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FAIT Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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37e LÉGISLATURE, 2e SESSION

Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le mercredi 5 novembre 2003




¹ 1555
V         Le président (M. Bernard Patry (Pierrefonds—Dollard, Lib.))
V         M. Peter Hansen (commissaire général, Office de Secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de la Palestine dans le Proche Orient (UNRWA))

º 1600

º 1605
V         Le président
V         M. Stockwell Day (Okanagan—Coquihalla, Alliance canadienne)

º 1610
V         Le président
V         M. Peter Hansen

º 1615
V         Le président
V         M. Peter Hansen
V         Le président
V         M. Peter Hansen
V         M. Yves Rocheleau (Trois-Rivières, BQ)
V         M. Peter Hansen

º 1620
V         Le président
V         L'hon. Art Eggleton (York-Centre, Lib.)

º 1625
V         M. Peter Hansen
V         L'hon. Art Eggleton
V         M. Peter Hansen

º 1630
V         Le président
V         Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD)
V         M. Peter Hansen

º 1635
V         Le président
V         L'hon. Diane Marleau (Sudbury, Lib.)
V         M. Peter Hansen

º 1640
V         Le président
V         M. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, Alliance canadienne)
V         M. Peter Hansen

º 1645
V         Le président
V         Mme Aileen Carroll (Barrie—Simcoe—Bradford, Lib.)
V         M. Peter Hansen
V         Mme Aileen Carroll
V         M. Peter Hansen
V         Le président
V         Mme Alexa McDonough
V         M. Peter Hansen
V         Le président
V         M. Peter Hansen

º 1650
V         L'hon. Art Eggleton
V         M. Peter Hansen
V         L'hon. Art Eggleton
V         M. Maher Nasser (chef, Bureau de liaison (New York), Office de Secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de la Palestine dans le Proche Orient)
V         Le président










CANADA

Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international


NUMÉRO 056 
l
2e SESSION 
l
37e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 5 novembre 2003

[Enregistrement électronique]

¹  +(1555)  

[Traduction]

+

    Le président (M. Bernard Patry (Pierrefonds—Dollard, Lib.)): Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous poursuivons notre étude sur les relations avec des pays musulmans.

    Aujourd'hui, nous avons deux témoins de l'Office de secours et des travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient : M. Peter Hansen, commissaire-général, et M. Maher Nasser, chef du Bureau de liaison à New York. Nous leur souhaitons la bienvenue.

    Je voulais simplement signaler à mes collègues que demain matin à neuf heures nous nous retrouverons dans la salle 237-C pour accueillir M. Sampson, qui témoignera devant le comité.

    J'ai également proposé que l'avis de convocation de demain que vous avez déjà reçu soit modifié : nous nous pencherons sur les travaux du comité de 10 heures ou 10 h 30 à 10 h 45. Nous étudierons les motions de MM. Eggleton, Cotler et Martin pour ensuite adopter le rapport du Sous-comité sur le commerce international. Puis, de 11 heures à 13 heures, c'est M. Feldman qui sera notre témoin, dans la salle 253-D de l'édifice du Centre.

    Monsieur Hansen, à vous la parole. Allez-y, je vous prie.

+-

    M. Peter Hansen (commissaire général, Office de Secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de la Palestine dans le Proche Orient (UNRWA)): Merci beaucoup, et merci de me permettre de vous donner un aperçu de la situation au Moyen-Orient, région où mon organisation et moi-même nous trouvons et travaillons de notre mieux.

    Je vous parlerai tout d'abord de mon organisation car je ne sais pas dans quelle mesure vous la connaissez. C'est triste à dire, mais c'est l'une des agences humanitaires les plus anciennes au monde. Quand elle a été créée, elle ne devait durer qu'un ou deux ans, trois au plus, et pourtant nous voici quelque 50 ans plus tard. Il existe toujours une population de réfugiés, qui est d'ailleurs bien plus importante qu'elle ne l'était au début de nos activités dans les années 1950. Nous sommes maintenant responsables de l'éducation, de la santé et du bien-être de quelque 4,1 millions de réfugiés enregistrés, à savoir près de l'ensemble de la population irlandaise.

    Notre agence est unique car elle traite directement avec les réfugiés. Il existe maintenant un système scolaire qui accueille environ 500 000 élèves et quelque 6 000 étudiants en formation professionnelle. Nous avons également mis sur pied un système de soins primaires d'envergure, qui permet de soigner approximativement neuf millions de patients par année, ainsi qu'un système d'aide sociale et de bien-être qui prend en charge les plus démunis.

    Je voudrais mettre l'accent sur le fait que l'UNRWA n'assure pas la distribution générale de biens à la population de réfugiés prise dans son ensemble. Nous n'assistons socialement que les réfugiés qui ne peuvent se prendre en charge eux-mêmes. Dans des circonstances dites normales, cela va de 5 p. 100 de la population palestinienne en Jordanie à 11 p. 100 de cette même population au Liban. En période de violence et de crise, évidemment, notre charge de travail est accrue, surtout dans la bande de Gaza et en Cisjordanie, région qui ont connu, dans les trois dernières années, beaucoup de dommages matériels et humains.

    Enfin, je voudrais vous parler d'un programme d'envergure de l'UNRWA qui est relativement nouveau; il existe depuis environ huit ans. Il s'agit du programme de micro-entreprises et de micro-crédit qui est le programme le plus important en son genre et qui connaît la croissance la plus rapide au Moyen-Orient. Ce programme permet de gérer un portefeuille de près de 60 à 70 millions de dollars et on a accordé des prêts à quelque 60 000 personnes qui ont pu, grâce à cet argent, travailler et s'occuper de leur famille.

    Je voulais le signaler car un des nombreux stéréotypes qui existent au sujet de l'UNRWA veut que notre agence maintienne les réfugiés dans une situation de dépendance pour qu'ils puissent être utilisés comme pantins politiques dans le conflit du Moyen-Orient. En étudiant la nature de nos programmes, vous constaterez que c'est absolument faux. Il serait difficile de dire que le programme de micro-crédit le plus important dans la région, qui regroupe le nombre le plus important de nouveaux entrepreneurs et dont 85 p. 100 du budget est consacré aux soins de santé primaires et à l'éducation, est géré par une organisation dont le but est d'assurer la dépendance des réfugiés. C'est tout à fait l'inverse, comme bien d'autres bruits qui circulent au sujet de l'UNRWA.

