FAAE Rapport du Comité
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Chapitre 2 L’essor de l’aide à la démocratie : les principaux problèmes à résoudre et la contribution canadienne pour remédier au déficit des connaissances et de l’évaluation
Comme on l’a fait remarquer au début du chapitre 1, la démocratie a de tout temps été un concept litigieux qui continue d’ailleurs à évoluer, y compris au sein de nos propres sociétés. Une observation similaire s’applique au concept controversé de « promotion de la démocratie » par des États externes, qui est essentiellement un phénomène apparu après la Seconde Guerre mondiale. Les principales réserves exprimées à ce sujet tiennent à la crainte que :
· la « promotion de la démocratie » en vienne à être considérée comme le fait, pour un pays, de tenter « d’exporter » avec étroitesse son modèle particulier de démocratie comme étant le « meilleur », quand on sait que la démocratisation est par nature un processus nécessairement interne;
· la « promotion de la démocratie » devienne étroitement associée à la puissance ou aux intérêts en matière de sécurité nationale d’un État en particulier ou d’un groupe d’États riches et puissants au sein du système international;
· la « promotion de la démocratie » en vienne à être perçue comme une forme de « néo-colonialisme » ou d’imposition coercitive d’idées « étrangères » par des États puissants à d’autres, moins puissants. Cette question est particulièrement controversée dans les cas d’intervention militaire.
Le Comité est conscient de ces préoccupations et il y revient dans ce chapitre, en examinant les enjeux importants auxquels sont confrontés les agents dispensant une aide à la démocratie. Nous nous sommes aussi assurés, au chapitre 1 et dans la recommandation 1, de mettre en valeur une approche conforme aux valeurs canadiennes où l’aide à la démocratie est vue en termes de développement mondial. Pour soutenir ce développement démocratique, il faut faire en sorte que les processus de démocratisation soient menés de l’intérieur des pays, et non décidés par des étrangers. Lorsque nous parlons d’aider ou de promouvoir le développement démocratique, c’est ce que nous avons présent à l’esprit.
L’aide au développement démocratique est devenue une entreprise de grande envergure à laquelle participent la plupart des grands pays donateurs d’Occident. C’est une entreprise d’autant plus vaste qu’elle est associée à tout un éventail d’objectifs englobant la promotion des droits de la personne et de la primauté du droit, la saine gouvernance, l’efficacité du développement et la consolidation de la paix. La démocratisation elle-même implique plusieurs éléments. Voici ce qu’en dit Peter Burnell :
La démocratisation n’est pas strictement une démarche pour l’édification d’un État démocratique, qui est constitué à partir de principes juridiques et constitutionnels ainsi que d’institutions officielles. Elle nécessite la formation d’une société politique particulière caractérisée par la pluralité des partis politiques en concurrence et par des styles appropriés pour gouverner. L’évolution des attitudes et des comportements fait également partie de la démocratisation (dont elle constitue l’aspect culturel), de même que diverses formes d’éducation civique grâce auxquelles la société civile sera plus active et mieux imprégnée de démocratie. Au-delà du gouvernement central et de la politique nationale, la démocratisation doit se faire à l’échelle des régions ou des provinces, des municipalités et des conseils locaux. L’aide à la démocratie a donc en somme plusieurs visages. C’est potentiellement une entreprise énorme[45].
Il n’est pas sans intérêt de rappeler les origines de l’aide moderne à la démocratie, qui se trouvent dans un pays ayant vécu une démocratisation à l’issue de sa défaite au cours de la Seconde Guerre mondiale. Les Stiftungen allemandes, fondations rattachées à des partis politiques, ont été les premières à consacrer des sommes d’argent substantielles à l’aide à la démocratie, tout en promouvant les intérêts allemands à l’étranger et en y nouant des relations. En 1990, l’Allemagne « avait des représentants permanents dans plus de 100 pays, et certains de ses bureaux extérieurs s’y trouvaient depuis déjà bien plus que 30 ans[46] ».
Aux États-Unis, le gros des efforts d’aide à la démocratie n’a pas commencé avant la fin des années 1970, bien que l’on ait intégré la politique participative aux objectifs officiels de l’aide étrangère dès 1966. Au cours de la présidence de Jimmy Carter, on a eu recours à un certain nombre de mesures liant l’aide étrangère aux droits de la personne. Le gouvernement Reagan a fait de la promotion de la démocratie un des principaux objectifs de la politique étrangère des États-Unis, même si ces objectifs ont été critiqués parce qu’on jugeait qu’ils relevaient de l’idéologie de la guerre froide et de la protection de la sécurité nationale. Le Congrès s’est beaucoup intéressé à la question lors de la création, en 1983, du National Endowment for Democracy (NED), une fondation privée sans but lucratif, subventionnée par l’État, qui s’inspire en partie du modèle allemand et qui fournit de l’aide financière à des organismes œuvrant sur le terrain, notamment les fondations des deux grands partis politiques aux États-Unis, le National Democratic Institute for International Affairs et l’International Republican Institute[47]. En 1984, la United States Agency for International Development (USAID) a mis sur pied l’Office for Democratic Initiatives. Les pays scandinaves, les Pays-Bas et le Canada ont aussi mis en œuvre des mesures d’aide à la démocratie au cours des années 1980. Le rôle du Canada depuis ce temps sera décrit en détail dans la partie II.
Avant la fin de la guerre froide, l’Allemagne et les États-Unis s’étaient déjà dotés de programmes exhaustifs et bien établis d’aide au développement politique. Mais, c’est au cours des années 1990 que le secteur de l’aide à la démocratie a connu sa croissance fulgurante. Burnell attribue ce phénomène principalement aux quatre facteurs suivants[48] :
· Premièrement, de nouvelles possibilités de démocratisation sont apparues à la fin de la guerre froide, lors du démantèlement de l’Union soviétique. En l’absence d’opposition économique ou stratégique de la part du bloc communiste, les États occidentaux pouvaient assortir leurs programmes d’aide au développement de conditions d’ordre politique ainsi que d’offres d’aide à la démocratie.
· Deuxièmement, la promotion de la démocratie et des droits de la personne constituait un motif impérieux pour fournir de l’aide étrangère relativement peu coûteuse à une époque où les budgets diminuaient et où le public était sceptique quant aux avantages de cette entreprise. Les responsables des politiques d’aide étrangère venaient de trouver, dans l’aide à la démocratie, une nouvelle mission stimulante.
· Troisièmement, dans un certain nombre de régions du monde, on réclamait de plus en plus de l’aide à la démocratie sous l’impulsion des mouvements de lutte pour la démocratie, qui étaient en plein essor. Les réformateurs des régimes politiques recherchaient souvent l’aide de l’Occident.
· Quatrièmement, un profond changement était en train de s’opérer dans notre façon de voir la relation entre le développement économique et le développement politique. On en percevait de plus en plus les interrelations. La démocratie n’était plus un luxe, mais bien un facteur de croissance et de développement. Des institutions financières internationales comme la Banque mondiale se rendaient compte que l’amélioration de la gouvernance était un facteur crucial d’efficacité des efforts de développement. (La Banque européenne pour la reconstruction et le développement, qui a été créée pour aider les pays d’Europe de l’Est et d’Europe centrale à effectuer la transition suivant l’ère communiste, avait fait de l’existence d’un régime démocratique à plusieurs partis une condition explicite pour accorder des prêts.)
On peut aussi ajouter à ces facteurs les motifs accrus d’intervention sur le plan des droits de la personne et sur le plan humanitaire, notamment la nécessité d’assurer la sécurité des personnes et la responsabilité de les protéger. Il est d’ores et déjà accepté que les intérêts de la communauté internationale sont en jeu lorsque les droits de la personne et les libertés politiques ne sont pas respectés. Un grand nombre d’États donateurs et d’organisations internationales se sont mis à assumer davantage leurs rôles et leurs responsabilités dans le maintien et la défense de la démocratie. L’engagement à respecter la démocratie est désormais une condition pour pouvoir adhérer à certaines organisations.
Dans une enquête internationale réalisée en 2003 sur l’aide à la démocratie, George Perlin classe les nombreuses activités des donateurs sous les rubriques de la bonne gouvernance, des droits de la personne, de la démocratisation et de la société civile[49]. Perlin estime qu’au total, dans le monde, les dépenses publiques pour le développement démocratique dépassent 3 milliards de dollars américains. Certains États donateurs y consacrent jusqu’à 11 p. 100 de l’aide publique au développement (APD), et la moyenne est d’environ 6 p. 100[50]. Toutefois, selon la méthode de calcul, les sommes affectées à l’aide à la démocratie (regroupées dans de vastes catégories, comme la « promotion de la démocratie », la « gouvernance démocratique », le « développement démocratique », la « bonne gouvernance », les « droits de la personne » et la « primauté du droit ») peuvent être considérées comme encore bien supérieures. Dernièrement, Perlin indiquait ce qui suit : « Personne ne sait combien est dépensé. Selon les estimations les plus prudentes, le secteur public dépenserait entre 8 et 9 milliards de dollars américains. Le secteur privé fournirait quant à lui au moins 700 millions de dollars[51]. »
La ministre responsable de l’ACDI, Josée Verner, a indiqué au Comité en octobre 2006 que l’ACDI, qui est la source la plus importante d’argent canadien destiné à l’aide étrangère, avait consacré en 2005 plus de 375 millions de dollars aux programmes de « gouvernance démocratique », somme qui se ventile comme suit par secteur : institutions publiques responsables (46 p. 100), liberté et démocratie (40 p. 100), droits de la personne (8 p. 100), primauté du droit (6 p. 100)[52]. Depuis ce témoignage, d’autres sommes, qui sont considérablement plus importantes, ont été communiquées au Comité. Selon l’information à jour remise au Comité le 21 mars 2007 par le président de l’ACDI, Robert Greenhill, les dépenses prévues de cet organisme en 2006‑2007 pour la gouvernance démocratique étaient de 466 millions de dollars. Toutefois, à des « fins de planification », les dépenses pour la paix et la sécurité ont été ajoutées à cette somme, ce qui fait un total de 584 millions de dollars, soit 21 p. 100 du programme d’aide étrangère de l’ACDI. Nous reviendrons dans le chapitre 4 sur cette incertitude entourant le montant exact de la contribution de l’ACDI.
