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FINA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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37e LÉGISLATURE, 2e SESSION

Comité permanent des finances


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le lundi 3 novembre 2003




À 1035
V         La présidente (Mme Sue Barnes (London-Ouest, Lib.))
V         L'hon. John Manley (vice-premier ministre et ministre des Finances)

À 1040

À 1045

À 1050

À 1055

Á 1100

Á 1105

Á 1110

Á 1115

Á 1120
V         La présidente
V         M. Monte Solberg (Medicine Hat, Alliance canadienne)
V         M. John Manley

Á 1125
V         M. Monte Solberg
V         M. John Manley
V         M. Monte Solberg
V         M. John Manley

Á 1130
V         M. John Manley
V         M. John Manley
V         M. Monte Solberg
V         M. John Manley
V         M. Monte Solberg
V         M. John Manley
V         M. Monte Solberg
V         M. John Manley
V         M. Monte Solberg
V         M. John Manley
V         La présidente
V         M. Pierre Paquette (Joliette, BQ)

Á 1135
V         M. John Manley

Á 1140
V         M. Pierre Paquette
V         M. John Manley
V         M. Pierre Paquette
V         M. John Manley
V         M. Pierre Paquette

Á 1145
V         M. John Manley
V         M. Pierre Paquette
V         La présidente
V         M. Pierre Paquette
V         M. John Manley
V         La présidente
V         M. Shawn Murphy (Hillsborough, Lib.)
V         M. John Manley
V         M. Shawn Murphy

Á 1150
V         M. John Manley
V         M. Shawn Murphy
V         M. John Manley
V         M. Shawn Murphy
V         M. John Manley
V         La présidente
V         M. Nick Discepola (Vaudreuil—Soulanges, Lib.)

Á 1155
V         M. John Manley
V         M. Nick Discepola
V         M. John Manley

 1200
V         M. Nick Discepola
V         M. John Manley
V         La présidente
V         M. Scott Brison (Kings—Hants, PC)
V         M. John Manley

 1205
V         M. Scott Brison
V         M. John Manley
V         M. Scott Brison
V         M. John Manley
V         M. Scott Brison

 1210
V         M. John Manley
V         M. Scott Brison
V         M. John Manley
V         M. Scott Brison
V         M. John Manley
V         M. Scott Brison
V         M. John Manley
V         M. Scott Brison
V         M. John Manley
V         La présidente

 1215
V         M. Gary Pillitteri (Niagara Falls, Lib.)
V         La présidente
V         M. John Manley

 1220
V         La présidente
V         M. Tony Valeri (Stoney Creek, Lib.)
V         La présidente
V         M. John Manley

 1225
V         La présidente
V         Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD)
V         M. John Manley

 1230
V         Mme Judy Wasylycia-Leis
V         M. John Manley
V         Mme Judy Wasylycia-Leis
V         M. John Manley
V         Mme Judy Wasylycia-Leis

 1235
V         La présidente
V         M. John Manley
V         Mme Judy Wasylycia-Leis
V         M. John Manley
V         La présidente
V         L'hon. Maria Minna (Beaches—East York, Lib.)

 1240
V         M. John Manley
V         La présidente
V         M. Bryon Wilfert (Oak Ridges, Lib.)

 1245
V         M. John Manley
V         M. Bryon Wilfert
V         M. John Manley
V         M. Bryon Wilfert
V         M. John Manley
V         M. Bryon Wilfert
V         M. John Manley

 1250
V         La présidente










CANADA

Comité permanent des finances


NUMÉRO 096 
l
2e SESSION 
l
37e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 3 novembre 2003

[Enregistrement électronique]

À  +(1035)  

[Traduction]

+

    La présidente (Mme Sue Barnes (London-Ouest, Lib.)): Bonjour. Bienvenue à tous.

    Conformément à l'article 83.1 du Règlement, nous passons à la mise à jour économique et financière du ministre des Finances.

    Nous accueillons aujourd'hui l'honorable John Manley, vice-premier ministre et ministre des Finances.

    Monsieur le ministre, si vous êtes prêt, vous avez la parole.

+-

    L'hon. John Manley (vice-premier ministre et ministre des Finances): Merci, madame la présidente.

    J'ai un petit discours que j'aimerais vous lire avant de passer aux questions. Je remercie les membres du comité de m'avoir invité aujourd'hui à présenter une mise à jour de la situation économique et financière du Canada.

    J'aimerais tout d'abord dire que ma présentation ici devant le comité aujourd'hui revêt une importance particulière pour moi et pour le gouvernement, car demain marque le dixième anniversaire de notre gouvernement. Il y a 10  ans, les Canadiennes et les Canadiens investissaient en nous leurs espoirs et leurs aspirations pour une vie meilleure, pour eux-mêmes, pour leurs collectivités et pour le Canada.

    Je n'ai probablement pas besoin de vous rappeler la situation économique qui prévalait lorsque nous sommes arrivés au pouvoir. Il y a 10 ans, le Canada était en pleine crise financière. Nous étions aux prises avec un déficit annuel de 38 milliards de dollars et une dette écrasante. Notre dette fédérale représentait les deux tiers de la production totale de notre économie et dévorait plus de 0,35 $ sur chaque dollar de revenus fiscaux, uniquement pour payer l'intérêt sur cette dette. Le Wall Street Journal avait qualifié le Canada de membre honoraire du tiers monde et on commençait vraiment à craindre que le Fonds monétaire international soit obligé d'intervenir pour stabiliser notre situation financière.

    C'était effectivement une autre époque. Dix ans plus tard, grâce aux efforts et aux sacrifices consentis par les Canadiens, et grâce à un engagement ferme à l'égard d'une saine gestion financière, nous avons complètement renversé la situation. Nous avons mis fin à 27 années de déficit et nous avons considérablement réduit la dette du Canada.

[Français]

    Madame la présidente, le gouvernement fédéral a réussi à maintenir le taux annuel d'inflation à l'intérieur de la fourchette cible de 1 à 3 p. 100. Nous avons activement cherché à établir des échanges commerciaux plus libres et plus équitables. Nous avons investi de façon réfléchie dans l'innovation et le développement des compétences, dans des secteurs clés comme la santé, la réduction de la pauvreté, la défense et la sécurité. Nous avons renouvelé notre engagement visant à améliorer la reddition de comptes et la transparence dans la gestion des ressources publiques. Nous avons réduit les impôts de 100 milliards de dollars, la plus grande réduction d'impôt sur le revenu des particuliers et des sociétés de toute l'histoire canadienne.

    Notre exercice continu d'examen et de réaffectation représente le début d'un changement de culture dans la fonction publique. Nous éliminerons les programmes qui ne fonctionnent pas. Nous ajusterons les programmes aux nouvelles réalités. Nous alignerons nos programmes avec les priorités changeantes des Canadiens. Nous ferons preuve de prudence dans nos dépenses.

    De nombreuses raisons expliquent l'excédent plus élevé que prévu l'an dernier. L'une de ces raisons est que nos dépenses de programmes étaient inférieures à celles contenues dans le budget. C'est un bon signe et un pas vers l'avenir. La prudence, la rigueur et l'alignement des dépenses avec les priorités font tous partie de l'engagement du gouvernement.

[Traduction]

    Madame la présidente, les résultats, à mon avis, sont clairs. Aujourd'hui, le Canada est l'un des chefs de file économiques et financiers du G-7. Depuis six ans, nous devançons les États-Unis et les autres poids lourds économiques mondiaux en termes de moyenne de croissance. Nous sommes au deuxième rang parmi les pays du G-7 pour notre ratio de la dette au produit intérieur brut, un redressement remarquable puisqu'il y a 10 ans, nous étions à l'avant-dernier rang. Nous sommes déterminés à maintenir ce ratio sur une trajectoire descendante permanente.

    Nous avons dû certes faire des choix difficiles et les Canadiens nous ont appuyés dans notre détermination. En 10 ans seulement, les Canadiens sont arrivés à créer une économie vigoureuse qui favorise l'esprit d'entreprise et qui peut faire face à l'adversité, au pays comme à l'étranger, ce qui m'amène à l'autre raison qui sous-tend l'importance particulière de ma présentation aujourd'hui.

    Je vous présente cette mise à jour économique à la suite d'une série de défis imprévisibles qui ont affecté la vie des Canadiens et notre économie. Je crois que nous en connaissons tous la liste : les incendies et maintenant les inondations en Colombie-Britannique, la maladie de la vache folle, le SRAS, la panne de courant au mois d'août en Ontario et l'ouragan Juan sur la côte Atlantique. Ces défis ont tous eu un impact sur nos collectivités, nos familles et notre vie de tous les jours.

    Comme gouvernement, nous avons pris la décision d'être là pour les Canadiens qui se retrouveraient en péril, que ce soit en raison du SRAS, des désastres naturels ou de la panne de courant. Je suis fier de cette décision. Mais ajoutons la faiblesse de la croissance économique mondiale et l'appréciation rapide du dollar canadien, et je crois qu'il est juste de dire qu'à tous égards, 2003 a été une année difficile pour l'économie canadienne.

    Malgré tout, les Canadiens ont continué de faire preuve d'optimisme quant aux perspectives économiques et de confiance quant à notre avenir et à l'avenir du Canada.

    Et le monde en prend bonne note. Le magazine The Economist a récemment décrit notre pays comme étant plutôt « cool », ajoutant que notre saine gestion financière, combinée à une certaine audace dans nos politiques sociales, donne de plus en plus d'assurance à notre pays. Et je suis d'accord avec cette évaluation.

    Grâce à la détermination des Canadiennes et des Canadiens, de même qu'aux mesures économiques et financières prises au cours des 10 dernières années, notre pays a pu résister à des chocs imprévisibles. Nous sommes maintenant en mesure de profiter d'une reprise économique mondiale qui, de l'avis de nombreux économistes, est déjà en cours.

À  +-(1040)  

[Français]

    Madame la présidente, la force relative de notre situation économique découle en partie des récents efforts du gouvernement visant à renforcer le cadre économique et financier du Canada. Comme je l'ai souvent dit, une saine gestion financière exige une réévaluation constante des programmes gouvernementaux par rapport aux besoins et aux priorités des Canadiens. Il faut trouver les moyens les plus économiques d'offrir des services de haute qualité et faire preuve de transparence à l'égard des Canadiens quant à la façon dont leur argent est géré et ultimement dépensé.

[Traduction]

    Tel que nous l'avons indiqué dans le budget de février, nous avons pris des mesures considérables pour satisfaire aux exigences d'une saine gestion financière et rehausser la confiance du public. Comme je l'ai mentionné plus tôt, nous avons d'abord entamé le processus visant à faire de la réaffectation des ressources publiques une partie intégrante du fonctionnement du gouvernement fédéral. À cette fin, le Conseil du Trésor mène actuellement un examen systématique et continu de toutes les dépenses discrétionnaires de programme. Le mois dernier, la présidente du Conseil du Trésor annonçait que l'exercice de réaffectation avait permis de réaliser des économies de 1 milliard de dollars. Et ce n'est qu'un début. Les Canadiens peuvent s'attendre à voir de plus grandes économies encore dans les années à venir, à mesure que le gouvernement fédéral réussira à réaffecter les ressources à des priorités plus élevées.

    Il ne s'agit pas d'un exercice unique. Nous continuerons de nous améliorer et de renforcer notre engagement à l'égard d'une saine gestion financière, en faisant de la réaffectation une caractéristique permanente de la façon dont nous gérons les affaires financières des Canadiens.

    Nous avons ensuite pris d'importantes mesures pour respecter notre engagement à mettre au point un nouveau mécanisme d'établissement du taux des cotisations d'assurance-emploi. Les consultations à cet égard ont pris fin cet été, et nous prévoyons déposer l'an prochain un projet de loi visant à instaurer un mécanisme permanent d'établissement du taux à compter de 2005.

    Enfin, nous poursuivons nos efforts pour appuyer la réforme du système canadien de réglementation des valeurs mobilières afin que celui-ci favorise la compétitivité, l'innovation et la croissance. En mars dernier, nous avons mis sur pied un groupe indépendant d'experts des plus respectés pour examiner cette question, et nous devrions recevoir leur rapport d'ici la fin du mois. Ce rapport proposera des recommandations que tous les gouvernements et intervenants seront priés d'envisager pour s'assurer que le rôle du Canada dans les marchés de capitaux mondiaux demeure solide.

[Français]

    Madame la présidente, dans d'autres secteurs d'activités gouvernementales, nous poursuivons nos discussions avec les provinces et les territoires en vue de renouveler le programme de péréquation et le financement des territoires. Comme vous le savez, ces deux programmes sont essentiels au bien-être de millions de Canadiens. De concert avec les provinces, nous voulons rehausser la stabilité, la prévisibilité et l'intégrité du programme de péréquation.

    Nous avons accompli de réels progrès sur des questions clés. Le gouvernement s'efforcera de terminer le processus de renouvellement d'ici la fin de mars 2004. En outre, en juin dernier, le gouvernement a répondu au rapport de votre comité sur les fusions bancaires. Dans cette réponse, il s'est appuyé sur le travail important effectué par votre comité et par le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce pour préciser les considérations liées à l'intérêt public aux fins de l'examen des projets de fusions bancaires.

    Nous avons aussi examiné d'autres questions importantes ayant une incidence sur la structure de l'industrie des services financiers. Nous recevons présentement le point de vue du public sur ces questions, et le gouvernement s'est engagé à énoncer une nouvelle politique en juin 2004.

À  +-(1045)  

[Traduction]

    Tous ces dossiers sont d'importantes questions de politique publique. Comme toujours, ils nous obligeront à faire des choix difficiles. Mais, comme en témoignent les événements survenus depuis un an, nous devons être prêts à faire ces choix pour préserver notre forte situation financière, continuer de rehausser la confiance et affronter une économie mondiale de plus en plus concurrentielle.

    Passons maintenant à la situation économique mondiale. À cet égard, l'année 2003 a été généralement décevante. La croissance économique mondiale reste inégale, la progression de la demande intérieure dans les pays industrialisés à l'extérieur de l'Amérique du Nord étant généralement assez faible.

    La zone euro, qui se compose des douze pays utilisant l'euro pour monnaie, a connu une autre année morose. L'économie allemande, la locomotive de l'Europe, a peu progressé en 2002 et devrait afficher une croissance nulle cette année. En outre, la plupart des pays européens sont aux prises avec d'importants déficits budgétaires. Et l'on prévoit que durant la prochaine période, la faiblesse marquée et de longue date de la demande intérieure dans la zone euro persistera.

    Le Japon a connu six trimestres de croissance de suite, grâce à la vigueur de ses exportations. Par contre, la demande intérieure reste faible et les dépenses de consommation sont, à toutes fins pratiques, restreintes.

    Mais, comme toujours, ce sont les États-Unis qui dominent notre horizon économique. Les données des deux derniers trimestres indiquent qu'une véritable reprise économique s'amorce dans ce pays. La croissance économique s'est accélérée au deuxième trimestre pour atteindre 3,3 p. 100, dépassant ainsi les prévisions. Au troisième trimestre, elle s'est accrue davantage pour s'établir au niveau très impressionnant de 7,2 p. 100.

    Les dépenses de consommation et les investissements des entreprises ont profité d'une vigueur généralisée sous l'impulsion de mesures de stimulation financière, de taux d'intérêt qui demeurent bas et d'un dollar américain plus faible. Les dépenses de consommation ont été particulièrement vigoureuses au chapitre des articles à prix élevé comme les automobiles et le logement. Avec la hausse des bénéfices en 2003, les investissements des entreprises semblent augmenter, surtout dans les secteurs des logiciels et du matériel.

[Français]

    Madame la présidente, l'ampleur et la persistance des déficits de la balance commerciale des États-Unis se sont traduites par l'appréciation, cette année, d'une large gamme de devises par rapport au dollar américain. Cette appréciation a représenté des gains de 11 p. 100 pour l'euro, de 9 p. 100 pour le yen et de 25 p. 100 pour le dollar australien. Un programme énergique de stimulation financière contribue à l'accélération de la croissance aux États-Unis. Au même moment, le déficit combiné de l'administration fédérale et des États américains devrait grimper à plus de 6 p. 100 du PIB cette année, ce qui pourrait avoir des répercussions sur la confiance des marchés.

