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AANO Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord


NUMÉRO 057 
l
1re SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 7 juin 2007

[Enregistrement électronique]

  (1110)  

[Traduction]

    La séance du jeudi 7 juin 2007 du Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord est ouverte.
    Vous avez reçu l'ordre du jour. Nous reprenons notre étude du projet de loi C-44, Loi modifiant la Loi canadienne sur les droits de la personne.
    Nous accueillons aujourd'hui deux groupes de témoins. Les premiers sont des représentants du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien. Ce sont Daniel Watson, sous-ministre adjoint principal, Politiques et orientations stratégiques, et Daniel Ricard, directeur général, Direction générale de la gestion et du règlement des litiges. Nous accueillons aussi des représentants du ministère de la Justice, soit Douglas Kropp, avocat-conseil, Services des stratégies de règlement des litiges, et Charles Pryce, avocat-conseil, Droit des autochtones et politiques stratégiques.
    Je vous souhaite la bienvenue à tous.
    Nous allons commencer avec les déclarations liminaires. Monsieur Watson, voulez-vous commencer? Ensuite, nous aurons une période de questions.
    Merci.
    Hélas, mon collègue, M. Ricard, a été retenu mais il devrait arriver bientôt.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je suis heureux de venir vous parler une fois de plus du projet de loi C-44. J'aimerais aujourd'hui commenter certains témoignages que vous avez entendus. Par la suite, mes collègues et moi serons disposés à répondre à vos questions.
    Comme vous le savez très bien, le projet de loi C-44 traite d'un principe important. Bref, il fera en sorte que tous les Canadiens jouiront du droit que leur procure la Loi canadienne sur les droits de la personne, la LCDP, de ne pas être la cible de discrimination. Le projet de loi donne suite aux demandes répétées pour que soit abrogé l'article 67 et éliminera un article discriminatoire qui se voulait au départ une mesure provisoire.
    Parlons maintenant de l'équilibre précaire. Monsieur le président, votre comité aura très bientôt la tâche immense de déterminer la marche à suivre pour examiner, article par article, le projet de loi C-44, tâche qui sera assurément éclairée par la multitude de témoignages qui ont été déposés.
    Les témoins ont abordé une vaste gamme de questions et fourni de nombreux points de vue différents. Je crois qu'il serait juste de dire que, dans bien des domaines, les témoignages recueillis n'ont pas dégagé un consensus clair. Il serait peut-être utile de clarifier certaines questions pour faire progresser vos travaux.

[Traduction]

    Nous pourrions entre autres faire ressortir les commentaires sur la nécessité ou non d'insérer un article d'interprétation ou une disposition de non-dérogation. Il s'agit clairement d'une question majeure pour laquelle il n'existe aucune solution simple ou consensuelle, et autour de laquelle gravitent de multiples conceptions différentes.
    Certains témoins prônent l'insertion d'une disposition de non-dérogation, d'autres préconisent des articles d'interprétation et d'autres encore soulèvent les deux méthodes ou utilisent la terminologie indifféremment. Quelques témoins suggèrent d'inclure une disposition dans la Loi canadienne sur les droits de la personne et d'autres, notamment la Commission canadienne des droits de la personne, proposent que des lignes directrices soient élaborées en dehors du cadre de la Loi, de concert avec les communautés autochtones.
    Il importe de faire la distinction entre ces deux types de dispositions. Par disposition de non-dérogation, on entend une disposition qui précise le rapport entre une loi et les droits ancestraux et issus de traités protégés par l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982. La LCDP, comme toutes les autres lois, est d'office assujettie à l'article 35.
    Comme l'a dit la Commission dans son rapport sur l'abrogation de l'article 67, il serait redondant d'intégrer dans la LCDP une disposition de non-dérogation faisant référence à l'article 35. En outre, une telle disposition pourrait se révéler problématique car les tribunaux risquent d'y voir une protection accordée aux droits ancestraux et issus de traités qui s'ajoute à celle prévue à l'article 35.
    Contrairement à la disposition de non-dérogation, un article d'interprétation constitue un article de fond qui enjoint aux autorités ou aux tribunaux d'appliquer ou d'interpréter la loi d'une certaine manière. En ce qui concerne les plaintes fondées sur la LCDP qui sont dirigés contre les premières nations, cet article pourrait faire en sorte que, en vertu de la Loi, la discrimination et les moyens de défense soient interprétés en tenant compte des intérêts collectifs et culturels de la première nation.
    Les avis sont partagés sur la question de savoir si une telle disposition devrait s'inscrire à l'intérieur ou à l'extérieur du cadre de la LCDP ou prendre la forme d'un énoncé de principe ou d'une disposition de fond. De plus, les diverses formulations proposées auraient des effets différents. L'expérience nous a appris que, même lorsqu'on tente de trouver un consensus, les articles d'interprétation finissent inévitablement par être libellés de manière générale et assez vague. La tâche de déterminer le sens précis d'un article d'interprétation reviendra donc au tribunal, ce qui engendrera des litiges dont l'objectif ultime sera de cerner les enjeux cas par cas.
    À notre avis, pour les raisons que je viens d'évoquer, l'insertion d'une disposition de non-dérogation ou d'un article d'interprétation dans la Loi pourrait entraîner des contestations judiciaires aux conséquences incertaines et involontaires, notamment l'affaiblissement éventuel de la protection qu'apporterait l'abrogation de l'article 67.
    De plus, nous ne croyons pas qu'une disposition de non-dérogation soit nécessaire et, pour éviter d'ajouter un article d'interprétation à la Loi, on pourrait demander à la Commission de travailler avec les premières nations et les autres communautés autochtones à l'élaboration de lignes directrices, de politiques ou de règlements appropriés qui veilleraient à ce que la Loi soit appliquée en tenant compte des besoins particuliers de ces communautés.
    La politique d'embauche d'autochtones de la CCDP démontre très bien les pouvoirs que la Commission possède déjà afin de répondre aux besoins des autochtones.

  (1115)  

[Français]

    L'autre sujet que j'aimerais aborder aujourd'hui porte sur les préparatifs en vue de l'abrogation et sur les répercussions qui s'ensuivront. De nombreuses préoccupations ont été portées à l'attention du comité. Ce n'est sûrement pas l'intention du ministre ou du ministère d'alourdir le fardeau des premières nations en abrogeant l'article 67.
    L'application de la Loi canadienne sur les droits de la personne aux programmes fédéraux et aux premières nations n'est pas tout à fait nouvelle. Comme le professeur Chartrand l'a signalé dans son témoignage, la commission et les tribunaux ont réservé une interprétation étroite à l'article 67. Bien des activités qui se déroulent dans les réserves ou qui sont administrées par le ministère sont déjà assujetties à la LCDP. Même s'il est extrêmement important d'abroger l'article 67, nous ne devrions pas en surestimer les répercussions éventuelles.
    La commissaire en chef, Mme Lynch, a affirmé que la commission traite actuellement plus de 40 cas par an. Le professeur Chartrand a conclu que les répercussions de l'abrogation seraient modérées. Nous ne prévoyons pas être inondés de plaintes, mais nous reconnaissons tous qu'il est impossible de prédire avec justesse le nombre de plaintes relatives aux droits de la personne qui seront dirigées contre les conseils de bande, car elles porteront sur des faits précis, seront motivées par la décision d'une personne de déposer une plainte si, par exemple, elle croit s'être fait refuser sans raison un emploi ou un service.

[Traduction]

    Des garanties sont prévues afin de donner aux premières nations le temps de s'ajuster et de les aider à se préparer. Il s'agit du délai de six mois appliqué à l'entrée en vigueur de l'abrogation et des directives formulées par la Commission.
    Comme vous le savez, le financement de la Commission fait actuellement l'objet d'ajustements pour lui permettre de s'acquitter des responsabilités élargies qui lui incomberont après l'abrogation de l'article 67. La Commission a lancé un programme national autochtone et elle entend instaurer des mécanismes de redressement dans le domaine des droits de la personne, lesquels tiendront compte des cultures et modes de décision diversifiés des premières nations du Canada.
    Lorsque les représentants de la Commission témoigneront, vous voudrez peut-être discuter avec eux du travail qu'ils entendent réaliser dans le cadre de leur programme. Je suis certain que leur témoignage contribuera beaucoup à atténuer certaines appréhensions des groupes et membres des premières nations qui craignent de devoir être seuls à assumer l'incidence de l'abrogation.
    Le projet de loi C-44 comporte en outre une mesure visant à examiner les conséquences involontaires que pourrait avoir son article 2. Cet examen obligatoire des effets de l'abrogation doit être effectué dans les cinq ans mais il pourrait l'être plus tôt si le comité parlementaire désigné le décidait. Le comité pourrait également exiger une réponse exhaustive du gouvernement à ses constatations.
    Votre comité a entendu diverses opinions sur la durée de la période de transition. Même si bon nombre de témoins estiment que six mois ne suffiront pas, je crois que cette période est assez longue pour permettre aux premières nations de commencer à se préparer à une mise en oeuvre complète et pour donner à la Commission le loisir de travailler avec les communautés. Bien sûr, le travail avec les premières nations ne prendra pas fin à l'issue de la période de transition. Au contraire, il se poursuivra à mesure que les effets de l'abrogation se préciseront et que nous prendrons de l'expérience. À ce sujet, notamment, le ministre Prentice sera heureux de connaître vos recommandations après avoir entendu un éventail aussi large de témoins.

[Français]

    Enfin, pendant les audiences du comité sur le projet de loi C-44, les témoins ont pu formuler leurs préoccupations à l'égard de la nécessité de garantir la protection de leurs droits, traditions et cultures autochtones. Nous avons parfois eu droit à des témoignages passionnés. Je prends bonne note des préoccupations soulevées. Je tiens aussi à signaler qu'à l'exception de deux témoins, tous ont dit soutenir le principe de l'abrogation de l'article 67, prouvant ainsi l'immense désir d'éliminer cette exemption. Je tiens à dire bien respectueusement que tout changement envisagé au projet de loi C-44 doit être évalué en fonction de ce principe important et de l'urgence d'agir.
    Une fois de plus, monsieur le président et membres du comité, je vous remercie de votre invitation à venir témoigner de nouveau aujourd'hui. Mes collègues et moi sommes disposés à répondre à vos questions.