Selon une étude réalisée en 2005 par l’Institut international pour la démocratie et l’aide au processus électoral, avec la catégorie du « développement participatif et de la bonne gouvernance » employée par le Comité d’aide au développement de l’OCDE, jusqu’à 10 p. 100 de l’ensemble de l’aide publique au développement a été consacrée au développement démocratique, au sens large, pendant les 15 années précédentes[53]. En outre, un document de discussion préparé récemment pour le Conseil de l’Europe indique que les donateurs ont fourni des sommes encore plus importantes :
Bien qu’il ne soit pas toujours facile de définir l’aide à la démocratie, on peut dire que, dans l’ensemble, les sommes dépensées par la Communauté européenne pour favoriser la démocratie, le respect des droits de la personne, les réformes judiciaires, la gouvernance et l’épanouissement de la société civile sont d’environ 4,5 milliards de dollars américains pour la période de 2000 à 2004. Ces sommes s’ajoutent aux sommes de près de 9,5 milliards de dollars provenant des États membres de l’Union européenne.
Le total des dépenses de l’Union européenne est donc de 14 milliards de dollars, comparativement à 10,5 milliards de dollars pour les États-Unis et à 1 milliard de dollars pour le Canada[54].
Pour le monde entier, la somme serait par conséquent de 25,5 milliards de dollars pour les cinq premières années du siècle, soit une moyenne de plus de 5 milliards de dollars par année. Les États-Unis sont de loin le donateur le plus important parmi les pays. Ils sont suivis par l’Allemagne. (En appliquant une méthode de calcul restrictive qui ne tient compte que des dépenses du domaine politique, le Canadien Leslie Campbell, associé principal et directeur régional des programmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord du National Democratic Institute, situé à Washington, a pu évaluer l’aide américaine pour les aspects politiques de la promotion de la démocratie à 1,5 milliard de dollars, tout en soulignant au passage qu’une des six fondations politiques allemandes dépense à elle seule 120 millions d’euros, soit environ 185 millions de dollars par année. Lors de son témoignage devant un comité sénatorial canadien, M. Campbell a indiqué, à propos du Canada, que « ses contributions sont minuscules par rapport à d’autres, même faible par rapport aux Pays-Bas ou à la Suède »[55].)
Que l’on retienne une définition globale ou étroite de l’aide à la démocratie, il est évident que, dans l’ensemble, les États donateurs occidentaux consacrent à ce domaine une proportion très substantielle de l’aide publique au développement. Par conséquent, de plus en plus de questions sont soulevées à propos de la nature et de l’efficacité de ce type d’aide. Quelles sont les façons les plus utiles de favoriser la démocratie? Comme l’a indiqué le ministre des Affaires étrangères lui-même, Peter Mackay, « la légitimité et l’efficacité de la promotion démocratique sont largement tributaires des modes de prestation de l’aide en ce domaine[56] ». Cette observation cadre bien avec les cinq principes énoncés par l’un des principaux experts du domaine, Gordon Crawford, principes qui devraient guider les travaux des intervenants souhaitant agir de manière constructive en appliquant des « stratégies d’édification de la démocratie » à l’étranger : « paternité de la stratégie par le pays concerné, dialogue démocratique, participation et inclusion, légitimité, engagement ». M. Crawford précise ce qui suit à propos de ces principes :
Les deux derniers principes, soit la légitimité et l’engagement, demandent aux promoteurs de la démocratie de faire en sorte que leur approche est à la fois sincère et sérieuse et non entachée ni par une association à un changement de régime ni par un écart entre le discours et la réalité. Les trois premiers principes, soit la paternité du pays, le dialogue démocratique et la participation et l’inclusion, se rattachent à la façon dont la démocratie est favorisée, ce qui donne à penser que la démocratie ne peut être exportée et qu’il est essentiel que le soutien extérieur à la réforme démocratique respecte les principes mêmes et les mécanismes de la démocratisation en tant que telle[57].
Le Comité est d’accord, mais juge qu’il faut savoir comment appliquer ces principes dans la réalité. C’est pourquoi la suite du présent chapitre présente quelques-uns des principaux enjeux dont devront tenir compte les responsables des politiques dans le domaine et indique comment le Canada pourrait aborder au déficit persistant de connaissances sur les moyens efficaces de développement démocratique.
1. Il est essentiel que la population du pays concerné soit à la tête du mouvement de démocratisation et que la gouvernance démocratique lui appartienne.
On peut dire que l’idée que la démocratie ne peut pas être implantée à partir de l’extérieur fait quasiment consensus (exception faite de circonstances très exceptionnelles). La démocratisation est une démarche longue, difficile et intrinsèquement indigène, qui peut être appuyée de l’étranger, mais non importée de l’étranger. Voici ce que dit à cet égard Vidar Helgesen, de l’Institut international pour la démocratie et l’aide au processus électoral : « On ne peut effectuer dans un pays des changements politiques démocratiques en y parachutant à partir de l’extérieur, de manière prétendument indépendante, des solutions techniques institutionnelles, qu’il s’agisse d’une constitution, d’un système électoral ou d’un système de partis politiques. Pour que la démocratie s’installe à demeure dans la sphère politique, il faut que se produisent des changements dans l’espace réservé aux débats et dans le climat des débats, de manière à ce que les institutions prennent une couleur et un sens locaux, même si on s’inspire fortement de l’expérience de pays étrangers pour bâtir ces institutions[58]. » L’approche de l’Institut international pour la démocratie et l’aide au processus électoral en matière d’évaluation de la démocratie tient compte des points de vue des citoyens du pays concerné et met l’accent sur l’importance du rôle du gouvernement de ce pays dans le développement démocratique. Gordon Crawford est d’avis que les mécanismes de toute réforme démocratique doivent être pilotés de l’intérieur du pays qui se démocratise. Plutôt que de « prendre en charge » ces mécanismes, le pays en a la « paternité ». Voici comment M. Crawford décrit cette approche :
La justification de la paternité nationale des stratégies d’aide des pays donateurs tient au fait que les perspectives locales permettent de mieux comprendre les problèmes caractéristiques auxquels la réforme démocratique est confrontée dans un contexte donné. Essentiellement, les acteurs extérieurs doivent être à l’écoute des voix locales. Ces voix seront plurielles. Il y aura des voix différentes et même contradictoires, mais ces exercices de délibération et de débat sont eux-mêmes des éléments fondamentaux de la démocratie[59].
En tant qu’analyste et critique de renom du domaine de l’aide à la démocratie, Thomas Carothers, du Carnegie Endowment for International Peace, est d’avis que l’un des progrès majeurs, au fil de la « courbe d’apprentissage » de la promotion de la démocratie, a été « l’autonomisation des acteurs locaux ». M. Carothers précise que « l’autonomisation des acteurs locaux, dans le domaine de l’aide à la démocratie, nécessite un changement d’attitude de la part des pays donateurs, qui ne doivent plus se voir comme des bâtisseurs de la démocratie chez les autres, mais bien comme des gens qui aident parfois les populations d’autres pays à bâtir la démocratie chez elles à leur manière[60] ». Roel von Meijenfeldt, de l’Institut néerlandais pour la démocratie multipartite, aux Pays-Bas, a déclaré ce qui suit lors d’un exposé qu’il a fait en janvier au ministère des Affaires étrangères et du Commerce international du Canada : « Gandhi a déjà fait remarquer que "l’esprit de la démocratie ne peut être imposé de l’extérieur. Il doit provenir de l’intérieur." Pour s’enraciner solidement, la démocratie doit croître de l’intérieur des pays, en construisant et en institutionnalisant étape par étape des processus politiques qui correspondent aux valeurs intrinsèques à une démocratie plurale[61]. » L’ancien député fédéral canadien, Ross Reid, a ajouté son grain de sel à cette réflexion : « Il est souvent préférable d’utiliser l’approche locale. Il nous arrive trop souvent de rejeter les processus traditionnels soit parce qu’ils sont considérés comme défaillants, soit au nom de la modernité, et nous tentons de priver les sociétés des processus déjà existants qui sont souvent mieux taillés à leurs besoins[62]. »
Les témoins que le Comité a pu entendre adhèrent fortement à cette vision. Comme l’a bien résumé Paul Larose-Edwards, de CANADEM, lorsqu’il a paraphrasé l’affirmation selon laquelle la vraie politique se vit au niveau local, « le développement démocratique se vit au niveau local […] même si le Canada peut et doit apporter son aide, l’avenir de tout développement démocratique repose entre les mains des sociétés civiles locales et des gouvernements en question »[63]. Le ministre des Affaires étrangères, Peter MacKay, s’est dit lui aussi de cet avis devant le Comité :
Nous devrions commencer par reconnaître que la démocratie n’est pas une chose que des étrangers peuvent imposer. Il est dans la logique même de la démocratie qu’elle soit le choix de citoyens qui l’adopteront. Des citoyens du monde entier aspirent à la démocratie, et l’aide fournie par des étrangers devrait l’être en fonction de ses bénéficiaires[64].
Jean-Louis Roy, de Droits et Démocratie, a lui aussi souligné la nature indigène et particulière au contexte du développement démocratique : « Un certain nombre d’institutions nationales ou internationales qui œuvrent dans le domaine ont récemment compris qu’il leur fallait absolument avoir dans leur personnel des gens qui parlent la langue du pays, qui sont originaires du pays. Certains travaux ne peuvent se faire qu’à partir de l’intérieur du pays, et non de l’extérieur[65]. » Dans son mémoire, l’Association du Barreau canadien parle de « l’engagement et la responsabilité à l’échelle locale » comme d’une des « pratiques exemplaires en matière de promotion de la primauté du droit » :
Les projets et programmes qu’appuie le Canada doivent s’adjoindre tous les intervenantes et intervenants, être sensibles aux besoins locaux et être pris en charge à l’échelle locale, sans quoi ils risquent d’échouer. Les expertes et experts locaux doivent être consultés et participer à toutes les étapes de la planification, de la mise en œuvre et de la surveillance. L’approche la plus fructueuse est celle où les acteurs et décideurs locaux sont habilités à faire des choix[66].