    Voyons maintenant la situation du Canada. Comme je l'indiquais plus tôt dans ma présentation, l'évolution récente de l'économie canadienne a été dominée par une série de défis imprévisibles. Il n'est pas facile d'évaluer les répercussions économiques de ces défis. Un large éventail de statistiques économiques témoignent de l'incidence du SRAS et de la maladie de la vache folle. Par exemple, le nombre de visiteurs au Canada, au deuxième trimestre, a chuté de 15 p. 100 par rapport au premier trimestre.

À  +-(1050)  

[Traduction]

    L'interdiction imposée sur nos exportations de boeuf par suite de la découverte d'un cas unique de la maladie de la vache folle a fait chuter de 10 p. 100 la production des abattoirs et des industries de transformation de la viande entre avril et juin. La panne de courant en Ontario et ses effets persistants expliquent en bonne partie la baisse de 4,5 p. 100 des livraisons du secteur manufacturier et le net recul des exportations réelles et du PIB en août. Et nous devons continuer d'évaluer les répercussions de l'ouragan Juan qui a dévasté des collectivités dans les Maritimes, ainsi que celles des incendies et des inondations qui ont frappé l'ouest du Canada.

    De plus, la baisse subite du dollar américain s'est traduite par une forte appréciation de notre propre monnaie. Depuis le début de 2003, la valeur du dollar canadien a augmenté de plus de 20 p. 100 par rapport au dollar américain. Cette appréciation de notre dollar aura une incidence sur les entreprises canadiennes à mesure qu'elles s'adapteront à l'effet à court terme sur les bénéfices des exportateurs et à la baisse de la demande extérieure pour nos biens et services dont le prix augmente.

    Résultat de tous ces chocs, l'économie canadienne a stagné au deuxième trimestre. Pour le troisième trimestre, qui comprenait notamment en août la panne de courant en Ontario, les économistes du secteur privé anticipent une croissance réelle d'environ 2 p. 100.

    Les chiffres sur la création d'emplois témoignent de ces défis. Après une très forte croissance des emplois l'an dernier, soit plus de 500 000, celle-ci a progressé de 98 000 au cours des neuf premiers mois de cette année et le taux de chômage a légèrement augmenté pour s'établir à 8 p. 100. Parallèlement, l'inflation au Canada a diminué plus rapidement que la plupart des analystes ne l'avaient prévu plus tôt cette année. L'inflation selon l'indice des prix à la consommation a été de 2,2 p. 100 en septembre. L'inflation sous-jacente, qui exclut les éléments de l'indice les plus volatils, a reculé à 1,7 p. 100 comparativement à plus de 3 p. 100 au début de l'année. Une croissance économique plus faible et la baisse rapide du taux d'inflation ont incité la Banque du Canada à réduire son taux d'intérêt cible de 50 points de base depuis juillet. Cette baisse de taux aidera à soutenir la croissance future.

    Les consommateurs et les entreprises restent très confiants dans la santé de l'économie canadienne. Par exemple, d'après le plus récent sondage de la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, la confiance de ses membres a repris la majeure partie du terrain perdu plus tôt cette année, et ceux-ci sont maintenant plus optimistes au sujet des perspectives pour les douze prochains mois.

    Après avoir examiné notre situation, j'aimerais maintenant traiter de la direction que nous prenons et de notre évaluation des perspectives des économies mondiale et canadienne. Examinons d'abord les perspectives mondiales. Le FMI prévoit que l'économie des pays industrialisés progressera de l,8 p. 100 cette année et de presque 3 p. 100 en 2004. Les prévisions pour l'an prochain sont très encourageantes comparativement à la stagnation que connaît l'économie mondiale depuis quelques années.

À  +-(1055)  

[Français]

    Par contre, madame la présidente, les perspectives à court terme de la zone euro restent relativement sombres. La croissance devrait atteindre 0,5 p. 100 en 2003 et grimper à 1,9 p. 100 en 2004. Au Japon, après une modeste expansion de 2 p. 100 en 2003, la croissance devrait reculer à 1,4 p. 100 l'an prochain, alors que ce pays devra faire face à une déflation soutenue et à une faiblesse persistante des résultats des entreprises et des bilans financiers.

[Traduction]

    Aux États-Unis, la reprise semble reposer sur des bases plus solides. Les mesures de stimulation financière et les taux d'intérêt peu élevés continuent de soutenir les dépenses de consommation. Si on ajoute à cela les bénéfices des sociétés, ces dernières disposeront de la confiance et des moyens nécessaires pour investir et créer des emplois. La dépréciation du dollar américain aidera à alimenter la reprise en rehaussant l'attrait des exportations américaines.

    Les économistes du secteur privé ont revu à la hausse leurs prévisions de la croissance américaine, qui s'établissent maintenant à 2,7 p. 100 pour 2003 et à 3,9 p. 100 pour 2004. La vigueur de l'économie américaine est évidemment une bonne nouvelle pour l'économie mondiale, et plus particulièrement pour le Canada.

    Passons maintenant aux perspectives de l'économie canadienne. Sur une base régulière, le ministère des Finances mène une enquête auprès d'un groupe d'économistes du secteur privé pour connaître leurs points de vue au sujet de l'économie canadienne. Lors du plus récent exercice de ce genre, tenu en septembre, les économistes ont fait passer à 1,9 p. 100 leurs prévisions de croissance du PIB pour 2003, comparativement à la progression de 2,2 p. 100 prévue en juin et à l'expansion de 3,2 p. 100 que ces économistes anticipaient à l'époque du budget de février 2003.

    Cependant, les économistes du secteur privé sont d'avis que divers facteurs devraient favoriser une expansion accrue de l'économie au cours des derniers mois de 2003 et l'an prochain. Ces facteurs comprennent la croissance soutenue aux États-Unis, les récentes baisses des taux d'intérêt opérées par la Banque du Canada et le retour à des niveaux de production plus usuels.

    Les taux d'intérêt peu élevés devraient stimuler les dépenses de consommation et les investissements des entreprises. Abondant dans le même sens, l'indice de la confiance des entreprises du Conference Board du Canada a nettement rebondi au troisième trimestre en raison d'une forte hausse de la proportion d'entreprises qui prévoient que les conditions économiques vont s'améliorer au cours des six prochains mois et qu'il est temps d'investir.

[Français]

    Madame la présidente, les économistes du secteur privé prévoient maintenant que le Canada profitera d'une croissance réelle de 3 p. 100 en 2004, soit une baisse par rapport aux prévisions de 3,5 p. 100 contenues dans le budget de février. Ils s'attendent à ce que les ajustements commerciaux et autres découlant de l'appréciation rapide du dollar canadien se poursuivent l'an prochain. C'est la raison principale pour laquelle ils ont abaissé leurs prévisions de croissance au Canada, tout en révisant à la hausse les estimations de croissance aux États-Unis.

    Il est à noter également que les économistes du secteur privé que nous avons interrogés prévoient que la croissance économique canadienne se situera en moyenne à environ 3 p. 100 pour les quatre années ultérieures à 2004. Ces prévisions ont été peu modifiées par rapport à ce qui avait été prévu dans le budget de février.

Á  +-(1100)  

[Traduction]

    Je suis heureux de dire que ces prévisions témoignent d'une amélioration de la situation économique du Canada et de l'économie mondiale, mais nous devons rester prudents. Il y a un certain nombre d'éléments d'incertitude qui pourraient remettre ces prévisions en question au cours des prochains mois.

    D'abord, la durabilité de la reprise aux États-Unis dépend à court terme de la relance de l'emploi. À défaut, les dépenses de consommation pourraient diminuer et les investissements risquent de s'essouffler alors que les entreprises perdront confiance dans la durabilité de la reprise. Il faudra aussi corriger le déséquilibre budgétaire croissant aux États-Unis, sinon l'augmentation rapide de la dette pourrait entraîner une pression à la hausse sur les taux d'intérêt à l'échelle mondiale.

    Ensuite, les économistes du secteur privé sont d'avis que l'incidence de l'appréciation de notre dollar sur l'économie est un risque important pouvant assombrir les perspectives canadiennes. Ils m'ont indiqué qu'en raison de l'ampleur et de la vitesse de l'appréciation, cette incidence pourrait être plus importante qu'ils ne l'avaient prévu.

    Cela dit, les fondements de l'économie canadienne demeurent solides et notre économie demeure bien placée pour afficher une croissance soutenue à moyen terme malgré un contexte international incertain.

    Passons maintenant à la situation et aux perspectives financières du Canada. J'aimerais d'abord traiter des résultats financiers de 2002 et de 2003 et les replacer dans le contexte de la situation internationale. Le 22 octobre, le gouvernement a présenté ses résultats financiers vérifiés pour l'exercice 2002-2003. Il s'agit de nos premiers résultats présentés selon la méthode de la comptabilité d'exercice intégrale, une réalisation de taille qui fait du Canada un chef de file mondial dans la présentation de rapports financiers. La vérificatrice générale du Canada a fortement appuyé ce changement puisqu'il trace un portrait plus complet de la situation financière du gouvernement.

    Selon la méthode de la comptabilité d'exercice intégrale, l'excédent pour l'exercice 2002-2003 a été de 7 milliards de dollars. Il s'agit du sixième excédent fédéral de suite, du jamais vu depuis 50 ans. Grâce à ces excédents, la dette fédérale a été réduite de 52,3 milliards de dollars en six ans. Comprenons bien ce que cela signifie. Chaque année, nous économisons en paiements d'intérêt 3 milliards de dollars que nous pouvons consacrer à d'autres priorités pour les Canadiens. Ainsi, pour la première fois en 19 ans, le gouvernement fédéral a dépensé davantage en transferts directs aux Canadiens que ce qu'il a payé en intérêt sur la dette publique.

[Français]

    De plus, madame la présidente, le ratio de la dette fédérale au PIB a diminué de presque 25 points de pourcentage, passant d'un sommet de 68,4 p. 100 en 1995-1996 à son niveau actuel de 44,2 p. 100.

    Si l'on considère l'ensemble des administrations publiques, le Canada a été le seul pays du G-7 à dégager un excédent en 2002. Le FMI et l'Organisation de coopération et de développement économiques estiment que le Canada devrait être le seul pays industrialisé à y parvenir encore cette année et l'année suivante.

    Le Canada vient maintenant au deuxième rang parmi les pays du G-7 pour sa faible dette publique totale comme part de l'économie. Seul le Royaume-Uni nous devance. Il s'agit d'une performance remarquable, sachant que le Canada venait au deuxième rang parmi les pays du G-7 pour l'ampleur de sa dette publique au milieu des années 90.

[Traduction]

    Il importe de noter la raison pour laquelle les résultats financiers ont été meilleurs que prévu l'an dernier. Les revenus budgétaires, provenant principalement de l'impôt sur le revenu des particuliers, ont été moins élevés, ce qui reflète l'économie plus faible que prévu dans les premiers mois de l'année. Toutefois, cette baisse a été largement compensée par des dépenses de programme moins élevées que prévu, principalement attribuable à des facteurs ponctuels.

    Toutefois, la faiblesse des revenus provenant de l'impôt sur le revenu des particuliers à laquelle nous avons assisté vers la fin de l'exercice 2002-2003 se poursuivra au cours de l'exercice actuel. D'ailleurs, les résultats financiers de l'exercice en cours le confirment. Les données pour la période d'avril à août de l'exercice 2002-2004 font état d'un excédent cumulatif de 1,3 milliard de dollars, ce qui est inférieur de plus de la moitié à l'excédent de 2,8 milliards enregistré au cours de la même période l'an dernier.

    Selon ces résultats et les prévisions du secteur privé, l'excédent prévu cette année a été réduit à 3,5 milliards de dollars, en baisse par rapport au montant de 4 milliards prévu dans le budget de février.

Á  +-(1105)  

    Vous vous souviendrez que ce montant de 4 milliards de dollars comprenait la réserve pour éventualités de 3 milliards de dollars et la mesure de prudence économique de 1 milliard de dollars. Comme je l'ai indiqué plus tôt, le Canada a connu cette année une série de défis imprévisibles qui ont forcé le gouvernement fédéral à agir.

    Depuis le budget de février, nous avons annoncé de nouvelles dépenses de l'ordre de 1,2 milliard de dollars cette année pour relever ces défis. Celles-ci comprennent des mesures pour venir en aide aux personnes les plus touchées par le SRAS et la maladie de la vache folle, et les dépenses supplémentaires imputables à nos obligations internationales, notamment le soutien du rôle joué par nos troupes en Afghanistan.

    Compte tenu du coût de ces mesures, il nous reste un excédent budgétaire estimé à 2,3 milliards de dollars pour 2003-2004. Cela signifie qu'il reste 2,3 milliards de dollars dans ce qui était une réserve pour éventualités de 3 milliards de dollars pour que nous puissions respecter notre engagement à maintenir l'équilibre budgétaire.

    En février, les premiers ministres fédéral et provinciaux ainsi que les dirigeants des territoires en sont arrivés à un accord historique sur la santé. Dans le cadre de cet accord, le premier ministre a convenu de transférer un montant additionnel pouvant atteindre 2 milliards de dollars dans la mesure où le montant de l'excédent fédéral dépasserait celui de la réserve pour éventualité de 3 milliards de dollars pour le présent exercice. Malgré le caractère conditionnel de cet accord, nous savons maintenant que bon nombre de provinces ont déjà affecté cet argent à des dépenses de soins de santé.

    Comme nous l'avons vu, les projections financières révisées suggèrent qu'il est peu probable que le gouvernement fédéral dégagera un excédent dépassant la réserve pour éventualités de 3 milliards de dollars cette année. Malgré cet état de choses, le premier ministre a écrit aujourd'hui aux premiers ministres provinciaux et aux dirigeants des territoires pour les informer que si le gouvernement fédéral dégage un excédent cette année, nous leur fournirons pour les dépenses en soins de santé la première tranche de tout excédent disponible à la fin de l'exercice, jusqu'à concurrence de 2 milliards de dollars. Il s'agit là d'une décision importante, une décision qui touche une grande priorité pour les Canadiens, tout en favorisant l'esprit de collaboration qui est au coeur de l'accord sur la santé.

[Français]

    Le premier ministre a écrit aujourd'hui aux premiers ministres provinciaux et aux dirigeants des territoires pour leur dire que si le gouvernement fédéral a un excédent cette année, nous leur fournirons, pour les dépenses en soins de santé, la première tranche de tout excédent disponible à la fin de l'exercice, jusqu'à concurrence de 2 milliards de dollars.

    Il s'agit là d'une décision importante qui touche une grande priorité des Canadiens, tout en favorisant l'esprit de collaboration qui est au coeur de l'accord sur la santé.

Á  +-(1110)  

[Traduction]

    Je tiens à réitérer que nous ne serons pas en situation de déficit cette année. Notre engagement à équilibrer le budget du Canada demeure la pierre angulaire de notre planification financière. Il s'agit là d'une modification stratégique ponctuelle touchant la réserve pour éventualités. La réduction de l'endettement général du Canada demeure une importante priorité pour le gouvernement fédéral. Mais les Canadiens s'attendent à ce que nous faisions des choix raisonnables et prudents lorsque nous faisons face à des circonstances imprévues. C'est ce que nous faisons cette année et que nous continuerons de faire à l'avenir. La proportion de la dette par rapport au PIB diminuera cette année. Cette année encore, nous aurons le meilleur rendement financier parmi les pays du G-7.

[Français]

    Madame la présidente, avant de passer aux perspectives financières à moyen terme, j'aimerais rappeler aux membres du comité les bases sur lesquelles les projections se fondent.

    Le ministère des Finances mène une enquête auprès d'économistes du secteur privé chaque trimestre et utilise la moyenne de leurs prévisions économiques comme point de départ de son exercice de planification budgétaire. Aux fins de la mise à jour d'aujourd'hui, quatre firmes de modélisation macroéconomique ont utilisé ces prévisions pour établir des projections budgétaires couvrant les cinq prochaines années.

