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CIMM Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration


NUMÉRO 006 
l
1re SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 17 mai 2006

[Enregistrement électronique]

  (1730)  

[Traduction]

    Au nom du comité, je vous souhaite la bienvenue, messieurs, à cette séance.
    Je vous cède la parole, monsieur Faull, et je vous invite à nous présenter les gens qui vous accompagnent.
     Merci beaucoup, monsieur le président, je vais assurément m'en charger.
    Bonjour, mesdames et messieurs. Peut-être quelques mots d'explication seraient-ils utiles pour dire qui je suis, ce que je fais et pourquoi je suis ici.
    Je suis directeur général de la Direction générale de la justice, de la liberté et de la sécurité de la Commission européenne. Ce sont là, bien sûr, de très belles aspirations et nous nous efforçons chaque jour de les faire éclore dans les 25 États membres de l'Union européenne. Ce que nous faisons correspond essentiellement à ce qui, dans nos États membres, représente les mandats des ministères de la Justice et de l'Intérieur; je ne sais pas exactement quel serait l'équivalent ici. Cela comprend l'immigration, le droit d'asile et les problèmes frontaliers, de même que la lutte contre le crime organisé, la lutte contre le terrorisme, la protection et la promotion des droits fondamentaux, le droit civil, le droit familial et le droit pénal de manière plus générale.
    L'Union européenne, comme vous le savez, comprend 25 pays, qui seront bientôt 27, et qui sait combien d'autres se joindront à nous par la suite, à court ou à moyen terme.
    Nous assumons des responsabilités directes sous l'égide des politiques communes et du système judiciaire commun de l'Union européenne. Le plus pertinent, je crois, dans le contexte de ma visite au Canada, c'est la problématique entourant les frontières, les visas, le droit d'asile, la manière dont nous gérons l'accès à notre territoire, et le droit de nos citoyens de voyager à l'intérieur de nos frontières et dans le monde entier.
     Je suis accompagné aujourd'hui de Eric Hayes, notre ambassadeur, le chef de la délégation de l'Union européenne au Canada; de Chris Kendall, qui travaille dans notre délégation d'Ottawa, située à quelques mètres d'ici; et de Joannes de Ceuster, qui est le chef de l'unité des frontières et des visas à ma direction générale à Bruxelles.
    Je dois dire que nos relations avec le Canada sont extrêmement bien établies, très amicales et marquées par une excellente collaboration. Nos points de désaccord sont quasi inexistants. Cependant, l'objectif principal de ma visite chez vous est de discuter une question qui suscite certaines préoccupations dans nos relations entre l'Union européenne et le Canada. Il s'agit du régime de visas que nous appliquons à vos ressortissants et que vous appliquez aux nôtres.
    Je pense que la coutume dans ce grand Parlement est d'utiliser les deux langues nationales du Canada. Nous faisons un peu la même chose à Bruxelles et, avec votre indulgence, je vais donc dire quelques mots en français.

[Français]

    Le problème des visas provient du fait que nous avons deux régimes juridiques différents : canadien, d'une part; européen, de l'autre. Le régime canadien, vous le connaissez. Le régime européen est fondé sur la collectivité européenne. Nos États membres forment une seule union et nous avons une politique commune des visas. Au niveau international, il se fonde sur la réciprocité, en ce sens que notre droit nous oblige à exiger des visas des pays qui exigent des visas de nos citoyens et de ne pas exiger des visas des pays qui n'en exigent pas de nos citoyens.
    Cette réciprocité n'est pas quelque chose que l'on atteint du jour au lendemain, nous le savons. Nous avons vécu, depuis quelque temps, avec des situations asymétriques où certains pays exigent des visas de certains de nos pays sans que nous ne mettions en place des représailles sous forme d'obligations de visas vis-à-vis des citoyens de ces pays.
    Depuis quelque temps, l'Union européenne s'élargit. Nous avons aujourd'hui 25 États, demain peut-être 27, et le très grand élargissement récent a eu lieu en 2004, avec l'adhésion de 10 nouveaux pays. Essentiellement, ce sont des pays de l'Europe de l'Est ou de l'Europe centrale, mais ce sont aussi deux îles de la Méditerranée : Malte et Chypre.
    Ces pays, en adhérant à l'Union européenne, adoptent ce qu'on appelle, de manière un peu grandiose, notre acquis. Qu'est-ce que notre acquis? C'est notre législation. C'est tout ce qu'on a fait depuis la création de l'Union européenne, au début des années 1950. Ils adoptent, dans leurs lois nationales, le corpus entier des lois européennes avec les obligations, les devoirs et les droits qui en découlent. Ce faisant, ils adoptent aussi ce principe de réciprocité, et leurs citoyens s'attendent à ce que l'Europe leur obtienne l'accès sans visa aux pays dont nous acceptons les citoyens chez nous sans visa.
    Comme je l'ai dit, c'est un processus. Ce n'est pas quelque chose qui arrive du jour au lendemain. Donc, nous sommes en discussion avec quelques pays, dont le Canada, depuis quelque temps pour atteindre cette réciprocité dans un avenir prévisible.
    Nous avons des problèmes semblables mais pas identiques avec les États-Unis, le Brésil, avec d'autres pays d'Amérique latine et avec d'autres pays ailleurs dans le monde.
    Au mois de janvier, nous avons émis un rapport de la Commission européenne qui est destiné à notre Parlement et à notre Conseil des ministres, pour constater le progrès ou l'absence de progrès intervenu dans les différents pays avec lesquels nous manquons de réciprocité. Ce rapport a annoncé un nouveau rapport six mois plus tard, donc à peu près maintenant. Lorsque nous rentrerons en Europe ce week-end, nous devrons finaliser la rédaction de ce rapport, qui sera publié début juillet.
    Je suis donc venu ici — j'étais également à Washington — pour voir avec nos partenaires ce qui a été fait, ce qui peut être fait en matière d'accès au territoire du pays concerné, sans obligation de visa. Je vous rappelle que pour les Canadiens, l'accès à tous les pays européens se fait sans visa. Vous venez chez nous comme vous voulez, sur présentation d'un passeport.
    Ce n'est pas le cas ici, vous le savez. Certains de nos pays, le mien par exemple, celui de Joannes de Ceuster... Oui, nous sommes par hasard des citoyens respectivement de Belgique et du Royaume-Uni, mais certains de nos nouveaux partenaires, 7 des 25 pays, sont encore soumis à l'obligation de visa à l'arrivée au Canada. Ce sont des pays essentiellement d'Europe centrale et de l'Est ou des républiques baltes.

