Passer au contenu
;

FOPO Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain
PDF

38e LÉGISLATURE, 1re SESSION

Comité permanent des pêches et des océans


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le mercredi 19 octobre 2005




¹ 1535
V         Le greffier du comité (M. James M. Latimer)
V         M. Peter Stoffer (Sackville—Eastern Shore, NPD)
V         Le greffier
V         Le greffier
V         M. Randy Kamp (Pitt Meadows—Maple Ridge—Mission, PCC)
V         Le greffier
V         Le greffier
V         M. Scott Simms (Bonavista—Gander—Grand Falls—Windsor, Lib.)
V         Le greffier
V         Le greffier
V         Le président (M. Tom Wappel (Scarborough-Sud-Ouest, Lib.))
V         Le président

¹ 1540
V         Mme Catherine Stewart (directrice des campagnes, Living Oceans Society)
V         M. Lance Morgan (expert scientifique en chef, Marine Conservation Biology Institute)

¹ 1545
V         M. Mark Butler (coordonnateur des programmes relatifs aux habitats marins et directeur interne, Ecology Action Centre)

¹ 1550
V         Mme Dorthea Hangaard (chercheuse en matière de pêches durables, Living Oceans Society)

¹ 1555
V         Mme Catherine Stewart
V         Le président
V         Mme Catherine Stewart
V         Le président
V         Mme Catherine Stewart
V         Le président
V         Mme Catherine Stewart
V         Le président
V         Mme Catherine Stewart
V         Le président
V         Mme Catherine Stewart

º 1600
V         Le président
V         Mme Catherine Stewart
V         Le président
V         Mme Catherine Stewart
V         Le président
V         Mme Catherine Stewart
V         Le président
V         M. Mark Butler
V         Le président
V         Mme Dorthea Hangaard
V         Le président
V         M. Loyola Hearn (St. John's-Sud—Mount Pearl, PCC)

º 1605
V         Le président
V         M. Wayne Eddy (pêcheur, Eastern Passage, Ecology Action Centre)
V         M. Loyola Hearn
V         Le président
V         M. Gerald Keddy (South Shore—St. Margaret's, PCC)
V         Le président
V         M. Gerald Keddy
V         Mme Dorthea Hangaard
V         Mme Catherine Stewart
V         M. Gerald Keddy

º 1610
V         M. Lance Morgan
V         M. Gerald Keddy
V         M. Lance Morgan
V         M. Gerald Keddy
V         M. Lance Morgan
V         M. Gerald Keddy
V         M. Lance Morgan
V         M. Gerald Keddy
V         M. Lance Morgan
V         Le président
V         M. Randy Kamp
V         Le président
V         M. Randy Kamp
V         Mme Catherine Stewart
V         M. Randy Kamp
V         Mme Catherine Stewart
V         M. Lance Morgan

º 1615
V         Le président
V         M. Phil Kline (conseiller principal en politiques des pêches, Oceana)
V         Le président
V         Mme Catherine Stewart
V         M. Gerald Keddy
V         M. Phil Kline
V         Le président
V         M. Phil Kline

º 1620
V         Le président
V         M. Phil Kline
V         Le président
V         M. Phil Kline
V         Le président
V         M. Jean-Yves Roy (Haute-Gaspésie—La Mitis—Matane—Matapédia, BQ)
V         Le président
V         M. Jean-Yves Roy
V         Mme Dorthea Hangaard
V         Mme Catherine Stewart
V         M. Mark Butler

º 1625
V         Le président
V         M. Jean-Yves Roy
V         M. Mark Butler
V         Mme Catherine Stewart
V         M. Wayne Eddy
V         M. Jean-Yves Roy
V         Le président
V         M. Peter Stoffer

º 1630
V         M. Phil Kline
V         M. Peter Stoffer
V         Le président
V         M. Wayne Eddy
V         Le président
V         M. Mark Butler

º 1635
V         Le président
V         M. Mark Butler
V         Le président
V         M. Wayne Eddy
V         Le président
V         M. Mark Butler
V         Le président
V         M. Mark Butler
V         Le président
V         M. Mark Butler
V         Le président
V         M. Phil Kline
V         M. Peter Stoffer
V         M. Phil Kline
V         Le président
V         Mme Dorthea Hangaard
V         Le président
V         M. Rodger Cuzner (Cape Breton—Canso, Lib.)
V         M. Mark Butler
V         M. Rodger Cuzner

º 1640
V         M. Mark Butler
V         Mme Catherine Stewart
V         M. Rodger Cuzner
V         Le président
V         M. Rodger Cuzner
V         M. Wayne Eddy
V         M. Rodger Cuzner
V         M. Wayne Eddy
V         M. Phil Kline

º 1645
V         M. Rodger Cuzner
V         Le président
V         M. Wayne Eddy
V         M. Rodger Cuzner
V         M. Wayne Eddy
V         M. Rodger Cuzner
V         Le président
V         M. Gerald Keddy
V         Le président
V         M. Gerald Keddy
V         Le président
V         M. Gerald Keddy
V         Mme Catherine Stewart
V         M. Lance Morgan

º 1650
V         Le président
V         M. Lance Morgan
V         Le président
V         M. Randy Kamp
V         M. Phil Kline
V         Le président
V         M. Mark Butler
V         M. Wayne Eddy
V         Le président
V         M. Peter Stoffer
V         Le président
V         M. Lance Morgan

º 1655
V         Le président
V         L'hon. Shawn Murphy (Charlottetown, Lib.)
V         M. Lance Morgan
V         Le président
V         M. Wayne Eddy
V         Le président
V         M. Mark Butler

» 1700
V         Le président
V         M. Phil Kline
V         L'hon. Shawn Murphy
V         Mme Catherine Stewart
V         Le président
V         M. Wayne Eddy
V         Le président
V         L'hon. Shawn Murphy
V         Le président
V         L'hon. Shawn Murphy
V         Le président
V         M. Mark Butler
V         Le président
V         M. Mark Butler
V         Mme Catherine Stewart
V         Le président










CANADA

Comité permanent des pêches et des océans


NUMÉRO 053 
l
1re SESSION 
l
38e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 19 octobre 2005

[Enregistrement électronique]

*   *   *

¹  +(1535)  

[Traduction]

+

    Le greffier du comité (M. James M. Latimer): Mesdames et messieurs, je constate que nous avons le quorum.

    Conformément aux articles 106(1) et 106(2) du Règlement, le premier point à l'ordre du jour est l'élection d'un président. Je suis prêt à recevoir les motions à cet effet.

    Monsieur Stoffer.

+-

    M. Peter Stoffer (Sackville—Eastern Shore, NPD): Au nom de mon parti, je propose que M. Tom Wappel soit élu au poste de président de notre Comité.

+-

    Le greffier: Y a-t-il d'autres candidats?

    Personne d'autre? Une fois, deux fois, trois fois; je mets la question aux voix: tous ceux qui sont pour M. Wappel à titre de président? Tous ceux qui s'opposent, le cas échéant?

    (La motion est adoptée.)

+-

    Le greffier: Je déclare M. Wappel président du Comité.

    Avant d'inviter M. Wappel à assumer ses fonctions, nous procéderons à l'élection des vice-présidents. Nous commencerons par l'élection du premier vice-président, lequel, selon le Règlement, doit être issu de l'opposition officielle.

    Je suis prêt à recevoir des motions à cet effet. Y a-t-il des propositions pour le poste de vice-président officiel du Comité?

    Monsieur Kamp.

+-

    M. Randy Kamp (Pitt Meadows—Maple Ridge—Mission, PCC): Je propose M. Gerald Keddy.

+-

    Le greffier: M. Kamp propose que M. Keddy soit le vice-président issu de l'opposition officielle.

    Y a-t-il d'autres propositions?

    Je déclare le processus de mise en candidature terminé. Tous ceux qui sont pour M. Keddy au poste de vice-président pour l'opposition officielle? Tous ceux qui s'y opposent, le cas échéant?

    (La motion est adoptée.)

+-

    Le greffier: Je déclare M. Keddy dûment élu vice-président pour l'opposition officielle.

    En vertu du Règlement, nous devons maintenant élire un vice-président qui est membre d'un parti de l'opposition, mais qui n'est pas membre de l'opposition officielle.

    Y a-t-il des propositions?

    Monsieur Simms.

+-

    M. Scott Simms (Bonavista—Gander—Grand Falls—Windsor, Lib.): Je suis très heureux, monsieur, de proposer la candidature d'un homme qui fait la fierté de la côte Est, M. Peter Stoffer.

+-

    Le greffier: Y a-t-il d'autres propositions?

    Je déclare le processus de propositions terminé. Tous ceux qui sont pour M. Stoffer à titre de second vice-président? Tous ceux qui s'y opposent, le cas échéant?

    (La motion est adoptée.)

+-

    Le greffier: Monsieur Stoffer, je vous déclare second vice-président dûment élu.

    J'invite maintenant M. Tom Wappel à occuper le fauteuil.

+-

    Le président (M. Tom Wappel (Scarborough-Sud-Ouest, Lib.)): Chers collègues, merci beaucoup. J'apprécie énormément votre confiance.

    Je tiens à vous laisser savoir que, conformément à notre décision précédente, nous accueillons des témoins aujourd'hui. Je vais les présenter dans un moment, mais je vais suspendre la séance quelques minutes, voire seulement quelques secondes--la période la plus brève possible--pour permettre au responsable de la console de s'organiser et de mettre son matériel au point.

    La séance est suspendue très, très brièvement.

¹  +-(1537)  


¹  +-(1539)  

+-

    Le président: Nous reprenons nos travaux.

    Pour le compte rendu, conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, le Comité reprend son examen de la morue du Nord incluant les événements menant à la réduction de la pêche et la défaillance des stocks de se renouveler depuis le moratoire.

    Comme vous vous en souvenez, nous accueillons les groupes qui avaient demandé à nous rencontrer, et que nous avions convenu d'entendre. Ainsi, de Living Oceans Society, nous accueillons Catherine Stewart, directrice des campagnes, et Dorthea Hangaard, chercheuse en matière de pêches durables; de l'Ecology Action Centre, Mark Butler, coordonnateur des programmes relatifs aux habitats marins et directeur interne, et Wayne Eddy, pêcheur, Eastern Passage; du Marine Conservation Biology Institute, Lance Morgan, expert-scientifique en chef; et d'Oceana, Phil Kline, conseiller principal en politiques des pêches. Bienvenue à vous tous.

    Vu les contraintes imposées aux activités de notre Comité, vous savez que vous disposez, au total, de 15 minutes pour vos déclarations préliminaires. Ensuite, bien sûr, les membres du Comité voudront évidemment poser des questions. Au moment de répondre à ces questions, vous pourrez soulever des questions supplémentaires que vous n'auriez pas pu soulever autrement, comme le font les politiciens. La question est sans importance, car vous connaissez la réponse de toute façon. Nous vous invitons à faire cela, car vous ne disposez que d'une heure. Et nous lèverons la séance vers 16 h 45, dans une heure, à moins, bien sûr, que les membres du Comité ne décident à l'unanimité de poursuivre, et de poser des questions supplémentaires, etc. Quoi qu'il en soit, je dois quitter au plus tard à 17 h 15.

    Cela dit, madame Stewart, voulez-vous prendre la parole?

¹  +-(1540)  

+-

    Mme Catherine Stewart (directrice des campagnes, Living Oceans Society): Merci beaucoup. Et merci de nous accueillir aujourd'hui. Nous vous sommes reconnaissants de consacrer votre temps et votre intérêt à cette question.

    Puisque le président Wappel a nommé tous mes collègues, je passe au vif du sujet.

    Le Premier ministre, Paul Martin, a déclaré, en mai 2005, que le temps est venu d'arrêter, une fois pour toutes, le pillage de nos océans. Nous sommes d'accord avec lui. Nous sommes à Ottawa aujourd'hui pour demander au gouvernement d'aller au-delà du discours vigoureux et de prendre des mesures, des mesures qui contribueront au rétablissement des stocks de morue du Nord et à assurer la pérennité des stocks de poisson de fond au large des deux côtes.

    Nous allons effectuer un survol des mesures que doit prendre le Canada pour résoudre le problème lié au chalutage de fond. Nous allons parler des aspects scientifiques, des mesures prises par d'autres pays à l'égard de cet enjeu, et nous allons décrire certaines des solutions que nos groupes recommanderaient.

    D'abord et avant tout, par contre, nous invitons le Comité à songer au fait que le gouvernement du Canada doit changer sa position actuelle en matière de chalutage de fond. Le ministre des Pêches a soutenu, sur des tribunes internationales, que le chalutage de fond n'est pas plus destructeur que d'autres méthodes. Or, des chercheurs de partout dans le monde s'entendent pour dire le contraire. Nous croyons que le Canada doit voir la réalité en face : le matériel de pêche au chalut est destructeur en soi, et ne devrait pas être utilisé dans des écosystèmes délicats, et nous devons faire la transition vers des méthodes plus durables afin d'assurer le rétablissement des stocks de morue et la pérennité des poissons de fond au large des deux côtes.

    Je cède la parole à Lance Morgan, qui va vous donner un aperçu des recherches scientifiques menées dans le domaine.

