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HUMA Rapport du Comité

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Étude sur l’employabilité – Opinion supplémentaire du NPD

Le NPD félicite les membres et le personnel du Comité qui ont entendu des avis très divers sur la meilleure manière de régler les problèmes d’employabilité au Canada. Le corps du rapport, adopté à l’unanimité, contient de nombreuses recommandations progressistes qui appellent une réponse et des actions de la part du gouvernement. Le rapport présente cependant des lacunes importantes auxquelles les recommandations contenues dans le présent document doivent pallier et nous demandons respectueusement que le gouvernement y réponde.

Pourquoi améliorer l’employabilité

L’étude que nous avons réalisée comportait un thème sous-jacent, mais néanmoins important, à savoir comment faire correspondre les compétences et la formation des travailleurs aux besoins des employeurs et de l’économie. Nous sommes déçus de constater qu’on ne précise nulle part dans le rapport que l’économie doit fonctionner de manière à procurer le maximum d’avantages aux travailleurs, et inversement. Tant que la croissance économique sera considérée comme une fin en soi, et que la population active sera ramenée à un simple produit mesurable, les mesures nécessaires pour bâtir une économie saine et une société forte continueront de nous échapper.

D’abord et avant tout, le NPD considère que notre économie doit avoir pour objectif principal entre autres de fournir à la population des emplois sûrs, gratifiants et bien rémunérés. Il s’ensuit que la politique fédérale en matière d’employabilité doit chercher à minimiser les emplois précaires, le temps partiel non voulu et les emplois mal payés; à pallier le sous-emploi et supprimer les obstacles qui gênent la transition vers un meilleur emploi; à faire en sorte que tous les travailleurs motivés et qualifiés aient un accès équitable à l’éducation et à la formation; à garantir le respect intégral des droits des travailleurs; et enfin, à maximiser le taux d’activité parmi les personnes aptes au travail en âge de travailler.

Recommandation no 1 du NPD : Le NPD recommande que le gouvernement reconnaisse dûment que l’économie a notamment pour objectif fondamental d’offrir à la population des emplois sûrs, gratifiants et bien rémunérés.

Emplois précaires et bas salariés

Plusieurs témoins ont souligné que les chiffres sur l’emploi au Canada masquent une augmentation inquiétante des emplois précaires, des emplois à temps partiel et des emplois à petit salaire, ce qui entraîne une augmentation du nombre des salariés pauvres. Le Comité a appris que quelque 35 p. 100 des travailleurs et 40 p. 100 des femmes occupent des emplois précaires et des emplois atypiques (emplois temporaires, emplois à temps partiel, travail à contrat, par exemple) et donc n’ont pas d’avantages sociaux et bien peu de chances d’avancement[1].

Beaucoup de personnes ont parlé des obstacles à la formation professionnelle, à l’éducation et à l’obtention d’un emploi bien rémunéré, mais le rapport n’en fait pas mention. Il importe de mentionner à cet égard le manque de programmes sociaux – soutien du revenu, garderies abordables, aide au transport et accès à des possibilités d’alphabétisation et d’apprentissage, entre autres – et ce qu’un témoin a appelé le « piège des faibles salaires empêchant des centaines de milliers de travailleurs d'échapper à un emploi peu rémunérateur. Ces emplois ne s'assortissent généralement pas d'avantages sociaux […] Ces emplois n'offrent pratiquement aucune occasion d'éducation, de formation ou d'avancement, allant même jusqu'à faire obstacle à la réalisation de ces objectifs[2] ».

Personne ne devrait être forcé de vivre dans la pauvreté au Canada, surtout pas ceux qui travaillent à temps plein toute l’année. Malheureusement, ce principe fondamental de la société canadienne ne figure pas dans le corps du rapport, en dépit du fait qu’un témoin nous a dit que « près d’un enfant pauvre sur trois vit dans une famille dont au moins un des membres travaille à temps plein toute l’année[3] ».

Recommandation no 2 du NPD : Le NPD recommande que le gouvernement s’engage à réduire les emplois précaires non choisis et à faire en sorte que les personnes qui travaillent à temps plein ne vivent pas dans la pauvreté et qu’il collabore à cette fin avec le patronat et les autres parties concernées à l’élaboration d’une stratégie de lutte contre la pauvreté. Cette stratégie doit nécessairement inclure l’annulation de la réduction de l’impôt général des sociétés annoncée dans la mise à jour économique de 2007, à remplacer par des investissements ciblés dans des mesures qui profitent à l’ensemble de la population.

