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AANO Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord


NUMÉRO 032 
l
1re SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 3 avril 2012

[Enregistrement électronique]

(1530)

[Traduction]

    Chers collègues, étant donné qu'il est 15 h 30, je vais ouvrir la 32e séance du Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord.
    Aujourd'hui, nous accueillons Manny Jules parmi nous.
    Manny, nous vous sommes reconnaissants d’être venus aujourd'hui nous donner un exposé.
    Manny comparaît devant nous au nom de la Commission de la fiscalité des Premières nations.
    Nous allons vous céder la parole afin que vous puissiez faire votre déclaration préliminaire. Après quoi nous commencerons à vous poser des questions. Vous avez assisté à des séances de comité auparavant, et vous comprenez en général comment nous fonctionnons. Vous êtes la seule personne à témoigner aujourd'hui.
    Chers collègues, nous allons poursuivre la séance jusqu'à ce qu'un des trois scénarios suivants se produise: nous n’avons plus de questions à poser; le temps dont nous disposons prend fin; ou la sonnerie retentit, parce qu’il est possible qu’un vote ait lieu cet après-midi. L’un ou l’autre de ces trois scénarios pourrait avoir une incidence sur notre horaire.
    Madame Duncan, vous avez une question à poser avant que nous commencions.
    Juste au cas où nous serions appelés à quitter la salle, le premier voyage du comité commencera immédiatement après la relâche, n'est-ce pas?
    Oui, c'est exact.
    Donc, qu'arrivera-t-il au comité en attendant? Les autres membres du comité se réuniront-ils?
    Non. Lorsque le comité voyage, des séances ne sont pas tenues simultanément à Ottawa.
    Par conséquent, il n'y aura pas de séance cette semaine-là?
    C'est exact. Je peux indiquer aux membres du comité que la Chambre des communes n'a plus qu'à adopter une motion pour que notre voyage soit confirmé. Maintenant que nous avons été autorisés à voyager dans les autres régions, cette décision sera prise promptement.
    Monsieur Jules, nous allons vous céder la parole pour que vous puissiez faire votre déclaration préliminaire. Après quoi nous poursuivrons avec les questions.
    Si quelqu’un d’autre a des questions à soulever, nous pourrions peut-être nous en occuper plus tard.
    C’est un honneur de comparaître devant le Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord afin de discuter de l’utilisation des terres et du développement économique durable.
    Pour ceux d’entre vous qui ne me connaissent pas, je m’appelle Clarence T. « Taxe » Manny Jules. On m’a donné le nom de mon père. Il était chef de notre collectivité dans les années 1960. Il m’a appris tout ce que je connais sur la politique, et c’est vers lui que je me tourne le plus souvent pour obtenir des encouragements et des idées. J’ai moi-même été membre du conseil de 1974 à 1984. Puis, j’ai été élu chef de ma collectivité trois fois par acclamation, et j’ai occupé ce poste pendant 16 ans.
    Mon père a été le premier à distinguer les deux plus grands obstacles à surmonter pour les Premières nations. Premièrement, la Loi sur les Indiens a interrompu le développement de notre cadre juridique et administratif au cours du XIXe siècle. Cela veut dire que nous ne sommes pas en mesure de suivre le rythme des entreprises et que seule une minuscule part des fonds privés sont investis sur nos terres. Deuxièmement, nous ne possédons même pas nos propres terres. Cela fait de nous des pupilles de l’État et crée un cycle de dépendance qui anéantit notre espoir.
    C’est à cause de mon père que je suis ici aujourd’hui pour vous parler de la mesure législative sur le droit de propriété des Premières nations que nous proposons et dont je vais abréger le nom en l’appelant l’initiative du DPPN.
    Le 29 mars, le gouvernement a annoncé qu’il avait l’intention de collaborer avec les Premières nations intéressées dans le but d’élaborer et de mettre en oeuvre une mesure législative portant sur le droit de propriété des Premières nations. C’était une annonce historique et un moment de fierté pour les Premières nations qui ont entrepris cette initiative, pour la Commission de la fiscalité des Premières nations et pour les Canadiens qui souhaitent résoudre le problème lié à notre désavantage économique.
    La mesure législative permettra aux Premières nations participantes de s’aider elles-mêmes. Les Premières nations qui choisiront de participer au régime posséderont leurs terres. Notre compétence permanente en matière d’imposition et de gestion des terres sera confirmée. Les Premières nations participantes bénéficieront d’un cadre juridique et administratif modèle. Elles seront en mesure de prendre des décisions aussi rapidement que les entreprises.
    La Loi sur les Indiens du XIXe siècle nous a empêchés de participer à l’économie et a permis à la Couronne de prendre possession de nos terres. Elles sont détenues en fiducie en notre nom. Il est temps de laisser le XIXe siècle derrière nous et d’adopter une loi qui nous permettra de remonter la pente. C’est ce que la Loi sur le droit de propriété des Premières nations (LDPPN) accomplira.
    Grâce à cette mesure législative, nous bénéficierons d’un régime de titres de propriété foncière identique à celui que le reste du Canada tient pour acquis. Cela signifie que nous pourrons obtenir des hypothèques, accumuler du capital, financer des entreprises et transférer nos richesses à nos enfants, tout comme les autres Canadiens. Cela nous permettra d’accroître notre productivité et de donner libre cours à l’imagination de nos entrepreneurs. Mais, ce qui importe encore plus, c’est que cela nous donnera l’occasion d’échapper à la dépendance dans laquelle nous étions tenus et de rétablir notre culture d’indépendance.
    La LDPPN est dans l’intérêt du Canada. Le budget du 29 mars articule correctement le défi politique que nous devrons relever au cours des 30 prochaines années. Dans 20 ans, deux travailleurs devront être aussi productifs que sept travailleurs l’étaient dans les années 1970, sinon il nous faudra accepter que le gouvernement prenne une ou plusieurs des mesures suivantes: des réductions des services gouvernementaux, des réductions du revenu personnel disponible, des prolongations des heures de travail et des reports de retraite.
    À ce sujet, je tiens à signaler que j’appuie entièrement l’annonce que le premier ministre a faite, à savoir qu’il faudrait repousser à 67 le statut d’aîné. Dans ma collectivité, on obtient ce statut à 60 ans. J’ai 59 ans, et je ne suis pas encore prêt à assumer ce rôle.
    Si nous nous appauvrissons, les politiques adoptées sèmeront davantage la discorde, et nous nous affronterons pour déterminer qui en subira le plus les conséquences. Aucun d’entre nous ne souhaite que cela se produise. Nous devons créer les conditions requises pour que l’économie canadienne croisse à long terme.
    Toute stratégie en matière de productivité doit tenir compte des Premières nations. Notre population est plus jeune que celle du reste du Canada. Au cours des 20 prochaines années, un travail sur 10 sera autochtone. À l’heure actuelle, nos membres sont les éléments les plus sous-employés de la population active. Si les choses continuent ainsi, le problème de productivité au Canada deviendra encore plus difficile à régler.
    La LDPPN permettra aux terres et aux membres des Premières nations de devenir plus productifs. La mesure législative réduira l’incertitude engendrée par le mode de tenure ainsi que la certitude éprouvée par les investisseurs. Elle réduira également les frais occasionnés par des transactions commerciales, comme l’inscription d’une hypothèque, le transfert d’un titre et l’obtention d’un financement. Elle confirmera la compétence des Premières nations, contribuera à sa mise en oeuvre et permettra d’ouvrir des marchés.
(1535)
    Les titres juridiques des réserves sont détenus en ce moment par le Canada. Les titres fonciers accordés en vertu de la LDPPN seront détenus par la Première nation. La propriété personnelle se limite en ce moment à des certificats de possession et des terres de réserve cédées à bail. La LDPPN permettra de détenir des terres en fief simple. Les titres ainsi octroyés offriront la même sécurité que ceux des autres terres du Canada et ne seront pas limités par les lacunes de la Loi sur les Indiens.
    Grâce à la LDPPN, les Autochtones pourront se procurer du financement pour leur logement sans devoir obtenir des garanties auprès du ministère ou des Premières nations. Selon les renseignements dont disposent l’Assemblée des Premières nations et Affaires autochtones et développement du Nord Canada, au rythme actuel, il faudra de 200 à 850 ans pour réduire le nombre de nouveaux logements que requièrent nos réserves à l’heure actuelle. Si nos membres détenaient les titres de propriété de leurs propres terres, ils pourraient négocier des hypothèques comme tout autre Canadien. Imaginez l’effet que cela aurait sur le manque de logements et sur les économies des Premières nations et du Canada.
    La LDPPN permettra à d’autres initiatives liées à l’éducation des Premières nations et au développement des ressources de donner de meilleurs résultats. Les investissements dans l’éducation des Premières nations seront plus profitables lorsque les gens qui reçoivent la formation vivront sur des terres productives qui offrent des débouchés économiques et des perspectives d’emploi. Les gens doivent être exposés très tôt à des perspectives d’emploi et des exemples de réussite commerciale pour être en mesure d’apprécier la valeur de l’éducation.
    Il est plus facile de conclure des ententes relatives au développement des ressources lorsque les terres des Premières nations sont productives. À l’heure actuelle, les Premières nations ne profitent que d’une infime partie des bénéfices qu’elles pourraient tirer du développement des ressources disponibles sur leurs terres actuelles et leurs territoires traditionnels. Elles ne sont pas en mesure de jouir de la plupart des avantages qu’apportent les investissements, parce qu’il est trop difficile de faire des affaires sur leurs terres. Elles s’emploient donc à toucher une part importante des bénéfices provenant de sources de revenus relativement minces comme les redevances et, par conséquent, il leur est plus difficile de parvenir à un accord. Lorsque les Premières nations seront en mesure de profiter pleinement des avantages économiques des projets, il sera plus facile de négocier des ententes, parce que celles-ci mettront l’accent sur leurs intérêts communs.
    Grâce à la LDPPN, nous risquerons moins d’être traités comme des problèmes sociaux. Ceux-ci découlent d’un manque de possibilités. Toute solution aux problèmes doit être d’ordre économique et augmenter d’abord la productivité de nos terres. La LDPPN nous permettra d’accroître nos revenus et notre autosuffisance. Comme nous le disons à la commission de la fiscalité, les investisseurs sont des contribuables.
    Bon nombre de Premières nations cherchent déjà à attirer sur leurs terres de nombreux investissements. La LDPPN leur facilitera la tâche. Nous ne craignons pas les investissements. C’est en obtenant des investissements que nous générerons des revenus, améliorerons la qualité des services et créerons notre propre cycle de croissance. Les investissements produiront des recettes publiques plus importantes, ce qui entraînera une amélioration des services et des infrastructures publics. Nous attirerons ainsi d’autres investissements qui enclencheront de nouveau le cycle.
    La LDPPN pourra contribuer à régler des différends liés à des biens matrimoniaux et des successions. Ceux-ci restent souvent insolubles, parce que nous ne pouvons pas utiliser la valeur de nos terres pour les résoudre. La LDPPN élargira l’éventail des propriétaires potentiels et permettra aux marchés immobiliers de fonctionner efficacement sur nos terres. Ainsi, les biens matrimoniaux seront répartis équitablement, et les biens successoraux détenus par plusieurs héritiers, ou les biens d’une personne décédée sans testament, pourront demeurer ou devenir productifs.
    Les ajouts aux processus des réserves devraient être adaptés afin de permettre à leurs membres de choisir d’être assujettis à la LDPPN. Cela profiterait immédiatement aux Premières nations de la Saskatchewan et du Manitoba. En Saskatchewan, 25 Premières nations sont en train de dépenser 440 millions de dollars pour acheter des terres dans le cadre de l'entente-cadre sur les droits de propriété issus de traités. Cette dernière a permis d’ajouter un million d’acres de terrain aux terres des Premières nations du Manitoba.
    Ces terres pourraient offrir aux Premières nations des sites plus rapprochés des marchés. L’adhésion à l’initiative du DPPN permettrait à ces terres de devenir productives et aux Autochtones d’acquérir des biens immobiliers et d’investir dans des entreprises.