+-

    M. Lance Morgan (expert scientifique en chef, Marine Conservation Biology Institute): Je tiens à vous remercier de nouveau de l'occasion qui nous est offerte de nous adresser au Comité cet après-midi. Merci de nous écouter.

    Les coraux, les éponges et les autres organismes des grands fonds qui jonchent le sol marin constituent, de fait, le berceau des poissons, de la morue et d'autres animaux aquatiques, et ils permettent également à ces organismes de se nourrir. Alors, lorsqu'on se penche sur le rétablissement du stock de morue, il est peut-être indiqué de se demander si son habitat est propice à un tel rétablissement. Jeff Hutchings, de l'Université Dalhousie, a examiné cette question de façon approfondie et il a conclu que, de fait, l'incapacité de la morue de se rétablir tient en partie au fait que son habitat n'est plus disponible. D'autres scientifiques, en particulier des chercheurs de la Nouvelle-Angleterre, aux États-Unis, se sont penchés sur la question, et ont découvert que le taux de survie est beaucoup plus élevé chez les jeunes morues : elles sont en mesure de se cacher dans ces structures lorsqu'il y a des prédateurs aux alentours, de sorte que leur survie, de toute évidence, ne peut être que meilleure à cette époque de leur vie, lorsqu'elles peuvent trouver refuge dans les coraux.

    De fait, on a mené de nombreuses études--dont une recherche d'envergure menée par le National Research Council, aux États-Unis--sur le chalutage de fond, le dragage, et son impact sur le plancher océanique. Ils ont conclu, bien sûr, que le chalutage de fond--si vous aviez vu les filets qu'on utilise, et si vous aviez vu certains de ces rouleaux, vous ne seriez pas étonnés d'apprendre une telle chose--réduit de façon massive la productivité du plancher océanique, et écrase les coraux et d'autres structures. Et, de fait, M. Eddy, qui est pêcheur, pourra en parler plus en détail, et vous faire part de ses observations, fondées sur son expérience de pêcheur.

    Le Conseil international pour l'exploration de la mer, ou CIEM, s'est également penché sur la documentation scientifique relative aux coraux des grands fonds et à l'incidence de la pêche sur les éponges et les coraux, et il a également conclu que le chalutage de fond est la méthode de pêche dont l'impact sur ces habitats vulnérables est le plus néfaste.

    Pas plus tard que l'an dernier, la commission royale a également examiné l'incidence environnementale de la pêche, et a recommandé que toute activité de chalutage de fond soit interdite en eaux britanniques.

    Je suis co-auteur d'un rapport intitulé Shifting Gears. Ce rapport porte sur l'incidence environnementale de dix années de pêche différentes, et les chercheurs, les protecteurs de l'environnement, les pêcheurs et les gestionnaires s'entendent pour dire que le chalutage de fond est la méthode de pêche la plus dommageable pour l'environnement.

    On ne s'étonnera pas d'apprendre que, grâce aux technologies modernes permettant d'examiner le plancher océanique, nous avons été en mesure d'obtenir des images de partout dans le monde qui nous montrent de quoi a l'air un plancher océanique sain, où il n'y a jamais eu de chalutage de fond, ainsi que des images du nivelage dévastateur occasionné par le passage de l'attirail de chalutage dans diverses régions. Cela s'est produit en Australie, en Norvège, au Canada et aux États-Unis, et nous serions heureux de vous acheminer certaines de ces photos à une date ultérieure.

    Enfin, ces preuves scientifiques ont incité plus de 1 000 chercheurs, en 2004, à signer une pétition en vue de demander aux Nations Unies d'imposer un moratoire jusqu'à ce qu'on mette en place une réglementation efficace pour interdire le chalutage de fond, dont les effets sur la haute mer, en particulier les monts sous-marins et les coraux qui vivent sur ces monts sous-marins, inquiètent énormément les chercheurs dans ce domaine.

    Sur ce, je cède la parole à Mark.

¹  +-(1545)  

[Français]

+-

    M. Mark Butler (coordonnateur des programmes relatifs aux habitats marins et directeur interne, Ecology Action Centre): Merci Lance.

    Je vous remercie de nous donner l'occasion de nous présenter devant le comité. Je vais dire quelques mots en français. Nous avons apporté le filet de chalutier, l'équipement de chalutage à Ottawa pour montrer aux Canadiens le problème en ce qui concerne la pêche au chalut et la grosseur de l'équipement. Toutefois, ce qui nous intéresse, c'est la solution.

[Traduction]

    C'est à cela que j'aimerais m'attacher : aux solutions.

    L'une des solutions que le ministre des Pêches pourrait appliquer demain consisterait à geler la superficie, à ne pas autoriser l'expansion du chalutage de fond à d'autres pêches ou à d'autres zones. Je crois que quelques députés membres de votre Comité--par exemple, Gerald Keddy--sont au courant de la controverse occasionnée par l'ouverture de zones riches en homard à la pêche à la drague du pétoncle, sans aucune preuve à l'appui, dans le sud-ouest de la Nouvelle-Écosse, ou par la récente ouverture au dragage de zones au large de l'ouest de Terre-Neuve, après dix ans d'interdiction, et après que des pêcheurs ont signalé un certain rétablissement de l'habitat que constitue le plancher marin. Je crois que c'est une décision particulièrement regrettable

    En ce qui concerne les solutions, les deux études mentionnées par Lance, soit celle du CIEM et celle du National Research Council aux États-Unis, en ont cerné trois : réduire les efforts, protéger les zones et utiliser du matériel moins destructeur. Je crois que nous savons tous que la réduction des efforts nous a été plus ou moins imposée. Quand il n'y avait plus de poisson, nous avons fermé les pêches.

    La protection des zones a au moins l'avantage de faire partie du vocabulaire du MPO. La fermeture de zone est une notion que le ministère peut comprendre. Lorsqu'il est question d'interdire le chalutage dans certaines zones, il ne se passe pas grand-chose. Mais c'est la troisième solution, l'utilisation du matériel moins destructeur, qui m'intéresse tout particulièrement, car c'est la seule solution qui ne prévoit pas tout simplement l'arrêt de la pêche; c'est une solution qui envisage les choses différemment. J'aime le poisson : j'aimerais seulement qu'on fasse les choses comme il se doit.

    J'aimerais vous lire deux citations. La première est du ministre Geoff Regan, s'adressant à l'ONU, en novembre 2004, au sujet du moratoire relatif aux grands fonds. Voici ce que M. Regan a déclaré :

La position du Canada est qu'aucun équipement de pêche n'est destructif en soi; cela dépend de la façon dont on l'utilise. L'expérience démontre que tout type d'équipement peut avoir des impacts négatifs.

    Mais lorsqu'on demande l'avis du gestionnaire des pêches... voici une citation de Leslie Burke, de la Direction de la gestion des pêches, secteur de Scotia-Fundy, en Nouvelle-Écosse : « Le dragage est une méthode de pêche qui peut avoir une incidence sur le plancher océanique, mais cela est vrai de toutes les autres formes de pêche. »

    On a des organismes scientifiques internationaux qui recommandent l'utilisation de matériel moins destructeur, et le MPO et son ministre--et, franchement, je crois que le ministre n'est pas bien conseillé--disent qu'il n'y a pas de matériel plus ou moins destructeur que d'autres. Je n'arrive pas vraiment à comprendre comment on pourrait comparer un leurre de dix onces ou un hameçon avec l'attirail qui a été déployé sur la Colline du Parlement, qui fait dix tonnes. Comment peut-on dire qu'il n'y a pas de matériel plus destructeur que d'autre?

    Et ce n'est pas parce que le ministre n'est pas conscient de l'importance de l'habitat. Laissez-moi vous lire cette citation :

Le lien qui existe entre la santé des pêches et celle de l'habitat du poisson ne fait absolument aucun doute. L'équation est d'une cruelle simplicité : pas d'habitat, pas de poisson.

    C'est ce que Geoff Regan a déclaré en janvier 2005. Il y a une rupture entre sa politique relative aux engins de pêche et cette déclaration. Or, la formule « pas d'habitat, pas de poisson » est très prisée de la Direction de la gestion de l'habitat. Il y a parfois lieu de se demander s'il s'agit d'un slogan ou d'un but.

    Pour terminer, pourquoi ne pouvons-nous pas adopter une position plus réaliste et plus raisonnable à l'égard des engins de pêche? En passant, nous ne demandons pas que le chalutage soit interdit. Nous demandons que des mesures raisonnables soient prises. Nous avons des chercheurs qui disent que nous devons nous pencher sur cet enjeu. Je parierais que 80 p. 100 des pêcheurs de la Région atlantique du Canada seraient en faveur d'une certaine restriction du dragage. Nous avons commandé la tenue d'une enquête auprès des Canadiens de la Région atlantique--et je crois qu'elle était plutôt juste, car on l'a formulée de façon à ce qu'elle soit objective--, et 70 p. 100 des répondants souhaitaient qu'on impose des restrictions au chapitre du dragage, et 20 p. 100 voulaient qu'on interdise complètement le chalutage. Je tiens à signaler que, sur l'Île-du-Prince-Édouard et à Terre-Neuve, 26 p. 100 des répondants voulaient qu'on interdise totalement le chalutage. Au Nouveau-Brunswick et en Nouvelle-Écosse, les statistiques étaient légèrement inférieures. C'est une position plus radicale, je crois, que la nôtre.

    Je m'en tiendrai à cela, et je cède la parole à Dorthea.

¹  +-(1550)  

+-

    Mme Dorthea Hangaard (chercheuse en matière de pêches durables, Living Oceans Society): Merci, Mark.

    Je vais vous entretenir de la situation internationale, mais j'aimerais seulement, si vous n'y voyez pas d'inconvénient, parler brièvement de la situation au pays.

    J'aimerais parler de la Colombie-Britannique pour un moment, car je crois que votre Comité, au cours des années à venir, devra pousser son examen bien au-delà du rétablissement des stocks de morue du Nord si on ne règle pas la question du chalutage de fond à l'échelle nationale. Vous aurez, certes, du pain sur la planche.

    Je vous présente une statistique qui vous donnera une idée du niveau d'activité de la flotte de chalutiers en Colombie-Britannique. Ces chiffres sont tirés de la base de données des observations des captures au chalut de Pêches et Océans Canada. Entre 1996 et 2002, on a rejeté 68 millions de kilogrammes de prises accessoires en Colombie-Britannique. Imaginez une ligne de camionnettes s'étirant de Vancouver à Prince George, et cela vous donne une idée de la quantité de prises que rejette à la mer la flotte de chalutiers de la Colombie-Britannique. C'est donc un enjeu important dans notre province, et, si on ne prend pas de mesures à l'échelle nationale, le problème ira bien au-delà du rétablissement des stocks de morue du Nord.

    Je vais principalement concentrer mon propos sur la position du Canada en ce qui concerne le chalutage en haute mer.

    Depuis 15 ans, le Canada est l'un des principaux promoteurs de la conservation des océans aux Nations Unies. Je crois que nos efforts en ce sens sont fort louables, mais j'avancerais que, jusqu'à maintenant, il ne s'agit que de belles paroles. Absolument rien n'a été mis en branle pour appliquer ces idées dans la pratique.

    En raison de notre programme de conservation, nous avons fini avec l'Entente des Nations Unies sur les stocks de poisson et le Code de conduite pour une pêche responsable de l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture, comme, j'en suis certaine, vous le savez déjà.

    Je tiens à signaler que, dans les articles 5 et 6 de l'Entente des Nations Unies sur les stocks de poisson, dont le Canada est signataire, et que nous sommes tenus de respecter, nous nous engageons à faire ce qui suit : appliquer une approche prudente afin de prévenir la surpêche; protéger les habitats particulièrement menacés; évaluer l'impact de la pêche; et réduire au minimum l'impact de la pêche.

    Il y a trois ans que l'Assemblée générale de l'ONU a lancé un appel urgent à la prise de mesures pour protéger les écosystèmes fragiles, mais rien n'a été fait. Ce ne sont que des mots écrits sur une page. Nous allons vous décrire ce que le Canada pourrait être en train de faire dans le cadre des pourparlers qui ont actuellement lieu aux Nations Unies.

    Il y a actuellement des délégués du Canada aux Nations Unies. Ils négocient actuellement des résolutions de portée générale relatives aux océans et au droit de la mer et aux pêches durables. Jusqu'à maintenant, la seule disposition acceptée par notre gouvernement qui pourrait donner suite à l'appel urgent des Nations Unies à la protection des écosystèmes fragiles est bien modeste. Je vais vous la lire.

    Il s'agit d'une résolution de portée générale sur les océans et le droit de la mer, à l'alinéa 11c) :

c) demande aux organisations régionales de gestion des pêches et aux parties à des ententes actuellement habilitées à prendre des mesures spatiales et temporelles visant à protéger les marins vulnérables de le faire de toute urgence;

    Essentiellement, cette disposition propose que les organisations régionales de gestion des pêches soient responsables de l'établissement d'un régime de gestion visant à protéger les écosystèmes fragiles en haute mer.

    Vous savez probablement tous qu'il n'y a, dans le monde, que cinq organisations régionales de gestion de la pêche qui sont responsables du poisson de fond. Autrement dit, 70 p. 100 du territoire en haute mer ne relève d'aucune organisation régionale de gestion des pêches. Ce n'est là que le premier problème à l'égard de la voie retenue par le Canada, et c'est la seule voie qu'il ait accepté jusqu'à maintenant à l'ONU.

