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ERRE Rapport du Comité

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CHAPITRE 4
VALEURS ET SYSTÈMES ÉLECTORAUX : VERS UNE SOLUTION PROPREMENT CANADIENNE

La motion à l’origine du Comité spécial sur la réforme électorale donnait pour mandat à ce dernier de « déterminer et [d’]étudier d’autres modes de scrutin pour remplacer le système majoritaire uninominal à un tour », le système en vigueur, selon cinq principes directeurs : l’efficacité et la légitimité; la participation; l’accessibilité et l’inclusion; l’intégrité; et la représentation locale[139].

Deux questions fondamentales constituent les bases de l’étude du Comité sur les systèmes électoraux potentiels :

  1. « Pourquoi réformer le système actuel? », ou quel est le problème que le Comité « ess[aie] de résoudre au moyen d’une solution différente qui pourrait vraiment fonctionner? »
  2. « Si nous adoptons un système ou un autre, quelles pourraient en être les conséquences? Quels seraient ses effets[140]? »

Le Comité a entendu un large éventail de témoignages et a reçu de nombreux mémoires sur les avantages et les inconvénients potentiels du système électoral actuel et de plusieurs autres systèmes possibles. Les deux questions fondamentales qui constituent les bases de l’étude du Comité sur la réforme électorale – Pourquoi changer? Quels seraient les conséquences des changements? – reposent sur les valeurs et les principes définis dans la motion à l’origine du Comité.

A.  Au sujet des valeurs et des principes

Les cinq principes établis dans la motion créant le Comité sont les suivants :

  • 1)    Efficacité et légitimité : que la mesure proposée augmente la confiance des Canadiens sur le fait que leur désir démocratique, tel qu’il est exprimé par le vote, sera traduit de façon juste dans les résultats du scrutin, et qu’elle réduise la distorsion et renforce le lien entre l’intention des électeurs et l’élection des représentants;
  • 2)    Participation : que la mesure proposée encourage le vote et la participation au processus démocratique, favorise une civilité et une collaboration accrues au sein de la sphère politique, améliore l’unité sociale et offre des possibilités d’inclusion des groupes sous-représentés dans le processus politique;
  • 3)    Accessibilité et inclusion : que la mesure proposée évite une complexité indue du processus de scrutin tout en respectant les autres principes, et qu’elle favorise l’accès par tous les électeurs admissibles, peu importe leur condition physique ou sociale;
  • 4)    Intégrité : que la mesure proposée puisse être mise en œuvre tout en assurant la confiance du public à l’égard du processus électoral, en assurant l’obtention de résultats fiables et vérifiables à l’aide d’un processus efficace et objectif qui est sécuritaire et préserve la confidentialité du vote pour les particuliers canadiens;
  • 5)    Représentation locale : que la mesure proposée assure la responsabilisation et tienne compte de la valeur que les Canadiens accordent à leur collectivité, au fait que les députés connaissent les conditions locales et qu’ils tentent de satisfaire les besoins locaux à l’échelle nationale; la mesure doit aussi permettre aux citoyens d’avoir accès à leur député pour faciliter la résolution de leurs préoccupations et leur participation au processus démocratique[141].

De ces principes, le premier, le troisième et le cinquième sont les plus étroitement liés aux facettes d’un système électoral, ou aux idéaux que doit incarner un système électoral.

Le premier principe, « efficacité et légitimité », s’articule autour de la manière dont les votes se traduisent en sièges à la Chambre des communes, et implique que le système électoral proposé doit veiller à ce que les votes se « traduisent de manière juste » en sièges de manière à « réduire les distorsions » et à « renforcer le lien entre l’intention des électeurs et l’élection des représentants ». Tel qu’expliqué par Byron Weber Becker, « [i]l y a de la distorsion lorsque la représentation au sein du gouvernement diffère grandement du degré de soutien populaire exprimé pendant les élections[142]. » Dans les faits, la réforme du système électoral intéresse le gouvernement fédéral depuis près d’un siècle, depuis que plus de deux partis briguent les suffrages, et a fait l’objet de nombreuses études à l’échelle fédérale et provinciale[143]. La plupart de ces études ont pour fondement la notion de la légitimité de la méthode par laquelle le système électoral en place traduit les votes en sièges, c’est-à-dire le rapport entre l’intention démocratique des électeurs et la représentation au Parlement. Pour répondre à la question globale « Pourquoi réformer le système actuel? », il faut répondre à deux questions sous-jacentes :

  • En premier lieu, si plus de deux candidats briguent les suffrages dans une circonscription donnée, le vainqueur devrait-il obtenir une majorité des voix (plus de 50 %) ou obtenir une simple pluralité des voix (plus de voix que les autres candidats, sans qu’il soit nécessaire de dépasser le seuil de 50 %), comme le prévoit le système actuel?
  • En second lieu, le système électoral, qui considère les circonscriptions comme le véritable terrain de lutte électoral, et par conséquent, qui ne tient pas compte du soutien pour les partis politiques ni des intérêts qui rassemblent plusieurs circonscriptions ou régions, devrait-il, d’une certaine manière, viser à traduire la proportion du vote global des partis en représentation à la Chambre des communes ou au sein des assemblées législatives provinciales?

Le troisième principe porte à la fois sur les éléments des systèmes électoraux, dans la mesure où ils doivent « éviter une complexité indue du processus de scrutin » (soit par la manière dont les électeurs votent ou par les calculs employés pour traduire les votes en sièges), ainsi que sur le caractère inclusif du processus de scrutin, dans la mesure où le système (ou le vote dans son ensemble) doit « favoriser l’accès par tous les électeurs admissibles, peu importe leur condition physique ou sociale ».

Enfin, le cinquième principe reconnaît le caractère fondamental de la représentation locale et de la responsabilisation. En effet, dans un pays aussi diversifié que le Canada sur le plan géographique, le rapport entre la représentation locale et la manière dont les votes sont traduits en sièges est déjà relativement complexe. Notre système parlementaire est fondé sur la représentation selon la population (les circonscriptions doivent essentiellement contenir des poids démographiques semblables), mais on note de grands écarts à ce chapitre. Par exemple, la circonscription la plus populeuse du Canada est Brantford–Brant, en Ontario, avec plus de 132 000 résidents (dont plus de 95 000 électeurs admissibles). Par opposition, le Nunavut est à la fois la circonscription la moins populeuse (elle compte un peu moins de 32 000 résidents) et la circonscription la plus vaste du pays, avec une superficie dépassant 1 750 000 km2. À l’opposé, la circonscription de Papineau (Québec) ne fait que 9 km2 (avec une population d’environ 110 000 résidents). Comme l’a indiqué un témoin à Whitehorse, les trois territoires du Nord sont « surreprésenté[s] sur le plan démographique, mais [sont] très sous-représenté[s] sur le plan géographique[144] ».

Par opposition, il semble que les valeurs définies aux deuxième et quatrième principes devraient s’appliquer, peu importe le système électoral sélectionné, mais le choix du système pourrait déterminer à quel point il est facile ou difficile d’appliquer les principes (puisque certains systèmes sont associés à certaines valeurs). Le deuxième principe, la « participation », amène le Comité à cerner des mesures qui « encouragent le vote et la participation au processus démocratique, favorisent une civilité et une collaboration accrues au sein de la sphère politique, améliorent l’unité sociale et offrent des possibilités d’inclusion des groupes sous-représentés dans le processus politique ». Comme il sera décrit notamment dans le chapitre 9, « Participation des électeurs », l’accroissement de la participation dans le processus politique global est un objectif que partagent tous les membres du Comité. Ce dernier reconnaît que l’atteinte des objectifs de ce principe nécessite un dévouement et des efforts soutenus. Le quatrième principe, l’« intégrité », porte sur le caractère fiable et vérifiable du système électoral, et sur la protection du caractère secret du vote. La confiance du public envers le processus électoral est élevée au Canada; la réforme électorale ne doit pas la miner[145].

1.   Principes et systèmes électoraux : Une question de compromis

De nombreux témoins ont indiqué que les différents systèmes électoraux donnent une importance différente aux principes définis dans la motion à l’origine du Comité. Comme l’a souligné Pippa Norris, « vous ne pouvez pas les trouver toutes [les valeurs] dans une option donnée. Toutes ces valeurs doivent se contrebalancer[146]. » Selon Thomas Axworthy, essentiellement, le choix d’un système électoral au Canada revient à déterminer à quelles valeurs la priorité devrait être attribué, de quelle manière et dans quelle mesure :

[I]l n’y a pas de système électoral parfait. Chaque formule présente des avantages et des inconvénients et c’est donc une question de valeurs, de perspectives différentes qui éclairera votre débat. Il n’y a pas de solution technique au problème de la réforme électorale. C’est un processus politique qui consiste à décider quels sont vos buts et vos valeurs et ceux que vous valorisez le plus[147].

En d’autres mots, comme l’a indiqué Amanda Bittner, « [t]ous les systèmes sont le résultat de compromis […] et il y a, à la base de chacun d’eux, une idée normative de ce que devrait être la politique[148] ».

Un autre témoin, Richard Kidd, a affirmé ce qui suit :

Aucun système n’est parfait. Si nous pouvions trouver le système parfait, tous les pays au monde l’utiliseraient présentement. Chaque système a ses avantages et ses inconvénients, et le défi auquel vous faites face consiste à tenter de trouver celui dont les avantages l’emportent sur les inconvénients, ou qui offre ce que l’on veut obtenir[149].

Le fait qu’il n’existe pas de système parfait n’est pas source de panique ou de paralysie. Jonathan Rose a proposé ce qui suit :

Alors que […] d’autres ont fait valoir qu’il n’y a pas de système parfait, je veux citer Richard Katz, qui prétendait que ce système parfait existe. Il a soutenu que le meilleur système électoral dépend de « qui vous êtes, d’où vous êtes, et d’où vous voulez aller[150] ».

En effet, les principes établis dans le mandat du Comité ont été très utiles pour démontrer qu’aucun système ne parvient à les incorporer tous et pour concentrer les travaux du Comité sur la manière dont ces principes devraient interagir les uns avec les autres afin de créer un système électoral plus robuste pour le Canada. Comme l’a fait valoir Matt Risser, bien qu’aucun système électoral ne soit parfait, certains systèmes s’harmonisent mieux que d’autres avec les valeurs et les principes énoncés :

Je tiens toutefois à revenir sur le commentaire que vous avez fait tout à l’heure et qu’on a aussi souvent entendu de la part de ce comité, à savoir qu’il n’existe pas de système parfait. J’en conviens, bien sûr, mais ce n’est pas parce que le système parfait n’existe pas qu’il n’y a pas de systèmes meilleurs que d’autres[151].

Afin de permettre l’évaluation des forces et des faiblesses des différents systèmes électoraux, la section suivante fait un survol des familles de systèmes électoraux et des principaux principes et éléments qui les distinguent les uns des autres.

B.  Familles de systèmes électoraux : majoritaires, proportionnels et mixtes

1.   Éléments constitutifs des systèmes électoraux

Fondamentalement, un système électoral définit la manière dont les votes se traduisent en sièges au sein d’une législature. Dans un système majoritaire, le candidat élu est la personne qui obtient le plus de voix dans un district électoral. La position des partis politiques dépend des résultats dans chaque district au pays : un parti détient autant de sièges à l’assemblée que le nombre de ses candidats élus. Par opposition, un système proportionnel fait correspondre la proportion de votes obtenus par chaque parti à la répartition des sièges au sein d’une législature. On qualifie les systèmes de « mixtes » (le plus connu est la représentation proportionnel mixte) lorsqu’ils assemblent des éléments des systèmes majoritaires et des systèmes proportionnels pour déterminer la répartition des sièges. L’objectif des systèmes mixtes est d’assurer une meilleure proportionnalité à l’aide de sièges compensatoires qui reflètent la proportion de votes obtenue par les partis tout en conservant les circonscriptions locales représentées par un seul député.

La liste suivante présente certaines des caractéristiques importantes qui distinguent les systèmes électoraux les uns des autres[152] :

  • Le nombre d’élus par circonscription (magnitude de la circonscription) : Dans chaque circonscription, y a-t-il un seul candidat élu ou plusieurs? Le nombre d’élus par circonscription, aussi appelé « magnitude de la circonscription », est l’élément qui distingue les systèmes majoritaires des systèmes proportionnels. Dans les systèmes majoritaires (« une famille de systèmes qui comprend le système électoral majoritaire à un tour, le système de vote préférentiel (VP) australien et le système français à deux tours[153] ») la valeur de la magnitude des circonscriptions est de un, « ce qui signifie qu’il n’y a qu’un gagnant par circonscription ». Les systèmes proportionnels, quant à eux, comptent plusieurs gagnants par circonscription (dans les systèmes mixtes, les sièges compensatoires sont répartis de manière à ce que les régions soient représentées par plus d’un député). En effet, « [a]vec un seul gagnant par circonscription, ce système ne peut être proportionnel, puisqu’une seule personne gagne tout. On ne peut répartir un seul siège entre plusieurs candidats; ce n’est donc pas un système de représentation proportionnelle[154] ». Autrement dit, s’il n’y a qu’un siège par circonscription, il est impossible que ce siège reflète la proportion des voix obtenues par chaque parti ou candidat.
  • Le bulletin : L’électeur coche-t-il le nom d’un seul candidat (les bulletins où plusieurs noms sont cochés sont déclarés nuls), ou place-t-il en ordre de préférence une série de candidats ou de partis? Il est important de noter que le scrutin préférentiel est un outil pouvant s’appliquer tant dans les systèmes électoraux majoritaires (comme le VP de base) ou proportionnels (comme le système de vote unique transférable (VUT), les listes ouvertes de la RPM, etc.).
  • Le seuil d’élection : Quel pourcentage des votes le candidat ou le parti doit-il recueillir pour remporter un siège? Par exemple, dans les circonscriptions uninominales, suffit-il d’obtenir la pluralité des votes (plus de voix que les autres candidats sans qu’il soit nécessaire d’en avoir plus de 50 %), ou faut-il obtenir la majorité des voix (plus de 50 %)? Dans les circonscriptions plurinominales, quel est le seuil ou le quota minimum à atteindre pour être élu (par exemple, déterminer si, dans une constitution comptant trois députés, un candidat qui obtient au moins 33 % des voix remporte un siège)?
  • La détermination des gagnants : Combien d’étapes faut-il suivre pour déterminer le nombre de sièges remportés par chaque parti et le nom des candidats gagnants? Bref, la procédure est-elle simple ou complexe? Par exemple, dans les systèmes proportionnels, la première étape consiste à déterminer la proportion globale des voix obtenues par un parti (au pays ou dans une région du pays), puis la deuxième étape consiste à répartir les sièges selon la proportion des votes (en fonction d’une liste de candidats ou en fonction des votes obtenus par les candidats). Dans les systèmes majoritaires à scrutin préférentiel, quel est le processus utilisé pour déterminer le gagnant?

Tous les témoignages entendus par le Comité ont abordé ces caractéristiques, la manière dont elles correspondent aux principes définis dans le mandat du Comité et leur application dans les différents systèmes électoraux.

C.  Le système électoral en vigueur : Système uninominal pluraliste, ou « système majoritaire uninominal à un tour »

Dans le système uninominal pluraliste du Canada, communément appelé système majoritaire uninominal à un tour (SMUT), le candidat élu est la personne qui obtient le plus de votes dans un district électoral (sans toutefois devoir obtenir la majorité des suffrages). Les partis politiques obtiennent autant de sièges à l’assemblée qu’elle compte de candidats élus. Autrement dit, la proportion des sièges que détient un parti est le résultat (la somme totale) de chaque lutte électorale remportée au pays. En ce qui concerne la formation du gouvernement, le chef du parti qui obtient le plus grand nombre de sièges, et par conséquent qui jouit de la confiance de la Chambre, est généralement invité par le gouverneur général à devenir premier ministre et à former le gouvernement[155].

1.   Forces perçues du SMUT

Bien que l’étude du Comité portait sur les systèmes pouvant remplacer le SMUT, les éléments suivants ont été décrits comme les forces perçues du SMUT en vigueur au Canada.

La démocratie canadienne se classe à un rang élevé au niveau international

Affirmant que la pratique démocratique n’est pas en crise au Canada, Thomas Axworthy remarque que le Canada occupe un rang élevé comparativement à d’autres démocraties :

Si nous prenons les diverses évaluations dont nous faisons l'objet au niveau international, nous constatons que la Banque mondiale, par exemple, qui parraine un projet mondial d'indicateurs de gouvernance accordait, en 2014, au Canada une note de 96 % pour la reddition des comptes, de 91 % pour la stabilité politique, de 95 % pour l'efficacité gouvernementale, de 98 % pour la politique de réglementation, de 95 % pour l'état de droit et de 94 % pour la lutte contre la corruption. Cela nous place dans les 10 premiers.
Le projet sur l'intégrité électorale de Mme Norris classait sans doute probablement le Canada — et si je me trompe, elle pourra le dire — en tête des systèmes électoraux majoritaires avec une note d'environ 75 % à 80 %, au-dessus des États-Unis, etc. Là encore, nous étions en tête.
Cette évaluation internationale des pratiques gouvernementales et des pratiques électorales canadiennes s'est reflétée dans, comme chacun sait, dans l'indice du développement humain des Nations unies où le Canada a toujours figuré dans les 10 premiers et parfois en première place. Je pense qu'en 2014 nous étions classés neuvième.
La solidité de notre système gouvernemental et de notre système électoral a certainement eu un effet positif sur notre classement dans l'indice du développement humain. C'est parce que le système de Westminster allie le pouvoir d'agir et une responsabilisation reliée à ce que David Smith, le brillant universitaire de la Saskatchewan appelle « la Chambre des communes du peuple » — la souveraineté du peuple représentée à la Chambre et la concentration des pouvoirs requis pour gouverner efficacement. C'est vraiment le secret du système de Westminster lorsqu'il fonctionne comme il faut. Il a bien fonctionné au Canada pendant presque toute notre histoire[156].

a. Le SMUT est efficace et simple, tant pour les électeurs que pour les administrateurs électoraux

Au cours de l’étude des solutions de réforme possibles, l’ancien directeur général des élections, Jean-Pierre Kingsley, a souligné « la simplicité relative du système ou du bulletin de vote que nous remplacerions, si nous remplaçons le système actuel » et a fait valoir que « rien ne sera considéré comme étant aussi simple que le système actuel, car nous l’utilisons depuis 149 ans […] Il fait partie de l’ADN du fait d’être Canadien et d’être né au Canada[157] ». Le directeur général des élections actuel, Marc Mayrand, a noté que le système en vigueur « est relativement simple et facile à comprendre[158] ».

En outre, le processus de dépouillement des votes est relativement simple. M. Mayrand a indiqué que l’instauration d’un nouveau système « pourrait faire en sorte qu’il soit difficile de publier les résultats des élections le soir même en effectuant le dépouillement du scrutin manuellement aux bureaux de vote, comme c’est le actuellement le cas ». Il a ajouté que les « Canadiens sont habitués d’apprendre les résultats des élections rapidement, et tout retard possible devrait être envisagé avec soin par le Comité[159] ».

Un certain nombre de participants aux assemblées publiques ont exprimé le point de vue que le système actuel fonctionne bien, est facile à utiliser et devrait être maintenu. Pour citer un participant « le système uninominal majoritaire à un tour nous a bien servis pendant près de 150 ans. Il est simple et facile à comprendre. De grâce, ne le changez pas[160]. » Un autre participant a affirmé que « si le système n’est pas brisé, ne le réparez pas[161] ».

b. Le SMUT donne l’importance à la représentation locale

De nombreux témoins ont mentionné l’importance de la représentation locale comme une caractéristique essentielle. Jean-Pierre Kingsley, ancien directeur général des élections, a souligné « le rapport, le lien, entre l’électeur et la personne élue, en ce qui concerne la représentation des électeurs, collectivement et individuellement, et la responsabilisation des représentants élus ». Il a ajouté que « [l]es Canadiens sont très habitués à ce rapport, à ce lien. Il doit être pondéré très attentivement s’il doit y avoir un changement[162] ».

L’importance de la représentation locale s’est également dégagée dans les consultations en ligne du Comité, où 72,5 % des participants étaient d’accord ou fortement d’accord avec le fait que « le système électoral canadien devrait permettre de s’assurer que les électeurs élisent des candidats locaux pour les représenter au Parlement[163] ».

c. Le SMUT a tendance à produire des gouvernements majoritaires et efficaces

Le SMUT est plus susceptible de produire des gouvernements majoritaires[164]. Comme l’a noté le politicologue Christian Dufour, le SMUT « livre l’essentiel. Il livre des gouvernements à la fois forts et susceptibles d’être congédiés, ce qui n’est pas rien. Dans le contexte de la mondialisation, qui est dangereuse, l’impuissance des démocraties est une chose à éviter. Notre système fait en sorte que les gouvernements sont souvent majoritaires[165]. » Kenneth Dewar, dans son mémoire au Comité, a fait écho à cette position. Il a affirmé :

Le scrutin majoritaire uninominal à un tour a permis d’élire depuis longtemps au Canada des gouvernements efficaces, souvent avec une forte majorité (généralement grâce à la pluralité des voix), et à l’occasion des gouvernements minoritaires également efficaces.[166]

En outre, Kenneth Carty a indiqué que les Canadiens sont habitués à des gouvernements majoritaires, et tout changement nécessiterait une adaptation :

Je crois qu’il est juste de prédire que dans la plupart des autres systèmes électoraux, les gouvernements de majorité tels que ceux auxquels les Canadiens ont été habitués disparaissent. Nous avons si peu d’expérience des gouvernements de coalition dans ce pays que nous n’avons pas d’idée claire de la manière dont ils travailleront ensemble à court terme ou à long terme, ni à quoi ils ressembleront[167].

Enfin, liée à la notion selon laquelle le SMUT produit des gouvernements majoritaires est l’idée selon laquelle ce système permet également d’évincer des gouvernements lorsqu’ils n’ont pas la faveur populaire, ce que Bryan Schwartz appelle l’« alternance» :

Je suis en faveur de l’alternance. J’aime l’idée que les gens au pouvoir changent et qu’on puisse entendre d’autres voix. J’aime l’idée que les politiques soient évaluées et repensées. J’aime l’idée que l’équipe de ceux qui recherchent des faveurs ne gagne pas à chaque fois . J’aime l’idée que les gens qui ne sont pas d’accord avec les autres puissent obtenir le pouvoir et vivre avec le problème[168].

