenir la paix et la stabilité dans cette région du monde. Nous demandons votre aide pour maintenir le statu quo, et nous invitons différents pays à surveiller la situation de très près. Aucun pays ne devrait agir unilatéralement pour changer ce statu quo.
    Je crois que tout cela cadre parfaitement avec vos politiques. Je n'y vois aucune contradiction avec vos politiques en matière de sécurité régionale dans notre partie du monde.
    Le troisième point de la déclaration porte sur la pleine participation de Taïwan aux instances internationales pertinentes, une demande qui a reçu votre appui très clair. Comme je l'ai dit, le Comité et la Chambre ont adopté des motions en ce sens.
    J'espère que nous pourrons nous entendre sur les points que j'ai soulevés. Si d'autres actions communes sont envisagées, nous serons plus que ravis.
    C'est une des raisons pour lesquelles nous souhaitons la présence de Taïwan à ces tribunes internationales. Nous pouvons en apprendre beaucoup de Taïwan, c'est évident. Vos interventions très efficaces durant la pandémie de COVID‑19 pourraient certainement servir de modèles à l'Organisation mondiale de la santé. La manière dont vous avez intégré les objectifs de développement durable à vos efforts de développement international pourrait aussi être une source d'inspiration pour d'autres démocraties au sein de l'Organisation des Nations unies.
    Concernant le soutien du Canada au maintien de relations pacifiques et au règlement pacifique des conflits, pensez-vous que notre gouvernement s'est montré assez ferme sur ces deux fronts? Pensez-vous que le gouvernement a profité de toutes les tribunes offertes pour faire valoir sa vision?
    J'observe une amélioration constante de nos relations bilatérales et, bien que je sois conscient que les politiques ne peuvent pas changer du jour au lendemain, je crois qu'il y a des progrès. Nous pouvons faire plus pour renforcer nos relations bilatérales. Je pense que nous réussirons à garder un esprit ouvert. Nous aimerions saisir toutes les occasions qui se présenteront pour discuter avec les responsables, les décideurs et les députés. Nous le faisons déjà, parfois de manière discrète, avec vous. Le contexte mondial évolue très rapidement. Nous avons jusqu'ici avancé lentement mais sûrement, mais il faudrait peut-être accélérer la cadence. J'espère que vous serez d'accord sur ce point et que nous trouverons des moyens pour faire bouger les choses plus vite.
(1940)
    Merci beaucoup.
    Merci.
    Nous avons le temps pour un autre tour de cinq minutes pour le Parti conservateur et le Parti libéral, et de deux minutes et demie pour le Bloc et le NPD.
    Monsieur Kmiec, vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Vous avez parlé entre autres des liens entre les peuples. Savez-vous si des Taïwanais en visite au Canada ont été intimidés ou persécutés par des représentants de la RPC, ses agents ou des employés du département du travail du Front uni?
    Merci de cette question, monsieur.
    Selon les renseignements auxquels j'ai accès, aucun ressortissant taïwanais ou Canadien d'origine taïwanaise vivant ici n'a été intimidé par des diplomates ou des ressortissants chinois qui travaillent au Canada. Toutefois, c'est un sujet dont nous en entendons beaucoup parler. Selon certaines sources, des Hongkongais ont beaucoup subi ce genre de menaces. Ils sont des cibles. Les personnes que vise la Chine sont les dissidents. Apparemment, leurs agissements déplaisent au Parti communiste chinois parce qu'ils sont perçus comme des menaces.
    Même si les ressortissants taïwanais au Canada ont échappé à ce genre d'intimidation, certains d'entre eux ont milité en faveur des idées démocratiques il y a quelques années. Un Taïwanais qui utilisait son ordinateur comme plateforme de diffusion des idées démocratiques a été placé en détention à son arrivée en Chine, qui l'a condamné à cinq ans d'emprisonnement. Il s'appelle Lee Ming-che, et il a été remis en liberté il y a un peu plus d'un an.
    Ce n'est pas arrivé au Canada. Si jamais c'était le cas, croyez-moi que je le signalerais à nos amis parlementaires.
    Merci.
    Mes questions suivantes porteront sur les soi-disant postes de police. J'imagine que vous en avez entendu parler. Je crois que c'est la province du Fujian qui les appelle des « postes de police ».
    Votre gouvernement autorise‑t‑il ce type de postes de police sur votre territoire?
    Je n'en ai jamais entendu parler, et ce serait d'ailleurs impensable que des postes de police de ce genre… Ils sont établis au nom d'une association qui agit à titre officieux puisque ce genre d'activités est réservé aux organismes gouvernementaux. L'établissement d'un poste de police ou de services de ce genre serait absolument impossible à Taïwan, surtout par des ressortissants chinois.
    Comment votre gouvernement réagirait‑il si jamais de tels postes de police étaient découverts sur votre territoire? Quelle serait votre recommandation au gouvernement canadien?
    À ma connaissance, ces postes de police ou de services ont été établis dans 24 pays. Il y en aurait 52 dans 24 pays, mais aucun n'a été découvert à Taïwan. Comme dans tout ce que nous faisons, je dirais que nous serions extrêmement vigilants, si je puis m'exprimer ainsi.
    Notre gestion de la pandémie a été très efficace parce que nous avons été vigilants dès le début. Toute forme d'agissement occulte exige une extrême vigilance. Ces activités se dérouleraient sous l'égide d'une association ou d'une société quelconque. Il faut surveiller de près les agissements contraires à notre système juridique.
(1945)
    Monsieur Kmiec, je suis désolé, mais votre temps est écoulé. Merci.
    L'intervenant suivant sera M. Dubourg. Vous disposez de cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je voudrais à mon tour souhaiter la bienvenue aux représentants du Bureau économique et culturel de Taipei au Canada.
    Monsieur Tseng, votre exposé m'a beaucoup plu, et surtout votre conclusion, dans laquelle vous avez insisté sur la paix. Vous avez notamment parlé de relations pacifiques dans le détroit de Taïwan et de la nécessité de recourir à des moyens pacifiques fondés sur le droit international. C'est de la musique à mes oreilles.
    Monsieur Dubourg, je suis désolé, mais je dois vous interrompre brièvement. Il semble que le microphone de votre casque n'est pas celui qui est connecté à la prise.
    M'entendez-vous maintenant?
    Oui, c'est mieux. Merci.
    Comme je le disais, monsieur Tseng, j'ai été ravi de lire votre exposé, et surtout votre conclusion sur les moyens pacifiques fondés sur le droit international et les relations pacifiques dans le détroit de Taïwan. Merci.
    Dans votre allocution, vous avez aussi fait allusion au 20e Congrès du Parti communiste chinois. Vous avez parlé du message inquiétant qui se dégage du rapport publié le 16 octobre pour tous ceux qui se trouvent du côté de la démocratie. J'aimerais que vous nous en disiez un peu plus à ce sujet.
    Dans ma déclaration préliminaire, j'ai expliqué ce que j'entendais par le message inquiétant que doivent percevoir tous ceux d'entre nous qui forment le groupe d'optique commune. Comme je l'ai souligné, le message économique du 20e Congrès du parti n'a rien de réjouissant, et je vous ai expliqué pourquoi j'ai cru bon de le rappeler. Le rapport politique reconduit la politique zéro COVID et il ne donne aucun espoir de déréglementation des plateformes Internet. Tout cela donne froid dans le dos.
    Mon analyse est essentiellement vue économique mais, dans une réponse à une de vos questions, j'ai aussi parlé de l'attention que nous devons accorder au message du 20e Congrès du parti sur les enjeux de sécurité. C'est ce qui ressort de bon nombre de réactions, y compris celle du secrétaire d'État américain, M. Antony Blinken, selon lesquelles la menace que représente la Chine pour Taïwan risque de se matérialiser plus tôt que prévu.
    Nous essayons de faire réaliser aux gens au Canada et dans d'autres pays d'optique commune qu'il ne faut surtout pas prendre à la légère le message véhiculé par le parti à son 20e Congrès. Nous devons nous préparer pour éviter les contrecoups négatifs à court terme.
(1950)
    Merci énormément.
    Dans votre exposé, au troisième paragraphe, vous dites que le PCC a fait primer l'égalité sur la prospérité, et que la Chine a ce faisant accéléré son découplage. Vous finissez en disant que le Canada doit rester sur ses gardes.
    Existe‑t‑il des problèmes ou des menaces dont nous devrions nous préoccuper plus particulièrement selon vous?
    La Chine représente un marché très important pour le Canada. C'est le troisième en importance, après les États-Unis et l'Union européenne. Ce qui se passe en Chine, surtout sur le plan économique, vous concerne au plus haut point, il va sans dire.
    J'ai dit qu'elle avait fait primer l'égalité sur la prospérité, mais je ne fais que vous transmettre le message véhiculé lors du 20e Congrès du parti, durant lequel M. Xi a souligné que la prospérité collective est de loin le principal objectif de la politique gouvernementale. Par prospérité collective, il n'entend pas l'imposition du revenu des particuliers et la redistribution de la richesse à ces mêmes particuliers. Même si la Chine le fait par l'intermédiaire de l'imposition, il faut comprendre que dans un régime aussi centré sur le contrôle politique, dans lequel la transparence est impossible parce qu'il n'y a pas de contre-pouvoirs, cette redistribution devient fatalement une source de corruption.
    C'est ce qui se produit depuis que Xi Jinping a pris le pouvoir il y a 10 ans. Il a passé ces 10 premières années à se débarrasser d'une bonne partie de ses ennemis politiques sous le couvert de la lutte à la corruption. Aujourd'hui, le pays ferme son économie et il essaie de redistribuer la richesse du peuple. À mon avis, ce n'est pas une bonne nouvelle, y compris pour sa propre population.
    Merci, messieurs Tseng et Dubourg.
    Nous passons maintenant à M. Bergeron. Vous avez deux minutes et demie.

