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FINA Rapport du Comité

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L’imposition des fiducies de revennu : Des divergences de vues irréductibles?

INTRODUCTION

En janvier et février 2007, le Comité permanent des finances de la Chambre des communes a tenu des audiences publiques au sujet de l’imposition des fiducies de revenu. Il a reçu des mémoires et entendu des témoins : plus de 100 groupes et particuliers représentant un vaste éventail de parties intéressées lui ont ainsi fait part de leur opinion, et le Comité a été frappé par le nombre et l’ampleur des divergences de vues que la question suscite.

Le Comité résume dans le présent rapport les commentaires dont on lui a fait part sur les mesures annoncées par le Ministre et le ministère des Finances au sujet des fiducies de revenu. Il y formule aussi ses propres réflexions et ses recommandations sur les questions soulevées depuis l’annonce du gouvernement fédéral du 31 octobre 2006 au sujet de l’imposition des fiducies de revenu.

L’ANNONCE RELATIVE À L’IMPOSITION DES FIDUCIES DE REVENU

  1. L’impôt sur les distributions

    Le 31 octobre 2006, le ministre fédéral des Finances a annoncé que le gouvernement fédéral prélèverait un impôt sur les distributions des fiducies de revenu et des sociétés en commandite cotées en bourse à l’exception de celles qui ne détiennent que des placements immobiliers passifs, et ce, pour égaliser les règles fiscales entre les fiducies de revenu et les entreprises dotées d’une structure classique.

    Le Ministre a précisé que le nouvel impôt s’appliquerait à certaines distributions de revenus des entités intermédiaires à compter de l’année d’imposition 2007 dans le cas des fiducies de revenu dont les parts ont été transigées pour la première fois après le 31 octobre 2006 et à partir de l’année d’imposition 2011 dans celui des fiducies de revenu déjà cotées avant cette date. Les distributions en question seront assujetties à l’impôt au taux de l’impôt des sociétés. Les investisseurs détenteurs de parts d’une entité intermédiaire paieront de l’impôt comme si les distributions étaient des dividendes. Ainsi, l’impôt sur les distributions des entités intermédiaires cotées pour la première fois après le 31 octobre 2006 s’établira à 34 % en 2007, 33,5 % en 2008, 33 % en 2009 et 32 % en 2010; le taux d’imposition de toutes les fiducies de revenu s’établira à 31,5 % à partir de 2011.

  2. Croissance normale

    Comme l’application différée des mesures annoncées le 31 octobre 2006 aux entités intermédiaires de placement déterminées (EIPD) existantes est subordonnée au respect des objectifs stratégiques du projet fédéral d’imposition des fiducies de revenu, le ministère des Finances a publié le 15 décembre 2006 des lignes directrices sur ce qu’on entend par « croissance normale » des fiducies de revenu et autres entités intermédiaires durant la période de transition de quatre ans. Le Ministère a précisé qu’il ne recommandera pas de modifier l’année de mise en application des nouvelles règles (2011) aux EIPD dont les capitaux propres augmenteront, par l’émission de nouveaux titres, d’une somme n’excédant pas soit 50 millions de dollars soit, s’il est plus élevé, un montant correspondant à une « zone sûre » établi objectivement.

    La zone sûre sera établie par rapport à la capitalisation boursière de l’EIPD à la clôture des marchés le 31 octobre 2006 (parts émises et en circulation). Le calcul de la capitalisation boursière exclut les dettes, les options et d’autres participations convertibles. En outre, les fiducies de revenu pourront demander l’autorisation d’accroître leur capital au-delà des bornes envisagées.