  (1735)  

    Ces pays ont renoué avec la démocratie après de longues années de dictature et d'occupation, et ont adhéré à l'OTAN, ont adhéré à l'Union européenne, et ne comprennent pas, pour être très clair avec vous, qu'on ne les traite pas de manière égale à leurs concitoyens européens des pays plus anciennement membres de l'Union.
    Nous leur disons d'être patients. Nous leur disons que la réciprocité ne s'obtient pas du jour au lendemain. C'est un processus. Il faut que certains critères soient remplis. Nous leur disons aussi que nous sommes en train de discuter, comme ils le sont, eux, de manière bilatérale avec vous, avec les autorités canadiennes en vue d'obtenir ce traitement réciproque d'égalité.
    Les critères ne sont pas toujours très clairs, très transparents pour eux. Toutefois, ils ont compris — nous le comprenons également — qu'il est important qu'ils vous convainquent, qu'ils convainquent votre gouvernement et vos autorités qu'ils respectent toutes les lois, tous les critères, toutes les normes indispensables pour être dispensés de l'obligation de visa.
    Vous devez comprendre que cela pèse particulièrement sur des pays où il n'y a pas de consulat canadien, où il n'y a pas d'ambassade canadienne habilitée à délivrer un visa. Vous avez, par exemple, l'Estonie où... Je sais que vous n'avez pas les moyens d'avoir un réseau très étendu de consulats, d'ambassades de par le monde. Les Estoniens doivent se rendre à Varsovie. L'Estonie n'est pas très proche de Varsovie. Cela complique donc la vie de gens qui se croient aujourd'hui membres à part entière de notre monde, de l'Union européenne, de l'OTAN, du monde que l'on disait autrefois — peut-être qu'on le dit encore — occidental.
    Je suis donc venu ici honnêtement parler de ces choses avec vos autorités. Nous devons établir ce rapport à notre retour à Bruxelles. Dans le rapport et dans la législation qui nous commande ce rapport, nous devons, si des progrès ne sont pas constatés, expliquer quelles mesures sont envisagées pour rétablir ou établir la réciprocité. En toute franchise, si je pars après-demain soir du Canada sans pouvoir écrire dans notre rapport qu'il y a une perspective, qu'il y a un espoir, qu'il y a des progrès, nous devrons très probablement envisager des mesures. Nous serons soumis à des pressions importantes des États membres concernés et des autres qui sont solidaires de leurs partenaires afin de faire quelque chose de réciproque pour tout le monde.
    Il n'est donc pas impossible... Ce n'est pas une menace. Je ne suis pas venu ici... Je ne suis pas pessimiste, ce n'est pas mon genre, je ne menace personne. J'espère bien partir après-demain avec quelque chose d'utile dans ma poche, dans ma tête, mais si cela ne s'avérait pas, nous devrions envisager quelques mesures, et parmi les mesures éventuelles qu'il faudrait considérer, il y aurait l'obligation de visa pour certaines catégories de détenteurs de passeports canadiens, par exemple les détenteurs de passeport diplomatique ou de service. Cela n'est pas certain, mais cela n'est pas exclu. 

  (1740)  

[Traduction]

    Je vais maintenant revenir à ma langue maternelle, après vous avoir torturé avec mon français.
    Je ne vous ai pas torturés? Merci.
    Voici la situation. Nous espérons repartir d'ici armés de bonnes nouvelles. C'est un processus. Nous ne nous attendons pas à obtenir des résultats du jour au lendemain. Mais cela fait maintenant deux ans que la nouvelle Europe a été élargie à 25 membres. Nos règles sont fondées sur la réciprocité. Pas les vôtres. Je comprends cela. Nos règles sont fondées sur une vision collective de l'Union européenne formée de 25 pays, mais ayant une citoyenneté européenne commune qui confère certains droits et impose certaines obligations. Ce n'est pas votre cas. Vous traitez avec chacun de nos pays individuellement.
    Nous avons de très bonnes relations entre l'Union européenne et le Canada, grâce en partie à notre excellent ambassadeur ici présent et aussi grâce aux efforts déployés par beaucoup d'entre vous et par vos représentants à Bruxelles. Vous comprenez donc l'Union européenne. Vous savez ce que nous sommes; vous savez ce que nous ne sommes pas.
    Mais nous sommes, entre autres choses, un groupe de pays ayant en commun une série de règles, de politiques et d'espoirs et, dans une certaine mesure, une citoyenneté commune. L'une des caractéristiques de la citoyenneté commune est que nous avons en commun un régime de visas vis-à-vis des pays étrangers qui devrait, en fin de compte, et nous espérons que ce sera bientôt, être fondé sur des relations de réciprocité. Ce n'est pas valable partout. Cela s'améliore en certains endroits. La situation ne s'est pas tellement améliorée au Canada jusqu'à maintenant. Je suis ici dans l'espoir qu'il y aura bientôt amélioration à ce chapitre.
    Merci.
    Merci.
    Allez-vous rencontrer le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, ou bien voulez-vous que vos vues soient transmises au ministre par notre comité?
    Je serais ravi si vous pouviez transmettre mes vues. Je vais rencontrer... Éric?
    Vous rencontrez demain toute l'équipe de Citoyenneté et Immigration. Nous avons prévu essentiellement une demi-journée entière de discussions avec des hauts fonctionnaires de Citoyenneté et Immigration.
    Ils vont m'écouter, mais peut-être vous écouteraient-ils davantage.
    Je suppose que vous êtes maintenant disposé à entendre des observations et à répondre à des questions.
    J'en serais ravi.
    Je vais vous donner la parole, Andrew, et ensuite à Ed, Borys et Mme Faille.
    En fait, je voudrais vous dire quelques mots pour établir le contexte de la position du Canada. Quand le rideau de fer est tombé et que le Canada a décrété de nouvelles exigences en matière de visas pour les nouveaux pays qui se trouvaient maintenant au-delà du rideau de fer — je le sais parce que j'étais secrétaire parlementaire à l'époque —, nous avons commencé à recevoir beaucoup de demandes de réfugiés, en particulier de la part de Roms, mais aussi d'autres gens. Je pense qu'en fait, ce qui a changé en profondeur, et je trouve que c'est important que nous le comprenions tous, c'est que maintenant, ces pays-là, premièrement, sont membres de l'OSCE. Deuxièmement, ils sont membres de l'OTAN et puis ils sont membre de l'Union européenne. En matière de protection contre des abus des droits de la personne, j'ose dire qu'ils sont probablement mieux lotis que le Canada, parce que vous avez tous ces organismes divers qui s'en occupent.
    Cela dit, je sais pour en avoir parlé avec les fonctionnaires de l'immigration d'ou vient le problème; il vient du fait que les Européens sont en mesure de demander le statut de réfugié. C'est notre problème, c'est nous qui avons créé cette situation. Nous avons parfois le sentiment que notre système est supérieur à celui de l'Union européenne, mais je dois dire que vous avez beaucoup plus de freins et contrepoids en Europe.
    Je sais que ce n'est pas une menace et je sais comment tout cela fonctionne mais si nous persistons dans notre attitude actuelle, à un moment donné, les Canadiens auront besoin d'un visa pour aller en Europe. C'est la nature même du système. Ce qu'il faut bien comprendre, c'est que nous n'avons pas à prêter l'oreille aux demandeurs du statut de réfugié d'Europe et à accepter leurs demandes. Je trouve que ce serait un moyen de résoudre le problème au niveau des fonctionnaires. Pour avoir suivi l'évolution de leur état d'esprit depuis de nombreuses années, je sais qu'ils en sont là.
    J'ignore si vous voulez commenter cela. Je sais que La Chambre des communes est actuellement saisie d'un projet de loi d'initiative parlementaire présenté par M. Wrzesnewskyj, la motion no 19, qui traite exactement de cette question. Mais je crois que j'ai assez bien dépeint le problème que vous posent les fonctionnaires dans ce dossier. Je suis très sympathique à votre cause. Je voudrais bien voir le ministère laisser tomber l'exigence du visa, parce que je ne pense pas que les Canadiens se réjouissent à l'idée de devoir passer eux-mêmes par le fastidieux processus d'obtention d'un visa pour aller en Europe.