2.   Faiblesses perçues du SMUT

Comme le montre la présente section, la principale critique à l’égard du SMUT est que, dans les cas de circonscriptions où se présentent plus de deux candidats et les luttes électorales comptant plus de deux partis politiques, ce système ne représente pas fidèlement la volonté des électeurs, tant à l’échelle de la circonscription qu’à l’échelle de la répartition des sièges à la Chambre des communes. En outre, parce qu’il ne représente pas fidèlement la volonté des électeurs, le SMUT pourrait décourager en somme la population de voter, ce qui pourrait avoir pour effet d’alimenter l’apathie des électeurs et le mécontentement par rapport au système et, au final, de réduire la participation électorale. Enfin, des témoins ont fait valoir que le processus de mise en candidature dans les circonscriptions jugées « sûres » peut « contribuer aux obstacles à l’investiture et à l’élection à la Chambre des femmes, des Autochtones et des groupes minoritaires[169] ». Roderick Wood, professeur de droit, qui était commissaire de la Commission du droit du Canada au moment de la publication de son rapport sur la réforme électorale en 2004, a résumé comme suit les différentes faiblesses perçues du SMUT :

[C]e système brise la proportionnalité, crée des majorités artificielles, des déséquilibres régionaux et un phénomène que la commission Jenkins a décrit comme les déserts électoraux, c’est-à-dire fait que des régions entières du pays ne sont que très peu ou pas représentées au gouvernement. Cela résulte aussi en une sous-représentation des femmes, des minorités et des peuples autochtones. Les gens ont l’impression que leur vote a été gâché. « Pourquoi voter? » se demandent-ils, « puisque cela ne va pas compter et que ça ne vaut rien? » Ce mode de scrutin peut aussi donner lieu à des votes stratégiques, à l’impression qu’on a voté pour le candidat qu’on aimait le moins, sans quoi on aurait déposé un bulletin qui ne compte pas. Le système peut aussi déboucher sur une sorte de culture politique de l’hyperpartisanerie, où tout est axé sur l’opposition des points de vue[170].

a.   Le SMUT dans un contexte multipartite et à candidatures multiples

De la Confédération en 1867 à 1921, les élections fédérales consistaient en des luttes entre deux partis, et il était entendu que, dans ce contexte, le SMUT canadien fonctionnait relativement bien en ce qui concernait la traduction des votes en sièges[171] :

Tant que les élections fédérales n’étaient disputées que par deux partis, le système uninominal majoritaire produisait des parlements dans lesquels il y avait une assez bonne correspondance entre la répartition des sièges à la Chambre des communes et les suffrages exprimés en faveur des partis politiques. Les gouvernements majoritaires que ces parlements ont soutenus à toutes les occasions, sauf une, ont été menés par des dirigeants dont les membres du parti avaient remporté la majorité des sièges à la Chambre et dont les candidats avaient remporté plus de 50 % des suffrages exprimés[172].

Cependant, vers la fin de la Première Guerre mondiale, de nouveaux partis politiques ont fait leur entrée dans l’arène et, à l’issue de l’élection fédérale de décembre 1921, trois partis politiques étaient représentés à la Chambre. Depuis, toutes les élections fédérales se sont jouées à trois partis politiques ou plus.

Cette transformation du paysage politique – le fait que plus de deux partis se disputent des sièges à la Chambre des communes – a soulevé des doutes quant à la légitimité du SMUT puisque l’on a commencé à voir des cas où des candidats étaient élus même s’ils n’obtenaient pas une majorité des voix dans leur circonscription. Le Comité spécial nommé pour connaître de la représentation proportionnelle (RP), du vote simple transférable ou préférentiel observait ce qui suit dans son rapport de 1921 :

Il doit paraître à tous que le système actuel d’élection, dans les circonscriptions d’un seul représentant, répond pleinement aux fins proposées lorsqu’il y a deux candidats seulement en nomination. Certains faits électoraux récents qui se sont produits au pays ont fait comprendre que lorsque trois candidats ou plus se présentent dans une circonscription à représentation simple, le candidat élu peut ne représenter qu’une minorité des électeurs de cette circonscription – ce qui arrive souvent[173].

La question de la pertinence du SMUT dans un environnement où plus de deux partis politiques se disputent le pouvoir et où plus de deux candidats se présentent dans les circonscriptions a été réitérée par Peter Russell, qui a souligné que « le système majoritaire uninominal à un tour du Canada, en vigueur au palier fédéral depuis la Confédération, ne correspond plus à la conjoncture politique du pays depuis 1921[174] ». Il a ajouté que, depuis 1921, « nous avons eu un régime multipartite, composé surtout de quatre ou cinq partis, qui a vraiment été torpillé et miné par le système majoritaire uninominal à un tour[175] ».

Jean-Pierre Derriennic, dans son ouvrage intitulé Un meilleur système électoral pour le Canada (lequel constituait les fondements de son témoignage et de son mémoire au Comité), a décrit les distorsions que cause le SMUT lorsque plus de deux partis et candidats se disputent une élection :

Au Canada, il y a habituellement trois, quatre ou cinq partis capables de faire élire des candidats. Nous ne sommes donc pas en situation de bipartisme, et le mode de scrutin pluralitaire a pour nous des effets beaucoup plus nocifs. Ceux-ci peuvent être mis en évidence en analysant rapidement les résultats de la dernière élection et de quelques élections précédentes.
S’il y a plus de deux partis importants, le mode de scrutin pluralitaire devient une machine à fabriquer des majorités de députés à partir de minorités d’électeurs. L’élection du 19 octobre 2015 a donné au Parti libéral 54 % des élus, ce qui lui permet d’exercer 100 % du pouvoir de décision appartenant à la Chambre des communes. Ce parti a obtenu 39,5 % des votes de la population, mais beaucoup de ces votes sont allés à des candidats libéraux qui ont été battus. Par conséquent, il y a sans doute 39,5 % des Canadiens qui sont assez satisfaits de la victoire du Parti libéral, mais ceux qui ont voté pour l’un des 184 députés libéraux sont seulement 26,1 % des électeurs. Si on tient compte du taux d’abstention, qui a été de 31,5 %, les députés libéraux qui vont exercer 100 % du pouvoir législatif et appuyer un gouvernement qui va exercer 100 % du pouvoir exécutif, ont été élus par 17,9 % des citoyens canadiens en âge de voter[176].

La légitimité du SMUT est une question de valeurs et de principes plutôt qu’une question « empirique », comme l’a fait valoir Emmett Macfarlane, qui a affirmé que « [l]a conséquence, c’est que le système uninominal majoritaire à un tour est – manifestement – illégitime parce qu’il produit des résultats qui ne sont pas démocratiques, mais il s’agit là d’un jugement de valeur, pas d’une déclaration empirique[177] ».

Enfin, il y a lieu de noter que les participants à la consultation en ligne du Comité ont manifesté dans l’ensemble un appui tiède au SMUT. À l’affirmation « Les sièges à la Chambre des communes devraient être attribués aux candidats qui ont reçu le plus de votes dans leur circonscription, même s’ils ont reçu moins de 50 % des voix exprimées », la majorité s’est dite en désaccord (51,7 %), alors qu’un peu plus du tiers s’est dit d’accord (34,5 %)[178].

Les sièges à la Chambre des communes devraient être attribués aux candidats qui ont reçu le plus de votes Échelle de cotation : 1 (fortement en désaccord) – 5 (fortement en accord); s.o.

Les sièges à la Chambre des communes
          devraient être attribués aux candidats qui ont reçu le plus de votes
          Échelle de cotation : 1 (fortement
          en désaccord) – 5 (fortement en accord); s.o.

b.   Le SMUT, l’apathie des électeurs, le vote stratégique, l’inversion des politiques et le manque de représentation de la diversité

Selon certains témoins, la manière dont le SMUT traduit les votes en sièges et les sièges en gouvernement est la source d’autres problèmes secondaires.

Brian Tanguay[179] et Craig Scott (ancien député)[180] ont fait valoir que le SMUT peut produire des majorités parlementaires « artificielles » ou « fausses » qui risquent de miner le Parlement et la gouvernance (au chapitre du pouvoir accordé à l’exécutif).

Nathalie Des Rosiers, qui était présidente de la Commission du droit du Canada au cours de son étude sur la réforme électorale, a fait valoir que la préférence pour la stabilité du SMUT n’est pas suffisante pour compenser l’absence de représentativité du système :

Les préférences de certains systèmes ont un prix trop élevé. C'était notre conclusion quant au système uninominal à un tour. En effet, sa préférence pour la stabilité était trop coûteuse, en ce sens qu’elle nous privait d’une représentativité plus adéquate en matière d’idées et de population[181].

De plus, Lise Ouellette, qui a été coprésidente de la Commission sur la démocratie législative du Nouveau-Brunswick de 2003 à 2004, a fait la remarque suivante : « Nous voilà 12 ans plus tard, et je crois que le changement est encore plus nécessaire au fédéral qu’il ne l’est ou qu’on ne l’a observé au palier provincial » vu le « risque d’un gouvernement fédéral non représentatif ou d’un Parlement non représentatif, que ce soit sur les plans géographique, idéologique ou démographique[182] ».

Eric Maskin, lauréat du prix Nobel, a cerné lors de sa comparution devant le Comité cinq problèmes découlant du SMUT, qui commencent par l’absence de vote majoritaire pour le candidat élu dans une circonscription et qui culminent par le sentiment de désintérêt des électeurs, qui estiment que leur vote est gaspillé, et par l’effet dissuasif sur les candidats les poussant à ne pas présenter leur candidature :

Le premier problème, c’est que, souvent, un député qui représente une circonscription électorale a été élu par une minorité, en ce sens que la plupart des électeurs de sa circonscription n’ont pas voté pour lui.
Deuxièmement, le système uninominal majoritaire à un tour provoque souvent une grave incohérence au sein du Parlement, et j’entends par là que le parti de la majorité a souvent reçu bien moins que la majorité des votes. Par exemple, en 2011, le Parti conservateur a obtenu 53,9 % des sièges, mais seulement 39,6 % des votes. Il y a de nombreux exemples de telles incohérences.
Troisièmement, souvent, on élit le mauvais candidat dans une circonscription […]
Quatrièmement, les électeurs sont en quelque sorte privés du droit de vote s’ils votent pour un candidat qui n’est pas populaire, un candidat qui est peu susceptible de remporter les élections. Si les candidats A et B sont les candidats qui ont une réelle chance de gagner et que je vote pour le candidat C, alors, en fait, je ne peux pas participer au choix qui importe vraiment et je perds mon vote. Je pourrais bien sûr voter de façon stratégique, c’est-à-dire voter pour les candidats A ou B, et ce, même si je préfère le candidat C, mais le vote stratégique en lui-même est problématique pour des raisons sur lesquelles je reviendrai peut-être durant la période de questions.
Cinquièmement, ce système peut pousser les candidats et les partis peu populaires à ne pas se présenter. Par exemple, supposons que je suis un candidat de droite en désaccord avec le Parti conservateur sur certaines questions politiques importantes. Je peux hésiter à me présenter, parce que, si je me présente, je cours le risque de diviser le vote de la droite, aidant peut-être ainsi à élire un candidat de gauche. Pour cette raison, je peux décider délibérément de ne pas me présenter, même si cette décision non seulement me prive d’une candidature aux élections, mais prive aussi l’électorat d’une autre voix politique[183].

De nombreux participants aux assemblées publiques ont exprimé ce qu’ils ont ressenti après avoir voté stratégiquement plutôt que pour un parti qu’ils préféraient afin d’éviter d’élire quelqu’un d’autre. Par exemple, Mary Cowper-Smith a expliqué que :

J’ai voté à l’occasion de toutes les élections provinciales et fédérales depuis que j’ai l’âge de voter et j’ai eu l’impression, pratiquement à chaque fois, que mon vote avait été gaspillé, ou bien je me suis sentie tenu de voter de façon stratégique. Je suis une électrice frustrée qui a le sentiment d’avoir été dupée[184].

Par ailleurs, plusieurs témoins, mémoires et participants aux consultations en ligne[185] du Comité ont abordé la perception qu’ont les électeurs que leur vote est « gaspillé » ou « perdu » dans le SMUT (principalement en comparaison aux systèmes électoraux proportionnels). Matt Risser explique cette perception ainsi :

Lorsque nous parlons de votes gaspillés, nous devrions vraiment faire la distinction entre l’équité de départ, et l’équité du résultat . Le Canada a une équité de départ – personne ne remet cela en question, chaque vote est équitablement compté – mais l’équité du résultat, c’est que chaque vote compte de manière équitable.[186]

Jean-Pierre Derriennic a utilisé les données suivantes sur l’élection fédérale de 2015 pour illustrer sa conception des « votes perdus » et du cynisme qui peut en découler :

L’ensemble des députés, opposition comprise, ont été élus par moins de la moitié des citoyens qui ont voté. En effet, si on additionne les voix obtenues par tous les candidats élus le 19 octobre 2015 on arrive seulement à 47,6 % du total des votes valides dans tout le Canada. Par conséquent, 52,4 % des votes valides ont été des votes perdus, qui n’ont élu personne. Les électeurs qui ont voté pour un candidat arrivé en deuxième position peuvent penser que leur vote n’a pas été complètement inutile, puisqu’ils ont fait ce qu’ils pouvaient faire de mieux pour empêcher l’élection d’un candidat qu’ils n’aimaient pas. Mais il y a des votes qui peuvent être considérés comme purement et simplement gaspillés, ceux qui ont été donnés à des candidats qui ne sont arrivés ni en première ni en deuxième position, et ils représentent 23,2 % du total des votes valides.
Il est clair qu’il y a là un problème très sérieux. Le cynisme de beaucoup de nos concitoyens envers les institutions démocratiques et l’abstention électorale qui en découle ont de nombreuses causes que je ne vais pas développer ici. Mais il est certain que l’insatisfaction envers les élections est une de ces causes. Beaucoup d’entre nous ont l’impression que leur vote ne sert à rien, que personne ne les représente à la Chambre des communes, que des politiciens peuvent arriver au pouvoir en s’appuyant sur des minorités et l’exercer sans tenir compte des préoccupations d’une grande part de la population. Cette impression, elle correspond dans une large mesure à la réalité et à leur expérience d’électeurs désabusés. Pour corriger cette impression et lutter contre ce cynisme, il faudrait faire en sorte que tous les votes comptent[187].

En outre, des témoins ont mentionné l’« incohérence politique » qui survient dans le SMUT comme conséquence négative de l’alternance de gouvernance entre des partis ayant des politiques et des approches différentes. Par exemple, James Bickerton a expliqué qu’ :

[A]u Canada, un problème relativement récent a émergé, du moins en termes d’importance, ayant été désigné comme « l’incohérence politique ». Je dis relativement récent, puisque pendant des décennies, avant les années 1990, la gouvernance canadienne était forgée par des politiques centristes, de médiation, qui atténuaient les changements de politiques auxquels on peut normalement s’attendre lors d’un changement de gouvernement. Toutefois, le contexte davantage polarisé d’un point de vue idéologique ayant fait son apparition au Canada depuis ce temps a soulevé des préoccupations au sujet de cas plus sévères de changements de politiques qui sont évidents dans d’autres juridictions de système uninominal à un tour avec des partis d’idéologie plus radicale. Et en effet, c’est une des raisons invoquées pour la décision de la Nouvelle‑Zélande de changer son système électoral.
Illustrons ce problème : l’actuel gouvernement Trudeau a consacré la majeure partie de sa première année au pouvoir, et fera sans doute de même pendant une bonne partie de sa deuxième année, à défaire plusieurs changements introduits par le gouvernement précédent. Il commencera alors à prendre des mesures pour paver la voie en vue de la prochaine campagne électorale fédérale. Toutefois, un léger changement du suffrage de cinq ou six points de pourcentage à cette élection pourrait se traduire par un nouveau gouvernement qui entreprendra une autre ronde de changements de politiques, défaisant la majeure partie de ce que ce gouvernement aura accompli. Ce genre de cercle « maintenant c’est à notre tour » pour l’établissement de politiques peut difficilement être vu comme profitable pour une gouvernance stable et à long terme reposant sur la solide fondation d’un large consensus de la société[188].

Arend Lijphart a abordé le problème d’uniformité des politiques découlant de l’alternance entre les gouvernements:

Tout d’abord, les décisions rapides ne sont pas nécessairement des décisions intelligentes. De plus, en alternant entre un gouvernement de gauche et un gouvernement de droite, on diminue grandement le niveau de cohérence. Voilà la principale raison pour laquelle le célèbre politicologue britannique Samuel Finer, qui était un ardent défenseur du SMUT, a changé d’avis et s’est rangé derrière la RP dans un livre influent publié dès 1975. Enfin, les politiques appuyées par un vaste consensus sont plus susceptibles de connaître du succès et de maintenir le cap que les politiques imposées par un gouvernement qui prend des mesures décisives allant à l’encontre de ce que souhaitent d’importants secteurs de la société[189].

En outre, la contrepartie de l’importance accordée à la représentation locale dans le SMUT est que ce système « favorise généralement les partis qui sont populaires dans une région, et non dans tout le pays[190] ». De plus, comme il a été mentionné précédemment, le SMUT a tendance à créer des « déserts régionaux », où des régions entières du pays n’ont aucune représentation soit du gouvernement, soit de l’opposition Jean-Pierre Derriennic a décrit les défis régionaux du SMUT ainsi :

Le mode de scrutin pluralitaire amplifie habituellement la représentation du parti qui a le plus de votes dans l’ensemble du pays et réduit celle des partis qui en ont moins. Il a le même effet dans chacune des régions, ce qui crée l’apparence que les oppositions entre elles sont beaucoup plus graves qu’elles ne le sont en réalité. L’inquiétude pour l’unité du pays est moins présente aujourd’hui qu’en 1993, mais l’exagération des oppositions entre régions existe toujours. Aux élections de 2015, le Parti conservateur n’a aucun élu dans les quatre provinces de l’Atlantique, malgré 19 % des votes; en Alberta, le Parti libéral et le NPD obtiennent ensemble 36 % des votes, et seulement 14 % des élus.
On observe là un des effets les plus négatifs de notre système électoral pour le Canada, où le peuplement et les conditions naturelles, les ressources et le climat, sont très divers. Les occasions de divergences d’intérêts sont donc très nombreuses entre ses différentes régions, et il est imprudent de garder un mode de scrutin qui amplifie les antagonismes entre elles ou en exagère la perception. C’est peut-être l’argument le plus fort en faveur d’une réforme de notre système électoral, et il est connu depuis longtemps[191].

Enfin, de nombreux témoins ont imputé au SMUT, la faible représentation des femmes, des minorités (y compris les minorités raciales et les personnes ayant un handicap) et des Autochtones. Comme l’a expliqué Brian Tanguay :

Mais en ce qui concerne la production d’un parlement qui soit un miroir de la nation, le système électoral actuel est en effet très mauvais. Il établit des obstacles sérieux à l’élection des femmes, des candidats issus des minorités et des autochtones[,] chose qui nuit considérablement à l’efficacité de ce corps en tant que forum pour l’émergence de nouvelles idées et de nouvelles politiques afin de faire face aux enjeux que pose ce monde en évolution rapide[192].

Pippa Norris a avancé que « [l]es femmes et les autres minorités ont beaucoup plus de difficulté à se faire élire avec le scrutin uninominal majoritaire qu’avec les listes des partis[193] ». Mais comme indiqué au chapitre 7, les obstacles à la représentation des femmes et des minorités ne sont pas nécessairement le fait du système politique; ils peuvent être attribuables plutôt au processus d’investiture et au fonctionnement des partis. Par exemple, tel qu’indiqué par Antony Hodgson:

[N]otre processus de mise en candidature met de l’avant un candidat par parti. En moyenne, cette façon de faire introduit un biais au profit des hommes blancs d’un certain âge [« male, pale, and stale »]. Je suis ravi que cette table n’en soit pas un bon exemple, mais statistiquement parlant, ce biais existe bel et bien. Je crois que les jeunes sont particulièrement sous-représentés au gouvernement[194].

Un témoin fait remarquer qu’on peut difficilement suivre le processus d’investiture dans chacune des 338 circonscriptions du Canada[195]. Par contraste, les électeurs peuvent facilement constater, dans les systèmes électoraux à listes, le nombre relatif de candidats de sexe féminin ou membres d’une minorité.

D.  Changer le système : quels modes de scrutin fonctionneraient au Canada?

Guidé par les cinq principes établis dans son mandat, le Comité s’est concentré sur certains systèmes électoraux à l’exclusion des autres. Par exemple, le scrutin de liste sous sa forme pure[196] ne serait pas approprié pour le Canada, puisqu’il met l’accent non pas sur la représentation locale mais sur les partis politiques (quoique des variantes modérées à listes ouvertes restreintes, où les provinces seraient divisées en régions, seraient envisageables). Comme l’a dit Brian Tanguay :

[Q]u'est-ce qui n’est pas acceptable au Canada? Eh bien, la RP par liste n’est pas acceptable. Le système israélien n’est pas non plus acceptable, ni celui des Pays-Bas. Tout système qui n’offre aux électeurs qu’un seul choix pour un parti est inacceptable[197].

Le scrutin de liste sous sa forme pure n’a d’ailleurs guère été soulevé comme option valable par les témoins et les participants individuels[198], et n’a reçu qu’un appui limité lors de la consultation en ligne réalisée par le Comité[199].

De même, ni les témoins[200] ni les répondants à la consultation en ligne[201] n’ont fait montre d’un grand intérêt pour le scrutin à deux tours, qui est une forme de scrutin majoritaire utilisée en France. On reproche à ce système de coûter cher (puisqu’il faut tenir deux votes) sans vraiment améliorer la représentation globale[202].

Les individus qui se sont mobilisés dans le cadre des travaux du Comité, que ce soit par l’envoi de mémoires, de témoignages ou par la participation à la consultation électronique, et qui préconisaient une réforme, se sont majoritairement positionnés en faveur de l’introduction d’un élément de proportionnalité dans le système électoral canadien.

Les options mentionnées par les témoins[203]incluent (en ordre de système majoritaire à proportionnel à mixte) :

  • Le vote préférentiel (VP) et ses variantes de la famille des systèmes majoritaires (la majorité des témoins et des participants qui ont discuté de ce système se sont prononcés contre celui-ci);
  • Le vote unique transférable (VUT) et les autres options de scrutin proportionnel où on vote pour des candidats dans des circonscriptions multinominales;
  • La représentation proportionnelle mixte (RPM) (la majorité de ceux qui se sont exprimés en faveur d’une réforme ont appuyé cette option);
  • Différentes combinaisons des systèmes ci-dessus, vu la diversité des réalités géographiques au Canada (p. ex. combiner le VP et les circonscriptions tantôt uninominales, tantôt multinominales, selon la concentration démographique[204]).

