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AANR Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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37e LÉGISLATURE, 2e SESSION

Comité permanent des affaires autochtones, du développement du Grand Nord et des ressources naturelles


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le mardi 28 janvier 2003




À 1005
V         Le président (M. Raymond Bonin (Nickel Belt, Lib.))
V         Chef Matthew Coon Come (chef national, Assemblée des Premières Nations)

À 1010

À 1015

À 1020

À 1025

À 1030
V         Vice-chef Ghislain Picard (Assemblée des Premières Nations)

À 1035

À 1040

À 1045
V         Chef Matthew Coon Come

À 1050

À 1055
V         Le président
V         M. Brian Pallister (Portage—Lisgar, Alliance canadienne)
V         Chef Matthew Coon Come
V         M. Brian Pallister
V         Chef Matthew Coon Come
V         M. Brian Pallister
V         Chef Matthew Coon Come
V         M. Brian Pallister
V         Chef Matthew Coon Come
V         Le président
V         M. Brian Pallister

Á 1100
V         Le président
V         M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe—Bagot, BQ)
V         Vice-chef Ghislain Picard
V         M. Yvan Loubier
V         Le président
V         Vice-chef Ghislain Picard
V         Le président
V         M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD)

Á 1105
V         Chef Matthew Coon Come
V         Le président
V         M. John Godfrey (Don Valley-Ouest, Lib.)
V         Chef Matthew Coon Come

Á 1110
V         M. John Godfrey
V         Le président
V         M. Brian Pallister
V         Chef Matthew Coon Come
V         M. Brian Pallister
V         Chef Matthew Coon Come
V         M. Brian Pallister
V         Chef Matthew Coon Come
V         Le président
V         M. Yvan Loubier
V         Vice-chef Ghislain Picard
V         M. Yvan Loubier
V         Vice-chef Ghislain Picard
V         Le président

Á 1115
V         M. Pat Martin
V         Chef Matthew Coon Come
V         M. Pat Martin
V         Chef Matthew Coon Come
V         Le président
V         Mme Nancy Karetak-Lindell (Nunavut, Lib.)
V         Chef Matthew Coon Come

Á 1120
V         Le président
V         M. Charles Hubbard (Miramichi, Lib.)
V         Chef Matthew Coon Come
V         M. Charles Hubbard
V         Chef Matthew Coon Come
V         M. Charles Hubbard
V         Chef Matthew Coon Come
V         Le président

Á 1125
V         Chef Matthew Coon Come
V         Le président

Á 1130
V         Mme Sheila Fraser (vérificatrice générale du Canada, Bureau du vérificateur général )

Á 1135
V         Le président
V         M. Brian Pallister

Á 1140
V         Mme Sheila Fraser
V         M. Brian Pallister
V         Mme Sheila Fraser
V         M. Brian Pallister
V         M. Jerome Berthelette (directeur principal, Bureau du vérificateur général )

Á 1145
V         M. Brian Pallister
V         M. Jerome Berthelette
V         M. Brian Pallister
V         M. Jerome Berthelette
V         M. Brian Pallister
V         M. Jerome Berthelette
V         M. Brian Pallister
V         Le président
V         M. Yvan Loubier
V         Mme Sheila Fraser
V         M. Yvan Loubier
V         Mme Sheila Fraser
V         M. Yvan Loubier
V         Mme Sheila Fraser
V         M. Yvan Loubier
V         Mme Sheila Fraser

Á 1150
V         M. Yvan Loubier
V         Mme Sheila Fraser
V         M. Yvan Loubier
V         Mme Sheila Fraser
V         M. Yvan Loubier
V         Le président
V         Mme Bev Desjarlais (Churchill, NPD)
V         Mme Sheila Fraser
V         Mme Bev Desjarlais
V         Mme Sheila Fraser
V         Mme Bev Desjarlais
V         Mme Sheila Fraser

Á 1155
V         Mme Bev Desjarlais
V         Mme Sheila Fraser
V         Le président
V         M. John Godfrey
V         Mme Sheila Fraser
V         Mme Maria Barrados (vérificatrice générale adjointe, Bureau du vérificateur général )

 1200
V         M. John Godfrey
V         Mme Maria Barrados
V         M. John Godfrey
V         Mme Maria Barrados
V         Le président
V         M. Brian Pallister
V         Mme Sheila Fraser
V         M. Brian Pallister
V         Mme Sheila Fraser
V         M. Brian Pallister
V         Mme Sheila Fraser
V         M. Brian Pallister
V         Le président
V         M. Brian Pallister

 1205
V         Mme Sheila Fraser
V         M. Brian Pallister
V         Mme Sheila Fraser
V         M. Brian Pallister
V         Le président
V         Mme Nancy Karetak-Lindell
V         Mme Sheila Fraser
V         Mme Nancy Karetak-Lindell
V         Le président
V         M. Yvan Loubier

 1210
V         Mme Sheila Fraser
V         M. Yvan Loubier
V         Mme Sheila Fraser
V         Le président
V         M. John Godfrey
V         Mme Sheila Fraser

 1215
V         M. John Godfrey
V         Le président
V         Mme Bev Desjarlais
V         Mme Maria Barrados
V         Mme Bev Desjarlais
V         Mme Maria Barrados
V         Mme Bev Desjarlais
V         Le président
V         M. Charles Hubbard
V         Mme Sheila Fraser

 1220
V         M. Charles Hubbard
V         Le président
V         M. Brian Pallister
V         Mme Sheila Fraser
V         M. Brian Pallister
V         Mme Sheila Fraser
V         M. Brian Pallister
V         Mme Sheila Fraser
V         M. Brian Pallister
V         Le président
V         M. Gérard Binet (Frontenac—Mégantic, Lib.)
V         Mme Sheila Fraser
V         M. Gérard Binet
V         Le président
V         Mme Bev Desjarlais

 1225
V         Mme Sheila Fraser
V         Mme Bev Desjarlais
V         Le président
V         Mme Sheila Fraser
V         Le président










CANADA

Comité permanent des affaires autochtones, du développement du Grand Nord et des ressources naturelles


NUMÉRO 015 
l
2e SESSION 
l
37e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 28 janvier 2003

[Enregistrement électronique]

À  +(1005)  

[Traduction]

+

    Le président (M. Raymond Bonin (Nickel Belt, Lib.)): Bienvenue à tous.

    L'ordre du jour prévoit l'étude du projet de loi C-7, Loi concernant le choix des dirigeants, le gouvernement et l'obligation de rendre compte des bandes indiennes et modifiant certaines lois.

    Nous sommes fiers d'accueillir parmi nous aujourd'hui un invité spécial de l'Assemblée des premières nations, le chef national Matthew Coon Come, accompagné de Ghislain Picard, vice-chef, et de Roger Jones, conseiller juridique.

    Chers collègues, le chef m'a précisé que son exposé allait durer environ 40 minutes, et je crois que nous devrions lui accorder ce temps de parole. Ce qu'il a à nous dire est important et nous aidera dans nos délibérations, c'est pourquoi je vous demande votre collaboration. Au moment de la période des questions, souvenez-vous de ce qui s'est produit hier: Si vous avez trois minutes pour votre question et vous en prenez deux minutes et demie pour la poser, cela bouscule énormément nos témoins parce qu'il ne leur reste plus que 30 secondes pour répondre.

    Sans vouloir blesser mes collègues, les réponses nous intéressent plus que les questions. Nous nous ferons la politique ailleurs. Les caméras tournent, j'en suis conscient, mais par souci d'équité pour nos témoins, je vous demande de poser des questions très brèves.

    Chef Coon Come, je vous invite à nous livrer votre exposé.

+-

    Chef Matthew Coon Come (chef national, Assemblée des Premières Nations): Merci beaucoup, monsieur le président et membres du comité.

    [Le témoin s'exprime dans une langue autochtone]

    Merci de me permettre une fois de plus de me prononcer sur le projet de loi C-7, la Loi sur la gouvernance des Premières nations.

    Je suis Matthew Coon Come, le chef national de l'Assemblée des premières nations. Je suis accompagné du chef régional du Québec et du Labrador à l'APN, Ghislain Picard, qui prendra part à la présentation.

    Roger Jones, principal conseiller juridique de l'APN, est également présent et nous aidera à répondre aux questions d'ordre technique.

    Comme vous le savez, l'APN est la seule organisation nationale des Premières nations dont les membres sont des gouvernements des Premières nations qui, eux, représentent tous leurs citoyens où qu'ils vivent. La Cour suprême l'a d'ailleurs reconnu dans l'arrêt Corbiere.

    Le chef national est élu par les représentants désignés des gouvernements des Premières nations. Ainsi, l'APN est un organisme démocratique. Nous ne sommes pas qu'un autre groupe de pression, pas plus que les Premières nations ne sont un simple groupe d'intérêts spéciaux.

    L'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982 reconnaît les Premières nations—ou les Indiens—comme l'un des trois peuples autochtones. Il reconnaît également nos droits inhérents ancestraux et issus de traités. Voilà qui revêt de l'importance pour la discussion d'aujourd'hui sur le projet de loi C-7.

    Permettez-moi de vous dire sans détour que l'Assemblée des premières nations n'appuie pas le projet de loi C-7, pas plus que nous croyons qu'il puisse être rafistolé au moyen d'amendements. Le fait est que la démarche était biaisée depuis le début et que le soi-disant processus de consultation a lamentablement échoué.

    Il n'y a aucune raison de crier au succès des consultations simplement parce que le ministre dit avoir eu recours à la technologie. Les consultations par Internet ou à l'aide d'un numéro sans frais sont tout à fait inappropriées. Bon nombre de Premières nations ne sont pas raccordées à Internet et, qui plus est, on ne peut se fier à ce genre de consultations anonymes.

    Qui sait le nombre d'appels reçus au numéro sans frais qui sont attribuables aux membres des Premières nations? Peut-être que les consultations sur Internet ont attiré quelques personnes qui avaient beaucoup de temps libre. Pour dire le moins, les chiffres cités de toutes parts voulant que 10 000 personnes aient participé aux consultations sont discutables. Le nombre de personnes qui se sont présentées aux consultations communautaires offre une mesure plus fiable.

    En moyenne, moins de 3 p. 100 des membres des collectivités ont participé. J'ai soumis des statistiques et des graphiques à ce sujet lors de ma dernière présentation, et nous pouvons vous les remettre sur demande.

    Quoi qu'il en soit, de récentes statistiques relèvent que le Canada compte plus de 600 000 membres des Premières nations, vraisemblablement près de 700  00. De plus, le ministre affirme que 200 collectivités des Premières nations ont participé—et ce chiffre est douteux—, mais la vaste majorité, sinon toutes, ont rejeté l'initiative. Consultation ne veut pas dire consentement.

    La Commission royale sur les peuples autochtones constitue la norme moderne de consultation. Personne ne peut dire le contraire. C'est pourquoi les Premières nations adoptent largement le rapport de la CRPA comme modèle pour un changement à la fois effectif et progressif. On ne peut tout simplement pas comparer les consultations de la CRPA et celles sur la LGPN.

    Le projet de loi C-7 ne fait que représenter les analyses et les hypothèses de consultants non autochtones et les désirs des bureaucrates fédéraux dont l'objectif, semble-t-il, est de maintenir une relation dysfonctionnelle. Comment pourrait-on expliquer autrement le projet de loi C-7? Rien qu'à en lire le titre, Loi concernant le choix des dirigeants, le gouvernement et l'obligation de rendre compte des bandes indiennes et modifiant certaines lois, on constate que le projet de loi C-7 ne traite pas de saine gouvernance.

    Le projet de loi C-7 veut imposer une façon de voir la démocratie et la reddition de comptes à un groupe diversifié qui compte plus de 50 Premières nations et au-delà de 633 collectivités des Premières nations. Comment un système qui n'arrive pas à respecter les principes de démocratie et de reddition de comptes auxquels les Canadiens aspirent fonctionnerait-t-il pour les peuples des Premières nations? Nos propres systèmes traditionnels de démocratie et de reddition de comptes ont fait leurs preuves.

    Nous savons très bien le sens de ce projet de loi qui est soumis au comité après une première lecture. En théorie, du moins, il permet au Parlement de mieux fignoler le projet de loi et d'en défendre les mérites.

    Nous avons également observé d'un oeil intéressé les récents débats et les activités visant à rétablir la démocratie et l'indépendance à l'intérieur des comités parlementaires. Par conséquent, nous nous attendons ni plus ni moins à ce que le comité saisisse l'occasion pour permettre aux Premières nations de vraiment prendre part au processus, et ce, en les écoutant et en incluant leurs commentaires dans son rapport et ses recommandations.

    Si les Premières nations disent haut et fort qu'elles n'appuient pas le projet de loi et qu'elles encouragent le comité à en recommander l'abandon, c'est ce qui devrait vous guider. Les pressions habituellement exercées par le premier ministre et le ministre des Affaires indiennes afin d'imposer une loi indésirable aux Premières nations ne devraient pas exister.

    Le premier ministre Chrétien et le ministre Nault ont tous deux affirmé publiquement que cette mesure législative ne doit pas nécessairement produire une loi si les discussions et les débats mènent à la conclusion qu'elle n'est pas dans le meilleur intérêt des Premières nations. Je vous encourage donc à écouter et à apprendre quand nos membres vous parlent de sujets comme les responsabilités fiduciaires, les droits issus de traités, les droits ancestraux et les options inspirées de la Constitution plutôt que des lois.

    Ce ne sont pas des paroles en l'air—ce sont des propos qui traduisent l'essentiel de la relation qu'entraînent le Canada et les Premières nations. Ils sont essentiels à l'étude du projet de loi C-7.

    La relation de fiduciaire est déterminante. Il ne s'agit pas simplement d'aligner certains mots pour décrire un concept vide de sens. Une relation de fiduciaire est en quelque sorte une relation de confiance, dans les sens moral et juridique. En fait, c'est bien plus, mais c'est une façon de la comprendre. Or, notre relation de fiduciaire se joue entre les Premières nations et le gouvernement. Pas avec le parti au pouvoir, mais avec l'État canadien. Chacun d'entre vous, en tant que parlementaire, est tenu d'agir au mieux des intérêts des peuples des Premières nations dans cette affaire. Vos obligations et votre loyauté ne doivent pas vous lier à votre parti ni au gouvernement.

    Comme vous le savez, le paragraphe 91(24) de la Loi constitutionnelle de 1867 est l'autorité législative fédérale qui s'applique à cet exercice. Le paragraphe 91(24) spécifie l'autorité législative du Parlement fédéral sur les Indiens et les terres réservées pour les Indiens. Toutefois, le paragraphe 91(24) représente une réalité juridique pour laquelle les peuples des Premières nations n'ont pas eu leur mot à dire. Les peuples des Premières nations auraient rejeté toute compétence législative étrangère ou externe imposée aux leurs et à leurs terres.

    En 1981, la Cour suprême du Canada a rendu son premier jugement sur la signification et le sens de l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982. Permettez-moi de vous rafraîchir la mémoire. L'article 35 précise que: «Les droits ancestraux et issus de traité existants des peuples autochtones du Canada sont par la présente reconnus et confirmés».

    À l'époque, la Cour suprême du Canada avait tranché dans la cause Sparrow. La cour avait clairement déterminé que l'exercice de l'autorité législative ne devait pas porter atteinte aux droits ancestraux et issus de traités. Auparavant, dans la cause Guerin, la Cour suprême avait déclaré que la Couronne n'avait pas agi aux mieux des intérêts d'une Première nation dans une transaction relative à une terre.

    Une responsabilité de fiduciaire implique qu'une partie, le fiduciaire, doit voir à ce que les affaires soient réglées dans le meilleur intérêt de l'autre partie, bénéficiaire. La relation de fiduciaire ne signifie peut-être pas grand-chose aux gouvernements qui se pressent de faire adopter des lois, mais ceux-ci l'ignorent à leur risque car elle a une portée juridique.

    La Loi constitutionnelle de 1867 est claire: Le Parlement exerce une autorité législative. Ce n'est pas un privilège réservé à la Couronne ni au parti au pouvoir. Nous croyons que tous les parlementaires, qu'ils siègent à la Chambre des communes ou au Sénat, ont le devoir de veiller à ce que toutes les mesures législatives proposées au sujet des peuples des Premières nations soient dans le meilleur intérêt de ces derniers. Le droit constitutionnel et la common law reconnaissent cette obligation.

À  +-(1010)  

    En 1999, la Cour suprême a émis une opinion sur le Renvoi sur la sécession du Québec. Vous vous rappelez sans doute que, dans le cadre des débats ayant trait à la séparation du Québec, le gouvernement fédéral a usé de son autorité pour demander à la Cour suprême du Canada d'examiner le droit du Québec de se séparer. À cet effet, la Cour suprême du Canada a tenu une audience à laquelle le Québec a refusé de participer, puis elle a formulé une opinion.

    L'opinion est intéressante à lire, et je vous encourage à l'étudier. Mais, pour revenir à ce qui nous intéresse, je voudrais signaler que la Cour s'est penchée sur l'importance du rapatriement de la Constitution et sur la transformation du système gouvernemental canadien. Je vais vous lire un passage de l'opinion:

... dans une large mesure, l'adoption de la Charte avait fait passer le système canadien de gouvernement à la suprématie parlementaire à la suprématie constitutionnelle. La Constitution lie tous les gouvernements, tant fédéral que provinciaux, y compris l'exécutif... Ils ne sauraient en transgresser les dispositions...

    Qu'est-ce que cela signifie? Cela signifie que le gouvernement ne peut continuer à agir arbitrairement et unilatéralement lorsque les intérêts des Premières nations sont en jeu. Le gouvernement doit se conformer à la Loi constitutionnelle de 1982 et ne pas porter atteinte aux droits ancestraux et issus de traités, et il doit agir au mieux des intérêts des peuples des Premières nations. Pour ce qui est du projet de loi C-7, il est clair que le gouvernement contrevient à la Loi. Il en va donc de la responsabilité du présent comité et de tous les parlementaires de veiller, à titre individuel et collectif, au respect de la Constitution et de la common law. C'est dire qu'ils doivent, entre autres, voir à ce que les droits ancestraux et issus de traités ne soient pas enfreints et à agir au mieux des intérêts des peuples des Premières nations.

