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OGGO Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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37e LÉGISLATURE, 2e SESSION

Comité permanent des opérations gouvernementales et des prévisions budgétaires


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le mardi 10 juin 2003




À 1025
V         Le président (M. Reg Alcock (Winnipeg-Sud, Lib.))
V         M. Tony Wright (À titre individuel)
V         Le président

À 1030

À 1035
V         M. Tony Wright
V         Le président

À 1040
V         M. Robert Lanctôt (Châteauguay, BQ)

À 1045
V         M. Tony Wright
V         Le président
V         M. Tony Wright
V         M. Kevin Brennan (À titre individuel)
V         Le président

À 1050
V         M. Roy Cullen (Etobicoke-Nord, Lib.)
V         Le président
V         M. Ken Epp (Elk Island, Alliance canadienne)

À 1055
V         Le président
V         M. Robert Lanctôt
V         Le président
V         M. Tony Wright
V         M. Kelvin Hopkins (À titre individuel)
V         Le président
V         M. David Heyes (À titre individuel)

Á 1100
V         M. Ian Liddell-Grainger (À titre individuel)
V         Le président
V         M. Paul Forseth (New Westminster—Coquitlam—Burnaby, Alliance canadienne)
V         Le président
V         M. Roy Cullen

Á 1105
V         M. Tony Wright
V         M. Roy Cullen
V         Le président
V         M. Robert Lanctôt

Á 1110
V         Le président
V         M. Tony Wright
V         Le président










CANADA

Comité permanent des opérations gouvernementales et des prévisions budgétaires


NUMÉRO 049 
l
2e SESSION 
l
37e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 10 juin 2003

[Enregistrement électronique]

À  +(1025)  

[Traduction]

+

    Le président (M. Reg Alcock (Winnipeg-Sud, Lib.)): La séance est ouverte!

    Bonjour. Je m'excuse de ces quelques minutes de retard, mais un autre dossier relevant de notre comité retient l'attention du grand public actuellement et il fallait absolument que je m'en occupe tout de suite.

    Soyez les bienvenus. Nous sommes ravis de vous accueillir.

    Je demanderai peut-être à M. Wright de nous présenter les personnes qui l'accompagnent et de nous expliquer l'objet de cette visite.

+-

    M. Tony Wright (À titre individuel): Avec plaisir.

    Tout d'abord, je tiens à vous remercier énormément d'avoir trouvé le temps de nous rencontrer. Nous souhaitions venir au Canada poser des questions concernant la façon dont sont administrées les fonctions publiques au Canada, un domaine qui intéresse notre comité.

    En effet, notre mandat porte sur de grandes questions constitutionnelles en Grande-Bretagne et nous menons des études sur toutes sortes de dossiers. Je peux vous énumérer au long les diverses études que nous effectuons et qui ont toutes à voir, d'une façon ou d'une autre, avec les rouages du gouvernement. Nous avons supposé que le travail de votre comité aurait un rapport quelconque avec le nôtre et qu'il y aurait peut-être des recoupements.

    Nous aimerions aussi, avec votre permission, vous poser des questions politiques d'ordre général au sujet du Canada. Nous sommes ici depuis une journée maintenant et nous ne faisons que commencer à organiser nos questions. Il serait bon de pouvoir les tester auprès de votre comité, si vous le voulez bien. Donc, je vous remercie à nouveau d'avoir dégagé du temps pour nous rencontrer.

    Nous formons un comité interministériel, c'est-à-dire que notre champ de compétence s'étend à tout l'appareil gouvernemental, que nous ne nous chargeons pas d'un ministère en particulier. De plus, notre comité est multipartite, c'est-à-dire qu'il comprend des porte-parole des trois grands partis représentés au Parlement.

    J'aimerais maintenant vous présenter mes collègues, soit Kevin Brennan, député de Cardiff West—comme vous le savez, Cardiff est la capitale du Pays de Galles—, David Heyes, député travailliste de Ashton under Lyne, qui se trouve près de Manchester, dans le nord de l'Angleterre, Kelvin Hopkins, député de Luton, dans le Bedfordshire, dans le centre-sud de l'Angleterre, Gordon Prentice, député de Pendle, qui se trouve un peu au nord de Manchester, notre greffier, Phillip Aylett, qui en règle générale met de l'ordre dans les affaires du comité, Ian Liddell-Grainger, le député conservateur de la Chambre...

    Des voix: Oh, oh!

    M. Tony Wright: Devant le dernier comité que nous avons rencontré, les membres ont dit qu'ils savaient qu'Ian était un conservateur la minute qu'il est entré. Voyons si vous êtes capables de le repérer, vous aussi.

    Ian représente Bridgwater, dans le Somerset, dans le sud-ouest de l'Angleterre. Nous avons aussi Annette Brooke, députée du Liberal Democrat Party—ne vous emballez pas trop—représentant la circonscription de Poole, sur la côte Sud. Voilà donc pour qui nous sommes.

    Je me demande s'il ne serait pas utile que vous nous disiez simplement ce que vous faites en règle générale, après quoi nous pourrons simplement vous poser quelques questions.

+-

    Le président: Je pourrais peut-être vous expliquer simplement la nature de notre mandat, après quoi les autres membres pourront intervenir.

    Nous sommes un comité permanent de la Chambre des communes. Comme tous les autres comités permanents, nous avons un mandat particulier à l'égard des organismes centraux du gouvernement. Par ailleurs, nous sommes habilités à examiner toute question qui nous intéresse, quel que soit le ministère visé. Nous avons donc à la fois un mandat particulier... en somme, nous pouvons agir sur deux niveaux. Nous sommes mandatés pour examiner des questions ayant un rapport avec les technologies de l'information et des communications au sein de l'appareil gouvernemental, un point particulier que mentionne notre ordre permanent. Ensuite, nous sommes également mandatés essentiellement pour examiner toute question qui touche au moins deux ministères et nous sommes libres de le faire selon notre bon vouloir. La question est entièrement laissée à la discrétion du comité.

