Passer au contenu
;

FINA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain

STANDING COMMITTEE ON FINANCE

COMITÉ PERMANENT DES FINANCES

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le lundi 15 octobre 2001

• 0832

[Traduction]

Le président (Maurizio Bevilacqua (Vaughan—King—Aurora, Lib.)): Je déclare la séance ouverte et souhaite la bienvenue à tous ce matin à Toronto. Le Comité des finances se déplace dans tout le pays pour consulter les Canadiens d'un océan à l'autre. Comme vous le savez, nous le faisons chaque année avant le dépôt du budget. Nous produisons un rapport, qui est déposé à la Chambre des communes et qui contient des recommandations à l'intention du ministre des Finances sur ce que sont les priorités, les besoins et les aspirations des Canadiens pour l'année en question. L'année dernière, nous avions en fait un plan de cinq ans.

Je souhaite la bienvenue aux organisations suivantes: l'Association canadienne des fabricants d'articles ménagers et de quincaillerie, le Conseil canadien des détaillants en matériaux de construction, l'Association canadienne des détaillants en quincaillerie, l'Association canadienne du ciment et l'Association canadienne de l'outillage et de l'usinage.

Nous allons respecter l'ordre d'apparition sur l'avis de convocation des organisations représentées. Comme vous le savez, vous avez de cinq à sept minutes pour faire une déclaration. Nous prenons connaissance de tout le mémoire qui nous est remis et vous n'avez donc qu'à nous en faire ressortir les points saillants. Il y aura une période de questions après que tous les témoins auront présenté leurs exposés.

Nous commençons par le président de l'Association canadienne des fabricants d'articles ménagers et de quincaillerie, M. Vaughn Crofford. Soyez le bienvenu.

M. Vaughn Crofford (président, Association canadienne des fabricants d'articles ménagers et de quincaillerie): Merci, monsieur le président.

Je m'appelle Vaughn Crofford. Je suis le président de l'Association canadienne des fabricants d'articles ménagers et de quincaillerie.

Je suis accompagné de mes collègues du Conseil canadien des détaillants en matériaux de construction ainsi que de l'Association canadienne des détaillants en quincaillerie avec qui nous présentons le mémoire prébudgétaire que nous avons rédigé conjointement. Il n'y a rien de particulier à conclure du fait que c'est moi qui prend la parole avant mes collègues.

Le mémoire de notre coalition illustre deux faits importants: d'abord, il s'agit vraiment d'une intervention concertée importante de toute l'industrie qui représente les opinions des manufacturiers, des distributeurs, des grossistes et des détaillants de quincaillerie et d'articles de quincaillerie, de matériaux de construction et d'articles saisonniers, comme les articles de jardin et pelouse. Ensuite, les trois associations vous diront que notre mémoire reflète les vues de nos membres, que nous avons recueillies au moyen d'un sondage prébudgétaire auprès de ces derniers.

Les membres de nos trois associations ont une grande importance économique. Ensemble ils représentent 3 810 sociétés, qui employaient quelque 120 000 Canadiens l'année dernière. Notre propre association compte 260 membres qui s'occupent de la fabrication et de la distribution de quincaillerie et d'articles ménagers. Selon nos estimations, le chiffre d'affaires de l'industrie en 2000 a été de 25 milliards de dollars, et environ 2 500 Canadiens ont travaillé pour ces sociétés l'année dernière.

• 0835

Pour votre information, j'aimerais ce matin vous rappeler que nos recommandations sont résumées dans les deux dernières pages du mémoire. De plus, un résumé de quatre pages précède le mémoire et en expose le contenu.

Bien sûr, notre mémoire a été déposé bien avant les attaques terroristes aux États-Unis et les décisions prises subséquemment par le gouvernement du Canada en vue d'accorder un appui concret pour combattre les menaces liées au terrorisme international. Au nombre des conséquences des événements du 11 septembre, mentionnons l'ébranlement d'une économie déjà affaiblie. Nous n'avons pas l'intention de débattre des avantages et des inconvénients du renforcement de nos forces armées et de nos agences de renseignement. Toutefois, nous sommes préoccupés par la possibilité de réactions budgétaires du gouvernement qui feraient retomber les finances de la nation dans une situation déficitaire et mineraient encore davantage la confiance des consommateurs.

Le sondage prébudgétaire effectué auprès des membres de nos associations a indiqué qu'on est unanimement d'accord pour proposer que le gouvernement maintienne son engagement à présenter des budgets équilibrés et n'utilise pas les excédents pour accroître les dépenses au titre de programmes et de services nationaux. Parallèlement à cela, 54 p. 100 des répondants estimaient que les excédents devaient servir à la réduction de la dette, et 46 p. 100 voulaient que les excédents budgétaires servent à des allégements fiscaux. Notre coalition comprend bien que de nouvelles dépenses s'imposent depuis le 11 septembre, mais nous demandons instamment qu'elles soient équilibrées par un ferme engagement de la part du gouvernement à contrôler ses dépenses dans d'autres domaines.

En décembre 1998, le comité permanent, dans son rapport prébudgétaire à la Chambre, réclamait l'adoption d'une entente sur la productivité pour garantir la répartition efficace des ressources et pour établir la reddition de comptes en matière de dépenses. L'entente mérite toujours le soutien actif du comité permanent. Les Canadiens ont déployé trop d'efforts pour assainir les finances de la nation pour que celle-ci soit exposée maintenant à de nouveaux déficits budgétaires.

Les Canadiens sont toujours lourdement taxés. Le dernier rapport de Statistique Canada sur les dépenses des ménages indique que 22 p. 100 du budget moyen des ménages est consacré au paiement des impôts personnels. Exclusion faite du coût des taxes de vente. Selon Statistique Canada, aucun poste de dépenses du budget des ménages canadiens n'est plus coûteux que le fardeau fiscal. Nous soutenons dans notre mémoire que l'actuel taux d'imposition du revenu des particuliers de 26 p. 100 doit être appliqué à tous les revenus imposables de 61 000 $ et plus et qu'il y a lieu d'accélérer la mise en oeuvre des allégements fiscaux prévus pour les sociétés. Nos associations estiment que ces mesures sont particulièrement importantes pour enrayer le marasme économique qui est en train de s'installer.

Monsieur le président, ces observations visent à vous donner à vous et à vos collègues un aperçu de notre mémoire. Mes collègues ne vont pas redire la même chose que moi. Pour leur part, ils vont plutôt se concentrer sur d'autres facettes importantes de notre exposé conjoint.

Merci beaucoup.

Le président: Merci, monsieur Crofford.

Nous allons maintenant entendre M. Stephen Johns du Conseil canadien des détaillants en matériaux de construction.

M. Stephen Johns (président sortant, Conseil canadien des détaillants en matériaux de construction): Merci, monsieur le président.

Je m'appelle Stephen Johns, et je représente le Conseil canadien des détaillants en matériaux de construction, qui, comme on vient tout juste de vous le dire, est l'un des trois partenaires signataires de ce mémoire prébudgétaire conjoint.

Le Conseil canadien des détaillants en matériaux de construction est une organisation cadre qui regroupe cinq associations régionales et provinciales de détaillants de matériaux de construction au Canada. Il s'agit de l'Atlantic Building Supply Dealers Association, qui a son siège à Moncton, au Nouveau- Brunswick; de l'Association des détaillants de matériaux de construction du Québec, à l'extérieur de Montréal; de la Western Retail Lumber Association, qui a son siège social à Winnipeg; de la Building Supply Dealers Association of British Columbia, située à Surrey, en Colombie-Britannique; et, enfin, de l'organisation dont je suis le président, soit la Lumber and Building Material Association of Ontario, qui a son siège social à Mississauga.

Ces cinq associations regroupent 1 750 sociétés des quatre coins du pays. Selon Statistique Canada, le total des ventes au détail pour 2000 aurait été de l'ordre de 28,5 milliards de dollars, et notre industrie employait quelque 50 000 Canadiens l'année dernière.

Quand M. Crofford vous a parlé il y a quelques instants, il a avec raison dit que notre coalition représente tous les aspects de l'industrie. Toutefois, il y a un autre facteur extrêmement important dont il faut tenir compte pour décrire l'éventail des sociétés représentées par notre coalition et que mes collègues m'ont demandé de mentionner plus particulièrement. C'est le fait que le secteur de la vente au détail des matériaux de construction et de la quincaillerie est constitué en très grande partie de petites entreprises.

• 0840

À bien des égards, les vues des petites entreprises et celles des grandes sociétés sont très similaires. Par exemple, 95 p. 100 des répondants à notre sondage prébudgétaire ont demandé instamment que le gouvernement du Canada continue de présenter des budgets équilibrés; 55 p. 100 des répondants ont estimé que tout excédent devait servir au paiement de la dette nationale; et 35 p. 100 recommandaient qu'on s'en serve pour réduire les impôts. Seulement 10 p. 100 des répondants estimaient que l'excédent devait servir à accroître les dépenses au titre de programmes et de services nationaux.

Une des recommandations contenues dans notre mémoire vise l'accélération de la mise en oeuvre des allégements fiscaux pour les sociétés, et nous nous réjouissons que le Comité du développement économique du caucus libéral ait récemment recommandé de réduire radicalement la taxe d'affaires.

Lorsque nous avons communiqué avec nos membres au début de juillet, nous leur avons demandé de faire des projections de la croissance économique nationale pour 2002. Aucun des répondants n'avait de grandes attentes pour l'an prochain: 73 p. 100 des répondants prévoyaient une croissance modérée tandis que 27 p. 100 prévoyaient une croissance faible pour l'année qui vient.

Il est intéressant de noter que nos membres étaient légèrement plus optimistes quant à leurs perspectives commerciales pour l'année à venir qu'ils ne l'étaient pour l'ensemble de l'économie. Le comité permanent devrait s'inquiéter de ces résultats et ce pour deux raisons. Tout d'abord, nos membres sont beaucoup moins optimistes cette année qu'ils ne l'étaient en l'an 2000 lorsque la même question leur a été posée lors de notre sondage prébudgétaire; de plus, ces résultats ne tiennent pas compte du ralentissement de l'économie qui a suivi les événements terroristes du mois dernier ni de l'incertitude qui accompagne l'imposition de droits importants à la suite de l'échéance de l'accord sur le bois d'oeuvre.

Il existe nombre de points communs entre les préoccupations prébudgétaires des petites et des grandes entreprises, mais dans notre mémoire nous faisons état de questions qui inquiètent tout particulièrement les petites entreprises. Par exemple, dans notre mémoire, nous proposons que l'exonération cumulative des gains en capital passe du niveau habituel de 500 000 $ à 1 million de dollars. De plus, nous exhortons le gouvernement à faire passer dans le prochain budget de 200 000 $ à 300 000 $ le seuil minimum à partir duquel la déduction accordée aux petites entreprises est appliquée.