    Il y a 11 mois, le 28 février 2002, vous m'avez invité à faire une présentation sur le projet de loi sur la gouvernance des Premières nations. Certains de vous y étaient. À ce moment-là, nous n'avions pas encore de projet de loi. Le ministre et son ministère n'avaient pas terminé l'élaboration du projet de loi. En juin 2002, le ministre a déposé le projet de loi C-61. Celui-ci est devenu le projet de loi C-7 après que le Parlement se fut prorogé et que le discours du Trône eut amorcé une nouvelle session. De retour au 28 février 2002, nous avions informé le comité que le projet de loi sur la gouvernance des Premières nations était mal avisé. Il y avait vice de procédure. Les enjeux à aborder n'étaient pas pertinents. Et l'approche consistant à séparer l'administration gouvernementale des Premières nations d'autres sujets importants comme la santé, les ressources, les traités et les terres n'avait pas de sens. Pour être franc, nous voyions un nouveau désastre se profiler à l'horizon. À la lecture du projet de loi C-61, maintenant le projet de loi C-7, nos craintes se sont fondées.

    Comme je l'ai dit plus tôt, le projet de loi C-7 est un aboutissement tracé d'avance. Si vous voulez vraiment connaître la motivation et l'intention du gouvernement par rapport à cette mesure législative, je vous invite à consulter le site Internet du ministère des Affaires indiennes. Vous y trouverez une liste de recherches, d'analyses et de documents de travail préparés par des consultants non autochtones. D'après votre liste de témoins, je vois que vous entendrez l'un d'entre eux, Brad Morse, chef de cabinet du temps de l'ancien ministre des Affaires indiennes, Ron Irwin. J'espère que vous questionnerez M. Morse à savoir si, parmi les conseils prodigués au ministre Nault, il y était question de la stratégie politique visant à affaiblir les dirigeants des Premières nations ainsi que d'une stratégie de communication pour modeler l'appui—bien que non éclairé—des médias et du public au sujet de la transparence et de la reddition de comptes des gouvernements des Premières nations.

    À partir du travail des consultants, nous avons pu comprendre que, puisque des arrêts récents tels que Corbiere ont déterminé que la Loi sur les Indiens était discriminatoire et ne pouvait être maintenue, des mesures correctives s'imposent pour protéger les intérêts du gouvernement, et non ceux des Premières nations. Deuxièmement, le rapport sur la reddition de comptes établit la nouvelle tendance voulant que le public ait le droit de savoir ce que le gouvernement fait et comment il dépense les fonds publics. Les Premières nations appuient entièrement ces principes. Mais, dans ce cas-ci, on déguise le tout sous le couvert de la «saine gouvernance». Pour dire le vrai, le gouvernement dissimule une plus grande participation du public dans le processus de gouvernance pour pouvoir se décharger de ses responsabilités et réduire les coûts associés à la bureaucratie. Comparez le travail des consultants au mandat du ministère et au produit final—le projet de loi C-7—et vous remarquerez la continuité et la constance dont je parle.

À  +-(1015)  

    Comme cela a déjà été le cas, cette mesure législative est enjolivée et proposée comme solution au «problème indien». Le plus grave «problème indien» réside dans les politiques et les lois qui sont adoptées de façon unilatérale et qui continuent de traiter les «Indiens» comme des sujets. À la lumière de ce que j'ai dit plus tôt, au sujet des obligations des parlementaires, je vous presse d'examiner de près le contexte afin de pouvoir entreprendre un examen sérieux du projet de loi et de faire des recommandations pertinentes à vos collègues du Parlement.

    Comme vous le savez peut-être, l'APN a tenu son assemblée générale annuelle à Kahnawake, en juillet dernier, peu après le dépôt du projet de loi C-61. Ayant pu examiner et analyser le projet de loi, l'APN a été en mesure de le rejeter en toute connaissance de cause puisqu'il s'agissait d'un faux départ.

    Je laisserai quelques-uns de nos documents à ce sujet, et je suis certain que les témoins qui comparaîtront dans les prochaines semaines vous en apporteront beaucoup d'autres. Encore une fois, je vous encourage à lire nos documents et à les étudier soigneusement. Vous remarquerez plusieurs similarités dans les analyses et les évaluations produites par des Premières nations de tout le pays et leurs avocats. Nous ne parlons pas pour rien dire. Nos craintes sont fondées.

    Le ministre des Affaires indiennes a répété à maintes reprises que le projet de loi ne porterait pas atteinte aux droits ancestraux et issus de traités. Malgré ces propos rassurants, le ministre n'a pu convaincre ses collègues du cabinet d'insérer une clause de non-dérogation dans le projet de loi. Trop souvent, le gouvernement évalue mal les répercussions de ses lois et de ses politiques, ainsi que sa capacité—et celle d'autres intervenants—d'en gérer les conséquences financières et administratives.

    Le projet de loi C-31 en est un exemple parfait. En 1985, il visait à modifier la Loi sur les Indiens afin d'éliminer la discrimination exercée contre les Indiennes qui épousaient des non-Autochtones. Les gouvernements des Premières nations, nos femmes et nos enfants ont tous payé pour cette loi promulguée sans qu'on ait seulement réfléchi à sa mise en oeuvre.

    Nous croyons que ce travail n'a pas été effectué dans le cas du projet de loi C-7, sinon de façon superficielle. C'est une mauvaise pratique que de deviner les coûts et les conséquences juridiques. La prudence nécessaire, les obligations de fiduciaire et l'obligation constitutionnelle font que le gouvernement devrait, à la suite d'un analyse et d'un examen rigoureux, avoir la certitude que tout a été passé en revue et qu'aucun désastre ne surviendra.

    Nous croyons fermement que la rigueur aurait dû ou doit pousser le gouvernement fédéral à entreprendre une analyse du projet de loi à la lumière de la common law, afin de cerner les violations éventuelles aux droits ancestraux et issus de traités. Les tribunaux ont clairement indiqué que les Premières nations ne jouissent pas toutes des mêmes droits ancestraux et issus de traités. Ils ont précisé que de tels sujets ne peuvent être éclaircis qu'au moyen d'un examen sérieux des circonstances de chaque groupe. C'est dire qu'il leur faut étudier l'histoire, les coutumes, les traditions et les relations avant de pouvoir déterminer les droits ancestraux et issus de traités de chacun des groupes.

    Il n'incombe pas aux Premières nations de mener de telles évaluations. Cette loi fédérale est du ressort du gouvernement fédéral, et c'est à lui de vérifier, pour lui-même et pour les Premières nations, qu'aucune violation n'y sera enchâssée. À cet effet, il serait sage que le comité demande à un avocat ou à un cabinet indépendant de procéder à une analyse juridique.

    Notre analyse juridique arrive à la conclusion que le projet de loi C-7 viole les droits ancestraux, et le plus bel exemple de violation touche le domaine des élections. Le droit jurisprudentiel reconnaît que le choix des dirigeants constitue une coutume ou une pratique faisant partie intégrante d'une société des Premières nations. Ironiquement, le gouvernement fédéral déteste que les tribunaux règlent ce genre de question mais, de toute évidence, c'est exactement là où elles échoueront.

    En précipitant le rétablissement de la gouvernance des Premières nations, le gouvernement fédéral invite directement les tribunaux à régler un autre problème législatif. Les Premières nations se préparent déjà à intenter des poursuites, et la Fédération des nations indiennes de la Saskatchewan a déposé une revendication fondée sur la violation anticipée des droits issus de traités. En voulant endiguer le flot des recours en justice et empêcher les tribunaux de rédiger des politiques pour vous, il se peut que vous vous apprêtiez plutôt à ouvrir les écluses.

À  +-(1020)  

    Nous affirmons aussi qu'une évaluation bien menée quant aux coûts et aux répercussions administratives pour les Premières nations devrait débuter par une évaluation des capacités actuelles des premières nations. Les premières nations sont-elles outillées pour satisfaire aux exigences gouvernementales et administratives actuelles? Peuvent-elles s'appuyer sur une base administrative ou organisationnelle? Sinon, que leur faut-il? Si oui, quel est le poids des obligations et des responsabilités additionnelles qu'elles peuvent assumer?

    Dernièrement, la vérificatrice générale a produit un rapport qui critiquait fortement les exigences en matière de rapport que divers ministères et diverses autorités gouvernementales externes imposent aux gouvernements des Premières nations. Elle disait: «Selon nos estimations, les quatre organismes fédéraux qui fournissent la majorité du financement pour les grands programmes fédéraux exigent au moins 168 rapports». Je dis bien 168 rapports. Cela veut dire que les Premières nations, même celles qui ne comptent que quelques centaines de personnes et très peu de ressources, sont forcées de remplir en moyenne trois rapports par semaine, et d'y consacrer le temps et les sommes nécessaires. Quelqu'un ose-t-il dire que nous ne sommes pas responsables?

    Le rapport de la vérificatrice générale est une autre prise de conscience amorcée par une autorité externe décentralisée par rapport aux attentes exagérées qu'on impose aux gouvernements des Premières nations. Voici une des observations que renferme le rapport de la vérificatrice générale: «Cette loi pourrait modifier la façon dont les Premières nations sont tenues de faire rapport. Ce projet de loi n'est toutefois pas entré dans nos discussions avec les Premières nations, et il n'est pas pris en ligne de compte dans cette étude». La Loi sur la gouvernance des Premières nations change-t-elle quoi que ce soit à la manière dont les Premières nations doivent rendre des comptes? Non. La Loi sur la gouvernance des Premières nations va tout à fait à l'encontre des constatations de la vérificatrice générale. Plutôt que de simplifier le tout, la LGPN ne fera qu'ajouter d'autres lourdeurs administratives.

    Je suis heureux d'apprendre que le comité a invité la vérificatrice générale à présenter ses constatations et son point de vue sur la question qui nous occupe et à en discuter. Pour mener son étude, la vérificatrice générale a travaillé avec les Premières nations afin de bien saisir la réalité à laquelle nos gouvernements sont confrontés. Si le ministre avait vraiment parlé avec nos membres, sans idées préconçues, il aurait trouvé une meilleure solution au «problème indien». En tant que comité, vous aurez une occasion de le faire.

    De plus, j'encourage le comité à amorcer un examen du problème du gouvernement fédéral quant à la gestion des affaires des Premières nations. Une saine gouvernance pour les Premières nations devrait débuter par un plan visant à enlever au gouvernement le pouvoir de régenter la vie des peuples des Premières nations. Nous avons restructuré le système fédéral pour instaurer une relation de gouvernement à gouvernement avec les Premières nations qui soit respectueuse, constructive et profitable de part et d'autre.

    Je dirais qu'une relation respectueuse et de gouvernement à gouvernement ne devrait pas obliger les gouvernements des Premières nations à se présenter devant les comités parlementaires. Des structures et des processus intergouvernementaux doivent encadrer les discussions et les consultations. Les lacunes que renferme le projet de loi sur la gouvernance des Premières nations constituent une conséquence directe des politiques, des lois et des pratiques administratives du gouvernement fédéral.

    Peut-être que c'est le problème du gouvernement fédéral que nous devrions étudier. Rien dans le projet de loi C-7 ne vient régler le problème du gouvernement fédéral. Pourquoi cela? Bon nombre des enquêtes et des études spéciales ayant trait au problème indien ont soulevé que le gouvernement avait géré les affaires indiennes de manière destructive. Le 7 janvier 1998, dans l'édifice même où nous nous trouvons, le gouvernement du Canada a présenté sa réponse au rapport de la Commission royale sur les peuples autochtones. Rassembler nos forces: Le plan d'action du Canada pour la question autochtone. Reste la réponse officielle du gouvernement fédéral au rapport de La CRPA, et le nouvel énoncé de la politique sur la façon de traiter avec les peuples autochtones.

    Les documents mêmes du gouvernement décrivent la politique et stratégie Rassembler nos forces comme suit: «...se fonde sur la reconnaissance des erreurs et des injustices du passé, sur l'amorce de la réconciliation, de la guérison et du renouveau, et sur l'établissement d'un plan conjoint visant à appuyer le développement économique ainsi que des gouvernements autochtones forts et durables».

    Soyez patients, je vais vous lire des passages de la déclaration de réconciliation, laquelle a été qualifiée de réussite majeure du plan à long terme. Les lignes qui suivent sont censées guider tout le gouvernement fédéral, et je tiens à vous les lire:

Des attitudes empreintes de sentiments de supériorité raciale et culturelle ont mené à une répression de la culture et des valeurs autochtones... Nous devons reconnaître les répercussions de ces actes sur les nations naguère autosuffisantes qui ont été fragmentées, perturbées, limitées ou même anéanties par la dépossession de leur territoire traditionnel, par la re-localisa des peuples autochtones et par certaines dispositions de la Loi sur les Indiens. Nous devons reconnaître que ces actions ont eu pour effet d'éroder les régimes politiques, économiques et sociaux des peuples et des nations autochtones.

À  +-(1025)  

    Pour renouveler notre partenariat, nous devons plutôt continuer à trouver des solutions qui permettront aux peuples autochtones de participer pleinement à la vie économique, politique, culturelle et sociale du Canada tout en préservant et en améliorant les identités des collectivités autochtones et en assurant leur évolution et leur épanouissement futurs.

    Je sais que certaines personnes parlent à la blague de «Ramasse-poussière» plutôt que de Rassembler nos forces». Parfois, comme on dit, mieux vaut en rire qu'en pleurer. Nos membres croient qu'une parole doit être tenue avant tout. Nous croyons au respect de nos engagements. Nous avons pris ces écrits à coeur, et nous nous sommes réjouis à l'idée d'une ère nouvelle.

    Dites-moi: où, dans le projet de loi C-7 et dans le processus qui a mené à sa création, reconnaît-on les erreurs et les injustices du passé? Où parle-t-on de réconciliation, de guérison et de renouveau? Pourquoi nous retrouvons-nous dans ce climat de méfiance et de conflit entre les Premières nations et le gouvernement que l'approche accusatoire et unilatérale du ministre des Affaires indiennes et du Nord a engendrée? Qu'est-il advenu de l'engagement à emprunter une démarche de partenariat? Dans le projet de loi C-7, où est-il question de la préservation des identités des collectivités des Premières nations? Le projet de loi C-7 est une autre expression de la supériorité raciale et culturelle des promoteurs du projet de loi.

    Un passage du projet de loi stipule: «Attendu que la démocratie représentative, qui se manifeste notamment par la tenue régulière d'élections par scrutin secret, la transparence et la responsabilisation sont des valeurs auxquelles les Canadiens sont attachés...» puis, le projet de loi poursuit en imposant avec force détails de telles valeurs aux peuples des Premières nations. Où sont passées les valeurs d'inclusion et de consensus des Premières nations? Assurément, certains gouvernements traditionnels des Premières nations observaient des normes de démocratie supérieures grâce auxquelles leurs processus décisionnels et leurs structures gouvernementales reflétaient les intérêts des membres de la collectivité—les hommes, les femmes, les enfants et la nature. Certaines de nos nations choisissaient leurs dirigeants par consensus au sein de la collectivité, ce qui est bien mieux que le scrutin secret qui implique une personne et un système de scrutin. Comment pourrait-on être plus ouverts et plus transparents?

    Souvenez-vous aussi que les Indiens n'ont pas eu le droit de participer à la démocratie représentative du Canada jusqu'en 1961.

    Permettez-moi aussi de vous dire que nous croyons que le processus qui encadre le comité permanent laisse beaucoup à désirer. Comme vous vous en souviendrez, le présent comité a mis à peine trois semaines, en novembre et en décembre 2002, pour étudier le projet de loi C-6. Notre exposé fait était de notre inquiétude, qui est en rapport avec le processus, mais je n'en ferai pas la lecture.

    Malgré cette réalité, le gouvernement fédéral a démontré sa volonté à utiliser et à corrompre le système fédéral pour parvenir à ses fins. L'imposition d'un système juridique indésirable aux peuples des Premières nations est-elle un geste de démocratie et de saine gouvernance de la part du gouvernement fédéral? Non. Elle ne fait que confirmer le déséquilibre des pouvoirs. Le rapport de la Commission royale renferme plusieurs recommandations sur la façon d'éliminer ce déséquilibre. Je doute que les Premières nations aient des leçons de démocratie et de saine gouvernance à recevoir du gouvernement fédéral.

    Cela dit, je cède la parole à Ghislain Picard.

À  +-(1030)  

[Français]

+-

    Vice-chef Ghislain Picard (Assemblée des Premières Nations): Mesdames et messieurs membres du comité, monsieur le président, c'est à mon tour de vous faire mes salutations.

    Alors, qu'est-ce qu'une saine gouvernance?

    Les nations et les gouvernements aspirent continuellement à une saine gouvernance. Les premières nations ne font pas exception. À mesure que le monde évolue et que les peuples progressent, les mesures qui caractérisent la saine gouvernance en font tout autant.

    Nous ne pouvons supposer que la réponse ou la solution se cache dans la construction d'une fondation de sable mou. Le préambule du projet de loi C-7 précise que le système actuel d'administration déléguée des conseils de bande des premières nations n'a jamais été conçu pour offrir des outils de gouvernance efficaces. Pourtant, le projet de loi sur la gouvernance des premières nations ne fait essentiellement que maintenir et ancrer plus profondément le même régime inefficace d'auto-administration.

    Pourquoi le gouvernement fédéral croit-il que les mêmes vieux trucs et concepts usés vont produire des résultats différents? L'approche universelle ne fonctionne pas. Le gouvernement essaie depuis plus de 100 ans. Pourquoi met-il autant de temps à comprendre?

    Nous croyons qu'une approche plus logique à la conception et à la mise en oeuvre d'une saine gouvernance consisterait à abandonner ce qui ne fonctionne pas pour trouver des exemples productifs. Prenez ces exemples utiles et adaptez-les aux réalités des collectivités des premières nations.

    Les coutumes et les pratiques traditionnelles de saine gouvernance au sein des sociétés des premières nations doivent être des sources d'information.

    La mission du comité serait plus utile si elle consistait à fouiller et à étudier le travail déjà effectué dans le monde sur la gouvernance efficace et à déterminer sa pertinence pour les premières nations. En effet, nous encourageons le comité à entreprendre un tel examen.

    Pour ce faire, les données sur les différentes stratégies et mesures de saine gouvernance procureraient au comité une norme pour évaluer le projet de loi C-7 et déterminer s'il parviendrait à faire quoi que ce soit pour favoriser une saine gouvernance au sein des collectivités des premières nations.

    Alors, quand il est question des nations autochtones, ce qu'on entend par saine gouvernance peut avoir une faible relation, sinon aucune, avec la façon dont les gens gouvernés voient le monde. Il se peut qu'elle ne reflète que les besoins qu'a l'État de répondre à ses propres besoins sociaux, économiques ou politiques.

    Pour bien comprendre la position des premières nations, il faut au moins connaître un peu la relation historique qu'entretiennent le Canada et les premières nations.

    La Commission royale sur les peuples autochtones divise la relation entre les peuples autochtones et les non-autochtones du Canada en quatre étapes. La première est le pré-contact.