Thomas Axworthy souligne de façon encore plus précise l’importance de l’autonomisation des acteurs locaux qui se dégage des études de cas réalisées par le Centre for the Study of Democracy de l’Université Queen’s : « les gouvernements locaux, les municipalités, constituent la base de la démocratie […] Au cours d’une transition démocratique, nous avons tendance à privilégier presque immédiatement les élections nationales. Dans presque toutes les études que j’ai examinées, je suis convaincu qu’il faut investir dans les municipalités locales, les gouvernements locaux et les élections locales pour laisser s’épanouir et se renforcer la démocratie[67] ». Dans son témoignage et son mémoire, la Fédération canadienne des municipalités a fourni au Comité des détails sur ce qui se fait déjà à cet égard, en partenariat avec des entités locales dans d’autres pays, et elle a proposé de renouveler pour une autre période de cinq ans le « Programme mondial de gouvernance locale[68] » financé par l’ACDI.
Certains témoins ont mis l’accent sur le rôle de la société civile à l’échelle locale dans le développement démocratique. John Foster a parlé dans son témoignage des réseaux internationaux de la société civile, comme Social Watch, qui peuvent être utiles quand vient le temps de fournir de l’aide à l’échelle locale, dont on ne saurait exagérer l’importance : « Pour ce qui est des gouvernements locaux, Social Watch Inde illustre particulièrement bien comment la société civile est essentielle pour la construction de la démocratie depuis la base[69]. »
Dans l’ensemble, il faut retenir de tout cela que le développement démocratique doit être mû par les populations locales, et non par des gens de l’extérieur. Compte tenu de son expérience au sein de Droits et Démocratie, Ed Broadbent a pu affirmer sans détour à ce sujet que « la priorité des programmes d’action, quels qu’ils soient, de mise en application des droits par un pays en développement ne doit jamais être fixée par des entités extérieures, qu’il s’agisse d’autres ONG ou de gouvernements démocratiques établis[70] ».
2. Les objectifs de la promotion de la démocratie demeurent contestés, en particulier lorsqu’ils sont associés aux intérêts stratégiques de puissances occidentales. En outre, il faut élaborer des stratégies tenant compte de la réaction récente contre les fournisseurs d’aide à la démocratie. La promotion de la démocratie doit être considérée comme une entreprise de l’humanité entière.
L’aide à la démocratie suscite la méfiance lorsqu’elle est liée à la sécurité nationale du donateur, à ses intérêts économiques ou à ses autres intérêts. C’est particulièrement vrai dans le cas des interventions des États-Unis et d’autres grandes puissances pour favoriser la démocratie. Celles-ci se sont vues accusées de revenir au « néo-colonialisme » lorsqu’elles appliquent des modèles occidentaux de démocratie. Dans le cas des politiques américaines relatives au Moyen-Orient, le lien entre la promotion de la démocratie et la « guerre contre le terrorisme » engendre la controverse[71]. Certains voient dans la mauvaise tournure de la guerre en Irak la cause d’un recul général dans la promotion de la démocratie.
Cependant, dès les années 1990, l’aide à la démocratie provenant de l’extérieur suscitait déjà une importante réaction défavorable qui était loin de concerner uniquement les politiques des États-Unis. Voici ce que disent à ce sujet Carl Gershman (président de l’organisme américain National Endowment for Democracy) et Michael Allen :
La réaction défavorable contre la promotion de la démocratie est largement un sous-produit de la prolifération des régimes prétendument hybrides après la troisième vague de démocratisation. Cette vague n’a pas été suivie par un retour vers l’autoritarisme, mais elle a laissé dans son sillage de nombreuses transitions inachevées ou ratées. Soit des autocrates ont remplacé les réformateurs après un bref intermède de démocratisation manquée, soit ils se sont accrochés au pouvoir après avoir accepté une libéralisation superficielle et la création d’un espace politique légèrement plus ouvert à une opposition démocratique. Les régimes hybrides conservent souvent certains mécanismes officiellement démocratiques, notamment des élections relativement libres (sinon équitables) et permettent à des organismes de la société civile de fonctionner et de recevoir de l’aide étrangère. Mais, la réalité politique de ces régimes se caractérise par la manipulation des résultats électoraux, la faiblesse du Parlement, un pouvoir exécutif trop fort, des médias contrôlés par l’État, de la corruption endémique et l’impossibilité d’avoir recours à un système judiciaire indépendant[72].
Dans certains cas, les activités des ONG et le financement étranger font l’objet de restrictions légales. Selon Gershman et Allen, les organismes d’aide à la démocratie « constatent qu’il leur est nécessaire d’investir beaucoup de temps et d’efforts dans des activités à caractère diplomatique. Ils doivent expliquer leurs programmes aux autorités du pays et leur fournir des garanties — par la communication et la transparence — que leur travail n’est ni partisan, ni destiné à privilégier l’opposition. Ils doivent obtenir l’adhésion des membres du parti au pouvoir à leurs programmes. En s’efforçant ainsi de bâtir un climat de confiance, les organismes d’aide à la démocratie peuvent soustraire leurs programmes aux pressions politiques, protéger les activistes du pays et préserver l’intégrité de leurs relations avec leurs partenaires au sein de la population locale. Ils peuvent aussi soustraire les programmes d’aide à la démocratie aux pressions politiques en renforçant le caractère international et multilatéral de ces programmes[73]. »
L’internationalisation de la promotion de la démocratie visant à transcender les objectifs particuliers des États est vue d’un œil très favorable par d’autres analystes et d’autres témoins entendus par le Comité. Après avoir parlé de la nécessité, pour les groupes de promotion de la démocratie, « de parfaire leurs stratégies pour contrer les réactions défavorables qu’ils suscitent », Thomas Carothers a conclu son témoignage devant le Comité des relations étrangères du Sénat des États-Unis en disant ceci : « Pour que l’idée de la liberté puisse progresser, elle doit être défendue non pas par les États-Unis mais par un mouvement qui s’étend dans le monde entier[74]. » D’autres analystes américains réclament une coalition mondiale de démocraties[75]. Compte tenu de la mauvaise expérience vécue en Irak, Gershman et Allen affirment ce qui suit à propos des « changements de régime » :
Ce n’est pas le but recherché par la promotion de la démocratie, dont l’unique dimension n’est pas du reste d’appuyer la tenue d’élections libres et équitables où il y a de la concurrence. Par la promotion de la démocratie, on doit chercher à : renforcer l’indépendance des médias; favoriser la primauté du droit et l’indépendance du système judiciaire; défendre les droits de la personne et les libertés fondamentales d’expression, de conscience et d’association; appuyer la société civile, y compris les organisations de femmes, les syndicats et les associations de gens d’affaires ainsi que les groupes non gouvernementaux qui éduquent les citoyens en matière de démocratie et les outillent pour qu’ils puissent participer à la vie politique et surveiller le travail du gouvernement.
En juin 2000, lors d’une réunion tenue à Varsovie, plus d’une centaine d’États souverains ont avalisé l’idée de la promotion de la démocratie — un effort de coopération internationale visant à renforcer la démocratie sous ces rapports et sous d’autres rapports — et ont alors fondé la Communauté des démocraties[76].
En parlant des réactions récentes contre les démocraties, M. Jeffrey Kopstein, professeur à l’Université de Toronto, a fait l’observation suivante devant le Comité : « Au cours des dernières années s’est constitué un nouveau groupe de nations que j’appellerais un groupe international autoritaire[77]. » M. Kopstein pense qu’il faut s’opposer à cette tendance, car la promotion de la démocratie n’est pas seulement dans l’intérêt du Canada, mais aussi dans l’intérêt du monde entier. Il ajoute ce qui suit : « la promotion de la démocratie n’est pas une activité qui donne des résultats rapidement. Ce devrait être une politique multidirectionnelle, à long terme qui devrait s’intégrer aux autres moyens d’action de l’État ». Il espère que l’on saura tirer le maximum de leçons des expériences européennes et américaines et que le Canada pourra agir en chef de file dans les efforts multilatéraux :
[…] si nous voulons prendre du recul, je proposerais un groupe ou une communauté de démocraties, que ce soit à l’intérieur ou à l’extérieur des Nations Unies. Le Canada bénéficierait sans doute d’une grande crédibilité pour présenter ce genre de projet. Les Nations Unies sont une instance qui pourrait accueillir une telle organisation mais il est possible qu’elles soient discréditées pour ce qui est de la promotion de la démocratie — il faudrait avoir l’honnêteté de le reconnaître —, en particulier après l’effondrement du Conseil des droits de l’homme. Autre solution possible, dont j’ai parlé ainsi que plusieurs de mes collègues depuis quelque temps, on pourrait essayer de réactiver une organisation officielle, la Communauté des démocraties, qui a été créée à Varsovie en 2000[78].
D’autres témoins ont affirmé avec insistance que le Canada devrait continuer de préconiser une approche de l’aide à la démocratie reposant sur le multilatéralisme. Le Comité a pu rencontrer des représentants des Nations Unies et de la Communauté des démocraties à New York et à Washington, en février 2007. Au chapitre 8, nous allons examiner davantage la question des rôles multilatéraux. Le multilatéralisme préconisé par le Canada est l’une des raisons pour lesquelles il a obtenu une bonne note lors d’une enquête réalisée en 2002 sur la défense de la démocratie dans le cadre du Democracy Coalition Project, qui a été lancé en 2001 par la Communauté des démocraties. (Le Comité a rencontré le directeur général du Democracy Coalition Project et co-auteur de cette enquête, Theodore Piccone, à Washington, le 6 février 2007.) La « souplesse et l’approche globale de la démocratisation », adoptées par le Canada, lui ont valu des éloges. Au sein de l’échantillon de 40 pays donateurs ayant fait l’objet de l’enquête, le Canada est parmi les trois seuls pays (les autres étant les Pays-Bas et la Suède) à avoir reçu la note « très bien » pour son « soutien à la démocratie étrangère, qui est incarné par sa volonté de fournir de l’assistance électorale aux démocraties naissantes, d’appuyer les programmes de vie démocratique populaire par de l’aide bilatérale et de critiquer les régimes se livrant aux abus les plus extrêmes contre la démocratie. Le Canada privilégie les forums multilatéraux dans ses efforts pour la démocratie, puisqu’il croit qu’une puissance moyenne agissant unilatéralement n’aurait qu’une influence limitée. Au sein des organisations dont il fait partie, le Canada joue un rôle de chef de file en vue de favoriser les réformes électorales et le développement démocratique[79]. »
3. Le développement démocratique est lié au développement social et économique, avec lequel il forme un tout. L’aide à la démocratie devrait être considérée comme un moyen d’accroître l’efficacité des efforts de réduction de la pauvreté et de mieux outiller l’ensemble des citoyens pour qu’ils puissent exercer leurs droits démocratiques.
