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PROC Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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38e LÉGISLATURE, 1re SESSION

Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le mardi 22 février 2005




Á 1105
V         Le président (L'hon. Don Boudria (Glengarry—Prescott—Russell, Lib.))
V         M. David McLaughlin (sous-ministre, Commission sur la démocratie législative, Gouvernement du Nouveau-Brunswick)

Á 1110
V         Le président
V         M. Claude Béland (Mouvement Démocratie et Citoyenneté du Québec, à titre personnel)
V         M. Dale Johnston (Wetaskiwin, PCC)
V         M. Michel Guimond (Montmorency—Charlevoix—Haute-Côte-Nord, BQ)

Á 1115
V         Le président
V         L'hon. Ed Broadbent (Ottawa-Centre, NPD)
V         Le président
V         L'hon. Ed Broadbent
V         Le président
V         L'hon. Ed Broadbent
V         Le président
V         Le président
V         M. Claude Béland

Á 1125
V         Le président
V         M. Scott Reid (Lanark—Frontenac—Lennox and Addington, PCC)

Á 1130
V         M. David McLaughlin
V         M. Scott Reid
V         M. David McLaughlin
V         M. Scott Reid
V         M. David McLaughlin
V         M. Scott Reid
V         M. David McLaughlin
V         M. Scott Reid
V         M. David McLaughlin
V         M. Scott Reid
V         M. David McLaughlin
V         M. Scott Reid
V         M. David McLaughlin

Á 1135
V         Le président
V         Mme Françoise Boivin (Gatineau, Lib.)
V         M. Claude Béland
V         Mme Françoise Boivin
V         M. Claude Béland

Á 1140
V         Le président
V         M. Michel Guimond
V         M. Claude Béland
V         M. Michel Guimond

Á 1145
V         M. Claude Béland
V         Le président
V         M. Mario Silva (Davenport, Lib.)
V         M. David McLaughlin

Á 1150
V         M. Mario Silva
V         M. David McLaughlin
V         M. Mario Silva
V         M. David McLaughlin
V         Le président
V         L'hon. Ed Broadbent
V         M. David McLaughlin
V         L'hon. Ed Broadbent
V         M. David McLaughlin
V         L'hon. Ed Broadbent
V         M. David McLaughlin
V         L'hon. Ed Broadbent
V         M. David McLaughlin
V         L'hon. Ed Broadbent

Á 1155
V         M. David McLaughlin
V         L'hon. Ed Broadbent
V         Le président
V         Mme Pauline Picard (Drummond, BQ)
V         M. Claude Béland
V         Mme Pauline Picard
V         M. Claude Béland

 1200
V         Mme Pauline Picard
V         Le président
V         M. Dale Johnston
V         M. Claude Béland
V         Le président
V         M. Claude Béland
V         Le président
V         M. David McLaughlin

 1205
V         Le président
V         M. David McLaughlin
V         Le président
V         M. Claude Béland
V         Le président
V         M. Claude Béland
V         Le président
V         M. Michel Guimond

 1210
V         M. Claude Béland
V         M. Michel Guimond
V         M. Claude Béland
V         Le président
V         L'hon. Ed Broadbent
V         M. Claude Béland

 1215
V         L'hon. Ed Broadbent
V         M. Claude Béland
V         L'hon. Ed Broadbent
V         M. Claude Béland
V         L'hon. Ed Broadbent
V         M. Claude Béland

 1220
V         Le président
V         Mme Françoise Boivin
V         M. Claude Béland
V         Mme Françoise Boivin
V         M. Claude Béland
V         Mme Françoise Boivin
V         Le président
V         M. Mario Silva
V         M. Claude Béland
V         M. Mario Silva
V         M. Claude Béland
V         Le président
V         M. Claude Béland
V         Le président
V         M. Claude Béland

 1225
V         Le président
V         M. Claude Béland
V         Le président
V         M. David McLaughlin
V         Le président
V         M. David McLaughlin
V         Le président
V         L'hon. Ed Broadbent
V         Le président
V         M. David McLaughlin
V         M. Claude Béland
V         Le président
V         M. Michel Guimond

 1230
V         Le président
V         M. Michel Guimond
V         Le président










CANADA

Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre


NUMÉRO 023 
l
1re SESSION 
l
38e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 22 février 2005

[Enregistrement électronique]

*   *   *

Á  +(1105)  

[Traduction]

+

    Le président (L'hon. Don Boudria (Glengarry—Prescott—Russell, Lib.)): Comme je vois qu'un autre collègue se joint à nous, nous allons maintenant avoir le quorum pour entendre nos témoins de ce matin.

    Je déclare donc la séance ouverte.

[Français]

    Conformément à l'ordre de renvoi du jeudi 25 novembre 2004, nous allons maintenant procéder à une étude sur la réforme électorale.

[Traduction]

    Nous accueillons ce matin M. David McLaughlin, sous-ministre de la Commission sur la démocratie législative.

[Français]

    Nous recevons également, à titre personnel, M. Claude Béland, du Mouvement Démocratie et Citoyenneté du Québec.

    Je voudrais remercier nos deux invités, M. McLaughlin du gouvernement du Nouveau-Brunswick et M. Béland du Québec, d'avoir répondu favorablement à notre invitation.

    Je vous demanderais, à tour de rôle, de faire votre déclaration initiale, après quoi nous allons demander à nos collègues d'élaborer sur divers points tel que bon leur semblera.

    Monsieur McLaughlin, voulez-vous débuter?

[Traduction]

+-

    M. David McLaughlin (sous-ministre, Commission sur la démocratie législative, Gouvernement du Nouveau-Brunswick): Je vous remercie de m'offrir l'occasion de comparaître devant vous aujourd'hui.

    J'aimerais d'abord vous donner un aperçu de la composition et du mandat de la Commission—je vais vous exposer brièvement la question—de même que de la démarche que nous avons suivie pour réaliser notre travail, étant donné son lien plus direct avec le sujet principal de votre ordre de renvoi. C'est ensuite avec plaisir que je répondrai aux questions que vous voudrez bien me poser sur l'un ou l'autre aspect du travail de la Commission, de son rapport final et de ses recommandations.

    Le premier ministre Bernard Lord a créé la Commission sur la démocratie législative en décembre 2003. Elle était composée de huit commissaires—quatre hommes et quatre femmes, quatre anglophones et quatre francophones—nommés par voie de décret en conseil, et elle était présidée par deux d'entre eux. En plus de réaliser un équilibre des sexes et des langues, les commissaires représentaient les différentes régions de la province et possédaient des expériences professionnelles, personnelles et politiques très diversifiées. Ils devaient représenter leur point de vue personnel et non celui d'un groupe, d'un organisme ou d'un parti politique en particulier. La Commission relevait officiellement du premier ministre mais, en réalité, elle a agi de façon autonome et considérait qu'elle devait rendre des comptes à tous les Néo-Brunswickois et Néo-Brunswickoises, ce qu'elle a fait.

    La Commission avait un an, jusqu'au 31 décembre 2004, pour examiner, en vue de formuler des recommandations, trois grands domaines: la réforme électorale, la réforme législative et la réforme démocratique.

    En ce qui a trait à la réforme électorale, la Commission devait recommander le modèle de représentation proportionnelle le mieux adapté au Nouveau-Brunswick. C'est ainsi que le mandat était formulé. Nous devions tenir compte de quatre paramètres dans nos recommandations sur un nouveau système électoral: « une représentation plus juste, une plus grande égalité des votes, une assemblée législative et un gouvernement efficaces, ainsi qu'un rôle soutenu pour les députés directement élus représentant des régions géographiques déterminées », pour reprendre le libellé de nos attributions. Nous devions également recommander les prochaines étapes de la mise en oeuvre d'un nouveau système électoral de représentation proportionnelle.

    Le mandat de la Commission concernant la réforme électorale comportait trois autres aspects; il fallait recommander un processus et une loi pour la délimitation des circonscriptions électorales, en plus de proposer le nombre de députés représentés à l'Assemblée législative; ensuite, proposer une date fixe pour les élections dans la province; et, enfin, faire des recommandations pour stimuler la participation au scrutin et au processus électoral, surtout chez les jeunes de la province.

    Pour ce qui est de la réforme législative, la Commission était officiellement tenue de formuler des recommandations sur deux principales questions: premièrement, améliorer le rôle des députés et de l'Assemblée législative pour accroître leur pertinence et leur responsabilisation; et, deuxièmement, proposer une nouvelle méthode de nomination au sein des organismes, conseils et commissions du gouvernement afin d'accroître la transparence et la responsabilisation du processus.

    Quant à la réforme démocratique, la Commission était tenue d'élaborer une loi référendaire pour le Nouveau-Brunswick et de faire des recommandations destinées à accroître l'engagement et la participation des citoyens à l'égard des décisions gouvernementales et législatives.

    Avec ce mandat, il s'agissait de la plus vaste étude sur le renouvellement démocratique jamais réalisée au Nouveau-Brunswick. En fait, c'est une des études les plus importantes jamais menées au Canada. Voilà pourquoi une commission de cette nature a été créée.

    Le rapport final et les recommandations de la Commission, un document de plus de 200 pages, a été présenté au premier ministre dans les délais prévus et sans dépasser le budget. Il a été déposé par le premier ministre à l'Assemblée législative au début janvier, et alors rendu public.

    Voilà pour notre mandat; je vais maintenant vous parler brièvement de notre démarche.

    Compte tenu de l'ampleur de notre mandat, nous avons dû établir non pas un seul processus mais un ensemble de processus pour la recherche, la consultation et la participation des citoyens, des organismes et des spécialistes. Nous devions non seulement recueillir les points de vue des Néo-Brunswickois et Néo-Brunswickoises, conformément à notre mandat, mais aussi faire nos propres recherches et études pour nous aider à déterminer les grands enjeux et les grandes questions que nous voulions examiner en vue de formuler des conclusions et des recommandations.

    Pour que notre rapport et nos recommandations reçoivent un accueil favorable une fois notre mandat terminé, il fallait attacher une grande importance à la façon d'exécuter ce mandat. La légitimité du processus comptait. C'est pourquoi nous avons d'abord établi quatre principes clés pour guider notre travail et intéresser le plus grand nombre possible de Néo-Brunswickois et Néo-Brunswickoises. Ces principes sont l'ouverture, la participation, le partenariat et la recherche.