    La Commission de la fiscalité des Premières nations a fait mener des recherches pour estimer les avantages qu’il y aurait à appliquer la LDPPN aux ajouts aux terres de réserve. Malgré l’utilisation d’estimations très prudentes, les résultats sont impressionnants.
(1540)
    On estime qu’en adhérant à l’initiative du DPPN, en ajoutant des terres aux réserves et en ouvrant davantage nos marchés, on pourrait, au cours des 15 prochaines années, obtenir 3,7 milliards de dollars en investissement, créer plus de 30 000 emplois et percevoir 48 millions de dollars en impôts fonciers, ce qui permettrait d’offrir des services locaux et de construire des infrastructures.
    Ces estimations sont prudentes, parce que nous avons supposé que la LDPPN allait s’appliquer à seulement 1 p. 100 des terres de la Saskatchewan et du Manitoba cédées en vertu d’un traité. Aucune autre province n’a été prise en considération. Nous sommes également partis du principe que seulement 40 p. 100 du point de pourcentage des terres seraient développés au cours des 15 prochaines années. Nous avons aussi supposé que leur valeur avoisinerait celle de petites collectivités rurales pendant cette période. Nous n’avons pas tenu compte de la valeur des terrains de Saskatoon, Regina et Winnipeg. Enfin, nous n’avons pas pris en considération les débouchés liés au développement des ressources; nous nous sommes contentés d’estimer les débouchés commerciaux et résidentiels.
    Ces quelque 3,7 milliards de dollars investis représentent beaucoup moins d’argent que le point de pourcentage d’investissement total qu’on s’attend à enregistrer dans ces provinces au cours des 15 prochaines années. En d’autres termes, il est probable que les avantages seront beaucoup plus élevés. La CFPN a également commandé une étude pour estimer les bénéfices fiscaux et économiques que 10 Premières nations intéressées pourraient tirer de leur adhésion à l’initiative. En utilisant des estimations prudentes semblables à celles employées précédemment, on a déterminé que les investissements, la valeur des propriétés, les recettes fiscales et les emplois pourraient générer 3 milliards de dollars supplémentaires dans ces collectivités.
    Pour mettre ces avantages en contexte, prenez en considération le fait que, chaque année, le gouvernement fédéral alloue environ 100 millions de dollars pour améliorer l’accès des Premières nations à des capitaux et aux marchés. Le gouvernement est obligé de le faire parce qu’une crise du crédit sévit sur nos terres. Contrairement aux autres Canadiens, nous ne pouvons pas avoir accès à des capitaux parce que, sur nos terres, le marché ne fonctionne pas correctement.
    Les dix Premières nations qui, jusqu’à maintenant, ont manifesté un intérêt à l’égard de l’initiative du DPPN verront les capitaux mis à leur disposition augmenter de 500 millions de dollars, une fois que la mesure législative aura été adoptée. En plus d’apporter d’importants avantages économiques, la LDPPN protégera mieux les terres des Premières nations que le système actuel, car les Premières nations participantes seront en mesure d’élaborer des plans d’utilisation des terres qui leur permettront de protéger et de mettre de côté des terres communautaires.
    L’initiative du DPPN a fait l’objet de critiques, parce qu’on craint que certaines Premières nations vendent toutes leurs terres. Cette idée est ridicule. La Couronne détient plus de 90 p. 100 des terres du Canada. Les Premières nations savent qu’il est important pour elles de posséder un territoire. Par conséquent, il est probable qu’elles agiront de façon semblable au gouvernement. De plus, grâce à la LDPPN, la gestion des impôts fonciers et des terres relèvera toujours des Premières nations, que les terres soient occupées par leurs membres ou non.
    Les Premières nations bénéficieront de pouvoirs d’expropriation qu’elles exerceront d’une manière semblable à celle en vigueur dans le reste du pays. Par ailleurs, les terres seront restituées au gouvernement de la Première nation concernée dans certaines situations, comme lorsque quelqu’un décède sans testament. De même, aujourd’hui, lorsqu’une Première nation disparaît, les terres de réserve, qui ont été mises de côté et dont les titres juridiques ont été dévolus à Sa Majesté, sont restituées au gouvernement provincial. En d’autres termes, les terres gérées en vertu de la LDPPN seront identiques à toutes les autres terres canadiennes. Si j’achetais un terrain à Ottawa, il continuerait de relever du gouvernement de l’Ontario, et non de ma collectivité de Tk'emlups. De même, si vous achetez un terrain dans ma collectivité de Tk'emlups, il continuera de relever de celle-ci.
    L’initiative du DPPN est également critiquée, parce qu’on soutient que nous jouissons déjà de pouvoirs suffisants pour faire fonctionner les marchés fonciers et qu’il n’est pas nécessaire que nous détenions les titres juridiques de nos terres. Dans les réserves, les intervenants des marchés se limitent souvent aux membres de la bande ou aux gens qui souhaitent acquérir un bail. Le marché composé des membres de la bande est restreint, et les valeurs marchandes sont très faibles. Le marché des terres de réserve cédées à bail est beaucoup plus vaste, mais représente au plus 65 p. 100 du marché des propriétés détenues en fief simple. Lorsque le bail prend fin, les affaires des titulaires de terres de réserve cédées à bail perdent un peu de leur valeur. En outre, il en coûte beaucoup plus d’établir et d’administrer des droits de tenure à bail que de transférer des titres de propriété foncière en fief simple.
(1545)
    Les titres fonciers sont actuellement inscrits dans le Registre des terres indiennes, qui est un système d'actes notariés. Le DPPN permettra de créer un régime d'enregistrement foncier Torrens, qui offre plus de certitude, de stabilité et d'efficacité que le Registre. Avec un système Torrens, nous pouvons offrir à nos membres un titre garanti au lieu d'un certificat de possession. Ce genre de titres devrait faciliter l'ouverture des marchés et donnerait aux propriétés la même valeur que dans les administrations voisines.
    L'élaboration, pour nos terres, d'un cadre juridique et administratif qui appuie les marchés peut prendre des années et coûter des millions de dollars. Nombre des solutions proposées aujourd'hui donnent aux gouvernement des pouvoirs, mais aucune orientation ni appui institutionnel. Pour prendre une analogie, cela équivaudrait à donner à d'autres gouvernements au Canada les clés de la voiture pour partir en voyage, mais en demandant aux Premières nations de construire d'abord la voiture.
    Une loi sur le DPPN créera un système Torrens des Premières nations et un cadre juridique et administratif adapté au XXIe siècle en adoptant les pratiques exemplaires qu'utilisent les systèmes provinciaux, fédéral et locaux dans tout le Canada. Elle créera un modèle de lois normalisées grâce auquel les Premières nations gagneront des années pour élaborer leur propre cadre juridique. Nous fournirons l'appui institutionnel par le truchement de la Commission de la fiscalité des Premières nations. Nous aurons recours au Tulo Centre of Indigenous Economics pour bâtir les capacités locales et mettre en oeuvre des systèmes administratifs orientés vers les investissements.
    Nous voulons que le DPPN donne aux Premières nations qui s'en prévalent la possibilité de rattraper le temps perdu en quelques années plutôt qu'en quelques décennies, à une fraction des coûts de mise en oeuvre. Cela réduira les coûts engagés par les investisseurs et les gouvernements des Premières nations pourront être concurrentiels et finalement commencer à vivre au rythme du commerce.
    D'aucuns disent que la propriété ne fait pas partie de notre culture. Je ne suis pas d'accord. Les économies de marché ne nous sont pas étrangères puisque nous les avons nous-mêmes créées. Nous faisions du commerce à des centaines de milles à la ronde. Les Mayas avaient un réseau d'échanges complexe. Comment la catlinite, dont la présence est attestée avant l'arrivée des Européens, aurait pu se retrouver dans mon territoire, au sud du centre de la Colombie-Britannique, alors qu'elle ne provient que de quelques régions du monde, telles que Pipestone, au Minnesota, si nous n'avions pas commercé? Comment le maïs aurait-il pu être utilisé dans toutes les Amériques avant l'arrivée des Européens, si nous n'avions pas commercé?
    Le commerce ne peut être financé sans capitaux. Nous avons dû mettre sur pied des moyens de transport tels que les bateaux, et construire des chemins, des routes et des immeubles publics, qui ont nécessité des investissements consentis en vue d'un rendement pour la collectivité et les particuliers. Ces infrastructures nous ont amenés à trouver nos propres revenus pour pouvoir les financer.
    Il faut des institutions pour faciliter le commerce. De l'Alaska à la Californie, nous avons convenu d'une langue commerciale commune pour enregistrer les transactions liées à la main-d'oeuvre et aux biens, le chinook, qui est un mélange de langues autochtones, d'anglais et de français.
    Nous avions des droits de propriété individuelle. Nos vêtements et chaussures n'étaient pas destinés à habiller toute la collectivité. Nos maisons d'hiver appartenaient à certaines familles. Selon notre histoire écrite, nos droits de propriété individuelle remontent au début des années 1800 et à la réintroduction de la pomme de terre péruvienne dans notre communauté.
    Je reconnais que le DPPN puisse ne pas être adapté à toutes nos collectivités, mais il s'agit de restaurer notre liberté de choix. Tout au long de notre histoire, nous avons pu adopter des innovations utiles et rejeter celles qui ne l'étaient pas. Nos plus grands novateurs ont été les Mayas, les Aztèques et les Incas. Chacune de nos cultures était fondée sur un avantage concurrentiel et a donné des économies durables.
    Avec l'arrivée des Européens, on nous a imposé un système de planification centrale. Ce système n'a pas marché en Europe de l'Est et il ne marche pas pour nous. Dans ce système, nous avons perdu la possibilité de choisir et avons été plongés dans une pauvreté inextricable. Nous avons aujourd'hui commencé à recréer nos institutions et ce sont les Premières nations qui détermineront celles qui sont les plus utiles.
(1550)
    Le DPPN nous redonnerait espoir. Nous avons autrefois prospéré. Puis nous avons été décimés par la maladie, la guerre et, dernièrement, par les bonnes intentions qui ont créé notre dépendance. Nous avons commencé à rebâtir le fondement juridique et administratif destiné à appuyer les marchés qui sont sur nos terres. La récupération des droits de propriété sur nos terres déclenchera une vague de créateurs et d'entrepreneurs.
    Le chef Joseph, un de mes héros culturels, disait en 1879, et je cite:
Laissez-moi être un homme libre. Libre de voyager, de faire une halte, libre de commercer à mon gré, libre de choisir mes maîtres, de suivre la religion de mes pères, de penser, de parler et d'agir tout seul.
    Merci beaucoup de m'avoir écouté.
    Merci, monsieur Jules.
    Nous allons commencer la série de questions.
    Madame Duncan, vous avez la parole en premier, pendant sept minutes.
    Monsieur Jules, tout le monde sait que vous défendez cette cause et vous avez fait un très bon plaidoyer en sa faveur. Cela nous faciliterait cependant la tâche de connaître les arguments contraires. Je vais donc vous en proposer quelques-uns. Vous avez d'ailleurs très bien indiqué dans votre exposé que cette cause ne faisait pas l'unanimité.
    Je vous pose donc ma première question, monsieur Jules. Vous êtes-vous en fait entretenu de la question avec les 600 et plus Premières nations? Y a-t-il un comité de l'Assemblée des Premières nations qui se penche sur la question et, dans l'affirmative, l'avez-vous rencontré pour en discuter les pour et les contre?
    Elles ont déjà pris position, sans…
    Je ne le savais pas.
    Elles ont déjà pris position sans me demander quelle était la mienne. Elles ont rejeté la proposition de DPPN sans entendre mes arguments ou ceux des Premières nations qui la défendent sur les raisons pour lesquelles elles souhaitent cette mesure législative.
    Ainsi, l'assemblée en a discuté et a dit qu'elle s'y opposait pour l'instant.
    C'est cela, et sans consulter ceux qui la défendaient.
    Vous avez dit que d'aucuns avaient fait valoir qu'il y avait déjà des mesures en place. Dans certains journaux juridiques, les avocats qui se sont penchés sur ces solutions de rechange ont affirmé que les mesures que le gouvernement devait appuyer de façon encore plus urgente pour faire avancer les intérêts économiques et l'indépendance des Premières nations, étaient de terminer le processus de conclusion des traités, de mettre ces derniers en oeuvre, de régler les revendications particulières et de consacrer plus de ressources pour accélérer les ajouts aux réserves. Que pensez-vous de ces positions?