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Une stratégie globale sur l’emploi et les compétences

Le NPD est heureux de constater que le Comité recommande des améliorations nécessaires de la prestation fiscale pour le revenu gagné. Notre étude a cependant montré qu’on a besoin d’une stratégie beaucoup plus globale – qui fasse intervenir le patronat, les syndicats et le secteur de l’éducation et de la formation[4] – pour créer des emplois de qualité et nous doter d’une main-d’œuvre souple et compétitive.

On a fait valoir au Comité que le manque de correspondance entre les compétences des travailleurs et les besoins des employeurs ne tenait pas simplement à des pénuries de main-d’œuvre[5], mais à des problèmes bien plus complexes dont la solution exigera la transformation d’attitudes et d’usages présents depuis longtemps au gouvernement et chez les employeurs :

Nous ne sommes pas d'accord avec les théories voulant qu'il y ait pénurie de main-d’œuvre ou qu'un trop petit nombre de travailleurs soient employables. Nous estimons plutôt que nous sommes confrontés à une érosion du nombre d'emplois offrant une rémunération moyenne ou élevée, à un sous-investissement dans la formation et l'éducation de la part des gouvernements et des employeurs, à une non-reconnaissance systémique des acquis et des titres de compétence étrangers, à une réticence des employeurs à offrir les aménagements nécessaires aux travailleurs handicapés et blessés, à une insuffisance des ressources publiques consacrées aux problèmes d'alphabétisation des Canadiens et des travailleurs arrivant de l'étranger, ainsi qu'à des programmes d'adaptation inadéquats – Pam Frache, Fédération du travail de l’Ontario, 27 octobre 2006

Le Comité a entendu à maintes reprises les conseils sectoriels nationaux et les associations dire qu’il fallait un effort concerté pour éviter les pénuries de professionnels clés et s’assurer que la main-d’œuvre possède l’éducation et la formation nécessaires pour répondre à la demande en matière de compétences et de connaissances, tandis que, pendant ce temps, le gouvernement fédéral se décharge aveuglement de la formation pour la confier aux provinces, sans condition ni coordination.

Recommandation no 3 du NPD : Le NPD recommande que le gouvernement se dote d’une stratégie pancanadienne sur les compétences et l’emploi faisant intervenir le patronat, les syndicats et le secteur de l’éducation et de la formation, et ce, en vue de maximiser l’activité parmi les Canadiens aptes au travail en âge de travailler et de voir à ce que la main-d’œuvre efficiente possède les compétences pour répondre à la demande.

Alphabétisation

Nous sommes heureux de constater que le Comité recommande l’équivalent d’une stratégie pancanadienne sur l’alphabétisation et l’éducation permanente avec l’établissement d’objectifs concrets en matière de taux de littératie et l’adoption d’un plan décennal comme l’avait proposé un comité d’experts au gouvernement libéral en 2004.

Cependant, plusieurs témoins ont fait valoir l’insuffisance du financement, par le gouvernement fédéral, des activités d’alphabétisation des adultes depuis plusieurs années et réclamé une augmentation notable de ces dépenses compte tenu du rôle crucial de la littératie dans le progrès économique et social. Ils ont aussi insisté sur l’importance, pour les organisations nationales et régionales de promotion de la littératie, d’un financement de base pluriannuel qui leur permette de continuer de coordonner les activités d’alphabétisation au niveau communautaire[6].

Recommandation no 4 du NPD : Le NPD recommande que le gouvernement augmente sensiblement le financement des programmes d’alphabétisation des adultes, notamment le financement de base pluriannuel des organisations nationales et régionales d’alphabétisation.

Enseignement postsecondaire

Nous sommes déçus de voir que le Comité n’a pas recommandé dans son rapport la création d’une stratégie fédérale en matière d’enseignement postsecondaire, comme le proposait le Conseil canadien sur l’apprentissage dans son témoignage. Faute d’objectifs pancanadiens et de plan visant à mesurer et à atteindre ces derniers, l’approche au coup par coup adoptée en matière d’enseignement supérieur continuera d’amoindrir la compétitivité internationale de notre main‑d’œuvre et de notre économie.