  (1745)  

    Merci, monsieur le président.
    Je voudrais faire un bref commentaire là-dessus.
    Ce n'est pas ce que nous voulons nous non plus, bien sûr, et j'espère ardemment que nous n'aurons pas à en arriver là. Je suis au courant, évidemment, de l'histoire de l'arrivée, il y a un certain nombre d'années, de Roms en provenance de certains pays qui sont maintenant des États membres de l'Union européenne, et de leurs demandes d'asile.
    J'ai plusieurs choses à dire là-dessus. Premièrement, l'Europe a changé. Ces pays-là ont changé. Il y a une nouvelle réalité en Europe. Je n'aurai pas l'outrecuidance de commenter le système canadien de protection des droits fondamentaux, mais d'après ce que je peux constater depuis l'étranger, ce système a l'air assez bon. Mais nous avons, comme vous le dites à juste titre, un réseau considérable de systèmes de protection des droits de la personne dans chaque pays de l'Union européenne, dans les autres organisations que vous avez mentionnées.
    Tous nos États membres sont partie prenante de la convention européenne des droits de l'homme, du système de détermination à Strasbourg qui en découle et du système judiciaire de l'Union européenne, qui renferme également toute une série de protections.
     Voilà les faits. Je pense que les préoccupations qui ont été exprimées il y a un certain nombre d'années n'ont plus de raison d'être aujourd'hui. J'espère donc du fond du coeur que les autorités canadiennes vont prendre à coeur ces questions.
    Merci.
    Ed, allez-y, et ensuite ce sera au tour de Borys.
    Merci beaucoup de vos commentaires francs et directs sur les questions qui vous préoccupent. Chose certaine, nous verrons à ce que les questions que vous avez soulevées soient transmises directement au ministre, parce qu'elles sont importantes.
    Je suis heureux d'entendre dire que la réciprocité ne s'instaure pas du jour au lendemain. Il faut que l'on fasse diligence dans ce dossier et qu'il y ait échange de lettres, et je crois savoir que c'est en cours.
    Une pensée qui m'est venue est que, bien sûr, beaucoup de questions mettant en cause des visas entre les pays membres de l'UE ne suscitent peut-être pas les mêmes conséquences ou difficultés que nous connaissons au Canada, étant donné la dynamique des diverses questions en cause, peut-être notamment celle soulevée par M. Telegdi.
    Si je comprends bien, à l'heure actuelle, il n'y a aucun processus, quand vous décidez quel pays sera visé ou exclu, permettant de faire intervenir un pays comme le Canada dans ce processus de prise de décisions, sur l'une ou l'autre des questions qui peuvent se poser en particulier. C'est une réflexion que je me suis faite, qu'il n'y a aucun mécanisme en place pour se pencher sur certaines questions qui peuvent être légitimes dans un pays donné mais qui ne suscitent pas de préoccupations pour d'autres.
    Deuxièmement, il n'y a pas de processus simultané permettant à un autre pays d'envisager des exemptions au régime des visas pendant que vous vous penchez sur l'entrée éventuelle d'un pays donné dans l'UE. Je suppose qu'on pourrait dire qu'il y a certaines conditions qui doivent être respectées.
    Peut-être y aurait-il un processus qui pourrait être avantageux pour les deux parties, s'il était appliqué simultanément de part et d'autre, au lieu de... Vous dites essentiellement que si l'on décide, dans les dossiers pertinents à l'UE, d'admettre un pays et de ne pas exiger de visa, alors cela devrait automatiquement s'appliquer à l'ensemble de l'UE. Mais certaines préoccupations que nous pouvons avoir ici ne sont peut-être pas les mêmes que vous avez chez vous quand vous prenez cette décision. Peut-être y aurait-il lieu de se pencher sur ces questions.
    Avez-vous des commentaires à faire là-dessus?

