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FINA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent des finances


NUMÉRO 044 
l
3e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 3 novembre 2010

[Enregistrement électronique]

(1530)

[Traduction]

    La 44e séance du Comité permanent des finances est ouverte.
     Je vous remercie tous d’être venus.
     Conformément à l'article 108(2) du Règlement, une étude de la mise à jour économique et des projections financières du gouvernement figure à l’ordre du jour.
     Des représentants de quatre organisations comparaissent cet après-midi. La Bibliothèque du Parlement est représentée par M. Kevin Page, le directeur parlementaire du budget, M. Mostafa Askari, le directeur parlementaire adjoint du budget, M. Sahir Khan, le directeur parlementaire adjoint du budget et M. Chris Matier, le conseiller principal pour l’analyse des dépenses et des revenus.
    La deuxième organisation est l’Institut C.D. Howe qui est représenté par M. Finn Poschmann. Nous accueillons également M. Derek Burleton du Groupe financier Banque TD et Mme Mary Webb, économiste principale et directrice du Groupe Banque Scotia, notre quatrième organisation.
     Je vous remercie tous de votre présence parmi nous cet après-midi. Chacun de vous dispose de 10 minutes pour faire une déclaration préliminaire.
     Nous allons commencer par M. Page.
     Bonjour M. le président, messieurs les vice-présidents et membres du comité.
     Merci de nous avoir invités, mes collègues et moi, à vous parler des perspectives économiques et financières du Canada.
     Ceux à qui incombe la responsabilité d'élaborer des budgets se heurtent présentement à une période particulièrement difficile. Le niveau d'incertitude demeure élevé. Dans plusieurs pays du G-8, le rythme de la reprise économique a subi un ralentissement dans une conjoncture où les économies fonctionnent encore bien en deçà de leur potentiel. Le ralentissement de la croissance se produit en outre au moment même où les gouvernements envisagent de mettre fin aux programmes de stimulation budgétaire et de mettre en oeuvre des mesures d'austérité pour réduire les déficits budgétaires.
     On ne saurait trop insister sur l'importance des risques et des compromis entre diverses politiques. Les décideurs doivent poursuivre une politique qui permet d'appuyer à court terme une reprise économique fragile, d'une part, et d'éviter un accroissement de la dette publique susceptible de peser sur les générations futures, d'autre part. Il y a aussi des problèmes structurels, comme la faiblesse de la croissance de la productivité, le vieillissement de la population, les déséquilibres budgétaires, etc., qui exigent des solutions structurelles.

[Français]

    Dans ce contexte, les décideurs et les responsables du budget doivent accorder une importance particulière à la transparence et à l'analyse budgétaire, afin d'appuyer le débat d'orientation qui aboutira au budget de 2011.
    Aujourd'hui, mon bureau a rendu publique une mise à jour de nos prévisions budgétaires quinquennales. Nous avons mis à jour notre analyse des composantes conjoncturelles et structurelles des déficits budgétaires prévus, et proposé une nouvelle évaluation quantitative des risques et de l'incertitude auxquels sont assujetties ces prévisions.
    Il y a quelques semaines, nous avons présenté une analyse portant sur l'expérience canadienne et internationale en matière de règles budgétaires, c'est-à-dire de fermes engagements législatifs et/ou politiques en faveur de compressions budgétaires.
    Nous avons soutenu que les parlementaires pourraient souhaiter amorcer un débat sur la prochaine génération de règles budgétaires au Canada. L'analyse met en évidence la nécessité d'un tel débat afin de traiter de la perspective à long terme des problèmes budgétaires au Canada, d'examiner tous les niveaux de gouvernement dans le contexte de fédéralisme budgétaire, de tenir compte des risques et des incertitudes, et de séparer les aspects conjoncturels et structurels dans l'analyse des prévisions budgétaires du Canada.
    Au cours des prochaines semaines, le DPB rendra publique une analyse des effets de la stimulation budgétaire au Canada, et notamment du Fonds de stimulation de l'infrastructure. Ce travail a pour objet d'estimer les effets économiques à court terme, de surveiller la mise en oeuvre du budget et de dégager des leçons préliminaires pour faciliter les délibérations futures sur les politiques.
    Au printemps prochain, le DPB publiera une mise à jour du rapport sur la viabilité budgétaire. Ce rapport portera sur les mesures budgétaires requises pour assurer la stabilité du ratio canadien dette/PIB non seulement du point de vue fédéral, mais également de celui de l'ensemble des gouvernements.
(1535)

[Traduction]

     Je tiens à mettre en évidence certains messages et certaines observations du rapport rendu public aujourd'hui concernant la situation et les perspectives économiques et financières au Canada.
     L'activité économique canadienne demeure bien en-deçà de son seuil de pleine capacité, c'est-à-dire de son PIB potentiel. Compte tenu de la prévision moyenne du secteur privé et de l'estimation que le DPB a faite du PIB potentiel, on prévoit que l'écart de production diminuera graduellement sur le moyen terme et l'économie atteindra son potentiel à la fin de 2016.
     Bien que le PIB réel ait presque entièrement récupéré les pertes enregistrées entre le premier trimestre de 2008 et le deuxième trimestre de 2009, l'activité économique canadienne demeure bien en-deçà de l'estimation du PIB potentiel du DPB qui s’élève à 2,9 p. 100. Les indicateurs du marché du travail donnent également à penser qu'une part sensible de capacité excédentaire subsiste au sein du marché du travail canadien.
     Bien que l'emploi soit revenu au sommet atteint avant la récession, il importe de reconnaître que le nombre total d'heures de travail demeure inférieur au niveau enregistré avant la récession et de 1,8 p. 100 inférieur à sa tendance. Ce faible niveau témoigne du fait qu'une part disproportionnée des gains récents en matière d'emploi inférieur relève de l'emploi à temps partiel. Le taux de chômage est demeuré à 8 p. 100 au cours du troisième trimestre de 2010, bien au-dessus de la plupart des estimations du taux naturel de chômage.
     L'enquête du ministère des Finances auprès des prévisionnistes du secteur privé de septembre indique que les prévisions concernant le PIB nominal sur le moyen terme - l'indice le plus global de l'assiette fiscale du gouvernement - ont peu changé par rapport aux prévisions sur lesquelles se fonde le Budget de 2010. Toutefois, les prévisionnistes du secteur privé ont révisé sensiblement à la baisse leurs prévisions des taux d'intérêt: sur la période 2011-2014, ils prévoient que ces taux seront, chaque année, en moyenne de 80 points de base inférieurs aux prévisions antérieures.
     Les prévisions à très court terme du taux de chômage ont été légèrement révisées à la baisse, bien que les prévisionnistes du secteur privé prévoient maintenant un taux de chômage légèrement plus élevé sur le moyen terme.
     Le DPB prévoit un déficit de 40,0 milliards de dollars — 2,5 p. 100 du PIB – en 2010-2011, celui-ci passant graduellement à 11,0 milliards de dollars — 0,5 p. 100 du PIB en 2015-2016. Si on ajoute à cela les déficits budgétaires enregistrés en 2008-2009 et 2009-2010, on obtient une augmentation cumulative prévue de la dette fédérale de 200,5 milliards de dollars, ce qui signifie que celle-ci atteindra 658,1 milliards de dollars, ou environ 32,4 p. 100 du PIB, d’ici 2015-2016.
     La réduction projetée du déficit budgétaire sur le moyen terme s'explique en grande partie par une amélioration conjoncturelle de l'économie. Le DPB estime que le déficit structurel du gouvernement ne diminuera que graduellement, atteignant 10,2 milliards de dollars en 2015-2016, soit 0,5 p. 100 du revenu potentiel.
     Malgré le bouleversement du plan budgétaire du Canada qu'a provoqué la dernière récession mondiale, les soldes budgétaires et les niveaux d'endettement canadiens se situent à des niveaux relativement meilleurs que ceux de nos concurrents. De plus, les déficits structurels du Canada sur le moyen terme sont sensiblement moins élevés que les déficits structurels des années 1980 et du début des années 1990. Selon cette perspective comparative, il est juste de dire que les problèmes budgétaires du Canada sont relativement moins graves et plus gérables.
     Toutefois, le fait que le Canada possède des soldes moins préoccupants que ceux de ses concurrents n'autorise pas à conclure que notre structure budgétaire est viable. Pour évaluer la viabilité budgétaire, il faut aller au-delà des prévisions des déficits budgétaires et de la dette sur le moyen terme et prendre en compte les conséquences économiques et budgétaires du vieillissement de la population.
     Dans notre Rapport sur la viabilité budgétaire de 2010, nous avons estimé un écart budgétaire fédéral de 1 p. 100 et de 2 p. 100 du PIB, selon les diverses hypothèses retenues. Cela donne à penser qu'il faudra des mesures budgétaires importantes et soutenues pour assurer la constance du ratio dette/PIB sur le long terme.
     Les parlementaires ne doivent pas ignorer le fait que, plus on tarde à mettre en oeuvre des mesures, plus leur coût budgétaire augmente et que cette augmentation est substantielle.
     Les prévisions budgétaires du DPB, de même que celles de la mise à jour du gouvernement, reposent sur les résultats de l'enquête de Finances Canada auprès des prévisionnistes économiques des organismes du secteur privé. Le DPB et Finances Canada transforment la moyenne des prévisions économiques du secteur privé en une prévision budgétaire, en s'appuyant sur leurs hypothèses propres.
     Le DPB prévoit des déficits qui, en moyenne, sont légèrement supérieurs à ceux que l'on trouve dans le rapport du DPB de mars 2010 et dans la mise à jour du gouvernement, et ce, surtout à cause de charges de fonctionnement plus élevées.
     À cause du manque d'information concernant les charges de fonctionnement faisant l'objet du gel des dépenses, le DPB a postulé que ces charges de fonctionnement croîtront au même rythme que la population et l'inflation, soit en moyenne de 3,2 p. 100, sur la période de 2010-2011 à 2015-2016. Cette hypothèse est sensiblement inférieure aussi bien à la croissance prévue du PIB nominal sur la même période, soit environ 4,9 p. 100, qu'à la croissance moyenne de 6,4 p. 100 observée au cours des 5 années précédant le Plan d'action économique du gouvernement.
(1540)

[Français]

    De l'avis du DPB, la résultante des risques auxquels sont assujetties les prévisions économiques actuelles n'est guère encourageante. Ces risques négatifs comprennent des risques tant extérieurs qu'intérieurs, chacun pouvant avoir un effet négatif important sur la croissance économique à court et à moyen terme.
    Les risques extérieurs sont liés à la conjoncture économique américaine, à l'appréciation récente du dollar canadien, aux tensions monétaires constantes à l'échelle mondiale et aux inquiétudes relatives aux dettes souveraines.
    Ces derniers trimestres, on observe un ralentissement de la croissance du PIB réel des États-Unis, une croissance léthargique de l'emploi et le maintien du taux de chômage bien au-dessus de 9 p. 100. Selon le DPB, la résultante des risques auxquels est assujettie la conjecture américaine est clairement négative, ce qui pourrait avoir un effet important sur l'économie canadienne.

[Traduction]

    Les tensions monétaires entre pays se sont accrues ces derniers mois, ce qui a suscité des discussions sur les dévaluations compétitives et sur les barrières tarifaires. Tout cela pourrait assujettir la conjoncture économique mondiale à des risques négatifs. Un deuxième risque concerne le puissant rebondissement du dollar canadien dont le taux d'appréciation depuis le premier trimestre de 2009 dépasse le taux d'augmentation du prix des produits de base, ce qui limite la croissance.
     Bien que les craintes relatives aux dettes souveraines se soient quelque peu atténuées ces derniers mois, comme le signale le Rapport sur la politique monétaire de la Banque du Canada, publié en octobre 2010, le différentiel de taux d'intérêt demeure élevé pour certains pays européens et un choc négatif risque de provoquer un renouvellement des tensions dans les marchés financiers mondiaux, ce qui entraînerait une hausse des primes de risque qui pourraient exercer des pressions à la hausse sur les taux d'intérêt.
     Les risques intérieurs concernent surtout le niveau élevé d'endettement des ménages canadiens. La dette des ménages a maintenu sa tendance à la hausse, atteignant 147 p. 100 du revenu disponible en 2009, ce qui place les ménages dans une situation vulnérable. Le niveau élevé d'endettement des ménages canadiens limitera vraisemblablement la croissance de la consommation et de l'investissement dans l'habitation au cours de la période de prévision.
     Le rapport du DPB rendu public aujourd'hui propose une nouvelle analyse de la quantification des risques et incertitudes auxquels sont assujetties les prévisions budgétaires au Canada. Il s'agit d'enrichir l'analyse du contexte de planification devant lequel se retrouvent les parlementaires, de faire porter le débat, non plus sur les écarts relativement petits des prévisions de l’équilibre budgétaire à moyen terme, mais plutôt sur une évaluation plus riche de l'incertitude qui tient compte de l'expérience accumulée par les prévisionnistes économiques du secteur privé et du jugement du DPB concernant le risque. Bien que la mise à jour du gouvernement fasse place à un ajustement au titre du risque dans ses prévisions, cet ajustement est, à notre avis, petit et ne tient pas suffisamment compte de l'ampleur des risques négatifs auxquels sont assujetties les perspectives économiques.
     Si les choses demeurent comme elles le sont, selon les prévisions du DPB, la probabilité que le budget soit équilibré ou excédentaire au cours de la période de 2010-2011 à 2013-2014 est effectivement nulle, la probabilité que le budget soit déficitaire en 2015-2016 est de 85 p. 100 et la probabilité que le solde budgétaire de 2015-2016 soit inférieur à l'excédent de 2,6 milliards de dollars prévu dans la mise à jour du gouvernement est de 88 p. 100. Dans ce contexte, les parlementaires pourraient vouloir débattre des rajustements budgétaires appropriés au titre du risque et de l'incertitude, en plus des objectifs budgétaires à moyen et à long terme appropriés concernant les soldes budgétaires et la viabilité budgétaire.
     En conclusion, Le DPB recommande que le gouvernement mette à la disposition de toutes ses analyses des soldes budgétaires corrigés des variations conjoncturelles, de la viabilité budgétaire à long terme et de son évaluation approfondie de l'incertitude et du risque. Les parlementaires et les Canadiens auront ainsi accès aux mêmes possibilités d'analyse que celles que l'on trouve dans beaucoup d'autres pays. Le DPB recommande aussi que le gouvernement fasse preuve d'une transparence supplémentaire concernant l'état du cadre budgétaire, qu'il s'agisse des fonds mis en réserve pour de nouveaux programmes et mesures législatives ou des stratégies ministérielles concernant le gel des charges de fonctionnement.
     Merci de l'occasion que vous nous offrez de vous adresser la parole aujourd'hui. Nous serons heureux de répondre à vos questions.
(1545)

[Français]