    Le deuxième problème, c'est que la création de ces régimes de gestion sera reportée jusqu'en 2006. Alors, on ne va se pencher sur ce problème que dans un an, même si les Nations Unies lancent un appel urgent à l'action depuis trois ans. Nous savons tous qu'à partir du moment où ils vont s'asseoir pour examiner la question, il faudra encore des années avant qu'un régime de gestion soit mis en place. Alors, nous pouvons être certains que rien ne va se produire pendant plusieurs années, qu'il s'agisse de mesures relevant d'une ORGP ou pas. Qu'allons-nous faire à ce sujet?

    Le troisième problème que j'aimerais signaler concerne le groupe consultatif que le MPO a chargé d'examiner l'OPANO. Je suis certaine que vous êtes tous au courant de l'existence de groupe consultatif, qui a conclu que l'OPANO devrait être dissoute, faisant valoir qu'elle était inefficace. C'est l'organisme que le MPO....

    Je passe à la conclusion.

¹  +-(1555)  

    Je tiens à mentionner que la position du Canada aux Nations Unies s'approche énormément de celle de l'Espagne, et c'est ce pays qui nous préoccupe le plus. Le Canada et l'Espagne croient tous deux qu'un moratoire sur le chalutage de fond ne pourrait être exécuté, et qu'aucun type d'engin de pêche est plus destructeur qu'un autre. Alors, il y a quelque chose qui cloche dans tout cela.

    Je m'arrête là.

+-

    Mme Catherine Stewart: Il y a beaucoup d'information que nous aimerions partager avec vous, et je suis certaine qu'une partie de cette information ressortira au moment de la période de questions. Nous avons fait circuler un document, dans les deux langues officielles, s'assortissant de quatre recommandations.

    Dans la première recommandation, nous faisons valoir que le Canada doit changer sa position et reconnaître la validité du nombre croissant de recherches scientifiques à l'échelle internationale selon lesquelles les chalutiers de fond détruisent le milieu benthique, détruisent les espèces et éliminent des récifs coralliens et spongieux, dont certains sont rares dans le monde. Il y a en Colombie-Britannique des récifs qu'on ne retrouve nulle part ailleurs dans le monde. Ils ont jusqu'à 9 000 ans, et ils se font passer dessus par les engins de pêche au chalut. Si vous n'avez jamais vu de tels engins, allez jeter un coup d'oeil sur la pelouse devant l'édifice du Centre aujourd'hui. Cela vaut le déplacement, ne serait-ce que pour voir les bourrelets saute-roche et les rouleaux. On ne peut les regarder sans comprendre, instinctivement, qu'ils causent énormément de dommages et de destruction...

+-

    Le président: Je m'excuse de vous interrompre. J'ai devant moi un communiqué de presse. C'est de cela que vous parlez?

+-

    Mme Catherine Stewart: Non. Nous avons fait circuler le communiqué de presse, mais nous avons également fait circuler un document qui s'assortit de quatre recommandations.

+-

    Le président: C'est exactement pour cette raison que je vous pose la question.

+-

    Mme Catherine Stewart: Merci, monsieur Wappel. Je crois qu'on est en train de le distribuer.

+-

    Le président: Je l'ai maintenant, alors, avant que vous ne passiez au mot de la fin, laissons tous les membres du Comité y jeter un coup d'oeil.

+-

    Mme Catherine Stewart: Désolée, je ne savais pas que le document n'avait pas encore été distribué.

+-

    Le président: Ce n'est certainement pas votre problème.

+-

    Mme Catherine Stewart: Je crois que nous avons surpris le greffier du Comité en fournissant deux documents dans les deux langues officielles. J'aurais aimé qu'on puisse les fournir tous.

+-

    Le président: Comme il l'a dit, c'est une agréable surprise.

+-

    Mme Catherine Stewart: Parmi nos suggestions de mesures que le Canada devrait prendre, la première concerne le fait que nous devons reconnaître que ces engins de pêche minent les efforts de rétablissement des stocks de morue et l'avenir des autres stocks de poisson de fond, non seulement dans notre ZEE, mais aussi en haute mer.

    Deuxièmement, nous demandons au gouvernement de prendre immédiatement des mesures concrètes pour réduire les activités de chalutage dans notre zone économique exclusive. Par exemple, en Colombie-Britannique, même si le MPO a mis en réserve certaines zones et établi des zones d'interdiction de chalutage à l'égard de quelques petites zones où l'on trouve des récifs coralliens et spongieux représentatifs qui sont uniques au monde, il n'y a pas encore de protection complète de ces récifs. Elles sont si petites et inadéquates qu'elles ne suffiraient jamais à soutenir cet écosystème bien longtemps.

    Il faudrait prendre des mesures concrètes, comme protéger les écosystèmes vraiment rares et en voie de disparition, interrompre toute expansion de l'empreinte de la flotte de chalutiers actuelle, afin qu'ils ne puissent pas s'étendre et dévaster des zones où il n'y a pas encore eu de chalutage de fond, et tenter de soutenir la biodiversité de ces zones pendant que nous nous affairons au moins à faire le travail scientifique de base pour comprendre quels sont les risques liés à l'expansion des pêches.

    Nous demandons au gouvernement de créer des incitatifs visant à encourager la transition des pêcheurs par chalutier vers des engins de pêche davantage axés sur la viabilité, en vue d'assurer l'avenir non seulement des stocks de poisson, mais aussi des collectivités de pêcheurs sur l'ensemble de nos côtes, qui dépendent de la viabilité à long terme de ces stocks.

    Enfin, nous demandons au gouvernement canadien d'appuyer l'appel des Nations Unies à l'imposition d'un moratoire sur le chalutage en haute mer. C'est absolument essentiel. Nous savons tous que le Canada a, au fil des ans, fait beaucoup de bruit au sujet de l'impact des chalutiers étrangers sur le nez et la queue des Grands Bancs. Nous avons enfin l'occasion de faire quelque chose à cet égard, de jouer un rôle directeur au sein de la communauté mondiale, et de promouvoir l'établissement d'un moratoire temporaire sur le chalutage en haute mer pendant que nous tentons de repérer les zones les plus vulnérables aux effets destructeurs de ces engins.

    Compte tenu des préoccupations soulevées par nos citoyens, d'un océan à l'autre, au sujet de l'effondrement de la pêche à la morue, et de la colère dirigée vers les flottes étrangères à l'extérieur de notre zone économique, il incombe à notre gouvernement d'adopter un rôle directeur et de veiller à ce que le moratoire proposé aux Nations Unies soit adopté.

    Je vous remercie de votre attention. Nous sommes prêts à répondre à vos questions et à discuter.

    N'hésitez surtout pas à interroger directement Phil Kline, des États-Unis, qui peut parler des mesures que prend le gouvernement américain au chapitre du chalutage de fond, ainsi que Wayne Eddy, pêcheur commercial de la Nouvelle-Écosse, qui peut vous parler en connaissance de cause de l'impact de ces engins sur la durabilité des pêches côtières locales.

º  +-(1600)  

+-

    Le président: Merci beaucoup. Avant de passer aux questions, j'aimerais clarifier quelques points. Est-ce que « dragage » est synonyme de « chalutage de fond »?

+-

    Mme Catherine Stewart: Oui.

+-

    Le président: D'accord.

    Deuxièmement, madame Stewart, j'éprouvais de la difficulté avec mon écouteur pendant votre témoignage. J'ai cru vous entendre dire que vous vouliez interdire le chalutage de fond.

+-

    Mme Catherine Stewart: Non. Nous demandons au Canada de soutenir le moratoire sur le chalutage en haute mer. Nous demandons la fermeture de certaines zones où l'on trouve des écosystèmes extrêmement rares, ou en voie de disparition. De fait, nous demandons l'interdiction du chalutage non pas sur l'ensemble du territoire, mais bien dans certaines zones désignées. Mais nous demandons que soit amorcée une transition des pêcheurs au chalut vers d'autres engins, lorsqu'il existe d'autres méthodes d'exploitation d'un stock donné. Dans certains cas, comme la pêche à la drague au pétoncle, le chalutage est la méthode privilégiée. Je suis certaine que nous pourrions trouver une solution de rechange. Mais, essentiellement, lorsqu'il y a possibilité d'utiliser la ligne et l'hameçon ou des engins de pêche plus axés sur la viabilité, nous devrions passer à ces méthodes.

+-

    Le président: D'accord. Je ne suis pas vraiment censé poser des questions. Je suis censé laisser les membres du Comité poser des questions. J'essaie seulement...

+-

    Mme Catherine Stewart: Ce n'était qu'une précision.

+-

    Le président: ...d'obtenir des précisions.

    Monsieur Butler, vous dites que vous ne voulez pas d'expansion de la pêche au chalut. Ce n'est pas la même chose que demander l'établissement immédiat d'un moratoire temporaire. Appuyez-vous l'établissement d'un tel moratoire?

+-

    M. Mark Butler: Oui, nous demandons l'établissement d'un moratoire en haute mer, à l'extérieur de la limite de 200 milles. À l'intérieur de la zone de 200 milles, nous voulons l'interruption de toute expansion de l'empreinte--c'est comme ça qu'on l'appelle--de la flotte, et l'utilisation d'engins plus viables dans certaines zones fermées, fragiles.

+-

    Le président: À ce sujet, Mme Hangaard a déclaré que le Canada n'a rien fait. Il semble qu'en août 2004 on a fermé l'accès à un récif corallien d'eau froide, au large des côtes de la Nouvelle-Écosse. N'est-ce pas ce dont vous parlez? N'est-ce pas quelque chose?

+-

    Mme Dorthea Hangaard: Je parlais d'enjeux touchant la haute mer. Le Canada a pris des mesures de protection dans ses eaux intérieures. Ce n'est pas suffisant, mais le Canada a certainement pris des mesures.

+-

    Le président: D'accord, merci.

    Qui veut commencer? M. Hearn, porte-parole de l'opposition officielle à l'égard des Pêches et des Océans, peut avoir la parole pour 10 minutes.

+-

    M. Loyola Hearn (St. John's-Sud—Mount Pearl, PCC): Merci beaucoup, monsieur le président. Je partagerai le temps qui m'est consenti, car nous n'aurons peut-être pas tous l'occasion d'intervenir.

    Je tiens à remercier nos invités d'être venus, et, laissez-moi vous le dire d'emblée, je n'ai absolument rien à redire à pratiquement tout ce que vous avez dit. Toutefois, nous ne nous entendrons peut-être pas sur la façon de faire.

    Je suis préoccupé par l'application du mot « moratoire » à la haute mer, car je crois que cela va occasionner une levée de boucliers; certains diront « pas question ». J'aime bien l'approche qui consiste à protéger des zones fragiles, comme les récifs coralliens, mais vous n'avez aucunement parlé des lieux de frai. On a détruit un trop grand nombre d'habitats; des stocks de poisson ont été éliminés par la pêche au chalut et la surpêche constantes. Certes, je n'ai aucune objection à ce qu'on lance une démarche qui mènerait à l'interdiction totale du chalutage en haute mer, dans certaines zones fragiles.

    Toutefois, certaines espèces peuvent être très difficiles à pêcher si on ne mise pas sur une technologie comparable. Pouvons-nous améliorer ces technologies? C'est probable. Y a-t-il une autre technologie qui permettrait de pêcher le flétan ou la crevette? Je l'ignore, et ce sont de grandes questions auxquelles il faudra répondre. Toutefois, quelqu'un doit faire le premier pas. Nous avons consacré beaucoup d'efforts à la question de la morue du Nord, et, certes, la principale raison de la disparition de la morue est la surpêche occasionnée par le chalutage, et la destruction des stocks en général. Cependant, en ce qui concerne l'enjeu plus délicat de rallier les gens à cette cause, si nous leur disions d'emblée que nous voulons mettre fin au chalutage, il y aurait une levée de boucliers et les gens s'y opposeraient. Si nous parlions de l'interdire graduellement dans certaines zones où l'on trouve des espèces fragiles -- dans certains lieux de frai--, alors je crois que nous pourrions obtenir leur soutien. En attendant, nous pouvons tenter de déterminer comment éliminer l'effet de cette activité sur la destruction de l'habitat d'autres espèces, dont la capture exige probablement l'utilisation de certaines technologies.

    Je me demande ce que vous pensez de cela.

º  +-(1605)  

+-

    Le président: Monsieur Eddy, allez-y.

+-

    M. Wayne Eddy (pêcheur, Eastern Passage, Ecology Action Centre): Quand vous avez parlé d'autres types d'engins permettant de pêcher diverses espèces, vous avez mentionné les crevettes et le flétan. Eh bien, le flétan a une bouche, alors nous pouvons l'attraper avec des hameçons. Et maintenant, il existe des casiers à crevettes dont le fonctionnement ressemble aux casiers à homards. Alors, il y a d'autres méthodes, quelle que soit la catégorie.