(1555)
    Je n'y vois pas d'objection. Si c'est ce que les Premières nations veulent… bonne chance. Je pense qu'elles doivent avoir de nombreuses possibilités pour pouvoir faire leurs propres choix et prendre leurs propres décisions.
    Je m'occupe de ces questions depuis plus de 38 ans et j'ai acquis beaucoup de connaissances pratiques à leur sujet. Depuis le début, j'appuie l'Assemblée des Premières nations, j'assiste à bon nombre de leurs rencontres et je prends part à leurs processus de consultation.
    J'ai contribué à formuler le premier amendement proposé à la Loi sur les Indiens en 1988. J'ai collaboré avec le gouvernement du Québec pour lui faire modifier la Loi sur les compétences municipales afin que Sept-Îles puisse commencer à appliquer un impôt foncier dans le milieu des années 1990. J'ai oeuvré avec le juge LaForme pour mettre sur pied une commission indépendante des revendications. J'ai collaboré avec Michael Wilson et Paul Martin à la mise sur pied de la première taxe à la consommation des Premières nations afin que nous puissions avoir notre part de la taxe de vente sur les produits et services.
    Je me suis occupé des dossiers de gestion et de mise en valeur des terres. J'ai travaillé avec Robert Louie lorsque la Loi sur la gestion des terres des Premières nations venait d'être promulguée.
    Je connais donc très bien les divers processus, avec toutes leurs lacunes et tous leurs succès — et des succès, il y en a eu beaucoup dans le cadre législatif actuel. Je n'ai rien à dire à ce sujet. J'ai toutefois le sentiment que je ne suis pas ici pour parler en faveur du statu quo. Je crois en ce qu'a dit le premier ministre le 24 janvier, à savoir qu'on ne pouvait tout simplement pas se débarrasser d'un seul coup de la Loi sur les Indiens. J'écoute depuis 1975 le slogan « Débarrassons-nous de la Loi sur les Indiens ». J'ai pris part à la fermeture du ministère des Affaires indiennes à Kamloops en 1975. J'ai appuyé le rejet des crédits du gouvernement au printemps de 1975 et c'est à ce moment-là que j'ai commencé à entendre le slogan « Débarrassons-nous de la Loi sur les Indiens » que l'on répète tous les cinq ans. Croyez-moi, Linda, cela a été les cinq années les plus longues de ma vie.
    Ce que je veux, c'est que les Premières nations puissent commencer à prendre leurs distances par rapport à la Loi sur les Indiens de façon à récupérer le droit sur nos terres. Quand je regarde le bilan des chefs des Premières nations qui ont parlé de la mise en oeuvre de leurs droits issus des traités, aucun d'eux n'a dit que leurs terres devaient être transformées en réserves indiennes.
    Puis-je revenir sur ce tout dernier point? C'est justement de cela dont j'aimerais parler.
    Ce qui m'étonne de ce système, c'est que pour l'instant… Bien sûr, la situation est différente avec les traités modernes qui prévoient un système de gouvernance totalement distinct. Appliquons donc ce système à ceux, par exemple, qui sont régis par des traités historiques et qui pourraient avoir des terres de réserve. Il est clair que certains n'en ont même pas, mais qu'ils ont quand même des terres.
    Je me demande donc qui posséderait cette terre et qui prendrait les décisions sur le choix des bénéficiaires de titres fonciers?
     Les collectivités des Premières nations qui défendent cette cause et avec lesquelles je travaille ont procédé à un exercice sur l'utilisation de la terre. Ils ont délimité celles qui seraient détenues collectivement. Dans la plupart des cas, ces terres font déjà l'objet d'un certificat de possession émis à un particulier. On envisage donc, si la bande ou la collectivité le souhaite, de remettre le titre à la collectivité.
    Dans le cas de Kamloops qui me concerne, pour l'instant le titre… Le titre foncier d'une réserve indienne appartient à la reine. Donc, la réserve indienne de Kamloops appartient au gouvernement fédéral. Pour quelle raison est-ce que je demande de faire adopter cette loi? Pour que la propriété soit transférée du gouvernement fédéral à la collectivité de Kamloops.
(1600)
    Ainsi le titre reviendrait à la collectivité si l'hypothèque n'était pas payée, par exemple?
    Kamloops en conserverait le titre à perpétuité.
    En quoi est-ce différent d'un certificat de possession?
    La principale différence est que l'on pourrait obtenir un titre de propriété foncière en fief simple.
    Comment peut-on avoir un titre de propriété en fief simple si la terre appartient à la bande? C'est cela que je n'arrive pas à comprendre.
    C'est comme l'Ontario ou la Colombie-Britannique, qui ont des titres sur les terres provinciales.
    Mais non pas sur les terres privées…
    Oui, elles l'ont, car si vous ne payez pas vos impôts, elles peuvent en prendre possession.
    Merci.
    Certes, c'est utile d'étirer certaines discussions, mais nous devons dans la mesure du possible nous limiter à nos sept minutes.
    Monsieur Clarke, vous avez la parole pendant les sept prochaines minutes.
    Monsieur Jules.
    Très rapidement, j'aimerais lire les déclarations que deux de vos collègues ont faites sur Attawapiskat.
    Charlie Angus déclare:
Grâce aux dispositions de la Loi sur les Indiens, les travailleurs qui souhaiteraient construire leur maison à Attawapiskat ne peuvent le faire, parce qu'ils ne peuvent pas obtenir d'hypothèque dans une réserve.
    Un autre de vos collègues, Gilles Bisson, fait valoir qu'il faudrait refondre la loi pour permettre aux gens des Premières nations de posséder leur maison à titre de propriété privée, ce que la loi actuelle leur interdit.
    Merci, monsieur Jules.
    Nous passons maintenant à M. Clarke, qui a sept minutes.
    Monsieur Jules, si vous voulez poursuivre, allez-y, cela ne me dérange pas. Merci encore d'être venu témoigner. Y a-t-il d'autres points que vous voulez éclaircir?
    Il y en a beaucoup, mais je suis ici pour faciliter le dialogue avec les parlementaires et je me réjouis de pouvoir le faire.
    Merci.
    Vous avez mentionné 25 millions en Saskatchewan et 440 millions de dollars pour les terres obtenues au titre des DFIT — le cadre. Vous avez parlé ensuite du Manitoba et des sommes qui y sont dépensées.
    Si j'ai bien compris ce que vous voulez dire — et je vais essayer d'utiliser des termes simples —, vous voulez parler de ceux qui ne sont pas des Autochtones. C'est facile pour ces derniers d'acheter des terres à la campagne, tout comme les Premières nations le font au titre des DFIT, mais c'est encore plus facile pour eux d'acheter des terrains, de les diviser et de bâtir de petites municipalités qui deviennent alors autonomes au plan économique. Ce que nous constatons pour les Premières nations, ce sont les barrières que crée la Loi sur les Indiens, même pour l'achat de terres au titre des DFIT.
    Ce que vous voulez dire au sujet de la propriété des Premières nations est qu'elle est remise aux collectivités non autochtones dans ce cadre structuré, n'est-ce pas ?
    C'est cela.
    Monsieur Clarke, je dois interrompre la séance et je vous prie tous de m'en excuser, à moins que l'on décide de la poursuivre à l'unanimité. Je ne sais pas pourquoi la sonnerie se fait entendre et nous allons vérifier.
    Puisque tout le monde est d'accord, nous allons poursuivre.
    Vous pouvez reprendre, monsieur Clark. Nous essaierons de tenir les collègues au courant au fur et à mesure.
    J'ai quelques questions à vous poser, monsieur Jules. Quelles étapes devraient suivre les collectivités pour adopter le régime de droit de propriété des Premières nations?
    La première étape est évidemment de faire adopter la loi à la Chambre puis au Sénat, et qu'elle obtienne la sanction royale. Nous prévoyons qu'il y aura ensuite un vote au conseil de bande sur un processus d'éducation des membres qui doivent connaître tous les avantages et désavantages de la mesure législative. Par un vote, on demandera enfin à la collectivité si elle souhaite se prévaloir de la nouvelle loi.
    Je comprends le mode de fief simple dont vous parlez; mais j'aimerais vous demander aussi pourquoi le droit de propriété des Premières nations s'avère nécessaire?
    J'ai commencé à réfléchir à ces questions par rapport à mon expérience à Kamloops et à ce que j'y ai vu. J'ai lu certaines des déclarations que mon père avait faites en 1968 à propos du processus de consultation intitulé Choosing a Path qu'avaient amorcé Jean Chrétien et le gouvernement Trudeau et qui visait à abolir la Loi sur les Indiens.
    À cette époque, en 1968, la collectivité a affirmé que nous n'avions pas élu les bureaucrates du ministère des Affaires indiennes pour nous conseiller, que nous avions élu notre gouvernement pour nous diriger, nous et nos terres. Nous devions pouvoir suivre le rythme du commerce, disaient-ils, et si, pour le gouvernement fédéral, la Loi sur les Indiens ne contenait aucune disposition sur les titres fonciers, nous voulions nous-mêmes des titres inattaquables. Voilà ce que l'on disait à Kamloops en 1968. Si j'estime cette législation nécessaire, législation qui porte aujourd'hui le nom de DPPN, c'est pour créer une classe moyenne d'entrepreneurs chez les Premières nations.
    Certes, il y a eu des collectivités gâtées au plan géographique, qui ont tiré profit de la Loi sur la gestion des terres des Premières nations et d'autres processus, dans le cadre contraignant des pouvoirs fonciers délégués et du système foncier prévu dans la Loi sur les Indiens, mais je veux aller plus loin. Je veux que nous ayons des titres fonciers inattaquables de façon à ce qu'un Autochtone puisse obtenir, selon les mêmes critères qui s'appliquent à tous les autres Canadiens, une hypothèque auprès de la Banque Royale ou de toute autre banque de son choix.
    Ce ne sera pas un programme qui ressemble à du logement social, dont on a encore besoin. Ce programme n'annulera pas ce besoin, ni les autres articles de la Loi sur les Indiens, dont il faudra bien s'occuper à un moment donné.
    J'estime que les Premières nations doivent pouvoir choisir et j'espère que le choix qu'elles feront donnera plus de pouvoirs à leurs membres. Il s'agit là de l'une des premières mesures législatives visant à donner aux individus le pouvoir de libérer leur imagination.
(1605)
    Merci.
    Selon ce que je constate dans la Loi sur les Indiens, c’est qu’elle traite les Premières nations comme des citoyens de deuxième ordre. En ce qui concerne votre proposition de modernisation, j’aimerais connaître les avantages qu’apportera le droit de propriété des Premières nations.
    Comme je l’ai sous-entendu dans le document, je crois que cela mènera à une meilleure éducation. Actuellement, dans le budget fédéral, il y a des engagements de l’ordre de 270 millions de dollars en éducation et d’environ 300 millions en infrastructure pour la construction d’écoles. L’éducation est une composante importante d’une stratégie pour nous aider à briser le cycle de la dépendance.
    Cependant, si on ne peut pas apprendre une autre façon de faire à la prochaine génération, le gouvernement fédéral devra encore investir 500 millions de dollars au cours des cinq prochaines années pour encore une fois rattraper son retard dans le domaine de l’éducation, tandis que si nous commençons à rendre les gens autonomes et à les délivrer de la dépendance dans laquelle ils se trouvent actuellement tous en matière de politique sociale — la dépendance à l’endroit du financement fédéral en matière d’éducation, par exemple —, cela signifie que les gens auront un avenir. Ils n’auront plus à se tourner du côté des marchés gris de l’économie. Ils pourront participer au libre marché en place au Canada et aux autres sphères desquelles ils ont été laissés pour compte au moment de légiférer.
    Merci beaucoup.
    Merci, monsieur Clarke, monsieur Jules.
    Madame Bennett, vous avez sept minutes.
    Vous dites consulter les autres collectivités des Premières nations qui ont démontré un intérêt envers votre approche. Pourriez-vous nous donner le nom de certaines de ces Premières nations qui ont démontré un tel intérêt pour que nous puissions leur parler?
    À Kamloops, il y a Little Shuswap, Shuswap, Whispering Pines, Kitselas, et il y a aussi Brokenhead à Winnipeg.
(1610)
    Nous avons entendu beaucoup de commentaires positifs au sujet du régime de gestion des terres des Premières nations. Qu’est-ce qui est rendu possible grâce à votre proposition qui ne l’est pas en vertu de ce régime?
    Vous devez comprendre que, dans le régime de gestion des terres des Premières nations, les terres restent tout de même des terres de réserve. Ces terres appartiennent toujours à Sa Majesté; le régime ne nous détache pas de la Loi sur les Indiens. Je ne suis pas ici pour défendre et continuer de soutenir la Loi sur les Indiens. Je veux trouver des façons et des moyens de nous en distancer. Voilà un élément.