  (1750)  

    Certainement, merci.
    Eh bien, il n'y a aucun mécanisme formel permettant la participation du Canada, mais il y a beaucoup de contacts informels et cette réunion-ci en est un, en un sens. Notre délégation ici a tout un éventail de discussions avec les autorités canadiennes sur ces questions, comme tous les pays qui sont en cause bilatéralement. Je suis constamment en contact avec votre ambassadeur à Bruxelles pour discuter de ces questions et cela, depuis de nombreuses années.
    Ce n'est pas un phénomène qui surgit du jour au lendemain, on ne se joint pas à l'Union européenne pour obtenir dès le lendemain la réciprocité du monde entier. Ce n'est pas le monde dans lequel nous vivons. Nous le savons. Pour aller de A à B ou de A à Z, du point de départ à la destination finale, il faut des discussions et des contacts et il faut prendre en compte vos préoccupations et les nôtres. C'est un processus.
    De notre côté, nous avons divers points de repère qui peuvent être utiles, je crois, dans votre évaluation de notre situation. Premièrement, avant qu'un pays se joigne à l'Union européenne, il passe par des années souvent angoissantes pendant lesquelles on doit légiférer, prendre des décisions, faire des évaluations, se soumettre à des examens par les pairs, rédiger des rapports, subir des tests, et quand le pays se joint enfin à l'Union européenne, on peut avoir la certitude absolue qu'il s'agit d'une démocratie irréprochable fonctionnant selon les règles de l'État de droit, de l'économie de marché, et que l'on y respecte les normes les plus élevées quant à la protection des droits de la personne. Autrement, il ne serait pas accepté comme membre de l'Union européenne. C'est aussi simple que cela. De plus, on peut avoir l'assurance que le pays possède une administration qui fonctionne bien et qui est capable d'administrer les règles que l'Union européenne impose, lesquelles ne sont pas simples et sont même parfois excessivement compliquées. Tout cela est vrai.
    La deuxième observation qui a une pertinence immédiate pour la question qui nous occupe est que le pays en question doit assurer la sécurité des documents et produire des passeports en conformité de règles européennes d'identification biométrique, règles qui sont, je crois, à l'avant-garde de ce qui se fait où que ce soit dans le monde pour s'assurer que nos documents sont sûrs à 100 p. 100, utilisant les technologies les plus modernes pour empêcher toute contrefaçon et avoir la certitude que le porteur du document est vraiment qui il prétend être. Il ne s'agit pas seulement d'avoir une signature et une photographie; nous utiliserons les empreintes digitales et des photographies numériques. Certains de nos passeports sont déjà conformes à cette norme et ils le seront tous d'ici l'été. Nous allons faire cela pas seulement parce que nos amis juste au sud d'ici à Washington veulent que nous le fassions; je dis tout le temps que nous devrions faire cela de toute façon, même si les États-Unis ne nous y obligeaient pas. Je répète souvent que si les États-Unis n'existaient pas et si le bon roi George était encore assis sur son trône à Washington, nous le ferions quand même. Pourquoi? Parce que c'est la meilleure application de la technologie moderne aux documents d'identité et c'est ce dont nous avons besoin.
    La plupart d'entre nous, jusqu'à récemment, ont eu les mêmes passeports qu'avaient nos parents et nos grands-parents. On y trouvait une photographie et une signature. Eh bien, ce n'est pas tellement à l'épreuve des contrefaçons, et nous le savons. Dans le monde dangereux dans lequel nous vivons, nous ne pouvions plus nous contenter de cela.
    Les États-Unis seront-ils exemptés des exigences de visa des pays de l'UE?
    Nous avons un problème très semblable avec eux, comme avec vous. Nous laissons les Américains entrer sans visa — tous nos pays membres. Quant à eux, ils ne nous laissent pas tous entrer sans visa. La liste de nos États membres pour lesquels des visas sont exigés sont les trois républiques baltes, donc l'Estonie, la Lithuanie et la Lettonie, la République tchèque, la Slovaquie, la Hongrie et la Pologne. Ils ont cette même liste à laquelle ils ont ajouté la Grèce — qui n'est même pas un nouvel État membre, puisque la Grèce est membre de l'UE depuis longtemps — Malte, et aussi Chypre, pour des raisons qui ne sont pas très claires.

  (1755)  

    Borys, je vous prie.
    Les régimes de ces nouveaux pays membres de l'UE pour la sécurité des passeports sont-ils l'égal des régimes qui étaient en place dans les autres pays de l'UE, je veux parler des derniers pays admis?
    Oui, ils le sont. En fait, ils sont même en avance par rapport à certains pays déjà membres, mais d'ici l'été, tous nos pays auront les mêmes règles et tous les nouveaux passeports seront pourvus d'identificateurs biométriques.
    À quel échéancier pouvons-nous nous attendre s'il n'y a pas de progrès dans nos discussions entre l'UE et le gouvernement canadien?
    Tout d'abord, lundi matin, quand nous serons remis du décalage horaire, nous allons nous asseoir dans nos bureaux pour commencer à rédiger notre rapport. Ce rapport sera publié dans les deux premières semaines de juillet. Il passera en revue, pays par pays, tous les cas où nous n'avons pas la réciprocité pleine et entière. On dira donc : nous avons un problème avec le Brésil et on est en train de le régler de la manière suivante; nous avons eu un problème avec l'Australie et il est en voie d'être réglé; nous avons eu un problème avec le Brunei — croyez-le ou non — et on est en train de le régler d'une certaine manière; nous avions un problème avec les États-Unis et il est ou n'est pas en train d'être réglé d'une certaine manière; nous avons un problème avec le Canada et il est ou n'est pas en voie d'être réglé d'une certaine manière.
    Si nécessaire, ce rapport sera accompagné d'une annonce ou peut-être même d'une proposition de loi renfermant des mesures à prendre contre les pays qui ne nous auraient pas manifesté la volonté de progresser vers la réciprocité.
    La Commission européenne ne légifère pas; elle propose de légiférer. La mesure législative sera en fin de compte adoptée par le conseil des ministres représentant les ministres de nos États membres et elle sera adoptée par ces ministres à un vote à la majorité qualifiée.
    Quelle est la date la plus rapprochée à laquelle nous pourrions nous voir imposer un régime de visas pour voyager en Europe?
    Cela dépend du temps qu'il faudra pour faire adopter la loi et de la date d'entrée en vigueur que nous y inscrirons. Ce ne sera pas avant quelques mois. La mesure ne s'appliquera probablement pas cet été, par exemple, période durant laquelle, sans nul doute, beaucoup de Canadiens voyagent en Europe. Je ne pense pas que la mesure législative aura été adoptée d'ici là dans le cadre du processus de décision au conseil. Mais il se pourrait bien qu'elle soit prête et en vigueur d'ici la fin de l'année.
    À titre d'information, comme M. Telegdi l'a dit tout à l'heure, je suis l'auteur d'une motion d'initiative parlementaire qui a été déposée à notre Chambre des communes le 4 avril et qui porte le numéro M-19; j'attends seulement qu'on m'en apporte la traduction pour pouvoir la distribuer — elle traite précisément de la question qui nous occupe.
    Si vous connaissez les particularités de notre système, vous savez que pour les projets de loi et les motions émanant des députés, il y a un tirage au sort. Malheureusement, je n'ai pas l'habitude d'acheter des billets de loterie et le résultat de ce tirage au sort me conforte dans cette idée. J'ai tiré le numéro 230. Donc, avant que cette mesure soit étudiée... qui sait même si le gouvernement actuel survivra d'ici là. Mais à titre d'information, et à votre intention, je voudrais distribuer cette motion avant la fin de la réunion.
    J'ai eu de nombreuses conversations avec des fonctionnaires du ministère sur cette question précise et je n'ai pas encore entendu une seule bonne raison, sinon la crainte du risque et quasiment une mentalité digne du rideau de fer... Bien que le rideau de fer soit tombé il y a bon nombre d'années, dans leur esprit, il existe encore ou bien ils aiment à croire qu'il existe encore. C'est tout à fait problématique, parce que le monde a considérablement changé depuis cette époque. Mais au moins, vous pouvez avoir l'assurance qu'un certain nombre de partis représentés à notre Chambre des communes appuient catégoriquement cette position et aimeraient que cette affaire soit expédiée rapidement.
    Il est regrettable que la seule raison pour laquelle l'affaire pourrait être expédiée et pour laquelle le gouvernement pourrait se décider dans ce dossier... Nous n'avons pas à attendre le dépôt de cette motion. Le gouvernement a le pouvoir de procéder rapidement dans ce dossier, selon les échéances que vous avez évoquées.
    Donc, si vous n'êtes pas encouragés à l'issue de vos discussions au ministère, soyez au moins réconfortés en sachant qu'il y a passablement d'appui envers cette position à la Chambre des communes, et aussi parmi la population canadienne.