    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Merci beaucoup, monsieur Page.
     Nous entendrons maintenant M. Poschmann.
    Merci, monsieur le président, chers membres du comité.
     Bonjour. C’est merveilleux de comparaître de nouveau devant votre comité. C’est un milieu extrêmement accueillant — parfois, en tout cas.
     Comme toujours, j’aimerais rappeler à tous que, bien que je sois président de la Recherche à l’Institut C.D. Howe, je parle en mon nom, et non au nom de mes membres ou du conseil d’administration qui pourraient ne pas être tellement d’accord avec mes propos.
    J'aimerais poursuivre en faisant ressortir quelques points que M. Page a soulevés, dont des points d'entente et des points d'intérêt. Je souhaiterais ensuite les approfondir un peu pour leur donner une orientation politique.
     Premièrement, depuis très longtemps, vous entendez — et vous continuerez d’entendre — les économistes parler d’incertitude. Les prévisions des retombées économiques sont toujours incertaines, surtout à l’heure actuelle. C’est un problème en ce moment pour les personnes responsables du budget parce qu’en dépit d’un certain degré d’incertitude, la prudence financière dont on a fait preuve dans le budget et les perspectives économiques s’élève en moyenne à seulement un milliard de dollars par année sur une période de six ans. Cela représente à peu près un demi-point de pourcentage des recettes, c’est-à-dire très peu. C’est inférieur à la réserve pour éventualités historique et aux sommes consacrées à la prudence économique qui s’élèvent à près de quatre milliards par année. Si l’on examine les années antérieures, cela correspond à environ 2 p. 100 des recettes budgétaires.
     Ce que j’essaie de faire valoir, c’est que c’est sans doute insuffisant dans un contexte économique instable où les projections financières sont susceptibles d’être erronées — et peut-être même grossièrement erronées. C’est l’une des raisons pour lesquelles il est plausible, comme l’a indiqué M. Page, d’envisager les dernières années de l’horizon de planification et de soupçonner qu’il est peu probable qu’elles génèrent des budgets positifs ou équilibrés.
     Par conséquent, ne serait-ce qu’en raison de l’instabilité actuelle, nous avons raison de douter un peu des prévisions économiques et de leur certitude.
     Il existe quelques risques. M. Page en a mentionné quelques-uns, mais je vais en ajouter d’autres. L’un d’eux est que les perspectives supposent que le gouvernement fédéral bénéficiera à long terme d’un taux de financement assez faible. Il se pourrait qu’en raison des taux d’intérêt peu élevés, le gouvernement fédéral puisse épargner deux à trois milliards de dollars par année au chapitre du service de la dette. En ce moment, personne ne s’attend — pas le moins du monde — à ce que les taux d’intérêt augmentent très rapidement, mais il y a assurément un risque que cela se produise. Toutefois, nous prévoyons que les taux d’intérêt en vigueur dans le marché des obligations augmenteront dans l’avenir, et peut-être dans un avenir plutôt proche.
     Quels autres postulats les prévisionnistes du secteur privé ou les économistes du gouvernement fédéral avancent-ils collectivement? Nous présumons que le taux de chômage diminuera assez rapidement et que le marché du travail tournera à plein régime. Encore une fois, cela pourrait bien se produire, mais ce n’est pas chose faite.
     Pour atteindre à peu près l’équilibre budgétaire d’ici 2014-2016, on suppose aussi que le gouvernement n’effectuera aucune nouvelle dépense importante au cours des cinq prochains budgets. Encore une fois, cela pourrait se réaliser, mais c’est un peu un régime-choc. Il faudra que le gouvernement soit très discipliné pour s’y tenir. S’il y parvient tant sur le plan de la planification que sur le plan financier, ce sera formidable, mais cela exigera beaucoup de volonté. C’est ce à quoi servent les budgets, tout comme les régimes. Par conséquent, cet aspect est également important.
     Je remarque aussi qu’en dépit de ces risques, les perspectives du gouvernement fédéral sont relativement positives comparativement à celles des gouvernements provinciaux qui font face à d’importants inducteurs de coûts. M. Page a fait allusion aux pressions que les changements démographiques exerceraient sur les dépenses de santé, en particulier celles découlant de notre société vieillissante — c’est une histoire que nous ne connaissons que trop bien. La plupart de ces coûts échoiront aux provinces, là où bon nombre des dépenses imputables aux changements sociaux et démographiques sont engagées.
     Voilà donc certains des risques qui pèsent sur le processus général d’élaboration des budgets du gouvernement. Ils exerceront évidemment des pressions sur le gouvernement fédéral, surtout en raison des soins de santé et, à compter de 2014, de la nécessité de renégocier l’entente sur le Transfert canadien en matière de santé. À l’heure actuelle, les perspectives financières prévoient que les dépenses de santé s’accroîtront à un rythme assez rapide, mais plus ou moins normal. C’est un problème que nous allons devoir régler d’ici 2014. Cela signifie que les questions de déséquilibre fiscal referont surface d’ici très peu de temps. Il s’agit d’enjeux qui nous sont très familiers.
     En particulier, on se demande qui devra hausser les impôts ou accroître les recettes pour financer ces dépenses de santé croissantes. Est-ce le gouvernement fédéral ou les gouvernements provinciaux? Dans la plupart des cas, le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux occupent la même assiette fiscale. Cela veut dire que lorsqu’on parle d’impôt sur le revenu des sociétés, d’impôt sur le revenu des particuliers et de taxes de vente ou de consommation, les gouvernements fédéral et provinciaux se partagent toutes ces recettes.
     Par conséquent, au cours des prochaines années, des compromis devraient ou doivent, être consentis en matière de marge fiscale, de sorte que l’ordre de gouvernement qui doit effectuer certaines dépenses soit en mesure de hausser les taxes qui les financent.
(1550)
    Après avoir mis le comité en garde contre certains de ces risques et de ces enjeux naissants, je tiens à conclure en formulant quelques recommandations.
     Premièrement, malgré certains des risques en matière de dépenses, nous ou plutôt je ne crois pas que les recettes du gouvernement fédéral courent nécessairement un grand risque. Nous ne voyons aucune raison pour laquelle le gouvernement devrait hésiter à mettre en oeuvre l’allégement fiscal qu’il prévoyait d’offrir aux sociétés. Si on songe à la croissance économique à long terme et à la façon dont l’impôt sur le revenu des sociétés fonctionne, il est probable qu’à long terme, une réduction de l’impôt fédéral, qui s’élève en ce moment à 18 p. 100, aura un effet positif sur les soldes gouvernementaux. En d’autres termes, le fait de réduire d’un point de pourcentage le taux d’imposition du revenu des sociétés de 18 p. 100 en 2010 aura des répercussions positives sur les recettes fédérales — pas nécessairement à court terme, mais assurément à long terme. C’est ainsi que fonctionne l’impôt sur le revenu des sociétés, en raison des incitations à l’investissement et à la croissance et de la façon dont les sociétés ont tendance à réagir lorsqu’on les encourage à investir.
     La même réduction d’impôt sur le revenu des sociétés pourrait profiter aux provinces en raison de la croissance de l’assiette fiscale. La croissance économique stimule aussi la croissance des recettes provinciales. Par conséquent, cette mesure aurait également des effets externes positifs; les provinces prospèrent quand le gouvernement fédéral abaisse son taux d’imposition du revenu des sociétés. Mais cette réduction fait partie d’un plan qui est pratiquement intégré aux perspectives en ce moment, et je pense qu’il serait logique de s’en tenir à ce plan.
     J’aimerais revenir sur l’équilibre qui existe entre le gouvernement fédéral et les provinces et sur ce que certains d’entre nous disaient, il y a un an de cela, à propos de l’équilibre qui doit être maintenu entre l’autorité taxatrice, la marge fiscale que l’impôt sur le revenu des sociétés apporte au gouvernement fédéral et l’espace fiscal offert par l’impôt sur le revenu des particuliers et la taxe de vente.
     Si vous remontez à 2005, j’ai rédigé, en collaboration avec M. Stephen Tapp, un document qui recommandait que le gouvernement fédéral réduise le taux d’imposition du revenu des particuliers et le taux de la TPS de deux points de pourcentage, et qu’il permette aux gouvernements provinciaux de hausser leurs taxes de consommation afin de financer les dépenses de santé qui accompagnent nécessairement leurs programmes. Nous avons franchi une partie des étapes. Nous avons vu le gouvernement fédéral abaisser le taux de la TPS de 2 p. 100. Toutefois, il est important que les provinces emploient l’espace fiscal intelligemment — en d’autres termes, il ne faut pas qu’elles imposent des taxes qui pourraient nuire à l’économie. C’est pourquoi le passage à une taxe de vente harmonisée, qui a été entrepris en Ontario, en Colombie-Britannique, au Québec et dans trois provinces de l’Est et qui remonte jusqu’à 1997, est une bonne chose. Voilà un système fiscal intelligent sur lequel les provinces peuvent s’appuyer davantage. Donc, nous avons permis aux provinces d’utiliser la TVH pour recueillir davantage de fonds et pour financer une plus grande partie de leurs propres dépenses de santé. Ainsi, on presse moins le gouvernement fédéral de recourir à l’impôt fédéral pour financer les dépenses provinciales.
     Par conséquent, il faut que nous commencions à parler davantage de l’équilibre qui doit exister entre l’imposition et les transferts du gouvernement fédéral aux provinces, et de la façon dont les provinces doivent fixer leurs propres taux d’imposition pour financer leurs propres dépenses.
     Sur ce, je remercie le président et les membres du comité.
     Je vous cède la parole.
    Merci beaucoup, monsieur Poschmann.
     Nous allons maintenant entendre M. Burleton.
    Merci beaucoup, monsieur le président. C’est un plaisir d’être ici.
     Nous avons entendu aujourd’hui le Bureau du directeur parlementaire du budget nous communiquer son opinion sur les perspectives financières des cinq prochaines années. Nous vous avons fait parvenir — et, avec un peu de chance, vous avez reçu une copie — de notre tableau fiscal, de notre point de vue, que je vais aborder dans un moment. Si vous ne l’avez pas, je le décrirai qualitativement.
     Mais, d’abord, je tiens à approfondir un peu la question de la dispersion inhabituelle des prévisions du secteur privé. Je pense que cette question est très importante et qu’elle témoigne manifestement de la période extrêmement étrange que nous vivons. Je soutiens que cela continuera d’être le cas dans un avenir prévisible, et cela s’explique de deux façons. Il est évident que nous sortons d’une crise financière très difficile. Nous entendons les banques centrales du monde entier employer l’expression « incertitude plus grande qu’à l’habitude » mais, à mon avis — que bon nombre de gens partagent —, il y a aussi la notion selon laquelle la soi-disant période de grande modération est révolue.
     Pendant les années 1990 et la majeure partie des années 2000, nous avons traversé une période pendant laquelle les gens étaient d’avis que si l’on maintenait le taux d’inflation faible et stable, les cycles économiques seraient moins extrêmes qu’ils l’étaient pendant les années 1980 et avant. Certaines personnes soutenaient que nous avions joui d’un peu de chance. En fin de compte, je pense que les récents développements ont prouvé que la chance avait joué un rôle. Une partie du problème découle du fait que certains de ces développements ont bel et bien incité les gens à prendre davantage de risques. La période de la grande modération est derrière nous et, par conséquent, je pense que nous pouvons nous attendre à vivre des cycles économiques plus longs que ceux que nous avons observés au cours des quelque 15 dernières années et aussi à ce que les marchés financiers soient assujettis à des cycles plus longs.
     Si nous examinons simplement les projections — j’ai examiné les chiffres publiés par Consensus Economic —, nous constatons que les prévisions de la croissance économique des États-Unis pour l’année prochaine varient de 1 à plus de 3 p. 100. La valeur du dollar canadien fluctuera entre 87 ¢US et 1,15 $US au cours de l’année à venir. Les prévisions de la croissance économique canadienne sont moins dispersées que celles des États-Unis; elles oscillent entre moins de 2 p. 100 et plus de 3 p. 100. Le fait est que nous, les prévisionnistes, nous heurtons à des problèmes très difficiles à résoudre, tant sur le plan cyclique que sur le plan structurel.
     En ce qui concerne le cycle, nous parlons des risques externes. Comme je l’ai mentionné, aux États-Unis, il y a, bien entendu, tout cet assouplissement quantitatif… Ces mesures seront-elles efficaces? Il est très difficile de le dire en ce moment. Mais je suis également préoccupé par certains enjeux nationaux, par certains des déséquilibres dont nous avons observé la formation — l’endettement des ménages par exemple. En tant que prévisionnistes, nous nous efforçons de déterminer ce qui adviendra de ces déséquilibres pendant que les taux d’intérêt sont extrêmement faibles, et nous prévoyons qu’ils resteront ainsi à court terme. Ces déséquilibres pourraient s’accentuer. À mon avis, à court terme, ils risquent d’augmenter. Par contre, à long terme, il pourrait y avoir d’importants risques de perte. Je vous donne simplement une idée de la grande importance que revêtent ces questions.
     En ce qui concerne les perspectives à plus long terme, les économistes se retrouvent dans deux camps. Certains d’entre eux croient que rien n’a vraiment changé et que le taux de croissance maintiendra sa tendance à 3 p. 100, ou un peu moins, tandis que d’autres, qui sont dans mon camp, pensent qu’à long terme, la croissance se rapprochera davantage de 2 p. 100.
     En ce qui concerne les changements démographiques, il est évident que la productivité est un élément qui détermine grandement les perspectives à moyen et à long terme. Mais lorsque nous y réfléchissons, la plupart d’entre nous sont un peu réticents à l’idée d’incorporer une accélération de la croissance de la productivité. Nous ne l’avons simplement pas observée dans le passé. Si nous devions dresser une liste des mesures que les gouvernements auraient dû prendre, il y a 15 ans, pour améliorer la productivité, nous constaterions que bon nombre d’entre elles ont été mises en oeuvre — dont, très récemment, la TVH en Ontario et en Colombie-Britannique — et que, pourtant, nous n’avons pas été témoins de cette accélération. Peut-être faut-il plus de temps. Peut-être y a-t-il un délai.
     Donc, même si mes prévisions n’en font pas état, je m’efforce de vous indiquer que les perspectives à long terme comportent aussi des risques de hausse.
     Je présume que vous avez effectivement reçu ces prévisions. Si ce n’est pas le cas, elles se situent entre celles du directeur parlementaire du budget et celles de la mise à jour économique. Nos projections économiques à long terme sont plus pessimistes, parce qu’elles tiennent compte de certains des risques de perte imputables aux changements démographiques. Comme Kevin Page vient de le mentionner, à court terme, je pense que les consommateurs auront du mal à accroître leurs dépenses de consommation de plus d’un très léger pourcentage au cours des trois à cinq prochaines années, alors j’en ai tenu compte. Je me suis servi de nos projections économiques. J’ai laissé telles quelles les dépenses de programme mentionnées dans la mise à jour budgétaire. J’ai supposé que les gouvernements seraient en mesure d’engager ces dépenses.
     Nos projections en matière de taux d’intérêt sont fondées sur nos prévisions des taux d’intérêt. Nous ne prévoyons pas que les taux d’intérêt augmenteront tellement, mais qu’ils s’accroîtront très progressivement jusqu’à ce qu’ils se rapprochent d’un niveau que nous jugeons plus normal. Manifestement, ces projections sur trois à cinq ans comportent des risques. Nous prévoyons que le déficit en 2015-2016 s’élèvera à environ cinq milliards de dollars. Cela représente une réduction de huit milliards par rapport à ce qui est prévu dans la mise à jour budgétaire, et cela met en évidence, encore une fois, nos prévisions plus pessimistes.
(1555)
     Deux dixièmes pour cent ne sont assurément pas un pourcentage élevé du PIB. Je soutiens que, dans cinq ans, ce ne sera pas tellement différent de ce que l’on observe dans le secteur privé. Encore une fois, la façon de calculer les recettes à partir de ces projections est incertaine. Pour calculer les recettes à partir du PIB, nous avons eu recours à une méthode très semblable à celle employée dans la mise à jour budgétaire. Selon nous, c’est la direction que nous prenons.
     Pour conclure, l’une des choses que nous devrons apprendre à cerner dans les plans budgétaires futurs est la dispersion des prévisions qui est plus vaste qu’à l’habitude. Lorsque j’examine le pays, j’observe ce que font les autres gouvernements. J’aime le modèle dont la Colombie-Britannique se sert. Ils font appel à un groupe de prévisionnistes qui se rencontrent annuellement. Dans le budget, ils fournissent un encadré de trois ou quatre pages qui décrit la dispersion des projections du secteur privé. On y retrouve pas mal de détails: les prévisions élevées, les prévisions faibles et tous les groupes qui les ont fournies. Même dans leurs observations, ils parlent de la façon dont ces projections évoluent et de la différence entre elles. Ils nous demandent la probabilité que nous attribuerions à chaque résultat. Donc, si mon cas de base est le suivant, quelle probabilité lui attribuerais-je? Ils tiennent compte de ces réponses dans leurs plans budgétaires. Je dois dire que j’accorderais à mon plan une probabilité moins élevée que je l’aurais fait il y a trois ans. Je dirais qu’il y a peut-être 50 p. 100 des chances que ces résultats, ce cas de base, se réalisent, alors qu’il y a peut-être quelques années, j’aurais dit que sa probabilité s’élevait à 60 ou 70 p. 100. Encore une fois, je pense que, compte tenu de l’importante dispersion des prévisions et des observations formulées par les autres intervenants, il serait utile de procéder à d’autres analyses du budget, d’examiner les répercussions que ces prévisions pourraient avoir sur le budget.
     Je vais m’arrêter ici.
     Merci.
(1600)
    Je vous remercie beaucoup de votre exposé.
     Madame Webb, allez-y.
    Merci, monsieur le président, de m’avoir invitée à témoigner aujourd’hui.
     J’aimerais me faire l’écho du thème de l’incertitude ainsi que de l’instabilité qui, à notre avis, continuera de régner tant dans le marché des changes que dans les marchés financiers. Le Canada a initialement connu une telle reprise économique que nous commençons seulement à mesurer le présent ralentissement. En fait, après avoir enregistré un taux de croissance réelle de 3 p. 100 cette année, nous prévoyons que, l’année prochaine, il se situera aux alentours de 2,25 p. 100, alors que la croissance américaine lui sera inférieure de 0,25 p. 100. Cela signifie qu’en fait, la croissance du PIB nominal pourrait avoir du mal à atteindre de 4 à 4,5 p. 100 et qu’il est très peu probable qu’elle atteigne 5 p. 00.
     En tant que petite économie, le Canada a un certain nombre de points forts, et je mentionnerais notre richesse en ressources et la solidité des bilans de nos entreprises qui est nettement supérieure à celle enregistrée pendant les périodes de reprise économique précédentes. Mais nous devons aussi procéder à de nombreux ajustements, en particulier dans le centre du Canada et, bien entendu, en Ontario où nous avons vu des secteurs comme l’industrie forestière et l’industrie automobile être réduits de manière permanente. Donc, nous devons nous réorganiser dans un monde maintenant dominé par la croissance des nouvelles économies.