Brian Tanguay s’est dit d’avis, que si le Comité « présent[e] aux électeurs les principales options et qu’il y a un débat équitable et transparent à ce sujet, cela ne pourrait qu’être utile à votre Comité et aussi, au gouvernement[205] ». À cet égard, le Comité espère en effet que sa présentation des principales options de réforme électorale dans les pages qui suivent est « équitable et transparente ».

Enfin, il ne faut pas perdre de vue l’impact que la réforme aura sur l’écosystème de gouvernance tout entier du Canada. C’est ce qu’a rappelé Maryantonett Flumian, présidente de l’Institut sur la gouvernance :

Voici mon message de base : quelles que soient les recommandations que vous allez présenter à la fin de cette étude, visez notre écosystème de gouvernance tout entier. Les gens exigent du changement. Les gens veulent voir la situation évoluer. Notre système doit évoluer de manière à conserver ce lien primordial avec les citoyens qui, à mon avis, constitue le fondement même de notre système démocratique de gouvernance; mais comprenez-moi bien : le système tout entier[206].

1.   Le vote préférentiel et ses variantes dans les circonscriptions uninominales

Certains ont proposé au Comité l’instauration d’un système de VP dans des circonscriptions uninominales. Il arrive actuellement que des candidats soient élus sans avoir le soutien de la majorité des électeurs. Cette réforme répondrait à ce problème, comme l’a expliqué Eric Maskin :

Sous le régime du système actuel — le système uninominal majoritaire à un tour —, les cas de députés élus sans avoir obtenu la majorité absolue sont très, très nombreux. Le pire, c’est que nous ne savons pas — parce que nous n’obtenons pas cette information auprès des électeurs — si une majorité aurait privilégié d’autres candidats. Voilà pourquoi le passage à un système électoral selon lequel les électeurs peuvent s’exprimer plus pleinement est une façon de s’assurer que les bons députés sont élus[207].

Dans les systèmes de VP, l’électeur ne désigne pas son choix d’un « x » sur le bulletin; il classe plutôt en ordre de préférence les candidats qui sont en lice dans sa circonscription. On compte ensuite les suffrages pour déterminer quel candidat est le choix préféré par majorité des électeurs. Les témoins ont décrit trois façons, expliquées ci-dessous, de dépouiller les résultats du VP.

En Australie, l’électeur « doit remplir toutes les cases du bulletin de vote pour que son bulletin soit valide et que son vote soit inclus dans le décompte[208] ». En d’autres mots, s’il ne classe pas tous les candidats inscrits sur le bulletin, son vote sera tenu pour « nul ». Il n’est pas recommandé, dans l’éventualité où le VP était adopté au Canada (dans des circonscriptions uninominales ou multinominales), de forcer les électeurs à classer tous les candidats inscrits. Comme il a été mentionné lors des audiences, cette exigence complexifierait le processus de vote et limiterait le choix des électeurs, sans changer grand-chose aux résultats[209].

Les principaux arguments à l’appui du VP dans les circonscriptions uninominales – arguments repris en détail ci-dessous – sont les suivants : les résultats électoraux seraient plus légitimes parce que plus proches des préférences des électeurs (premier principe du mandat du Comité); il s’agit d’une mesure qui serait relativement simple à comprendre et à mettre en œuvre (elle ne nécessiterait pas la re-délimitation des circonscriptions et les candidats continueraient de se présenter aux élections comme ils le font maintenant); et le VP encouragerait la modération et la recherche de consensus (puisque les candidats et les partis chercheraient à être le deuxième choix des électeurs s’ils ne peuvent être leur premier).

Par contre, on reproche à cette option de n’apporter aucun correctif aux défauts du scrutin majoritaire. En effet, le VP ne tient pas compte du soutien qu’obtiennent les partis ou les causes par-delà les délimitations des circonscriptions ou à la grandeur des régions; ces voix cumulatives n’obtiennent aucune représentation proportionnelle à l’Assemblée législative. De plus, certains ont avancé que le VP dans les circonscriptions uninominales, à force de modération et de consensus, serait en fait discriminatoire contre les petits partis et les points de vue minoritaires; il en résulterait une représentation appauvrie de la diversité et, potentiellement, une distorsion accrue entre les préférences des électeurs et les résultats des élections. Enfin, certains ont dit que, si les circonscriptions restaient uninominales, l’adoption du VP changerait si peu les choses qu’elle n’en vaut pas la peine.

a.   Méthodes de dépouillement : le vote préférentiel de base, la méthode Borda et la méthode de Condorcet

On a décrit au Comité trois méthodes de dépouillement des suffrages exprimés au VP : le VP de base, la méthode Borda et la méthode de Condorcet. Comme on le verra ci-dessous, ces techniques de dépouillement peuvent mener à des résultats quelque peu différents. Fait à noter, toutes trois pourraient servir aussi dans des circonscriptions multinominales.

i.    Le vote préférentiel de base

Le VP de base, qui est la forme la plus connue de scrutin préférentiel dans les circonscriptions uninominales, sert actuellement à l’élection des députés à la Chambre des représentants de l’Australie. Il a aussi été utilisé autrefois aux paliers provincial et municipal (avec le VUT) dans certaines parties de l’Alberta, de la Colombie-Britannique et du Manitoba[210].

Essentiellement, l’électeur classe les candidats inscrits dans sa circonscription en ordre de préférence sur le bulletin de vote. Pour être élu, un candidat doit obtenir la majorité des suffrages exprimés. Si aucun candidat n’obtient la majorité au premier décompte, le candidat qui a obtenu le moins de suffrages de premier choix (c’est-à-dire qui est au dernier rang) est éliminé et les suffrages de deuxième choix inscrits sur les bulletins où il figure au premier rang sont attribués aux candidats toujours en lice désignés par ces choix. Le processus se poursuit jusqu’à ce qu’un candidat obtienne la majorité nécessaire[211].

ii.   La méthode Borda

Au XVIIIe siècle, le mathématicien, théoricien politique, navigateur et physicien français Jean-Charles de Borda, mécontent du système majoritaire servant à l’élection des membres de l’Académie des sciences de France[212], a conçu un système de VP appelé « méthode Borda ». Cette méthode consiste à répartir un total de points (qui dépend du nombre total de candidats) entre les candidats inscrits sur le bulletin de vote « en fonction de [leur] ordre de préférence ». Comme l’a expliqué Russ Husum :

La méthode de dépouillement Borda est facile à utiliser, et elle donne des résultats plus fidèles à la réalité que la méthode qui cautionne l’élimination des candidats qui reviennent le moins souvent comme premier choix des électeurs. Voici pourquoi.
Tout d’abord, aucun candidat n’est éliminé. Deuxièmement, chaque ordre de préférence exprimé sur chacun des bulletins de vote est pris en compte dans le calcul total. Troisièmement, chaque choix indiqué sur le bulletin reçoit une valeur en fonction de son ordre de préférence.
Par exemple, s’il y a six candidats, un vote de première place vaudra six points. Un vote de deuxième place vaudra cinq points, puis quatre, puis trois. À huit candidats, une première place vaudra huit points, la deuxième, sept, et ainsi que de suite.
Disons qu’il y a cinq candidats en lice. Un vote de première place vaudra cinq points au candidat. Disons que Josée Tremblay obtient 10 000 votes de première place. Elle reçoit 5 fois 10 000 points. Si elle obtient 5 000 votes de deuxième place, elle reçoit 4 fois 5 000 points. Comme les points sont compilés pour chaque candidat, le résultat final est plus fidèle à la réalité que si vous vous contentez d’éliminer des candidats[213].

M. Husum a soutenu que la méthode Borda permettrait de répondre à certaines des reproches faites au VP :

La façon habituelle de dépouiller un vote préférentiel suscite certaines préoccupations, mais la méthode Borda les fait disparaître. Je passerai immédiatement trois de ces préoccupations en revue.
Parfois, lorsque vous éliminez le premier candidat — celui qui est revenu le moins souvent comme premier choix —, vous laissez en fait tomber celui que les électeurs préfèrent. […]
De plus, la méthode de dépouillement habituelle peut parfois, par inadvertance, accorder une majorité gagnante à un candidat qui n’est pas le préféré des électeurs.
Enfin, l’un des reproches faits au vote préférentiel est que les deuxièmes et troisièmes choix qui sont reclassés ne devraient pas avoir le même poids que le premier choix [214].

On peut illustrer les différences entre le SMUT, le VP et la méthode Borda en les comparant au système de notation des élèves à l’école. Dans notre système majoritaire actuel, où on n’indique qu’une seule préférence, les candidats doivent recevoir un « A »; il n’y a pas d’autres notes prises en compte. Sous le VP, on dépouille d’abord les « A », mais au besoin, on compte aussi les « B », et ainsi de suite. Mais la méthode Borda accorde plutôt une moyenne chiffrée : le candidat élu est celui qui obtient le total de points le plus élevé[215]. Une variante du système Borda, appliquée à des circonscriptions multinominales, est utilisé à Nauru (qui a obtenu son indépendance de l’Australie en 1968[216]). Ce mode de dépouillement sert aussi souvent pour l’attribution des prix sportifs, comme celui du meilleur joueur de la Ligue majeure de baseball et le Trophée Heisman du football universitaire américain.

iii.  La méthode de Condorcet

Toujours dans la France du XVIIIe siècle, le marquis de Condorcet s’est opposé à la méthode de son contemporain Borda. Il a donc prôné une autre façon de procéder : le candidat élu est celui qui, comparé tour à tour à tous les autres candidats, s’avère le candidat préféré. Eric Maskin, de Harvard, a décrit une méthode de vote Condorcet appelée « règle de la majorité »[217].

M. Maskin a expliqué comme suit la « règle de la majorité » :

Selon la règle de la majorité, les électeurs ne votent pas simplement pour un candidat : ils peuvent classer les candidats. Le candidat A est le meilleur, le candidat B arrive deuxième, et ainsi de suite. Le candidat gagnant est celui qui est préféré par une majorité, selon les classements, par rapport à chacun de ses adversaires. Ce candidat est celui qui a vraiment remporté la majorité puisqu’il l’emporterait sur chacun de ses adversaires s’ils devaient s’affronter en tête à tête.
J’ai préparé une diapositive pour illustrer cette situation. Imaginons que l’électorat se divise en trois groupes différents : 40 % de l’électorat préfère le candidat A, puis le candidat B, et ensuite le candidat C; 35 % de l’électorat préfèrent le candidat C, puis le B, et ensuite le A; et les autres 25 % préfèrent le B, puis le C, et ensuite le A. Ce n’est qu’un exemple qui ne correspond à aucune situation réelle.
Que se passe-t-il selon la règle de la majorité? Conformément à la règle de la majorité, le candidat B l’emporte à la majorité sur le candidat A parce que le groupe du milieu, celui des 35 %, préfère le candidat B au candidat A, et que le groupe à la droite, celui des 25 %, préfère le candidat B au candidat A. Le candidat obtient une majorité de 60 %.
Le candidat B l’emporte aussi sur le candidat C à la majorité parce que le premier groupe, le groupe des 40 %, préfère le candidat B au candidat C, et le troisième groupe, le groupe des 25 %, préfère le candidat B au candidat C, ce qui donne 65 %. Par conséquent, le candidat B est celui qui l’emporte vraiment à la majorité.
Examinons maintenant ce qui se passe dans le système uninominal majoritaire à un tour. Dans le cadre de ce système, les électeurs votent pour un seul candidat. On peut présumer que les gens dans le premier groupe voteront pour le candidat A, les gens dans le deuxième groupe, pour le candidat C, et les gens dans le troisième groupe, pour le candidat B. Le candidat A l’emportera parce 40 % est le pourcentage de votes le plus élevé. On élit ainsi le mauvais candidat. Le candidat A est élu dans le système uninominal majoritaire à un tour, mais une majorité d’électeurs, 60 %, lui préfère le candidat B. Et en fait, dans cet exemple, une majorité d’électeurs préfère aussi le candidat C au candidat A, alors le candidat A est un très mauvais choix du point de vue de la volonté de la majorité.
La règle de la majorité règle les cinq problèmes que j’ai décrits parce que le gagnant représente une majorité d’électeurs[218].

M. Maskin a ajouté que « [g]râce à la règle de la majorité, les électeurs n’auraient plus de raison de voter stratégiquement. Ils seraient au contraire incités à voter en fonction de leurs réelles préférences[219] ».

M. Maskin a ensuite décrit la différence entre la « règle de la majorité » et le VP :

Je crois que la façon la plus simple de distinguer le vote préférentiel, parfois aussi appelé vote transférable, et ce dont je parlais, le principe de la majorité, est de prendre l’exemple affiché à l’écran.
Comme le montre l'exemple, le candidat B remporte la majorité parce qu'il bat les candidats A et C par une majorité.
Toutefois, avec un scrutin préférentiel ou transférable, on ne retiendrait que les premiers choix, ce qui donne 40 % pour le candidat A, 35 % pour le candidat C et 25 % pour le candidat B. Le candidat B, qui a remporté la majorité, serait éliminé avec un système de scrutin préférentiel. Avec ce genre de système, quand aucun candidat n’est le premier choix de la majorité des électeurs, on élimine le candidat qui a eu le moins de votes de première place. Dans l’exemple, il s’agit du candidat B.
Voilà un exemple patent de la différence entre le principe de la majorité et le vote préférentiel[220].

Bien qu’il préfère la règle de la majorité au VP, M. Maskin s’est dit d’avis que l’une et l’autre méthode seraient préférables au SMUT :

Selon moi, le vote préférentiel, le principe de la majorité ou toute autre variante semblable où les électeurs ont l’occasion d’établir un classement des candidats en ordre de préférence au lieu de simplement voter pour une seule personne serait une grande amélioration par rapport au scrutin majoritaire uninominal à un tour[221].

Le marquis de Condorcet lui-même avait prévu un problème potentiel : qu’arrive-t-il si aucun candidat ne bat tous les autres? Dans ce cas – qui risque bien peu de se produire dans le contexte canadien, selon M. Maskin –, il faudrait recourir à un mécanisme de bris d’égalité[222].

Enfin, M. Maskin a rappelé que la méthode de la « règle de la majorité » pouvait difficilement être mise en œuvre avant l’ère informatique :

[J]e crois que l’une des grandes raisons, c’est que jusqu’à assez récemment, si la règle de la majorité était écartée, mais pas le vote préférentiel, c’était tout simplement parce que le comptage des bulletins de vote est quand même plus compliqué avec la règle de la majorité. Il faut tenir compte de toutes les comparaisons par paires. Avec des ordinateurs modernes, cela ne pose aucun problème, mais avant qu’il y ait des ordinateurs modernes, c’était certainement compliqué[223].

b.   Les forces du vote préférentiel dans les circonscriptions uninominales

De l’avis des témoins, le principal avantage du VP dans les circonscriptions uninominales (quelle que soit la méthode de dépouillement) est qu’il confère une légitimité accrue aux résultats du scrutin, en produisant une meilleure représentation du choix des électeurs dans leur circonscription et les candidats ne peuvent être élus s’ils n’ont pas l’appui de la majorité des électeurs de la circonscription. André Blais a décrit comme suit cette différence par rapport au SMUT :

Pour l’essentiel, ce système n’est pas très différent du scrutin uninominal, mais le parti qui est le second choix de nombreux électeurs obtiendrait davantage de sièges. Ce serait la principale différence. C’est à vous de décider quel est le parti qui sera le second choix dans un contexte donné et vous pourrez alors savoir quel est le parti qui risque d’être favorisé par ce système à un moment donné.
C’est la principale différence. Il est plus légitime, dans le sens qu’un candidat ne peut être élu que s’il obtient 50 % des voix. À mon avis, cela renforce sa légitimité. Ce n’est pas encore un résultat proportionnel, notamment, sous de nombreux aspects, mais c’est à mon avis plus acceptable[224].

M. Derriennic abonde dans le même sens :

Tous les députés seraient élus avec une majorité dans leur circonscription et le risque serait moins grand qu’un parti gagne l’élection en ayant moins de votes populaires que son adversaire principal. Les électeurs pourraient voter sincèrement, sans risquer de gaspiller leur vote ou recourir au vote stratégique. On saurait quel est le soutien réel de tous les partis dans la population, et les grands partis seraient incités à tenir compte des préoccupations des électeurs des petits partis[225].

L’adoption du VP, si elle conservait la représentation locale des circonscriptions individuelles, serait considérée comme un changement relativement « inoffensif » par comparaison aux autres propositions présentées au Comité. C’est ce qu’a fait valoir Royce Koop :

Le vote préférentiel ne touche pas vraiment ce dont je parlais au sujet de la représentation locale. Il y aurait très certainement un représentant local. Cela serait conservé, et donc, représenterait un avantage réel dans le cas du vote préférentiel aussi.
On verrait peut-être que les gens sentent qu’ils ont plus leur mot à dire dans le choix. Étant donné que des candidats sont classés dans le bulletin de vote, un plus grand nombre de votes sont inclus dans le résultat global. On pourrait constater une plus grande satisfaction démocratique comme résultat, mais au-delà de cela, je ne suis pas sûr. Le changement ne serait pas énorme. C’est un changement relativement inoffensif au système électoral comparativement à certaines des autres options dont nous parlons aujourd’hui[226].

Pour l’honorable Paul Okalik, l’introduction du VP combiné au maintien des circonscriptions uninominales serait une innovation claire et simple :

Si le comité désire et veut passer à un modèle différent, j’insiste pour dire qu’il doit être aussi simple et aussi clair que possible pour tous les intéressés. Le vote alternatif aurait ma préférence, en ce qu’il conserve cette clarté et cette simplicité pour les électeurs et correspond à leurs souhaits[227].

James T. Arreak, président-directeur général de Nunavut Tunngavik Inc., a dit du VP qu’il serait conforme à la culture inuite puisqu’il favorise le consensus :

Une alternative au système majoritaire uninominal est le système préférentiel dans lequel chaque électeur classe les candidats par ordre de préférence. Les voix pour les candidats ayant moins de premier choix sont calculées et redistribuées jusqu’à ce qu’un candidat soit le choix d’au moins 50 % des électeurs. Ce système a le mérite de surmonter un défaut du système majoritaire uninominal dans lequel il est possible qu’une personne qui a des positions extrêmes susceptibles de plaire à une minorité d’électeurs mais rejetées par une majorité soit quand même élue. Le système préférentiel semble être plus conforme à l’importance accordée à la recherche d’un consensus et à la préférence pour l’inclusion caractéristique de la culture inuite[228].

Enfin, lors du passage du Comité à Fredericton, au Nouveau-Brunswick, Joel Howe a avancé que le VP encouragerait la modération :

Avec la préférence alternée, par exemple, vous autorisez de nombreux partis, mais chacun doit s’efforcer pour être le deuxième ou le troisième choix des électeurs. Autrement dit, ils ne doivent pas se contenter de courtiser leurs partisans, qui sont en nombre limité, s’ils veulent être élus. Voilà l’incitatif à la modération qu’un seuil de 5 % à 10 % dans un système de représentation proportionnelle [ne] peut espérer offrir[229].

c.   Les faiblesses du vote préférentiel dans les circonscriptions uninominales

La principale faiblesse reprochée au VP, si les circonscriptions restent uninominales, est qu’il n’est au final qu’un système majoritaire qui risque de profiter aux grands partis au détriment des petits. C’était la position de l’honorable Ed Broadbent :

Un système de vote préférentiel peut avoir pour effet de faire disparaître les très petits partis. Un tel système peut effectivement les faire disparaître. L’avantage qu’offre la RPM ou la RP est que chaque vote compte et qu’il n’est pas nécessaire d’exprimer une préférence pour que ce vote compte[230].

Par exemple, l’une des participantes a remarqué ce qui suit :

Si on adoptait un système de vote préférentiel, comment pourrait-on faire pour que notre pays n'élise pas toujours un parti du centre, comme le Parti libéral? Ainsi, à l'avenir, un parti qui tire profit du fait qu'il est le deuxième choix de tout le monde pourrait alors gagner chaque fois. De quel genre de système et de mesures de sécurité aurons-nous besoin afin de protéger le pays contre une telle situation récurrente?[231]

Pour Brian Tanguay, le VP ne ferait que reproduire les problèmes du SMUT s’il était instauré dans des circonscriptions uninominales :

Personnellement, je ne suis pas un partisan du vote alternatif. Même s’il donne un choix plus vaste aux électeurs, il semble reproduire tous les problèmes posés par l’actuel système uninominal majoritaire. Le scrutin préférentiel ne réglerait pas le problème soulevé par les citoyens qui ont participé aux travaux de la commission de réforme du droit et lors de la tenue du référendum en Ontario. Ce système ne corrigerait pas les lacunes du système actuel qu’il est impératif de régler[232].

Dans le même esprit, Nelson Wiseman a évoqué le risque de distorsion : « Le scrutin préférentiel, auquel je ne suis pas opposé, peut également créer une distorsion. Un parti peut obtenir 40 % de tous les votes de premier choix et ne pas emporter un seul siège[233] ».

À ce sujet, Byron Weber Becker a présenté au Comité une évaluation des divers systèmes électoraux. Il appelait « cohérent » le système qui, selon son évaluation, « réduit la distorsion[234] et renforce le lien entre l’intention des électeurs et l’élection des représentants ». En d’autres mots, « dans un système cohérent, le nombre de députés ayant obtenu un siège est proportionnel au nombre de votes obtenus[235] ». Selon M. Becker, le VP « est encore plus incohérent » que le SMUT[236]. Il a expliqué son raisonnement avec l’analogie de la « tragédie des communes » :

Je pense que le mode de scrutin préférentiel est très logique pour les circonscriptions. Permettez-moi de dire que je peux comprendre pourquoi ce serait une option pour les circonscriptions, mais je pense qu'il comporte également quelques problèmes.
Chaque circonscription prend une décision sans tenir compte de toutes les autres circonscriptions, comme dans le cadre du système uninominal majoritaire à un tour. C'est lorsqu'on regroupe toutes ces décisions que le système échoue et devient désavantageux pour l'ensemble du Canada. Il m'est déjà arrivé de le comparer à la théorie économique de la tragédie des communes, où un village a des pâturages en commun où tout le monde fait paître ses vaches. Le système fonctionne à merveille, dans la mesure où tout le monde respecte les règles. Mais un jour, quelqu'un a une brillante idée et dit, « Je peux faire paître deux vaches sur ces terres ». Les villageois prennent une décision optimale pour leur localité. C'est comme lorsqu'une circonscription déclare qu'il est préférable qu'elle utilise le mode de scrutin préférentiel. Si tout le monde agit de la sorte, le pâturage est surchargé et le système échoue pour tout le monde. Si toutes les circonscriptions utilisent le mode de scrutin préférentiel, alors l'ensemble du système devient très disproportionnel et le Canada en souffre.[237]

Henry Milner a soutenu quant à lui que la combinaison « vote préférentiel-circonscriptions uninominales » réduirait la diversité à la Chambre des communes :

Je n’ai pour ma part jamais compris l’avantage qu’est censé représenter le vote préférentiel. Nous en connaissons en revanche les inconvénients, car avec ce mode de scrutin, les petits partis ont encore plus de mal à faire élire des représentants que sous le régime actuel. Cela donne donc un paysage politique moins diversifié[238].