    Ce qui semble vous échapper, je crois, c'est que le chalutage de fond est la première cause de destruction de l'habitat en importance. Il y a le chalutage pélagique, et il y a d'autres formes de chalutage. Il y a d'autres méthodes qui pourraient fonctionner dans le cadre de la pêche à la crevette, et ainsi de suite. Il est compréhensible qu'on veuille recourir au chalutage de fond.

    Assurez-vous d'aller jeter un coup d'oeil à ce matériel pendant qu'il est sur la Colline du Parlement, car nous allons le reprendre ce soir. Vous comprendrez tout le potentiel destructeur de ces engins.

+-

    M. Loyola Hearn: J'aimerais soulever rapidement une question, monsieur le président, et je passerai ensuite la parole à quelqu'un d'autre.

    Mon commentaire porte sur les personnes qui sont déjà concernées. Je suis bien au courant des divers engins existants; j'ai grandi sur un bateau, et j'ai utilisé à peu près tous les types d'engins qui soient. Ma région et mon foyer ont essentiellement été détruits économiquement, en raison de ce qui est arrivé aux pêches.

+-

    Le président: Monsieur Keddy.

+-

    M. Gerald Keddy (South Shore—St. Margaret's, PCC): Combien de temps nous reste-t-il?

+-

    Le président: Vous avez six minutes et 26 secondes.

+-

    M. Gerald Keddy: Aviez-vous quelque chose à...?

+-

    Mme Dorthea Hangaard: En ce qui concerne le moratoire sur le chalutage en haute mer, il y a des détails que j'aimerais ajouter.

    Nous devons établir un moratoire sur le chalutage de fond en haute mer jusqu'à ce qu'on possède les données scientifiques, jusqu'à ce qu'on ait effectué les recherches et élaboré un régime de gestion et cerné les zones en haute mer qui sont fragiles et qui doivent être protégées. Si nous ne faisons pas cela, ils vont continuer de pêcher au chalut jusqu'à ce qu'il soit trop tard. Cela va prendre du temps.

+-

    Mme Catherine Stewart: Est-ce que je pourrais ajouter brièvement un commentaire à cela?

    Je comprends la distinction entre la haute mer et notre ZEE et comment nous devons aborder ces enjeux. Je crois que vous avez absolument raison, lorsqu'il est question de la ZEE, de dire que nous devons envisager l'établissement d'un plan de transition, examiner l'impact sur les collectivités, l'impact sur les pêcheurs, déterminer comment changer et transformer cela lentement. Je crois que, en ce qui concerne la haute mer, la majorité des Canadiens appuieraient certainement un moratoire qui interdirait l'accès des chalutiers espagnols et portugais au nez et à la queue des Grands Bancs. Si c'est présenté dans le contexte de la haute mer, il y aura de la contestation, mais il y a eu énormément de contestation quand nous avions mené une campagne en faveur du moratoire sur les filets dérivants; néanmoins, les Nations Unies l'ont appuyé.

    Alors c'est possible.

+-

    M. Gerald Keddy: Merci beaucoup, et bienvenue à nos invités.

    J'ai deux points à soulever. En ce qui concerne le point soulevé par Mark au sujet de la zone 29 et de l'habitat des homards, au large du sud-ouest de la Nouvelle-Écosse, l'un des aspects frustrants--du moins pour moi, car j'essaie de représenter une circonscription rurale qui tire sa subsistance de la pêche, et je suis membre de ce comité--, c'est que nous n'adoptons pas une approche raisonnable, responsable. Sur la question du chalutage de fond dans la zone 29, par exemple, les pêcheurs eux-mêmes sont autorisés à pêcher là-bas--les pêcheurs de homards qui attrapent du homard là-bas veulent pêcher le pétoncle à la drague. Ils le font à une vitesse de deux à quatre noeuds, de sorte que les homards ont tout le temps nécessaire pour s'écarter. Ils sortent les bateaux de la baie de Fundy pour draguer le même fond; ils le font à une vitesse de six à huit noeuds ou même plus rapidement, et ils attrapent les homards.

    Ainsi, il y a des solutions plutôt raisonnables, responsables, assez élémentaires à certains de ces problèmes, et nous ne nous penchons même pas sur ces solutions. C'est juste que je trouve cela un peu frustrant.

    Est-ce que quelqu'un, peut-être M. Morgan, a de l'information sur...? Et, en toute franchise, je dois vous dire que j'aime la notion d'empreinte. C'est une idée fantastique. Gardons l'empreinte que nous avons maintenant, veillons à ce qu'elle ne s'élargisse pas. Mais si, demain, nous mettions un terme à la pêche au chalut aux poissons de fond--j'aimerais écarter la flotte de pêcheurs de pétoncle de cette conversation, si vous le permettez--dans une zone donnée, combien de temps le plancher océanique mettrait-il pour se rétablir?

º  +-(1610)  

+-

    M. Lance Morgan: Je dirais, de mémoire, que la perspective de rétablissement immédiat n'est pas très bonne.

+-

    M. Gerald Keddy: Ce n'est pas la réponse que je voulais entendre.

+-

    M. Lance Morgan: Je crois qu'il y a un certain potentiel de rétablissement, mais, dans un grand nombre de cas, nous avons nivelé tout ça. Nous parlons, du moins dans le cas des coraux, d'organismes qui peuvent mettre des centaines d'années... à se régénérer. Selon moi, les occasions qui s'offrent à nous concernent davantage cette idée d'empreinte, car il y a encore des habitats qui n'ont pas été touchés par le chalutage de fond. Par conséquent, en raison de la gravité de la situation, il serait tout à fait sensé de prévenir toute expansion supplémentaire pour l'instant.

    Je crois que certaines choses pourront se rétablir avec le temps. Aux endroits où des navires ont coulé, ce genre de choses, nous avons constaté que les épaves sont colonisées par une riche faune et flore marine. Qu'elles aient été coulées par une torpille pendant la Seconde Guerre mondiale ou par autre chose, les épaves finissent effectivement par être recolonisées.

    Alors, il y a de l'espoir, mais je ne crois pas que cela va...

+-

    M. Gerald Keddy: Savez-vous combien de temps cela prendrait?

+-

    M. Lance Morgan: Je n'oserais pas m'avancer.

+-

    M. Gerald Keddy: Quand l'Arrow a sombré, au large des côtes de la Nouvelle-Écosse, de bonnes quantités de bunker C se sont retrouvées au fond, et on aurait de la difficulté à trouver cela aujourd'hui. Je crois qu'il a fallu attendre de huit à dix ans--j'ai l'information quelque part--avant que le plancher océanique ne soit recolonisé.

+-

    M. Lance Morgan: Si, par recolonisation, vous entendez l'ensemble du processus, la repousse dans un habitat qui a une certaine complexité verticale, je sais que, dans le cas de certains des destroyers qui ont coulé au large de la côte méridionale des États-Unis pendant la Seconde Guerre mondiale, on a constaté, 50 ans plus tard, que des coraux avaient connu une croissance assez importante sur les épaves, mais 50 ans, c'est long.

+-

    M. Gerald Keddy: Je ne parlais pas particulièrement des coraux. Je ne crois pas qu'il y ait grand-chose à faire à l'égard des coraux endommagés par le dragage. Ils ne vont pas se rétablir en cinq ou dix ans. Je m'intéresse plutôt à un plancher océanique qui serait favorable aux poissons de fond en particulier.

+-

    M. Lance Morgan: Le principal problème à cet égard, selon moi, c'est que nous n'avons pas, à l'heure actuelle, fermé suffisamment de zones pour vraiment nous pencher sur ce processus. Quand on a fermé des zones sur le banc de Georges, aux États-Unis, les pétoncles sont revenus assez rapidement. Environ 10 ans plus tard, la récolte de pétoncles y était très bonne. Dans le cas des autres poissons de fond, on voit de petites poussées, et les gens parlent de rétablissement, mais ce n'est qu'un pour cent de la biomasse historique.

+-

    Le président: Monsieur Kamp.

+-

    M. Randy Kamp: J'ai combien de temps?

+-

    Le président: Suffisamment de temps pour poser une question.

+-

    M. Randy Kamp: D'accord.

    Je suis un peu confus. J'ai un certain nombre de questions, mais laissez-moi vous poser la suivante.

    Vous avez commencé votre témoignage aujourd'hui--et j'ai également assisté à l'exposé qui a eu lieu pendant l'heure du dîner--, et vous aviez parlé plus en détail du fait que la documentation scientifique est catégorique, en quelque sorte, sur le fait que c'est destructeur, disons. Vous demandez qu'on établisse un moratoire jusqu'à ce qu'on dispose de preuves scientifiques. Y a-t-il de l'information, oui ou non? Y a-t-il interdiction, oui ou non?

+-

    Mme Catherine Stewart: Il y a des données scientifiques relatives à la technologie. Le moratoire permettrait de mener des recherches en vue de cerner, en haute mer, les écosystèmes rares, vulnérables, très complexes et spéciaux. Cette recherche n'a pas été effectuée.

+-

    M. Randy Kamp: Alors, il y a des endroits où ce n'est pas grave si l'activité est destructrice. Nous pouvons continuer à recourir à cette méthode.

+-

    Mme Catherine Stewart: Je crois que je m'en remettrais à Lance, dans ce cas-là.

+-

    M. Lance Morgan: Si je comprends bien la position, ce que je crois être la position appropriée, cela revient au point soulevé par M. Hearn, selon lequel il y a des endroits où nous devons assurer une transition en vue de passer de la pêche au chalut à d'autres méthodes. Il y a d'autres zones où le plancher océanique constitue un habitat complexe pour les éponges et les coraux, et où il ne faudrait pas draguer du tout. Aux États-Unis, la question est envisagée davantage comme une approche complète de zonage, de sorte que certains types d'engins sont reconnus pour ce qu'ils sont, et l'exploitation peut être durable.

    Au Canada, c'est un passage à la pêche aux lignes dans les zones côtières, et il y a peut-être, au large, des zones où le dragage peut se poursuivre. Mais il faut que cela s'inscrive dans une méthode et une analyse. Phil peut probablement parler de cela aussi, de ce qui s'est passé aux États-Unis, où on s'est penché sur les habitats, et on a cartographié une partie du plancher océanique. La Plate-forme Scotian a été bien cartographiée, d'après ce que je sais, et on pourrait manifestement l'examiner et, probablement, avec un bon processus de collaboration entre les pêcheurs et les chercheurs, examiner les divers types d'habitats et créer une pêche aux lignes côtière viable. Peut-être un peu plus au large, où il est un peu plus difficile de se rendre, les bateaux plus imposants peuvent draguer certaines zones, mais, en même temps, devoir composer avec des limites raisonnables à l'égard d'habitats fragiles protégés contre le chalutage.

º  +-(1615)  

+-

    Le président: Monsieur Kline, vouliez-vous ajouter quelque chose, brièvement? J'aimerais que le compte rendu fasse état d'une intervention de votre part, puisque vous êtes ici.

+-

    M. Phil Kline (conseiller principal en politiques des pêches, Oceana): Merci de nous accueillir aujourd'hui.

    La gestion des pêches n'est pas moins controversée aux États-Unis qu'elle ne l'est au Canada. Cet enjeu a été pris en charge par notre structure de gestion, c'est-à-dire les conseils régionaux de gestion des pêches, qui sont composés de membres de la Chambre des représentants de la région et de membres du grand public, c'est-à-dire, à une personne près, des représentants de l'industrie de la pêche.

    La question des éponges et des coraux des grands fonds a été soumise au milieu scientifique, et maintenant, au grand public, par l'industrie de la pêche. Puisque ces choses existent, nous savons qu'elles sont importantes.

    La réponse à votre question au sujet du rétablissement, c'est que ces coraux poussent très lentement. Cela prend des siècles. Sur certaines surfaces sablonneuses et graveleuses du plancher océanique, les bryozoaires et d'autres organismes se rétablissent plus rapidement.

    Cette année, aux États-Unis, dans le cadre du processus régional de gestion dominé par l'industrie de la pêche, l'industrie a soutenu l'application d'une formule de protection de l'habitat, de la frontière mexicaine jusqu'aux Îles Aléoutiennes, qui constituent réellement un précédent dans le monde. Ils ont interrompu toute expansion de l'empreinte. Nos conseils régionaux qui ont pris cette mesure l'ont appuyée à l'unanimité, de sorte qu'elle jouit du soutien de l'industrie. Ils ont interrompu l'expansion du territoire où les gens pêchent au chalut.

    Nous avons des cartes et nous connaissons certaines zones dans cette empreinte qui n'ont pas été draguées--le bord d'une gorge profonde, un pinacle ou quelque autre endroit où l'on trouve des coraux et des éponges--, on a établi des zones désignées où seul le chalutage de fond est interdit. Le chalutage pélagique n'est pas interdit, et il en va de même de la pêche à la ligne, qu'elle soit commerciale ou récréative. Cela permet vraiment d'atténuer les principales répercussions sur ces collectivités. Alors c'est ce qui a été fait.