  (1800)  

    Madame Faille.

[Français]

    Vos préoccupations sont justifiées. Je le sais pour avoir visité l'Europe et rencontré tout récemment plusieurs ambassadeurs qui nous ont fait part de ces préoccupations. J'ai demandé au ministère de nous fournir la liste des pays pour lesquels des visas sont exigés, ainsi que des indications quant aux dernières évaluations qui ont été faites relativement à la nécessité d'exiger ces visas.
    Encore tout récemment, au cours de la dernière année, je crois, le Canada a ajouté 11 pays à la liste. Si on en ajoute, j'imagine qu'il y a un processus quelque part qui prévoit en enlever. Si vous écoutiez la conversation qui à eu lieu lors de la réunion précédente, vous constateriez que j'ai demandé aux représentants du ministère de nous fournir un tableau à cet effet. À partir de cela, le comité pourra faire davantage de travail à cet égard. Ce ne sera peut-être pas fait pour lundi matin, mais ça devrait venir.
    D'autre part, il y a aussi des formulaires supplémentaires qui sont demandés lorsque les gens font leur demande de visa. On fait aussi des enquêtes par rapport à des crimes de guerre. Dans le cas de certains pays, ces formulaires sont caducs. Je pense par exemple à la Croatie, dont l'acceptation au sein de l'Union européenne est en vue. On demande ce formulaire à toute personne âgée de 21 ans et plus. Donc, au moment où la guerre à eu lieu, ces personnes avaient 7 ou 8 ans. Alors, à moins que cela fasse partie de leur système d'éducation ou de leurs services de garde, ce qui me surprendrait, cela n'a pas de sens. Bref, il y a plusieurs aberrations de ce genre.
    Le ministère doit nous revenir très prochainement là-dessus. Si vous pouvez suivre ce qui se passe ici, au comité, on pourra peut-être vous faire parvenir les renseignements à votre bureau d'Ottawa.
    C'est une question qui préoccupe aussi nos industries. Le Québec a un lien privilégié avec l'Europe, et beaucoup de voyageurs passent maintenant l'été et même l'hiver au Québec. C'est pour nous une industrie florissante, surtout pour nos régions comme la Gaspésie, le Grand Nord, les Laurentides et même pour Montréal. La réciprocité au niveau de la langue nous préoccupe également beaucoup. Nous allons en Europe plus souvent qu'ailleurs; c'est la même chose pour vous. Donc, s'il y avait une levée de cette obligation de visa, ce serait bénéfique aussi pour nous. Nous attendons ce genre de modification depuis plusieurs années. Je peux donc vous assurer que vous avez notre appui.

[Traduction]

    Merci.
    Monsieur Siksay, je vous prie.
    Merci, monsieur le président.
    Je voudrais simplement faire savoir que c'est une question dont j'ai entendu parler dans ma circonscription, en particulier de la part de certains de mes commettants qui ont des parents en République Tchèque. Ce sont surtout ces gens-là qui m'ont fait part de leurs préoccupations au sujet de l'exigence imposée par le Canada.
    Vous avez évoqué de manière abstraite la politique de réciprocité. Vous avez mentionné qu'il était particulièrement difficile pour des habitants de l'Estonie d'avoir à se rendre à Varsovie pour trouver un bureau canadien des visas. Pouvez-vous me citer d'autres cas de difficultés particulières que les gens éprouvent à cause de cette politique? Est-ce dicté par l'objectif de la réciprocité, ou bien y a-t-il un élément particulier qui touche les gens sur le plan individuel?

  (1805)  