[Français]

     Merci beaucoup, monsieur le président.
    J'aimerais revenir à l'échange que nous avons eu précédemment. Vous avez souligné à juste titre que je vous avais posé une question hypothétique. Sortons maintenant de la sphère de l'hypothèse et abordons les faits.
    Y a-t-il eu plusieurs visites ministérielles à Taïwan en provenance des pays occidentaux, ces dernières années? Si la réponse est oui, ces visites étaient de la part de quels pays?

[Traduction]

    Merci de cette question, monsieur.
    Les visites ministérielles à Taïwan sont assez rares. Je dois souligner que la dernière visite d'un ministre américain remonte à 2020. Le secrétaire d'État à la Santé est venu à Taïwan en 2020. Taïwan accueille très souvent des anciens ministres, et même des anciens premiers ministres qui viennent de quitter leurs fonctions, mais rarement quand ils sont en poste. C'est la réalité. Soit dit en passant, le Canada n'est pas le seul pays à ne pas envoyer de ministres à Taïwan. Je tiens vraiment à le préciser.

[Français]

    D'accord.
    Le 3 août dernier, les ministres des Affaires étrangères du G7 ont publié une déclaration sur le maintien de la paix et de la stabilité dans le détroit de Taïwan. La déclaration invitait la République populaire de Chine à résoudre des différends dans l'ensemble du détroit par des moyens pacifiques. Elle indiquait ceci:
    
Il n’y a aucun changement aux politiques respectives d’une seule Chine [...] et aux positions fondamentales sur Taïwan des membres du G7.
    À quel point ce genre de déclaration vous apparait-il utile?
(1955)

[Traduction]

    Cette déclaration des pays du G7 a une très grande portée. D'ailleurs, je pense que c'est la première fois qu'une déclaration commune du G7 fait allusion à la paix, à la sécurité et à la stabilité dans le détroit de Taïwan. En fait, cet énoncé a été inclus pour la première fois en 2021 pendant une réunion des ministres des Affaires extérieures et le Sommet du G7 à Londres.
    Depuis, l'énoncé est repris dans toutes les déclarations. Il fait partie intégrante de la position du G7, et nous en sommes très reconnaissants. Nous espérons que le message sera reconduit chaque fois que les pays du G7 se réuniront, car la paix et la stabilité dans le détroit de Taïwan resteront importantes.
    Nous serions ravis si les pays du G7 réitèrent cette position chaque fois qu'ils se réunissent.
    Merci, messieurs Tseng et Bergeron.
    Les deux dernières minutes et demie seront réservées à Mme McPherson.
    Merci, monsieur le président.
    Je tiens à remercier nos invités. Nous avons eu une formidable rencontre. Merci, monsieur Tseng.
    Nous avons parlé de diplomatie. Nous avons parlé de commerce. Nous avons parlé de ce que le Canada pourrait faire de plus, de ce qu'il a déjà, et nous avons aussi parlé de sécurité. Notre monde est en transformation. Ce qui se passe en Ukraine se répercute sur la situation à Taïwan. Ce qui s'est passé durant la pandémie de COVID et la période de reprise actuelle se répercute sur la manière dont la Chine réagit et la réalité sur le terrain.
    Ce sont les deux dernières minutes et demie de ce tour. Monsieur Tseng, j'aimerais vous donner ce petit moment pour transmettre au Comité des compléments d'information qui pourraient l'intéresser et que vous aimeriez voir inscrits au hansard et au compte rendu.
    Merci énormément pour ces bons mots.
    Je vous remercie de m'avoir donné la possibilité de comparaître devant le Comité spécial. Je sais qu'il a été créé dans un but précis. Votre invitation à comparaître témoigne de l'importance que vous accordez à ces enjeux et aux relations entre le Canada et Taïwan. J'espère vraiment que mon témoignage est le signe qu'il se passe quelque chose et que la situation évolue.
    Je suis impatient de pouvoir collaborer avec chacun des membres du Comité qui se trouvent dans la salle ou qui participent à la réunion en ligne. Je crois vraiment que nous vivons un moment charnière de l'histoire. Les pays d'optique commune doivent unir leurs efforts pour retrouver la synergie qui sera nécessaire pour affronter un défi qui ne ressemble à rien de ce que nous avons connu jusqu'ici.
    Peu de gens saisissent que la rigidité accrue des politiques étrangères de la Chine va complètement bouleverser notre monde dans un horizon de 5 à 10 ans. C'est ce qui nous attend. Par exemple, nous pensons que d'ici cinq ans, fort de son troisième mandat, Xi Jinping pourrait user de moyens inédits pour intensifier les pressions sur Taïwan.
    On pourrait assister à d'autres exercices de l'envergure de ceux qui ont été déployés pour la visite de Nancy Pelosi. En réalité, même s'il n'y a pas eu de déclaration officielle, c'est un exercice qui se poursuit encore aujourd'hui. Tous les jours, des dizaines de sorties — il peut y en avoir jusqu'à une centaine  — sont effectuées dans la zone d'identification de défense aérienne de Taïwan pour l'intimider.
    Mon souhait est que nos amis canadiens surveillent de près ces activités parce que Taïwan ne sera certainement pas la seule cible. Taïwan n'est pas un enjeu intérieur pour la Chine. Taïwan est un enjeu international. Ce qui fait mal à Taïwan fait mal au monde entier.
    Je ne parle même pas de la capacité de fabrication de puces. Taïwan fabrique la majorité des puces utilisées par beaucoup de grandes industries dans le monde. Je ne parle même pas de cette capacité. C'est un aspect important, bien évidemment, mais le plus important est que si Taïwan tombe, c'est la démocratie qui va écoper, et ce sera alors tout ce qui comptera pour nous.
(2000)
    Monsieur, je vous suis vraiment reconnaissant d'avoir été des nôtres ce soir, comme tous mes collègues du Comité.
    Monsieur Ping, monsieur Tseng et monsieur Chen, merci encore une fois de votre présence devant le Comité.
    Monsieur Bergeron, vous avez la parole.