    Nous avons créé deux zones. Nous avons créé des zones de conservation des habitats, et nous avons créé des zones de chalutage bien définies. Nous avons choisi une période de référence de sept ans. Si, au cours des sept dernières années, une zone donnée a été draguée, cette zone était considérée comme une zone ouverte au chalutage. Ainsi, le reste de notre zone économique exclusive est demeurée non désignée. Dans les zones non désignées, puisque l'expansion de l'empreinte était interrompue, il n'était pas possible de pêcher au chalut à l'extérieur des zones où l'on avait déjà pêché au chalut, de sorte que l'on créait, de fait, un moratoire sur la pêche au chalut dans ces zones, jusqu'à ce qu'elles soient désignées à titre de zones ouvertes à la pêche ou de zones fragiles fermées, pour une raison quelconque, dont la protection de l'habitat. Cela procure au milieu scientifique l'occasion de repérer et d'évaluer les ressources, et de formuler des recommandations raisonnables, dans le cadre du processus de gestion des pêches, en ce qui concerne les répercussions auxquelles ont pourrait s'attendre si on draguait le fond de ces zones.

    Il s'agit vraiment, en ce qui concerne la gestion, d'un changement de paradigme qui crée un précédent à l'échelle mondiale. Dans le passé, la gestion des pêches consistait à pêcher jusqu'à ce qu'il ait un problème, et à ensuite tenter de composer avec le problème. En interrompant toute expansion de l'empreinte, et en demandant aux scientifiques de formuler des recommandations relativement à l'utilisation appropriée, pendant qu'ils procèdent au repérage et à l'évaluation, on transforme le paradigme de façon à assurer une gestion responsable.

+-

    Le président: Merci, monsieur Kline.

    Oui?

+-

    Mme Catherine Stewart: J'aimerais que les gens comprennent la portée des fermetures aux États-Unis. Si vous pouviez nous donner une idée de la taille du territoire couvert.

+-

    M. Gerald Keddy: Du Mexique jusqu'à l'Alaska, c'est assez vaste.

+-

    M. Phil Kline: On a fermé plus d'un demi-million de milles carrés sur la côte ouest, des Îles Aléoutiennes jusqu'au sud de la Californie. Je le répète, les intervenants de l'industrie de la pêche ont voté à l'unanimité pour cette mesure, et ils sont fiers de ce qu'ils ont fait.

+-

    Le président: Existe-t-il de la documentation à cet égard, des ententes, quoi que ce soit d'écrit?

+-

    M. Phil Kline: Oui, il y a des plans fédéraux de gestion des pêches qui s'inspirent de notre processus régional, et qui ont été soumis à l'approbation du secrétaire du commerce.

º  +-(1620)  

+-

    Le président: Ce que je veux savoir, c'est s'il y a des documents ratifiés par l'industrie, par exemple, qui pourraient être acheminés à notre Comité?

+-

    M. Phil Kline: Il y a les dossiers de vote des conseils régionaux, où le profil de chaque membre est connu. Les seuls représentants de la côte du Pacifique et du Pacifique Nord au sein des conseils sont des utilisateurs. Il n'y a personne pour promouvoir la conservation ou protéger l'intérêt du public.

+-

    Le président: Nous aimerions bien obtenir des copies de tout document que vous pourriez nous fournir à cet égard.

+-

    M. Phil Kline: Nous pouvons certainement vous les procurer.

+-

    Le président: Merci beaucoup.

    La prochaine question viendra de M. Roy, porte-parole du Bloc québécois.

    Monsieur Roy.

[Français]

+-

    M. Jean-Yves Roy (Haute-Gaspésie—La Mitis—Matane—Matapédia, BQ): Merci, monsieur le président.

+-

    Le président: Monsieur Roy, vous disposez de sept minutes.

+-

    M. Jean-Yves Roy: Je vous remercie d'être présents. Au cours de votre présentation, vous avez beaucoup insisté sur la haute mer. Cela pose problème. En effet, quand on fait du chalutage dans une baie comme la baie des Chaleurs, entre le Nouveau-Brunswick et le Québec, on détruit des frayères importantes, entre autres celles du hareng.

    Je ne comprends pas. À moins que j'aie mal compris ou mal entendu, vous avez dit que la population canadienne accepterait facilement qu'on interdise le chalutage en haute mer dans certaines zones.

    Je pense que la population canadienne, lorsqu'elle voit du chalutage de sa maison, dans une baie comme la baie des Chaleurs, est tout à fait consciente qu'on détruit effectivement le fond marin et qu'on détruit l'environnement de façon importante. Par conséquent, j'ai de la difficulté à endosser votre proposition, car elle ne touche que la haute mer.

    Pourquoi ne proposez-vous pas la même chose pour la pêche côtière?

[Traduction]

+-

    Mme Dorthea Hangaard: Nous croyons que, tant que le Canada maintiendra sa position, selon laquelle aucun type d'engin n'est plus destructeur qu'un autre, et c'est la position du Canada au pays et sur la scène internationale, nous n'irons pas très loin, que ce soit au pays ou à l'échelle internationale. À l'heure actuelle, nous avons l'occasion de faire pencher l'opinion du gouvernement sur cette question aux Nations Unies et nous attirons votre attention sur cette question aujourd'hui, parce que nous estimons qu'il est urgent pour nous d'exercer des pressions sur le gouvernement canadien afin qu'il se penche sur le travail effectué aux Nations Unies et qu'il change sa position au sein de cette organisation. En appuyant le moratoire, il laissera savoir qu'il change sa position selon laquelle aucun type d'engin n'est plus destructeur qu'un autre.

+-

    Mme Catherine Stewart: Je crois, monsieur Roy, que si vous regardez nos quatre recommandations, vous verrez que nous avançons qu'il est essentiel de prendre des mesures à l'intérieur de la ZEE également. Nous demandons l'interruption de l'expansion de l'empreinte en vue de protéger les écosystèmes fragiles.

    M. Hearn a mentionné plus tôt que la transition aura des répercussions sur les collectivités, ce qui suppose d'élaborer au pays un plan de transition qui tient compte des besoins tant des humains que de l'environnement. Nous faisons valoir que le gouvernement doit prendre cette transition au sérieux, et que nous devons élaborer un plan pour atténuer les répercussions dans notre ZEE aussi.

+-

    M. Mark Butler: Je crois que nous demandons un moratoire sur le chalutage de fond en haute mer, ce qui est différent d'une interdiction. Cela veut dire que nous voulons disposer du temps nécessaire pour cerner les zones qui sont peut-être plus fragiles, et ensuite, dans cinq ou dix ans, peut-être pourra-t-on rétablir le chalutage dans certaines zones.

    Je crois qu'il importe de reconnaître qu'il y a des habitats plus fragiles que d'autres, et que certains habitats sont peut-être plus résistants. Je crois également que, dans une certaine mesure, nous devons accepter que certaines parties de l'océan sont susceptibles d'être modifiées par l'activité humaine. À l'heure actuelle, 100 p. 100 du territoire sont modifiés par l'activité humaine--eh bien, 100 p. 100! Je m'excuse, je sais que je prêche contre ma paroisse, mais vous savez qu'une grande part du territoire est touchée par l'activité humaine, et nous ne devrions peut-être pas nous attendre à ce que 100 p. 100 de l'océan ne soient pas touchés par l'activité humaine.

    Ces paroles peuvent vous sembler bizarres, de la part d'un protecteur de l'environnement qui a lutté longtemps et avec acharnement pour inciter le gouvernement à réagir aux problèmes du chalutage de fond, mais ce que nous proposons à l'heure actuelle est si loin de ce que vous dites, que le fait d'interdire le chalutage en eaux canadiennes... Nous sommes si loin de ce que vous suggérez pour les eaux canadiennes, que nous ne sommes même pas disposés à reconnaître la destruction qui a lieu à l'heure actuelle, ou de reconnaître que certains engins de pêche sont moins destructeurs que d'autres.

º  +-(1625)  

[Français]

+-

    Le président: Monsieur Roy, vous avez la parole.

+-

    M. Jean-Yves Roy: Je suis d'accord avec vous quant à votre vision des choses, sauf quand vous donnez l'exemple de la terre et de l'océan. On cultive la terre, mais pas l'océan. Il y a une grosse marge. Quand vous détruisez l'océan, la régénération doit être naturelle, tandis que sur le sol, c'est très différent.

    Cependant je voudrais revenir aux autres engins que M. Eddy, entre autres, a mentionnés. Cela m'amène à parler de l'impact potentiel que cela aurait sur les collectivités qui vivent le long des côtes.

    Si on interdisait le chalutage dans nos eaux, par exemple, avez-vous évalué quel serait l'impact économique de cette interdiction sur les gens qui vivent de la pêche et sur les régions côtières, celles de l'Est, à titre d'exemple, ou de l'Ouest? On y vit déjà beaucoup de difficultés, la ressource est presque toute épuisée.

    Si on en rajoute, un plan d'aide devrait être offert à ces collectivités qui seraient frappées par le moratoire en question. Avez-vous fait une évaluation de l'impact que cela aurait?

    De plus, cela a-t-il changé quoi que ce soit à l'économie des régions côtières des États-Unis, entre autres?

[Traduction]

+-

    M. Mark Butler: Je pourrais peut-être répondre à cela, et peut-être Wayne ou Bill.

    Pendant l'heure du dîner, nous parlions de l'ouest de Terre-Neuve, où une fermeture avait eu lieu au début des années 90. On a ensuite autorisé le retour de la pêche aux lignes, et la morue est revenue. Les pêcheurs ont également remarqué que le fond s'était rétabli. Ils ont commencé à trouver au bout de leurs lignes des animaux comme des crinoïdes et des patates de mer, des invertébrés de fond qu'ils n'avaient pas vus depuis longtemps. Cette région jouit maintenant d'une pêche plutôt saine, qui emploie un plus grand nombre de personnes; par livre de poissons pris, la pêche aux lignes emploie davantage de gens que la pêche au chalut.

    Les pêcheurs de l'ouest de Terre-Neuve comprennent qu'ils doivent composer avec cette situation, alors ils travaillent avec la société de développement locale pour voir s'il est possible d'acheter les quotas de la flotte de chalutier et d'empêcher les chalutiers de draguer le plancher de ces zones, parce qu'ils ont déjà vu ce que cela peut faire, et je crois qu'ils veulent éviter que cela se reproduise.

    Alors, il y a des façons de faire--des incitatifs, le transfert graduel de quotas d'un type d'engin à un autre--qui pourrait réduire au minimum l'impact.

+-

    Mme Catherine Stewart: Si vous le permettez, je suggère aussi que M. Eddy parle de l'impact du maintien du chalutage sur les collectivités. Ensuite, M. Kline aimerait parler brièvement des mesures prises en Islande.

+-

    M. Wayne Eddy: Je tiens à dire qu'en 1992-1993, quand on a imposé un moratoire sur la pêche à la morue sur la côte est, dans la zone 4W, c'est-à-dire de Halifax jusqu'au Cap Breton et l'ensemble de Terre-Neuve, l'indemnisation et toutes ces choses étaient déjà prévues dans le cadre de programmes et autres mesures s'inscrivant dans la LSPA.

    Maintenant, à peu près 90 p. 100 du chalutage de fond est effectué par de grandes sociétés qui disposent déjà de ces engins, et qui s'en donnent à coeur joie. Cela a été réduit maintenant, de sorte que la transition ou l'indemnisation, l'impact de l'interruption du chalutage de fond, ne sauraient être comparés aux répercussions du moratoire qui avait été imposé à l'époque, et qui était déjà payé. Je vous le dis avec certitude : si, aujourd'hui, on disait aux gens de la côte est qu'il n'y aura plus de chalutage de fond, mais qu'on leur attribue un quota X--les poissons sont de retour--ils iraient à la pêche, et les pêches créeraient plus d'emplois que jamais. Environ 50 p. 100 des pêcheurs sont partis maintenant, et l'effectif augmenterait très rapidement s'il n'y avait pas de chalutage de fond.

[Français]

+-

    M. Jean-Yves Roy: C'est ce que je voulais entendre.

+-

    Le président: Merci, monsieur Roy.

[Traduction]

    M. Stoffer pour cinq minutes, et ensuite, M. Cuzner.

+-

    M. Peter Stoffer: Merci beaucoup, monsieur le président, et toutes mes félicitations pour votre réélection.

    Je tiens à vous remercier tous d'avoir quitté vos foyers, d'aussi loin que les États-Unis, pour venir ici et porter cette question à notre attention. Notre Comité aborde cette question, de façon sporadique, depuis quelques années.

    J'aimerais poser quelques questions fondamentales, par contre. M. Morgan, vous avez parlé de deux livrets que vous aviez montrés. Vous serait-il possible de procurer des copies de ces livrets pour le Comité à une date ultérieure?

    Ensuite, monsieur Eddy, pourriez-vous, quand j'aurai fini ma question, décrire aux membres du Comité comment on se sent lorsqu'on pêche aux lignes et qu'on voit passer un chalutier?

    Monsieur, vous parliez de l'exemple des États-Unis--de 250 000, si je ne me trompe pas, milles... carrés, je présume?

º  +-(1630)  

+-

    M. Phil Kline: Il s'agit de plus de 500 000 milles carrés.

+-

    M. Peter Stoffer: C'est un demi-million de milles carrés. S'agissait-il d'une initiative de l'industrie acceptée par la suite par le gouvernement, ou s'agissait-il plutôt d'une initiative dans le cadre de laquelle le gouvernement a dit à l'industrie qu'elle devait faire cela? Ce qui m'embête, c'est que--et peut-être que M. Butler pourrait nous fournir des explications à ce sujet--, M. Eddy a mentionné que ce sont les grandes sociétés qui font la plupart du dragage. Il me semble évident que nous devions, pour protéger l'habitat, imposer un moratoire et déterminer où sont les zones à protéger, car, sans habitat, il n'y a pas de poisson. C'est comme sur la terre ferme : s'il n'y a pas d'habitat, on ne peut avoir d'orignal ou de caribou, ou de quoi que ce soit.