  (1120)  

[Traduction]

    Merci, monsieur Watson.
    Monsieur Pryce, voulez-vous faire une déclaration liminaire? Non? Très bien. Merci.
    Nous entamons un premier tour de sept minutes avec un représentant du parti libéral.
    Madame Neville, vous avez la parole.
    Merci beaucoup. Je remercie les témoins d'être venus ou revenus devant le comité. Je crains que votre déclaration ne nous donne plus de nouvelles questions que de réponses. C'est en tout cas ma première réaction.
    Vous venez de dire, monsieur Watson, que tous les témoins sauf deux ont exprimé leur appui au projet de loi C-44. Vous n'avez peut-être pas noté les très nombreuses préoccupations qu'ils ont soulevées, concernant aussi bien le fond que la forme du projet. Je crois que leurs réactions étaient empreintes de réserves importantes et qu'il faut en tenir compte.
    Je ne sais pas par quoi commencer. Prenons d'abord la disposition d'interprétation.
    Ce que vous nous dites, c'est de faire confiance au gouvernement, de faire confiance à la Commission canadienne des droits de la personne. Vous savez que la commissaire viendra nous présenter l'idée d'un principe d'interprétation, par opposition à une disposition d'interprétation. Pourriez-vous nous donner d'autres informations sur toute la question d'une disposition d'interprétation, après quoi j'aurai d'autres questions à vous poser?
    Parlons d'abord du début de votre intervention. Il est parfaitement exact que nous avons entendu beaucoup de préoccupations au sujet de la période de transition, des ressources et d'une foule d'autres questions, et loin de moi l'idée de prétendre le contraire.
    En ce qui concerne la disposition d'interprétation, nous croyons qu'il est possible, dans le cadre de la Loi telle qu'elle existe aujourd'hui, comme cela s'est fait dans un certain nombre de domaines concernant des questions d'emploi, d'être sensible à l'équilibre des diverses questions à prendre en compte en cas de plaintes formulées dans un contexte autochtone. Nous croyons qu'il y a des antécédents historiques à ce sujet et que c'est déjà possible en vertu de la Loi.
    Mes collègues du ministère de la Justice ont effectué une analyse approfondie de cette question et il serait peut-être utile qu'ils interviennent maintenant.
    Absolument.
    Si je comprends bien la partie de votre question concernant le fait que la Commission propose un énoncé de principe concernant l'ajout d'une disposition d'interprétation ou d'une clause d'interprétation, nous craignons que cela ne fasse qu'accroître la complexité, l'incertitude et la confusion étant donné qu'une telle disposition devra elle aussi être interprétée, ce qui ouvrira la porte à d'autres risques de poursuites et de contestations plus tard et ne réglera donc rien.
    Vous parlez du principe, pas de la disposition elle-même?
    Exact. Je pensais que tel était l'objet de votre question.
    Très bien. C'est bon à savoir. Merci.
     Je suis aussi frappée de vous entendre dire — et nous avons eu beaucoup de discussions sur l'incidence du projet de loi C-44 et de l'abrogation — que ça ne sera pas important. Ce qui nous frappe le plus, ou moi en tout cas, c'est l'absence de toute étude d'impact. Vous n'avez pas pris une communauté comme modèle afin de voir quel serait l'impact de cette proposition. Certains des témoins qui se sont adressés au comité ont dit que l'impact sera très profond, qu'ils n'ont pas la capacité ou les ressources nécessaires pour y faire face et qu'on n'envisage aucune mesure pour accroître leur capacité ou leurs ressources. J'aimerais donc avoir un peu plus d'informations sur ce facteur car nous avons entendu des opinions très divergentes à ce sujet.

  (1125)  

    Absolument. Nous avons évidemment entendu les mêmes commentaires que vous.
    Il est peut-être utile de distinguer deux catégories d'incidences, à partir des témoignages. Il y a d'abord des questions très réelles et importantes portant sur la manière dont on devra réagir en cas de plainte. On peut supposer qu'il y aura beaucoup d'inconnues la première fois que quelqu'un déposera une plainte.
    Nous avons collaboré étroitement avec la Commission canadienne des droits de la personne et je sais que celle-ci entend collaborer étroitement avec les collectivités pour bien faire comprendre le processus aux populations une fois que la mesure entrera en vigueur. Voilà pour le premier groupe.
    Le deuxième groupe concerne les questions de fond, c'est-à-dire l'incidence que l'initiative pourrait avoir sur un programme ou un service dispensé dans la collectivité.
    Nous nous sommes évidemment penchés sur cette question, pas au niveau d'une communauté individuelle mais de manière générale. Lors de mon dernier passage, l'un des membres du comité avait parlé d'un cadre de gestion du risque et je peux vous dire que nous avons un cadre de gestion du risque au ministère. Nous envisageons les programmes comme un tout et, quand nous nous penchons sur ces choses, nous pouvons dire que nous savons que les gens sont plus susceptibles de formuler des plaintes dans certains domaines que dans d'autres.
    Par exemple, on peut s'attendre à ce que, si quelqu'un perçoit une différence dans les niveaux de financement d'un programme donné, sur la base d'un facteur de comparaison... Il pourrait fort bien y avoir une plainte. Les plaintes elles-mêmes devront être factuelles et précises et nous ne pouvons donc pas dire aujourd'hui quelle en sera la nature.
    Avez-vous fait une analyse de...
    Me reste-t-il du temps, monsieur le président?
    Non.
     J'essaierai donc de reprendre la parole au tour suivant.
    Merci.
    Monsieur Lemay, s'il vous plaît.

[Français]

    Bonjour et merci d'être là. J'ai devant moi un grand nombre d'avocats intéressants, alors, on va s'amuser.
    Ma question s'adresse à M. Watson ou à quelqu'un du ministère. Selon vous, combien de nations autochtones l'Assemblée des Premières Nations du Canada représente-t-elle?
    Si je me souviens bien des chiffres, il y a au-delà de 600 membres.
    Avez-vous lu le rapport qu'ils ont déposé le 29 mars devant le comité? J'imagine que vous devez en avoir pris connaissance.
    Oui, mais je ne l'ai pas devant moi.
    Au nom des 600 membres, moi, je note qu'il n'existe pas de climat de confiance entre le ministère et l'Assemblée des Premières Nations. Je ne sais pas si vous avez noté la même chose, mais c'est ce que j'ai noté après avoir entendu tous ceux qui ont comparu devant nous.
    Il y a un point sur lequel j'aurais beaucoup aimé vous entendre, et je vais vous poser la question. Ils sont tous et toutes — parce qu'il y a eu aussi des grandes chefs qui sont venues nous voir — parlé du manque de consultation. Il doit sûrement y avoir quelqu'un, autour de cette table, qui a lu les arrêts Corbiere et Haïda Nation devant la Cour suprême.
    Que pensez-vous de la définition de consultation en rapport avec la mise en oeuvre du projet de loi C-44? Y a-t-il eu des consultations, ou non?
    Je pourrais peut-être parler d'un aspect de cette question et ensuite, je demanderai à mes collègues du ministère de la Justice d'en parler plus en détail.
    D'un côté, comme vous le savez tous et toutes, ce n'est pas une nouvelle question, cela dure depuis 30 ans, et on en a fait état dans plusieurs rapports. À ce chapitre, c'est quelque chose qui fait partie du débat public depuis longtemps.
    Je demanderais à mes collègues du ministère de la Justice de parler plus spécifiquement de consultation, particulièrement en relation avec l'article 35.

  (1130)  

[Traduction]

    Bon nombre des questions ont porté sur la question de savoir s'il existe un devoir légal de consulter et si l'on s'en est acquitté dans ce cas. J'ai été particulièrement intéressé par le témoignage de plusieurs avocats, jeudi de cette semaine je crois, qui étaient unanimes. Toutefois, Louise Mandell a dit qu'il n'est pas évident qu'il y a un devoir de consulter dans le contexte de l'élaboration d'un projet de loi. Je crois que le ministre des Affaires indiennes avait dit la même chose beaucoup plus tôt.

[Français]

    Un instant.
    Vous êtes avocat; je suis avocat. Je vous pose une question directe. Selon vous, qui avez lu, j'en suis convaincu, les arrêts Haïda Nation et Corbiere de la Cour suprême, le gouvernement est-il tenu de procéder à une consultation qui respecterait les règles de la Cour suprême, avant la mise en oeuvre du projet de loi C-44? Ma question est claire.

[Traduction]

    La réponse est que, malheureusement, nous ne le savons pas. La Cour suprême n'a pas traité directement de cette question. Ce dont elle a traité, dans des arrêts tels que ceux des Haïda, des Taku et des Cris Mikisew, c'est de décisions gouvernementales issues de textes législatifs portant sur des questions de gestion des ressources. Il n'est donc pas évident que ces décisions s'appliqueraient à l'élaboration de lois et au processus législatif concernant des textes portant sur les droits de la personne, comme le projet de loi C-44.

[Français]

    Non. J'aime les avocats parce que j'en suis un.
    Mais ma question vise à connaître la position du ministère de la Justice, que vous représentez dans ce dossier, en rapport avec l'obligation d'avoir une consultation. Avez-vous besoin de consulter, oui ou non? C'est clair.
     L'opinion que vous auriez à donner à votre ministre et qui, bien évidemment, influencerait le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, c'est oui, on a besoin de consulter en vertu de l'arrêt Corbiere, ou non, selon nous, on n'a pas besoin de consulter et on adopte la loi. C'est l'opinion que vous auriez à donner. Vous ne pouvez pas dire que vous irez voir à la Cour suprême du Canada.

[Traduction]

    Je regrette de devoir me répéter mais ce n'est pas clair. D'autres avocats ont dit la même chose. Pour revenir aux témoignages frappants de mardi, Jerome Slavik a indiqué que c'est une question de gestion du risque. Quoi qu'il en soit, qu'il existe ou non un devoir évident de consulter, la consultation est une mesure de bon sens du point de vue de la gestion du risque ou de l'élaboration de textes législatifs bons et efficaces.
    Ce qui se passerait si c'était plus une consultation prévue par une politique plutôt qu'exigée par une loi, c'est qu'il y aurait plus de souplesse. Beaucoup des questions que soulève la question de savoir si les audiences de votre comité répondent au devoir de consulter et s'il est nécessaire de consulter directement toutes les premières nations revêtent moins d'importance si l'on envisage la consultation plus largement comme étant simplement un moyen d'élaborer des lois meilleures et efficaces.

[Français]

    C'est terminé? Gracias. Je reviendrai au deuxième tour.