C’était aussi le point de vue de Harold Jansen, dont les études sur le VP et le VUT révèlent que les résultats du VP ne diffèrent guère de ceux du SMUT. Par contraste, le VUT, qui est un système proportionnel, aurait un fort impact :

Les résultats de ma recherche sur l’utilisation du scrutin préférentiel aux élections provinciales m’incitent à penser que le vote alternatif ne constitue probablement pas le meilleur choix pour le Canada. Les circonstances historiques suggèrent que ce scrutin produit des résultats électoraux assez similaires à ceux que produirait le système uninominal à un tour; il ne corrigerait pas la défaillance principale de ce système, qui est de ne pas produire une législature qui reflète adéquatement les préférences des Canadiens. En Alberta et au Manitoba, ce scrutin n’influe aucunement la proportionnalité, qui est le critère sur lequel les experts en sciences politiques mesurent la correspondance entre les sièges et les votes. Ce scrutin n’a absolument aucun effet là-dessus.
Même au niveau des circonscriptions, le vote alternatif ne produit pas de résultats bien différents de ceux du scrutin uninominal à un tour. Pendant les 30 années où l’Alberta a appliqué le vote alternatif, moins de trois pour cent de tous les sièges contestés auraient été attribués différemment par un scrutin uninominal. Au Manitoba, ce chiffre n’atteint même pas deux pour cent. Autrement dit, dans 97 à 98 % des cas, le candidat qui a de l’avance sur les autres au premier tour finit par gagner, et il aurait gagné au scrutin uninominal à un tour.
[…]
D’un autre côté, je dirais que le système de VUT appliqué à Edmonton, à Calgary et à Winnipeg s’est avéré beaucoup plus efficace …[239]

M. Jansen a ajouté que le modèle australien du VP, dans lequel les électeurs doivent classer tous les cnadidats sur le bulletin, diffère du VP utilisé historiquement en Colombie-Britannique, en Alberta et au Manitoba :

En essayant d’imaginer le fonctionnement du vote alternatif au Canada, nous jetons souvent un coup d’œil sur l’Australie. Mais nous oublions que la loi oblige les électeurs australiens à classer tous les candidats dans leur ordre de préférence. C’est là toute la différence. Nous n’avons pas fait cela [au Manitoba, en Alberta et en Colombie-Britannique][240].

Dans un document d’information, M. Jansen a signalé les conséquences associées au fait d’exiger que les électeurs classent tous les candidats sur le bulletin de vote :

En Australie, le choix entre le vote préférentiel optionnel ou obligatoire est intimement lié aux positions concurrentielles des partis. Le parti travailliste, souvent victime de l’échange de préférences entre ses opposants, appuie l’annulation du vote préférentiel obligatoire, et y est parvenu au Queensland et en Nouvelle-Galles du Sud[241].

Michael Gallagher a souligné que le VP, puisqu’il n’est pas proportionnel, n’accomplirait pas grand-chose, si ce n’est nuire aux petits partis :

Le vote alternatif n’est pas une forme de RP et les résultats qu’il produit ne sont pas très différents de ceux du système majoritaire uninominal à un tour. Par conséquent, je pense que ce serait faire énormément d’efforts pour peu de résultats si le Canada adoptait simplement le vote alternatif après de longues délibérations. Cela ne changerait pas grand-chose.
C’est ce que je pense, car les résultats des élections australiennes sont généralement aussi disproportionnés que ceux des élections britanniques ou canadiennes, par exemple. Vous n’obtenez pas une grande proportionnalité et les petits partis, en particulier, sont presque toujours perdants[242].

Dans un article en intitulé The Consequences of the Alternative Vote , les auteurs Lydia Miljan et Taylor Jackson notent les implications politiques du modèle australien de VP. En effet, ce système, introduit en 1918

par un gouvernement non travailliste en réaction à la formation du Parti rural, un rival de centre droit qui avait une influence régionale croissante. La mise en place d’un système électoral préférentiel a permis aux partis non travaillistes d’échanger les votes préférentiels, plus particulièrement dans les régions rurales. Ce changement a permis d’empêcher le Parti travailliste de profiter de la division du vote non travailliste.[243]

Mme Miljan et M. Jackson affirme que l’adoption du VP et la nécessité de classer tous les candidats a eu pour effet de modifier le résultat des élections en faveur de la droite politique australienne et au détriment de la gauche politique, et ce, pendant un demi-siècle. Mme Miljan et M. Jackson notent ce qui suit :

En général, les partis non travaillistes ont été les plus avantagés par ce système. Dans son examen des effets du vote préférentiel sur les élections australiennes de 1919 à 1951, Rydon (1956) a observé que, des 73 sièges qui ont dû être attribués selon le vote préférentiel pour déterminer le vainqueur des élections, 58 ont été remportés par des candidats non travaillistes et seulement 15 par des candidats du Parti travailliste[244].

Ce constat suggère qu’un nouveau système électoral peut avoir des effets prévisibles à long terme sur les élections. Il peut favoriser un parti et en entraver un autre au cours de plusieurs cycles électoraux; ces effets étaient prévisibles pour les décideurs qui ont conçu le nouveau système.

Enfin, dans leur article, Mme Miljan et M. Jackson fournissent une analyse exhaustive de la manière dont le VP aurait influencé les élections fédérales canadiennes depuis 1997. Le résultat le plus frappant est que les libéraux auraient remporté un plus grand nombre de sièges à l’issue de chaque élection : 15 sièges supplémentaires en 1997, 17 sièges supplémentaires en 2000, 25 sièges supplémentaires en 2004, 22 sièges supplémentaires en 2006, 11 sièges supplémentaires en 2008, 13 sièges supplémentaires en 2011, et 31 sièges supplémentaires en 2015[245].

2.   Les systèmes électoraux proportionnels

Comme vu ci-dessus, un des aspects caractéristiques des systèmes électoraux proportionnels est que la magnitude des circonscriptions y est supérieure à un. Plus cette magnitude (c’est-à-dire le nombre de députés par circonscription) est élevée, plus la proportionnalité est grande, puisque la gamme des préférences électorales des électeurs se reflète alors plus exactement dans les résultats. Par contre, c’est la dimension locale de la représentation qui en souffre. Or, les témoins ont exprimé, tout le long de l’étude, leur préférence pour la représentation locale, pour des députés proches de leurs électeurs et capables de leur rendre des comptes. Il en résulte que si la proportionnalité était adoptée au Canada, il faudrait la conjuguer à une magnitude qui ne diluerait pas indûment la représentation locale. C’est possible, a dit Pippa Norris :

[La proportionnalité et la représentation locale] peuvent se combiner et l’aspect important est la taille de la circonscription. Si vous avez une petite circonscription — en Espagne, elle correspond à trois à cinq sièges, en Irlande cinq — l’électeur peut alors s’adresser non pas seulement à un député, mais à quelques députés, peut-être même de partis différents, pour qu’ils représentent les préoccupations de leur circonscription, pour qu’ils défendent ses intérêts ou s’occupent de sa situation.
Dans le cas d’une grande circonscription, ce lien est plus diffus. Il y a de nombreux pays où les circonscriptions correspondent à, disons, 16 à 20 sièges, et il n’est pas possible d’intervenir au niveau de la circonscription lorsque celle-ci est aussi vaste. Les cas classiques sont Israël, où il n’y a qu’une seule circonscription dans le pays, et les Pays-Bas. Dans ces pays, les liens qui existent entre les membres de la Knesset en Israël et les électeurs sont extrêmement ténus. Dans cette situation, il n’y en a plus.
Cela dépend de la façon dont on délimite les circonscriptions et de la volonté d’inciter les candidats à offrir des services à leurs électeurs. Ce n’est pas un système où il faut choisir entre la RP et la circonscription uninominale[246].

Pour Laura Stephenson, « [toute magnitude] supérieur[e] à un donnerait des résultats plus proportionnels que notre système actuel, et de nombreux systèmes partout dans le monde ont des circonscriptions à faible magnitude. Les experts diront que le nombre idéal se situe entre trois et sept[247] ».

L’un des outils qui a été développé pour mesurer la disproportion relative entre les votes reçus et les sièges obtenus à l’intérieur d’un système électoral est l’indice de Gallagher, créé par Michael Gallagher, qui a témoigné devant le Comité. Tel qu’indiqué par Byron Weber Becker, l’indice de Gallagher « combine à la fois la surreprésentation et la sous-représentation pour chaque parti en un chiffre unique[248]. » Selon M. Becker, un indice de Gallagher inférieur à 5 est considéré comme « excellent ». De plus, M. Becker a développé « l’indice de Gallagher composé » qui « désigne la moyenne des indices de Gallagher pour chaque province et territoire, pondérée en fonction de son nombre de sièges[249] ». Il indique que: 

Cette façon de faire permet de corriger un problème de calcul de l’indice de Gallagher pour l’ensemble du pays, lequel peut masquer des disproportions régionales, comme la surreprésentation considérable des conservateurs dans les Prairies qui vient compenser la [surréprésentation] des libéraux dans les Maritimes[250].

Dans son mémoire au Comité, M. Becker a indiqué que la plus récente élection a obtenu un indice de Gallagher de 12% et un indice de Gallagher composé de 17,1%[251]. Il a partagé avec le Comité un tableau classant les différents systèmes selon cet indice[252] :

indice de Gallagher

Traduction :    À l’horizontale : Nom du système, Nombre de députés locaux, Nombre de députés régionaux, Surreprésentation par parti, Libéral, Conservateur, NPD, Bloc, Vert, Indice de Gallagher, Indice de Gallagher 2015, Indice de Gallagher composé, % d’électeurs avec un député local préféré, % d’électeurs avec un député régional préféré, Nom de système abrégé

À la verticale : Vote transférable, Scrutin uninominal majoritaire à un tour (SMUT), Proportionnel mixte (allégée)

a.   Proportionnalité : les forces

Le principal argument en faveur des systèmes proportionnels est qu’ils assurent une correspondance plus exacte entre la proportion des voix exprimées et le nombre de sièges qu’obtiennent les partis politiques à l’Assemblée législative. C’est sur cet élément qu’ont insisté beaucoup des témoins, par exemple Arend Lijphart :

L’objectif principal de la représentation proportionnelle est d’obtenir des résultats proportionnels afin que les partis, ou des groupes de représentants, représentent à peu près d’égales proportions d’électeurs. Les systèmes de RP diffèrent en termes de proportionnalité. Certains ne sont pas tout à fait proportionnels et font barrage aux petits partis, et ainsi de suite. Les résultats des systèmes de RP montrent qu’il n’y en a pas un qui soit complètement à 100 % proportionnel[253].

Harold Jansen était du même avis :

Le système électoral se contente de modifier le calcul que l’on effectue pour traduire les votes en sièges. Les systèmes de représentation proportionnelle comme le VUT, la représentation proportionnelle mixte ou la représentation proportionnelle avec des listes de parti le font avec beaucoup plus de précision que le scrutin uninominal à un tour et que le vote alternatif. Je crois que nous avons là le critère fondamental à observer en préparant cette réforme électorale[254].

Henry Milner a ajouté :

Plus la représentation est proportionnelle, plus les votes sont égaux sur le plan de leur capacité d’élire quelqu’un. Donc, moins la représentation est proportionnelle, moins les votes sont égaux sur le plan de la capacité d’élire quelqu’un[255].

Kenneth Carty a rappelé que plusieurs initiatives de réforme provinciales visaient la « juste représentation », assimilée à la RP :

[P]ermettez-moi de dire que les milliers de Canadiens qui ont pris part aux récents débats sur la réforme provinciale au sein d’assemblées de citoyens en Ontario et en Colombie-Britannique, au sein de la Commission sur la démocratie législative au Nouveau-Brunswick, dans le cadre des audiences des commissions parlementaires dans tout le Québec, ont exprimé très clairement ce qu’ils attendent d’un système électoral. Ils ont désigné assez nettement ce qu’ils pensent être les trois valeurs les plus estimables. La première est la juste représentation et en cela la plupart des votants ont signifié que quelque chose de l’ordre de la représentation proportionnelle était l’une des valeurs les plus importantes[256].

Les deux autres valeurs les plus estimées des électeurs qui ont participé aux projets de réforme provinciale ces 15 dernières années étaient la « représentation locale, identifiable et forte » et « davantage de choix lors du scrutin[257] ».

L’attrait pour ces valeurs est aussi ressorti de la consultation en ligne menée par le Comité. En effet, 71,5 % des répondants se sont dits fortement en accord (59,1 %) ou en accord (12,4 %) avec l’affirmation « Le système électoral canadien devrait permettre de s’assurer que le nombre de sièges détenus par un parti au Parlement reflète le pourcentage de voix que le parti a reçu dans l’ensemble du pays ».[258]

Le nombre de sièges détenus par un parti au Parlement reflète le pourcentage de voix que le parti a reçu dans l’ensemble du pays Échelle de cotation : 1 (fortement en désaccord) – 5 (fortement en accord); s.o.

Le nombre de sièges détenus par un parti
          au Parlement reflète le pourcentage de voix que le parti a reçu dans l’ensemble
          du pays
          Échelle de cotation : 1 (fortement
          en désaccord) – 5 (fortement en accord); s.o.

De même, 72,5 % des répondants étaient fortement en accord (48,6 %) ou en accord (23,9 %) avec l’affirmation « Le système électoral canadien devrait permettre de s’assurer que les électeurs élisent des candidats locaux pour les représenter au Parlement. [259]»

Les électeurs élisent des candidats locaux pour les représenter au Parlement Échelle de cotation : 1 (fortement en désaccord) – 5 (fortement en accord); s.o.

Les électeurs élisent des candidats locaux pour les représenter au Parlement Échelle de cotation : 1 (fortement en désaccord) – 5 (fortement en accord); s.o.

Enfin, la majorité des répondants se sont dits fortement en accord ou en accord avec les deux énoncés suivants, qui établissent un lien entre la proportionnalité et le choix : « Les électeurs devraient pouvoir voter pour les candidats qui sont sur la liste d’un parti, et les sièges à la Chambre des communes devraient être attribués en conséquence [260]».

Les électeurs devraient pouvoir voter pour les candidats qui sont sur la liste d’un parti Échelle de cotation : 1 (fortement en désaccord) – 5 (fortement enaccord); s.o.

Les électeurs devraient pouvoir voter pour les candidats 
          qui sont sur la liste d’un parti
          Échelle de cotation : 1 (fortement
          en désaccord) – 5 (fortement enaccord); s.o.

Deuxièmement, « Le système électoral canadien devrait produire un Parlement proportionnel (où les sièges reflètent approximativement la répartition des voix entre les partis) par l’élection directe de représentants locaux dans des circonscriptions plurinominales[261] ».

Le système électoral canadien devrait produire un Parlement proportionnel par l’élection directe de représentants locaux dans les circonscriptions plurinominales Échelle de cotation : 1 (fortement en désaccord) – 5 (fortement enaccord); s.o.

Le système électoral canadien devrait
          produire un Parlement proportionnel par l’élection directe de représentants
          locaux dans les circonscriptions plurinominales
          Échelle de cotation : 1 (fortement
          en désaccord) – 5 (fortement enaccord); s.o.

L’honorable Ed Broadbent a fait remarquer que les experts des institutions démocratiques préfèrent généralement la RP aux systèmes majoritaires :

[L]orsque la plupart des spécialistes — non seulement ceux qui ont présenté un exposé au comité, mais ceux du monde entier qui ont étudié la démocratie et les institutions démocratiques — choisissent un système électoral, ils choisissent toujours une forme de RP[262].

Enfin, Arend Lijphart a parlé de ses travaux sur la relation entre la représentation proportionnelle, qui augmente les chances de gouvernements de coalition, et ce qu’il appelle la « démocratie consensuelle » :

[A]vec le temps, j’en suis venu à la conclusion que la RP constitue la meilleure option. On observe également cette tendance en général chez les politicologues. La grande majorité des preuves empiriques viennent désormais appuyer fermement cette conclusion. La RP est un élément essentiel de ce que j’appelle la « démocratie consensuelle », surtout quand elle est combinée à un régime gouvernemental parlementaire. Elle entraîne habituellement un pluripartisme, qui, à son tour, mène à des cabinets de coalition ainsi qu’à des parlements plus forts et à des cabinets moins dominants. Par ailleurs, elle a tendance à être associée à un système plus coopératif de groupes d’intérêts[263].

À ce sujet, l’honorable Ed Broadbent a ajouté :

[L]a RP favorise la civilité et la courtoisie en politique. J'ai bien connu, une fois ma vie politique terminée, par exemple, des politiciens allemands qui étaient membres du CDU et du SPD. Ils connaissaient bien la situation en Scandinavie et ils m'ont tous dit qu'avec les systèmes multipartis qui obligent les partis à se regrouper pour former le gouvernement, les politiciens étaient plus courtois les uns avec les autres avant les élections et pendant les élections, parce qu'ils savaient qu'ils allaient être obligés de travailler avec d'autres partis par la suite. Ce n'est pas un aspect mineur.[264]

b.   Proportionnalité : les faiblesses

Comme on l’a vu ci-dessus, la principale faiblesse des systèmes très proportionnels est la diminution de la représentation locale. C’est pourquoi de telles options ne sont pas considérées par le Comité, certains témoins ont aussi évoqué la complication que représenteraient la fin des gouvernements majoritaires et leur remplacement par des coalitions :

Comme rien n’est parfait, il y a deux problèmes en particulier qui pourraient se présenter [avec la RP]. L’un d’eux est que les circonscriptions devraient être beaucoup plus grandes, tant sur le plan géographique que démographique, parce que la représentation proportionnelle requiert des circonscriptions plurinominales. Les circonscriptions seraient donc beaucoup plus vastes alors que certaines d’entre elles sont déjà énormes. En outre, la formation d’un gouvernement devient beaucoup plus compliquée, car un gouvernement unipartite serait très improbable. Dans un système vraiment proportionnel, il est très difficile à un parti de remporter la majorité des suffrages. Ce n’est pas forcément une mauvaise chose; un gouvernement de coalition a des avantages et des inconvénients, mais ce serait plus compliqué[265].

Il est vrai que la fréquence accrue des gouvernements de coalition représenterait un changement important qui nécessiterait adaptation et éducation :

[I]l est clair que, dans le cas du Canada, cela suppose un changement de culture politique important. Une des conséquences de l’adoption d’un mode de scrutin proportionnel est notamment l’arrivée plus fréquente de gouvernements minoritaires. La population a l’habitude de ce type de gouvernement.
Une chose serait différente, dans le cas du Canada, c’est-à-dire l’arrivée de coalitions gouvernementales. Il n’y a pas de tradition à cet égard ici. Il y a parfois eu des tentatives de coalition qui pouvaient être surprenantes, mais il n’y a pas eu de véritable coalition. Cela pourrait donc être un changement de culture politique important.
[…] Des efforts doivent donc être déployés non seulement par la population, mais aussi par les témoins qui couvrent la vie politique, et cela suppose de l’information. Un des éléments qu’on a aussi mesurés est l’importance d’avoir des cours d’éducation à la citoyenneté …[266]

Fait intéressant, les répondants à la consultation en ligne, qui dans l’ensemble étaient favorables à la proportionnalité, semblaient ouverts à l’idée des gouvernements collaboratifs : 53,5 % étaient fortement en accord (31,8 %) ou en accord (21,7 %) avec l’affirmation « Le système électoral canadien devrait favoriser le résultat suivant : aucun parti politique ne détient la majorité des sièges au Parlement, ce qui favorise une plus grande collaboration entre les partis dans l’adoption des lois[267] ».

Aucun parti politique ne devrait détenir la majorité des sièges au Parlement, favorisant une plus grande collaboration entre les partis dans l’adoption des lois Échelle de cotation : 1 (fortement en désaccord) – 5 (fortement en accord); s.o.

Aucun parti politique ne devrait détenir
          la majorité des sièges au Parlement, favorisant une
          plus grande collaboration entre les partis dans l’adoption des lois 
          Échelle de cotation : 1 (fortement
          en désaccord) – 5 (fortement en accord); s.o.

Certains témoins craignaient que l’adoption d’un système purement proportionnel n’entraîne la prolifération de petits partis au détriment des grands partis nationaux. Kenneth Carty a exprimé cette appréhension :

Je crois qu’avec un système électoral fortement proportionnel, il y a un risque majeur que nous perdions nos partis politiques nationaux. Je crois que les incitations électorales favoriseraient fortement les partis régionaux et sectoriels aux dépens des partis nationaux. Nos partis nationaux pourraient facilement se briser en morceaux de tailles et de formes variées selon le parti concerné[268].

Il a ajouté que l’érosion des partis nationaux pourrait entraîner celle de la vie politique nationale :

[S]elon moi, les systèmes hautement proportionnels, ou même modérément proportionnels, désavantagent les grands partis nationaux. En fait, l’avantage irait aux différents pans de ces partis nationaux, qui pourraient, pour ainsi dire, suivre leur propre voie comme l’ont fait les conservateurs en 1993, en prenant trois chemins différents. N’eût été le système majoritaire uninominal à un tour, jamais ils n’auraient été réunis de nouveau. Je pense qu’avec le temps, nous assisterions à l’érosion des partis nationaux parce qu’il y aurait des incitations électorales à ce que différentes régions et différents groupes présentent leurs propres candidats, sans être liés à une plateforme nationale. Je pense que le véritable risque de la proportionnalité est l’érosion des partis nationaux et, à mon sens, de la vie politique du pays[269].

Pour M. Carty, la grande réussite du système électoral actuel du Canada est qu’il a empêché les clivages de déchirer le pays :

La grande réussite du système canadien des partis est, à mon avis, qu’il a empêché que les clivages énormes, les divisions que l’on retrouve au Canada se reflètent dans notre Parlement et que nous obtenions un pays incapable de fonctionner […] Une des forces de notre système, et de son fonctionnement, est qu’en fait, il a obligé les partis à faire beaucoup d’efforts pour empêcher que toutes ces divisions s’expriment, dans un pays qui évolue constamment[270].

Enfin, certains ont dit craindre – c’est une idée qui se rapproche de celle de M. Carty sur l’érosion des partis nationaux – que la proportionnalité ne mène à la prolifération de petits partis potentiellement « extrémistes » :

Il est clair que la représentation proportionnelle, surtout une représentation proportionnelle des extrêmes, comme c’est le cas en Israël, donne une voix ainsi que le moyen de s’organiser à de très petits groupes qui peuvent adopter des positions très tranchées. À l’inverse de notre système majoritaire uninominal à un tour qui favorise la représentation régionale, le système de représentation proportionnelle favorise la représentation idéologique[271].