    À bien des égards, nous vivons une période très difficile dans les territoires occupés. Les effets de trois ans d'Intifada se font durement sentir, tout d'abord au niveau de l'espoir qu'entretiennent les Palestiniens et les Israéliens de trouver une solution pacifique au conflit.

º  +-(1600)  

    L'économie des Palestiniens a connu une croissance rapide pendant les premières années de leur autonomie gouvernementale, leur PNB augmentant de 9 et 10 p. 100 par année jusqu'en 2000. Puis, elle s'est effondrée, catastrophe d'une ampleur presque sans précédent. À l'heure actuelle, l'économie globale palestinienne se retrouve dans le même état qu'en 1986. Nous sommes non seulement retournés en arrière et avons effacé tous les progrès accomplis après l'accord d'Oslo mais, en plus, les pertes subies nous font reculer de près de 10 ans, alors que l'économie doit maintenant faire vivre une population beaucoup plus importante.

    Tout cela se traduit par une pauvreté absolue qui a triplé depuis la fin des années 1990, époque à laquelle 20 p. 100 des Palestiniens vivaient sous le seuil de pauvreté de 2 $ par jour. Aujourd'hui, ce pourcentage s'élève à 60 p. 100. Le chômage, qui, pendant les années de progrès et d'espoir, avait régressé pour se situer entre 10 et 20 p. 100, atteint maintenant entre 35 et 50 p. 100, selon les techniques utilisées pour déterminer le taux de chômage. La malnutrition, qui avait été contenue dans les années 1950, 60 et 70 s'aggrave. D'après l'Université Johns Hopkins et la USAID, environ 25 p. 100 de la population souffrirait de malnutrition.

    Nous faisons face à une véritable explosion des besoins des réfugiés, dont les revenus ne cessent de diminuer, en grande partie en raison des restrictions imposées à la population palestinienne, qui ne peut plus se déplacer librement, par Israël pour contrer la violence palestinienne. Je répète que nous devons maintenant faire face à des besoins qui se sont considérablement accrus. Actuellement, ce n'est pas de 7 à 8 p. 100 de la population qui dépend de l'aide alimentaire de l'UNRWA, mais plutôt 50 p. 100 de la population, à savoir 1,2 million de réfugiés. Des personnes qui ne seraient pas dépendantes de ce genre d'aide dans d'autres circonstances, ou même des gens qui s'étaient sortis de cet état de dépendance, se retrouvent maintenant dans cette situation.

    Nous avons été témoins du déclin dramatique de la santé publique, de demandes accrues de services de santé et, dans les dernières semaines ou derniers mois, d'un accroissement faramineux du nombre de personnes dont les logements ont été détruits par des bulldozers, surtout dans le sud de la bande de Gaza. En octobre, quelque 200 buildings, dont certains abritaient plusieurs familles, ont été rasés et 2 000 personnes se sont retrouvées à la rue, entourées des décombres de ce qui fut leur maison. Cette statistique s'ajoute aux 12 000 personnes, au minimum, qui se retrouvent à la rue dans la bande de Gaza et aux milliers de Palestiniens maintenant sans abri en Cisjordanie.

    Il nous faut maintenant travailler de plus en plus rapidement afin de ne pas perdre du terrain. Nous avons construit 228 abris de remplacement et allons en terminer 250 bientôt, mais nous sommes incapables de soutenir le rythme de destruction. Nous avons également remarqué une certaine lassitude au sein de la communauté internationale, au sein de laquelle de plus en plus de donateurs se demandent s'ils devraient continuer à assumer les coûts de la destruction causée par l'occupation.

º  +-(1605)  

    Il est évident que dans le cas d'une telle destruction, la responsabilité est partagée. Il ne s'agit pas d'une partie qui tue et qui détruit les maisons de l'autre partie sans raison. La société israélienne est imprégnée de peur et d'insécurité. C'est une société qui, au moins pour les habitants juifs, est une démocratie et on s'attend à ce que des citoyens vivant dans une démocratie exigent de leur gouvernement et de leurs leaders protection et sécurité. On ne pourrait demander à Israël de ne pas répondre aux attaques qui ont pour cible sa population; on ne doit donc pas s'étonner qu'Israël ait recours à la violence.

    Je suppose qu'il est inconcevable que les Palestiniens n'aient pas recours à la violence sous l'occupation. Certains hésitent à utiliser le terme « cycle de violence », et pourtant, c'est ce à quoi nous faisons face, un cycle tragique qui mène à une spirale diabolique d'action violente et de réaction. Plus de 800 Israéliens et environ 2 500 Palestiniens ont été tués dans ce conflit.

    J'ajouterai que, malheureusement, le personnel de l'UNRWA figure parmi les victimes et les pourcentages, proportionnellement, sont plus élevés que pour les Palestiniens et les Israéliens. Neuf de nos employés ont perdu la vie, tous tués par les forces de défense israéliennes dans diverses circonstances. Vous vous souviendrez sans doute de ceux dont on a beaucoup parlé, comme M. Iain Hook, responsable de projet britannique qui a été tristement tué il y a environ un an alors qu'il essayait d'extraire des membres de notre personnel d'une enceinte qui avait été le théâtre d'affrontements.

    Je suis tout à fait conscient du fait que le travail effectué par l'UNRWA ne peut être qu'une solution temporaire. L'aide humanitaire ne peut nous sortir de la situation dans laquelle nous nous trouvons; seules des solutions politiques qui demandent un engagement politique beaucoup plus important des deux côtés du conflit ainsi qu'un engagement à faire des concessions difficiles pourront résoudre le conflit. M. Sharon a déclaré à maintes reprises qu'il était prêt à faire preuve de ce genre de détermination, mais nous avons constaté, tristement, que de moins en moins de personnes, des deux côtés du conflit, soutiennent ces difficiles concessions.

    Ça n'augure rien de bon pour l'avenir car, d'après moi, il n'y a pas de solution facile ou immédiate. À l'UNRWA, notre plus grand espoir, c'est qu'une solution pacifique soit bientôt en vue et que notre organisation devienne en quelques années désuète, nous permettant de fermer nos portes. Alors, nous pourrions tous quitter l'UNRWA pour rentrer chez nous n'étant plus obligés d'assumer les tâches très dangereuses qui meublent notre quotidien, jour et nuit.

    Monsieur le président, peut-être vaudrait-il mieux que j'arrête de parler de choses que vous connaissez sans doute déjà, malheureusement, pour répondre aux questions des membres du comité.