     En ce qui concerne les États-Unis, j’appuie complètement l’opinion de mes collègues. Son économie est en grande difficulté. Nous ignorons quel effet, positif ou non, le deuxième assouplissement quantitatif aura non seulement sur la croissance réelle et la création d’emplois, mais aussi sur le dollar américain et, finalement, sur la voie que prendra l’inflation à mi-mandat. Nous craignons aussi que plus les Américains retardent la mise en oeuvre d’un plan global de redressement budgétaire, plus la correction sera sévère.
     Je pense que la menace du protectionnisme, que ce soit au moyen d’une dévaluation concurrentielle de leur monnaie ou autrement, pèsera sur nous pendant plusieurs années à venir. En même temps, les pays se dépêchent en ce moment de signer des accords commerciaux bilatéraux avantageux. C’est pourquoi notre cadre commercial mondial est complètement en train de changer.
     Finalement, le Canada a vraiment profité non seulement de nos propres mesures nationales de stimulation, mais aussi des plans de relance monétaire et budgétaire qui ont été mis en oeuvre simultanément à l’échelle mondiale. Nous allons maintenant nous heurter à plusieurs années pendant lesquelles les nations se rétabliront à différents rythmes et de différentes manières, élimineront graduellement les stimulants financiers et entreprendront un redressement budgétaire. Nous n’avons jamais vécu un tel redressement budgétaire simultané des pays développés et à une telle échelle auparavant. Par conséquent, nous ne savons pas vraiment quelle incidence ces mesures auront les unes sur les autres.
     À l’échelle nationale, nous croyons fermement — parce que nous sommes convaincus que le dollar américain continuera de fléchir — que, d’ici la deuxième moitié de 2011, le dollar canadien atteindra la parité de manière durable et, selon nous, s’échangera probablement au pair en 2012 et 2013. Notre industrie a appris à s’accommoder d’un dollar à 95 ¢US, mais pas d’un dollar qui pourrait valoir 1,05 $US.
     Au cours du deuxième trimestre de 2010, le volume de nos exportations représentait 86 p. 100 du sommet précédent enregistré au cours du deuxième trimestre de 2007. En passant, lorsque ce sommet a été atteint, nos exportations s’élevaient à 99 p. 100.
     Le fait que les ménages canadiens vont devoir ralentir la croissance de leur crédit et réduire leurs dépenses nous préoccupe également. Si nous examinons l’une des mesures, soit le ratio d’endettement, nous constatons qu’il atteint des records. En fait, il se rapproche maintenant du niveau américain qui a baissé. En raison d’une série de circonstances imprévues qui se sont produites au moment où nous sortions de la récession, les Canadiens ont été grandement incités à emprunter. Si nous avons raison, cela signifie que nous allons faire face à un marché du logement beaucoup moins dynamique et à des consommateurs canadiens beaucoup plus prudents au fur et à mesure que les provinces et le gouvernement fédéral s’efforcent de rétablir leur bilan.
     Le directeur parlementaire du budget a établi un parallèle dont je me souviens. Si vous examinez la deuxième moitié des années 1990, de 1997 à 2000, vous constaterez qu’il s’agissait d’une période de développement économique dynamique qui a facilité les progrès des provinces et du gouvernement fédéral en matière de rétablissement budgétaire. La croissance réelle se chiffrait à 4,4 p. 100, la croissance du PIB nominal s’élevait à 6,5 p. 100, le dollar canadien était toujours très faible et les taux d’intérêt avaient diminué tout au long des années 1990. Cette période était particulièrement propice à l’achèvement du processus de rétablissement. Je ne pense pas que les prochaines années vont nous être aussi favorables.
(1605)
     Par conséquent, nous sommes heureux que la mise à jour automnale du gouvernement tienne au moins compte d’un certain niveau d’incertitude et du fait que la croissance du PIB nominal pourrait bien être inférieure à la moyenne établie par le secteur privé.
     Je pense qu’il vaudrait la peine que vous envisagiez un scénario où, comme nous le craignons, cela se produirait pendant plusieurs années. Donc, au lieu de connaître une croissance réelle d’en moyenne 2,7 p. 100 de 2011 à 2015, la moyenne pourrait être considérablement inférieure à 2,5 p. 100, disons 2,25 p. 100. En fait, le déflateur du PIB est moins de 2 p. 100.
     C’est pourquoi le PIB nominal que nous avons calculé pour la dernière année de la mise à jour s’élève à quelque 50 milliards de dollars de moins que celui du gouvernement, tout comme celui de la Banque TD.
     En réfléchissant à cela et en songeant, par conséquent, à la trajectoire établie par le gouvernement fédéral, nous avons toujours considéré que le budget de 2015 serait équilibré. Notre conclusion repose sur le fait qu’on ne peut pas mettre en oeuvre un redressement budgétaire draconien en raison de la fragilité de la reprise économique canadienne, américaine et mondiale et du fait qu’il faut prendre des mesures pour tirer parti de cette période où les taux d’intérêt sont faibles.
     Donc, il me semble que le gouvernement a prévu rajuster son plan de réduction budgétaire d’une année à l’autre. Il y aura donc une longue période pendant laquelle les dépenses de programme seront considérablement réduites, ce qui contrastera énormément avec les cinq années qui ont précédé le budget de 2008 et représente seulement une fraction de ce que nous avions prévu. Donc, puisque nous envisageons peut-être d’ajuster annuellement la réduction des dépenses de programme, je me rappelle des principes qui ont été exposés par le Royaume-Uni. À l’heure actuelle, le Royaume-Uni entreprend un programme d’austérité économique beaucoup plus sévère que le nôtre, mais ses dirigeants n’ont cessé de recourir aux principes d’équité et de réforme, afin de veiller à jeter les assises d’une croissance à long terme.
     En ce qui concerne le dernier principe, nous approuvons l’idée que vous mettiez en oeuvre les réductions de l’impôt sur le revenu des sociétés que vous avez planifiées. Comme cela a été mentionné, les recettes des provinces et du gouvernement fédéral en bénéficieront à long terme et, comme l’économie du Canada est petite et ouverte, ce genre de mesures nous ouvrira davantage au commerce et aux investissements étrangers qui sont extrêmement importants.
     Merci.
     Je vous remercie beaucoup de votre exposé.
     Les membres vont commencer à vous poser des questions. Monsieur Brison, vous disposez de sept minutes.
(1610)
    Je vous remercie tous pour les exposés que vous nous avez donnés aujourd’hui.
     Monsieur Page, dans votre rapport vous confirmez que le Canada accuse maintenant un déficit structurel. Quelle incidence une réduction du taux d’imposition du revenu des sociétés, de l’ordre de trois points supplémentaires, aura-t-elle sur nos objectifs en matière de déficit et sur notre plan pour rétablir l’équilibre budgétaire?
    Dans nos projections, nous avons tenu compte de la réduction de l’impôt sur le revenu des sociétés au cours des prochaines années. Donc, cette mesure est intégrée à nos projections tant du déficit structurel que de l’équilibre budgétaire global.
    Si nous ne mettions pas en oeuvre les réductions de l’impôt sur le revenu des sociétés, rétablirions-nous l’équilibre budgétaire plus rapidement?
    D’après l’évaluation sommaire qui a été faite et la règle qu’utilise le ministère des Finances, pour chaque point que l’on soustrait du taux d’imposition des sociétés prévu par la loi, les recettes sont réduites d’à peu près 1,5 à 2 milliards de dollars, en fonction du niveau de revenu des sociétés.
     Donc, oui, s’il est question de trois points, les recettes perdues pourraient osciller entre 5 et 6 milliards de dollars, ou plus.
     Au Canada, nous parlons de permettre à l’économie d’atteindre son plein potentiel en 2016 et de réduire le déficit structurel à environ 11 milliards de dollars. Cela ne comblerait pas complètement l’écart, mais cela aiderait.
    Dans votre rapport, vous dites que « la structure financière actuelle n'est pas viable à long terme ».
    M. Poschmann a fait allusion aux changements démographiques, au vieillissement de la population, aux problèmes de productivité et à l'accroissement des coûts de soins de santé dont il faudra tenir compte dans les négociations sur les transferts en matière de santé.
    Y a-t-il un risque que de nouvelles réductions de l'impôt des sociétés ne soient pas viables? Risque-t-on de devoir l'augmenter pour payer ou éliminer le déficit au cours des cinq prochaines années?
    Nous estimons que la structure financière actuelle du Canada n'est pas viable à long terme. Il nous faudra donc la modifier pour la rendre plus viable.
    Dans le cadre des travaux que nous avons effectués au début de l'année, monsieur, pour notre rapport sur la viabilité financière, nous avons fait des prévisions et examiné ces questions, à savoir la productivité, le taux de croissance et les tendances de la main-d'oeuvre; en fonction des hypothèses liées aux transferts, dont M. Poschmann a parlé, on observe un écart financier pour le Canada qui varie entre un et deux points de pourcentage du PIB.
    Là où je veux en venir, monsieur, c'est que pour maintenir un ratio dette-PIB stable d'environ 33 p. 100, tout en tenant compte du vieillissement de la population et des données démographiques pour les 75 prochaines années, il faudrait des interventions budgétaires de l'ordre de un à deux points de pourcentage du PIB.
    Quand on parle de 2015-2016, on prévoit une économie de 2 billions de dollars. Chaque point de PIB correspond grosso modo à 20 milliards de dollars; il faut donc maintenir ce niveau, monsieur, pour éliminer l'écart financier. C'est un calcul que d'autres pays font régulièrement et, en fait, ils sont obligés de le faire en vertu de la loi.
    Dans votre rapport, vous dites également que le DPB a demandé de plus amples informations concernant la façon dont le gouvernement entend réaliser son gel sur les charges de fonctionnement au cours de la période de projection. Toutefois, le gouvernement a indiqué que cette information relève d'un document confidentiel du Cabinet et qu'elle ne sera pas rendue publique.
    Vous êtes un mandataire du Parlement. Nous sommes des parlementaires et, au bout du compte, c'est le Parlement qui tient les cordons de la bourse du gouvernement. C'est le rôle qu'assume le Parlement en matière de reddition de comptes. Pouvez-vous expliquer au comité pourquoi, d'après vous, le gouvernement ne vous fournit pas — à vous et, par ricochet, au Parlement — l'information particulière que vous avez demandée?
    Au fond, nous avons demandé qu'on nous fournisse les niveaux de référence planifiés sur cinq ans pour les ministères, de pair avec les répartitions appropriées — budget de fonctionnement, immobilisations, transferts, etc. — pour que nous puissions en fait améliorer notre processus de prévision des dépenses.
    De plus, nous voulions obtenir cette information pour pouvoir, en quelque sorte, entreprendre une analyse à l'intention des parlementaires sur la question de savoir si un gel soutenu des charges de fonctionnement présente un risque budgétaire ou un risque du niveau des services.
    Nous avons demandé, à plusieurs reprises, qu'on nous fournisse les niveaux de référence s'étalant sur cinq ans. Le Comité des opérations gouvernementales et des prévisions budgétaires a également déposé une motion à cet effet pour que nous puissions entreprendre cette analyse.
    Au début du mois dernier, le comité a adopté quatre motions demandant que Finances Canada nous fasse part des coûts prévus pour les chasseurs F-35, les réductions d'impôt pour les sociétés et les mesures législatives des conservateurs en matière de criminalité. Croyez-vous que la réponse du ministère à ces motions était suffisamment adéquate pour nous permettre d'évaluer pleinement ces questions?
    Eh bien, on nous a demandé d'effectuer une analyse financière concernant les F-35. Cette analyse est en cours. Nous espérons présenter un rapport aux parlementaires avant Noël. Pour répondre à votre question, je dirais que plusieurs questions demeurent sans réponse relativement aux coûts et qu'il y a de l'incertitude au sujet des F-35.
    Quant aux autres questions soulevées, comme le rapport sur le G8 et le G20, nous avons fait à l'avance des travaux pour les parlementaires.
    Il est vrai que nous n'avons pas vu, dans le budget de 2010 ou dans la mise à jour budgétaire, les ajustements qui ont été vraiment apportés au cadre financier pour ces dépenses. Selon moi, il y a de l'incertitude. Mais je pense qu'à ce stade-ci, le travail relève de la vérificatrice générale qui devra, en quelque sorte, passer en revue les reçus. Je ne suis pas sûr ce que nous pourrions apporter de plus dans ce dossier.
    Pour ce qui est des taux d'imposition des sociétés, nous pourrions faire quelques travaux pour déterminer les coûts approximatifs. Notre modèle d'imposition des sociétés laisse à désirer. Nous pourrions travailler avec Statistique Canada. Nous avons fait ce genre de prévisions dans le passé. Nous pourrions effectuer des estimations brutes. Je pense que le ministère des Finances en a déjà exposé les grandes lignes dans l'énoncé de 2000 lorsqu'il a annoncé des réductions de l'impôt sur le revenu des sociétés. Il y a donc un peu d'information.
    Quel était le quatrième point?
(1615)
    Il vous reste 30 secondes.
    Ah oui, ça concernait les projets de loi sur la criminalité. Je suis désolé, monsieur.
    Nous attendons toujours de l'information sur les projets de loi sur la criminalité. Nous n'avons pas eu de chance parce que nous n'avons pas pu obtenir de renseignements au moment d'établir les coûts liés à la Loi sur l'adéquation de la peine et du crime.
    Vous n'avez pas eu de chance. Voulez-vous dire qu'on ne vous a pas donné...?
    Nous n'avions aucune information, monsieur.
    Mais vous en avez fait la demande.
    Tout à fait. En fait, nous avons demandé de l'information sur le contexte pour comprendre comment les coûts avaient été établis. Nous n'avons pas pu obtenir...
    Quand avez-vous demandé cette information?
    Eh bien, c'était dans le cadre de nos travaux sur la Loi sur l'adéquation de la peine et du crime, que nous avons commencés vers la fin de l'automne 2009 et, comme vous le savez, nous avons déposé le rapport en juin.
    C'est donc dire que vous attendez, depuis l'automne 2009, de l'information sur l'établissement des coûts liés à certaines de ces mesures législatives.
    Il s'agit en l'occurrence, monsieur, de la Loi sur l'adéquation de la peine et du crime, l'ancien projet de loi C-25. Il y a plusieurs autres projets de loi. Nous n'avons reçu aucune information sur eux non plus.
    D'accord. Merci.
    Merci, monsieur Brison.
    Monsieur Paillé, s'il vous plaît.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je suis un peu mal à l'aise d'avoir à discuter du rapport de M. Page et de ses collègues, et d'avoir à mêler cela avec des « commerciaux » de deux banques à charte et l'exposé d'un individu, parce que les conjoncturistes nous ont entraînés dans une espèce de prévision stratosphérique, à mon avis. Tout le monde sait que les prévisions sont pour les conjoncturistes ce qu'un lampadaire est pour une personne soûle: ça soutient plus que ça éclaire.
    À long terme, on va tous être morts. Aussi, je pense que la prévision que je peux vous faire, mesdames et messieurs, c'est que vous vous trompez. C'est sûr que dans quatre ou cinq ans, on va revenir ici et on va dire que les chiffres de TD ou de M. Poschmann ou ceux du Groupe Banque Scotia n'étaient pas bons. Mais ce n'est pas l'important, ici, et c'est pour cela que je reviens à M. Page, avec qui, puisqu'il représente les parlementaires, on essaie de travailler.
    En fait, vous manquez d'information. Pour moi, c'est très important, car vous dites que le gouvernement a une façon de gérer qui fait en sorte que, du côté de ses revenus, il va suivre sa politique fiscale très conservatrice en maintenant les allègements fiscaux des entreprises. Des économistes nous disent que ce sera rentable à long terme. Mais oui!
    En même temps, on a un gouvernement qui, du côté des dépenses, nous montre — le passé est garant de l'avenir — son incapacité à contrôler cela. En plus, il ne vous donne pas accès à l'information, ce qui m'inquiète.
    Vous dites que vous devez prendre un 3,2 p. 100 pour hypothèse de croissance. Je trouve cela valeureux, de votre part, d'avoir cette hypothèse. Tout n'est pas faux, dans ce que vous avez dit, il y a des choses intéressantes. Par contre, je m'interroge. Comme on pige dans la même assiette fiscale, cela nous montre que le déséquilibre fiscal n'a jamais été réglé, au Canada. Les deux niveaux de gouvernement pigent dans les poches des mêmes contribuables. Le danger, à l'heure actuelle, on le voit dans l'entente sur la santé que le ministre veut reprendre en disant que, dans les prochaines années, il va baser cela sur l'indice des prêts à la consommation plutôt que sur les besoins de main-d'oeuvre. Cela n'a rien à voir.
    N'avez-vous pas l'impression, malgré le fait que vous n'ayez pas ou peu d'information, que ce gouvernement est en train de pousser la neige chez le voisin, avec la seule différence que la neige ne fond pas et que les gouvernements des provinces vont se retrouver de plus en plus avec des déséquilibres énormes qui seront ingérables?
(1620)
    À mon avis, il est nécessaire de faire des analyses pour examiner la viabilité fiscale non seulement du gouvernement fédéral, mais aussi des gouvernements provinciaux.
    Dans notre premier rapport, celui sur la viabilité fiscale de 2010, nous avons examiné seulement le gouvernement fédéral. Comme je l'ai dit tout à l'heure, dans notre prochain rapport, peut-être en février ou mars, nous sommes déterminés à examiner le gouvernement d'une façon consolidée, donc tous les niveaux gouvernements.
    Comme le disait M. Poschmann, il y a des questions importantes, à savoir quelle est la croissance des transferts en matière de santé. Dans le cadre fiscal actuel, il y a une hypothèse de 6 p. 100 par année; c'est une grande partie de notre budget, comme l'a dit M. Burleton quand nous avons parlé d'un taux de croissance du PIB de 2 p. 100.
    Donc, il serait important que nous ayons une discussion à cet égard. Cependant, il serait important que notre bureau et, peut-être, le ministère des Finances préparent de bonnes analyses pour examiner la fiabilité fiscale de tous les gouvernements.
    On représente des comtés. En ce qui concerne les besoins de la population, on peut dire que ce sera deux, deux et demi, deux et trois quarts, deux et sept huitièmes. C'est la tendance qui est importante, mais ce ne sera pas la même chose partout. La croissance économique en Alberta ne sera pas la même qu'au Québec. Dans ce cas, n'a-t-on pas l'impression que ce serait beaucoup mieux que le gouvernement dégage de la place, des points d'impôt, des taxes complètes? Il ne suffit pas qu'il en donne la moitié ou qu'il en garde les trois quarts. Il devrait donner au gouvernement du Québec et à ceux des autres provinces les moyens d'assumer leurs responsabilités.
    Oui, je suis d'accord: la situation peut changer. Toutefois, peut-être que la chose la plus importante est d'avoir des analyses claires, afin de déterminer quelles sont les hypothèses pour le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux. Et s'il est possible de faire de bonnes analyses de viabilité fiscale pour chaque province, quelles sont les hypothèses?
     Alors, il ne s'agit pas seulement de faire une projection; c'est l'hypothèse qui est vraiment importante.
    En ce qui a trait aux données statistiques, justement, n'avez-vous pas l'impression que le gouvernement, le ministère des Finances, vous empêche d'avoir de bonnes données? À plus long terme, avec les formulaires tronqués de recensement, les données ne seront plus très viables.
    Nous sommes préoccupés par le niveau de transparence relativement aux questions portant sur des dépenses opérationnelles, des dépenses directes de programmes. Par ailleurs, en ce qui concerne le ministère des Finances et ses fonctionnaires, je n'ai aucun doute qu'il est très possible pour eux de faire de bonnes analyses.
    C'est évident. Je suis d'accord avec vous, il y a du bon monde.
    Merci, monsieur Paillé.
    Monsieur Menzies.