    La Commission a assuré une grande accessibilité à ses réunions en affichant son programme et les exposés sur son site Web. Elle a produit et diffusé des documents de consultation explicites. Elle a facilité la participation en organisant différentes activités permettant aux citoyens de donner leurs points de vue. Elle a établi des partenariats officiels avec des groupes de l'extérieur afin de mettre à contribution leurs membres et leur expertise et ainsi élargir sa portée. Enfin, elle a entrepris de nouvelles recherches indépendantes afin de se doter d'une base d'analyse solide pour ses recommandations.

    La section intitulée « Comment nous avons fait notre travail », dans la préface du rapport final, décrit en détail les mesures que nous avons prises ainsi que les activités de consultation et d'information que nous avons organisées.

    Le travail de la Commission comportait trois grandes phases qui peuvent être d'intérêt pour vous: pour la première, celle de la recherche, douze documents de recherche indépendants ont été produits par des universitaires de renom au Nouveau-Brunswick et au Canada. Ils seront publiés dans un ouvrage complémentaire plus tard cette année. Nous avons organisé des séances d'information avec ces universitaires et d'autres experts sous forme de conférences et de tables rondes. Pour parfaire leurs connaissances, les commissaires ont entendu des exposés faits par le personnel et ont discuté entre eux.

    Pour la deuxième phase, celle de la consultation générale, des audiences publiques ont eu lieu au printemps et à l'automne et on a organisé des tables rondes avec des dirigeants communautaires et des forums ciblant les jeunes, les étudiants, les femmes et les communautés acadiennes et francophones. Des documents de consultation, des fiches d'information et des questionnaires ont été produits et distribués en ligne.

    Pendant la troisième phase, celle des délibérations, les commissaires ont examiné tous les points de vue qui leur avaient été présentés. Pour assurer la pleine transparence de notre démarche et stimuler une plus grande discussion et rétroaction, nous avons publié, l'automne dernier, un rapport d'étape intitulé « Options », qui expliquait certaines des orientations que nous envisagions.

Á  +-(1110)  

    Le rapport final de la Commission marque, à mon avis, une étape dans le renouvellement démocratique du Nouveau-Brunswick. Son caractère exhaustif, la recherche originale qu'il présente et les recommandations percutantes qui y sont formulées en font un document unique qui pourrait avoir un effet durable sur la vie démocratique de notre province.

    Permettez-moi de conclure en vous donnant un avant-goût de sa portée et de son ampleur.

    Pour compter le votes des Néo-Brunswickois et Néo-Brunswickoises, nous avons proposé d'adopter un nouveau système électoral régional de représentation proportionnelle appelée « système proportionnel mixte du Nouveau-Brunswick », selon lequel les deux tiers des députés à l'Assemblée législative seraient élus comme ils le sont sous le système majoritaire uninominal en vigueur, et l'autre tiers selon les listes de parti établies pour les quatre régions. Nous avons également recommandé de tenir un référendum provincial, au plus tard à la prochaine élection, pour offrir aux Néo-Brunswickois et Néo-Brunswickoises l'occasion de se prononcer sur un tel changement.

    La Commission a également recommandé que toutes les élections se tiennent dorénavant le troisième lundi du mois d'octobre, tous les quatre ans; elle a aussi recommandé une nouvelle loi sur la représentation et la délimitation des circonscriptions électorales, de même qu'une nouvelle délimitation des circonscriptions après chaque recensement décennal; elle a aussi recommandé une nouvelle commission électorale indépendante, l'inscription des électeurs en ligne et d'autres mesures pour faciliter la participation électorale.

    Pour améliorer le fonctionnement du système pour les Néo-Brunswickois et Néo-Brunswickoises, nous avons recommandé de rééquilibrer les pouvoirs de manière à réduire l'autorité de l'exécutif et d'augmenter celle de l'Assemblée législative, grâce à de nouvelles mesures destinées à accroître l'autonomie des députés, leur liberté par rapport à la discipline de parti, leurs compétences, leur efficacité et leur responsabilisation. En plus d'un nouveau processus indépendant fondé sur le mérite pour nommer les Néo-Brunswickois et Néo-Brunswickoises aux organismes, conseils et commissions, nous avons recommandé de nouvelles règles importantes pour régir le financement et la conduite des courses à l'investiture et à la direction des partis, de même que l'établissement de fondations d'orientation de parti.

    Pour faire entendre la voix de tout le monde au Nouveau-Brunswick, surtout celle des jeunes et de femmes, nous avons recommandé de créer un programme d'éducation civique obligatoire pour les élèves de la maternelle à la deuxième année, pour une sensibilisation et une participation plus grandes au processus électoral dans les écoles, en organisant des élections simulées, par exemple, et d'augmenter le nombre de femmes élues à l'Assemblée législative en offrant des incitatifs financiers aux partis pour qu'ils nomment un nombre accru de femmes.

    Enfin, nous avons proposé une loi référendaire pour la tenue de référendums exécutoires à l'échelle du Nouveau-Brunswick sur une base exceptionnelle, ainsi qu'un éventail de mesures destinées à accroître l'engagement des citoyens à l'égard de la démocratie participative et du processus décisionnel.

    Voilà un résumé du travail de la Commission. Je répondrai avec plaisir aux questions que vous voudrez bien me poser.

    Merci.

+-

    Le président: Merci beaucoup, monsieur McLaughlin, pour cet exposé.

[Français]

    C'est maintenant à M. Claude Béland, du Mouvement Démocratie et Citoyenneté du Québec, comme je l'ai dit tout à l'heure. Monsieur Béland, encore une fois, bienvenue. Avez-vous une déclaration à nous faire avant que nous ne passions aux questions?

+-

    M. Claude Béland (Mouvement Démocratie et Citoyenneté du Québec, à titre personnel): Oui, j'ai une brève déclaration à faire.

    Je pense que ce qui me vaut le privilège d'être devant vous aujourd'hui est que j'ai eu un autre privilège, celui de présider les États généraux sur la réforme des institutions démocratiques au Québec en 2003. C'était une démarche unique. En fait, c'était la première fois que des citoyens, un groupe de neuf citoyens, avaient l'occasion de consulter la population, avec l'aide du gouvernement puisque celui-ci avait financé toute l'opération, ce qui n'était pas à dédaigner. Le gouvernement tenait...

[Traduction]

+-

    M. Dale Johnston (Wetaskiwin, PCC): Je regrette de vous interrompre, mais le système d'interprétation en anglais ne fonctionne pas.

[Français]

+-

    M. Michel Guimond (Montmorency—Charlevoix—Haute-Côte-Nord, BQ): Moi, pour améliorer mes connaissances linguistiques, j'écoute le parquet. Quand on parle français, j'entends le français; quand on parle anglais, j'entends l'anglais. Cela nous permet d'améliorer nos connaissances de l'autre langue.

Á  +-(1115)  

+-

    Le président: Merci. Dans mon cas, je n'ai jamais utilisé cet équipement. Je n'y connais donc pas grand-chose.

[Traduction]

    De l'anglais vers le français, le système fonctionne, mais dans l'autre sens, il ne fonctionne pas.

[Français]

    Monsieur Broadbent.

+-

    L'hon. Ed Broadbent (Ottawa-Centre, NPD): Monsieur le président, nous pouvons continuer car nous avons un texte en anglais.

+-

    Le président: Cela est contraire à nos règles. Celles-ci sont claires. Pour qu'un comité soit dûment constitué, il faut qu'il y ait traduction simultanée. Je regrette, mais je ne peux pas accepter une telle suggestion. Il faudra que nous attendions que le système fonctionne adéquatement. Je suis sûr que nos collègues veulent que le système fonctionne dans les deux langues. De toute façon, même après la déclaration de quatre ou cinq minutes, nous aurons le même problème pendant la période de questions qui suivra. D'une manière ou d'une autre, il faut que nous attendions.

[Traduction]

    Mesdames, messieurs, on pourrait peut-être suspendre la séance. Bon nombre d'entre nous pourraient s'entretenir de façon informelle avec MM. McLaughlin ou Béland; il serait peut-être préférable d'interrompre nos travaux. Au moins, on pourrait accomplir quelque chose, car actuellement il n'y a rien qu'on puisse faire. Le technicien doit...

+-

    L'hon. Ed Broadbent: On pourrait peut-être commencer la discussion sur la Commission.

+-

    Le président: Nous avons déjà entendu l'exposé de M. McLaughlin.

+-

    L'hon. Ed Broadbent: Nous pourrions lui poser des questions.

[Français]

+-

    Le président: Qu'arrive-t-il lorsqu'un de nos collègues pose une question en français? C'est la même chose. Je ne voudrais pas qu'on soulève une question de privilège dans 15 minutes.

    Normalement, on ne siège pas si le système de traduction simultanée ne fonctionne pas. Nous allons donc suspendre nos travaux pendant quelques minutes, jusqu'au rappel. Je m'excuse auprès de nos deux témoins et, bien sûr, auprès de tous mes collègues aussi.

Á  +-(1119)  


Á  +-(1122)  

[Traduction]

+-

    Le président: Nous reprenons nos travaux.

    Apparemment, d'après le technicien, le système fonctionne. Je m'excuse auprès de mes collègues de cette défectuosité.

[Français]

    Je m'excuse surtout auprès de M. Béland, puisque nous avons interrompu sa présentation.

    Vous pouvez continuer.

+-

    M. Claude Béland: Monsieur le président, je pense que ce qui me vaut l'honneur d'avoir été invité à venir vous rencontrer est le fait que j'ai eu un autre privilège, celui de présider les États généraux sur la réforme des institutions démocratiques en 2003 au Québec.

    Je crois que c'était une démarche unique, puisqu'il s'agissait de citoyens qui consultaient l'ensemble des citoyens, ou au moins ceux qui voulaient se faire entendre. Je dis qu'il y avait « des » citoyens qui consultaient. En effet, le ministre qui a eu cette idée de consultation m'a désigné comme président et m'a dit de choisir les membres du comité directeur, les neuf personnes qui ont visité le Québec et qui ont entendu la population. J'avais donc choisi M. Shapiro, qui était à l'époque recteur de l'Université McGill, des jeunes, des femmes. Nous avons fait un comité qui représentait le mieux possible, d'une façon non partisane, la population du Québec.