    Merci beaucoup de m'avoir donné cette occasion.

+-

    Le président: Merci beaucoup, monsieur Hansen.

    Nous allons passer aux questions immédiatement. Monsieur Day, vous avez cinq minutes, allez-y.

+-

    M. Stockwell Day (Okanagan—Coquihalla, Alliance canadienne): Merci, monsieur le président.

    Je ne voudrais certainement pas mettre en question la valeur du travail humanitaire effectuée par votre agence. Par contre, 23 000 employés, ça fait beaucoup. J'aimerais que vous m'aidiez à mieux comprendre quelques aspects.

    Je constate que 116 gouvernements financent votre organisation. Trente pour cent du financement provient des États-Unis et le Canada participe également. Par contre, les statistiques semblent indiquer qu'en 2000 l'Arabie saoudite, le Koweït et les autres Émirats du Golfe n'ont contribué qu'à hauteur de 2 p. 100 tandis que l'Égypte, l'Irak et la Syrie n'ont rien contribué du tout. Il est évident que nous n'êtes pas responsable de cette situation, mais comment s'explique-t-elle?

    Ensuite, y a-t-il un rapprochement à faire entre ce manque de financement et le manque apparent—je dis bien apparent—d'intérêt de la part des pays arabes avoisinants à accueillir leurs cousins en tant que réfugiés, ne fut-ce que comme le fait le Canada? Chaque fois qu'il y a un conflit qui éclate, le Canada s'empresse toujours d'assumer sa part. Je sais que certains réfugiés sont intégrés dans d'autres régions. Pourriez-vous nous expliquer cette situation? Je ne voudrais pas dire que ces pays laissent leurs cousins à leur triste sort, mais c'est bien l'impression que ça donne.

    De plus, on nous a déjà fait savoir que pour ce qui est de l'éducation—l'UNRWA est active à ce chapitre—certains des manuels et des programmes à l'intention des enfants arabes palestiniens sont assez anti-Israël. Nous avons vu ce matériel didactique. Est-ce quelque chose que vous avez constaté? Votre organisation est-elle en mesure d'intercepter ce genre de chose?

º  +-(1610)  

+-

    Le président: Monsieur Hansen.

+-

    M. Peter Hansen: Merci.

    Premièrement, je me sens en partie responsable du manque de participation des pays arabes parce que ça veut dire que je ne leur ai pas expliqué assez efficacement que c'est leur devoir moral et éthique que d'assumer leur part de responsabilité.

    À mon entrée en fonctions voilà huit ans, on disait que les Arabes prétendaient que le problème avait été créé par quelqu'un d'autre et que ce quelqu'un d'autre devrait donc être responsable des conséquences. Je suis heureux que les Arabes ne tiennent plus ce discours, et qu'ils pensent, comme moi, qu'on ne peut choisir quelles sont ses responsabilités internationales en disant qu'on veut bien faire face à tel ou tel problème mais pas à d'autres. Les pays membres de la Ligue arabe ont décidé que leur contribution devrait atteindre entre 7 et 8 p. 100 du budget global de l'UNRWA, mais ils en sont encore loin. Il faudrait que leur contribution quadruple pour qu'ils atteignent ce niveau.

    Lorsqu'on compare la participation des pays arabes à leur capacité, leur contribution de 2 p. 100 n'est pas aussi dérisoire qu'elle pourrait le paraître. Je me suis rendu compte que d'après les données du World Bank Atlas de la Banque mondiale, l'ensemble du revenu national brut des pays du Golfe était inférieur au revenu national brut belge. Cette découverte m'a beaucoup étonné. Je vous encourage à consulter ces statistiques.

    À partir de là, j'ai essayé de déterminer quelle serait la juste part de chaque pays donateur. Je me suis servi du meilleur outil, à savoir l'échelle de contribution des Nations Unies qui est fondée sur le principe de la capacité de payer. D'après cet outil, quatre des six pays arabes du Golfe, c'est-à-dire l'Arabie saoudite, les Émirats, le Koweït et, je pense, le Bahreïn, donnent plus que ce qui leur aurait été demandé dans le cadre d'un budget normal. Moins de la moitié des pays nord-américains et européens contribue autant. Le Canada contribue à hauteur de 80 p. 100 de la somme déterminée, ce qui est inférieur à la contribution relative de la plupart des pays arabes du Golfe. Il y a quelques années, le Canada a assumé sa pleine part, mais n'a pas pu accroître sa participation dans les trois ou quatre dernières années, phénomène qui s'explique sans doute de diverses façons et auxquelles, je l'espère, on pourra trouver une solution.

    Pour ce qui est de la liste des principaux donateurs : la Suède contribue sept fois plus que le montant établi, la Norvège, six fois plus, tout comme le Luxembourg. Mais c'est le Koweït qui se classe en quatrième position; il figure donc parmi les gros donateurs.

    Pour ce qui est des appels qui ont été faits pour obtenir une aide d'urgence, je constate que les Émirats arabes unis se sont engagés à verser 28 millions de dollars pour reconstruire le centre du camp de réfugiés de Jenin. Ce n'est pas si mal que ça; les Émirats se retrouveraient en tête de liste des donateurs d'aide d'urgence. En Syrie, on est allé chercher des dons dans les écoles, les mosquées, etc., ce qui a permis de recueillir 3 millions de dollars. Si on prend en compte le revenu moyen syrien, alors ce pays est sans doute le premier pays donateur.

    J'ai dit que je n'étais pas satisfait de la contribution des pays arabes. J'ai l'intention d'aller très prochainement sur place pour les exhorter à participer davantage, leur montrer qu'ils n'ont pas tenu leurs promesses quant à leur participation, et j'espère que je pourrai les persuader d'être plus généreux. Il est vrai que ces pays pourraient faire davantage, mais leur participation n'est pas aussi faible que ce qu'on nous ferait croire dans nos pays occidentaux, surtout quand les uns et les autres essayent de se décharger de leurs responsabilités.

º  +-(1615)  

+-

    Le président: Merci, monsieur Hansen.

    Je passe à M. Rocheleau.

+-

    M. Peter Hansen: Excusez-moi, j'ai oublié de vous parler des manuels.

+-

    Le président: Non, on ne répond pas à une deuxième question. C'était un tour de cinq minutes et nous avons déjà atteint les six minutes et demie. Désolé, c'est le Règlement.