[Traduction]

    Merci, monsieur le président.
    Merci à tous nos témoins.
    Merci encore une fois, monsieur Page, d'être accompagné de votre personnel très compétent. Nos questions s'adressent surtout à vous, alors n'hésitez pas à mettre à profit vos vastes connaissances.
    J'ai une question très sérieuse à vous poser. Dans votre déclaration préliminaire, vous avez dit qu'en 2015-2016, il y a 85 p. 100 de chances que le budget soit déficitaire et 88 p. 100 de chances que le solde budgétaire soit inférieur à 2,6 milliards de dollars.
    Je ne regarde pas trop la télé, mais il y a une publicité accrocheuse: quelles sont mes chances d'être enlevé par des extraterrestres?
    Je blague évidemment, mais quand vous avez mentionné ces statistiques dans votre déclaration préliminaire, je me suis dis qu'il fallait y donner suite.
    À mon sens, monsieur Page, vos prévisions correspondent beaucoup à notre mise à jour économique de l'automne. La seule différence serait les dépenses de programme. Nous partageons votre ferveur, si vous voulez, pour ce qui est d'assurer le retour à des budgets équilibrés, et nous apprécions ce commentaire. Mais si vos prévisions s'appuyaient sur les mêmes dépenses que les nôtres, ce serait presque semblable. J'aimerais connaître votre avis là-dessus.
    Le point sur lequel je voulais revenir, c'est votre recommandation que le ministère des Finances utilise ses propres prévisions économiques dans notre processus de planification budgétaire, au lieu d'utiliser celles d'individus, c'est-à-dire des 15 conseillers du secteur privé. C'est ce que nous faisons depuis 1994.
    Dans le dernier budget, il y avait un écart de 100 milliards de dollars dans le PIB prévu. Nous sommes maintenant passés à un écart de 50 milliards de dollars. Alors, la volatilité est une chose très importante quand on examine ce genre d'écarts.
    Ce processus de prévisions — ou de collecte d'information, si vous voulez — a été recommandé par Ernst & Young en 1994. O'Neill Strategic Economics a réaffirmé la méthode en 2005, qui a aussi été appuyée par le FMI. Pour quelles raisons proposez-vous que les ministère des Finances s'en tienne à ses propres prévisions et que nous ne consultions pas les experts à l'extérieur du ministère?
(1625)
    Merci.
    Monsieur, nous n'avons pas de modèle pour calculer les probabilités que vous soyez enlevé par des extraterrestres.
    Des voix: Oh, oh!
    Pourriez-vous vous en occuper?
    Blague à part, je voudrais revenir sur trois des points que vous avez soulevés: l'évaluation des risques, la grande ressemblance entre nos prévisions et celles du ministère des Finances, ainsi que la question des prévisions indépendantes.
    En fait, je pense que le point le plus important, c'est la question des risques et comment nous nous y prenons — mis à part la question de savoir si, oui ou non, nous allons être enlevés par des extraterrestres. Il est important de savoir — et je pense que M. Paillé a, lui aussi, soulevé ce point — que les économistes ne sont pas des mystiques. Dans le journal d'aujourd'hui, il y avait une citation de M. Galbraith qui disait que les économistes font des prévisions non pas parce qu'ils connaissent la réponse, mais parce qu'on leur demande de le faire.
    Je pense qu'ils sont payés pour ça. Du moins, c'est ce qu'on espère.
    Non, monsieur, ce n'est pas ce que je voulais dire.
    À mon avis, la raison pour laquelle le DPB effectue ces prévisions pour vous et la raison pour laquelle nous faisons des rapprochements et toutes les analyses connexes, c'est pour vous fournir un contexte de planification riche en informations et vous permettre de débattre des politiques et des priorités à court, à moyen et à long terme. Voilà pourquoi nous faisons ces prévisions, et il y a toujours des doutes.
    Quand nous construisons ces graphiques en éventail pour examiner des probabilités et des répartitions — un outil utilisé dans différentes parties du monde, comme aux États-Unis et maintenant au Royaume-Uni, sans oublier les banques centrales qui s’en servent pour l’inflation —, nous jetons essentiellement un regard rétrospectif. Quelle a été la feuille de route des prévisions du secteur privé par rapport à la prévision moyenne? Les données dont nous disposons s’étendent sur une période de 16 ans. Nous effectuons quatre enquêtes par année. Quels sont nos antécédents pour ce qui est des prévisions sur un, deux, trois, quatre, cinq ans? Nous tenons à ce que vous connaissiez cette information, monsieur, parce qu’elle fait partie de la richesse du contexte dans lequel vous travaillez. Nous ne pouvons que faire des prévisions. Nous sommes honnêtes à ce sujet.
    Ensuite, je pense que vous devriez nous demander ce que nous pensons du risque. Comment fait-on face aux enjeux que pose une économie américaine potentiellement faible? Ce sont des questions dont on a parlé aujourd'hui, notamment les risques de la monnaie dans le contexte de la deuxième série d'assouplissement quantitatif ou les questions liées au risque de crédit souverain, à l’endettement des ménages... Comment s'adapte-t-on à cette répartition des probabilités de résultats? Voilà à quoi se résume notre travail ici. Alors, nous essayons de vous fournir un milieu riche en information.
    Pour évaluer le déficit en 2015-2016, comme Derek l'a dit aujourd'hui... la différence entre 5, 10 et 15 milliards de dollars dans une économie de 2 billions de dollars n'est pas vraiment le noeud du problème. Le but, c’est de déterminer les priorités stratégiques.
    Encore une fois, nous n'avons pas de modèle pour prévoir si nous allons être enlevés par des extraterrestres, mais il est important de comprendre les risques inhérents et notre capacité de les surveiller et de faire des prévisions.
    Par ailleurs, vous avez tout à fait raison, monsieur, de dire qu'il y a très peu de différence entre les chiffres du ministère des Finances. Si vous regardez le solde budgétaire — en fait, si on le répartit et qu'on examine les recettes et les dépenses sur une période de cinq ans —, la différence est négligeable sur le plan des recettes. En ce qui concerne les dépenses, vous avez souligné de grandes différences dans les dépenses de fonctionnement. Il y a quelques écarts dans les frais de la dette publique. Mais tout compte fait, si on additionne le tout sur une période de cinq ans, on obtient probablement une dette cumulative d’un peu plus de 30 milliards de dollars. Alors, la différence n'est pas énorme.
    Je le répète: pour nous, ce n'est pas la question la plus importante. Vous voulez comprendre les risques qui entourent ces chiffres. Nous voulons que vous compreniez si c’est de nature cyclique ou de nature structurelle. Avons-nous une structure financière viable? Alors, quand nous soulevons ces points, monsieur, nous avons besoin de plus d'analyses. Ce n'est que dans un tel contexte que vous pourrez débattre de ces questions.
    Pour ce qui est des prévisions indépendantes, j'ai fait cette observation en réponse à une question qu'on a posée. Les prévisions indépendantes devraient être la norme. Je ne suis pas le ministre des Finances. Il a un travail très difficile à faire. Je ne suis pas un député. Mais je pense qu'il y a une certaine rigueur dans les prévisions indépendantes — et je crois ces gens le savent. Que se passe-t-il dans chaque secteur de l'économie dans tel ou tel trimestre? On s'occupe du moyen terme. C'est donc utile. En l'absence d'une telle rigueur, on perd des données. Nous ne voulons pas perdre ce que nous faisons. Nous travaillons avec les prévisions moyennes du secteur privé. Nous voulons garder cela. Si le ministère des Finances tient à avoir son point de vue, c'est correct. Mais je crois que, tôt ou tard, le DPB devrait, lui aussi, avoir son point de vue sur l'économie et comparaître à des séances de ce genre pour vous le présenter.
(1630)
    Merci, monsieur Menzies.
    Merci, monsieur le président.