[Traduction]

    Je pense que la réponse est que ça n'a pas encore été établi.
    Madame Crowder est la suivante.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins.
    En guise de préface, j'affirme évidemment que le gouvernement a le devoir de consulter avant de légiférer, puis d'envisager une période de transition.
    Je ne suis pas avocate mais mon interprétation du témoignage de Mme Mandell, l'autre jour, est qu'elle parlait de l'existence d'un droit autochtone ou d'un titre de propriété. Il y a donc une question de droit autochtone et bon nombre d'observateurs vous diront que ce projet de loi risque d'enfreindre les droits autochtones.
    J'ai deux questions à ce sujet. Je le répète, je ne suis pas avocate et je suis sûre que vous connaissez ce projet de loi beaucoup mieux que moi mais mon interprétation est que le gouvernement possède le pouvoir de demander à la Cour suprême si l'obligation de consulter existe ou non — je crois que ça relève de l'article 55 d'une loi quelconque — et la question est alors de savoir pourquoi dans le cas présent où il semble y avoir une certaine confusion au sujet de l'existence de cette obligation on ne s'est pas adressé à la Cour suprême pour obtenir des précisions avant de proposer le projet de loi C-44.
    Deuxièmement, il semble y avoir ici une question de compétence constitutionnelle. Votre position est-elle que les premières nations n'ont pas compétence en matière de droits de la personne et que c'est pour cette raison que le gouvernement se doit d'intervenir?

  (1135)  

    Permettez moi de répondre à votre question.
    Je crois pouvoir dire, en ce qui concerne la démarche retenue et l'urgence exprimée par le ministre quant au désir de s'assurer qu'on éliminera toute possibilité de faire de la discrimination...
    En vertu de la Loi sur les Indiens. Replaçons ça dans le contexte.
    Oui, en vertu de la Loi sur les Indiens.
    Bien. Merci.
    S'attaquer à cette question de manière aussi opportune que possible ne concorde peut-être pas avec le temps qu'exigerait un certain nombre d'options et d'accords. Si l'on choisit de s'adresser à la Cour suprême à ce sujet, on parle d'un délai considérable.
    Je crois comprendre, même si je ne suis pas avocate, que simplement demander l'opinion de la Cour suprême sur l'existence du devoir de consulter ne prendrait pas aussi longtemps que s'il s'agissait d'une poursuite en bonne et due forme.
    Ce serait probablement plus rapide que s'il y avait un procès passant par les différents paliers, c'est incontestable, mais ce serait quand même un processus très long.
     Vous avez dit vous-même qu'il y a beaucoup de confusion sur la question de savoir s'il y a un accord. Si tel est le cas, il me semble que régler cette question du devoir de consulter au départ éviterait peut-être de longues poursuites plus tard car je devine que beaucoup de bandes, dès qu'elles recevront leur première plainte au titre des droits de la personne, déposeront une plainte arguant que le gouvernement ne s'est pas acquitté de son devoir de consulter, ce qui prendra beaucoup de temps dans l'appareil judiciaire et bloquera toute autre activité. Est-ce que je me trompe?

  (1140)  

    Il y a plusieurs choses à envisager.
     Comme l'a dit mon collègue, notre interprétation des arrêts de la Cour suprême ne nous porte pas à conclure que le devoir de consulter lors de l'élaboration d'un projet de loi est clairement établi à l'heure actuelle.
    Si l'on examine tous les sujets pour lesquels existent des opinions sensiblement différentes quant au fait que tel ou tel projet de loi fédéral a une incidence sur les droits autochtones — je songe par exemple aux questions concernant l'Accord de transfert des ressources naturelles des années 30, au sujet duquel il y a une question importante, que maintes premières nations ont soulevée, sur le fait qu'il portait atteinte ou non aux droits protégés par l'article 35 — nous pourrions avancer dans une voie avec un grand nombre de textes de loi sur lesquels nous essayons de travailler où nous devrions continuellement aller devant la Cour suprême, jour après jour, au sujet de chaque projet de loi.
    Notre méthode de gestion du risque consiste à déterminer si nous pensons qu'il existe ou non un devoir légal de consulter. Dans toute une série de cas, nous consultons, comme l'a dit mon collègue, mais parce que c'est une bonne chose à faire de manière générale. Je crois que le témoignage de M. Slavik au sujet de la gestion du risque en donne une très bonne description.
    Avez-vous procédé à une évaluation du risque concernant le devoir de consulter au sujet de ce projet de loi particulier?
    Notre opinion à ce sujet est double, je pense. La Cour suprême n'a pas donné d'indication claire qu'il existe un devoir de consulter au sujet de l'élaboration d'un texte de loi mais elle a été très claire sur d'autres aspects des exigences de consultation. En plus de cela, cependant, nous croyons qu'il est important pour nous de consulter, pour des raisons de politique publique.
    Nous envisageons cette question dans le contexte de tout le travail qui s'est fait au cours des 30 dernières années. C'est ce large éventail de choses que nous prenons en considération, dont les témoignages recueillis par votre comité. Le ministre et le ministère tiennent évidemment à savoir quelles seront les conclusions et ont indiqué qu'ils garderont l'esprit ouvert au sujet de recommandations dans divers domaines.
    Il vous reste moins d'une minute, madame Crowder.
    Concernant le devoir de consulter, il me semble que le gouvernement, dans la plupart des cas importants, ne l'a accepté que quand il y a été forcé par la Cour suprême.
    Mon argument est qu'il a cette fois la possibilité de mener des consultations adéquates à l'avance afin de couper court à certaines des conséquences imprévues dont nous avons souvent entendu parler au sujet du projet de loi C-44.
    Je sais que le ministère a procédé à l'analyse du projet de loi C-44 et à son incidence éventuelle, et qu'il estime qu'il pourrait y avoir jusqu'à 250 000 causes.
    Étant donné les circonstances passées où ce devoir de consulter n'a pas été respecté, ainsi que les conséquences que nous voyons maintenant à la suite de ce projet de loi C-44, je me demande pourquoi le ministère n'encourage pas vivement le ministre à s'acquitter de ce devoir de consulter.
    Je répète qu'il s'agit de toute la gamme des activités qui sont en cours pour éclairer le processus de décision. Vous avez certainement raison de dire que la Cour suprême donne des indications de plus en plus claires sur ce que ce que sont les règles en la matière. Je pense qu'il est utile que toutes les parties comprennent bien quand c'est nécessaire et quand ça ne l'est pas, et quand nous tenons des consultations pour des raisons de politique plutôt que d'obligation légale. Quoi qu'il en soit, nous convenons que c'est important dans les deux cas et nous sommes sensibles à l'importance du processus parlementaire d'audition des parties affectées et des parties intéressées et nous prenons bonne note de ce que vous découvrez dans ce processus.
    Merci.
    Monsieur Storseth, du parti gouvernemental.
    Merci beaucoup, monsieur le président. Je remercie les témoins d'aujourd'hui.
    L'une des choses que je retiens avec plaisir des réponses de certains de nos témoins est que le gouvernement du Canada continuera de travailler avec nos premières nations et avec leurs dirigeants dans tout ce processus, non seulement dans une période de consultation avant mais aussi pendant et après, ce qui aidera à résoudre toutes les conséquences imprévues qui pourraient découler de ceci. J'ai été heureux d'entendre M. Watson le dire.
    Je pense qu'il est important de rétablir la vérité sur certains des thèmes de ce débat. Je rappelle que l'article fondamental de ce projet de loi ne comporte que neuf mots et c'est peut-être pourquoi l'opposition essaye de manière tellement désespérée d'éviter l'étude article par article avant le congé d'été.
    L'une des choses que j'ai notées dans le témoignage de M. Slavik, jeudi, est qu'il estime que l'abrogation de l'article 67 est très importante. Il estime qu'il faut aller de l'avant mais il a deux préoccupations. La première concerne la période de transition qu'il faudrait selon lui allonger, peut-être jusqu'à 18 mois, et l'autre, le besoin éventuel de ressources supplémentaires. Évidemment, personne ne peut dire aujourd'hui quelles ressources supplémentaires seront nécessaires tant que nous ne serons pas effectivement engagés dans le processus.
    Quelle est votre position au sujet d'un allongement de la période de transition et du besoin de ressources supplémentaires, et cela n'est-il pas une meilleure solution que de mettre le projet de côté pendant tout l'été?
    Pour ce qui est de travailler ensemble, si vous me permettez de répondre d'abord à cela, nous sommes très résolus à travailler avec la CCDP lorsque c'est approprié et à travailler avec les premières nations pour comprendre les répercussions. Nous comprenons parfaitement qu'il y a des questions légitimes que se posent les premières nations. Tout gouvernement responsable, comme le sont les premières nations, veut comprendre clairement comment ça va fonctionner et comment il pourra faire face à la nouvelle situation, et nous voulons travailler avec elles pour nous en assurer.
    Au sujet de la période de transition, la période actuellement prévue, qui est de six mois, est une période que le ministre juge adéquate. Comme je l'ai dit, c'est un début, pas nécessairement une fin, mais le ministre a également indiqué qu'il est prêt à entendre l'avis du comité à ce sujet. Je ne pense pas que des témoins soient venus dire qu'une période de six mois serait satisfaisante et il est donc prêt à entendre les recommandations à ce sujet
    En ce qui concerne les ressources, il y a beaucoup de questions sur les ressources qui seront nécessaires et sur l'impact que cela aura. Nous avons l'instruction, pas absolue, mais nous pensons que l'information que nous avons actuellement est utile, c'est-à-dire qu'il y a une quarantaine de causes par an concernant les premières nations. Ce n'est pas 400 ni 4 000. Ça ne veut pas dire que ça ne pourrait pas changer. Nous nous attendons parfaitement à ce que ça change mais, quand nous voyons la forte aptitude de la Commission dans un certain nombre de cas à travailler très étroitement avec les communautés et avec les employeurs pour s'assurer qu'on évite la discrimination au départ, je pense que cela a été l'un des grands succès de la Commission par rapport à un certain nombre d'autres endroits du monde. Elle travaille avec les gens pour s'assurer qu'ils comprennent la Loi et savent comment éviter les situations pouvant donner lieu à des plaintes.
    Étant donné toutes ces choses, on ne peut dire absolument clairement quelles seront les ressources nécessaires mais le ministre a également indiqué qu'il serait heureux de recevoir des recommandations sur ce front. Nous voulons évidemment prendre le temps d'y réfléchir. Je ne peux pas envisager d'examen entrepris au sujet de cette loi qui ne porterait pas sur cette série de questions de manière assez détaillée, et ce serait certainement quelque chose qui serait examiné dans ce contexte et devrait être réglé. Et c'est le deuxième aspect de la question car c'est une chose dont il faudra s'occuper au départ aussi.