Nous notons que plusieurs groupes d'intervenants clés qui n'ont pas témoigné dans le cadre de l’étude ont soutenu publiquement que les hausses des transferts fédéraux pour l’éducation sont inférieures d'au moins un milliard de dollars à ce que le gouvernement fédéral devrait y consacrer pour que ce secteur obtienne sa juste part du financement de base, et que le gouvernement ne peut toujours pas rendre compte de ce financement à moins que celui-ci soit distinct du TCPS et vise expressément l'EPS[7].

Recommandation no 5 du NPD : Le NPD recommande que, en collaboration avec les provinces et les territoires, le gouvernement fédéral applique les principes incarnés dans le projet de loi C‑398, Loi canadienne sur l’enseignement postsecondaire, qui garantit un financement fédéral stable et suffisant pour protéger l’accessibilité, la qualité, l’abordabilité et l’intégrité des collèges et universités publics du Canada.

Nous sommes satisfaits de voir que le gouvernement a finalement mis sur pied un régime complet de bourses pour étudiants qui vise également les revenus moyens. Toutefois, le nouveau système couvrira moins de la moitié des frais de scolarité des étudiants à faible revenu et à peine l’achat de manuels scolaires pour les étudiants à revenu moyen. Qui plus est, que les bourses soient fonction du revenu constituent une discrimination à l’encontre des étudiants qui choisissent ou ont besoin de poursuivre leurs études postsecondaires loin de chez eux.

Recommandation no 6 du NPD : Le NPD recommande que le gouvernement augmente de façon significative le budget du Programme canadien de subventions aux étudiants et consulte des groupes d’étudiants et d’autres intervenants du secteur des études postsecondaires avant septembre 2008 afin de déceler et de corriger les principales lacunes du programme avant que celui‑ci ne soit appliqué pendant toute une année, notamment en faisant en sorte qu’il tienne compte des besoins.

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Départ à la retraite obligatoire

Le Comité s’est fait dire que l’abolition de la retraite obligatoire ne devrait pas être utilisée comme solution à la pénurie de main-d’œuvre qualifiée ou à la pauvreté chez les aînés et qu’une telle mesure aura en fait l’effet contraire puisqu’elle réduira les possibilités d’emploi pour les chômeurs actuels et fera en sorte que les gouvernements et les employeurs sentiront moins l’urgence de former et de recruter de jeunes travailleurs.

« [N]ous n'avons perçu absolument aucun désir parmi le grand public, les dirigeants du monde des affaires et des syndicats, ou les centaines de personnes qui ont participé aux discussions dans l'Atlantique et en Saskatchewan de recourir à la prolongation de la vie professionnelle comme solution aux problèmes des pénuries de main-d'œuvre. » – Shirley Seward, Centre syndical et patronal du Canada, 20 juin 2006

Le gouvernement fédéral doit plutôt protéger le droit des travailleurs de pouvoir compter sur un revenu de retraite suffisant, en bonifiant le RPC, la SV et le SRG et en faisant en sorte que les Canadiens en âge de travailler occupent des emplois sûrs et bien rémunérés.

Recommandation no 7 du NPD : Le NPD recommande que le gouvernement ne relève pas l’âge de la retraite obligatoire et améliore plutôt la sécurité du revenu pour les personnes âgées.

Autochtones

Recommandation no 8 du NPD : Pour faire suite à la recommandation no 3.9 du Comité, le NPD recommande par souci de clarté que le gouvernement élimine le plafond de 2 p. 100 appliqué à toutes les dépenses d’ordre social du ministère des Affaires indiennes et du Nord afin d’améliorer l’enseignement de la maternelle à la 12e année, le logement, les activités récréatives, les soins à la petite enfance, les versements d’aide sociale et l’enseignement postsecondaire. des Autochtones.

Personnes handicapées

Nous sommes déçus de voir que les recommandations concernant les personnes handicapées ne portent que sur une plus grande accessibilité et ne reconnaissent pas les barrières structurelles au travail. Au moins un témoin a demandé que l’on établisse une stratégie économique globale pour les personnes handicapées, qui, outre la formation et les aides, viserait le logement abordable, le transport et la sécurité du revenu comme moyens d’accroître l’employabilité à long terme. Le même témoin a également demandé que le gouvernement étende le Programme de contrats fédéraux (PCF) (qui exige actuellement des employeurs ayant au moins 100 employés à l’échelle nationale qu’ils respectent les normes d’équité en matière d’emploi pour pouvoir soumissionner à l’égard d’importants contrats fédéraux) aux employeurs ayant au moins 20 employés[8].