    Pour la période allant du 1er novembre 2006 jusqu’à la fin de 2007, la zone sûre d’une EIPD correspondra à la somme représentant 40 % du point de référence du 31 octobre 2006. De 2008 à 2010, elle correspondra à la somme représentant 20 % du point de référence, ce qui permettra au total une croissance globale pouvant aller jusqu’à 100 % sur l’ensemble de la période de transition de quatre ans. Les sommes annuelles correspondant à la zone sûre sont cumulatives, mais pas les sommes de 50 millions de dollars. Les nouveaux capitaux propres comprennent les parts et les dettes convertibles en parts. Par ailleurs, le fait de remplacer des dettes en circulation au 31 octobre 2006 par de nouveaux capitaux propres ne sera pas considéré comme de la croissance; des dettes nouvelles et non convertibles peuvent aussi être émises sans influer sur la zone sûre, mais le remplacement de ces nouvelles dettes par des capitaux propres sera considéré comme de la croissance. Enfin, la fusion de deux EIPD ou plus dont les parts étaient cotées le 31 octobre 2006 ou la réorganisation d’une telle entité ne seront pas considérées comme de la croissance dans la mesure où elles n’entraînent pas une majoration nette des capitaux propres.

  3. Conversions de fiducies en sociétés

    Le ministère des Finances a annoncé également le 15 décembre 2006 que la conversion d’une EIPD en société par actions n’aura pas de conséquences fiscales sur les investisseurs.

  4. Consultations sur les propositions législatives

    Le ministère des Finances a publié le 21 décembre 2006 ses propositions législatives pour la mise en œuvre de l’impôt sur les distributions, et a indiqué qu’il accepterait des observations constructives sur les aspects techniques de ses propositions jusqu’au 31 janvier 2007.

MESURE DES PERTES FISCALES

  1. Observations générales des témoins

    Quand il a comparu devant le Comité, le ministre des Finances a fait état d’une tendance croissante à l’évitement fiscal chez les sociétés. Ce souci d’évitement fiscal influe sur les décisions des entreprises en matière d’investissement au profit des investisseurs non-résidents et au détriment des contribuables canadiens. Selon le ministre des Finances, les conversions réelles et prévues de sociétés de type classique en fiducies de revenu constituent un danger pour le régime fiscal canadien et pour la structure de notre économie; ce n’est pas ainsi qu’on bâtira une économie dynamique et compétitive. Le Ministre constate qu’une part non négligeable des distributions des fiducies de revenu vont à des investisseurs étrangers, pour lesquels elles constituent une aubaine aux frais des contribuables canadiens, puisqu’ils paient beaucoup moins d’impôt sur celles-ci que les investisseurs Canadiens n’en paient sur les leurs.

    Des documents fournis au Comité par le ministre des Finances attestent que la Colombie-Britannique, le Manitoba, l’Ontario, le Québec, l’Île-du-Prince-Édouard, la Nouvelle-Écosse, le Nouveau-Brunswick et Terre Neuve et Labrador souscrivent aux nouvelles règles et à la période de transition de quatre ans annoncées le 31 octobre. La Saskatchewan est d’accord avec la période de transition et l’Alberta a soumis une estimation de ses pertes de revenu nettes associées aux fiducies de revenu.

    Le Ministre a dit au Comité que, d’après des estimations raisonnables fondées sur une méthode sûre et uniforme, les pertes fiscales associées aux fiducies de revenu s’élèveront à environ 500 millions de dollars pour 2006, soit, a t il précisé, une estimation analogue à celle à laquelle est arrivé le professeur Jack Mintz de la Rotman School of Management de l’Université de Toronto.

    Parlant de la sensibilité des pertes fiscales fédérales estimatives aux variations des hypothèses de base, le Ministre a indiqué qu’un changement d’un point de pourcentage du taux fédéral d’imposition réel des sociétés, qui porterait celui-ci de 6,6 à 7,6 %, se solderait par une perte estimative annuelle de 710 millions de dollars pour le Trésor fédéral. Il a signalé aussi que la perte estimative de 500 millions de dollars prévue pour 2006 ne prend pas en compte les conversions d’autres sociétés ou les répercussions sur les recettes fiscales des provinces.

    Pour sa part, l’Institut canadien des comptables agréés estime que, avant l’annonce du 31 octobre 2006, les parts appartenant à des investisseurs exonérés d’impôt et des investisseurs non-résidents entraînaient des pertes fiscales croissantes.

    Mme Diane Urquhart estime que le projet d’imposition des fiducies de revenu supprime des avantages fiscaux. Pour elle, qui dit avantages fiscaux dit pertes de revenu pour l’État. Elle a précisé que les régimes enregistrés d’épargne-retraite et les caisses de retraite entraînent pour le gouvernement des pertes de revenu permanentes et des pertes associées au report de l’impôt. Mme Urquhart veut bien accepter les chiffres du ministère des Finances, mais à son avis, les pertes fiscales sont bien supérieures à 500 millions de dollars si l’on tient compte des comptes à impôt différé.