    Point qui intéressera peut-être votre greffier, nous pouvons aussi modifier des crédits, même s'ils ont été renvoyés à d'autres comités permanents. Habituellement, dans le cadre de l'examen des budgets, durant lequel nous pourrions modifier les crédits qui nous ont été particulièrement renvoyés, nous pouvons aussi modifier des crédits dont sont saisis d'autres comités permanents s'ils concernent un des enjeux horizontaux auxquels nous travaillons, soit celui des technologies de l'information et des communications pour lequel nous sommes particulièrement mandatés, soit une des questions que nous avons décidé d'examiner cette année-là.

    Nous aussi formons un comité multipartite. M. Lanctôt que vous voyez ici est député du Bloc québécois. Malheureusement, ni les progressistes-conservateurs ni les néo-démocrates qui font partie de notre comité ne pouvaient être des nôtres ce matin.

    M. Lanctôt représente une circonscription du Québec, à l'est d'Ottawa. M. Epp et M. Forseth sont tous deux des députés alliancistes et représentent donc des circonscriptions de la région ouest du pays. Paul vient de la Colombie-Britannique et Ken, des Prairies, tout comme moi. En effet, je représente une circonscription du centre du pays.

    À droite, vous avez toute une brochette de députés libéraux de l'Ontario—en fait, trois d'entre eux.

    Une voix: À votre droite à vous...

    Le président: Oui, à ma droite, peu importe le sens dans lequel vous l'entendez.

    Conformément à la structure de ces comités, M. Tirabassi est le secrétaire parlementaire du secrétaire du Conseil du Trésor. Le Conseil du Trésor fait en effet rapport à notre comité, tout comme les Services gouvernementaux. Leur secrétaire parlementaire fait aussi partie de notre comité. Nous avons aussi le grand bonheur, au sein de notre comité—je dis bien que nous avons le grand bonheur—de compter parmi nous M. Valeri et M. Cullen, des membres actifs et intéressés de notre comité. Ils sont tous deux également d'ex-secrétaires parlementaires du ministre des Finances.

    Au-delà de ces renseignements, n'étant pas certain de la nature détaillée du travail que fait un comité spécial au Royaume-Uni, je précise que notre comité a vu le jour à la suite de longs débats au sujet de la nature changeante du Parlement et de la désaffection publique à son égard. L'institution était en effet perçue comme un mécanisme d'approbation d'office des mesures proposées par le gouvernement du jour. La question a suscité énormément de débats, tout comme le peu d'intérêt porté aux comptes publics et aux prévisions budgétaires, de même que l'impression que le Parlement, bien qu'il soit responsable de faire un examen détaillé des prévisions budgétaires et d'obliger les ministères à rendre des comptes, ne le faisait pas en réalité, qu'il n'effectuait que des examens superficiels.

    Il y a eu énormément d'échanges quant à la façon dont il faudrait réagir. Différents régimes avaient été appliqués au processus d'examen budgétaire. La manière dont nous fonctionnons, chaque grand ministère ou chaque série de ministères relève d'un comité permanent précis qui a pour mandat d'effectuer tous les travaux du cycle budgétaire annuel, allant des premières indications jusqu'aux comptes publics et à toute loi envisagée, l'idée étant que le comité acquiert de l'expérience dans le domaine étudié et qu'il l'applique aux fonds qui sont alloués.

    Malheureusement, très peu de comités le faisaient en réalité, et les budgets étaient simplement mis de côté en raison des autres travaux à faire. On a donc débattu de l'idée de créer un seul comité qui s'occuperait uniquement des documents budgétaires.

À  +-(1030)  

    En bout de ligne, il a été décidé de ne pas le faire. Nous avons décidé de créer ce comité-ci, il y a tout juste un an, et de lui confier un mandat élargi. Nous sommes mandatés pour examiner les prévisions budgétaires, mais nous avons interprété ce mandat non pas comme nous obligeant à examiner les prévisions comme telles, mis à part celles des ministères que nous décidons d'examiner, mais d'étudier le processus lui-même et de prodiguer des conseils à d'autres comités quant à la façon d'effectuer ces examens pour la Chambre et d'organiser leur temps.

    M. Valeri et un député allianciste coprésident ce travail particulier et ils sont en train de rédiger un rapport plutôt détaillé, qui sera soumis à notre approbation demain, sur cette question même de savoir comment restructurer le processus d'examen budgétaire.

    C'est là à notre avis une tâche permanente qu'effectuera le sous-comité chaque année, à mesure que nous creuserons la façon dont un comité parlementaire assure une surveillance efficace.

    Quand nous nous sommes organisés—nous avions également ma greffière fort capable, Miriam Burke—, nous avons regroupé sous notre responsabilité les principaux organismes centraux du gouvernement, soit le Bureau du Conseil privé, le Conseil du Trésor, les Services gouvernementaux et d'autres. En théorie, le Sénat fait rapport à notre comité, mais nous n'oserions jamais convoquer ses représentants. En fait, je ne suis même pas sûr que nous sommes censés en reconnaître l'existence. Il suffit de leur donner les fonds. Le comité compte aussi, parmi ses responsabilités, d'obliger de hauts fonctionnaires de la Chambre à rendre des comptes, soit le commissaire de l'accès à l'information, le commissaire à la protection de la vie privée, le commissaire de la fonction publique et, bientôt, le commissaire à l'éthique. Il n'a pas encore été décidé si ce dernier se présentera devant notre comité dans le cadre de ses nouvelles responsabilités. Je soupçonne que ce ne sera pas le cas. Je crois qu'il devra plutôt répondre au comité des privilèges et des élections. Par contre, il relève de nous pour ce qui est de l'enregistrement des lobbyistes.

    Or, nous venons tout juste d'achever une étude. M. Cullen et M. Forseth ont également coprésidé un sous-comité qui a examiné la fonction publique, l'embauchage dans la fonction publique et certains des enjeux soulevés par la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique. Nous venons tout juste d'achever l'étude d'un projet de loi qui est maintenant devant le Sénat et qui représente la première grande réforme de la législation en matière d'emploi dans la fonction publique depuis 32 ans. Pour ce qui est des hauts fonctionnaires de la Chambre—le commissaire à l'éthique, le commissaire à la protection de la vie privée et ainsi de suite—, nous nous apprêtons à mener une étude portant sur le Commissariat de l'accès à l'information et à envisager une réforme des lois qui y ont trait. M. Lanctôt, entre autres, participe activement à ce processus. 