    Avant d'allouer quoi que ce soit à la prudence, la moyenne des projections du secteur privé pour cette période fait état d'excédents de 3 milliards de dollars en 2004-2005 et en 2005-2006, de 4 milliards de dollars en 2006-2007, de 6 milliards de dollars en 2007-2008 et de 9,5 milliards de dollars en 2008-2009. Ces montants comprennent le coût des mesures annoncées depuis le budget de février.

    Ces chiffres montrent qu'à court terme, le Canada affichera des excédents budgétaires relativement modestes alors que nous faisons face à des perspectives économiques plus faibles que prévu. Ces excédents nous permettront de mettre de côté chaque année la réserve pour éventualités habituelle de 3 milliards de dollars et de mettre de côté une mesure de prudence économique additionnelle pendant la troisième année des prévisions.

    La raison en est fort simple. Bien que les économistes du secteur privé aient substantiellement abaissé leurs prévisions de croissance économique pour cette année et l'an prochain, ils n'ont pas modifié leur point de vue quant aux perspectives de croissance à moyen terme. Cela veut dire que la perte de production et de revenus résultant d'une croissance plus faible cette année et l'an prochain ne devrait pas se traduire prochainement par une croissance plus forte. Ainsi, on s'attend à ce que le revenu national, la plus vaste mesure de l'assiette fiscale du gouvernement, soit plus faible que prévu au moment du budget de février pour la période de prévision de cinq ans.

[Traduction]

    Madame la présidente, je crois que ceci souligne l'importance que nous devons accorder à nos efforts de réaffectation. Ceux-ci seront essentiels si nous voulons continuer de nous occuper des plus hautes priorités des Canadiens et de répondre efficacement aux chocs imprévisibles comme ceux que nous avons subis cette année. Nous devons réinstaurer notre mesure de prudence aussitôt que possible. Et nous devons continuer de réaliser des économies dans la manière dont le gouvernement gère et dépense l'argent des contribuables.

    Malgré cela, il faut comprendre que sans la discipline budgétaire des dernières années, nous serions vraiment aux prises avec un déficit et une dette nationale de nouveau en hausse, un fardeau qui continuerait de peser plus lourdement encore sur les générations futures. Et à long terme, je crois que ceux-ci poseraient la plus grande menace à notre capacité de consacrer des fonds aux programmes que les Canadiens souhaitent et dont ils ont besoin.

    Heureusement, il n'en est rien. En fait, les finances du pays demeurent saines, et il devrait continuer d'en être ainsi. Nous sommes le seul pays du G-7 dans cette situation. Cet avantage canadien est une conséquence directe des progrès que nous avons faits au cours des 10 dernières années pour assainir la situation financière du Canada et la maintenir en bon état.

Á  +-(1115)  

[Français]

    Madame la présidente, il y a 10 ans, les Canadiens ont élu un nouveau gouvernement. Ils nous ont demandé de prendre les mesures nécessaires pour leur assurer, de même qu'à leurs enfants, un avenir meilleur. Nous avons parcouru un long chemin ensemble. Nous pouvons être fiers des progrès accomplis grâce à la détermination, au travail acharné et au dévouement de l'ensemble des Canadiens.

    Mais pour bien comprendre l'ampleur de nos progrès, il faut remonter à la situation dans laquelle nous nous trouvions il y a 10 ans. Comme je l'indiquais plus tôt, il y a 10 ans, notre économie était en crise. Notre gouvernement avait hérité d'une situation économique désastreuse: taux de chômage élevé, faible croissance économique, déficits fédéraux élevés, faible confiance des marchés.

[Traduction]

    Il y a dix ans, il était pratiquement impossible d'imaginer que notre pays réussirait aussi rapidement pareil tour de force. Honnêtement, qui aurait cru que, dix ans plus tard, nous aurions effacé un déficit budgétaire annuel de 38 milliards de dollars, dégagé six excédents budgétaires de suite et réduit notre dette de plus de 50 milliards de dollars?

    Qui aurait cru que nous allions réussir à mettre en place un plan de réduction des impôts de 100 milliards de dollars sur cinq ans, le plus vaste effort de réduction de toute l'histoire du Canada?

    Qui aurait cru que nos taux de l'impôt des sociétés seraient plus faibles aujourd'hui en moyenne que ceux des États-Unis? C'est là un levier important pour attirer au Canada des investissements qui contribuent à créer des emplois et stimulent la croissance économique.

    Qui aurait cru que nous allions pouvoir nous engager à augmenter sensiblement la prestation fiscale canadienne pour enfants en y injectant plus de 5 milliards supplémentaires d'ici 2007 pour aider à réduire le nombre d'enfants vivant dans la pauvreté?

    Qui aurait imaginé que nous allions réussir à placer le Régime de pensions du Canada sur des bases financières solides pour les 50 prochaines années, garantissant ainsi que les travailleurs canadiens d'aujourd'hui et de demain auront les moyens de profiter d'une retraite confortable et empreinte de dignité?

    Qui aurait pensé que nous allions profiter de taux records de création d'emplois et de croissance économique, au point où notre pays compte aujourd'hui 3 millions de gens de plus qui travaillent qu'en 1993?

    Qui aurait prédit qu'au cours des six dernières années, notre PIB par habitant, la mesure qui reflète le mieux le niveau de vie d'un pays, augmenterait de 20 p. 100, plaçant le Canada en tête du G-7 à ce chapitre?

    Qui aurait prédit que nous allions investir 63 milliards de dollars supplémentaires pour renforcer le système de soins de santé en fonction d'accords signés avec les provinces et les territoires?

    Qui aurait osé croire que le Canada effectuerait le plus important investissement de son histoire, 13 milliards de dollars, dans la recherche et l'innovation, faisant de nos universités des chefs de file mondiaux dans la quête du savoir et des idées nouvelles, et du développement des technologies de pointe?

[Français]

    Madame la présidente, les Canadiens ont fait tout cela, et bien plus encore, en 10 ans à peine. Oui, nous leur avons demandé de faire des sacrifices. Évidemment, cela a été pénible pour ceux et celles qui ont ressenti l'impact des compressions alors que nous cherchions à redresser notre situation financière. Lorsque j'étais ministre de l'Industrie, j'ai dû réduire mon budget de 50 p. 100 et mettre à pied des centaines d'excellents fonctionnaires, dont bon nombre vivaient dans ma ville, dans la capitale nationale. Je sais de première main les sacrifices que les gens ont dû faire.

    Mais le résultat est clair. Le Canada d'aujourd'hui est très différent de ce qu'il était et, plus que jamais, il fait bon y vivre, y travailler et y investir. Le Canada d'aujourd'hui se libère rapidement du fardeau du passé et il est prêt à exploiter pleinement les possibilités de demain.

Á  +-(1120)  

[Traduction]

    Évidemment, il reste encore d'importants défis à relever et nous devons combler des besoins pressants. Notre tâche n'est pas terminée. Il reste encore beaucoup à faire si nous voulons bâtir, pour nos enfants et nos petits-enfants, un Canada qui fait davantage preuve d'innovation, d'intelligence, de tolérance et d'ouverture sur le monde. Néanmoins, nous pouvons être certains que nous sommes sur la bonne voie financière. Nous avons déjà parcouru beaucoup de chemin. Et cette voie nous conduira plus loin encore à mesure que nous bâtirons un Canada encore meilleur pour tous les Canadiens.

    Madame la présidente, nous venons de vivre une année remplie d'adversité et de défis qui ont mis la détermination des Canadiennes et des Canadiens, d'un bout à l'autre du pays, à rude épreuve. En dépit des chocs que nous avons subis, l'équilibre budgétaire du Canada demeure intact et notre économie est prête à tirer avantage de la reprise générale de l'économie mondiale au cours des prochains mois. Toutefois, les bilans financiers ne nous permettent pas de saisir complètement à eux seuls ce que le Canada a vécu en 2003. Je crois qu'il faut plutôt se tourner vers l'attitude que les Canadiens ont maintes fois manifestée cette année face aux crises qui sont survenues. Malgré les feux, les inondations, la panne de courant, le SRAS, la maladie de la vache folle, les défis constants affectant l'agriculture, les forêts et les pêches, les Canadiens ont réagi avec compassion et détermination.

[Français]

    Madame la présidente, c'est une attitude née d'une confiance redécouverte et inspirée par un objectif précis et une volonté de réussir. C'est cette même attitude qui nous a permis de relever les énormes défis économiques et financiers de la dernière décennie. Et c'est cette même attitude qui fera du Canada un modèle de prospérité et de sécurité au XXIe siècle.

    Thank you. Merci.

[Traduction]

+-

    La présidente: Merci beaucoup.

    Nous allons faire un tour de table complet, ce qui nous prendra 80 minutes, et nous prolongerons la réunion d'environ 10 minutes. Je vais chronométrer rigoureusement, mais si les partis souhaitent partager leur temps, cela peut se faire dans des périodes de cinq minutes qui comprennent la question et les réponses. Faites-le-moi savoir. J'ai déjà ma liste des députés du parti ministériel qui se partageront leur temps.

    Nous allons commencer par M. Solberg, pour un maximum de 10 minutes.

+-

    M. Monte Solberg (Medicine Hat, Alliance canadienne): Merci beaucoup, madame la présidente.

    Monsieur le ministre, vous avez un problème de crédibilité. L'an dernier, vous avez présenté, un mois avant la fin de l'année, un budget dans lequel vous disiez qu'il y aurait à la fin de l'année un surplus de 3 milliards de dollars. Parallèlement, votre gouvernement s'est lancé dans des dépenses de 5 milliards. Vous avez fait l'achat de jets, les infâmes jets Challenger. Même s'il ne restait plus qu'un mois avant la fin de l'année, vos prévisions quant à la taille du surplus s'écartaient de la réalité de 133 p. 100, soit de 4 milliards de dollars. Le surplus réel s'est élevé à 7 milliards.

    Pourquoi devrions-nous vous croire aujourd'hui? Pourquoi vous croire maintenant quand vos prévisions étaient aussi erronées l'an dernier? N'est-ce pas là un exemple de la comptabilité qui a acculé des sociétés comme Enron à la faillite? Ne trompez-vous pas en fait la population quand vous dites que les surplus seront aussi faibles que vous l'aviez dit l'an dernier alors qu'il se sont révélés en fait bien supérieurs?

+-

    M. John Manley: Tout d'abord, monsieur Solberg, il faut bien comprendre ce que sont les prévisions des surplus ou des déficits. Il s'agit du montant des recettes prévues duquel est soustrait le montant prévu des dépenses.

    Nos recettes s'élèvent à environ 180 milliards de dollars. En gros, le montant des dépenses est le même. Nous devons faire des prévisions sur des sommes d'environ 360 milliards de dollars.

    Oui, le surplus accumulé à la fin de l'année s'est élevé à 4 milliards de plus que prévu, mais 4 milliards sur 360, cela ne représente pas plus de 100 p. 100, comme vous le dites. Il s'agit en fait d'environ 1 p. 100, ce qui se compare très favorablement aux estimations d'autres gouvernements.

    Si j'adoptais l'orientation que vous proposez et que je faisais preuve d'un plus grand optimisme dans les résultats, cela donnerait un résultat assez semblable à ce qui s'est produit, par exemple, dans le gouvernement de vos amis progressistes-conservateurs en Ontario. Et voyez quel en a été le résultat. Se retrouver avec un déficit de 5,6 milliards de dollars quand on avait prévu un budget équilibré, c'est tout un problème de crédibilité.

    Nous essayons d'établir des prévisions prudentes. C'est l'approche que je préconise. Je préfère de loin que le gouvernement enregistre un surplus supérieur aux prévisions plutôt qu'un déficit quand nous avions promis un surplus.

Á  +-(1125)  

+-

    M. Monte Solberg: Monsieur le ministre, je ne suis pas du même avis que vous. L'an dernier, vous vous êtes trompé de 2,6 milliards de dollars dans vos prévisions de dépenses. Cette somme représentait la plus grande partie de la différence dans le surplus. Votre stratégie consiste, semble-t-il, à sous-estimer les prévisions et à surestimer les dépenses. Il en était de même l'année précédente; la différence était de 3,1 milliards de dollars.

    Vous contrôlez directement les dépenses de programme, n'est-ce pas? Vous contrôlez ces dépenses. Vous n'avez pas à faire de prévisions à leur sujet. C'est vous qui prenez les décisions. Cela dit, les dépenses ont augmenté l'an dernier de 6,6 p. 100, même si elles étaient moins élevées que prévu de 2,6 milliards de dollars. Cela ne prouve-t-il pas que vous maquillez les comptes?

+-

    M. John Manley: Madame la présidente, permettez-moi de vous présenter mon sous-ministre, Kevin Lynch, et mon sous-ministre adjoint, Paul-Henri Lapointe, qui sont ici pour me prêter main-forte.

    Non, monsieur Solberg, nous ne contrôlons pas, comme vous le dites, toutes les dépenses de programme. En fait, les chiffres fournis par Statistique Canada au sujet des montants de péréquation et des paiements de transfert ont permis de réduire fortement les dépenses de programme. Ce sont là des montants qui relèvent des dépenses de programme. Ces montants sont calculés en fonction d'une formule. Comme toujours, nous nous fondons sur les meilleures prévisions possible, c'est-à-dire sur les chiffres existants. Ces chiffres sont rajustés lorsque, comme dans ce cas-ci, Statistique Canada publie les données de ses recensements.

    Je ne sais pas très bien comment vous voudriez que nous procédions, mais il vaut mieux à mon avis s'en tenir aux chiffres dont nous disposons plutôt que d'essayer de deviner à l'avance ce que publiera Statistique Canada.

+-

    M. Monte Solberg: Ce que je dis, c'est que vous vous êtes trompé de 3,1 milliard de dollars dans vos prévisions des dépenses de programme il y a deux ans et de 2,6 milliards de dollars l'an dernier. Quelle que soit la méthode de comptabilité, c'est beaucoup d'argent, monsieur le ministre. Votre problème est plus grave que cela.

    Au début de votre déclaration d'aujourd'hui, vous avez parlé d'une réduction d'impôt de 100 milliards de dollars. C'est tout simplement faux. En fait, la réduction d'impôt que vous avez effectuée a consisté à éliminer des augmentations futures d'impôt, ce qui est très trompeur. Vous englobez dans votre réduction d'impôt l'augmentation de la prestation nationale pour enfants, ce qui est bien sûr plus que trompeur. Dans le calcul net de vos réductions d'impôt, vous ne tenez toutefois pas compte de l'augmentation des cotisations au Régime de pensions du Canada. Si l'on tient compte de tout cela, la réduction réelle d'impôt est de moins de la moitié de ce que vous avez promis. Elle s'élève à 47 milliards de dollars.

    Ce que vous faites, à mon avis, c'est trouver des moyens de limiter la taille des surplus de façon à ne pas offrir aux Canadiens un réel allégement fiscal. En fait, nos citoyens sont ceux qui, parmi les pays du G-7, paient l'impôt sur le revenu des particuliers le plus élevé. Je soumets que vous préparez le terrain pour les dépenses extravagantes d'une autre fin d'année préélectorale. Ainsi, M. Martin, qui a déjà engagé 34 milliards de dollars en dépenses, aura la marge de manoeuvre dont il a besoin. N'est-ce pas le cas?

+-

    M. John Manley: Je vois les choses un peu différemment, monsieur Solberg. D'un point de vue idéologique, votre position est plus près de celle de l'ancien gouvernement de l'Ontario, qui a effectué des réductions massives d'impôt. Il en est résulté un déficit, et la population de la province a été très insatisfaite des services publics qu'elle a reçus.

    Votre approche est aux antipodes de ce que vous recommandez. Vous préconisez des réductions d'impôt afin d'appauvrir le gouvernement de sorte qu'on ne puisse plus offrir à la population des services publics et que celle-ci, par insatisfaction, se tourne vers le secteur privé.

    Une voix: Et pourtant vous vous vantez des répercussions des réductions d'impôt.