Les charges sociales ont un impact considérable sur les petites entreprises. C'est pourquoi nous proposons une réduction supplémentaire des taux de cotisation au régime d'assurance-emploi pour l'année de cotisation 2002. Les modifications proposées à l'exonération cumulative des gains en capital ont été appuyées par 74 p. 100 de ceux qui ont répondu au sondage prébudgétaire; 68 p. 100 d'entre eux ont proposé des modifications à la déduction pour les petites entreprises et 71 p. 100 ont dit qu'ils désiraient que de nouvelles réductions soient apportées aux cotisations au titre du programme d'assurance-emploi.

Au nom de mes collègues et des associations qui font partie du Conseil canadien des détaillants de matériaux de construction, je vous remercie d'avoir pris le temps d'écouter nos préoccupations.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Johns.

Nous entendrons maintenant M. Robert Elliott, président de l'Association canadienne des détaillants en quincaillerie.

M. Robert Elliott (président, Association canadienne des détaillants en quincaillerie): Merci, monsieur le président.

Je m'appelle Bob Elliott. Je suis président de l'Association canadienne des détaillants en quincaillerie, et je suis le troisième intervenant qui ait participé à la rédaction de ce mémoire portant sur les consultations prébudgétaires pour l'ensemble de l'industrie. Notre association regroupe quelque 1 800 détaillants des domaines de la quincaillerie, de la rénovation et des matériaux de construction dans tout le Canada. En 2000, ces sociétés ont enregistré un chiffre d'affaires de l'ordre de 14 milliards de dollars et ont fourni des emplois à 45 000 Canadiens, dans des collectivités de toutes les tailles et dans toutes les régions du pays.

La majorité de nos membres sont des petites entreprises, et je désire réitérer notre appui pour les recommandations concernant les petites entreprises formulées dans notre mémoire, recommandations que vient de vous résumer M. Johns. Les résultats obtenus lors de notre sondage prébudgétaire cette année concordent étroitement avec les données que vous ont déjà présentées les autres membres de la coalition.

Nos membres ont dit clairement qu'ils ne veulent pas que l'excédent budgétaire soit utilisé pour financer de nouveaux programmes et services nationaux. Plutôt, 68 p. 100 de nos membres étaient d'avis que tout excédent devrait être employé pour rembourser la dette, alors que 27 p. 100 d'entre eux désirent un allégement fiscal supplémentaire. Seuls 5 p. 100 des répondants proposent des dépenses accrues de la part du gouvernement. Quatre-vingt-dix-sept pour cent de ceux qui ont répondu au sondage prébudgétaire ont fait ressortir le besoin d'un budget équilibré chaque année.

Notre association s'inquiète tout particulièrement du faible niveau des attentes de ses membres quant au rendement économique pour l'an 2002. Il ne faut pas oublier que notre sondage prébudgétaire a été effectué bien avant les événements du 11 septembre, et déjà les résultats indiquaient que seuls 6 p. 100 des déclarants s'attendaient à ce que l'économie nationale connaisse une croissance importante l'an prochain. Cinquante-neuf pour cent d'entre eux jugeaient que l'économie connaîtrait une croissance modérée pendant cette période alors que 35 p. 100 prévoyaient de faibles niveaux de croissance économique. Les prévisions quant à la croissance de notre secteur l'année prochaine ressemblent étroitement à celles qui ont été présentées pour l'ensemble de l'économie.

Il est clair que l'économie n'a pas eu le rendement espéré cette année et on s'attend à une situation semblable pour l'an 2002, tout particulièrement à la suite des événements du 11 septembre. Le comité permanent doit cependant noter que les facteurs négatifs qui caractérisent l'économie cette année, jusqu'à tout récemment en tout cas, ne se retrouvaient pas dans tous les secteurs.

• 0845

Lorsque le ministre des Finances a comparu devant le comité permanent au printemps, il a indiqué, et avec raison, que les industries de l'automobile et de l'informatique avaient contribué le plus au ralentissement, bien qu'il semble désormais probable que plusieurs autres secteurs, dont l'aviation commerciale et le tourisme, connaîtront aussi un ralentissement.

Lorsqu'il est venu témoigner au printemps, le ministre des Finances vous a indiqué, à juste titre, que l'un des facteurs qui avait empêché la situation de s'aggraver était la vigueur continue du secteur du bâtiment. Cette observation a été confirmée plus tôt ce mois-ci lorsque Statistique Canada a rapporté que le nombre de permis de construction émis entre janvier et août de cette année avait augmenté de 11,2 p. 100 comparativement à la même période l'année dernière, et qu'il s'agissait du plus haut taux cumulatif pour toute période de janvier à août depuis 1989. Au cours de l'année dernière, les permis de construction résidentielle pour la période ont augmenté de 8 p. 100.

Bien que la semaine dernière les médias aient fait grand cas d'un ralentissement signalé dans les mises en chantier en septembre comparativement à août, ils ont omis d'indiquer que les mises en chantier pour la période de janvier à septembre de cette année avaient connu une augmentation de 7 p. 100 par rapport à la même période en l'an 2000.

Il est temps que le comité permanent étudie sérieusement les recommandations formulées par notre coalition dans ses mémoires prébudgétaires au cours des dernières années, et dont il semble ne pas avoir tenu compte. Il faudra prévoir des mesures de relance de l'économie l'année prochaine, et le gouvernement ne disposera pas des fonds nécessaires pour lui donner le coup de pouce nécessaire.

Même si le gouvernement ne dispose peut-être que de fonds supplémentaires limités pour la stimulation économique, de nombreux Canadiens sont en mesure de relancer les secteurs affaiblis de l'économie grâce aux épargnes accumulées dans leurs REER. Le programme d'accès à la propriété a déjà établi un précédent pour l'utilisation des fonds d'un REER—assorti de dispositions rigoureuses en matière de remboursement—pour faciliter l'accession à la propriété. Notre coalition estime qu'il s'agit d'une mesure louable dont la portée devrait être élargie. Plus précisément, notre mémoire recommande que le montant qui peut être retiré dans le cadre du programme d'accès à la propriété soit augmenté et passe à 25 000 $ et que la portée du programme soit élargie pour aider à financer les réparations et les rénovations domiciliaires et aussi pour aider à financer les adaptations résidentielles nécessaires pour répondre aux besoins d'une population vieillissante.

Au nom de mes trois partenaires de la coalition, je tiens à vous remercier de votre attention à nos trois présentations. Nous nous ferons un plaisir d'en discuter de façon plus détaillée avec vous ce matin.

Je vous remercie, monsieur le président.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Elliott.

Nous allons maintenant passer à l'Association canadienne du ciment: M. Wayne Dawson, vice-président pour la région de l'Ontario, et Lynn Davidson, gestionnaire de l'environnement, St. Mary's Cement, usine de Bowmanville. Bienvenue à tous.

M. Wayne Dawson (vice-président, région de l'Ontario, Association canadienne du ciment): Nous tenons à vous remercier de nous offrir l'occasion de prendre la parole devant vous ce matin.

Tout d'abord, j'aimerais vous parler de notre association et de l'industrie du ciment. Notre association est le porte-parole de l'industrie du ciment du Canada et elle représente la totalité des fabricants de ciment au Canada. Nous avons des bureaux à Ottawa, Montréal, Toronto, Halifax, Calgary et Vancouver. Par conséquent, nous sommes présents dans l'ensemble du pays. Nous offrons à nos membres une tribune qui leur permet de participer aux affaires publiques.

L'industrie du ciment et du béton représente un chiffre d'affaires d'environ quatre milliards de dollars par année. De plus, nous possédons des avoirs dans des entreprises d'agrégats et de construction. Les activités de l'industrie du ciment et du béton créent environ 22 000 emplois au Canada. Environ 40 p. 100 de ces activités sont situées en Ontario, en majeure partie dans la grande région métropolitaine de Toronto et dans les régions du sud de l'Ontario.

Nous aimerions vous parler aujourd'hui du déficit en matière d'infrastructure. C'est une question qui nous tient particulièrement à coeur en Ontario, surtout en raison de la congestion chronique et des files d'attente à la frontière, ainsi qu'à cause des fermetures d'usine. De plus—et cela concerne les questions commerciales et économiques—cette situation entraîne une augmentation des émissions et nuit à la qualité de l'air.

L'industrie du ciment compte des usines dans l'ensemble de l'Ontario. Nous sommes d'importants exportateurs à destination des États-Unis. Nous faisons face à une concurrence accrue. Récemment, la Thaïlande est devenue le principal exportateur de ciment à destination des États-Unis, plutôt que le Canada. Nous avons environ 3 000 à 4 000 camions sur les routes chaque jour pendant l'été, c'est-à-dire pendant la saison de la construction. Nous sommes aussi d'importants clients du Canal Welland.

On a évidemment parlé des événements du 11 septembre et les problèmes à la frontière se sont aggravés. Mais ils existaient auparavant.

L'encombrement des voies de circulation dans la région du Grand Toronto en particulier pose problème. Nous constatons que la région du Grand Toronto représente aussi la plus importante source de recettes fédérales dans ce domaine. C'est pourquoi il nous semble que le gouvernement fédéral a tout intérêt à assurer la viabilité économique de cette région: elle produit une grande part de ses recettes. D'ici vingt ans, on prévoit que Toronto devrait atteindre la même taille que Montréal.

• 0850

Nous estimons qu'au cours de cette période, toutes sortes d'infrastructures et d'investissements seront nécessaires. Cet investissement devra prendre en compte les émissions et l'utilisation de notre produit d'une façon positive. L'un des exemples, ce sont les autoroutes en béton qui sont beaucoup plus durables, nécessitent moins d'entretien, réduisent la congestion et par conséquent les émissions. Selon les responsables des spécifications chez Detroit Diesel, fabricant de moteurs de camion, les autoroutes en béton devraient permettre aux poids lourds qui les empruntent de consommer 20 p. 100 de moins de carburant que s'ils empruntaient une route asphaltée. Par ailleurs, le béton est un produit très rentable pour l'économie étant donné que toutes les composantes de ce calcaire sont locales et que par conséquent on n'a pas à exporter d'argent pour ce produit. Si vous achetez du pétrole, vous exportez de l'argent à l'extérieur de la province. Lorsque vous achetez du béton, vous créez plus d'emplois pour chaque dollar dépensé.

Nous estimons que la région du Grand Toronto et l'Ontario connaissent un important problème de congestion qu'il faut régler, et il faut que le gouvernement fédéral contribue à la solution.

L'industrie du ciment est tout à fait disposée à participer à un partenariat entre le secteur public et le secteur privé, au niveau de la conception, de la construction et de l'entretien, et à aider de son mieux le gouvernement à assurer des coûts fixes et à éviter les risques en matière de coûts et d'entretien à long terme. Nous sommes là pour coopérer avec le gouvernement et pour l'aider.