Mais tous les témoins ne sont pas allés aussi loin. Par exemple, André Blais s’est limité à prédire que l’accroissement de la proportionnalité augmenterait la diversité des points de vue, et peut-être la polarisation à la Chambre des communes :

Je ne suis pas sûr que les données soient aussi claires sur exactement quelles seraient les conséquences. Une des conséquences serait l’existence d’un plus vaste éventail de points de vue, et certains d’entre eux seraient probablement plus extrêmes qu’ils ne le sont présentement, donc il y aurait davantage de diversité, mais aussi peut-être un peu plus de polarisation au début à la Chambre des communes[272].

D’autres intervenants, comme Brian Tanguay, ont repoussé l’idée que la proportionnalité entraînerait la fragmentation des partis politiques nationaux, ou qu’elle favoriserait la prolifération des partis « extrémistes » :

Je ne suis pas aussi convaincu que M. Carty que cela marquerait la fin des partis politiques nationaux. Je ne pense pas que le Canada soit un pays déchiré par ce que les politicologues appellent les clivages, comme l’est la Belgique par exemple. Le modèle proposé par la commission de réforme du droit établirait une sorte de seuil. Par exemple, il faudrait recueillir au moins 10 % des voix dans une région pour obtenir l’un des sièges de la liste.
Ce qui serait préoccupant, selon moi, ce serait la prolifération de partis marginaux ou extrémistes, mais il me semble exagéré de dire que les partis nationaux disparaîtraient. Je ne pense simplement pas — et je partage le point de vue que vous avez éloquemment exposé dans le préambule à la question — que nous ayons vécu et survécu dans un pays au bord de l’éclatement sous le système uninominal majoritaire. À mon avis, la situation ne pourrait être pire qu’elle ne l’est en ce moment[273].

3.   Le vote unique transférable et d’autres variantes de scrutin préférentiel dans les circonscriptions plurinominales

a.   Le vote unique transférable

L’un des modes de scrutin proportionnel qui pourrait être adopté, selon de nombreux témoins, est le vote unique transférable (VUT) car il est axé sur les candidats et préserve la représentation locale :

Le vote unique transférable [...] est bien connu dans le monde anglo‑saxon et c’est la raison pour laquelle il est qualifié de « système de RP anglais ». L’Irlande, Malte, la chambre haute d’Australie, il est bien connu dans le monde anglo‑saxon. Il conserve la représentation locale[274].

Le VUT a aussi déjà été utilisé au Canada. À l’échelle provinciale, l’Alberta et le Manitoba ont employé, des années 1920 aux années 1950, ce mode de scrutin dans les circonscriptions urbaines, et le VP dans les circonscriptions rurales[275]. En outre, entre 1910 jusqu’au début des années 1920, un certain nombre de municipalités de l’Alberta, de la Colombie‑Britannique, du Manitoba et de la Saskatchewan ont utilisé le VUT[276]. Enfin, l’Assemblée des citoyens de la Colombie‑Britannique a recommandé à la province d’adopter le « VUT‑C.‑B. » dans son rapport de décembre 2004[277].

Le VUT vise essentiellement à établir un niveau modéré de proportionnalité, tout en offrant aux électeurs le plus grand choix possible et en maintenant le lien local entre ces derniers et les députés. Comme l’a expliqué Michael Gallagher lors de sa comparution devant le Comité :

Un type de représentation partielle est la représentation proportionnelle à vote unique transférable. Cela vise à faire plusieurs choses en même temps. Premièrement, ce système cherche à établir un rapport assez étroit entre le nombre de suffrages et le nombre de sièges obtenus par chaque parti. Deuxièmement, il cherche à offrir aux électeurs le maximum de choix – plus que le système à liste ouverte. Cela évite que les électeurs gaspillent leur voix en votant pour un candidat dont les chances sont nulles. Troisièmement, ce système vise à maintenir un lien territorial étroit entre les électeurs et les députés. Le système vise tous ces objectifs[278].

Le VUT fonctionne de la façon suivante[279] : Les électeurs des circonscriptions plurinominales (les circonscriptions comptent de trois à cinq députés en Irlande) classent par ordre de préférence les candidats inscrits sur le bulletin. Ils peuvent les classer tous ou ne classer que ceux de leur choix. C’est en fait la façon de faire en Irlande. Aux élections sénatoriales australiennes, les électeurs doivent classer tous les candidats.

Dans la plupart des variantes, il faut établir le nombre total de suffrages valides exprimés, puis en tenant compte du nombre de sièges, calculer le nombre minimal de voix nécessaire pour être élu (le « quota »). Les candidats recevant suffisamment de premiers choix pour atteindre le quota sont élus. S’il reste encore des sièges à pourvoir, un décompte additionnel en deux étapes a lieu. À la première étape, tous les votes obtenus au‑delà du quota par les candidats élus sont attribués aux candidats de deuxième choix indiqués sur les bulletins des élus, et ce, au moyen d’une formule de pondération des votes (il s’agit du « transfert d’excédents »). Les candidats qui atteignent le quota de cette façon sont élus. Si aucun n’atteint le quota de cette façon, on passe à la deuxième étape. Le candidat qui a le moins de suffrages de premier choix (c’est-à-dire qui est au dernier rang) est alors éliminé et les suffrages de deuxième choix inscrits sur les bulletins où il figure au premier rang sont attribués aux candidats toujours en lice désignés par ces deuxièmes choix. Il y a autant de décomptes additionnels qu’il en faut pour pourvoir tous les sièges disponibles. Comme l’a observé M. Gallagher, la « répartition des votes excédentaires est l’élément le plus complexe du VUT[280] ».

Certaines variantes du VUT excluent le transfert d’excédents, mais prévoient l’élimination du candidat qui a reçu le moins de suffrages et l’attribution des deuxièmes choix obtenus par ce candidat. Cette méthode simplifie le décompte.

Le décompte des votes peut en fait prendre plusieurs jours en Irlande :

On procède au décompte jusqu’à ce que tous les sièges soient comblés. Le dépouillement se fait en plusieurs étapes. La procédure prend beaucoup plus de temps que pour le système uninominal majoritaire. En Irlande, nous avons eu une élection au début de l’année. Elle a eu lieu un vendredi et le décompte des voix n’a commencé qu’à 9 heures le samedi matin. La plupart des sièges ont été comblés avant minuit le samedi, mais certains d’entre eux, pas avant le dimanche. Dans une circonscription où les résultats étaient très serrés et ont exigé quelques recomptages, le dépouillement a duré jusqu’au mercredi matin. Le décompte n’est pas un processus instantané – il faut parfois plusieurs jours pour obtenir le résultat complet[281].

M. Gallagher a ensuite décrit les incidences du système irlandais de VUT sur la représentation, la participation aux élections, la cohésion des partis et les liens entre électeurs et députés :

Premièrement, pour ce qui est de l’exactitude, la représentation est assez exacte. Cela ne donne pas une proportionnalité extrêmement élevée comme le système d’Afrique du Sud, mais des niveaux de proportionnalité assez moyens selon les normes de la plupart des systèmes électoraux européens. C’est beaucoup plus proportionnel que les systèmes différents comme ceux que le Canada, ou encore la Grande-Bretagne ou la France utilisent. Du point de vue de ce critère, le système fonctionne à la satisfaction de notre électorat.
En ce qui concerne la stabilité du gouvernement, elle n’a pas vraiment posé de problème au cours des années. De nos jours, la plupart des gouvernements sont des coalitions, mais ils peuvent être aussi stables que des gouvernements unipartites. Nous avons eu 29 élections au cours de notre histoire et il s’écoule donc environ trois ans d’une élection à l’autre. Cela dit, la dernière élection, en février, n’a pas produit un gouvernement très stable. Nous avons un gouvernement minoritaire qui détient seulement 58 sièges sur 158. Il a fallu deux mois pour le constituer. Sa durée de vie est assez incertaine. Nous ne dirions pas que nous avons un gouvernement très stable pour le moment, mais la stabilité n’a pas posé de problème sur l’ensemble de la période.
Comme je l’ai déjà mentionné, aux yeux de ses défenseurs, l’un des atouts du VUT est qu’il offre beaucoup de choix aux électeurs. Ils peuvent dire exactement ce qu’ils pensent. Ils ne sont pas forcés de voter pour le Parti travailliste, pour Fianna Fail ou le Parti vert, pour nommer les partis irlandais. Ils peuvent voter pour le Parti vert comme premier choix et si le candidat de ce parti est éliminé, ils peuvent voter pour le Parti travailliste comme deuxième choix, pour le Fine Gael comme troisième choix, si bien que leur vote n’est pas gaspillé et qu’il compte. Ils peuvent choisir en fonction de leurs propres critères. Ils peuvent voter pour la position officielle d’un parti ou selon des critères géographiques. Ils veulent un candidat de telle région de la circonscription, un candidat qui réside près de chez eux. Pour cette raison, ils peuvent voter, comme premier choix, pour un candidat local d’un parti et comme deuxième choix, pour un candidat d’un autre parti.
Le système donne‑t‑il un taux élevé de participation électorale? Pas particulièrement, en Irlande. La participation électorale n’est pas particulièrement élevée. Elle était d’environ 65 % aux élections qui ont eu lieu au début de l’année. Néanmoins, ceux qui étudient la participation électorale disent qu’elle dépend d’un grand nombre de facteurs différents. Le système électoral ne joue peut‑être qu’un rôle mineur. Le seul autre pays d’Europe qui utilise la RP‑VUT est Malte où le taux de participation est très élevé, soit de plus de 90 %.
Pour ce qui est de la cohésion des partis, comme je l’ai dit, la concurrence au sein des partis ne nuit pas vraiment à la cohésion. Dans notre pays, la solidarité des groupes parlementaires est très élevée. Il est très rare que les députés défient le whip de leur parti. Il en est ainsi, à tort ou à raison. Les députés votent presque toujours pour la position de leur parti, et ils ne votent tout simplement pas autrement. Quelles que soient les pressions locales, les partis parlementaires font preuve de beaucoup de cohésion.
Il y a ensuite les liens avec les électeurs. Il est intéressant que la question soit soulevée dans le contexte canadien, car c’est un sujet assez controversé en Irlande. Les liens avec les électeurs sont extrêmement solides en Irlande. Les liens entre les députés et les électeurs sont très forts. Les députés passent beaucoup de temps à s’occuper de leurs électeurs, à les représenter, à les rencontrer, à porter des causes en leur nom devant la bureaucratie centrale de la fonction publique […] Il ne semble certainement y avoir aucune raison de s’inquiéter que la RP‑VUT affaiblisse les liens avec la circonscription, car ce serait plutôt l’inverse. Comme je l’ai dit, c’est ce que pensent les universitaires. Le principal atout de la RP‑VUT à cet égard est que maintenant, les députés sont fortement incités, du point de vue électoral, à répondre aux exigences de leurs électeurs[282].

M. Gallagher a conclu sa déclaration liminaire en offrant une suggestion sur la mise en place d’un système de VUT au Canada :

Pour le moment, vous avez 338 députés. Par conséquent, si le Canada adoptait la RP‑VUT il pourrait y avoir de 70 à 90 circonscriptions plurinominales qui éliraient chacune de trois à sept députés ou peut‑être plus. Si nous examinons quelques provinces, nous voyons que Terre‑Neuve‑et‑Labrador a actuellement sept circonscriptions uninominales et pourrait se retrouver avec une circonscription à trois sièges et une circonscription à quatre sièges, par exemple. L’Île‑du‑Prince‑Édouard, qui a actuellement quatre circonscriptions uninominales pourrait devenir une circonscription à quatre sièges. Le Nouveau‑Brunswick a 10 circonscriptions uninominales qui pourraient céder la place à deux circonscriptions à cinq sièges. Les vastes régions géographiques comme le Labrador, les Territoires du Nord‑Ouest, le Nunavut et le Yukon pourraient demeurer des circonscriptions uninominales[283].

Selon ce que le Comité a entendu lors du témoignage de M. Gallagher, différents atouts sont attribués au VUT : le système repose sur une certaine proportionnalité (quoique cette proportionnalité soit modérée, vu la magnitude réduite des circonscriptions), il augmente le choix pour les électeurs et il maintient le lien entre les candidats et les électeurs.

Les principaux défauts ou inconvénients du VUT sont son apparente complexité et le temps requis pour déterminer les gagnants ainsi que l’idée selon laquelle les candidats des mêmes partis se font la lutte[284]. Sur ce dernier point, M. Gallagher a estimé qu’en Irlande, « la concurrence au sein des partis ne nuit pas vraiment à la cohésion[285] ». Pour sa part, Craig Henschel, amené à parler de son expérience à l’Assemblée des citoyens de la Colombie‑Britannique, a fait remarquer que la concurrence interne peut aussi avoir de bons côtés :

Il y a deux aspects à cette question. Les membres de l’Assemblée aiment beaucoup l’idée d’une plus grande concurrence, et le Canada porte une plus grande attention aux électeurs afin d’obtenir leur vote. Nous estimons aussi qu’en raison du mode de scrutin préférentiel, si vous voulez être élu, vous ne pouvez pas dire des choses horribles sur les autres candidats, parce que vous pourriez avoir besoin de leur appui. Vous pourriez avoir besoin de l’appui de leurs partisans. La teneur des propos et le ton des élections devraient même s’améliorer avec l’augmentation de la concurrence[286].

Enfin, divers témoins se sont exprimés sur la magnitude idéale des circonscriptions dans un système tel que le VUT, qui allierait la proportionnalité et la représentation locale. En Irlande, les circonscriptions comptent de trois à cinq députés; leur magnitude est fixée dans la constitution. Dans le système de VUT de la Colombie‑Britannique, chaque circonscription aurait de deux à sept sièges. Comme l’a souligné Laura Stephenson, « [t]out nombre supérieur à un donnerait des résultats plus proportionnels que notre système actuel, et de nombreux systèmes partout dans le monde ont des circonscriptions à faible magnitude ». Elle a ajouté que, selon les experts, « le nombre idéal se situe entre trois et sept[287] ».

b.   Proposition de Jean-Pierre Derriennic concernant une « représentation proportionnelle modérée avec vote préférentiel »

Jean-Pierre Derriennic s’est appuyé sur son récent ouvrage intitulé Un meilleur système électoral pour le Canada [288] pour recommander, lors de son témoignage, que le Canada mette en place une variante du mode de scrutin irlandais. Selon ce système de « représentation proportionnelle modérée », le Canada serait divisé en circonscriptions de trois à cinq sièges. Comme M. Derriennic l’a observé devant le Comité :

La mise en œuvre de cette réforme ne serait pas difficile si l’on suit les principes suivants : maintenir le nombre total de députés ou leur nombre par province; fusionner des circonscriptions contiguës sans modifier les limites actuelles; dans les nouvelles circonscriptions plurinominales, veiller à ce que la proportion de députés par habitant demeure aussi égale que possible. L’Île‑du‑Prince‑Édouard formerait une seule circonscription comportant quatre sièges. Dans les autres provinces, le regroupement de circonscriptions auxquelles on attribuerait trois, quatre ou cinq sièges permettrait d’atteindre le bon nombre de députés. Ce système permettrait d’éviter le principal danger de la représentation proportionnelle, soit un trop grand nombre de partis ayant des députés[289].

Par ailleurs, le système proposé par M. Derriennic comprendrait un scrutin préférentiel, lequel devrait être, selon lui, un élément de tout système électoral, qu’il soit fondé sur la proportionnalité ou la majorité absolue :

Le scrutin préférentiel devrait invariablement faire partie des systèmes électoraux, car les citoyens devraient avoir le droit de voter sincèrement, sans avoir à deviner comment d’autres voteront et sans se faire manipuler par des rumeurs et des sondages d’opinion.
Dans des circonscriptions uninominales, la possibilité d’exprimer son choix en ordre de préférence plutôt qu’un seul choix conférerait une légitimité aux résultats, puisque tous les députés sont élus par une majorité d’électeurs.
Il est aussi possible d’exprimer son choix par ordre de préférence lorsqu’on choisit parmi des listes de candidats pour obtenir un résultat proportionnel. On peut alors utiliser le vote unique transférable, comme en Irlande, ou exprimer son choix en ordre de préférence entre des listes bloquées de candidats[290].

Cependant, pour « éviter d’affaiblir les partis » (même si une certaine concurrence à l’intérieur des partis est inhérente au VUT), M. Derriennic propose la solution suivante :

Les électeurs voteraient comme en Irlande : le bulletin de vote mentionne tous les candidats qui se présentent dans la circonscription et très clairement le parti auquel ils appartiennent; les électeurs indiquent un ordre de préférence, complet ou non. La façon de calculer le résultat serait différente de celle appliquée en Irlande : toutes les premières préférences accordées aux candidats du même parti seraient d’abord additionnées, pour déterminer le nombre des votes en faveur de chaque parti. On appliquerait ensuite la méthode de calcul décrite plus haut dans ce chapitre pour le vote préférentiel entre des listes : les bulletins en faveur des partis qui ont trop peu de votes pour avoir un élu seront transférés en fonction des deuxièmes préférences ou des préférences suivantes[291]; quand tous les partis qui restent en compétition peuvent avoir au moins un élu, on procède à la répartition proportionnelle des sièges entre eux. Ces sièges sont ensuite attribués aux candidats individuels en fonction des votes personnels qu’ils ont obtenus[292].

M. Derriennic soutient que son système serait moins compliqué que le VUT, car il ne serait pas nécessaire de calculer des quotas et de faire du transfert d’excédents.

c.   Suggestion de Jean-Pierre Kingsley et proposition de représentation proportionnelle rurale‑urbaine de Représentation équitable au Canada

Lors de sa présentation devant le Comité, Jean‑Pierre Kingsley a proposé l’ajout d’un élément de proportionnalité au système électoral du Canada en regroupant les circonscriptions urbaines pour en faire des circonscriptions plurinominales, tout en conservant le SMUT pour les circonscriptions rurales et éloignées. Les électeurs continueraient de voter une fois, qu’ils vivent dans une circonscription uninominale ou une circonscription plurinominale :

Cela dit, la suggestion que j’ai faite est la suivante: étant donné que le Canada est si vaste, on préserverait le système uninominal à un tour pour les circonscriptions éloignées, rurales ou étendues. Environ 40, 50 ou 60 députés seraient élus de cette façon.
Quant aux zones urbaines, on pourrait réunir quatre ou cinq circonscriptions actuelles et faire en sorte que les quatre ou cinq députés soient choisis par les électeurs en fonction des résultats du vote. Je ne défendrai pas ce qui suit jusqu’à ma mort, mais selon la façon dont je vois les choses, un électeur voterait pour un parti ou un candidat. Les candidats seraient choisis par la nouvelle association qui regrouperait les quatre ou cinq circonscriptions. Ce serait donc les gens qui choisiraient.
Pour ce qui est de la parité entre hommes et femmes, supposons qu’il y ait cinq sièges à pourvoir. Je demanderais qu’on élise trois hommes et trois femmes, et que le parti choisisse, au niveau local, un homme, une femme, un homme, une femme, un homme, une femme, et ainsi de suite, de façon à ce que ce soit toujours un, deux, un, deux, un, deux.
Bref, l’électeur choisirait. Il voterait, comme il le fait présentement, pour un candidat ou un parti. Ce serait la même chose. Il n’y aurait qu’un vote. À partir de là, on établirait, par exemple, que 60 % des gens ont voté pour un parti donné, et qu’il y a trois sièges. On parlerait donc de 20 %[293].

M. Kingsley a ajouté qu’il serait toujours possible, pour les candidats indépendants, d’être élu dans le système proposé :

Dans l’exemple que j’ai présenté, il est également possible d’avoir des candidats indépendants. Leurs chances d’être élus, d’ailleurs, seraient probablement les mêmes qu’aujourd’hui. Nous ne pouvons pas concevoir un système — à tout le moins, pas rapidement — dans lequel les candidats indépendants domineraient, mais il est important que ce phénomène ait droit de cité, dans notre système, et il existe différents systèmes qui le permettent déjà sans problème[294].

Pour déterminer si une circonscription est rurale ou éloignée, il faudrait « examiner une à une toutes les provinces, pour voir ce que les gens pensent, ce qu’ils considèrent comme une région rurale et comme une région urbaine[295] ».

En réponse à la suggestion de Jean-Pierre Kingsley, l’organisation Représentation équitable au Canada a proposé un modèle appelé « représentation proportionnelle rurale‑urbaine » (l’objectif étant de rendre le système plus proportionnel). Elle a décrit sa proposition de la façon suivante :

  • 1) des circonscriptions plurinominales dans les régions urbaines (où les élus pourraient l’être par un vote préférentiel – VUT – ou une liste ouverte);
  • 2) des circonscriptions uninominales dans les régions rurales et les petites régions urbaines (qui pourraient tout de même utiliser le vote préférentiel – ou le vote uninominal à un tour);
  • 3) un petit nombre de députés régionaux supplémentaires pour rendre les résultats dans les régions proportionnels (c’est une idée empruntée de la Suède, où ces sièges sont appelés des sièges d’ajustement[296]).

Dans le mémoire qu’elle a donné au Comité, l’organisation Représentation équitable au Canada propose un modèle de représentation proportionnelle rurale‑urbaine qui possède les caractéristiques suivantes :

  • des circonscriptions uninominales ou de 2‑3 députés dans les régions à faible densité démographique;
  • des circonscriptions plurinominales dans les régions à forte densité démographique;
  • des sièges compensatoires à la hauteur de 15 % de la totalité, ajoutés soit en agrandissant quelque peu la Chambre des communes ou en augmentant la taille des circonscriptions régulières[297].

Selon l’organisation, ce mode de scrutin pourrait offrir une solution sur mesure pour le Canada :

Ce mode de scrutin peut être configuré de différentes façons dans le but de représenter efficacement chaque électeur. Il permettrait ainsi d’ajuster certains éléments de conception d’une part à l’autre du pays dans le cadre d’une solution sur mesure pour le Canada qui offre le niveau de proportionnalité souhaité en fonction des différences rurales‑urbaines en restant à l’écoute des préoccupations et des préférences locales[298].

4.   Les systèmes électoraux mixtes : le système de représentation proportionnelle mixte et ses variantes

a.   Introduction

Le Comité a entendu de nombreux témoignages concernant les systèmes mixtes, et plus particulièrement le système de représentation proportionnelle mixte (RPM). Les systèmes électoraux mixtes marient des éléments des systèmes majoritaires à la représentation proportionnelle. Dans le cadre du système de RPM, certains députés sont élus par un scrutin majoritaire dans des circonscriptions uninominales (il s’agit souvent du SMUT), et certains sont choisis à partir d’une liste de parti, dans le cas d’un scrutin proportionnel et compensatoire. Les systèmes de ce genre ont pour objet de maintenir la représentation locale, tout en permettant dans l’ensemble une plus grande proportionnalité entre le vote populaire et l’attribution des sièges.