    Nous avons visité 20 villes du Québec et tenu 27 séances publiques, convoquées par la voie des journaux et de la poste. Postes Canada nous avait aidés en distribuant 4 millions de cartons d'invitation aux citoyens pour qu'ils viennent nous dire ce qu'ils pensaient des institutions démocratiques politiques du Québec. Nous avons reçu 237 mémoires de corps constitués. Évidemment, nous ne demandions pas de mémoires aux individus. Il y a 1 000 personnes qui ont assisté aux états généraux. Finalement, tout cela a abouti à un rapport.

    Ce qui nous a intéressés comme citoyens et pourrait vous intéresser aussi est que nous avons pu constater, d'abord, l'état d'esprit des électeurs. J'apporterais une nuance. J'ai fait carrière dans le domaine des institutions sous contrôle démocratique, dans les coopératives, les mutuelles, etc. Au Québec, évidemment, les membres de syndicats et de coopératives sont nombreux. Les gens qui avaient eu cette expérience des associations coopératives ou démocratiques et qui venaient nous voir nous disaient toujours qu'il y avait une différence incroyable entre leurs organisations sous contrôle démocratique et les institutions politiques. Ils affirmaient que, chez eux, c'étaient eux qui adoptaient les règlements généraux. Ils donnaient un mandat à leurs élus, alors qu'ils avaient l'impression qu'il n'en allait pas de même quand ils faisaient face aux institutions politiques. Ils disaient qu'en somme, tous les quatre ou cinq ans, ils donnaient du pouvoir--pas un mandat, mais du pouvoir--aux élus et qu'ils ne pouvaient pas faire grand-chose entre-temps.

    Une partie de la population a eu cette réaction: elle réclamait une réforme des institutions démocratiques, pas seulement du mode de scrutin.

    L'autre partie de la population avait des raisons très différentes, comme la mondialisation. Elle disait que les décisions allaient maintenant si vite qu'on ne pouvait pas laisser le gouvernement prendre des décisions soudaines pendant quatre ou cinq ans sans que la population ait la chance d'intervenir autrement qu'en descendant dans la rue ou en utilisant des moyens qui ne sont pas institutionnels.  

    D'autres nous disaient que c'était la montée de la conscience individuelle, que le collectif y perdait beaucoup et donc que la démocratie en souffrait. Il y avait un grand désenchantement. Pour nous, le plus difficile a été de voir que les gens croyaient si peu à la démocratie.

    Je vous raconte simplement un incident. Je lisais un petit boniment en début de séance et je terminais par une déclaration de M. Abraham Lincoln, qui disait que la démocratie est le gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple. Et dans bien des régions, les gens riaient dans la salle. Un soir, il y a même quelqu'un qui s'est levé en disant: « Monsieur Béland, je ne pensais pas que vous étiez un humoriste. » C'est vous dire combien les gens perçoivent mal la démocratie. Il y a un certain cynisme à l'égard de la démocratie.

    D'autres sont venus nous dire qu'il ne fallait rien changer. Nous n'avons pas retenu cette opinion car nous avons compris, grâce aux représentations des gens, qu'on nous demandait quatre choses, et principalement par rapport au mode de scrutin, puisque c'est cela qui vous intéresse.

    D'abord, les gens disaient qu'il fallait corriger les distorsions, qu'il fallait faire en sorte que chaque vote des électeurs compte dans le résultat global et final, ce qui n'est pas le cas actuellement au Québec. Ensuite, ils disaient qu'on devait maintenir le lien entre l'électeur et le député. Ils y tenaient. Ils ne voulaient donc pas d'une proportionnelle mur à mur.

    Troisièmement, ils disaient qu'il fallait favoriser le pluralisme politique et qu'on devait permettre l'entrée de tiers partis à l'Assemblée nationale du Québec et à la Chambre des communes du Canada.

    Finalement, ils disaient qu'il fallait assurer une juste et équitable représentativité des femmes, des jeunes et des communautés ethnoculturelles à l'Assemblée nationale du Québec.

Á  +-(1125)  

    Nous avons fait des recommandations au gouvernement et nous avons suggéré des mesures. Nous avons fait 14 recommandations, qui n'étaient pas toutes relatives au mode de scrutin, mais nous avons proposé, comme mode de scrutin, une représentation proportionnelle régionale.

    Le gouvernement du Québec n'a pas donné suite à cette recommandation. Vous savez, je pense, ce que le gouvernement du Québec a proposé, mais ce n'est pas à moi de vous l'expliquer, n'étant pas un représentant du gouvernement. Nous avions aussi proposé, en deuxième lieu, un système majoritaire comme maintenant, avec des mesures compensatoires, ce que le gouvernement du Québec propose actuellement.

    Voilà, monsieur le président, ce que je voulais vous dire.

+-

    Le président: Merci beaucoup, monsieur Béland.

    Nous allons maintenant passer aux questions de mes collègues.

    Monsieur Reid, c'est vous qui êtes le premier.

+-

    M. Scott Reid (Lanark—Frontenac—Lennox and Addington, PCC): Merci, monsieur le président.

[Traduction]

    Mes premières questions s'adressent à M. McLaughlin.

    Je n'ai malheureusement que le sommaire. J'aurais peut-être pu obtenir les réponses à mes questions si j'avais eu le document complet à ma disposition. Je ne vous fais pas de reproche. Je m'en veux de ne pas avoir consulté au préalable votre site Web.

    Cela étant dit, la recommandation 3 propose, et je cite :

Que les électeurs et électrices des quatre districts régionaux plurinominauxélisent cinq députés ou députées à partir de listes de parti fermées sur la basedu nombre de voix que chaque parti reçoit dans la région.

    Et à la recommandation 7, on dit :

Que les sièges issus du scrutin de représentation proportionnelle de listesoient répartis sur une base régionale, selon la méthode électorale d'Hondt,de manière à corriger partiellement la disproportionnalité propre auxélections axées sur des circonscriptions uninominales.

    Pouvez-vous expliquer ce que vous entendez par là?

Á  +-(1130)  

+-

    M. David McLaughlin: D'après le modèle de base du système de représentation proportionnelle mixte, deux tiers des députés sont élus selon le système uninominal majoritaire à un tour qu'on utilise actuellement. Notre assemblée législative, par exemple, compte à l'heure actuelle 55 députés. Aux fins de la discussion et de l'exercice, nous allons augmenter le nombre à 56 pour faciliter le calcul. Donc, le deux tiers des 56 députés sont élus selon le système uninominal majoritaire à un tour. Le nombre de circonscriptions passe ainsi à 36 et couvrent géographiquement l'ensemble de la province.

    Il y a quatre régions : une au nord, une au centre, une au sud-est et une au sud. Ces quatre régions auraient chacune cinq députés élus à partir de listes. Ils seraient choisis par leur parti à même la liste que le parti a établi après divers processus de mises en candidature. La proportionnalité serait calculée dans la région.

    Aux fins de la discussion—et nous présentons divers modèles dans le rapport— supposons qu'un parti a droit à huit sièges dans une région donnée. S'il a déjà élu huit députés dans des circonscriptions uninominales, il n'aurait pas le droit de choisir de députés à partir de listes pour corriger la disproportionnalité, car il n'y a rien à corriger dans ce cas-là. Toutefois, si le parti avait droit à six députés dans une région, mais qu'il n'en élisait que trois, il en désignerait alors trois dans cette région, les trois premiers inscrits sur sa liste de parti.

    Je le répète, le système vise à corriger la disproportionnalité, mais le calcul se fait sur une base régionale.

+-

    M. Scott Reid: Seulement dans cette région.

+-

    M. David McLaughlin: Seulement dans cette région, c'est juste.

+-

    M. Scott Reid: Une région comprend neuf circonscriptions; elle va essentiellement respecter les mêmes limites.

+-

    M. David McLaughlin: Oui. Encore une fois, pour expliquer comment le système fonctionne, chaque région compte neuf circonscriptions uninominales et cinq députés choisis à partir de listes de parti.

+-

    M. Scott Reid: Vous dites que ce sont des listes de parti fermées. Essentiellement, le parti fournit une liste qui indique ses premier, deuxième et troisième choix de candidats.

+-

    M. David McLaughlin: C'est exact.

+-

    M. Scott Reid: D'après ce que je comprends, il n'y a pas de disposition qui dit que cette personne devrait avoir été candidate. En réalité, c'est plutôt le contraire. Elle n'aurait pas pu être candidate dans une circonscription uninominale

+-

    M. David McLaughlin: Non, car nous avons recommandé d'interdire les candidatures en double.

+-

    M. Scott Reid: C’est intéressant, car j'essayais de voir comment on peut se soustraire à la discipline de parti quand on a recours au système de listes. Ce qui m'est venu à l'esprit—dans le contexte fédéral, bien entendu—, c'est qu'il vaut mieux se présenter candidat dans une circonscription particulière. Cela contourne le danger que les dirigeants du parti réservent les sièges aux candidats les plus dociles ou qui proviennent de leur faction du parti. Il doit y une raison pour laquelle vous avez choisi de ne pas prendre cela en considération et de ne pas l’interdire. Pouvez-vous me dire ce qui a motivé ce choix?

+-

    M. David McLaughlin: Les commissaires se sont fondés sur des valeurs, dans ce cas-ci établies en fonction d’un principe très clair, à savoir que personne ne doit accéder à l’assemblée législative par la porte arrière. Le processus doit être très transparent et très clair. Vous vous présentez dans une circonscription ou vous figurez sur une liste de parti. Vous choisissez. Le processus est très équitable et très transparent.

    Le contraire est parfois mal vu. Celui qui profite de la double candidature peut être défait dans une circonscription, mais choisi à partir d'une liste et se retrouve quand même député. Cette formule va à l'encontre de nos valeurs.

+-

    M. Scott Reid: Je vois à quoi vous voulez en venir.

    Je sais que mon temps est presque écoulé, monsieur le président, mais je voudrais seulement faire une observation. Aux élections de 2000, j'ai été élu en Ontario avec 38 p. 100 des voix selon le système uninominal majoritaire à un tour. D'autres candidats ont obtenu un plus haut pourcentage de voix que moi mais ont été défaits parce que, contrairement à ce qui s'est passé dans leur cas, le vote s'est partagé de façon particulière dans ma circonscription.