    Qui conseille le gouvernement? Est-ce l'industrie? Ou est-ce qu'il y a quelqu'un d'autre pour dire au gouvernement d'envoyer paître ces cinglés? Nous voulons que la pêche poursuive dans cette voie. Revenir, comme l'a dit Wayne, à la pêche à la ligne serait merveilleux, mais ce n'est pas rentable. C'est peut-être viable à long terme, mais ce n'est pas rentable à court terme. Qui pousse le gouvernement à aller de l'autre côté?

+-

    Le président: Aux fins du compte rendu, je tiens à signaler que M. Morgan a hoché de la tête pour signifier son intention de fournir la documentation au comité.

    La prochaine question était destinée à M. Eddy.

+-

    M. Wayne Eddy: Il est question ici de la destruction de ces... Cela revient à ce que vous avez dit. J'ai vu ces gros chalutiers--je pêche à la palangre depuis des années--, et quand ils ont passé près de moi, à diverses occasions, je voyais cette belle eau bleue tranchée par un énorme sillon gris, où tout ce qui est au sol est déchiré, et la couleur réelle de l'océan ne revient que de nombreuses heures plus tard, quand tout cela finit par se déposer sur le plancher océanique.

    C'est de cette destruction à grande échelle que nous parlons, de cette notion de dragage et de la destruction que cela occasionne, non seulement au chapitre des stocks de poisson, mais aussi de ce qu'on rejette dans la mer. Ce sont les grandes sociétés qui s'y adonnent encore aujourd'hui--comme FBI, Clearwater et National Sea, que notre gouvernement a sauvés pendant les années 80, j'ignore combien de fois--qui ont causé ce gros problème.

    Certaines des histoires d'horreur qui m'ont été relatées par les pêcheurs sur chalutier... De nombreux membres d'équipage de chalutier détestent monter à bord de ces bateaux et voir la destruction qu'ils créent. Mais c'est leur gagne-pain, et le gouvernement canadien les laisse faire, alors ils se disent « allons faire de l'argent » ils n'arrivent toujours pas à comprendre : « Pourquoi faisons-nous cela, malgré la destruction que cela occasionne? ».

    Comme je l'ai dit, tous les députés qui sont ici à Ottawa devraient aller voir l'engin qui est exposé dehors; si vous n'arrivez pas à comprendre l'ampleur de la destruction, non seulement des poissons, mais aussi des habitats et de tout le reste, occasionnée par le dragage, alors vous ne devriez pas nous représenter, car vous n'êtes pas très intelligents. Il n'est pas difficile d'imaginer la destruction qui a lieu lorsqu'on traîne 15 tonnes de matériel sur le plancher océanique, et qu'on arrache les coraux et tout le reste.

    Il y a des zones mortes dans cet océan à l'heure actuelle, des zones où il n'y a rien, où je peux lancer une ligne, la laisser pendant 12 à 24 heures, et retrouver l'appât intact sur l'hameçon, parce qu'il n'y a rien pour le manger; il n'y a aucun organisme pour manger là-bas. Si vous allez dans une autre zone, mettez un morceau d'appât sur l'hameçon et lancez la ligne à l'eau, vous n'attendrez même pas une demi-heure, car il y a de la vie dans cet océan.

    C'est la destruction qui a lieu et qui a eu lieu dans le passé, celle qu'a occasionné la flotte étrangère ici, il y a plusieurs années, quand nous avions la limite de 12 milles. J'ai vu ce qu'ils peuvent faire. J'ai vu ce que peuvent faire les grandes sociétés comme National Sea, et je le vois encore, avec FBI, Clearwater et les grandes sociétés. Il y a très peu de petites entreprises.

+-

    Le président: Merci, monsieur Eddy.

    Monsieur Butler, une question vous était destinée.

+-

    M. Mark Butler: Quand je compare la position du MPO à l'égard des engins de pêche et celle, par exemple, du Conseil canadien des pêches, qui représente les principaux intervenants de l'industrie, je ne vois presque aucune différence. Je les vois dire presque exactement la même chose que le ministre. C'est peut-être ça, le problème.

    Je crois aussi que certaines personnes, au ministère des Pêches et Océans, ont consacré toute leur vie à une certaine façon de faire, et sont profondément réticentes au changement. Nous avons entendu, aujourd'hui, un cadre intermédiaire du MPO, qui s'est montré plutôt grossier envers l'un de nos bénévoles, et plutôt indifférent à l'impact du dragage sur le plancher océanique, ce qui est plutôt étonnant, de la part d'un responsable de la gestion des pêches.

    Je crois que l'une des choses que nous devons demander au MPO au sujet des données scientifiques dont il dispose, c'est : « Que dites-vous à vos gestionnaires des pêches? » Le MPO dit que sa gestion est fondée sur des assises scientifiques solides, et il semble y avoir un écart énorme entre ce que les chercheurs du MPO font ou ne font pas et ce que le reste du monde scientifique affirme. Dans notre revue, dont je peux vous fournir des exemplaires, nous avons des chercheurs du MPO qui contredisent directement--pas à dessein, mais seulement parce qu'ils doivent dire la vérité--ce que le ministre dit au sujet des engins de pêche. Il faut vraiment que ça change.

º  +-(1635)  

+-

    Le président: Monsieur Butler, connaissez-vous le nom de la personne dont vous parlez?

+-

    M. Mark Butler: Du chercheur du MPO?

+-

    Le président: La personne qui s'est montrée grossière envers votre bénévole?

+-

    M. Wayne Eddy: Oui.

+-

    Le président: Allez-y, monsieur Eddy, donnez-nous son nom si vous le savez, juste pour que nous le sachions.

+-

    M. Mark Butler: La bénévole dont il est question est ici, c'est Lisa Asbreuk, étudiante de troisième année en droit qui effectue des recherches pour nous sur la Loi sur les pêches et le renouvellement de la Loi sur les pêches.

+-

    Le président: Connaissez-vous son nom?

+-

    M. Mark Butler: Il s'agit de Chris Allen.

+-

    Le président: C'était juste pour savoir. Nous ne...

+-

    M. Mark Butler: Il était la personne concernée, mais il s'agit de son supérieur, malheureusement; il s'agit de Les Burke, à Halifax. Le problème ne se limite pas à une seule personne, mais je vous remercie tout de même d'avoir posé la question.

+-

    Le président: Merci.

    Monsieur Kline, je vous laisse le dernier mot, brièvement.

+-

    M. Phil Kline: J'aimerais répondre à votre question au sujet du processus, et de la façon dont il a été mis en oeuvre. J'essaierai d'être bref.

    Au milieu des années 90, on a modifié la loi fédérale en vue d'atténuer des responsabilités en matière de conservation à la gestion des pêches. Une disposition prévoyait que les conseils devaient évaluer l'impact des engins de pêche sur l'habitat et réduire au minimum les conséquences néfastes éventuelles.

    Deux ans plus tard, les conseils n'avaient rien fait. À l'époque, un groupe de pêcheurs de diverses régions au pays et d'écologistes ont engagé des poursuites, et ils ont gagné, ce qui a mené à la rédaction des premiers énoncés des incidences environnementales sur les pêches. Ces énoncés des incidences environnementales proposaient une gamme de possibilités : l'une d'elles consistait à maintenir le statut quo; une autre correspondait à ce que nous avons maintenant, c'est-à-dire des fermetures massives, l'interruption de l'expansion de l'empreinte, etc.

    Lorsque les conseils ont pris connaissance de cette analyse des options et de ces données scientifiques, ils ont choisi l'option la plus modérée, et ont voté à l'unanimité en faveur de la mise en oeuvre de cette option.

+-

    M. Peter Stoffer: À l'unanimité?

+-

    M. Phil Kline: Oui.

+-

    Le président: Madame Hangaard.

+-

    Mme Dorthea Hangaard: J'aimerais vraiment parler des raisons pour lesquelles cela se produit. D'où vient la pression?

    J'ai compris, dans le cadre de mes recherches sur les pêches durables, que, au point où nous en sommes, le mandat du MPO consiste manifestement à se soustraire à la gestion des pêches. Pour faire cela, pour privatiser la flotte, passer à un système de quota, et faire en sorte que l'industrie doive se gérer elle-même, il faut qu'il y ait de gros bateaux appartenant à de grandes sociétés capables d'assumer les frais nécessaires à une telle gestion. Elles doivent payer le salaire des personnes qui les observent. Elles doivent être dotées de systèmes de contrôle à bord. Elles doivent élaborer leurs propres plans de gestion, et elles doivent retenir les services d'experts-conseils. Cela donne vraiment l'impression que le MPO tente de se soustraire à la gestion des pêches. Et je crois vraiment que c'est un point important, surtout lorsqu'on voit ce qui reste du ministère.

+-

    Le président: Merci.

    Monsieur Cuzner.

+-

    M. Rodger Cuzner (Cape Breton—Canso, Lib.): Merci beaucoup d'être ici aujourd'hui. Il est important que vous preniez le temps de présenter et d'étayer votre point de vue.

    J'aimerais seulement revenir à ce que M. Butler a dit au sujet des données scientifiques du MPO. J'ai peine à imaginer que Les Burke, ou le Ministre, s'adresse à l'ONU et déclare qu'il n'y a aucune différence entre les divers types d'engins, à moins qu'une telle déclaration soit fondée sur une banque de données scientifiques établies par le MPO. Alors, je me demande seulement si vos groupes sont au courant de quelque chose, si vous avez au moins eu la possibilité de voir ces sources, de les remettre en question ou de procéder à un examen par les pairs? Quel est leur point de référence? Est-ce que cela se poursuit?

    Si vous voulez fournir des précisions, je vous invite à le faire, et peut-être que M. Morgan voudrait ajouter quelque chose.

+-

    M. Mark Butler: Certainement.

    Il y a toujours une certaine incertitude scientifique. Rappelez-vous ce qu'on disait du tabagisme, ou des pluies acides, ou du changement climatique. Ceux qui ne veulent pas que les choses changent miseront sur cette incertitude scientifique pour ne pas changer. Je ne crois pas...

+-

    M. Rodger Cuzner: Est-ce cela, sa position? Est-ce que sa position repose non pas tant sur une banque de données scientifiques, que sur son opinion selon laquelle vos données scientifiques sont discutables?

º  +-(1640)  

+-

    M. Mark Butler: Non, je crois que nos données scientifiques sont très, très claires. Quand j'ai commencé à m'intéresser à cette question, il n'y avait pas beaucoup d'information, à part le gros bon sens et les connaissances des pêcheurs. Maintenant, il y en a de l'information. Nous sommes membres du CIEM. Lisez le rapport du CIEM et du Conseil national de recherches : il faut utiliser moins d'engins destructeurs.

    Ce que le Ministre dit... Malheureusement, je crois que cela tient en partie au fait que les océans ne font pas partie des grandes préoccupations de la majorité des Canadiens, et qu'il peut abuser de la situation. Nous serions disposés à nous mesurer publiquement au MPO dans le cadre d'un débat scientifique--quelle que soit la tribune. C'est la validité des données scientifiques qui décide de tout.

    Le MPO mène actuellement des activités visant à commencer à classifier les habitats. Savez-vous que le MPO n'a jamais procédé à une évaluation de l'impact des pêches sur le plancher océanique? Il n'a jamais fait ce que les États-Unis ont fait. Il n'a jamais fait ce que le CIEM a fait. Cela n'a jamais été fait, je suppose, en raison d'obstacles purement politiques.

    La majorité d'entre nous connaissons des gens au MPO, des gens qui travaillent au MPO, des chercheurs. Ce qu'ils vous diront et ce qu'ils diront publiquement, ce sont deux choses très différentes. Mais nous avons des citations de Dave Wildish, de la Station biologique de St. Andrews, selon lesquelles nous devons interdire le dragage dans certaines zones de la Baie de Fundy, et utiliser des engins de pêche moins destructeurs. Eh bien, cela va directement à l'encontre des déclarations du Ministre.

+-

    Mme Catherine Stewart: Puis-je ajouter quelque chose? Merci.

    Au cours de mes années de service au MPO, je crois qu'il y a eu un certain nombre de problèmes, et Mark en a mentionné quelques-uns. Par exemple, il y a lieu de se demander si les chercheurs sont habilités--c'est-à-dire autorisés, dotés des ressources nécessaires, mandatés--à étudier les questions qui méritent d'être approfondies, et bien souvent, ils ne le sont pas. La Living Oceans Society vient tout juste d'effectuer une analyse des prises accessoires, à la lumière des rapports d'observateurs sur la flotte de chalutiers de la Colombie-Britannique. Le ministère des Pêches n'a jamais analysé ses propres données. Ces chercheurs voulaient peut-être le faire, mais ils n'étaient pas habilités à le faire.