[Français]

    Monsieur Mulcair, vous avez la parole.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je vais d'abord m'adresser à Mme Webb, qui a fait plus tôt une déclaration qui m'a quelque peu surpris. Elle a dit ceci:

[Traduction]

    « Notre industrie a appris à s'accommoder d'un dollar à 95 ¢US... »

[Français]

    Je vais me permettre de lui lire une citation de Statistique Canada datant du 16 août 2007:
L'économie canadienne n'est pas atteinte du syndrome hollandais [...] les Pays-Bas ont fait la découverte de nouvelles ressources, tandis que le Canada fait maintenant face à l'intégration des économies des nations émergentes [...]
    En 2009, soit à peine deux ans plus tard, Statistique Canada a été obligé de faire volte-face. Dans un document intitulé « Tendances de l'emploi manufacturier », Statistique Canada disait ceci:
[...] l’emploi manufacturier a entrepris une tendance baissière très nette, enregistrant des pertes annuelles successives d’au moins 3 % de 2005 à 2008.
    Donc, deux ans plus tard, ils faisaient une analyse complètement différente.
Au cours de ces quatre années, c’est plus d’un emploi manufacturier sur sept qui a été perdu.

Ces pertes ont eu pour conséquence l’érosion rapide de la part de l’emploi manufacturier dans l’économie.
    On nous dit de plus que 322 000 emplois ont disparu, au Canada, pendant cette période.

[Traduction]

    Est-ce ainsi que notre industrie a appris à s'accommoder, c'est-à-dire en perdant 322 000 emplois? Est-ce là votre analyse? Est-ce la position officielle de la Banque Scotia sur la question, à savoir la perte de 322 000 emplois comme moyen de s'accommoder?
    Tout d'abord, c'est mon opinion personnelle, et non pas celle de la Banque de Nouvelle-Écosse.
    D'accord, je vous arrête ici. Merci. Si nous allons entendre votre opinion personnelle et non pas celle de la Banque de Nouvelle-Écosse, je vais m'adresser à M. Page.
    J'abonde dans le même sens que M. Poschmann. Je ne suis pas ici pour entendre les opinions personnelles des gens, mais celles d'une institution. Si vous n'êtes pas ici pour représenter votre institution, alors je vous remercie de votre temps.

[Français]

    Monsieur Page, vous avez déjà eu l'occasion de dire que la situation dans laquelle on se trouve à l'heure actuelle est une question de choix. Dans des rapports antérieurs, vous avez déjà dit que le gouvernement est en train de faire des choix qui produisent ce résultat. Vous avez parlé, par exemple, de la réduction des impôts des grandes sociétés qui, par définition, bénéficiaient seulement aux sociétés les plus riches, puisqu'une compagnie forestière, manufacturière, qui était sur le qui-vive et ne faisait pas de profits, évidemment, ne payait pas d'impôt, donc, ne pouvait pas bénéficier d'une réduction de ses impôts.
    J'aimerais connaître votre point de vue sur les dépenses de programme dont il est question ici, dans les présentations de quelques-uns de vos collègues qui disent prévoir des dépenses de programme à un niveau donné. Le choix du gouvernement de maintenir ou non les dépenses de programme aura-t-il un effet déterminant sur l'économie? Si oui, comment calculez-vous les risques que cela représente?
    De notre côté, nous croyons qu'il y a fort à parier que les conservateurs, face à un déficit qu'ils ont créé eux-mêmes, diront que la solution est de couper radicalement dans les dépenses de programme.
     Alors, j'aimerais connaître votre analyse des résultats possibles d'un tel choix, et que vous nous disiez s'ils priorisent cela, puisque c'est à notre tour de faire une prévision.
    Le gouvernement a fait des choix. Il a décidé de faires certaines dépenses pour certains programmes comme, peut-être, de modifier le Code criminel. Il y a un impact sur les dépenses de programme, mais c'est un choix du gouvernement. Ce n'est pas un choix, à mon avis, que le Bureau du directeur parlementaire du budget peut vraiment examiner.
    Il est important, pour notre bureau, d'examiner les niveaux de dépenses et de voir s'ils sont raisonnables, s'il y un risque — le gouvernement en parle — que soit gelé le niveau de dépenses opérationnelles afin de réaliser des épargnes. Pour nous, ce n'est pas vraiment une question de choix. À partir des choix du gouvernement, nous analysons les chiffres, sans tenir compte du reste.
(1635)
    Bien entendu. On a toujours respecté cela et je pense que vous avez toujours fait preuve de prudence. Vous ne vous aventurez pas sur le terrain des choix politiques, c'est certain. Vous mesurez pour nous les résultats probables des choix que vous voyez.
    Un autre terme qui a été employé ici aujourd'hui est « priorité ». Alors, si la priorité demeure ce qu'elle est en ce moment, des résultats sont probables. Mais si la priorité devient d'agir en réponse à une crise appréhendée qu'ils auront eux-mêmes créée...
    Quand on accorde au total 60 milliards de dollars de réductions d'impôt aux sociétés les plus importantes et qu'on vide le coffre de l'assurance-emploi qui, en temps de grand chômage, est vide, ce sont des choix. Cet argent a été mis là par toutes les sociétés, celles qui perdaient de l'argent comme celles qui en gagnaient. Mais la priorité étant d'accorder une aide aux grandes sociétés les plus rentables, il y a fort à parier — et c'est notre boulot, comme politiciens — que les choix seront une réduction « mur à mur » des dépenses de programme, de la même manière qu'ils ont accordé des réductions d'impôt « mur à mur » pour les sociétés les plus rentables, sans prioriser la création d'emploi, sans prioriser la productivité « mur à mur ». Il y a fort à parier qu'on verra des coupes « mur à mur ». Ils ne le savent pas, ça ne les intéresse pas de gérer.
     Alors, je voulais savoir de votre part, sans vous inviter à vous immiscer dans ces choix, quelle est la conséquence probable d'une coupe « mur à mur » dans les dépenses de programme. Le gouvernement essaiera de la présenter comme quelque chose de positif: on réduit. Mais quels sont les impacts négatifs possibles d'un tel choix sur la société, selon votre point de vue?
    Notre bureau a la possibilité d'examiner les questions de risque fiscal de même que les questions de risque liées aux services pour le public. Cependant, il est nécessaire que nous ayons certains renseignements pour calculer ces niveaux de risque. Comme je l'ai dit, nous n'avons pas l'information nécessaire pour examiner des questions de risque fiscal, des questions de risque pour les services et les conséquences pour les Canadiens.
    Monsieur le président, je vais terminer en remerciant encore M. Page pour son analyse pondérée, qui nous aide toujours énormément.
    Tout comme mon collègue M. Paillé, je suis désolé d'entendre de nouveau qu'il lui manque de l'information, car il représente une institution qui a été créée, bien sûr, pour aider les parlementaires, mais aussi, par notre intermédiaire, pour aider le public canadien. Le fait que son travail soit toujours limité par le refus de lui fournir l'information à laquelle il a droit nous empêche de faire notre travail et, surtout, prive le public d'une information capitale.
    Je vous remercie à nouveau, monsieur Page, vous êtes un extraordinaire serviteur du public.

[Traduction]

    Ce point a été soulevé par plusieurs collègues, et je tiens à clarifier, pour les députés, la motion exacte qui a été adoptée à l'unanimité.
    Concernant la motion de Massimo Pacetti, il a été convenu:
Que le Comité invite Kevin Page, directeur parlementaire du budget, ainsi que des économistes du secteur privé à comparaître pendant deux heures devant ses membres le mercredi 3 novembre 2010, afin de discuter des plus récentes mise à jour économique/projections financières du gouvernement, et de tout autre sujet lié à son cadre financier ou à ses projections de revenus et de dépenses.
    Je pense que nous devons toujours nous efforcer de traiter avec respect nos invités et nos collègues. La présidence a bel et bien invité des témoins à comparaître aujourd'hui. Le greffier a évidemment communiqué avec eux, et je ne crois pas que les députés aient fait des suggestions quant aux économistes du secteur privé.
    Mais à l'avenir, si le comité souhaite que M. Page comparaisse séparément, veuillez en faire part à la présidence qui veillera à ce qu'il en soit ainsi. Ensuite, la présidence organisera une séance avec M. Page et une autre avec les économistes du secteur privé.
     En tant que président, j'ai tout simplement rempli le souhait exprimé dans la motion présentée par M. Pacetti et adoptée par le comité. Je voulais simplement souligner ce point aux députés.
    M. Mulcair invoque le Règlement.
    Je tiens à préciser, monsieur le président, que nous n'avons aucun problème à écouter des témoins qui représentent des institutions et qui nous exposent le point de vue de ces institutions. Toutefois, à nos yeux, il y a une grande différence entre une personne qui témoigne à titre personnel ou une personne qui représente une institution.
    On nous les présente comme étant des témoins qui représentent une institution, mais on nous apprend ensuite que ce n'est pas le cas et on nous donne leurs noms... Je préfère simplement m'en tenir aux propos du témoin qui est ici à titre de représentant d'une institution, à savoir M. Page.
    Ce n'est pas par manque de respect. Si c'est l'impression que j'ai donnée, je vous présente toutes mes excuses, monsieur le président — à vous et au comité.
(1640)
    Merci de soulever ce point. Je vous en suis reconnaissant.
    Mais d'après ce que je crois comprendre, et veuillez me corriger si j'ai tort, Mme Webb représente la Banque Scotia et M. Burleton représente le Groupe financier Banque TD.
     Ai-je raison?
    Elle a dit le contraire quand je lui ai posé la question. Elle a dit qu'elle parlait à titre personnel et que ses opinions ne représentent pas celles de la Banque Scotia.
    Madame Webb, pouvez-vous nous donner des précisions?
    J'imagine que je me suis trompée.
    Lorsque j’ai parlé du dollar à 95 ¢, je faisais allusion au fait qu’il y a 15 ans, alors qu’on parlait du dollar qui allait atteindre 90 ou 92 ¢, des études ont conclu que des secteurs comme notre industrie des pièces automobiles ne pourraient pas survivre si le dollar dépassait la marque des 85 ou 86 ¢ et qu'un dollar à 88 ¢ serait impossible. Il ne fait aucun doute que notre secteur manufacturier a été fortement touché et que notre dollar lui a fait mal. Cependant, ce secteur a su améliorer sa rentabilité et trouver des créneaux qui lui ont permis de continuer.
    J’ai écrit sur ce sujet et sur la restructuration de l’Ontario. Donc, c’est ma recherche. Vous avez raison, à savoir que je l’ai faite au nom de la Banque Scotia. Je n’aurais probablement pas dû répondre aussi rapidement que c’était ma recherche, mais ce l’était. Toutefois, je représente bien la Banque Scotia.
    Merci à tous.
    La parole est maintenant à M. Szabo.
    Monsieur Page, vous avez commenté la situation du plan de relance économique. Vous sous-entendiez qu’il y avait des risques qu’un fort pourcentage de ses projets ne soit pas réalisé d’ici mars 2011.
    Votre opinion à cet égard a-t-elle changé? Pourriez-vous nous donner une idée des conséquences, dans le pire des cas, sur les emplois et le PIB?
    Je répondrai en premier, puis demanderai à M. Sahir Khan de compléter.
    Comme je l’ai mentionné, nous publierons dans quelques semaines une étude qui se penchera sur la relance en général du point de vue des effets macro-économiques. Cela comprendra aussi une vue d'ensemble des municipalités qui ont obtenu de l'argent dans le cadre du Fonds de stimulation de l'infrastructure. L'étude examinera la création d'emplois et l'efficacité de la mise en oeuvre du programme. Elle devrait être mise à la disposition des parlementaires dans les prochaines semaines.
    Nous avons également reçu des données, qui datent maintenant un peu, d’Infrastructure Canada en ce qui concerne le Fonds de stimulation de l’infrastructure. Il s’agit des données du rapport d'étape en date du 30 juin. Donc, nous mettrons à jour nos prévisions, monsieur, en ce qui concerne le nombre de projets qui courent peut-être le risque de ne pas être terminés. Encore une fois, les données sont assez vieilles, et nous préparerons une étude.
    Monsieur Khan, j'aimerais que vous nous disiez où vous en êtes rendu à cet égard.
    Nous sommes actuellement en train de nous affairer à la publication du rapport. Normalement, lorsqu’on le reçoit du ministère, nous sommes en mesure de le publier dans les 10 jours suivants environ.
    D’accord, soit.
    Selon ce qu’on entend jusqu’à présent, les nouveaux emplois sont en très grande partie des emplois à temps partiel. Cette information vous donne-t-elle des éléments qui vous permettent d’évaluer en quelque sorte la force de la reprise économique dans le secteur de l’entreprise?
    Autant le secteur de l’entreprise et en général… Les renseignements contenus dans notre graphique traitent de l’économie dans son ensemble et du total des heures de travail, du nombre moyen d’heures de travail hebdomadaires. Nous avons des graphiques qui montrent notre position par rapport au sommet atteint à l'automne 2008 et la position où nous devrions nous trouver selon sa tendance.
    En gros, si on regarde les heures, on a l’impression d’être vraiment en deçà de la tendance. Nous sommes bien en deçà de ce sommet. Nous accusons encore un retard de 2 points de pourcentage pour ce qui est du total des heures. Cela indique que la production de la main-d'oeuvre qui doit permettre de maintenir une économie forte est actuellement assez faible. Ce qui se cache aussi derrière cela, c’est que cela vient confirmer notre analyse, à savoir que lorsqu’on examine la prévision pour le secteur privé et qu’on regarde notre prévision de la production potentielle, nous remarquons un écart de production, en ce moment, en date du deuxième trimestre, de probablement 2,9 p. 100, presque 3 p. 100 en deçà du potentiel et qui ne sera pas comblé avant 2016. Donc, lorsque vous penserez aux interventions gouvernementales nécessaire à inclure dans le prochain budget, vous devriez tenir compte du fait que notre économie opère actuellement bien en deçà de sa capacité et que l'écart se comblera très graduellement.
    Notre économie est intimement liée à celle des États-Unis, et tout le monde dit qu’il y a de très graves problèmes. Que se passera-t-il? Si notre devise s'apprécie en raison principalement de notre secteur des ressources naturelles et que les deux devises se trouvent à parité ou que nous dépassions peut-être la devise américaine, à quel moment, au bout de combien de temps, commencera-t-on à en ressentir les effets dans le secteur manufacturier qui souffre de la force de notre devise?
    Cela vient peut-être compléter le point soulevé plus tôt par M. Mulcair. Au cours des dernières années, nous avons vu les effets qu’une devise forte pouvait avoir sur la production et le volume net des exportations du secteur manufacturier du point de vue de la croissance. C’est presque simultané: les changements dans l’économie américaine ont un effet presque immédiat dans notre économie. Donc, lorsque nous voyons la faiblesse, elle est ressentie très rapidement. Lors de la forte appréciation de la devise canadienne en 2007, nous avons remarqué une importante faiblesse de notre secteur manufacturier.
(1645)
    D’accord. Je serai bref. En ce qui concerne l'objectif de 2015, tout le monde dit que la donne peut changer — la volatilité —, mais pour le prochain exercice, tout le monde s’accorde pour dire que la croissance du PIB sera moins importante que ce qui est prévu dans la mise à jour économique du gouvernement.
    Lors de la période de questions, le ministre a dit que le plan se trouvait dans la mise à jour économique. Comprenez-vous le plan du gouvernement et comment il en est arrivé à ces chiffres? Et pourquoi les taux de croissance du PIB sont-ils beaucoup moins élevés dans votre prévision?
    Vous avez 30 secondes.
    Je ne sais pas si le gouvernement a un plan qui vise réellement un taux de croissance précis pour l’économie canadienne. Vous avez raison; je crois que la croissance moyenne prévue par le secteur privé se chiffre cette année à 3 p. 100 pour le PIB réel, et chute à 2,5 p. 100 l’année prochaine. Selon moi, le gouvernement a un plan, pour le dire ainsi, pour réduire le déficit. Je ne sais pas s’il a un plan pour s’assurer d’atteindre une croissance précise l’année prochaine d’environ 2,5 p. 100.
    Merci.