    Il y a évidemment beaucoup d'Européens qui ont des amis et de la famille au Canada. C'est vrai au Québec et c'est vrai également ailleurs. Les Européens voyagent au Canada, les Canadiens voyagent en Europe et nous avons beaucoup de liens entre nous. Ceux qui doivent se procurer un visa doivent le payer. Ce n'est pas une somme énorme, mais pour certains de nos pays les plus pauvres et surtout certains des gens les plus pauvres qui y habitent, c'est quand même un fardeau. Je comprends bien que vous ne pouvez pas avoir des consulats et des ambassades absolument partout, mais s'il se trouve que vous n'en avez pas dans un pays donné, les habitants de ce pays éprouvent de grandes difficultés, surtout s'ils sont convoqués pour une entrevue. Il faut s'y rendre, il faut être présent physiquement.
    J'ai mentionné l'Estonie et la Pologne parce que ce matin encore, quelqu'un nous a fait part de l'anecdote d'un Estonien qui a dû aller jusqu'à Varsovie pour une entrevue de 30 secondes, somme toute, pour obtenir le visa; il a eu son visa, mais il lui a fallu payer le voyage aller-retour vers Varsovie, avec les retards que cela impose.
    Maintenant, je comprends cela. Si vous exigez un visa, c'est parce que vous voulez interviewer les gens; c'est parce que vous ne faites pas confiance aux citoyens du pays en question, du moins pas autant que vous faites confiance aux citoyens d'autres pays. Ce que nous disons, c'est qu'à notre avis, les relations entre les pays démocratiques de l'Union européenne et le Canada démocratique sont telles aujourd'hui — dans la nouvelle Europe, le nouveau monde dans lequel nous vivons — que nous devrions nous faire suffisamment confiance mutuellement.
    L'une des différences — et j'en ai d'ailleurs discuté avec les Américains qui sont vos voisins et aussi avec les autorités de votre pays — est qu'aux États-Unis, il y a une loi du Congrès qui énonce toute une série de critères et, dès lors qu'on les respecte, tout va bien. Nous avons eu des discussions avec eux parce que nous nous demandons si les critères sont justes, s'ils sont bien appliqués, etc. Dans votre pays, il n'y a pas de critères énoncés dans la loi.
    Nous comprenons, d'après ce que le gouvernement du Canada nous a dit, que l'on fait une évaluation du risque d'un pays donné, et je respecte cela. Encore une fois, j'aimerais bien que la réciprocité s'instaure du jour au lendemain, mais nous n'obtiendrons pas cela; nous ne l'avons pas. Nous vivons dans le monde réel. Donc, le gouvernement canadien examine chaque pays et se pose la question: quel risque prendrais-je en permettant aux citoyens de ce pays d'entrer au Canada sans visa? Nous soutenons que pour nos pays, le risque est minime, tout comme nous croyons que le risque est minime quand nous permettons aux Canadiens de visiter nos pays sans visa.
    M. Wilson, et ensuite Mme Guarnieri.
    Honorables délégués, je vous souhaite la bienvenue. Bonjour. Dzien dobry.
    Je ne vais pas parler polonais, parce que nous avons seulement des interprètes en anglais et en français ici.
    Je veux seulement dire que j'accueille favorablement les commentaires que vous avez formulés ici aujourd'hui. Je souscris à certaines préoccupations exprimées par mes collègues et certaines observations que vous avez faites, en particulier le fait que la circonscription que je représente, West Vancouver-Sunshine Coast-Sea to Sky Country, comprend beaucoup de gens venus des pays qui sont sur votre liste de pays exclus : la République tchèque, l'Estonie, la Hongrie, la Lettonie, la Lithuanie et la Pologne. Je vais prendre les cinq minutes qui me sont accordées pour exhorter le gouvernement du Canada à travailler sérieusement à accélérer ce processus de reconnaissance de ces pays, pour que nous puissions avoir de meilleures relations avec la Commission européenne et l'Union européenne.
    D'après les documents que mes collaborateurs m'ont remis, la dernière révision a eu lieu en 2004, sauf erreur, et je pense qu'entre 2004 et 2006, l'Europe -- le monde entier, en fait -- a changé très rapidement. Le monde devient beaucoup plus petit; nous nous rapprochons beaucoup les uns des autres. Si le Canada veut vraiment et sérieusement faire entendre sa voix sur la scène mondiale, nous devons agir de concert avec des organisations comme celle-ci et collaborer beaucoup plus activement et de manière ouverte et transparente.
    J'exhorte le gouvernement à mettre tout en oeuvre pour expédier cela le plus rapidement possible afin de faciliter les déplacements des gens, dans toute la mesure du possible, entre notre pays et les pays en question.

  (1810)  

    Merci.
    Madame Guarnieri.
    Merci, monsieur le président.
    Je souhaite la bienvenue à la délégation qui nous rend visite.
    Dans le dossier de la réciprocité des visas, l'une des difficultés qui se pose au Canada est la possibilité que des personnes sans visa viennent au Canada en provenance de l'Union européenne et présentent des demandes de statut de réfugié. Nous en avons des dizaines de milliers venant de l'Union européenne. Étant donné que les citoyens de l'Union européenne ont le droit de travailler et de se déplacer n'importe où sur le territoire de l'Union européenne, est-ce que vous soutenez qu'il est impossible d'avoir une demande de statut de réfugié qui soit légitime en provenance de n'importe quel pays de l'Union européenne?
    Je ne connais pas le droit canadien et j'ignore quels critères vous appliquez. En général, une demande d'asile ou de statut de réfugié doit être accompagnée d'une preuve et le demandeur doit avoir une crainte légitime de persécution. Je pense que ce sont les termes de la Convention de Genève.
    Nous ne persécutons pas les gens dans l'Union européenne. Nous ne sommes pas parfaits, mais nos États membres assurent un niveau très élevé de protection des droits fondamentaux et cela s'applique à tous nos citoyens, sans distinction de race, de couleur, d'origine, d'appartenance ethnique, etc. Ce n'est pas une affirmation particulièrement audacieuse que je fais là. C'est simplement la réalité aujourd'hui dans l'Union européenne moderne.
    Quant à savoir comment cela se traduit dans l'application du droit canadien, je m'en remets au Canada et à ses tribunaux, etc. Mais l'Union européenne et ses États membres respectent les droits de tous les gens qui vivent en Europe.
    Je suppose que si quelqu'un veut quitter l'État tchèque, par exemple, il peut aller travailler en France ou en Allemagne. Je pense que vous conviendrez toutefois que personne dans l'Union européenne ne pourrait raisonnablement correspondre à la définition d'un réfugié. Êtes-vous d'accord avec cela?
    Eh bien, je dois encore une fois être prudent, parce que je ne peux pas commenter ce qu'un tribunal canadien pourrait ou ne pourrait pas faire. Je suppose qu'en définitive, il reviendrait aux tribunaux canadiens de se prononcer sur une telle revendication au Canada.
    Mais je dis sans hésitation qu'aucun Européen aujourd'hui ne saurait avoir une crainte fondée de persécution dans l'un ou l'autre des États membres, à cause des normes très élevées que ces États s'imposent et que les institutions européennes communes leur imposent.
    Merci. C'est presque une confirmation officielle que l'UE ne produit pas de réfugiés.
    Ce sont vos propres termes, pas les miens.
    Nous avons M. Jaffer et ensuite Mme Deschamps.
    Monsieur Jaffer.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie nos délégués ici présents pour leurs allocutions.
    Il y a une chose que je n'arrive pas à comprendre et j'aurais peut-être besoin de quelques éclaircissements.
    Monsieur Faull, vous avez dit clairement que les normes sont très rigoureuses dans tous les pays membres en matière de passeport et de documentation et que, dans certains cas, les normes sont peut-être même en avance par rapport à celles de certains pays membres existants. Ils sont peut-être même plus avancés que nous. Je n'en suis pas certain.
    Il semble que certains nouveaux États membres ont été reconnus et qu'aucun visa n'est exigé. J'ai examiné la liste de mon collègue et je constate que des progrès ont été accomplis. Évidemment, notre gouvernement est seulement en place depuis quatre mois et nous espérons progresser dans ces dossiers. Mais des pays comme la République tchèque ou d'autres sont membres de l'UE, si je ne me trompe, depuis un certain temps.