    Nous passons à M. Rocheleau.

+-

    M. Peter Hansen: Je ne le savais pas. Excusez-moi.

[Français]

+-

    M. Yves Rocheleau (Trois-Rivières, BQ): Merci, monsieur le président.

    Merci, monsieur Hansen, pour votre action au Proche-Orient. Quand on vous entend dire que neuf de vos collaborateurs ont connu la mort, on voit combien est importante et délicate la mission que vous avez là. C'est tout à votre honneur, et il faut vous en remercier et vous féliciter.

    Ma première question porte sur les relations que votre organisme entretient avec le gouvernement israélien. On dit que neuf personnes sont décédées par l'action d'Israël. Est-ce que sont des accidents? Est-ce qu'Israël reconnaît votre action? On sait qu'Israël a des armes très sophistiquées et peut cibler des gens. Est-ce que ces gens ont connu la mort dans des accidents ou s'ils ont été ciblés?

    Deuxièmement, vous avez parlé de désespoir. J'aimerais vous entendre parler de la construction du mur et de ses effets psychologiques sur la population de la Palestine. Je suppose que le mur se prolonge peu à peu au fil des jours. Comment est-il perçu par la population et quels sont ses effets sur le moral de la population?

[Traduction]

+-

    M. Peter Hansen: Merci beaucoup.

    Je vais vous répondre très brièvement à propos de nos relations avec les Israéliens en vous disant que je crois effectivement que le gouvernement israélien reconnaît notre présence. En fait, le gouvernement israélien a dit et répété maintes et maintes fois à quel point le rôle de l'UNRWA était indispensable pour apporter une aide humanitaire. Beaucoup de nos détracteurs reconnaissent que l'UNRWA est indispensable pour assumer une bonne partie du fardeau et du coût de l'occupation. Nous ne considérons pas que nous aidons un camp politique ou un autre, simplement nous aidons les victimes du conflit et le gouvernement israélien a reconnu notre action à ce titre.

    Nous souhaiterions cependant que ce même gouvernement israélien nous laisse fonctionner sur le terrain dans de bien meilleures conditions. Nous aimerions qu'on donne à nos ambulances la priorité qu'elles devraient avoir. Toutes nos ambulances ont été atteintes à un moment donné par des balles israéliennes. L'un de nos chauffeurs d'ambulance a été tué, et il était l'un des neuf tués en service. Nous avons subi de nombreux retards dans la livraison d'aide humanitaire et nous discutons constamment avec le gouvernement israélien pour lui demander de faciliter nos activités, de nous laisser faire notre travail comme nous sommes censés le faire, et Israël s'est engagé à nous aider à le faire.

    Le mur—et je vais essayer d'accélérer—est un coup terrible pour l'économie palestinienne. Il faudrait dire le mur, la barrière ou la barrière de séparation car les termes « mur » et « barrière » n'ont pas la même connotation. Par endroits, c'est un mur très haut, de 28 pieds de haut. C'est deux ou trois fois la hauteur du mur de Berlin à l'époque, puisque c'est ce mur qu'on évoque souvent dans ce cas.

    Pour une ville comme Qalqilya, c'est particulièrement tragique parce que cette ville voulait devenir un lieu de rencontre entre Arabes et Juifs, un lieu d'échange et de contact culturel, etc. Cette ville est aujourd'hui entourée d'un mur de 28 pieds de haut avec des barbelés par endroits. Il n'y a qu'un unique point d'entrée et de sortie de Qalqilya. La ville est complètement coupée de l'extérieur et quand on se promène dans la rue principale aujourd'hui, on ne voit plus à la place de ce qui était un marché plein d'animation que des fenêtres fermées par des volets et des barrières de protection en métal ou autre.

    Ce qui inquiète les habitants de Qalqilya en particulier, c'est qu'ils n'ont aucune perspective d'avenir dans une ville ainsi étouffée matériellement et économiquement. La population de la ville, qui était de 42 000 habitants avant l'érection du mur est maintenant tombée—d'après le maire, qui m'a donné ces chiffres—à environ 37 000 habitants et ce déclin se poursuit. Cela veut dire que Qalqilya est en train, sinon de se dépeupler complètement, du moins de perdre une grande partie de sa population. Où vont ces gens, que font-ils, ce sont de graves questions.

    La situation de Qalqilya laisse mal augurer aux Palestiniens des conséquences du mur. S'il avait été construit sur la ligne verte, de nombreux Palestiniens l'auraient bien accueilli en tant que dispositif de séparation, mais il a été construit à l'intérieur de la Cisjordanie et apparemment planifié de manière à permettre à Israël de s'emparer de vastes régions de la Cisjordanie. Environ 200 000 personnes vivent dans un no man's land, dont 13 000 réfugiés qui ne peuvent ni aller en Israël, ni retourner en Cisjordanie, et n'ont littéralement aucun statut.

º  +-(1620)  

+-

    Le président: Merci.

    Monsieur Eggleton.

+-

    L'hon. Art Eggleton (York-Centre, Lib.): Monsieur Hansen, merci d'être venu nous rencontrer aujourd'hui et merci pour tout ce que fait l'UNRWA pour la santé, le bien-être et l'éducation des réfugiés palestiniens.

    Je crois savoir que, bien que leur situation ne soit pas brillante, évidemment, puisqu'ils sont dans des camps de réfugiés, beaucoup d'entre eux vivent néanmoins mieux que certaines personnes des quartiers qui les entourent.

    Mais ce qui me préoccupe, c'est d'entendre dire que ces camps sont en train de devenir des pépinières de terroristes. Si c'est le cas, on comprend les interventions fréquentes des forces de défense israéliennes et l'existence des conflits qui vous préoccupent. Par exemple, il semble qu'une majorité de vos employés—si je comprends bien, vous avez 23 000 employés, comme l'a dit M. Day—sont des Palestiniens qui peuvent être des réfugiés eux-mêmes. Ils ont un syndicat ou des syndicats et l'un d'entre eux, un bloc islamique affilié au Hamas, a obtenu haut la main les postes de direction du syndicat, semble-t-il. Il y a 8 000 commis et enseignants et les représentants des secteurs des services et des travailleurs ont remporté 23 des 27 sièges lors de l'élection de l'été dernier. Dans le secteur de l'enseignement, ils ont apparemment remporté la majorité dans la région de Gaza et ailleurs.