  (1145)  

    Je suis d'accord avec vous. Chaque fois que le ministre nous a fait la grâce de venir nous parler, il a toujours démontré qu'il est prêt à coopérer avec les communautés des premières nations. Les témoins que nous avons entendus nous ont dit qu'ils sont plus que prêts à travailler avec le gouvernement sur ces questions.
    Il est dommage que certains députés de l'opposition affirment mordicus qu'ils voteront contre ce projet de loi, quelles que soient les circonstances.
    Un rappel au règlement, monsieur le président. Je regrette mais aucun député de l'opposition n'a dit qu'il voterait contre ça quelles que soient les circonstances. C'est un projet de loi important qui mérite un examen attentif car les répercussions seront profondes.
    Je suis profondément choquée par ce genre de commentaire.
     Je prends note.
    J'invite les députés à traiter précisément du projet de loi en adressant leurs questions aux témoins au sujet du projet de loi plutôt que des positions des autres partis.
    Merci beaucoup, monsieur le président. Je prends bonne note de votre intervention.
    Ce rappel au règlement est-il pris sur mon temps de parole?
    Non, poursuivez.
    Je montrerai avec plaisir à mon honorable collègue la transcription de la dernière séance du comité.
    Ma deuxième question est de savoir si l'objectif de ce projet de loi est d'assurer aux peuples des premières nations les mêmes droits humains fondamentaux dont jouissent tous les autres Canadiens.
    Je crains que la disposition d'interprétation et l'abrogation de l'article 67 de la Loi canadienne sur les droits de la personne ne réduisent l'effet de protection de cette partie de la Loi. Pourriez-vous me donner plus de détails à ce sujet et me dire si vous pensez que cela risque d'arriver?
    Mes collègues du ministère de la Justice ont longuement réfléchi à cette question et je les laisse donc vous répondre.
    Je vous remercie de cette question.
    C'est effectivement l'une de nos préoccupations car une disposition d'interprétation pourrait... Comme je l'ai dit plus tôt, comme elle sera sujette à interprétation et à contestation, on ne sait pas comment elle sera interprétée ni comment on trouvera un équilibre entre les droits individuels et les droits collectifs. Le reste des Canadiens à qui s'applique la LCDP n'a pas une clause d'équilibre similaire et on peut donc craindre, par exemple, l'émergence de systèmes doubles, essentiellement, ou de deux systèmes, ce qui pourrait affaiblir les droits individuels des individus des premières nations qui pourraient ne pas avoir les mêmes protections que les autres Canadiens.
    L'une des préoccupations concernerait la situation des femmes autochtones en vertu de la Loi — à moins qu'il y ait quelque chose de précis pour protéger leurs droits dans cet équilibre.

  (1150)  

    Nous passons maintenant à un tour de cinq minutes.
    Madame Karetak-Lindell.
    Je tiens à répéter qu'il semble manquer quelque chose à la neuvième page de votre exposé. Quand vous dites que tous les témoins ont appuyé le principe, beaucoup d'entre eux ont dit « mais pas le projet de loi C-44 ». Je pense que c'est fondamental dans ce débat, et aussi pour répondre à l'insinuation de M. Storseth que nous faisons de l'obstruction parce que nous ne voulons pas donner de droits aux gens qui vivent dans les réserves et qui relèvent de la Loi sur les Indiens. Je pense que c'est une conclusion tout à fait erronée.
    Vous demandez aux gens de faire confiance à un gouvernement et de croire que ces neuf mots auront une incidence minime et qu'il y aura de nouvelles ressources pour faire face à ces plaintes. Beaucoup de chefs ont déjà dit qu'ils n'ont pas assez de ressources pour offrir les services auxquels ils ont droit, selon les affirmations des gens d'en face. Ils n'ont déjà pas assez d'argent pour donner des logements adéquats, pour donner des services d'éducation à tous ceux qui en demandent, pour dispenser des soins de santé satisfaisants.
    Ces gens sont censés faire confiance à un gouvernement qui affirme qu'il y aura des ressources pour dispenser ces services mêmes au sujet desquels il y aura probablement des plaintes parce qu'ils ne sont pas dispensés, alors que le Canada est l'un des deux pays des Nations unies qui n'appuient pas la déclaration des droits des peuples indigènes. Ils sont censés faire confiance à un gouvernement qui, d'un côté, se bat pour faire adopter le projet de loi C-44 mais, du côté international, se bat contre la déclaration des droits des peuples indigènes.
    Ces gens sont censés faire confiance à gouvernement qui se dit encore « nouveau » au bout de 16 mois. Un gouvernement qui dit : « Laissez-nous le temps d'apprendre à diriger un pays. Laissez-nous le temps d'apprendre à établir une nouvelle relation avec les gens ». Je pense qu'on ne devrait pas avoir besoin d'un texte de loi pour forcer un gouvernement à respecter les gens qui subiront l'incidence de la législation et qu'on ne devrait pas avoir besoin d'un texte de loi pour former une bonne relation de travail avec les gens.
    Je me demande vraiment pourquoi les gens devraient faire confiance au gouvernement sans une disposition d'interprétation, sans une disposition de non-dérogation et sans une législation indiquant qu'il y aura des ressources et du développement de capacités. Ils sont censés le croire sur parole — comme je l'ai dit, sur les neuf paroles d'un projet de loi — et censés croire qu'il agira de bonne foi après ça. J'ai beaucoup de mal à croire ça.
    Merci.
    Merci.
    J'ai travaillé avec suffisamment de premières nations différentes, avec des métis et des groupes Inuit, pour savoir qu'il n'y a rien que moi-même ou n'importe quel représentant du gouvernement puisse dire pour créer cette confiance.
    Je peux vous dire par contre que cette démarche repose sur un certain nombre d'éléments différents. Je ne m'attends pas à ce que le simple fait que quelqu'un ait tracé un chemin amène les gens à dire que nous perdrons automatiquement ce qui a provoqué ce manque de confiance que nous voyons dans bien des cas dans le pays.
    Je veux dire aussi que nous prenons une quantité connue, la LCDP, pour l'appliquer plus largement qu'elle l'a été jusqu'à présent. Ce n'est pas totalement neuf dans le contexte actuel mais il y a de nouvelles parties. Il n'y a aucun doute à ce sujet.
    Nous travaillons très fort — et la CCDP est prête à travailler très fort — avec les communautés pour comprendre comment faire face aux répercussions. Je répète, il ne s'agit pas simplement de voir comment faire face aux plaintes mais surtout de voir comment éviter les plaintes.
    La partie suivante est qu'il y aura...

  (1155)  

     Je veux vous poser une question. Pourquoi ne faites-vous pas ça maintenant?
    Voudriez-vous laisser M. Watson finir sa réponse?
    Je demande simplement pourquoi on ne fait pas ça maintenant pour le projet de loi C-44.
    J'entends bien mais nous sommes déjà...
    Par exemple, développer les capacités pour qu'ils n'aient pas...
    Laissez M. Watson répondre.
    Nous sommes certainement prêts à faire ça. Nous avons eu beaucoup de discussions avec de nombreuses organisations différentes sur cette question et sur comment éviter les plaintes. Nous devrons bien sûr en avoir beaucoup d'autres et nous sommes prêts à le faire. Nous avons travaillé pour obtenir une augmentation des fonds de la CCDP afin qu'elle puisse aussi faire ce genre de travail.
    Je répète, je n'ai pas l'illusion que ce que moi-même ou n'importe qui d'autre au sein du gouvernement puisse dire fera disparaître cette méfiance. Ce que nous pouvons offrir, je suppose, c'est une démarche progressive par laquelle nous aurons un certain contexte, nous aurons une certaine expérience, et nous pourrons démontrer que nous sommes prêts à aller dans ces voies. On nous jugera aux actes.
    Merci.
     J'aimerais poser une question à M. Pryce.
    Est-ce que le devoir de consulter, tel qu'il a été défini par la Cour suprême, renvoie à une question donnée, ou à un lieu donné, par opposition au devoir d'un organisme élu du gouvernement du Canada d'adopter des lois pour tous les citoyens? Diriez-vous que ce projet de loi a plus à voir avec le devoir d'un organisme élu qu'avec un lieu particulier?
    Merci, monsieur le président.
    Au risque de paraître encore indécis, il y avait clairement dans l'arrêt de la Cour suprême concernant les Haïda une revendication très factuelle et localisée touchant les droits autochtones, concernant une première nation particulière, la nation Haïda ou la première nation Taku Tlingit. Le projet de loi Bill C-44 est un animal très différent, si je peux dire, de par son objectif. Il aura une large incidence sur chaque première nation.
    Vous avez parlé d'arrêt factuel et localisé mais c'est de cette manière qu'a évolué ou qu'existe la jurisprudence sur les droits autochtones issus des traités. Différents groupes ont des droits différents et ce projet de loi aura donc une incidence variable sur les différentes premières nations. C'est une chose très différente.
    La Cour suprême ne s'est pas penchée sur la question de savoir si le devoir de consulter s'applique à l'adoption d'un texte législatif ni, si tel était le cas, s'il s'appliquerait à ce genre particulier de texte législatif qui consiste à modifier la Loi sur les droits de la personne.
    Il y aurait certainement des difficultés ou des contestations si la Cour voulait s'engager dans une voie débouchant sur l'existence d'un devoir de consulter dans le processus législatif. Vous savez qu'il existe des traditions bien établies de suprématie parlementaire et que les tribunaux ne s'occupent généralement des textes de loi qu'après leur adoption. Il faudrait donc que la Cour suprême procède à une analyse ou à une réflexion approfondie si elle devait envisager de dire qu'il existe un devoir de consulter dans ce contexte particulier.