Recommandation no 9 du NPD : Le NPD recommande que le gouvernement élabore une stratégie économique globale à l’intention des personnes handicapées et avec la collaboration de ces dernières et applique le PCF aux employeurs ayant au moins 20 employés.

Équité salariale

Nous sommes déçus de voir que les recommandations du Comité concernant l’équité salariale ne tiennent pas compte de deux grandes recommandations que le Conseil national des femmes du Canada (CNFC) lui a présentées : (1) remplacer l’actuel régime fédéral d’équité salariale par une loi globale et proactive et (2) mettre en place un moyen facilement accessible pour les femmes non syndiquées et les travailleurs à temps partiel, temporaires, saisonniers et contractuels d’avoir accès aux processus relatif à l’équité salariale[9]. Un rapport récent du Congrès du travail du Canada constate que les salaires féminins représentent 70 % des salaires masculins (68 % pour les détentrices de diplômes d’études postsecondaires) : il faut de toute évidence prendre des mesures plus concrètes pour remédier à cette iniquité persistante.

Recommandation no 10 du NPD : Le NPD recommande que le gouvernement applique toutes les recommandations du CNFC concernant l’équité salariale.

Travailleurs temporaires étrangers et travailleurs agricoles saisonniers

Nous sommes heureux de voir que le Comité a recommandé un examen de la transition du statut de travailleur temporaire étranger à celui de résident permanent. Le Programme des travailleurs temporaires étrangers (PTTÉ) et le Programme des travailleurs agricoles saisonniers (PTAS) ne respectent aucunement la tradition canadienne qui veut que l’on accueille des travailleurs spécialisés et leur octroie le statut de résident permanent (pour qu’ils puissent devenir des citoyens à part entière), ont donné lieu à une exploitation honteuse des travailleurs venant au Canada et doivent être remaniés de fond en comble avant d’être étendus.

Il n’existe aucun mécanisme visant à empêcher, détecter ou faire cesser l’exploitation des travailleurs temporaires, qui doivent jouir des mêmes avantages, droits et respect que les travailleurs canadiens. Nous sommes donc déçus que la recommandation 4.5 ne tienne pas compte des solutions concrètes que plusieurs témoins ont avancées[10]. Pour respecter les contraintes d’espace de la présente opinion complémentaire, le NPD a expliqué en détail ces solutions dans une lettre aux ministres du Travail et des Ressources humaines dont il attend une réponse officielle.

Recommandation no 11 du NPD : Le NPD recommande que le gouvernement travaille avec les provinces et les autres intervenants pour mettre en place des solutions concrètes visant à prévenir, détecter et faire cesser les abus causés par le PTTÉ et le PTAS.



[1] Sheila Regehr, Conseil national du bien-être social, 28 septembre 2006; Susan Nasser, Nova Scotia Association of Social Workers, 24 octobre 2006

[2] Sheila Regehr, Conseil national du bien-être social, 28 septembre 2006

[3] Susan Nasser, Nova Scotia Association of Social Workers, 24 octobre 2006

[4] Shirley Seward, Centre syndical et patronal du Canada, 20 juin 2006

[5] Pam Frache, Fédération du travail de l’Ontario, 27 octobre 2006; Peter Sawchuk, Institut d’études pédagogiques de l’Ontario, 26 octobre 2006.

[6] John O’Leary, Frontier College, 26 octobre 2006; Wendy desBrisay, Movement for Canadian Literacy, 28 septembre 2006; Kim Gillard, Literacy Newfoundland and Labrador, 23 octobre 2006.

[7] Communiqués de presse du 19 mars 2007 de l’Association canadienne des professeures et professeurs d’université, de la Fédération canadienne des étudiants et la Fédération étudiante universitaire du Québec.

[8] John Rae, Alliance for Equality of Blind Canadians, 27 octobre 2006

[9] Karen Dempsey, Conseil national des femmes du Canada, 24 octobre 2006.

[10] Chris Ramsaroop, Justicia for Migrant Workers, 27 octobre 2006; Veena Verma, Initiatives canadiennes œcuméniques pour la justice (KAIROS), 26 octobre 2006; Hassan Yussuff et Karl Flecker, Congrès du travail du Canada, 20 mars 2007.

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