    M. Jeffrey Olin a dit avoir confiance dans les estimations de M. Mintz et celles du ministère des Finances, mais il a fait remarquer qu’il existait par ailleurs d’autres analyses. D’après lui, la question des pertes de revenus fiscaux doit être étudiée sur une base plus fondamentale et peut-être plus intuitive.

    Des témoins ont parlé des méthodes et hypothèses qui sous-tendent les analyses et estimations du ministère des Finances quant aux pertes fiscales fédérales associées aux fiducies de revenu. Certains témoins sont convaincus que les pertes fiscales, si tant est qu’elles existent, sont inférieures aux estimations présentées par le Ministre. M. Don Francis ne croit pas à l’existence de pertes fiscales et M. Cameron Renkas non plus, qui s’appuie sur des études effectuées par BMO — Marchés des capitaux.

    M. Yves Fortin aussi conteste l’existence de pertes fiscales et, partant, l’argument invoqué par le gouvernement pour expliquer son action. D’après lui, ce sont les mesures contenues dans les propositions législatives — et non l’existence de fiducies de revenu — qui causeront des pertes fiscales. Pour lui, il est faux de dire que les fiducies de revenu échappent à l’impôt : l’impôt est simplement perçu au niveau du détenteur de parts et non au niveau de la fiducie. Il considère que la méthode employée par le ministère des Finances dans son document de consultation de 2005 — qui apparemment n’a pas été modifiée — est erronée. M. Gordon Tait estime pour sa part que certaines des hypothèses du ministère des Finances sont fautives.

    M. Tait a aussi dit au Comité que les fiducies de revenu n’avaient pas pour effet de réduire les revenus fiscaux du gouvernement. D’après lui, les estimations de pertes fiscales ne sont vraisemblablement pas le fait de différences entre l’impôt perçu auprès des détenteurs de parts et l’impôt perçu auprès des sociétés puisque, quand on compare les montants, les investisseurs des fiducies de revenu paient toujours plus. Suivant son analyse, cela s’explique par trois raisons : les particuliers sont assujettis à des taux marginaux d’imposition et des taux d’imposition réels relativement plus élevés que les sociétés; les distributions en espèces d’une fiducie constituent une assiette fiscale plus grande que celle que représentent les bénéfices d’une société; enfin, les sociétés ont relativement plus de possibilités de mettre leurs bénéfices à l’abri de l’impôt.

    Selon M. Tait, quand le fardeau fiscal est transféré de ceux qui paient en général la plus faible proportion de l’impôt et à des taux moindres — les sociétés — à ceux qui tendent à payer la plus forte proportion de l’impôt et à des taux plus élevés — les particuliers — le gouvernement devrait y gagner sur le plan des revenus fiscaux. M. Tait estime que, pour le gouvernement, il est sans importance que les impôts soient payés indirectement par les actionnaires des sociétés ou directement par les détenteurs de parts; à son avis, c’est aux investisseurs d’en décider.

    L’Association canadienne des fonds de revenu considère que les estimations des pertes fiscales sont très exagérées et non fondées et elle signale que le ministère des Finances n’a pas publié de chiffres clairs et crédibles à l’appui de celles-ci. L’Association a dit au Comité que HDR|HLB Decision Economics Inc. — son cabinet indépendant d’experts-conseils — s’était entendu sur une méthodologie avec le ministère des Finances en 2005 et avait conclu que l’existence des fiducies n’entraînait aucune perte fiscale. Qui plus est, les experts conseils avaient conclu que les fiducies de revenu procuraient au gouvernement fédéral des revenus fiscaux supérieurs à ceux qu’il aurait obtenus si celles-ci avaient été des sociétés.

    Des investisseurs ont écrit au Comité pour exprimé leur conviction que les fiducies de revenu ne sont pas source de pertes fiscales. De plus, dans son mémoire, le iTrust Institute, affirme que les fiducies de revenu ne causent pas de pertes fiscales et conteste les calculs utilisés pour justifier le projet d’imposition des fiducies de revenu.