  (1200)  

    Vous venez juste de dire qu'il y a un bon argument en faveur de ce que je viens juste de dire.
    Je donne maintenant la parole à M. Bruinooge.
    Je vais rester sur le même sujet mais j'aimerais préciser d'abord que la Commission canadienne des droits de la personne est un organisme indépendant qui, j'en suis sûr, trouvera un très juste équilibre en ce qui concerne les droits humains des premières nations. J'attends cela avec impatience.
    Pour revenir sur le devoir de consulter, dans le contexte des Taku-Haïda, vous avez dit qu'on n'a pas encore fait d'analyse approfondie de la manière dont cela serait relié peut-être aux décisions ultérieures ou à d'autres questions en dehors peut-être du domaine des ressources.
    Je voudrais vous soumettre une proposition que j'ai déjà présentée lors de la réunion précédente. Suite à Taku-Haïda, la Cour suprême a décidé d'étendre des droits aux métis, comme moi, en matière de chasse et de pêche. Bien sûr, cela a une incidence sur les premières nations puisqu'il s'agit de ressources finies. Elle n'a elle-même tenu aucune consultation et je me demande comment cela serait interprété par rapport à Taku-Haïda.
    Merci de cette question.
    Je pense que j'étais ici lors de la réunion précédente et je ne me souviens pas exactement de la réponse mais, du point de vue juridique, les tribunaux rendent des décisions sur les droits et interprètent la Constitution et la common law. Il est donc difficile de concevoir, je crois, conceptuellement que la Cour devrait consulter d'autres personnes qui pourraient être affectées par une décision donnée.
    Ce qui a tendance à se produire, en tout cas au moment où une affaire arrive devant la Cour suprême du Canada, c'est que les autres personnes susceptibles d'être affectées constituent une alliance ou essayent d'intervenir. De cette manière, les juges prennent connaissance de l'opinion des autres personnes pouvant être pour ou contre la proposition en cause.
    C'est ce que nous faisons ici, dans une certaine mesure. Nous recueillons l'opinion de nombreux...
    Oui. Je veux dire qu'il existe un processus pour prendre connaissance des autres opinions.
    On pourrait dire que c'est une consultation similaire à ce qui se passe à la Cour suprême, et nous pouvons évidemment continuer avec ce projet de loi.
     Je dois malheureusement vous interrompre ici.
    En effet, nous avons d'autres témoins et je sais que nous avons commencé en retard. Que voulez-vous, continuer ou commencer avec le deuxième groupe?
    Commencer avec le deuxième groupe? Très bien.
     Je m'excuse de notre retard. Je vous remercie de votre participation à cette séance et des informations que vous nous avez données. Merci beaucoup.
    Nous faisons une pause de quelques minutes.
    Je tiens également à dire aux membres du comité et aux témoins que nous avons fait venir de quoi manger. N'hésitez pas à vous servir.

  (1205)  

    Pouvons-nous reprendre nos travaux?
    Nous allons maintenant accueillir le deuxième groupe de témoins, de la Commission canadienne des droits de la personne.
    Nous accueillons Jennifer Lynch, présidente de la Commission, David Langtry, commissaire, Hélène Goulet, secrétaire générale, et Harvey Goldberg, chef d'équipe d'initiatives proactives.
    Bienvenue devant le comité.
    Madame Lynch, voulez-vous faire une déclaration liminaire?
    Encore une fois, bienvenue.

[Français]

    Merci de votre accueil.

[Traduction]

    Je vous remercie de me donner l'occasion de comparaître à nouveau devant votre comité pour la conclusion de vos audiences.
    Nous avons évidemment suivi vos débats de très près. Nous avons écouté et nous avons appris. Aujourd'hui, avant de répondre à vos questions, je souhaite établir un lien entre les principaux éléments de notre déclaration d'origine et certains des témoignages entendus depuis. Je souhaite également fournir une brève analyse de ce que nous pourrions appeler certaines idées fausses et préoccupations exprimées par d'autres témoins au sujet de l'incidence de l'abrogation.
    Pour commencer, je veux établir le lien entre notre déclaration et les autres témoignages. Le 19 avril, nous avons présenté quatre éléments essentiel : nous appuyons l'abrogation immédiate de l'article; il importe de veiller à ce que notre Loi soit interprétée de manière à établir un équilibre adéquat entre les droits et intérêts individuels et les droits et intérêts collectifs; la période de transition, à notre avis, devrait être beaucoup plus longue que six mois et être d'au moins 18 mois; et il est essentiel que la Commission et les premières nations reçoivent un financement adéquat pour assurer la mise en oeuvre avec succès de l'abrogation.
    À mon avis, les témoins ont confirmé la validité foncière de ces quatre éléments.

  (1210)  

[Français]

    Commençons par l'abrogation immédiate.
    Presque tous les témoins qui se sont présentés devant le comité ont appuyé la nécessité de mettre en oeuvre un mécanisme de protection et de recours relatif aux droits de la personne qui soit propre aux premières nations. Cela n'est pas surprenant. Nous continuons à insister sur l'urgence de l'abrogation. Cela fait 30 ans que la commission demande l'abrogation de cet article. La Loi canadienne sur les droits de la personne a été modifiée plusieurs fois afin que la commission puisse continuer à protéger et à promouvoir les droits de la personne; toutefois, l'article 67 a toujours fait partie de la loi.
    Trente ans, c'est bien trop long à attendre pour pouvoir avoir accès à la protection fondamentale des droits de la personne, une protection que tous les autres Canadiens et Canadiennes tiennent pour acquise. Le temps est venu d'agir. Il apparaît clairement que la question n'est pas de savoir si les premières nations devraient bénéficier d'une protection exhaustive des droits de la personne, mais plutôt quel est le meilleur moyen de mettre en oeuvre une telle protection.

[Traduction]

    Vous avez entendu des témoins dire que la protection des droits collectifs et des droits individuels est reconnue par les premières nations comme une valeur nécessaire pour la bonne gouvernance et le bien-être de leurs membres, et qu'elle est conforme aux traditions et cultures des premières nations. Vous avez aussi entendu des témoignages éloquents et émouvants sur la nécessité de veiller à ce que les droits de la personne soient appliqués aux premières nations d'une manière compatible avec les droits autochtones existants et les droits issus des traités, ainsi qu'avec les cultures et les traditions des premières nations.
    Quasiment tous les témoins ont souligné la nécessité d'élaborer un mécanisme adéquat pour atteindre l'équilibre recherché. À notre avis, l'une des méthodes consisterait à modifier le projet de loi pour y inclure un énoncé de principe devant guider la Commission et le Tribunal dans leur interprétation des plaintes formulées contre les autorités autochtones, et nous vous proposons aujourd'hui le libellé suivant :
Dans toutes les questions pouvant faire, en vertu de la Loi canadienne sur les droits de la personne, l'objet d'une plainte contre une autorité autochtone, l'interprétation et l'application de la présente Loi doivent se faire de façon à concilier les droits et intérêts individuels et les droits et intérêts collectifs.
    Une telle disposition serait conforme aux articles 15 et 16 de notre Loi. L'article 15 permet à la Commission et au Tribunal de prendre en considération, au moment de déterminer s'il y a eu une infraction à la Loi, certaines questions telles que les exigences professionnelles justifiées d'un emploi. Par exemple, refuser un emploi de pilote de ligne à une personne ayant une déficience visuelle serait discriminatoire en vertu de notre Loi, mais il s'agit d'une discrimination qui pourrait être justifiée par les exigences de l'emploi.
    Dans leurs témoignages, le professeur Larry Chartrand et Mme Wendy Cornet ont fait référence à des arrêts judiciaires et à des décisions du Tribunal canadien des droits de la personne concernant les premières nations dans lequelles on a déjà équilibré les droits collectifs et individuels au moyen de l'article 15. Pour ce qui est de l'article 16 de notre Loi, il autorise les programmes spéciaux établissant une discrimination en faveur de groupes particuliers si leur objectif est de surmonter une discrimination passée.
    Du fait des articles 15 et 16, la Commission et le Tribunal ont déjà une longue expérience de la conciliation des intérêts dans l'examen des questions concernant les droits de la personne. Pour concrétiser cet équilibrage entre les droits collectifs et individuels, la Commission s'est engagée à collaborer étroitement avec les premières nations et avec les autres parties prenantes, de façon continue. Le dialogue est essentiel avant de se demander si d'autres mécanismes tels que des règlements, des lignes directrices ou des politiques, ou une combinaison de ceux-ci, pourraient mieux nous aider dans le traitement quotidien des plaintes touchant les droits de la personne. Et, bien sûr, nous avons déjà entamé ce dialogue.

  (1215)  

[Français]

    Je vais maintenant parler de la période de transition.
     Presque tous les témoins s'accordent pour dire qu'on a besoin de temps pour mettre en place la capacité et les processus nécessaires pour faire face aux enjeux éventuels en matière de droits de la personne dans les collectivités.
    Certains ont fait remarquer que bien que leurs collectivités appuient les droits de la personne, elles ne comprennent et ne savent pas vraiment comment un système de recours applicable à ces droits pourrait fonctionner dans leurs collectivités.
    On a insisté plusieurs fois sur le fait que les collectivités des premières nations avaient besoin de temps pour en arriver à un consensus et à une meilleure compréhension, deux éléments qui sont essentiels au fondement solide sur lequel on pourra construire un système efficace permettant de gérer et de régler les questions liées aux droits de la personne.
    Ces témoignages ont confirmé notre conviction selon laquelle la période de transition prévue, soit six mois, est tout à fait insuffisante pour effectuer le travail requis. Il faudrait à tout le moins prévoir un délai de 18 mois avant que la loi ne s'applique aux premières nations. Il serait même préférable de prévoir une période plus longue.
    Passons maintenant à la question des ressources.
     Des témoins ont fait valoir la nécessité d'un financement approprié pour assurer la mise en oeuvre harmonieuse et le fonctionnement soutenu des régimes de droits de la personne destinés aux premières nations. À cet égard, les représentants du MAINC ont rappelé la reconnaissance par le gouvernement de cette nécessité et sa volonté de se pencher sur cette question, en excluant toutefois la nécessité d'intégrer ces considérations pécuniaires aux dispositions du projet de loi. La commission partage les préoccupations des premières nations, à savoir que la satisfaction des besoins en ressources découlant de l'abrogation ne devrait pas se faire au détriment d'autres priorités urgentes, tels le logement, la santé et l'éducation.
    Comme nous vous l'avons signalé lors de notre dernière comparution, la commission a entrepris des discussions avec les représentants du gouvernement au sujet des besoins en ressources de la commission pour mettre en oeuvre l'abrogation de façon efficace.
    Toutefois, au moment où l'on se parle, il n'y a toujours pas de nouvelles ressources allouées en appui aux projets de la commission visant à collaborer avec les intervenants des premières nations, ou à planifier la mise en oeuvre de l'abrogation.
    Compte tenu du fait que les ressources demandées ne nous seront pas accordées avant l'adoption du projet de loi, nous devrons nous limiter à l'amorce à pas prudents de notre stratégie de liaison.