    En bref, la commission parle de la période qui a suivi le contact et au cours de laquelle nos gouvernements et les colons ont transigé à pied d'égalité entre nations souveraines. La signature de bon nombre de nos traités remonte à cette période.

    La relation établie dans les traités n'a jamais changé. La Commission royale sur les peuples autochtones décrit ce qui est arrivé comme une domination exercée graduellement par les non-autochtones.

    À mesure que la maladie, les guerres et les génocides ont réclamé des vies, la population et les pouvoirs des premières nations ont décliné. Les colons sont arrivés plus nombreux avec des idées de domination et se sont approprié les terres et les ressources des premières nations. Ils ont confiné les peuples des premières nations dans des réserves et ils ont adopté des lois et des politiques visant à les assimiler et à les anéantir. Malgré les traités toujours en vigueur, la relation qui s'en inspirait n'était pas respectée.

    J'aimerais ajouter que la Commission royale sur les peuples autochtones a aussi reconnu une quatrième étape, le renouveau et la renégociation, qui, nous l'avions espéré, aurait dû être amorcée depuis. Il s'agit d'un point tournant marqué par des peuples des premières nations revitalisés et par un examen sérieux de notre relation, en ne perdant pas de vue la renégociation et le renouveau fondés sur la reconnaissance, le respect, le partage et la responsabilité.

    La période la mieux documentée est celle de la domination des colons. Les nations autochtones ont été affaiblies à tout point de vue et la relation d'égalité souveraine s'est transformée en un lien de domination.

    Par conséquent, les débats ont eu lieu et les lois et politiques colonisatrices ont eu leurs effets sans la participation des nations mêmes auprès de qui la France et l'Angleterre avaient à l'origine sollicité et noué des partenariats.

À  +-(1035)  

    Les premières mesures constitutionnelles ignoraient pratiquement les premières nations, si ce n'est pour permettre au Parlement du Canada d'exercer son autorité législative sur les Indiens et les terres réservées pour les Indiens.

    Partenaires et alliés précieux, nous sommes devenus du jour au lendemain une gêne administrative, un obstacle à la construction d'un nouvel empire colonial établi sur les terres que nos ancêtres avaient partagées.

    En administrant les Indiens et les terres réservées pour les Indiens, le gouvernement fédéral contrôlait pratiquement tous les aspects de la vie des membres des premières nations, notamment leur façon de se gouverner.

    Depuis plus d'un siècle, la Loi sur les Indiens constitue la principale expression législative de la gouvernance des premières nations du Canada.

    Conformément à la perception voulant que les autochtones ne soient pas civilisés, les objectifs du système administratif de la Loi sur les Indiens étaient d'isoler les autochtones de la civilisation et de les assimiler graduellement à l'aide de programmes conçus pour modifier la culture, l'économie et le mode de vie des peuples des premières nations.

    La Loi sur les Indiens a redéfini en termes racistes les diverses nations autochtones du Québec, du Canada, séparant les peuplements en bandes d'Indiens et utilisant le pourcentage de sang indien, le mariage et la paternité pour déterminer le statut d'Indien et l'appartenance.

    Les systèmes de gouvernance établis en vertu de la Loi sur les Indiens visaient principalement à permettre aux fonctionnaires canadiens de déléguer une partie de leurs tâches administratives aux autochtones.

    Le système des conseils élus a été créé en 1869 au moyen d'une disposition qui s'est retrouvée dans les versions subséquentes de la Loi sur les Indiens. Il imposait un système de contrôle externe à nos gouvernements internes, par lequel les gens colonisés appliquaient les règles et les structures du colonisateur.

    Le nouveau système ne s'inspirait pas des pratiques de gouvernance de nos nations, il reflétait les valeurs et les aspirations de la nation colonisatrice. Nous avons d'ailleurs des citations qui supportent nos interprétations.

    Pour toutes nos nations, toutefois, ce système étranger leur était imposé sans égard pour la diversité de leurs membres et de leurs traditions.

    Il y a des années que les membres des premières nations émettent des inquiétudes à l'égard des politiques de gouvernance du gouvernement. En 1895, le ministère des Affaires indiennes a dû dresser une liste des bandes devant être assujetties à la loi puisque les premières nations, lorsqu'elles en avaient le choix, refusaient d'adopter le système de conseils élus.

    Il est devenu pratique courante d'utiliser les moyens les plus efficaces pour presser, cajoler ou leurrer les autochtones afin qu'ils adoptent les politiques législatives.

    À l'opposé, un agent des Indiens pouvait empêcher une bande de tenir des élections s'il ne la jugeait pas suffisamment avancée. Des études ont démontré que cette pratique était assez courante, surtout dans les collectivités plus reculées.

    Dans d'autres cas, les bandes ont eu la surprise d'apprendre que lorsqu'elles avaient accepté un système de conseils élus, on avait considéré qu'elles mettaient fin à leur traité.

    Même après l'adoption des systèmes de conseils élus, les chefs à vie conservaient souvent leur influence. Les formes traditionnelles de gouvernement maintiennent une certaine autorité dans bon nombre de nos collectivités.

    Là où je veux en venir, c'est que la culture autochtone a prouvé sa résistance malgré les assauts répétés perpétrés au moyen de programmes et de lois.

    Le Comité Penner sur l'autonomie gouvernementale des Indiens et la Commission royale sur les peuples autochtones ont tous deux reconnu un élément clé du succès de l'autonomie gouvernementale: tout mouvement vers l'autonomie gouvernementale doit s'activer dans les premières nations.

    Comme point de départ, la Commission royale sur les peuples autochtones suggère qu'il existe trois modèles potentiels d'autonomie gouvernementale autochtone: le gouvernement fondé sur la nation, le gouvernement populaire et le gouvernement fondé sur la communauté d'intérêts. Le comité Penner a recommandé que la bande commence par définir ses membres, lesquels adopteraient ensuite une constitution qui serait reconnue en vertu d'une loi fédérale.

    La Commission royale sur les peuples autochtones considérait la réédification de la nation comme une première étape essentielle au gouvernement des premières nations. La Commission royale sur les peuples autochtones et le rapport Penner ont témoigné du besoin des premières nations de compter sur une mise en oeuvre souple ainsi que sur une base économique et financière solide, sans oublier évidemment l'accès aux terres et aux ressources.

À  +-(1040)  

    Le projet de loi C-7 contredit l'histoire et toutes les théories actuelles sur ce que constitue une véritable autonomie gouvernementale.

    Contrairement à la Commission royale sur les peuples autochtones, au rapport Penner et à d'autres études, le projet de loi C-7 adopte une attitude normative face au gouvernement des premières nations. Il laisse peu de latitude à la bande, mais donne une grande marge de manoeuvre au ministre.

    La Loi sur la gouvernance des Premières nations ne traite même pas des membres et des citoyens, une composante fondamentale de la gouvernance. Elle se concentre plutôt sur l'adoption de codes qui régissent les élections, l'administration de la bande, la gestion financière et la reddition de comptes.

    Elle ne parle pas de processus législatif efficace. Les premières nations ne voient pas l'autonomie gouvernementale comme le droit de fabriquer des règlements sur l'enlèvement des ordures ou l'obligation de tenir les chiens en laisse.

    On n'y trouve pas, non plus, de mécanisme d'application. À défaut de compter sur des tribunaux régionaux, les cours provinciales sont les seuls recours. Cette mesure viendra alourdir le fardeau, en temps et en argent, des cours provinciales. Les provinces ont-elles été consultées pour savoir si elles sont prêtes à assumer cette charge supplémentaire et en mesure de le faire? Nous ne le croyons pas.

    Et, bien sûr, les bandes n'ont que deux ans pour mettre tous ces codes en application. J'ai déjà mentionné l'étude de la vérificatrice générale qui indique que les gouvernements de bande sont déjà accablés de travail et qu'ils ont à produire plus ou moins 168 rapports par année, ce qui équivaut en moyenne à trois rapports par semaine.

    Ce sont les mêmes gens qui auront à faire vite pour élaborer des codes, retenir les services d'experts, d'avocats et de conseillers politiques pour être bien certains de se plier aux règles, informer leur collectivité et obtenir son approbation. Ce sera la course contre la montre.

    Les bandes, vraisemblablement nombreuses, qui ne pourront tout faire à temps se feront imposer des codes par défaut. Une fois de plus, on revient à l'approche universelle qui ne fonctionne jamais.

    Nous ne comprenons pas trop en quoi le projet de loi C-7 est censé être bon pour nos membres et nos gouvernements.

    Dans cette démarche, nos dirigeants sont nombreux à percevoir les échos de la débâcle du projet de loi C-31. Le projet de loi C-31 s'intitulait Loi modifiant la loi sur les Indiens. Il a été adopté en 1985 pour tenter de rendre la Loi sur les Indiens conforme à la Charte canadienne des droits et libertés.

    Le projet de loi C-31 donnait deux ans aux bandes pour adopter des codes d'appartenance, sans quoi elles étaient assujetties aux dispositions imposées par défaut par la Loi sur les Indiens.

    Bien des bandes éprouvaient déjà des difficultés financières et elles craignaient que le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien ne leur fournisse pas les fonds nécessaires pour composer avec l'arrivée de nouveaux membres.

    Malgré cela, plusieurs collectivités se sont dépêchées d'adopter des codes qui se sont plus tard avérés encombrants, coûteux et facilement attaquables. Le ministre avait débloqué des fonds pour encourager l'élaboration de codes, mais quand les recours en justice ont fait surface, il ne s'est pas manifesté et très peu de bandes ont reçu de l'aide pour se défendre en cour.

    La question n'est pas seulement de savoir ce qu'on entend par saine gouvernance, mais qui définit la saine gouvernance. Le rapport Penner et celui de la Commission royale sur les peuples autochtones ont recommandé de laisser les fondements de la gouvernance à la discrétion des premières nations.

    C'est assurément un gros problème, et nous devrions cesser d'attendre une solution rapide et simple. Les premières nations auront besoin de temps et d'appui pour composer avec les problèmes qui vont surgir.

    Selon la Commission royale sur les peuples autochtones, la gouvernance doit, pour être durable, dépendre du pouvoir, de la légitimité et des ressources.

    Ce sont ces valeurs communales qui rendent nos nations uniques. Les théoriciens de la société peuvent débattre du sens de la collectivité, mais toute collectivité qui se définit elle-même en fonction de l'identité nationale apporte une source possible de valeurs communes.

À  +-(1045)  

    L'ingérence pratiquée en vertu des lois auprès des membres des gouvernements des premières nations a influencé le point de vue de certains de nos membres. Mais si la gouvernance s'appuie sur le processus d'autoréglementation plutôt que de compter sur les institutions de réglementation, la gouvernance des premières nations ne peut être rétablie qu'au moyen d'un discours interne qui redéfinit les valeurs sui generis communes.

    Je laisse la conclusion au chef national.

[Traduction]

+-

    Chef Matthew Coon Come: Merci.

    Les outils efficaces de gouvernance ne peuvent être définis qu'à l'aide d'une vision claire de ce qu'est la gouvernance. Si la gouvernance se veut une expression des valeurs et des choix des personnes et de leur société, la gouvernance des Premières nations devrait se fonder sur les valeurs, les traditions et les pratiques des nations autochtones. Ce point de vue a été exprimé par la Commission royale sur les peuples autochtones et le Comité spécial sur l'autonomie politique des Indiens, et il se dégage des demandes formulées par nos membres depuis un siècle.

    L'histoire nous démontre que le gouvernement fédéral peut imposer des politiques contre la volonté des Premières nations, mais seulement à un coût humain et financier élevé. Le simple fait de croire qu'un plan d'action est dans leur meilleur intérêt n'en fait pas pour autant un bon plan. Notre histoire est truffée de gens qui savaient ce qui nous convenait le mieux, et nous pouvons en voir le résultat: la Loi sur les Indiens, les pensionnats indiens, les réinstallations forcées, le morcellement social et économique et les problèmes que nous essayons d'éliminer ici aujourd'hui.

    L'imposition du projet de loi C-7 ou de toute approche «universelle»—aux Premières nations est vouée à l'échec. Les Premières nations ne souhaitent aucunement l'adoption du projet de loi. Certaines n'en ont ni les capacités ni les ressources et, par-dessus tout, les Premières nations veulent une approche progressive et effective à l'autodétermination. Pourquoi le gouvernement a-t-il dépensé plus de 15 millions de dollars pour des consultations qui n'ont rien donné? Qui sait combien de millions supplémentaires sont allés aux avocats et aux consultants? Pourquoi a-t-on gaspillé autant de volonté politique auprès des Premières nations pour une démarche dont personne ne veut?

    Pendant que le ministre rédige les dispositions qui exigent encore plus de comptes, nos membres s'enlèvent la vie et vivent dans des cabanes surpeuplées. Ils risquent de s'empoisonner chaque fois qu'ils tournent le robinet pour se prendre un verre d'eau, et le ministre vient mener des consultations sur les codes électoraux dans leur collectivité. Nous avons une liste d'attente de 10 000 jeunes qui souhaitent poursuivre des études universitaires mais ne peuvent obtenir de financement. Ils sont la main-d'oeuvre de demain. Ils veulent améliorer leurs chances dans la vie et contribuer à l'économie canadienne, mais le ministre leur dit: «Attendez encore un peu que je finisse cet article sur la capacité légale».

    Non seulement la Loi sur la gouvernance ne traite pas de ces priorités, mais elle créera d'autres préjudices. Elle continuera d'entacher les relations entre le gouvernement fédéral et les Premières nations en allant à l'encontre de pratiquement toutes les études et tous les rapports déjà produits au sujet des Premières nations. Et en tant qu'être humain, et non que chef national de l'APN, je dois dire que je n'arrive pas à comprendre pourquoi le ministre est si déterminé à imposer aux Premières nations quelque chose dont nul ne veut. Il dit que certaines personnes l'appuient, il doit faire référence à son personnel.

    Je ne doute pas un instant que si l'APN appuyait le projet de loi C-7, le ministre le crierait haut et fort d'un bout à l'autre du pays. Puisque nous rejetons le projet de loi et que nous nous y opposons, il ne traite plus l'APN que comme un simple groupe de pression. Lorsque les chefs ont rejeté le projet de loi C-7 à l'unanimité, il nous a coupé les vivres de moitié. Il a fallu mettre à pied 70 employés. Je suppose que nous devons nous attendre à d'autres compressions budgétaires, cette année, puisque notre position reste la même. Le présent passage de notre mémoire expose ce que nous pensons des mesures prises par le ministre, et je vais passer par-dessus.

    Des périodes de l'histoire et des expériences récentes, par exemple, le projet de loi C-31 et la modification du processus électoral imposée par l'arrêt Corbiere, démontrent qu'il est extrêmement difficile et périlleux de tenter d'instaurer des changements à grande échelle d'un seul coup. Ces deux exemples prouvent que deux années sont loin de suffire. Les Premières nations et le gouvernement fédéral doivent disposer de suffisamment de temps pour planifier ce genre de changements fondamentaux et s'y préparer.

    Je vous invite à consulter l'approche que nous proposons à la gouvernance: le plan d'action des Premières nations. Il préconise des changements fondamentaux à long terme, mais commence par la réédification de nos collectivités et le renforcement de nos citoyens. En d'autres mots, nous n'avons pas à attendre l'édification complète de nos nations pour nous attaquer aux priorités urgentes relatives à la santé, au logement, à l'éducation et à la formation. En fait, c'est là que nous devons commencer.

    Les ministres se succéderont. Les chefs nationaux se succéderont. Mais l'autonomie gouvernementale véritable des Premières nations sera là pour de bon. Nos peuples ne partiront pas. Nous ne disparaîtrons pas. Nous ne nous assimilerons pas. Nos jeunes apprennent leurs traditions. Ils ne tournent pas le dos à leur collectivité ni à leur culture. Ils sont prêts à affronter l'avenir.

    Nous voulons travailler avec le Canada. Le ministre a tenté de balayer notre position en disant que le travail de l'APN consistait à dire non. Eh bien, donnez-nous de quoi dire oui. Assoyez-vous avec l'APN et les citoyens des Premières nations de tout le pays, et amorçons des échanges constructifs. Parlez-nous dès le début. Ne venez pas nous voir après avoir pris des décisions pour vous plaindre que nous n'appuyons pas vos idées dépourvues de logique.

À  +-(1050)  

    La dernière fois que je me suis adressé au comité pour expliquer notre position au projet de loi C-6—le projet de loi sur l'organisme de règlement des revendications—un fonctionnaire m'a dit qu'il «valait mieux faire quelque chose que rien du tout». Pas si ce «quelque chose» va créer plus de troubles, plus de poursuites, plus de mauvaise volonté et, pis encore, plus d'occasions ratées. Je suis prêt à appuyer une approche qui reconnaît la véritable place que nous tenons au Canada, et celle que nous occupons dans la Constitution canadienne. Je suis prêt à applaudir toute approche empreinte de respect qui s'inspire du partenariat. Je suis prêt à relever mes manches et à aller de l'avant dans une démarche qui permet de bâtir des Premières nations viables et en santé et donne force et vitalité aux citoyens des Premières nations. Je suis prêt à travailler main dans la main pour tisser une nouvelle relation qui donne espoir à nos enfants et des possibilités à nos membres. Le Canada est-il prêt? Êtes-vous prêts?

    L'époque où le gouvernement fédéral formulait et imposait ses idées à nos membres devrait être révolue. Éliminons l'agent des Indiens et partageons le calumet qui a consacré nos traités. Ce projet doit être abandonné. Nous devons mettre en application l'article 35 ainsi que nos droits ancestraux et issus de traités. Empruntons une nouvelle route qui nous ouvrira de nouveaux horizons.

    Sur ce, monsieur le président, mesdames et messieurs, je vous remercie pour votre patience. Meegwetch.

À  +-(1055)  

+-

    Le président: Merci.

    Mesdames et messieurs, il nous reste 35 minutes. Pour le premier tour, les intervenants disposeront de trois minutes. Les députés de l'opposition officielle auront quatre minutes. Je vous en prie, que vos questions soient courtes et claires. Si vous prenez trop de temps pour les poser, c'est vraiment regrettable pour nos témoins, nos invités et nos collègues qui ne peuvent pas bénéficier de leurs témoignages.

    Alors, monsieur Pallister, vous avez quatre minutes.

+-

    M. Brian Pallister (Portage—Lisgar, Alliance canadienne): Merci pour ce rappel, monsieur le président.

    Des voix: Oh, oh!

    M. Brian Pallister: Monsieur Coon Come, je suis heureux de vous revoir.

    Pourriez-vous expliquer comment il se fait qu'hier le ministre dans son témoignage a déclaré que vous appuyez ce projet de loi.