    HDR|HLB Decision Economics Inc. estime que les divergences entre sa propre analyse et celle du ministère des Finances tiennent à des différences d’hypothèses quant aux quatre facteurs clés suivants : le taux d’imposition réel des fiducies de redevances; la proportion des parts de fiducie de revenu détenues dans des comptes exonérés d’impôt; la valeur de l’impôt reporté; et les répercussions des modifications fiscales envisagées. À son avis, en employant exactement la même méthodologie que le ministère des Finances et après avoir apporté les révisions appropriées à l’approche adoptée par celui-ci, la perte fiscale estimative serait de l’ordre de 164 millions de dollars en 2006 et 32 millions de dollars en 2010.

  2. Observations des témoins sur le report ou l’exonération de l’impôt

    Dans les documents qu’il a remis au Comité, le ministre des Finances affirme qu’il est très difficile d’estimer les revenus fiscaux futurs associés aux comptes à impôt différé parce qu’on ne connaît pas le moment du versement des revenus de pension, ni des retraits et rentes afférents aux régimes enregistrés d’épargne-retraite (REER) ou des paiements sur les fonds enregistrés de revenu de retraite (FERR). Quand il estime les répercussions sur ses revenus fiscaux, le gouvernement fédéral ne prend en compte que l’année courante, et les revenus fiscaux associés aux comptes à impôt différé sont pris en compte dans les estimations portant sur les années futures concernées. La prise en compte des revenus fiscaux futurs associés aux entités bénéficiant d’un impôt différé ne produira un gain de revenus fiscaux que dans la mesure où le taux de rendement projeté des placements des entités intermédiaires dépassera le taux de rendement qui aurait été obtenu si les mêmes sommes avaient été investies dans d’autres moyens de placement.

    HDR|HLB Decision Economics Inc. a dit au Comité que, en 2005, il s’était entendu avec le ministère des Finances sur une méthode et des hypothèses de calcul des estimations des pertes fiscales. L’organisation et le Ministère se sont mis d’accord sur une méthode générale, sauf sur un point : l’inclusion de la valeur de l’impôt différé. On nous a dit que, bien qu’elles ne soient pas immédiatement imposables, les distributions versées dans un compte exonéré d’impôt sont imposables au moment du retrait des fonds et ont donc une valeur économique.

    De l’avis de HDR|HLB Decision Economics Inc., si l’établissement du budget est une activité à base courante, l’analyse des politiques doit, elle, reposer sur le cycle de vie. Ainsi, il est opportun de prendre en compte l’impôt différé quand on envisage de modifier la politique fiscale.

    Pour l’Association canadienne d’investissement dans des fiducies de revenu, c’est l’exclusion de l’impôt sur les revenus de retraite de l’analyse du ministère des Finances, et non pas les fiducies de revenu, qui est responsable des pertes fiscales. M. Yves Fortin a signalé que le Ministère considère que les comptes de retraite à impôt différé constituent de loin la plus importante source de pertes fiscales. Or, on ne peut pas selon lui imputer les pertes fiscales aux REER et aux caisses de retraite, car le montant annuel des retraits imposables de ces comptes dépasse de loin le montant annuel des contributions à impôt différé.

    Dans le même ordre d’idées, M. Gordon Tait impute les pertes fiscales alléguées à l’exclusion — qu’il considère comme arbitraire — des impôts acquittés annuellement sur les revenus tirés des caisses de retraite, des REER et des FERR. Selon lui et selon l’Association canadienne des fonds de revenu, seules les œuvres de bienfaisance et les sociétés d’État sont exonérées d’impôt.

    D’autres témoins, notamment la Coalition des fiducies de l’énergie du Canada, ont signalé que les comptes de retraite bénéficient d’un impôt différé et non d’une exonération d’impôt, tandis que M. Tait a dit au Comité que certaines analyses ne distinguent pas les fiducies détenues dans un FERR ou dans un compte de pension assujettis à l’impôt de celles qui sont détenues dans un REER, et que les impôts perçus actuellement sur les fiducies détenues à l’intérieur de tous les comptes de pension sont exclus des estimations. À son avis, jusqu’au tiers des parts de fiducie détenues dans des comptes de retraite sont détenues dans des comptes assujettis à l’impôt.