    Il y a eu des situations où la recherche scientifique, ou des recommandations, ont été modifiées par des régimes de gestion des stocks. Par exemple, le Comité d'examen des évaluations scientifiques du Pacifique formulait une recommandation de TAC, c'est-à-dire de total autorisé des captures, assortie d'un risque pouvant aller de faible à élevé. Si vous regardez le document du CEESP, l'écart est de là à là; si vous regardez le document de gestion, l'écart va de là à là, on cite les chercheurs et on laisse entendre que c'est l'écart proposé par les chercheurs. Il a donc des exemples de situation, au sein du ministère, où les recommandations scientifiques sont supplantées par les intérêts liés à la gestion et les intérêts politiques.

    Enfin, il y a la question de la suppression de données, lorsqu'une recherche est menée, mais n'est pas publiée, n'est pas diffusée, n'est pas disponible. Si vous avez vent de l'existence de cette information, vous pouvez demander à l'obtenir, grâce à l'accès à l'information. Je crois que la majorité d'entre vous avez probablement entendu parler de l'affaire du présumé chercheur dissident, dans le cadre de la Phase finale du projet Kemano, en Colombie-Britannique. Le MPO n'est pas étranger à de telles situations, où la science va à l'encontre des objectifs de gestion ou des objectifs politiques, et est tout simplement supprimée.

+-

    M. Rodger Cuzner: D'accord.

    Combien de temps nous reste-t-il?

+-

    Le président: Vous avez cinq minutes.

+-

    M. Rodger Cuzner: J'ai deux autres questions, mais si vous voulez commenter brièvement cette...

+-

    M. Wayne Eddy: Oui, un bref commentaire.

    Votre question visait à déterminer si la science sait quelque chose que nous ne savons pas, ou quelque chose comme ça. Je vais vous mettre au défi--vous êtes un homme intelligent, j'en suis sûr, sinon vous ne seriez pas ici--d'aller jeter un coup d'oeil à cet engin...

+-

    M. Rodger Cuzner: Ce n'est pas nécessairement le cas. Il suffit d'être populaire.

+-

    M. Wayne Eddy: ... et de me dire que cela ne va pas occasionner de dommages lorsqu'on va le traîner sur le plancher océanique.

    Je ne suis pas chercheur, et je n'ai pas besoin de l'être pour comprendre que cet engin occasionnera des dommages importants si je l'utilise pour draguer le fond de l'océan. On ne voulait pas nous laisser monter l'engin ici, mais il est acceptable de l'utiliser pour draguer le plancher océanique. On nous a interdit d'utiliser ne serait-ce qu'un piquet de tente sur la pelouse, de peur que cela ne la brise. Qu'arrivera-t-il si nous traînons cet engin sur l'ensemble de la pelouse? Il n'y en aura plus, de pelouse. C'est ça que je vous dit. Vous n'avez pas besoin de données scientifiques, il suffit de réfléchir. Regardez l'engin, et pensez-y. C'est élémentaire.

+-

    M. Phil Kline: Nous ne croyons pas que ce soit une question d'échelle. J'ai pêché pendant 25 ans. C'est là que j'ai passé la majeure partie de ma vie, en mer. Je pêchais à la ligne, et il m'arrivait à l'occasion de briser une branche de corail. Mais il m'est également arrivé de voir, dans la même zone, un chalutier passer et dévaster toutes les formations de corail en dix minutes seulement. Alors, d'autres engins ont des répercussions, mais nombre d'entre eux ont un impact minime, et le rétablissement est possible.

    Alors, c'est une zone grise, quand la politique officielle consiste à dire que tous les engins ont un impact... oui, tout a un impact, mais on ne précise pas qu'un engin rase tout, et que l'autre ne brise qu'un petit morceau de branche. Ainsi, de telles déclarations laissent une zone grise au chapitre des politiques.

    Pour ce qui est des considérations économiques--nous en avons parlé tout à l'heure--un poisson pêché à la ligne vaut davantage sur le marché qu'un poisson pêché au chalut. La durée de conservation est jusqu'à cinq fois plus longue, de sorte que les détaillants sont disposés à payer davantage, car ils ont davantage de temps pour le vendre et toucher un profit. Alors il ne s'agit pas que de volume, lorsqu'on parle d'économies, Il faut également s'attacher à la valeur du poisson, et le poisson pris à la ligne se vend à un prix supérieur.

º  +-(1645)  

+-

    M. Rodger Cuzner: Ma prochaine question concerne cet aspect aussi, car, manifestement, nous sommes confrontés--du moins, dans le cas de l'Atlantique--à un changement de paradigme. Pendant des années, nous avons pris le plus de poisson possible, nous l'avons transformé le plus rapidement possible, et nous l'avons mis sur le marché. On a probablement justifié le recours au chalutier en faisant valoir qu'il fallait alimenter les usines. Maintenant, ces usines sont en Chine et en Inde, et nos produits sont transformés à l'étranger.

    En ce qui concerne les chalutiers, la situation correspond exactement à ce que vous avez dit : c'est une question de qualité du produit. Une jeune morue prise dans les filets d'un chalutier ne reçoit pas beaucoup d'amour et d'attention. Au-delà des considérations de rentabilité, je crois que vous pouvez également parler de la façon dont les pêcheurs au chalut traitent le produit.

    J'aimerais que M. Eddy fasse un commentaire. Les pêcheurs disent également que l'une des autres graves répercussions du dragage concerne la disparition des requins. Des équipes vont au large de la côte est pendant huit heures pour pêcher la crevette, et ils ne voient aucun requin. Alors j'aimerais entendre vos commentaires à ce sujet.

    Je sais que vous avez l'air honnête, et je suis certain que vous êtes un homme honnête, alors j'aimerais également savoir ce que vous pensez des phoques.

    C'est ma dernière question, monsieur le président.

+-

    Le président: Monsieur Eddy, sur les requins et les phoques : vous avez une minute et dix secondes.

+-

    M. Wayne Eddy: Pour commencer, les requins--cela nous ramène à la pêche aux lignes. La majorité des requins succombent non pas aux chalutiers, mais bien aux hameçons. La majorité des requins ne sont pas au fond. C'est la flotte de pêche à la palangre qui pêche l'espadon ou d'autres prises pélagiques de grande taille.

    Au fil des ans, avec 60 000 hameçons par voyage, j'ai peut-être pris de cinq à dix requins par année. Comme je l'ai dit, je fais deux voyages par semaine--quand nous avons la permission de pêcher. En ce qui concerne le requin, il y a des façons...cela dépend de ce qu'on pêche : il y a une façon de se pencher sur le problème, et d'y réagir.

    Les phoques, c'est une tout autre question. Je ne tiens vraiment pas à m'aventurer sur ce terrain. Tout ce que je peux vous dire, c'est que la population de phoques...

+-

    M. Rodger Cuzner: Nous sommes entre amis.

+-

    M. Wayne Eddy: ...sur l'Île de Sable, sur la côte est de la Nouvelle-Écosse, a décuplé au cours des six dernières années. La population a décuplé. Et vous savez quoi? Les phoques, ça mange.

    Il n'est plus question de la destruction occasionnée par les chalutiers. Quand je commence à parler des phoques de cette façon, je parle de leur impact sur les stocks de poisson, qui ne se rétablissent pas lorsque les chalutiers ont détruit les stocks de poisson.

+-

    M. Rodger Cuzner: Oui.

+-

    Le président: Merci.

    Il y a manifestement beaucoup d'intérêt, alors je vais attribuer une question à quiconque veut en poser une. Essayons de poser des questions brèves, et de répondre un peu plus en détail.

    Monsieur Keddy.

+-

    M. Gerald Keddy: Et d'y répondre un peu plus en détail.

+-

    Le président: Oui.

+-

    M. Gerald Keddy: J'aimerais soumettre rapidement un commentaire à nos invités. Je crois que si nous pouvions nous entendre sur la question des phoques, nous pourrions en venir à nous entendre sur tout ça.

    Rodger, vous avez soulevé la question du chalutage de fond. Il y a une très bonne raison pour expliquer pourquoi le chalutage de fond ne suscite pas l'indignation du grand public : on ne le voit pas. C'est loin des yeux, alors c'est loin du coeur. C'est aussi simple que cela. Si le phénomène était visible, on ne tiendrait pas une telle discussion.

    L'approche préconisée par les Nations Unies me préoccupe. Je ne suis pas convaincu de sa validité. Trop souvent, je vois...

+-

    Le président: Monsieur Keddy, rapidement.

+-

    M. Gerald Keddy: ...une résolution de l'ONU mise de l'avant, et personne n'y donne suite. Je préférerais que le Canada prenne en charge toutes les zones jusqu'à la limite de 200 milles et prenne vraiment des mesures, surtout à l'égard du chalutage de fond--et le nez et la queue des Grands Bancs et du Bonnet Flamand. J'aimerais entendre vos commentaires à cet égard.

+-

    Mme Catherine Stewart: Lance voulait dire quelque chose.

+-

    M. Lance Morgan: J'aimerais formuler un bref commentaire au sujet de l'approche préconisée par l'ONU, car je crois qu'elle a été décrite de façon erronée.

    L'ONU ne fait pas appel à un moratoire--et il s'agit effectivement d'un moratoire, d'une approche provisoire--entièrement pour les raisons que vous croyez. Sa démarche tient en partie au fait que la majeure partie de la pêche en haute mer est illégale, non déclarée et non réglementée, ce qu'on appelle également pêche INN. Il n'y a aucun accord en vigueur. En vertu des ententes relatives aux stocks de poisson et de toutes les autres ententes conclues par la communauté internationale, nous nous sommes engagés à ne pas nous adonner à une pêche INN. À l'heure actuelle, le chalutage de fond en haute mer est une pêche INN. Il faudrait établir un moratoire, et, pendant ce temps, nous devrions en venir à une entente sur la façon de réglementer cette pêche.

    Cela ne tient pas nécessairement à des données scientifiques. Comme je l'ai déjà dit, les données scientifiques relatives aux effets du chalutage de fond sont assez claires, mais 70 p. 100 de la superficie en haute mer n'est pas visée par une réglementation régissant les monts sous-marins, les grands fonds et le chalutage de fond hauturier qui a lieu dans ces zones; au bout du compte, le moratoire ne vise qu'à établir une structure de gouvernance concertée, afin que nous puissions nous asseoir et établir un régime de gestion et de gouvernance éclairé à l'égard de la haute mer.

º  +-(1650)  

+-

    Le président: Merci.

    Quelles sont les trois lettres que vous utilisiez, et que veulent-elles dire?

+-

    M. Lance Morgan: Il s'agissait de INN--illégal, non déclarée et non réglementée.

+-

    Le président: Merci.

    Monsieur Kamp.

+-

    M. Randy Kamp: J'ai une petite question.

    Vous avez dit à notre président, au début, que le chalutage de fond et le dragage étaient synonymes. Si nous avions 100 exploitants de chaluts de fond dans la pièce, est-ce qu'ils procéderaient tous de la même façon? Pourrait-on faire valoir que certains chaluts de fond sont plus respectueux de l'environnement que d'autres, et pourrait-on dire qu'ils le font...? Pourrait-on avancer qu'il y a moyen de le faire de façon responsable?

    Une voix: Ils sont tous dans le même bateau.

+-

    M. Phil Kline: Les conditions océaniques varient. Dans un habitat de haute énergie susceptible d'être perturbé, l'environnement a évolué en vue de s'adapter à ces perturbations. Il y a des secteurs de faible profondeur, sablonneux, propices au turbot de sable et à la plie. C'est une tout autre chose lorsqu'on pense à des eaux plus profondes, qui ne sont jamais soumises à des perturbations, où les animaux qui vivent au fond n'ont pas évolué de façon à s'adapter à la perturbation.

    Il y a aussi la taille des filets. Il y a la surface de dragage. Il y a la façon dont on installe les filets--quels types de rouleaux et de bourrelets saute-roche on utilise. Si on amenait 100 exploitants de chaluts dans une pièce et on posait cette question, on recevrait probablement 100 réponses différentes.

+-

    Le président: Merci.

    Monsieur Butler.

+-

    M. Mark Butler: Le MPO se plaît à dire que tout cela tient à l'attitude de la personne qui utilise l'engin, et c'est peut-être vrai, dans une certaine mesure. Par contre, même si on mettait le Christ aux commandes d'un chalutier, il y aurait tout de même beaucoup de dommages. Et, je le répète, deux capitaines de chalutier ont travaillé avec nous en vue de préparer notre voyage à Ottawa.

+-

    M. Wayne Eddy: Puis-je dire quelque chose, rapidement, monsieur le président?

    M. Keddy a mentionné que le principal problème, en ce qui concerne le chalutage de fond, c'est que c'est «loin des yeux, loin du coeur». Mais c'est à cela que nous servons : à sensibiliser les gens, à sensibiliser les députés qui sont ici. Quand l'un des représentants de notre ministère des Pêches--et nous avons mentionné son nom plus tôt--dit que ces choses ne parcourent pas vraiment le plancher océanique, ce sont nos responsables des Pêches qui sont dans l'ignorance, alors comment voulez-vous que le public le sache? Et quand nous sensibiliserons le grand public à cette question, cela créera l'indignation, et on prendra des mesures pour y mettre un terme.

+-

    Le président: Monsieur Stoffer.

