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FAAE Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent des affaires étrangères et du développement international


NUMÉRO 034 
l
1re SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 5 décembre 2006

[Enregistrement électronique]

(1550)

[Traduction]

    La séance est ouverte.
    Il s'agit de la 34e séance du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international. Nous poursuivons aujourd'hui notre étude sur le développement démocratique. Au cours des 10 ou 11 derniers mois, le comité a entrepris une étude de la façon dont nous apportons notre aide au développement et notre aide humanitaire dans le monde; cet automne, nous avons lancé une étude plus globale du développement démocratique et du rôle du Canada en faveur du développement démocratique.
    Nous avons le plaisir d'accueillir aujourd'hui de l'Université de Montréal Mme Diane Éthier, professeure titulaire au département des sciences politiques. Soyez la bienvenue.
    Veuillez nous excuser de notre retard. De temps en temps à la Chambre des communes il y a ce que l'on appelle des votes. Parfois nous sommes prévenus, et parfois quand nous invitons les témoins nous ignorons qu'il y en aura un. La bonne nouvelle, c'est que les votes sont terminés et que les membres du comité sont ici et ont hâte de vous entendre, madame Éthier.

[Français]

    Je remercie le comité de m'avoir invitée à témoigner au sujet du développement démocratique. Je dois dire cependant que Mme Crandall ne m'a pas donné beaucoup de précisions quant au thème que je devais aborder. J'ai consulté les questions que le comité se pose par rapport à ce thème. Évidemment, je ne peux pas répondre à toutes ces questions. Je vais donc faire une courte présentation sur le sujet principal de mes recherches depuis six ans, c'est-à-dire l'efficacité des stratégies de promotion de la démocratie. Comme vous allez le constater, les programmes d'assistance à la démocratie constituent un volet seulement, ou une stratégie de promotion de la démocratie, mais cela peut être intéressant de comparer cette stratégie avec les autres.
    Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, trois stratégies ont été utilisées en vue d'amener différents pays, soit à réaliser une transition de l'autoritarisme à la démocratie, soit à consolider leur régime démocratique par diverses réformes telles l'amélioration de la bonne gouvernance des administrations publiques, le renforcement de l'état de droit, la décentralisation des pouvoirs du gouvernement central, le développement de la société civile, l'extension des droits des minorités, la lutte contre la corruption, etc.
     La première de ces stratégies est le contrôle, c'est-à-dire l'imposition de la démocratie à un pays par des forces étrangères, unilatéralement ou avec le concours de certains acteurs politiques domestiques, à la suite de l'occupation militaire de son territoire.
    La seconde stratégie est la conditionnalité. Dans sa forme positive, la conditionnalité est l'obligation faite à un pays d'instaurer un régime démocratique ou de consolider ce dernier avant de pouvoir profiter d'un avantage: aide économique, allègement ou rééchelonnement de ses dettes, adhésion à une organisation internationale, etc. Dans sa forme négative, elle consiste à imposer à un État des sanctions: embargos, suspension d'une organisation internationale, etc., dont la levée est conditionnelle à l'adoption par ce pays de changements démocratiques.
    La troisième stratégie est celle des incitatifs. Elle consiste à octroyer gratuitement à un État diverses formes d'aide ou d'autres avantages en vue de l'encourager à instaurer ou à consolider la démocratie.
    Considérons, l'une après l'autre, l'efficacité de ces stratégies. Les expériences de contrôle ont été relativement nombreuses au cours de la période contemporaine. Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, cette stratégie a été utilisée par les Américains et leurs alliés au Japon, en Corée du Sud, en Allemagne, en Italie et en Autriche, et par les Britanniques, lors de l'accession à l'indépendance de plusieurs de leurs anciennes colonies, dans les Antilles et en Asie du Sud-Est. Depuis la fin des années 1980, elle a été utilisée par les États-Unis à Panama; par l'Union européenne, l'OTAN et l'ONU, en Bosnie et au Kosovo, et par les Américains et leurs alliés, en Afghanistan et en Irak.
    Aucune étude n'a tenté, jusqu'à ce jour, d'évaluer l'efficacité de ces scénarios d'imposition de la démocratie. Nous avons personnellement effectué une investigation préliminaire de certains de ces scénarios, au cours des derniers mois, en vue de préparer un projet de recherche soumis au Conseil de recherche en sciences humaines du Canada. Trois leçons ou enseignements ressortent de cette évaluation préliminaire.
    Premièrement, les démocraties imposées par les forces étrangères se sont développées ou consolidées uniquement dans les pays qui avaient atteint un niveau avancé de modernisation économique et sociale au moment de leur instauration — Allemagne, Autriche, Italie — ou qui ont connu un processus rapide de modernisation grâce aux investissements massifs et aux réformes économiques et sociales effectués par les puissances occupantes. C'est le cas du Japon.
    Deuxième leçon. Dans les pays sous-développés où une occupation étrangère de longue durée avait permis de créer chez les élites politiques nationales une culture de compromis et de coopération, le contrôle a permis l'instauration de démocratie minimale mais durable, par exemple dans les ex-colonies britanniques antillaises, ou encore des régimes hybrides mais stables, par exemple au Singapour et en Malaisie.
(1555)
    Troisième leçon: dans les sociétés traditionnelles caractérisées par une culture clanique et des conflits ethniques, religieux et politiques, où l'imposition de la démocratie par des forces étrangères est récente et où les investissements de la communauté internationale en matière de développement sont également récents et insuffisants — mentionnons la Bosnie, le Kosovo, l'Afghanistan et l'Irak —, le contrôle est un échec. Non seulement les règles d'une démocratie minimale — c'est-à-dire la possibilité pour tous les citoyens adultes de choisir leurs dirigeants dans le cadre d'élections justes, honnêtes et régulières lors desquelles les partis peuvent compétitionner librement pour l'obtention des suffrages en raison du respect effectif des libertés civiles et politiques fondamentales — ne sont pas appliqués, mais il n'existe pas encore d'État de droit digne de ce nom à l'intérieur de ces territoires.
    Parlons maintenant de la conditionnalité. La conditionnalité politique sous sa forme positive a été uniquement utilisée par la Communauté/Union européenne, dans le cas spécifique de ses élargissements vers les pays moins développés de l'Europe: adhésion de la Grèce, de l'Espagne et du Portugal; adhésion des pays de l'Europe centrale et orientale et de la Turquie; processus de stabilisation et d'association dans les Balkans de l'ouest. Une véritable conditionnalité entraîne en effet la perte assurée de l'avantage de la récompense promise si un État cible refuse de se conformer aux obligations prescrites. Or, les élargissements de la Communauté/Union européenne sont les seules situations où les États membres d'une organisation internationale sont unanimement résolus à appliquer cette sanction, car, en raison de leur degré très élevé d'intégration, ils ont tous intérêt à éviter les coûts inhérents à l'admission en leur sein d'un nouveau membre incapable de respecter les règles du jeu démocratique.
    Dans le cadre des accords d'association ou de coopération conclus avec des États tiers non candidats, l'Union européenne est incapable d'appliquer une véritable conditionnalité politique, en raison des intérêts divergents des États membres. Bien que la plupart de ces accords incluent désormais des clauses démocratiques assorties de sanctions, ces dernières ne sont pas appliquées ou sont appliquées de manière très partielle et limitée.
    Les études qui ont évalué l'efficacité de la conditionnalité politique des élargissements de l'Union européenne sont unanimes. Cette conditionnalité a été le facteur décisif de la chute des dictatures en Grèce, en Espagne et au Portugal. Elle a également été la cause la plus déterminante de la consolidation des nouvelles démocraties dans les pays de l'Europe centrale et orientale. L'efficacité de la conditionnalité de l'Union européenne est également démontrée dans le cas de la Turquie, où d'importantes réformes démocratiques ont été mises en oeuvre à la suite de son admission comme candidat officiel à l'adhésion, en 1999, et dans le cas de la Croatie, qui a satisfait, entre 2003 et 2005, aux conditions politiques imposées par le processus de stabilisation et d'association pour l'amorce des négociations d'adhésion.
    Deux théories sont utilisées pour expliquer l'efficacité de la conditionnalité des élargissements de l'Union européenne. La première théorie est la théorie réaliste. Les pays candidats se soumettent aux exigences de Bruxelles parce que l'avantage promis est crucial et sans alternative pour eux et qu'ils sont conscients de la détermination des États membres à les priver de cet avantage en cas de non-compliance. D'autres facteurs les incitent également à faire les réformes pré-accession. Il y a, premièrement, les généreux programmes d'aide incitatifs qui leur sont consentis, comme les programmes PHARE, TAIEX et Twinning, puis le monitoring serré des réformes par la commission et le conseil et, enfin, les institutions de partenariat créées en vue de les associer à la planification et à la mise en oeuvre des réformes.