    Sur la question des comptes imposables où l’impôt n’est pas différé, M. Fortin a affirmé que le gouvernement fédéral perçoit davantage d’impôt auprès des investisseurs dans des fiducies de revenu que ce ne serait le cas si les fiducies en question étaient administrées comme des sociétés par actions. Dans ce cas, il n’y a pas de perte fiscale parce que, comme on l’a vu, le montant des distributions — fondé sur les liquidités — dépasse le bénéfice net qui serait imposé dans le cas des sociétés. En outre, a-t-il dit, les distributions sont assujetties aux taux de l’impôt sur le revenu des particuliers, lesquels sont généralement supérieurs au taux d’imposition réel des sociétés et au taux d’imposition des dividendes. À son avis, si les fiducies se reconvertissent en sociétés par actions, l’assiette fiscale et les taux d’imposition seront moindres; dans un cas extrême, si toutes les fiducies se reconvertissent d’ici 2011, le gouvernement pourrait bien ne plus toucher que la moitié de l’impôt qui est acquitté actuellement par les investisseurs détenteurs de parts de fiducie à impôt non différé.

  3. Observations des témoins sur le secteur énergétique

    Quand il a comparu devant le Comité, le ministre des Finances a affirmé que ce serait une erreur de soustraire le secteur énergétique à l’application des mesures envisagées au sujet des fiducies de revenu et de lui accorder un congé fiscal permanent. Pour lui, il est normal que tous les secteurs de l’économie paient leur juste part des impôts.

    Le Ministre a fait valoir cinq autres choses : le Canada n’a aucune intention de copier le régime fiscal américain; les Master Limited Partnerships (MLP) américains appartiennent presque exclusivement à des investisseurs américains, tandis que, au Canada, les fiducies de redevances de ressources naturelles sont dans une large mesure entre les mains d’investisseurs étrangers; des obstacles d’ordre structurel dans le droit américain limitent les possibilités d’investissement des fonds mutuels et des entités exonérées dans des MLP; le gouvernement fédéral ne considère pas que les règles qui régissent les MLP américains confèrent à ceux-ci un avantage sur les fiducies de redevances du Canada; enfin, la valeur des fiducies de redevances du Canada cotées en bourse représente 4 % de la capitalisation boursière de la Bourse de Toronto et les fiducies de revenu plus de 15 % de la production canadienne de pétrole et de gaz, tandis que la valeur des MLP américains représente moins d’un tiers d’un pour cent de la capitalisation boursière de la bourse de New York et du NASDAQ. Le Ministre a dit en outre au Comité que, au Canada, la moitié des parts des fiducies du secteur énergétique sont détenues par des étrangers — principalement des Américains — qui font face à une retenue d’impôt de 15 %; aux États-Unis, en revanche, les parts de MLP sont détenues presque exclusivement par des investisseurs américains.

    Selon Mme Diane Urquhart, qui a fait part au Comité d’un impôt spécial sur les actionnaires payé par les investisseurs américains qui détiennent leurs propres MLP à l’intérieur d’un compte de retraite personnel américain, les MLP sont — pour la plupart — assujettis à des règles d’imposition identiques à celles qui frapperont les fiducies de revenu canadiennes si les propositions fiscales annoncées par le gouvernement fédéral le 31 octobre 2006 deviennent loi. Elle estime également qu’il est faux d’affirmer que, en raison de leurs avantages concurrentiels, les MLP achèteront des biens dans le secteur canadien du pétrole et du gaz si les nouvelles règles fiscales visant les fiducies de revenu s’actualisent; elle pense que le contraire se produira.