[Français]

    Monsieur Carrier, c'est à vous.
    Bonjour, mesdames et messieurs. Je vais adresser mes questions à M. Page, que je suis heureux de revoir.
    Vous êtes notre conscience financière fiable du gouvernement. Il est donc important qu'on recueille vos commentaires et qu'on puisse obtenir certaines réponses à nos questions.
    Ce qui m'intéresse — mon collègue a abordé la question plus tôt —, c'est que votre prochain rapport tiendra compte non seulement du point de vue du fédéral, mais également de celui de l'ensemble des gouvernements des provinces.
    Personnellement, je crois que c'est une belle avenue pour essayer de clarifier plusieurs gestes posés par le gouvernement central qui ne sont pas coordonnés. Prenons l'exemple de l'harmonisation de la taxe, qui est accordée à certaines provinces, mais ce n'est pas encore réglé pour le Québec, quoique plusieurs pensent que cette taxe est harmonisée. Je pense que c'est ce qu'avançait M. Burleton tout à l'heure. On voit qu'il y a des tractations particulières faites par un gouvernement central.
    On peut penser aux revenus d'Hydro-Québec qui ne sont pas traités de la même façon que ceux d'Hydro One, en Ontario. En Ontario, ils ne sont pas considérés comme des revenus du gouvernement, contrairement au Québec. Ça influence donc le paiement de péréquation et sa fameuse formule de calcul.
    L'approche que vous proposez va-t-elle aider à harmoniser les actions du gouvernement? Serez-vous en mesure de cibler des traitements particuliers qui ne sont pas recommandables et de suggérer plutôt d'avoir des politiques fédérales pour l'ensemble du pays?
    Dans notre prochain rapport, qui va traiter de la viabilité fiscale des gouvernements fédéral et provinciaux, nous nous examinons la structure fiscale du gouvernement fédéral et nous partons de l'hypothèse que les gouvernements provinciaux veulent maintenir cette structure. Nous faisons des calculs, nous examinons la question du vieillissement de la population, nous émettons des hypothèses sur la productivité de toutes les provinces, nous calculons un écart fiscal pour le gouvernement fédéral et nous faisons un autre calcul pour les gouvernements provinciaux. Nous sommes en train de déterminer s'il est possible d'examiner séparément toutes les provinces, par exemple le Québec, l'Ontario, la Colombie-Britannique, etc.
    Nous verrons ce qu'il en est, selon les résultats de notre analyse. Il est difficile de dire pour le moment si ce sera vraiment possible. À mon avis, il est vraiment important de faire des calculs de ce genre, de s'assurer que tous les parlementaires ont l'information et peuvent mener un bon débat sur les transferts en matière de santé de même que sur les transferts sociaux.
    Avez-vous déjà approché les provinces pour vous assurer de leur intérêt à vous fournir de l'information? Elles le feraient peut-être mieux que le gouvernement fédéral.
(1650)
    Non, mais comme je l'ai dit, nous faisons des calculs pour le gouvernement fédéral. Nous avons publié une étude que nous rendrons disponible cette année. Pour notre équipe ici présente, il est très difficile de tout faire en même temps. Le but, aujourd'hui, est d'améliorer les outils qui nous permettent d'examiner les questions de risque et les projections fiscales. Pour nous, le prochain grand projet sera l'examen de la viabilité fiscale. Nous allons commencer demain.
    Si je comprends bien, vous n'avez pas encore approché les provinces pour leur demander si elles veulent collaborer aux études que vous allez mener.
    Nous examinons le type d'études à faire pour toutes les provinces. La viabilité fiscale des provinces n'implique pas maintenant beaucoup de calculs. À mon avis, notre projet est très important.
    Chris a peut-être quelque chose à ajouter. Non? D'accord.
    Comme je l'ai mentionné plus tôt, j'espère que ça va mettre en lumière les inégalités de traitement du fédéral à l'égard de certaines provinces. Est-ce un aspect que votre rapport va faire ressortir?
    Oui, mais il va nous falloir travailler avec tous les experts, et certainement avec ceux du Québec.
    D'accord. Merci.
     Merci, monsieur Carrier.

[Traduction]