On peut dire essentiellement des systèmes de RPM tels que ceux appliqués en Allemagne, en Nouvelle‑Zélande et en Écosse qu’ils font voter deux fois les électeurs. Le premier vote permet d’élire le représentant de la circonscription, selon le mode de scrutin majoritaire uninominal à un tour. Le deuxième vote détermine le nombre total de députés de chaque parti selon la méthode compensatoire. Dans la plupart des systèmes de cette sorte, le vote primaire est celui qui est destiné au parti : une partie des sièges que le parti occupera au parlement est déterminée par le vote destiné aux partis; le nombre de sièges de circonscription qui ont été remportés est ensuite soustrait du total. Les sièges restants sont comblés à partir des listes de parti[299].

b.   Avantages perçus de la RPM

David Moscrop a mis en lumière l’une des caractéristiques perçues comme un grand atout de la RPM :

La représentation proportionnelle mixte permet une représentation locale directe et satisfait à l’engagement qu’ont de nombreux Canadiens envers l’équité qu’ils interprètent comme étant un nombre de sièges établi proportionnellement au nombre de votes[300].

Pour certains, la RPM pourrait donc satisfaire au principe « d’efficacité et de légitimité », car elle vise à établir un rapport entre le nombre de votes et le nombre de sièges de façon à « réduire les distorsions », tout en maintenant le lien entre les préférences des électeurs et l’élection de leurs représentants.

La majorité des participants ayant argumenté en faveur d’une réforme électorale ont préconisé l’adoption d’un système de RPM qui, selon eux, maximise le choix pour les électeurs. Comme l’a dit Leslie Seidle, « je pense que le modèle mixte est très avantageux, parce qu’il peut être structuré de manière à permettre beaucoup de choix pour les électeurs[301] ». La RPM permet de répartir son vote : l’électeur peut choisir le candidat d’un certain parti dans sa circonscription et voter pour un autre parti au scrutin compensatoire. Cette solution contribuerait à régler le problème du « vote gaspillé » que certains imputent au SMUT. Lee Ward a dit, à propos de la RPM :

Le seul système qui habilite les électeurs est celui qui s’assure, dans toute la mesure du possible, que le vote de chaque personne – ou son véritable choix, son premier choix – contribuera à faire élire son représentant au Parlement[302].

Le problème du vote stratégique pourrait se régler plus facilement si le bulletin de vote offrait plus de choix aux électeurs. Craig Scott a traité de cette question :

En Nouvelle-Zélande, environ 30 % des électeurs choisissent cette option de vote croisé. Cela signifie que les candidats locaux sont plus susceptibles de pouvoir récolter des votes pour qui ils sont, pour ce qu’ils ont fait et pour ce qu’ils peuvent apporter à l’échelon national, depuis l’échelon local, sans avoir à se soucier du vote stratégique. Selon moi, il s’agit d’une caractéristique extrêmement importante du système mixte avec compensation proportionnelle[303].

Par ailleurs, des témoins ont observé que le système de RPM reste assez simple. Katelynn Northam croit que « c’est en partie attribuable au fait que le facteur de la représentation locale semble très familier et semblable à ce qu’ils connaissent déjà dans le cadre du scrutin majoritaire uninominal à un tour. Ça semble assez simple et accessible sur le bulletin de vote[304]. »

c.   Histoire de la RPM au Canada

Au Canada, la RPM n’a jamais été utilisée à l’échelle provinciale ou fédérale. En mars 2004, la Commission du droit du Canada, à la suite d’une étude de trois ans sur la réforme électorale, a recommandé que le Canada passe à un système de RPM[305] pour différentes raisons :

  • réduire l’écart entre la proportion de sièges que détient un parti à la Chambre des communes et celle des voix qu’il a obtenues aux élections;
  • faciliter l’inclusion de nouvelles voix précédemment sous‑représentées, comme celles de petits partis politiques;
  • permettre l’élection d’un plus grand nombre de candidates et de candidats membres des groupes minoritaires;
  • favoriser la coopération entre les partis au sein de gouvernements de coalition;
  • atténuer le déséquilibre entre la valeur des différents votes observé dans notre système actuel en vertu duquel un vote accordé au parti vainqueur a souvent trois ou quatre fois plus de valeur qu’un vote accordé à n’importe quel autre parti;
  • réduire le nombre de votes gaspillés et donner ainsi lieu à une augmentation de votes « loyaux » par opposition aux votes stratégiques;
  • donner lieu à une représentation plus équilibrée des régions au sein des caucus[306].

Lors du plébiscite de novembre 2016 à l’Île-du-Prince-Édouard sur la réforme électorale, au terme de quatre séances de dépouillement, la RPM a été identifiée comme l’option privilégiée parmi celles à l’étude.[307] La RPM a aussi fait l’objet d’un référendum en Ontario (2007) et d’un plébiscite précédent à l’Île‑du‑Prince‑Édouard (2005). Elle n’a pas reçu la proportion requise d’appuis dans les deux cas. En outre, la RPM a été recommandée par la Commission spéciale sur la Loi électorale et le Comité citoyen du Québec, en 2006, et par la Commission sur la démocratie législative du Nouveau‑Brunswick, en 2006.

d.   Éléments de la RPM

i.    Listes de parti ouvertes et fermées

La manière dont les candidats sont élus en fonction des listes de parti constitue l’un des aspects importants du système de RPM. Il existe deux grandes sortes de listes de parti, communément appelées « ouvertes » et « fermées ».

Dans le scrutin de liste fermée, le parti établit la liste en attribuant un rang à chaque candidat. Les électeurs votent pour un parti, et non pour un candidat. Après le dépouillement du scrutin, chaque parti se voit accorder un nombre de sièges proportionnel à sa part des suffrages nationaux. Ces sièges sont alors attribués aux candidats selon leur rang sur la liste du parti. Les détracteurs des listes de parti fermées affirment souvent que ce type de liste laisse aux partis politiques un trop grand pouvoir de décision sur le choix des candidats élus.

Royce Koop a fait remarquer que le recours à des listes de parti serait « une toute nouvelle expérience pour les Canadiens. Ils ne seraient probablement pas emballés de ne pas pouvoir rendre les politiciens responsables[308]. » Mireille Tremblay a abondé dans le même sens, soulignant que, les listes fermées étant soumises totalement à la volonté des partis, « on peut penser que les élus seront plus redevables envers le parti qu’envers les électeurs[309] ».

Comme nous le verrons de plus près dans la section suivante, les listes fermées ont pour principal avantage de permettre aux partis de classer leurs candidats de manière à garantir l’élection de ceux représentant des groupes historiquement sous‑représentés, comme les femmes, les minorités visibles et les peuples autochtones.

Dans le scrutin de liste ouverte, les électeurs choisissent le ou les candidats qu’ils préfèrent dans la liste du parti pour lequel ils veulent voter. Cela revient à dire que ce sont les électeurs qui établissent l’ordre dans lequel les candidats de la liste se verront attribuer un siège[310]. James Bickerton a indiqué qu’un système de RPM avec liste ouverte pourrait résoudre les préoccupations que les listes de parti fermées suscitent au sujet de la reddition de comptes :

À mon avis, rien ne justifie de refuser aux électeurs la possibilité de choisir entre les candidats d’un parti. Certains soutiennent que cela stimulerait la lutte entre les candidats d’un parti politique. Oui, ce serait le cas, mais du point de vue de l’électeur et d’une perspective de représentation, je ne pense pas que ce soit une mauvaise chose pour autant[311].

Pippa Norris a fait valoir que, lorsque des listes ouvertes sont utilisées, « les électeurs peuvent exprimer une préférence pour un candidat particulier au sein d’une liste complète, ce qui leur donne un choix plus large[312] ». Par contre, à l’assemblée publique organisée à Victoria, Tana Jukes a estimé qu’un « système mixte proportionnel avec des listes ouvertes pourrait [...] apporter quelques améliorations au système actuel, mais je suis préoccupée par les difficultés qu’il entraînerait[313] ». Dans un système de RPM, les électeurs auraient à s’informer sur un plus grand nombre de candidats, ce qui leur demanderait de consacrer plus de temps au processus électoral.

La grande majorité (70,1 %) des participants à la consultation électronique a indiqué qu’ils étaient « fortement en désaccord » ou « en désaccord » avec l’affirmation selon laquelle les partis politiques devraient déterminer quels candidats inscrits sur leur liste seraient élus[314]. D’autre part, la majorité des répondants (59,6 %) ont dit qu’ils appuyaient fermement ou qu’ils appuyaient le point de vue voulant qu’il appartient aux électeurs de décider quels candidats inscrits sur les listes de parti devraient être élus[315].

Pour clore la question des listes ouvertes et fermées, il est important de noter que ces listes peuvent être adaptées, et qu’il existe dans le monde de nombreuses façons possibles de déterminer lesquels, parmi les candidats inscrits sur les listes, devraient être élus[316]. En 2004, la Commission du droit du Canada a suggéré une option intermédiaire : donner aux électeurs la possibilité d’appuyer la liste de parti pour sa région ou d’indiquer sa préférence pour un candidat dans la liste[317]. Une autre option hybride distincte consiste à utiliser le modèle des « meilleurs seconds », aussi connu comme modèle de Baden-Wurtemberg du nom du Land (état ou province) allemand où il est utilisé. De plus, tel que l’explique Représentation équitable au Canada :

Une façon de simplifier le scrutin pour les sièges compensatoires serait de les attribuer aux meilleurs seconds. Selon ce modèle, utilisé dans la province de Baden-Wurtemberg en Allemagne, les sièges compensatoires sont attribués à des candidats de seconde place à l’échelon uninominal, en commençant par le candidat restant qui a reçu le plus haut niveau d’appui.[318]
ii.   Diversité et listes de parti

Un certain nombre de témoins ont soutenu que, même si la réforme électorale ne garantira pas à elle seule la possibilité d’accroître la représentation des groupes historiquement sous‑représentés, comme les femmes, les minorités visibles et les peuples autochtones, les listes de parti pourraient se révéler utiles. Si un groupe sous‑représenté a toujours du mal à se faire élire dans une circonscription particulière, les partis peuvent s’assurer de leur élection par le jeu des listes de parti fermées[319].

M. Peden a signalé que c’est précisément ce qui s’est produit en Nouvelle‑Zélande, où « le système de RPM a entraîné l’élection d’un nombre plus élevé de femmes et de Maoris au Parlement, la plupart étant des députés de liste[320] ».

Bon nombre de témoins ont également fait valoir que, même si les listes de parti équilibrées contribuent à favoriser, dans une certaine mesure, la diversité des candidats et des élus, elles représentent au final une solution peu efficace à un problème qui reste principalement du domaine des partis politiques. Melanee Thomas a rappelé que l’élection de femmes et d’autres membres de groupes historiquement sous‑représentés ne s’est pas produite spontanément[321]. « Elle ne va pas apparaître spontanément sous notre régime ni en raison de l’adoption de la RP[322]. Amanda Bittner a dit pour sa part « qu’on a tendance à associer les systèmes proportionnels à une plus grande diversité, mais ce lien reste dépendant de l’engagement des partis à dresser des listes de candidats traduisant cette diversité[323] ».

Selon Joachim Behnke, professeur de sciences politiques à l’Université Zeppelin en Allemagne, les listes de parti représentent « le meilleur moyen de forcer les partis à céder la moitié de leurs sièges à des femmes[324] », quoique les partis assument d’eux‑mêmes cette responsabilité. M. Behnke a signalé que la loi allemande ne fixe pas de quotas, mais les partis s’en sont donné de façon volontaire et non officielle pour assurer la représentation de certains groupes.

Enfin, en ce qui a trait à la diversité vis-à-vis les listes ouvertes ou fermées, le Comité a entendu des témoignages suggérant que les électeurs voteront pour des candidats issus de la diversité en cas de liste ouverte. Laura Stephenson a partagé avec le Comité le résultat de ses recherches sur la probabilité que les électeurs élisent des femmes dans les systèmes avec listes ouvertes :

Dans tout système qui implique une liste de candidats, nous devons réfléchir à l'ordre des noms sur la liste. Dans un système à liste fermée, où les partis ont le plein contrôle de l'ordre dans lequel les candidats obtiendront des sièges, il est important d'alterner ou, du moins, de ne pas placer les groupes sous-représentés dans une position favorable. Dans les systèmes à liste ouverte, cela n'est pas aussi important. En faisant des recherches avec mes collègues, nous avons découvert qu'en laissant les gens voter dans un système à liste ouverte, où ils pouvaient choisir, on augmentait la représentation des femmes. N'est-ce pas là une bonne nouvelle? Le soi-disant désavantage que les femmes représentent n'a pas été étayé par des preuves[325].
iii.  Régions et listes de parti

Compte tenu des réalités géographiques et de la Constitution du pays, il est fort probable que les députés de liste doivent être élus en fonction des listes de parti établies dans chaque province et territoire. La Commission du droit du Canada était en fait arrivée à cette conclusion dans son rapport d’étude de 2004[326].

Avant le jour du scrutin, chaque province et territoire créerait une liste de candidats à élire en fonction des listes de parti. Les provinces plus peuplées pourraient exiger la présentation d’un certain nombre de listes de parti. Par ailleurs, comme David McLaughlin l’a relevé, « la façon dont les limites des régions seraient dessinées, dans un système mixte proportionnel, permettait très facilement de protéger des communautés d’intérêt, par exemple lorsque des communautés minoritaires importantes étaient regroupées[327] ».

Roderick Wood a parlé du travail de réflexion de la Commission du droit du Canada concernant les listes de parti provinciales et infraprovinciales :

Nous avons proposé que la liste, sauf pour le Québec et l’Ontario en raison de la taille de ces provinces, soit dressée en fonction des régions, ce qui établirait une liste provinciale. Cela signifierait qu’une province comme Terre‑Neuve‑et‑Labrador aurait sept députés, soit quatre députés de circonscription et trois députés de liste. Chaque province disposerait de sa propre liste[328].
iv.  Des doubles candidatures?

Des témoins ont jugé importante la question de permettre ou non les « doubles candidatures », c’est‑à‑dire la possibilité d’être candidat dans une circonscription et d’être inscrit en même temps sur une liste de parti. Louis Massicotte a dit à ce sujet :

Avec un scrutin mixte compensatoire, habituellement, il est possible d'être candidat dans une circonscription et de figurer sur la liste, pour une raison très simple: plus un parti a du succès dans une circonscription, moins il en a sur la liste. Par conséquent, il vaut mieux jouer sur les deux tableaux, parce qu'au moment où les députés posent leur candidature, on ne sait pas quel sera le résultat final – c’est la beauté de la démocratie. Autrement, si vous pensez que vous aurez un grand succès, que vous vous présentez dans une circonscription, mais que l'élection tourne mal et que vous êtes défait dans la circonscription, vous perdez la sécurité que vous procure la liste.
[Il] me paraît parfaitement légitime d'avoir la double candidature, mais cette idée se heurte à beaucoup de résistance au sein de la population et également parmi les députés[329].

M. Behnke a signalé que, en Allemagne, le fait d’être candidat dans une circonscription tout en figurant sur une liste est chose courante :

[L]a plupart des députés de liste ou des sièges de liste sont aussi, dans bien des cas, des candidats de circonscription. Ils ont perdu dans leur circonscription, mais ils entretiennent une relation spéciale avec elle, ils sont connus et ont un bureau dans cette circonscription[330].

D’autres témoins, dont Christopher Kam à Vancouver, se sont demandé si les doubles candidatures seraient vues comme étant justes ou légitimes :

[S]i vous perdez une élection, vous perdez une élection. Mais avec la double candidature, les candidats peuvent contester la circonscription et la liste, et cela leur permet presque toujours de se faire élire ou du moins de se protéger contre une défaite[331].

Selon ce que sous‑entend M. Kam, si les doubles candidatures étaient possibles, il pourrait être difficile pour les électeurs de montrer la porte à un candidat à la réélection qui est devenu impopulaire au niveau local. Benoît Pelletier a fait une remarque dans le même sens en relatant l’expérience québécoise :

Ce que certains ont jugé inacceptable, c'est que quelqu'un puisse être candidat dans la circonscription et, en même temps, être en haut de la liste. La défaite de ce candidat dans la circonscription découlait de l'expression démocratique de la population qui n'en voulait pas ou qui préférait quelqu'un d'autre. Les parlementaires, d'abord, puis une partie de la population, n'aimaient pas l'idée que cette personne puisse être élue députée, fédérale ou provinciale, uniquement par sa présence sur une liste.[332]

e.   Conséquences de la RPM

i.    Deux types de députés?

Laura Stephenson a exprimé une autre critique souvent dirigée contre la représentation proportionnelle parlementaire. Elle a dit au Comité qu’elle n’appuyait pas cette forme de système parce qu’il crée « deux différentes catégories de députés[333] ». Comme certains députés peuvent être élus dans une circonscription précise et d’autres, choisis dans la liste du parti, des témoins ont dit craindre que ce système modifie les rôles traditionnels des députés et qu’il suscite des doutes sur la reddition de comptes. Patrice Dutil a résumé quelques‑unes des principales préoccupations touchant l’existence de deux types de députés :

Je ne pense pas que l'idée d'établir deux classes de députés sera acceptée dans notre culture politique. Nous aurions une classe de députés qui répondent aux besoins des électeurs et une autre classe de députés dont les noms figureraient continuellement à la liste. Je crois que les Canadiens tiennent à ce que leurs députés assument leurs responsabilités envers eux[334].

Nelson Wiseman a signalé un autre problème potentiel : une division pourrait survenir entre les fonctions parlementaires remplies par les deux types de députés[335]. Par exemple, si les députés des circonscriptions réalisaient la majeure partie du travail dans leurs circonscriptions, à qui les députés de liste rendraient‑ils des comptes? D’un autre côté, certains ont estimé que les députés de liste pourraient être vus comme des députés de « seconde classe » parce qu’ils n’ont pas vécu le processus ardu de se faire élire dans une circonscription.

Roderick Wood, qui était membre de la Commission du droit du Canada en 2004, lorsque la Commission a publié son rapport sur la réforme électorale, a dit que la Commission s’était penchée sur cette préoccupation :

Nous nous sommes arrêtés à l'argument de la création de deux classes de députés, au fait qu'il y en ait qui ne soient pas élus et qu'ils soient des citoyens de seconde classe. Nous avons conclu que tel n'était pas le cas. En Allemagne et en Nouvelle‑Zélande, les deux catégories font partie de la députation et les partis veillent à ce que les membres nommés à partir de listes se voient confier une part équitable du travail de circonscription. Qui plus est, les électeurs ont un meilleur choix par la suite, parce qu'ils peuvent se tourner vers le député de circonscription, mais aussi vers un député régional qui peut appartenir à un parti différent[336].

Pippa Norris a aussi jugé que l’existence de deux types de députés ne posait pas nécessairement problème :

Vous pouvez avoir un système mixte, mais cela veut dire qu'il y aura de légères différences dans les rôles et les responsabilités des députés, la quantité de travail qu'ils accomplissent au service de leur circonscription, un service extrêmement précieux qui prend beaucoup de temps et est apprécié dans tout système parlementaire, par rapport à ceux qui se consacreront davantage au travail en comité ou aux enjeux ou autres préoccupations du Parlement. Vous divisez simplement les rôles un peu plus qu'avec le système actuel[337].

Des experts de la Nouvelle‑Zélande et de l’Allemagne ont souligné que la présence de deux types de députés ne posait pas de problème en pratique pour les citoyens ou les députés eux‑mêmes. Robert Peden, de la Nouvelle‑Zélande, a indiqué que « les parlementaires élus à partir de la liste ont exactement les mêmes droits et responsabilités qu'un député élu dans une circonscription[338] ». Pour sa part Friedrich Pukelsheim a soutenu ce qui suit :

Il n'existe aucune différence quant à leurs fonctions et à leur accès aux postes politiques. La différence est que la moitié d'entre eux sont des représentants directs d'une circonscription [...] Mais cela ne les empêche pas d'être très actifs, d'avoir des heures de bureau, de faire des visites et d'entretenir des liens avec les associations. Ils essaient d'acquérir une grande visibilité. En Allemagne, les tâches politiques courantes sont très similaires pour les deux types de représentants[339].

Par ailleurs, Joachim Behnke a fait savoir que, en Allemagne, de nombreux députés élus à partir des listes de parti avaient tenté en vain de se faire élire dans une circonscription. Une bonne part des députés de liste ont ainsi des liens directs avec les électeurs de leur région[340].

Enfin, des témoins ont affirmé que différents types de députés peuvent assurer une représentation plus efficace de l’électorat, car ils permettent à certains députés de se concentrer sur les enjeux locaux et à d’autres de se consacrer à des dossiers régionaux, de portée plus large. Ce système peut donc aider les citoyens à interagir plus facilement avec leurs députés à propos des questions qui comptent pour eux.

ii.   Gouvernements de coalition

Les témoins ont convenu dans une grande mesure que la constitution d’un gouvernement majoritaire par un seul parti se produirait peu fréquemment dans le cadre d’un système de RPM. Brian Tanguay a fait valoir que l’une des conséquences principales de l’adoption d’un système du genre serait que les « coalitions de nécessité deviendraient la norme[341] ».

Les scrutins tenus dans le cadre d’un système de RPM donnent généralement lieu à l’élection d’un gouvernement minoritaire ou d’un gouvernement de coalition. Le cas néo‑zélandais offre un exemple intéressant, comme l’a montré M. Peden :

Il y a eu jusqu'ici sept élections selon le système de RPM en Nouvelle‑Zélande. Dans chaque cas, de six à huit partis ont été représentés au Parlement. Chaque élection a débouché sur une forme quelconque de gouvernement de coalition ou d'arrangement entre des partis politiques, comme il faut s'y attendre quand on utilise un système proportionnel. Chaque gouvernement a conservé la confiance du Parlement tout au long de son mandat[342].

De nombreux témoins et citoyens ont dit craindre qu’un système de RPM ait tendance à produire des gouvernements de coalition. Louis Massicotte a rappelé, à cet égard :

[Au] Canada [...] il n'y a pas une culture des coalitions. Les coalitions sont mal vues dans la classe politique et par une partie de la population. Les acteurs politiques vont probablement s'ajuster, mais l'ajustement ne sera pas nécessairement facile[343].