    Ensuite, nous nous mettrons en veilleuse. C'est l'autre chose que nous faisons ici.

    Quelqu'un a-t-il autre chose à ajouter à cette description?

    La parole est à vous.

À  +-(1035)  

+-

    M. Tony Wright: Voilà qui est extrêmement intéressant. Il y a donc énormément de recoupements entre vos travaux et les nôtres—je ne les nommerai pas tous—, de même que d'importantes différences. Toutefois, il semble y avoir des problèmes communs à nos deux Parlements. Les prévisions budgétaires posent un problème considérable au Parlement britannique, et il est constamment question, encore aujourd'hui, d'améliorer la façon dont les comités chargés des ministères examinent les prévisions budgétaires. C'est toujours la partie qui est mise de côté, et vous avez trouvé ici une façon originale de régler le problème.

    Nous essayons de renforcer ce que nous appelons le comité spécial, ce que nous sommes, parce que les comités britanniques ne font pas à la fois l'étude de projets de loi et des études tout court; ce sont là des entreprises distinctes. C'est une tentative en fait en vue de permettre à ces comités spéciaux, aux comités d'examen, de mieux se pencher sur les prévisions budgétaires, bien que je ne crois pas que nous allions très loin dans cette voie. Toutefois, une grande partie de ce que vous avez dit nous intéresse, je crois.

    Je vais peut-être commencer avec cette affaire qui fait les manchettes en ce moment et au sujet de laquelle je lis des articles depuis mon arrivée. Je parle du ministre qui aurait donné des contrats à ses amis et à des partisans du parti....

    Les gens quittent-ils la salle parce que j'en parle?

    Des voix: Oh, oh!

    M. Tony Wright: On laisse entendre que le Parlement n'a pas vraiment maîtrisé la situation. Est-ce bien le cas? Dans l'affirmative, pourquoi ne l'a-t-il pas fait?

+-

    Le président: Je vais commencer par vous donner un léger aperçu, après quoi je vais demander à Robert et à un autre allianciste peut-être de poursuivre. Si quelqu'un de ce côté-ci de la table souhaite prendre la parole également, il faudrait me laisser le savoir.

    Avant d'entrer dans le détail, un des enjeux autour desquels gravitent certaines discussions de notre comité et qui expliquent en partie notre raison d'être est ce déclin de véritable surveillance.

    Une partie du phénomène s'explique par... Un chercheur universitaire a récemment publié un document sur le sujet qui me semblait utile. En 1993, quand le gouvernement actuel a été élu pour la première fois, ce fut un de ces raz de marée qui emporta la plupart des sièges de la Chambre. Le gouvernement précédent, qui avait pris le pouvoir avec une très faible majorité en 1988, ne détenait plus que deux sièges. C'est pourquoi la plupart des nouveaux venus à la Chambre, moi-même inclus et, je suppose, la plupart des autres députés qui se trouvent ici, n'avait aucune expérience parlementaire. Il n'y avait pas de mémoire institutionnelle. Ce n'était pas deux nouveaux députés qui se joignaient à un comité déjà bien établi.

    C'est pourquoi, pendant un certain temps, nous avons simplement continué de nous affronter au sein des comités. C'était sans cesse le parti ministériel contre l'opposition. Évidemment, il y a toujours un peu de cela au sein de n'importe quel comité, mais il n'y avait aucune collégialité, aucune impression que notre rôle de parlementaires était d'obliger le gouvernement à rendre des comptes. Avec toutes ces guerres intestines, le gouvernement réussissait à se défiler. C'est justement ce que nous sommes en train d'essayer de régler.

    Naturellement, une des choses qui nous mettent à l'épreuve est le genre de questions dont vous avez parlé tout à l'heure.

    Robert, vous pouvez peut-être répondre.

À  +-(1040)  

[Français]

+-

    M. Robert Lanctôt (Châteauguay, BQ): Merci beaucoup, monsieur le président, de me permettre de prendre la parole.

    Je suis le porte-parole en matière de Travaux publics et Services gouvernementaux pour le Bloc québécois; je peux donc parler un peu de ce dossier, qui dure depuis près de deux ans. Or, la question que vous avez soulevée, je l'ai moi-même soulevée hier à la Chambre. On parle ici d'un dossier qui a été entre les mains de plusieurs ministres des Travaux publics et des Services gouvernementaux; on en est maintenant au troisième et on n'en a pas terminé avec cette question. En effet, depuis deux ans, nous demandons qu'une enquête publique soit menée pour être en mesure d'étudier la chose jusqu'au bout. Il s'agit d'une histoire vraiment incroyable.

    Au Québec, nous avons un parti qui s'appelle le Bloc québécois, dont je fais partie. Ici, nous travaillons dans le cadre d'un gouvernement fédéral, mais notre objectif est la souveraineté du Québec; nous y avons la majorité des sièges et nous ne présentons des candidats que dans cette province. Il y a au Québec 75 circonscriptions et le Bloc détient la majorité d'entre elles. Ainsi, la majorité des députés élus au Québec proviennent de cette formation dont je fais partie.

    En 1995, lors d'un référendum que nous avons perdu par 30 000 voix seulement, le Canada a constaté que quelque chose de très sérieux se passait au Québec. On a donc décidé d'y mousser l'image du Canada, et le Programme de commandites a été créé. Par la suite, plusieurs compagnies de publicité en ont utilisé les fonds et se sont accordé des commissions. Je ne ferai pas tout le portrait de la situation parce que les événements se sont déroulés pendant deux ans et que plusieurs dossiers étaient en cause. Il reste que plusieurs compagnies de publicité se sont octroyé des commissions à même les commandites ou les subventions offertes.

    Je vais vous donner l'exemple de la Formule 1, qui aura lieu à Montréal en fin de semaine. Dans un tel contexte, on donnait une commandite; de cette dernière, la compagnie de publicité se prélevait une commission qu'elle utilisait ensuite pour accorder des sous-contrats à des amis, des membres de leur famille ou d'autres proches. Ces gens remettaient enfin des sommes d'argent au parti au pouvoir.