+-

    Chef Matthew Coon Come: Quand tout cela a commencé, nous avons fait valoir au ministre qu'il fallait qu'il rencontre le comité exécutif pour que nous puissions apprendre de bonne source ce que ce processus signifiait. Nous pensions que ce serait une bonne occasion de nous engager dans la voie d'un véritable partenariat et d'une véritable initiative conjointe. Nous avons constaté que le ministre n'avait que quatre choses en tête: les élections, l'administration des bandes, la gestion financière et la reddition de comptes.

    Pour notre part, nous voulions parler du statut de membre. Nous voulions discuter de la mise en oeuvre de l'article 35. Nous voulions préserver l'esprit et la lettre de nos traités. Je me disais que si nous devions parler de gouvernance, nous devions commencer par les éléments vraiment essentiels à la nation. Commençons par l'article 35, pas par l'article 91.24. Ainsi donc, quand nous nous sommes engagés dans cette voie, nous avons constaté que ce n'était pas ce à quoi il songeait. Aucun revirement n'était envisagé, même si au cours des consultations il a demandé un sondage. Selon ce sondage, les questions qui intéressaient nos membres étaient la santé, l'éducation et la mise en oeuvre de nos traités. La gouvernance se situait tout au bas de l'échelle. Nous pensions qu'il voulait apprendre et écouter ce que nous avions à lui dire. Les gens se sont exprimés. Ils ne voulaient pas parler de modifier la Loi sur les Indiens; ils voulaient parler d'édification de notre nation, d'application de mesures commerciales, ils voulaient parler de questions fondamentales.

+-

    M. Brian Pallister: Cette déclaration était donc erronée?

+-

    Chef Matthew Coon Come: Je m'étonne que le ministre ait fait une telle déclaration étant donné qu'en ce qui concerne les questions dont nous voulions parler il n'y avait aucune ouverture, aucune flexibilité. Bien sûr, quand nous avons rendu compte de ce qui se passait à nos chefs et que nous leur avons dit que nous avions tenté d'aborder d'autres sujets mais que le ministre s'était montré intraitable, les nôtres l'ont bien sûr rejeté. N'est-ce pas là une expression de la démocratie, que nous avons le droit de le rejeter?

+-

    M. Brian Pallister: Oui, on voit bien que vous n'appuyez pas ce projet de loi. Je voulais en parler parce que je pense tout comme vous, et je pense que vous l'avez très bien dit, que toute mesure législative qui s'appuie sur un manque d'égard est très difficile à appuyer à long terme.

    Songez-vous à une contestation? Une de vos organisations membres, je crois que ce sont les chefs de la Saskatchewan, a déjà fait savoir qu'elle contestera parce qu'elle estime que la consultation était faussée dès le départ. En tant que chef d'une organisation nationale envisagez-vous aussi une contestation de ce genre?

+-

    Chef Matthew Coon Come: Nous appuyons bien sûr la Federation of Saskatchewan Indian Nations, qui prend l'initiative de contester devant les tribunaux cette possible violation de la responsabilité fiduciaire de la Couronne. Nous l'appuyons, oui.

+-

    M. Brian Pallister: Très bien.

+-

    Chef Matthew Coon Come: J'aimerais apporter une précision, monsieur le président, à propos de la question de M. Pallister. Je crois que le ministre a en fait recommandé que le chef national appuie la ratification de la Loi canadienne sur les droits de la personne au sujet de la Loi sur les Indiens.

+-

    Le président: Vous avez 45 secondes.

+-

    M. Brian Pallister: Je n'ai que peu de temps. Je voulais dire que nous partagions vos inquiétudes quand nous voyons le ministre proposer une mesure législative qui encouragera les bandes à détenir des pouvoirs dont elles ne semblent pas vouloir, d'après votre témoignage, et cela nécessitera des ressources. Il prévoit qu'il faudra plus de 100 millions de dollars pour les agents d'exécution et des agents de redressement pour chaque bande. Un bon nombre des gens des Premières nations à qui nous avons parlé sont beaucoup plus préoccupés par la qualité de l'eau, le logement et d'autres questions très graves.

    Pensez-vous comme moi que c'est faire un mauvais usage des ressources et que dans cette mesure législative on ne tient pas compte de l'avis des autorités supérieures des peuples autochtones?

Á  +-(1100)  

+-

    Le président: Merci, votre temps de parole est écoulé.

[Français]

    Monsieur Loubier.

+-

    M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe—Bagot, BQ): Merci, monsieur le président. Je voudrais continuer dans la même veine que mon collègue. Lorsque le ministre a comparu hier, il s'est réclamé du chef nisga'a, en affirmant que le chef lui avait dit que si on avait disposé d'une loi comme le projet de loi C-7 au moment où on a commencé à négocier l'autonomie gouvernementale des Nisga'as, cela aurait pu accélérer les choses et même améliorer le cadre des discussions et du processus. J'aimerais que vous commentiez cette réclamation du ministre par rapport au chef nisga'a, car ça m'a surpris d'entendre ça.

+-

    Vice-chef Ghislain Picard: D'après moi, ça a été la prétention du ministre tout au long du processus. Nous, ça fait maintenant deux ans que nous allons d'une assemblée à l'autre, d'une réunion à l'autre avec le même ordre du jour, qui est celui du processus législatif du gouvernement fédéral mené de plein front par le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, et chaque fois, nous revenons avec des positions très claires au niveau de notre assemblée, à savoir que le processus fait fausse route parce que, au départ--et nous l'avons souligné dans notre présentation--, il ne prend pas en compte la considération du présent gouvernement, la considération que, depuis 1987, le processus doit se faire sur une base conjointe avec une participation à part égale des premières nations et du gouvernement fédéral. Donc d'après nous, si le processus, dès le départ, fait fausse route, c'est que le résultat aussi va le faire.

+-

    M. Yvan Loubier: J'ai une autre question, monsieur le président, si vous me le permettez. Il y a eu une entente de principe entre les premières nations de Mashteuiatsh, d'Essipit, de Betsiamites et de Nutashquan. Monsieur Picard, vous êtes probablement le mieux renseigné sur cette entente-là. Dans les principes essentiels de cette entente, il y a la question de l'autonomie gouvernementale des premières nations.

    J'aimerais comprendre comment le projet de loi C-7, s'il était adopté, pourrait contraindre ou bien même annihiler les efforts qu'on a fournis dans cette entente de principe pour assurer l'autonomie gouvernementale avec toutes les conditions pouvant servir de bon tremplin pour les premières nations concernées. Comment le projet de loi peut-il intervenir pour freiner ou peut-être même annihiler les efforts d'autonomie gouvernementale dans cette entente particulière?

+-

    Le président: En 30 secondes.

+-

    Vice-chef Ghislain Picard: En réalité, l'argument du ministre est que finalement, lorsqu'on était à une table de négociations pour négocier ce type d'entente-là, on se soustrayait aux amendements à la Loi sur les Indiens, et c'est finalement une autre tactique pour creuser encore une fois le fossé entre ceux qui appuient et ceux qui n'appuient pas son processus législatif. Je pense qu'il n'y a rien d'autre à dire là-dessus; c'est une tactique du ministre.

+-

    Le président: Merci.

[Traduction]

    Monsieur Martin.

+-

    M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Merci, monsieur le président.

    Merci pour cet excellent exposé. Il suscitera certainement beaucoup d'observations.

    Je voudrais aborder brièvement trois points. Vous pouvez répondre à l'un ou l'autre, je suppose, parce que nous n'avons que très peu de temps.

    Tout d'abord, la Commission royale sur les peuples autochtones a dressé une liste des champs de compétences de base des peuples autochtones, ce qui inclut les institutions gouvernementales, les élections, certains aspects économiques particuliers et l'imposition. Estimez-vous que le projet de loi C-7 empiète sur des champs de compétences autochtones?

    Deuxièmement, le Sénat est en train de mettre au point un projet de loi omnibus pour retirer la disposition de non-dérogation de tous les textes législatifs portant sur des questions autochtones. Pensez-vous que cela s'inscrit dans un grand plan pour en réduire la portée? Comme vous le dites, tout cela porte systématiquement atteinte à différentes choses que vous avez soulevées. Êtes-vous préoccupé par ce nouveau projet de loi omnibus du Sénat visant à supprimer les dispositions de non-dérogation?

    Vous avez mentionné que le projet de loi C-7 ne contenait pas de disposition de non-dérogation. Nous avons bien sûr remarqué que dans de récents projets de loi le libellé de la disposition de non-dérogation a été édulcorée.

    Estimez-vous que le projet de loi C-7 ne devrait pas être amendé et qu'il faudrait même le retirer. Seriez-vous disposé à comparaître si le ministre avait le courage de reconnaître que tout cela est en train de déraper et qu'il faudrait songer à un retrait du projet de loi? Seriez-vous disposé à rencontrer le ministre et à rédiger une nouvelle loi qui pourrait peut-être reposer sur le plan des Premières nations que vous avez mentionné?

Á  +-(1105)  

+-

    Chef Matthew Coon Come: Pour répondre à la première question, nous avons toujours appuyé la Commission royale sur les peuples autochtones en ce qui concerne les fonctions de base. Je crois que cela devrait être mis en oeuvre. Nous pourrions ainsi vraiment avoir des initiatives des Premières nations qui émanent de la base pour tout ce qui concerne les coutumes, les valeurs et les traditions. C'était là l'intention de l'attribution de ces fonctions fondamentales. Compte tenu des ressources, je crois que nous pouvons suivre cette voie.

    Nous nous préoccupons beaucoup de la non-dérogation. Nous avons tellement d'accords, sans compter la disposition de non-dérogation que nous réclamons pour le projet de loi C-7. La Convention de la Baie James et du Nord québécois comporte une disposition de non-dérogation. Pratiquement toutes les conventions et tous les accords que vous avez signés avec les peuples des Premières nations contiennent une clause de non-dérogation ayant trait à une dérogation aux droits autochtones et issus de traités ou à une abrogation de ces droits. Cette tentative de retrait de cette disposition dans ce cas-ci nous préoccupe beaucoup. Je crois que, dans certains cas, on ne peut retirer cela sans le consentement des parties concernées. Nous nous occuperons certainement de cela en temps et lieu.

    Nous sommes prêts à rencontrer le gouvernement fédéral, le gouvernement du moment, quel qu'il soit, pour nous lancer sur la voie de réalisations que nous n'avons jamais entreprises auparavant. Ces recommandations découlent d'études antérieures, de rapports de commissions, entre autres, dont nous avons traité dans notre rapport. Nous sommes prêts à dire: Voici ce que nous voulons régler, occupons-nous-en. Ensemble, nous pouvons le faire.

    En soi, la Loi sur les Indiens est une loi secondaire. Elle continuera probablement d'exister jusqu'à ce que nous ayons tous disparu de la planète. Nous devrions travailler à la démanteler afin que nous puissions être affranchis et pour que nous puissions prendre ces décisions nous-mêmes. Nous devons trouver le moyen de coexister et d'avoir des partenariats réels plutôt que des relations antagonistes.

+-

    Le président: Merci beaucoup.

    Monsieur Godfrey.

+-

    M. John Godfrey (Don Valley-Ouest, Lib.): Il y a des choses que je ne comprends pas très bien, à commencer par la question que M. Pallister vous a posée. Hier, le ministre a décrit ainsi la relation avec les Premières nations:

Nous avons cherché à dialoguer sincèrement avec les peuples des Premières nations.

Permettez-moi de vous donner un exemple. Comme un bon nombre d'entre vous le savent, une fois l'initiative lancée, l'Assemblée des premières nations nous a demandés d'arrêter afin que nous puissions répondre à certaines de ces préoccupations. Nous avions déjà offert à l'Assemblée un rôle important dans la conception de l'initiative ainsi que dans le processus de consultation. Notre offre a été rejetée.

Malgré cela, j'ai accepté cette deuxième occasion d'un dialogue et d'une amélioration. En novembre 2001, après trois mois de discussions et de négociations pointues, l'ensemble du Conseil exécutif national de l'APN et moi sommes parvenus à une entente historique. Il n'y avait aucune abstention, aucune objection. Ensuite, comme vous le savez tous, l'entente s'est effondrée quelques semaines plus tard. Une minorité des chefs des Premières nations a voté contre le plan de travail du Conseil exécutif national.

    Est-ce là une description juste de ce qui s'est produit?

+-

    Chef Matthew Coon Come: Lorsque le ministre a annoncé la tenue des consultations, il a parlé de gouvernance. Dans notre esprit, la gouvernance est un concept qui inclut bien des choses. Toutefois, lorsque nous l'avons effectivement rencontré—et il est normal que nous le rencontrions pour savoir ce que sont ses idées—nous avons vu que cela ne correspondait pas à ce que nous attendions. Il voulait nous parler d'élections, d'administration des bandes, de gestion financière, de reddition de comptes. Or, nous voulons parler de condition d'appartenance, nous voulons traiter de la mise en oeuvre des traités, nous voulons nous occuper des terres, des territoires, etc.

    Nous nous sommes rendu compte que nous ne pouvions pas convaincre le ministre d'apporter des modifications. Il refusait de s'écarter du chemin qu'il s'était tracé: «Voilà ce que je vais faire. Si vous n'êtes pas d'accord, très bien, mais je vais quand même le faire». Ce ne sont pas là des négociations, il n'y a aucun compromis possible. Si au moins il avait dit: «Nous traiterons de la reddition de comptes ailleurs, ainsi que des élections, et de vous...» Là, il y aurait eu véritablement échange de vues. Nous aurions pu alors dire que nous voulons traiter des questions d'appartenance, que nous voulons traiter de la citoyenneté, parce que ces choses-là sont importantes pour déterminer les services et les programmes que nous pouvons offrir à ceux de nos membres qui vivent dans les réserves ou qui, pris au dépourvu, ne savent pas à quel organisme s'adresser pour obtenir qu'on leur fournisse des services.

    Ayant pris l'initiative d'essayer d'apporter des modifications, nous n'avions bien sûr rien à offrir à nos membres, parce qu'il nous était impossible d'amener le ministre à changer d'avis. Nous sommes retournés voir nos mandants et leur avons dit que nous avions essayé, mais que le ministre n'était pas prêt à bouger. Bien sûr, ils ont rejeté le résultat de ces pourparlers. Lorsque les chefs rejettent des propositions, n'est-ce pas là l'exercice de la démocratie?

Á  +-(1110)  

+-

    M. John Godfrey: Merci.

+-

    Le président: Nous commençons un tour de table où chaque député dispose de deux minutes. Monsieur Pallister, à vous.

+-

    M. Brian Pallister: Quand, pour la dernière fois, avez-vous rencontré le ministre?

+-

    Chef Matthew Coon Come: J'ai parlé au ministre juste avant Noël et probablement en novembre.

+-

    M. Brian Pallister: Comment décririez-vous votre relation avec le ministre?

+-

    Chef Matthew Coon Come: Je pense que notre relation est cordiale, mais je trouve qu'il porte des oeillères et qu'il n'est pas souple. Nous tachons de trouver des solutions, d'établir des partenariats. Je ne sais pas quand le gouvernement lui a donné l'autorisation de ne pas suivre «Rassembler nos forces», de ne pas travailler en formant des partenariats. Je crois que ses actes devraient traduire clairement son attitude à l'endroit des Premières nations du Canada. 

+-

    M. Brian Pallister: Une des préoccupations que suscite parmi nous le modèle que le ministre préconise, monsieur Coon Come, tient au fait que, pour l'essentiel, il propose plus de 600 mécanismes distincts de prestation de services. Je sais que beaucoup de représentants de vos bandes m'ont dit avoir commencé, de façon coopérative, à élaborer des prestations de services institutionnels et professionnels. Croyez-vous que, si cette loi est adoptée, il est réellement possible que ce genre de travail en collaboration se poursuive?

    Bien sûr, notre préoccupation tient au fait que cette loi est axée sur l'hypothèse que chaque bande aura le pouvoir d'avoir son propre ombudsman—de petits ombudsmen serviles semblables au conseiller en éthique que le premier ministre a embauché pour lui donner des conseils—de sorte que les chefs se trouveront dans la situation insoutenable d'avoir à nommer quelqu'un comme agent de redressement et de devoir ensuite choisir ou non de suivre les conseils donnés. Pensez-vous, comme nous, que nous devrions nous orienter vers une prestation des services plus coopérative, plus collégiale, afin de nous éloigner des méthodes actuelles de prestation de services en matière de garde d'enfants, de soins de santé, de logement, etc.?

+-

    Chef Matthew Coon Come: Le projet de loi C-7 ne traite pas de la véritable gouvernance. Il ne traite même pas de la saine gouvernance, de la façon d'obtenir les compétences nécessaires, des ressources à offrir pour créer de véritables bons gouvernements et pour avoir des collectivités vraiment autosuffisantes au plan économique.

    Nous voulons, bien sûr, nous occuper des questions de santé, d'éducation, de bien-être des enfants et de régie du territoire. Or, ce projet de loi maintient la mainmise du ministre sur nos populations, ne nous accorde du pouvoir que dans les réserves et ne reconnaît pas notre compétence sur les territoires qui sont plus vastes que ces réserves.

[Français]

+-

    Le président: Merci.

    Monsieur Loubier.

+-

    M. Yvan Loubier: Monsieur Picard, j'aimerais que vous précisiez une chose que vous m'avez dite plus tôt.

    Vous dites, à propos de l'entente conclue avec les Innus, que depuis le début de la négociation, les premières nations concernées sont exclues de l'application éventuelle du projet de loi C-7 puisqu'il y est question pour elles d'autonomie gouvernementale, soit de la création de leurs propres institutions, avec pouvoirs exécutifs, législatifs et judiciaires.

    Vous dites qu'étant donné ces deux dispositions, les Innus qui participent à cette négociation seraient exclus du projet de loi C-7 mais que ce dernier pourrait s'appliquer si, en cours de route, l'entente n'était pas ratifiée.

+-

    Vice-chef Ghislain Picard: En fait, en l'absence d'une entente qui serait concluante pour les Innus, le projet de loi C-7, c'est-à-dire les modifications à la Loi sur les Indiens, s'appliquerait d'entrée de jeu.

+-

    M. Yvan Loubier: Cela implique qu'en dépit du fait que dans le traité, on dit vouloir, comme vous l'avez mentionné pour le C-7, respecter les institutions actuelles et rebâtir les premières nations, si un traité n'est pas signé avant l'adoption du projet de loi C-7, tous les efforts qui sont déployés dans le cadre de l'entente de principe avec les Innus seront complètement annulés par l'application de ce projet de loi.

+-

    Vice-chef Ghislain Picard: À notre connaissance, selon les estimations mêmes du ministère des Affaires indiennes, il y a moins d'une centaine de tables de négociations à travers le pays. Certaines ont été conclues, d'autres pas, mais cela permettrait à ces tables-là, soit à des communautés ou à des regroupements de communautés, de se soustraire, finalement, de la législation.