    Monsieur Wallace, s’il vous plaît, pendant cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    J’aimerais remercier nos témoins de leur présence cet après-midi.
    Monsieur Page, M. Brison hochait la tête de haut en bas à tout ce que vous disiez, et je crois que vous disiez, entre autres, que nous devions examiner nos perspectives financières et que, si nous voulons vraiment rétablir l'équilibre budgétaire, nous devrions sabrer les dépenses. J’ai hâte de voir les propositions que fera le Parti libéral à cet égard dans le cadre du présent processus budgétaire. Je crois me souvenir qu’il faisait partie du Cabinet lorsque son parti était aux prises avec le scandale des commandites libérales à la Chambre des communes et je suis persuadé qu’il comprend l’enjeu des documents confidentiels du Cabinet que vous avez dit avoir du mal à obtenir.
    J’ai une question à vous poser, puis je passerai aux économistes. Je suis d’accord avec vous pour dire que la tâche n'est pas facile et qu'il faut examiner divers aspects. Je présume que la ligne directrice émanant de votre bureau sera, si nous devons sabrer les dépenses des programmes, que vous offrirez aussi de réduire vos dépenses, dans le prochain budget, pour aider le gouvernement.
    Monsieur, j’ai passé une année complète à me battre afin de récupérer mon budget. Il a fallu deux ans pour faire approuver mon plan de RH.
    Votre réponse est-elle non?
    Si vous êtes insatisfait du rendement du bureau du DPB...
    Je ne suis pas insatisfait du rendement de quiconque dans la fonction publique, mais je crois que tout le monde doit mettre la main à la pâte. C’est tout ce que j’ai à dire.
    Notre budget est gelé à 2,8 p. 100.
    Oui, il est gelé, mais cela ne veut pas dire pour autant qu’il ne peut pas être réduit.
    Ce n’est pas une menace; c’est la réalité.
    J’ai deux questions, dont une est adressée à mes amis des banques. Vous avez parlé de l’endettement des ménages comme d'un problème. Ma question a deux volets: comment le gouvernement peut-il améliorer la situation de l’endettement des ménages, du point de vue des politiques? Les banques n’en sont-elles pas un peu responsables? Selon moi, la majorité des gens obtiennent leurs fonds des banques et des sociétés de cartes de crédit, et je crois que les deux vous concernent. J’aimerais avoir des réponses à mes questions.
    Ensuite, monsieur Poschmann, à votre tour — espérons que nous aurons le temps — au sujet des taux d'imposition du revenu des particuliers que vous avez mentionnés, existe-t-il une meilleure façon de les modifier? Est-ce des changements au niveau du seuil ou du pourcentage? Qu’en pensez-vous?
    Ce sont mes questions.
     Il vous reste deux minutes et demie.
    Monsieur Burleton.
    Oui, je pourrais commencer.
    Nous avons publié un rapport sur l’endettement des ménages il y a deux ou trois semaines, et c’était une étude assez poussée. J’ai été étonné du manque de recherche dans le domaine. Nous avons donc mené notre étude, et je crois qu’elle est assez réussie, mais je ne suis peut-être pas objectif.
    On met beaucoup l’accent sur le ratio de la dette au revenu. À mon avis, lorsqu’on regarde une statistique moyenne, nous devons toujours nous demander si nous avons un portrait complet de la situation. Donc, l’étude parle assez en détail des actifs, du ratio d’endettement, de l’endettement par rapport à la valeur nette et de bon nombre d’autres éléments, comme la capacité à rembourser la dette. Nous examinons certaines données que la Banque du Canada examine aussi.
    Nous concluons que nous n'avons pas encore atteint les niveaux critiques. À mon avis, nous avons beaucoup de raisons de croire que nous ne sommes pas dans la même situation difficile que les États-Unis. Nous ne sommes pas allés jusqu'à utiliser les mêmes pratiques de prêts risquées au cours de la croissance du marché de l'immobilier. Cela étant dit, il ne fait aucun doute que bon nombre de Canadiens ont profité des taux d’intérêts extrêmement bas, mais je ne crois pas que beaucoup aient tenu compte du fait que les taux d’intérêt reviendront un jour à leur niveau normal.
    Donc, une bonne partie du rapport est davantage axée sur l’avenir.
    En fonction de ces taux d'intérêt hypothétiques, à quoi la dette ressemblera-t-elle? Honnêtement, je suis très inquiet de voir que les taux hypothécaires sont à leur plus bas niveau et de constater que les emprunts pourraient se poursuivre, même si nous avons...
(1655)
    Existe-t-il une politique que le gouvernement fédéral pourrait mettre en oeuvre pour commencer à renverser la situation? La réponse peut être non, mais j'ai besoin d'une réponse.
    Eh bien, je devais expliquer un peu le contexte.
    Eh bien, je vous remercie de votre initiative, mais il ne me reste que 10 secondes.
    D'accord. J'arrivais de toute manière au fait.
    Actuellement, selon moi, nous devons faire preuve de prudence avant de mettre en place une politique à l'échelle fédérale, en partie en raison du ralentissement dans le marché de l'immobilier. Si la croissance dans ce secteur reprend, on devra alors examiner certains éléments. Bien entendu, on pourrait regarder les règles pour l'obtention d'hypothèques — la SCHL et les autres assureurs hypothécaires et les types de règles pour l'obtention d'hypothèques. Toutefois, je suis d'accord avec vous; les banques ont leur lot de responsabilités. Règle générale, nous devons pousser nos recherches et comprendre les conséquences de ces marges de crédit. Je crois qu'il incombe aussi aux banques de regarder s'il s'agit de la première maison du client, parce que, dans ce cas, il achète généralement une assurance hypothécaire, ou si le client opte plutôt pour une marge de crédit. Du point de vue des banques, à mon avis, il nous incombe d'analyser plus en détail les renseignements et de voir ce qu'il en est.
    Malheureusement, nous devrons revenir aux autres questions dans une prochaine série de questions.
    Monsieur Pacetti, s'il vous plaît, pendant cinq minutes.
    Merci, monsieur le président. Merci à nos témoins d'être ici.
    Monsieur Page, j'ai une question à vous poser rapidement. Je siège à ce comité depuis six ou sept ans. J'en ai d'ailleurs déjà été le président. On recevait autrefois des spécialistes indépendants des prévisions économiques, et il a toujours été difficile d'obtenir des estimations. Puis-je vous demander de nous expliquer, en termes simples, en quoi consiste votre travail exactement? En quoi est-il différent de celui des prévisionnistes économiques? Le principe de base semble être de déterminer l'augmentation des revenus du gouvernement en fonction du pourcentage de la croissance prévue, et c'est tout, puisque nous ne pouvons pas savoir ce qui va être dépensé. Et même quand on établit des budgets, ils ne sont pas respectés. Au moins, avec les gouvernements libéraux, quand le budget n'était pas respecté, c'est qu'on avait dépensé moins que prévu. Le gouvernement actuel semble trop dépenser, alors nous avons le même genre de problèmes, mais en sens inverse.
    Donc, voici ma première question. En quoi votre travail de directeur parlementaire du budget est-il différent de celui des prévisionnistes économiques qui sont assis à votre droite?
    Merci de me poser la question.
    Notre travail est en fait assez différent. Ce que nous faisons se rapproche beaucoup plus de ce que fait le ministère des Finances. En fait, la plupart des témoins ici présents ont travaillé pendant de nombreuses années au ministère des Finances.
    Ce que nous faisons, et c'est le cas depuis environ deux ans, c'est que nous commençons avec les prévisions moyennes du secteur privé. Nous utilisons les évaluations du ministère des Finances, et à l'aide de modèles, nous les transposons en prévisions fiscales. Nous faisons ensuite la ventilation des revenus par catégorie, et nous faisons de même pour les dépenses.
    Alors les revenus sont sensiblement les mêmes. Peu importe qui les calculent, que ce soient les prévisionnistes, le ministère des Finances, ou quelqu'un d'autre. Tout est proportionnel, en fonction de ce que sera la croissance. Est-ce exact?
    Eh bien, il est important, lorsque vous parlez de...
    Je simplifie les choses.
    Oui. Il est important de faire les rapprochements. Il faut comprendre l'écart entre nos chiffres, par exemple, et ceux du ministère des Finances, pour avoir une idée des revenus projetés pour l'économie. À quoi ressemblent les revenus personnels au ministère des Finances dans ses prévisions quinquennales? À combien se chiffrent les impôts sur le revenu des sociétés? Et ainsi de suite. Nous pouvons ensuite faire le rapprochement entre nos deux prévisions. Nos modèles sont toutefois très semblables. La différence, c'est que nous n'entrons pas autant dans les détails, particulièrement en ce qui a trait aux dépenses de programme. C'est de ce côté que nous faisons pression.
    Au cours des six derniers mois, pour quels secteurs n'avez-vous obtenu aucune formation?
    Je crois que la réponse à cette question se divise en deux volets. Le premier, c'est lorsque que nous faisons nos prévisions économiques et fiscales. Nous avons tenté d'obtenir des détails auprès du ministère des Finances à propos des parts de revenus, et il...
     Cela n'a rien à voir avec les politiques ou avec le secret ministériel, n'est-ce pas?
    Non. Comme nous l'avons dit souvent, ce genre d'information était communiquée aux prévisionnistes du secteur privé dans le passé, alors que le calcul des prévisions fiscales se faisait différemment. Cela nous a posé problème dernièrement. Nous travaillons avec le comité des opérations gouvernementales et des prévisions budgétaires sur les prévisions quinquennales des dépenses de programme.
(1700)
    Et il s'agit uniquement de programmes qui ont été annoncés.
    Oui. Les fonds ont été approuvés dans le cadre des budgets. Il faut toujours tenir compte des dépenses en cours d'année dans les prévisions. Ce que nous voulons connaître, ce sont les niveaux de référence approuvés sur cinq ans pour chacun des ministères.
    Pour ce qui est de l'autre volet, notons qu'il y a des difficultés au niveau de l'établissement des coûts des politiques. Notre petit bureau a travaillé fort pour faire l'établissement des coûts des politiques entourant la mission canadienne en Afghanistan, l'infrastructure éducative autochtone, et la Loi sur l'adéquation de la peine et du crime.
    Nous sommes en pleine consultations prébudgétaires. Nous convoquons des témoins qui sont en mesure d'établir le coût de nos propositions. Le ministère des Finances semble quant à lui avoir de la difficulté à établir les coûts de quelques-unes de nos propositions; on remarque donc une certaine incohérence.
    Je comprends que vous soyez frustrés de ne pas obtenir l'information demandée. Le comité a aussi déjà essayé d'avoir des estimations du ministère des Finances avant de formuler une recommandation, et on nous a remis des estimations aberrantes. Et cela a été la même chose, en fait de variances, pour quelques-uns des projets de loi d'initiative parlementaire.
    Dans votre troisième paragraphe, vous nous dites qu'il y a aussi des problèmes structurels, comme la faible productivité, le vieillissement de la population et les déséquilibres budgétaires. M. Burleton a parlé de l'endettement des ménages. Est-ce aussi de cela dont vous parlez?
    Non. M. Burleton voudra sans doute parler plus en détail de l'endettement des ménages et comment elle pourrait éventuellement nuire à la croissance économique. Nous faisions plutôt référence au déficit structurel. Quand on examine les déséquilibres fiscaux, tout comme les autres pays, nous faisons la distinction entre ce qui est cyclique et ce qui est structurel. Si vous avez un problème d'ordre structurel, cela signifie que vous accuserez des déficits même lorsque l'économie sera revenue à son plein potentiel. Selon nous, ce ne sera pas le cas avant 2016.
    Alors, vous l'incluez à votre déséquilibre fiscal?
    C'est exact.
    Merci, monsieur Pacetti.
    Madame Brown, c'est à vous.
    Merci, monsieur le président.
    Merci beaucoup pour vos présentations d'aujourd'hui.
    Je suis ici en tant qu'invitée du comité, alors je vous remercie de me permettre de prendre la parole.
    Contrairement à d'autres membres du comité, j'aimerais beaucoup entendre ce que nos économistes ont à dire.
    Monsieur Poschmann, ma première question s'adresse à vous. Nos représentants des banques voudront peut-être aussi formuler des commentaires, car elles fournissent probablement du crédit.
    J'ai lu les livres des comptes publics qui ont été publiés l'autre jour. Certains diront que je n'ai pas une vie très palpitante, mais comme j'ai étudié dans le domaine de l'économie, c'est quelque chose qui m'intéresse.
    Dans les quelques premières pages, j'ai remarqué un graphique circulaire qui montre que 47  p. 100 des revenus du gouvernement sont tirés des impôts sur le revenu, et 13 p. 100 des impôts sur le revenu des entreprises. On envisage de réduire les impôts sur le revenu des entreprises afin de créer de l'emploi, c'est-à-dire de créer des emplois bien rémunérés dans notre économie. Quel impact est-ce que cela aura sur les revenus du gouvernement à ce niveau? Que se passera-t-il si nous ne réduisons pas les impôts sur le revenu des entreprises? Tim Hortons a réimplanté son siège social au Canada en raison des réductions fiscales. Qu'est-ce que cela va signifier pour les autres entreprises qui songent à investir ici?
    Si vous me le permettez, j'aimerais répondre à cette question, monsieur le président.
    Merci à l'honorable député de me l'avoir posé.
    Je travaille pour un groupe de recherches sur les politiques publiques, un groupe non partisan et à but non lucratif, et à ce titre nous publions des documents sur une vaste gamme de sujets. Parfois, nous publions des rapports qui présentent les vues divergentes des spécialistes qui écrivent pour nous. La semaine dernière, par exemple, nous avons publié un rapport en deux parties. La première soutenait que la Banque du Canada devrait publier ses prévisions du taux d'intérêt, en vue des années à venir. Dans la seconde partie, on expliquait que la Banque du Canada ne devrait pas publier ses prévisions du taux d'intérêt, en rétrospective des années passées. Il y a des arguments valides des deux côtés. Nos publications portent généralement sur des questions économiques.
    Pour ce qui est des taux d'imposition, cependant, les rapports publiés par l'institut, y compris les miens, sont assez unanimes sur la question. On croit que les Canadiens de tous les revenus pourraient nécessairement tirer profit de la création d'un milieu à faible charge fiscale — un milieu favorable à l'investissement, à la croissance et à la création d'emplois. C'est à cela revient un régime à faible charge fiscale: établir la base de la façon la plus large possible, la plus simple possible, et imposer les entreprises des différents secteurs de façon très similaire.
    De la même façon, si on veut déterminer comment traiter les impôts sur le revenu des particuliers, en ce moment, parce que les allocations familiales sont établies selon le revenu familial, les familles ayant un revenu assez faible sont quand même s'assujetties à des taux d'imposition réels plutôt élevés. Autrement dit, une famille qui a des enfants à charge et dont le revenu se situe entre 40 000 et 70 000 $ par année n'aura pas droit aux allocations familiales, et cela pourrait l'exposer à des taux d'imposition réels assez élevés. C'est un problème pour les ménages, et à notre avis, il n'est pas avantageux en général de pénaliser durement les familles qui augmentent leurs revenus en leur retirant leurs allocations familiales. Il faut se demander ce qui est bon pour les revenus, pour les familles, de même que pour la croissance.
    Nous sommes assez convaincus que la réduction des taux d'imposition profite aux investissements, aux entreprises et aux ménages.
(1705)
    Monsieur Burleton.
    Vous avez environ une minute, monsieur Burleton.
    Nous sommes certainement en faveur de la création d'un avantage fiscal pour le Canada. Un défi auquel est confronté notre pays, c'est qu'il s'agit d'un marché plus petit que celui des États-Unis et de beaucoup d'autres grands pays à l'échelle internationale. Si nous pouvons créer un meilleur environnement, cela aidera certainement à remédier aux problèmes de productivité à long terme. Évidemment, en tant qu'économistes, nous avons mis de côté cette notion selon laquelle alléger la dette et réduire les impôts est la solution à tout. Mais le coût des investissements est toujours un élément très important.
    Avec les mesures prévues, tant au niveau niveau fédéral que provincial, c'est ce qui va se produire au cours des prochaines années. En moyenne, le taux effectif marginal d'imposition aux États-Unis se situera à la moitié du nôtre, et cela constitue un incitatif assez intéressant, surtout si la valeur du dollar canadien est à la hausse. Selon nos prévisions, la valeur du dollar canadien va continuer à grimper, alors ce sera un autre obstacle à franchir.
    Merci.
    Merci.
    Monsieur Pacetti, nous vous écoutons.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Page, pour revenir à ce que vous nous disiez à propos des déséquilibres fiscaux, je crois que vous nous indiquiez qu'il y avait un risque associé à certains de ces éléments, s'ils sont cycliques ou structurels.
    Ce sont des problèmes de nature structurelle. Comme les spécialistes ici présents vous l'ont dit aujourd'hui, la croissance de la productivité a été très faible au cours des 10 dernières années au Canada: la productivité multifactorielle, négative; la productivité du travail, une croissance annuelle très faible au cours des 10 dernières années. Nous avons aussi fait référence au vieillissement de la population; c'est un problème de nature structurelle. La population en âge de travailler en ce moment croît à un rythme d'un peu plus d'un pour cent par année, et au cours des 15 prochaines années, ce pourcentage chutera de plus de la moitié. À mesure que vieillira la population, cela aura d'importantes répercussions sur le facteur travail au pays et sur la production potentielle, sur les revenus, et même sur les facteurs de dépenses.
    Il y a ensuite le problème du déséquilibre fiscal. Le Canada accuse un léger déficit structurel en ce moment, environ 1 p. 100, qui chutera à 0,5 p. 100 au cours des cinq prochaines années. C'est un faible pourcentage en comparaison à ce que nous avons vu à la fin des années 1990 et au début des années 1980, alors que le déficit structurel se chiffrait à quelque 5 ou 6 p. 100; c'est aussi peu par rapport au déficit qu'accusent d'autres pays en ce moment. Toutefois, le déficit structurel, si on pense à long terme, va en fait augmenter en raison du vieillissement de la population.
    Comment est-ce qu'on en tient compte dans les prévisions du gouvernement? Calcule-t-on que les revenus vont diminuer, ou doit-on prévoir des impondérables dans nos dépenses?
    Si on jette un oeil aux registres en matière d'équilibre fiscal, qu'on examine les chiffres du directeur parlementaire du budget ou ceux du gouvernement... Dans notre cas, monsieur, vous parliez d'un déficit estimé à 40 milliards de dollars pour 2010-2011, qui passerait à 11 milliards en 2015-2016. Nous pouvons dégager les éléments que nous jugeons cycliques ou structurels. Ce que nous disons, c'est que nous sommes aux alentours de...
    Qui peut faire cette analyse?
    Nous faisons cette analyse, monsieur, et nous connaissons les analyses du ministère des Finances, parce que nous y avons tous travaillé pendant de nombreuses années.
    Mais vous ne savez pas où en est l'analyse du ministère par rapport à la vôtre?
    Eh bien, en ce moment, le ministère ne nous fournit pas d'estimations sur les éléments cycliques et les éléments structurels. On ne nous fournit pas de calculs sur la viabilité fiscale, et nous pensons que le ministère serait en mesure de le faire.
    Monsieur Burleton, puis-je vous demander rapidement si dans les chiffres qui se trouvent sur votre feuille, les 45 milliards de dollars pour 2010-2011, vous faites la distinction entre ce qui est cyclique et ce qui est structurel?
    Oui, nous tenons compte des éléments structurels et cycliques. Le cycle...
    Est-ce que vous publiez vos...
    Non, nous n'avons pas fait la ventilation dans cette analyse. À court terme, il est surtout question d'éléments cycliques, mais vers 2013-2014, les influences structurelles sont plus marquées.
    D'accord, et c'est ce dont vous parliez aussi en ce qui concerne l'endettement des ménages...
    Oui. À notre avis, l'endettement des ménages suit la très modeste croissance des dépenses des consommateurs, et nous en avons tenu compte dans notre...
(1710)
    On en a tenu compte dans les données démographiques, et cela devrait paraître dans vos estimations structurelles. Mais est-ce que ce sera rendu public quand vous publierez vos calculs?
    Selon nous, la croissance structurelle, d'ici 5 à 10 ans, se situera à environ 2 p. 100, et les dépenses des consommateurs seront aussi à 2 p. 100 environ.
    Le ministère des Finances devrait pouvoir fournir ces données au directeur parlementaire du budget, à votre avis. N'est-ce pas...
    J'ai toujours cru que plus d'information...
    ... à moins que le ministère n'ait quelque chose à cacher?
    Très bien.
    Monsieur Page, dans vos remarques préliminaires, vous avez indiqué que l'activité économique du Canada est encore bien en-deçà de son seuil de pleine capacité. Sur quoi fondez-vous cette affirmation? Qui décide du seuil cible? Avec quoi le compare-t-on?
    Le ministère des Finances produit des estimations sur le niveau de productivité potentielle et son taux de croissance. Ce sont des estimations historiques. Le ministère ne publie pas cette information de façon prévisionnelle. Nous avons publié un document au début de l'année, dont la rédaction a été dirigée par Mostafa Askari et Chris Matier, qui montre comment nous calculons la productivité potentielle, et quelles sont nos hypothèses. À partir de là, nous calculons, pour faire le lien avec l'autre conversation, quel est l'écart de productivité. Nous employons les prévisions du secteur privé pour avoir une idée du niveau auquel l'économie devrait se situer par rapport à ce potentiel. Nous calculons l'écart de productivité de cette façon.
    Dans quel rapport peut-on trouver cette information?
    Tous nos rapports sont affichés sur notre site Web.
    Mais qu'en est-il de celui qui montre que l'économie est en-deçà de son plein potentiel. Je ne me souviens pas de l'avoir vu.
    Nous serions probablement en mesure de trouver l'information avant la fin de la séance, monsieur. Nous pourrions vous dire exactement de quel rapport il s'agit, et à quel mois il a été publié. Je crois que c'est au mois d'avril.
    Est-ce comparable à ce qui se fait ailleurs dans le monde?
    Oui. La plupart des pays, même le ministère des Finances, le font. Mais les calculs sont effectués sur une base historique.
    C'est tout.
    Merci, monsieur Pacetti.
    Je cède la parole à M. Généreux, mais je vais permettre juste avant à Mme Webb de répondre à la question.
    On vous interrompt chaque fois que c'est à votre tour de parler. Je vais donc vous donner environ 30 secondes pour répondre à la question.
    Merci beaucoup.
    Quand j'ai parlé des ménages, j'étais loin de vouloir établir un parallèle avec ce qui s'est passé aux États-Unis. Notre système bancaire et hypothécaire est très différent du leur, et nos piliers financiers sont beaucoup plus solides. La question est plutôt de savoir pourquoi la croissance sera de l'ordre de 2 p. 100 au cours des cinq prochaines années, et pourquoi pas de 2,5 ou de 3 p. 100?. Ce serait beaucoup plus facile pour le gouvernement d'équilibrer son budget si la croissance se situait à 3 p. 100 et que nous arrivions à combler l'écart de productivité plus rapidement.
    Avec la vague de consommateurs qui ont contracté des emprunts immédiatement après la récession, la marge de manoeuvre en fait de dépenses dont on aurait peut-être pu profiter plus tard n'y est plus. C'est important que votre comité le sache, parce que l'avenir de l'économie dépendra d'une importante croissance des exportations et des investissements commerciaux, compte tenu de la demande du secteur privé et de la distance que prend le secteur public.
    Merci.

[Français]

    Monsieur Généreux, vous disposez de quatre minutes.
     Bienvenue à tous. Ma question s'adresse à Mme Webb.
     D'après ce que j'ai compris plus tôt, vous avez étudié certaines questions qui m'intéressent. Le Canada est un important pays exportateur. J'aimerais connaître votre opinion sur la parité du dollar canadien avec le dollar américain et sur l'hypothèse d'un dollar canadien plus élevé que le dollar américain. Vous avez dit plus tôt avoir fait en 1997 une étude dans laquelle on prévoyait que le Canada ne serait pas en mesure de fonctionner avec un dollar dont la valeur passerait de 67 ¢ à 88 ¢. Quelle est votre opinion à ce sujet? Je vous cède tout mon temps pour répondre à cette question.