[Traduction]

    La deuxième partie de mes remarques concerne l'incidence de l'abrogation et ce que j'appellerai la réalité et la perception.
    Certaines idées fausses ont été exprimées durant vos audiences quant à l'incidence possible de l'abrogation. Par exemple, on a avancé l'hypothèse qu'une plainte adressée à la Commission pourrait entraîner des changements importants et avoir de profondes répercussions sur les gouvernements des premières nations. On a dit aussi que l'abrogation de l'article 67 mettrait en péril toute la structure des relations entre le gouvernement et les premières nations, ce qui entraînerait le démantèlement massif de la Loi sur les Indiens.
    Il s'agit de questions sur lesquelles il est difficile à la Commission d'exprimer un avis et je vais donc en traiter avec beaucoup de prudence.
    La Commission examine chaque plainte qui lui est adressée en se penchant sur son mandat législatif, la preuve avancée et la jurisprudence pertinente. Quoi qu'il en soit, afin d'aider les membres du comité à mieux comprendre le mandat législatif de la Commission et la manière dont elle fonctionne, je veux apporter les précisions qui suivent.
    Premièrement, même s'il est important, le mandat législatif de la Commission est relativement restreint. Les droits de la personne revêtent de nombreux aspects, comprenant par exemple un large éventail de droits civils, politiques, sociaux, culturels, indigènes ou autres. Le rôle de la Commission est axé avant tout sur le droit de ne pas être victime de discrimination dans l'emploi et dans la prestation de services.
    Deuxièmement, pour qu'une plainte soit examinée, elle doit reposer sur l'un au moins des 11 motifs précis que sont le sexe, l'âge, la couleur, l'origine nationale ou ethnique, l'état matrimonial, la situation de famille, l'orientation sexuelle, la déficience, la religion et l'état de personne graciée.
    Il ne suffit pas d'affirmer que deux personnes ou groupes ont fait l'objet d'un traitement différent ou qu'un groupe a reçu un service de qualité ou de niveau différent d'un autre groupe. Pour que la Commission examine la plainte, il faut que le lien avec l'un des motifs ci-dessus soit démontré. Je précise à cet égard que la « condition sociale » n'est actuellement pas un motif illicite de discrimination.
    Troisièmement, il existe bien des situations dans lesquelles une personne peut avoir le sentiment d'avoir été traitée de manière injuste. Elle peut penser que ses droits humains, au sens le plus large de l'expression, ont été transgressés ou qu'on a commis une erreur administrative à son égard. Bien souvent, ses allégations seront peut-être justifiées mais la Commission ne peut se pencher que sur les motifs de discrimination illicites qui sont énoncés dans la Loi. La Commission n'est pas un ombudsman et n'est pas habilitée à jouer ce rôle.
    Quatrièmement, bien que le traitement de certaines plaintes puisse être long, litigieux et coûteux, c'est l'exception plutôt que la règle. La plupart des plaintes peuvent être réglées en moins de neuf mois. De plus, dans 27 % des cas, la plainte est résolue et, dans 28 % des cas, elle est rejetée parce qu'elle n'était pas fondée ou pour d'autres raisons. Finalement, 35 % des cas sont renvoyés devant d'autres modes de règlement ou ne sont pas recevables et seulement 10 % sont renvoyés devant le Tribunal, bon nombre étant ensuite réglés par la médiation.
    Comme la Commission fait la promotion active de la résolution des plaintes sans recours au contentieux, la participation d'avocats reste minime. Beaucoup de plaintes, si ce n'est la majorité, sont réglées avant l'engagement d'une procédure officielle devant la Commission. En outre, celle-ci encourage vivement les employeurs à mettre en oeuvre leurs propres mécanismes internes de gestion des conflits.
    Une autre question assez importante est l'impression erronée que notre mandat se limite au traitement des plaintes. L'un des aspects essentiels de notre stratégie de mise en oeuvre consiste à travailler avec les premières nations pour bâtir des mécanismes communautaires de règlement des différends et renforcer les mécanismes existants. Dans les approches modernes de gestion des conflits, de solides processus de plainte sont importants mais ils ne devraient être invoqués qu'en dernier essort. Notre vision des choses et notre mandat font de nous beaucoup plus qu'un système de traitement des plaintes. Le règlement officiel des différents, même s'il est important, devrait rester une partie relativement mineure d'un système global englobant aussi la prévention et l'éducation.
     La situation actuelle offre un potentiel énorme d'élaboration d'un système exhaustif débutant avec une structure de résolution des différends offrant de multiples options de règlement, appuyé par d'autre processus et pratiques mettant l'accent sur les étapes initiales que sont la prévention de la discrimination et l'éducation.

  (1220)  

    Les principes essentiels devant être formulés devraient avoir pour objectif de favoriser une culture dans laquelle la résolution des conflits est considérée comme l'une des composantes permettant de créer des collectivités et des milieux de travail inclusifs et productifs.
    L'établissement de systèmes intégrés de gestion des conflits touchant les droits de la personne permettra aux citoyens des premières nations de mieux comprendre leurs droits et la manière de s'en prévaloir, aux gouvernements des premières nations de mieux apprécier les droits qu'ils ont le devoir de promouvoir et de respecter, et à toutes les parties de collaborer pour prévenir la discrimination et résoudre les plaintes touchant les droits humains.
    Sixièmement, s'il est vrai qu'une plainte pourrait amener à conclure que certains éléments d'une loi fédérale sont discriminatoires, il est peu probable qu'un tel jugement puisse jamais déboucher sur le démantèlement à la pièce de tout un régime législatif. Le rôle de la Commission est d'offrir des recours, pas d'être une entreprise de démolition. Un gouvernement faisant l'objet d'un jugement de discrimination aurait la possibilité d'en profiter pour revoir ses procédures ou ses lois et de les adapter pour qu'elles ne soient plus en conflit avec la LCDP.
    En conclusion, permettez-moi de réitérer que la Commission respecte les collectivités et gouvernements des premières nations. Nous respectons le droit des premières nations à l'autonomie gouvernementale. Nous respectons leurs traditions juridiques, leurs lois coutumières et leurs systèmes de règlement des différends. Nous sommes résolus à oeuvrer avec les premières nations afin d'élaborer un système de droits de la personne favorisant et confortant ce respect et rehaussant la protection de ces droits pour tous les citoyens des premières nations.
    J'espère que ces remarques sur vos audiences vous aideront à conclure vos délibérations très importantes sur ce projet de loi.
    Mes collègues et moi-même répondrons avec plaisir à vos questions.

  (1225)  

    Merci, madame Lynch.
    Nous aurons à partir de maintenant un tour de cinq minutes pour que chacun ait la chance d'intervenir. Comme nous avons fini avec le parti du gouvernement, je donne maintenant la parole à M. Lévesque.
    Ce sont de nouveaux témoins et vous avez commencé...
    Je crois que le président peut prendre la décision. Nous n'avons que 25 minutes et je veux m'assurer que tout le monde puisse poser ses questions.
    Allez-y, monsieur Lemay.

[Français]

    Monsieur le président, je pense moi aussi que c'est un nouveau tour. Pour éviter qu'on perde du temps en discussions, je suggère qu'on commence par les libéraux et qu'Yvon intervienne par la suite. Pour ma part, je n'aurai pas de questions, étant donné qu'on s'est entendus. Mon collègue pourra poser les questions pour nous, et nous pourrons ensuite passer aux membres du gouvernement. De cette façon, tout le monde aura le temps de poser une question.

[Traduction]

    D'accord, mais seulement cinq minutes.
    Ça me suffira, monsieur le président. Nous voulons aussi que tout le monde ait sa chance.
     Je vais poser une brève question en espérant que M. Russel pourra répondre aussi.
    Je vous remercie de votre exposé. Vous avez apporté beaucoup d'éclaircissements importants.
    M. Pryce, qui vous précédait, a dit que ce projet de loi aura une profonde incidence, malgré les neuf mots dont il a constamment parlé, et il est important que nous fassions bien notre travail.
    Comme vous le savez, nous avons rencontré hier la Commission canadienne des droits de la personne qui nous a proposé un principe d'interprétation. Je sais que les collectivités autochtones ont recommandé d'inclure dans ce principe les mots « traditions juridiques et lois coutumières indigènes ». Pour une raison que j'ignore, vous avez choisi de ne pas les inclure dans le principe d'interprétation.
    Dans votre conclusion, madame Lynch, vous avez dit respecter les traditions juridiques, les lois coutumières et les systèmes de règlement des différends. Pourquoi n'avez-vous pas inclus cela, et pouvez-vous nous dire comment cela s'appliquerait aux premières nations qui ne relèvent pas actuellement du projet de loi C-44 — celles à qui la Loi ne s'applique pas actuellement?
    Je vais d'abord vous donner une réponse générale et je demanderai ensuite au commissaire Langtry de vous donner un peu plus de détails.
    Cette proposition a été faite lors d'une réunion et nous l'avons examinée. L'une de nos préoccupations est que nous pourrions avoir 600 collectivités relevant de notre compétence et que les termes proposés nous obligeraient à produire 600 interprétations différentes des traditions et des cultures. Ce qui vaut dans un cas ne vaudrait pas nécessairement dans les autres.
    C'était ma réponse générale et je laisse M. Langtry vous donner des précisions.
    Notre préoccupation au sujet de cette proposition — et je parlerai dans un instant de la manière dont nous la comprenons — est que certaines premières nations ont une tradition juridique ou une loi coutumière que d'autres n'ont pas, et qu'il y a des différences de l'une à l'autre.
    Très franchement, l'intérêt de la transition et la raison pour laquelle nous voulons formuler des lignes directrices d'interprétation ou un instrument quelconque en discutant et en dialoguant avec les premières nations est que nous voulons apprendre. Nous ne pensons donc pas qu'il soit opportun d'intégrer ou de proposer un texte sur quelque chose que nous ne connaissons pas bien. En outre, nous pensons que les intérêts collectifs sont suffisamment larges pour englober les traditions juridiques et les lois coutumières.
    L'autre raison est que la tradition juridique et le droit coutumier constituent peut-être déjà un autre mécanisme de règlement des litiges, ce qui signifierait que nous n'aurions même pas à en connaître car nous préférons avoir recours aux mécanismes différents de règlement des litiges quand ils existent. Donc, au lieu d'intégrer cela dans un énoncé de principe, nous pensons que c'est quelque chose qui pourra être mis au point avec nous pendant la période de transition.