[Français]

     Monsieur le président, je me demandais s'il y aurait un consentement unanime des membres du Comité pour prendre une photographie avec les représentants de Taïwan.

[Traduction]

    Nous allons prendre une pause pour nous préparer à accueillir les prochains témoins. Vous pourrez en profiter pour prendre cette photo.
    Nous allons suspendre…
    Pouvez-vous inclure les membres qui siègent par écran interposé dans la photo?
    Nous pouvons nous placer devant l'écran, madame McPherson. Nous allons faire de notre mieux pour inclure tout le monde.
    Nous allons prendre une pause.
(2000)

(2010)
    Nous reprenons nos travaux avec le second groupe de témoins.
    Je suis heureux d'accueillir M. Scott Simon, professeur à l'Université d'Ottawa et agrégé supérieur au Macdonald-Laurier Institute.
    Pour le prochain tour, chers collègues, nous allons faire comme d'habitude. Chaque parti disposera de six minutes dans le premier volet et, dans le second, les libéraux et les conservateurs auront cinq minutes chacun, et le Bloc ainsi que le NPD auront deux minutes et demie chacun. Nous allons ensuite prendre une pause avant de discuter pendant quelques minutes des affaires du Comité.
    Nous vous souhaitons la bienvenue, monsieur Simon… Ou comment dois‑je m'adresser à vous?
    Merci de comparaître en personne. C'est beaucoup plus facile pour les aspects techniques. Nous vous sommes reconnaissants d'être des nôtres ce soir.
    Nous allons écouter votre déclaration préliminaire. Vous disposez de cinq minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je suis le cotitulaire de la Chaire d'études taïwanaises de l'Université d'Ottawa. J'ai vécu à Taïwan pendant plus de 10 ans et, pendant cette période, j'ai consacré 5 ans à étudier les communautés autochtones. Je souligne que ces populations sont très reconnaissantes pour les 150 années de relations entre le Canada et Taïwan qui les ont mises en lien avec les missions presbytériennes et catholiques.
    La question de Taïwan, comme on l'appelle aujourd'hui, est apparue après la guerre, dans la foulée de l'aliénation de territoires japonais au titre du traité de paix de San Francisco de 1951. Le Japon avait décrété la fin de la guerre et renoncé à toutes ses revendications à l'égard de Taïwan, sans toutefois désigner les bénéficiaires. À cette époque, le ministre des Affaires étrangères, Lester Pearson, avait dit espérer que peu importe la solution retenue, elle ne s'appliquerait pas au détriment de certaines personnes laissées pour compte tout au long du processus, c'est‑à‑dire la population de Formose.
    Dans une certaine mesure, la démocratisation a permis au peuple taïwanais d'exercer son droit à l'autodétermination aux élections. Même si la République de Chine a imposé un régime autoritaire à Taïwan, la démocratisation a permis à sa population de remodeler le pays à son image. Taïwan est aujourd'hui un chef de file sur les questions des droits des personnes lesbiennes, gaies, bisexuelles et transexuelles, ou LGBT, ainsi que des Autochtones. Cependant, à cause des menaces de la Chine d'envahir et d'annexer ce pays insulaire, ces personnes continuent de vivre dans la peur. C'est un problème sur le plan des droits de la personne. Et quand la Chine force le Canada à marginaliser Taïwan, c'est une atteinte à notre souveraineté.
    Souvent, les Canadiens s'autocensurent quand il est question de Taïwan. Cependant, quand il a reconnu la RPC à titre de gouvernement unique de la Chine en 1970, le gouvernement du premier ministre Pierre Trudeau a tenu à garder les coudées franches en déclarant qu'il se garderait d'approuver ou de contester la position du gouvernement chinois à l'égard du statut de Taïwan. Nous devons donc éviter de manifester ne serait‑ce qu'un semblant d'appui aux revendications de la Chine sur Taïwan, y compris dans les choses les plus insignifiantes comme les menus déroulants sur des sites Web du gouvernement.
    Parce qu'il est un pays commerçant, l'intérêt premier du Canada réside dans la paix, la liberté et l'ouverture de la région indopacifique. Je pense que les enjeux de sécurité et de défense ont déjà été couverts, ainsi que l'APIE, le PTPGP et les organismes internationaux. J'aimerais ajouter l'importance des enjeux d'inclusivité et de durabilité dans la région indopacifique.
    Nous partageons avec Taïwan un intérêt commun pour les questions autochtones. Je viens de passer deux jours avec une délégation du bureau des affaires autochtones de Taipei. Cette année, nous avons signé l'Accord de coopération économique et commerciale avec les peuples autochtones avec Taïwan, l'Australie et la Nouvelle-Zélande. Les choses bougent de ce côté, c'est indéniable. Nous avons aussi déjà conclu un protocole d'entente avec Taïwan sur les questions autochtones.
    C'est dans l'intérêt du monde entier que des pays entretiennent des relations avec Taïwan sous l'appellation République de Chine. Nous pouvons contribuer à renforcer le statu quo pacifique en coopérant avec Taïwan dans le cadre de projets conjoints dans divers pays. Certains, comme Palau, peuvent sembler très éloignés pour la plupart des Canadiens, mais d'autres, dont Haïti, revêtent une grande valeur pour nous et ont aussi besoin de notre aide. Nous pouvons les aider de concert avec Taïwan. Nous pourrions par exemple créer des projets conjoints d'aide au développement, ou même de coopération dans le domaine militaire ou de la garde côtière pour des missions de maintien de la paix, de secours en cas de catastrophe et de recherche et sauvetage.
    Le Canada ne conteste pas, mais il n'approuve pas non plus les revendications de la Chine à l'égard de Taïwan. C'est sa politique. Nous ne pouvons pas les approuver parce qu'elles reflètent des visées politiques, et non la réalité du terrain. Nous avons choisi de ne pas contester ces revendications parce que le silence était nécessaire pour établir des relations diplomatiques avec la Chine. Toutefois, cette décision reposait sur l'hypothèse que la Chine et Taïwan chercheraient une solution pacifique. Or, comme une des parties, la Chine, fait preuve d'une agressivité croissante, il faut lui faire comprendre que nous n'appuyons pas ses actes de coercition. Nous pourrions envisager d'adopter une mesure législative semblable à la Taiwan Relations Act des États-Unis pour guider les Canadiens et les relations entre le Canada et Taïwan. J'ajouterai qu'un tel guide serait également fort utile pour les universités.
    Dans le pire cas de figure — l'agression chinoise —, nous pourrions être obligés de reconnaître officiellement Taïwan, comme nous avons dû le faire pour le Kosovo en dépit de l'opposition des Russes et des Serbes, pour en faire un enjeu international. Historiquement, et surtout durant l'ère Pearson, le Canada a considéré que c'était un enjeu international.
    Il faut tout mettre en œuvre pour éviter un conflit. Nous y arrivons très bien en répétant sans cesse que notre intention est de préserver la paix. Nous devons bien faire comprendre à la Chine que nous tenons absolument à préserver la paix et que notre position de neutralité à l'égard de Taïwan était conditionnelle à sa renonciation à toute forme d'agression. Ce temps semble révolu. Nous devons également rassurer nos alliés et nos partenaires du monde démocratique, soit le Japon, les États-Unis et d'autres, que notre soutien est indéfectible et que nous considérons Taïwan comme un enjeu de sécurité commun.
    Nous devons absolument mettre les bouchées doubles pour préserver la paix. Un échec aurait des conséquences inimaginables et un coût très élevé pour le Canada.
(2015)
    Merci beaucoup, monsieur Simon.
    Avant d'entamer la première série de questions, je souhaite la bienvenue à Mme Rempel Garner. Je sais qu'elle se cache quelque part dans Zoom. La voici. Bonsoir.
    Je vais donner la parole à M. Chong, pour six minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je vous remercie, monsieur Simon, de comparaître devant nous aujourd'hui.
    Vous avez rédigé un document dans lequel vous dites que le Canada devrait mettre à jour sa stratégie concernant Taïwan. En particulier, vous y affirmez que dans certains cas, la reconnaissance de Taïwan par la communauté internationale pourrait se révéler être la meilleure stratégie pour décourager la guerre et que le Canada devrait montrer la voie à suivre à cet égard.
