Selon les données du Recensement de 2006, 20 %
de la population canadienne vit en zone rurale, ce qui inclut, selon
Statistique Canada, les villes et les collectivités de 1 000 habitants ou
plus qui se trouvent hors des zones où la densité de population est de plus de
400 habitants au kilomètre carré. Les études menées par l’ICIS démontrent que les populations des régions
rurales ont en moyenne des résultats de santé moins bons que le reste de la
population canadienne, car tant les femmes que les hommes qui vivent dans ces
régions ont une espérance de vie inférieure et sont exposés à des risques de
mortalité plus élevés en termes de maladies de l’appareil circulatoire, de
blessures et de suicide. Les chercheurs attribuent ces résultats de santé au fait que les
résidents des régions rurales du Canada sont plus susceptibles que les résidents
des zones urbaines de vivre dans de moins bonnes conditions socioéconomiques, d’avoir
un niveau de scolarité moins élevé, de présenter des comportements nuisibles
pour la santé, particulièrement en matière de tabagisme et d’alimentation. De plus, l’accès aux soins de santé demeure, en région rurale, un
problème persistant qui résulte en partie du manque de professionnels des soins
de santé installés dans ces régions. En 2004, environ 16 % des médecins de famille et 2,4 %
des spécialistes étaient installés dans les régions rurales et les petites
villes du Canada, alors que ces dernières représentent 21,1 % de la
population du Canada.
Le présent chapitre souligne les initiatives
innovatrices actuellement menées pour accroître le nombre de professionnels de
la santé offrant des soins à la population des régions rurales du Canada. Il
définit également des pistes quant aux initiatives que pourrait prendre le
gouvernement fédéral pour remédier aux problèmes de ressources humaines en
santé dans les régions rurales.
Selon les témoins qui ont comparu devant le
Comité, les trois principaux facteurs associés au fait qu’un étudiant décide d’exercer
en milieu rural à la fin de ses études et de sa formation sont le fait d’avoir
grandi en milieu rural, des expériences cliniques et éducatives positives au
premier cycle des études de médecine, ainsi qu’une formation ciblée en médecine
rurale au niveau postdoctoral, et, notamment, des programmes de résidence qui
préparent les candidats à l’exercice de la médecine en milieu rural.
Le Comité a appris que ces trois facteurs avaient
mené, au Canada, à la création d’écoles de médecine vouées à l’exercice de la
médecine en région rurale ou éloignée. Le Comité a ainsi appris que l’École de
médecine du Nord de l’Ontario (EMNO) a élaboré un modèle particulier d’enseignement
médical et de recherche qui vise à doter les diplômés des connaissances et des compétences
nécessaires à faire carrière dans le Nord de l’Ontario, ou dans un milieu rural
nordique, isolé, autochtone ou francophone similaire. Pour ce faire, elle s’efforce de recruter des étudiants qui s’intéressent
plus particulièrement à la médecine rurale et reflètent la population qu’ils
seront amenés à servir. Ainsi, environ 90 % des étudiants ont-ils grandi
dans le Nord de l’Ontario, tandis que de 40 à 50 % d’entre eux proviennent
de région rurale ou éloignée et que de 6 à 11 % d’entre eux sont originaires
de communautés autochtones. L’EMNO offre également un programme axé sur la médecine rurale, la
formation interprofessionnelle et la santé des Autochtones. Le Comité a
également appris que le Rural Ontario Medical Program propose des programmes de
formation axés sur la médecine familiale qui sont offerts en régions rurales et
dont les étudiants décident, dans 85 % des cas, d’effectuer leur résidence
dans ces mêmes régions rurales.