    Là où je veux en venir, c'est qu'on pourrait peut-être compenser pour cela et faire en sorte que ceux qui ont obtenu de bons résultats, mais ont été défaits à cause des particularités de leur circonscription soient élus. Je ne sais pas si on peut voir cela comme une porte arrière ou simplement une façon de corriger les lacunes du système uninominal majoritaire à un tour.

+-

    M. David McLaughlin: C’est juste, et vous pouvez trouver une formule ou un modèle qui va répondre à ce genre de préoccupation. Cela dépend des valeurs démocratiques que vous jugez importantes. Le projet de loi dont l'Assemblée nationale du Québec est actuellement saisie propose un système à un vote. Selon celui que nous préconisons, l'électeur dispose de deux votes, un pour le candidat local et un autre pour le parti. Ainsi, on donne vraiment aux électeurs la possibilité de partager leur vote, si c'est ce qu'ils souhaitent. Dans ce contexte, il serait probablement logique d'interdire la double candidature, car ce qu'on tente d'établir, ce sont des choix démocratiques clairs pour la population. On peut voter pour le parti qui est important, et on peut aussi voter pour le candidat local qui est important.

    On peut mettre en place des règlements pour empêcher les partis de piper les dés et d'agir comme ils le font quelquefois, ce qui mécontente les gens et jette le discrédit sur le système. Cela ne garantit pas pour autant que le parti n'appliquera pas une stricte discipline de parti et qu'il ne va pas établir une liste dictée par les dirigeants, mais les règles existent. Par la suite, les membres de la base du parti vont s'assurer, du mieux qu'ils peuvent, que les règlements sont appliqués.

Á  +-(1135)  

[Français]

+-

    Le président: Madame Boivin, c'est votre tour.

+-

    Mme Françoise Boivin (Gatineau, Lib.): Bonjour.

    Ma question s'adresse à M. Béland, car j'ai trouvé ses deux rapports très intéressants puisqu'ils touchent mon sujet de prédilection: comment s'assurer que l'on rend bien l'intention des gens, des citoyens. Notre mandat est de tenter de les contacter pour avoir les meilleures suggestions à faire ensuite au Parlement.

    Je trouve fascinant de voir que dans vos conclusions vous disiez qu'il y a une différence d'opinion selon que l'on parle à des citoyens qui oeuvrent dans des organisations sous contrôle démocratique ou à ceux qui n'ont pas d'expérience d'organisation démocratique.

    Au fédéral, un pourcentage élevé des gens ne votent pas et semblent complètement désintéressés. Il reste à savoir pourquoi. Se sentent-ils complètement à part et exclus à cause du système électoral? Je n'en suis pas encore certaine. Parmi ceux que vous avez rencontrés, car vous dites avoir rencontré plus de 2 000 participants, quelle proportion des gens n'étaient pas habitués à travailler dans des organisations sous contrôle démocratique? Comment avez-vous fait pour joindre ces gens-là?

+-

    M. Claude Béland: D'après ce que j'ai pu constater, au Québec il y a une plus grande proportion de gens qui connaissent le fondement de la démocratie, parce qu'ils sont membres d'un syndicat, ou membres d'un condominium où l'on décide ensemble si on achète des fleurs ou non. Ils comprennent que lorsqu'on travaille ensemble on a droit au débat et que le pouvoir vient des usagers. Ils comprennent cela. Ils étaient plus nombreux à nous dire que nous parlions de démocratie dans les institutions politiques, mais que ce n'était pas celle qu'ils vivaient dans leurs organisations.

    Cela m'amène à vous dire que ceux qui sont venus avaient déjà un intérêt plus grand. Les autres, qui étaient en minorité, invoquaient des raisons plus larges, comme la mondialisation, et disaient que tout était changé. Ils disaient qu'il y avait des tendances vers la démocratie participative un peu partout dans le monde et qu'il fallait donc faire la même chose. On nous donnait souvent l'exemple de la Colombie-Britannique, où il y a des procédures d'initiative populaire, de droit de rappel des députés, et les gens disaient que cela ressemblait davantage à ce qu'ils vivaient dans leurs organisations démocratiques.

+-

    Mme Françoise Boivin: Comment peut-on joindre ces gens-là?

+-

    M. Claude Béland: C'est la grande difficulté.

    Je ne sais pas si vous connaissez l'étude du professeur Milner sur la compétence civique. Il a mené cette très vaste étude dans tous les pays démocratiques. Je ne veux pas faire un grand discours, mais je dirai cependant qu'il en vient à la conclusion que le Canada, et en particulier le Québec, se classent mal sur le plan de la compétence civique. Bien des raisons expliquent le phénomène, entre autres la concentration de la presse, le peu d'accès aux bibliothèques, etc.

    Ainsi, un forum sur le mode de scrutin n'attirera que peu de gens parce qu'il s'agit d'une chose considérée compliquée. Il faut convoquer les gens et leur demander si, à leur avis, le système fonctionne bien et pourquoi ils ne votent pas. C'est ce que nous avons fait. Nous avions un long questionnaire. À la question demandant s'ils votaient, la majorité des répondants nous ont dit qu'ils ne votaient plus. Quand on leur demandait pourquoi, ils répondaient que leur vote ne comptait pas. Certaines personnes, qui venaient d'un district affichant la même couleur depuis la naissance de la Confédération canadienne, ont dit que les 2 000 ou 3 000 votes obtenus par leur parti n'avaient aucun poids dans la balance. Ils n'aimaient pas cette situation.

    À force d'entendre ce genre de commentaires, nous avons pu dire au gouvernement qu'il fallait, non pas adopter un mode de scrutin donné, mais plutôt corriger les distorsions, parce que les gens n'aimaient pas cela. Chez nous, il est arrivé quatre fois depuis 1960 que le gouvernement prenant le pouvoir soit d'un parti qui l'avait emporté sur les autres en obtenant un pourcentage de votes moins élevé mais un plus grand nombre de sièges. Les gens trouvaient que cela n'avait pas de sens et qu'il fallait corriger cette situation. Cela a été très fort.

    En outre, les gens demandaient comment il se faisait qu'on ait encore le bipartisme. On leur répondait que le système favorisait cela. Ils disaient alors vouloir qu'il y ait des tiers partis, ou affirmaient que les femmes n'étaient pas entendues, et ainsi de suite. On a suggéré au gouvernement de corriger cet état de chose et de permettre l'entrée de tiers partis à l'Assemblée nationale et à la Chambre des communes. Les gens ont dit vouloir quand même leur député et maintenir un lien avec lui. On a alors proposé une formule qui permet d'avoir à la fois un système majoritaire et des mesures compensatoires.

Á  +-(1140)  

+-

    Le président: Monsieur Guimond.

+-

    M. Michel Guimond: Merci, monsieur le président. Merci, messieurs McLaughlin et Béland. Ma question s'adresse à M. Béland.

    D'entrée de jeu, je veux vous féliciter pour l'ensemble de votre oeuvre, qui n'est pas terminée. Vous faites encore preuve d'une grande vivacité et d'une grande clairvoyance. Vous êtes peut-être à l'âge où on prend normalement sa retraite, mais de toute évidence, vous ne l'avez pas prise. Je veux vous remercier. Étant québécois, j'ai la chance de savoir qui vous êtes. À l'ouest de la rivière des Outaouais, vous êtes peut-être connu grâce au mouvement coopératif. Par contre, je suis persuadé que la majorité des personnes ici présentes ne savent pas ce que vous avez fait. Ils ne connaissent probablement pas la commission Béland non plus. Nous vous avons donc invité pour en parler.

    Comme l'a mentionné ma collègue Mme Boivin, l'ordre de renvoi que notre comité a reçu de la Chambre consiste à déterminer quelle serait la meilleure formule à utiliser pour consulter les Canadiens et les Québécois sur une éventuelle réforme du mode de scrutin.

    Selon vous, la formule qui a été utilisée, à savoir les consultations régionales et les états généraux, est-elle vraiment la recette miracle? Si on vous demandait de présider des consultations pancanadiennes, favoriseriez-vous la même approche?

+-

    M. Claude Béland: Je pense que nous aurions pu faire mieux si on avait mis plus de temps à notre disposition. Au début, quand nous arrivions dans une ville, les gens étaient méfiants. Ils pensaient que nous représentions une organisation du gouvernement. Or, quand ils se sont rendu compte que nous étions des citoyens comme les autres, ils ont commencé à nous dire très fréquemment et avec beaucoup d'insistance qu'après ces quatre heures passées ensemble, ils trouvaient que nous devions absolument revenir les voir. Nous disions alors que nous ne pouvions pas le faire, que nous avions un rapport à établir.

    Par conséquent, dans notre rapport, nous avons recommandé la création d'espaces publics non partisans pour permettre aux citoyens, chacun dans leur région, de mener un débat public. La recommandation n'a pas été retenue par le gouvernement actuel. J'ai eu à transmettre cette décision aux gens qui avaient assisté aux états généraux. À ma grande surprise, ils ont réagi en disant que si le gouvernement ne voulait pas les aider, ils allaient se charger eux-mêmes de la chose.

    Aujourd'hui, il existe 11 conseils régionaux de la citoyenneté et de la démocratie dans 11 régions du Québec. Ce ne sont pas de grosses organisations, mais il y a là de la braise. Les gens disent maintenant vouloir connaître les enjeux. J'ai eu la chance d'être nommé président dans le but de chapeauter ce mouvement. Le Mouvement Démocratie et Citoyenneté du Québec existe désormais.

    Pour répondre à votre question, je dirai qu'à mon avis, une des raisons pour lesquelles on n'arrive pas à intéresser les gens à la question est qu'ils ne connaissent pas vraiment les enjeux. Par contre, ils savent ce qu'ils veulent. Ainsi, pour obtenir des résultats, il faut d'abord leur demander ce qui, à leur avis, ne fonctionne pas et ce qu'ils n'aiment pas dans le système actuel. À partir de leurs réponse, on peut élaborer des solutions.

+-

    M. Michel Guimond: Est-ce que les recherchistes de votre commission ont eu l'occasion de répertorier des expériences similaires, quasi similaires ou semblables en termes de consultations ailleurs dans le monde? On sait que le Québec aime beaucoup innover. Est-ce que nous sommes le seul État au monde à faire cela?