Á  +-(1130)  

+-

    M. John Manley: Je ne suis pas d'accord avec cette approche. Il nous faut une approche équilibrée.

    Une voix: Vous avez dit que la réduction des taux de l'impôt des sociétés était une bonne chose.

+-

    M. John Manley: Dans une approche équilibrée, il faut réduire les impôts—et peu m'importe comment vous la comptabilisez, mais pour moi, une réduction des recettes est une réduction d'impôt—et il faut faire des dépenses pour renforcer les programmes sociaux qui sont importants pour les Canadiens. C'est pourquoi, dans le dernier budget, la plus grande augmentation des dépenses se situait dans les transferts aux provinces, plus particulièrement au titre des soins de santé, grâce à la signature de l'entente sur la santé.

    Les Canadiens se sont clairement exprimés. Vous avez voyagé avec le comité et vous l'avez entendu également, quand j'ai tenu des consultations prébudgétaires. Ce que les Canadiens réclamaient, c'était une garantie que le régime de soins de santé continuera de répondre à leurs besoins. C'est à ce besoin que nous avons réagi.

+-

    M. Monte Solberg: N'est-il pas vrai que dans votre mise à jour économique, vous avez prétendu que réduire les impôts des grandes sociétés aidait à créer des emplois? Sauf erreur de ma part, n'est-ce pas ce que vous avez dit?

+-

    M. John Manley: J'ai dit qu'au Canada, le taux d'imposition des grandes sociétés était en moyenne plus faible qu'aux États-Unis, ce qui représentait un avantage pour nous.

+-

    M. Monte Solberg: Mais le fardeau fiscal des particuliers reste le plus élevé des pays du G-7.

    Les Canadiens à revenu moyen n'ont connu aucune diminution réelle de leur fardeau fiscal. Ce sont eux qui doivent assumer la plus grande partie du fardeau lorsque vient le temps de frapper. Les Canadiens à faible revenu ont vu leur fardeau fiscal baisser, mais certainement pas les Canadiens à revenu moyen, n'est-ce pas?

+-

    M. John Manley: Non, vous avez tort. En fait, les Canadiens à revenu moyen ont connu une très grande réduction de leurs impôts. De plus, si l'on regard l'ensemble du fardeau fiscal du Canada, on constate que le Canada se classe au troisième rang des pays du G-7. Je ne sais quels chiffres vous utilisez, mais ce ne sont pas les bons.

+-

    M. Monte Solberg: Mais il ne faudrait surtout pas utiliser vos chiffres à vous qui sont trompeurs, savoir une réduction des impôts de 100 milliards de dollars.

    Mais n'est-il pas vrai, en dernière analyse, que vous vous retrouverez avec des excédents de 8 à 10 milliards de dollars, de cet ordre de grandeur-là, dans la mesure où vous ne vous lancerez pas avant la fin de l'année dans des dépenses frénétiques?

+-

    M. John Manley: Ce n'est pas ce que j'ai présenté aujourd'hui comme prévisions. Si la situation devait être meilleure que prévu parce que nos recettes sont plus élevées et parce que la croissance est plus forte que prévu, je serais le premier à m'en réjouir.

+-

    M. Monte Solberg: Le problème c'est qu'au cours des dernières années, le gouvernement ne s'est même pas approché des prévisions de surplus qu'avaient faites les libéraux. Vous devriez le reconnaître.

    En matière de prévisions des excédents de recettes, votre dossier n'est pas très reluisant; d'ailleurs cela n'a rien à voir avec afficher honnêtement des projections, puis changer sa façon de planifier pour se retrouver avec un excédent! Donc, étant donné que vous vous êtes à ce point trompé dans vos prédictions, je vous pose à nouveau ma question du début et je vous demande pourquoi la population devrait vous croire. Pourquoi les Canadiens devraient-ils vous croire aujourd'hui lorsque vous affirmez que votre excédent sera de 3,5 milliards de dollars?

+-

    M. John Manley: Parce que s'ils comparent nos prévisions à celles des autres pays, ils constateront que le gouvernement s'en tire assez bien. Comparez nos prévisions à celles de vos alliés qui formaient l'ancien gouvernement ontarien, et vous constaterez que nous nous en sommes tirés assez bien. Je vous suggère de croire notre gouvernement plutôt qu'eux.

+-

    La présidente: Merci.

[Français]

    C'est maintenant votre tour, monsieur Paquette; vous avez 10 minutes.

+-

    M. Pierre Paquette (Joliette, BQ): Merci, madame la présidente.

    Monsieur Manley, je vous remercie pour cette mise en scène économique. À mon sens, il ne s'agit pas le moindrement d'une mise à jour économique et financière; en fait, vous faites durer le suspense concernant les 2 milliards de dollars qui ont été promis aux provinces. Vous faites cela pour des raisons essentiellement politiques, en l'occurrence pour permettre à M. Martin d'annoncer lui-même ces 2 milliards de dollars avant la prochaine élection, au printemps.

    Dans votre communiqué, vous avez dit que le gouvernement fédéral fournirait, au titre des dépenses de santé, un montant pouvant atteindre 2 milliards de dollars, pris à même l'excédent pour cet exercice, lorsque les chiffres seraient finalisés l'automne prochain.

    Y a-t-il quelqu'un qui pense que M. Martin ira en élection sans avoir déboursé ces 2 milliards de dollars?

    Au plan économique, c'est une fumisterie. C'est tout simplement une opération politique. Vous savez que vous avez l'argent et que vous aurez des surplus, mais au lieu d'annoncer cette somme dès maintenant, vous préférez faire durer le suspense pour permettre à M. Martin, après le congrès d'investiture du Parti libéral, le 15 novembre prochain, et avant la prochaine élection, de l'annoncer lui-même. En outre, pour ce qui est de l'énoncé économique, comme le disait mon collègue de l'Alliance, vous faites la même chose que la dernière fois: de façon tout à fait évidente, vous sous-estimez vos surplus. Au cours des deux dernières années, vous avez récolté 4 milliards de dollars en recettes. On ne parle plus ici de prudence, mais bien d'irréalisme.

    Pour ce qui est des dépenses, je pense qu'elles sont surestimées. Je vais par contre convenir avec vous qu'il y a énormément de dépenses inutiles. Par exemple, au cours des quatre premiers mois de 2003-2004, elles ont augmenté de 3,3 milliards de dollars, soit de 7,9 p. 100. Or, le communiqué du ministère nous révèle que cette augmentation est avant tout attribuable aux dépenses de fonctionnement des ministères. Elle n'a rien à voir avec la crise de la vache folle, le SRAS et les incendies en Colombie-Britannique.

    À mon avis, vous savez très bien, comme vous le saviez probablement l'année dernière et au mois de juin, que le surplus sera plus important. Vos performances des dernières années ainsi que celles de M. Martin sont de nature à inquiéter. Voici quelques chiffres. En 1999-2000, vous aviez prévu un surplus de 3 milliards de dollars, qui, en réalité, s'est chiffré à 12,7 milliards de dollars. On parle ici d'un taux d'erreur de 323 p. 100. En 2000-2001, vous aviez prévu un surplus de 4 milliards de dollars, qui a en fait totalisé 18,1 milliards de dollars, ce qui donne un taux d'erreur de 353 p. 100. En 2001-2002, vous aviez prévu un surplus de 1,5 milliard de dollars; il a été en réalité de 8,9 milliards de dollars, ce qui représente un taux d'erreur de 493 p. 100.

    Je conviendrai avec vous que cette année, votre taux d'erreur est un peu plus bas que celui de votre prédécesseur. Depuis juin, vous prévoyiez un surplus de 3 milliards de dollars, et il est de 7 milliards de dollars. On parle ici d'un taux d'erreur de 133 p. 100.

    Compte tenu que cette mise à jour économique et financière est censée éclairer les citoyens et les milieux d'affaires sur la situation réelle du gouvernement, il y a de quoi s'inquiéter. À titre d'information, je dois faire savoir au secrétaire parlementaire qu'il me doit deux bouteilles de vin. J'avais parié que le surplus serait de 10 milliards de dollars. Or, si on ajoute les 2,5 milliards de dollars que vous avez transférés aux provinces pour honorer l'entente sur la santé, on arrive à un total d'environ 9,5 milliards de dollars. Il me doit donc deux bouteilles de vin: une ontarienne et une québécoise.

    Je vais néanmoins vous poser la question suivante. Monsieur Manley, si vous étiez sérieux et que vous prévoyiez effectivement attendre à l'automne prochain, comment, à votre avis, les provinces seraient-elles en mesure de prévoir ces montants dans leur budget? Est-ce que ce n'est pas faire montre d'irresponsabilité à l'égard des provinces, qui, vous le savez, se dirigent vers un déficit qui totalise environ 10 milliards de dollars? Elles sont toutes en difficulté sauf l'Alberta.

    Je pense que cette opération politique, qui est aussi une mise en scène économique, révèle une attitude irresponsable.

Á  +-(1135)  

+-

    M. John Manley: D'abord, monsieur Paquette, permettez-moi de faire un commentaire sur les prévisions.

    Vous n'avez peut-être pas encore eu l'occasion d'examiner les chiffres pour l'année 2002-2003, mais nos revenus sont inférieurs de 1,2 milliard de dollars à ce que nous avions prévu. Nous n'avons pas sous-estimé les revenus, mais les revenus ont été moindres. Ce sont les dépenses qui ont été plus basses que prévu.

    Pour ce qui est des recettes et des dépenses pour 2002 et de la différence entre les prévisions et la situation actuelle, le Canada a fait une erreur de 1,4 p. 100. Le seul pays qui était au même niveau que le Canada est le Royaume-Uni, où il y a eu un écart de 1,4 p. 100. Quand on compare le Canada et d'autres pays, on constate que l'Italie a fait une erreur de 1,9 p. 100, le Japon, une erreur de 3,8 p. 100, l'Allemagne, une erreur de 2,3 p. 100, la France, une erreur de 3,7 p. 100 et les États-Unis, une erreur de 7,5 p. 100. Nous avons des recettes et des dépenses de 360 milliards de dollars et nous faisons de notre mieux. Je ne peux pas accepter qu'on dise que nous ne faisons pas tout ce qui est nécessaire pour estimer le plus précisément possible la situation future et réserver les fonds nécessaires en cas d'imprévu.

    En ce qui concerne le Fonds pour la santé de la population, j'ai rencontré les ministres des Finances ici, à Ottawa, le 10 octobre. Ils ont été unanimes à dire que le gouvernement fédéral ne devait pas faire de déficit. Ils reconnaissent que cela pourrait affecter la réputation de tous les gouvernements canadiens et ils ne sont pas prêts à accepter un déficit.

    Le premier ministre vient d'envoyer sa lettre et je crois qu'ils seront très contents de l'assurance que nous leur avons donnée, à savoir que le transfert pourra se faire si on évite le déficit.

Á  +-(1140)  

+-

    M. Pierre Paquette: Je persiste à dire que cet argent sera transféré avant la prochaine élection, au cours des prochains mois. On n'attendra certainement pas septembre prochain pour voir si le surplus est au rendez-vous.

    J'ai envoyé une lettre à M. Martin pour lui faire part des prévisions du Bloc québécois, qui sont habituellement nettement supérieures à celles du ministère des Finances. Nous ne nous sommes jamais trompés de plus de 10 p. 100, alors que vous avez fait systématiquement des erreurs allant jusqu'à presque 500 p. 100 depuis que vous êtes au pouvoir.

+-

    M. John Manley: Mais les conséquences d'une erreur d'un côté et d'une erreur de l'autre côté ne sont pas exactement les mêmes. Je trouve que c'est beaucoup plus grave quand on fait une erreur et qu'on crée un déficit comme l'ont fait le gouvernement de l'Ontario et l'ancien gouvernement péquiste au Québec.

+-

    M. Pierre Paquette: C'est en grande partie à cause du gouvernement fédéral que les provinces ont des difficultés, parce que les 7 milliards de dollars que vous avez dégagés--oh, surprise!--, vous les avez appliqués au remboursement de la dette alors qu'ils auraient pu être utilisés à d'autres fins. C'est la vérificatrice générale qui nous l'a dit en novembre 2002.

    Qui, il y a 10 ans, aurait pensé qu'on baisserait les impôts de 100 milliards de dollars au Canada, disiez-vous tout à l'heure. Une chose m'a étonné bien davantage. Qui aurait pensé, quand les libéraux sont arrivés au pouvoir, qu'ils détourneraient 45 milliards de dollars de la caisse de l'assurance-emploi? Les prévisions du secteur privé sont probablement les seules à être à peu près crédibles dans tout ce que j'ai lu. On prévoit encore, pour les prochaines années, un surplus de 2 à 3 milliards de dollars de la caisse d'assurance-emploi. Malgré ce que vous nous dites dans votre énoncé, du côté du secteur privé, on considère que le gouvernement fédéral va encore se servir de la caisse d'assurance-emploi pour engranger des surplus.

    Cette consultation des derniers mois a-t-elle été sérieuse, et quand en aurons-nous les résultats? Vous aviez promis que pour le prochain budget, on connaîtrait exactement la façon dont fonctionne le mécanisme de détermination des taux de cotisation. Il n'y a absolument rien. Vous nous dites dans votre énoncé que de grandes mesures ont été prises. La seule grande mesure qu'on a prise a été de faire une consultation, en grande partie sur le site web. Pour le moment, on n'a aucune indication de la direction dans laquelle le gouvernement fédéral va aller.

    Pour ma part, je suis scandalisé; c'est aussi simple que cela.

+-

    M. John Manley: On a souvent tenu ce débat à la Chambre. En l'an 2000, une réduction d'impôts applicable sur cinq ans a été adoptée. Cela pourrait comprendre une réduction des cotisations de l'assurance-emploi. Il reste que cela représente pour le gouvernement une baisse de revenus de 100 milliards de dollars.

    J'ai déjà établi, dans le budget de février, le taux pour l'an 2004. En outre, une réduction est déjà prévue pour l'an prochain au chapitre des cotisations de l'assurance-emploi, et nous avons promis que d'ici 2005, il y aurait un nouveau système servant à établir les taux. Comme je l'ai dit dans ma présentation, les consultations sont terminées. Je crois que le projet de loi sera adopté en 2004. On pourra donc établir, dès 2005, un processus nous permettant de générer les revenus nécessaires pour payer les prestations d'assurance-emploi.

+-

    M. Pierre Paquette: Lors du dernier budget, vous nous avez dit--et le secrétaire parlementaire l'a répété à plusieurs reprises--que les cotisations arriveraient tout juste à payer les prestations et les frais de la caisse. Or, encore cette année, il y a un surplus qui dépasse les 3 milliards de dollars, et on prévoit pour l'année prochaine un surplus supérieur à 2 milliards de dollars.

    Il est urgent de corriger la situation. Ces impôts que vous prélevez sont régressifs et frappent les plus démunis parmi les salariés; ce sont des gens qui n'ont pas eu la chance de bénéficier, au même titre que d'autres, des baisses d'impôts généreuses que vous avez consenties.

Á  +-(1145)  

+-

    M. John Manley: Je suis d'accord, et c'est justement pour aller plus directement au but que j'ai adopté cette mesure.

+-

    M. Pierre Paquette: Nous nous attendions à avoir quelques pistes de débat aujourd'hui même.

+-

    La présidente: C'est tout.

+-

    M. Pierre Paquette: Est-ce possible?

+-

    M. John Manley: Le temps passe rapidement quand on s'engage dans ce genre de discussions.

[Traduction]

+-

    La présidente: Monsieur Murphy, vous avez dix minutes.

+-

    M. Shawn Murphy (Hillsborough, Lib.): Merci beaucoup, madame la présidente.

    Monsieur le ministre, j'aurais quelques questions au sujet de la somme de 2 milliards de dollars qui sera consacrée à des dépenses supplémentaires en matière de santé. Comme vous l'avez laissé entendre dans votre exposé, cette somme dépendra des surplus budgétaires engendrés mais qui, d'après vos projections, ne se concrétiseront pas. Mais vous avez déclaré que vous alliez néanmoins financer ces dépenses en santé, et le premier ministre l'a d'ailleurs confirmé par lettre à ses collègues.