Dans la même veine, Nick Loenen a estimé que les Canadiens ne verraient tout simplement pas d’un bon œil « des gouvernements de coalition chroniques[344] ». Peter Loewen a observé quant à lui qu’« une responsabilité plus floue et des négociations à huis clos qui ont lieu après ou entre les élections » font partie des grands inconvénients des gouvernements de coalition. M. Loewen a ajouté que la mise en place d’un système proportionnel tel que la RPM aurait « pour effet de donner un rôle peut‑être permanent aux petits partis régionaux ». Ces petits partis pourraient exercer une influence trop grande au gouvernement[345].

Outre les craintes relatives aux gouvernements de coalition et la représentation accrue des petits partis, bon nombre de témoins ont jugé qu’une gouvernance multipartite serait bénéfique pour la démocratie parlementaire au Canada. Arendt Lijphart a porté son attention sur les effets de l’élection de différents partis au Parlement ou de la représentation de différents partis au sein du conseil des ministres :

[Elle] mène à des cabinets de coalition ainsi qu’à des parlements plus forts et à des cabinets moins dominants. Par ailleurs, elle a tendance à être associée à un système plus coopératif de groupes d’intérêts[346].

Jean-Pierre Charbonneau a avancé que les gouvernements de coalition peuvent créer une culture de la collaboration et du compromis sur la scène politique fédérale :

La coalition n'implique pas que nos gouvernements sont instables [...] Le fait de devoir établir des compromis avec des adversaires politiques, de même qu'avec des gens dont l'idéologie est plus proche de la nôtre, crée néanmoins un climat politique favorable. Les citoyens en ont ras le bol de la partisannerie excessive et des comportements qui dévaluent la chose politique[347].

Bien que le Canada n’ait pas une tradition de gouvernements de coalition, les experts de l’Allemagne et de la Nouvelle‑Zélande consultés par le Comité ont expliqué comment les partis politiques, les électeurs et le Parlement peuvent s’y adapter. Joachim Behnke a décrit l’expérience allemande des gouvernements de coalition :

La formation de coalitions n’est vraiment pas très compliquée dans la plupart des cas, parce que nous avons des sortes de précoalitions durant les campagnes électorales [...] Les gens disent souvent que le défaut des systèmes proportionnels est qu’ils ne savent pas dans quelles coalitions ils vont se retrouver, mais, en fait, ce n’est pas ce qui se passe, parce qu’ils obtiennent généralement ce pour quoi ils ont voté[348].

Certains craignent que la présence de petits partis jouissant d’une trop grande influence sur le parti au pouvoir soit mauvaise pour la démocratie et peu représentative des électeurs. D’autres sont d’avis que les coalitions constituent le meilleur moyen de s’assurer que le gouvernement tient compte des perspectives défendues par les partisans des petits partis.

En réponse au risque d’élection de partis « marginaux » ou « extrémistes », certains pays qui appliquent la RPM ont mis en place des seuils d’élection. Par exemple, pour avoir droit à une part des sièges réservés aux candidats des listes, un parti doit recueillir au moins 5 % des suffrages nationaux ou remporter au moins une circonscription[349].

f.    Éléments à considérer

i.    Rapport entre le nombre de députés de circonscription et le nombre de députés de liste

Dans un système de RPM, il est important de tenir compte du rapport entre le nombre de députés de circonscription et le nombre de députés de liste. L’établissement de ce rapport exige de trouver un juste équilibre entre le désir des électeurs d’être représentés efficacement à l’échelle locale et la proportionnalité. Mary Pitcaithly, présidente du Electoral Management Board for Scotland, a expliqué comment le rapport a été établi en Écosse :

C'est une décision politique qui relevait entièrement du Parlement. Elle partait de l'intention d'adopter un modèle de représentation proportionnelle pour le nouveau Parlement, sans toutefois aller jusqu'à 50‑50[350].

Pour qu’un système RPM puisse être mis en place au Canada, il faudrait prendre l’une ou l’autre des mesures suivantes :

  • Maintenir le nombre actuel de députés : le nombre de députés de circonscription serait réduit pour permettre l’ajout de sièges compensatoires. Les circonscriptions deviendraient plus populeuses et plus vastes en conséquence.
  • Augmenter le nombre de députés : les circonscriptions ne seraient pas changées, et un nombre déterminé de sièges compensatoires serait ajouté aux 338 députés actuels.

Le rapport entre le nombre de députés de circonscription et le nombre de députés de liste varie d’un pays à l’autre. En Allemagne, la moitié des députés sont élus dans des circonscriptions, et l’autre moitié sont élus à partir des listes de parti. En Nouvelle‑Zélande, 70 députés sont élus dans des circonscriptions, et 50 le sont à partir des listes de parti[351].

En 2004, la Commission du droit du Canada a recommandé que deux tiers des députés soient élus dans des circonscriptions et qu’un tiers soient élus à partir de listes de parti provinciales ou territoriales. Pour en arriver à ce rapport, elle a jugé prioritaire de ne pas augmenter le nombre de députés à la Chambre des communes. David McLaughlin, qui a supervisé la Commission sur la démocratie législative du Nouveau‑Brunswick (2003‑2006), a signalé que la Commission néo‑brunswickoise avait recommandé le même rapport en 2006, car il fallait « assurer la représentation locale nécessaire, tout en instaurant un degré de proportionnalité suffisant pour permettre de façon significative de traduire les votes en sièges[352] ».

Royce Koop a fait valoir que, si la RPM était adoptée au Canada, il faudrait accroître le nombre de députés à la Chambre des communes. « Réduire le nombre des députés de circonscription pour faire de la place à des députés de liste nuirait à la qualité de la représentation par circonscription », a‑t‑il indiqué[353].

ii.   RPM dans les territoires

Des citoyens de partout au Canada ont offert au Comité des témoignages convaincants sur les défis que présente la mise en œuvre de la représentation proportionnelle dans les territoires. Les territoires ont chacun un siège au Parlement, et leurs populations sont dispersées sur de vastes superficies. Comme David Brekke l’a indiqué à Whitehorse, le Nord est « une région qui est déjà surreprésentée sur le plan démographique, mais qui est très sous‑représentée sur le plan géographique[354] ».

Les discussions qui ont eu lieu dans les territoires ont porté en grande partie sur les réalités uniques avec lesquelles les résidents de chaque territoire doivent composer pour participer au processus électoral et pour se faire représenter correctement. « Quel que soit le système que vous proposerez, je vous supplie de ne pas renoncer à la représentation locale pour le Nord[355] », a demandé John Streicker. Pour sa part, Louis Sebert a observé que « toute réforme électorale envisagée devrait tenir compte de l'unicité [des Territoires du Nord‑Ouest][356] ».

Des participants et des témoins ont affirmé, lors des assemblées tenues dans les territoires, que si le Canada passait à un système de RPM, il faudrait s’assurer que le Nord ne soit pas exclu en raison de sa petite population. Dennis Bevington, ancien député des Territoires du Nord‑Ouest, a estimé à Yellowknife qu’« à défaut d'avoir le système proportionnel mixte, nous serons des citoyens de deuxième classe lors des élections[357] ». À ce sujet, des témoins comme Andrew Robinson[358] et John Streicker[359] ont proposé de donner un deuxième siège compensatoire à chaque territoire pour garantir un certain degré de proportionnalité, dans le cas où un système de RPM était adopté.

E. Recommandations

Recommandation 1

Le Comité recommande que le gouvernement, aux fins de l’élaboration d’un nouveau système électoral, utilise l’indice de Gallagher pour réduire au minimum la distorsion entre la volonté populaire de l’électorat et la répartition des sièges au Parlement. Le gouvernement devrait chercher à élaborer un système qui atteint un indice de Gallagher de 5 ou moins.

Recommandation 2

Le Comité recommande que, bien que les modes de scrutin de liste pure peuvent atteindre un indice de Gallagher de 5 ou moins, ils ne doivent pas être pris en considération par le gouvernement car ceux-ci rompent le lien entre les électeurs et leur député.


[139]         Extrait de : Chambre des communes, Journaux , 1re session, 42e législature, 7 juin 2016.

[140]         Comme l’ont bien exprimé Pippa Norris et d’autres témoins, voir : ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 23 août 2016, 1400 (Pippa Norris, professeure des relations gouvernementales et chargée de cours lauréate, Université de Sydney, conférencière McGuire en politique comparée, Harvard, directrice de l’Electoral Integrity Project, à titre personnel); ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 5 octobre 2016, 1335 (Amanda Bittner, professeure associée, Université Memorial, à titre personnel) : « Qu’est-ce que le gouvernement espère obtenir avec la réforme électorale? Qu’est-ce que le Comité espère obtenir? Qu’est-ce qui justifie tout ce travail et toutes ces audiences? Qu’est-ce qui nous paraît aller de travers dans le système majoritaire uninominal à un tour? Tant qu’on n’aura pas répondu à cette question, il sera impossible de trouver une bonne solution. » Mme Bittner a indiqué que la sous-représentation des femmes, des minorités visibles et des Autochtones canadiens constitue un problème fondamental qu’il faudra régler, peu importe le système électoral retenu.

[141]         Extrait de : Chambre des communes, Journaux , 1re session, 42e législature, 7 juin 2016.

[142]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 19 octobre 2016, 1915 (Byron Weber Becker, à titre personnel).

[143]         Comme souligné au chapitre 3 : Leçons apprises : Historique de la réforme électorale aux paliers fédéral et provincial.

[144]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 26 septembre 2016, 1610 (David Brekke, à titre personnel).

[145]         Le chapitre 7 du présent rapport contient une discussion sur la fiabilité des résultats électoraux et le secret du vote, plus particulièrement en ce qui concerne le vote en ligne et le vote électronique.

[146]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 23 août 2016, 1400 (Pippa Norris).

[147]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 23 août 2016, 1410 (Thomas S. Axworthy).

                ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 27 juillet 2016, 1400 (Leslie Seidle, directeur de recherche, Évolution de la communauté fédérale canadienne, Institut de recherche en politiques publiques) :

Parlons maintenant de votre mandat. On vous demande d’étudier d’autres modes de scrutin pour remplacer le système en place, et d’évaluer la portée dans laquelle les options précisées pourraient améliorer la mise en œuvre des principes de réforme électorale qui sont énumérés dans le mandat. À la lecture de ces principes – je suis parvenu à cette conclusion assez rapidement – il m’a semblé impossible logiquement que votre comité puisse trouver un seul autre mode de scrutin qui respecte également l’ensemble des principes . Mais ce n’est peut-être pas votre objectif. Après tout, votre mandat parle d’options au pluriel, et non pas d’une seule option. Voilà qui m’amène au premier grand point que je souhaite aborder aujourd’hui, à savoir qu’il faut établir un ordre de priorité des principes associés aux autres modes de scrutin . Si vous présentez une autre option, vous devez savoir ce que celle-ci vise à accomplir. Si vous en présentez plus d’une, la même réflexion s’applique aux autres modes de scrutin.

[148]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 5 octobre 2016, 1335 Amanda Bittner).


[149]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 20 septembre 2016, 1440 (Richard Kidd). M. Kidd a conçu un système nommé « Chaque vote compte ».

[150]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 28 juillet 2016, 1010 (Jonathan Rose).

[151]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 4 octobre 2016, 1530 (Matt Risser, à titre personnel). M. Risser est membre d’une équipe qui a conçu un système nommé « scrutin proportionnel uninominal proportionnel par district ».

[152]         Adapté de : Andre Barnes, Dara Lithwick et Erin Virgint, Les systèmes électoraux et la réforme électorale au Canada et à l’étranger : aperçu , publication no 2016-06-F, Service d’information et de recherche parlementaires, Bibliothèque du Parlement, Ottawa, révisé le 23 juin 2016.

[153]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 28 septembre 2016, 1625 (Christopher Kam, professeur associé, Département de science politique, Université de la Colombie-Britannique, à titre personnel).

[154]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 23 septembre 2016, 1305 (Csaba Nikolenyi, professeur, Département de science politique, Université Concordia, à titre personnel).

[155]         Voir : Andre Barnes, Dara Lithwick et Erin Virgint, Les systèmes électoraux et la réforme électorale au Canada et à l’étranger : aperçu , publication no 2016-06-F, Service d’information et de recherche parlementaires, Bibliothèque du Parlement, Ottawa, révisé le 23 juin 2016.

[156]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 23 août 2016, 1410 (Thomas S. Axworthy). Il a ensuite ajouté : « Même si je peux dire que notre système de Westminster est supérieur, tout peut être amélioré. »

[157]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 7 juillet 2016, 1405 (Jean-Pierre Kingsley).

[158]         Ibid. , 1145 (Marc Mayrand, directeur général des élections, Élections Canada).

[159]         Ibid. , 1000.

[160]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 28 septembre 2016, 2105 (Norman Franks, à titre personnel); à 2020 (William Dunkley, à titre personnel); et à 2150 (Ivan Filippov, à titre personnel).

[161]         Ibid ., 2000 (Ariane Eckardt, à titre personnel).

[162]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 7 juillet 2016, 1405 (Jean-Pierre Kingsley).

[163]         À l’affirmation « Le système électoral canadien devrait permettre de s’assurer que les électeurs élisent des candidats locaux pour les représenter au Parlement », 48,6 % (10 808) des participants ont dit être fortement d’accord; 23,9 % (5 323) ont dit être d’accord; 15,8 % (3 516) ont indiqué être ni d’accord ni en désaccord; 5,0 % (1 117) étaient en désaccord; 2,9 % (636) étaient fortement en désaccord; et 3,8 % (848) se sont abstenus.

[164]         On compte 18 gouvernements majoritaires depuis 1921, date où plus de trois partis politiques ont commencé à remporter des sièges à la Chambre des communes. L’ensemble des 13 législatures entre la Confédération en 1867 et 1921, où seuls deux partis briguaient les suffrages, ont été dirigées par des gouvernements majoritaires. Source : ParlInfo, Durée des gouvernements majoritaires, 1867 à aujourd'hui , Bibliothèque du Parlement, Ottawa, révisé le 20 octobre 2015. On compte 11 gouvernements minoritaires depuis 1921. Source : ParlInfo, Durée des gouvernements minoritaires, 1867 à aujourd'hui , Bibliothèque du Parlement, Ottawa, révisé le 3 mai 2011.

[165]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 22 août 2016, 1830 (Christian Dufour, politicologue, auteur et analyste, à titre personnel).

[166]         Kenneth Dewar, Mémoire , 4 octobre 2016.

[167]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 25 juillet 2016, 1400 (R. Kenneth Carty).

[168]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 20 septembre 2016, 1550 (Bryan Schwartz, professeur de droit, Université du Manitoba, à titre personnel). Toutefois, tel que discuté ci-après, l’une des critiques adressées à l’alternance dans les systèmes utilisant le SMUT est que cela entraîne des « incohérences politiques ».

[169]         Andre Barnes, Dara Lithwick et Erin Virgint, Les systèmes électoraux et la réforme électorale au Canada et à l’étranger : aperçu , publication no 2016-06-F, citant la Commission du droit du Canada, Un vote qui compte : la réforme électorale au Canada , Ottawa, 2004, p. 11.

[170]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 29 septembre 2016, 1340 (Roderick Wood).

[171]         Voir chapitre 3 : Leçons apprises : Historique de la réforme électorale aux paliers fédéral et provincial.

[172]         Peter H. Russell, Université de Toronto, Mémoire au Comité spécial sur la réforme électorale de la Chambre des communes , 26 juillet 2016.

[173]         Chambre des communes, Comité spécial nommé pour connaître de la représentation proportionnelle, du vote simple transférable ou préférentiel, premier rapport, Journaux , 5e session, 13e législature, 30 mai 1921,
p. 391–392.

[174]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 26 juillet 2016, 1405 (Peter Russell).

[175]         Ibid .

[176]         Jean-Pierre Derriennic, Un meilleur système électoral pour le Canada, Presses de l’Université Laval, Québec, 2016, p. 8–9.

[177]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 23 août 2016, 1020 (Emmett Macfarlane).

[178]         Annexe F : « Consultation en ligne sur la réforme électorale, sommaire des réponses », tableau 22.

[179]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 25 juillet 2016, 1415 (Brian Tanguay) : « L’un des principaux défauts du modèle de Westminster est qu’il permet au parti au pouvoir, grâce à sa majorité législative artificiellement ou mécaniquement grossie, de dominer presque complètement l’agenda politique pendant quatre ou cinq ans et cela contribue par conséquent à la marginalisation du Parlement .  »

[180]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42législature, 1er septembre 2016, 1135 (Craig Scott, professeur de droit, Osgoode Hall Law School, Université York, à titre personnel) :

On parle de fausse majorité quand un parti obtient plus de sièges que n’en justifie le vote populaire et ça semble injuste. C’est une perspective axée sur les électeurs et c’est une bonne chose. Et c’est effectivement juste de dire que c’est un problème. Mais le fait est qu’on donne la majorité des sièges à un seul parti dans un système où il y a fusion entre l’exécutif et le législatif alors que le système de Westminster donne déjà beaucoup de pouvoir à l’exécutif.

[181]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 22 août 2016, 1810 (Nathalie Des Rosiers).

[182]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42législature, 7 octobre 2016, 1335 (Lise Ouellette). À titre d’illustration, elle a rappelé que les Néo-Brunswickois opposés au gouvernement n’ont actuellement aucun représentant au Parlement fédéral.

[183]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 30 août 2016, 0945 (Eric Maskin, professeur de l’Université Adams, Département des sciences économiques, Université Harvard, à titre personnel).

[184]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 26 octobre 2016, 1640 (Mary Cowper-Smith, à titre personnel).

[185]         Annexe F : « Consultation en ligne sur la réforme électorale, sommaire des réponses », tableau 19 et figure 16.

[186]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 4 octobre 2016, 1605 (Matt Risser).

[187]         Jean-Pierre Derriennic, Un meilleur système électoral pour le Canada, Presses de l’Université Laval, Québec, 2016, p. 9–10; ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 22 septembre 2016, 1535 (Jean-Pierre Derriennic, professeur associé, Département de science politique, Université Laval, à titre personnel).

[188]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 4 octobre 2016, 1340 (James Bickerton, professeur, à titre personnel).

[189]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 22 août 2016, 1410 (Arend Lijphart, professeur émérite de recherche en science politique, Université de la Californie, San Diego, à titre personnel).

[190]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 6 juillet 2016, 1410 (Maryam Monsef). Elle a ajouté :

Dans le cadre du mode de scrutin actuel, les partis qui gagnent des pourcentages du vote similaires ou identiques n’obtiennent pas nécessairement un même nombre de sièges. Prenons par exemple l’élection de 1997, où le Parti réformiste du Canada a gagné 18,7 % du vote et obtenu 60 sièges, alors que le Parti progressiste-conservateur a gagné 18,8 % du vote, pour ainsi dire le même pourcentage, et obtenu seulement 20 sièges. Le Parti réformiste a gagné le même pourcentage et obtenu 40 sièges de moins. À la fin de l’élection précédente, les progressistes-conservateurs ont gagné 16 % du vote et obtenu seulement deux sièges, alors que le Bloc québécois a gagné 13,5 % du vote populaire et obtenu 54 sièges.

                D’autres témoins ont mentionné les résultats de ces élections au cours de l’étude du Comité.

[191]         Jean-Pierre Derriennic, Un meilleur système électoral pour le Canada, Presses de l’Université Laval, Québec, 2016, p. 12–13.

[192]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 25 juillet 2016, 1410 (Brian Tanguay).

[193]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 23 août 2016, 1450 (Pippa Norris).

[194]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 27 septembre 2016, 1705 (Antony Hodgson, Vote Équitable CB).

[195] .       ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 20 octobre 2016, 1840 (Kelly Carmichael, directrice générale, Mouvement pour la représentation équitable au Canada). Elle a décrit comment les processus d’investiture sont menés presque totalement en vase clos : « Pensez un peu à nos circonscriptions, qui à l’heure actuelle sont très cloisonnées. Nous votons pour certains députés, mais nous ne dépassons pas ces cloisons si un parti a beaucoup de candidats ou beaucoup de candidates. »

[196]         Andre Barnes, Dara Lithwick et Erin Virgint, Les systèmes électoraux et la réforme électorale au Canada et à l’étranger : aperçu , publication no 2016-06-F, Service d’information et de recherche parlementaires, Bibliothèque du Parlement, Ottawa, révisée le 23 juin 2016 :

Il […] existe deux principales formes [du scrutin de liste], soit le scrutin de liste fermée et le scrutin de liste ouverte. Dans les deux cas, chaque parti dresse, avant le jour du scrutin, une liste régionale ou nationale des candidats qu’il présente dans chaque circonscription. Dans le scrutin de liste fermée, le parti établit la liste en attribuant un rang à chaque candidat. Les électeurs votent pour un parti, et non pour un candidat. Après le dépouillement du scrutin, chaque parti se voit accorder un nombre de sièges proportionnel à sa part des suffrages nationaux. Ces sièges sont alors attribués aux candidats selon leur rang sur la liste du parti. Dans le scrutin de liste ouverte, les électeurs choisissent le ou les candidats qu’ils préfèrent dans la liste du parti pour lequel ils veulent voter. Cela revient à dire que ce sont les électeurs qui établissent l’ordre dans lequel les candidats de la liste se verront attribuer un siège.

[197]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 25 juillet 2016, 1620 (Brian Tanguay).

[198]         Le professeur Larry LeDuc a fait exception : « Je suis d’avis que [le scrutin de liste] est le mode de scrutin qui exécute le mieux les fonctions principales d’un système électoral; il s’agit aussi du plus répandu au monde, de sorte que nous devons l’envisager. Pourquoi commencer par des modèles hybrides ou très peu utilisés? »

                ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 27 juillet 2016, 1615 (Larry LeDuc, professeur émérite, Université de Toronto, à titre personnel).

[199]         Annexe F : « Consultation en ligne sur la réforme électorale, sommaire des réponses », tableaux 26–28 et figures 23–25.

[200]         Exception faite de Rémy Trudel, qui s’est dit favorable au modèle français : ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 3 octobre 2016, 1550 (Rémy Trudel, professeur invité, École nationale d’administration publique, à titre personnel).

                ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 17 octobre 2016, 1345 (James T. Arreak). Il a dit : « En France, il existe une variation du système préférentiel selon lequel un deuxième tour plusieurs semaines après les élections générales permet de choisir entre les deux premiers candidats lorsqu’aucun candidat n’a obtenu la majorité des voix à l’élection générale. Cette variation mériterait d’être étudiée plus avant, mais les coûts supplémentaires pourraient être considérables. »

[201]         Annexe F : « Consultation en ligne sur la réforme électorale, sommaire des réponses », tableau 25 et figure 22.