    Selon vous, le moment est‑il venu pour le Canada de reconnaître Taïwan sur le plan diplomatique? Si ce n'est pas le cas, à quel moment avant une guerre entre la République populaire de Chine et Taïwan, qui semble imminente, et dans quelle situation entre maintenant et l'éclatement de cette guerre conviendrait‑il que le Canada reconnaisse Taïwan sur le plan diplomatique?
    Manifestement, c'est une question à laquelle il est très difficile de répondre. Bon nombre de débats se tiendront au Canada avant que nous en arrivions là.
    J'espère que je ne nourris pas de trop grands espoirs. À mon avis, il serait prématuré d'agir ainsi à l'heure actuelle. Même les exercices militaires du mois d'août n'étaient pas menaçants au point que nous devions prendre une telle mesure.
    J'estime qu'il faut tracer une certaine ligne rouge. Nous devons être prêts. Nous devons savoir de quoi il s'agit, et cela va nécessiter des pourparlers. Serait‑ce, par exemple, des vols dans le ciel directement au‑dessus de Taïwan? Cela suffirait‑il?
    En dépit du fait que nous entretenons des relations avec l'Ukraine et que ce pays fait partie des Nations unies depuis longtemps, cela n'a pas empêché la Russie de l'envahir. L'établissement d'une telle relation n'empêcherait pas nécessairement une guerre, mais nous augmenterions ainsi le coût d'une guerre pour la Chine en lui signifiant que nous sommes sérieux au sujet de Taïwan et que la communauté internationale est disposée à défendre Taïwan.
    Vous avez aussi recommandé au Parlement de renforcer son rôle; je suppose que vous vous dites par là en faveur de voyages de députés à Taïwan dans le cadre d'échanges de parlementaires. Ai‑je raison?
(2020)
    Vous avez tout à fait raison. Nous envoyons de telles délégations à Taïwan depuis les années 1970, et de nombreux autres pays font de même. Ce sont des échanges assez courants. Je crois que nous devons continuer à le faire.
    Merci de cette précision.
    Selon vous, quand la Chine envahira‑t‑elle Taïwan?
    Je ne peux pas vous donner de date. Récemment, le gouvernement des États-Unis a dit certaines choses. Il avait parlé de 2049, puis de 2027. Aujourd'hui, il dit que ce sera peut-être en 2023, ou plus tard cette année. Ce n'est vraiment pas mon rôle, je crois, d'essayer de deviner quand la Chine fera cela.
    À mon avis, ce que nous devons plutôt faire, au lieu d'essayer de deviner quand la Chine le fera, c'est de tenter de l'inciter à repousser la date le plus possible.
    Je sais qu'il y a eu une certaine incrédulité quand le gouvernement Biden a donné à entendre tard l'an dernier que la Russie était sur le point d'envahir l'Ukraine. Aucun de nous ne voulait croire que cela se produirait. Malheureusement, l'invasion a eu lieu le 24 février. Je prends un peu plus au sérieux maintenant l'analyse de Washington au sujet de cette possibilité. Je crois qu'il nous incombe, à titre de parlementaires, d'étudier les divers scénarios éventuels.
    Partagez-vous le point de vue du représentant taïwanais selon lequel, en entretenant des liens plus étroits avec Taïwan — tant à titre officieux, par des liens entre législateurs, qu'officiellement dans le cadre de la négociation d'accords sur la promotion et la protection des investissements étrangers et d'accords de libre-échange —, nous accroissons pour Pékin le coût d'une invasion de Taïwan?
    En fait, nous façonnons le monde où nous vivons avec les accords que nous concluons. Je suis donc tout à fait d'accord avec lui au sujet de l'établissement de relations plus étroites avec Taïwan à tous les égards — par des accords sur la promotion et la protection des investissements étrangers, des relations entre citoyens, des relations entre les universités de Taïwan et d'autres universités et même par le travail de l'Église presbytérienne à Taïwan ou de l'Église unie du Canada. Tous ces efforts sont très importants pour nos relations. Ils sont importants pour influer véritablement sur le rôle que Taïwan joue dans le monde et pour faire en sorte que ce rôle grandisse. C'est bon pour la démocratie.
    Vous avez déclaré dans le passé que le Canada a longtemps supposé, comme d'autres démocraties, que la participation de Pékin aux affaires internationales a favorisé la paix. Cependant, il est de plus en plus clair que la République populaire de Chine est prête à recourir à la force et à la coercition militaires, même contre le Canada, afin d'arriver à ses fins.
    Selon vous, le gouvernement canadien devrait‑il être plus explicite au sujet de ce problème en disant à Pékin plus directement que les hypothèses que nous avons acceptées au sujet de la Chine, à savoir qu'elle était un acteur pacifique dans le monde, s'érodent rapidement et que, par conséquent, nous allons réviser notre politique dans la région indopacifique en fonction de cette nouvelle réalité?
    Je crois que le Canada a joué un rôle lorsqu'il s'est agi d'intégrer la Chine dans l'appareil des Nations unies, en invoquant l'argument selon lequel l'exclusion de ce pays des débats constituait une menace pour la paix mondiale. Nous avons fait entrer la Chine dans les Nations unies en supposant que son adhésion au système mondial favoriserait la paix mondiale et que les enjeux relatifs au détroit de Taïwan seraient dès lors réglés pacifiquement.
    De toute évidence, ce n'est pas le cas maintenant. Ce n'est pas uniquement à cause des menaces pesant sur Taïwan et sur le Canada, qui sont bien concrètes; il y a aussi le génocide qui se déroule à Xinjiang et les menaces exprimées contre l'Inde et le Japon.
    Nous devons, selon moi, signifier très clairement à la Chine que le Canada est sérieusement et gravement préoccupé par tous ses actes d'agression. Je pense que nous devons aussi renseigner la population du Canada à ce sujet.
    Je vous remercie, messieurs Simon et Chong.
    Nous passons maintenant à M. Oliphant pendant six minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je vous remercie, monsieur Simon, d'être des nôtres ce soir.
    Vous avez déclaré dans votre exposé — et je crois que votre compréhension des choses est juste — que « l'intérêt premier du Canada réside dans la paix, la liberté et l'ouverture de la région indopacifique ». Ce serait là notre but, je crois. Vous avez aussi parlé de moyens à prendre pour « renforcer » — ou peut-être rétablir, malheureusement — « le statu quo pacifique ». Ce but est exprimé dans votre exposé, et c'est aussi celui du Canada.
    David Wright, de l'Université de Calgary, qui a récemment comparu devant notre comité, a déclaré: « Certaines des mesures que les pays démocratiques » — et j'ajouterais certains membres des partis d'opposition — « veulent prendre pour protéger la démocratie à Taïwan pourraient très bien donner le résultat inverse ». Il a ajouté: «  Peut-être que, pour faire la bonne chose, il faut surtout éviter de faire la mauvaise chose. »
    Je veux que vous travailliez un peu avec moi sur cette question, car nous avons utilisé un système dans le cadre duquel nous avons cherché à ne pas avaliser ni à contester les attitudes ou les actions de la République populaire de Chine relativement à Taïwan. La Chine nous bouscule. Certaines personnes ont pour réaction de vouloir donner la réplique. Je crains parfois que cela risque d'accroître le danger pour la population de Taïwan. Mon but serait de trouver un juste milieu entre pousser la Chine, d'une part, et mettre Taïwan en danger, d'autre part.
    Pouvez-vous m'aider un peu à cet égard?
(2025)
    Je crois que cette conversation se poursuit depuis un certain temps. Ce que l'on oublie souvent, c'est que le Canada a décidé... En fait, quand le secrétaire d'État aux Affaires extérieures, Mitchell Sharp, a négocié avec la Chine, ce pays a approuvé notre décision de ne pas avaliser ses actions ni de les contester.
    Je pense qu'il ne nous est pas nécessaire de toujours le faire publiquement, mais nous devons rappeler aux Chinois que nous ne souscrivons pas à leurs revendications à l'endroit de Taïwan. Nous ne les avons jamais acceptées. Nous en avons pris note, mais ne les avons jamais acceptées.
    En ce qui concerne les mesures concrètes, certaines pourraient être trop provocatrices, mais à vrai dire, j'estime que le Canada ne devrait pas s'en faire à ce sujet autant que les États-Unis, par exemple. La Chine tend de bien des façons à percevoir les États-Unis comme un pays ennemi. Le Canada ne représente pas vraiment la même menace pour la Chine. Par conséquent, je crois que nous pourrions faire bien des choses que les Américains doivent éviter, et je pense que nous devrions explorer cet aspect.