    Je tiens d'abord à vous en féliciter. Une collaboration entre le gouvernement fédéral et les provinces est notre voeu à tous.

    Monsieur le ministre, une autre condition était stipulée, à savoir que les provinces et les territoires acceptent de créer un conseil national de la santé. C'était un engagement ferme pris lors d'une réunion des premiers ministres. Je ne parle pas ici d'une vague entente intervenue lors du congrès au leadership des conservateurs. Voilà une chose que les Canadiens souhaitaient voir concrétiser.

    Cela remonte déjà à un certain temps. Certains premiers ministres sont revenus sur leur parole, et on ne semble pas vouloir se décider. Mais, à mon avis, c'est une chose que les Canadiens souhaitent grandement. Ils seraient bien déçus que le gouvernement fédéral avance la somme de 2 milliards de dollars sans que le conseil national de la santé voie le jour.

    J'ai deux questions à poser, dont la première porte sur l'attribution supplémentaire de ressources à certaines conditions. Vous avez pu réfléchir à tout cela pendant la dernière année; continuez-vous de croire qu'il était judicieux de votre part de faire cette annonce, si l'on considère que cinq provinces se sont dites partantes immédiatement? J'avoue, au départ, souscrire sans réserve à cette annonce de la part du gouvernement.

    En second lieu, si les provinces persistent à ne pas vouloir créer un conseil national de la santé, allez-vous quand même attribuer ces ressources supplémentaires de 2 milliards de dollars?

+-

    M. John Manley: En premier lieu, le gouvernement s'était engagé à mettre de l'argent supplémentaire à la disposition des provinces, parce qu'il avait espéré que l'économie se porterait mieux qu'elle ne s'est effectivement portée et parce qu'il s'était attendu à des excédents plus élevés qu'ils ne le seront probablement. Il y a quelques semaines, lorsque j'ai rencontré les ministres des Finances, il avait été établi très clairement que le rendement économique du Canada avait été plus faible que prévu cette année. Les provinces nous ont dit pour l'essentiel qu'elles avaient besoin de cet argent-là; qu'elles ne souhaitaient pas que le gouvernement fédéral enregistre un déficit, mais qu'elles ne voulaient pas non plus qu'il fasse toutes sortes de dépenses inopinées de façon à empêcher un excédent fédéral.

    Le premier ministre, dans sa lettre d'aujourd'hui, souligne clairement que la création d'un conseil de la santé est au coeur même de la mise en oeuvre de l'accord. Il explique également que, si nous modifions la condition établie, c'est pour nous assurer que l'accord sera mis en oeuvre dans tous ses aspects. Il explique aussi que nous sommes en mesure de le faire, parce que nous avons réussi encore mieux que prévu à réduire de façon accrue la dette de l'an dernier.

    Peut-on vraiment parler d'une condition expresse dans la lettre? Pas vraiment, mais je crois que cette démonstration de bonne foi de la part du gouvernement fédéral entraînera sans aucun doute la contrepartie de la part des provinces. Personnellement, je considère que la création d'un conseil de la santé en est un élément important.

+-

    M. Shawn Murphy: Monsieur le ministre, l'an dernier, vous avez réaffecté 1 million de dollars de ressources, en modifiant vos priorités; à mon avis, c'est une façon de faire très importante en matière de politique gouvernementale, car chaque année il faut réaffecter les ressources différemment, et chaque année, cette démarche se heurte à beaucoup de résistance. Pouvez-vous nous expliquer comment vous avez fait, à quelle résistance vous vous êtes heurté, quel défi vous avez dû relever et quels enseignements vous en avez tirés—car tout cela est un processus permanent?

Á  +-(1150)  

+-

    M. John Manley: Bien sûr, nous nous heurtons à de la résistance. L'examen des programmes de 1994-1995 s'est évidement heurté lui aussi à de la résistance. Je me rappelle ma propre réaction lorsque j'ai rencontré le ministre des Finances de l'époque. Lorsqu'il m'a expliqué quelle était la cible que je devais fixer à mon ministère, comme je semblais raisonnablement optimiste, il a réagi en me disant que « certains de mes collègues étaient tombés dans un état catatonique. » Je lui ai répondu « que je ne m'exprimais peut-être pas clairement, mais que j'étais aussi dans un état de catatonie. »

    La résistance ne disparaîtra jamais. Nous nous levons tous les matins en étant convaincus que ce que nous faisons est important et valable, ce qui est vrai. Mais il s'agit d'établir ses priorités. Il s'agit d'accepter que ce que nous faisons est peut-être bien, mais qu'il y a peut-être des façons de faire mieux encore. Y a-t-il des choses plus importantes encore à faire que ce que nous faisons? Quelles sont les choses que les Canadiens considèrent comme étant essentielles à leurs intérêts et dont nous devrions tenir compte malgré nos ressources limitées?

    Nous devrons donner plus de moyens au Conseil du Trésor pour qu'il puisse prendre ce genre de décisions, et devrons peut-être améliorer les procédures suivies pour que, de façon permanente, on soit assuré d'obtenir tous les résultats attendus. C'est un élément absolument essentiel de notre vision qui nous permettra d'avancer.

    Si nous n'agissons pas de façon méthodique, comme nous l'avons suggéré dans le budget et comme nous avons commencé à le faire déjà cette année, nous serons inévitablement obligés de mener un examen des programmes de fond en comble comme celui de 1994, ce qui pourrait perturber grandement le fonctionnement du gouvernement et être difficile à gérer.

    Il nous faut agir de façon plus musclée et rapidement.

+-

    M. Shawn Murphy: Pouvez-vous nous dire exactement où les réductions ont été effectuées? Un ministère a-t-il eu à assumer une plus grande part des réductions que les autres?

+-

    M. John Manley: Comme c'est le Conseil du Trésor qui a publié ceci, on trouve des chiffres qui viennent de la plupart des ministères. Je ne peux pas vous parler de programmes en particulier mais pour l'Agriculture, c'est 17 millions; pour l'Agence de douanes, c'est 22 millions; pour l'ACDI, 130 millions; pour DRHC, 105 millions; pour Industrie, 117 millions...

+-

    M. Shawn Murphy: Mais tout le monde a dû faire sa part?

+-

    M. John Manley: Oui, de façon générale, et les gestionnaires ont dû apprendre à dépenser leurs ressources de façon plus efficiente.

    J'ai été moi-même chargé d'un ministère hiérarchique, et je puis vous dire d'après ma propre expérience que, même si c'est très douloureux au départ—M. Lynch qui était mon sous-ministre à l'époque, vous confirmera que nous avons dû subir d'assez graves compressions—nous avons fini, si je peux m'exprimer ainsi, par être beaucoup plus efficaces parce que nous avons dû tenir compte des nouvelles priorités du milieu des années 90 plutôt que de nous en remettre aux priorités des années 80 ou même 70, et aux programmes qui existaient depuis tout ce temps.

+-

    La présidente: Monsieur Discepola, vous avez dix minutes.

+-

    M. Nick Discepola (Vaudreuil—Soulanges, Lib.): Merci, madame la présidente.

    Monsieur le ministre, si l'on analyse vos projections des dernières années, je me vois obligé de dire comme certains de mes collègues de l'opposition que vous souffrez d'un certain manque de crédibilité. J'ai regardé les chiffres de l'année dernière, et si je compare les projections aux résultats réels, vous avez manqué le bateau à raison de plus de 60 milliards de dollars.

    Personnellement, je préfère qu'on pèche par excès de prudence. Si M. Roth avait fait comme vous et avait eu recours à vos techniques de prédiction, j'imagine que mes actions de Nortel seraient encore aujourd'hui à 125 $. Vous devez avoir cette confiance.

    J'imagine que, dans votre ministère, on doit faire le suivi de vos techniques de budgétisation pour déterminer si elles portent fruit ou non. Existe-t-il chez vous un système de ce genre? De plus, à quel moment, à votre avis, notre crédibilité—ou celle du gouvernement, ce qui est encore plus important— commencera-t-elle à souffrir de cet écart dans vos prédictions, si les résultats ne finissent pas par se rapprocher un peu plus de vos projections?

    Par exemple, vous avez dit que des excédents de 4 milliards de dollars sur des recettes et des dépenses de 180 milliards de dollars respectivement, ce n'était pas si mal. Je veux bien, mais quand je vois que vous n'êtes pas en mesure d'obtenir plus de 1 milliard de dollars en réaffectation de ressources à même ces 360 milliards de dollars, il me semble que les efforts de ce côté sont déficients.

    Je vous laisse le temps de répondre à l'une ou l'autre des questions.

Á  +-(1155)  

+-

    M. John Manley: Rappelez-vous que la réaffectation ne se fait que du côté des dépenses; par conséquent, on ne peut parler de 360 milliards de dollars mais seulement de 180 milliards. Mais je vous l'accorde : 4 milliards, ce n'est pas beaucoup sur 180 milliards.

    Mais, monsieur Discepola, personne n'a une meilleure réputation que nous en matière de prévisions. Le défi est le même dans les autres pays qui font aussi des prévisions. Or, faire des prévisions c'est essayer de prédire l'avenir. Si nous avions tous notre boule de cristal, vous auriez sans doute vendu vos actions lorsqu'elles étaient à 120 $, n'est-ce pas? Je ne puis qu'ajouter ceci : j'ai déjà été à la place de l'opposition à ce même comité : tous les ans, Mike Wilson comparaissait à ce comité, et tous les ans nous le blâmions pour l'inexactitude de ses prévisions en des termes quelque peu plus musclés que ceux qu'utilisent aujourd'hui nos amis de l'opposition. Mais ces prévisions allaient toujours dans l'autre sens : c'était toujours comme le bâton de hockey qui est trop élevé, et il prévoyait toujours que ses recettes allaient grimper et que le déficit allait diminuer. Or, pendant toutes les années où il était au gouvernement, il n'a jamais réussi à faire baisser le déficit en deçà de 29 milliards de dollars.

    Si nous avons été trop prudents, je plaide coupable. Nous essayons d'être prudents, car le fait que le Canada fasse mieux que tous les autres pays en matière de rendement financier nous a permis de rétablir notre crédibilité dans le monde. Voilà justement pourquoi les ministres des provinces nous ont demandé de ne pas renouer avec le déficit, même si l'argent était en jeu aussi pour eux.

    Nous essayons d'être aussi exacts que possible et nous nous fions, dans une certaine mesure, aux prévisions du secteur privé. Nous avons innové lorsque, à notre arrivée au gouvernement, nous avons cessé de faire nos propres prévisions. Ce sont, de fait, 20 prévisions extérieures que nous utilisons à la base de nos projections économiques. Nous faisons appel à des entreprises de modélisation de l'extérieur pour préparer les projections de déficit et d'excédent que vous avez sous les yeux aujourd'hui. C'est ce qui donne un certain élément d'objectivité à l'exercice, et c'est ce qui manquait auparavant. Cela me semble être la clé de la réussite. Et pourtant, nous reconnaissons tout de même qu'il est impossible de prédire l'avenir avec quelque certitude que ce soit.

+-

    M. Nick Discepola: Monsieur le ministre, tout excédent a toujours servi jusqu'à maintenant à réduire la dette, et il me semble qu'on en arrive à un point où... on parle actuellement de 40 milliards de dollars d'ici l'année du prochain exercice. On semble avoir une idée fixe, et c'est celle de réduire le ratio de l'endettement au PIB jusqu'à un niveau acceptable. Personnellement, j'estime que 30 p. 100 suffit amplement; mais si vous regardez à combien a correspondu chacun des excédents en termes de diminution de la dette, vous constaterez que cela n'a pas vraiment modifié ce ratio.

    Je pense personnellement que l'on peut atteindre cet objectif avec une croissance économique saine et qu'on pourrait commencer à affecter l'excédent à d'autres secteurs prioritaires. Ce qui me préoccupe, quand on parle de réduire le ratio, c'est d'être obligés par la loi d'utiliser l'excédent pour réduire la dette.

    Nous n'en avons pas encore parlé, mais quelques collègues et moi nous posions une question. M. Murphy affirme que la reddition de comptes dans tous les transferts avec les provinces est de la plus haute importance : c'est vrai, car, lors de nos audiences pancanadiennes, nous avons entendu les Canadiens exiger transparence et reddition de comptes. Pourtant, je crois fermement pour ma part que nous devons investir dans les soins de santé.

    D'accord. Peut-être y a-t-il des conditions liées au transfert de 2 milliards aux provinces. Mais, à mon avis, nous voulons vous entendre dire aujourd'hui que cette attribution de ressources de 2 milliards de dollars sera versée aux provinces quoi qu'il arrive. Vous semblez laisser entendre que l'on projette un excédent d'à peine 2,3 milliards de dollars; donc, en donnant deux milliards aux provinces, cela laisse au gouvernement à peine 300 millions de dollars d'excédent. Pourtant, je suis convaincu que les Canadiens ont à coeur de voir cesser le chamaillage constant entre les divers paliers de gouvernement et qu'ils veulent investir dans le secteur qui les préoccupe le plus, soit les soins de santé. Allez-vous leur verser les 2 milliards de dollars?

+-

    M. John Manley: Tout d'abord, je suis d'accord avec vous sur le fait que c'est ce que les Canadiens veulent. Ils veulent que nous mettions fin aux chicanes. Ils veulent que nous puissions travailler ensemble de façon constructive. À mon avis, le climat des relations fédérales-provinciales s'est grandement amélioré.

    Deuxièmement, les 2 milliards de dollars prévus seront là. Pourquoi ne pas simplement les distribuer dès aujourd'hui? C'est parce qu'une réserve pour éventualités de 300 millions de dollars me semble trop mince pour les cinq mois qui restent. Il n'y a qu'à voir à quoi nous avons utilisé notre argent cette année : le SRAS, la vache folle et le secours aux sinistrés. De plus, il y a eu l'augmentation de la valeur du dollar. Rien de tout cela n'était prévu lorsque le budget a été livré le 18 février. À ce moment, le dollar valait 0,65 $. Personne n'avait entendu parler du SRAS. Personne ne croyait que le Canada serait frappé par un cas de maladie de la vache folle. Évidemment, les catastrophes naturelles ne sont jamais prévisibles. Je crois que 300 millions de dollars seraient une somme trop mince et que nous risquerions de nous retrouver en déficit.

    Je sais que je vous prête des propos, mais votre question laisse entendre en partie que nous avons obtenu d'excellents résultats l'an dernier et que nous ne devrions pas tant nous préoccuper d'accuser un léger déficit cette année. À mon avis, les Canadiens comprennent pourquoi il ne faut pas laisser nos dépenses s'accroître et pourquoi nous ne devons pas relâcher notre discipline contre les déficits pendant plusieurs années. Ils savent quels sacrifices ont été faits pour remettre les choses en ordre. Ils comprennent que si nous acceptons un léger déficit, ce déficit pourrait prendre de l'expansion. Nous devons nous montrer fermes, et c'est pourquoi je dis catégoriquement non au déficit. Je refuse toute décision qui présente ce risque.

  +-(1200)  

+-

    M. Nick Discepola: Merci.

    Permettez-moi de vous poser une question directe, monsieur le ministre. L'une de mes préoccupations, ce sont les dépenses de programme. Dans votre discours, vous avez mentionné le budget de 1995-1996 et l'examen des programmes, deux éléments qui ont été cruciaux. Mais au cours des dernières années, les dépenses de programme ont augmenté constamment. En 1995-1996, nous avons effectivement réduit de près de 50 000 le nombre des fonctionnaires dans la région immédiate, mais leur nombre a recommencé à augmenter au cours des dernières années. Cela m'inquiète. Êtes-vous inquiet vous aussi?

+-

    M. John Manley: Oui. C'est pourquoi nous avons présenté certaines mesures dans le dernier budget. C'est pour cette raison que j'ai dit que nous devons renforcer nos programmes et faire peut-être des examens plus rigoureux des programmes et des réaffectations. Nous devons nous fixer de vrais objectifs et les réaliser.