    Je pense qu'il y a un point important à souligner dans ce qui a été avancé un peu plus tôt quant à l'attitude du ministre. Il y a des endroits où on parlait du regroupement d'organisations. Je pense que cela a été notre volonté tout au long de l'exercice. Je parle de notre région en particulier, où on est engagés dans un processus qui vise justement à donner un peu plus de force et un peu plus de poids à des institutions régionales autochtones. Ce qu'on sait depuis peu de temps, c'est que ces processus-là ne valent plus grand-chose ou ne signifient plus grand-chose. Or, je pense que c'est tout à fait contraire à notre compréhension de que qu'est la gouvernance ou de ce que devrait être la gouvernance.

+-

    Le président: Merci.

[Traduction]

    Monsieur Martin, à vous la parole.

Á  +-(1115)  

+-

    M. Pat Martin: Merci, monsieur le président.

    Monsieur Coon Come, il y a de graves allégations de représailles contre ceux qui ne collaboreront pas avec la mise en oeuvre du projet de loi C-7. Vous avez dit que votre propre organisme a vu son budget réduit de 50 p. 100 au moment où il a exprimé son opposition au projet de loi C-7. L'Association des femmes autochtones du Canada a refusé de collaborer et on a aussitôt assisté à la création et au financement d'une nouvelle association des femmes autochtones. J'ai ici toute une liste d'autres mesures vexatoires. Trouvez-vous qu'il y a un lien direct entre le fait que le ministre soit opprimant et vengeur et le fait que ceux qui jouent le jeu du projet de loi C-7 sont récompensés alors que ceux qui ne collaborent pas sont punis?

+-

    Chef Matthew Coon Come: Je constate que le ministre ne respecte pas les dirigeants élus, qu'il crée de nouveaux organismes composés de personnes qui sont d'accord avec lui, qu'il punit ceux qui s'opposent à lui plutôt que de travailler à harmoniser les relations et à nous donner les ressources financières et humaines qui nous permettront de travailler ensemble pour résoudre les véritables problèmes de gouvernance.

    C'est triste à dire, mais il se comporte comme les anciens agents indiens: «Je sais ce qui est bon pour vous. Voici ce que je vais faire. Si cela ne vous plaît pas, tant pis. Si vous ne voulez pas me parler, je vais constituer un organisme»—comme il l'a fait avec l'Association des femmes autochtones—«et c'est à cet organisme que je parlerai. Je parlerai aux gens à qui je veux parler.»

    Je veux bien qu'il parle à qui bon lui semble, mais il me semble qu'il faut respecter les dirigeants qui ont été élus, qu'il faut essayer de coopérer avec eux.

+-

    M. Pat Martin: Au moment même où les amendements les plus complexes proposés depuis 50 ans à la Loi sur les Indiens vous arrivent, vous vous trouvez contraint de licencier 70 personnes dont la majorité sont des experts et des sommités en la matière. Ne conviendriez-vous pas que cela équivaut à traduire quelqu'un devant un tribunal en lui refusant tout accès aux services juridiques dont il aura besoin pour pouvoir se défendre efficacement?

+-

    Chef Matthew Coon Come: Effectivement, c'est un peu le sentiment que nous avons; nous n'avions pas le droit de vote et ce droit est maintenant rétabli. Désormais, c'est le ministre qui aura le dernier mot en ce qui concerne l'identité des dirigeants élus. Tous les registres, tous les statuts seront au cabinet du ministre. Celui-ci resserre encore son emprise sur les nôtres en nous disant qu'il sait ce qui nous convient le mieux, alors qu'il devrait travailler avec nous pour arriver à une véritable initiative conjointe, à un véritable partenariat.

+-

    Le président: Je vous remercie. Vous aurez l'occasion de dire un mot en guise de conclusion.

    Ayant donc accepté cette dernière question et cette dernière réponse, je suis sûr que je ne serai jamais accusé d'avoir censuré qui que ce soit. C'est là quelque chose que je garderai à mon crédit.

    Madame Karetak-Lindell, vous avez deux minutes.

+-

    Mme Nancy Karetak-Lindell (Nunavut, Lib.): Je vous remercie.

    L'un des objectifs énoncés dans la loi est «d'offrir aux bandes des outils de gouvernance plus efficaces en attendant la négociation du droit inhérent à l'autonomie gouvernementale et sa mise en oeuvre». N'avez-vous pas l'impression que les outils en question pourraient être, pour certaines bandes, un genre de tremplin qui leur permettra d'obtenir des outils efficaces? Je parle ici de la gestion des terres que nous avons mise en place il y a quelque temps déjà en Ontario.

    Je me souviens qu'il y avait à l'époque quelques bandes qui doutaient que ce régime leur permettrait de devenir un peu plus indépendantes financièrement parlant. Mais quelques années plus tard, les bandes sont de plus en plus nombreuses à vouloir tenter cette option.

    À votre avis, quels sont ceux des outils offerts par ce projet de loi qui ne sont pas efficaces?

+-

    Chef Matthew Coon Come: J'ai toujours pensé que la Loi sur les Indiens était une disposition transitoire en attendant la mise en oeuvre de nos traités. Il faut utiliser cette adéquation et mettre en oeuvre l'esprit et la lettre des traités, mais également nous donner les outils nécessaires.

    La Commission royale sur les peuples autochtones avait recommandé la création d'un institut sur la gouvernance qui était censé étudier des modèles de gouvernance, mais non pas des questions comme la reddition de comptes, les élections et ainsi de suite, mais plutôt s'axer sur la véritable gouvernance, celle qui nous permettrait de créer nos propres institutions, nos institutions politiques, et permettre aux Premières nations de décider ce qui leur convient le mieux, étant donné qu'un modèle unique ne correspond pas nécessairement aux besoins de tous. Nous pensions par conséquent avoir un institut de ce genre, mais le ministre a supprimé le financement.

    Cet institut était donc censé étudier différents modèles de gouvernance étant donné qu'il y a au Canada 50 Premières nations différentes. Les Cris ne ressemblent pas aux Mohawks. Les Mohawks ne ressemblent pas aux Haidas et le système mohawk ne ressemble pas au système héréditaire des chefs qu'on trouve en Colombie-Britannique. Nous pensions donc avoir un système, des recommandations qui pourraient servir de point de départ. Mais le ministre a dit non, il a dit qu'il voulait s'occuper des questions exclusivement administratives.

    Et même là, il ne fait rien pour le renforcement des capacités, avec de véritables ressources, avec une véritable formation, tout ce qui nous permettrait d'utiliser cela comme point de départ.

    Lorsque nous avons négocié le remplacement de la Loi sur les Indiens pour les Cris et les Naskapis, nous avons bien veillé à ce qu'il y ait des dispositions financières. Nous n'étions pas prêts à accepter une loi qui ne soit pas assortie d'une autorisation financière du Parlement pour en permettre la mise en oeuvre. Nous avons bien veillé à ce qu'il y ait des manuels, des principes comptables et ainsi de suite pour nous dire comment rendre compte des sommes que nous allions recevoir. Nous devions alors nous doter des capacités nécessaires pour pouvoir former les nôtres.

    À l'heure actuelle, vous appelez ceci une mesure temporaire, mais pas moi. Cette mesure législative devrait régler la question des terres, mais la Loi sur la gouvernance des Premières nations est muette pour ce qui est des terres.

Á  +-(1120)  

+-

    Le président: Merci.

    Monsieur Hubbard.

+-

    M. Charles Hubbard (Miramichi, Lib.): Merci, monsieur le président.

    Pour dire les choses simplement, grand chef, il arrive que nous nous trouvions nous-mêmes dirigés par des sources indépendantes de nous. Ainsi, il y a Sandra Lovelace. Encore une fois, il y a ce jugement concernant les électeurs, qui nous dit qui peut voter et qui sont les membres.

    Vous avez parlé des membres et de votre propre position à ce sujet. Vous pourriez peut-être nous décrire rapidement la position de l'APN à ce sujet.

+-

    Chef Matthew Coon Come: En deux mots, ce que je pense moi, c'est que la base de l'autonomie politique, le principe du droit à l'autodétermination, qui permet de créer nos propres institutions politiques, signifie que nous aurions le pouvoir de déterminer qui sont nos membres et être en mesure d'élaborer ces lignes directrices. Je pense que c'est le gouvernement des Premières nations qui devrait en décider, avec ses membres, tout comme le gouvernement du Canada décide qui est canadien et qui devrait pouvoir être canadien, qui devrait pouvoir immigrer au Canada.

    Je pense que nos Premières nations pourraient le faire. Nous voulons nous occuper de ce genre de choses. Le problème des membres est l'une des questions que nous avions signalées lorsque nous avions parlé au ministre de cette loi sur la gouvernance.

+-

    M. Charles Hubbard: Tous vos membres acceptent-ils l'arrêt Lovelace et pourquoi a-t-il fallu que cela se fasse à l'étranger?

+-

    Chef Matthew Coon Come: Je dirais qu'il arrive, malheureusement, que nous devions nous adresser à l'étranger, aux instances internationales, pour faire pression sur le Canada afin de lui rappeler qu'il enfreint des droits humains fondamentaux et que ces droits sont universels. C'est pour cette raison que nous devons aller à l'étranger.

+-

    M. Charles Hubbard: Et est-ce que tous vos membres souscrivent à l'arrêt Lovelace?

+-

    Chef Matthew Coon Come: Bien entendu. Si vous vous souvenez bien, l'arrêt Lovelace portait sur la Loi sur les Indiens qui était discriminatoire à l'endroit des femmes qui avaient épousé un non-Indien puisque celles-ci perdaient ipso facto leur statut d'Indien.

    Je connais très bien la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec qui a remplacé la Loi sur les Indiens. J'avais été l'un des principaux négociateurs. Nous nous étions saisis de la question des membres en disant qu'il fallait laisser ceux-ci décider en la matière. Nous avons créé des mécanismes pour le faire et pour déterminer qui seraient les bénéficiaires de ces accords.

    Les Innus vont devoir faire la même chose dans le cadre de l'accord qu'ils ont signé. Ils vont devoir déterminer qui sont les bénéficiaires.

+-

    Le président: Grand chef, je voudrais vous remercier très sincèrement pour ce que vous nous avez dit. Il nous restera cinq minutes pour vous permettre de conclure.

    Toutefois, avant de le faire, je voudrais au nom du comité vous dire que nous prenons très au sérieux cette tâche qui nous a été confiée par le Président de la Chambre.

    Dans votre exposé, vous avez parlé des événements historiques qui influent sur le travail que nous devons faire. Je voudrais qu'il soit parfaitement clair que notre comité n'est pas un comité de l'État ou du ministre ou du premier ministre. Il s'agit d'un comité de la Chambre des communes. La Chambre nous a confié l'étude d'un projet de loi. Pour nous, ce projet de loi n'appartient ni à l'État, ni au ministre, ni au premier ministre. C'est un projet de loi qui appartient à la Chambre des communes.

    D'aucuns nous diront pendant les neuf prochaines semaines que nous devrions mettre ce projet de loi à la poubelle. Mes collègues savent très bien que la seule façon de mettre ce projet de loi à la poubelle serait de voter contre ses 59 articles au moment où nous en ferons l'examen article par article. C'est la seule façon de mettre à la poubelle un projet de loi. Nous ne pouvons nous contenter de dire que nous nous en lavons les mains. La Chambre des communes nous a confié une responsabilité et, par conséquent, il nous appartiendra d'examiner chacun des articles du projet de loi pour tenter de trouver le moyen d'améliorer le sort de ceux et celles qui seront affectés par celui-ci. Nous allons donc assumer cette responsabilité, mais sans pour autant dire que les autres événements historiques, que les autres conséquences, n'ont pas leur importance. Tout au contraire. Il n'en reste pas moins que nous avons un travail à faire et que nous le ferons.

    Il faut également que je vous dise que, le printemps dernier, avant la rédaction du texte de ce projet de loi, le comité a consacré trois mois à se familiariser avec le contexte historique et avec le projet de loi. Nous allons maintenant passer les neuf prochaines semaines, quasiment à plein temps... Nous aurons quatre semaines de quatre ou de cinq jours pour tenir des audiences en déplacement et l'une de ces quatre semaines, nous allons même partir un dimanche, ce qui donnerait une semaine de six jours.

    Nous allons donc accorder au projet de loi tout le respect et toute l'attention qu'il mérite parce que nous pensons qu'il a une grande importance. Nous voulons donc vous promettre que c'est cela que nous ferons.

    Je vous invite maintenant à nous livrer votre conclusion.

Á  +-(1125)  

+-

    Chef Matthew Coon Come: Monsieur le président, je vous remercie beaucoup ainsi que les membres du comité.

    Je voudrais dissiper cette impression que les Premières nations sont contre la responsabilité ou ne rendent pas compte de l'argent qui nous est accordé. Je voudrais vous donner un exemple extrait d'un accord de contribution. Avec tout l'argent qui a été accordé aux Premières nations, il y a toujours eu un accord de contribution qui précise nos obligations.

    En fait, on appelle cela un «cadre redditionnel». C'est un contrat juridique. Ce contrat parle de transparence. Il dit ceci, et je cite:

tient des registres financiers et prépare des états financiers visant à permettre la préparation de la vérification par le Conseil

    Ce cadre parle également d'états financiers, et je cite:

états financiers annuels vérifiés préparés conformément au Manuel des rapports de fin d'exercice et ses modifications. Lorsque le ministre en fait la demande par écrit, une copie des états financiers annuels vérifiés est mise à sa disposition.

    Il parle également de budgets, en l'occurence:

Le Conseil doit avoir un budget correspondant à la durée du présent accord et ce budget doit faire état de la façon dont le Conseil va diviser les fonds qui lui sont versés dans le cadre du présent accord pour la prestation des programmes et des services aux membres [de la bande].

    Il parle aussi de conflit d'intérêt, en l'occurence:

Le Conseil doit élaborer, mettre en oeuvre et tenir des lignes directrices sur les conflits d'intérêt

    Et il précise le minimum.

    Ce cadre parle également du conseil, et je cite:

Le Conseil doit approuver toutes les sources de rémunération des administrateurs élus et des membres du personnel comme les salaires, honoraires, indemnités quotidiennes et niveaux maximums de rémunération qui peuvent être touchés par toute personne pour les fonctions reliées à une charge.

    Il parle également de prêts, en l'occurence:

une politique écrite concernant les prêts que ses membres doivent pouvoir consulter sur demande;

    Il parle de divulgation, en l'occurence:

Le Conseil doit mettre les informations suivantes à la disposition de ses membres sur simple demande de ceux-ci, sans autre frais que le coût raisonnable de leur reproduction.

    Ce cadre parle de budgets et entre autres du rapport du vérificateur. Il parle des politiques, des lignes directrices, des services écrits, des normes, des critères d'admissibilité et de tout autre document couvert par cet accord.

    Il parle également de recours:

mécanismes impartiaux et clairement définis pour le dépôt et le règlement des différends et qui donne à toutes les parties la possibilité d'être entendues

    C'est donc un accord type. Nous ne sommes pas contre la responsabilisation. Déjà, nous avons signé avec le gouvernement fédéral des contrats sur la distribution des fonds publics qui en précisent les modalités.

    Nous ne sommes donc pas contre la responsabilisation. Je dirais que nous sommes ceux qui rendent le mieux compte. Saviez-vous par exemple qu'une bande, celle de l'ancien chef Ron Ignace à Kamloops, dont les statuts prescrivent que le chef et le conseil doivent tous démissionner si le budget est en déficit? Démissionneriez-vous si le gouvernement affichait un déficit budgétaire?

    Vous pourriez peut-être me poser la question à la fin de l'année pour le budget de l'APN, mais cela c'est une autre histoire.

    Je pense donc que notre position est très claire. Les traités sont bons et la Loi sur la gouvernance des Premières nations n'est pas bonne.

    Je vous remercie beaucoup.

+-

    Le président: Merci beaucoup.

    Nous n'allons pas interrompre la séance mais plutôt passer directement à son volet suivant, l'audience publique, et je vais inviter nos témoins suivants à prendre place à la table.

    Nous accueillons donc pour cette partie-ci de nos travaux la vérificatrice générale du Canada, Mme Sheila Fraser. Bienvenue madame.

    Mme Fraser est accompagnée par la vérificatrice générale adjointe, Mme Maria Barrados, et par le directeur principal, Jerome Berthelette.

    Je vous souhaite donc la bienvenue à tous trois et je vous invite à nous faire votre exposé. Je pense que vous avez constaté comment les choses se passaient. J'aurais peut-être dû signaler la dernière fois que lorsque nous disons que les tours de questions sont de trois minutes, il s'agit de trois minutes pour la question et la réponse. Si la question dure trois minutes, il faudra que vous y répondiez dans le cadre de la question suivante, si vous voulez vraiment répondre à cette question. C'est cela l'arnaque.

    Des voix: Oh, oh!

    Le président: Nous vous écoutons donc.

Á  +-(1130)  

+-

    Mme Sheila Fraser (vérificatrice générale du Canada, Bureau du vérificateur général ): Merci, monsieur le président, et je ferai de mon mieux pour glisser mes réponses.

    Monsieur le président, je vous remercie de m'avoir invitée à comparaître aujourd'hui pour discuter des travaux effectués par notre bureau qui peuvent être pertinents à l'étude du projet de loi C-7.

    Je suis accompagné aujourd'hui de Mme Maria Barrados, vérificatrice générale adjointe, et de M. Jerome Berthelette, directeur principal, qui sont responsables de nos travaux sur les questions autochtones.

    Comme vous le savez peut-être, les questions autochtones constituent l'une des cinq priorités stratégiques de mon bureau. Elles comptent actuellement parmi les défis les plus importants et les plus complexes auxquels le Canada est maintenant confronté. Nos travaux sont axés sur les programmes gouvernementaux qui influent sur les conditions sociales, économiques et environnementales des communautés autochtones, mais nos méthodes intègrent les vues des Premières nations.

    Nous sommes heureux de pouvoir présenter au comité nos propres vues fondées sur les vérifications et les études que nous avons menées au cours des dernières années. Nous avons également apporté avec nous de la documentation qui résume cette information. Nous croyons comprendre que le comité désire connaître nos vues sur la gestion financière et l'obligation de rendre compte.

    Monsieur le président, le bureau se préoccupe depuis longtemps à ce que le gouvernement améliore sa gestion financière. À cet effet, nous avons conçu une approche, un modèle, qui décrit les principaux éléments essentiels à une gestion financière efficace. Bien que notre modèle ait été conçu pour les ministères et organismes fédéraux, nous croyons que ces éléments peuvent être utiles dans le cadre de vos délibérations sur les dispositions du projet de loi C-7 concernant la gestion financière. La gestion financière représente une partie importante de l'exécution des programmes et de la prestation des services de même que de l'intendance des ressources qui y sont affectées.