Dans sa première recommandation, le Comité préconise l’extension de la définition du développement démocratique pour inclure les progrès à réaliser en matière de droits socio-économiques de la personne et en matière de qualité et de viabilité de la démocratie. La ministre de la Coopération internationale, Josée Verner, a fait le lien entre l’aide à la démocratie, le développement et la lutte contre la pauvreté lorsqu’elle a déclaré ce qui suit devant le Comité : « nous avons appris que la gouvernance démocratique est essentielle au développement dans son ensemble. Pour cette raison, nos efforts en faveur de la gouvernance démocratique vont se multiplier. À l’avenir, les grands programmes géographiques de l’ACDI permettront d’évaluer et d’appuyer la gouvernance démocratique. […] La gouvernance démocratique est essentielle au progrès des pays en développement. Elle est également essentielle si l’on veut mettre un terme à la pauvreté de façon durable[80]. » En outre, le mémoire de l’ACDI qui accompagnait le témoignage de la ministre commençait par le passage suivant : « La gouvernance démocratique est essentielle à la réduction de la pauvreté et au développement durable. Le travail de l’ACDI dans ce domaine vise à permettre aux États de s’attaquer plus efficacement au problème de la pauvreté, en améliorant la façon dont tous les membres de la société, en particulier ceux qui sont pauvres et marginalisés, peuvent influer sur les politiques et améliorer leur niveau de vie. »
Un certain nombre de témoins se sont prononcés pour une approche globale de l’édification de la démocratie et du développement social. Par exemple, Jean-Pierre Kingsley, ancien directeur général des élections du Canada et nouveau président d’IFES (organisme connu autrefois sous le nom d’International Foundation for Electoral Systems), est venu dire ce qui suit au Comité : « C’est tout le processus du développement démocratique et tout le système qu’il faut appuyer, mais toujours dans le respect des valeurs, de l’histoire et de la culture du pays[81]. » D’autres témoins, notamment l’Association du Barreau canadien, ont défendu avec énergie l’idée voulant que le développement démocratique et le développement axé sur la réduction de la pauvreté soient des formes de développement complémentaires, plutôt que mutuellement exclusives ou séquentielles. À l’occasion du Dialogue sur l’approche canadienne en matière de développement démocratique, organisé par le Conseil démocratique à Ottawa, en février 2007, Bernard Wood s’est dit de cet avis :
Une fois pour toutes, il faut transcender les arguments « sectaires » et formuler une série d’approches et de stratégies susceptibles de favoriser tant le développement socioéconomique que la démocratie. […]
Une démocratisation durable nécessite des progrès parallèles sur le plan de l’équité et des possibilités et nécessite aussi la participation, afin d’offrir à tous un rôle suffisant à jouer dans le projet de démocratie[82].
Deux témoins ont exprimé des points de vue quelque peu différents et se sont montrés sceptiques relativement aux chances de maintien de la démocratie dans les sociétés à faible revenu. Jeffrey Kopstein, de l’Université de Toronto, a décrit les « pays très pauvres » comme « le problème le plus difficile à résoudre ». En outre, il a déclaré ceci : « La science politique a très peu de données à vous fournir. Il y en a deux. La première est que les démocraties ne se font pas la guerre. La seconde est que les pays qui deviennent des démocraties ont tendance à demeurer des démocraties si — et c’est là un gros « si » — leur revenu intérieur brut par tête est supérieur à 6 000 $ de 1993[83]. »
Diane Éthier, professeure à l’université, a été encore plus catégorique. Elle ne croit pas du tout aux possibilités de démocratisation dans les pays qui n’ont pas atteint un certain degré de développement :
[…] toutes les théories sur la démocratie, depuis plus de 50 ans, soutiennent que la démocratie ne peut pas se développer dans un pays pauvre et sous-développé. On ne peut donc pas faire en même temps du développement économique et social et la démocratisation, parce que cette démocratisation est une conséquence du développement économique et social.
[…] Je pense que les experts diraient que si vous voulez aider les pays à progresser vers la démocratie, aidez le développement économique et social, et plus tard, vous penserez à instaurer des institutions politiques démocratiques[84].
Mais en fait, les recherches effectuées par le Comité révèlent que les choses sont moins simples et que la démocratie peut même être un facteur important pour créer des conditions propices au développement et à la réduction de la pauvreté. À l’issue du travail empirique détaillé, dont les résultats sont rapportés dans The World in 2007, l’Economist Intelligence Unit arrive à la conclusion suivante : « Le rapport entre le niveau de développement (revenu par habitant) et la démocratie n’est pas évident. Il semble qu’il y ait un rapport, même si parmi les pays pleinement démocratiques certains ne sont pas des pays riches de l’OCDE. » On peut lire aussi ce qui suit dans le même document : « la direction de causalité entre la démocratie et le revenu est une question qui peut-être débattue. L’hypothèse de modernisation normale voulant que le développement économique conduit à la démocratie et que c’en est une précondition nécessaire n’est plus universellement acceptée. On fait plutôt valoir que la direction de causalité primaire passe de la démocratie au revenu[85] […] ».
Les organismes de développement, les praticiens et les analystes œuvrant dans le domaine de l’aide à la démocratie sont aujourd’hui d’avis que les progrès de la démocratie font partie intégrante, ou du moins devraient faire partie intégrante, du développement et de la réduction de la pauvreté dans leur ensemble. On ne peut qu’être d’accord avec eux si l’on souscrit à la déclaration suivante, qu’a faite le secrétaire général des Nations Unies, Kofi Annan, le 30 octobre 2006 : « la démocratie est un droit universel qui n’est l’apanage d’aucun pays ni d’aucune région [et] une gouvernance participative, fondée sur la volonté du peuple, est le plus sûr chemin vers la liberté, la croissance et le développement »[86]. Dans la même veine, voici ce qu’a affirmé quelques jours plus tôt Hilary Benn, secrétaire d’État au Développement international du Royaume-Uni, dans une importante déclaration de principes :
[…] le développement, s’il doit vouloir dire quelque chose […] doit aussi porter sur ce que Sen appelle « les libertés d’agir » (freedoms to) : la liberté de choisir, de choisir les personnes qui représentent votre point de vue; la liberté de faire connaître vos opinions; la liberté de s’associer librement avec d’autres; la liberté de s’affilier à un parti politique ou à un syndicat; la liberté de culte et de religion. Si vous le demandez à des gens pauvres, ils vous diront ce que ces libertés représentent pour eux […] Je soutiens que c’est en passant par une politique démocratique et, par le fait même, par la démocratie que nous atteignons cet objectif. Le développement doit viser à nous doter de politiques convenables, car le développement et le progrès ne peuvent être réalisés si le régime politique exclut la majorité et nie les droits acquis à la naissance[87].
Roel von Meijenfeldt, de l’Institut néerlandais pour la démocratie multipartite, a fait valoir un point de vue semblable lorsqu’il s’est exprimé à ce sujet au Canada, en janvier 2007 :
Amartya Sen a été un des premiers à remettre en question l’ancien paradigme, selon lequel les pays doivent tout d’abord se développer économiquement pour devenir mûrs pour la démocratie, au profit d’un nouveau paradigme voulant que les pays mûrissent (économiquement) par la démocratie.
Par exemple, la ministre hollandaise de la Coopération au développement, Mme Agnes van Ardenne, a récemment cité plusieurs études […] (dont […] l’ouvrage The Democratic Advantage rédigé par Morton Halperin […]) qui révèlent que les démocraties et les pays en voie de démocratisation déclassent leurs vis-à-vis autoritaires pour ce qui est de l’ensemble des indicateurs de développement, ce qui l’a amenée à conclure que la démocratie est une condition préalable du développement. D’après une analyse statistique couvrant les 40 dernières années, rien ne prouve que l’autoritarisme est profitable à la croissance économique. Les démocraties ont un avantage comparatif de l’ordre de 30 %. Les démocraties pauvres ont beaucoup mieux réussi à éviter les désastres économiques[88].
Dans un ouvrage majeur intitulé Aiding Democracy Abroad, Thomas Carothers, de la fondation Carnegie Endowment for International Peace, que le Comité a rencontré à Washington, tire la conclusion suivante : « les promoteurs de la démocratie devraient s’employer à établir une relation entre l’aide à la démocratie et le monde plus vaste et mieux établi de l’aide au développement social et économique. La plupart des promoteurs de la démocratie croient que le développement économique et la démocratisation se renforcent l’un l’autre. Pourtant, ils font peu d’efforts pour rattacher leur travail à d’autres facettes du développement[89]. »
Carothers poursuit son propos en soutenant qu’il faut s’intéresser davantage aux liens entre la démocratisation et le développement socio-économique, entre l’aide pour le développement démocratique et les autres genres d’aide au développement. Il pense qu’il faut s’employer à établir des liens cruciaux entre ces deux volets du développement dans l’optique de la « participation des citoyens », y compris les plus démunis, et dans l’optique aussi du « rôle des femmes dans la démocratisation »[90]. Jean-Louis Roy, de Droits et Démocratie, fait partie quant à lui des autres témoins qui ont parlé de la question des femmes. Dans son témoignage, il a en outre souligné les tendances sociodémographiques marquantes à prendre en considération dans l’univers de l’aide à la démocratie d’aujourd’hui et de demain : « Deux milliards de personnes naîtront au cours des 20 prochaines années, dont 90 p. cent dans les pays du Sud[91]. » Voici ce qu’il a encore dit au Comité à cet égard :
[…] je crois que l’on doit se rappeler ce que nous savons tous — parfois, il vaut mieux le redire —, la moitié, soit 50 p. 100 exactement de la population du monde, a moins de 25 ans. Il y a 1,2 milliard d’humains qui ont entre 10 et 19 ans. Dans tous les pays où nous travaillons, dans tous ces pays du Sud, la population va croître dans les prochaines années, et le premier groupe d’âge aura entre 10 et 25 ans. Nous devons parler de démocratie à ces jeunes, nous devons trouver des moyens innovateurs et avoir de vrais programmes à leur donner[92].