    Parallèlement, je vous rappelle que les dépenses de programme comprennent tous les programmes du gouvernement fédéral. Cela comprend donc les transferts aux provinces et aux territoires, tant en ce qui a trait au Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux qu'aux paiements de péréquation. Par conséquent, si nous augmentons de 35 milliards de dollars le TCSPS, comme nous le faisons sur cinq ans dans le cadre de l'entente sur la santé, une bonne partie de cet argent, 2,5 milliards de dollars pour le dernier exercice financier, fait partie des dépenses de programme.

    Le but de la réaffectation est de voir comment nous pouvons nous concentrer sur ce qui relève vraiment du gouvernement fédéral afin de veiller à ce que nous fassions bien ce que nous faisons, que nous ne fassions pas ce que nous ne devrions pas faire et que nous réservions l'argent à dépenser pour les priorités qui tiennent à coeur aux Canadiens.

+-

    La présidente: Merci beaucoup à tous les deux.

    Monsieur Brison, vous avez dix minutes.

+-

    M. Scott Brison (Kings—Hants, PC): Je vous remercie, madame la présidente.

    Je tiens à vous remercier, monsieur le ministre, de comparaître devant nous aujourd'hui.

    Dans votre présentation, vous avez dit que le gouvernement mettra en oeuvre une nouvelle politique sur l'industrie des services financiers. C'est d'ailleurs ce que les banques pensaient que vous aviez dit au printemps et à l'été de 2002. Puis en octobre 2002, le premier ministre a dit : « Un instant. Il n'y aura pas de fusions bancaires jusqu'à ce que je prenne ma retraite ». Tout ce que cette politique a de nouveau, n'est-ce pas le fait que le Canada aura, sous l'administration de Paul Martin, un premier ministre qui autorisera la fusion des banques?

+-

    M. John Manley: Vous savez qu'il y a eu la fusion de Toronto Dominion avec Canada Trust. D'autres changements importants ont été apportés au secteur des services financiers. Il y a eu les fusions de compagnies d'assurance.

    Ce que je voulais dire, du moins dans la réponse que nous avons transmise à votre comité et au comité sénatorial, c'est que désormais nous envisageons une politique qui tient compte du fait qu'il ne s'agit plus simplement de services bancaires ou de services bancaires de détail tels que la plupart des gens les conçoivent. L'industrie a profondément changé au cours des cinq dernières années et c'est la raison pour laquelle nous avons demandé l'avis d'un plus grand nombre d'intervenants.

    Nous nous sommes engagés à ce qu'un énoncé de politique soit prêt d'ici la fin juin et à recevoir des demandes quelques mois par la suite. Je crois que cela répondra aux besoins de l'industrie. Les représentants de l'industrie m'ont dit vouloir de la certitude. Ils ne veulent pas que l'incertitude se poursuive. Ils veulent que nous leur indiquions clairement quand nous recevrons des propositions afin qu'ils puissent faire ce qu'ils ont à faire.

  +-(1205)  

+-

    M. Scott Brison: À la suite de l'évaluation faite par le Forum économique mondial cette année, le Canada en fait est tombé dans le classement mondial de la troisième à la seizième place au cours des deux dernières années en raison entre autres de ses impôts élevés, de ses déficits en matière d'infrastructure et, ce qui est plus inquiétant à certains égards, de son absence de transparence et en fait d'allégations de corruption. En fait, d'après la description qui est faite du Canada, on pourrait croire qu'il s'agit d'une quelconque république bananière ou d'un pays qui se dirige dans cette voie.

    Examinons les conséquences inouïes du départ à la retraite du premier ministre pour d'importantes décisions de politique publique. J'ai mentionné plus tôt la politique sur la fusion des banques. Il y a aussi la planification du budget. Le 29 août, vous avez laissé entendre qu'il n'y aurait probablement pas de budget en février. Vous avez dit que comme il s'agissait d'un travail qui exige systématiquement la collaboration du ministre des Finances et du premier ministre, il serait impossible de préparer un budget avant la transition ».

    Nous ne pourrons donc pas avoir de budget avant le départ à la retraite du premier ministre. En ce qui concerne la péréquation, les provinces devront rester dans l'incertitude pendant que le programme social le plus important du Canada est mis en veilleuse jusqu'après le départ à la retraite du premier ministre. En ce qui concerne l'engagement de 700 millions de dollars pris par le ministre actuel des Transports à l'égard de VIA Rail, le futur premier ministre se demande s'il sera possible de remplir cet engagement.

    Le refus du premier ministre de devancer la date de son départ à la retraite et le fait que ces importantes décisions de politique publique se trouvent ainsi différées ne sont-ils pas des facteurs qui contribuent à l'impression que l'on se fait du Canada à l'étranger, à savoir qu'il s'agit davantage d'une république bananière plutôt que d'une démocratie en bonne et due forme?

+-

    M. John Manley: J'aimerais simplement porter à l'attention de M. Brison une lettre envoyée jeudi dernier par Tom d'Aquino du Conseil canadien des chefs d'entreprises à Klaus Schwab, président du Forum économique mondial, après la publication de l'enquête sur la compétitivité faite par le Forum économique mondial. Il y décrit les réserves qu'il a à propos des méthodes d'enquête utilisées par le Forum, puis il dit ce qui suit :

... Je crains que des constatations qui correspondent si peu à la réalité de la compétitivité canadienne risquent de ridiculiser le travail du Forum économique mondial à cet égard. Certains sondages que j'ai faits ce matin auprès de mes collègues PDG et de hauts fonctionnaires corroborent mes craintes.

Malgré les lacunes de la méthodologie utilisée, les constatations du Forum économique mondial intéressent l'ensemble de la communauté internationale, et une description inexacte du Canada risque de nuire aux perceptions des milieux de l'investissement étrangers au sujet du rendement et des perspectives économiques du Canada. Heureusement pour nous, d'autres évaluations de la part d'instances internationales respectées nous attribuent un très bon classement. Je songe entre autres au International Institute of Management Development qui classe le Canada au troisième rang en matière de compétitivité dans son rapport de 2003. Je vous renvoie également au service de veille économique de la revue The Economist qui classe le Canada au premier rang du contexte commercial à l'échelle mondiale pour 2003-2007.

+-

    M. Scott Brison: Sauf votre respect, monsieur le ministre, vous pouvez consulter un millier de médecins et il s'en trouvera un qui vous dira que le tabagisme ne cause pas le cancer. Le fait est...

+-

    M. John Manley: Oui, et je crois que c'est ce que le Forum économique mondial a fait. Il a fait un sondage auprès d'un échantillon représentatif très petit. Je pourrais aussi vous renvoyer à l'étude de KPMG sur les solutions de rechange à la concurrence, qui classe le Canada au premier rang. Comme M. d'Aquino l'a souligné, le Institute for Management Development classe le Canada au troisième rang.

    Je crois que si vous vouliez jeter un coup d'oeil aux chiffres, vous pourriez avoir de la difficulté à étoffer les observations de certaines entreprises sondées par le Forum économique mondial.

+-

    M. Scott Brison: Monsieur le ministre, ce matin, nous avons pris l'engagement de consacrer 2 milliards de dollars à la santé pour les provinces. En fait, selon le tableau 3.8, pour ce qui est des prévisions des paiements de remplacement aux provinces ou des arrangements fiscaux, ce qui désigne en fait la péréquation, on constate une diminution de 10 milliards de dollars au cours des cinq prochaines années, comparativement aux chiffres de l'année dernière. En fait, c'est de la frime. Il ne s'agit pas de nouveaux fonds pour les provinces. Vous prévoyez une diminution de 10 milliards de dollars au cours des cinq prochaines années pour ce qui est des transferts de péréquation aux provinces. Par conséquent, l'augmentation des fonds destinés aux soins de santé est de la frime par rapport aux prévisions de l'année dernière. Pourquoi cette diminution?

  +-(1210)  

+-

    M. John Manley: À quelle ligne vous trouvez-vous, monsieur Brison?

+-

    M. Scott Brison: Au tableau 3.8. Si vous comparez ce tableau au tableau 3.5 des prévisions de l'année dernière, vous constatez une diminution de 2 milliards de dollars, soit 10 milliards de dollars au cours des cinq prochaines années au chapitre des paiements de remplacement pour programmes permanents dans le cadre des arrangements fiscaux.

+-

    M. John Manley: Comme vous pouvez le constater d'après le tableau 3.8, en fait le montant augmente progressivement par rapport aux données réelles de 2002-2003, qui sont de 10,4 milliards de dollars. Le montant passe à 11 milliards de dollars, 12,1 milliards de dollars, 12,7 milliards de dollars...

+-

    M. Scott Brison: Dans le cadre des arrangements fiscaux, monsieur le ministre, il y a une diminution de 10 milliards de dollars au cours des cinq prochaines années comparativement aux chiffres de l'année dernière.

+-

    M. John Manley: D'abord, le chiffre augmente sans cesse, et deuxièmement c'est la façon dont la péréquation fonctionne. On applique une formule complexe pour mesurer la capacité financière des provinces. On compare chaque province par rapport à une moyenne de cinq provinces, en excluant la province la plus riche et les quatre provinces ayant le plus bas revenu, pour calculer la moyenne, et les paiements comblent la différence entre la capacité financière des provinces récipiendaires et cette moyenne. Si les données indiquent que l'écart s'est rétréci entre la moyenne et la capacité des provinces récipiendaires, ce qui est le cas ici, et si des changements démocratiques se sont produits, les paiements baissent bien sûr.

    Mais le tableau ne fait aucune prévision des conséquences possibles des changements proposés dans nos discussions avec les provinces.

+-

    M. Scott Brison: Mais d'après ces prévisions, le gouvernement va jouir d'un bénéfice de 10 milliards de dollars au cours des cinq prochaines années, ce qui fait que l'augmentation de 2 milliards de dollars dans le domaine de la santé ne représente pas vraiment une augmentation des transferts aux provinces; c'est de la frime.

+-

    M. John Manley: Non. L'argent ne va pas aux mêmes provinces, d'abord. Cela passe par le TCSPS, comme l'engagement le prévoit. Vous parlez de la péréquation.

+-

    M. Scott Brison: Vous dites ici que la modification du traitement de la réserve pour éventualités constitue un changement unique de politique, mais il s'agit d'un changement très important par rapport à la politique que vous aviez déjà articulée et répétée. En réalité, est-ce que ce changement de politique important ne vous donne pas une occasion rêvée de faire des dépenses préélectorales extraordinaires? Je crois que vous en avez sous-estimé l'impact et que vous avez essayé de le minimiser. C'est un changement de politique très important de la part de votre gouvernement.

+-

    M. John Manley: Et bien, c'est un changement de politique important, ce qui explique pourquoi j'ai insisté sur le fait qu'il s'agit d'une mesure ponctuelle pour respecter un engagement, bien que conditionnel, pris en février dernier par plusieurs provinces, comme en témoigne le fait que cinq provinces ont même prévu les paiements conditionnels dans leur budget et ont agi comme si elles tenaient pour acquis que ces revenus allaient leur parvenir. Donc, même s'il n'existe vraiment pas d'obligation juridique, nous avons quand même un impératif politique, à mon avis.

    D'ailleurs on pourrait inverser votre raisonnement. Si les 2 milliards de dollars sont destinés aux provinces, cet argent n'est pas disponible à d'autres fins.

+-

    La présidente: Nous passerons à une ronde de dix minutes, et M. Pillitteri et M. Valeri auront cinq minutes chacun pour les questions et les réponses.

    Monsieur Pillitteri.

  +-(1215)  

+-

    M. Gary Pillitteri (Niagara Falls, Lib.): Je vous remercie, madame la présidente.

    Je suis heureux d'être de ce côté-ci de la Chambre, monsieur le ministre, et non de l'autre côté où se trouvent les pessimistes. Je représente une région où la situation était très difficile avant 1993, lorsque le taux de chômage avant atteint 14,5 p. 100. Je crois qu'aujourd'hui le taux de chômage dans la région est inférieur à la moyenne nationale qui se situe aux environs de 7 p. 100. Ce redressement de la situation n'est pas entièrement attribuable au gouvernement, mais il ne fait aucun doute que le gouvernement a joué un certain rôle pour ce qui est de contribuer à la reprise économique.

    J'aimerais commencer par dire que dans ma propre région—et toutes les questions politiques sont locales—le secteur privé, surtout l'industrie du tourisme, y a investi plus d'un milliard de dollars au cours des sept ou huit dernières années pour construire des hôtels. Notre région est la Mecque du tourisme du Canada.

    Un grand nombre de mes commettants m'ont interrogé à propos du dollar canadien. Monsieur le ministre, je ne devrais peut-être pas vous poser cette question, mais il est important que je le fasse, parce que nous devons examiner le dollar, dont la valeur s'est accrue de 20 p. 100 comparativement au dollar américain. Nous connaissons tous les prévisions; les États-Unis se débrouillent très bien, et la valeur de notre dollar a augmenté.

    Le tourisme n'est pas différent d'un produit manufacturé mis au point au Canada : il s'agit aussi d'un produit d'exportation. Depuis que la valeur du dollar a augmenté de 20 p. 100, on fait de la planification à long terme. Le SRAS a eu des conséquences dévastatrices sur l'Ontario, et particulièrement à Niagara Falls et dans la péninsule du Niagara, au point où il a même influé sur nos prévisions de croissance au cours des deuxième et troisième trimestres. Je crois vraiment que l'industrie touristique ne connaîtra pas de croissance au cours du deuxième trimestre, peut-être un peu plus au troisième trimestre, et une véritable croissance au cours du quatrième trimestre. Que pouvons-nous faire pour venir en aide à cette industrie, pour assurer le maintien de cette industrie d'exportation qu'est le tourisme?

    Par ailleurs, nous constatons que la Banque du Canada a fait preuve dans une certaine mesure de négligence en n'abaissant pas les taux d'intérêt, parce que cela a eu des répercussions entre autres sur le secteur manufacturier. Elle vient d'abaisser les taux d'intérêt, mais ils demeurent de 1,75 ou 2 p. 100 supérieurs à ceux en vigueur aux États-Unis.

+-

    La présidente: Monsieur le ministre, vous avez deux minutes et demie.

+-

    M. John Manley: Tout d'abord, vous avez raison, le SRAS a durement touché le secteur du tourisme. Je dirais que ce n'est pas uniquement l'Ontario qui a été touchée, mais les secteurs du tourisme et de l'accueil partout au pays. En fait, les répercussions sont relativement moins graves plus on s'éloigne de la région de Toronto, mais il a eu des répercussions partout au pays.

    En ce qui concerne le dollar, l'élément important n'est pas oublié ici, comme les diapositives l'ont indiqué, c'est que cela ne reflète pas vraiment la situation du dollar canadien mais plutôt celle du dollar américain. La valeur du dollar américain a nettement baissé par rapport aux autres devises importantes, surtout par rapport à l'euro et dans une certaine mesure par rapport au yen. Sa valeur a d'ailleurs enregistré une baisse plus importante par rapport au dollar australien que par rapport au dollar canadien.

    Il s'agit en fait d'un rajustement attendu depuis longtemps au taux de change du dollar américain, qui reflète l'accumulation constante de la part des États-Unis d'importants déficits commerciaux et de déficits du compte courant. C'était donc un rajustement qui s'imposait.

    Pendant une assez longue période, on s'est inquiété de la dévaluation rapide du dollar américain et de l'instabilité que cela entraînerait. Ces craintes se sont avérées fondées. Nous avons constaté au cours de l'année une diminution rapide de la valeur du dollar américain.

    Il ne fait aucun doute que la politique monétaire relève dans une grande mesure du gouverneur de la Banque du Canada. Il a comparu devant vous, comme il l'a fait en public, pour expliquer les décisions qu'il a prises concernant les taux d'intérêt, mais ces taux ne sont pas déterminés selon les répercussions qu'ils auront sur le taux de change. Les décisions en matière de politique monétaire visent à assurer la concrétisation de la politique de stabilité des prix que le gouvernement a adoptée en collaboration avec la Banque du Canada, à savoir maintenir l'inflation aux alentours de 1 à 3 p. 100. C'est là où se situe le taux d'inflation. Cela a contribué, comme d'autres facteurs, à notre situation économique généralement favorable.