    Selon la deuxième théorie, la théorie constructiviste, les élites politiques des pays candidats feraient les réformes pré-accession demandées non pas par calcul d'intérêt, mais parce qu'elles partagent les valeurs et les normes démocratiques à la base des réformes juridiques et institutionnelles demandées par l'Union européenne. Les succès partagés du processus de stabilisation et d'association de l'Union européenne dans les Balkans indiquent toutefois que l'importance de l'adhésion, les programmes d'aide, le monitoring et les institutions de partenariat ne suffisent pas, dans certains pays, à convaincre les élites politiques de procéder aux réformes démocratiques.
(1600)
    Depuis 2000, ni la Serbie, ni la Bosnie, ni la Macédoine, ni l'Albanie, ne sont parvenues à réaliser les réformes préalables à l'amorce de négociations d'adhésion. Ces constats tendent à corroborer la pertinence de la théorie constructiviste et de la théorie de la modernisation. Lorsque la culture des partis politiques dirigeants est fondée sur des valeurs contraires à celles de la démocratie — esprit de clan, ultra-nationalisme, autoritarisme, clientélisme — en raison, notamment mais non exclusivement, du retard de la modernisation économique et sociale, la conditionnalité est peu efficace.
    Je termine avec la troisième stratégie. Les programmes d'aide incitatifs au développement démocratique ne sont pas nouveaux, mais ils se sont multipliés de manière exponentielle depuis la fin de la guerre froide. Un très grand nombre d'organisations internationales, dont l'OSCE, le Conseil de l'Europe, la BERD, l'Organisation des États américains, l'Union africaine, l'ONU, l'Union européenne, les agences d'aide des 14 principaux pays donateurs de l'OCDE et des milliers d'ONG, financées dans une large mesure par les gouvernements occidentaux, ont investi argent, ressources humaines et temps dans ces programmes.
    L'efficacité de ces programmes demeure toutefois difficile à mesurer car très rares sont les organisations qui procèdent à l'évaluation de leurs programmes. Parmi les agences d'aide, seule la United States Agency for International Development procède à de telles évaluations depuis 1994, car elle y a été forcée par le Congrès. Certains chercheurs des universités et de fondations privées, comme la Carnegie Endowment for International Peace, ont toutefois évalué l'efficacité de quelques programmes mis en oeuvre par le Conseil de l'Europe, l'OSCE, le Pacte de stabilité pour l'Europe du Sud-Est et les ONG américaines. Leurs conclusions sont unanimes: dans l'ensemble, les résultats de ces programmes sont très modestes, sinon nuls, pour les raisons suivantes.
     Premièrement, l'aide accordée aux États receveurs a une importance très relative pour eux parce qu'elle est limitée, qu'elle est en baisse depuis 1990 et qu'elle peut être facilement remplacée par d'autre sources de revenus.
    Deuxièmement, la suspension, la réduction ou l'annulation de cette aide est peu crédible aux yeux des États bénéficiaires, car ces menaces de sanction ne sont presque jamais appliquées, en raison des conflits d'intérêts et des divergences idéologiques qui existent entre les pays donateurs et, au sein d'un même pays donateur, entre les ministères du gouvernement, les agences d'aide et les ONG.
    J'en sais quelque chose. Entre 1992 et 1995, j'ai donné à l'ACDI une formation sur la politique conditionnelle d'aide de la Banque mondiale. J'ai été confrontée à des conflits très importants au sein de l'ACDI, de même qu'entre l'ACDI et le ministère des Affaires étrangères, au sujet de cette fameuse politique. Il n'y avait aucun consensus. Cette situation n'est d'ailleurs pas unique au Canada. Elle prévaut dans plusieurs autres pays donateurs. J'ai fait des vérifications, entre autres en Suède, au Danemark, aux Pays-Bas et en France.
    Je peux ajouter que le professeur Stephen Brown, de l'Université d'Ottawa, dont le sujet de thèse de doctorat était l'aide aux pays africains, est arrivé à la conclusion que seuls deux pays, soit le Kenya et le Malawi, avaient réellement subi des sanctions pour ne pas avoir appliqué les réformes démocratiques demandées par les agences d'aide. À son avis, les sanctions n'ont jamais été appliquées aux autres pays africains.
    Thomas Carothers, qui est un des plus importants praticiens et évaluateurs des programmes de développement démocratique aux États-Unis et qui est attaché à la Carnegie Endowment for International Peace, adhère à ces conclusions, mais de manière nuancée. Dans son ouvrage le plus récent sur le sujet, intitulé Critical Mission et publié en 2004, il stigmatise les programmes d'aide au développement des sociétés civiles, mais il reconnaît que l'observation des élections et le renforcement de l'État de droit peuvent faire une différence significative, à condition, cependant, qu'ils soient réorientés.
(1605)
    Comme je n'ai pas beaucoup de temps, je vais résumer brièvement ses principales conclusions concernant ces trois types de programmes d'assistance démocratique.
    Les programmes visant à développer l'organisation des sociétés civiles, selon Carothers, ne contribuent pas à l'instauration ou à la consolidation des démocraties, d'abord parce que la société civile, étant constituée de toutes sortes d'acteurs, y compris de réseaux criminels et de délinquants, ne constitue pas en soi une garantie de démocratisation. Bref, il ne faut pas exagérer l'importance de la société civile en tant qu'acteur du développement démocratique.
    Il affirme ensuite que dans plusieurs pays, les ONG travaillant au développement de la société civile sont dans la plupart des cas des ONG occidentales qui n'ont aucun lien avec les ONG locales. Elles demeurent bien souvent concentrées dans la capitale du pays et développent des liens avec les autres ONG occidentales. Elles sont largement financées par leur gouvernement, de sorte que très souvent, la politique qu'elles défendent dans le pays d'accueil est celle de leur propre gouvernement. Il ne s'agit donc pas uniquement de développement démocratique désintéressé. Dans certains cas, cette situation entraîne des conflits avec le gouvernement du pays d'accueil, qui voit les ONG comme des organisations qui font de la propagande et du militantisme en faveur de leur pays d'origine.
    Vous avez sûrement entendu dire que Freedom House avait publié un rapport cette année sur la situation de plus en plus critique des ONG américaines dans plusieurs pays. En effet, elles sont considérées indésirables depuis qu'elles se sont impliquées activement, entre autres, dans la Révolution orange en Ukraine, la Révolution des roses en Géorgie et la révolution au Kirghizistan. C'est une situation très délicate et très complexe.
    La troisième raison qu'invoque Carothers pour critiquer les programmes de développement des sociétés civiles est que dans le cadre de dictatures, les ONG font souvent la promotion de revendications démocratiques qui mettent en péril la sécurité des citoyens et qui, en fait, conduisent à un resserrement des mesures de répression par les régimes au pouvoir. On obtient donc des résultats qui sont contraires à l'objectif recherché.
    Selon Carothers et bien d'autres auteurs, l'observation des élections est une intervention plus efficace en matière de défense de la démocratie, dans la mesure où elle peut permettre de déceler les fraudes avant ou pendant les élections tout en consolidant ce processus dans les pays en transition vers la démocratie. Cependant, seuls les gouvernements ou organisations internationales qui envoient des observateurs compétents et chevronnés sur le terrain longtemps avant les élections et qui les maintiennent sur place jusqu'à la publication officielle des résultats — qui sont longs à venir, dans certains pays — sont en mesure d'influencer le processus.
    Carothers déplore le fait qu'il y ait de plus en plus d'amateurs qui observent les élections sur le terrain. Il nomme les organisations qui sont, à son avis, les plus aptes à faire de l'observation d'élections de façon efficace. Elles sont : Carter Center; International Foundation for Election Systems; Democracy Promotion Unit of the OAS; United Nation Electoral Assistance Unit; Office for Democratic Institutions and Human Rights of the Organization for Security and Cooperation in Europe. Malheureusement, Élections Canada ne fait pas partie de la liste.
    Le dernier type de programme dont je voulais parler est la promotion de l'État de droit. Celle-ci est jugée positive en tant que telle, mais son efficacité est diminuée par le manque flagrant de connaissances chez les acteurs externes.
(1610)
    On croit souvent à tort qu'en voulant modeler le fonctionnement du système judiciaire des pays cibles sur celui des pays occidentaux, on améliorera l'État de droit. Or, le respect des lois par les citoyens dépend moins de la compétence et de l'efficacité des juges — cette dernière notion pouvant même favoriser la mise en place d'une justice expéditive défavorable au citoyen mais favorable à un État autoritaire — que de la légitimité des lois aux yeux des citoyens, un phénomène largement lié à la perception qu'ils entretiennent à l'égard du fonctionnement des institutions politiques.
    Ce constat signifie qu'il vaut peut-être mieux travailler à l'élargissement de la représentativité des systèmes politiques, pour accroître la légitimité de la démocratie aux yeux des citoyens et faire en sorte qu'ils respectent davantage les lois, que d'investir beaucoup d'argent dans l'amélioration du fonctionnement du système judiciaire.
    C'est finalement le message de Carothers et d'autres auteurs.