Outre les initiatives visant à élaborer des
modèles innovateurs de formation en médecine rurale, les témoins ont également
attiré l’attention du Comité sur des stratégies qui pourraient améliorer la
rétention des médecins en région rurale. Il s’agit, notamment, d’offrir aux
professionnels de la santé la possibilité de faire de l’enseignement clinique
dans des écoles de médecine rurale qui favorise leur implantation au sein de la
collectivité. Les témoins ont par ailleurs souligné la nécessité d’offrir aux
professionnels de la santé en milieu rural des possibilités de formation et de
perfectionnement continus, soit en leur offrant des programmes d’enseignement à
distance, soit en les aidant à trouver des remplaçants afin qu’ils puissent
voyager pour améliorer leurs compétences.
Enfin, les témoins ont parlé de l’importance des
incitatifs financiers dans le recrutement et dans la rétention des
professionnels de la santé en milieu rural. Ils ont expliqué que les incitatifs
financiers devraient être plus axés sur le fait de mieux rémunérer les
professionnels de la santé en région rurale en raison des services plus étendus
qu’ils assurent et de leur degré plus élevé de responsabilité, plutôt que sur
le fait de les dédommager pour les éventuelles contraintes associées au fait de
vivre en région rurale ou éloignée. Les témoins ont par ailleurs expliqué que les incitatifs
financiers devraient être répartis tout au long de la carrière des
professionnels de la santé vivant dans ces régions, car la remise de grosses
sommes au début de leur carrière ne favorise pas la rétention à long terme et crée
des dissensions lorsque des professionnels de la santé établis dans une même
collectivité ne reçoivent pas le même niveau de compensation financière.
Les témoins ont souligné qu’il était indispensable
que les intervenants collaborent à la promotion de pratiques exemplaires en
matière de recrutement et de rétention des professionnels de la santé dans les
régions rurales et éloignées, notamment par examen de l’ensemble des modèles de
formation en médecine rurale du pays et des pratiques exemplaires des
différents gouvernements. Ils ont expliqué que le meilleur moyen était, pour ce faire, d’organiser
une conférence nationale sur la santé rurale financée par le gouvernement
fédéral. Ils ont également suggéré que les faits établis et les
recommandations formulées dans le cadre de cette conférence servent de
fondement à une stratégie nationale de la santé rurale.
Le Comité reconnaît que le gouvernement fédéral ne
joue pas un rôle direct dans la prestation des soins de santé dans les régions
rurales et éloignées, sauf dans le cas des réserves des Premières nations et
des communautés inuites. Cependant, le Comité prend partie pour les témoins qui
estiment que le gouvernement fédéral pourrait favoriser une collaboration entre
les ordres de gouvernement intéressés dans le domaine de la santé rurale et des
ressources humaines en santé. L’étude du Comité a révélé qu’il existe d’excellents
modèles d’éducation en santé qui assurent la promotion de la médecine rurale
partout au Canada. Le Comité a également appris que ces modèles d’éducation en
santé rurale constituent les exemples concrets sur lesquels se fondent
certaines des recommandations et lignes directrices sur le recrutement et le
maintien des professionnels de la santé en zone rurale, qui seront présentées à
l’Assemblée mondiale de la santé qui doit se tenir en mai 2010. Le Comité recommande donc :
Recommandation 23 :
Que Santé Canada tienne une conférence nationale
sur la santé rurale afin que les différents intervenants puissent discuter de
leurs pratiques exemplaires et formuler des recommandations quant à la santé
rurale, à la formation et au recrutement de ressources humaines en santé.
Recommandation 24 :
Que Santé Canada cible des fonds afin d’appuyer
des initiatives visant à accroître le nombre d’étudiants en santé rurale,
notamment : des bourses d’études à l’intention des étudiants issus du
milieu rural qui souhaitent faire carrière dans les régions rurales.
Recommandation 25 :
Que le Comité consultatif sur la prestation des
soins de santé et les ressources humaines FPT envisage de créer un groupe de
travail ayant pour mandat d’examiner, pour ensuite y réagir, les pratiques
exemplaires en matière de recrutement et de rétention des RHS dans les régions
rurales et éloignées, et, notamment, les lignes directrices et les
recommandations présentées par le groupe d’experts de l’OMS lors de l’Assemblée
mondiale de la santé de mai 2010.