  (1815)  

    Cela fait deux ans.
    Oui, deux ans. La situation n'avait manifestement pas été améliorée même sous le gouvernement précédent.
    Pourquoi y aurait-il cette espèce de dichotomie, c'est-à-dire que certains des nouveaux pays membres ont été approuvés, tandis que d'autres, qui ne me semblent pas poser le moindre problème, n'ont pas été approuvés? Pouvez-vous nous donner votre point de vue là-dessus?
    Vous avez dit que le risque est l'un des critères. Mais si la sécurité de leurs documents est assurée de façon aussi serrée que vous le dites, alors qu'est-ce qui empêchait au cours des dernières années, et empêche peut-être même encore aujourd'hui, le ministère de donner le feu vert dans ce dossier?
    Franchement, je n'en suis pas certain. Il faudrait poser la question aux autorités canadiennes plutôt qu'à moi. Mais pour être juste à leur égard, beaucoup de travail a été fait dans ce dossier et il y a eu un examen.
    Mais il n'est pas vrai de dire qu'il ne s'est rien passé depuis. Il y a régulièrement des rencontres entre Citoyenneté et Immigration Canada, le CIC, et les autorités de tous ces pays qui exercent bien sûr des pressions à tous les niveaux, depuis les présidents et les premiers ministres jusqu'au bas de l'échelle. Si je comprends bien, l'évaluation du risque se poursuit continuellement.
    Quels sont les facteurs qui entrent en jeu? Comment détermine-t-on que pour Malte, tout va bien, mais pas pour la République tchèque? Je l'ignore. Ce qui m'apparaît plus inquiétant, c'est que je ne suis pas certain que les pays en cause sachent précisément selon quels critères ils sont jugés. Mais je suppose que certains facteurs qui sont légitimement pris en considération sont notamment le taux de refus : combien de demandes de visas canadiens par des citoyens d'un pays donné sont refusés? Si le chiffre est très élevé, vous être peut-être justifiés d'approfondir un peu la question plus pour en trouver la raison?
    Les autorités des pays — les nôtres comme les vôtres — craignent que des gens viennent armés d'un visa, ou viennent de toute manière si aucun visa n'est exigé, soi-disant pour une courte période, et qu'ils restent et disparaissent ensuite dans l'économie. Les gens ont des craintes raisonnables à ce sujet. Nous ne croyons pas qu'il y ait de grandes probabilités que les gens profitent d'une visite au Canada pour disparaître, alors même que la croissance économique et la prospérité se répandent dans l'ensemble de l'Europe, y compris dans ces nouveaux pays, qui ont d'ailleurs connu des taux de croissance très élevée ces dernières années. Il n'existe aucune donnée convaincante, à ma connaissance, démontrant que cela se produise.
    Maintenant, je sais qu'on me répondra qu'il n'y a pas de données parce qu'il n'y a pas de données. On ne sait pas, et le soi-disant problème des « séjours indûment prolongés » est compliqué, surtout que, soit dit en passant, nous ne consignons pas les départs de notre territoire, et je crois d'ailleurs que vous ne le faites pas non plus. Nous consignons les arrivées, mais quand les gens partent, nous ne le savons pas. Peut-être que maintenant, nous nous dirigeons tous vers une situation où cela se fera.
    Nous avons eu à Washington des entretiens avec les responsables du système en place pour les visiteurs aux États-Unis; comme vous le savez sans doute, il existe tout un appareil compliqué pour consigner l'arrivée des gens aux États-Unis, mais on ne possède pas non plus de données sur les départs. Dans l'Union européenne, nous envisageons de tenir des registres des entrées et des sorties également. Cela nous donnerait des données fiables. À l'heure actuelle, il n'existe aucune donnée fiable et il faut donc procéder à une évaluation du risque fondée sur la situation économique dans le pays en question, ses perspectives d'avenir, etc.
    Nous soutenons que les pays de l'Union Européenne ont aujourd'hui de très bonnes perspectives, en particulier les nouveaux membres, soit dit en passant, qui connaissent une croissance rapide. Certains de ces pays ont vu leurs jeunes travailleurs partir vers d'autres pays, mais l'idée que ceux-ci viendraient au Canada pour disparaître ensuite dans un trou noir de votre économie nous apparaît improbable.
    Merci.
    Madame Deschamps.

[Français]

    Je suis tout à fait d'accord avec vous en ce qui concerne votre demande et je crois qu'on devrait pouvoir y répondre, compte tenu de la volonté du nouveau gouvernement qui a été élu en janvier dernier et qui semble faire preuve d'ouverture à cet égard.
    Même si une motion est déposée, le gouvernement a encore la liberté et la discrétion de faire ce qu'il veut. Je crois que le ministre, notre ministre élu, notre représentant de Citoyenneté et Immigration, pourrait se montrer très réceptif à votre demande.
    Je voudrais faire un commentaire en lien avec ce que Mme Faille a dit précédemment. Je viens d'une région, les Laurentides, située au nord de Montréal. C'est une belle région qui attire beaucoup les gens d'affaires de l'étranger. On y accueille donc des gens en provenance de certains pays ciblés par l'obligation de visa pour entrer au Canada.
    Une fois établis au Canada, ces gens souhaitent que leur famille, demeurée dans leur pays d'origine, vienne les visiter. Or, si j'en crois ce que vous avez dit au sujet d'un pays donné, les membres de ces familles se heurtent parfois à des obstacles dus au fait qu'il n'y a pas d'ambassade à proximité. Ces obstacles viennent parfois alourdir la démarche à laquelle ils doivent se soumettre pour pouvoir rendre visite à un fils et à une belle-fille qui ont déjà des petits-enfants qu'ils ne voient pas grandir. Cet aspect humain de la question me touche beaucoup.
    J'ai fait le tour de ce que je voulais dire à ce sujet. Je ne sais pas s'il y a des gens qui veulent ajouter des commentaires.