    Nous disons que la reconnaissance de Taïwan dans les tribunes internationales est importante. C'est là une forme de réplique, mais nous avons fortement encouragé la participation de ce pays là où il peut apporter une contribution. Nous continuons de renforcer les relations commerciales et les liens de citoyen à citoyen. J'aimerais beaucoup mieux comprendre sur quel plan nous pourrions répliquer sans rebuter les Taïwanais, car il est important de respecter l'ego.
    Je ferais écho aux propos de M. Pearson au sujet de la population. C'est elle qui doit participer au débat sur cette question. Nous parlons ici de la population de Taïwan. Je ne veux pas lui faire de mal. Je veux la pousser à agir, mais sans la blesser. Comment faire cela?
    Je crois que, pour cela, il nous faut dialoguer avec Taïwan et, souvent, travailler sur des dossiers communs — les questions autochtones, par exemple. Le Canada et Taïwan acceptent tous deux les mariages homosexuels et les droits de la communauté LGBT. Le pays a une présidente, et le parlement comprend de nombreuses députées; donc, au chapitre du féminisme, notre politique étrangère féministe devrait trouver écho là‑bas. Les mêmes propos valent pour le développement durable.
    Peut-être pourrions-nous aussi travailler avec Taïwan à certains de ses projets de développement dans d'autres parties du monde, comme Haïti ou l'Océanie, et les renforcer en adoptant de nombreux moyens qui échappent à la surveillance de la Chine, mais qui sont tout de même utiles.
    J'aime bien rappeler à tous et toutes que l'ancien président Ma, en sa qualité de maire de Taipei, a été le premier maire asiatique à établir un festival de la fierté gaie.
    C'est une chose à laquelle nous accordons de la valeur, au Canada; par conséquent, nous l'encouragerons et nous trouverons des moyens de le faire. Je ne me soucie pas de contrarier la Chine, mais en protégeant Taïwan en même temps, nous trouverions à cet égard le juste milieu que nous recherchons.
    Je suis content que vous mentionniez Mitchell Sharp, mon premier mentor politique. Je pense que l'idée de ne pas accepter le point de vue de la Chine au sujet de Taïwan et de trouver plutôt des moyens de le contester judicieusement serait l'autre chose à faire.
    En ce qui concerne le statu quo pacifique, croyez-vous qu'il en existe un? Existe‑t‑il un statu quo qui n'est pas pacifique? Ou avons-nous un statu quo dangereusement précaire?
(2030)
    Je crois qu'à l'heure actuelle, la paix est très précaire.
    L'hon. Robert Oliphant: C'est une paix précaire.
    M. Scott Simon: Oui. Je dis cela parce que la paix, c'est l'absence de guerre. Il existe, bien sûr, des tactiques de zone grise qui se rapprochent de la guerre. Je pense que les exercices menés en août constituent un bon exemple de cela. Je crois que la Chine essaie d'habituer le monde à ces tactiques.
    Que dire de l'envoi d'une frégate canadienne dans le détroit de Taïwan à ce moment‑là?
    Oui. Je crois que c'est un signal indiquant à la Chine que nous sommes très préoccupés par la situation.
    Nous avons fait cela.
    M. Scott Simon: Oui.
    L'hon. Robert Oliphant: Je vous remercie, monsieur le président.
    Je vous remercie beaucoup, monsieur Oliphant.
    Nous passons maintenant à M. Bergeron pendant six minutes ou moins.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Monsieur Simon, mes questions iront dans le même sens que celles de mon collègue M. Oliphant.
     En février dernier, le directeur général pour l'Asie du Nord d'Affaires mondiales Canada, M. Weldon Epp, s'est présenté devant le Comité permanent des affaires étrangères et du développement international. Il y a réitéré la position du Canada quant au fait que le Canada n'appuie pas les revendications de la Chine sur Taïwan, mais qu'il ne les conteste pas non plus. Tout est une question de nuances, mais vous avez dit, il y a quelques instants, que vous ne les contestiez pas, mais que vous ne les aviez jamais acceptées.
    Dans votre esprit, quelle est la différence entre ne pas contester les revendications de la Chine sur Taïwan et ne pas les accepter?
    À mon avis, il y a une grande différence entre les deux.
     Pour que l'on puisse établir des relations avec la Chine, cette dernière a demandé qu'on reconnaisse que Taïwan est partie intégrante de la Chine. M. Mitchell Sharp a dit que c'était impossible, parce que Taïwan ne fait pas partie de la Chine.
    Le fait que la Chine demande au Canada de reconnaître cela, c'est déjà une preuve. La Chine n'a pas demandé que le Canada reconnaisse que le Shandong fait partie de la Chine et le Canada n'a pas demandé à la Chine de reconnaître que l'Alberta fait partie du Canada.
    Si l'on ne conteste pas les revendications, c'est parce que l'on veut entretenir des relations avec la Chine. Si l'on n'accepte pas les recommandations, c'est parce que c'est un fait établi que Taïwan ne fait pas partie de la Chine. On ne peut donc pas appuyer la position de la Chine.
    Je suis désolé d'insister, mais cela me paraît extrêmement important.
    Quand on n'accepte pas un état de fait, n'est-ce pas, de facto, une façon de contester cet état de fait?
    Je pense que c'est une formule très diplomatique.
    Cela conteste très clairement la revendication de la Chine voulant que Taïwan appartienne à la République populaire de Chine. Cette convention diplomatique était nécessaire, en 1970, pour avoir une relation diplomatique avec la Chine.
     Si je comprends bien ce que vous nous dites, dans les faits, le Canada conteste les prétentions de la Chine sur Taïwan, mais il fait mine de ne pas les contester.
    Oui, c'est de la fiction. Même la Cour supérieure du Québec, il y a 18 ans environ, dans le recours de François Parent contre Singapore Airlines Limited, la Civil Aeronautics Administration de Taïwan, a dit que c'était de la fiction diplomatique et que les cours n'étaient pas tenues de la maintenir.
    Notre société entière n'a pas besoin de la maintenir.
    Ce que vous nous dites est très intéressant, encore une fois, monsieur Simon.
    En quoi la Cour supérieure du Québec a-t-elle contesté cette fiction?
    Elle a dit que cela ne s'appliquait qu'à ce cas très particulier, parce qu'un avion s'était écrasé à l'aéroport de Taipei. M. François Parent avait poursuivi l'administration de l'aviation civile de Taïwan.
    La Cour supérieure du Québec était obligée de décider si Taïwan était un État ou non. Or elle a tranché et a considéré que, dans ce contexte, Taïwan était un État.
(2035)
    C'est très intéressant.
    En octobre dernier, vous avez publié un article intitulé « Comprendre les relations entre le Canada et Taïwan — Pourquoi le Canada a besoin d’une nouvelle stratégie pour contribuer à la préservation de la paix dans le détroit de Taïwan ». Vous y réclamez que le Canada mette à jour sa stratégie à l'égard de Taïwan, notamment en organisant la tenue de discussions directes entre des représentants gouvernementaux et d'anciens diplomates, des universitaires et des groupes de réflexion du Canada et de Taïwan.
     Comme mon collègue le disait, le Parlement peut lui aussi renforcer son rôle, peut-être en suivant l'exemple du Japon et en amorçant un dialogue bilatéral sur la sécurité de Taïwan.
    En quoi l'exemple du Japon peut-il inspirer le Canada?
    Je pense que la relation entre le Japon et Taïwan pourrait inspirer le Canada à plusieurs égards.
    Dans ce rapport, j'ai donné l'exemple d'un dialogue tenu entre les partis politiques sur la sécurité et la défense. Ce n'est pas un dialogue d'État à État, entre les ministères de la Défense, etc., mais entre les partis au pouvoir. Il serait donc possible d'amorcer une telle démarche entre le Parti libéral et le Parti démocrate progressiste de Taïwan. C'est le modèle proposé.
    Il y a une autre chose que j'aimerais ajouter. Quand Mme Sgro s'est rendue à Taïwan avec la délégation, il y a eu un défilé. Les membres du Parlement du Japon ont participé à ce défilé pour célébrer la fête nationale de la République de Chine à Taïwan. C'était donc tout à fait public. Ils ont contribué au défilé.
    Les parlementaires canadiens ont-ils participé au défilé?
    Ils étaient spectateurs.
    Laissez-vous entendre que les parlementaires canadiens auraient dû prendre part au défilé?
    Je pense que ce serait peut-être une bonne idée de le faire à l'avenir.
    D'accord. Dites-moi si...