    La Coalition des fiducies de l’énergie du Canada a dit au Comité que les fiducies de redevances de ressources naturelles avaient pour effet d’accroître les revenus fiscaux du gouvernement fédéral et des provinces, et que ses fiducies membres avaient généré davantage d’impôt — au niveau provincial et au niveau fédéral — depuis cinq ans qu’elles n’en auraient payé si elles avaient été des sociétés par actions. Selon elle, rien ne prouve de manière probante que les fiducies de redevances sont responsables de pertes fiscales. De l’avis de la Coalition, les sociétés d’exploration et de production pétrolière et gazière ont toujours payé très peu d’impôt, tandis que les distributions des fiducies de redevances génèrent les recettes fiscales suivantes : de l’impôt sur le revenu des particuliers; un surcroît de recettes fiscales provenant du rendement composé des placements dans les comptes à impôt différé; et un prélèvement fiscal de 15 à 25 % perçu auprès des investisseurs non-résidents.

    D’après Pengrowth Energy Trust, les fiducies de redevances de ressources naturelles — dont on dit qu’elles jouent un rôle central dans le secteur canadien du pétrole et du gaz depuis 20 ans — sont fondamentalement différentes des sociétés de placement immobilier (SPI) et des entreprises qui se sont converties en fiducies de revenu, notamment parce qu’elles ont une longue histoire, que le secteur de l’énergie a des besoins en capitaux substantiels et permanents et qu’elles suivent un modèle d’entreprise active. Pour Pengrowth, la structure des fiducies de redevances a favorisé la croissance, facilité efficacement les mouvements de capitaux à l’intérieur du secteur du pétrole et du gaz, suscité de l’innovation, amélioré la productivité dans la récupération finale des ressources dans les champs pétrolifères parvenus à maturité, le tout avec des répercussions environnementales minimes. Pengrowth Energy Trust affirme que les fiducies de redevances sont des pionnières dans l’utilisation de techniques comme l’injection de dioxyde de carbone et d’autres encore qui amélioreront la récupération et la productivité tout en réduisant les répercussions environnementales du secteur énergétique ainsi que les besoins en capital futurs de cette industrie.

    Par ailleurs, Pengrowth Energy Trust affirme que les fiducies de redevances ne sont pas la source de pertes fiscales par rapport aux sociétés pétrolières et gazières classiques. À son avis, le gouvernement perdra environ un milliard de dollars par an en recettes fiscales si les fiducies de redevances sont forcées de se reconvertir en sociétés par actions. Il a également souligné l’exemption des sociétés de placement immobilier et des fiducies de redevances de ressources naturelles aux États-Unis et réclame la protection des droits acquis des fiducies de redevances canadiennes.

  4. Observations des témoins sur les répercussions fiscales pour les provinces

    Dans son témoignage devant le Comité, le ministre des Finances a souligné que les gouvernements des provinces et des territoires avaient unanimement appuyé l’annonce du 31 octobre 2006, car, pour eux, les fiducies de revenu ont eu une incidence négative sur les revenus et l’économie de leurs provinces.

    D’ailleurs, le trésorier provincial de l’Île-du-Prince-Édouard a indiqué que la forte hausse des conversions en fiducies de revenu de 2006 est devenue menaçante et qu’il fallait gérer et protéger les finances publiques et l’économie provinciale de même que fournir des services publics. Il a mentionné le nombre, la taille et le type d’entreprises qui devenaient ou envisageaient de devenir des fiducies de revenu, et expliqué qu’une fois devenue une fiducie de revenu, l’entreprise ne paie plus d’impôt sur le revenu aux provinces où elle évolue. En fait, les détenteurs de parts sont imposés par leur province de résidence et, comme ils résident en règle générale dans des provinces plus importantes ou à l’étranger, les petites provinces souffrent de la situation.

    D’autres témoins ont expliqué l’incidence du régime proposé d’imposition des fiducies de revenu sur les recettes fiscales des provinces et des territoires. M. Yves Fortin a expliqué que c’est la province où réside la fiducie qui percevra désormais l’impôt sur les distributions proposé, alors qu’actuellement ce sont les provinces où résident les détenteurs de parts qui prélèvent les impôts. Pour M. Fortin, par suite du changement envisagé, les provinces où la collectivité d’investisseurs est dynamique, mais où les fiducies sont rares, voire absentes, verraient leur échapper le gros des impôts perçus actuellement auprès des détenteurs de parts de fiducie.