  (1820)  

[Traduction]

    Merci.
    Je pense que nous avons deux autres questions. M. Telegdi, et j'apprends maintenant que Mme Faille a une courte question à poser.
    Monsieur Telegdi.
    Il est vraiment important de signaler que la situation économique a changé énormément. Les gens de Pologne peuvent aller en Angleterre et y faire beaucoup plus d'argent qu'ils en pourront jamais en faire au Canada. Cela s'applique donc au risque.
    Ce qui est vraiment regrettable, c'est que lorsque le problème s'est posé au début, certains groupes en Europe en ont profité pour essayer de se débarrasser du peuple rom.
    Voici ma question: Comment la Hongrie règle-t-elle ses problèmes à ses frontières, étant donné qu'il y a une importante minorité hongroise en Roumanie? S'il y avait un risque qui se posait là-bas, ce serait que des gens passent de Roumanie en Hongrie.
    Merci.
    Premièrement, la gestion des frontières est évidemment un dossier extrêmement important. La première chose à dire — et cela m'apparaît extrêmement important — est que nous avons une série de règles et de procédures communes sur la manière de gérer nos frontières extérieures communes. Par conséquent, tous les postes frontières terrestres, tous les aéroports, tous les ports de l'Union européenne sont gérés en conformité des règles établies à Bruxelles et les procédures sont identiques. Un investissement énorme en formation et en matériel a été consenti depuis 10 ou 15 ans, depuis la chute du rideau de fer. Depuis que ces pays ont manifesté leur intérêt à se joindre à l'Union européenne, il y a eu un effort long et soutenu de notre part, de la part des États membres existants, au moyen de mécanismes de jumelage et aussi grâce à beaucoup d'aide apportée par le Canada et d'autres pays amis autour du monde.
    La situation aujourd'hui est que lorsqu'un pays se joint à l'Union européenne, il doit respecter les critères pour policer nos frontières extérieures et, par conséquent, la frontière entre la Hongrie et la Roumanie, pour prendre votre exemple, est traitée exactement de la même manière que l'aéroport d'Amsterdam, la frontière fino-russe, ou n'importe quel poste frontalier terrestre, maritime ou aérien dans l'Union européenne. Est-ce que cela pose des problèmes pour les pays où dans les régions frontières, des gens de part et d'autre de la frontière parlent la même langue et partagent la même culture, à cause de la manière dont les empires européens ont été assemblés et ensuite démantelés... Est-ce que cela leur rend la vie difficile? Bien sûr que oui. Et nous avons un certain nombre de réponses à cela.
    Premièrement, il y a un certain nombre d'arrangements frontaliers locaux, par exemple des régimes spéciaux pour les visas, des régimes spéciaux pour traverser les frontières, ou qui permettent de garder les frontières ouvertes en tout temps, jour et nuit — certains villages sont coupés en deux — pour que les gens puissent continuer à mener leur vie normalement. En fin de compte, ce problème sera résolu très bientôt parce que la Roumanie deviendra membre de l'Union européenne, soit le 1er janvier 2007, soit le 1er janvier 2008. À ce moment-là, cette frontière deviendra une frontière européenne et la vie sera beaucoup plus simple pour les gens qui y habitent de part et d'autre.
    Cela ne va pas régler le problème de la frontière ukrainienne. Il y aura toujours des difficultés, car l'Europe est un drôle d'endroit, mais nous essayerons toujours de trouver des solutions en tenant compte des besoins des populations locales, tout en assurant la sécurité dont nous avons tous besoin parce que dès qu'on est à l'intérieur de l'Union européenne, on a divers droits et l'on peut se déplacer sur l'ensemble du territoire. Par conséquent, les gens qui habitent à Londres, Bruxelles ou Madrid sont directement touchés par ce qui se passe à l'autre bout de l'Union, à la frontière fino-russe, ou bien dans un aéroport du sud de l'Italie où à la frontière entre la Hongrie et la Roumanie. Nous le savons. C'est un effort commun.

  (1825)  

    Une dernière question pour Mme Faille.

[Français]

    Il ne s'agit pas nécessairement d'une question.
    Beaucoup de gens d'affaires ont de la difficulté à obtenir un visa pour venir au Canada. L'étude de leur demande, les enquêtes sécuritaires, l'enquête médicale, tout cela prend énormément de temps et on perd graduellement notre avantage par rapport à l'Union européenne.
    On me dit que les dossiers qui ont un retard au Canada sont nécessairement des dossiers qui présentent des problèmes sur le plan de la sécurité. Ces dossiers sont en revanche acceptés dans d'autres pays, comme l'Australie ou les pays de l'Union européenne. Ces gens ont souvent beaucoup d'argent, par exemple un million de dollars. Ils obtiennent automatiquement un passeport européen. C'est là une facette de l'immigration.
    Cependant, est-ce que ce genre de procédure existe également pour d'autres catégories d'immigrants, par exemple les travailleurs? Existe-t-il d'autres motifs pour lesquels le Canada ne voudrait pas vous libérer de l'obligation de visa? Je pense à des motifs qui seraient peut-être d'ordre sécuritaire. Certaines gens tentent leur chance dans différents pays et trouvent une façon d'y entrer. Je ne veux pas m'étendre là-dessus, mais cela pourrait peut-être faire en sorte que les États-Unis exercent une pression sur le Canada pour ne pas qu'il retire cette obligation.
    Il est certain que la sécurité est une préoccupation très importante pour tous nos pays et que vous avez un voisin dont c'est depuis peu la préoccupation principale, pour des raisons évidentes. Les événements du 11 septembre se sont produits chez eux. Il faut les comprendre. La sécurité de nos concitoyens, de nos infrastructures joue donc un rôle très important et influe sur les décisions que l'on prend dans ce domaine, je n'ai aucun doute là-dessus, et c'est légitime.

[Traduction]

    Je vous remercie de votre témoignage d'aujourd'hui. Nous vous en sommes très reconnaissants.
    Je dois vous informer que le secrétaire parlementaire du ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration fait partie de notre comité et je suis certain que le ministre sera donc mis pleinement au courant des préoccupations que vous avez exprimées aujourd'hui.
    Je vous remercie tous de votre attention.
    La séance est levée.