[Traduction]

    Pardon, madame. Pouvez-vous nous donner une idée du temps qu'il reste à votre exposé?
(1615)
    Deux secondes.
    Je vous accorde deux secondes.
    Allez-y. Nous en sommes à 21 minutes et je voulais savoir. Je ne veux pas vous interrompre.
    Je peux m'arrêter ici si vous le voulez.
    Non, allez jusqu'à la conclusion. Je voulais seulement avoir une idée.

[Français]

    En conclusion, le bilan des stratégies de promotion de la démocratie tend à corroborer la thèse fondamentale des théories de la démocratisation depuis plus de 50 ans.

[Traduction]

    La démocratie est une question intérieure par excellence.

[Français]

     Bien que les stratégie plus contraignantes, comme le contrôle et la conditionnalité, soient plus efficaces que les incitatifs, leur succès dépend ou de l'existence de conditions économiques, sociales, politiques et culturelles favorables dans les pays cibles, ou de la création de ces conditions au prix d'investissements massifs et d'interventions judicieuses et ciblées pendant une longue ou une très longue période de temps.

[Traduction]

    Merci beaucoup, madame Éthier.
    Nous allons entamer la première série de questions en commençant par M. Patry.
    Vous avez sept minutes.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Madame Éthier, merci beaucoup. Ce fut très intéressant. C'est comme si on se retrouvait sur les bancs d'école. Votre présentation était fascinante.
     Vous nous avez parlé de l'expérience contrôlée, des « réussites » de certains pays, comme ceux dont la démocratie a été imposée ou qui avaient déjà atteint un niveau économique et social. Vous avez également parlé des pays sous-développés qui ont été sous une occupation étrangère pendant une longue durée, ce qui leur a permis de développer une élite politique. Cela a quand même fonctionné dans certains endroits, dont les Caraïbes. Ensuite, vous avez parlé des sociétés traditionnelles comme on en voit actuellement, des sociétés claniques comme celles en Irak, en Afghanistan et dans d'autres pays.
    Vous avez également parlé de conditionnalité politique selon deux théories : réaliste et constructive. Vous avez aussi parlé du rôle des ONG et avez été un peu critique, dans un certain sens, quant à leur rôle. Vous avez parlé de l'observation des élections et de la formation des juges. À la fin, vous avez dit:

[Traduction]

La démocratie est une affaire intérieure par excellence.

[Français]

    Que peut-on faire dans le cas d'un pays comme Haïti, un cas que nous avons étudié? Je suis allé plusieurs fois en Haïti. On constate que tout est à reprendre, à reconstruire du début.
     Vous avez parlé de la formation des juges. À cet égard, Haïti est régie par le Code Napoléon de 1821, qui n'a jamais été amendé. Or, dans les cas de viols et dans certains autres cas, l'ADN n'est pas admis en cour parce que le code n'a pas été amendé. De plus, on constate que 90 p. 100 des nouveaux parlementaires élus n'ont jamais fait de politique.
    Dans un pays comme Haïti, où le Canada veut être présent et améliorer les choses, de quelle façon pourrait-on s'engager, sans devoir revenir à la case départ dans deux, trois ou quatre ans, avec un nouveau président?

[Traduction]

    Merci, monsieur Patry.
    Madame Éthier.

[Français]

    Je ne connais pas très bien le cas d'Haïti. Je me souviens que quand j'ai été consultante pour l'ACDI, entre 1992 et 1995, on se posait déjà la question: que peut-on faire en Haïti? Connaissant déjà assez bien à l'époque les processus de démocratisation, j'avais dit aux gens de l'ACDI que quel que soit le type d'intervention que le Canada fera en Haïti, je n'étais pas très confiante quant aux résultats. Malheureusement, plus de 10 ans plus tard, les faits ont confirmé mon pessimisme. Que puis-je vous dire?
    On ne peut pas empêcher le Canada d'essayer d'améliorer la situation, pour des raisons peut-être politiques: la communauté haïtienne au Canada est importante. Cela ne me concerne pas, mais en tant que spécialiste des questions de démocratie, je dois dire la vérité. Les conditions internes — économique, sociale, culturelle et politique — en Haïti sont défavorables au développement de la démocratie, et même si la communauté internationale intervient, elle ne pourra pas changer ces conditions, à moins de faire des investissements très importants durant une très longue période de temps.
    Les exemples que je donne dans mon texte sont ceux des anciennes colonies britanniques. La Grande-Bretagne — il faut reconnaître ses qualités par rapport à d'autres puissances coloniales — a su créer dans plusieurs de ses colonies des conditions favorables à l'instauration de régimes démocratiques; cela a duré des décennies et des décennies. Prenons le cas de l'Inde. L'Angleterre a commencé en 1880 à éduquer les élites indiennes à la démocratie locale, et en 1949, quand l'Inde est devenue indépendante, les élites indiennes connaissaient les règles de la démocratie, étaient d'accord avec ces règles et voulaient les instaurer. Mais cela a pris 70 ans.
(1620)
    En pratique, par où commence-t-on, en Haïti? Est-ce qu'on commence par la bonne gouvernance, par le Parlement? Nous, parlementaires, voulons aider le Parlement afin d'aider les parlementaires. Cependant, si on ne veut pas être pessimistes et si vous étiez consultante pour notre comité — parce que vous êtes consultante aujourd'hui —, quelles recommandations nous suggéreriez-vous de faire à notre gouvernement?
    J'étudierais la situation en Haïti avant. Pour le moment, je connais mal le cas, alors je ne veux pas...
    M. Bernard Patry: Je comprends.