Carothers termine en faisant une mise en garde. Selon lui, il faudra davantage que des affirmations et des déclarations de bonnes intentions pour progresser sur les deux fronts à la fois, c’est-à-dire vers la démocratie et vers le développement en général. Le Comité souscrit à l’appréciation suivante de sa part : « Il existe un domaine de recherche potentiellement riche dans lequel on pourrait faire la synthèse des travaux de développement politique et socioéconomique, ce qui constituerait une tâche à la fois stimulante et colossale[93]. » On peut et on doit allier l’aide pour le développement démocratique à l’aide au développement en faveur des pauvres si l’on veut obtenir de bons résultats. La démocratie n’a pas à être reléguée au second plan dans les efforts de développement[94].
4. La cohésion et la coordination font toujours défaut dans l’aide pour le développement démocratique tant au sein de chaque pays donateur qu’à l’échelle internationale. Les fournisseurs d’aide à la démocratie doivent remédier à cette faiblesse.
Quelle que soit la préférence exprimée à propos des approches de promotion de la démocratie avec coordination multilatérale (ou du moins à propos des approches compatibles les unes avec les autres), la coordination se fait rarement dans la pratique. Voici ce que dit George Perlin à cet égard : « les fournisseurs de services sur le terrain et les bénéficiaires de l’aide considèrent généralement que la complexité de mise en œuvre de l’aide à la démocratie a des conséquences néfastes […] il n’y a pas de stratégie concertée pour chaque pays. L’aide est fournie à la pièce, selon les préférences et les compétences particulières des donateurs […] certaines formes d’aide sont fournies par plusieurs donateurs (dont les programmes se chevauchent), alors que d’importants besoins ne sont pas comblés[95]. » Lors de son témoignage devant le Comité, M. Perlin a indiqué que les donateurs devaient veiller à la cohésion de leurs propres programmes et que le Canada pourrait donner l’exemple à cet égard :
Il y a une autre critique que l’on peut faire au travail effectué dans ce domaine, c’est la fragmentation des efforts déployés par les donateurs en raison du manque de cohérence des programmes mis en oeuvre dans divers pays. Nous pourrions élaborer au Canada des plans stratégiques d’assistance démocratique visant les pays dans lesquels nous souhaitons intervenir. Là encore, je souligne qu’à mon avis, il faut adopter une stratégie de gouvernance globale fondée sur la recherche relative à la situation particulière d’un pays particulier : les caractéristiques du pays, l’étape à laquelle il en est arrivé dans le processus de démocratisation, quelle était la situation antérieure et quelle est l’expérience que le pays a connue avant de démarrer le processus de développement démocratique[96].
Selon la ministre de la Coopération internationale, Josée Verner, l’ACDI a appris de ses activités sur le terrain « qu’instaurer la gouvernance démocratique est un processus complexe qui doit puiser dans un vaste éventail de connaissances. Ce processus doit être accompagné d’une stratégie et d’une vision globale. Il doit aussi faire l’objet d’efforts coordonnés tant à l’échelle nationale qu’internationale[97] ».
Plusieurs témoins, notamment Thomas Axworthy, David Donovan et Kevin Deveaux, ont exhorté le Comité à envisager une approche de coordination plus centralisée de l’aide canadienne au développement démocratique, approche qui impliquerait la création d’une nouvelle institution. D’autres témoins ont dit préconiser des moyens plus modestes pour améliorer la coordination entre les organismes canadiens ayant des activités de développement démocratique, de manière à ce que ces activités soient plus fructueuses. Le Comité pense quant à lui qu’il faut faire les deux. Nous allons examiner cette question plus en détail au chapitre 7 de la partie III du présent rapport, qui traite des nouvelles orientations des politiques canadiennes.
À ce stade-ci, le Comité voudrait souligner que le problème du manque de cohésion et de coordination demeure entier pour les fournisseurs d’aide à la démocratie, qui devront s’employer à le résoudre. Les États-Unis sont bien sûr eux aussi concernés par ce problème, compte tenu des importantes sommes d’argent qu’ils consacrent au domaine et de l’éventail d’organismes américains qui y œuvrent. Voici ce que dit à ce sujet Thomas Melia (directeur exécutif adjoint de Freedom House et professeur à la Walsh School of Foreign Service de l’Université Georgetown), que le Comité a rencontré à Washington :
[Il y a aux États-Unis] une communauté plutôt décentralisée de plusieurs milliers de coopérants, hommes et femmes, qui travaillent à l’intérieur ou à l’extérieur de l’administration américaine, dans un éventail d’organismes publics, multinationaux ou privés, dont le siège est aux États-Unis, mais qui ont des ramifications partout dans le monde par l’intermédiaire de divers réseaux multinationaux. Ces gens ont accumulé, au cours des 20 dernières années environ, une expérience (et ont même acquis une véritable expertise dans certains cas) sur les programmes et les politiques pouvant contribuer au développement démocratique dans d’autres pays.
Cependant, il n’y a aucun centre « de commandement et de contrôle » relatif aux politiques de promotion de la démocratie. Il n’y aucun endroit consacré à l’élaboration ou à l’application coordonnée d’une stratégie globale, même pour les organismes faisant partie de l’administration américaine. Au fil des ans, cet éventail d’acteurs a su communiquer régulièrement et coopérer la plupart du temps de manière fructueuse, tant au sein de l’administration américaine qu’à l’extérieur de celle-ci, entre Américains et étrangers. Le gros de la coopération pratique est de nature tactique. Elle se produit « sur le terrain », lors d’urgences où divers acteurs sont actifs et où les besoins des bénéficiaires potentiels s’expriment dans une situation très changeante qui nécessite des réactions rapides et qui exige de la part des fournisseurs d’aide en puissance qu’ils trouvent une façon de coopérer. Ils y arrivent souvent, mais l’expérience nous montre qu’il est beaucoup plus difficile (et même impossible à toutes fins utiles) de parvenir, sur une vaste échelle, à une coopération stratégique ou à une convergence autour des approches de la démocratisation […] on a essayé à plusieurs reprises d’imposer la cohésion, mais ces efforts ont été vains jusqu’à maintenant[98].
Ian Smillie, du Partenariat Afrique Canada, a dit ceci au Comité : « Il y a peu de chance qu’une bonne gouvernance découle d’une liste de projets disparates, limités dans le temps, qui sont offerts par une dizaine de donateurs mal coordonnés[99]. » Par la même occasion, il a prévenu le Comité qu’il ne suffirait pas d’améliorer la cohésion et la coordination pour obtenir de meilleurs résultats. Il faudrait aussi chercher à apprendre davantage par la mise en commun des connaissances, compte tenu de la complexité du champ d’application des politiques :
[…] certains détracteurs de l’approche canadienne en matière de gouvernance déplorent l’absence de politiques cohérentes reliant ensemble tous les aspects du programme. Une approche parcellaire, projet par projet, sans politique centrale évidente et sans gestion centrale, disent-ils, a peu de chance de donner de bons résultats. C’est peut-être vrai, mais étant donné la taille énorme du programme de gouvernance et du bilan limité des donateurs relativement à la promotion, de saines doses d’humilité et de prudence sont justifiées, ainsi qu’un bon jeu de freins au niveau des attentes. Étant donné la complexité du défi, on peut justifier des interventions sélectives, de concert avec d’autres donateurs, destinées à apprendre ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas. Cependant, l’absence apparente, au Canada, d’un endroit où l’on peut regrouper, décrire, partager et se rappeler les leçons va à l’encontre de l’apprentissage qui fait si cruellement défaut dans ce domaine[100].
5. Il n’est pas facile d’évaluer les effets de l’aide à la démocratie en général ainsi que de projets et de programmes particuliers de démocratisation. Qui plus est, les donateurs s’occupent souvent assez peu de procéder à des évaluations. Il faut donc s’employer davantage à viser des objectifs réalistes exprimés sous forme de résultats, à tirer des leçons de l’expérience pratique et à faire de la recherche dans le but de rendre l’aide au développement démocratique plus efficace.
Thomas Carothers tirait la conclusion suivante dans un ouvrage écrit en 1999 :
De toutes les facettes de l’aide à la démocratie, c’est l’évaluation qui a le moins progressé. Les programmes de démocratisation ne sont pas faciles à évaluer parce qu’il est difficile pour les évaluateurs de s’entendre sur des critères de réussite précis dans le domaine politique. Il est difficile d’établir des relations causales claires entre des projets donnés et des tendances politiques plus vastes. Dans la plupart des cas, au cours des années 1990, soit les promoteurs de la démocratie n’évaluaient pas du tout leurs programmes, soit ils commandaient des évaluations superficielles à des experts ne bénéficiant pas d’une indépendance véritable. Ce n’est qu’au cours des dernières années, avec la fin de la lune de miel de la démocratisation ayant commencé en 1989 et avec les pressions grandissantes pour justifier les budgets, que les fournisseurs d’aide ont commencé à prendre le sujet des évaluations plus au sérieux[101].
Dans son ouvrage, Carothers se montrait sceptique devant les efforts de la United States Agency for International Development visant à employer sur le terrain un mode de gestion « axé sur les résultats » et des indices quantifiables de rendement. « La complexité et la rigidité du système engendrent des projets qui sont conçus pour s’y intégrer — pour produire “de bons chiffres” — plutôt que des projets conçus pour répondre aux besoins des pays qui se démocratisent[102]. » Il était aussi très réaliste à propos des résultats que pouvait donner l’aide fournie[103]. Cinq ans plus tard, en analysant la situation, Carothers a dû constater qu’il n’avait pas vu beaucoup d’amélioration : « même si les activités de promotion de la démocratie se multiplient, nous ne disposons toujours, sur ce domaine, que d’une quantité assez limitée d’information épurée, compilée et organisée […] dans l’ensemble, la promotion de la démocratie est toujours loin d’être assez étudiée, et l’écart entre ce que nous voulons accomplir et ce que nous connaissons à propos des moyens d’y arriver demeure toujours énorme[104] ».
