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FEWO Rapport du Comité

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CHAPITRE 3 : POURQUOI ACCROÎTRE LA PRÉSENCE DES FEMMES DANS LES EMPLOIS NON TRADITIONNELS?

Il y a des époques où l’incitation au changement est portée simultanément par différents vecteurs, qui ont leur propre raison d’être mais qui tendent vers un objectif commun. La présence accrue des femmes dans les emplois non traditionnels en est un cas typique. Cet enjeu repose sur un souci de justice et d’équité pour les femmes et sur la conviction qu’elles devraient avoir un accès équitable aux emplois les mieux rémunérés de la société. Il s’appuie en même temps sur la volonté de l’industrie d’avoir l’avantage d’une main-d’œuvre concurrentielle à l’ère de la mondialisation et compte tenu de la pénurie de main-d’œuvre qui résultera du départ à la retraite des baby-boomers dans les prochaines décennies. L’industrie ne peut plus se permettre de choisir les meilleurs parmi la moitié de la population seulement; elle veut puiser dans la population tout entière, peu importe le sexe, la race ou l’origine ethnique. Les témoins ont soutenu avec conviction qu’il est insensé d’exclure la moitié des Canadiens des métiers spécialisés et des secteurs techniques.

A. L’argument de l’équité

Comme nous l’avons vu, les femmes sont concentrées dans un petit nombre de professions, qui, de surcroît, offrent des salaires moins élevés que les professions à prédominance masculine. Certains témoins ont dit qu’il fallait chercher à savoir pourquoi les emplois des groupes professionnels à prédominance féminine sont moins bien rémunérés que ceux à prédominance masculine. Les programmes et les politiques découlant des lois sur l’équité salariale sont utiles pour déterminer si les emplois de valeur égale donnent lieu à un salaire égal. Des témoins, comme Mme Patty Ducharme, vice‑présidente exécutive nationale de l’Alliance de la Fonction publique du Canada, ont souligné l’importance de l’équité salariale :

L’équité salariale est, à notre avis, essentielle pour assurer la pleine égalité des femmes dans notre société et permet que les emplois à prédominance féminine, qui ont été sous-évalués par le passé, soient rémunérés de la même façon que les emplois d’égale valeur dominés par les hommes[19].

Dans cette optique, le Comité réitère l’importance d’une loi proactive sur l’équité salariale.

Il faudra toutefois du temps avant que les emplois à prédominance féminine entraînent la même rémunération que les emplois de valeur égale à prédominance masculine. C’est pourquoi la plupart des témoins ont indiqué qu’il était important que les femmes aient un accès égal aux emplois à prédominance masculine, mieux rémunérés. Mme Rebecca McDiarmid, présidente de Canadian Construction Women, a dit au Comité que les « femmes ont intérêt à travailler dans le secteur de la construction pour des raisons bien précises : elles peuvent y gagner des salaires avantageux, en particulier lorsqu’on les compare à la rémunération des emplois occupés traditionnellement par les femmes…[20] ». Mme Denise Thomas, du Ralliement national des Métis, a signalé au Comité que la principale raison invoquée pour vouloir augmenter la participation « des femmes dans des professions traditionnellement occupées principalement par des hommes, c’est que les femmes jouiront d’un revenu d’emploi supérieur et rattraperont le salaire des hommes[21] ».

Mme Theresa Weymouth, du Syndicat des travailleurs et travailleuses canadiens de l’automobile, a résumé l’argument de l’équité dans son essence :

Si elles [les femmes] vont consacrer 40 heures à un travail, elles veulent [en retirer le maximum d’avantages]. C’est aussi simple que cela. Nous sommes maintenant rendus à un point où, sur le plan économique, les femmes travaillent pour l’argent et pour la sécurité[22].

B. L’argument de la diversité

Des études ont bien établi que les départs à la retraite des baby-boomers préfigurent une pénurie de main-d’œuvre. Le Conference Board du Canada a prévu qu’il manquera 1,2 million de travailleurs qualifiés au pays en 2025. Cette situation sera en partie attribuable à la croissance des projets dans les secteurs des ressources naturelles et de la construction, où les femmes demeurent fortement sous-représentées dans les emplois non traditionnels. En outre, selon l’économiste en chef de la Banque royale du Canada, la sous-représentation des femmes pèse lourdement sur l’économie canadienne[23].