Á  +-(1145)  

+-

    M. Claude Béland: Je ne pourrais pas vous répondre. D'abord, nous n'avions pas de recherchistes et notre budget était assez limité. On savait ce qui se passait en Colombie-Britannique. On savait ce qui se passait au Canada. Il y a eu une démarche à peu près similaire en Nouvelle-Zélande, que nous a rapportée le professeur Henry Milner, mais on en connaissait peu de chose.

    Au Canada, il y a cette volonté. Dès la première ligne de son rapport, la Commission du droit du Canada à Ottawa dit qu'il y a un déficit démocratique au Canada.  Ce n'est pas rien. Partant de là, cela nous permet de dire aux gens qu'il y a des autorités qui le disent et qu'il faut se pencher sur cette question, parce que la démocratie est importante. On y tient et si on ne s'en occupe pas, on va se rendre compte que c'est très fragile. Quatre millions...

+-

    Le président: On va y revenir.

    Monsieur Silva, c'est à vous.

[Traduction]

+-

    M. Mario Silva (Davenport, Lib.): Merci.

    Ma question s'adresse à M. McLaughlin. Manifestement, on a étudié bien des systèmes un peu partout, et la Colombie-Britannique vient tout juste d'adopter celui du vote unique transférable qui est de loin l'un des systèmes les plus complexes qui soit. Donc je suis curieux de savoir pourquoi la province a opté pour ce système et quels sont les problèmes auxquels vous faites face, notamment en ce qui concerne la représentation hommes-femmes et la langue et si cela rentre en ligne de compte.

+-

    M. David McLaughlin: On a attaché une grande importance à la représentation hommes-femmes et à la langue pour la structure même de la commission et le choix de ses huit membres, c'était incontournable. L'un des coprésidents de la commission a déjà occupé la présidence de la Société des Acadiens et Acadiennes du Nouveau-Brunswick. Cela nous a obligés à veiller à ce que ce genre de problèmes de représentation et la façon dont la société néo-brunswickoise se reconnaît dans un système électoral particulier soient au coeur de nos discussions, et cela a contribué à orienter notre choix vers le modèle régional.

    Nous avons opté pour un système à quatre régions en partie parce que, dans les simulations que nous avons faites, nous avons obtenu une représentation semblable de députés francophones. Ce sont là des réalités politiques. Un nouveau système électoral, quel qu'il soit, qui aurait réduit—ou donné l'impression de réduire— la représentation d'un segment particulier d'une société dans une province officiellement bilingue comme le Nouveau-Brunswick aurait eu des conséquences. Donc, les modèles que nous avons conçus et qui prévoient quatre régions nous ont donné l'assurance que les résultats seraient sensiblement les mêmes, entre autres, pour ce qui est de la proportion de députés francophones et de députés anglophones.

    Lorsqu'est venu le temps de choisir entre le système de représentation proportionnelle mixte ou le système de vote unique transférable, après examen, on a vite rejeté le deuxième pour la raison que vous avez déjà donnée, parce que nous l'avons jugé trop complexe. Il n'a pas beaucoup suscité l'intérêt des commissaires. Une présentation a été faite par le personnel et par le directeur de recherches, M. Bill Cross, qui est un universitaire connu et respecté de l'Université Mount Allison. Nous avions à notre disposition une équipe complète d'attachés de recherche qui nous a présenté de l'information provenant d'un peu partout au pays. Nous avons donc pu examiner les divers systèmes et les comparer, et il était clair que les commissaires n'accepteraient pas le système de vote unique transférable. Il est trop complexe et, essentiellement, je crois qu'il n'a pas été retenu principalement parce qu'il éliminait le lien direct entre le député et l'électeur.

    Je le répète, nous avions notamment pour mandat de maintenir les députés élus représentant des régions géographiques déterminées. Les Néo-Brunswickois, comme la plupart des Canadiens je suppose, veulent être en mesure d'entrer en contact avec leur député. C'est important pour la responsabilisation. Cela fait partie de la vie de tous les jours, et je crois qu'il s'agit d'une valeur démocratique très importante. Donc il aurait été difficile, à notre avis, de s'écarter de ce principe.

    Sur la question de la représentation hommes-femmes, dans tout système qui prévoit des districts représentés par plusieurs députés et l'établissement de listes de parti qui présentent trois, quatre, cinq ou six candidats, il est probablement possible d'assurer la représentation des deux sexes. Les partis vont désigner le nombre de candidats appropriés pour obtenir ce genre de représentation.

    D'après ce que j'ai lu et étudié, le système de vote unique transférable de la Colombie-Britannique pourrait également assurer une représentation des deux sexes. Nous croyons toutefois que notre modèle, en proposant cinq députés choisis à partir de listes dans chacune des régions, va permettre d'obtenir une représentation proportionnelle. En-deçà de cinq, on ne l'obtient pas et, avec cinq, les partis ont plus de marge de manoeuvre pour désigner des femmes et d'autres groupes représentatifs de la société.

Á  +-(1150)  

+-

    M. Mario Silva: Dans le système de liste européen, par exemple, il peut y avoir 10 ou 20 noms sur la liste. Je ne sais pas si la loi le prescrit ou non, mais ce n'est pas nécessairement le premier candidat qui est élu à l'assemblée législative. Ce peut être le cinquième, le sixième ou le septième. Les cinq premiers candidats n'ont peut-être pas envie de siéger à l'assemblée législative, même si leur nom figure sur la liste. Or, vous laissez entendre que c'est le premier inscrit sur la liste qui doit être choisi.

+-

    M. David McLaughlin: Oui. Sur les cinq, si vous n'avez droit qu'à un seul candidat, c'est le premier inscrit sur la liste qui est choisi. Si vous avez droit à deux ou trois candidats, ce sont les trois premiers qui sont choisis.

+-

    M. Mario Silva: Est-ce que la personne peut se désister?

+-

    M. David McLaughlin: Je ne le crois pas. Les trois premiers sont choisis. Cela correspond à l'ordre dans lequel ils sont inscrits sur la liste.

[Français]

+-

    Le président: Monsieur Broadbent.

+-

    L'hon. Ed Broadbent: Merci, monsieur le président.

    D'abord, en tant que Canadien vivant à l'extérieur du Québec, je veux souligner que j'ai beaucoup de respect pour le travail que M. Béland a fait au Québec dans le passé et pour celui qu'il fait encore maintenant. Mais pour d'autres raisons, mes nombreuses questions s'adressent à M. McLaughlin.

[Traduction]

    D'abord, M. Béland a parlé d'un sondage qui a été mené au Québec. D'après les résultats de celui-ci, environ 92 p. 100 des Québécois croient que le nombre de sièges attribués aux partis devrait être proportionnel aux votes reçus à la Chambre—ce qui ne correspond pas à la situation actuelle. Avez-vous des données comparables pour le Nouveau-Brunswick?

+-

    M. David McLaughlin: Nous n'avons pas analysé les données d'enquête de la commission. J'ai vu des résultats de sondages publiés par le Centre de recherche et d'information sur le Canada, le CRIC. D'après un sondage mené en octobre-novembre dans la région de l'Atlantique, 70 p. 100, 80 p. 100 ou 90 p. 100 des répondants, selon la question posée, sont en faveur de la proportionnalité. Je sais par expérience que les Canadiens attachent beaucoup d'importance à ces valeurs, à ces principes.

+-

    L'hon. Ed Broadbent: J'ai analysé de nombreux systèmes ainsi que les études réalisées par les provinces, et je constate que le Nouveau-Brunswick sert, à bien des égards, de microcosme pour le Canada, puisqu'on y trouve une majorité anglophone, une minorité francophone, ainsi de suite. Vos recommandations, comme vous venez de l'expliquer, tiennent compte de cette réalité.

    Je voudrais vous poser une question purement hypothétique, si je puis me permettre. J'ai bien aimé le fait que vous ayez opté pour un système régional de représentation proportionnelle, puisque l'un des principaux— « maux » est peut-être trop fort—points faibles du système canadien réside dans le fait que le Parti libéral peut obtenir 25 p. 100 des votes dans l'Ouest, mais 2 ou 3 p. 100 des sièges, par exemple. Je ne veux pas me lancer dans ce débat, mais je pense que ce facteur a contribué à créer des divisions au Canada.

    Est-ce que le modèle que vous proposez—si je puis me permettre de vous poser la question, et je suis certain que vous y avez réfléchi—pourrait-il s'appliquer à l'ensemble du Canada?

+-

    M. David McLaughlin: On ne pourrait pas écarter le modèle régional si l'on choisissait d'appliquer un système de représentation proportionnelle à l'échelle du pays. Si on ne peut pas l'écarter au Nouveau-Brunswick, on ne peut pas l'écarter ailleurs au Canada. Il faut trouver un modèle qui sert les intérêts du pays. Or, même au Nouveau-Brunswick, il y a des prises de position très fermes à l'échelle régionale, des tendances régionales très marquées qui doivent être prises en compte parce que la population francophone acadienne, qui est concentrée dans une région géographique bien précise, a tendance à élire des députés provinciaux bien ancrés dans la région pour défendre ses intérêts.

    La situation ne changera pas, en raison de l'existence de cette perspective régionale. Le danger, c'est qu'on peut exacerber le régionalisme, et nous en avons déjà parlé. Nous avons essayé de trouver un moyen de le faire, d'où le système à quatre régions au lieu de dix ou onze que nous avons proposé.

    Monsieur Broadbent, quand vous avez assisté à notre table ronde sur la représentation proportionnelle à l'Université de Moncton, il a été question d'un modèle à dix ou onze régions. Nous avons jugé que c'était trop. Nous avons fini par opter pour un système à quatre régions. Ce modèle aurait contribué à exacerber le régionalisme, mais pas de façon exagérée.

+-

    L'hon. Ed Broadbent: Et si on utilisait les dix provinces comme régions?

+-

    M. David McLaughlin: Je ne sais pas. Je dois avouer que...

+-

    L'hon. Ed Broadbent: La Commission du droit s'est penchée sur la question. Avez-vous eu l'occasion d'examiner son rapport?