    Pour notre part, nous demandons à connaître toute l'histoire. Il existait des liens serrés avec ce ministre dont vous avez parlé plus tôt; c'est en outre ce dernier qui, au Québec, contrôlait toute l'organisation du parti au pouvoir.

    Par l'entremise des médias et de nos recherchistes, nous faisons des recherches depuis deux ans. C'est un dossier qui s'élargit de jour en jour; il s'agit d'une toile tissée très serré. Nous demandons donc depuis deux ans qu'il y ait une enquête publique à cet effet. Or, tous les membres de ce gouvernement ne sont pas impliqués dans cette machination. Nous voudrions bien éclaircir la chose, et la seule façon de le faire est de tenir une enquête publique.

    La décision qui a été prise à cet égard a été de mettre le dossier entre les mains de la GRC pour que des enquêtes policières soient réalisées. Cependant, aucun résultat n'est révélé parce que, bien entendu, tous les dossiers--il y en a maintenant environ 14--font l'objet d'une enquête à la GRC. Chaque fois qu'on s'enquiert de l'évolution de ce dossier, on ne nous donne pas de réponse sous prétexte que c'est sous enquête policière. Par la suite, bien entendu, on n'entend plus parler de ce qui s'est passé.

    C'est donc en quelque sorte l'histoire qui se cache derrière la question que vous posez. Bien entendu, le ministre responsable a été nommé ambassadeur à Copenhague, au Danemark.

À  +-(1045)  

En outre, on a appris dernièrement qu'il voulait devenir ambassadeur au Vatican. Je ne sais pas si vous avez lu les journaux et entendu nos questions à la Chambre des communes hier, mais on peut se demander comment il serait possible de nommer au Vatican quelqu'un dont la réputation est entachée de cette façon. La chose serait pour le moins particulière.

[Traduction]

+-

    M. Tony Wright: Merci de cette réponse. C'est une fort bonne explication. Avant qu'un autre n'intervienne, me permettez-vous de simplement poser une question supplémentaire?

    Le Canada, c'est connu, a son commissaire à l'éthique, et des personnes venues comme nous de l'extérieur pourraient se demander pourquoi le commissaire à l'éthique n'examine pas tout cela. Pourquoi faut-il attendre et exiger la tenue d'une enquête?

    Une voix: C'est là toute une autre controverse.

+-

    Le président: Je vais peut-être demander à M. Cullen de répondre.

    Monsieur Epp, aimeriez-vous...?

+-

    M. Tony Wright: Je pourrais peut-être demander à M. Brennan d'ajouter un mot.

+-

    M. Kevin Brennan (À titre individuel): Je ne crois pas que nous nous intéressions vraiment au détail de cette affaire. Ce qui intéresse la présidence et qui m'a également frappé, c'est que le Canada a l'enviable réputation d'avoir une vie politique propre, si je peux l'exprimer ainsi, et d'avoir un sens de l'éthique très poussé, une des raisons pour lesquelles nous sommes venus ici.

    Une voix: [Note de la rédaction: Inaudible]

    M. Kevin Brennan: Cela compte, surtout sur le plan international. C'est vrai.

    Nous examinons de pareilles questions couramment, lors de nominations publiques et ce genre de choses. Depuis que nous sommes ici, ce qui en a étonné certains, c'est de voir à quel point le favoritisme est presque institutionnalisé.

    Ce n'est pas la critique d'un parti politique en particulier, c'est le système qui le veut ainsi. Il existe toute une série de charges publiques auxquelles les partis politiques peuvent nommer des personnes de leur choix, des amis, des copains.

    Une voix: Environ 3 500.

    M. Kevin Brennan: Il y en a beaucoup.

    Ce matin, j'ai entendu parler à la radio de cette affaire d'appels en matière d'immigration, de hauts fonctionnaires qui sont accusés d'avoir accepté des pots-de-vin en échange du statut d'immigrant au Canada. À nouveau, c'était là des nominations politiques; l'un d'entre eux avait déjà été condamné pour fraude. Nous avons aussi entendu parler du commissaire à la protection de la vie privée qui fait escale à Hawaï et j'oublie quoi encore.

    Nous connaissons bien ce genre de situation, parce que nous l'avons tous vécu, d'une façon ou d'une autre. En Grande-Bretagne, c'était courant durant les années 90.

    Je suppose que je veux savoir, en réalité, si votre comité ou quelqu'un au Parlement se penche non pas sur des questions particulières—nous ne nous intéressons pas à ces affaires—, mais sur toute la grande question de l'influence qu'exerce le favoritisme sur la politique canadienne.

+-

    Le président: Je vais vous offrir une réponse structurelle, après quoi les autres pourront m'interrompre.

    Avant 1993, il n'y avait rien, aucun processus officiel d'éthique pour les élus. Le poste de commissaire à l'éthique a été créé, mais le premier ministre qui l'a créé, l'actuel premier ministre, a énoncé comme principe que...en tant que... il devait avoir droit de regard sur le Cabinet, en grande partie, et sur les hauts fonctionnaires qui sont nommés à des charges publiques et que, comme tous ceux-là relevaient de lui, le commissaire à la protection de la vie privée lui ferait rapport.

    Il s'agit-là d'une controverse qui dure depuis quelque temps déjà, parce que, à tort ou à raison—rien ne prouve que la personne a mal agi—, il est accusé d'avoir agi pour des motifs politiques simplement parce que tout son bureau relève du premier ministre.

    Le travail se fait donc à deux niveaux actuellement. Toute la question du favoritisme politique, de l'éthique, relève du comité de la procédure et des affaires de la Chambre. En fait, actuellement, il est saisi d'un projet de loi qui prévoit que le commissaire à l'éthique est un haut fonctionnaire du Parlement nommé indépendamment, un peu comme le vérificateur général, et qu'il fait rapport au Parlement plutôt que de passer par le premier ministre.

    Il existe aussi un autre niveau, soit l'ébauche d'une politique, ce dont discutera en fait notre comité ce soir. Nous accueillons en effet le greffier du Conseil privé qui est tenu de faire rapport à notre comité en vue de discuter de mesures analogues à l'égard des hauts fonctionnaires. Une des préoccupations exprimées, c'est que pour des raisons de...