+-

    M. Peter Stoffer: Monsieur le président, nous avons appris, tout récemment, que le MPO gère ses finances internes comme il gère les pêches.

    Mais trève de plaisanterie, j'ai une vraie question à vous poser. Si on maintient le statut quo et on ne fait rien avant 2006, s'ils continuent de traîner les choses en longueur--si vous me permettez ce jeu de mots--, combien de temps nous reste-t-il avant que les stocks soient attaqués de façon irréversible, au point où on ne s'en fait plus et on pêche jusqu'au dernier poisson? À Terre-Neuve, un homme nous a dit de pêcher le dernier poisson et d'en finir, car, tout sera bientôt fini.

    Monsieur Morgan, c'est peut-être une question injuste, et vous n'êtes pas tenu d'y répondre maintenant, mais nous avons entendu des Terre-Neuviens dire que le stock de morue du Nord dans la division 2J3KL, au large de Terre-Neuve, devrait être considéré comme une espèce en danger de disparition. Avez-vous eu l'occasion d'évaluer la situation, et seriez-vous prêt à appuyer un appel à l'inscription de cette espèce à titre d'espèce en danger de disparition, en vertu de la Loi sur les espèces en péril, de notre Loi canadienne sur la protection de l'environnement?

+-

    Le président: Deux questions : combien de temps et les espèces en danger de disparition.

+-

    M. Lance Morgan: La première chose que je vais dire, c'est qu'on a déjà estimé que la majeure partie de l'habitat marin à surface dure à plus de 1 000 mètres de profondeur environ a fait l'objet d'une pêche à un moment donné, a été draguée au moins une fois. Cela fait vraiment beaucoup de grands fonds. Il se fait beaucoup de dragage en haute mer, et c'est pourquoi l'idée d'un moratoire a été soulevée, et c'est un enjeu urgent.

    Avec les technologies actuelles, nous pouvons draguer jusqu'à environ 2 000 mètres de profondeur, peut-être même un peu plus loin maintenant. Il y a encore beaucoup de grands fonds, plus profonds que cela, mais cela signifie que la majorité des monts sous-marins du monde qui sont en eaux moins profondes ont été dragués, au milieu de l'océan Indien, au milieu du Pacifique Sud, et dans tout l'Atlantique Nord.

    On estime qu'à compter de l'an 2025 environ, la pêche de poissons de grands fonds sera chose du passé. C'est dans la documentation, et je serai heureux de vous transmettre également ces références.

    En ce qui concerne la morue, je m'en remettrais vraiment aux chercheurs canadiens des pêches, qui connaissent mieux la question. Je sais que M. Haedrich, à l'Université Memorial, a travaillé sur la Loi canadienne sur les espèces en péril, et il estime qu'au moins certains stocks de morue méritent d'être inscrits sur la liste des espèces en péril.

º  +-(1655)  

+-

    Le président: Merci.

    Monsieur Murphy, dernière question.

+-

    L'hon. Shawn Murphy (Charlottetown, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président, et merci aux témoins.

    Je veux vous poser une question. Vous avez parlé des gros chalutiers de fond. Prenons un écosystème particulier du Canada atlantique. Vous dites qu'il faut sensibiliser le public, mais je crois que nous avons beaucoup de travail à faire dans l'industrie de la pêche. Dans le détroit de Northumberland, à l'heure actuelle, un débat fait rage entre les pêcheurs à chalut au pétoncle et les pêcheurs de homard. Et les chercheurs sont très clairs sur ce point : les chalutiers à pétoncle ont un effet très destructeur sur l'habitat. Ils parcourent le détroit de long en large avec ces gros moteurs, 600 chevaux, avec des monte-charges hydrauliques et toutes ces choses. Nous parlons aux pêcheurs... et les chercheurs conviennent que c'est destructeur. Les pêcheurs n'osent pas se prononcer, de peur de froisser un de leurs frères, qui fait la pêche à chalut au pétoncle. Pendant ce temps, les prises de homard, en particulier dans le milieu du détroit, sont à la baisse.

    J'inviterais peut-être M. Morgan--et toute autre personne--à se prononcer sur la pêche à chalut au pétoncle et les dommages qu'elle cause pour l'habitat, et sur la façon dont nous pouvons porter cela à l'attention non pas tant du public, mais bien des pêcheurs? Ils ne prennent jamais position.

+-

    M. Lance Morgan: Eh bien, la pêche à chalut au pétoncle est probablement en deuxième place, après le chalutage de fond, au chapitre de la destruction de l'habitat. Le seul aspect, probablement, qui fait en sorte que la situation soit ce qu'elle est, c'est que la pêche à chalut au pétoncle est, de fait, limitée à une zone beaucoup plus modeste, de sorte que la zone touchée...

    Dans les cas où cette pêche entre en conflit avec d'autres pêches, je crois que la discussion doit vraiment revenir sur la nécessité de déterminer comment nous allons gérer diverses utilisations de l'océan. On ne peut pas gagner sur tous les tableaux : on ne peut pas manifester son soutien à l'égard de la pêche au homard tout en autorisant la pêche au pétoncle au même endroit et au même moment. Les responsables de la gestion des pêches devront décider s'il s'agit d'une zone de pêche au pétoncle ou de pêche au homard.

    Il y a eu une foule de démarches aux États-Unis, et une foule de mesures adoptées par des conseils selon lesquels il y a une zone de protection des crabes royaux à tel endroit, et il est interdit de pêcher au chalut et de draguer à cet endroit. Certaines de ces mesures ont été exécutées trop tard, car nous avions déjà détruit certaines pêches du crabe, mais il faut réagir lorsqu'il y a de tels conflits.

    Je crois que l'une des choses qui incitera les pêcheurs à prendre part au dialogue consiste à dire que nous voulons savoir quels sont les impacts de cette activité, afin que nous puissions déterminer dans quels secteurs nous allons autoriser divers types d'activités de pêche, et continuer d'avancer. S'ils ont tous l'impression qu'il s'agit d'un processus amorcé de bonne foi, et qu'ils peuvent parler des répercussions, alors les pêcheurs au chalut prendront part à la conversation, et ils tenteront de trouver une solution avec vous.

+-

    Le président: Merci.

+-

    M. Wayne Eddy: Je me demande si les députés ici présents savent que le MPO, le gouvernement canadien, a émis, au cours des deux dernières années, cinq permis supplémentaires de pêche à la palourde afin que Clearwater Fine Foods puisse draguer le fond pour des palourdes. Alors, on continue d'émettre des permis.

+-

    Le président: Monsieur Butler.

+-

    M. Mark Butler: Nous avons reçu, à l'Ecology Action Centre, quelques appels plutôt désespérés de la part de pêcheurs de homard de l'Île-du-Prince-Édouard, parce qu'ils voient leurs pêches s'étioler. Ils attribuent cela en partie à la pêche au pétoncle à la drague.

    Une voix: Ils ne disent rien.

    M. Mark Butler: Eh bien, il y en a au moins un qui nous a téléphoné. J'ai oublié son nom de famille.

    Je conviens que les pêcheurs, à un moment donné, doivent accepter une part de responsabilité, au lieu de se contenter de hausser les épaules et de dire: « Eh bien, le MPO me laisse faire, et si je ne le fais pas, c'est mon voisin qui va le faire, alors je le fais aussi. »

    Les pêcheurs doivent accepter une part de responsabilité. Mais au bout du compte, vous êtes le gouvernement, et nous possédons les données scientifiques sur l'impact du dragage, et le MPO.... Si les gestionnaires n'ont pas le courage d'agir, alors le ministre devrait avoir le courage d'agir, car, oui, vous avez raison de dire que, dans les petites collectivités, il est plutôt difficile pour un homme de parler contre son frère. Dieu merci, il y a des pêcheurs comme Wayne.

    Je crois que si le MPO se tenait debout davantage, alors les pêcheurs seraient disposés à se mouiller. Mais c'est effectivement ce qu'ils ont fait; je connais de nombreux pêcheurs qui ont pris le risque de comparaître devant le CCRH ou devant vous pour dire quelque chose, et il ne se passe rien. Maintenant, ils rient de nous; ils rient de Wayne, parce qu'ils se disent que tout cela ne mène à rien. Il y a beaucoup de cynisme dans le domaine, car le MPO ne fait pas preuve de leadership. C'est vraiment triste.

»  -(1700)  

+-

    Le président: Merci.

    Un dernier mot pour M. Kline.

+-

    M. Phil Kline: J'ai pêché le crabe pendant 26 saisons dans le nord du Pacifique. Les pêcheurs à engins fixes ont des milliers de dollars qui reposent au fond de l'océan, et il faut des milliers d'heures de travail pour préparer ces engins et les installer, mais il ne faut que quelques minutes pour qu'un chalut de fond ou un dragueur de pétoncle détruise tout cela complètement, et vous mette en faillite. Alors, allez-vous risquer votre gagne-pain et vous prononcer sur la question qui vient d'être soulevée? C'est vraiment l'un des problèmes fondamentaux.

    Si les pêcheurs de homard utilisaient une canne et un moulinet, il y a fort à parier qu'ils veilleraient à se faire entendre, mais ce n'est pas le cas. Leur capital est immobilisé dans les casiers, lesquels, bien souvent, valent davantage que leur maison et leurs véhicules mis ensemble, et ces casiers risquent de rester dans la mer. Le pêcheur de pétoncle utilise une drague; c'est le nom de l'engin de pêche, car il déchire la surface du plancher océanique.

    Lance avait absolument raison lorsqu'il a dit qu'il faut établir des zones. Il faut que les endroits les plus propices à la pêche au pétoncle soient réservés à cette pêche. Les pêcheurs de pétoncle ont tendance à « conditionner » le plancher océanique, comme ils disent, en retirant les pierres qui sont plus grosses qu'un oreiller.

+-

    L'hon. Shawn Murphy: Si vous me permettez de vous corriger, nous parlons des mêmes pêcheurs. Le pêcheur de pétoncle qui est là-bas pêche également le homard; ils ont tous un permis de pêche du homard.

    Et, en passant, les saisons sont différentes aussi.

+-

    Mme Catherine Stewart: Je crois que nous pouvons tous convenir de la validité de l'argument soulevé par Mark. Nous avons tous vu des situations comme celle-là, où les pêcheurs répugnent à parler, ou ont peur. C'est le MPO qui doit assumer un rôle de leadership; c'est le gouvernement qui doit dire quel processus sera utilisé pour résoudre le problème, et passer à l'action.

+-

    Le président: Merci.

    De toute évidence, c'est un groupe d'invités très intéressants. Nous avions clairement de nombreuses questions, et nous sommes allés au-delà de la durée prévue.

    Nous vous remercions de votre demande à comparaître devant notre Comité. Cela nous sera utile au moment de présenter notre rapport sur la morue, car c'était, après tout, la raison d'être de la réunion. Les enjeux soulevés font partie de cela, et ils ont été soulevés à Terre-Neuve, quand nous étions là-bas.

    Nous tenons à vous remercier d'avoir témoigné, d'avoir monté une démonstration dehors, d'avoir tenu un dîner, même si je n'y ai pas assisté, et de votre témoignage. Nous avons hâte de recevoir toute la documentation que vous nous avez promise.

    Merci.

+-

    M. Wayne Eddy: Nous avons besoin d'aide pour charger le matériel. Alors, si vous voulez vraiment voir à quel point c'est gros, vous êtes les bienvenus.

+-

    Le président: Un instant, je vous prie, on invoque le Règlement.

+-

    L'hon. Shawn Murphy: M'accordez-vous 30 secondes?

+-

    Le président: Monsieur Murphy, pour 30 secondes.

+-

    L'hon. Shawn Murphy: Monsieur le président, le ministre aimerait inviter le Comité à souper. Il nous avait invité à souper à pareille date l'an dernier, et il aimerait le refaire cette année.

    Si c'est convenable pour le Comité d'aller souper, seulement les membres du Comité, pas de membres du personnel, il a suggéré que ce soit le mardi 2 novembre. L'invitation est là, peut-être pourrions-nous examiner la question la semaine prochaine.

+-

    Le président: D'accord. C'est ce que nous ferons.

+-

    M. Mark Butler: Monsieur le président?

+-

    Le président: Un instant, monsieur Butler.

    Avant que tout le monde parte, n'oubliez pas que nos prochaines réunions auront lieu la semaine prochaine, mardi et mercredi, de 15 h 30 à 17 h 30, tel que convenu. À ce moment-là, nous continuerons de donner des instructions en vue de la préparation du rapport sur la morue.

    Monsieur Butler.

+-

    M. Mark Butler: Je voulais seulement dire que la majorité d'entre nous serons en ville jusqu'à vendredi après-midi. Nous serions heureux de rencontrer toute autre personne intéressée en vue de poursuivre les discussions et de présenter certaines données, un exposé sur PowerPoint, etc.

+-

    Mme Catherine Stewart: Mon numéro de téléphone et celui de Mark figurent au bas du communiqué de presse que vous avez reçu. Vous pouvez communiquer avec nous, et planifier une rencontre.

-

    Le président: Merci. Fantastique.

    Je convoquerai une réunion du Comité directeur le mardi 1er novembre. M. Latimer communiquera avec vous.

    Encore une fois, merci à tous.

    La séance est levée.