    Je dirai pour répondre à votre question qu'étant donné que nous ne pouvons pas vraiment prévoir les fluctuations de la valeur du dollar, il est important que les entreprises canadiennes s'assurent d'être concurrentielles. Elles doivent investir dans la productivité, dans la formation, et dans le perfectionnement de leurs employés pour leur permettre d'être concurrentiels, que le dollar se maintienne au taux actuel, que sa valeur augmente ou qu'elle diminue. C'est ce que feront les gens d'affaires prudents pour se protéger contre les fluctuations du taux de change, qui échappent vraiment à notre contrôle et au leur.

  +-(1220)  

+-

    La présidente: Merci beaucoup.

    Nous allons maintenant céder la parole à M. Valeri, et vous avez cinq minutes.

+-

    M. Tony Valeri (Stoney Creek, Lib.): Je vous remercie, madame la présidente.

    Je tiens à vous remercier, monsieur le ministre, pour la mise à jour que vous nous avez présentée aujourd'hui. J'aimerais aborder deux points. J'aimerais vous les présenter et vous donner l'occasion d'y répondre.

    Je crois que le document donne un aperçu de l'efficacité de notre remboursement de la dette. Il est vrai que les dépenses de programmes ont diminué depuis 1993-1994. Elles ont légèrement augmenté tout récemment. Nous avons même constaté que le revenu disponible par habitant a augmenté, d'environ 13 p. 100 comme l'indique le document, ce qui est une statistique très valable et que nous ne devrions pas perdre de vue.

    Nous avons une monnaie qui prend de la valeur, ce qui est bon, bien que certains craignent, comme vous l'avez entendu, que l'appréciation rapide de cette monnaie ait nui jusqu'à un certain point à notre économie. Cependant, nous sommes toujours aux prises avec la question de la productivité. Même si la productivité de notre main-d'oeuvre s'améliore, l'écart entre notre productivité et celle des Américains demeure important.

    Récemment, le Conference Board a présenté un document qui traite des différences dans la structure industrielle qui explique peut-être un aspect important de cet écart de productivité entre notre pays et les États-Unis. C'est une question qui me préoccupe, et je me demande si le gouvernement a examiné les répercussions de cette structure économique sur les niveaux de productivité. Que devons-nous faire pour remettre l'accent sur les aspects de notre économie qui ne relèvent pas du secteur des ressources?

    Ce rapport indique également que l'économie canadienne met essentiellement davantage l'accent sur les industries d'exploitation des ressources naturelles en début de croissance, ou dépend davantage de ces industries comparativement à nos homologues américains. J'aimerais que vous abordiez cette question si vous le pouvez.

    L'autre chose qui me préoccupe, c'est que nous ne prévoyons aucune mesure de prudence avant 2006-2007. Les mesures de prudence ont toujours fait partie intégrante de notre cadre financier. Nous en avons constaté les avantages compte tenu des événements du 11 septembre, du SRAS et de la maladie de la vache folle. Aujourd'hui, nous indiquons que pour les prochains exercices financiers, nous n'établirons aucune mesure de prudence.

    Cela me préoccupe. J'aimerais savoir si vous êtes à l'aise avec cette idée et ce que vous envisagez faire jusqu'à ce que nous arrivions à un stade où nous puissions désormais tenir compte à nouveau de ce facteur de prudence. Vous pourriez peut-être traiter aussi de la réaffectation des ressources et nous indiquer si nous pourrons utiliser les sommes réaffectées et tenir compte de ce principe de prudence dans notre cadre financier, car je considère que cela fait partie intégrante des mesures qui nous ont permis d'éviter un autre déficit et d'assurer un rendement économique efficace.

+-

    La présidente: Monsieur le ministre.

+-

    M. John Manley: Je vous remercie, monsieur Valeri.

    Vous constaterez, à la lecture de la page 48, que la productivité du Canada a augmenté à partir de l'année où notre budget a affiché un excédent. Je ne sais pas s'il s'agit d'une coïncidence, mais cette année-là a été un point tournant. Le taux de croissance de notre productivité générale ainsi que le taux de croissance de la productivité du travail ont par la suite suivi ceux des États-Unis. C'est à partir de ce moment-là que la croissance de notre PIB par habitant a commencé à dépasser celle des États-Unis. À partir de là, la conjoncture a été très favorable. Ça a été le début d'un cycle positif pour le Canada.

    Compte tenu de la structure de notre économie, je crois qu'il est un peu difficile, comme vous le faites valoir, de changer certains de ces chiffres quand une grande partie de notre économie continue de reposer sur l'exploitation des ressources naturelles. Quand on fait une distinction entre les secteurs industriels et le secteur des services de notre économie, on constate une véritable croissance de la productivité générale et de la productivité du travail.

    L'avantage qui découle de l'appréciation de notre devise, c'est que comme une large partie de l'équipement et de la machinerie que nous utilisons dans le cas de nos activités de production est importée, elle coûte donc moins cher. Je suis donc très optimiste pour l'avenir.

    La dernière chose que j'ajouterais, c'est qu'il y a souvent un décalage entre la croissance de la productivité—comme on a pu le constater par le passé—et le développement technologique. Au milieu des années 90, le Canada a connu une croissance rapide des investissements dans le domaine de la technologie. Il suffit de songer à la rapidité avec laquelle toutes nos écoles ont été branchées à Internet. Il arrive parfois qu'il y ait aussi un décalage entre ces investissements et les gains de productivité.

    La question de la prudence est très importante. Il nous faudra y réfléchir soigneusement. Comme on l'a mentionné, il nous a fallu en tenir compte dans notre budget de décembre 2001, présenté dans la foulée des événements survenus le 11 septembre. Nous nous trouvions alors dans une situation analogue à celle d'aujourd'hui. Nous avions renoncé à la prudence et le fonds pour imprévus était inférieur à 3 milliards de dollars.

    La croissance en 2002 s'est révélée plus importante que prévue ainsi que la réserve pour imprévus. Il s'agit là évidemment de la meilleure option, à savoir que la croissance se maintienne à un niveau élevé et que nous anticipions des résultats qui nous permettent de rétablir la prudence tout en maintenant une importante réserve pour imprévus.

    Je suis donc favorable à un examen des dépenses qui nous permettrait de rétablir une certaine prudence pendant le début du cycle et de maintenir une réserve pour imprévus. Il s'agit cependant d'une décision que nous devrons prendre une fois que nous aurons une meilleure idée de l'évolution de la conjoncture.

  +-(1225)  

+-

    La présidente: Je vous remercie.

    Madame Judy Wasylycia-Leis, vous avez 10 minutes.

+-

    Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD): Je vous remercie, madame la présidente.

    Je vous remercie, monsieur le ministre. De toute évidence, nous avons des visions du monde et de ce pays qui sont très différentes. Vous vous êtes fixé ce grandiose but que le Canada ait le meilleur ratio dette-PIB du G-7. Je pense plutôt que le Canada devrait se situer en première place parmi le G-7 et dans le monde pour la façon dont il traite sa population et pour ce qui est de son indice de développement humain. Soit dit en passant, nous sommes passés de la première à la huitième place sur cet indice en peu de temps.

    Je ne suis pas non plus d'accord avec l'évaluation que vous faites de la dernière décennie. Pour moi, cette décennie a été marquée par des espoirs et des attentes déçues. J'aimerais donc vous poser la question que vous nous avez posée à tous : Qui se serait attendu à ce que nous ne parvenions pas à atteindre l'objectif que nous nous étions fixé en l'an 2000 d'éliminer la pauvreté chez les enfants?

    Qui se serait attendu à ce que notre système de santé se détériore autant pendant cette décennie?

    Qui se serait attendu à ce que sept enfants sur dix appartenant à des familles où les deux parents travaillent attendent toujours des places dans des garderies autorisées?

    Qui se serait attendu à ce que les banques d'alimentation connaissent un tel essor?

    Qui se serait attendu à ce que l'écart entre les riches et les pauvres augmente?

    Qui se serait attendu à ce que les Nations Unies dénoncent l'existence des conditions de vue sur les réserves qui ressemblent à celles du tiers monde?

    Qui se serait attendu à ce que nous ne respections pas le protocole des Nations-Unies sur l'élimination de la discrimination contre les femmes?

    Je pourrais poursuivre encore longtemps dans la même veine. Comme vous le voyez, je n'ai pas la même conception que vous des 10 dernières années.

    Voici donc la question que je vous pose. Allez-vous vous rendre compte qu'il vous faut changer votre conception des choses? Nous devons d'abord cesser d'être obsédés par l'élimination du déficit. Il faut aussi cesser d'offrir des réductions d'impôt qui ne profitent qu'aux riches et aux grandes entreprises. Il faut aussi cesser d'être obsédés par la dette. Quand allez-vous vous attaquer à l'élimination du déficit humain et du déficit social qui sont le résultat de vos politiques budgétaires?

+-

    M. John Manley: Voilà le genre de discours qui fait hocher la tête aux socio-démocrates européens qui ne comprennent tout simplement pas pourquoi le NPD au Canada ne comprend vraiment pas quels sont les choix qui doivent être faits pour gouverner efficacement le pays aujourd'hui. Ce n'est pas le genre de discours que tiennent mes homologues de Suède ou d'Allemagne ou de tous les autres pays où les socio-démocrates se rendent compte qu'il faut faire des choix pragmatiques de manière à atteindre les objectifs qu'on se fixe.

    Voilà, à mon avis, une des raisons pour lesquelles votre parti n'est pas vu comme un parti qui pourrait gouverner le pays. C'est qu'en partant de la prémisse que la dette importe peu, on ne peut que vouloir se lancer dans de grandes dépenses. J'aimerais beaucoup pouvoir me lancer à la dépense. Nous pourrions annoncer toutes sortes de programmes. Tôt ou tard, cependant...

  +-(1230)  

+-

    Mme Judy Wasylycia-Leis: Ce n'est pas ce que je propose, monsieur Manley.

+-

    M. John Manley: Vous avez commencé par demander pourquoi il faudrait se fixer comme objectif que le Canada ait le meilleur ratio dette-PIB...

+-

    Mme Judy Wasylycia-Leis: Dans ce cas, permettez-moi de reformuler la question.

+-

    M. John Manley: Laissez-moi terminer maintenant. Vous m'avez donné une litanie. Permettez-moi de vous en donner une à mon tour.

    Oui, notre ratio dette-PIB a diminué et vous savez quoi? Je pense que c'est la façon dont nous pourrons maintenir nos programmes sociaux et non pas comment nous les compromettrons. La dette nous mangeait la laine sur le dos. Lorsque nous sommes entrés au pouvoir, 37c. de chaque dollar perçu en impôts allait au service de la dette. Aujourd'hui, c'est 21 cents. Ce devrait même être moins.

    Voilà ce qui nous a permis de lancer le crédit d'impôt pour enfants et de le porter à 5 milliards de dollars. Pourquoi n'avons-nous pas pu éliminer la pauvreté chez les enfants avant 2000? Parce que nous n'avions pas encore les ressources voulues pour pouvoir le faire. Nous commençons à constituer ces ressources. Nous avons maintenant commencé à éliminer la pauvreté chez les enfants.

    Pour ce qui est des soins de santé, il est vrai que notre système de soins de santé fait face à des pressions. Il suffit d'examiner les données démographiques pour comprendre ce qui se passe. Qu'allons-nous faire pour être en mesure de maintenir le système de soins de santé public à mesure que vieillira la population? Nous ne pourrons pas le faire en augmentant notre niveau d'endettement. Nous devons être sûrs de pouvoir nous permettre les mesures que nous prenons. Nous devons d'une part favoriser le développement économique et, d'autre part, faire en sorte que ces trois millions de Canadiens qui ne travaillaient pas en 1993 continuent de travailler. Or, ces personnes ont des familles et paient des impôts et ce sont elles qui font tourner l'économie.

    Voilà pourquoi il faut, pour que le Canada puisse continuer d'avoir l'un des meilleurs niveaux de vie au monde, que nous conciliions développement économique et développement social. L'un de ne peut pas aller sans l'autre.

+-

    Mme Judy Wasylycia-Leis: Je suis heureuse que vous me permettiez de reformuler ma question. Vous avez décidé de vous lancer dans une tirade et vous n'avez pas compris du tout qu'il faut concilier prudence et compassion.

    Je pense que les pays socio-démocrates de l'Union européenne auxquels vous avez fait allusion sont des modèles à cet égard. Voilà ce que je vous demande de faire.

    Je pense qu'on reconnaît qu'un ratio dette-PIB d'environ 36 p. 100—soit le ratio actuel du Canada—est un bon objectif et nous devrions maintenant aider les Canadiens qui ont été les plus durement touchés par vos politiques budgétaires.

    Voici donc les questions que j'aimerais vous poser. Premièrement, si vous étiez un Canadien à faible revenu ou à revenu moyen ayant une hypothèque et deux ou trois enfants d'âge préscolaire ou d'âge scolaire, chercheriez-vous honnêtement à réduire ou à éliminer votre hypothèque même si vous deviez pour cela priver vos enfants d'activités sportives? Empêcheriez-vous votre fils de se joindre à l'équipe de hockey ou de participer à un voyage d'école? Cesseriez-vous d'offrir à vos enfants des petits déjeuners ou des déjeuners nutritifs? Choisiriez-vous plutôt d'éliminer votre hypothèque pour pouvoir payer leurs études plus tard même s'il est bien possible qu'ils ne poursuivent jamais d'études parce que vous aurez tué leur avenir afin de le sauver? Voilà ma première question.

    Ma deuxième question porte sur la marge de manoeuvre dont vous disposez. Vous vous êtes trompé de 80 milliards de dollars dans vos prévisions. On vous en a beaucoup parlé ce matin. Si les prévisions étaient plus exactes, ce qui serait bon du point de vue comptable, nous pourrions débattre sérieusement de nos priorités au lieu de tenir ce débat inutile sur la réduction de la dette.

    Soit dit en passant, vous avez accusé Monte Solberg de préconiser des solutions qui se rapprochent beaucoup de celles que préconisait l'ancien gouvernement de l'Ontario. J'ai plutôt l'impression que ce sont vos solutions qui se rapprochent de celles du gouvernement Ernie Eves. Vous parlez exactement comme il parlait lors de la campagne lorsqu'il s'en prenait à Paul Martin. En fait, Paul Martin et vous dites exactement la même chose : oublions les priorités en matière de développement humain et visons cet objectif absurde d'un ratio dette-PIB de 25 p. 100.

    Enfin, monsieur le ministre, permettez-moi de vous dire que vos excédents—et j'y ai fait allusion plus tôt—vous donnent une certaine marge de manoeuvre. L'excédent de l'an dernier s'élevait à 7 milliards de dollars. Vous n'êtes cependant pas encore prêt à vous engager fermement à verser aux provinces les 2 milliards de dollars au titre de la santé. Sachant que vous disposez de cette marge de manoeuvre, vous dites que vous verserez cette somme de 2 milliards de dollars si le budget affiche un excédent. Il n'y a pas de quoi se réjouir. C'est une promesse que le premier ministre a faite et vous devriez la respecter maintenant.

    Enfin, vous avez reconnu que les réductions d'impôt sont une forme de dépense. Si vous voulez accroître votre marge de manoeuvre, au lieu de réduire les dépenses de programmes, vous pourriez réduire les réductions d'impôt. L'excédent de l'an dernier s'élève à 7 milliards de dollars. Ces réductions d'impôt de 100 milliards de dollars vont vous obliger à réduire les dépenses de programmes. Pourquoi ne pas revenir sur ces réductions si vous attachez autant d'importance que vous dites aux priorités dans d'autres domaines?

    Je vous soumets ces scénarios et ces options et je vous demande d'y réfléchir.

  +-(1235)  

+-

    La présidente: Vous avez deux minutes pour donner une réponse.