[Français]

    Nous admettons que les organisations n'ont pas toutes besoin des mêmes capacités de gestion financière. Cependant, certains éléments de base s'appliquent à un large éventail d'organisations, dont les premières nations, et en voici quelques-uns: élaborer et communiquer une vision claire de l'orientation stratégique de l'organisation; établir un cadre de gestion et de contrôle de tout risque qui pourrait nuire à l'atteinte des objectifs de l'organisation; gérer et protéger l'intégrité de l'information financière; présenter cette information à des fins redditionnelles et gérer et diriger les ressources de manière économique et efficiente afin d'atteindre les objectifs.

    En bout de ligne, nous croyons qu'une organisation ne peut avoir une gestion financière efficace si son milieu ou sa culture ne sont pas propices à une telle gestion, laquelle doit également être appuyée par un régime approprié de récompenses, de reconnaissance et de sanctions. Un milieu propice signifie notamment un leadership continu, des valeurs communes, ainsi qu'un engagement et un but commun. Il faudra peut-être du temps pour atteindre les objectifs de gestion financière du projet de loi. Il se peut que plusieurs premières nations doivent se doter de capacités de gestion financière plus solides pour respecter pleinement l'intention de la loi.

    La majorité des communautés des premières nations, soit 61 p. 100, comptent moins de 500 résidants. De nombreuses communautés, soit 21 p. 100, sont situées dans des régions isolées et éloignées. De plus, chaque communauté a une culture, des traditions et un niveau de développement économique qui lui sont propres. Les capacités de gestion financière dont elles ont besoin varient. Tout cadre général pour l'ensemble des communautés devrait être assez souple pour tenir compte de ces différences, mais il devrait également inclure des éléments de base.

Á  +-(1135)  

[Traduction]

    En 1996, mon bureau a étudié les vues des Premières nations concernant leur relation redditionnelle avec le gouvernement fédéral. Il ressortait principalement de cette étude que la capacité administrative des Premières nations devait s'harmoniser avec leurs responsabilités en matière d'exécution de programmes, de sorte que les conseils de bande puissent davantage rendre compte à leurs membres. Les Premières nations considéraient aussi leur obligation redditionnelle envers le gouvernement fédéral sous l'angle d'une obligation semblable de la part des organisations fédérales.

    Les Premières nations ne possèdent pas certains des pouvoirs et des capacités de gouvernance dont disposent d'autres gouvernements au Canada; elles ne sont pas non plus tenues de satisfaire aux mêmes exigences de transparence.

    Nos travaux de vérification à Affaires indiennes et du Nord canadien ont révélé que les mécanismes de recours et de règlement des plaintes doivent être améliorés en tant qu'élément de la reddition de comptes. Le ministère doit aussi tenir compte du fait que du point de vue des Premières nations, leur relation redditionnelle avec le gouvernement fédéral implique une obligation réciproque.

    Dans une étude récente, mon bureau a constaté que les exigences des organismes fédéraux en matière de rapport représentent un lourd fardeau pour les Premières nations. Parmi le très grand nombre de rapports que le gouvernement fédéral exige chaque année—au moins 168 de chaque Première nation—, nous avons détecté beaucoup de chevauchements et de répétitions. Les organismes fédéraux qui exigent ces rapports n'utilisent pas efficacement la majeure partie de l'information reçue. Nous avons conclu que les ressources consacrées au système de rapport pourraient être utilisées à meilleur escient.

    Le projet de loi C-7 renforce l'obligation redditionnelle des conseils de bande envers leurs membres, mais il ne modifie pas les exigences en matière de rapport des ententes de financement existantes entre les Premières nations et les organismes fédéraux. Un bon nombre des dispositions de ces ententes, notamment les exigences concernant la transparence et les vérifications des états financiers, ont été intégrés au projet de loi et auront force de loi.

[Français]

    Monsieur le président, le système de rapport actuel n'est pas viable. Nous avons recommandé que le gouvernement fédéral examine les rapports qu'il exige des premières nations et qu'il supprime ceux qui ne sont pas nécessaires, qu'il rationalise les programmes définis de façon restrictive et qu'il fasse une meilleure répartition des responsabilités liées aux programmes entre les organismes fédéraux. Le gouvernement a convenu qu'un tel examen doit être mené parallèlement à son examen en cours des pouvoirs se rattachant aux programmes, lequel doit prendre fin au plus tard en 2005.

    Plusieurs organismes fédéraux fournissent un soutien aux autochtones. Quatre de ces organismes ont fourni 95 p. 100 du financement fédéral aux premières nations en 2001-2002, soit Affaires indiennes et du Nord Canada, avec 67 p. 100; Santé Canada, 19 p. 100; Développement des ressources humaines Canada, 5 p. 100 et la Société canadienne d'hypothèques et de logement pour 4 p. 100.

    On doit préciser les rôles et les responsabilités des ministres, de leur ministère, des sociétés d'État et des autres entités fédérales qui aident les premières nations à améliorer leur gestion financière et leur reddition de comptes.

[Traduction]

    Enfin, le délai de deux ans prévu par le projet de loi pour la mise en application du code portant sur la gestion financière et l'obligation de rendre compte peut-être difficile à respecter pour les petites Premières nations qui n'ont pas une capacité administrative suffisante.

    En conclusion, monsieur le président, bien que notre rôle ne consiste pas à faire de commentaires sur les propositions législatives du gouvernement, nous sommes heureux de partager avec vous ce que nous avons appris dans les secteurs où nos travaux nous ont permis d'acquérir une certaine expertise.

    Nous prévoyons réaliser d'autres vérifications et études sur les questions autochtones puisqu'il s'agit de l'une de nos priorités. Nous serons heureux d'entendre vos suggestions à ce sujet.

    Je vous remercie, et nous nous ferons un plaisir de répondre aux questions du comité.

+-

    Le président: Merci beaucoup.

    Nous commencerons par un premier tour de cinq minutes. Par conséquent, l'opposition officielle aura droit à sept minutes.

    Monsieur Pallister.

+-

    M. Brian Pallister: Merci.

    Merci beaucoup, madame Fraser, pour votre rapport.

    Vous avez fait allusion, dans le rapport que vous venez de publier, au fardeau que représentent les exigences administratives imposées à l'administration des bandes, entre autres les 168 rapports exigés chaque année, et dans certains cas même plus de 200, si j'ai bien compris ce que vous avez dit. Pour ceux d'entre nous qui ont déjà essayé de préparer notre propre déclaration d'impôt sur le revenu, nous pourrions envisager le fardeau que nous imposons aux administrateurs de bande locaux.

    Cela dit, ce qui m'a vraiment frappé dans votre rapport c'est l'observation selon laquelle la majeure partie de cette information n'est pas vraiment utilisée. On n'en tient pas compte. S'il nous est impossible d'assurer la reddition des comptes à l'aide de 200 rapports par an, pourquoi le serait-ce à l'aide de 210, 220 ou 250 rapports?

    Je veux mettre moins l'accent sur l'obligation de rendre compte imposée par Ottawa et davantage sur la façon dont, au niveau local, les gens peuvent améliorer l'efficacité de leurs modèles de gouvernance pour eux-mêmes. Notre principale préoccupation, c'est que les rapports financiers soient intelligibles pour les gens au niveau local, qu'ils soient détaillés et qu'ils soient accessibles sans qu'il fasse nécessairement passer par le bureau du chef pour les obtenir. Pouvez-vous commenter ces trois attentes? Nous allons bien entendu y donner suite à l'aide d'amendements et de divers mécanismes. Mais j'aimerais entendre vos commentaires sur ces trois sujets de préoccupation.

Á  +-(1140)  

+-

    Mme Sheila Fraser: En tant que vérificatrice générale, je suis évidemment très préoccupée par l'obligation de rendre compte et la transparence. Ce sont deux valeurs fondamentales qui nous tiennent à coeur.

    Dans l'étude que nous avons faite, nous sommes arrivés la conclusion que si on examine le programme en soi, les dispositions en matière d'obligation de rendre compte sembleraient appropriées et l'information demandée n'était pas forcément excessive. C'est la combinaison de tous ces éléments qui fait que cela devient un fardeau.

    L'une des principales conclusions auxquelles nous sommes aussi arrivés, c'est que le gouvernement fédéral devrait utiliser le même type d'information que la Première nation fournit à ses propres membres, et qu'il faudrait améliorer la consultation entre le gouvernement et les Premières nations pour déterminer le type d'information dont se sert la Première nation pour administrer ses activités, le type d'information qu'il conviendrait de fournir aux membres de la bande, et que cette information constitue la base de la reddition des comptes au gouvernement fédéral. Un bon exemple, ce sont les exigences concernant les états financiers. Le gouvernement fédéral exige d'une Première nation cinq types différents d'états financiers vérifiés. Je pense que nous pouvons tous convenir qu'un seul état financier permettrait de répondre aux besoins des divers intéressés.

    Donc, je crois qu'il s'agit davantage d'une question d'intégration, de traiter de cet aspect de façon horizontale, plutôt que de s'arrêter à un aspect très particulier et plus étroit du programme.

+-

    M. Brian Pallister: Je vous remercie de cette observation. Lorsque l'on a 13 ministères différents et que dans bien des cas chaque bande doit se conformer à cette multitude d'exigences, cela semble représenter un lourd fardeau.

    J'aimerais aborder la question des recours. Vous avez insisté dans vos commentaires aujourd'hui, et dans des commentaires précédents, sur l'importance des mécanismes de recours et d'appel. Nous craignons beaucoup qu'en vertu de cette proposition, des mécanismes qui pourraient être efficaces pour la majorité des bandes ne fonctionnent pas pour d'autres bandes parce que les agents de bande,comme on les appelle dans ce projet de loi, seraient nommés par le chef et conseil même.

    Pouvez-vous nous proposer un autre modèle qui pourrait être envisagé et qui permettrait une plus grande indépendance que la nomination d'un agent de bande par un chef? Un grand nombre des chefs à qui j'ai parlé trouvent cette proposition risible. Avez-vous une autre solution à nous proposer?

+-

    Mme Sheila Fraser: Je ne crois pas, monsieur le président, qu'il soit de mise pour nous de proposer des modèles. Nous pouvons vous indiquer certaines des préoccupations que nous avons relevées dans notre travail précédent et certaines des préoccupations que nous ont communiquées aussi les Premières nations. Je demanderais à M. Berthelette de vous donner des précisions à ce sujet. 

+-

    M. Brian Pallister: Si vous le pouviez, oui, parce que de toute évidence nous tenons tous à nous assurer que nous proposons des modèles qui fonctionnerons non seulement dans des situations théoriques idéales, mais qui seront d'une utilité pratique pour les Premières nations elles-mêmes.

+-

    M. Jerome Berthelette (directeur principal, Bureau du vérificateur général ): Les mécanismes de redressement et de règlement des différends sont importants pour les collectivités. Ils permettent de maintenir l'ordre public et d'entretenir des relations harmonieuses, de régler des différends, et d'aider la collectivité à aller de l'avant en cas de problèmes.

    Le mécanisme proposé par la loi laisse entendre que le chef et le conseil devraient pouvoir nommer une personne ou un organisme. Il laisse également entendre que les collectivités peuvent se réunir et élaborer des mécanismes de redressement à un niveau plus élevé. La loi semble vouloir faire preuve de souplesse en offrant aux collectivités des possibilités d'élaborer des mécanismes de règlement des différends qui vont au-delà de la simple nomination d'une personne ou d'un organisme par un chef et un conseil.

Á  +-(1145)  

+-

    M. Brian Pallister: C'est tout à fait raisonnable, mais des propositions théoriques de coopération qui prévoient entre autres la cession de certains pouvoirs ont tendance à ne pas très bien fonctionner. C'est pourquoi je vous demande si à votre avis un autre modèle—par exemple, un modèle régional selon lequel diverses bandes se réuniraient pour nommer un agent de bande, ce qui créerait ainsi une forme de séparation entre l'administration et son propre agent de bande --ne serait pas plus efficace. Ne croyez-vous pas qu'il est tout simplement logique qu'un tel modèle serait beaucoup plus efficace? Je comprends que la loi préconise la coopération mais soyons réalistes. C'est peu probable, à mon avis.

+-

    M. Jerome Berthelette: Je ne suis pas sûr qu'un tel modèle convienne aux collectivités. Elles se réunissent effectivement pour discuter de différentes questions au niveau du conseil tribal, au niveau régional et au niveau national. Je crois qu'il faudrait donner aux collectivités la possibilité de...

+-

    M. Brian Pallister: N'existe-t-il pas une différence fondamentale entre la nomination d'un agent qui critiquera vos propres initiatives et l'exercice de pressions concertées de la part d'un groupe de personnes? Ce sont deux catégories d'activités très différentes.

+-

    M. Jerome Berthelette: La plupart des gouvernements finissent par nommer des personnes chargées de régler des différends pour eux, qu'il s'agisse de juges et d'ombudsmen nommés par le gouvernement. Tous les gouvernements le font. Nous voudrions peut-être donner aux Premières nations la possibilité de prendre elles-mêmes ce genre de décisions.

+-

    M. Brian Pallister: Comme il y aura plus 600 agents de bande différents, ne croyez-vous pas que cela posera un problème de rentabilité?

+-

    M. Jerome Berthelette: De toute évidence, il y aura des problèmes de coût et de rentabilité, mais il faut aussi tenir compte du type de différends que devront régler les collectivités. Tous ne seront pas des différends coûteux ou dont le règlement exigera des mécanismes coûteux.

+-

    M. Brian Pallister: Il est très coûteux de nommer un agent, de prévoir des locaux à bureau et ainsi de suite.

+-

    Le président: Je vous remercie. Votre temps est écoulé.

[Français]

    Monsieur Loubier, pour cinq minutes.

+-

    M. Yvan Loubier: Bonjour, madame Fraser.

    J'aimerais vous poser une question. Quand vous parlez des 168 rapports requis auprès des premières nations pour répondre aux exigences du ministère des Affaires indiennes, est-ce que vous avez évalué le coût d'administration et de gestion de ces formulaires? Vous semblez dire que si on utilisait les ressources pour le service direct aux populations concernées, ce serait préférable, mais avez-vous une idée de l'ordre de grandeur des coûts d'une telle administration?

+-

    Mme Sheila Fraser: Non, monsieur le président. Dans l'étude que nous avons effectuée, nous avons consulté quelques premières nations pour effectuer le travail. Nous savons que ces dernières ont du personnel qui travaille à temps plein pour préparer ces rapports-là, mais nous n'avons pas calculé quel serait l'optimum mais combien elles dépensent actuellement pour le faire. Je pense que c'est une évidence, quand on considère le nombre de rapports et le type d'information qui était souvent répétitif dans différents rapports, qu'il pourrait y avoir une simplification du système et une rationalisation dans les rapports.

    Je dois aussi souligner que nous n'avons traité que de quatre ministères, soit les quatre ministères principaux. Nous n'avons pas traité de tous les rapports que les premières nations doivent produire.

+-

    M. Yvan Loubier: Donc, ce sont d'énormes ressources qui sont allouées à la gestion de ces 168 formulaires. Cela voudrait dire que dans l'analyse du projet de loi C-7 actuel, on demande aux premières nations de mettre des ressources considérables à construire un système démocratique acceptable--toutes les conditions inacceptables à nos yeux mais imposées par le projet de loi C-7--, ce qui voudrait dire que dans l'ordre actuel des choses, ce serait étrangler les premières nations, parce qu'elles ne disposent pas de ressources suffisantes à consacrer à cet exercice étant donné que déjà, avec le statu quo, le système est engorgé du point de vue administratif.

+-

    Mme Sheila Fraser: Il faut dire aussi que les premières nations reçoivent un financement pour préparer ces rapports.

+-

    M. Yvan Loubier: Oui, mais si elles n'ont pas de financement additionnel...

+-

    Mme Sheila Fraser: Il y a un coût au gouvernement pour appuyer toute l'administration que cela exige. Une de nos préoccupations est de savoir si on a bien évalué tous les coûts et tout ce que cela implique pour les premières nations de se conformer à toutes ces demandes. Avant d'aller de l'avant avec un système de rapport qui consiste essentiellement à reconduire ce qui se fait actuellement, il y aurait lieu de simplifier et de rationaliser...

+-

    M. Yvan Loubier: À l'heure actuelle, il n'y a pas de financement supplémentaire disponible pour aider les premières nations à atteindre des objectifs tels que ceux contenus dans le projet de loi C-7. On peut s'attendre à ce qu'elles n'aient pas les moyens de réaliser quoi que ce soit.

+-

    Mme Sheila Fraser: Je pense que ça va être très difficile et, comme on l'a déjà mentionné, présentement, plusieurs premières nations ne sont pas en mesure de le faire; elles ont besoin d'aide pour arriver à répondre aux exigences de la loi.

    En outre, on remet en cause le délai de deux ans. On se demande s'il leur donne suffisamment de temps. Le comité pourrait peut-être vérifier auprès du ministère quel est le plan d'action et voir si on a bien évalué l'effort qui est nécessaire pour procurer de l'aide aux premières nations qui en ont besoin.

Á  +-(1150)  

+-

    M. Yvan Loubier: Puisqu'on parle d'imputabilité, madame la vérificatrice, j'aimerais vous remercier pour le rapport que vous avez publié sur la communauté de Davis Inlet. Je voudrais savoir, étant donné le déménagement de cette communauté et les mesures qu'on nous a promises et qui doivent être appliquées dans le cadre de programmes visant à combattre les inégalités sociales, les problèmes de polytoxicomanie, et ainsi de suite, si vous avez l'intention, incessamment, de présenter un rapport sur la nouvelle situation de Davis Inlet et de ses résidants.

+-

    Mme Sheila Fraser: Nous avons comme pratique de faire des suivis des vérifications que nous avons réalisées. À ma connaissance, il n'est pas prévu que nous fassions un suivi de la vérification sur Davis Inlet au cours de la prochaine année, mais il se peut que nous l'incluions à notre plan de travail pour les années à venir.

+-

    M. Yvan Loubier: Dans l'état actuel des choses et compte tenu des remarques que vous avez formulées au sujet de cette communauté, est-ce que vous croyez que les mesures prises jusqu'à présent pour le déménagement, la réinsertion et l'adaptation de cette communauté au nouvel environnement sont suffisantes pour enclencher à tout le moins un mouvement de réhabilitation?