D’autres analystes ayant eux aussi examiné attentivement la question sont arrivés à des conclusions semblables. Par exemple, Andrew Green et Richard Kohl ont souligné ainsi la présence de cet écart : « Depuis l’apparition de l’aide à la démocratie comme élément clé de l’aide étrangère au milieu des années 1980, le sujet est devenu important pour les organismes donateurs de tous genres dans le monde entier. Néanmoins, ce progrès n’a malheureusement pas fait l’objet d’une somme de travaux de recherche qui auraient permis d’analyser les répercussions de l’aide à la démocratie[105]. »
Le Comité est d’avis que le Canada a les moyens de faire une contribution importante dans ce domaine et qu’il devrait le faire comme l’indique la prochaine section du présent chapitre.
2.1 La contribution canadienne pour combler le déficit des connaissances et de l’évaluation
Les témoins entendus avaient passablement de choses à dire au sujet des problèmes d’évaluation et du manque chronique de connaissances. Diane Ethier, professeure à l’université, s’est exprimée sans détour à cet égard : « Il y a des limites aux évaluations de l’USAID parce qu’il n’y a pas assez d’experts qui vont sur le terrain, ils y restent seulement trois semaines, ce qui n’est pas assez long, et ils ne rencontrent pas assez d’intervenants locaux. Alors, les évaluations de l’USAID pourraient être meilleures, mais c’est déjà mieux que ce qu’offre l’ACDI, qui n’a aucune évaluation[106]. » Cette dernière affirmation est peut-être trop catégorique, puisque le président de l’ACDI, Robert Greenhill, est venu dire au Comité que l’ACDI procédait à des évaluations de programme, souvent dans l’ensemble du pays, et que ces évaluations étaient publiques. Un service de l’ACDI se consacre aux évaluations et aux vérifications. M. Greenhill a ajouté ceci : « Nous aurons aussi, après avoir mis un nouvel accent sur la comptabilité, un chief audit executive qui fera des audits pour moi sur des programmes spécifiques, afin de nous assurer que l’argent est bien dépensé et donne des résultats[107]. » (En revanche, Ian Smillie a mis le Comité en garde contre ce qu’il a appelé le « brouillard » d’une « programmation axée sur les résultats ». Il a ajouté : « C’est devenu une sorte de tyrannie de la programmation, qui a conduit l’ACDI et ses subventionnés à un excès de planification et d’aversion pour le risque, dans ce qui est essentiellement une activité émergente et encline au risque[108]. »)
Dans le mémoire qu’elle a présenté au Comité en octobre 2006, l’ACDI énonçait ainsi les « leçons retenues » de son expérience :
· Le renforcement de la gouvernance démocratique est un processus ni simple ni rapide. Il faut améliorer les compétences, les processus et les institutions de même que promouvoir et solidifier les liens complexes qui existent entre les règles juridiques, les droits, l’administration et la politique.
· Pour progresser, il faut bien connaître les valeurs universelles qui constituent le fondement de la gouvernance démocratique et avoir la volonté politique de les mettre en pratique.
· Les partenaires du développement ne veulent pas qu’on leur propose des modèles étrangers, ils veulent des connaissances pratiques.
· Les donateurs obtiennent de meilleurs résultats lorsqu’ils connaissent bien les rouages de la gouvernance démocratique et qu’ils apportent une aide ciblée et adaptée aux circonstances locales.
· Les programmes d’aide sont plus efficaces lorsqu’ils ne visent pas qu’une activité, telle une élection, et englobent les processus, les institutions et la culture démocratique connexe.
À part l’ACDI, le Centre international des droits de la personne et du développement démocratique (Droits et Démocratie) fait l’objet d’une évaluation quinquennale prévue dans la loi, évaluation dont les résultats sont soumis au Parlement, mais suscitent rarement beaucoup d’intérêt sur la scène politique[109]. En Europe, l’Institut néerlandais pour la démocratie multipartite des Pays-Bas semble être le plus avancé en fait d’évaluation régulière des programmes du pays[110].
Il reste qu’on en sait toujours trop peu sur ce qui fonctionne dans tel ou tel contexte. George Perlin est venu dire ceci au Comité : « il existe un grand besoin d’étudier les façons d’améliorer l’efficacité de l’aide démocratique. Il n’existe pas d’outil efficace permettant d’évaluer l’aide démocratique. Nous avons des outils pour évaluer la façon dont nous gérons les projets mais nous n’avons pas de catégorie d’analyse ou d’outils pour faire la recherche que nous avons besoin d’effectuer pour définir quels sont les résultats souhaités[111]. » Dans le même témoignage, il a dit également ceci : « Je veux dire en fait que nous pourrions faire un apport utile si le Canada devenait un centre de recherche[112]. » Dans un mémoire présenté subséquemment au Comité, M. Perlin a précisé sa pensée concernant les problèmes du manque chronique de coordination, de planification stratégique et de connaissances puisées au fil de l’expérience. Selon lui, « les évaluations des besoins devraient être fondées sur des plans globaux centrés sur les pays et tenir compte des évaluations issues d’une recherche systématique à laquelle les experts locaux participent activement[113]. »
La curiosité du Comité a été piquée par la suggestion de M. Perlin voulant que le Canada agisse en chef de file sur la scène internationale pour résoudre ces problèmes, en établissant un « centre d’études des politiques sur le développement démocratique », au sujet duquel il donne les précisions suivantes :
Le principal objectif du centre serait de promouvoir une politique et des pratiques plus efficaces. Pour ce faire, il pourrait, par exemple, contribuer à la politique et aux pratiques administratives canadiennes et fournir des ressources visant à appuyer la réforme des pratiques et de la politique internationales. Il pourrait notamment :
· établir une base de données internationale sur les programmes et les projets, dont donateurs et praticiens pourraient se servir pour coordonner plus facilement leurs activités;
· établir une base de données sur les enseignements tirés de l’expérience;
· créer des instruments et des protocoles d’évaluation qui aideraient à bâtir un corpus international de connaissances sur les enseignements tirés;
· créer des stratégies de développement démocratique globales pour les pays auxquels le Canada fournit une aide, en faisant appel à des équipes de recherche combinant groupes d’experts locaux et internationaux, notamment des représentants des autres donateurs travaillant dans ces pays;
· aider à créer des plans stratégiques axés sur les pays similaires pour d’autres pays où le Canada intervient;
· appuyer la recherche universitaire sur les politiques et les pratiques exemplaires en matière d’aide au développement démocratique;
· établir des programmes de formation pour les administrateurs et les praticiens qui leur fourniraient les connaissances dont ils ont besoin pour prendre des décisions stratégiques efficaces[114].
M. Perlin est d’avis que le centre en question « pourrait être établi comme agence au sein de l’exécutif ou comme agence indépendante relevant du Parlement par l’entremise d’un ministre, comme le CRDI [Centre de recherches pour le développement international] ». Le Comité préférerait nettement que le centre soit un organisme indépendant dont les travaux de recherche pourraient être consultés tant par des gens travaillant au sein d’organismes publics que par d’autres personnes. En outre, le centre devrait être financé un peu comme le CRDI, soit de manière à en préserver l’indépendance à l’égard du gouvernement.
Le Comité constate que le Canada a bien réussi avec la création (en 1970) du CRDI, à Ottawa, qui a acquis ses lettres de noblesse sur la scène internationale et dont le but est d’inciter les pays en voie de développement à répondre à leurs propres besoins sur le plan du savoir. La présidente de cet organisme, Maureen O’Neil, a affirmé devant le Comité que « la recherche dans les pays en développement [pouvait] favoriser l’essor de la démocratie[115] ». Selon Mme O’Neil, « la recherche est propice à la libre investigation et au débat [et elle] élargit l’éventail de solutions concrètes face à des problèmes persistants. [Elle] contribue à rendre les gouvernements comptables de leurs actes [et elle] sert d’assise à des politiques fondées sur des données probantes ».[116] Néanmoins, Mme O’Neil a dû faire le constat suivant, qui est des plus clairs : « Les politiques d’aide à la démocratie devraient se fonder sur une recherche sérieuse, mais il est rare qu’elles le soient[117]. »
Mme O’Neil a précisé que le CRDI avait coopéré avec le Centre parlementaire et d’autres membres du « Conseil démocratique[118] » dans ce dossier. Il en sera question plus longuement dans les parties II et III du présent rapport, qui sont consacrées aux politiques canadiennes. Le Comité souhaite relever les recommandations pertinentes à cet égard de Robert Miller, président du Centre parlementaire, qui disait ceci dans son témoignage d’octobre 2006 : « nous conseillons au gouvernement de créer un réseau de centres d’excellence canadiens du développement démocratique à l’échelle internationale. Ce type d’initiative soutiendrait des organisations canadiennes dûment sélectionnées afin de leur permettre d’acquérir une expertise considérable sur des questions essentielles liées au développement démocratique. Elle favoriserait également leur capacité à innover, à appliquer et à diffuser leur savoir[119] ». Dans un mémoire remis au Comité, le Centre parlementaire propose au gouvernement de financer « un nouveau Programme de recherche et d’études pour les partenaires de la démocratie ». Il souhaite que l’on confie au CRDI « le mandat de concevoir et de gérer un tel programme »[120]. Ainsi, le Centre parlementaire pense que le savoir doit être « ancré localement ». Selon lui, « les pays en développement doivent renforcer leurs capacités à soutenir des études et à entreprendre des recherches ancrées dans la réalité locale[121] ».
Revenons maintenant à la première question d’importance que nous avons cernée relativement à l’aide à la démocratie, soit la participation qu’il faut susciter dans le pays bénéficiaire. Les Canadiens peuvent fournir de l’aide, mais doivent être bien conscients de ce que leur dit Paul Larose-Edwards : « Si vous voulez des résultats durables, vous avez intérêt à former des remplaçants locaux[122]. » Le Comité constate que le transfert de connaissances vers le pays bénéficiaire est l’une des premières leçons qu’il faut retenir au fil de la « courbe d’apprentissage » dont parle Thomas Carothers, qui précise par ailleurs ceci :
[…] les promoteurs de la démocratie doivent aider les pays bénéficiaires à bien comprendre et à bien utiliser l’aide à la démocratie. […] On peut commencer par adopter des méthodes d’élaboration, de mise en œuvre et d’évaluation axées sur le pays concerné, ce qui est déjà un pas dans la bonne direction. Toutefois, l’effet se limite chaque fois à un seul projet. Les promoteurs de la démocratie doivent entreprendre de traiter le sujet globalement […] Les donateurs doivent faire connaître bien davantage leurs programmes d’aide à la démocratie dans les pays bénéficiaires, en diffusant largement, dans la langue locale, de l’information qui explique quels programmes sont mis en œuvre, qui en donne les objectifs et qui indique les partenaires[123].