    La Coalition des fiducies de l’énergie du Canada a fait valoir un argument du même ordre, en expliquant au Comité que, étant donné que la plupart des détenteurs de parts de la Coalition vivent ailleurs qu’en Alberta — province où se trouve la totalité des fiducies de redevances de ressources naturelles — les Canadiens de toutes les régions du pays bénéficient du versement des distributions, si bien que leur province de résidence bénéficie d’une hausse des revenus fiscaux.

  5. Observations des témoins sur la période de transition

    Dans son témoignage devant le Comité, le ministre des Finances a indiqué que, suivant des estimations, l’extension de l’actuelle période de transition de quatre ans pour les fiducies de revenu — qu’il juge juste et raisonnable — à 10 ans ferait perdre environ trois milliards de dollars au gouvernement fédéral sur le plan fiscal. Les provinces essuieraient également des pertes fiscales, qui se chiffreraient pour l’Alberta à plus de deux milliards de dollars et pour le Québec à des centaines de millions de dollars. Pour lui, une extension de la période de transition constituerait un revirement politique et reviendrait à faire accepter de façon détournée un changement de politique ne pouvant être adopté ouvertement; cela représenterait également une prolongation d’une injustice fiscale et ne ferait rien pour les investisseurs qui ont décidé de vendre leurs parts entre le 1er novembre 2006 et le 30 janvier 2007. Le Ministre a précisé que les lignes directrices proposées en matière de croissance des fiducies de revenu existantes pendant la période de transition sont généreuses. Nous avons appris par ailleurs que la période de transition en Australie est de trois ans.

    Le Ministère a dit au Comité que l’estimation de trois milliards de dollars tenait compte des réductions du taux de l’impôt des sociétés et donc aussi de la baisse du taux d’imposition des sociétés du secteur des ressources naturelles étalée sur six ans à compter de 2006 ou 2007, a-t-il dit. Pour sa part, HDR|HLB Decision Economics Inc. estime qu’on ne peut aboutir à ce résultat que si l’on pose en hypothèse des augmentations excessivement élevées des distributions des fiducies de revenu durant les prochaines années.

    Certains témoins, notamment Mme Urquhart, ne veulent pas que la période de transition de quatre ans proposée soit modifiée. Pour elle, un changement provoquerait une recrudescence d’activité à court terme sur le marché des fiducies de revenu et amènerait les personnes âgées à investir dans une catégorie d’actifs qu’elle considère comme présentant trop de risque pour elles.

    Quand il a comparu devant le Comité, le trésorier provincial de l’Île-du-Prince-Édouard a réitéré son appui à la période de transition de quatre ans proposée pour les fiducies de revenu existantes.

    Pour Finn Poschmann, le choix de la durée de la période de transition est à la fois subjectif et arbitraire. Cela dit, il considère que la période de quatre ans est une période raisonnable qui permettra aux sociétés ou fiducies concernées de réorganiser leurs affaires; une période plus longue ne ferait que faire durer le problème inutilement.

    Le représentant de TAMRIS Consultancy a dit au Comité qu’il ne voyait aucun avantage à étendre la période de transition au-delà de la période de quatre ans proposée. À son avis, les fiducies de revenu doivent se reconvertir le plus rapidement possible en sociétés par actions.

    Quand il a comparu devant le Comité, le porte-parole de HDR|HLB Decision Economics Inc. a dit que son cabinet avait estimé à 192 millions de dollars — 32 millions de dollars par an — les pertes fiscales qui résulteraient d’une prolongation de 6 ans de la période de transition qui porterait celle-ci de 4 à 10 ans. À son avis, la méthodologie suivie par son cabinet d’experts est identique à celle du ministère des Finances, mais leurs estimations respectives diffèrent grandement; il estime que le Ministère surestime, par un facteur de 15, les pertes fiscales associées à une prolongation de six ans de la période de transition proposée.

    Pour M. Cameron Renkas, une période de transition de 10 ans aurait fait perdre au marché environ 8 % de sa valeur et non 12,5 %, et fait économiser environ 10 milliards de dollars aux investisseurs canadiens.

    Des témoins ont fait savoir que d’autres pays avaient adopté des périodes de transition plus longues lorsqu’ils ont modifié le régime fiscal des sociétés de personnes cotées en bourse existantes; aux États-Unis, notamment, cette période était de 10 ans et les sociétés de personnes n’étaient assujetties à aucune restriction concernant l’expansion de leurs activités existantes ou l’acquisition d’entreprises générant un revenu admissible; toute expansion vers une nouvelle activité ne générant pas un revenu admissible et non liée étroitement à la vocation existante de l’entreprise ne devait pas représenter plus de 15 % de l’actif ou du revenu brut.