J'aimerais vous lire la dernière partie. L'Association canadienne du ciment encourage le gouvernement du Canada à investir dans l'infrastructure essentielle des corridors commerciaux, et à s'assurer que ces investissements maximisent la valeur à long terme, l'activité économique à court terme et les avantages économiques. L'utilisation d'autoroutes en ciment est un exemple de la façon de concrétiser ces objectifs.

Je vous remercie.

Le président: Je vous remercie, monsieur Dawson.

Nous allons maintenant entendre les représentants de l'Association canadienne de l'outillage et de l'usinage, MM. James D. Bowman, Ed Glover et Les Payne. Bienvenue, messieurs.

M. James D. Bowman (directeur et président, Comité du crédit d'impôt pour l'apprentissage, Association canadienne de l'outillage et de l'usinage; J.P. Bowman Ltd. (outillage)): Bonjour, monsieur le président. J'aimerais tout d'abord commencer par remercier chacun d'entre vous de nous avoir invité, l'Association canadienne de l'outillage et de l'usinage, à prendre la parole devant vous à nouveau concernant la nécessité de prévoir des crédits d'impôt pour l'apprentissage au Canada. Nous sommes heureux d'avoir l'occasion de partager ces renseignements avec vous et de vous indiquer comment nous pensons que le gouvernement fédéral peut aider à mettre fin à cette pénurie systémique de gens de métier qualifiés au Canada.

La proposition que nous présentons en faveur des crédits d'impôt pour l'apprentissage est d'envergure nationale et englobe tous les programmes d'apprentissage accrédités au pays et non uniquement ceux offerts dans l'industrie de la transformation des métaux. Depuis notre dernière comparution devant vous, très peu de choses ont été faites pour donner suite à la pénurie de main-d'oeuvre qualifiée au Canada. On vient donc de perdre encore plus de temps et notre pays n'a pris aucune mesure permettant de développer un mode de croissance durable de cet aspect indispensable de notre économie.

Comme vous le savez, nous avons toujours compté sur l'immigration de personnes qualifiées pour compléter la main-d'oeuvre qualifiée dont nous avions besoin. Cependant, comme il s'agit désormais d'un problème mondial, nous pouvons nous attendre à ce que cette façon de procéder devienne de plus en plus inefficace étant donné que tous les pays se trouvent dans la même situation.

Les gouvernements fédéral et provinciaux reconnaissent la gravité de la situation et pourtant aucun d'entre eux ne semble correctement préparé pour y remédier. Des représentants de tous les paliers de gouvernement ont indiqué qu'ils aimeraient accroître le nombre d'apprentis dans le système, et certains ont même dit qu'ils aimeraient le doubler. Permettez-nous de poser une question élémentaire: comment?

Le 27 septembre 2001, la ministre ontarienne de la Formation, des Collèges et des Universités, Mme Dianne Cunningham, a prononcé un discours devant la Chambre de commerce de Toronto dans lequel elle a dit:

    Le problème est que les employeurs font face à un obstacle de taille à la réalisation d'un rendement équitable de leur investissement en matière de formation, puisque les employés peuvent partir travailler pour d'autres entreprises une fois leur formation terminée. Quand une entreprise perd son capital humain, les employeurs hésitent alors à investir dans la formation.

    À mon avis, le gouvernement fédéral devrait envisager d'accorder un crédit d'impôt au perfectionnement professionnel pour encourager les employeurs à assurer la formation de leurs employés.

Ce problème ne se résoudra pas de lui-même. À moins d'y remédier, il finira par toucher tous les Canadiens. En effet, il se traduira par une augmentation des prix des biens de consommation et par une diminution des recettes fiscales fédérales en raison de la perte du revenu supérieur à la moyenne que gagnent la plupart des travailleurs qualifiés. Supposons qu'il y a 100 000 apprentis au Canada, et que chacun de ceux-ci gagnent un revenu annuel de 26 000 $. Le revenu combiné de tous les apprentis serait de 2,6 milliards de dollars. L'État fédéral prélèverait alors 577 millions de dollars au titre de l'impôt sur le revenu annuel de ces apprentis. Or le nombre d'apprentis est à la baisse actuellement.

• 0855

Le problème ne tient plus aux attitudes des gens ni à leur manque de connaissance à l'égard des métiers spécialisés, comme ce fut le cas dans le passé. En fait, nous croyons que la majorité des Canadiens sont bien conscients du fait que les métiers spécialisés offrent un revenu et une sécurité d'emploi supérieurs à la moyenne.

Partout au Canada, des employeurs sont sollicités régulièrement par des jeunes désireux de devenir des apprentis. Si le secteur privé a besoin de travailleurs qualifiés, d'une part, et si un nombre élevé de Canadiens sont prêts à faire carrière dans des métiers spécialisés, d'autre part, pourquoi y a-t-il problème alors? La réponse est assez simple: les entreprises qui formaient des apprentis ne peuvent plus le faire désormais. La formation d'un apprenti entraîne des coûts très élevés. À ce problème se greffe un autre, celui des entreprises qui n'assurent pas la formation d'ouvriers qualifiés et qui braconnent sur la chasse réservée des autres. Cela entraîne une perte considérable pour l'entreprise qui assure la formation des ouvriers. Évidemment, les entreprises braconnières peuvent se permettre d'offrir des salaires plus élevés.

La formation d'apprentis est le troisième pilier de notre système d'éducation. L'employeur assure 80 p. 100 de la formation et les collèges les 20 p. 100 qui restent. À l'heure actuelle, une entreprise qui forme des ouvriers spécialisés n'a pas moyen de recouvrer les coûts de la formation. Pourtant, l'État fédéral subventionne le volet collégial de l'apprentissage. Si on veut bien subventionner les collèges et universités privés, pourquoi ne pas le faire pour le secteur privé?

Le système d'apprentissage est le seul système d'éducation au Canada où l'étudiant contribue aux recettes fiscales de l'État fédéral tout en suivant sa formation. Une fois sa formation terminée, l'ouvrier spécialisé frais émoulu est certain de trouver un emploi et de jouir d'un meilleur niveau de vie. En revanche, les étudiants qui suivent une formation surtout universitaire ne bénéficient pas des mêmes garanties d'emploi une fois leurs études terminées.

Pour amener tous les secteurs à investir davantage dans la formation professionnelle, il faudra mettre sur pied un programme d'incitatifs qui serait régi par la Loi de l'impôt sur le revenu. Cela encouragerait les entreprises à former un plus grand nombre d'apprentis. Cela inciterait notamment les entreprises qui n'assurent pas de formation professionnelle à l'heure actuelle à le faire.

En bref, l'ACOU propose que toute entreprise qui offre une formation dans le cadre d'un programme d'apprentissage provincial accrédité puisse bénéficier d'un crédit d'impôt fédéral jusqu'à concurrence de 75 p. 100 du salaire de base d'un apprenti pendant un exercice financier. Cela permettra aux entreprises concernées de recouvrer certains coûts relatifs à la formation. En outre, cela permettrait aux entreprises canadiennes de concurrencer les entreprises étrangères qui offrent des incitatifs à la formation. Une telle mesure 0accroîtrait également la compétitivité du Canada à l'échelle mondiale, puisque les débouchés existent là où il y a main-d'oeuvre qualifiée. Ce serait un investissement dont le but à long terme serait d'assurer la viabilité des métiers spécialisés. Ce serait un investissement dans le capital humain, les jeunes, un investissement qui hausserait le niveau de vie des Canadiens. De plus, les prélèvements sur les revenus des ouvriers qualifiés garantiraient un rendement rapide de l'investissement initial fait par le gouvernement et continueraient d'alimenter les recettes fiscales à l'avenir.

Merci, monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité, de nous avoir accordé votre temps et votre attention ce matin.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Bowman.

Je voudrais féliciter tous les témoins de s'être présentés à l'heure. C'est parfait, d'autant plus que nous commençons nos audiences ici à Toronto.

Monsieur Solberg, vous avez sept minutes.

M. Monte Solberg (Medicine Hat, Alliance canadienne): Je cède la parole à quelqu'un d'autre, monsieur le président. Étant donné que je n'ai pas été aussi ponctuel que nos témoins, je ne suis pas bien préparé et je m'en excuse.

Le président: Je n'allais pas le signaler, mais merci de l'avoir fait à ma place.

Dans ce cas-là, la parole est M. Brison, qui entamera un tour de cinq minutes et qui sera suivi de M. Nystrom.

M. Scott Brison (Kings—Hants, PC/RD): Premièrement, je voudrais remercier tous les témoins de leur intervention. Leur point de vue est très utile pour nos délibérations.

Ma première question s'adresse à M. Crofford, et elle se rapporte à la productivité et à d'autres questions connexes. Les niveaux d'investissement et les niveaux de productivité sont étroitement liés. Dans vos recommandations, avez-vous envisagé de réclamer une réduction de l'impôt sur le capital? La question est distincte de l'impôt des sociétés. Nos impôts sur le capital ont des répercussions négatives sur les niveaux d'investissement et, donc, sur la productivité à long terme. C'est une question qui devient on ne peut plus importante. Des témoins, dont des économistes, nous ont entretenus de l'importance d'avoir un régime d'impôt sur le capital qui soit compétitif. J'aimerais savoir ce que vous en pensez.

• 0900

Je m'adresse maintenant à M. Johns; pour ce qui concerne l'exemption pour gains en capital, si l'on se penche sur les recettes fédérales provenant des gains en capital des particuliers, on constatera que ces recettes frisent les 4 milliards de dollars par année, ce qui est considérable quand on le compare à d'autres types d'impôts qui ont une incidence négative sur l'économie... J'aimerais savoir ce que vous pensez de l'élimination progressive mais complète des impôts sur les gains en capital des particuliers et ce qu'en pensent les membres que vous représentez.

Il y a une autre question que vous n'avez pas mentionnée et sur laquelle j'aimerais votre avis et celui des membres que vous représentez, celle du plafond de cotisation aux REER. Pour bien des gens du milieu de la petite entreprise, les REER constituent l'un des rares moyens de faire des économies en prévision de l'avenir.

Par ailleurs, en haussant le plafond de cotisation aux REER, on reporterait des recettes fiscales considérables à un moment où nous en aurions réellement besoin, c'est-à-dire dans 20 ou 30 ans, soit quand le vieillissement de la population fera en sorte qu'il y aura beaucoup moins de cotisants que de bénéficiaires. Un tel report d'impôts nous permettrait de faire de la planification par anticipation.

Voilà donc des questions auxquelles j'aimerais avoir des réponses.