Bref, il reste encore toute une série de questions importantes à traiter pour pouvoir progresser dans le domaine de l’aide internationale à la démocratie. Dans tous les cas, et le donateur, et le bénéficiaire ont besoin d’enrichir leur bagage de connaissances. Ce besoin existe quel que soit le type d’aide à la démocratie ou son champ d’application, y compris lorsqu’il s’agit de constituer un parlement et des partis politiques, ce dont il sera question en détail au chapitre 7.
Il importe de souligner que, quelle que soit la quantité de ressources affectées par le Canada au développement démocratique à l’avenir, et parallèlement aux nouvelles mesures canadiennes que nous présentons dans la partie III du présent rapport, il est essentiel de pouvoir s’appuyer sur de meilleures connaissances à propos des façons les plus efficaces d’utiliser les sommes d’argent destinées à l’aide à la démocratie. Nous sommes d’accord avec George Perlin pour dire que le Canada a les moyens de jouer un rôle de chef de file à cet égard et qu’il devrait le faire.
Recommandation 2
Le Canada devrait investir davantage dans l’acquisition de connaissances pratiques et dans la recherche relativement à l’aide au développement démocratique, pour que celle-ci soit plus efficace. L’information recueillie devrait servir à guider dans leur travail l’État fédéral lui-même — notamment la Section de la démocratie du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international ainsi que le Bureau de la gouvernance démocratique de l’ACDI — de même que d’autres donateurs et des gens de l’extérieur du secteur public qui œuvrent dans le domaine. Plusieurs solutions devraient être envisagées pour appuyer la recherche indépendante d’une manière coordonnée permettant aux décideurs et aux praticiens d’en profiter. On pourrait notamment envisager la création d’un programme de recherche et d’études pour les partenaires de la démocratie qui relèverait du Centre de recherches pour le développement international, selon la suggestion du Centre parlementaire et d’un centre d’étude des politiques sur le développement démocratique, selon la suggestion de George Perlin.
La recherche dont on pourrait s’inspirer pour établir les politiques devrait être axée particulièrement sur les questions ayant constamment une importance cruciale dans le domaine du développement démocratique, en particulier les questions suivantes :
· La nécessité de favoriser une démocratisation dont la paternité est locale et de porter attention aux dimensions locales du développement démocratique.
· La nécessité de veiller à ce que le développement démocratique soit considéré comme un droit et une valeur universels, conformément à la Charte internationale des droits de l’homme.
· La nécessité de lier l’aide au développement démocratique au phénomène plus vaste du développement social et économique des pays et aux mesures de lutte contre la pauvreté dans les pays bénéficiaires d’aide publique au développement.
· La nécessité de tirer profit de l’expérience des ONG actives dans le domaine de l’aide au développement démocratique.
· La nécessité d’améliorer la cohésion et la coordination de l’aide au développement démocratique au sein de chaque pays donateur et dans une perspective multilatérale.
· La nécessité d’évaluer plus régulièrement et de manière plus réaliste l’efficacité du financement de l’aide à la démocratisation et la nécessité d’évaluer plus régulièrement et de manière plus réaliste l’efficacité des stratégies d’aide au développement démocratique poursuivies.
Le Comité reconnaît que l’aide canadienne au développement démocratique à l’échelle internationale a beaucoup progressé depuis ses débuts dans les années 1980. Nous élaborerons sur la question de l’évolution de cette aide au chapitre 4. Par ailleurs, il ressort nettement des témoignages entendus qu’il faudrait examiner de près l’ensemble de l’aide financière que le gouvernement du Canada consacre actuellement au développement démocratique et dont l’essentiel provient du budget de l’ACDI. Une lacune a été particulièrement relevée, et c’est l’absence d’une évaluation sérieuse. Nous sommes donc d’avis qu’une évaluation indépendante détaillée de l’aide actuelle et de son efficacité s’impose.
Une solution consisterait à réunir un petit groupe indépendant d’experts, choisis après consultation de tous les partis représentés à la Chambre des communes et approbation du Comité, qui aurait pour mandat de déterminer, parmi tous les mécanismes de prestation d’aide financière, lesquels permettent d’atteindre les objectifs déclarés efficacement, quelles formes d’aide sont le plus efficaces et où l’aide canadienne est le plus utile. Nous reviendrons sur ce point dans plusieurs recommandations ultérieures. Le Comité propose que le groupe indépendant dispose un délai d’un an pour préparer son rapport et que celui-ci soit déposé au Parlement et renvoyé au Comité.
Recommandation 3
Compte tenu des faiblesses observées dans l’évaluation des effets, par rapport aux sommes dépensées, de l’aide à la démocratie fournie par le Canada, le gouvernement devrait faire réaliser une évaluation indépendante dans l’année suivant l’attribution de tout financement public pour ce genre d’aide. Les résultats de l’évaluation devraient être soumis au Parlement et renvoyés au Comité. Cette évaluation pourrait être entreprise par un panel d’experts indépendant choisi à la suite de consultations de tous les partis à la Chambre des communes et de l’approbation du Comité.
[45] Peter Burnell, dir., Democracy Assistance: International Cooperation for Democratization, 2000, p. 13. [traduction]
[46] Ibid., p. 36. [traduction]
[47] Pour en savoir davantage sur le contexte de la création du NED, voir Thomas Carothers, Aiding Democracy Abroad: The Learning Curve, 1999, p. 30 et pages suivantes.
[48] Burnell, op. cit., p. 39 et pages suivantes. Concernant les justifications d’une aide accrue au développement démocratique dans le cadre de l’aide internationale, voir aussi George Perlin, « International Assistance to Democratic Development: Some Considerations for Canadian Policy Makers », Background Paper for research meeting on Good governance and aid effectiveness, Ottawa, CRDI, 5 mars 2005, p. 2-6.
[49] George Perlin, « International Assistance to Democratic Development: A Review », 2003, p. 12-13, tableau 1, « Program Objectives and Activities in the Area of Democracy Assistance », collection Documents de travail de l’Institut de recherche en politiques publiques, no 2003-04, www.irp.org.
[50] Ibid., p. 13.
[51] George Perlin, « Trouver une voie vers des politiques plus efficaces de promotion de la démocratie », mémoire présenté au Comité, 5 mars 2007, p. 1, note en bas de page no 2.
[52] Témoignages, réunion 21, 18 octobre 2006, p. 1, et mémoire présenté à cette occasion par l’ACDI.
[53] Massimo Tommasoli, « Democracy Building and the Political Dimensions of Development », dans Institut international pour la démocratie et l'aide au processus électoral, Ten Years of Supporting Democracy Worldwide, 2005, p. 29‑30.
[54] The EU Approach to Democracy Promotion in External Relations: Food for Thought, 21 juin 2006, document de discussion du Conseil de l’Europe sur la promotion de la démocratie, http://www.democracyagenda.org/modules.php?mop=modload&name=Upload&file=index&op=show&mid=2. [traduction]
[55] Témoignage de Leslie Campbell devant le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international le 21 février 2007. M. Campbell devait témoigner devant le comité de la Chambre des communes à Washington le 5 février 2007, mais il a dû se rendre en Irak à l’occasion du décès, dans ce pays, de quatre membres du personnel du National Democratic Institute.
[56] Peter MacKay, allocution à l’occasion du Dialogue sur l’approche canadienne en matière de développement démocratique, 15 février 2007, http://geo.international.gc.ca/cip-pic/current_discussions/democracy_dialogue-fr.asp?lang_update=1.
[57] Gordon Crawford, « Réunir les conditions propices aux réformes démocratiques : tirer des enseignements des principes démocratiques », communication présentée à l’occasion du Dialogue sur l’approche canadienne en matière de développement démocratique, Ottawa, 15 février 2007, p. 7.
[58] Vidar Helgesen, « Institutions and Beyond: Making Democracy Sustainable », 2006, p. 5. [traduction]
[59] Crawford, op. cit., p. 2.
[60] Thomas Carothers, Aiding Democracy Abroad: The Learning Curve, 1999, p. 339. [traduction]
[61] Roel von Meijenfeldt, Au-delà de l’euphorie : de nouveaux défis pour la promotion de la démocratie, communication présentée au ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, 10 janvier 2007, p. 13.
[62] Ross Reid, « Dialogue sur l’approche canadienne en matière de développement démocratique », communication présentée à l’occasion du Dialogue sur l’approche canadienne en matière de développement démocratique, Ottawa, 15 février 2007, p. 1.
[63] Témoignages, réunion 23, 24 octobre 2006, p. 1.
[64] Témoignages, réunion 17, 27 septembre 2006, p. 3.
[65] Témoignages, réunion 18, 2 octobre 2006, p. 5.
[66] Association du Barreau canadien, « Le soutien à la démocratie au moyen du principe de la primauté du droit », janvier 2007, p. 8. Voir aussi Témoignages, réunion 38, 30 janvier 2007.
[67] Témoignages, réunion 19, 4 octobre 2006, p. 12.
[68] Témoignages, réunion 42, 27 février 2007.
[69] Témoignages, réunion 35, 6 décembre 2006, p. 2. Voici la description faite par M. Foster de la coalition Social Watch, en Inde : « C’est en fait une alliance d’organismes de la société civile et non un organisme séparé. Elle travaille à l’échelle nationale à surveiller des questions de gouvernance nationales, régionales et locales. Elle a pour objectif de veiller à ce que les organismes de la société civile et les citoyens participent véritablement au processus de gouvernance pour rendre la démocratie plus significative et participative. La surveillance des institutions de gouvernance les rendra responsables et transparentes. Elle cible quatre lieux clés de gouvernance : le Parlement, l’exécutif et son exécution de la politique publique, la Cour suprême et les administrations autonomes locales. Elle le fait dans une perspective de développement social et de reddition de comptes aux citoyens » (ibid., p. 1). En ce qui concerne, de façon générale, les problèmes rencontrés par la société civile, voir Strengthening Democratic Gouvernance: The Role of Civil Society, juin 2006, actes du congrès Wilton Park S06/10, présenté en collaboration avec l’Ash Institute for Democratic Gouvernance and Innovation de l’Université Harvard, http://www.wiltonpark.org.uk/documents/conferences/WPS06-10/pdfs/WPS06-10.pdf.