    D'après un texte publié par un pays arabe, les écoles de l'UNRWA sont des pépinières de candidats aux attentats-suicides. On ajoute dans cet article que la majorité de ces auteurs d'attentats-suicides en Palestine sont des diplômés des écoles de l'UNRWA nés dans les camps de réfugiés de la Cisjordanie et de Gaza, qui sont sous la responsabilité de l'UNRWA, et que ce sont les slogans anti-israéliens et l'éducation qu'on donne à ces étudiants qui les amènent à se transformer en bombes à retardement.

    Sur le site Web du Hamas, on parle d'une conférence dans une école d'un de vos camps de réfugiés où l'un des dirigeants du Hamas a dit aux étudiants du secondaire qu'ils étaient «la génération de la libération et de la victoire... et que l'ennemi sioniste voulait [les] écraser et [les] obliger à renoncer à la Palestine», et que le Hamas n'accepterait jamais cela. Un autre dirigeant a fait l'éloge de certains diplômés qui avaient perpétré des attentats-suicides contre Israël.

    Naturellement, comme l'a dit M. Day, d'après ce que nous constatons et ce qu'on nous dit, les manuels scolaires ne répondent pas aux normes d'enseignement de l'UNESCO. En fait, ils ne contribuent en aucune façon à combler les écarts, mais encouragent au contraire ce genre de terrorisme en glorifiant les attentats-suicides lancés à partir de ces camps.

    Or, le Canada appuie financièrement l'UNRWA, mais en même temps il a décrété que le Hamas était illégal parce que c'était une organisation terroriste. Pourquoi devrions-nous continuer à appuyer l'UNRWA si cet organisme doit aider le Hamas à avoir ce genre de contrôle et à créer ces pépinières de terroristes dans ces camps?

º  +-(1625)  

+-

    M. Peter Hansen: Si c'était le cas, vous pourriez effectivement vous poser la question, mais je vais essayer de vous répondre. Premièrement, les camps sont-ils des pépinières de terroristes? Si je voulais créer un laboratoire, une pépinière de terroristes, je commencerais par créer les conditions d'habitat pitoyables qu'on trouve dans ces camps. Ils sont isolés. De par leur environnement même, ils ne peuvent susciter que la haine et l'amertume. J'en suis douloureusement conscient, et vous le seriez aussi si vous alliez visiter quelques-uns de ces camps.

    Que fait l'UNRWA face à cela? Eh bien, nous n'avons pas de pouvoirs civils dans ces camps. Nous n'avons pas de police. Tout ce que nous avons, ce sont les écoles et les cliniques où nous assurons ces services.

    Les gens qui travaillent au sein de nos rangs ont le droit d'élire leurs représentants, mais j'ai le regret de vous décevoir : aucune de ces élections n'est organisée sous le contrôle d'une faction unique ou d'une bannière de parti quelconque. La notion de candidat du Hamas n'existe pas, et j'invite n'importe quel universitaire ou chercheur à aller voir sur place s'il peut trouver la moindre trace d'un représentant de notre personnel qui se serait présenté au nom du Hamas, du Jihad, du Fatah ou de quelque autre cause.

+-

    L'hon. Art Eggleton: C'était une organisation affiliée.

+-

    M. Peter Hansen: Affiliée. Ils ne sont pas non plus les candidats d'organisations affiliées.

    À l'occasion, lorsqu'ils ont été élus candidats indépendants, sans adopter le programme électoral d'un parti organisé, il set arrivé que les journaux locaux publient des annonces provenant du Hamas ou d'organisations affiliées félicitant ces candidats. C'est probablement ce qui pousse certains à conclure qu'ils sont des candidats du Hamas. Mais ce n'est pas garanti.

    Je ne peux pas garantir non plus que certains professeurs ne sympathisent pas avec le Hamas. Nous ne sommes pas une police politique ou un parti qui essaie de contrôler les pensées de ses membres. Ce que j'ai fait, et en fait nos professeurs et d'autres intervenants m'ont accusé de limiter leur liberté d'expression, c'est de leur rappeler sans cesse qu'ils sont des employés de l'ONU et qu'à ce titre ils doivent respecter les normes que le public est en droit de s'attendre des employés de l'ONU en matière d'impartialité, de non-partisanerie et de non-participation à tout événement qui pourrait jeter le discrédit sur l'ONU ou—si vos renseignements sont exacts—pourrait permettre à certaines personnes de porter des accusations contre l'UNRWA.

    La conférence dont vous avez parlé a eu lieu dans une école de l'UNRWA, mais n'était pas un événement organisé par nous, et un des professeurs a félicité les étudiants de leur travail. Nous n'avons pas pu trouver de témoin qui puisse confirmer ce que vous avez dit, et je me suis penché sur cette question parce que si cela avait été vrai, cela aurait été une situation fort grave et nous aurions dû agir. Cependant, notre enquête, notre recherche de témoins, la recherche dans les dossiers publics pour comprendre comment les journaux en étaient venus à parler de cette réunion ont confirmé que cela n'a simplement pas eu lieu. Ces commentaires n'ont pas été faits, il n'y a pas eu d'événement organisé par le Hamas dans cette école, alors il y a tout un écart entre ce qui est dit par les sources que vous employez et les faits, ou les faits tels qu'on peut les vérifier. J'invite quiconque voudrait aller vérifier ces choses à le faire.

    Pour ce qui est des slogans dans les écoles, encore une fois, nous avons eu nombre de visiteurs et ils confirmeront qu'il n'y a pas de slogans ou d'affiches dans les écoles. Peut-être certains étudiants les apportent-ils et les mettent-ils à l'extérieur de l'établissement parce qu'ils sont révoltés face à ce qu'a vécu leur famille, le fait qu'on a détruit leur maison, des choses du genre, mais on les enlève par la suite. Il y a un groupe qui visite sans cesse tous les établissements pour s'assurer qu'il n'y a pas de message politique.

º  +-(1630)  

+-

    Le président: Merci.

    Madame McDonough.

+-

    Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Merci, monsieur le président. J'aimerais d'abord souhaiter la bienvenue à nos invités et dire que je suis très heureuse d'avoir cette occasion d'exprimer mon appréciation pour le travail herculéen et héroïque que fait l'UNRWA dans des circonstances absolument épouvantables.