    Il y a deux moyens de réduire le favoritisme politique ou, expression qui décrirait mieux le phénomène selon moi, une «trop grande influence politique». On peut, d'une part, accroître la transparence ou, d'autre part, retirer les nominations des mains des élus, éliminer leur participation à ce processus. Si vous choisissez cette dernière solution, tout ce que vous faites, c'est de remettre beaucoup de pouvoir à la fonction publique, de sorte que le favoritisme pratiqué par la fonction publique deviendrait aussi préoccupant que le favoritisme politique. C'est en partie ce dont on débat actuellement.

    Roy, souhaitiez-vous intervenir à ce stade-ci?

À  +-(1050)  

+-

    M. Roy Cullen (Etobicoke-Nord, Lib.): Oui. Merci, monsieur le président.

    Je sais que vous ne vous intéressez pas au détail de cette affaire particulière, mais puisque mon collègue en a parlé, je tenais simplement à situer tout cela dans son contexte. Une des contreparties de la fonction de vérificateur général et d'une très grande liberté de presse, naturellement, c'est que toutes sortes d'histoires se retrouvent dans les médias en raison de la transparence accrue.

    Dans le cas qui nous préoccupe, celui dont vous parlez, l'histoire des commandites, tout d'abord, un des problèmes du gouvernement central au Québec est de faire passer son message fédéraliste. Certains éléments du Québec souhaitent que la province se sépare du Canada. Donc, le programme de commandites permettait d'orienter des contrats vers des personnes qui, de l'avis du gouvernement, partageaient ses vues fédéralistes et transmettraient son message, soit que le gouvernement fédéral commanditait et appuyait des événements au Québec.

    En fin de compte, ce qui s'est produit selon moi, c'est que d'autres événements peut-être partisans qui n'étaient pas tout à fait corrects se sont insérés dans ce programme. Pour régler le problème, le nouveau ministre a essentiellement transformé le programme de commandites de sorte que tout ce qui était adjugé à l'externe est maintenant fait à l'interne. On ne connaîtra plus ce genre de difficultés.

    Le seul autre commentaire que j'aimerais faire, c'est que vous pouvez avoir les meilleures règles du monde... c'est ce que je suis en train de découvrir. Je fais beaucoup de travail sur la régie des entreprises, sur la lutte à la corruption en règle générale. Vous pouvez avoir les meilleures règles du monde, mais le facteur déterminant sera la personnalité et la culture, la meilleure des intentions.

    C'est tout ce que je tenais à dire pour vous situer en contexte un peu.

    Bien sûr, au Canada, les questions d'éthique posent des problèmes, comme à tout autre gouvernement. Nous avons une presse très libre et très ouverte. Nous avons un vérificateur général qui présente un rapport chaque trimestre. Il arrive donc que nous nous fassions taper sur les doigts.

+-

    Le président: Ken, souhaitiez-vous intervenir?

+-

    M. Ken Epp (Elk Island, Alliance canadienne): Je vous remercie beaucoup.

    Tout d'abord, j'aimerais vous souhaiter la bienvenue. Je trouve fantastique d'avoir cette occasion d'échanger un peu.

    Moi et Paul Forseth sommes membres de l'Alliance canadienne, comme s'appelle notre parti. Nous sommes un parti d'opposition qui est quelque peu différent du parti de notre collègue séparatiste du Québec. Le sien a renoncé à Ottawa et au gouvernement fédéral et il souhaite faire bande à part. Notre slogan, il y a dix ans, quand notre parti a été fondé, disait que l'Ouest voulait se joindre à la grande famille canadienne. Nous souhaitons avoir une participation beaucoup plus concrète dans la Confédération. Comme notre région est loin et qu'elle est également beaucoup moins populeuse, nous avons en réalité été ignorés. Mais ce n'était là qu'un petit préambule.

    J'ai eu le privilège et la responsabilité d'agir comme porte-parole en matière d'éthique pour notre parti depuis la première fois presque que j'ai été élu, en 1993. En fait, j'ai dû partir tôt aujourd'hui parce que nous sommes en ce moment même en train d'étudier le projet de loi qui instituera le nouveau poste de commissaire à l'éthique, censément indépendant. Il continue de nous préoccuper énormément parce que, comme maintenant, même avec le nouveau projet de loi, c'est le premier ministre qui va faire le recrutement et choisir les candidats.

    Il est vrai qu'en vertu des nouvelles règles, il y aura consultation, ce qui est en réalité une bonne chose à mon avis, mais rien dans la loi n'oblige le premier ministre à changer d'idée s'il y a de l'opposition à son choix. Ensuite, la nomination devra être ratifiée par vote à la Chambre où le Parti libéral détient une nette majorité et, la plupart du temps, on se contentera de toute évidence de ratifier le choix.

    C'est donc là une de nos grandes préoccupations, parce que notre commissaire à l'éthique devrait être vraiment à l'écart de toute influence politique de la part du premier ministre.

    Je connais personnellement celui que nous avions auparavant. C'est une excellente personne, mais je crois que le fait d'avoir été nommé par le premier ministre et de ne répondre qu'à lui lui fait obstacle dans son travail. Bien souvent, il nous a semblé être simplement un membre de l'équipe de contrôle des dommages plutôt que quelqu'un qui va vraiment au coeur du problème et qui le règle d'un point de vue éthique.

    Je fais donc partie de ce processus, et nous faisons tout ce que nous pouvons pour faire adopter une règle de supermajorité quelconque ou quelque... et faire participer tous les partis au recrutement initial plutôt que de laisser le Bureau du premier ministre s'en occuper. C'est là un petit aperçu rapide.

    Je dois vous quitter, parce que l'autre réunion débute à 11 heures.

    À nouveau, je vous suis reconnaissant d'être venus nous rencontrer.

À  +-(1055)  

+-

    Le président: M. Lanctôt a une petite question supplémentaire.

[Français]

+-

    M. Robert Lanctôt: Oui, s'il vous plaît.

    Nous sommes aussi vraiment d'accord sur ce que M. Epp vient de dire. Il est évident qu'un commissaire à l'éthique devrait être indépendant et non pas relié au premier ministre.