M. Vaughn Crofford: Il est vrai que nous n'avons pas vraiment abordé dans notre mémoire la question de l'impôt sur le capital, mais sachez que nos membres sont d'avis que les entreprises et les producteurs canadiens doivent être concurrentiels sur la scène internationale, et pour cela, il faudra uniformiser les règles du jeu. Toute réduction d'impôt, qu'il s'agisse d'investissement de capitaux ou d'impôt des sociétés, serait accueillie favorablement par nos membres qui y verraient une mesure stimulant leur compétitivité. Je présume que vous faites allusion aux investissements dans l'équipement, les immeubles et ainsi de suite. Nos membres seraient favorables à tout ce qui pourrait accroître leur compétitivité ou leur productivité à l'échelle mondiale.

M. Stephen Johns: En ce qui concerne les exemptions pour gains en capital, l'accroissement du plafond de cotisation aux REER et ainsi de suite, pour une question de principe, monsieur Brison, nos membres appuieraient toute politique qui stimulerait le travail, les bénéfices, les dépenses et la réussite, car cela bénéficiera à tous, directement et indirectement, y compris l'État fédéral.

M. Crofford a fait allusion à la compétitivité sur les marchés mondiaux. En évaluant notre position par rapport à d'autres pays, je crois qu'il est important de garder à l'esprit le facteur compétitivité. À mon sens, l'idée principale est de créer une atmosphère qui favorise la compétitivité et la réussite, et qui fait en sorte que les conditions de vie et de travail au Canada soient attrayantes.

M. Scott Brison: J'ai une question concernant le dollar. Notre dollar est directement relié au niveau de productivité et sa forte baisse de ces dernières années correspond au déclin de la croissance de notre productivité par rapport à celle de nos principaux partenaires commerciaux. Quelles sont les répercussions de la baisse du dollar pour vos membres? Nous pouvons soulever la question. Je suppose que dans certains cas, pour certaines entreprises tournées vers le marché d'exportation, cela peut avoir des résultats positifs, à tout le moins à court terme, bien qu'à long terme, je ne pense pas que ce soit le cas. Mais sur le plan de votre capacité d'investir pour améliorer votre productivité, que ce soit donc de l'équipement, des logiciels ou autres choses, que pensent vos membres des répercussions de notre huard boiteux? J'aimerais savoir ce que vous en pensez.

• 0905

Le président: Monsieur Crofford, allez-y.

M. Vaughn Crofford: Notre association regroupe divers types d'entreprises. Une bonne partie d'entre elles ressemblent à de simples succursales. Elles ne produisent pas grand-chose au Canada; les marchandises viennent de la maison-mère aux États-Unis. Je dirais toutefois que les fabricants canadiens obtiennent de bons résultats grâce à la faiblesse du dollar. Cela n'a certainement pas nui à nos exportations. Par contre, les succursales des maisons- mères américaines doivent évidemment payer plus cher pour les marchandises qu'elles importent. Cela a donc des conséquences négatives pour elles. Notre faible dollar avantage les unes et fait du tort aux autres, comme cela a toujours été.

Le président: Merci.

La parole et à M. Nystrom.

M. Lorne Nystrom (Regina—Qu'Appelle, NPD): Je vous souhaite la bienvenue à tous ici, ce matin, et je voudrais vous poser quelques questions qui se rapportent surtout à Toronto et les environs.

Vous avez parlé de la congestion et de la croissance démographique énorme qui s'annonce. Quels sont les besoins en infrastructures de la région dont le Parlement fédéral devrait être conscient?

D'autre part, beaucoup de gens ont mentionné que les affaires urbaines et le gouvernement municipal avaient pris plus d'importance que par le passé. Faudrait-il accorder davantage de pouvoirs aux gouvernements municipaux?

La semaine dernière, par exemple, je devais prendre la parole à Peterborough, et j'ai passé quatre heures sur la 101, entre l'aéroport Pearson et Peterborough, ce qui représente une distance de 150 kilomètres. Que recommandez-vous sur le plan de l'infrastructure, des réseaux de transport urbain express et de ce genre de choses? C'est une question très simple.

M. Wayne Dawson: Merci.

Je commencerais par vous donner un exemple. Un de nos membres a fait quelques calculs. Cette entreprise, dont je tairai le nom, a vu qu'elle perdait entre 4 et 6 millions de dollars par an dans la région du Grand Toronto à cause des bouchons de circulation. Voilà le chiffre pour un seul de nos membres dont les camions sont immobilisés.

En fait, si vous avez 100 000 personnes qui arrivent chaque année dans la région, d'ici 20 ans, nous aurons l'équivalent de Montréal. Il faut donc coordonner tous les modes de transport. Il ne serait pas réaliste de dire que le transport en commun ou l'amélioration du réseau routier vont suffire à résoudre tous les problèmes. Il faut une solution globale.

Les régions urbaines du pays sont les principaux moteurs de l'économie. Je crois que la région du Grand Toronto représente environ 50 p. 100 des recettes fédérales. Le gouvernement fédéral a donc un investissement important à faire pour assurer sa santé économique à long terme. Il s'agit d'un investissement plutôt que d'une dépense.

Il faut toutefois coordonner les efforts. Qu'on le fasse en accordant plus de pouvoir au gouvernement municipal ou autrement, il faut que ce soit coordonné. Ce n'est pas vraiment le cas pour le moment.

J'ai participé à un grand nombre de ces groupes de discussion dont vous avez parlé et je pense que tout le monde partage cet avis.

M. Lorne Nystrom: Quelqu'un a-t-il autre chose à ajouter?

Je viens de Regina et quand vous restez 20 minutes sur la route, vous avez le sentiment de gaspiller beaucoup de temps dans cette ville de 200 000 habitants.

Avez-vous d'autres suggestions à formuler quant aux mesures que le gouvernement fédéral devrait prendre? Dans les Prairies, nous avons nos propres problèmes de transport à cause des voies ferrées qui ont été abandonnées, de la circulation très dense sur le réseau routier notamment. Mais que peut faire le gouvernement fédéral en ce qui concerne l'infrastructure de la région de Toronto?

M. Wayne Dawson: J'ajouterai seulement une chose, si vous le permettez.

• 0910

Pour ce qui est des autres régions urbaines du monde, le gouvernement national intervient dans chacune d'elles.

M. Lorne Nystrom: De nombreux pays ont une politique nationale de transport et une politique nationale de la voirie. Nous n'en avons pas vraiment chez nous.

M. Wayne Dawson: Nous devrions en avoir une.

M. Stephen Johns: Suite à ce qu'on a dit tout à l'heure, comme je viens de la région du Grand Toronto, je suis très conscient des problèmes que représentent la congestion et l'encombrement du réseau routier.

Hier soir, je suis revenu de plusieurs jours de réunion à Calgary et dans les environs. La région de Calgary a les mêmes problèmes d'infrastructure. C'est une ville qui connaît une croissance assez considérable mais dont l'infrastructure n'a pas suivi. Dans notre mémoire, nous soulignons l'importance d'un réseau routier national de haute qualité.

Les entreprises de notre secteur insistent toujours beaucoup sur l'importance de pouvoir livrer les marchandises. Sur le plan du service, avec la rotation des stocks et la livraison juste à temps, il faut que nos détaillants puissent obtenir nos produits rapidement. Une bonne partie de ces marchandises sont transportées par camion. Il est donc très important d'aborder ce problème et d'y consacrer les ressources voulues, que la taxe fédérale sur l'essence serve à améliorer l'infrastructure.

M. Lorne Nystrom: J'ai une dernière question concernant la formation. Quelqu'un a mentionné la formation et le crédit d'impôt. Y a-t-il autre chose que le gouvernement fédéral pourrait faire sur le plan de la formation? Bien entendu, cette responsabilité a été transférée dans le champ de compétences des provinces. À part le crédit d'impôt, y a-t-il autre chose qui vous aiderait pour la formation?

M. James D. Bowman: Nous avons également besoin de normes nationales pour les divers types de formation. Tant pour la coiffure que la plomberie en passant par les électriciens et la fabrication d'outillage, il faut former des apprentis. Nous avons besoin d'une politique nationale uniforme quant aux matières à enseigner et à la façon de le faire, mais nous n'en avons pas. Et cela varie d'une province à l'autre. Le gouvernement fédéral devrait reprendre une partie des pouvoirs que les provinces possèdent sur le plan de la formation parce qu'à mon avis, cet argent n'est pas réparti de façon satisfaisante et c'est au détriment de notre pays.

M. Lorne Nystrom: Partagez-vous la même opinion en ce qui concerne les pouvoirs fédéraux et les pouvoirs provinciaux?

M. Robert Elliott: Notre association ou notre industrie n'ont pas de politique à cet égard et c'est une question dont nous n'avons pas discuté. Mais d'après ce que j'ai remarqué dans notre secteur, celui de la quincaillerie au détail, nos membres éprouvent continuellement de la difficulté à recruter du personnel compétent pour travailler dans leurs magasins, des gens qui ne sont pas là uniquement en attendant de trouver un meilleur emploi. C'est ce que semble souhaiter le secteur de la vente au détail. Ce n'est pas une recommandation précise, mais nous serions en faveur de toute mesure visant à améliorer la formation à n'importe quel niveau. Nos membres ne mettent pas ce principe suffisamment en pratique pour qu'on puisse dire qu'ils le font.

M. Les Payne (vice-président, Association canadienne de l'outillage et de l'usinage; président, Universal Pattern Co. Ltd.): Monsieur le président, puis-je formuler une opinion à ce sujet?

Le président: Certainement.

M. Les Payne: Nous faisons partie de l'International Special Tooling and Machining Association. Vingt-quatre grands pays y sont représentés. Nous nous réunissons chaque année pour savoir ce qui se passe dans le monde. Le Canada a pris beaucoup de retard sur le plan de la formation à l'échelle nationale. Pour vous donner un petit exemple, des compétitions de compétences ont eu lieu récemment en Corée. La Corée est un pays de 60 millions d'habitants. Il y a là-bas 220 collèges. Nos collèges se sont éloignés de l'apprentissage professionnel. La Corée compte 60 millions d'habitants mais elle a 220 centres pour former ses jeunes. Lors des 35 compétitions organisées pour l'ensemble des métiers, la Corée a remporté 32 médailles d'or, d'argent ou de bronze. La Chine et Singapour font mieux que nous sur le plan de la formation. Singapour a des centres de formation incroyables. Et il y en a bien d'autres. Nous sommes en difficulté.

• 0915

Le président: Quand vous parlez de ces compétitions, de quelles compétences parlez-vous?

M. Les Payne: Le Canada n'a obtenu qu'une médaille d'argent pour la coiffure. Cela veut dire que nous sommes intelligents, mais cela ne crée pas de richesse pour notre pays.

Le président: Je veux savoir de quels genres de compétences on parle?

M. James D. Bowman: Il y avait les métiers de plaquiste, mouliste, ajusteur et mécanicien-monteur.

M. Les Payne: Il y avait aussi la charpenterie, la coiffure, la plomberie, l'électricité, les compétences informatiques, tous les genres de compétences.