    J'ai été très troublée par la question qu'a soulevée mon collègue d'en face, mais je suis heureuse aussi qu'il l'ait fait parce que je crois que ça vous a donné l'occasion rêvée de réfuter ces allégations. Je m'inquiète de ce qui semble être une campagne relativement systématique de mésinformation provenant de sources non identifiées, d'accusations provenant de personnes qui restent dans l'anonymat à l'égard de choses qui supposément se produisent. J'ai visité un certain nombre de camps de réfugiés, j'ai visité le quartier général de l'UNRWA et j'ai posé beaucoup de questions sur ce genre d'accusations qui circulent sans cesse et je n'ai rien vu ou entendu qui puisse confirmer de telles accusations. Je sais que les cyniques diront qu'on ne m'a amenée qu'aux meilleurs endroits. Si c'est le cas, il est alors absolument impossible de répondre à ceux qui lancent des accusations si ces sources sont anonymes!

    Je voulais vous parler de mon expérience puis vous inviter à faire des commentaires sur cette situation; j'ai visité cette région pendant deux semaines et j'ai vu nombre de programmes destinés aux femmes et aux enfants tout particulièrement pour les encourager à retrouver l'espoir, le respect de soi et trouver des perspectives d'avenir. J'ai été tout particulièrement impressionnée par les programmes qui semblent viser à stimuler la créativité des enfants. Tout compte fait, je suppose que la seule façon de régler ces problèmes c'est d'aider les résidents de la région à retrouver leur estime de soi, à exprimer leur créativité de sorte qu'ils puissent trouver des solutions politiques à ces problèmes.

    J'aimerais vous poser une question bien précise. En réponse à ces accusations de gens qui disent qu'on retrouverait dans les écoles de l'UNRWA du matériel qui incite à la haine, pourriez-vous nous décrire brièvement ces écoles en territoire occupé. En d'autres termes, combien d'écoles sont parrainées par l'UNRWA, combien d'écoles le sont par l'autorité palestinienne et combien d'écoles sont des établissements privés, s'il en est, des écoles qui pourraient être en fait subventionnées par un groupe religieux particulier.

+-

    M. Peter Hansen: Merci.

    Je dois signaler d'entrée de jeu qu'on retrouve dans certains manuels scolaires des choses qui ne devraient certainement pas s'y trouver. Vous savez, je viens du Danemark. Quand j'étais jeune il y a eu toute une polémique après la guerre au sujet des Allemands et de ce qu'on devrait dire dans les manuels scolaires, et beaucoup de choses ont été supprimées. Beaucoup de choses ont été dites sur les Arabes dans les manuels israéliens, il y a beaucoup de choses qui n'auraient pas dû être dites sur les juifs dans les manuels scolaires égyptiens, dans les manuels syriens et dans d'autres livres.

    Au cours des dernières décennies, l'État d'Israël a beaucoup fait pour épurer sa loi sur les manuels scolaires, comme l'ont d'ailleurs fait plusieurs pays européens. Au cours des dernières années, les manuels scolaires arabes ont changé de façon radicale et fondamentale, tout particulièrement depuis la signature du traité de paix avec l'Égypte; même les manuels égyptiens ont été épurés. Quant à l'autorité palestinienne, elle a fait quelque chose d'absolument unique dans l'histoire du monde; en effet un pays occupé... Je peux vous garantir que cela ne se serait pas produit au Danemark, étant donnée l'occupation allemande, que nous n'aurions certainement pas changé le manuel scolaire après la guerre et après l'occupation de la façon qu'ils l'ont fait en Palestine.

    Ils ont un nouveau programme d'enseignement et, au dire de chercheurs américains qui ont visité la région, ont étudié le programme et ont rédigé des rapports et des ouvrages à ce sujet... pas le CMIP mais le professeur Nathan Brown, par exemple, dont les conclusions pourraient vous intéresser. Je vais vous en faire part. Tout d'abord, il dit qu'au lieu d'accuser les Palestiniens d'incitation à la haine, nous devrions les féliciter d'avoir produit un programme de cours où l'on ne retrouve aucune incitation ni haine. Les enfants palestiniens sont témoins de l'humiliation de leurs familles à des postes de contrôle tous les jours et certains ont vu des bulldozers détruire leurs maisons ou celles de leurs amis.

    S'il y a une certaine rancune à l'égard des Israéliens, je peux vous assurer que les enfants n'ont pas eu besoin de l'apprendre dans les manuels scolaires. Cette rancune vient malheureusement beaucoup trop naturellement, de ce que vivent ces enfants tous les jours. L'autorité palestinienne a fait quelque chose d'absolument remarquable en épurant de cette façon ses textes scolaires alors que son territoire est toujours occupé.

    M. Brown, qui est professeur juif américain, a vécu à Tel Aviv avec sa famille et ses enfants ont fréquenté une école israélienne. Il a écrit dans l'un de ses ouvrages que ce que ses enfants apprenaient à leur école de Tel Aviv était tout aussi regrettable que ce qu'on trouvait dans les ouvrages palestiniens ou jordaniens avant qu'ils ne soient épurés.

    À mon avis, ce n'est pas là une question bien tranchée qui ne se pose que dans le cas de l'État d'Israël ou de la Palestine. Il y a des problèmes avec les manuels scolaires dans le monde entier, et je ne vois pas pourquoi on cible particulièrement ce pays. Je crois qu'il faudrait être encouragé par les extraordinaires progrès qui ont été faits, et espérer qu'ils se poursuivront. Cela ne donne absolument rien d'avoir un camp qui accuse l'autre d'inciter à la haine.

    C'est nous, à l'UNRWA, qui avons produit tous ces documents pour le CMIP, parce que nous avions cru les motifs de ce centre, soit qu'il voulait faire la promotion d'une compréhension mutuelle. Je ne crois plus que c'était le but, après avoir lu les rapports du CMIP. Je crois que l'objectif du CMIP était de démontrer qu'on ne peut pas faire confiance aux Palestiniens. C'est le CMIP—je m'excuse, il s'agit du Center for Monitoring the Impact of Peace—qui a effectué les « études » des manuels scolaires qui démontrent que les écoles arabes et palestiniennes sont toutes mauvaises et que toutes les écoles israéliennes sont très bonnes.

    Il est vrai que les écoles israéliennes sont bonnes, tout particulièrement les écoles neutres, quoiqu'on ne peut pas en dire autant des écoles religieuses et orthodoxes. Les écoles neutres ont fait beaucoup de progrès, mais il en va de même pour les écoles palestiniennes, et ces dernières accusaient tout un retard. Il faut quand même reconnaître que les Palestiniens ont travaillé très fort et qu'ils ont réalisé des progrès remarquables.