[202]         Pour Jean-Pierre Derriennic, « [a]u Canada, rien ne justifierait l’adoption d’un scrutin majoritaire à deux tours, plus coûteux que le vote préférentiel et moins efficace pour exprimer fidèlement les préférences politiques des citoyens », dans Un meilleur système électoral pour le Canada, Presses de l’Université Laval, Québec, 2016, p. 23.

[203]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 25 juillet 2016, 1620 (Brian Tanguay) : « Les options sont très claires : vote préférentiel avec des circonscriptions uninominales, une combinaison du vote préférentiel avec le VUT dans les circonscriptions plus importantes, la représentation proportionnelle mixte ou aucun changement ».

[204]         Voir par exemple la proportionnelle rurale-urbaine proposée par Représentation équitable au Canada.

[205]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 25 juillet 2016, 1620 (Brian Tanguay).

[206]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 28 juillet 2016, 1130 (Maryantonett Flumian).

[207]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 30 août 2016, 1020 (Eric Maskin).

[208]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 26 juillet 2016, 1905 (Tom Rogers, commissaire électoral, Australian Electoral Commission, à titre personnel).

[209]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 22 septembre 2016, 1555 (Jean-Pierre Derriennic).

[210]         Des années 1920 aux années 1950, l’Alberta et le Manitoba ont utilisé le vote unique transférable (VUT) dans les villes et le vote préférentiel à la campagne. Le vote préférentiel a aussi eu cours à Calgary de 1961 à 1973 : Dennis Pilon,  The Politics of Voting - Reforming Canada’s Electoral System , Emond Montgomery Publications Limited, Toronto, 2007, p. 81; Élections Manitoba, Sommaire des procédures électorales au Manitoba de 1870 à 2011.

[211]         Andre Barnes, Dara Lithwick et Erin Virgint, Les systèmes électoraux et la réforme électorale au Canada et à l’étranger : aperçu , publication no 2016-06-F, Service d’information et de recherche parlementaires, Bibliothèque du Parlement, Ottawa, révisée le 23 juin 2016; ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 26 juillet 2016, 1905 (Tom Rogers) :

Pour la Chambre des représentants, nous avons un mode de scrutin préférentiel complet. Il faut pour cela que les électeurs attribuent à chacun des candidats un numéro et un rang en fonction de leurs préférences. Un candidat est élu lorsqu’il obtient plus de 50 % des votes valides. Si aucun candidat n’est le premier choix de 50 % des électeurs, le candidat qui a obtenu le moins de votes est éliminé, et les votes préférentiels de ce candidat sont alors répartis entre les candidats restants. Le processus de répartition des préférences se poursuit jusqu’à ce qu’un candidat obtienne plus de 50 % des votes.

[212]         Borda reprochait au système majoritaire de permettre l’élection de membres que n’aimaient pas la majorité des électeurs. L’Académie des sciences a utilisé la méthode de Borda jusqu’à ce que Napoléon Bonaparte la remplace par la sienne une vingtaine d’années plus tard.

[213]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 19 septembre 2016, 1845 (Russ Husum, à titre personnel).

[214]         Ibid .

[215]         Cette explication s’inspire de celle de Donald G. Saari dans The Symmetry and complexity of elections , Department of Mathematics, Northwestern University, Evanston, Illinois (sans date) :

On peut illustrer les différences entre la méthode Borda et le vote majoritaire par une comparaison avec le système de notation des élèves à l’école. Le système majoritaire ne reconnaît que les candidats qui sont premiers; ce serait comme classer les élèves en fonction des « A » qu’ils ont reçus, sans tenir compte des autres notes. Ainsi, supposons que Rose a un « A » dans cinq matières et un « B » dans toutes les autres, et que Claudia a un « A » dans six matières mais échoue à toutes les autres. Sous le vote majoritaire, c’est Claudia qui arriverait devant Rose! Mais la méthode Borda, par contraste, ressemble au système de notation traditionnel sur 4,0 points : les « A » valent 4 points, les « B » trois points, et ainsi de suite; sous ce système, c’est Rose qui arriverait première. L’expérience personnelle montre donc que la méthode Borda est plus fiable que l’autre. Pourtant, c’est l’approche inférieure que nous utilisons lorsqu’il s’agit de prendre des décisions cruciales pour nos finances personnelles (politique économique) et même notre vie elle-même (politique étrangère)! [traduction].

[216]         Base de données Parline de l’UIP, Naura .

[217]         Le député Ron McKinnon a présenté un système essentiellement identique appelé « classement par paires ». ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 26 octobre 2016, 1950 (Ron McKinnon, Coquitlam—Port Coquitlam, Lib.). Voir aussi le site Web de M. McKinnon, http://ranked-pairs.ron-mckinnon.ca/.

[218]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 30 août 2016, 0945–0950 (Eric Maskin).

[219]         Ibid. , 1010.

[220]         Ibid ., 1130.

[221]         Ibid.

[222]         M. Maskin a proposé que ce mécanisme soit précisément le SMUT . ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 30 août 2016, 1135 (Eric Maskin) :

Il y a la possibilité que la majorité ne choisisse aucun candidat comme véritable gagnant, c’est-à-dire que le candidat a battu tous les autres par une majorité. Le marquis de Condorcet, philosophe du XVIIIe siècle, théoricien politique et créateur du principe de la majorité, a reconnu qu’il s’agissait d’une possibilité quand il a proposé ce principe. Il a reconnu qu’il n’y aurait pas toujours de gagnant majoritaire avec ce système. Lorsque cela arrive, il faut qu’il y ait un mécanisme pour nommer un vainqueur. La façon la plus simple de faire cela serait d’utiliser ensuite le système majoritaire uninominal à un tour. Il ne serait pas nécessaire de demander aux électeurs de voter à nouveau, puisque vous avez déjà leurs bulletins de vote. Il suffirait de prendre le vainqueur au scrutin majoritaire uninominal à un tour. Il existe également d’autres façons de départager les candidats. Je veux toutefois vous faire remarquer que la possibilité est faible de ne pas avoir de gagnant majoritaire, d’après ce que je comprends de la situation au Canada. Concrètement, je crois qu’il y aura toujours un véritable gagnant majoritaire pour chaque siège.

[223]         Ibid .

[224]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 27 juillet 2016, 1030 (André Blais, professeur, Département de science politique, Université de Montréal, à titre personnel).

[225]         Jean-Pierre Derriennic, Un meilleur système électoral pour le Canada, Presses de l’Université Laval, Québec, 2016, p. 27.

[226]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 20 septembre 2016, 1430 (Royce Koop, professeur agrégé et chef du département, Département d’études politiques, Université du Manitoba, à titre personnel).

[227]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 17 octobre 2016, 1840 (Paul Okalik, membre de l’Assemblée législative, circonscription Iqaluit-Sinaa, à titre personnel).

[228]         Ibid ., 1335 (James T. Arreak).

[229]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 7 octobre 2016, 1715 (Joel Howe, à titre personnel).

[230]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 29 août 2016, 1520 (Ed Broadbent, président et fondateur, Institute Broadbent).

[231]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 19 septembre 2016, 2025 (Rachel Morgan, à titre personnel) :

[232]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 25 juillet 2016, 1520 (Brian Tanguay).

[233]         Ibid. , 1430 (Nelson Wiseman, directeur, Programme des études canadiennes et professeur, Département de science politique, Université de Toronto, à titre personnel).

[234]         « Il y a de la distorsion lorsque la représentation au sein du gouvernement diffère grandement du degré de soutien populaire exprimé pendant les élections », a dit l’intervenant.

[235]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 19 octobre 2016, 1915 (Byron Weber Becker).

[236]         Ibid ., 2020.

[237]         Ibid ., 2100.

[238]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 27 juillet 2016, 1135 (Henry Milner, chercheur invité, Département de science politique, Université de Montréal, à titre personnel).

[239]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 22 août 2016, 1815 (Harold Jansen).

[240]         Ibid ., 1815.

[241]         Harold Jansen, « The Political Consequences of the Alternative Vote », Canadian Journal of Political Science , 37:3 (septembre 2004), p. 663 [en anglais seulement].

[242]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 26 juillet 2016, 1105 (Michael Gallagher, professeur de politique comparée, Trinity College Dublin, à titre personnel).

[243]         Lydia Miljan et Taylor Jackson, « The Consequences of the Alternative Vote », Counting Votes: Essays on Electoral Reform . Vancouver : Institut Fraser, 2016, p. 49 [en anglais seulement].

[244]         Ibid .

[245]         Ibid ., p. 57‑63 [en anglais seulement].

[246]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 23 août 2016, 1545 (Pippa Norris).

[247]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 21 septembre 2016, 1525 (Laura Stephenson, à titre personnel).

[249]         Ibid .

[250]         Ibid .

[251]         Ibid .

[252]         Ibid . À la suite de son témoignage, le Comité a adopté une motion demandant au professeur Becker de développer des modélisations pour la RMP, le VUT et le système Rural-Urbain qui soient conformes à un ensemble de contraintes précises : 1. Des résultats pour l’indice Gallagher composite aussi bas que possible; 2. Chaque province et chaque territoire doivent avoir exactement le même nombre de députés que lors de l’élection de 2015; 3. La redistribution des sièges, s’il y a lieu, doit pouvoir être effectuée rapidement par la fusion de circonscriptions existantes en regroupements de deux, trois ou davantage.

                Le Comité remercie M. Becker pour son travail, tant dans son mémoire au comité que dans son document additionnel « Modélisation avec contraintes pour ERRE ».

[253]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 22 août 2016, 1455 (Arend Lijphart).

[254]         Ibid ., 1820 (Harold Jansen).

[255]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 27 juillet 2016, 1015 (Henry Milner).

[256]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 25 juillet 2016, 1405 (R. Kenneth Carty).

[257]         Ibid .

[258]         Annexe F : « Consultation en ligne sur la réforme électorale, sommaire des réponses », tableau 16 et figure 13.

[259]         Ibid. , tableau 15 et figure 12.

[260]         Ibid ., tableau 28 et figure 25

[261]         Ibid ., tableau 29 et figure 26.

[262]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 29 août 2016, 1405 (Ed Broadbent).

[263]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 22 août 2016, 1405 (Arend Lijphart).

[264]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 29 août 2016, 1410 (Ed Broadbent).

[265]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 26 juillet 2016, 0935 (Michael Gallagher).

[266]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 22 septembre 2016, 1930 (Éric Montigny, directeur exécutif, Chaire de recherche sur la démocratie et les institutions parlementaires, Département de science politique, Université Laval, à titre personnel).

[267]         Annexe F : « Consultation en ligne sur la réforme électorale, sommaire des réponses », tableau 14 et figure 11.

[268]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 25 juillet 2016, 1410 (R. Kenneth Carty).

[269]         Ibid ., 1500.

[270]         Ibid. , 1530.

[271]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 31 août 2016, 1555 (Gordon Gibson).

[272]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 27 juillet 2016, 1010 (André Blais).

[273]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 25 juillet 2016, 1520 (Brian Tanguay).

[274]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 23 septembre 2016, 1305 (Csaba Nikolenyi).

[275]         Dennis Pilon,  The Politics of Voting – Reforming Canada’s Electoral System , Emond Montgomery Publications Limited, Toronto, 2007, p. 81. Voir aussi Élections Manitoba, Sommaire des procédures électorales au Manitoba de 1870 à 2011 .

[276]         Calgary (de 1916 à 1961); Edmonton (de 1922 à 1928); Regina (de 1920 à 1926); Saskatoon (de 1920 à 1926); Vancouver (de 1920 à 1923); Victoria (de 1920 à 1921); Winnipeg (de 1920 à 1971). Source : Dennis Pilon,  The Politics of Voting - Reforming Canada’s Electoral System , Emond Montgomery Publications Limited, Toronto, 2007, p. 81.

                ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 22 août 2016, 1820 (Harold Jansen).

[277]         Après l’adoption du VUT, le système électoral de la Colombie‑Britannique serait passé de 85 circonscriptions uninominales à 20 circonscriptions plurinominales, mais le nombre total de députés provinciaux n’aurait pas changé. Chaque circonscription aurait de deux à sept sièges, selon sa population et sa superficie, et les électeurs choisiraient leurs représentants en classant les candidats sur le bulletin de vote. Dans le modèle recommandé, l’Assemblée a rejeté l’utilisation de listes de partis, qui risquaient selon elle d’être impopulaires auprès des Britanno-Colombiens. Les électeurs choisiraient plutôt des candidats individuels, y compris des candidats de partis différents qu’ils classeraient en ordre de préférence. Cette méthode leur procurerait ainsi la plus grande liberté de choix possible.

[278]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 26 juillet 2016, 0945 (Michael Gallagher).

[279]         Adapté d’Andre Barnes, Dara Lithwick et Erin Virgint, Les systèmes électoraux et la réforme électorale au Canada et à l’étranger : aperçu , publication no 2016‑06‑F, Service d’information et de recherche parlementaires, Bibliothèque du Parlement, Ottawa, révisé le 23 juin 2016.

[280]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 26 juillet 2016, 0945 (Michael Gallagher) :

La répartition des votes excédentaires est l’élément le plus complexe du VUT. Disons simplement que si un candidat obtient très peu de voix, seulement quelques centaines, ces voix ne sont pas gaspillées. Il est éliminé du décompte et les voix sont transférées aux autres candidats selon la deuxième préférence indiquée. Si le deuxième candidat est éliminé à son tour, les voix sont transférées au troisième choix, et ainsi de suite. Ainsi, même si un électeur vote pour un candidat qui a peu de succès, son vote n’est pas perdu comme il le serait avec le scrutin uninominal majoritaire. L’ordre des préférences est suivi et peut influencer le résultat .

[281]         Ibid .

[282]         Ibid ., 0950.

[283]         Ibid ., 0955.

[284]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 22 septembre 2016, 1550 (Jean-Pierre Derriennic) : « L’objection qui m’a été faite par certains amis politiciens, c’est que le vote unique transférable irlandais peut avoir comme effet que plusieurs candidats du même parti font campagne les uns contre les autres. Peut-être que c’est bon, mais peut‑être que les partis préfèrent éviter cela. »

[285]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 26 juillet 2016, 0950 (Michael Gallagher).

[286]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 27 septembre 2016, 1600 (Craig Henschel).

[287]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 21 septembre 2016, 1525 (Laura Stephenson).

[288]         Jean‑Pierre Derriennic, Un meilleur système électoral pour le Canada , Québec, Presses de l’Université Laval, 2016. M. Derriennic a d’abord recommandé d’éviter la représentation proportionnelle « dans des circonscriptions élisant chacune un grand nombre de députés, ce qui permet à un grand nombre de partis d’avoir des élus à la Chambre et comporte un risque sérieux d’indécision politique et d’instabilité ». Il a ensuite déconseillé les systèmes mixtes comportant des députés élus dans des circonscriptions uninominales et des députés élus de manière compensatoire, car ce système est difficile à mettre en œuvre; ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 22 septembre 2016, 1535 (Jean‑Pierre Derriennic).

[289]         Jean‑Pierre Derriennic, Mémoire présenté au Comité spécial sur la réforme électorale , septembre 2016.

[290]         Ibid .

[291]         M. Derriennic ajoute, dans une note en bas de page : « Si un électeur donne ses trois premières préférences à trois candidats du même parti, ce qui arrivera souvent, c’est sa préférence numéro 4 qui indique sa deuxième préférence de parti. »

[292]         Jean‑Pierre Derriennic, Un meilleur système électoral pour le Canada , Québec, Presses de l’Université Laval, 2016, p. 61‑62. M. Derriennic ajoute, dans une note en bas de page, que « l’élu n’est pas nécessairement celui qui a eu le plus de premières préférences. Si un parti qui a présenté trois candidats a droit à un élu, les deuxièmes préférences mentionnées sur les bulletins de celui qui a le moins de premières préférences peuvent avoir un effet décisif entre les deux autres. »

[293]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 7 juillet 2016, 1440 (Jean‑Pierre Kingsley).

[294]         Ibid ., 1510.

[295]         Ibid .

[296]         Représentation équitable au Canada, La proportionnelle rurale-urbaine .

[298]         Ibid .

[299]         Commission du droit du Canada, Un vote qui compte : la réforme électorale au Canada , Ottawa, 2004, p. 98.

[300]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 28 septembre 2016, 1340 (David Moscrop, étudiant doctorant, Département de sciences politiques, Université de la Colombie‑Britannique, à titre personnel).

[301]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 27 juillet 2016, 1625 (Leslie Seidle).

[302]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 19 septembre 2016, 1840 (Lee Ward, professeur agrégé de sciences politiques, Campion College, Université de Regina, à titre personnel).

[303]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 1er septembre 2016, 0955 (Craig Scott).

[304]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 30 août 2016, 1600 (Katelynn Northam, militante-réforme électorale, À l’Action).

[305]         Commission du droit du Canada, Un vote qui compte : la réforme électorale au Canada , Ottawa, 2004.

[306]         Commission du droit du Canada, Un vote qui compte : la réforme électorale au Canada , Ottawa, 2004, p. xviii‑xix.

[307]         Élections Prince Edward Island, « Plebiscite Results », 7 novembre 2016 [en anglais seulement].

[308]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 20 septembre 2016, 1345 (Royce Koop).

[309]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 3 octobre 2016, 1850 (Mireille Tremblay, à titre personnel).

[310]         Andre Barnes, Dara Lithwick et Erin Virgint, Les systèmes électoraux et la réforme électorale au Canada et à l’étranger : aperçu , publication no 2016‑06‑F, Service d’information et de recherche parlementaires, Bibliothèque du Parlement, Ottawa, révisé le 23 juin 2016.

[311]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 4 octobre 2016, 1400 (James Bickerton).

[312]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 23 août 2016, 1615 (Pippa Norris).

[313]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 27 septembre 2016, 2110 (Tana Jukes, à titre personnel).

[314]         Annexe F : « Consultation en ligne sur la réforme électorale, sommaire des réponses », tableau 27 et figure 24.

[315]         Ibid ., tableau 28 et figure 25.

[316]         Andre Barnes, Dara Lithwick et Erin Virgint, Les systèmes électoraux et la réforme électorale au Canada et à l’étranger : aperçu , publication no 2016‑06‑F, Service d’information et de recherche parlementaires, Bibliothèque du Parlement, Ottawa, révisé le 23 juin 2016.

[317]         Commission du droit du Canada, Un vote qui compte : la réforme électorale au Canada , Ottawa, 2004, Law Commission of Canada, Voting Counts: Electoral Reform for Canada , Ottawa, 2004, p. 109.

[318]         Représentation équitable pour le Canada, Annexe 10 : La représentation proportionnelle mixte (RPM) sur mesure pour le Canada , 2016.

[319]         Erin Virgint, Les systèmes électoraux et la représentation des femmes , publication no 2016-30-F, 5 juillet 2016.

[320]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 26 juillet 2016, 1925 (Robert Peden, directeur général des élections, Commission électorale de la Nouvelle-Zélande).

[321]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 30 août 2016, 1630 (Melanee Thomas, professeure adjointe, Département de science politique, Université de Calgary, à titre personnel).

[322]         Ibid .

[323]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 5 octobre 2016, 1335 (Amanda Bittner).

[324]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 31 août 2016, 1140 (Joachim Behnke, professeur titulaire, sciences politiques, Université Zeppelin, Allemagne, à titre personnel).

[325]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 21 septembre 2016, 1530 (Laura Stephenson).

[326]         Commission du droit du Canada, Un vote qui compte : la réforme électorale au Canada , Ottawa, 2004, p. 91.

[327]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 1er septembre 2016, 1100 (David McLaughlin).

[328]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 29 septembre 2016, 1420 (Roderick Wood).

[329]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 30 août 2016, 1405 (Louis Massicotte, professeur, Département de science politique, Université Laval, à titre personnel).

[330]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 31 août 2016, 1025 (Joachim Behnke).

[331]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 28 septembre 2016, 1630 (Christopher Kam).

[332]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 22 août 2016, 1630 (Benoît Pelletier).

[333]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 21 septembre 2016, 1550 (Laura Stephenson).

[334]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 26 juillet 2016, 1635, (Patrice Dutil, professeur, Université Ryerson, à titre personnel).

[335]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 25 juillet 2016, 1630 (Nelson Wiseman).

[336]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 29 septembre 2016, 1345 (Roderick Wood).

[337]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 23 août 2016, 1510 (Pippa Norris).

[338]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 26 juillet 2016, 1950 (Robert Peden).

[339]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 31 août 2016, 1025 (Friedrich Pukelsheim, professeur, Institut für Mathematik, Université d’Augsbourg, Allemagne, à titre personnel).

[340]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 31 août 2016, 1205 (Joachim Behnke).

[341]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 25 juillet 2016, 1415 (Brian Tanguay).

[342]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 26 juillet 2016, 1920 (Robert Peden).

[343]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 30 août 2016, 1405 (Louis Massicotte).

[344]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 28 septembre 2016, 1345 (Nick Loenen, à titre personnel).

[345]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 30 août 2016, 0955 (Peter John Loewen, directeur, École politique publique et gouvernance et professeur agrégé, Département de sciences politiques, Université de Toronto, à titre personnel).

[346]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 22 août 2016, 1405 (Arend Lijphart).

[347]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 29 août 2016, 1430 (Jean-Pierre Charbonneau, ministre de la Réforme des institutions démocratiques, gouvernement du Québec [de 2002 à 2003], à titre personnel).

[348]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 31 août 2016, 1205 (Joachim Behnke).

[349]         Andre Barnes, Dara Lithwick et Erin Virgint, Les systèmes électoraux et la réforme électorale au Canada et à l’étranger : aperçu , publication no 2016‑06‑F, Service d’information et de recherche parlementaires, Bibliothèque du Parlement, Ottawa, révisé le 23 juin 2016.

[350]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 31 août 2016, 1030 (Mary Pitcaithly, présidente, The Electoral Management Board for Scotland).

[351]         Andre Barnes, Dara Lithwick et Erin Virgint, Les systèmes électoraux et la réforme électorale au Canada et à l’étranger : aperçu , publication no 2016‑06‑F, Service d’information et de recherche parlementaires, Bibliothèque du Parlement, Ottawa, révisé le 23 juin 2016.

[352]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 1er septembre 2016, 0950 (David McLaughlin).

[353]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 20 septembre 2016, 1340 (Royce Koop).

[354]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 26 septembre 2016, 1610 ( David Brekke).

[355]         Ibid ., 1545 (John Streicker, à titre personnel).

[356]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 30 septembre 2016, 1510 (Louis Sebert, à titre personnel).

[357]         Ibid ., 1530 (Dennis Bevington, à titre personnel).

[358]         Ibid ., 1715 (Andrew Robinson, Alternatives North).

[359]         ERRE, Témoignages , 1re session, 42e législature, 26 septembre 2016, 1545 (John Streicker).