  (1230)  

    Il vous reste une minute et 20 secondes.
    Très brièvement, vous avez dit, en reliant votre déclaration à d'autres témoignages, que vous approuvez l'abrogation rapide de l'article 67.
    Voulez-vous dire que vous êtes en faveur de l'abrogation rapide de l'article 67 une fois qu'on aura réglé les trois autres questions - les points 2, 3 et 4?
    C'était à la deuxième page, je crois.
    Oui, merci beaucoup. Je connais très bien nos principaux arguments. Je formulais simplement une réponse à votre question.
    J'aimerais parler de la réalité, d'abord du point 4 concernant le financement. Il est tout à fait exact que, conformément à nos propres principes de participation à un dialogue avec les parties prenantes sur les questions qui les touchent, nous avons entrepris le maximum de dialogue possible actuellement. Cela est aussi directement relié au point 3, la période de transition.
    Les deux sont inextricablement liés car, même si nous sommes heureux qu'un témoin précédent ait parlé de notre contribution et de notre engagement au dialogue et à l'interaction, nous n'avons tout simplement pas les fonds nécessaires actuellement pour vraiment commencer ça.
    De même, comme notre mandat et notre vision sont beaucoup plus larges qu'un mécanisme de recours intelligent qui soit facilement accessible et agisse efficacement, comme notre vision dépasse largement cela et que nous voulons avancer vers l'éducation, la sensibilisation et les comportements ne donnant pas prise à la discrimination, c'est un très long processus auquel nous devons participer avec les diverses communautés pour atteindre cet objectif. Par conséquent, nous avons besoin de temps et de ressources mais nous pensons que cela peut être géré durant une période de transition adéquate.
    Finalement, avec le concept de principe d'interprétation, nous savons comment équilibrer les droits et intérêts individuels, trouver des équilibres et, dans ce contexte, une période de transition nous permettra d'élaborer une ligne directrice ou un instrument quelconque.
    Je ne sais pas si je vous ai répondu précisément.
    C'était tout le temps dont vous disposiez. Merci.
    Je passe maintenant au parti gouvernemental.
    Un rappel au règlement, monsieur le président. Je croyais que vous aviez une nouvelle liste. Donc, ce sont les trois partis d'opposition puis...
    Une voix : C'était ce que vous pensiez mais je pense que le président a pris une décision.
    Mme Jean Crowder : Non, ce n'était pas ce que je pensais.
    Si je dois prendre une nouvelle liste, je devrais commencer avec un tour de sept minutes et...
    Monsieur Lévesque, nous perdons notre temps. Nous devons avancer pour donner à tout le monde la possibilité d'intervenir.

[Français]

    Madame Lynch, vous avez précisé qu'on attendait ça depuis 30 ans et que ça pressait. C'est comme la souveraineté au Québec dans notre cas: ça presse également. Cependant, il y a d'abord des choses importantes à considérer, vous devrez l'admettre. Je suis certain que vous ne pouvez pas nous dire aujourd'hui qu'au cours des 30 dernières années, le gouvernement a réellement consulté les premières nations. Vous allez arguer qu'il n'y avait pas de directives en ce sens de la part d'un tribunal quelconque ou d'un gouvernement.
     Par contre, je suis sûr que vous étiez à la commission en 2005 et que vous vous souvenez de l'engagement du gouvernement à consulter les premières nations à l'égard de toutes les politiques fédérales touchant les membres de l'Assemblée des Premières Nations et ayant un impact spécifique et important sur leur avenir.
    Je vais vous poser mes questions en rafale.
    Je n'ai pas compris votre première question. Pourriez-vous la répéter, s'il vous plaît?
    On peut dire que le projet de loi C-44 est très important, compte tenu qu'il va changer la vie des premières nations. Pouvez-vous nous dire si depuis qu'il a pris l'engagement de consulter les premières nations, le 31 mai 2005, donc il y a deux ans, le gouvernement les a consultées?
    Par ailleurs, je suis certain que vous étiez présente lorsque les gens du ministère ont comparu. Vous avez sûrement entendu l'allocution de M. Watson. Vous nous dites que dans le cadre de l'application du projet de loi C-44, suite à l'abrogation, une clause interprétative sera nécessaire. Vous avez entendu M. Watson dire que ce n'était pas le cas. Maintenez-vous votre position, malgré l'assertion de M. Watson?

  (1235)  

     Merci. Je vais répondre en anglais.

[Traduction]

    En ce qui concerne votre première question, c'est-à-dire si le gouvernement a consulté ou non, je regrette, monsieur, que notre Commission ne soit pas en mesure de donner une opinion à ce sujet. Le devoir de consulter est un devoir du gouvernement et ne fait pas partie de notre rôle.
    En ce qui concerne le principe d'interprétation, il y a des avis divergents et nous les avons tous entendus. Nous avons une Loi qui nous offre des solutions pour élaborer une disposition d'interprétation au moyen, par exemple, d'une ligne directrice. La ligne directrice peut ne pas être la méthode adéquate, ça pourrait être une politique, ça pourrait être un règlement.
    Pour ce qui est d'écouter les parties prenantes et savoir comment elles peuvent être touchées par cette abrogation, nous sommes venus devant vous aujourd'hui proposer un principe, au moins. En fait, quand ce sera dans la Loi, ce sera un article de la Loi. Toutefois, un énoncé de principe de large portée faisant néanmoins référence aux droits et aux intérêts sera utile. Ensuite, nous aurons plus de temps pendant la transition pour l'étoffer afin de créer d'autres lignes directrices d'interprétation.

[Français]

    Vous êtes responsable de la Commission des droits de la personne. On sait qu'il y a des droits individuels et des droits collectifs. Dans un souci de respect de nation à nation mais aussi de respect des droits de la personne, le gouvernement devrait-il respecter l'autre partie en se fondant sur la vision de la Commission des droits de la personne?

[Traduction]

    Vous en êtes à 15 secondes. Si vous voulez une réponse, laissez le témoin continuer.
    Merci beaucoup.
    Je sais que c'est une question importante pour vous mais ça ne fait pas partie de notre responsabilité en tant que Commission et nous ne pouvons pas répondre à cette question.
    C'est une réponse suffisante, merci.
    Madame Crowder.
    Merci, monsieur le président, et merci aux témoins.
    Je veux faire deux brèves remarques puis poser une question au sujet de la Loi sur les Indiens
    Tout d'abord, nous ratons une chance. J'affirme qu'il aurait dû y avoir des consultations avant que le projet de loi C-44 soit mis en place. Nous risquons aussi de rater une chance si nous ne donnons pas à la Commission les ressources voulues pour mener une campagne d'éducation et de sensibilisation. Comme nous le savons, la Loi canadienne sur les droits de la personne s'applique dans les réserves aux questions ne relevant pas de la Loi sur les Indiens. Il y aurait donc là l'occasion de faire un travail utile.
    Ma deuxième remarque rapide concerne les recours. Cela ne relève pas de notre mandat mais beaucoup de témoins ont exprimé la crainte de ne pas avoir suffisamment de ressources pour offrir des recours si des plaintes sont formulées.
    J'aborde maintenant la Loi sur les Indiens. La raison pour laquelle je veux en parler est que ce n'était pas seulement les témoins, ce sont aussi certains experts de ce domaine qui ont exprimé des préoccupations au sujet de la Loi sur les Indiens, notamment l'Association du Barreau. À la huitième page de son mémoire, que je ne citerai pas, elle dit que le juge Muldoon de la Cour fédérale du Canada s'était interrogé sur le fait que l'abrogation de l'article 67 pourrait avoir de profondes répercussions sur la Loi sur les Indiens.
    La deuxième chose que je veux porter à votre attention est la remarque de l'Association des femmes autochtones du Canada sur l'accès à la justice et les traditions juridiques indigènes — c'est à la 11e page de son mémoire en anglais. Elle y cite en fait le propre rapport de la Commission où celle-ci dit être favorable à l'abrogation de l'article 67 mais en ajoutant ceci : « Toutefois, la Commission privilégierait que le gouvernement adopte une approche proactive en vue de prévenir la discrimination sans attendre le dépôt de plaintes ». Et ensuite :
Par conséquent, la Commission presse le gouvernement de procéder avec elle, de concert avec les Premières nations et les autres organismes concernés, à l'examen des dispositions de la Loi sur les Indiens et des politiques et programmes applicables afin de veiller à ce qu'ils n'entrent pas en conflit avec la Loi canadienne sur les droits de la personne et les autres règles pertinentes de droit interne ou de droit international relatives à ces droits.
     Bien qu'on ne parle pas ici nécessairement du démantèlement de la Loi sur les Indiens, on dit qu'il y a de sérieux problèmes avec cette Loi. Je pense que suffisamment de préoccupations ont été exprimées au sujet de répercussions ponctuelles de la Loi sur les Indiens... Bon nombre de personnes ont dit qu'une révision beaucoup plus exhaustive s'impose.
     Cela étant, pourriez-vous faire un commentaire sur votre commentaire?

  (1240)  

    Merci beaucoup.
    Le commissaire Langtry, qui est le champion de ce portefeuille, va vous répondre.
    Si j'ai bien compris, oui, nous sommes conscients de certaines de ces préoccupations concernant le démantèlement global de la Loi ou de certaines de ses dispositions. Je sais d'où viennent certaines de ces préoccupations et nous nous sommes demandés comment on pourrait équilibrer... ou comment les dispositions de la Loi sur les Indiens qui pourraient susciter une controverse... Je vais prendre comme exemple le fait que, même si le projet de loi C-31 rétablissait... comme vous le savez, aux enfants des enfants et ce genre de chose en termes de rétablissement, y aurait-il alors motif de plainte pour discrimination?
     Je peux dire que nous avons commencé sur le plan interne le processus de révision de la Loi sur les Indiens simplement pour nous donner une certaine compréhension des motifs de plaintes éventuelles. Nous avons aussi discuté de ces questions avec l'AFAC, ainsi que des projets qu'elle envisage de lancer.
     Je n'ai certainement aucun moyen de dire si le gouvernement a procédé à un examen exhaustif car, bien sûr, nous n'avons rien à voir avec ce processus. Mais cela soulève la question des ressources et je suis tout à fait d'accord quand vous dites que, pour pouvoir faire ce genre d'examen exhaustif, nous... Et la manière dont cela pourrait s'appliquer est l'une des questions reliées au besoin de faire l'équilibrage de la disposition d'interprétation.
    Je peux dire que nous faisons déjà ça. Il y a eu des exemples où la Loi sur les Indiens ne s'applique pas et dans lesquels le Tribunal a équilibré les droits et intérêts collectifs et individuels concurrents.
    Me reste-t-il du temps?
    Non.
    Je donne la parole à M. Bruinooge.
     Merci, monsieur le président.
    Je reste sur le même sujet. Pensez-vous qu'il serait bon d'effectuer les consultations avant d'abroger l'article 67, afin d'obtenir une bonne idée du nombre de causes qui pourraient surgir, étant donné que vous ou quelqu'un d'autre pourrait aller dans les collectivités et rencontrer les personnes dont les droits pourraient actuellement être transgressés? Par contre, les gens allant dans ces collectivités rencontreraient ces personnes et leur donneraient la possibilité de s'exprimer mais cela risquerait de les exposer à d'autres infractions sur le plan des droits humains, étant bien entendu que l'abrogation risquerait de ne jamais intervenir dans le contexte minoritaire.
    M. Langtry, croyez-vous que ce serait possible? Vous serait-il difficile d'aller dans une communauté avant l'abrogation pour demander aux gens s'ils estiment que leurs droits humains sont transgressés?