º  +-(1635)  

+-

    Le président: Madame Marleau.

+-

    L'hon. Diane Marleau (Sudbury, Lib.): Je vous remercie d'être venus nous rencontrer parce que je suis d'avis que nous n'entendons pas suffisamment parler de la situation critique que vivent les Palestiniens.

    Comme vous le savez, j'ai eu l'occasion de visiter des camps de réfugiés et nombre des régions que vous avez mentionnées, et j'ai fait ce voyage à une époque relativement paisible. Je dois vous dire qu'après avoir voyagé dans les pays les plus pauvres du monde, j'ai franchement eu honte de voir la condition des camps. J'avais honte du fait que nous, en Amérique du Nord, les gens les plus riches, nous pouvions accepter ce genre de situation, et pouvions être si inconscients de la pauvreté qui y règne. C'était en 1998 ou en 1999. Je ne me souviens plus très bien. C'était seulement une observation.

    J'ai également été frappée lors de mon voyage par le fait que la population était très jeune et qu'elle connaissait un taux d'alphabétisation très élevé. Combien y a-t-il d'habitants dans la région aujourd'hui? Quel taux d'alphabétisation? Quels sont les débouchés des jeunes qui sont instruits? Que pouvons-nous faire dans cette période très difficile? Il ne suffit pas de simplement vous donner les mêmes montants d'argent que vous aviez auparavant parce que les besoins sont beaucoup plus importants. Peut-être pourriez-vous nous en dire un peu plus long.

+-

    M. Peter Hansen: Pour ce qui est de l'alphabétisation et du nombre de jeunes en Palestine, la moitié de la population est âgée de moins de 17 ans. Il s'agit donc d'une classe très importante. Fort heureusement, les jeunes sont éduqués. Ils peuvent, s'ils ont les occasions voulues, devenir des citoyens productifs dans une société qui, nous l'espérons, pourra bientôt vivre en paix avec leurs cousins, comme on les appelle, de l'autre côté. Je crois que nous avons beaucoup fait pour leur permettre d'avoir un avenir prometteur.

    Quant aux programmes scolaires de l'UNRWA, je désire signaler que nous ne suivons pas passivement les programmes de cours établis par d'autres. Nous nous en inspirons au départ, mais nous les améliorons et donnons des cours par exemple sur la tolérance, les droits de la personne et le règlement pacifique des différends. Nous ajoutons aussi au programme de cours d'autres éléments qui permettront d'assurer non seulement leur alphabétisation mais qui leur enseignera la tolérance et la compréhension de l'autre. Nous avons envoyé nos enfants dans des écoles que fréquentent des enfants israéliens si possible pour qu'ils puissent vivre ensemble et puissent se voir les uns les autres comme des êtres humains. Je regrette que la situation actuelle augure mal pour l'avenir de ces programmes, mais tout au moins nous avons fait l'effort et nous continuerons.

º  +-(1640)  

+-

    Le président: Monsieur Martin.

+-

    M. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, Alliance canadienne): Merci, monsieur Hansen et monsieur Nasser d'être venus nous rencontrer aujourd'hui. Nous vous en sommes fort reconnaissants.

    Il y a deux semaines, M. Patry, M. Cotler et moi étions en Cisjordanie. Nous sommes allés à Ramallah et à Hébron et avons marché jusqu'aux tombeaux des patriarches. La polarisation croissante des deux parties nous a profondément attristés. Tout semble indiquer que les radicaux, si je peux m'exprimer ainsi, ou les extrémistes des deux côtés semblent avoir gain de cause.

    Je ne vous demanderai pas de répondre à mes deux premières questions dès maintenant, mais si vous le voulez bien, vous pourrez faire parvenir vos réponses au président. Connaissez-vous le taux de mortalité maternelle et infantile dans les camps? Combien de réfugiés vivent dans ces camps? Je vous serais reconnaissant de nous faire parvenir ces renseignements lorsque vous rentrerez chez vous.

    Voici la question à laquelle j'aimerais que vous répondiez maintenant : que pouvons-nous faire afin de réduire les tensions entre les deux parties pour encourager les modérés pour qu'ils puissent insister sur une résolution pacifique de ce différend dont on a désespérément besoin? Compte tenu de votre expérience, quelles solutions spécifiques pourriez-vous proposer et quel rôle le Canada pourrait-il jouer?

    Enfin, pouvez-vous nous dire combien de maisons ont été détruites? S'agit-il de maisons qui abritaient réellement des gens qui fabriquaient des bombes et qui étaient sur le point d'attaquer Israël?

    Merci.

+-

    M. Peter Hansen: Merci beaucoup.

    Nous vous ferons parvenir les renseignements sur les taux de mortalité infantile.

    Je suis d'accord avec vous, et je crois que je l'ai signalé dans mes commentaires liminaires, ce qui est regrettable dans la situation actuelle c'est que les propositions positives qui sont formulées par la société civile semblent être appuyées par un nombre toujours moins grand d'intervenants simplement en raison de la radicalisation des deux camps. Je crois que la seule façon d'accomplir quoi que ce soit est d'appuyer ce genre de propositions et d'encourager les parties à en tenir compte sérieusement. Les propositions du général Ayalon d'Israël et de Sari Nusseibeh et la proposition de Yossi Beilin sont toutes à mon avis courageuses. Ces propositions font ressortir quelles devraient être les solutions.

    Nous le savons tous, mais les intervenants ont besoin de l'encouragement de la communauté internationale. Il serait bon par exemple que diminue une bonne partie de la violence excessive qui caractérise la lutte contre la violence palestinienne, ce qui à mon avis est une réaction disproportionnée contre le peuple palestinien de la part des forces de défense israéliennes. Nous avons même vu, je l'ai vu dans les rapports des médias lors de mes déplacements, le chef d'état-major de l'armée israélienne dire que ce genre d'intervention tactique à court terme, ce recours à une force disproportionnée, nuit aux intérêts stratégiques à long terme d'Israël. Je suis d'avis que ces mesures poussent un plus grand nombre d'intervenants à devenir des bombes humaines que le matériel des manuels scolaires qui viseraient à endoctriner les enfants, si c'était le cas.