    Le régime en question dépend encore du registre des terres de réserve, qui est un régime d’enregistrement des actes. Dans une tenure à bail dans ma collectivité, il y a un bail qui fait plus de 500 pages; c’est un livre. Lorsqu’un avocat examine un bail ou un régime d’enregistrement des actes, il remonte peut-être 45 ans en arrière, alors qu’un régime Torrens ne compte qu’une page. On peut se rendre à la banque avec un tel document.
    Quel serait le seuil acceptable pour qu’une collectivité accepte de le faire? Étant donné certaines inquiétudes que nous avons entendues et le récent documentaire diffusé à la radio de CBC... Je me rappelle que Gary Merasty a dit que si une parcelle de terre d’une réserve devient la propriété d’un membre de la collectivité, c’est comme si on trouait la réserve — l’effet de damier que tout le monde redoute. On pourrait se retrouver avec un territoire très troué qui ne sera en fait plus un jour la propriété de la collectivité.
    C’est comme le Canada et les provinces. Disons-nous que l’Ontario est troué? Étant donné qu’il y a beaucoup de régimes fonciers différents, disons-nous qu’Ottawa est trouée? Je ne crois pas.
    Que se passerait-il si un futur chef voulait se retirer du régime en fief simple?
    Comme c’est actuellement le cas, il faudrait payer des intérêts.
    Je ne propose pas que nous fassions comme ce qui s’est passé dans le cas de la Dawes Act aux États-Unis. J’ai soigneusement examiné cette loi. Après l’expansion vers l’ouest des États-Unis, l’objectif de la Dawes Act était de prendre les terres des Amérindiens et de diviser le territoire. Donc, la majorité des terres ont été prises et données à des colons. Certaines parcelles ont été distribuées à des membres de la tribu. Ce n’est pas ce que je propose de faire.
    Le titre servirait toujours l’intérêt de la collectivité qui continuerait d’exercer son autorité sur les terres, peu importe qui les détient. Le vote ressemblerait à celui qui régit le référendum au Québec.
    Cinquante plus un.
    Oui.
    Je crois que nous parlons d’une majorité claire dans le présent...
    Ce sera une majorité claire.
    Je crois que le débat ne porte pas sur le cinquante plus un. Il s’agit d’une majorité non claire pour beaucoup de gens.
    En ce qui concerne le budget et les consultations sur la possibilité d’une telle mesure, qui se chargera de ces consultations?
    Ce seront les Premières nations qui soutiennent le projet et le gouvernement fédéral.
    Donc des consultants? Quelles ressources seront nécessaires pour être en mesure de réaliser cela...?
    Pour arriver au point actuel, il nous a fallu beaucoup de temps. Cela ne date pas d’hier ou du 28 mars. Nous avons d’abord décidé qu’il fallait le faire. C’est le résultat des travaux que j’ai accomplis au fil des ans. J’ai agi à titre de conseiller pour deux vérificateurs généraux; j’ai examiné le logement développé dans les réserves et j’ai constaté que la plupart des maisons construites dans les réserves ne durent qu’en moyenne sept ans. Comment aborder le problème? Il y a notamment des retards concernant le logement et des réparations qui doivent être faites. C’est ce qui nous a poussés à conclure qu’il fallait le faire.
    J’ai travaillé avec Sheila... pas Sheila — quel est son nom?
(1615)
    Était-ce Sheila Fraser?
    Non. Ce n’était pas Sheila Fraser; il y avait une Sheila Fraser, mais c’était la femme de London.
    Elle était secrétaire parlementaire. C’était Sue Barnes.
    Elle s’occupait du dossier des biens immobiliers matrimoniaux, et je lui ai dit, de même qu’à Bob Nault et Ron Irwin — j’avais de telles discussions à l’époque — que si vous incluez les biens immobiliers matrimoniaux dans la Loi sur les Indiens, c’est comme si vous érigiez une maison sur du sable, parce que vous ne serez tout simplement pas en mesure d’obtenir la certitude du régime foncier si vous ne faites que l’inclure dans la Loi sur les Indiens.
    Ce sont les femmes et les enfants qui sont touchés. À la lumière de tous ces éléments, nous avons examiné une série d’études, dont une qui visait à déterminer si cela respectait notre Constitution, parce que certains disaient que ce n’était pas possible en vertu de la Constitution.
    C’est donc possible en vertu de la Constitution. Quels sont les avantages économiques d’aller de l’avant avec la proposition? Un certain nombre d’études nous ont menés à conclure que c’est possible et qu’il y a des avantages économiques. Nous avons ensuite travaillé avec le Comité permanent des finances durant un certain nombre d’années. Massimo était l’une des personnes avec lesquelles j’ai travaillé au sein du Parti libéral. J’ai aussi rencontré M. Martin, Michael Ignatieff, Bob et d’autres gens. Le Comité permanent des finances a dit que nous devrions examiner cette possibilité, ce qui a mené à une entente.
    Il y a eu des visites à Kamloops et dans les collectivités qui soutiennent le projet, et c’est ce qui a fait que cet élément a été inclus dans les recommandations du Comité permanent des finances. Les prochaines étapes seront en fait de commencer la rédaction du projet de loi et de le présenter en Chambre.
    Merci.
    Merci, madame Bennett.
    Monsieur Boughen, vous avez sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Bienvenue au comité, Clarence. Merci beaucoup d’avoir pris le temps de venir témoigner devant notre comité, parce que nous reconnaissons la valeur de vos connaissances et votre volonté de nous en faire part.
    Je m’intéresse à l’idée du droit de propriété des Premières nations que nous avons examiné par intermittence au cours de notre étude.
    Selon vous, est-ce que cela changerait la donne en ce qui concerne le régime foncier au sein des réserves? Croyez-vous qu’il y aura un important changement dans ce domaine en ce qui a trait à la propriété des terres par des particuliers?
    Selon moi, cela changerait complètement la donne.
    J’ai l’occasion de visiter beaucoup de collectivités en tant que commissaire, et la plupart de ces collectivités ont une liste d’attente de 10 ans en matière de logement. La majorité des collectivités qui sont administrées par un tiers se trouvent directement dans cette situation, parce que des particuliers n’ont pas payé leur hypothèque dans des terres de réserve et qu’ils se retrouvent en fin de compte sans capital.
    Voilà ce que cela change.
    Cela permet à une personne qui occupe un emploi stable et qui a un bon crédit de contracter une hypothèque dans une banque comme tout Canadien peut le faire.
    J’ai oublié de parler d’un élément; c’est la capacité d’être cautionné. Beaucoup de collectivités qui appuient maintenant la proposition disent qu’elles veulent être cautionnées pour être en mesure d’engager des entreprises en vue de construire des routes ou de travailler dans le secteur minier, soit une industrie vers laquelle bon nombre de collectivités se tournent actuellement. Bref, le cautionnement est un autre élément.
    Il y a aussi la question de la succession. Les gens disent qu’ils détiennent maintenant des droits de propriété dans les réserves, mais mon frère est décédé ab intestat en 2010, et je vous laisse deviner qui s’est occupé de sa succession. C’est le ministère des Affaires indiennes, le propriétaire foncier, et non sa famille.
    Voilà ce que cela change.
    Cela permet aux gens de commencer à penser de manière créative, de devenir plus productifs et de participer à l’économie locale, régionale, provinciale, nationale et mondiale. Ce n’est actuellement pas le cas.
(1620)
    D’après vous, quelles collectivités des Premières nations bénéficieraient le plus de cette proposition? Pourquoi? Y a-t-il aussi des collectivités des Premières nations qui n’en bénéficieraient pas?
    Je vais revenir à Attawapiskat. Au cours de la dernière année, il y a eu beaucoup de controverses au sujet de cette collectivité. Charlie Angus — le député et apparemment un récipiendaire d’un prix Juno — et le député provincial ont tous les deux soutenu que la collectivité devrait détenir les droits de propriété pour que ces membres puissent contracter des hypothèques.
    Je crois comprendre qu’il y a une entente avec De Beers qui a créé une possibilité de 500 emplois. La collectivité a été en mesure de seulement tirer profit de 200 emplois. Environ 100 personnes travaillent dans la mine et pourraient contracter une hypothèque. Cela diminuerait les besoins en logement d’au moins 100 personnes, selon mon évaluation.
    Au début, peu de collectivités iront de l’avant, parce que la tradition orale est encore très présente. Les Premières nations doivent pouvoir l’entendre et voir les résultats. De plus, elles sont de nature très conservatrice. Elles ne veulent pas s’éloigner de ce qu’elles connaissent.
    Les seuls qui ont le statut d’Indien et qui savent ce qu’est la vie en dehors de la Loi sur les Indiens sont les Nisga'a, depuis 10 ans, et les Tsawwassen. Ce n’est pas le cas de tous les autres, comme mon père — son grand-père est né avant la Loi sur les Indiens, mais cela remonte déjà à quelques générations.
    Cela brise le cycle de la dépendance.
    À mon avis, nous obtiendrons également plus de transparence et de reddition de comptes de la part des gouvernements, parce que nous voudrons nous assurer que des investissements se concrétisent sur nos terres et que nos maigres ressources ne sont pas dilapidées. En fin de compte, toutes les Premières nations et tous les Canadiens en tireront profit.
    Merci, monsieur Jules. Merci, monsieur le président.
    Merci.
    Il reste un peu de temps. Quelqu’un aurait-il une question complémentaire?
    Monsieur Clarke, allez-y.
    Avec votre proposition... Si elle était adoptée aujourd’hui, selon vous, combien de temps faudrait-il pour mettre en place l’ensemble du processus?
    Comme vous devez l’avoir constaté, je suis optimiste...
    Vous l’êtes.
    ... mais je suis aussi réaliste.
    Je suis dans le domaine depuis 38 ans, comme je l’ai mentionné. Tout ce qui concerne une loi prend en moyenne sept ans de sa naissance à son adoption. J’ai déjà collaboré à plusieurs projets de loi.
    En raison de l’annonce de la politique dans le budget, il me tarde de travailler cet été avec les Premières nations qui soutiennent la proposition et de rédiger un projet de loi qui pourrait, avec un peu de chance, être présenté en Chambre dès cet automne. La Chambre pourrait ensuite demander à un comité de l’examiner, et le projet de loi fera l’objet d’amendements et de changements en vue d’en améliorer l’efficacité. Enfin, le comité renverrait le projet de loi à la Chambre, puis la mesure législative devrait suivre le même cycle du côté du Sénat.
    J’aimerais que cela se fasse avant le 21 décembre, parce que c’est la fin du monde.
    Des voix: Oh, oh!
    M. Clarence T. Jules: L’autre aspect très important concerne le processus parallèle que nous devrons lancer avec les gouvernements provinciaux. Pour réaliser notre projet, il faut avoir l’adhésion des provinces. Comme vous l’avez entendu encore et encore le 24 janvier, bon nombre de Premières nations sentent qu’elles sont en présence de l’État, alors qu’en fait ce n’est pas le cas.
    Il y a l’indissociable État qui comprend le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux. Ils sont tous concernés dans le présent dossier. Il m’a fallu du temps pour comprendre ce qu’était réellement une fédération. Je l’ai appris en siégeant six ans avec M. Rae à un comité appelé le Forum des fédérations.
    J’ai vu Bill Clinton parler du fédéralisme à Mont-Tremblant. Il nous a dit que nous étions une grande famille et que tous ses membres doivent commencer à collaborer entre eux. C’est un peu comme une démocratie. Une démocratie ne signifie pas simplement une personne, un vote. C’est plus que ça. Nous devons commencer à intégrer les Premières nations dans les affaires de la famille et à être productifs d’une manière qui n’a encore jamais été vue. Nous avons déjà été une composante essentielle de l’économie.
    Je discuterais avec les gouvernements provinciaux au cours de l’été. J’ai déjà eu des discussions avec la Colombie-Britannique, le Manitoba, l’Ontario et le Nouveau-Brunswick. J’ai hâte de discuter avec les autres provinces qui iront de l’avant. La Saskatchewan a fait savoir qu’elle aimait bien l’idée, mais elle ne veut pas prendre les devants des Premières nations qui soutiennent le projet.
    Nous avons dépassé le point où le gouvernement fédéral doit trouver des solutions à notre place. Ce sont les Premières nations qui doivent le faire. D’un autre côté, il doit y avoir des processus pour les diverses collectivités des Premières nations. C’est déjà en branle sur la scène locale. Nous discutons avec elles. Je crois que tout sera probablement terminé en 2014.
(1625)
    Merci, monsieur Jules.
    Monsieur Genest-Jourdain, vous avez cinq minutes.