[Traduction]

    Monsieur Bergeron, je suis désolé, mais il ne vous reste plus de temps.
    M. Stéphane Bergeron: Je reviendrai.
    Le président: Très bien. Merci.
    Madame McPherson, allez‑y. Vous avez six minutes ou moins.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Quelle conversation fascinante nous avons! Merci beaucoup, monsieur Simon, d'être ici et de partager vos opinions avec nous.
    Je pense que nous essayons tous de trouver des moyens de préserver la paix à Taïwan. C'est le but de tout le monde, je crois. Vous avez parlé de mesures telles que travailler à l'atteinte de buts relatifs au développement durable, ou de façons dont nous pouvons collaborer avec les Taïwanais aux fins de l'aide au développement. Ces mesures me font plaisir, bien sûr. Je sais que vous êtes un spécialiste des relations autochtones à Taïwan.
    Que signifie le fait que Taïwan ne peut pas participer aux travaux des Nations unies? Que perdons-nous quand nous ne pouvons pas entendre Taïwan parler aux Nations Unies de choses comme la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones ou les relations avec les Autochtones?
    Nous perdons bien des choses parce que Taïwan ne fait pas partie des Nations unies. Je crois que le représentant a parlé un peu de cela relativement à l'OMS, entre autres.
    En outre, puisque nous parlons des questions autochtones, il y en a qui se rapportent aux droits autochtones à Taïwan et qui n'ont pas été réglées, par exemple en ce qui a trait aux droits des peuples autochtones de chasser selon leurs traditions. Dans bien des cas, la chasse a été criminalisée. Parce que Taïwan ne fait pas partie des Nations unies, les citoyens — le peuple de Taïwan, y compris les Autochtones — n'ont pas accès au rapporteur spécial sur les droits autochtones. Ils n'ont pas un accès complet à la tribune permanente. Quand ils s'y rendent — ils y vont tous les ans —, leur participation se limite aux activités connexes. Il serait avantageux pour les peuples autochtones d'avoir effectivement un accès complet aux délibérations des Nations unies sur les droits autochtones.
    Je vous remercie.
    Vous avez aussi parlé des universités et du fait qu'elles ont besoin de davantage d'orientation, et cela a éveillé mon attention.
    Qu'avez-vous voulu dire par là et quel genre d'orientation leur faut‑il?
    Ce à quoi je pensais à ce moment‑là — et j'espérais que quelqu'un m'interroge à ce sujet —, c'est qu'en général, notre chaire d'études sur Taïwan ne nous cause aucun problème et que la Chine n'exerce sur nous aucune pression à cet égard, mais un incident s'est produit en 2015, quand un conférencier, M. Andrew Young, politologue et sociologue, est venu parler du rôle de la République de Chine pendant la Seconde Guerre mondiale.
    Un assistant a affiché le drapeau de la République de Chine dans le site Web aux fins de la publicité, et l'ambassade a communiqué avec l'université et en a bombardé l'administration, jusqu'au président, de courriels et d'appels téléphoniques à ce sujet. L'université craignait beaucoup que l'ambassade annule une cérémonie de signature qui allait avoir lieu à l'Académie des sciences. Un de nos vice-doyens m'a averti que, à l'avenir, nous devrons éviter d'utiliser tout propos ou symbole susceptible d'irriter l'ambassade de la République populaire de Chine.
    C'est à cela que je pensais. Il faut vraiment que le gouvernement conseille aux universités de n'accepter aucun ordre provenant des ambassades étrangères.
(2040)
    C'est, bien sûr, difficile à faire quand le gouvernement essaie de ne rien dire du tout parfois.
    Oui.
    Vous avez parlé un peu de l'aide au développement, en disant que le Canada pourrait, entre autres, travailler avec Taïwan pour soutenir Haïti. Bien sûr, c'est là un sujet que le comité des affaires étrangères étudie actuellement. De toute évidence, vu ce qui se passe à Haïti, le pays a un besoin pressant d'aide humanitaire.
    Pouvez-vous me parler un peu d'autres façons dont le Canada pourrait collaborer avec Taïwan relativement au développement international? Quelles sont les priorités de Taïwan et pouvez-vous peut-être nous dire quelques mots sur le stade où en est Taïwan en matière d'aide au développement?
    Oui, Taïwan offre une aide au développement international qui met bien sûr l'accent sur les pays ayant des relations diplomatiques avec la République de Chine. Ces pays reconnaissent effectivement le gouvernement de Taïpei comme étant le gouvernement de la Chine, ce qui tient un peu de l'anachronisme de certaines façons, mais c'est tout de même utile parce que cela signifie que Taïwan n'a pas à déclarer son indépendance de la République de Chine.
    Je reviens à la question du développement. Il y a tellement d'endroits en Afrique! Taïwan n'est maintenant présente que dans un pays d'Afrique, soit l'Eswatini. Selon moi, il serait très utile de travailler avec Taïwan à des projets de développement — et Haïti est un bon exemple — et de rappeler à d'autres pays comme Haïti qu'ils agissent en ce sens et qu'ils sont très heureux d'avoir des relations avec la République de Chine.
    C'est un aspect de la nature précaire de la paix qui existe là. Certains pays reconnaissent encore la République de Chine comme étant le gouvernement de la Chine.
    Lors d'une conférence à laquelle j'ai assisté, un professeur de l'Académie chinoise des sciences sociales s'est vu poser la question: « Qu'arriverait‑il si la Chine enlevait à Taïwan tous ses alliés? » Le professeur a répondu: « Nous ne pouvons laisser cela se produire, car Taïwan n'aurait alors d'autre choix que de déclarer l'indépendance. »
    Je crois que cette situation étrange où une poignée de pays reconnaissent Taïpei comme étant le gouvernement de la Chine constitue en fait un facteur de stabilisation, et nous pouvons étayer cette réalité en travaillant sur cette question avec Haïti, Palau, Nauru et tous ces petits pays.
    Voyez-vous le ...
    Madame McPherson, je suis désolé, mais votre temps est écoulé.
    Nous passons à notre deuxième période de questions avec M. Kmiec pendant cinq minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je reviens à la question des universités, car vous avez dit que vous aviez besoin de consignes. Vous n'avez pas vraiment précisé de quel genre de consignes il s'agirait.
    Pouvez-vous en dire plus long là‑dessus? S'agit‑il simplement d'instructions sur la façon de traiter avec les ambassades étrangères, ou envisagiez-vous d'autres éléments?
(2045)
    Je pense qu'il faut aller un peu plus loin que cela. Il s'agit des universités, mais aussi de tout l'environnement de recherche où nous vivons.
    J'ai mentionné les menus déroulants, parce que, quand on parle de coopération avec d'autres pays dans le formulaire de demande du Conseil de recherches en sciences humaines, le menu déroulant dit: « Taïwan-Province de la Chine. » Cela donne l'impression que le gouvernement du Canada avalise la revendication de la Chine à l'égard de Taïwan.
    Je crois qu'il nous faut des consignes de sorte que les universités, les autres établissements d'enseignement et tout le réseau de la recherche que nous avons se conforment à la politique du Canada et ne donnent pas l'impression qu'ils entérinent la politique de la Chine.
    Récemment, en août de cette année, le gouvernement de l'Alberta a assoupli certaines des restrictions qu'il avait imposées aux universités albertaines — nous les appelons « polytechniques » — et la façon dont elles peuvent nouer des liens avec le gouvernement chinois. Cependant, il a maintenu certaines restrictions, par exemple celles concernant la signature de nouveaux accords pour les chercheurs invités et les boursiers faisant des études postdoctorales et les modalités relatives à la commercialisation de la recherche, aux transferts de technologie et à la propriété intellectuelle. Dans ces cas, il est interdit aux universités de signer de nouveaux accords ou de conserver des accords préexistants.
    Est‑ce là le genre de consignes qu'il faudrait donner à toutes les universités canadiennes — surveiller les types de relations qu'elles établissent à long terme avec des institutions établies en Chine continentale —, ou doivent-elles favoriser les relations avec les universités taïwanaises?
    Je conviens qu'il doit y avoir des lignes directrices sur les relations avec la Chine également, mais je pense que les universités hésitent parfois beaucoup à nouer des liens avec Taïwan.
    Je travaille là‑dessus à l'Université d'Ottawa depuis 20 ans. Nous avons connu un grand succès. Nous avons établi des protocoles d'entente avec de nombreuses universités de Taïwan, mais cela a nécessité beaucoup d'efforts.
    Taïwan est un des pays prioritaires pour l'Université d'Ottawa, mais il y a des universités qui sont très timides à cet égard, car elles craignent de mettre en péril leur coopération avec la Chine. D'après notre expérience à l'Université d'Ottawa, les liens établis avec Taïwan ne compromettent pas nos relations avec la Chine. Nous pouvons nouer des liens avec les deux pays.
    Serait‑il utile alors que le Canada adopte une loi-cadre simple — comme certains partis aiment l'appeler — qui ressemblerait à une loi sur les relations officielles entre le Canada et Taïwan? Une telle loi guiderait les universités canadiennes. Ce serait un signal plus positif comparativement au signal négatif interdisant de faire ceci ou cela. Nous pourrions dire d'un ton positif que nous aimerions les voir poursuivre des relations plus étroites avec les universités, les polytechniques et les collèges de Taïwan, et cela favoriserait les relations interpersonnelles entre les Canadiens et la population de Taïwan.
    Est‑ce là quelque chose qui nous aiderait?
    Je crois qu'une loi sur les relations canado-taïwanaises serait très utile. Il importe de bien préciser qu'elle aurait pour but de créer des lignes directrices pour les Canadiens dans le cadre du protocole que nous avons déjà.
    Pensez-vous qu'une loi de ce genre doit être très détaillée, ou pourrait-elle être un genre d'énoncé-cadre de valeurs ne comportant que des éléments généraux? Je sais que la U.S. Taiwan Relations Act est très détaillée. Elle aborde même la relation militaire et relative à la sécurité. La nôtre devrait-elle faire de même, ou devrait-elle se limiter aux aspects civils de notre relation?
    Je pense que nous devrons en débattre au cours des années à venir. La loi devrait être assez détaillée et approfondie et porter sur divers aspects de nos relations avec Taïwan dans un contexte sociétal global. Cela inclurait la défense, bien sûr.
    Combien de temps me reste‑t‑il?
    Il vous reste 50 secondes.
    Parfait.
    En ce qui concerne les relations interpersonnelles, j'ai déjà posé à un représentant ici une question sur l'intimidation qui se fait au Canada. C'est une question que j'ai posée à presque chaque réunion à laquelle j'ai pu assister.
    Êtes-vous au courant de cas d'intimidation de citoyens, visiteurs au Canada ou personnes essayant de faire des affaires ici au nom d'entreprises taïwanaises pour conclure un accord avec une université canadienne? Existe‑t‑il une ingérence d'origine étrangère, notamment de la part des ambassades ou des consulats de la République populaire de Chine?
    Nos étudiants viennent de Hong Kong et de Taïwan. Nous avons des étudiants ouïghours et tibétains. Ils nous font savoir qu'une ingérence existe et qu'ils font l'objet de menaces.
    Je vous remercie, messieurs Simon et Kmiec.
    Nous passons maintenant à M. Cormier pendant cinq minutes ou moins.