Le président: Qu'en est-il des compétences informatiques?

M. James D. Bowman: Il n'y a pas de programmes d'apprentissage accrédités pour cela.

Le président: Cela est-il révélateur du fait que notre économie cesse d'être une économie manufacturière pour devenir une économie fondée sur le savoir?

M. Les Payne: Il faut avoir des compétences pour tirer quelque chose de ce savoir. Il faut encore savoir comment planter des clous, mais au lieu de travailler avec le bois, il faut savoir aujourd'hui comment joindre des colombes de métal. C'est donc ce qu'on fait de ce savoir qui compte aujourd'hui. On ne peut pas prendre de diplômés en informatique et leur confier les ordinateurs de nos entreprises tant qu'ils ne possèdent pas les compétences de base, et c'est cela, un système d'apprentissage.

M. James D. Bowman: Ce qu'il vient de dire est essentiel. Pour ce qui est des programmeurs pour la CNC, ces gens doivent quand même maîtriser les éléments théoriques du découpage des tôles. Oui, il y a des choses qu'on peut apprendre en lisant un manuel, mais tant qu'on n'a pas travaillé avec ses mains pour connaître les effets de ces charges et de ces forces... Comme employeur, une personne qui m'arrive avec sa scolarité pour tout bagage et qui n'a aucune expérience pratique me coûtera beaucoup plus cher qu'une personne qui arrive de l'atelier et qui, grâce à une formation supplémentaire, a appris à programmer la CNC, parce que cette personne aura encore beaucoup à apprendre.

Le président: J'admets bien sûr qu'il vous faut encore des gars capables de planter des clous. Pour moi, c'est une compétence essentielle. Tout le monde sait que pour monter un toit, il vous faut quelqu'un qui sache poser des bardeaux, et qu'il vous faut un plombier pour faire la plomberie. Je comprends cela très bien.

Même si notre économie ne s'est pas totalement transformée en une économie fondée sur le savoir, il ne fait aucun doute qu'on s'est éloigné de l'activité manufacturière pour passer à l'économie du savoir. Je posais la question pour savoir si cela constitue une juste appréciation de l'état actuel des compétences au Canada parce que je me demandais si vous aviez tenu compte de cela.

M. James D. Bowman: Pour l'étudiant qui essaie de décider du choix d'une carrière, il est beaucoup plus attrayant de se lancer dans n'importe quel secteur de l'économie du savoir, qu'il s'agisse de la programmation, de la conception des sites Web ou de quoi que ce soit d'autre. Ce sont là des domaines très attrayants.

Mais nous avons encore besoin d'une main-d'oeuvre qualifiée pour faire le travail, et ces domaines sont négligés. À cause du phénomène de la génération des baby-boomers, d'ici 2010, 40 p. 100 des opérateurs de machine auront atteint l'âge de la retraite. Soit dit en passant, il s'agit d'une statistique du gouvernement fédéral. Nous ne formons pas assez d'apprentis en ce moment pour combler ce manque. Il en résultera des prix plus élevés pour les consommateurs, et le gouvernement fédéral va perdre les recettes fiscales qu'il tire de ces gens de métier dont le revenu est supérieur à la moyenne.

M. Ed Glover (président, Association canadienne de l'outillage et de l'usinage; président, Harbour Advanced Machining Ltd.): Vous parliez du délaissement de l'activité manufacturière. Je crois que cette conception est fausse. Il est plus facile d'enseigner aux gens comment manipuler un ordinateur. Les collèges peuvent acheter dix ordinateurs, mais seulement une fraiseuse, et ils peuvent offrir dix places dans un cours—ils ne font que vendre des cours après tout—par opposition à une seule.

• 0920

Dans le secteur manufacturier, qui constitue la base de notre société, nous avons besoin de travailleurs qualifiés. Le Canada et l'Amérique du Nord traversent une crise grave. Nous avons besoin de ces travailleurs. Et la seule façon de les trouver, c'est de les former, comme nous le faisons. Auparavant, je formais quatre personnes par année, chaque année; je n'en forme plus qu'une seule. Si je ne reçois pas d'aide, je vais devoir mettre fin à mes activités de formation. Ça coûte trop cher. Nous n'avons pas de marge de manoeuvre financière pour former des gens. Les collèges ne peuvent assurer cette formation; c'est nous qui devrons l'assurer.

On peut former un pilote avec un ordinateur. Mais accepteriez-vous de monter avec lui, ou ne préféreriez-vous pas monter avec le gars qui a appris à voler aux commandes d'un vrai appareil? Ce pilote doit avoir les compétences voulues. N'importe qui peut apprendre avec un ordinateur. Il faut avoir des années d'expérience derrière soi. Ça prend dix ans pour former un outilleur, dont quatre années d'apprentissage et au moins six sur le tas avant qu'il soit vraiment formé. Nous n'avons pas dix ans devant nous. Nous devons faire quelque chose maintenant. Il faut vraiment faire quelque chose maintenant.

Le président: Sans vouloir minimiser la question du temps, ne devrions-nous pas envisager le système d'apprentissage en deux volets qui existe en Allemagne depuis plusieurs années, par exemple. Les apprentissages ici au Canada sont très coûteux parce que les gens commencent plus tard dans la vie, et plus l'on vieillit bien sûr, plus l'on a d'obligations financières... on fonde une famille et tout le reste.

M. Les Payne: Puis-je faire un commentaire en terminant?

Le président: Bien sûr.

M. Les Payne: L'objectif de tout notre programme... Il n'existe aucun levier encourageant les employeurs à engager davantage d'apprentis. Il n'y a rien. Ils n'ont aucune raison d'en engager. Tout ce que nous voulons, c'est un levier qui permettra de doubler le nombre d'apprentis que nous avons. Cela faciliterait la vie de tout le monde au Canada. Nous voulons essentiellement offrir davantage de possibilités aux jeunes qui veulent recevoir une formation.

Le président: Merci.

Nous allons passer à M. Murphy, à M. Cullen et à Mme Bennett, après quoi nous conclurons avec M. Solberg.

Monsieur Murphy.

M. Shawn Murphy (Hillsborough, Lib.): Merci, monsieur le président. À l'instar de mes collègues, je tiens à remercier toutes les personnes qui ont fait un exposé aujourd'hui. Je mesure très bien la peine qu'ils ont prise.

Ma première question s'adresse à M. Johns, à M. Crofford ou M. Elliott. Je comprends que votre texte a été rédigé avant le 11 septembre, et beaucoup de choses se sont passées depuis, mais votre mémoire, vous le voyez vous-mêmes, va très loin; vous demandez beaucoup de choses. Je crois que vous avez 16 recommandations. Si le gouvernement devait toutes les mettre en oeuvre, il en coûterait des milliards, voire des centaines de milliards de dollars.

Parmi toutes ces priorités, y en a-t-il qui sont plus importantes que d'autres? Ce que je veux savoir, c'est où sont vos vraies priorités. Sur ces 16 recommandations, y en a-t-il une ou deux qui devraient vraiment retenir l'attention du gouvernement?

M. Vaughn Crofford: Nos membres sont unanimes à dire qu'il faut réduire la dette, en premier lieu, et abaisser les impôts afin de stimuler l'économie et de maintenir l'avantage concurrentiel des entreprises canadiennes sur le marché mondial. Pour notre association, ce sont les deux premières priorités.

M. Shawn Murphy: Ma deuxième question, et je ne sais pas si elle s'adresse à M. Johns, à M. Crofford ou à M. Elliott, concerne la recommandation 12. Elle a vraiment piqué ma curiosité. C'est la recommandation qui permettrait aux personnes âgées de se servir de leur REER pour rénover leur maison. A-t-on fait plus de travail à ce sujet, sur la mécanique d'une telle mesure? Pour l'autre mesure, je sais qu'il faut rembourser l'argent. Si vous vous servez de votre REER pour acheter une maison, vous êtes obligé de remettre cet argent dans le REER, sur une période de dix ans je crois. Dans les cas des personnes âgées, cela ne serait pas faisable. A-t-on fait davantage de travail sur le coût et le fonctionnement d'une telle mesure? La proposition me semble très intéressante. Je crois qu'elle serait très valable à plusieurs points de vue.

M. Robert Elliott: Non, nous n'avons pas fait plus de travail ou de recherche sur cette question, mais s'il m'est permis d'apporter une précision, ce ne serait pas nécessairement les personnes âgées qui utiliseraient cet argent. Ce serait peut-être des gens de notre âge qui rénovent leur maison pour leurs parents âgés ou des amis ou quelqu'un d'autre en se servant de leur REER. L'argent serait remboursé sur une certaine période, en vertu là aussi de certains critères rigoureux comme cela se fait déjà avec les acheteurs d'une première maison.

• 0925

M. Shawn Murphy: J'avais mal compris. Je vois qu'il s'agit plutôt de combler les besoins des personnes âgées. Je croyais que celles-ci pourraient elles-mêmes puiser dans leur REER sans payer d'impôt.

M. Robert Elliott: Non.

M. Shawn Murphy: Ma dernière question s'adresse à M. Glover ou M. Bowman. Il s'agit de cette notion de crise que nous aurions au Canada concernant la formation des gens de métier.

D'après ce que je vois au Canada, les collèges communautaires semblent obligés de traiter avec 13 gouvernements différents, 13 plans de formation différents, 13 régimes différents, avec tous les problèmes qui en découlent. Votre association préconise-t-elle un programme de formation entièrement géré et exploité par l'industrie à l'exclusion des collèges communautaires, ou entrevoyez-vous une combinaison des deux?

Deuxièmement, dans les modèles étrangers qui donnent les meilleurs résultats, quel est le rôle des collèges communautaires, si rôle il y a?

M. James D. Bowman: Non. Nous ne disons pas qu'il faut en faire un système géré à l'échelle fédérale. Nous croyons qu'il appartient au pays d'avoir un programme d'études cohérent, qui devrait être enseigné dans toutes les provinces et où les compétences seraient transférables d'une province à l'autre. Nous croyons qu'il vaut mieux confier l'enseignement à l'industrie privée. Même dans un système où les écoles de formation sont différentes, il existe de bonnes méthodes pour préparer les apprentis à la formation sur le tas. La seule façon d'apprendre vraiment, c'est d'apprendre dans le vrai monde, d'avoir une expérience en temps réel.