[Français]

    Monsieur Jules, lors de votre présentation de la First Nations Property Ownership Act, une notion, en particulier, a attiré mon attention, soit la capacité de saisie.
    J'aimerais savoir si vous avez cerné l'incidence de l'émission, par des cours provinciales, de brefs de saisie — brefs de saisie-arrêt ou brefs de saisie-exécution — et de la possibilité d'avoir une saisie judiciaire des terres pour les nations qui, bien entendu, adhéreraient à ces principes.

[Traduction]

    C'était un des domaines qui ont fait l'objet de discussions poussées par les Premières nations dans une réunion avec les partisans de cette initiative. Ce qu'elles ont dit, c'est qu'elles ne voulaient pas être limitées par l'article 89 de la Loi sur les Indiens. Elles voulaient pouvoir être cautionnées; par conséquent, les dispositions sur la saisie prévues à l'article 89 ne s'appliqueraient pas dans les cas où des questions monétaires sont en cause.
    Là où elles ont commencé à fixer une limite, c'était dans les litiges entre un défendeur et une tierce partie, comme quelqu'un qui a un accident de la route et qui veut poursuivre les propriétaires. Elles ont dit que ce n'était pas quelque chose qui les intéressait. Si nous utilisons les terres à des fins hypothécaires ou de cautionnement, alors, oui, les terres seraient saisissables.

[Français]

    Toujours en ce qui concerne la First Nations Property Ownership Act, quelle est votre appréciation de l'exportation des principes prévus dans les communautés éloignées?
    Je viens de la communauté d'Uashat. Vous parliez, tout à l'heure, de Sept-Îles. Les seules choses qu'on trouve en abondance, chez moi, ce sont des bureaux de prêteurs sur gages et des usuriers.
    Considérez-vous que, pour des nations éloignées et dépourvues sur les plans social et financier, ce principe serait applicable et exportable?
    À ma connaissance, l'une des premières actions qui sera mise en avant sera, bien entendu, de tenter d'aliéner ce bout de terrain pour en percevoir des bénéfices pécuniaires. Quelques terrains dans ma communauté sont situés au bord du fleuve Saint-Laurent. Il y a une valeur ajoutée, tout de même, à ces terrains. Des Québécois s'intéressent à ces bouts de terrain.

[Traduction]

    J'ai eu l'occasion de visiter votre collectivité à quelques occasions. Ricky Fontaine — j'ignore si vous connaissez Ricky — a fait partie de la Commission consultative de la fiscalité indienne pendant un certain nombre d'années. Comme je l'ai dit plus tôt, lorsque Sept-Îles a commencé à s'intéresser au domaine sacré de la taxe foncière, elle ne pouvait pas le faire parce que le gouvernement du Québec occupait le champ, et nous avons dû modifier la Loi sur les municipalités. Il a fallu environ cinq ans pour y arriver.
    Lorsque nous parlons de la saisie des terres dans le contexte des intérêts fonciers hypothécables, ce n'est pas une question dans laquelle vous vous engagez les yeux fermés. Je n'essaie pas d'encourager quelqu'un qui dit qu'il veut vendre ces terres pour des perles et des babioles. Ce n'est pas le but de ce que je propose. Le but de ce que je propose, c'est d'habiliter une personnes à compter sur elle-même, plutôt que sur quelqu'un d'autre, pour aller de l'avant. C'est le genre de culture que vous avez, je crois, et que mon peuple a eu depuis des temps immémoriaux.
(1630)

[Français]

    Maintenant, j'ai une question assez vaste, dont je vais tenter de me souvenir.
    Combien de temps me reste-t-il?

[Traduction]

    Vous avez une minute.

[Français]

    Monsieur Bevington, allez-y. Ma question m'échappe.

[Traduction]