    J'aimerais vous faire part du fait que ce comité vient de terminer une étude sur la modernisation de la fonction publique; il s'agissait du projet de loi C-25. Je pense qu'il y a ici des gens qui sont membres du Parti travailliste. Nous avons présenté 120 amendements, dont un seul a été accepté en comité. Ces amendements avaient pour but d'améliorer les relations patronales-syndicales, mais ils ont été rejetés.

    Auparavant, c'était la Commission de la fonction publique qui décidait qui aurait les promotions, qui allait faire le recrutement et ainsi de suite. Le projet de loi que nous avons étudié permet de déléguer ces pouvoirs aux sous-ministres. On a dit qu'on avait une fonction publique partisane et qu'elle devait être impartiale. Dans les discours, on dit vouloir une fonction publique impartiale, mais on donne des armes aux sous-ministres pour nommer les personnes qu'ils veulent aux postes intéressants. En vertu de ce projet de loi, on peut même permettre qu'il y ait un seul candidat à un poste.

    Je voulais vous donner un peu l'image de la situation. Oui, il y a des nominations politiques, mais dans ce projet de loi, on prévoyait des éléments permettant aux hauts dirigeants de la fonction publique d'avoir le contrôle, et cela, bien entendu, au détriment des syndicats.

[Traduction]

+-

    Le président: Comme le timbre signifie qu'il ne nous reste que 15 minutes environ avant de devoir aller voter, pourquoi ne posez-vous pas deux ou trois questions de plus auxquelles les membres vont répondre.

+-

    M. Tony Wright: Je vous remercie beaucoup.

    Kelvin.

+-

    M. Kelvin Hopkins (À titre individuel): Vous nous avez dit, dans votre mot de bienvenue, qu'on manquait de confiance dans les députés, qui sont maintenant perçus comme une simple formalité pour approuver ce que décide le gouvernement. Un sentiment analogue a cours en Grande-Bretagne. Il est très inquiétant de constater que la participation électorale baisse à des niveaux dangereusement bas—pas autant qu'en Amérique, mais on a l'impression que tout est d'une certaine façon organisé par les hautes instances et qu'il n'y a pas grand-chose à faire. Bien que certains électeurs continuent de voter avec loyauté pour leurs partis, une participation de 59 p. 100 à une élection générale est très faible d'après nos normes et très inquiétante. Manifestement, il en va de même au Canada.

    Croyez-vous qu'on puisse faire quelque chose? Quelle est la cause du problème? Est-ce l'impression que les députés ne sont pas tant corrompus qu'impuissants?

+-

    Le président: Posez deux ou trois questions—et puis il y aura l'autre heure, plus tard.

+-

    M. David Heyes (À titre individuel): Vous avez mentionné tout à l'heure le raz de marée électoral de 1993. Hier, nous avons discuté avec des personnes que nous avons rencontrées de la très courte durée de vie des élus au Canada. Il n'y a rien d'inhabituel à ce qu'ils ne fassent qu'un mandat.

    Dans quelle mesure le genre de problèmes dont nous discutons est-il le résultat d'un manque fondamental d'expérience de la législature et du déséquilibre des pouvoirs qui en résulte?

    Simplement connaître vos vues à ce sujet nous serait utile.

Á  +-(1100)  

+-

    M. Ian Liddell-Grainger (À titre individuel): Pour en revenir à ce dont il était question, je suis intrigué, car vous avez le pouvoir d'interroger la personne qui est nommée par le premier ministre. Combien de fois convoquez-vous des personnes nommées par le premier ministre? De plus, que faites-vous si ce choix ne vous plaît pas? Ce pourrait être n'importe qui.

    Nous discutions de l'industrie laitière de l'Alberta. C'est bien, mais invitez-vous à témoigner celui ou celle qu'a choisi le premier ministre et lui faites-vous passer un mauvais moment? C'est ce que nous faisons. Le faites-vous?

+-

    Le président: Je crois que je vais laisser Paul prendre la parole, puisqu'il n'a pas parlé jusqu'ici, puis ce sera le tour de Roy, après quoi ce sera mon tour.

    Paul, si vous voulez bien.

+-

    M. Paul Forseth (New Westminster—Coquitlam—Burnaby, Alliance canadienne): Je crois que nous n'exerçons pas suffisamment notre pouvoir en tant que comité indépendant. Le Parlement n'est pas le gouvernement, mais bien l'institution indépendante à laquelle le gouvernement fait appel pour faire adopter ses lois et à laquelle il demande la permission d'imposer des taxes et de dépenser l'argent des contribuables. Le Parlement, par l'intermédiaire de notre comité, devrait exercer son rôle indépendant et examiner ce qui se passe, plutôt que d'approuver d'office ce qui se passe et ce que veut le Bureau du premier ministre.

    Dans la mesure où les nominations sont concernées, nous savons qu'on procède un peu partout au pays à quelque 3 500 nominations à des offices régionaux, à des commissions, à la magistrature et ainsi de suite. Il existe au Bureau du premier ministre un bureau qui manifestement continue d'essayer de faire ces nominations. Malheureusement, comme j'ai pu moi-même m'en rendre compte, il est à la recherche non seulement de compétences, mais également de proches du parti politique.

    Par bonheur, la plupart des personnes ainsi nommées sont tout à fait compétentes et font de l'excellent travail. Toutefois, il y a autant de favoritisme entourant ces nominations parce qu'on a une dette à payer à ses amis et qu'on le fait dans le cadre d'un système.

    Les seuls partis qui ont été au pouvoir depuis la Confédération sont les conservateurs, suivis des libéraux, d'autres conservateurs, de libéraux encore et ainsi de suite. Or, les deux partis ont à peu près le même style. Chaque parti a sa machinerie électorale. Pour convaincre les gens de travailler au sein de cette machine électorale, il faut qu'il y ait un système inhérent quelconque qui récompense ceux qui travaille longtemps pour le parti. Partout dans notre société, on va à l'université et on voit les étudiants prendre la décision, même au premier cycle, d'adhérer à un parti politique parce qu'ils savent qu'à un certain stade, ce sera peut-être utile pour leur carrière, surtout s'ils sont en droit, en affaires ou je ne sais trop quoi encore. Je participe à ces journées sur le campus où on recrute de nouveaux membres pour le parti et il y est question... c'est le genre de conversation qu'on entend. Ces systèmes font partie intégrante de notre société.