M. Ed Glover: Pour reprendre ce que Jamie disait, nous avons besoin des collèges. Ils existent déjà, et ils nous donnent pas mal ce que nous voulons. Le problème, c'est que l'industrie assure environ 75 p. 100 du reste de la formation, et il n'y a qu'un petit groupe dans l'industrie qui est vraiment en mesure de le faire. Il y a beaucoup d'entrepreneurs qui agissent par souci d'éthique et qui se disent: «Je veux faire ma part.» Mais leur nombre diminue. Les grandes entreprises voient ce qu'il en coûte pour former les gens et préfèrent s'abstenir. General Motors ne forme personne. Ce sont les petites et moyennes entreprises qui forment les gens, et nous devons les encourager à former plus de monde. La seule façon équitable de nous rembourser... si on paye les collèges pour assurer 20 p. 100 de la formation, tout ce que nous demandons, c'est qu'on aide ceux qui assurent le reste de la formation, les 80 p. 100 qui manquent.

Nous avons besoin des collèges; nous ne pouvons pas tout faire. Les collèges font du très beau travail. Nous collaborons volontiers avec eux. Nous faisons des choses pour les aider, mais ils ne peuvent pas tout faire. Il serait impossible de les obliger à tout faire. Ce serait comme dire: nous allons former les pilotes de ligne au collège, puis nous allons les mettre aux commandes d'un avion et les laisser piloter. C'est impossible. Ça ne peut pas se faire. Ça prend 10 ans pour former un travailleur qualifié dans notre domaine. Ça ne prend peut-être pas autant de temps dans d'autres domaines. Mais ça peut prendre deux, trois ou quatre ans pour divers métiers, mais dans le découpage du métal, il faut environ 10 ans.

Le président: Merci, monsieur Murphy.

Monsieur Cullen, après quoi nous passerons à la Dre Bennett.

M. Roy Cullen (Etobicoke-Nord, Lib.): Merci, monsieur le président. Merci à tous nos témoins. Je ne suis pas arrivé à l'heure, et je vous fais mes excuses.

J'ai quelques questions sur la formation en apprentissage et une ou deux autres sur les autoroutes, si nous en avons le temps.

À mon avis, les pénuries de compétences que nous constatons, particulièrement dans le bâtiment et dans d'autres secteurs, constituent un problème. L'apprentissage est un système que le Canada devrait soutenir davantage et mieux.

Je sais que certains d'entre nous se sont intéressés à cette question il y a quelque temps de cela, et nous nous sommes tout de suite butés à des problèmes de champs de responsabilités pour ce qui est de la formation et de la dévolution aux provinces. Étant que le gouvernement fédéral a compétence en matière d'impôt fédéral, j'imagine que les crédits d'impôt pourraient donner des résultats. Je sais que nous avions le programme des jeunes stagiaires. D'ailleurs, au collège Humber, dans ma circonscription, on a travaillé en étroite collaboration avec l'industrie de l'outillage, collaboration qui a été couronnée de succès. Quatre- vingt-quinze pour cent des étudiants inscrits au programme ont trouvé du travail, et c'était un programme très positif à tous les égards.

• 0930

Les choses ont beaucoup changé et je ne suis plus aussi certain que le programme des jeunes stagiaires donne encore de bons résultats.

J'ai une ou deux questions à poser. En premier lieu, croyez-vous que le crédit d'impôt pourrait être efficace du point de vue des champs de responsabilités? En deuxième lieu, vous avez mentionné l'accréditation des programmes provinciaux d'apprentissage. Sauf erreur, ce ne sont pas toutes les provinces qui ont des programmes accrédités? Si nous options pour cette solution, je présume que cela encouragerait les provinces à former des apprentis. En troisième lieu, j'ai besoin d'une précision: j'imagine que le crédit d'impôt représenterait un pourcentage du salaire, n'est-ce pas? Cela reviendrait à subventionner une partie du salaire pendant la formation sur le tas ou pendant les études.

Qu'en pensez-vous?

M. James D. Bowman: Vous avez abordé beaucoup de sujets.

Vous avez mentionné au début les différents programmes existants et avez dit qu'il y a autant de mécanismes et de systèmes différents que de paliers de gouvernement; cela vaut la peine de le répéter.

M. Glover vient de la région de Windsor qui compte plusieurs programmes couronnés de succès. Dans notre province, il y a le programme OYAP, Programme d'apprentissage pour les jeunes de l'Ontario, qui semble être lui aussi une réussite. Je sais qu'il existe plusieurs mécanismes différents à l'échelle locale et régionale. Soit dit en passant, tous ces programmes ont un taux de succès très élevé en matière d'emploi, simplement parce que la demande existe. Presque tous les systèmes d'enseignement pourraient former des jeunes dans les métiers spécialisés qui trouveraient des emplois.

La situation ne reflète pas vraiment la qualité de l'enseignement dispensé, même si celui-ci peut être parfois excellent. La situation traduit le grand besoin qui existe. Vous pourriez vous retrouver dans un emploi d'outilleur-ajusteur sans aucune expérience, tellement la demande est forte aujourd'hui.

M. Les Payne: Vous demandez si le crédit d'impôt donnerait de bons résultats, et je dirais que oui. Cela permettrait d'aller chercher tous les grands qui ne forment pas aujourd'hui de stagiaires. C'est d'ailleurs ce que nous recommandions. Je parle des GM, Ford et Chrysler de ce monde qui ne forment aucun apprenti. Ils ont des comptables...

M. Roy Cullen: Vous prêchez à un converti.

Comme vous êtes constitutionnaliste, je me demande si vous avez effectué des recherches là-dessus pour déterminer si ce type de programme serait jugé constitutionnel ou pas.

M. Les Payne: Nous pourrions faire des recherches.

M. Ed Glover: Je crois qu'il pourrait l'être parce qu'il est juste. On ne paie quelqu'un que s'il forme des apprentis. Vous deviendriez un agent de formation et si vous ne formez personne, vous ne recevrez rien. Autrement dit, tous en sortent gagnants. Les salaires des apprentis montent ainsi que les recettes fiscales, au fur et à mesure que le nombre d'apprentis augmente.

M. Les Payne: Mais cela n'est bon que pour les entreprises rentables.

M. Roy Cullen: Le programme des jeunes stagiaires a été éliminé progressivement. A-t-il revu le jour sous une autre forme, ou a-t-il simplement disparu?

M. Ed Glover: Mais il y a beaucoup de programmes comme le Programme d'apprentissage pour les jeunes de l'Ontario qui sont tous très bons. À Windsor, notamment...

M. Roy Cullen: Non, je parlais de ceux qui sont subventionnés par le gouvernement fédéral.

M. Ed Glover: Non, que nous sachions, il n'y a pas de programmes subventionnés par le gouvernement fédéral.

M. James D. Bowman: Ce sont les provinces qui en ont hérité.

M. Roy Cullen: Bien. Savez-vous combien cela représenterait si nous options pour le crédit d'impôt? Avez-vous fait des calculs pour voir à combien se chiffreraient les dépenses fiscales pour le gouvernement fédéral? En avez-vous quelque idée?

M. James D. Bowman: Lors de nos réunions avec DRHC, nous n'avons jamais réussi à savoir de façon concrète combien d'apprentis étaient déjà inscrits au système, à l'échelle nationale ou régionale. Il nous est donc impossible de vous donner de nombres concrets. Je sais que l'on a brandi des chiffres ici et là, mais tout dépend du nombre.

Nous serons heureux de collaborer avec vous dans cette recherche.

M. Roy Cullen: En avez-vous discuté avec le ministère des Finances et avez-vous songé à des scénarios ou à des chiffres?

M. Les Payne: Non, mais nous aimerions bien le faire.

M. Roy Cullen: C'est peut-être quelque chose que nous devrions faire.

• 0935

Ai-je raison de croire que les provinces ont des visions différentes de l'apprentissage? Est-il vrai que certaines provinces n'ont aucun programme reconnu en la matière ou est-ce plutôt que le même programme existe sous une forme ou une autre dans toutes les provinces.

M. Les Payne: Un groupe de directeurs des programmes d'apprentissage de toutes les provinces se réunit au moins tous les ans. Son objectif premier est d'apposer son «sceau rouge», mais il n'y a que quelques métiers, dont celui des outilleurs-ajusteurs, qui se soient vu accorder le sceau rouge. Nous prenons part à ce processus d'accréditation.

Nous prenons également part au comité consultatif de la province, ce qui nous permet d'être en lien avec les directeurs des programmes d'apprentissage. Nous travaillons de concert avec les directeurs de toutes les provinces, mais ce ne sont pas toutes les provinces qui ont un sceau rouge pour tous les métiers.

Le président: Monsieur Cullen, soyez bref.

M. Roy Cullen: J'adresse à M. Dawson une petite question au sujet des autoroutes.

La notion de conception-construction-entretien a beaucoup de mérite car elle réduit les frais d'immobilisations. Sans vouloir entrer dans le débat sur l'utilisation du ciment ou celle de l'asphalte, et je suis certain que vous avez quelques arguments convaincants, il faut admettre que les routes à péage suscitent toujours une réaction négative au Canada. L'autoroute 407 à Toronto en est un exemple parfait. On a une forte densité de trafic et on a des options.

Que faites-vous des régions au Canada où la densité de trafic est faible? Le secteur privé serait-il intéressé à participer là-bas à des routes à péage? Vous savez sans doute que les péages virtuels ne sont qu'une façon d'amortir les coûts pour le gouvernement. Avez-vous des idées là-dessus?

M. Wayne Dawson: Il faudrait sans doute sur certaines autoroutes avoir une combinaison entre le public et le privé, puisque les péages ne pourraient sans doute pas assurer 100 p. 100 des coûts, mais seulement une partie. Sur les routes à plus faible densité de trafic, il est sans doute irréaliste d'espérer que les péages remboursent 100 p. 100 des coûts, sans participation aucune du privé. Il est impossible de déterminer qu'à tel niveau, les péages sont économiques et qu'aucun... Le gouvernement pourrait en financer une partie, tandis que l'autre portion des coûts serait remboursée par les péages, et plus la densité du trafic augmenterait, plus les péages représenteraient un pourcentage élevé du coût total.

M. Roy Cullen: Autrement dit, dans certaines de ces régions, on ne pourrait espérer s'en tirer sans subvention gouvernementale. Ce que j'espérais, pour ma part, c'était aller chercher le plus de participation privée possible. Le Royaume-Uni a fait beaucoup de travail en termes de concession, de biens immobiliers. On pourrait déterminer si cela, en plus des péages, intéresse le secteur privé. Et une fois que le marché aura été mis à l'essai, on se retrouvera avec ce qui est probablement un bien collectif qui devra être subventionné par le gouvernement...

M. Wayne Dawson: En dernière analyse, le gouvernement saura exactement combien il y injecte, puis il transférera le risque au secteur privé. Ce n'est pas comme si on savait exactement combien on injectait en espérant que cela serait suffisant. Vous, vous savez combien cela vous coûtera, puis vous demanderez au secteur privé d'assumer le risque, ce qu'il a l'habitude de faire.

M. Roy Cullen: Oui. Bien.

Le président: Merci, monsieur Cullen.

Madame Bennett.