[Français]

     Monsieur Simon, je vous remercie d'être avec nous ce soir. Les discussions que nous avons sont très intéressantes.
    Certaines questions ont déjà été posées par mes collègues, mais vos propos sur les droits des Autochtones ont piqué ma curiosité. D'ailleurs, je pense que vous faites un peu de recherches sur ce sujet.
    Plus tôt, j'ai lu une note dans laquelle on disait que certains groupes autochtones étaient exclus du processus relatif à Taïwan.
    Y a-t-il des similarités entre ce qu'ont vécu les peuples autochtones du Canada et ce que vit le peuple de Taïwan? Quel est le grand problème que vous observez à ce sujet?
    Ce sujet est intéressant.
    Je viens de terminer un livre sur cette question. C'est le deuxième livre que j'écris sur les peuples autochtones.
    Il y a effectivement certaines ressemblances dans nos histoires, notamment la perte de territoires et la difficulté à obtenir une reconnaissance de la souveraineté des peuples autochtones. Plusieurs questions sont très semblables.
    À certains égards, je pense que Taïwan a une meilleure note que le Canada. Par exemple, toutes les communautés autochtones de Taïwan ont accès à l'électricité et à l'eau potable, ce qui n'est pas le cas au Canada.
    Ma question portait aussi sur le fait que certains groupes sont exclus du conseil des peuples autochtones. Si je ne me trompe pas, il s'agit de 10 ou 12 groupes.
    Pourquoi ces groupes en sont-ils exclus?
(2050)
    Il y a des instances autochtones à l'ONU de façon permanente. Taïwan est exclu de toutes les instances de l'ONU. En fait, c'est en contradiction avec l'objectif d'un forum permanent sur les questions autochtones à l'ONU. Normalement, les peuples autochtones devraient avoir un accès direct à l'ONU, sans l'interférence des États. Ce principe n'est pas respecté dans le cas de Taïwan.
     D'accord.
    Vous avez aussi dit qu'il fallait faire tout notre possible pour prévenir un conflit ou une guerre. Ce qui m'intéresse beaucoup, dans ce comité, c'est tout ce qui a trait à nos relations commerciales et à l'économie de notre pays, y compris l'économie mondiale, qui pourrait souffrir grandement.
    Selon vous, quelle serait la plus grande menace pour l'économie canadienne, si un conflit survient entre la Chine et Taïwan?
    Ce serait vraiment une catastrophe économique pour le Canada et pour le monde entier. Si jamais il y avait un conflit — je ne parle même pas d'une invasion —, comme un embargo contre Taïwan, on perdrait l'accès au port de Taïwan et de la Chine. Cela bloquerait le transport maritime, et on risquerait de perdre nos investissements en Chine, ainsi que les importations en provenance de Taïwan et de la Chine.
    D'accord.
    Je pense que tous les membres du Comité sont d'accord pour dire que les droits de la personne doivent être la priorité absolue.
    Je pose souvent la question suivante aux témoins: selon vous, d'un point de vue économique, le Canada peut-il se passer de la Chine en tant que partenaire commercial éventuellement?
    La Chine est un immense pays, avec une grande population. On voit qu'il y a maintenant une tendance en Chine à se déconnecter de l'économie mondiale. C'est la Chine qui fait cela, et non l'Occident.
    La Chine a besoin du monde entier, et le monde entier a aussi besoin de la Chine. À long terme, je pense qu'il est très important que la Chine soit intégrée au monde.
    Si vous aviez des recommandations à faire à ce comité quant à ce que le Canada pourrait faire mieux ou différemment pour Taïwan, quelles seraient ces recommandations?
     Pouvez-vous résumer cela en un ou deux points?
    Le Canada doit en faire plus pour appuyer Taïwan, mais avec la collaboration d'autres États de la région. Il pourrait améliorer sa relation avec le Japon, parce que la question de Taïwan est très importante pour le Japon. Il devrait collaborer plus étroitement avec le Japon sur les questions relatives à la paix et à la sécurité dans la région.