    Merci, monsieur le commissaire en chef Jules.
    Cette approche me plaît, mais je m'intéresse à la vue d'ensemble. Je vais vous lire quelque chose qui a été écrit par Pamela Palmater, une avocate micmaque. Elle dit:
De la même manière, l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982 est une promesse importante pour les peuples autochtones pour ce qui est à la fois de reconnaître et de protéger leurs droits ancestraux ou issus de traités. Peut-être plus important encore, l'article 35 est une promesse constitutionnelle aux peuples autochtones de protéger leurs cultures et leurs identités distinctives pour les générations futures. Étant donné que la terre est déterminante pour l'identité des Premières nations ainsi que pour le maintien de leurs cultures et de leurs collectivités, il semble illogique de laisser entendre que les Premières nations sont mieux desservies en divisant leurs réserves en parcelles de terre relevant d'une propriété individuelle disponible pour la vente à des non-Autochtones au nom du développement économique.
    S'agit-il d'un jugement dur de sa part?
    Dès le départ, je savais qu'il devait y avoir un débat public étendu sur cette question. Un livre publié en 2009 a propulsé la question à l'avant-scène. Je savais que cela se révélerait un changement de fond par rapport au statu quo. Tout le monde ici, dans cette salle, reconnaît que le statu quo n'a pas été une bonne chose pour les Premières nations. Même Mme Palmater serait d'accord là-dessus.
    Lorsque je regarde la mise en application de nos droits en vertu de l'article 35, c'est ce que cela fait. Il autorise nos gouvernements des Premières nations à faire des choix par eux-mêmes, à prendre une décision éclairée.
    À mes yeux, l'expression la plus libre de notre intérêt collectif, ce sont les droits individuels. Sans la libre expression de nos droits individuels au sein de cette collectivité, nous n'allons pas survivre en tant que peuple. En effet, c'est de cette façon que nous avons toujours fonctionné. Dans le passé, à l'époque traditionnelle, si nous n'aimions pas le système, nous allions ailleurs pour créer notre propre bande. Nous ne pouvons pas faire cela maintenant, parce que la Loi sur les Indiens dit: « Vous êtes de cet endroit ».
    Lorsque je pense à notre territoire traditionnel, il ne s'agit pas uniquement des terres des réserves indiennes. Alors, cela doit faire partie de la stratégie globale pour régler les problèmes que nous avons face aux peuples autochtones partout au pays.
    Une partie de cela est le partage réel des recettes de l'exploitation des ressources. Mais si nous ne sommes pas capables d'utiliser ce que nous avons, nous ne pourrons jamais faire cela de manière appropriée. Nous allons toujours dire simplement: « Eh bien, prenons la plus petite partie que nous pouvons parce que c'est tout ce que nous pouvons obtenir ». Je veux changer cela. Je veux être capable de changer cela d'une manière très fondamentale qui habilite nos gouvernements, de manière qu'ils puissent toujours être ici pour les générations futures.
    Je ne suis pas ici pour qu'il y ait une extinction. Il y a eu des exemples dans l'histoire canadienne de collectivités qui se sont éteintes. En effet, à cause des épidémies de variole de 1862 et de 1863 en Colombie-Britannique, un certain nombre de mes collectivités ont disparu, et elles se sont unies pour former les 17 collectivités Shuswap restantes dont je suis maintenant membre. Le peuple Nicola de Merritt s'est éteint.
    Effectivement, une des collectivités favorables à cette idée, celle de Whispering Pines, a dit vouloir participer à cette initiative parce qu'elle sait que si elle s'éteint à cause du libellé de la Loi sur les Indiens qui dit aux paragraphes 6(1), 6(2) et 6(3), vous n'êtes pas un membre…
    Elle dit vouloir être capable d'avoir son propre territoire, de sorte que les générations futures soient en mesure de profiter du peu de terre qu'elle possède maintenant, mais également qu'elles puissent utiliser cela comme un tremplin pour aller de l'avant.
    Mme Palmater et d'autres ont droit à leur position et les collectivités qui prennent une décision éclairée d'aller de l'avant à partir de cela ont les mêmes droits.
(1635)
    Merci, monsieur Jules.
    Monsieur Payne, vous avez la parole pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, Manny, d'être venu. C'est tout simplement fascinant de vous entendre parler d'un sujet dans lequel vous croyez fermement.
    Je sais que vous avez parlé brièvement des différences entre la Loi sur la gestion des terres des Premières nations et la Loi sur le droit de propriété des Premières nations. Je ne sais pas s'il y a quelque chose que vous aimeriez ajouter par rapport aux différences que vous avez déjà expliquées. J'ai d'autres questions à ce sujet.
    Juste pour en finir avec cette question, certaines personnes régies par la LGTPN ont exprimé beaucoup d'inquiétudes et je n'ai aucune objection face à leur choix. Je pense que si elle fonctionne pour eux, tant mieux.
    Ce que je propose est substantiellement différent. Ma proposition fait intervenir un registre foncier de type Torrens avec un titre en fief simple. Cela permet de faire quelque chose qui ne peut être fait à l'heure actuelle en vertu de la Loi sur les Indiens. Alors, la LGTPN s'applique encore à une réserve indienne. Il y a encore une responsabilité de la Couronne. Il n'y a pas de champ de compétence en matière d'environnement, par exemple. Alors, il y a certaines limites, mais cette formule s'est révélée un succès pour beaucoup de collectivités et je n'ai aucunement l'intention de critiquer leurs succès. Ce que je veux faire, c'est aller au-delà de cela.
    L'autre chose que je dois dire, c'est que vous faites preuve d'une grande ouverture d'esprit pour ce qui est du choix des Premières nations quant au type de système qu'elles veulent appliquer, alors, je pense que c'est vraiment exceptionnel.
    J'ai besoin de certaines précisions. Vous avez parlé en particulier du fief simple et des aspects communautaires de la propriété de la terre. Vous ai-je bien compris lorsque vous avez dit que même avec le fief simple, la compétence continuerait de relever de la bande?
    C'est exact.
    Très bien. Cela m'amène à autre chose.
    Vous avez également parlé de la participation des provinces. Que faut-il faire? Si on suppose que la loi fédérale est adoptée et que les choses vont de l'avant, quel travail doit-on faire avec la province pour s'assurer que le projet aille de l'avant et qu'il réponde à toutes vos attentes?
    Je suis certain que les membres du comité sont au courant de l'affaire St. Catharines Milling et de l'affaire Star Chrome au Québec. Si ce n'est pas le cas, ce sont des causes très importantes survenues immédiatement après que le Canada est devenu un pays. Elles ont indiqué, et souligné, le fait que si des terres sont réservées pour les Indiens, le titre, si vous voulez, appartient à la province. Alors, essentiellement, Affaires indiennes exerce la responsabilité administrative sur les réserves et sur les Indiens. C'est le paragraphe 91(24).
    Pour régler cette question, les gouvernements provinciaux doivent adopter une loi pour qu'il n'y ait pas d'ambiguïté concernant le transfert du titre du gouvernement fédéral au gouvernement des Premières nations. Je ne veux pas que dans l'avenir, si quelqu'un meurt sans testament ou si une quelconque collectivité s'éteint, la province dise: « Eh bien, nous allons faire valoir notre titre ». Voilà pourquoi les gouvernements provinciaux doivent participer.
    Je pense qu'il y a d'autres domaines qui sont d'une importance capitale lorsque nous regardons les champs de compétence provinciaux. J'ai parlé de l'un d'entre eux, à savoir l'environnement. La province a mis sur pied, au cours d'une période de temps plus longue, des institutions auxquelles nous devons avoir accès. Nous pouvons utiliser la législation existante ou nous pouvons le faire, comme nous le proposons, en vertu de la Loi sur le droit de propriété des Premières nations, par défaut. La Première nation aurait la compétence, mais si elle décidait de ne pas l'exercer, d'autres lois s'appliqueraient, à sa demande, par défaut.
    Vous avez parlé de votre frère et de son décès, et du fait que c'est Affaires indiennes qui s'est occupé de sa succession. Je suis tout simplement renversé de voir que c'est ce qui se passe dans la réalité. Cette idée de fief simple et du fait qu'il n'y a pas de différence par rapport à n'importe quel autre Canadien m'intéresse au plus haut point et, de toute évidence, c'est la même chose pour vous. Vous avez parlé un peu de certains des avantages économiques. De plus, pour ceux qui meurent, ces terres, si je vous comprends bien, continueraient d'appartenir à leurs héritiers.
(1640)
    C'est exact.
    Une autre question dont j'ai parlé, c'est que lorsqu'une personne meurt sans testament, il n'y a pas d'empressement de la part des héritiers à régler la succession. Dans ma collectivité, nous avons certaines parcelles de terrain très précieuses. Cela fait maintenant deux générations que le propriétaire est décédé. Mais il n'y a pas d'empressement de la part des héritiers à régler la succession, parce qu'ils se demandent ce qu'ils pourraient bien en faire?
    Nous avons des situations comme à Kahnawake, tout juste au sud de Montréal, où vous avez de vieilles habitations de toute beauté et les gens ont un intérêt d'un millième dans ces dernières. Ils ne sont pas intéressés à régler un grand nombre de ces questions en suspens.
    Monsieur Payne, malheureusement, nous avons dépassé le temps d'environ une minute. Alors, nous allons devoir passer à l'intervenant suivant.
    Nous allons donner la parole à M. Bevington, pour cinq minutes.
    Je n'ai que quelques questions.
    Comment les terres de réserve seront-elles transférées en propriété en fief simple sans inviter la compétence provinciale?
    La première étape doit être l'adoption d'une loi fédérale qui fixe le processus par lequel le titre, qui appartient actuellement au gouvernement fédéral, sera transféré à la Première nation. Une loi provinciale devra également être adoptée pour s'assurer que la province respecte ce processus et qu'elle n'essaiera pas de faire valoir ses intérêts. La seule province qui n'a pas d'exigence à cet égard, c'est la Colombie-Britannique, mais cette province a déjà donné son accord, parce que j'ai demandé à la province — à partir, vraiment, d'une position de moment — de le faire. Il y a eu des discussions avec les deux partis à ce sujet.
    Je pense que l'adoption d'une loi provinciale garantirait que cet intérêt qu'estime avoir la province, parce qu'elle possède ce que l'on appelle un intérêt sous-jacent à la réserve indienne, ne serait pas soulevé.
    Ainsi, à l'heure actuelle, sur les réserves des Premières nations, si vous avez un certificat de propriété, vous pouvez obtenir une hypothèque. Vous pouvez également louer à bail à quelqu'un d'autre qui peut obtenir une hypothèque, n'est-ce pas exact?
    Sur la réserve indienne existante?
    Oui.
    Oui, si vous obtenez les autorisations appropriées.
    Dans le cas de Kamloops, lorsque j'étais chef, j'ai conclu une entente à l'amiable avec Sun Rivers Development. L'entreprise a dépensé 18 millions de dollars avant même qu'un bail soit accordé. Alors, vous devez désigner la terre et il y a maintenant des discussions visant à abroger les articles traitant de la désignation. L'histoire de la désignation ou de la cession conditionnelle des terres remonte aux affaires Star Chrome et St. Catharines Milling, où il devait y avoir un rôle du fédéral dans toutes ces questions.
    Alors, vous devez tenir un vote et ensuite, vous pouvez signer une entente. Une fois que c'est fait, vous devez demander au propriétaire foncier — qui est Sa Majesté — de signer un bail en votre nom. Alors, vous êtes le bénéficiaire de ce bail.
    Même si vous êtes régis par la Loi sur la gestion des terres des Premières nations?
    Cette situation est un peu différente. Vous avez posé la question en fonction de la Loi sur les Indiens.
    En vertu de la LGTPN, vous pouvez signer des baux à plus long terme de votre propre chef. En vertu de la Loi sur les Indiens, vous devez avoir un vote parmi tous les électeurs qui ont un bail de 49 ans. Il y a un procès devant les tribunaux… non, pas un procès devant les tribunaux, mais une plainte devant la Commission des droits de la personne pour qu'une personne ait un bail de 99 ans. Mais comme vous le comprenez tous, même lorsque vous avez un bail de 99 ans, il y a un certain seuil critique. Alors, lorsque que vous approchez de l'année 30, 40, 50, la valeur de la terre diminue…
(1645)
    J'ai une autre question, parce que j'en ai plusieurs.
    Est-il possible de créer un registre de type Torrens en vertu de la Loi sur la gestion des terres des Premières nations?
    Ils ont choisi d'avoir un système d'actes de transfert en vertu de la Loi sur les Indiens.
    Mais il n'y a rien qui empêcherait que cela se fasse.
    Ils ont choisi d'avoir un système d'enregistrement des titres fonciers qui se base sur des actes de transfert en vertu du Registre des terres de réserve. Alors, à l'heure actuelle, en vertu du Registre des terres de réserve, il y a un registre pour les réserves indiennes, pour les terres désignées et pour les terres régies par la LGTPN — et ce sont des actes de transfert.
    Alors, comme je l'ai indiqué, vous finirez par vous retrouver avec une encyclopédie.
    Vous avez 20 secondes si vous avez autre chose, Dennis.
    C'est assez difficile avec 20 secondes.
    Très bien; eh bien, la dernière fois que j'ai accordé une minute à quelqu'un, cela a duré cinq minutes. Je parle de M. Bevington. La dernière fois que je l'ai fait avec lui, cela a duré huit minutes 43 secondes.
    Alors, monsieur Seeback, je vous donne la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Il est merveilleux que vous soyez ici. Cette discussion est très intéressante pour moi.
    Alors, si je devais essayer de résumer ce que j'entends, cela ne fera que de donner un choix de plus aux Premières nations en ce qui concerne la gestion des terres. Vous auriez presque un spectre. Dans certains cas, vous auriez les articles 53 à 60. Ensuite, vous auriez les gens qui se réclameraient de la LGTPN et enfin, avec cette loi, il y a maintenant un choix additionnel, qui est la conversion de certaines parties des terres de réserve en fief simple.
    Est-ce une description assez juste?
    Eh bien, ce que nous envisageons, c'est que la totalité du territoire relève de la Loi sur le droit de propriété des Premières nations, parce qu'autrement, cela nous mènerait à la location dont nous avons parlé plus tôt. Alors, cela relèverait en totalité de la Loi sur le droit de propriété des Premières nations. Il ne sera pas possible de choisir des éléments par-ci par-là.
    Si vous décidez d'y souscrire, si la communauté le décide, dans ce vote…
    La totalité du territoire…
    … alors, la totalité des terres de réserve sera enregistrée en fief simple.
    C'est exact. Transférée.
    Transférée en fief simple.
    Je lisais une observation pour ma propre information. C'était dans une certaine note que nous recevons tous. On y parlait de droit réversif que conserve la Première nation. Avez-vous une idée de ce que cela signifie?
    Un droit réversif?
    Un droit réversif.
    Eh bien, les provinces ont un droit de reprise sur les terres et elles conservent ce droit de manière à ce qu'elles puissent reprendre des terres à des fins publiques.
    Un intérêt réversif que les bandes auraient sur les terres… Vous savez, cela serait semblable à un droit d'expropriation, je suppose.
    Dans une des notes que nous recevons de la bibliothèque, on peut lire: « Peu importe qui détient les titres en fief simple, l'objectif est que la Première nation conserve le titre sous-jacent ou le droit réversif ».
    Oui. Cela signifie simplement que le titre sera toujours conservé par la Première nation, peu importe qui a un intérêt par rapport à ce titre.
    J'aimerais revenir rapidement sur quelques points.
    Il y a des différences évidentes entre un droit de tenure à bail et un intérêt en fief simple. C'est, en partie, ce dont vous avez parlé. Quels sont, d'après vous, les principaux désavantages et avantages des prêts — c'est-à-dire de l'accès au capital — pour quelqu'un qui se trouve dans un régime d'intérêt en fief simple comparativement à une personne qui détient un droit de tenure à bail?
    J'avais organisé une conférence nationale à ce sujet en octobre 2010 et j'avais invité Hernando de Soto à faire un exposé; pour ceux d'entre vous qui ne le connaissent pas, il est l'auteur du livre The Mystery of Capital. Il siège, avec Madeleine Albright, à un comité de l'ONU sur la réduction de la pauvreté.
    Bref, je lui ai demandé de venir parler de toutes ces questions, mais il y avait parmi les experts invités un avocat de la Banque royale. Celui-ci a dit que les banques sont vraiment réticentes à l'idée d'utiliser un droit de tenure à bail pour les emprunts. D'après mon expérience à titre de chef de ma collectivité, j'ai déjà constaté cette réalité. Oui, on peut emprunter un montant d'argent basé sur l'hypothèque, mais quand j'ai fait une acquisition pour le compte de la bande et de la ferme avoisinante, le ranch Harper, les banques n'ont pas accepté de baux fonciers. Nous en avons beaucoup — il y a quelques milliers de baux fonciers dans la réserve de Kamloops.
    Quand j'en ai parlé aux banques, elles ont manifesté un intérêt pour la TPSPN — la taxe sur les produits et services des Premières nations. C'est ainsi que nous avons pu obtenir des fonds. Bref, quand on s'adresse aux institutions bancaires, celles-ci veulent quelque chose d'un peu plus sûr qu'un bail.
(1650)
    Ce serait simple si c'était évidemment le cas.
    Combien de temps me reste-t-il, monsieur le président?
    Une minute...
    Une minute. Parfait...
    Le président: Et quatre secondes.
    M. Kyle Seeback:Très bien.
    Outre le fait que les Premières nations ne bénéficient pas de titres de propriété foncière en fief simple, quels sont les autres facteurs qui empêchent ou entravent le développement économique dans les réserves? Je sais que c'est une question trop vaste pour pouvoir y répondre en 40 secondes.
    Eh bien, c’est l’un des principaux facteurs attribuables au sous-développement de nos terres. Quand on compare les terres dans la plupart des collectivités promotrices et celles de l’administration voisine, c’est le jour et la nuit. À Kamloops, on appelait la réserve « le côté sombre » parce qu’il n’y avait pas autant de lumières que dans la ville de Kamloops. C’est donc sous-développé. Pourquoi? À cause de la Loi sur les Indiens. Quand on n’est pas propriétaire des terres ou qu'on ne détient pas de titre de propriété sur les terres et que celles-ci appartiennent à autrui, les propriétaires sont toujours en mesure de prendre des décisions à votre place.
    Les processus auxquels on doit participer sont longs et complexes. Dans un cas, nous avons dû franchir 32 étapes différentes avant de pouvoir accorder un bail foncier. Mon père disait en 1968 que d’ici à ce que le ministère des Affaires indiennes nous donne le feu vert, le développeur était déjà parti. Voilà un des aspects.
    Autre facteur: le système des actes de propriété. Quand on examine ce système, il faut faire des recherches historiques. C'est là un autre aspect.
    Ensuite, les institutions bancaires, disons celles d’une province ou d’un territoire donné, suivent une série de critères s'il s'agit d'un régime Torrens. Elles peuvent facilement déterminer le taux d'intérêt et le montant de l’hypothèque. Par contre, dans une réserve, une foule de facteurs différents entrent en jeu.
    Un des exemples que le banquier nous a donnés, c’était le cas d’un bail foncier de 99 ans. Le hic, c'était qu'on n'avait pas accès à l'eau ou à d'autres services susceptibles d’accroître la valeur des terres. D'après l'évaluation, les terres valaient 2 millions de dollars à cause du bail foncier, si bien que le demandeur s’est vu offrir un montant de 900 000 $. Le banquier nous a dit: « Savez-vous combien nous avons fini par payer? Zéro, parce qu'il n'y avait pas d'intérêt saisissable. »
    Merci, messieurs Seeback et Jules.
    Nous passons maintenant à M. Genest-Jourdain, suivi de Mme Hughes.

[Français]

    Monsieur Jules, je reviens à la First Nations Property Ownership Act. Vous avez fourni quelques informations sur la modulation en ce qui a trait au titre de propriété individuelle. Compte tenu du fait que ma communauté est toujours nomade à ce jour, c'est-à-dire que les gens passent d'une maison à l'autre, n'ont pas de résidence fixe et se promènent durant toute l'année, comment le titre de propriété va-t-il être modulé si un individu désire s'en prévaloir, par exemple si la bande désire attribuer des lots aux individus? J'aimerais connaître votre propre appréciation de la chose.

[Traduction]

    Je pense que ce serait à peu près le même processus que celui actuellement utilisé dans votre collectivité. Quand j'ai visité Sept-Îles, il y avait deux différentes collectivités. J'ai vu des terrains sur lesquels les gens avaient construit des maisons. Ce serait à peu près la même chose.
    Pour élaborer un plan communautaire, les membres de la collectivité doivent se réunir et dire: « Voici le plan de lotissement que nous allons créer pour que les gens puissent détenir un droit de propriété sur ces terres. » Il faudrait ensuite procéder à un vote communautaire pour ratifier le plan et le mettre en oeuvre.