Mme Carolyn Bennett (St. Paul's, Lib.): Je m'intéresse au crédit d'impôt pour la formation en apprentissage. Comment feriez-vous pour mettre en oeuvre ce programme dans un secteur où il existe une norme pour les programmes d'études. Comment les organisations telles que les vôtres pourraient-elles s'assurer que les programmes offerts sont reconnus et que le même employé ne demeure pas apprenti pendant vingt ans? Comment faites-vous pour établir la responsabilité et comment faites-vous pour accréditer les enseignants ou les entreprises, dans l'optique du «sceau rouge» dont vous avez parlé?

Au Canada, il est bien clair que nos difficultés découlent plus souvent de règles fédérales-provinciales qu'internationales. L'ISO est en train d'élaborer des normes de fabrication ou de gestion, voire des normes internationales d'équivalence en matière de formation et j'ai l'impression que nous ratons le coche. Comment pouvez-vous nous aider en faire en sorte qu'une mesure comme celle-ci, un crédit d'impôt, n'ouvre pas la porte à des abus et qu'elle puisse être mise en oeuvre au Canada?

M. Les Payne: Jane Stewart nous a invités à examiner la question. Nous l'avons rencontrée récemment à son bureau.

Chaque province a un programme d'apprentissage reconnu et menant à l'obtention d'un certificat. Dans notre mémoire, nous disons que chaque apprenti devrait être inscrit auprès de la province dans le cadre de ce programme d'apprentissage reconnu. Je crois que cela réglerait le principal problème.

• 0940

Il ne faut pas non plus que cela s'applique uniquement aux entreprises rentables. Autrement dit, que le crédit d'impôt soit refusé à une entreprise qui ne serait pas rentable. De cette façon, le coût à assumer ne serait pas entier. Les économistes pourraient nous aider à tirer tout cela au clair. Nous sommes des outilleurs-ajusteurs et des moulistes, pas des économistes, mais nous travaillerions volontiers avec les économistes.

Mme Carolyn Bennett: Les directeurs dans les divers corps de métiers se concertent-ils pour élaborer des normes relatives au programme d'études?

M. Les Payne: L'Ontario a sans doute les meilleures normes. Dans certains secteurs, elles sont en réalité parmi les meilleures au monde. Nous avons reçu des félicitations pour les normes que nous avons aidé à élaborer.

Mme Carolyn Bennett: Vous dites donc que tant qu'il y a réglementation provinciale...

M. Les Payne: C'est tout ce que nous avons pour l'instant.

Mme Carolyn Bennett: Mais certains ont dit souhaiter qu'il y ait des normes nationales.

Un témoin: À mon avis, c'est ce que nous devrions viser.

M. Les Payne: Pour le certificat portant le sceau rouge mais il n'existe que dans certains métiers. Je ne sais pas si le sceau rouge existe dans le secteur de la construction. C'est ce vers quoi tendent la majorité de contremaîtres dans le secteur de l'usinage de précision. C'est ce que j'ai constaté.

M. Ed Glover: Nous tentons, dans tout le Canada, de trouver une solution aux problèmes que vous avez énumérés. En Ontario, nous avons l'un des meilleurs programmes d'apprentissage pour le découpage des métaux. Il est aussi bon que le programme allemand. Le problème tient à une pénurie d'entreprises en mesure de former les apprentis parce que la formation est coûteuse. Si nous recevions autant de subventions que les Allemands, qui permet à une entreprise comme DaimlerChrysler de former 200 apprentis en échange de subventions, nous pourrions recruter les apprentis formés par DaimlerChrysler et ce serait merveilleux. Or, le nombre d'entreprises qui forment les apprentis va décroissant et nous n'aurons plus accès à la formation. Nous pourrions tripler le nombre d'apprentis si les entreprises acceptaient de les former. Ce ne serait pas difficile de mettre en place un tel programme.

M. James D. Bowman: À l'heure actuelle, les provinces se blâment les unes les autres et personne ne veut prendre l'initiative. C'est une pomme de discorde. Il faudrait que le gouvernement fédéral fasse preuve de leadership pour nous sortir de l'impasse, de concert avec d'autres organisations, dont la nôtre. Cela aura des conséquences pour l'ensemble du pays. Cela ne touchera pas que l'Ontario et le Québec. Tout le pays s'en ressentira. Voilà pourquoi nous croyons que le gouvernement fédéral doit assumer un rôle de chef de file.

Mme Carolyn Bennett: Quant au problème du maraudage, y compris d'infirmières et de médecins, il nous inquiète tous. Les petites entreprises assument le fardeau de la formation et les grandes entreprises viennent ensuite recruter les employés formés. Les provinces pratiquent-elles aussi cette forme de maraudage? Y a-t-il des provinces qui font de la formation tandis que d'autres ne font pas leur part? Cela se fait dans le secteur de la médecine. La Colombie-Britannique n'a jamais formé tous les médecins dont elle a besoin parce qu'elle a toujours misé sur l'attrait de la province pour attirer ceux qui lui manquent. Nous tentons de corriger cette situation.

M. James D. Bowman: Nous ne pouvons parler avec autorité que du programme d'apprentissage dans notre secteur, à savoir le découpage des métaux. Je dirais qu'il y a peu d'efforts en ce sens au niveau interprovincial.

M. Les Payne: Nous avons rencontré le président de la National Special Tooling and Machining Association, qui fait partie de notre groupe, et il nous a affirmé catégoriquement qu'il y a, aux États-Unis, une pénurie d'environ 60 000 à 70 000 outilleurs-ajusteurs qualifiés. Nous lui avons demandé où les États-Unis iraient les chercher. Il nous a répondu qu'ils iraient dans un autre pays où l'anglais est parlé comme chez eux. Je n'ai pas besoin de vous dire de quel pays il parlait.

Mme Carolyn Bennett: Ils viennent aussi chercher 50 p. 100 de nos médecins de famille.

M. Les Payne: La seule solution, c'est de continuer d'en former. Nous ne pouvons rien faire pour empêcher les départs.

Le président: Étant donné l'intégration toujours plus poussée de l'économie nord-américaine, nous devrions chercher une solution à l'échelle nord-américaine plutôt qu'une solution nationale.

• 0945

M. Ed Glover: Nous avons un autre problème en plus de l'exode vers les États-Unis. La pénurie est en partie attribuable au départ à la retraite des travailleurs âgés. Ce n'est pas le ralentissement de l'économie qui entraînera une pénurie d'emplois. Le problème tient au départ à la retraite et à l'absence de relève. S'ajoute à cela le danger que les travailleurs qualifiés capables d'assurer la relève partent aux États-Unis. Nous perdons sur les deux tableaux et nous devons reprendre dès maintenant le contrôle de la situation.

Le président: L'évolution démographique est très semblable au Canada et aux États-Unis. Quand nous parlons de l'Amérique du Nord, il ne faut pas oublier le Mexique. C'est là que seront formés les travailleurs qualifiés de votre secteur.

M. Ed Glover: Je crois qu'ils envisagent actuellement la formule coréenne. Il y a 30 ans, la population de la Corée était formée de paysans. La Corée est devenue un grand pays industrialisé. Elle nous fait concurrence et nous ne sommes pas en mesure de l'affronter.

Le président: Ainsi, vous admettez qu'il faut chercher une solution continentale. Est-ce bien ce que vous dites? Êtes-vous d'accord?

M. Ed Glover: Oui, je suis d'accord.

Le président: C'est noté pour mémoire. Merci.

Monsieur Solberg.

M. Monte Solberg: Merci, monsieur le président.

Je tiens à dire que je crois aussi qu'il faut une solution continentale.

Dans la même veine, il me semble que les corps de métiers forment en réalité deux grands groupes. Il y a d'une part les corps de métiers associés à la fabrication lourde. Les entreprises ont tendance à aller s'implanter là où les coûts sont les plus bas. Dans le cas de ces métiers, l'aide que vous réclamez serait peut-être utile à court terme, mais les entreprises continueront de migrer vers le Mexique. J'aimerais entendre votre réaction.

La demande de main-d'oeuvre a été très forte ces derniers temps et j'imagine que cela a rendu la concurrence pour la main-d'oeuvre plus vive dans tous les secteurs d'activité. Dans quelle mesure cela a-t-il contribué à vos problèmes? Quand l'activité économique ralentit, les gens sont-ils plus enclins à se chercher du travail dans un corps de métiers même si le salaire est moins élevé? C'est en réalité une question de coûts.

Vous avez dit que l'Ontario a d'excellents programmes de formation. Y a-t-il une province au Canada qui se démarque des autres en raison des incitatifs qu'elle accorde pour favoriser la formation?

M. James D. Bowman: S'agissant de l'exode des corps de métiers qualifiés vers le Mexique, c'est un phénomène relativement nouveau. C'est un véritable problème. Deux personnes qui travaillent dans mon entreprise ont été invitées à se réinstaller au Mexique, en vertu d'un contrat de quatre ans richement rémunéré. Ils ont rejeté cette offre uniquement parce que leurs familles sont ici. Je serais inquiet si la même offre était faite à un célibataire mais, typiquement, les célibataires sont plus jeunes et moins expérimentés, et cela joue en notre faveur. Quant aux moyens à déployer pour empêcher cet exode, il suffirait de créer au Canada des conditions qui ne leur donneraient pas le goût de partir. Je pense notamment aux soins de santé.

Vous avez dit qu'en période de ralentissement économique, certains sont prêts à travailler dans des métiers spécialisés pour un salaire moindre. Mais ce n'est pas nécessairement vrai, car si on regarde le revenu national des ménages, on constate que les ouvriers spécialisés ont en général un revenu supérieur à la moyenne. Un ouvrier qui s'est taillé une place dans un métier spécialisé ne va pas quitter ce métier pour se lancer dans autre chose, lorsque l'économie est plus avantageuse. Je ne crois pas que les gens pratiquent des métiers spécialisés ou cessent de les pratiquer en fonction de l'économie.

• 0950

M. Les Payne: Il n'y a pas une pénurie de candidats intéressés dans nos métiers. Des sommes énormes ont été investies pour améliorer notre image. Parmi nos candidats, nous comptons des diplômés d'universités et de collèges. Des enseignants m'ont déjà même demandé comment ils pourraient devenir apprentis outilleurs-ajusteurs. Ce n'est pas cela, notre problème. Le problème, c'est qu'il n'y a pas suffisamment d'entreprises. Nous représentons les employeurs, et je puis vous dire que c'est à leur niveau que se trouve le goulot d'étranglement. Même si nous les représentons, c'est à leur niveau que se trouve le problème. Les entreprises ne sont pas prêtes à créer davantage de postes pour former des jeunes, car elles n'en ont pas les moyens.