[Traduction]

    Monsieur Wilfert: deux minutes.
    Merci, monsieur le président.
    J'ai une courte question. La Fédération canadienne des municipalités a proposé un programme mondial de gouvernance locale avec l'ACDI. Essentiellement, on parle souvent de développement démocratique où on voit une approche de haut en bas, où nous élisons le président, nous avons un parlement ou un congrès, mais on n'essaie pas vraiment de favoriser au niveau local les racines pour avoir un développement démocratique réussi. Le Canada a participé aux élections communales au Cambodge, par exemple, au début des années 90. Mais ce programme, le programme mondial pour la gouvernance locale, doit se doter d'une approche systématique pour travailler avec les ONG locales, la population locale, pour s'assurer qu'il est vraiment soutenu, que les ressources sont appliquées, etc.
    Vous ne connaissez peut-être pas la proposition, mais juste sous l'angle de l'approche générale à la gouvernance démocratique, je me demandais si vous pouviez nous faire part de vos commentaires.

[Français]

    Vous me demandez de vous donner mon avis sur les programmes de local governance, de démocratie locale. Dans un article que j'ai publié en 2003 dans la revue Democratization, j'ai examiné les programmes de l'ACDI, notamment en Asie du Sud-Est et aux Philippines, où des programmes de démocratie locale ont été instaurés à quelques reprises.
    Le problème, c'est que l'ACDI n'évalue pas l'impact de ces programmes. Il n'existait aucun document à l'ACDI qui pouvait me dire si cela avait donné des résultats ou si la situation était meilleure après qu'avant. Alors, le seul indicateur que j'avais, c'était Freedom House, qui mesure l'évolution des libertés civiles et politiques dans les pays. Je dois dire que, malheureusement, la cote accordée par Freedom House n'était pas meilleure après qu'avant, dans le cas des Philippines et d'autres pays qui avaient été la cible de ces programmes de local governance de l'ACDI.
    Alors, évidemment, on ne peut pas tirer de conclusion juste à partir des rapports de Freedom House, mais c'est tout ce qu'on a. Alors, c'est très difficile pour les experts de répondre, parce qu'il n'y a pas d'évaluation de ces programmes. Comme je l'ai dit, il y a seulement la United States Agency for International Development, qui fait des évaluations parce que le Congrès américain l'a obligé à en faire, en 1994. Encore là, leur travail fait l'objet de critiques. J'ai publié des articles à ce sujet. Il y a des limites aux évaluations de l'USAID parce qu'il n'y a pas assez d'experts qui vont sur le terrain, ils y restent seulement trois semaines, ce qui n'est pas assez long, et ils ne rencontrent pas assez d'intervenants locaux. Alors, les évaluations de l'USAID pourraient être meilleures, mais c'est déjà mieux que ce qu'offre l'ACDI, qui n'a aucune évaluation.
(1625)

[Traduction]

    Merci, madame Éthier.
    Nous allons passer au Bloc.

[Français]

    Madame Barbot et madame Bourgeois, vous avez sept minutes.

[Traduction]

Ils vont se partager le temps.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je vais être très brève parce que M. Patry a posé la question que je voulais poser.
    Merci d'être venue nous rencontrer, madame Éthier, même si vos propos sont plutôt alarmants, même s'ils viennent aussi attester certaines idées dont on entend parler depuis très longtemps. En fait, si l'aide internationale fonctionnait, il y a longtemps que des pays seraient sortis du sous-développement. Or, on est en train de produire le sous-développement à la tonne.
    J'étais au Rwanda en 1980, alors que toutes les organisations internationales étaient présentes, et tout ce qui florissait, c'était le nombre d'employés d'organisations internationales. Donc, même si cela fait mal d'entendre ce que vous dites, je pense qu'à la base, il faut avouer que l'aide telle qu'elle est conçue fonctionne difficilement.
    J'imagine que ce n'est pas par hasard que le modèle que vous avez présenté comme pouvant avoir du succès dans certaines conditions, c'est la conditionnalité, qui a fonctionné dans certains États européens.
    Cela étant dit, que faut-il faire? Je sais que la question est large.
    Comme je l'ai dit, la conditionnalité est utilisée presque uniquement par l'Union européenne parce que seule l'Union européenne peut l'utiliser, pour deux raisons.
    Voici la première raison: l'Union européenne offre aux pays candidats une récompense incroyable, soit l'adhésion à l'Union européenne. L'importance de cette récompense pour les pays candidats est cruciale et sans équivalence. Il n'y a pas de meilleure issue pour un pays que d'adhérer à l'Union européenne.
    Voici la seconde raison: tous es États membres sont déterminés à priver de cette récompense un pays candidat qui ne ferait pas les réformes démocratiques demandées. On comprend facilement pourquoi: en acceptant un pays qui ne respecterait pas les règles de la démocratie dans l'Union européenne, tous les États membres seraient pénalisés et en subiraient les contrecoups, et les pays candidats le savent. Toutefois, il n'y a que l'Union européenne qui soit dans cette situation de pouvoir utiliser la conditionnalité.
    La conditionnalité négative dont j'ai parlé peut exister. Je voudrais donner l'exemple du Commonwealth. Notre ex-premier ministre Brian Mulroney avait joué un rôle très important dans la décision du Commonwealth d'adopter un embargo contre l'Afrique du Sud pour l'obliger à abandonner l'apartheid et à instaurer la démocratie. Je me souviens que cela a pris des mois et des mois avant que le premier ministre Mulroney réussisse à convaincre les autres pays du Commonwealth d'appliquer cet embargo. En effet, certains pays du Commonwealth avaient intérêt à ne pas sanctionner l'Afrique du Sud. Cela a été très long, mais le jour où ils en sont venus à une position unanime, l'embargo a été efficace.
    Lorsqu'un groupe de pays peut s'entendre pour offrir une extrêmement grande récompense ou pour imposer une très dure punition à un pays, cela peut être efficace. Cependant, c'est très difficile de créer cette unanimité entre des pays qui ont des intérêts divergents.
    L'Union européenne, bien sûr, est unique. En effet, en ce qui concerne l'intégration, on en est rendu à l'union économique, monétaire et même politique, mais c'est unique au monde. Certains diront qu'on peut la comparer à l'ALENA. Non, je m'excuse, on ne peut pas comparer l'ALENA et l'Union européenne. Ce sont deux choses complètement différentes.
    La conditionnalité est efficace, mais on ne peut pas l'utiliser. Telle est la conclusion.
(1630)

[Traduction]

    Merci, madame.
    Madame Bourgeois.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Madame Éthier, j'ai trouvé votre présentation extrêmement intéressante. Malheureusement, nous n'avions pas les documents.
    Serait-il possible que la greffière nous fasse parvenir vos notes?

[Traduction]

    Madame, nous avons effectivement le document en français et il sera traduit pour être distribué à tous les membres.

[Français]