    L'Alliance canadienne veut changer tout cela. Nous proposons une longue série de réformes parlementaires de manière à, une loi à la fois, redonner vie à la collectivité ou la faire participer à la vie politique pour que chaque électeur soit convaincu que son vote a une influence ou qu'il peut faire son devoir de citoyen par des moyens électroniques. C'est là une toute nouvelle capacité d'engagement des citoyens. Nous espérons pouvoir le faire avec les sondages d'opinion publique.

    Cela leur donne aussi un certain pouvoir en ce qui concerne le programme législatif. Le mouvement vient de la base plutôt que d'être imposé par le haut. Voilà ce que nous préconisons.

    Nous avons donc beaucoup de choses à proposer en vue de changer le centre du pouvoir, pour passer d'un programme dicté par le premier ministre et deux ou trois fonctionnaires non élus à un Parlement qui réaffirme une partie de son autorité indépendante.

+-

    Le président: Je vous remercie, Paul.

    Roy.

+-

    M. Roy Cullen: Merci, monsieur le président.

    Ce n'est pas que je veuille être trop sectaire, mais chaque parti parle d'abolir les nominations du genre jusqu'à ce qu'il accède au pouvoir. Deux semaines plus tard, on n'en entend plus parler.

    Personnellement, les nominations politiques ne me posent pas de problème. Toutes autres choses étant égales par ailleurs, pourquoi ne pas avoir quelqu'un qui épouse vos valeurs et votre façon de penser?

    J'aimerais en revenir à une des questions. On a beaucoup débattu au Canada récemment de ce déficit de la démocratie. Un congrès au leadership est naturellement prévu en novembre. Un monsieur qui deviendra probablement le prochain premier ministre a parlé sans équivoque du déficit démocratique et des mesures qu'il aimerait voir prises à cet égard.

    Nous parlons de nominations. Pour l'instant, les nominations sont parfois soumises au comité, mais après le fait. Plusieurs d'entre nous affirment que c'est un exercice tout à fait inutile. Je crois que vous verrez un changement sur ce plan.

    On cherche davantage à savoir si l'on tient vraiment à instituer un régime de nomination des juges à la façon américaine, par exemple. La vie privée de ceux-ci est étalée au grand jour, rien n'est plus secret, y compris la façon dont ils ont voté dans un certain dossier. Cela devient un peu une chasse aux sorcières.

    Je crois que c'est là-dessus que se concentre actuellement le débat. Si vous voulez mon avis, le renvoi à des comités de nominations qui ont déjà été décidées est un pur gaspillage de temps, et je crois que vous verrez cette situation changer.

Á  +-(1105)  

+-

    M. Tony Wright: Cela nous intéresse parce que nous sommes sur le point de présenter un rapport à ce sujet. Si le modèle américain vous déplaît en raison de la chasse aux sorcières et si le modèle actuel est un exercice inutile, que proposez-vous?

+-

    M. Roy Cullen: Il doit y avoir un juste milieu entre les deux. Je crois qu'on renverra au comité toute une gamme de nominations avant que ne soient faites des offres définitives. Le débat fait plutôt rage au sujet des juges, des personnes nommées à la Cour suprême; voilà où le débat devient plus gênant. Cependant, pour les nominations ordinaires, je crois que le nouveau gouvernement mettra cette formule à l'essai et essaiera de la rendre efficace.

    D'autres mesures peuvent également être prises. Nous parlions en privé du fait que la plupart des votes maintenant sont assimilables à des votes de confiance. Je crois qu'on va revenir au « three-line whip ». Cette notion a disparu du paysage parlementaire, phénomène qui est à l'origine de beaucoup de cynisme.

    Dans le grand public, on comprend parfois mal le rôle des députés en termes de discipline de parti, mais je crois que la concentration du pouvoir au Bureau du premier ministre n'a pas aidé.

    Nous avons parlé des présidents de comité. Jusqu'à tout récemment, le premier ministre décidait qui présiderait tel comité, par exemple. Ce choix était communiqué aux députés qui recevaient l'instruction du whip de voter en sa faveur. La situation évolue actuellement. Notre caucus est beaucoup plus engagé et joue un rôle beaucoup plus actif dans le choix des présidents de comité.

    Nous avons aussi parlé du rôle des comités, de renvoyer les projets de loi au comité à l'étape de la première lecture. Nous l'avons fait parfois, mais c'était plus pour la forme, sans véritable engagement de la part du gouvernement. Je crois qu'il y a moyen de le faire plus souvent, de renvoyer les projets de loi au comité dès la première lecture.

    Le rôle du comité va aussi changer. Actuellement, des comités qui examinent les prévisions budgétaires réduisent les fonds demandés par un ministère. Le lendemain, le gouvernement cherche à tout rétablir à la Chambre parce que c'est une question de confiance, une question de budget et d'affectation de crédits.

    Le comité se met alors à se demander pourquoi il se donne la peine d'examiner les prévisions budgétaires puisque, s'il y a apporte des changements légitimes, le gouvernement dit simplement qu'il s'agit d'une question d'argent, d'une question de confiance, qu'il va rétablir et soumettre le tout à la Chambre?

    On pourrait continuer ainsi pendant longtemps, mais ce sont là certains changements possibles.

[Français]

+-

    Le président: Monsieur Lanctôt, une toute petite question.

+-

    M. Robert Lanctôt: Le déficit démocratique existe partout dans le monde présentement. Cependant, le manque d'intérêt des gens, je pense qu'il est seulement sur papier, lors du vote. Les gens s'intéressent moins à des politiques internes; il y a plus d'intérêt pour les questions internationales à cause de la mondialisation. C'est un fait que chez vous et chez nous, c'est la même chose.

    Par contre, il y a des endroits où le déficit démocratique n'existe pas. Il y a eu des élections partielles au Québec dernièrement, car des sièges s'étaient libérés. Pour une circonscription, le taux de participation a été de 22 p. 100, et pour l'autre, il a été de 29 p. 100. C'était un vote au fédéral.