[Traduction]

    Au départ, quand le dollar a commencé à grimper, 90 cents était considéré comme très haut. Un certain nombre de nos industries ont présenté différents arguments pour montrer à quel point il serait difficile de faire concurrence avec un dollar dont la valeur était supérieure à 85 cents. Dans ce cas précis, notre travail au Groupe Banque Scotia était axé sur le secteur des véhicules automobiles et les observations qu'il avait faites.
    Avec le temps, la valeur du dollar retranche aussi une portion du profit disponible, car bon nombre de nos contrats sont négociés en dollars américains. Même en dehors du secteur manufacturier, la valeur du dollar a de très grandes répercussions, parce que si le prix des produits est établi en dollars américains, il est évident que le profit est moindre.
    Les industries craignent que si on se rapproche de la parité, ce sera un autre seuil qui prévaudra. Je pense que les entreprises canadiennes ont démontré qu'elles étaient résilientes dans ce contexte mondial où il y a une capacité excédentaire dans bien des industries.
(1715)

[Français]

    Quel taux de change serait complètement inacceptable si le dollar canadien parvient à parité avec le dollar américain et dépasse même sa valeur? Y a-t-il un plafond qui serait inacceptable, un plafond avec lequel les entreprises ne pourraient pas composer?

[Traduction]

    C'est une question extrêmement intéressante, et il est important de s'y attarder. Nous ne l'avons pas déterminé, et il est évident que cela variera d'une industrie à l'autre.

[Français]

    Merci beaucoup.
    Il vous reste deux minutes.

[Traduction]

    Monsieur Hiebert, si vous avez une question, vous avez deux minutes et demie.
    Je crois que M. Poschmann nous a dit que pour chaque réduction de 1 p. 100 des taux d'imposition sur le revenu des sociétés, on enregistre une augmentation des revenus du gouvernement. Ai-je bien compris ce que vous nous avez dit?
    Pour être exact, monsieur le président et honorables députés, d'après la valeur actualisée, les revenus nets du gouvernement sont positifs, compte tenu du taux actuel, si on réduit ce taux d'un pour cent. Il s'agit essentiellement d'une évaluation à long terme.
    Vous avez dit « à long terme ». De quelle période parlons-nous au juste, si nous appliquons la réduction conformément à notre plan actuel, avec la réduction à 15 p. 100 d'ici 2012?
    Si on tient compte de la réactivité des investissements à l'égard des taux d'imposition, on peut raisonnablement s'attendre, vu la situation actuelle et le fait que la réduction va pratiquement s'autofinancer, à une période de 4 à 10 ans.
    De 4 à 10 ans, d'accord. Donc, au-delà de l'échéancier que l'on vise actuellement?
    Sans doute. Tout dépend des investissements que cela engendrera et des autres facteurs déterminants de l'économie. Par exemple, beaucoup d'entreprises accumulent les richesses, c'est-à-dire qu'elles se sont abstenues d'investir au cours des quelques dernières années. Les banques conservent un important capital de réserve, étant donné qu'elles sont dû bâtir leur capital social au cours deux ou trois dernières années. On a donc de bonnes raisons de croire qu'une telle mesure pourrait rapidement encourager l'investissement, mais beaucoup de facteurs sont à considérer.
    D'accord.
    Je ne sais pas exactement de qui vient cette idée, mais quelqu'un a proposé qu'on applique les principes de la réforme des actifs du Royaume-Uni, des bases solides à long terme. Qui a fait cette proposition?
    C'était vous, madame Webb? D'accord.
    Pourriez-vous nous parler plus en détail de l'application de ces principes au contexte canadien? Comment pourrait-on procéder?
    J'en ai d’abord parlé parce que, même s’il connaît une période d’austérité sévère, le Royaume-Uni a pris une décision éclairée. De fait, dans le cadre de certains projets d'immobilisations, le pays protégerait certains budgets destinés à la science et à la recherche simplement parce qu’il doit maintenir une croissance à plus long terme.
    J’estime qu’il importe vraiment d’en tenir compte en ce qui a trait à la situation du Canada. En ce moment, nous avons effectivement plus de souplesse que de nombreux autres pays développés. Il est donc extrêmement important d'examiner les voies que nous voulons emprunter concernant le budget, tout en augmentant notre capital productif, qu'il s'agisse de capital physique ou humain ou encore de nouvelles connaissances technologiques.
    Merci.
    Je vous remercie, monsieur Hiebert.
    Monsieur Mulcair.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je voudrais revenir à M. Burleton pour savoir si, à la suite de ses analyses, il craint qu'en raison de la quantité de dollars que l'on a imprimés, une fois que la vitesse de retour de cet argent commence à augmenter... Comme il l'a si bien dit, on n'est pas présentement dans une situation où il y a accélération. Nous avons imprimé... vous avez utilisé le terme anglais admis en Angleterre « quantitative easing ». Réal Caouette appelait cela « imprimer de l'argent ».
    Selon l'analyse du Groupe Financier TD, une fois que cet argent commence à être remis plus rapidement dans l'économie, y a-t-il un risque d'inflation qui dépasse la cible de 2 p. 100, par exemple si cela commence aux États-Unis où on a imprimé des milliers de milliards de dollars?

[Traduction]

    Monsieur le président, je m’inquiète de ce qui se passe aux États-Unis. On est en terrain inconnu, et j’ai des craintes quant à l'inflation à moyen terme. J’en ai moins pour le Canada, car nous avons l'inflation et le ciblage, et nous n'avons pas donné dans l'assouplissement quantitatif. Bien sûr, je dis « moins », mais ce qui se passe dans le marché obligataire américain, par exemple, a tendance à avoir des répercussions chez nous. Nous sommes intimement liés.
    Comme il s’agit d’un risque à moyen terme, cette crainte s’ajoute probablement à de nombreuses autres sources de préoccupation.
(1720)

[Français]

    Madame Webb, après la guerre du Vietnam, la seule façon de rembourser une dette devenue trop lourde a été de le faire au moyen de l'inflation. Du moment que la monnaie est en train de changer de valeur, on rembourse plus rapidement, mais la valeur change.
    Est-ce que les milliers de milliards de dollars — des trillions en anglais, des billions en français — vont être remboursables autrement que par une vive inflation? J'ai rencontré plusieurs économistes qui le craignent. Chaque fois que l'on rencontre M. Carney, il tente de se faire rassurant.
    Comme l'a souligné votre collègue de la banque TD, on est intimement liés au marché américain qu'on le veuille ou non. Avez-vous des craintes liées à l'inflation à moyen terme, comme M. Burleton?

[Traduction]

    Je suis du même avis que M. Burleton. Actuellement, aux États-Unis, il est aussi question de la vitesse de circulation de la monnaie. De fait, la circulation a tellement ralenti qu’il ne semble pas y avoir beaucoup de retombées relativement à l'argent injecté dans l’économie. Le résultat est presque le même que si l’on tentait de pousser sur une corde.
    Ensuite, si l’on réussit à obtenir la vitesse de circulation désirée, advenant un certain nombre de changements institutionnels financiers conjugués à la confiance des consommateurs et des entreprises, on pourrait constater une augmentation soudaine de cette vitesse. C’est alors qu’un problème pourrait survenir.
    Cependant, la Réserve fédérale américaine a publié un certain nombre d’articles rassurants dans lesquels elle indique qu’elle peut éponger les liquidités rapidement, dès les signes avant-coureurs d’un tel scénario. On peut croire ses arguments. Je répète que nous sommes en terrain inconnu. On peut donc se demander si elle peut effectivement réagir de manière rapide et substantielle. Au Canada, la situation est si différente que je doute qu’un tel scénario se produise, sauf si ce n’est des liens étroits qu’entretient le Canada avec les États-Unis.
    Pour ce qui est de la dette, l'inflation élevée est une stratégie très punitive pour les personnes à revenu fixe — ce sont toutes des raisons pour lesquelles nous sommes restés près de la cible de 2 p. 100. La Banque du Canada a été très claire à ce sujet.

[Français]

    Il y a également une autre manière de le dire, monsieur le président. Il y a des gens qui n'ont pas d'actifs fixes. Le propriétaire d'une maison va au moins voir la valeur de celle-ci augmenter. Le locataire va seulement voir son loyer augmenter, mais il n'aura pas d'actifs qui vont accuser une plus-value.
    Monsieur Page, auriez-vous la gentillesse de partager votre point de vue à ce sujet?

[Traduction]

    Je voudrais faire écho à ce qui a déjà été dit. D’après ce que je comprends des décisions prises par le président de la Réserve fédérale américaine, M. Bernanke, dont les préoccupations premières sont le chômage et la déflation, c'est qu’elles sont très axées sur le court terme. Par ailleurs, on peut probablement noter que le cours des actions a essentiellement réagi à... Nous avons observé une certaine hausse du cours des actions en réponse à l’injection annoncée récemment de liquidités supplémentaires dans l’économie.
    Par contre, si l’on opte pour cet assouplissement quantitatif, je crois que l’on peut se préoccuper de l’injection d’autant de liquidités supplémentaires dans l’économie. Où vont-elles aller? Vont-elles rester aux États-Unis? Vont-elles connaître des taux d’intérêt plus élevés? Très récemment, nous avons observé une hausse des taux d'intérêt en Inde et en Australie. Il y a toutes sortes d’opérations de portage en cours.
    Ces fonds vont-ils vraiment rester aux États-Unis, de sorte qu’ils aient des retombées sur le prix des actifs au pays? C'est difficile à dire, mais je suis certain que les banquiers centraux du monde entier sont également inquiets. Si l’on maintient les taux d'intérêt aussi bas qu’actuellement, on va finir par rencontrer des embûches. Ils doivent être inquiets à ce sujet.

[Français]

    Merci beaucoup.
    Merci, monsieur le président.

[Traduction]

    Il n’y a pas de quoi. Merci.
    Je cède maintenant la parole à M. Szabo.
    Monsieur Page, si le gouvernement fédéral versait de l’argent aux provinces, quel serait l'impact sur la situation fédérale? Le gouvernement bénéficierait-il d’un retour d’une somme rigoureusement équivalente pour pourvoir à son déficit structurel?
    Il s’agit essentiellement de réduire nos transferts fédéraux de sorte que le fardeau des dépenses ou le déséquilibre fédéral soient transférés aux provinces.
    Je crois que nous réduirions le déséquilibre structurel à l’échelle fédérale et qu’il y aurait une hausse à l'échelle provinciale, ce qui soulève la question de l’importance d'examiner cette question de manière globale.
    Tout à fait.
    Qu'avez-vous présumé à l'égard du nouvel accord sur la santé?
    À moyen terme, nous avons pris les hypothèses du gouvernement au-delà de 2014. Il y a le taux de croissance de 6 p. 100 pour le Transfert canadien pour la santé et le taux de croissance de 3 p. 100 pour le Transfert canadien en matière de programmes sociaux — la péréquation. Nous avons essentiellement pris les données gouvernementales. Cependant, quand nous calculons la viabilité budgétaire, nous préparons des scénarios.
    Au sujet de la nouvelle manière de faire de la Commission de l'assurance-emploi — les cotisations reçues paient les prestations à payer —, elle affiche un déficit important actuellement. On présume que son déficit, quel qu’il soit, est intégré aux projections. Au départ, dans le budget de la mise à jour économique, on prévoyait une hausse de 15 cents pour l’assurance-emploi, si je me souviens bien. Nous en sommes maintenant à une augmentation de cinq cents. Même avec une telle hausse des cotisations d'assurance-emploi, savez-vous combien d'emplois seront cela représente-t-il?
(1725)
    Nous avons une simple règle pour le coût financier, mais pas pour les emplois.
    Avons-nous une idée du nombre d'emplois qui seront créés par une réduction de l'impôt sur les sociétés?
    Nous n’avons pas de telles données, monsieur.
    Pour revenir au point qu’a soulevé M. Poschmann, un certain nombre d'études internationales se penchent sur les différents régimes fiscaux, entre autres choses. Elles étudient les conséquences de la modification d’une catégorie par rapport à l’établissement d’un taux unique pour l’impôt des particuliers, l’impôt des sociétés, la taxe d'accise et ainsi de suite.
    Pour le gouvernement fédéral, quel est le plus grand risque potentiel de ses projections?
    Il existe un certain nombre de risques. Si j'avais à n'en mettre qu’un en évidence, je dirais qu’il faut nous pencher sur le long terme. Nous devons prendre en considération le vieillissement de la population. Pour avoir l’heure juste sur la question de la viabilité budgétaire, nous devons regarder au-delà de 2015-2016 et tenir compte des données sur le vieillissement de la population. Autrement, je doute que nous rendions justice aux parlementaires et aux Canadiens.
    Merci, monsieur Szabo.
    Monsieur Brison, si vous voulez prendre la parole, il nous reste deux minutes.
    En ce qui concerne la dette brute, quand on compare la dette proportionnelle au PIB du Canada à celle d'autres pays, nous comparons souvent notre dette à celle d’états unitaires où d’autres ordres de gouvernement ne supportent pas le même niveau d'endettement que les gouvernements provinciaux canadiens. C'est une question particulièrement pertinente, puisque le moment y est propice. De fait, nous entamons une période de négociation avec les provinces à propos des transferts relatifs à la santé, et un changement démographique va nous apporter d’importants défis de productivité et accroissements des coûts sanitaires et sociaux.
    Nous avons une dette brute équivalente à 82 p. 100 de notre PIB. Celle des États-Unis représente 83 p. 100 de son PIB. Notre dette brute proportionnelle au PIB est supérieure à celle du Royaume-Uni, de la France et de l'Allemagne.
    Que devrait faire le gouvernement fédéral pour se préparer à ces négociations pour qu’il affiche un excédent? Jusqu’à quel point la question de la dette brute vous préoccupe-t-elle?
    Il nous reste 45 secondes, monsieur Brison. Voulez-vous répondre?
    J’aimerais connaître l’avis des économistes des banques sur la question de la dette brute.
    Madame Webb.
    C'est certainement la raison pour laquelle il faut trouver l'équilibre le plus rapidement possible sans interrompre la dynamique de l’économie. C’est important, notamment en ce qui concerne les déficits accumulés par les provinces et qui doivent également être abordés. Néanmoins, au Canada, la dette nette a beaucoup de sens. Nous avons des programmes, tels que notre Régime de pensions du Canada, où le cadre national de sécurité sociale est entièrement financé et ne cesse de croître. C'est un écart immense, et il n'y a pas beaucoup de pays qui ont le même type d’écart.
    Je comprends donc votre préoccupation, mais il y a quelques facteurs de compensation qui sont essentiels.
    Je vous remercie.
    Monsieur Paillé, s'il vous plaît.

[Français]

    Merci, monsieur le président. Je sais qu'il est tard, je veux donc remercier nos invités.
    Par ailleurs, comme je suis un conjoncturiste de formation — vous me direz que ça fait longtemps que je n'ai pas fait ce métier —, habitué à évaluer des risques de probabilité, je peux vous garantir qu'il n'y a aucune probabilité qu'un extra-terrestre ait l'intention de venir enlever Mike Wallace. Ils n'en veulent pas. J'en suis certain.
    Comme il n'a pas compris ma remarque, d'autres pourront la lui répéter. J'aimerais donc terminer cette rencontre sur cette note d'humour que l'on pourra traduire à M. Wallace en temps opportun.

[Traduction]

    D’accord.
    Sur ce, je tiens à remercier tous nos témoins d’avoir été des nôtres aujourd’hui. Merci pour vos exposés et pour vos réponses à nos questions.
    La séance est levée.
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