    Je ne sais pas si une ou deux des maisons détruites étaient utilisées pour fabriquer des bombes. Je ne peux pas exclure la possibilité que des bombes y étaient fabriquées. En fait, je sais très bien qu'à Jenin il y a eu des bombes qui ont été fabriquées dans plusieurs des maisons qui ont été détruites. C'est un fait, mais la puissance de feu employée par un camp contre l'autre était définitivement disproportionnée.

    Si vous voulez trouver des tunnels et les détruire—comme ça c'est fait en Russie—je ne pense pas que la façon la plus efficace d'y parvenir, au point de vue militaire, soit d'envoyer des missiles à partir d'hélicoptères de combat dans des régions civiles très peuplées et détruire 200 maisons alors que ces tunnels aboutissaient à trois maisons. On aurait pu procéder à des attaques beaucoup plus ciblées, à mon avis, ce qui aurait pu épargner bien des morts et de la souffrance et on aurait aussi évité la radicalisation qui a suivi ces attaques.

º  +-(1645)  

+-

    Le président: Merci.

    Madame Carroll, vous pouvez poser une question.

+-

    Mme Aileen Carroll (Barrie—Simcoe—Bradford, Lib.): Puisque je suis la dernière intervenante, monsieur Hansen, je suis heureuse de vous céder le temps qui m'était réservé. Pourquoi ne profitez-vous pas de cette occasion pour nous en dire plus?

+-

    M. Peter Hansen: Merci beaucoup.

    Je dois relire mes notes et voir si j'ai donné des réponses trop brèves à vos questions puisque je ne connaissais pas vraiment votre façon de procéder.

    J'ai dit ce que je pensais des manuels scolaires. J'espère que nous pourrons obtenir les ressources et l'aide nécessaires pour continuer à fournir du matériel extrascolaire afin de renforcer les parties de notre programme qui visent à renseigner les étudiants sur les droits de la personne et sur la tolérance. J'espère que vous et d'autres intervenants, lorsque vous visiterez la région, verrez certaines des choses qui sont faites à l'école, les exercices et les jeux que font les enfants sur les droits de la personne et sur la compréhension des autres. J'espère qu'on pourra renforcer ces activités.

    J'espère également qu'en leur fournissant un plus grand nombre d'abris, nous pourrons diminuer la souffrance des résidents de la région; j'espère également que nous pourrons un jour cesser de mettre à pied nos experts en traumatismes psychologiques; ils font un travail très important dans nos écoles mais malheureusement, faute de financement, ils ne peuvent pas travailler aussi souvent avec les enfants que nous l'aurions voulu.

    Je vous remercie de m'avoir offert cette occasion de vous donner de plus amples détails sur la situation.

+-

    Mme Aileen Carroll: Je pense que je vous ai pris un peu au dépourvu en vous posant cette question et je crains que vous vous sentiez limité encore une fois par les règles du comité. Nous voulions entendre vos commentaires ainsi que ceux de M. Nasser. Je vous remercie.

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    M. Peter Hansen: Merci.

+-

    Le président: Madame McDonough.

+-

    Mme Alexa McDonough: Monsieur le président, j'aimerais poser deux petites questions. La première porte en fait sur un rappel au Règlement; je me demande si on pourrait demander à nos témoins de rester un peu plus longtemps s'il y a d'autres questions, parce que tous les députés n'ont pas eu l'occasion d'intervenir.

    De plus, pour ce qui est des documents produits par M. Nathan Brown, je me demande si nos témoins pourraient nous laisser les coordonnées ou, si ce n'était pas possible, les faire parvenir au président ou au greffier.

+-

    M. Peter Hansen: Je vous ferai parvenir ces renseignements si vous ne les avez pas déjà; un certain nombre de projets de recherche ont été réalisés par des spécialistes israéliens et ont fait ressortir à peu près les mêmes choses que Nathan Brown.

+-

    Le président: Puis-je vous demander de faire parvenir ces renseignements au greffier, s'il vous plaît?

+-

    M. Peter Hansen: Oui, si nous nous procurons ses coordonnées.

    J'aimerais également vous faire parvenir des renseignements sur ce qu'une institution israélo-palestinienne reconnue, le Centre de recherche et d'information israélo-palestinien, l'IPCRI, a fait avec ces manuels scolaires. Cela a été fait grâce à un apport financier des États-Unis afin d'obtenir l'opinion d'un tiers parti neutre sur la question des manuels scolaires. Cette institution, jugée impartiale et objective par le gouvernement américain, a conclu qu'il n'existait aucune incitation à la haine ou de choses du genre contrairement aux sources de M. Eggleton.

º  -(1650)  

+-

    L'hon. Art Eggleton: Il s'agissait de sources arabes. J'ai cité des publications arabes.

+-

    M. Peter Hansen: Si on pouvait nous dire les noms...

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    L'hon. Art Eggleton: En fait, plusieurs d'entre elles mentionnaient le Hamas.

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    M. Maher Nasser (chef, Bureau de liaison (New York), Office de Secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de la Palestine dans le Proche Orient): En fait, le rapport de l'IPCRI est accessible sur le site Internet du consulat américain à Jérusalem, parce que ce sont les Américains qui ont financé cette étude.

    L'article dont vous avez parlé qui disait que les écoles de l'UNRWA étaient des pépinières de terroristes provient d'un journal appelé Al Bayan, journal des Émirats arabes unis. J'ai lu le texte entier de cet article. Cet article couvre environ cinq pages, et est surtout une attaque contre l'UNRWA en raison de la déclaration qu'a faite M. Hansen au mois de juin lorsqu'il a rappelé aux employés qu'ils devaient être neutres, leur rappelant leurs responsabilités à titre d'employés des Nations Unies. Ce rappel de M. Hansen avait été fait à la suite de propos injurieux visant l'UNRWA, car on accusait les écoles de l'Office d'être des pépinières de terroristes, et tous ses commentaires ont été interprétés hors contexte. Je connais la source de cet article, et c'est justement d'où viennent les autres citations. J'ai la version arabe de cet article, et si vous traduisez le texte, vous constaterez qu'il n'appuie pas en fait l'argument qui a été présenté.

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    Le président: Merci beaucoup.

    Merci, messieurs Hansen et Nasser, d'avoir rencontré notre comité cet après-midi. Bonne soirée.

    J'aimerais rappeler à mes collègues que le comité se réunira demain matin à 9 heures pour rencontrer M. Sampson. Puis de 10 heures à 10 h 30, nous étudierons trois motions, puis à 11 heures nous rencontrerons M. Feldman.

    Merci beaucoup.

    La séance est levée.