Le Comité a entendu parler de secteurs et de régions déjà aux prises avec une sérieuse pénurie de main-d’œuvre qui les force à trouver des moyens d’attirer les femmes. Terre-Neuve-et-Labrador prévoit une pénurie de travailleurs qualifiés « à court terme […] alors même que seront entrepris, dans notre province, des projets à grande échelle d’exploitation des ressources naturelles. Lorsque les travaux atteindront leur point culminant, vers 2015, la demande devrait dépasser largement l’offre de main-d’œuvre[24] ».

Mme Mary Ann Mihychuk, présidente de Women in Mining Canada, a signalé que, malgré la présence d’un plus grand nombre de femmes dans le secteur minier, « d’ici 2017 […] l’industrie des minéraux connaîtr[a] une pénurie de main-d’œuvre. Il manquera à ce secteur environ 60 000 travailleurs. De ce nombre, [jusqu’à] 900 postes seront vraisemblablement attribués à des diplômés postsecondaires et des immigrants. Un nombre croissant de postes laissés vacants en raison de la pénurie mondiale de compétences dans le secteur minier pourraient être confiés à des femmes[25] ».

Sachant qu’ils se disputeront plus âprement les travailleurs qualifiés, les employeurs reconnaissent qu’ils devront demeurer concurrentiels pour attirer de nouveaux employés et conserver leurs effectifs.

Outre les arguments d’ordre démographique et économique invoqués plus haut, des témoins ont fait valoir les avantages constatés par les organisations et les secteurs qui ont engagé plus de femmes. Ils ont signalé que les politiques de promotion de la diversité peuvent faire croître le potentiel d’innovation chez les employeurs qui ont accès à des effectifs plus diversifiés. Ils ont aussi fait état d’études démontrant que les entreprises qui comptaient le plus de femmes dans leur conseil d’administration enregistraient une meilleure performance que celles qui en comptaient le moins[26].

Des témoins ont également illustré par des exemples les avantages nouveaux que la présence des femmes procure à l’industrie, signalant ceci :

 [I]l y a moins d’affrontements sur les lieux de travail, moins de bagarres, et […] les gens semblent plus productifs. On semble vouloir trouver des solutions aux problèmes plutôt qu’essayer de gagner contre l’autre. Les femmes ont tendance à mieux respecter les règles de sécurité […] Les hommes et les femmes ne voyant pas les choses de la même manière, augmenter le nombre de femmes dans une entreprise élargit les perspectives lorsque vient le temps de résoudre des problèmes[27].

En résumé, la gestion efficace de la diversité donne accès à un plus large éventail de talents, permet d’accroître la performance des entreprises et peut procurer des avantages nouveaux aux employeurs.



[19]           Mme Patty Ducharme (vice-présidente exécutive nationale, Bureau de direction, Alliance de la Fonction publique du Canada), Témoignages, 22 octobre 2009.

[20]           Mme Rebecca McDiarmid (présidente, Canadian Construction Women), Témoignages, 24 mars 2010.

[21]           Mme Denise Thomas (vice-présidente, région du Sud-Est, Fédération des Métis du Manitoba, Ralliement national des Métis), Témoignages, 22 mars 2010.

[22]           Mme Theresa Weymouth (coordonnatrice nationale, Programme d’éducation, Syndicat des travailleurs et travailleuses canadiens de l’automobile), Témoignages, 29 mars 2010.

[23]           Mme Wendy Cukier, More Than Just Numbers, Revisited: An Integrated, Ecological Strategy to Promote and Retain Women in Technology, Diversity Institute for Management and Technology, p. 2.

[24]           Mme Ashley Turner (agente de liaison entre l’industrie et la collectivité, Women in Resource Development Corporation), Témoignages, 24 mars 2010.

[25]           Mme Mary Ann Mihychuk (présidente, Women in Mining Canada), Témoignages, 14 avril 2010.

[26]           Mme Hiromi Matsui (ancienne présidente, Coalition canadienne des femmes en ingénierie, sciences, métiers et technologie), Témoignages, 22 octobre 2009.

[27]           Mme Rebecca McDiarmid (présidente, Canadian Construction Women), Témoignages, 24 mars 2010.