    L’Association canadienne des fonds de revenu a fait savoir au Comité qu’il faudrait limiter les futures conversions en fiducie de revenu, ce qui revient à appuyer implicitement la protection des droits acquis des fiducies existantes. M. Yves Fortin souscrit à l’idée d’adopter des critères et des mesures réglementaires pour déterminer quels types d’entreprises peuvent être autorisées à se convertir en fiducies de revenu.

    De même, M. Dave Marshall propose de limiter la création de nouvelles fiducies. M. Tait, qui préférerait une période de transition plus longue, a dit que le gouvernement fédéral aurait pu indiquer clairement dans quels secteurs il lui paraît inopportun d’autoriser des fiducies de revenu et fixer une taille d’entreprise à partir de laquelle les projets de conversion devraient faire l’objet d’un examen préalable.

    Tout en privilégiant l’exemption des fiducies de revenu existantes de l’application des nouvelles règles — et donc la protection des droits acquis — la Canada’s Association for the Fifty-Plus a affirmé que celles-ci devraient à tout le moins bénéficier d’une période de transition d’au moins 10 ans, comme aux États-Unis. Les épargnants auraient ainsi plus de temps pour réviser leur portefeuille dans le calme et peut-être récupérer une partie de leurs pertes. M. Don Francis aussi souscrit à la protection des droits acquis de toutes les fiducies de revenu existantes, sans contraintes relativement à leur croissance, jusqu’à ce que les propositions fiscales du 31 octobre 2006 du gouvernement fédéral aient fait l’objet d’un examen honnête et complet.

    M. William Barrowclough aussi souscrit à une période de transition de 10 ans et signale que c’est ce qui a été accordé aux États-Unis quand des changements similaires ont été effectués.

    Le Comité a reçu divers mémoires d’investisseurs canadiens qui, eux aussi, prônent la protection des droits acquis pour les fiducies de revenu existantes et estiment que la période de transition devrait être portée à 10 ans, conformément à ce qui se passe ailleurs. On a en outre proposé au Comité d’appliquer un principe fondamental en politique fiscale, à savoir protéger les droits acquis à l’égard d’opérations existantes conformes aux règles antérieures lorsque des mesures défavorables sont adoptées.

  6. Observations des témoins sur les sociétés de placement immobilier

    Le ministre des Finances a dit au Comité que, à l’étranger, dans les pays semblables au Canada, les sociétés de placement immobilier font l’objet de règles distinctes, ce qui justifie selon lui le maintien de cette pratique au Canada.

    Des témoins ont signalé que l’annonce du 31 octobre 2006 manquait de clarté en ce qui concernait l’exemption des SPI. L’Association canadienne d’investissements dans les fiducies de revenu a souligné la nature statique et passive de l’actif des SPI et leur contribution relative en tant que moteur de la croissance économique et de l’emploi ainsi que leur importance stratégique globale pour le Canada.

    Des investisseurs canadiens ont envoyé des mémoires au Comité pour faire savoir qu’ils estimaient que l’exemption des SPI était du favoritisme et qu’il était injuste de laisser prospérer celles-ci, sans rien changer, alors que le secteur énergétique n’est pas exempté. Ils ont fait valoir que les SPI devaient être assujetties au régime d’imposition des fiducies de revenu, au même titre que les fiducies et fiducies de revenu privées.

    L’Association des biens immobiliers du Canada a fait savoir dans son mémoire au Comité qu’elle était ravie de la décision de continuer à reconnaître les SPI. Cela dit, elle a estimé qu’il fallait résoudre quatre questions : l’imposition de restrictions concernant la propriété étrangère; la nécessité d’exiger de chaque entreprise faisant partie d’un groupe de SPI de se conformer séparément à toutes les règles; la clarification de ce qui constitue un revenu provenant d’une propriété aux fins des exceptions dont jouissent les SPI et la nécessité d’une conformité constante.