+-

    M. David McLaughlin: Oui. Il faudrait calculer le nombre de sièges pour chaque...

+-

    L'hon. Ed Broadbent: Non, on garderait le même nombre de sièges dans chacune des provinces. Il n'y aurait aucun changement. On aurait une sorte de système de représentation selon la population. La répartition des sièges serait la même, mais on utiliserait la formule du Nouveau-Brunswick, si je puis m'exprimer ainsi, sur une base régionale, où les provinces tiendraient lieu de régions.

Á  +-(1155)  

+-

    M. David McLaughlin: Si vous voulez corriger la disproportionnalité dans la province, il faut le faire sur la base de ce calcul. Je pense que, d'un point de vue théorique, et c'est ce que vous voulez savoir, les gens seraient plus à l'aise avec ce système.

    La région de l'Atlantique forme un tout homogène, mais Terre-Neuve-et-Labrador est différente des provinces Maritimes, du Québec, manifestement, en tant que province et région, et de l'Ontario, dans certains contextes touchant la formule d'amendement. Dans l'Ouest, il il y a les trois provinces des Prairies qui font bloc et ensuite la Colombie-Britannique, ce qui...

+-

    L'hon. Ed Broadbent: Mais pourquoi chaque province ne peut-elle pas avoir...?

+-

    Le président: Il faut s'arrêter là. Votre temps est écoulé.

    Madame Picard.

[Français]

+-

    Mme Pauline Picard (Drummond, BQ): Monsieur Béland, bienvenue à ce comité. À l'instar de mon collègue, je tiens à vous remercier et à vous féliciter pour votre implication au sein de la société québécoise depuis des années.

    Si vous étiez membre de ce comité, quelle recommandation feriez-vous pour qu'on puisse adéquatement consulter la population canadienne et québécoise, afin d'avoir un système efficace et sans déficit démocratique?

+-

    M. Claude Béland: Je suis convaincu que cela ne peut pas se faire à partir du haut, mais à partir de la population. Il faut d'abord consulter les gens, après leur avoir bien expliqué les enjeux. Mais il faut aller vers les gens. Vous ne pouvez pas leur demander de venir ici, à Ottawa, pour vous expliquer ce qu'ils pensent. Si vous voulez procéder ainsi, vous devez le faire dans chacune des provinces et dans chacune des régions des provinces.

    En Colombie-Britannique, on vante beaucoup l'Assemblée des citoyens, The Citizens' Assembly, mais il s'agit d'un groupe restreint de personnes qui propose un mode de scrutin compliqué. La Colombie-Britannique n'a pas encore adopté cela: ce n'est pas fait. Il faut qu'il y ait un référendum, et il n'y a personne pour défendre cela. Le gouvernement ne veut pas s'en occuper en arguant qu'il s'agit d'une décision citoyenne. Du côté des citoyens, qui va expliquer cela à la population? On sait comme la résistance au changement est forte, surtout si le mode de scrutin proposé est difficile à expliquer. On ne peut donc pas encore dire que la Colombie-Britannique a adopté le système. Il ne faudrait pas faire la même chose au Canada, en disant en comité et à la Chambre des communes qu'on a trouvé un nouveau système, sans savoir si la population le comprend bien et si elle est prête à voter de cette façon.

    La méfiance est énorme. C'est le cas au Québec aussi. J'en fais la tournée en ce moment, et parce que le Parti libéral a déposé un projet de loi--qui, à mon sens, est acceptable avec certaines modifications--, les gens n'ont pas confiance parce qu'ils se disent que cela doit avantager le Parti libéral. On travaille sur un terrain miné où les gens sont méfiants. Il faut d'abord s'assurer que ce soit la volonté populaire la plus forte possible, sinon il est très difficile d'aller de l'avant.

+-

    Mme Pauline Picard: Quand on vous a confié ce mandat, vous assumiez la présidence du comité directeur. Quelles ont été vos premières réflexions? Comment vous êtes-vous préparés à joindre la population comme vous l'avez fait?

+-

    M. Claude Béland: Selon le modèle Desjardins, que je connaissais bien, nous avons formé beaucoup de sous-comités. J'ai fait toute la tournée, mais les membres n'étaient pas obligés de me suivre partout. Nous avons fait un calendrier; nous nous sommes annoncés à l'avance; nous avons donné beaucoup de conférences de presse; nous avons utilisé les médias au maximum; nous avons utilisé les chambres de commerce pour dire que nous arrivions et que nous allions discuter d'un sujet important. Il faut inscrire cela à l'ordre du jour. Il faut que cela devienne une préoccupation pour les gens, autrement les décisions ne seront prises que par une partie de la population, et ce n'est pas souhaitable. Changer les institutions démocratiques est une grande entreprise, vous savez.

  +-(1200)  

+-

    Mme Pauline Picard: Merci beaucoup.

+-

    Le président: Merci beaucoup, madame Picard.

    Monsieur Johnston.

[Traduction]

+-

    M. Dale Johnston: Merci, messieurs, de vos exposés. Je suis désolé d'avoir interrompu l'exposé de M. Béland, mais les diablotins devaient être à l'oeuvre.

    Je pense que M. Béland a répondu en partie à ma question. J'aimerais toutefois savoir ce que l'un ou l'autre pense du cynisme qu'affiche, comme on l'a mentionné plus tôt, le grand public. Nous devrions peut-être essayer de trouver des moyens de contrer le cynisme que ressent l'électorat, au lieu de passer notre temps à mettre au point un système compliqué que personne ne comprendrait. Il va être très difficile d'expliquer ce système à l'électorat.

    Vous pourriez aussi nous parler des bulletins de vote qui seraient annulés en vertu de votre système, par opposition à ceux qui le sont en vertu du système actuel.

+-

    M. Claude Béland: Je vais répondre en français, si vous n'y voyez pas d'inconvénient.

[Français]

+-

    Le président: Monsieur Béland, c'est votre choix et vous n'avez pas à vous en expliquer.

+-

    M. Claude Béland: Je veux être clair pour moi-même.

    Je pense qu'il ne faut pas essayer de vendre ou d'expliquer un système à la population. Il faut lui demander ce qu'elle veut changer. On doit d'abord établir les valeurs de la démarche qu'on veut faire. Le citoyen comprend cela. Il est très compétent pour nous dire ce qu'il veut.

    En planification stratégique, dans le triangle, il y a d'abord ce qu'on veut, et ensuite on voit ce qu'on peut faire et ce qu'on doit faire. Lorsqu'on parle au citoyen, il faut lui demander ce qu'il veut et ce qu'il n'aime pas. Aime-t-il le système actuel, les institutions démocratiques actuelles? Si non, qu'est-ce qu'il n'aime pas? Une fois cela fait, les élus peuvent décider de proposer des solutions. Si on commence simplement en proposant un nouveau mode électoral, ce sera extrêmement difficile à expliquer.

    Quand nous avons fait des réunions sur les valeurs, sur l'objectif, nous avions 350 ou 400 personnes chaque soir. Quand nous avons commencé à demander ce que les gens pensaient de tel mode de scrutin, nous avions 10, 12 ou 15 personnes, dont la moitié étaient des professeurs de sciences politiques.

+-

    Le président: Merci beaucoup.

[Traduction]

    Monsieur McLaughlin.

+-

    M. David McLaughlin: Je suis d'accord avec M. Béland. Les valeurs démocratiques doivent servir de fondement. Le premier chapitre de notre rapport porte là-dessus. Ces valeurs rassemblent les citoyens et constituent les seuls éléments qui peuvent faire l'objet d'un consensus. Un système électoral devrait refléter les valeurs démocratiques contemporaines de la société. Or, les valeurs changent, tout comme la société, et les systèmes électoraux, les institutions démocratiques—le Parlement, les assemblées législatives, les députés provinciaux, les députés fédéraux, les partis politiques, ainsi de suite, doivent changer aussi. Ils doivent trouver un moyen de s'adapter aux valeurs démocratiques en constante évolution. Or, nous avons constaté, lors de nos discussions, de nos recherches, qu'il y a une brisure entre la population, les valeurs qu'elle défend, et ces institutions, y compris le système électoral. Il y a une brisure entre les deux. Les institutions ne reflètent pas les valeurs démocratiques qui sont chères à la population.

    Prenons la représentation des femmes. Au Nouveau-Brunswick, les femmes représentent 51 p. 100 de la population. Or, seulement 12 p. 100 des députés sont des femmes. Et ce chiffre diminue. Vous n'élirez pas un plus grand nombre de femmes dans un système majoritaire uninominal. J'en suis absolument convaincu, ce qui n'était pas le cas au début. Si vous jugez qu'il est important, sur le plan démocratique, de faire élire un plus grand nombre de femmes, d'accroître la représentation de ce segment de la société, vous devez alors utiliser le système électoral pour y arriver.

    Or, il n'existe pas de système électoral idéal, ou encore de stratégie miracle pour contrer le cynisme que vous avez mentionné et qui est bien réel, ou encore pour faire disparaître la brisure, le désenchantement que l'on observe. Il faut avoir recours à toute une gamme de solutions, et c'est pour cette raison que l'on nous a confié un mandat beaucoup plus vaste, un mandat qui ne se limite pas seulement au système électoral. Nous ne nous sommes pas uniquement penchés sur la question de la réforme électorale, et nous avons bien fait. La réforme électorale ne peut être examinée isolément. C'est la conclusion à laquelle nous sommes, à juste titre, arrivés.

    Vous avez parlé des bulletins de vote annulés. Quand vous tenez plus d'un vote, le nombre de bulletins annulés augmente, dans une certaine mesure. Nous proposons un scrutin à deux tours, un pour le candidat local et un autre pour le parti. Nous avons examiné des modèles similaires en Nouvelle-Zélande, en Écosse et au pays de Galles. Nous avons constaté qu'entre 1 et 1,5 p. 100 des bulletins étaient annulés, ce qui n'est pas exagéré. Il est vrai que le nombre de bulletins annulés augmenterait légèrement, mais rien ne prouve que cette tendance se maintiendrait. Grâce à des campagnes de sensibilisation, par exemple, les électeurs finiraient pas s'habituer.

  +-(1205)  

+-

    Le président: Merci beaucoup.

    J'aimerais vous poser une question à tous les deux.

    Monsieur McLaughlin, vous avez recommandé la tenue d'un référendum pour faire approuver ce système. Savez-vous si le gouvernement compte en organiser un?