    Excellent.
    Cela mis à part, nous n'avons pas beaucoup de notes portant sur votre parcours. Je viens d'apprendre à l'instant que vous avez travaillé à l'ACDI.
    Je trouve cela extrêmement intéressant parce que nous avons effectué ensemble, en octobre, un voyage dans les pays scandinaves et en Grande-Bretagne. Nous avons pu aller questionner des gens qui, comme vous, font des recherches sur la façon d'établir la démocratie, quant aux moyens à utiliser pour ce faire.
    En lisant mes notes, j'ai constaté que vous êtes la cinquième personne à venir nous dire aujourd'hui qu'on n'impose pas la démocratie.
    Je voudrais vous poser la même question que je pose toujours à nos invités. Selon une pratique exemplaire d'établissement d'une démocratie dans un pays, quelles étapes devrait-on suivre?
    Je l'ai répété. Il faut s'informer de ce que les Britanniques ont fait dans plusieurs de leurs colonies. C'est vraiment très intéressant de constater comment ils ont procédé pour créer des conditions favorables à l'instauration de la démocratie au moment de l'indépendance de ces pays.
    Ce n'est pas un hasard si les démocraties des anciennes colonies britanniques sont stables, durables, et que plusieurs se sont consolidées, alors que dans les régimes politiques des ex-colonies françaises, espagnoles ou portugaises, c'est tout à fait différent.
    C'est curieux que je dise cela, en tant que Canadienne française, mais il faut reconnaître les faits. C'est ainsi.
    Cependant, vous avez parlé du Kenya. Or, on sait que la Grande-Bretagne a laissé le Kenya dans le rouge dans une proportion de 97 p 100; seulement 3 p. 100 des gens pouvaient vivre.
    C'est une question très intéressante. La Grande-Bretagne n'a pas agi de la même façon avec toutes ses colonies. À l'époque, il y avait en Grande-Bretagne — disons-le franchement — des préjugés racistes très importants à l'égard de l'Afrique et de l'Asie centrale. Par conséquent, les politiques de la Grande-Bretagne en Asie du Sud-Est ont été différentes de celles qu'elle a utilisées en Afrique ou en Asie centrale. Vous avez tout à fait raison à cet égard. Il faut se replacer dans le contexte de l'époque.
    Cependant, dans la plupart des cas où elle a préparé les conditions à l'avènement de démocraties durables, cela a été assez efficace. Et l'une de ces conditions, certes, c'est l'éducation. Il y a d'abord l'éducation des élites, puis les expériences de démocratie locale. Finalement, on élargit progressivement la démocratie à d'autres.
    Habituellement, les Britanniques n'appliquaient jamais le même modèle dans tous les pays. Contrairement aux Américains — il faut leur donner cela —, ils étudiaient en profondeur l'histoire d'un pays, ses caractéristiques particulières, et leurs stratégies étaient adaptées aux conditions spécifiques de chaque pays. Ce n'était pas standardisé.
     Je peux affirmer une chose: on a dit qu'aucun des soldats américains en Iraq ne parlait arabe. Néanmoins, les soldats britanniques en Inde parlaient plusieurs langues de ce pays. Que l'on pense aux départements de langues qui existaient dans les universités de Cambridge ou d'Oxford. C'était incroyable. Finalement, tous ceux qui allaient dans les colonies devaient apprendre les langues locales, de sorte que lorsqu'ils partaient, ils étaient déjà au courant de l'histoire, de la culture et de ces langues. C'est certainement très important.
    D'autre part, il y a le développement économique, bien sûr. Je me rappelle que notre ex-premier ministre Jean Chrétien disait que c'était plus important de soutenir le développement économique en Chine que de critiquer les lacunes de la démocratie en Chine. À mon avis, il avait tout à fait raison.
    Ce qui va faire qu'un pays comme la Chine deviendra démocratique, c'est la poursuite du développement d'une économie de marché, comme c'est le cas actuellement. Au regard de la troisième vague de démocratisation depuis 1975, une quarantaine de pays sont devenus démocratiques. Ce sont tous de nouveaux pays industriels, et ils ont tous connu un développement économique et social accéléré dans les années 1960 et 1970. Les exceptions à la règle sont les quelques pays africains qui sont devenus démocratiques dans les années 1990. Malheureusement, les derniers rapports sur la démocratie en Afrique ne sont pas très encourageants.
(1635)

[Traduction]

    Merci.
    Monsieur Goldring, vous avez sept minutes.
    Bienvenue, madame Éthier. Nous sommes heureux de vous accueillir ici aujourd'hui.
    Vous avez tenu dans votre déclaration liminaire des propos très décourageants auxquels je souscris: les politiques que nous avons tenté d'établir ne portent pas les fruits de la démocratie que l'on espérait.
    C'est le cas en particulier d'Haïti. Oui, il y a eu des élections pacifiques, mais il ne semble pas y avoir beaucoup de matière derrière la façade.
    Vous avez évoqué certains pays britanniques. L'été dernier, j'étais en Guyane, où il y a eu des élections. Voilà bien un pays qui n'a pas profité de l'accession à l'indépendance. Politiquement, le pays semble ne pas avoir évolué depuis 1962, année de son indépendance.
    Il y a un autre pays aujourd'hui qui est dans l'actualité, les îles Fiji. Je pense que c'est le dixième renversement du gouvernement en une dizaine d'années.
     Il semble y avoir donc beaucoup d'exceptions. Le fait qu'il y a des différences est la raison pour laquelle le comité essaie d'analyser ce qui peut être fait — pas un système unique qui permet de tout faire, mais un système qui nous permettrait d'aborder chaque pays en fonction de ses capacités et de ses particularités.
    En préparation de la réunion d'aujourd'hui, j'ai lu une brochure de Droits et démocratie. Il s'agit d'un article de Hau Sing Tse de la Direction générale de l'Asie à l'Agence canadienne de développement international. J'aimerais entendre votre réaction. Je vais en lire un paragraphe :
    À l'ACDI, nous croyons fermement qu'une bonne gouvernance — ce qui signifie la liberté, la démocratie, la primauté du droit et le respect des droits humains — est nécessaire pour favoriser une croissance économique équitable...
    Monsieur Goldring, il va vous falloir lire plus lentement. Je vous accorderai dix secondes de plus à la fin.
    D'accord.
    Je cite :
...nécessaire pour favoriser une croissance économique équitable et un développement durable... Une mauvaise gouvernance entraîne des conséquences négatives comme la corruption, des carences au chapitre de la prestation des services....
    ...Une discussion visant à déterminer si la sécurité, le développement économique ou le développement démocratique devrait passer en premier pourrait certes contribuer à soulever des questions importantes. Mais elle ne serait pas vraiment utile aux communautés locales qui cherchent à avoir une vie meilleure et à réduire leur vulnérabilité face à la pauvreté. Les progrès dans tous ces domaines doivent être réalisés simultanément si nous voulons aider les populations à bâtir un meilleur avenir pour leurs enfants.
    J'aimerais savoir ce que vous pensez de ces affirmations étant donné que le comité est à la recherche de nouvelles initiatives et de nouvelles formules de développement démocratique. Il y a une communauté de vues au comité et nous commençons à réaliser que, oui, le développement démocratique doit être incorporé aux efforts de réduction de la pauvreté et de promotion de la bonne gouvernance — pour qu'il fasse un tout. Estimez-vous que l'on ne peut pas considérer ceci encore une fois comme une façon, j'espère, de faire de nouveaux pas dans le développement de ces régions à l'avenir, au lieu d'être pessimistes et d'essayer de s'engager loin dans un autre secteur qui peut ou peut ne pas être inclus, même s'il pourrait bien l'être? Ne devrions-nous pas essayer à nouveau à l'aide de cette formule qui forme un tout?

[Français]

    Cette politique était la nouvelle politique conditionnelle d'aide de la Banque mondiale, tout au début des années 1990, en 1992, si je me souviens bien. On voulait tout faire en même temps: promouvoir le développement économique, lutter contre la pauvreté, promouvoir la protection de l'environnement, améliorer la bonne gouvernance et développer la démocratie.
    Il y avait presque 10 volets à la politique conditionnelle d'aide de la Banque mondiale, et cela n'a pas fonctionné. Cela ne pouvait pas fonctionner. Je me souviens qu'à l'ACDI, beaucoup d'agents étaient contre cette politique et la critiquaient, et ils avaient en grande partie raison.
    En effet, toutes les théories sur la démocratie, depuis plus de 50 ans, soutiennent que la démocratie ne peut pas se développer dans un pays pauvre et sous-développé. On ne peut donc pas faire en même temps du développement économique et social et la démocratisation, parce que cette démocratisation est une conséquence du développement économique et social.
    C'est du wishful thinking que de penser qu'on va instaurer une démocratie durable dans un pays pauvre comme Haïti, qui est un des plus pauvres de la planète. Non seulement ce pays est pauvre, mais il n'y a même pas d'État de droit, en Haïti. L'État ne contrôle pas l'ensemble de ses citoyens et de son territoire. On est au stade bien antérieur, on est au stade de créer un État de droit. Ne parlons pas de démocratie. C'est sûr qu'on peut toujours organiser des élections, mais immédiatement après les élections, les problèmes vont refaire surface. Il y a quelque chose de totalement artificiel dans le fait de s'entêter à vouloir organiser des élections démocratiques dans un pays qui, par ailleurs, n'a aucune autre caractéristique de la démocratie et qui ne peut pas les avoir parce que son développement économique et social est trop faible.
    Je pense que les experts diraient que si vous voulez aider les pays à progresser vers la démocratie, aidez le développement économique et social, et plus tard, vous penserez à instaurer des institutions politiques démocratiques.
(1640)