+-

    Mme Sheila Fraser: Monsieur le président, je ne suis vraiment pas en mesure de répondre à cela; j'aimerais mieux donner mon avis lorsqu'on aura fait une vérification et que j'aurai des données en main. Malheureusement, nous n'allons pas étudier tous ces aspects.

+-

    M. Yvan Loubier: Je vous remercie, madame.

+-

    Le président: Merci, monsieur Loubier.

    Madame Desjarlais.

[Traduction]

+-

    Mme Bev Desjarlais (Churchill, NPD): Je vous remercie beaucoup d'être des nôtres aujourd'hui.

    Je vais commencer par vous poser une question à laquelle j'espère vous pourrez me donner une réponse. En ce qui concerne les 61 p. 100 des Premières nations qui comptent moins 500 résidents, quel est approximativement leur budget de fonctionnement dont vous auriez dû donner un aperçu, le cas échéant?

+-

    Mme Sheila Fraser: Nous ne disposons pas malheureusement de ce genre d'information.

+-

    Mme Bev Desjarlais: Très bien. La raison pour laquelle je vous pose cette question c'est que je crois qu'elle se rattache à ce dont nous sommes en train de discuter.

    Lorsque la Loi sur la gouvernance des Premières nations a été présentée et à laquelle un certain nombre de Premières nations se sont opposées, j'ai constaté que de nombreuses Premières nations dans ma circonscription ont dû opter pour la gestion par des tiers. J'ai donc fait ma petite enquête et j'ai constaté que le gouvernement du Canada n'a aucun processus d'appel d'offres pour la gestion par des tiers des budgets des Premières nations. On procède de façon plus ou moins aléatoire. Des contrats sont signés et dans certains cas, chez les Premières nations disposant de fonds très limités, et je ne plaisante pas lorsque je parle de fonds très limités, elles versaient jusqu'à 30 000 $ par mois à des cabinets d'experts-comptables chargés d'assurer la gestion par des tiers—jusqu'à 30 000 $ par mois.

    En pareils cas, la plupart des employés de la bande ont été congédiés ou mis à pied une fois que le gestionnaire indépendant a pris la relève, privant ainsi les économies locales de l'argent qui y était investi auparavant.

    Avez-vous enquêter sur le processus et le coût de la gestion par des tiers?

+-

    Mme Sheila Fraser: Monsieur le président, il s'agit d'une question pertinente. Nous allons effectivement préparer un rapport sur la gestion par des tiers cette année, en décembre. Donc à ce moment-là, si le comité juge notre travail pertinent, nous nous ferons un plaisir de revenir pour en discuter.

+-

    Mme Bev Desjarlais: Dans la même veine, des comptables de diverses collectivités m'ont dit que la gestion par des tiers était pour leurs cabinets une véritable manne parce que c'est de l'argent facile à gagner. En effet, ils n'appliquent pas les mêmes lignes directrices qu'ils suivraient s'il s'agissait d'un client commercial auquel ils accorderaient un forfait pour le même genre de service. En ce qui concerne la gestion par des tiers dans le cas des Premières nations, les services se vendent automatiquement au prix fort.

    J'ai donc bien hâte de voir ce que vous aurez à dire en décembre prochain. Je crois que ce sera révélateur pour la population canadienne d'apprendre ce qui s'est vraiment produit.

    On a également mentionné à propos de la Loi sur la gouvernance des Premières nations que le coût, selon le gouvernement s'élèvera, à environ 110 millions de dollars. Toutefois, l'APN et les Premières nations en général croient que la facture sera beaucoup plus salée et qu'elles n'auront pas les moyens de l'acquitter, à tel point qu'ils craignent même un dépassement de coût semblable à celui du programme d'enregistrement des armes à feu.

    Je m'interroge; est-ce que, à votre avis, vous qui êtes experte en la matière, il semble raisonnable d'évaluer à 110 millions de dollars le coût des mesures proposées?

+-

    Mme Sheila Fraser: Merci monsieur le président.

    D'abord, je souhaite remercier Mme Desjarlais pour ses observations. Nous en prendrons bonne note dans nos travaux sur la gestion par des tiers.

    En ce qui a trait à l'estimation des coûts, je n'ai pas de données sur lesquelles... Nous n'avons pas encore reçu de plan. Nous ne savons pas comment il sera élaboré. Le comité voudra peut-être en discuter avec les fonctionnaires du ministère afin de savoir comment ils en sont venus à cette estimation et, d'après eux quelles mesures s'imposent afin de venir en aide aux Premières nations.

Á  +-(1155)  

+-

    Mme Bev Desjarlais: En fait, j'ai été heureuse de vous entendre insister sur le fait que les communautés des Premières nations de petite taille auraient des difficultés puisque le grand chef Coon Come a bien précisé que le délai de deux ans allait poser problème vu que c'est à ce moment que la disposition sur la non-exécution entrera en vigueur. Étant donné que vous êtes d'accord avec le grand chef, on se demande pourquoi le gouvernement agit de la sorte s'il veut vraiment travailler en collaboration avec les Premières nations.

+-

    Mme Sheila Fraser: Il faudrait que vous le demandiez au ministère.

    Mme Bev Desjarlais: Merci.

+-

    Le président: Monsieur Godfrey.

+-

    M. John Godfrey: Bienvenue.

    D'abord, croyez-vous que la reddition de comptes se fait de manière réciproque entre le ministère et les Premières nations?

    Ensuite, croyez-vous que la complexité du système de rapports que vous avez décrit—168 rapports par Première nation—nuit a la communication de rapports aux populations des Premières nations, ce qui en soi est un obstacle, sans parler de la gouvernance?

    En dernier lieu, quel doit être notre priorité? Doit-on d'abord corriger les pratiques de gouvernance ou simplifier le système de rapports—cela doit-il être fait dans un certain ordre ou en parallèle—, et peut-on avoir un système de gouvernance efficace si deux parties sont responsables de la gestion tandis qu'une seule a le fardeau des rapports en plus? S'il n'est pas rationalisé en même temps, le système de rapports continuera-t-il de faire obstacle à la transparence, à la reddition de comptes et à la saine gouvernance?

+-

    Mme Sheila Fraser: Ce sont d'excellentes questions, monsieur le président, et je vais peut-être devoir demander à ma collègue, Madame Barrados de m'aider à y répondre.

    En effet, je crois que la reddition de comptes est réciproque. Je crois que chacune des parties a ses responsabilités et que chacune d'entre elles doit rendre des comptes à l'autre. C'est dans la façon de procéder qu'il y a parfois des difficultés, mais lors de nos vérifications, nous avons souvent constaté que les responsabilités du gouvernement fédéral, que ce soit en éducation ou dans d'autres domaines ne font pas toujours l'objet d'évaluation de rendement ou des résultats. Je crois qu'il faut exiger ce genre de reddition de comptes lorsque l'enjeu est aussi important du point de vue tant financier que social. Donc effectivement, je crois que la reddition de comptes doit être réciproque.

    En ce qui a trait à la complexité du système de rapports, comme je l'ai dit un peu plus tôt, si on considère les programmes isolément, ils sont logiques. Les exigences ne semblent pas excessives. Si nous avions analysé un programme séparément, nous aurions sans doute demandé ce genre de reddition de comptes. C'est lorsqu'on les rassemble... Je crois que c'est un défi pour le gouvernement de voir les questions d'un point de vue horizontal, et non sous l'angle vertical, et d'élaborer un mécanisme.

    Comme je l'ai dit plus tôt, je crois qu'il est important de faire participer les collectivités et les Premières nations elles-mêmes dans la gestion des programmes, le choix des renseignements communiqués à la population et, par la suite, au processus de reddition de comptes au bailleur de fonds, si vous voulez.

    En ce qui a trait à votre dernière question, j'espère que les initiatives seront faites en parallèle, mais je crois qu'il faudra y consacrer le temps nécessaire pour que ce soit bien fait.

    Peut-être madame Barrados voudra ajouter ses réflexions.

+-

    Mme Maria Barrados (vérificatrice générale adjointe, Bureau du vérificateur général ): Au sujet de la reddition de comptes, j'aimerais ajouter que nous avons passé beaucoup de temps au bureau imaginer une manière plus contemporaine, plus moderne de définir cette réalité puisqu'elle est généralement toujours perçue d'un point de vue hiérarchique. L'on vous dit quoi faire et vous devez rendre des comptes. Cela faisait partie du rapport que nous avons publié en décembre dernier. Nous avons rédigé une définition établissant que la reddition de comptes est fondée sur une entente définissant les attentes, les résultats escomptés et la façon d'en faire rapport. Son bon fonctionnement dépend nécessairement d'un accord des deux parties sur les attentes et les résultats. Autrement, la relation redditionnelle continuera à poser problème.

  +-(1200)  

+-

    M. John Godfrey: En d'autres termes, la réciprocité.

+-

    Mme Maria Barrados: Effectivement.

+-

    M. John Godfrey: C'est donc dire que la façon de s'entendre sur la reddition de comptes peut avoir un effet direct sur ses résultats. Elle ne peut pas être imposée.

+-

    Mme Maria Barrados: C'est exact, et notre façon de voir la reddition de comptes a beaucoup changé depuis le début de nos travaux à ce sujet tels que décrits par la vérificatrice générale. Nous avons passé beaucoup de temps à prendre le pouls des Premières nations au sujet de la reddition de comptes. Elles étaient toutes en faveur d'une meilleure reddition de comptes. Le problème réside dans la structure hiérarchique.

+-

    Le président: Merci.

    Monsieur Pallister, vous avez cinq minutes.

+-

    M. Brian Pallister:  Évidemment, vos prédécesseurs se sont faits l'écho de vos observations sur les difficultés inhérentes au décloisonnement des activités gouvernementales et à la coordination efficace des mandats des différents ministères. Je crois que cette réalité est particulièrement pertinente dans le cas qui nous occupe puisque la mesure législative vise à limiter l'influence du ministre. Toutefois, cela ne s'applique qu'aux considérations financières. Je crains que cela n'exacerbe bien des problèmes qui ont abouti à la gestion par des tiers dont on s'est prévalu par le passé.

    Je suis content que Bev ait soulevé la question de la gestion par des tiers. Cela s'applique , bien entendu, au Manitoba puisque la moitié des bandes ont une entente de cogestion ou de gestion par des tiers. La situation est semblable en Saskatchewan.

    À l'heure actuelle, en matière de gestion par des tiers, ceux-ci sont nommés par le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien et n'ont pas la responsabilité des fonds consacrés à la santé et à la Société canadienne d'hypothèques et de logement. Il y a donc à nouveau un cloisonnement dans la gestion par les tiers. Une bande pourrait avoir trois différents gestionnaires, exact?

    Ne serait-il pas préférable de procéder judicieusement à ce sujet et de dire simplement qu'il faut nommer un seul gestionnaire, lequel doit travailler de concert avec...? Je sais qu'on m'accusera de trop simplifier la chose, mais ne serait-il pas plus logique pour une bande d'avoir un seul gestionnaire de ses recettes et pour le gouvernement de n'avoir à interagir qu'avec un seul gestionnaire en poste au lieu d'une multitude d'entre eux?

+-

    Mme Sheila Fraser: Comme je l'ai déjà dit, monsieur le président, nous sommes en train de travailler sur cette question et nous présenterons notre rapport plus tard au cours de l'année. Il est difficile pour moi de formuler une opinion fondée sur des faits à l'heure actuelle, mais l'idée semble logique à prime abord. Je comprends très bien ce que vous dites. Vous avez raison. Chaque ministère nomme son propre gestionnaire, selon ses besoins, et il nous nous pencherons sur cette formule lorsque nous étudierons la question.

+-

    M. Brian Pallister: C'est raisonnable puisqu'il est question de gouvernance. Nous parlons de transparence, de reddition de comptes et de ce genre de choses. Ils sera sans doute difficile d'instaurer, par exemple, des normes relativement uniformes régissant la publication d'états financiers vérifiés partout au pays quand on ne parvient pas à le faire dans nos propres ministères.

+-

    Mme Sheila Fraser: Je le répète, si l'on examine chaque programme individuellement, tout cela semble logique. C'est la façon dont sont structurés les programmes. Sont-ils restreints au point de se multiplier de sorte à tous être gérés individuellement? Comment intégrer la gestion horizontale à nos pratiques? J'espère que le gouvernement se penchera sur cette question et qu'il tentera de rationaliser certaines de ces pratiques.

+-

    M. Brian Pallister: Le problème,en l'occurrence,c'est que le gouvernement présente un argument simpliste: il va être ferme avec les bandes en exigeant des états financiers vérifiés sans quoi les programmes perdront leur financement. Ce genre d'argument ne tient pas debout. Le scandale de Enron ne se serait jamais produit s'il avait suffi de présenter des états financiers vérifiés, n'est-ce pas?

    Ce qui m'importe, c'est que la population locale ait accès à des états financiers compréhensibles. Encore une fois, j'aimerais que vous me disiez comment nous pourrions mieux habiliter la population locale grâce à ce projet de loi.

+-

    Mme Sheila Fraser: Monsieur le président, je crois qu'il s'agit principalement d'une question de moyens. Les Premières nations ont-elles les moyens nécessaires? Dans le cas des petites collectivités et de nombreuses collectivités éloignées et isolées, il est vraiment difficile de trouver la capacité nécessaire pour relever ce genre de défi. Je crois que le ministère devrait se pencher sur cette question.

+-

    M. Brian Pallister: Il y a un enjeu important également—et le président me signale que je n'ai plus qu'une minute alors je vais tenter d'être bref pour que vous puissiez répondre...

+-

    Le président: C'est une minute que vous devrez vous partager.

+-

    M. Brian Pallister: Bon nombre de chefs de bande nous disent être vraiment préoccupés par leurs recettes autonomes. Ainsi que M. Denis Desautels l'a déjà mentionné, ils s'efforcent de ne pas faire figurer ces recettes dans bon nombre de leurs registres financiers. Cela nuit à la transparence, et on n'a pas la moindre idée de ce que le gouvernement fédéral va faire de tous ces renseignements. Il y a beaucoup de malentendus, les versions changent selon ceux à qui on s'adresse. Comment allons-nous obtenir des états financiers complets et vérifiés qui peuvent être d'une utilité quelconque pour les bandes, si certaines recettes en sont exclues?

  +-(1205)  

+-

    Mme Sheila Fraser: Ce que vous essayez de faire valoir, c'est que le conseil doit avant tout rendre des comptes à ses membres, qu'il doit y avoir une...

+-

    M. Brian Pallister: Bien entendu, ce que craignent les conseils, c'est que le gouvernement réduise leur part de recettes, s'ils les font figurer dans leurs documents, en ce cas, pourquoi serait-il dans leur intérêt de communiquer tout cela? Vous me suivez?

+-

    Mme Sheila Fraser: Eh bien, je crois fermement au mérite de la transparence, par conséquent...

+-

    M. Brian Pallister: Pour ma part, je crois aux résultats de la transparence. Je pense que les chefs aimeraient savoir quels en seraient ces résultats.

+-

    Le président: Merci beaucoup.

    Madame Karetak-Lindell.

+-

    Mme Nancy Karetak-Lindell: J'aimerais remonter un peu plus loin par rapport à ce qu'a dit M. Pallister.

    Nous affirmons tous que les états financiers sont tout à fait fondamentaux en ce qui a trait à la reddition des comptes, mais, je viens de collectivités où l'on n'a pas la moindre idée de la façon dont on interprète ce genre de choses. J'ai fait de la comptabilité, alors vous comprendrez sans doute de quoi je parle ici, mais tant que les gens ne sauront pas quelles questions poser, tout leur paraîtra satisfaisant, à moins qu'ils ne se rendent compte que les dépenses seront élevées par rapport à celles qui avaient été projetées pour l'année.

    Il est fort bien que nous discutions de tout cela, mais à moins que les gens ne sachent poser les bonnes questions et obtenir des renseignements sans peine, comment allons-nous faire? Matthew Coon Come a parlé du renforcement des capacités. Or comment pouvons-nous nous y prendre pour que la population participe à l'exercice de reddition des comptes?

    Je vois constamment ce genre de problèmes dans mes collectivités. Le conseil du plus petit bourg doit produire des états financiers annuels. Toutefois, si dans le conseil en question, il y a neuf personnes et une seule qui s'y connaît un peu en matière de rapport financier, le président peut toujours donner l'impression que tout va bien, à moins, je le répète, que les gens ne posent les questions qu'il faut. J'aimerais donc savoir comment vous pouvez favoriser la participation publique au processus.

    On aura beau présenter tous les rapports au monde, à moins qu'il n'y ait des gens capables de poser les bonnes questions et d'une manière à évoquer les réalités quotidiennes, je ne pense pas qu'on assistera à de grandes améliorations.

+-

    Mme Sheila Fraser: Monsieur le président, la remarque de Mme Karetak-Lindell est très juste. Si j'étais cynique, je dirais qu'il n'y a pas que dans les petites collectivités éloignées que les gens s'abstiennent de poser des questions. Si l'on se reporte à certains scandales du secteur privé, on peut penser que là non plus les gens ne posaient pas les bonnes questions.

    À mon avis, il s'agit maintenant de renforcer la capacité de connaître et de comprendre. Cependant, il est peu réaliste de s'attendre que les collectivités elles-mêmes y parviennent à elles seules. Elles auront besoin d'aide pour y arriver. Quant aux moyens à prendre pour les appuyer, il faudra en discuter avec elles, collaborer avec elles à leur élaboration, car n'oublions pas que leur niveau de développement varie beaucoup. Certaines d'entre elles sont très avancées et pourraient servir de modèles, tandis que d'autres n'ont fait des progrès que très récemment. Les collectivités elles-mêmes doivent donc participer au processus et éventuellement se consulter entre elles afin de suivre leur progrès.

    Quoi qu'il en soit, la remarque est excellente, car à eux seuls, les états financiers ne résoudront pas le problème.

+-

    Mme Nancy Karetak-Lindell: Je vous remercie.

[Français]

+-

    Le président: Monsieur Loubier.

+-

    M. Yvan Loubier: Monsieur le président, comme vous le savez, je suis nouveau à ce comité; il reste que je suis de moins en moins nouveau et que j'apprends à tous les jours, que ce soit par moi-même ou par l'entremise des travaux du comité. Mais s'il existe une constante depuis le début des travaux auxquels je participe, c'est qu'on semble vouloir donner aux première nations le monopole de la mauvaise gestion, du manque de transparence et d'imputabilité et des chiffres tronqués. On oublie, de ce côté-ci de la table comme de l'autre, que chaque année, Mme Fraser et les autres vérificateurs généraux qui l'ont précédée, dont M. Desautels, ont donné des exemples flagrants et frappants de pratiques gouvernementales faisant état de mauvaise gestion.