[Traduction]

    Je vous remercie, monsieur Cormier.

[Français]

    Je vous remercie, monsieur Simon.
    En passant, je voulais vous féliciter pour votre excellent français.

[Traduction]

    Nous passons à M. Bergeron, qui disposera de deux minutes et demie.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    J'appuie le commentaire de mon collègue M. Cormier.
    Je vous remercie infiniment, monsieur Simon, de vous exprimer et de répondre dans un français impeccable aux questions qui vous sont posées dans la langue de Molière.
    J'aimerais revenir à la question du Japon.
    On parle d'un dialogue bilatéral sur la sécurité. Vous nous avez parlé des relations entre partis politiques, mais, concrètement, que signifie ce dialogue bilatéral sur la sécurité, et quels résultats cela donne-t-il?
    Ce dialogue bilatéral vient tout juste de commencer au Japon. C'est le début d'un dialogue.
    L'effet le plus important est de mettre en évidence dans le discours public la situation de la région. Cela démontre l'importance du Japon en ce qui concerne la situation dans le détroit de Taïwan. Cela implique aussi des îles japonaises situées juste à côté de Taïwan.
    Selon vous, à quels résultats ce dialogue bilatéral sur la question précise de la sécurité peut-il mener?
(2055)
    Ce dialogue démontre au monde entier, et à la Chine aussi, que nous sommes prêts à collaborer avec Taïwan pour sa protection. Les États‑Unis et le Japon ont certainement une avance sur le Canada, mais je pense que le Canada pourrait aussi mener des initiatives.
    D'après vous, qu'est-ce que le Canada pourrait faire?
    Ce ne serait pas nécessairement les mêmes initiatives conjointes que nous menons déjà avec le Japon, mais nous pourrions commencer en menant de petites initiatives. Par exemple, on pourrait mener des initiatives avec la garde côtière en collaboration avec Haïti.
    Il s'agit de commencer par discuter ensemble de petits projets comme cela.
    D'après vous...

[Traduction]

    Monsieur Bergeron, je suis désolé, mais vous êtes à court de temps.

[Français]

     Nous aurons d'autres occasions.
    Je vous remercie, monsieur Simon.

[Traduction]

    Le frappeur clé est au bâton. Le coureur gagnant est à la plaque de but.
    Madame McPherson, vous avez les deux dernières minutes et demie.
    C'est toujours à moi de jouer ce rôle, n'est‑ce pas, monsieur le président?
    Je terminerai en faisant le suivi de certaines des questions posées par M. Bergeron.
    Nous savons que la stratégie indopacifique est en préparation. C'est ce que l'on nous a dit à maintes reprises. Je suppose qu'elle sera prête à un moment donné.
    Qu'aimeriez-vous voir dans son contenu? Selon vous, à quoi ressemblerait une stratégie fructueuse sur la région indopacifique pour Taïwan quand elle sera annoncée? Si vous le pouviez, quel conseil donneriez-vous à notre ministre des Affaires étrangères?
    Il importe d'être très précis dans la stratégie et de dire que le Canada favorise la paix et la sécurité dans le détroit de Taïwan et qu'il est contre toute agression unilatérale. J'espère que la stratégie manifestera un appui solide pour Taïwan.
    Vous avez parlé de nos relations et du fait que le Japon a un rôle important dans ce contexte. Vous avez dit que le Japon avait assumé une sorte de rôle de chef de file à cet égard. Avec quels autres pays devrions-nous surtout continuer à travailler, en plus du Japon, bien sûr?
    Je pense que nous avons une grande diaspora venant d'autres pays de la région — par exemple, les Philippines et le Vietnam. Selon moi, il faudrait accorder la priorité à ces pays.
    Une autre région où nous jouons un rôle spécial est l'Océanie. Grâce à notre patrimoine français et anglais, nous pouvons communiquer avec les populations de ces pays.
    Avez-vous d'autres observations avant que nous concluions cette soirée?
    Non. Je vous remercie beaucoup. Je pense qu'il importe grandement de reconnaître que nous entretenons avec Taïwan une relation indépendante de celle que nous avons avec la République populaire de Chine, et nous devons garder cela à l'esprit dans tous nos travaux.
    Je vous remercie d'être venu aujourd'hui et d'avoir partagé tous ces points de vue avec nous.
    M. Scott Simon: Je vous remercie.
    Mme Heather McPherson: Monsieur le président, c'est tout pour moi.
    Je vous remercie, madame McPherson.
    Monsieur Simon, je vous suis très reconnaissant d'avoir passé la soirée avec nous. Il se fait tard, et nous vous remercions énormément de votre temps.
    Nous allons maintenant faire une pause. Pour les personnes qui nous suivent sur Zoom, un lien vous est envoyé maintenant. Nous reviendrons dans quelques minutes pour une courte séance à huis clos.
    Oui, monsieur Chong.
    J'invoque le Règlement. Au début de la réunion, notre témoin, M. Medeiros, n'a pas pu comparaître. Il semble qu'il y ait eu un problème de communication entre les techniciens qui ont mis son équipement à l'essai plus tôt et ce qui était nécessaire pour la présente réunion. Je veux simplement m'assurer que cette anomalie aura disparu la prochaine fois, de manière que nous n'ayons pas à priver un témoin de son temps.
    Oui, à ce sujet, monsieur Chong, nous dépassions les limites de ce qui était une qualité audio acceptable venant de M. Medeiros. Nous avons fait un essai plus tôt. Les résultats ont été faibles, mais nous avons consulté nos interprètes et décidé, compte tenu surtout des risques auxquels ils font face, qu'il vaudrait mieux faire en sorte que M. Medeiros ait le bon équipement. Nous l'inviterons de nouveau.
(2100)
    Puis‑je faire une simple suggestion? Nous devrions établir une règle par défaut selon laquelle tous les témoins doivent disposer du bon équipement.
    C'est la règle par défaut. Je répète qu'étant donné les difficultés dont nous avons parlé auparavant et qui concernent la convocation de témoins devant notre comité à cette heure de la journée, nous avons cru pouvoir le faire, mais en fin de compte, nous n'avons pu y arriver, ce qui explique pourquoi M. Simon a dû répondre aux questions à lui seul.
    Je vous remercie de votre intervention à ce sujet. Je pense que nous avons retenu la leçon selon laquelle, sans le bon équipement, un témoin ne pourra pas comparaître devant nous.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Nous allons faire une courte pause et reviendrons à huis clos sous peu.
     [La séance se poursuit à huis clos.]
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