+-

    M. David McLaughlin: Je ne sais pas. Le premier ministre a fait deux déclarations à ce sujet : d'abord dans une allocution prononcée à Ottawa, et ensuite dans un discours sur le budget principal des dépenses à l'assemblée législative. Il a indiqué que si des changements étaient apportés au système électoral, la population du Nouveau-Brunswick serait appelée à se prononcer sur la question par le biais d'un référendum. Nous avons proposé une loi référendaire, de même qu'un modèle, mais je ne sais pas ce que compte faire le gouvernement.

[Français]

+-

    Le président: Monsieur Béland, dans votre rapport, avez-vous recommandé qu'on consulte la population par voie référendaire avant d'adopter quelque chose de semblable? Si oui, savez-vous si le gouvernement va adopter cette façon de faire?

+-

    M. Claude Béland: Dans notre rapport, nous recommandions la tenue d'un référendum. Le gouvernement a décidé de ne pas tenir de référendum en disant que la consultation qui avait été faite à l'occasion des états généraux était suffisante. Le gouvernement a décidé de ne pas tenir de référendum.

+-

    Le président: Je crois comprendre de votre réaction que vous en souhaiteriez encore un.

+-

    M. Claude Béland: Personnellement, oui. Cependant, il y a un compromis, à savoir que le ministre a tout de même annoncé une commission parlementaire itinérante. Pour faciliter l'accès des citoyens à cette commission, on a changé un peu les règles. D'abord, c'est la commission qui va se déplacer dans chacune des régions du Québec. On n'exige pas le dépôt de mémoires au préalable, on a fait disparaître les coûts, etc. On a facilité, en somme, le processus pour obtenir de nouveau l'opinion des citoyens et des citoyennes. Mais ça reste un compromis plutôt qu'un référendum en bonne et due forme.

+-

    Le président: Merci beaucoup.

    C'est maintenant à vous, monsieur Guimond.

+-

    M. Michel Guimond: Je vais vous poser deux questions consécutives afin que vous ayez le temps de répondre à la deuxième. J'avertis mes collègues et le président: cette deuxième question n'est pas forcément dans le champ de notre étude. Je ne voudrais pas qu'elle soit jugée non pertinente.

    Monsieur Béland, vous dites que 4 millions de cartons ont été distribués. Êtes-vous satisfait du taux de réponse ou du degré d'intérêt de la population? Si 2 millions de personnes avaient voulu rencontrer la commission, vous seriez encore là. Il y a eu 4 millions de cartons et vous avez rencontré 2 000 personnes. Est-ce un ratio que vous trouvez intéressant? Vous avez aussi demandé des mémoires et vous en avez reçu 237. Est-ce un échantillon amplement suffisant, selon vous?

  +-(1210)  

+-

    M. Claude Béland: On aurait espéré davantage et on s'attendait à davantage. Évidemment, c'était en soirée, pendant la semaine, et ce n'était pas toujours facile pour les citoyens et citoyennes de se déplacer. Mais on aurait espéré davantage.

    On a reçu 237 mémoires, mais on s'adressait uniquement aux corps constitués, pas aux individus.

    Je voudrais faire une petite remarque. J'ai été un peu déçu de voir que les chambres de commerce, les gens d'affaires, ceux qui ont déjà une forme de pouvoir ne s'étaient pas beaucoup manifestés. Je suis même allé à la Chambre de commerce du Montréal métropolitain pour dire aux gens que j'étais déçu qu'ils n'aient pas manifesté d'intérêt à l'égard d'un projet aussi important.

    Une des conclusions que nous avons tirées est que les gens qui ont un certain pouvoir, pouvoir de capital, pouvoir de réseaux, comme par exemple les centrales syndicales, ne se sont pas manifestés. Les associations de patrons ne se sont pas manifestées. Lorsque je les appelais pour leur demander pourquoi ils ne venaient pas, ils me disaient qu'ils ne faisaient pas de politique. J'ai été un peu déçu de voir que les individus se sont manifestés, mais les associations un peu moins.

+-

    M. Michel Guimond: Ma deuxième question a trait à un sujet qui est d'actualité en ce moment à la Chambre des communes, puisqu'un député libéral a déposé ce qu'on appelle un projet de loi émanant d'un député concernant la question du vote à 16 ans. Il faut comprendre que, dans le cas des projets de loi émanant des députés, c'est un vote libre. Il n'y a pas de ligne de parti. Ce député a obtenu l'appui d'un représentant par parti en conférence de presse. Dans le temps des Fêtes, il y a eu certaines sorties médiatiques à cet égard.

    J'aimerais vous entendre à ce sujet, car nous serons appelés à voter sur ce projet de loi de Mark Holland, député d'Ajax—Pickering. Je vous renvoie particulièrement au résultat 9 dans votre document: « Ils souhaitent que l'âge requis pour voter soit maintenu à 18 ans. » C'est ce que vous ont répondu 74 p. 100 des 2 000 participants. Je crois que le chiffre de 58 p. 100, entre parenthèses, est celui obtenu lors des états généraux.

    Que pensez-vous de cela?

+-

    M. Claude Béland: Nous ne l'avons pas recommandé.

    Nous avons été influencés par les parents qui venaient nous dire que leur grande fille ou leur grand gars était assez intelligent pour voter à 16 ans. Cependant, les jeunes de 16 ans venaient nous dire qu'ils n'étaient pas prêts. Cela nous a beaucoup surpris. Les gens eux-mêmes disaient qu'ils n'étaient pas prêts, qu'ils n'avaient pas appris cela à l'école, qu'on ne leur enseignait pas ça au primaire, ni au secondaire, ni au collégial... [Note de la rédaction: Difficultés techniques]

+-

    Le président: Nous reprenons. Monsieur Broadbent, c'est à vous.

+-

    L'hon. Ed Broadbent: Monsieur Béland, vous avez mentionné qu'il existe une différence entre le gouvernement fédéral et le gouvernement du Québec, au sujet du processus électoral. Vous avez fait certaines suggestions sur le contenu, mais le gouvernement a changé. Pouvez-vous nous expliquer les différences entre les deux?

+-

    M. Claude Béland: La différence vient du fait qu'il y a eu un changement de gouvernement. Quand on a produit notre rapport, le gouvernement du Parti québécois était au pouvoir. La plupart des recommandations que nous avions soumises ont reçu un accueil favorable.

    Un mois plus tard, il y a eu une élection. Un nouveau gouvernement est arrivé en poste, et le nouveau ministre m'a fait savoir que son gouvernement ne suivrait aucune de nos recommandations.

    Je m'aperçois cependant, en lisant le projet de loi déposé aujourd'hui, qu'on s'en est inspiré. Je m'en aperçois surtout dans l'autre projet de loi, qui porte sur la réforme parlementaire. Nous suggérions de revoir le rôle du député, et notamment de faire disparaître la ligne de parti, ou que la ligne de parti ne soit obligatoire que pour certaines questions. Je vois que ces éléments se retrouvent dans le projet de loi soumis par le ministre délégué à la Réforme des institutions démocratiques du Québec. Je pense donc que notre rapport a quand même eu une certaine influence.

  +-(1215)  

+-

    L'hon. Ed Broadbent: D'accord. Dans votre rapport original, vous avez suggéré qu'on applique au Québec un système mixte, comme celui en vigueur au Nouveau-Brunswick. Pouvez-vous nous en expliquer les détails et faire ensuite une comparaison entre votre proposition et la décision du gouvernement libéral?

+-

    M. Claude Béland: Nous avions suggéré en premier lieu une vraie proportionnelle régionale, et non un système majoritaire. Nous avions suggéré une élection proportionnelle par région. Cependant, on a fait remarquer aux membres du gouvernement du Québec que les gens voulaient maintenir un lien avec un député qu'ils connaissent et on a donc proposé un modèle presque identique au modèle présenté par M. McLaughlin. Je vois peu de différences entre celui-ci et notre proposition.

    Cependant, le gouvernement actuel n'a pas retenu le système du double vote dans son avant-projet de loi. Pour le gouvernement, quand vous votez pour un candidat du Parti libéral, vous votez aussi pour le Parti libéral. On fait l'addition des deux. Le projet de loi est un peu compliqué. Des experts pourraient mieux l'expliquer.

    Au Québec, nous proposons que le nombre de députés passe de 125 à 127. Soixante-dix sept députés seraient élus au système majoritaire, et 50 seraient élus à la proportionnelle régionale. Pour constituer une région, il faut trois ou quatre circonscriptions. On peut donc imaginer un système majoritaire avec des circonscriptions qui vont ressembler aux circonscriptions du gouvernement fédéral.

    Au Québec, il y a 77 circonscriptions fédérales, donc 77 circonscriptions élargies. Pour compenser cela, pour corriger les distorsions, il faudrait créer 26 districts comprenant trois ou quatre circonscriptions, où il y aurait un scrutin à la proportionnelle. Des listes seraient déposées dans chacun des districts et on ferait un choix, comme M. McLaughlin l'a expliqué. C'est le même système.

    La plupart des organisations militantes contesteront cette formule et demanderont le recours au système des deux votes, pour qu'on puisse voter à la fois pour le député de son choix et pour un parti qui peut être différent mais dont on préfère le programme. Ce sont les seules nuances.

+-

    L'hon. Ed Broadbent: J'ai une dernière question. Préconiseriez-vous le même modèle pour l'ensemble du Canada?

+-

    M. Claude Béland: Je pense que oui. On pourrait faire cela par province, une province étant une région. En tant que canadien, je ne verrais pas d'objections à cela.

+-

    L'hon. Ed Broadbent: En ce qui concerne la distribution entre les députés élus dans un comté et ceux élus à la proportionnelle, serait-ce une distribution moitié-moitié ou un tiers-deux tiers?

+-

    M. Claude Béland: La répartition doit être au minimum de 60-40: 60 p. 100 de députés élus au scrutin majoritaire et 40 p. 100 de députés élus au scrutin proportionnel. C'est le minimum. Je préfère le système proposé au Québec: c'est 65-35. Il faut une majorité de députés élus au scrutin majoritaire. On n'a pas besoin d'un chiffre aussi élevé pour les mesures compensatoires. À l'échelle du Canada, dans une région de la taille d'une province, le pluralisme politique peut jouer beaucoup mieux. Moins il y a d'électeurs, plus le pluralisme politique est étroit, n'est-ce pas? Je pense qu'on comprend cela.