[Français]

    À l'heure actuelle dans ma communauté, que ce soit à Maliotenam ou à Uashat, les gens ne sont pas propriétaires. On leur a simplement consenti le droit d'occuper cette partie du territoire. Ils ne sont même pas propriétaires des maisons. Je tenais à le préciser au passage.
(1655)

[Traduction]

    N'empêche qu'ils résident dans les maisons.
    En Ontario, combien de Premières nations font partie de votre organisation ou envisagent de s'y joindre une fois qu'on règle des revendications visant à instaurer un régime de gestion des terres des Premières nations? Certains de ces cas ont-ils été réglés?
    Certaines des collectivités ont commencé à faire la transition vers ce qu'on appelle la LGTPN. Je ne me suis pas personnellement entretenu avec les collectivités du Nord de l'Ontario pour déterminer si elles préconisent cette initiative ou souhaitent y participer.
    Y en a-t-il en Ontario?
    Oui.
    Combien?
    Il y a une collectivité. Il y en a une autre qui est sur le point de conclure une entente et qui souhaite établir des terres dans le cadre du DPPN.
    Je vais céder la parole à ma collègue pour un instant et, s'il reste du temps, je reprendrai.
    Je voudrais simplement obtenir quelques précisions, monsieur Jules. Cette proposition vient-elle de la Commission de la fiscalité ou de vous-même, à titre personnel? J'aimerais également en savoir plus sur votre fonction de président de la Commission de la fiscalité. Je suis curieuse de connaître votre expérience.
    Si j'ai bien compris, le rôle de votre commission consiste à fournir aux gens des renseignements sur les droits de tenure à bail et les possibilités de prélever des impôts sur des propriétés à bail. D'après votre expérience à titre de président de la Commission de la fiscalité, pourriez-vous également prendre le temps de nous expliquer comment les collectivités des Premières nations profitent de ces mécanismes.
    Volontiers. Je vais vous donner une courte leçon d'histoire.
    Mon père a commencé à s'occuper de la question de fiscalité en 1965. Il était question de déneiger certaines des terres sur notre parc industriel du mont Paul, que le gouvernement fédéral a créé en 1961. On s’est adressé au gouvernement provincial. La province a dit: « Eh bien, vous êtes une réserve indienne, alors parlez au ministère des Affaires indiennes. » Nous avons fini par en discuter pendant plus de 20 ans.
    Quand je suis devenu chef des revendications en 1984, j'ai rédigé une lettre à toutes les collectivités du Canada pour leur demander d'appuyer Kamloops dans ses efforts visant à modifier la Loi sur les Indiens. Auparavant, nous avions travaillé avec beaucoup de collectivités pour essayer d'avoir une compétence fiscale en vertu de la Loi sur les indiens. Par la suite, dans le budget fédéral de 1986, on a annoncé qu'il y aurait une modification pour nous permettre de prélever des taxes sur les terres de réserve. C'est ainsi qu'en 1988, le projet de loi a été adopté.
    J'ai dû faire en sorte que le gouvernement provincial cède ses pouvoirs d’imposition. Trois collectivités se sont portées candidates — Kamloops, Westbank et Musqueam. Elles étaient les premières collectivités une fois que le gouvernement provincial a cédé les terres de manière ordonnée. Maintenant, on compte environ 140 collectivités qui se chargent de prélever des impôts fonciers. Elles perçoivent environ 100 millions de dollars par an, et nous enregistrons des recettes de presque 1 milliard de dollars depuis que j'ai commencé ce travail.
    Quel est le nombre de maisons par rapport au nombre d'entreprises?
    C'est un mélange. Il y a des ensembles résidentiels, quelques emprises ferroviaires avec Canadien Pacifique, ainsi que des développements industriels et commerciaux. Ce sont là des intérêts imposables que les Premières nations recherchent parce qu'elles peuvent miser là-dessus pour obtenir des intérêts qu'elles peuvent...
    Ces projets se font sur des terres cédées à bail.
    C'est ça.
    Autrement dit, les terres cédées à bail génèrent des revenus non négligeables.
    C'est exact. N'oublions pas que les terres cédées à bail représentent un dixième de la valeur des terres en fief simple. Alors, évidemment, cela va augmenter.
    Merci.
    Monsieur Rickford, à vous la parole pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président, et merci, Manny, d'être ici aujourd'hui.
    Premièrement, je dois faire un aveu, monsieur le président. J’ai déjà eu l’occasion, à deux reprises, de discuter longuement avec le témoin et, chaque fois, celui-ci m'a donné tellement de matières à réflexion que j'ai eu du mal à dormir. Je ne lui en veux pas, mais je me sens de nouveau fatigué aujourd’hui parce que je n'ai pas cessé de penser à toutes ces questions. Manny, sachez que je ne suis pas au bout de mes peines sur le plan théorique et pratique, mais je vous suis reconnaissant d'avoir orienté le débat de sorte que nous puissions connaître les options fondamentales qui s'offrent à nous et avoir une idée de quoi elles auraient l'air. Bien entendu, il ne faut pas perdre de vue le contexte.
    Deuxièmement, en ce qui concerne la mise en oeuvre, il faut se rendre à l'évidence: le régime actuel ne fonctionne pas. Je pense à la merveilleuse circonscription de Kenora et au lac des Bois. Mes collègues se sentent émus quand je commence à parler de ma circonscription. Nous reconnaissons l’énorme potentiel que recèle l'une des plus belles régions du Canada. Certaines collectivités des Premières nations travaillent à la mise en valeur des terres par l’entremise de programmes fédéraux pour la construction d’ensembles résidentiels. On y construit des lieux à vous couper le souffle mais, au bout du compte, leur valeur réelle n'est pas réalisée. Alors, cela ne marche pas non plus. Mais qu'est-ce qui fonctionne?
    Il y a des baux fonciers de 99 ans et, comme vous l'avez dit, la valeur n'arrête pas de baisser. Dans un tel contexte, les propriétaires se retrouvent les mains vides, si bien que la valeur de ces terres ne profite à personne dans la collectivité des Premières nations. J'en ai été témoin dans le domaine juridique. Voilà pourquoi je suis obsédé par cette question. D'ailleurs, je suis vraiment ravi de participer à l'étude du comité et d'examiner les options. Celles que vous avez proposées m'inquiètent particulièrement pour les raisons que je viens de mentionner.
    J'aimerais m’attarder un peu sur l'expérience de la nation Nisga'a que vous connaissez bien. Voici ce qui m’a donné le plus de fil à retordre. Lorsque des collectivités manifestent un intérêt, particulièrement celles de l'intérieur de la Colombie-Britannique, où l’on trouve des terres magnifiques en bordure du lac Okanagan, et dans la réserve de la Première nation Washagamis — où tout est plus que parfait, même s'il y a certain potentiel — ou encore dans certaines collectivités isolées des Premières nations — par exemple, une des 25 collectivités dans ma région —, on leur dit: « C’est, en quelque sorte, le scénario d’un monde idéal. Que se passera-t-il là-bas? »
    Pouvez-vous nous parler un peu de cette expérience et nous expliquer comment le processus a permis de moduler la valeur réelle des terres situées dans une partie assez éloignée de la Colombie-Britannique?
(1700)
    J'ai travaillé avec toutes sortes de collectivités, allant de Squamish — qui recèle un potentiel de développement de plusieurs milliards de dollars — jusqu'à Westbank, la première collectivité avec laquelle j'ai travaillé pour la mise en oeuvre d’opérations fiscales, sans compter plusieurs autres collectivités dans l'ensemble du pays. Certaines d'entre elles commencent de façon relativement modeste. Le projet de Truro à Millbrook est un bon exemple. Ces collectivités ne sont pas vraiment isolées, mais lorsque j'ai entrepris ce travail, elles avaient une assiette fiscale de 25 000 $. Maintenant, on y trouve un Tim Hortons, un cinéplex, des complexes hôteliers, et j’en passe.
    Si on n'arrive pas à concevoir une solution économique, alors c'est peine perdue. Comme premier pas, nous devons amener les gens à donner libre cours à leur imagination pour voir ce qui est possible. Dans mon cas précis, une telle approche est porteuse d'espoir pour l'avenir.
    Nous sommes saisis de la gestion des terres des Premières nations et, encore une fois, je vous suis reconnaissant de nous avoir fait part de ces options. Comment entrevoyez-vous la mise en oeuvre d’un tel régime ou les collectivités qui pourraient y participer? J'ai pris connaissance des notions liées au régime Torrens. J'ai une idée des propriétés foncières en fief simple, tant sur le plan théorique que pratique. Il y a un processus de gestion des terres des Premières nations, qui met à la disposition de l’entrant des ressources pour mettre en valeur les capacités dans ces différents domaines. Vous avez mentionné l'environnement.
    Si j'avais plus de temps, j’évoquerais quelques idées intéressantes ayant trait à la province. Tous ces éléments font partie de la capacité dont nous parlons, à savoir la gestion des terres des Premières nations.
    Comment cela se rapporte-t-il à ce que vous proposez aujourd'hui, du moins en guise de comparaison?
    À vrai dire, la LGTPN sera une expérience riche en leçons: nous allons beaucoup apprendre des collectivités qui passent par le processus et des résultats qu'elles obtiendront.
    Il y a quelques collectivités qui participent à ce processus et qui sont assujetties à la LGTPN. Ce que nous serons en mesure de faire, c'est... Je ne sais pas si je l'ai dit, mais j'ai mis sur pied un établissement appelé Tulo. Ce mot signifie, en chinook, « profit ». Il s’agit d’un centre de recherche économique autochtone, qui se greffe à l'Université Thompson Rivers. Nous allons offrir des programmes universitaires afin de former des administrateurs agréés qui savent ce qui s’impose en matière d'approche économique.
     Nous interpellons les collectivités qui ont une vision économique pour l'avenir. Il faut toutefois passer de la théorie à la pratique, c'est-à-dire de l'éducation et de la formation à l'application du régime. Tulo est un composant essentiel de cette approche.
    Nous organiserons des ateliers à l'échelle locale pour que la collectivité soit prête et apte à assumer la compétence. Cela représente une bonne dose de collaboration avec les collectivités promotrices et les personnes. Dans bien des cas, il s'agit de bâtir la confiance entre les conseils et les propriétaires des terres parce que, souvent, il n'y a pas assez de confiance entre eux.
    Il s'agit vraiment de créer un établissement national qui permet de transférer, rapidement et facilement, des connaissances aux Premières nations pour que nous puissions accélérer le processus, au lieu d'attendre encore 40 ou 50 ans, ou deux ou trois autres générations.
(1705)
    Merci, monsieur le président.
    Je sais que mon temps est écoulé, mais je tiens à vous remercier de votre témoignage aujourd'hui. J'ai hâte de visiter votre région pour, au moins, entamer un dialogue — ou, comme vous le dites, un débat approfondi — sur les options qui s'offrent à nous. Merci.
    Madame Duncan, vous avez la parole pour les cinq prochaines minutes.
    J'aimerais que nous revenions au rôle de la Commission de la fiscalité des Premières nations, car nous n'avons pas vraiment eu l'occasion, au cours de cet examen, d'apprendre ce que fait la commission.
    En ce qui concerne son mandat, je vois qu'il semble être très similaire à celui des autres conseils et commissions que nous avons entendus, mais vous vous employez notamment à développer la capacité et à fournir des conseils pour l'établissement et la mise en oeuvre de régimes fiscaux, de même que pour les tenures à bail. Je me demande si vous pourriez nous parler de certaines des leçons apprises.
    Par exemple, vous faut-il davantage de fonds pour la capacité? Est-ce une question de capacité? Est-ce simplement que certains ont des possibilités et d'autres, non? Pourriez-vous nous donner des exemples et peut-être faire quelques recommandations pour l'amélioration du système afin que les Premières nations puissent bénéficier de ces deux objectifs?
    Voilà pourquoi j'étais très heureux qu'on ait annoncé davantage de fonds pour l'éducation dans le budget fédéral. L'un des facteurs limitatifs, c'est que nous devons pouvoir attirer les étudiants à Tulo pour leur enseigner. Nous devons nous servir de moyens très créatifs pour trouver et créer des bourses d'études, afin d'avoir des administrateurs de haut niveau. C'est ainsi que nous diffusons l'information des rouages internes, si l'on veut, de la commission de la fiscalité. C'est là où nous nous lions, si vous voulez, avec les collectivités.
    Actuellement, disposez-vous de l'argent nécessaire pour faire venir les gens et pour enseigner?
    Nous l'avons fait de différentes façons, mais cela devient de plus en plus difficile. Nous n'avons pas les ressources pour le faire, mais nous en trouvons...
    Vous semblez plein d'espoir. Je croyais que l'argent prévu pour l'éducation devait servir à la construction d'écoles, mais je suis heureux de voir que vous avez bon espoir que l'argent puisse servir à la prestation des programmes.