[70] Témoignages, réunion 21, 18 octobre 2006, p. 10.
[71] Voir Thomas Carothers, « Promoting Democracy and Fighting Terror », Foreign Affairs, janvier et février 2003. Voir aussi Carothers, « The Backlash Against Democracy Promotion », Foreign Affairs, mars et avril 2006, http://www.foreignaffairs.org/backissues/decade/2000. En ce qui concerne les soupçons du monde musulman à propos de la stratégie des États-Unis au Moyen-Orient, voir Carrie Wicksham, « The Problem with Coercive Democratization: The Islamist Response to the U.S. Democracy Reform Initiative », Muslim World Journal of Human Rights, vol. 1, no 1, 2004, article 6.
[72] Carl Gershman et Michael Allen, « The Assault on Democracy Assistance », Journal of Democracy, vol. 17, no 2, avril 2006, p. 37, http://www.journalofdemocracy.org/articles/gratis/Gershman-17-2.pdf [traduction]. L’Economist Intelligence Unit compte, dans sa liste de 2006 des pays classés selon l’indice de démocratie, 30 régimes hybrides, notamment la Russie, Haïti et l’Irak. L’Afghanistan figure toujours parmi les 55 régimes autoritaires (voir Kekic, op. cit., p. 4-5, tableau 1, « Indice de démocratie de l’Economist Intelligence Unit 2006 »).
[73] Ibid., p. 47. [traduction]
[74] Thomas Carothers, « Responding to the Democracy Promotion Backlash », témoignage présenté lors d’une audience du Comité des relations extérieures du Sénat des États-Unis, 8 juin 2006, http://www.carnegieendowment.org/publications/index.cfm?fa=view&id=18416&prog=zgp&proj=zdrl,zme. [traduction]
[75] Ivo Daalder et James Lindsay, « Democracies of the World , Unite », The American Interest Online, aperçu du numéro de l’hiver 2007, http://www.the-american-interest.com/ai2/article.cfm?Id=219&MId=6.
[76] Gershman et Allen, op. cit., p. 49-50. [traduction]
[77] Témoignages, réunion 19, 4 octobre 2006, p. 3.
[78] Ibid., p. 4. Le Comité a rencontré Richard Rowson, président du Council for a Community of Democracies, à Washington, le 6 février 2007.
[79] Robert Herman et Theodore Piccone, dir., Defending Democracy: A Global Survey of Foreign Policy Trends 1992-2002, Democracy Coalition Project, 2002, cités dans Schmitz, « The Role of International Democracy Promotion in Canada’s Foreign Policy », 2004, p. 42, http://www.irp.org/fasttrak/index.htm. Le Comité a rencontré Theodore Piccone, directeur général du Democracy Coalition Project et représentant à Washington du Club de Madrid, le 6 février 2007, à Washington. M. Piccone a indiqué que les résultats d’une nouvelle étude sur les 40 pays visés par l’enquête de 2002 allaient paraître bientôt.
[80] Témoignages, réunion 21, 18 octobre 2006, p. 2.
[81] Témoignages, réunion 26, 1er novembre 2006, p. 11.
[82] Bernard Wood, Quelques points de départ possibles, communication présentée à l’occasion du Dialogue sur l’approche canadienne en matière de développement démocratique, Ottawa, 15 février 2007, p. 3‑4. C’est l’auteur qui emploie les caractères gras et les soulignements.
[83] Témoignages, réunion 19, 4 octobre 2006, p. 9.
[84] Témoignages, réunion 34, 5 octobre 2006, p. 7.
[85] « L’indice de démocratie de l’Economist Intelligence Unit », 2006, p. 3, voir Dani Rodrik et Roberto Rigobon, « Rule of law, democracy, openness, and income: estimating the interrelationships », Economics of Transition, vol. 13 no 3, 2005; Daron Acemoglu et coll., « Income and democracy », National Bureau of Economic Research, document de travail no 11205, mars 2005.
[86] Cité par von Meijenfeldt, « Au-delà de l’euphorie : de nouveaux défis pour la promotion de la démocratie », p. 3. La version française de la déclaration se trouve dans le site des Nations Unies, à l’adresse http://www.un.org/News/fr-press/docs/2006/SGSM10702.doc.htm.
[87] Hilary Benn, « La politique au service des pauvres : démocratie et développement », discours présenté par le centre d’études et de recherches Demos, Westminster Hall, 23 octobre 2006, p. 2, http://www.demos.co.uk/files/File/HB_speech_-_final.pdf (site en anglais).
[88] « Au-delà de l’euphorie : de nouveaux défis pour la promotion de la démocratie », p. 3, voir Morton Halperin, Joseph T. Seigle et Michael M. Weinstein, « The Democracy Advantage: How Democracies Promote Peace and Prosperity », Council on Foreign Relations, New York, Routledge, 2004.
[89] Carothers, Aiding Democracy Abroad: The Learning Curve, 1999, p. 344. [traduction]
[90] Ibid., p. 345. [traduction]
[91] « Promotion et protection de la démocratie et des droits humains : Politiques et perspectives pour le 21ième siècle », mémoire accompagnant le témoignage de vive voix du président de Droits et Démocratie, Jean-Louis Roy, 2 octobre 2006.
[92] Témoignages, réunion 18, 2 octobre 2006, p. 4. C’est nous qui employons les caractères gras.
[93] Carothers, Aiding Democracy Abroad: The Learning Curve, p. 345. [traduction]
[94] Voir aussi Carothers, « The Sequencing Fallacy », Journal of Democracy, janvier 2007.
[95] Perlin, « International Assistance to Democratic Development: A Review », 2003, p. 19. [traduction]
[96] Témoignages, réunion 19, 4 octobre 2006, p. 2.
[97] Témoignages, réunion 21, 18 octobre 2006, p. 2.
[98] Thomas O. Melia, The Democracy Bureaucracy: The Infrastructure of American Democracy Promotion, septembre 2005, p. 9, document de discussion préparé pour le Princeton Project on National Security du Working Group on Global Institutions and Foreign Policy Infrastructure, http://www.wws.princeton.edu/ppns/papers/democracy_bureaucracy.pdf [traduction]. Voir aussi Melia, « The Democracy Bureaucracy », The American Interest, vol. 1, no 4, été 2006, p. 122‑130.
[99] Ian Smillie, « Une assez bonne gouvernance? », mémoire présenté au Comité, janvier 2007, p. 3. Voir Témoignages, réunion 39, 1er février 2007.
[100] Ibid., p. 2‑3.
[101] Carothers, Aiding Democracy Abroad: The Learning Curve, p. 339‑340. [traduction]
[102] Ibid., p. 340. [traduction]
[103] Comme le dit Carothers : « Dans l’ensemble, les programmes de démocratisation n’ont, dans le meilleur des cas, qu’une influence secondaire parce qu’ils n’ont pas d’effet décisif sur les conditions sous-jacentes de la société qui déterminent largement la trajectoire politique d’un pays, à savoir : le caractère et le positionnement des principales forces politiques; les traditions politiques, les attentes et les valeurs propres à l’ensemble des citoyens; la présence ou l’absence de puissants éléments antidémocratiques. » (Ibid., p. 341.) [traduction]
[104] Carothers, « Introduction », Critical Mission: Essays on Democracy Promotion, Washington, Carnegie Endowment for International Peace, 2004, p. 2‑3. [traduction]
[105] Andrew T. Green et Richard D. Kohl, « Challenges of Evaluating Democracy Assistance: Perspectives from the Donor Side », Democratization, vol. 14, no 1, février 2007, p. 163. [traduction]
[106] Témoignages, réunion 34, 5 décembre 2006, p. 5. C’est nous qui employons les caractères gras.
[107] Témoignages, réunion 43, 1er mars 2007, p. 13.
[108] Smillie, « Une assez bonne gouvernance? », mémoire présenté au Comité, janvier 2007, p. 2.
[109] Le Comité a tenu une audience sur la troisième de ces évaluations. Voir Témoignages, 38e législature, 1re session, réunion 17, 15 décembre 2004.
[110] Voici ce que dit à cet égard une publication du NIMD : « Le NIMD est conscient qu’il œuvre dans un secteur d’activité – l’aide à la démocratie – qui est encore peu défriché. C’est pourquoi il met beaucoup l’accent sur l’évaluation régulière et externe de ses programmes. Des évaluations externes sont disponibles pour les programmes du Mozambique, du Guatemala, de la Bolivie et du Ghana. La direction du NIMD insiste pour que les activités du NIMD soient empreintes du désir d’apprendre et elle souhaite grandement mettre en commun les leçons tirées de l’expérience. » (Support for Political Parties and Party Systems: The IMD approach, La Haye, non datée, p. 13, http://www.nimd.org/upload/publications/2005/supporting_parties_the_imd_approach.pdf)
[111] Témoignages, réunion 19, 4 octobre 2006, p. 2.
[112] Ibid.
[113] Perlin, « Trouver une voie vers des politiques plus efficaces de promotion de la démocratie », mémoire présenté au Comité, 5 mars 2007, p. 2.
[114] Ibid.
[115] Témoignages, réunion 18, 2 octobre 2006, p. 1.
[116] Ibid., p. 1‑2.
[117] Ibid., p. 2.
[118] En février 2007, le Conseil démocratique, qui avait été formé à titre de forum informel en 2005, comptait huit membres : le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, l’ACDI, Élections Canada, le Forum des fédérations, le CRDI, l’Institut national de la magistrature, le Centre parlementaire et Droits et Démocratie (information tirée d’une note d’information préparée à l’occasion du Dialogue sur l’approche canadienne en matière de développement démocratique, 15 février 2007).
[119] Ibid., p. 11.
[120] Le Centre parlementaire, « Renforcer le rôle du Canada comme chef de file dans la promotion de la démocratie », mémoire présenté au Comité, 11 janvier 2007, p. 6.
[121] Ibid.
[122] Témoignages, réunion 23, 24 octobre 2006, p. 2.
[123] Carothers, Aiding Democracy Abroad, 1999, p. 346‑347. [traduction]