    C'est le défaut de l'avant-projet de loi actuel, à mon avis. On parle de pluralisme politique, mais pour qu'un tiers parti ait droit à un siège, il devra avoir au moins 13 à 15 p. 100 des suffrages dans une même région, ce qui est beaucoup.

  +-(1220)  

+-

    Le président: Merci.

    Madame Boivin.

+-

    Mme Françoise Boivin: Monsieur Béland, tout à l'heure, vous avez dit à M. Guimond que les leaders, les centrales syndicales, le patronat, etc. ne s'étaient pas beaucoup manifestés. Qu'en est-il des députés? Ont-ils participé au processus? Devraient-ils y participer? La semaine dernière, nous avons entendu des experts qui nous ont dit que nous étions souvent des éléments catalyseurs, que nous pouvions rassembler des gens dans nos circonscriptions, faire sortir les gens ordinaires.

    Je reviens encore sur mon dada. Je veux connaître l'opinion des gens, je veux qu'ils me disent ce qui va mal. Nous nous faisons souvent reprocher d'être déconnectés de la réalité, de ne pas être près de la base électorale. Ne devrions-nous pas nous impliquer plus à fond? Cela a-t-il été vécu dans le cadre de votre commission?

    Cela m'intéresserait que vous parliez davantage de l'éducation citoyenne et de ce qu'elle comprendrait.

+-

    M. Claude Béland: Nous avons tenu à ce qu'il n'y ait pas de politiciens au comité directeur, qui a fait la consultation. Autrement, les gens auraient pensé que nous défendions les intérêts d'un parti. Cependant, plusieurs députés, tant fédéraux que provinciaux, sont venus à nos séances comme citoyens pour témoigner de leur expérience et dire comment ils vivaient leur rôle de député et les résultats des élections. Je pense que c'est souhaitable, évidemment. Ceux qui vivent tout cela le plus profondément sont sûrement les élus ou les anciens élus. J'encourage leur participation.

+-

    Mme Françoise Boivin: Qu'en est-il de l'éducation citoyenne?

+-

    M. Claude Béland: L'éducation citoyenne a été notre première recommandation. Au Québec, on n'enseigne pas cela au primaire ni au secondaire. Je suis professeur à l'UQAM et je demande à mes étudiants qui sont à l'université de me définir la démocratie. Vous seriez surpris des réponses que j'obtiens. On me répond souvent que la démocratie, c'est faire ce qu'on veut. Je me dis qu'il va peut-être falloir expliquer les choses davantage.

    Il nous est apparu évident qu'il fallait améliorer l'enseignement des compétences civiques ici, au pays. Cela dépasse la partisanerie. Il s'agit de l'enseignement à la citoyenneté. Pour savoir comment vivre ensemble au XXIe siècle d'une façon paisible et harmonieuse et en donnant une chance à tout le monde, il faut que tous les citoyens comprennent les enjeux et y participent.

+-

    Mme Françoise Boivin: Tout à fait.

    Merci.

+-

    Le président: Merci beaucoup.

    Monsieur Silva.

+-

    M. Mario Silva: Merci, monsieur le président.

    Monsieur Béland, je veux savoir une chose. Dans la proportionnelle régionale, est-ce fixé pour une période de temps, pour 10 ans, par exemple?

    Deuxièmement, il y a toujours des changements de population dans la plupart des grandes villes. Comment peut-on contrebalancer cela pour les régions rurales?

+-

    M. Claude Béland: Les changements se font par un amendement à la Loi électorale. Évidemment, les régions et les façons de procéder demeurent les mêmes jusqu'à ce que la Loi électorale soit modifiée. Il ne peut en être autrement. C'est une décision qui est incarnée dans les textes de loi. Les districts qui seront créés chez nous, qui sont l'équivalent de ce qu'on appelle une région, seront précisés dans le texte de loi.

+-

    M. Mario Silva: J'ai posé la question parce que près de 80 p. 100 de la population habite dans les grandes villes. Je ne sais pas comment on peut créer des régions...

+-

    M. Claude Béland: Chez nous, c'est la Commission de la représentation électorale qui a l'autorité de recommander de changer les limites des régions s'il y a des mutations importantes dans les populations. Évidemment, c'est toujours approuvé par l'Assemblée nationale.

+-

    Le président: J'ai une question à vous poser, si vous avez une minute pour y répondre. Comment consulteriez-vous la population à l'échelle nationale, monsieur Béland?

+-

    M. Claude Béland: En l'écoutant.

+-

    Le président: Mais quel processus emploieriez-vous? Serait-ce une commission?

+-

    M. Claude Béland: Cela peut être un comité directeur ou une commission. Je souhaiterais, s'il n'était pas possible qu'elle soit entièrement citoyenne, que ce soit au moins une commission qui soit élargie à des gens qui ne sont pas des élus. Il y a une grande méfiance. Quand nous arrivions dans les régions, pendant les cinq ou dix premières minutes, les gens nous demandaient si nous étions des représentants du gouvernement. Il y avait de la méfiance. Je pense qu'il faut faire en sorte que la consultation soit le moins partisane possible.

  +-(1225)  

+-

    Le président: Proposeriez-vous que ce soit en plus ratifié par un référendum?

+-

    M. Claude Béland: Oui, absolument.

[Traduction]

+-

    Le président: Et vous?

+-

    M. David McLaughlin: Cela dépend des objectifs que vous visez. Si vos objectifs sont...

+-

    Le président: Notre mandat est très clair. Je pense qu'on vous en a envoyé une copie. Nous devons recommander un processus qui engage les citoyens et les parlementaires dans une étude de notre système électoral. Comment procéderiez-vous?

+-

    M. David McLaughlin: S'il s'agit d'une simple étude, vous pouvez mettre sur pied soit une commission composée de personnalités éminentes de l'extérieur, soit un comité parlementaire. S'il s'agit d'un processus qui va aboutir à des décisions, je crois que les attentes des gens vont changer et qu'il faudrait opter pour une assemblée des citoyens. Cette formule, dans l'ensemble, a donné des résultats, puisque l'assemblée détenait, à la fin, de réels pouvoirs.

    Voilà pourquoi je dis que cela dépend des objectifs visés. On peut faire appel, s'il s'agit d'une simple étude, à un groupe de l'extérieur, à des personnalités éminentes, ou encore à un comité parlementaire composé de représentants de la Chambre et du Sénat, c'est selon.

    Toutefois, il est important que les parlementaires participent au processus. J'insiste là-dessus, parce que cet exercice vous concerne au bout du compte et que vous apportez une perspective particulière au débat. Pour ce qui est de savoir si vous devez jouer un rôle de décision, encore une fois, cela dépend des objectifs que vous visez.

[Français]

+-

    Le président: Madame Picard, voulez-vous poser une question?

    Il y aura une question et une réponse, puis ce sera terminé.

    Monsieur Broadbent.

[Traduction]

+-

    L'hon. Ed Broadbent: J'essaie de trouver un moyen de formuler ma question.

    J'ai des idées préconçues sur ce sujet depuis 50 ans. Déjà, quand j'étais étudiant, je militais en faveur d'un système de représentation proportionnelle. Non seulement les Canadiens en général, mais de nombreux députés de la Chambre ne connaissent pas bien le principe. Nous avons eu tendance à croire, au fil des ans, que le système actuel est assez démocratique. Personnellement, je ne le crois pas. Je pense qu'il contient de sérieuses lacunes.

    Fait intéressant, vous avez tous les deux, alors que vous venez de provinces qui, à bien des égards, sont totalement différentes, proposé un système mixte. Vous avez examiné le système actuel, le système majoritaire uninominal en vigueur au Canada. Quelles sont, à votre avis, les trois grandes lacunes de ce système qui, bien sûr, présente aussi des avantages positifs?

+-

    Le président: Je vous demanderais d'être brefs.

+-

    M. David McLaughlin: Je dirais la disproportionnalité des résultats, en raison du modèle régional qui caractérise le pays et la façon dont les partis politiques s'adaptent à ce modèle obtenir des sièges, des voix.

    L'absence de représentation des femmes et d'autres groupes constitue une autre lacune.

    Enfin, la participation électorale. Je ne veux pas vraiment établir un lien trop étroit entre les deux, mais nous avons examiné les systèmes de représentation proportionnelle en vigueur dans différents pays et, selon les données disponibles, la participation électorale est légèrement plus élevée dans le système de représentation proportionnelle que dans le système majoritaire uninominal.

[Français]

+-

    M. Claude Béland: Les gens m'ont dit--et je me suis laissé convaincre facilement--qu'il fallait corriger les distorsions. En outre, ils disaient tenir à garder un lien avec le député. Ils ne peuvent pas envisager qu'il n'y ait qu'un député choisi à partir d'une liste. On m'a aussi parlé de pluralisme politique, de tiers partis ainsi que de la représentativité des femmes, des communautés culturelles et des autochtones.

+-

    Le président: Merci beaucoup.

    Je veux remercier les témoins qui ont comparu ce matin, MM. McLaughlin et Béland. Vos présentations étaient fort intéressantes.

    Avant de terminer, j'ai une question à poser aux collègues. Le professeur Peter Aucoin, qui était responsable du personnel dans le cadre de la commission Lortie, est prêt à venir témoigner. On avait déjà parlé de cette éventualité. Toutefois, il ne peut pas venir les mardis et jeudis, jours où il enseigne. Aimeriez-vous que nous prévoyions la rencontre le lundi, en soirée ou à la fin de la journée, ou le mercredi?

    Bien sûr, il faut trouver une salle disponible. Quelqu'un a une opinion à ce sujet?

+-

    M. Michel Guimond: Ce serait peut-être plus facile le mercredi. Ma collègue Mme Picard est à Ottawa du mardi au vendredi.

  -(1230)  

+-

    Le président: On va tenter d'organiser cela en tenant compte de sa disponibilité. Donc, si je comprends bien, ce serait de préférence le mercredi.

+-

    M. Michel Guimond: En effet, mais à l'impossible nul n'est tenu.

[Traduction]

-

    Le président: M. Johnston préfère le lundi. Très bien. Nous allons essayer de nous organiser. Je voulais à tout le moins avoir votre opinion là-dessus.

    Merci beaucoup.

    La séance est levée.