  (1245)  

    Comme vous le savez, nous avons lancé un programme national autochtone, et c'était avant le dépôt du projet de loi C-44. Il avait fallu longtemps pour l'élaborer car nous savions que nous n'avons pas et n'avions pas de relations avec beaucoup de premières nations à cause de l'existence de l'article 67. Nous avons formulé un programme ou une stratégie d'extension auprès des autochtones de façon à engager ce dialogue, d'un point de vue éducatif... pour décrire le travail de la Commission ainsi que pour apprendre auprès des premières nations.
    Quand la présidente de la Commission a dit que ce programme est encore modeste, c'est seulement parce que nous n'avons pas de ressources supplémentaires mais nous avons l'intention de le continuer, de le développer, d'agir en collaboration avec un certain nombre de collectivités, que le projet de loi C-44 soit adopté ou non. Nous voulons donc poursuivre cet effort d'éducation et, comme vous le savez, l'article 67 n'est pas un obstacle absolu car il nous arrive déjà de recevoir certaines plaintes des réserves.
    Merci.
    Pour ajouter un mot à ce sujet — et je vous remercie de cette question — vous soulevez un problème important qui ne disparaîtra pas, quel que soit le scénario. Ce que vous envisagez, c'est que nous allions sur place discuter des répercussions en demandant aux gens de nous dire ce qui les préoccupe et, si ça se fait avant l'abrogation, s'ils seraient prêts à formuler des plaintes ou s'ils craindraient des représailles. Je pense que c'est à peu près le scénario que vous avez évoqué, n'est-ce pas?
    Il s'agit là d'un élément clé de la gestion des conflits dans toute société et, certainement, dans les collectivités autochtones. La réalité est que la grande majorité des gens ne se plaignent pas, pour maintes raisons. Donc, quand on essaye de prévoir le nombre de plaintes qu'il pourrait y avoir, c'est seulement la pointe de l'iceberg, et c'est pourquoi nous parlons d'éducation, de sensibilisation et de prévention. Cette question d'oser se plaindre ou non est cruciale
    Voici mon hypothèse : a) abroger la loi; et b) prévoir une période de transition assez longue pour que nous puissions créer un environnement de confiance et de confidentialité pour élaborer des mécanismes et des systèmes de gestion des conflits qui non seulement protégeront les gens qui oseront se plaindre mais qui établiront un environnement au sein duquel tout le monde pourra exprimer ses préoccupations en ayant l'assurance qu'elles seront traitées de manière respectueuse et responsable.
     C'est évidemment la solution qui semble la plus raisonnable. Le gouvernement essaye depuis 30 ans d'abroger l'article 67 mais, malheureusement, il n'a pas encore réussi. Dans le contexte actuel d'un gouvernement minoritaire, il est toujours difficile d'adopter un projet comme celui-ci. Le gouvernement souhaite clairement l'abrogation immédiate de l'article 67.
    Combien de temps me reste-t-il?
    Il vous reste sept, six, cinq secondes.
    Je vais mettre fin à la période des questions car nous avons d'autres questions à régler.
     Je remercie les témoins de nous avoir fourni des informations extrêmement utiles. Nous sommes très heureux d'avoir pu vous interroger. Merci.
    Nous avons maintenant... Oui?
    Une dernière précision. J'attendais que les témoins aient terminé afin de ne pas les interrompre mais je voudrais corriger quelque chose.
    Mme Neville a dit au début que j'ai peut-être induit le comité en erreur. Je voudrais citer cet extrait de la séance du jeudi 5 juin 2007 du Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord.
    M. Russell a dit :
Fondamentalement, l'objectif est d'adopter un projet de loi répondant aux besoins et désirs que nous essayons d'énoncer : la protection des droits humains. La période de transition est une question mineure, à mon avis, car je crois que le projet de loi est foncièrement vicié du point de vue de son approche et de son processus.
    J'ai dit ensuite :
Dans ce cas, passons tout de suite au vote.
    Ce à quoi M. Russell a répondu, et c'est le passage pertinent, monsieur le président :
Je voterai, ne vous inquiétez pas. Je voterai contre ce projet de loi... c'est absolument certain.

  (1250)  

    Merci.
    Monsieur le président, s'il veut me citer, il devrait me citer correctement car j'avais dit « contre ce projet de loi sous sa forme actuelle ».
    N'est-ce pas, monsieur Storseth?
    Vous avez probablement raison.
    Je n'ai pas probablement raison, j'ai absolument raison, à 100 p. 100.
     Nous allons maintenant revenir à nos travaux.
     Nous avons une motion de Mme Neville :
Que le Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord demande aux représentants de l'Assemblée des Premières Nations (APN) de comparaître de nouveau devant lui pour commenter les délibérations et les présentations faites au Comité concernant le projet de loi C-44.
    Le président souhaite apporter quelques précisions à ce sujet. Le président tient à s'assurer que les membres du public ont des chances égales de s'exprimer devant le comité. À mon avis, si le président donne à l'APN la possibilité de comparaître une deuxième fois, il devra évidemment offrir la même possibilité aux autres témoins. De ce fait, le président croit qu'il ne faudrait pas donner une deuxième possibilité de comparution aux témoins qui ont déjà comparu.
    Les témoins qui viennent juste de comparaître étaient des représentants du gouvernement et non pas ce que j'appelle des membres du public.
    Voilà l'opinion du président mais on peut la contester.
    Venez-vous de rendre une décision, monsieur le président? Dans ce cas, je la conteste.
    C'est certainement votre droit. Le débat est ouvert.
    Monsieur le président, je pense que votre décision est la bonne. Nous avons un certain nombre de témoins...
    Un rappel au règlement.
    Un instant, s'il vous plaît, monsieur Bruinooge.
    Je précise que la motion est recevable. Voulez-vous discuter de la motion? Je ne parle pas ici de l'opinion du président.
    Allez-y, madame Jennings.
    Au sujet du rappel au règlement, je crois comprendre que vous venez de décider que cette motion n'est pas recevable.
    En fait, j'exprimais seulement mon opinion.
    Nous allons ouvrir le débat sur la motion qui a été présentée.
     Vous avez la parole, madame Crowder.
    J'aimerais proposer un amendement pour ajouter l'Association des femmes autochtones du Canada après l'Assemblée des Premières Nations.
    Continuez, monsieur Bruinooge.
    Il me semble qu'une décision a été rendue et je pense qu'il suffit maintenant que le comité la conteste.
    C'était précisément ce qui m'inquiétait. C'est juste ce que disait madame Neuville. Dans ce cas, le président a décidé de ne pas convoquer de nouveaux témoins. On peut contester cette décision.
    Je conteste la décision du président.
    La décision du président est-elle confirmée?
    (La décision du président est renversée.)
    Y a-t-il d'autres interventions sur la motion qui a été présentée, avant de passer au vote?
    Je crois qu'un amendement a été proposé.
    Nous parlons de la motion qui a été présentée.
    Dans ce cas, je veux donner une brève explication, monsieur le président.
    Nous avons invité les représentants du gouvernement à revenir. L'Assemblée des Premières Nations et, à mon avis, l'AFAC seront beaucoup plus touchés par ce projet que n'importe quel autre témoin, ce qui est un facteur important et, en réalité, essentiel. Si l'on vérifie les témoignages antérieurs, on verra que nous avions pris l'engagement, lors de leur première comparution, de les faire revenir une fois que nous aurions entendu tous les témoins.
    Je tiens également à dire au nom de mon propre parti, monsieur le président, que nous n'avons pas l'intention de bloquer ce projet de loi qui est important. Nous croyons qu'il est nécessaire d'entendre tous les témoins pertinents afin que le projet de loi C-31 n'ait pas de conséquences imprévues. Nous tenons cependant aussi à aller de l'avant et à agir de bonne foi en proposant cet amendement.

  (1255)  

    Cette motion. D'accord.
    M. Bruinooge, au sujet de la motion.
    Comme j'avais commencé à le dire, nous avons entendu un grand nombre de témoins. Si nous en faisons revenir certains, ce sera un mauvais précédent. Nous avons entendu beaucoup d'opinions différentes au sujet du projet de loi et nous avons toutes les informations nécessaires pour entreprendre l'étude article par article afin de commencer à faire ce travail très important d'extension des droits humains aux peuples des premières nations.
    J'approuve donc votre décision mais, en même temps, j'espère que l'opposition est maintenant prête à passer à l'étude article par article.
    Je crois que l'Assemblée des Premières Nations et l'AFAC ont également exprimé des positions très valides devant le comité. L'APN a déposé un document très complet qui énonçait clairement sa position, et je crois même que c'était l'un des mémoires les plus volumineux que nous ayons reçus.
    À mon avis, nous avons maintenant toutes les informations dont nous avions besoin et je crois que le moment est venu d'aller de l'avant.
    Très bien. Y a-t-il d'autres interventions?
    Monsieur Storseth, voulez-vous ajouter quelque chose?
    Je voudrais poser une question. Nous parlons bien de l'amendement?
    Non, nous parlons de la motion telle qu'elle a été présentée. Êtes-vous prêts à passer au vote?
    Madame Crowder, voulez-vous proposer un amendement?
    Je pensais l'avoir déjà fait.
    Nous n'en avons pas encore discuté.
    Je propose d'ajouter « l'Association des femmes autochtones du Canada » après « l'Assemblée des Premières Nations ».
    Quelqu'un veut-il intervenir au sujet de l'amendement?
    Qui est en faveur de l'amendement? Qui s'oppose à l'amendement —
    Un rappel au règlement, monsieur le président. Je veux faire un rappel au règlement avant le vote.
    C'est juste une précision...
    Le président n'accepte pas le rappel au règlement car le vote a déjà commencé.
    Qui s'oppose à l'amendement?
    (L'amendement est rejeté.)
    Le président : Passons maintenant à la motion modifiée.
    Qui est pour? Qui est contre?
    Le président ne voit que deux votes de ce côté.
    (La motion modifiée est adoptée.)
    Le président : Le comité souhaite-t-il tenir une réunion mardi de la semaine prochaine? Très bien.
    La séance est levée.