[Traduction]

    Quand on regarde un pays comme l'Iraq, je pense que c'est l'exemple d'un endroit où les trois choses se font simultanément. Il y a des problèmes de sécurité et, évidemment, le développement démocratique est difficile à réaliser tant qu'il n'y aura pas la sécurité et tout le reste. Tout comme le dit cet article, il faut s'occuper des besoins particuliers du pays. Certains ont besoin d'un surcroît de sécurité. La Guyane, par exemple, a besoin d'institutions démocratiques, de travailler avec les partis politiques pour améliorer son système alors qu'Haïti est vraiment un État défaillant. Il doit améliorer sa sécurité à partir de la base, travailler auprès des villages et des villes pour constituer un embryon de démocratie. Il y a tant à faire qu'il est difficile de décrire le problème en un mot. Les besoins de chaque pays varient et j'irais jusqu'à dire que les îles Fiji elles aussi ont besoin d'une formule adaptée.
    Êtes-vous en train de nous dire qu'il n'y a rien à faire, qu'il n'y a que l'aide liée pour forcer le gouvernement d'Haïti à prendre certaines mesures? Ou est-ce que cela est aussi voué à l'échec parce que le gouvernement d'Haïti le rejetterait?

[Français]

    Je ne comprends pas pourquoi le Canada ou d'autres pays veulent à tout prix que tous les pays de la planète soient démocratiques en 2006.
    J'ai donné l'exemple de la Malaisie et de Singapour, qui ne sont pas, au sens strict du terme, des démocraties; ce sont des régimes hybrides. C'est-à-dire que ce sont des pays dont le système politique a beaucoup de caractéristiques démocratiques, mais aussi des caractéristiques autoritaires. Toutefois, ces régimes sont stables, pacifiques. Ce sont des pays qui ont maintenant des conditions économiques et sociales enviables pour beaucoup d'autres pays.
    Je mentionne juste un élément : 85 p. 100 des logements sont subventionnés, à Singapour. En effet, les gens y ont des conditions de vie tellement bonnes sur le plan matériel que le fait que la liberté de presse ne soit pas complète et qu'il faille toujours que le PAP soit réélu ne leur pose pas d'énormes problèmes, d'autant plus que 76 p. 100 de la population est chinoise et que la culture est confucianiste. Comme vous le savez, c'est une culture en vertu de laquelle les citoyens doivent respecter l'autorité. Par conséquent, les Singapouriens ne sont pas des gens qui veulent beaucoup de libertés individuelles.
    Je vous avoue franchement que cela ne m'empêche pas de dormir. Je préfère un régime comme celui de Singapour ou de la Malaisie à une démocratie extrêmement faible où la corruption existe et dont une partie du territoire est entre les mains de certaines bandes de trafiquants, etc. Cela ne veut alors rien dire.
    Il y a eu une époque où l'aide était quand même centrée sur le développement économique et social. La question de la démocratie est devenue prioritaire après la fin de la guerre froide. On a voulu absolument propager le modèle démocratique rapidement à l'ensemble des pays de la planète. Toutefois, je le répète, c'est du wishful thinking et ça ne fonctionnera pas. Ça ne peut pas fonctionner. Je le répète, la démocratie ne peut pas fonctionner dans un pays très pauvre. Énormément de textes le prouvent. Un des plus grands sociologues américains, Seymour Martin Lipset, l'a très bien expliqué dans plusieurs textes.
    Le développement économique et social change la culture des individus. Elle crée des classes moyennes. Donc, elle change la structure sociale, et les classes moyennes sont en mesure de négocier avec les élites des compromis politiques qui vont satisfaire aussi en partie les revendications des pauvres. C'est ainsi que la démocratie peut s'instaurer et durer. Ces changements culturels, ces changements de comportements politiques sont les conséquences de l'industrialisation, de l'urbanisation, de l'éducation, etc.
(1645)

[Traduction]

    Merci, monsieur Goldring, madame Éthier.
    Madame McDonough.
    Merci beaucoup, monsieur le président.

[Français]

    Merci beaucoup, madame Éthier, de votre présence parmi nous aujourd'hui.

[Traduction]

    J'aimerais d'abord poser une ou deux questions pour obtenir des précisions puis poser une question de nature plus générale.
    Je crois vous avoir entendu dire que l'ACDI ne fait pas vraiment d'évaluation de l'efficacité de certains de ses programmes. Parliez-vous des résultats des initiatives de développement démocratique ou de l'ACDI en général quand vous parliez d'absence d'évaluation rigoureuse?

[Français]

    Je parlais de l'absence d'évaluation des programmes de développement démocratique de l'ACDI. J'ai examiné les programmes de développement démocratique dans les années 1990 : de 1992 à 2002. J'ai communiqué avec la direction de l'ACDI et demandé si on avait des évaluations publiques de tous ces programmes. La réponse a été non.
    L'ACDI n'est pas la seule agence qui n'évalue pas ses programmes. J'ai vérifié: au Danemark, en Suède et au Japon, c'est la même chose. Néanmoins, c'est un problème. En effet, comment peut-on savoir si on doit continuer ou modifier les programmes, sans évaluation? L'USAID en a plusieurs, mais comme je l'ai dit, il y a des lacunes dans ses méthodes d'évaluation des programmes. Toutefois, à mon avis, c'est déjà beaucoup mieux que l'ACDI, qui n'a rien.

[Traduction]

    Madame McDonough.
    Ce rôle conviendrait-il, selon vous, au Conseil de recherche pour le développement international, organisme indépendant assujetti à une loi distincte de celle qui régit l'ACDI? Pourrait-il évaluer l'ACDI précisément en raison de son autonomie au lieu de faire faire cette évaluation à l'interne, où il n'y a pas autant d'objectivité et d'indépendance?

[Français]

    Vous avez raison. Je pense qu'il serait préférable que l'ACDI ne fasse pas elle-même l'évaluation de ses propres programmes. Comment procède l'USAID? La loi du congrès américain l'oblige à embaucher des experts indépendants de l'USAID, des gens qui ne travaillent pas pour l'USAID. Les gens qui font les évaluations sont des universitaires, des gens qui appartiennent à différentes fondations, mais qui sont quand même payés par l'USAID. Quand on les envoie en mission durant trois semaines pour faire une évaluation, le fait qu'ils soient payés par l'USAID peut représenter un genre de conflit d'intérêts. Cela peut modifier leurs conclusions, en quelque sorte. Il serait donc préférable que ce soit fait par un organisme indépendant.
(1650)

[Traduction]

    Vous savez que nous nous sommes penchés sur les États défaillants et en déroute. Si je comprends bien vos conclusions, elles sont plutôt décourageantes. Je vais m'assurer de bien comprendre votre position. Vous estimez que le développement socio-économique est le préalable au développement démocratique.
    Dans ce cas, même si je comprends ce que vous avez dit à propos de l'UE, où l'on peut appliquer la conditionnalité, il me semble que c'est tout le contraire de ce que nous essayons d'accomplir. Autrement dit, il y a presqu'une réciprocité entre l'UE et les États qui veulent être admis. C'est une incitation qui s'applique à quelque chose qui est très concret et très réel.
    Prenons le cas de l'Afghanistan. C'est un pays où beaucoup craignent qu'on ne mette la charrue avant les boeufs. Surtout à Kandahar. Dans vos travaux, avez-vous examiné la question de la militarisation croissante de l'aide comme méthode de développement supposément économique et social comme préalable à la démocratie?
    La militarisation de l'aide? C'est ça votre question?
    Oui.
    La militarisation de l'aide...
    Bonne chance, madame Éthier.