+-

    M. John Manley: J'étais un Canadien dont le revenu était de faible à moyen, j'avais des enfants, et notre première hypothèque était de 14,5 p. 100. J'ai pris mon hypothèque avant que les taux n'augmentent vraiment. Vous savez quoi? J'ai décidé que nous devions tenter de réduire le plus possible notre niveau d'endettement et j'ai fait le bon choix. Et je pense que le fait que vous disiez...

+-

    Mme Judy Wasylycia-Leis: J'ai dit que si vous aviez le choix de programmes pour vos enfants, et vous en aviez peut-être les moyens.

+-

    M. John Manley: ...qu'un rapport dette-PIB de 25 p. 100 est ridicule et je suppose que vous voulez dire que ce rapport ne serait pas assez élevé. Je pense que vous devriez lancer cette idée pendant la campagne électorale. Allez-y. J'aimerais bien qu'il y ait un débat sur cette question, car les Canadiens le comprennent.

    Si M. Solberg est associé au dernier gouvernement conservateur, vous êtes associé au dernier gouvernement NPD. Les gens dans ce parti projetaient toujours que les choses allaient s'améliorer, mais ils se sont finalement fait mettre dehors car ils ne pouvaient équilibrer les livres. Je ne comprends pas pourquoi le NPD au Canada ne comprend pas que les Canadiens sont trop intelligents pour cela maintenant. Ils savent que nous devons équilibrer le budget et payer au fur et à mesure.

    Oui, ils veulent que nous fassions les bons choix entre tous les divers intérêts qui existent pour tenter d'y arriver, et c'est pour cette raison que nous avons élargi notre soutien aux enfants des familles à faible revenu. Les deux plus gros postes du budget étaient ce soutien et l'argent transféré aux provinces pour les soins de santé.

    Les gens disent que les dépenses ont beaucoup augmenté. Eh bien, elles ont un peu augmenté, mais nos dépenses de programmes se situent toujours en-dessous de 12 p. 100 du PIB. Lorsque nous sommes arrivés au pouvoir, elles étaient presque à 16 p. 100 du PIB. Je pense que c'est là un rapport beaucoup plus sain et beaucoup plus durable.

    Toutefois, je pense que l'objectif qui consiste à nous assurer de maintenir un juste équilibre commence par notre capacité de maintenir notre crédibilité auprès de ceux qui établissent les taux d'intérêt. Ce n'est pas moi et ce n'est même pas le gouvernement ni la Banque du Canada, sauf à court terme.

    Nous devons nous assurer que notre pays a la crédibilité, ce qui nous permet de faire en sorte que les gens ayant un faible revenu puissent avoir accès à des taux hypothécaires peu élevés. En janvier 2001, le taux hypothécaire était de 7,7 p. 100 pour un an. Le 22 octobre 2003, il était de 4,55 p. 100, ce qui permettait aux familles ayant un faible revenu d'économiser 2 254 $ en paiements annuels. Tout cet argent peut-être utilisé pour payer le temps de hockey et toutes les autres activités. C'est le genre de programme que nous devons je pense maintenir.

+-

    La présidente: Nous allons maintenant donner la parole à l'honorable Maria Minna, qui dispose de cinq minutes.

+-

    L'hon. Maria Minna (Beaches—East York, Lib.): Merci, madame la présidente.

    Monsieur le ministre, je vous remercie de comparaître devant notre comité aujourd'hui.

    Je voudrais tout d'abord dire que j'espère que l'excédent sera en fait plus élevé que prévu. L'an dernier, il a été plus élevé, et j'espère que cette année la situation se répétera, car cela nous donnera certainement davantage de marge de manoeuvre.

    Je suis heureuse d'apprendre l'engagement de deux milliards de dollars pour les soins de santé aux provinces. Je pense qu'on en a désespérément besoin. Je sais que cette année un certain nombre de diplômés de l'École de médecine n'arrivent pas à trouver d'emploi dans un cabinet, et c'est un problème.

    J'ajouterais certaines conditions en ce qui a trait au conseil de la santé. Je pense que les Canadiens veulent vraiment qu'il y ait responsabilisation dans les soins de santé, et le conseil de la santé serait l'organisation la plus indépendante sur le plan de la responsabilisation, à la fois devant le gouvernement du Canada et les provinces, de sorte que cela ne toucherait pas tous les paliers de gouvernement. J'espère que vous serez en mesure de faire quelque chose à cet égard.

    Je voudrais revenir quelques instants à l'excédent, tout simplement parce que je sais que nous avons des prévisions très prudentes dans une certaine mesure, et qu'il y a eu d'autres prévisions comme celles du Council for Policy Research, le contre-budget, dont les prévisions sont un peu plus près de la réalité. Si je penche un petit peu plus de ce côté, c'est tout simplement parce que, d'après ce que nous avons vu jusqu'à présent, en grande partie le rapport dette-PIB a été réduit à la suite d'une croissance économique que nous avons eue, non pas seulement en raison de la dette que nous avons remboursée. Investir dans des domaines comme la recherche, la formation, l'éducation, l'infrastructure et la santé augmenterait certainement notre croissance économique, et je pense que c'est une façon de réduire notre rapport dette-PIB. J'aimerais que nous soyons un petit peu plus optimistes de ce côté.

    Ce que je dis, c'est que je serais peut-être un peu moins prudente, pour en arriver à un excédent qui va ensuite à la dette... non pas que j'ai un problème avec cela, mais d'une certaine façon j'estime que nous ne dépensons pas dans les domaines dans lesquels nous devrions dépenser.

    Par exemple, le SRAS a été une crise majeure. Nous n'aurions pu la prévenir, mais si nous avions investi davantage auparavant dans l'infrastructure, nous aurions pu empêcher que la situation soit aussi grave.

    Ce que je voudrais savoir, monsieur le ministre, c'est si vous pourriez nous parler de l'investissement dans l'éducation, la santé, le logement et l'infrastructure, c'est-à-dire les domaines qui à mon avis stimuleraient la productivité et augmenteraient notre rendement économique, ce qui affecterait également l'attitude des gens à long terme, si on était un peu moins prudent au sujet de l'excédent.

  +-(1240)  

+-

    M. John Manley: Les secteurs prioritaires que vous avez mentionnés méritent en effet notre attention. On a entendu parler de la détérioration de l'infrastructure canadienne. On sait que les gouvernements provinciaux subissent d'énormes pressions dans les secteurs de l'éducation et des soins de santé et que nous avons un rôle direct à jouer dans cette situation. Nous connaissons également toutes les pressions qui s'exercent dans le milieu universitaire, sur l'enseignement postsecondaire, sur les universités et les collèges.

    Ce sont tous des secteurs dans lesquels il vaudrait la peine d'investir, et notre gouvernement s'en est fait le champion au cours des dernières années, en tout cas dans une certaine mesure. Nous devrions continuer à considérer ces secteurs comme prioritaires. Ils contribuent non seulement à notre qualité de vie mais aussi à notre prospérité de demain, parce qu'ils représentent des investissements dans des éléments qui génèrent une économie prospère.

    Maintenant, quant à savoir si nous sommes trop prudents de nos prédictions, on nous accuse d'être trop prudents lorsque les rajustements se font du bon côté, mais si c'est l'inverse, on nous accuse d'avoir pris les choses trop à la légère. Je l'ai déjà dit : faire des prévisions, c'est essayer de prédire l'avenir. Faut-il se satisfaire lorsqu'on est assez prêt de l'objectif, plus ou moins un certain pourcentage, ou faut-il au contraire être très strict dans la poursuite de l'objectif, comme je vous l'ai proposé aujourd'hui, et refuser quoi qu'il arrive de retomber dans un déficit?

    À mon avis, il faut faire redescendre notre ratio d'endettement par rapport au PIB à un niveau approprié, et je ne considère certes pas 25 p. 100 comme étant farfelu. Cela me semble un objectif valable, mais nous n'y parviendrons certainement pas du jour au lendemain. C'est un objectif. Mais tant que nous n'aurons pas atteint ce pourcentage, nous aurions tout intérêt à faire preuve d'excès de prudence. Ainsi, si nous étions aux prises avec divers problèmes, comme nous l'avons été cette année plus que tout ce que nous aurions pu imaginer—il y a bien une ou deux autres catastrophes qui auraient pu nous frapper, mais je ne les mentionnerai pas de crainte qu'elles ne surviennent—, nous aurions assez de marge de manoeuvre pour pouvoir réagir sans faire face de nouveau à un déficit. D'ailleurs, la faiblesse de nos taux d'intérêt et notre capacité de prévoir les coups durs à venir nous ont permis en grande partie d'atteindre cette reconnaissance internationale.

+-

    La présidente: Monsieur Wilfert, vous avez les cinq dernières minutes.

+-

    M. Bryon Wilfert (Oak Ridges, Lib.): Monsieur le ministre, je comparerais n'importe quand votre crédibilité à celle des anciens ministres des Finances de l'Ontario et du Québec.

    Votre exposé soulève chez moi quelques préoccupations. D'abord, sans vouloir entacher votre crédibilité, je m'interroge au sujet du conseil de la santé. Il semble, d'après ce que vous avez dit, que le premier ministre a écrit à ses homologues pour leur faire savoir que, à la fermeture des livres, selon ce que l'on conclura de notre capacité de payer, le gouvernement fédéral pourrait leur donner jusqu'à 2 milliards de dollars. En retour de quoi au juste?

    Les provinces qui ont déjà budgété cette somme l'ont fait en sachant pertinemment bien que, comme il est écrit dans l'accord, tout dépend de l'état de nos finances en janvier prochain. À mon avis, celles qui ont adhéré à l'entente devraient recevoir leur part, et celles qui n'y ont pas adhéré devraient voir les sommes promises remises en main tierce jusqu'à ce qu'elles y adhèrent. Qu'obtiendrons-nous en échange de cet argent? J'espère que nous ne ferons pas un chèque en blanc aux provinces.

  +-(1245)  

+-

    M. John Manley: Non, ce n'est certainement pas un chèque en blanc; mais, comme je l'ai déjà expliqué, la lettre du premier ministre souligne à quel point il est important de mettre en oeuvre l'accord pour que nous remplissions nos engagements financiers. Il y a évidemment plusieurs étapes à franchir avant que nous puissions effectuer les paiements, dont l'approbation par le Parlement, et c'est pourquoi je suis convaincu qu'on en débattra encore beaucoup; j'espère que l'une des premières conséquences de ce débat sera l'annonce de la création d'un conseil de la santé.

+-

    M. Bryon Wilfert: Monsieur le ministre, c'est en tout cas une chose que je veux dire très clairement. Je veux bien que nous travaillions en collaboration et de façon efficace avec les provinces, comme vous l'avez si bien exprimé lors de vos réunions sur la péréquation. Mais si nous devons refaire comme par le passé et continuer à verser de l'argent aux provinces sans qu'elles fassent quoi que ce soit en échange, cela m'embêterait sérieusement.

    Lorsque vous avez parlé de prudence, vous avez mentionné la réaffectation de ressources et expliqué que le gouvernement venait de lancer un examen généralisé des dépenses et un examen de la gestion dans tous les ministères, dans le contexte d'un cycle quinquennal. Vous avez parlé de chocs subis par le système, monsieur le ministre. À mon avis, le grand choc qu'a dû subir la fonction publique, ce fut de vous entendre parler très clairement de la réaffectation des ressources de un milliard de dollars—comme l'a confirmé clairement la présidente du Conseil du Trésor à la fin de septembre.

    On s'interroge souvent sur les résultats et on se demande comment on fera pour accélérer cette réaffectation des ressources et en faire un suivi réel. Puisque l'on parle d'arriver de justesse à un excédent d'à peine 300 millions de dollars—ce qui est beaucoup trop serré à mon avis—comment faire pour convaincre les Canadiens qu'il ne s'agira pas uniquement, comme vous l'avez laissé entendre, d'un exercice ponctuel et que ce rythme sera même intensifié? Comment faire pour intensifier cet examen de réaffectation et comment faire pour le rendre réel de façon à nous procurer à l'avance les sommes voulues? Comment faites-vous pour convaincre vos collègues ministres d'étudier leurs priorités sous un angle différent de ce qu'ils ont fait jusqu'à maintenant?

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    M. John Manley: Je parle pour ma part d'un changement de culture, comme celui qui a suivi l'examen des programmes. D'aucuns préféraient sans doute parler du syndrome de Stockholm, mais il s'agit plutôt d'un changement de culture. Nous avions reconnu que la crise approchait et qu'il fallait réagir en profondeur.

    Il est une chose qui, à mon avis, nous permettra d'agir : il faudra reconnaître que si nous n'acceptons pas d'examiner rigoureusement et de façon permanente nos dépenses en nous fondant sur une évaluation des nouvelles priorités, nous serons inévitablement obligés de faire un examen complet des programmes, ce qui pourrait être beaucoup plus douloureux pour les ministres et pour les fonctionnaires que l'exercice que nous avons lancé lors du dernier budget.

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    M. Bryon Wilfert: Revenons à la péréquation : je sais que vous avez tenu plus de 27 réunions très fructueuses avec les provinces et leurs représentants depuis 1999. Je sais que les provinces ont publié un document sur le raffermissement du programme de la péréquation dans lequel on propose une norme établie à partir de la capacité fiscale des dix provinces, puisque l'on sait qu'actuellement, la norme est basée sur cinq provinces, ce qui donne environ 97 p. 100 de ce qu'elle est pour les dix provinces. Puisque vous parlez des chocs que doit absorber le système, si nous devions mettre en oeuvre la norme fondée sur la capacité fiscale des dix provinces, cela pourrait coûter au trésor quelque 3 milliards de dollars.

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    M. John Manley: C'est notre chiffre estimatif à nous. Lorsque vous dites 97 p. 100, c'est 97 p. 100 si on se fie à la norme par habitant, mais si vous regardez le total, cela représente une augmentation d'environ 3 milliards de dollars pour un programme qui se situe actuellement aux environs de 10,5 milliards de dollars.

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    M. Bryon Wilfert: Autrement dit, soit il nous faut procéder à une réaffectation très poussée des ressources, soit nous n'aurons jamais les 3 milliards de dollars. Puisque vous parlez de 97 p. 100 en termes de péréquation monsieur le ministre, je crois que vous devez vous faire clairement comprendre. Néanmoins, je dois reconnaître que, d'après ce que vous avez dit dans la foulée de la rencontre avec vos homologues, il semble souffler un vent nouveau.

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    M. John Manley: Je crois que la réponse était très positive. J'ai joué de franchise avec eux. Je leur ai dit que nous n'avions pas les moyens d'accorder une augmentation de trois milliards de dollars au titre du programme de péréquation, mais j'ai précisé que nous étudiions la possibilité d'apporter de sérieux changements à la formule afin d'améliorer la stabilité et la prévisibilité du programme pour répondre à l'une de leurs préoccupations majeures.

    Nous étudions d'autres changements qui pourraient être apportés à la base de données dont nous avons discuté et qui sont de nature plutôt techniques, mais où nous pourrons faire des progrès, me semble-t-il. C'est très complexe, cependant. La base se compose de 15 éléments et toute modification à ce niveau change la répartition entre les provinces.

    C'est pourquoi, à cause du calendrier parlementaire, je leur ai proposé quelque chose qui pourrait nous permettre de continuer à faire les versements après le 31 mars, même si l'on n'avait pas encore adopté, à ce moment-là, un projet de loi qui nous permettrait de renouveler le programme de péréquation avec ces changements. C'est pour cela que vous avez devant vous un projet de loi. Il n'est pas très long; au fond, c'est une sorte de police d'assurance.

    On a averti les ministres que l'on proposait un projet de loi en leur promettant qu'il s'agissait là d'une mesure temporaire qui n'empêchera pas le renouveau du programme de péréquation accompagné de ces changements.

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    La présidente: Merci beaucoup.

    Au nom de tous nos collègues et membres du comité, nous vous remercions beaucoup monsieur le ministre Manley, ainsi que vos associés, de votre présence ici aujourd'hui.

    La séance est levée.