    Pour ce qui est de la transparence, on n'a qu'à penser à la gestion de l'assurance-emploi qui a eu cours pendant des années. Votre prédécesseur a, à cet égard, dénoncé le gouvernement. On a pu voir, dans le cadre du dossier sur les commandites, comme l'imputabilité au gouvernement était importante. On a eu un bon exemple de gestion efficace des fonds publics avec le dossier des armes à feu. En ce qui a trait aux chiffres tronqués, à tout les ans on nous raconte n'importe quoi sur les surplus prévus pour l'année en cours. On ne peut donc pas se faire une idée sur ce que pourrait faire le gouvernement en se basant sur des chiffres véritables.

    Ça devient un peu lassant de voir certaines personnes--il s'agit surtout de membres de l'Alliance, mais aussi de certains députés libéraux--accorder le monopole de la mauvaise gestion et du manque de transparence aux premières nations. Il faudrait peut-être se regarder soi-même et se dire que nos pratiques, que certains de nos membres qualifient d'exemplaires, ne le sont pas tout à fait. On devrait réviser certaines choses.

    Dans votre dernier rapport, j'ai trouvé admirable que vous souleviez la question des 168 formulaires qui doivent être remplis pour avoir droit à des subventions. Ce sont là des exemples que les gens comprennent. Les 168 exigences ne viennent pas des premières nations mais bien du gouvernement fédéral. Il faudrait donc cesser de dire qu'on doit servir d'exemple. On ne doit justement pas servir d'exemple et reproduire ce qui est mauvais et mal fait de notre côté.

    J'aimerais savoir si, depuis que vous avez publié votre rapport, dans lequel vous avez fait des recommandations sur la simplification des formulaires--l'acheminement plus rapide des réponses par voie électronique, par exemple--, vous avez senti que les quatre ministères qui constituaient votre échantillon accueillaient favorablement ces réformes ou si, au contraire, ils prenaient cela à la légère et tentaient de maintenir un système qui sert bien les bureaucrates en place.

  +-(1210)  

+-

    Mme Sheila Fraser: Merci, monsieur le président.

    D'abord, je suis d'accord pour dire qu'il ne faut pas prendre pour acquis que les premières nations sont toutes pareilles et qu'elles ne sont pas de bons gestionnaires. J'ai visité des communautés qui, en termes de reddition de comptes, pourraient servir d'exemple à des communautés non-autochtones. C'était formidable.

    À mon avis, il faut reconnaître qu'il y a une grande variation d'une communauté à l'autre, comme c'est le cas pour toutes les communautés au Canada.

    En ce qui concerne le dernier rapport de décembre, les ministères nous ont indiqué qu'ils reconnaissaient le problème. Je crois qu'il y a une volonté d'agir et qu'ils vont commencer à étudier la situation dans le cadre de l'examen des programmes dont j'ai parlé au cours de ma déclaration d'ouverture.

    Bien sûr, comme je l'ai déjà mentionné, on fait aussi un suivi de nos recommandations. Ainsi, on déterminera éventuellement avec eux un moment approprié pour prendre les mesures qui s'imposent et on retournera voir si vraiment quelque chose a été fait.

+-

    M. Yvan Loubier: Pour revenir sur la question que je vous ai posée sur Davis Inlet, quand prévoyez-vous déposer un rapport? J'ai l'impression qu'après une année, on peut voir si l'intégration est réussie et évaluer quelles sont les ressources qui manquent pour répondre aux nombreux problèmes de polytoxicomanie et aux problèmes sociaux en général.

+-

    Mme Sheila Fraser: Je ne peux pas vous promettre qu'on va étudier la question. Je sais que mon personnel n'apprécierait guère que je prenne des engagements en ce sens. Mais je peux vous dire que la question va être considérée avec sérieux lors de la planification de l'année prochaine.

+-

    Le président: Monsieur Godfrey.

[Traduction]

+-

    M. John Godfrey: J'ai réfléchi à vos propos, et ce que vous vous avez dit au sujet du respect, de la réciprocité et de tout le reste m'a paru très utile. Notre façon de faire vous donne probablement le droit de donner des leçons, mais pouvez-vous renseigner le comité, et peut-être même le ministre, sur la façon dont votre bureau a effectué sa récente vérification des Premières nations.Auparavant, avec qui avez-vous négocié, et comment vous y êtes-vous pris?

+-

    Mme Sheila Fraser: Merci, monsieur le président.

    Le comité n'ignore sans doute pas que je n'ai absolument aucun mandat en ce qui concerne les Premières nations. Mon bureau ne peut vérifier que les états du ministère des Affaires indiennes et des autres ministères intéressés. Nous sommes donc en mesure de vérifier les chèques émis par ces derniers et les renseignements reçus par eux en retour.

    Cela dit, depuis quelques années, et particulièrement depuis l'étude sur la reddition des comptes, nous entretenons de très bons rapports avec les Premières nations. Le travail dont je vous ai parlé a donc été possible grâce à leur collaboration. Elles ont accepté sans aucune obligation de nous aider à effectuer l'étude.

    Nous avons toujours été très bien accueillis par les Premières nations, chaque fois que nous leur avons demandé de participer à quoi que ce soit. En l'occurence, nous tenions à refléter le point de vue de la collectivité autochtone, exprimer comment les exigences du gouvernement fédéral étaient jugées de leur point de vue plutôt que le contraire. Je compte d'ailleurs sur quelques groupes de conseillers supérieurs pour m'aider à cerner les questions sur lesquelles nous devrions aller de l'avant. Nous avons aussi établi un groupe chargé des questions autochtones, et dont font partie des chefs de partout au pays. Ils nous donnent leur avis au sujet de certains points qui les préoccupent en particulier et sur lesquels ils estiment que nous pouvons agir, bien entendu, en conformité avec notre mandat.

  +-(1215)  

+-

    M. John Godfrey: J'en conclus que pour peu qu'on sache comment s'y prendre, il est possible d'avoir d'excellents rapports de travail, constructifs et efficaces, même lorsqu'on étudie des questions difficiles et même épineuses.

    Je vous remercie.

+-

    Le président: Madame Desjarlais.

+-

    Mme Bev Desjarlais: Dans le même ordre d'idées, je me réjouis d'apprendre que vous avez procédé ainsi, car je crois que cela nous ramène à la position du chef Coon Come, d'après lequel, les Premières nations veulent bel et bien la reddition des comptes et ne craignent pas du tout que le vérificateur général du Canada se rende chez eux et établisse comment les choses se passent. À mon avis, cette façon de faire a certainement été à leur avantage et il est donc encourageant d'entendre qu'on insiste à nouveau là-dessus.

    Vous avez mentionné le fait que chacun des états financiers est différent selon le programme, et si je me reporte aux programmes de santé, dont les crédits venaient du ministère de la Santé, a-t-on observé les problèmes chez les Premières nations, ou y en a-t-il plutôt eu à cause de la façon dont l'argent avait été accordé par le gouvernement fédéral?

    Si je vous pose une telle question, c'est en raison d'une situation que nous avons connue au Manitoba, où il semble que l'argent ait été détourné de sa source, peut-être par le sous-ministre ou un directeur régional. Y a-t-il eu une enquête là-dessus?

+-

    Mme Maria Barrados: Merci, monsieur le président.

    Nous n'avons pas examiné en particulier la situation au Manitoba, mais avant cela nous avions fait du travail auprès du ministère relativement à la gestion des subventions et des contributions. Nous avions alors exprimé nos préoccupations du fait que le ministère ne gérait pas tout cela avec suffisamment de vigilance.

    Lors de l'étude entreprise en vue de la préparation du rapport, nous avons de nouveau examiné les quatre grands programmes, y compris la santé. Nous avons demandé aux collectivités quels rapports elles devaient présenter, comment elles répondaient à ces exigences, et nous avons en fait rencontré des représentants pour qu'ils nous montrent les rapports ainsi produits.

    Pour ce qui est de la santé, il y a eu beaucoup de difficultés, parce qu'on était justement en train de modifier les conditions et les modalités des accords de contribution. Ces gens-là ne comprenaient pas vraiment ce qu'ils étaient censés faire. Du fait de la situation au Manitoba, les mesures de contrôle étaient devenues beaucoup plus rigoureuses. Or, les représentants des collectivités ne savaient pas vraiment ce qui était en jeu. Même le personnel régional ne comprenait pas ce que l'on attendait de lui. Il y a donc eu un certain nombre de difficultés simplement du fait que toutes ces modifications étaient en train de se faire.

+-

    Mme Bev Desjarlais: Encore une fois, je crois que cela met l'accent sur ce que vous avez dit, et qu'il devrait y avoir un processus relativement semblable pour tous les ministères...

+-

    Mme Maria Barrados: Et que les gens le comprennent. Il faut qu'il y ait une discussion, il faut prendre le temps nécessaire, parce que, dans les collectivités, les gens n'interprètent pas nécessairement les choses de la même façon que les bureaucrates. Ces gens-là ne comprennent pas la terminologie, ils ne comprennent pas le code, et on ne devrait d'ailleurs pas s'attendre à ce qu'ils le comprennent. Ils sont tout à fait prêts à vous écouter si vous êtes prêts à prendre le temps de leur fournir les explications.

+-

    Mme Bev Desjarlais: Merci beaucoup.

+-

    Le président: Monsieur Hubbard, à vous.

+-

    M. Charles Hubbard: Merci, monsieur le président.

    Je voudrais simplement faire une brève observation. Je sais que Bev et John ont fait état de certaines préoccupations, et je tiens à dire à Bev que nous sommes certainement conscients de ces préoccupations.

    Toutefois, l'un des problèmes auxquels font face de nombreuses bandes et de nombreuses réserves, c'est que leur système est taxé sur une seule année d'exploitation. De ce fait, elles ne font pas de planification à long terme. Elles n'ont pas vraiment la possibilité de transférer des sommes d'un crédit budgétaire à un autre, sauf si un secteur budgétaire est en énorme difficulté. Je me demande donc s'il ne serait pas à l'avantage des collectivités et de leurs relations avec les divers paliers gouvernementaux de disposer, dans ce projet de loi, de moyens qui leur permettent de faire de la planification à long terme?

+-

    Mme Sheila Fraser: Merci, monsieur le président.

    Je crois qu'on soulève là une excellente question. Si vous le permettez, je voudrais même que cela soit poussé plus loin. Même les ministères gouvernementaux auraient probablement grand avantage à ce que soit institué du financement à plus long terme et que soient établies des certitudes à plus long terme relativement à ce que l'on peut faire et ce que l'on ne peut pas faire.

    Il y a une vérification qui pourrait intéresser le comité, et qui paraîtra ce printemps. Elle porte sur le logement. Sans faire de grandes révélations sur son contenu, je crois pouvoir dire que la question du financement a évidement causé de graves préoccupations. Il est difficile de faire de la planification à long terme, en matière de logement ou pour toute autre chose, si, d'une année à l'autre, on ne sait pas quels fonds on va recevoir.

  +-(1220)  

+-

    M. Charles Hubbard: Merci, monsieur le président.

+-

    Le président: Il y a encore deux députés qui ont dit vouloir poser des questions. Y a-t-il plus que deux députés qui veuillent prendre la parole? Non.

    Nous aurons donc un tour de trois minutes, d'abord pour M. Pallister ensuite pour M. Binet.

+-

    M. Brian Pallister: Ce dont vient de parler M. Hubbard représente une arme à double tranchant. Bien entendu, il y a des avantages à planifier à long terme, mais au Manitoba nous avons constaté qu'en raison de la démarche adoptée par le gouvernement pour céder des pouvoirs aux bandes et de la latitude qu'il leur a accordée sans peut-être les compétences et l'expérience nécessaires pour les y préparer, la moitié de nos bandes se trouvent maintenant dans un régime de cogestion et de gestion par des tiers. Pourriez-vous commenter cette situation? C'est ce qui se passe lorsqu'on fournit un financement de base à une bande qui n'a pas eu l'expérience de ce genre de gestion auparavant.

+-

    Mme Sheila Fraser: Je répéterai simplement qu'à mon avis, le vrai problème se situe au niveau de la capacité. Le gouvernement doit aider les Premières nations à développer une capacité de gestion efficace. Nous devrions viser à ce qu'aucune bande ne soit assujettie au régime de gestion par des tiers.

+-

    M. Brian Pallister: Tout à fait.

    Cette question de capacité est pertinente parce que, mise à part toute répétition des politiques précédentes—et d'ailleurs la présente loi ne s'en prive pas—les principaux changements qu'elle apporte consistent à conférer des pouvoirs législatifs, des pouvoirs d'application de la loi et des pouvoirs de redressement—dans ces trois catégories—pourtant chacun de ces pouvoirs exige de toute évidence une certaine capacité de gestion et de mise en oeuvre.

    Le ministre hier a parlé d'un montant de 110 millions de dollars. J'ai lu différents comptes rendus où il a qualifié ce montant d'un soutien financier provisoire à l'intention des bandes pour les aider à mettre en oeuvre leurs nouveaux codes, mais hier il a dit qu'il s'agissait d'un montant annuel.

    Plus tôt, vous avez parlé du besoin d'une analyse de rentabilité. Vous en parlez très souvent, bien entendu, et vous avez mentionné que d'autres ministères seraient mieux en mesure de répondre à cette question, mais vous devez être sûrement préoccupée de constater... Nous n'avons aucune indication de la façon dont les coûts ont été établis, ni du type d'engagement pris par le gouvernement pour appuyer à long terme ces nouveaux postes et ces nouvelles responsabilités dont il se décharge maintenant sur les bandes. C'est sûrement un aspect qui doit vous préoccuper.

+-

    Mme Sheila Fraser: Compte tenu du stade auquel se trouve ce projet de loi, cela ne me préoccupe pas encore. Cela me préoccupera lorsque le gouvernement ou les parlementaires auront arrêté leur décision stratégique à ce sujet. Je pense que le gouvernement voudrait peut-être demander en quoi consiste le plan qui a été établi, surtout compte tenu du délai de deux ans. Qu'a-t-on établi comme plan? A-t-on analysé le nombre de collectivités qui pourraient effectivement répondre à ces exigences et les mesures qui sont prises pour y parvenir? Ce serait l'une des décisions que devraient prendre le comité et les parlementaires.

+-

    M. Brian Pallister: On serait en droit de s'attendre à ce que cela s'inscrive dans le cadre de notre propre gestion transparente et responsable, n'est-ce pas?

+-

    Mme Sheila Fraser: Bien sûr, et cela fait partie de l'analyse qui doit accompagner la présentation de ce projet de loi.

+-

    M. Brian Pallister: Oui, tout à fait.

    Je vous remercie.

[Français]

+-

    Le président: Monsieur Binet.

+-

    M. Gérard Binet (Frontenac—Mégantic, Lib.): Bonjour, madame Fraser. Il me fait plaisir de vous parler aujourd'hui. Je suis député d'une région où il n'y a pas de communauté autochtone.

    Dimanche dernier, j'ai rencontré une bonne amie qui a quitté la région pour aller travailler pour une institution financière qui transige avec des communautés autochtones. Sachant que j'étais membre du Comité des affaires autochtones, elle m'a fait remarquer que la façon de gérer était vraiment une question d'éducation. Elle m'a donné l'exemple d'un projet de 7 millions de dollars qui en coûtait 13 millions. Et ce n'était pas plus grave que ça!

    Avez-vous un certain contrôle? S'ils ont le pouvoir d'aller chercher du financement, ils peuvent aussi s'enliser là-dedans. Avez-vous un regard sur ces institutions financières?

+-

    Mme Sheila Fraser: Non, monsieur le président. Je n'ai aucun mandat en ce qui concerne les premières nations. Nous pouvons simplement vérifier le financement du gouvernement fédéral, de même que les rapports et les informations qui sont fournis au gouvernement concernant les fonds qu'elles reçoivent. Les premières nations ont, pour la plupart, leur propre vérificateur et leurs propres conseillers financiers, je l'espère. Nous n'avons aucune autorité ni aucun mandat relativement aux premières nations.

+-

    M. Gérard Binet: Merci.

+-

    Le président: Madame Desjarlais.

[Traduction]

+-

    Mme Bev Desjarlais: Je tiens à faire cette observation surtout pour éclaircir cette question des tiers gestionnaires, parce que je conviens avec vous qu'en fin de compte cette situation ne devrait jamais se produire.

    Pour commenter la situation, je crois que c'est en Ontario que le ministre a instauré un régime de gestion par des tiers chez une Première nation. Ce régime a été contesté devant les tribunaux et le tribunal a jugé que la Première nation avait raison et qu'elle n'aurait jamais dû être assujettie à une gestion par des tiers. C'était le ministre qui avait pris cette décision et cette situation n'aurait pas dû se produire. Donc, je crois que le projet de loi va probablement intensifier certaines contestations qui pourraient exister, compte du fait que le ministre détient des pouvoirs qu'il ne contrôle probablement pas de façon appropriée.

    Vous avez fait votre étude avec la coopération des Premières nations, sans ce nouveau projet de loi dont nous sommes saisis. Rien ne vous empêchait lorsque vous avez obtenu la coopération des Premières nations d'assurer la reddition de comptes. Ce n'est pas comme si le projet de loi était nécessaire pour assurer cette reddition de comptes.

  -(1225)  

+-

    Mme Sheila Fraser: Non, ils l'ont fait tout à fait volontairement, de la même façon que les Premières nations ont collaboré à la vérification en matière de logement que nous menons actuellement, ainsi qu'à d'autres vérifications. En ce qui nous concerne, elles font preuve d'un très bon esprit de collaboration envers notre bureau depuis de nombreuses années.

+-

    Mme Bev Desjarlais: Merci.

+-

    Le président: Madame Fraser, vous avez géré votre temps de manière si efficace que vous êtes probablement le premier témoin que je n'ai pas eu à interrompre. Peut-être avez-vous déjà dit tout ce que vous souhaitez partager avec nous, mais il reste encore quelques minutes. Si vous voulez ajouter le mot de la fin, nous serions heureux de vous entendre. Mais tout d'abord, je vous remercie chaleureusement, ainsi que vos collègues, d'avoir comparu.

+-

    Mme Sheila Fraser: Monsieur le président, membre du comité, nous vous remercions de nous avoir invités à comparaître aujourd'hui et vous sommes reconnaissants de la confiance que vous témoignez envers le travail de notre bureau. Si certaines des vérifications et études que nous entreprendrons à l'avenir vous intéressent, nous espérons pouvoir revenir en discuter devant votre comité. Et si le comité juge que certaines questions sont importantes et méritent d'être prises en compte dans notre planification, n'hésitez surtout pas à nous en faire part.

    Merci beaucoup.

-

    Le président: Merci beaucoup, chers collègues. Nous nous retrouvons à 15 h 30.