[Français]

    La question est intéressante et importante, mais je ne peux pas y répondre, parce que c'est le projet auquel je viens de commencer à travailler. Cela touche les expériences de démocratisation sous contrôle étranger. Il y en a eu plusieurs dans l'histoire. Je veux comparer et savoir si cela a fonctionné dans l'histoire, dans des pays sous-développés comme l'Afghanistan, ou si ça n'a jamais fonctionné.
    Actuellement, l'Afghanistan représente plus ou moins un échec. C'est un échec relatif, mais en ce moment, la Bosnie est aussi un échec, et le Kosovo ne va pas très bien non plus. Pourtant, il y a la conditionnalité de l'Union européenne, qui investit beaucoup d'argent en Bosnie et au Kosovo pour améliorer le développement économique et social. Il y a aussi le Pacte de stabilité avec l'Europe du Sud-Est. Quarante pays et organisations internationales participent à ce pacte et essaient de faire du développement économique et social en Bosnie pour créer les conditions favorables à la démocratie politique. Cela existe depuis 1995, depuis 11 ans, et le dernier rapport de l'Union européenne sur la Bosnie dit qu'elle ne fonctionne pas encore en tant que pays. Il faut maintenir en place des soldats de l'OTAN et de l'Union européenne, sinon les conflits ethniques vont redémarrer entre les Serbes, les Croates et les Bosniaques.
    On peut faire des comparaisons entre la Bosnie et l'Afghanistan. En Bosnie, comme je vous le dis, il y a plus d'aide et d'interventions qu'en Afghanistan, toute proportion gardée. Je sais que mes propos ne sont pas encourageants, mais que voulez-vous, je ne suis pas très optimiste pour l'Afghanistan. Je le dis bien franchement, je pense que la guerre contre les talibans va être un échec, à moins que l'OTAN ne décide d'envoyer 100 000 ou 200 000 soldats, mais l'OTAN ne fera jamais cela. Ce sera donc un échec. J'en suis absolument certaine.
(1655)

[Traduction]

    Est-ce que j'ai le temps d'en poser une autre?
    Vous en êtes à huit minutes. Allez-y, très rapidement.
    Ce qui m'intéresse seulement c'est de savoir si vous avez fait une analyse que vous pourriez communiquer au comité. Je sais qu'il n'y a pas beaucoup de temps ici, mais dans le sens du travail que vous avez déjà fait, avez-vous fait une analyse de la politique adoptée par le précédent gouvernement libéral et entérinée par le gouvernement conservateur qui a suivi, établissant les trois piliers du développement, de la diplomatie et de la défense comme principes sous-jacents ou assises de l'approche prise, apparemment, en Afghanistan?

[Français]

    Je n'ai pas étudié la politique étrangère canadienne. J'ai étudié les processus de démocratisation en général et j'ai comparé en général plusieurs cas de stratégies de promotion de la démocratie: contrôle, conditionnalité et incitations. Ma seule expérience canadienne est le travail que j'ai fait avec l'ACDI, mais c'était il y a longtemps, entre 1992 et 1995. Je ne peux donc pas répondre à votre question.

[Traduction]

    Merci, madame Éthier.
    Madame Barbot, je pense que nous allons nous en tenir là.
    Nous tenons à vous remercier d'être venues aujourd'hui. Nous relirons avec plaisir le compte rendu de votre témoignage. Nous apprécions les travaux que vous faites et le fait que vous ayez accepté de les communiquer au comité.
    Nous allons suspendre la séance pendant quelques instants pour permettre aux témoins de partir. Nous allons ensuite passer en séance à huis clos pour discuter de notre projet de rapport sur Haïti, après quoi nous allons aborder très brièvement les travaux du comité.
    [La séance se poursuit à huis clos]