    Par contre, lorsqu'on vote dans ce qu'on appelle ici une province mais que nous, au Québec, appelons notre nation, on a des taux assez exceptionnels, qui vont au-delà de 75 p. 100 et même 80 p. 100 lors d'élections provinciales générales. Au dernier référendum, en 1995, les gens ont voté à plus de 97 p. 100. Plus les gens se sentent loin de leurs députés, moins ils participent. Voilà la raison du déficit démocratique. Lorsqu'ils se sentent près d'eux, ils participent, et il faut le constater. Dans un pays comme le Canada, dans une fédération, les gens se trouvent très loin de leurs petites choses quotidiennes.

    À l'unanimité, au Québec, tous les partis politiques parlent d'un déséquilibre fiscal; tous les partis de l'opposition au fédéral, ici au Parlement, parlent d'un déséquilibre fiscal. Autrement dit, le fédéral a trop d'argent par rapport aux dépenses faites pour les juridictions. Il devrait remettre cela en points d'impôt aux provinces. Le gouvernement au pouvoir dit qu'il n'a pas d'argent. Donc, tout le monde dit qu'il y a un déséquilibre fiscal, sauf le gouvernement en place qui est très loin, tout en haut. Les gens se sentent donc très loin des préoccupations. Tout le monde trouve qu'il y a un déséquilibre fiscal, sauf le gouvernement central.

    Plus on est près des gens, plus ceux-ci vont voter.

Á  -(1110)  

[Traduction]

+-

    Le président: Robert, je vous remercie.

    Je vais essayer très rapidement de passer en revue avec vous les trois questions.

    Une des explications, si l'on prend du recul et qu'on observe l'évolution depuis un siècle, c'est qu'il y a eu un transfert de pouvoir de la Chambre des communes vers le pouvoir exécutif. Cela ne s'est pas fait durant les quatre ou cinq dernières années. Beaucoup d'autres forces très complexes sont en jeu, par exemple les communications, le rôle de la télévision, la centralisation autour de personnes plutôt que de groupes. Il y a toute une série d'autres facteurs en jeu.

    La question... je le sais, parce que j'ai débattu de votre décision de voter en direct avec des membres de votre bureau convaincus que, si le vote est facilité, plus de gens iront aux urnes. Bien que cela puisse sembler très logique, la plupart des faits laissent croire que ce n'est pas assez. La mesure a son importance et elle mérite d'être approfondie, mais la baisse de la participation électorale n'est-elle pas simplement due au fait que l'électeur se dit: «Je suis occupé et je ne vois pas pourquoi je voterais parce que c'est sans conséquence et que je ne crois pas que mon député soit au courant de ma réalité et qu'il fera ce que j'aimerais le voir faire de toute façon»? Les députés sont déconnectés du reste de la collectivité.

    Donc, nous avons en partie tenté de changer structurellement... parce qu'en fin de compte, tout est une question de pouvoir. Nous en parlons en termes administratifs, mais il s'agit de la façon dont nous gérons le pouvoir dans la société. Nous essayons donc d'en décentraliser une partie.

    En fait, la Chambre détient un énorme pouvoir, mais elle ne l'exerce pas. Elle ne le fait pas, en partie, en raison de l'inexpérience des députés. Je crois qu'on peut le constater actuellement, durant le troisième mandat. C'est la première fois depuis 1973 qu'un budget a été réduit, et c'est notre comité qui l'a fait, imité par après par celui des transports.

    C'est donc la première fois littéralement que cela se produit en trente ans. La décision est attribuable en partie au fait que les députés gagnent en expérience. Au sein de ce comité-ci, nous avons vécu l'expérience inhabituelle, durant l'examen du projet de loi sur l'emploi, d'un porte-parole de l'opposition qui exhortait le gouvernement à adopter la mesure et de membres du parti ministériel qui essayaient d'en retarder l'adoption, en raison d'une dynamique qui s'est installée ici, une chose très saine selon moi.

    Nous essayons donc de séparer certains de ces pouvoirs. Comment les députés deviennent-ils membres de comités? Actuellement, c'est comme une sorte de cadeau que leur font les whips. Désormais, ce sera le caucus qui décidera. Comment élit-on les présidents? Auparavant, comme l'a dit Roy, c'est le premier ministre qui décidait. Désormais, ils seront librement élus par les députés. En fait, des présidents de comité ont été élus en dépit des objections du gouvernement, en grande partie par des membres de l'opposition. En réalité, on débat activement de la question de savoir s'il n'y aurait pas moyen d'exiger une double majorité, c'est-à-dire que le président de comité soit choisi par une majorité des membres de l'opposition et par une majorité des membres du parti ministériel.

    Roy a mentionné la question de la première lecture des projets de loi, de faire participer les comités à l'étude des projets de loi avant que la Chambre ne se soit prononcée à leur sujet.

    M. Liddell-Grainger a posé une question au sujet de l'approbation. Nous sommes saisis de toutes ces nominations. Elles nous sont effectivement renvoyées. Combien de candidats ont été convoqués? Notre comité ne l'a jamais fait. En fait, je n'ai jamais fait partie d'un comité qui a convoqué un candidat. Ils passent tous devant le comité et nous en sommes avisés, mais cela se fait après le fait, de sorte qu'on se demande bien pour quelle raison il faut le faire.

    Pour ma part, un des gros morceaux du casse-tête, l'outil le plus précieux de cet endroit, est le temps des députés. Nous n'en avons pas. On travaille constamment au pas de course. On affirme que les prévisions budgétaires sont importantes, mais simultanément, on nous écrase sous une pile de projets de loi. Vous êtes donc aux prises simultanément avec un renvoi de budget et un renvoi de projets de loi. Le budget est mis à l'écart.

    Une voix: Reg, il faut faire vite, le timbre sonne.

    Le président: D'accord.

    Je suis désolé, mais s'il existe un groupe qui comprend la nature du timbre, c'est bien le vôtre.

+-

    M. Tony Wright: Nous comprenons effectivement. Ne vous inquiétez pas.

    Je vous remercie vivement du temps que vous nous avez consacré. Ce fut extrêmement utile.

-

    Le président: C'est nous qui vous remercions.

    La séance est levée.