    Eh bien, je l'espère.
    D'accord.
    Je vais céder la parole à Mme Hugues, ma collègue, qui a quelques questions à vous poser, je crois.
    Je pourrais continuer de vous parler de tous ces...
    Madame Hughes.
    J'ai discuté de cette question avec l'un des chefs des Premières nations de ma circonscription. Je m'interrogeais à ce sujet, car ils disent qu'avant que nous puissions nous tourner vers la fiscalité, les traités doivent être reconnus, tout d'abord, et leurs revendications territoriales doivent être réglées. J'aimerais savoir ce que vous en pensez. Êtes-vous d'accord sur ce point?
    J'ai discuté avec quelques-uns d'entre eux, en fait. Ils disent qu'avant même de le faire, on doit régler certaines choses. Cela ne fonctionnera pas, car en réalité, ces revendications territoriales traînent depuis très longtemps. Certaines collectivités des Premières nations ne reçoivent aucune réponse du bureau du ministre sur ces questions.
    Si une collectivité ou un dirigeant décide d'adopter cette approche, je ne vais pas m'y opposer. Si une collectivité ou un conseil déclare vouloir le faire, je me ferai un plaisir de collaborer.
    Voilà en quoi consiste l'optionalité. C'est la liberté de choix.
    Mon autre question porte sur un commentaire que vous avez fait concernant la différence entre le certificat, le fief simple et la propriété. Vous avez dit que les Premières nations ne vont pas aller vendre leurs terres. Mais si elles possèdent ces terres, elles peuvent les vendre à qui bon leur semble, n'est-ce pas?
(1710)
    C'est exact.
    Je me demande donc dans quelle mesure cela apportera un soutien aux collectivités lorsqu'elles constateront qu'il y a un morcellement. Je sais qu'elles ont à coeur de veiller à ce que leurs collectivités demeurent entières.
    Oui, mais dans bien des cas, même en Ontario, il y a déjà beaucoup de droits de tenure à bail. C'est ici, en Ontario, que se trouvent la plupart des non-Autochtones vivant sur les terres de réserves — la grande majorité. Quand nous parlons du morcellement des droits, c'est déjà le cas. Nous ne proposons pas cela. Il revient à chaque collectivité de prendre ce genre de décision éclairée.
    En même temps, l'intérêt de la collectivité est protégé en ce qui concerne ces terres.
    Il y a un autre élément, soit la SCHL. En réalité, les membres des Premières nations peuvent avoir accès au financement de la SCHL et, encore une fois, l'intérêt de la collectivité est protégé. Vous pourriez peut-être clarifier cela pour moi.
    C'est l'un des problèmes que nous constatons. Il y a un différend entre la SCHL et le ministère des Affaires autochtones quant à savoir qui a la responsabilité de fournir les maisons sur les terres des réserves. Puis, pour compliquer davantage les choses, il y a des personnes dans les collectivités qui affirment avoir un droit issu d'un traité d'avoir une maison.
    La Première nation de Sagamok en est un exemple.
    Madame Hughes, votre temps est écoulé. Je suis désolé, mais vous l'avez dépassé de 30 secondes. Je vais laisser le témoin finir de répondre, mais je vous demande de ne pas poser d'autres questions.
    Je vais maintenant me prévaloir de la prérogative de la présidence. En fait, mes collègues de ce côté-ci m'ont cédé leur temps de parole.
    Monsieur le président, j'aimerais finir de répondre à cette question.
    Je vais vous laisser le faire.
    Pour que la SCHL accorde un prêt dans la réserve, le conseil de bande doit demander au ministre des Affaires autochtones de fournir une garantie ministérielle. Même quand on se rend dans une banque — il y en a quelques-unes qui fournissent de l'aide pour le logement dans les réserves —, le conseil de bande doit garantir cela. De ce fait, la majorité des collectivités qui font l'objet d'une intervention par un séquestre-administrateur se trouvent dans une telle situation parce que des personnes ne remboursent pas leurs prêts au logement, et c'est parce qu'elles n'en sont pas propriétaires.
    Je tiens simplement à dire que cela fonctionne très bien dans le cas de la Première nation de Sagamok.
    Il y a...
    C'était une observation, pas une question.
    Les membres du comité ne font des observations que durant leur temps de parole.
    Je vais maintenant prendre la parole.
    Monsieur Jules, dans bien des propositions que nous recevons ici, il y a des interprétations et de fausses interprétations de différentes choses, et je vous suis reconnaissant d'avoir présenté très clairement votre propre proposition. Il est parfois important d'entendre l'auteur de la proposition et non uniquement les personnes qui s'y opposent.
    Il y a des gens qui compareraient votre proposition au livre blanc de 1969 du gouvernement fédéral qui visait à reconnaître les droits des Autochtones sur les terres. Je me demande si vous pourriez nous donner plus de précisions. Vous nous avez donné des explications claires aujourd'hui, mais je ne comprends pas encore tout à fait comment une collectivité des Premières nations conserverait le droit protégé par la Constitution de toujours être propriétaire des terres. Donc, même si elles étaient confiées à des intérêts privés, que faudrait-il faire pour s'assurer qu'elles reviennent toujours à la Première nation, qu'il s'agisse toujours de terres des Premières nations, et non de terres provinciales, et que même si elles étaient vendues à de multiples reprises, elles continueraient d'appartenir à la collectivité des Premières nations?
    D'abord, revenons à Choosing a Path. D'après ce que je comprends, sous le gouvernement Trudeau, on a élaboré ce document parce qu'on estimait que les réserves indiennes étaient le modèle de l'apartheid en Afrique du Sud. On n'approuvait pas les principes de l'apartheid. On voulait se débarrasser de la Loi sur les Indiens. Pour cette raison, on a rédigé un document d'orientation intitulé Choosing a Path, qui portait sur cette option. Il a été rejeté par toutes les collectivités du pays. C'est en raison de cette position que le 24 janvier dernier, le premier ministre a dit que le gouvernement conservateur n'allait pas éliminer la Loi sur les Indiens. Il a indiqué qu'elle est fortement enracinée et que ces décisions ne lui revenaient pas. Nous estimons donc qu'il nous incombe de faire ces choix.
    Nous avons parlé de l'article 35 de la Loi constitutionnelle, de la reconnaissance de notre droit inhérent à l'autonomie gouvernementale, et de toutes les autres subtilités prévues dans la Constitution canadienne. Ce n'est pas comme si nous nous penchions sur l'affaire de la St. Catharines Milling, dans laquelle le premier ministre de l'Ontario a affirmé devant la Cour suprême que les terres cessaient d'appartenir aux Autochtones si elles n'étaient plus utilisées comme réserves indiennes. Étant donné tout ce qui a été fait depuis 100 ans, c'est possible pour le gouvernement fédéral sur le plan constitutionnel.
(1715)
    Je pense que certains ont décrit faussement votre proposition...
    Oh, oui.
    ... comme étant une façon de faire en sorte que les terres cessent d'appartenir aux Premières nations aussitôt qu'elles seraient détenues par des entités privées. Y aurait-il une disposition dans votre proposition prévoyant que ces terres continueraient d'appartenir aux Premières nations en vertu de la Constitution?
    Eh bien, je pense que...
    Ai-je bien compris? Serait-ce nécessaire?
    Il ne s'agit pas d'un processus de traité, ni d'un processus d'autonomie gouvernementale. Nous nous sommes longuement demandés si cela pouvait être fait en vertu du paragraphe 91(24) de la Loi constitutionnelle. Ces terres resteront des terres réservées à nos besoins.
    Elles sont préservées et jamais cédées.
    Exactement. Elles sont protégées par la Constitution.
    Je ne prétends pas être avocat ni même comprendre le processus, mais vous avez manifestement obtenu des avis juridiques vous indiquant qu'elles seraient protégées par la Constitution. J'en suis heureux. Cette information est utile. Je me demande s'il y aurait des documents à distribuer aux membres du comité en ce qui concerne ces avis juridiques.
    Oui.
    Ce serait utile.
    Je donne maintenant la parole à Mme Bennett.
    Votre proposition a une longue histoire. Elle a été reconnue dans le budget la semaine dernière. Selon vous, quel pourrait être l’échéancier en ce qui concerne le budget et les fonds nécessaires? Je crois qu’on n’indique aucun montant dans le document budgétaire.
    Je suis content que vous ayez posé cette question. L’une des choses que je voudrais faire, c’est de créer des institutions nationales qui faciliteraient une véritable autonomie gouvernementale. Cela signifie que les institutions auraient la capacité de générer des fonds pour s’autogérer. La proposition prévoit notamment les transferts de propriété, afin que le régime d’enregistrement des titres fonciers en vienne à s’autofinancer. Nous utilisons pratiquement la même formule que la LGTPN, à titre de transition. Les fonds ne seront pas offerts à perpétuité, mais…
    Veuillez m’excuser. Cette fois-ci, je dois vous interrompre parce que je suis tenu de le faire.
     Je crois que le timbre est d’une durée de 30 minutes. Avec votre consentement, nous pouvons terminer les cinq minutes de Mme Bennett. Je pense qu’il reste environ quatre minutes. Si vous êtes d’accord, nous allons continuer pour quatre minutes.
     J’aimerais qu’on nous confirme le moment du vote.
    Des voix: Trente minutes.
    Le président: C’est une mise aux voix par sonnerie d’appel de 30 minutes; nous avons donc le temps, si mes collègues sont d’accord, de continuer durant quatre minutes.
     Nous allons revenir à vous, madame Bennett, pour le reste de votre temps de parole.
(1720)
    Je vais continuer de répondre à la question. L’intention est de créer des institutions qui en viendront à s’autofinancer; nous voulons également que les collectivités, des plus grandes aux plus petites, soient capables de partager cette responsabilité, car cela règle certains problèmes d’iniquité. C’est l’approche que nous voulons adopter. Au bout du compte, une partie de ces sommes devront être revues, si l’on peut dire, et cela figurera dans la demande présentée au gouvernement.
     Quant à l’échéancier, j’ai mentionné tout à l’heure que je continue à être optimiste. Idéalement, le projet de loi sera présenté cet automne et, d’un point de vue réaliste, il sera probablement adopté peu après — en quelques mois.
    Dans vos discussions avec le gouvernement, puisque aucune somme n’était prévue pour cela dans le budget, croyez-vous que le projet de loi sera déposé à l’automne et que les fonds seront prévus dans le budget de l’an prochain? Qu’espérez-vous à ce chapitre?
    Je crois que des fonds de départ devront de toute évidence provenir des crédits budgétaires actuels. S’il faut investir des fonds supplémentaires, ils devront manifestement figurer dans le budget de l’an prochain.
    Quels crédits budgétaires s’appliqueraient actuellement à ce processus?
    Je ne suis pas le comptable du ministère des Affaires autochtones.
    Mais quelque chose du ministère, lequel a subi des compressions de 250 millions de dollars.
    Oui.
    D’accord.
    Au sujet de la différence entre la gestion des terres et votre proposition, vous avez indiqué qu’il n’est pas possible d’obtenir un prêt hypothécaire. Parce que bien des gens… Même pour les terres visées par la Loi sur les Indiens, il y a un prêt hypothécaire.
     Expliquez-nous le problème, ce dont vous parlez au sujet des prêts hypothécaires.
    Tout dépend de l’endroit où vous êtes. Dans la collectivité de Westbank, c’est relativement facile d’obtenir un prêt hypothécaire parce que la région est propice au développement immobilier et, en plus, il y a des baux de 99 ans. Pour les baux beaucoup plus courts, comme à Kamloops, où nous avons un bail de 49 ans dans le parc industriel Mt. Paul, quand les gens veulent vendre le bail ou le renouveler, ils disent: « Nous voulons revenir en arrière ». Même au bout de cinq ans, ils disent vouloir recommencer. On finit par recommencer afin qu’ils puissent aller à la banque pour obtenir un prêt hypothécaire. Mais la qualité du développement n’est pas optimale, et c’est là où je veux en venir. Je veux pouvoir atteindre la pleine valeur marchande pour les terres.
    Et quelle est la différence?
    La différence, c’est qu’en vertu d’une convention de bail, on pourra obtenir 65 p. 100 de la valeur, pas 100 p. 100.
    Merci, madame Bennett.
     Chers collègues, avant de clore la séance, je veux vous parler d’un document qui a été distribué aux membres du comité. Il s’agit d’un document confidentiel destiné aux membres du comité seulement, qui indique quels sont les témoins que nous n’avons pas encore entendus et que les membres du comité souhaitent entendre à un moment donné.
     Je voulais simplement vous en parler afin que vous puissiez y jeter un coup d’œil au cours des prochaines semaines.
     Sur ce, je tiens à vous remercier, monsieur Jules, de votre présence aujourd’hui, d’avoir répondu à nos questions et de nous avoir donné matière à réflexion.
     Mesdames et messieurs, la séance est levée.
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