    [La séance publique reprend]
(1740)
    Madame McDonough veut discuter de sa motion, ce que l'on pourra faire lorsque l'on discutera des travaux du comité.
    On l'a depuis quelques temps déjà. Elle découle de ma proposition initiale. J'essaie de me souvenir exactement à quand ça remonte. Lors d'un débat antérieur, il avait été proposé que j'en fasse une motion distincte. Elle se lit comme suit :
Que, conformément au paragraphe 108(2) du Règlement et aux termes de l'étude qu'il effectue au sujet du développement démocratique, le comité fasse rapport à la Chambre de sa recommandation visant à ce que le gouvernement lui présente son projet de stratégie pangouvernementale touchant les États en déroute, que les ministères pertinents comparaissent devant le comité afin de discuter de cette stratégie, et que des témoins soient invités à comparaître concernant les implications de la stratégie proposée sur le plan des droits de la personne et humanitaires.
    Mme McDonough vient de lire la motion dont nous sommes saisis aujourd'hui.
    Cela fait tellement longtemps, j'avais oublié, mais on a eu une discussion assez ouverte sur l'absurdité de nous lancer dans une étude d'envergure sur le développement démocratique, étant largement reconnu qu'il existe en fait une stratégie pangouvernementale pour les États en déroute, un document d'orientation, qui est actuellement en circulation. Pourquoi ne demanderions-nous pas d'avoir la chance d'en être informés et d'avoir la possibilité de l'examiner? Dans le cas contraire,c'est comme si deux ailes n'étaient pas coordonnées.
    Très bien, au sujet de la motion, monsieur Obhrai, allez-vous répondre?
    Oui. Je lis mes notes.
    Cela date de si longtemps. C'est quand nous faisions notre première révision au rapport sur Haïti, et j'ai proposé l'inclusion d'une recommandation pour que ce rapport sur le développement démocratique soit remis au comité. Je pense qu'il y avait consensus au comité sur une meilleure façon d'en traiter, au lieu d'en faire une recommandation à inclure dans le rapport sur Haïti — parce que ça ne s'applique pas seulement à Haïti — serait de mettre ça dans une motion distincte et de la présenter au comité; que nous demandions au gouvernement de nous remettre ce rapport pour que nous l'étudiions en invitant des représentants du gouvernement à venir nous en parler.
    Voilà donc l'origine de la motion. Si mes souvenirs sont bons, il y avait consensus au comité pour que nous procédions de cette façon au lieu d'en faire une recommandation dans le rapport sur Haïti.
    Une voix: C'est conforme au paragraphe 108(2) du Règlement?
    Mme Alexa McDonough: Oui, c'était conforme à ce paragraphe de faire cette demande au sujet du rapport à la Chambre. Nous demandons qu'il soit remis au comité et que nous l'examinions.
(1745)
    Monsieur le président, je n'ai rien à redire à propos de la motion présentée par Mme McDonough conformément au paragraphe 108(2) du Règlement aux termes de l'étude sur le développement démocratique. Nous pourrions voir à ce que des fonctionnaires du MAECI et de l'ACDI se préparent à comparaître devant le comité dans la première moitié de 2007 au sujet des engagements de programme, des principes et des objectifs pour faire enquête sur les États en déroute. Ce n'est pas quelque chose à quoi nous nous opposerions, parce que cela jetterait aussi de la lumière sur ce que fait le gouvernement du Canada au sujet des États en question.
    Nous n'avons donc aucune difficulté à appuyer la motion.
    Merci.
    Monsieur Patry.
    J'ai un petit problème à propos de la troisième ligne, « que le gouvernement lui présente son projet de stratégie pangouvernementale... ». Je n'ai jamais vu de gouvernement présenter une ébauche. Vous présentez quelque chose, mais pas une ébauche, parce qu'il peut y avoir 5, 10,15, 20 ébauches de rapport.
    Pour commencer, est-ce qu'il y a un rapport? Je n'en ai aucune idée. On m'a dit qu'il y en avait un, mais je ne suis pas sûr que ce soit le cas. Y a-t-il un rapport uniquement sur « les États en déroute »? Quelle est la définition d'« États en déroute », pour commencer? Je n'ai aucune idée. On a essayé de le définir dans le cas d'Haïti mais je n'ai aucune idée de ce qu'on entend par États en déroute.
    Je ne peux pas accepter le mot « projet ». Le gouvernement pourrait le retirer, le supprimer, peu importe. Mais pour moi, discuter du rapport... On peut demander au gouvernement de comparaître pour discuter de n'importe quoi mais la façon dont c'est rédigé...
    Je comprends ce que vous dites. Voulez-vous proposer un amendement amical? J'accepterai comme...
    [Inaudible — NDLR]... ma motion.
    Je comprends exactement ce que vous dites. Est-ce que je pourrais suggérer deux changements pour régler la question? D'abord, « que le gouvernement lui présente son projet de stratégie pangouvernementale touchant les États en déroute » et, deuxièmement, à la dernière ligne, on dise « les implications de la stratégie proposée ».
    Il est tenu acquis que nous parlons de la version finale et cela élimine le problème. Bernard a raison de faire cette suggestion. Pourquoi parlons-nous d'une ébauche?
    Je ne comprends pas le concept de « stratégie pangouvernementale ». Parlez-vous de pan...?
    À la Chambre, on ne cesse d'appeler la stratégie pangouvernementale. C'est l'expression que vos ministres emploient. Si vous préférez stratégie tout court, ça va.
    Franchement, pour un État en déroute comme Haïti, l'Afghanistan, l'Iraq ou l'Amérique du Sud ou encore l'Asie, on n'a pas la même stratégie. C'est ce que je veux dire. Le gouvernement en a peut-être plus d'une...
    Est-ce que ça va?
    Madame McDonough, où en est-on?
    J'accepte l'argument de Bernard pour supprimer le mot projet. Je suis d'accord pour l'enlever.
    Une voix: Vous dites que la stratégie du gouvernement est... [Inaudible — NDLR].
    Mme Alexa McDonough: Sauf que « pangouvernementale » est le mot que ne cessent d'employer vos ministres et le premier ministre chaque fois que la question est évoquée. C'est pourquoi je pense que c'est le nom qu'on devrait lui donner. Ce n'est pas moi qui ai inventé la formule. C'est le mot employé par le gouvernement pour décrire sa stratégie
    Allez-y, monsieur Patry.
    Mettons que l'on s'entende là-dessus. Il faudra que beaucoup de ministères comparaissent. C'est la raison pour laquelle vous parlez de stratégie « pangouvernementale » et de tous les « ministères pertinents ».
    Quand voulez-vous que l'on fasse ça? Six, sept, huit, neuf ministères peuvent être concernés ici.
    On s'occupe actuellement de développement démocratique. Est-ce que ça s'inscrit dans cette étude ou non? Je vous pose la question. Je ne suis pas contre.
    Si on a soulevé cette question — on a déjà eu cette discussion — c'est parce que nous faisons une étude sur le développement démocratique sous l'angle des États en déroute ou défaillants. Pourquoi ne pas en profiter pour entendre le gouvernement parler de la stratégie qui existe déjà dans son document de « stratégie pangouvernementale touchant les États en déroute »?
(1750)
    Je ne sais pas si vous voulez que l'on vote là-dessus ou pas.
    Va-t-on discuter des affaires du comité demain? Va-t-on traiter de la motion de M. Martin vers la fin de la journée?
    Tout ce que dit Keith dans sa motion c'est de traiter du projet de loi C-293 mardi.
    C'est ce que nous sommes disposés à faire. Essentiellement la raison pour laquelle j'ai contacté la greffière et la proposition qu'a faite le gouvernement...
    En fait, c'était censé être demain. J'étais en train de la modifier pour que ce soit mardi de la semaine prochaine.
    On essaie de supprimer la comparution des témoins la semaine prochaine pour procéder à l'étude article par article, mardi et mercredi. Le bruit court que l'on ajournera plus tôt que prévu. Depuis six ans que je suis ici, c'est toujours la même chose et ça n'arrive jamais. Mais si c'est le cas, cela pourrait arriver mercredi soir. Même de notre côté, je n'ai rien entendu plus tôt que mercredi soir, ce qui nous donnerait mardi et mercredi. Je pense donc que cette proposition irait.
    On peut régler la question maintenant ou préférez-vous continuer?
    Nous sommes d'accord pour nous en occuper maintenant. On a d'abord dit qu'il était préférable d'en discuter maintenant.
    Bien.
    Puis-je simplement répondre brièvement à Bernard? Une autre suggestion qui améliorerait le texte serai que nous supprimions « tous », là où l'on dit : « que tous les ministères pertinents », parce que je pense que c'est à nous d'en décider. C'est nous qui établissons toujours notre programme. C'est nous qui décidons qui nous voulons entendre. Simplement parce que certains pourraient s'inquiéter que nous voulions faire venir...
    Continuons. Mme McDonough a la parole. Elle a demandé que « tous » soit supprimé. Si je comprends bien, « ministères pertinents » seraient les Affaires étrangères et l'ACDI.
    Ce serait à nous d'en décider.
    Très bien, mais vous savez ce qui pourrait se produire. Tout d'un coup, quelqu'un pourrait dire qu'il veut entendre le ministère de la Défense ou le ministère des Finances. Et nous nous retrouverions en difficulté. Cela ne définit pas clairement qui l'on souhaiterait voir venir et c'est le problème que me pose cette motion.
    Monsieur Patry.
    Alexa, quand vous dites que vous voulez supprimer : « que tous les ministères pertinents comparaissent devant le comité pour discuter du rapport », je pense qu'il y a une stratégie dont il nous faut discuter. Ils vont nous envoyer un rapport et c'est tout. Je ne sais pas s'il y a un rapport mais j'estime que si on veut améliorer les choses c'est de la stratégie dont il nous faut discuter.
    Alexa, pourriez-vous tout relire afin que tout le monde soit sur la même longueur d'ondes? Pourriez-vous commencer au début?
    Alexa, je vais être honnête avec vous car je suis nouveau dans ces fonctions. J'ai l'impression que l'on est en train d'apporter de changements susceptibles de changer l'intention même de la motion car il ne s'agit plus maintenant d'expliquer ou de discuter d'un rapport mais de discuter de toute cette stratégie.
    C'est ce que nous essayons de faire ici. Il est question dans la motion de développement démocratique. Il y a des tas de ministères qui ont déjà comparu, qui nous ont parlé de la stratégie globale. C'est donc quelque chose que nous faisons et c'est pourquoi je pense que le gouvernement peut accepter cela. Mais maintenant vous avez retiré le rapport. C'est le rapport de qui? C'est notre rapport. Est-ce que ce n'est pas ce que nous voulions — une réponse?
    Non, c'est le rapport du gouvernement. C'était la stratégie. Pour nous, c'est toujours la stratégie. Nous parlons de stratégie, nous ne parlons pas nécessairement de rapports.
    Entendu. Merci.
    Allez-y, Alexa.
    Parfait.
Que, conformément au paragraphe 108(2) du Règlement et aux termes de l'étude qu'il effectue au sujet du développement démocratique, le comité fasse rapport à la Chambre de sa recommandation visant à ce que le gouvernement lui présente sa stratégie pangouvernementale touchant les États en déroute, que les ministères pertinents comparaissent devant le comité afin de discuter de cette stratégie, et que des témoins soient invités à comparaître concernant les implications de la stratégie proposée sur le plan des droits de la personne et humanitaires.
    Franchement, je ne pense pas que cela change du tout le sens de la motion. J'estime que toutes les suggestions qui ont été faites ont permis de l'améliorer et c'est certainement la raison pour laquelle nous avons eu cette discussion.
(1755)
    Monsieur Obhrai, voulez-vous répondre pour le parti ministériel?
    Je répète que je ne vois pas de problème. Le gouvernement se fera un plaisir de présenter sa stratégie sur les États en déroute et c'est ce que nous avons fait jusqu'ici. C'est ce que stipule cette motion et je pense que c'est une amélioration si bien que je n'y vois pas de problème.
    Très bien. Peut-on voter?
    (La motion est adoptée.)
    Chers collègues, j'ai beaucoup apprécié cette expérience avec vous aujourd'hui.
    La séance est levée.