M. Monte Solberg: Cela m'amène à vous poser une question car nous avons entendu tout à l'heure un exposé dans lequel on disait que le nombre des mises en chantier avait augmenté de 8 p. 100 l'an dernier. Dans ce cas, s'il existe une si grande demande de logements et que les prix augmentent dans une telle situation, pourquoi n'y a-t-il pas suffisamment d'argent pour payer ces apprentis ou pour permettre aux entreprises d'offrir de la formation, contrairement aux autres industries?

M. Ed Glover: Le problème est d'ordre mondial. Nous sommes maintenant en concurrence avec la Chine, la Corée, Singapour et l'Inde.

Auparavant, je formais quatre apprentis chaque année. Et je n'ai pas une grande entreprise. Les 120 000 $ nécessaires pour former un apprenti représentent un gros investissement. J'avais auparavant les moyens de le faire. Je ne forme plus maintenant qu'un apprenti.

Voici un exemple des possibilités d'embauche d'apprentis. Le programme Moulding Youth for Industry, de Windsor, accueille des jeunes de 18 à 30 ans qui reçoivent des prestations d'assurance-emploi. Ces jeunes cessent de recevoir les prestations d'assurance-emploi. On les forme pendant 40 semaines et ils vont ensuite dans l'industrie. Sur 120 candidats—parce que nous n'avons pas suffisamment de sociétés prêtes à les former—seulement 23 vont dans les entreprises prêtes à les former. Les autres sociétés attendent qu'ils aient été formés pour aller les chercher. Mais lorsque les travailleurs prendront massivement leur retraite dans quelques années, ces apprentis ne seront qu'une goutte d'eau dans l'océan. Il faut encourager les sociétés à former des apprentis.

C'est 123 personnes qu'il faudrait former pour l'avenir du Canada—des jeunes qui ne seront pas au chômage et qui, si jamais ils y sont réduits, seront employables dès qu'un poste s'offrira... Il est très facile de faire des sondages auprès des agences de chômeurs. Combien de travailleurs spécialisés attendent un emploi? Aucun. C'est cela qui est extraordinaire. Ces gens-là ne seront pas au chômage.

M. Monte Solberg: Voici ma dernière question. Existe-t-il une province dont le programme pourrait servir de modèle?

M. Les Payne: Deux provinces ont d'excellents programmes. Il s'agit du Québec et de l'Ontario. Récemment, le Québec a fourni 22 des 30 concurrents au Mondial des métiers. Le Québec fait donc de l'excellent travail. Je ne connais pas les programmes d'aide au système d'apprentissage. Ces programmes commencent un peu plus tôt, je crois; on peut donc ainsi avoir un meilleur rendement pour les investissements. La société en a davantage pour son argent.

Je trouve toutefois étonnant qu'il n'existe au Canada aucun appui au système d'apprentissage—aucun. Jane Stewart a déclaré que le gouvernement fédéral appuie le système d'apprentissage, qu'il y investit 30 millions de dollars. Mais on a retiré plus de 600 millions de dollars... Il faudrait peut-être voir les choses différemment, créer un programme menant à un diplôme, ou quelque chose de ce genre, et cesser de payer ces apprentis. Nous pourrions alors ravoir les 600 millions de dollars. Nous n'avons pas à vous le donner.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Solberg.

Au nom du comité, je remercie tous nos témoins. Nous avons eu une table ronde très intéressante.

• 0955

Dans vos propos, j'ai remarqué que vous êtes très en faveur d'une stratégie qui favorise la croissance. Vous avez parlé de la productivité en relation avec le niveau de vie, de la mise en place d'un régime fiscal concurrentiel à l'échelle internationale, d'investissement dans l'infrastructure et de développement des ressources humaines dans le contexte de programmes de partenariat. Et bien sûr, vous appuyez l'utilisation par le gouvernement de tous les leviers à sa disposition pour favoriser cette croissance stratégique.

Je tiens également à souligner la question importante que vous avez soulevée au sujet d'une perspective continentale dans la résolution des problèmes en ce qui a trait à notre économie et aux problèmes qui se posent, de même, bien sûr, qu'en ce qui a trait aux questions d'obstacles au commerce interprovincial et à d'autres préoccupations.

Merci beaucoup. Encore une fois, vous avez fourni cette année au comité des renseignements précieux.

Je vais maintenant suspendre la réunion pendant environ deux minutes. Ne quittez pas vos sièges.

• 0956




• 1002

Le président: La séance est ouverte. Bienvenue à notre deuxième groupe de témoins, à ces consultations prébudgétaires que nous tenons à Toronto.

Ce groupe de témoins est composé de représentants d'un certain nombre d'organisations et de particuliers. Nous accueillons Mme Leslie Whicher, qui témoigne à titre personnel. Nous accueillons également le capitaine Brian Chury, le capitaine Vincent Charron et le capitaine Steve Linthwaite, de l'Association des pilotes de l'air. Nous entendrons de plus les représentants de l'Association canadienne des restaurateurs et des services alimentaires, Mme Joyce Reynolds, directrice principale des Affaires gouvernementales et Mme Becky McKinnon, présidente de Timothy's World Coffee. J'espère que le café que nous buvons ce matin vient de chez eux. Nous accueillons également les représentants du Régime de retraite des employés municipaux de l'Ontario, Dale E. Richmond, président et chef de la direction, et Walter Borthwick, président du conseil. L'Association canadienne des professionnels de la vente est représentée par M. Terry Ruffel, président. Enfin, nous entendrons M. Donald F. Warden, président sortant de l'Association canadienne des chefs de pompiers.

Vos noms nous sont familiers pour la plupart et vous savez déjà probablement comment le comité fonctionne. Vous avez de cinq à sept minutes pour faire vos remarques liminaires. Essayez de respecter cet horaire. Comme vous le voyez, il y a de nombreux témoins et les députés voudraient aussi leur poser des questions.

Commençons par Mme Whicher. Bienvenue.

Mme Leslie L. Whicher (témoignage à titre personnel): Merci de me donner l'occasion de participer à vos consultations, surtout en ce qui a trait aux objectifs de donner à tous les Canadiens une chance égale de réussir et d'améliorer leur qualité et leur niveau de vie.

Mon témoignage d'aujourd'hui est semblable à de nombreuses demandes qui ont déjà été faites en vain à de nombreuses reprises. Pourtant, rien ne saurait être plus important dans notre société que les conditions dans lesquelles nous élevons nos enfants. Il serait cynique, il me semble, de conclure qu'un gouvernement reconnu pour ses discours sur l'aide qu'il faut apporter aux enfants et aux Canadiens dits moyens pourrait continuer à tenter de justifier le régime actuel, dans lequel on calcule la valeur des enfants et de l'éducation des enfants pour la société principalement en fonction du revenu des parents. Dans le régime actuel, plus le revenu des parents est élevé, plus le crédit d'impôt pour enfants est élevé, et ce sont les familles à deux revenus, qui ont statistiquement le revenu familial le plus élevé, qui profitent du partage du revenu.

• 1005

Les prestations de maternité sont également calculées en fonction du revenu et augmentent en fonction de celui-ci. Cette structure de prestations qui augmentent parallèlement au revenu du bénéficiaire est contraire à tout principe d'équité ou à tout système d'impôt progressif que l'on puisse appuyer, surtout si on est libéral.

Dans le mémoire écrit que j'ai présenté, je réclame que votre gouvernement cesse d'exercer une discrimination dans son régime fiscal contre les familles dont un parent gagne tous les revenus, ou la majeure partie de ce revenu, alors que l'autre fait le sacrifice des avantages économiques pour élever leurs enfants. Plus précisément, le régime fiscal devrait être modifié de façon à permettre aux parents de partager la totalité de leurs revenus. Cela signifie que les deux parents devraient pouvoir se prévaloir de la déduction au titre des cotisations à un REER et qu'il faudrait convertir la déduction d'impôts pour frais de garderie en un crédit universel, sans égard au fait que l'un ou l'autre parent gagne le revenu familial ou au montant de ce revenu.

Comme je le souligne dans mon mémoire, aucun des arguments avancés par les défenseurs du système actuel ne résiste à l'analyse. Je dois espérer que vous avez lu ces motifs puisque c'est sur eux que repose tout mon mémoire, mais je ne peux faute de temps les reprendre oralement.

J'aimerais simplement relever que le crédit d'impôt pour enfants est une déduction fiscale qui est surtout intéressante pour la famille dont le conjoint qui gagne le moins a un revenu net avant impôt de plus de 114 000 $, ce qui représente un revenu familial minimum de 228 000 $.

Étant donné que, dans son rapport de juin 1999, le Sous-comité sur l'équité fiscale pour les familles canadiennes concluait qu'en dépit de la prestation fiscale pour enfants, il demeurait néanmoins un énorme écart entre les familles à un revenu et les familles à deux revenus, et que vous n'avez pourtant rien fait, j'ai demandé à mon député, M. Bevilacqua, de m'expliquer pourquoi le gouvernement persiste à conserver cette lourde discrimination malgré les conséquences manifestement très néfastes qu'elle a pour les enfants. Pourquoi donner tellement la préférence aux parents qui s'éloignent tous deux de leurs enfants pour aller gagner de l'argent chacun de leur côté? Je pensais qu'il devait y avoir une bonne raison que je ne connaissais pas. La réponse de M. Bevilacqua a été la seule explication qui m'ait été donnée et à laquelle j'ai pu accorder foi. Il m'a dit que la véritable raison, c'est que les pouvoirs publics estiment que plus il y a de parents dans la population active, plus la productivité économique du pays, c'est-à-dire le PIB, augmente. Il a dit notamment qu'on sollicite surtout les parents intelligents et très scolarisés parce que ce sont eux qui ont le plus à offrir.

En d'autres termes—ce n'est pas lui qui le dit mais moi—la valeur d'une personne en tant que parent, rêve de tout parent qui souhaite inculquer à ses enfants ses propres valeurs plutôt que de laisser ce soin à une quelconque gardienne rémunérée, et qui tient à être aux côtés de ses enfants parce que c'est dans leur intérêt, tout cela est délibérément sacrifié aux objectifs économiques nationaux à court terme du gouvernement. Pourquoi donc? Est-ce que l'augmentation du PIB améliore les chances d'être réélus? Et qu'en est-il de toutes les études sans cesse citées par les médias et qui parlent de l'effet néfaste produit par l'augmentation du stress dû au cumul des pressions exercées par la vie familiale et par la vie professionnelle, et qui affectent tout particulièrement les femmes: le nombre sans cesse croissant d'heures que les Canadiens consacrent chaque semaine au travail, l'augmentation du nombre de jours de congé de maladie pris par les parents, ainsi que la baisse de productivité entraînée par les maladies causées par le stress? Qu'en est-il de la valeur économique d'un parent qui, sans stress aucun, a le temps et l'énergie nécessaires pour donner le maximum afin d'assurer le développement de ses enfants? En d'autres termes, cette théorie qui veut qu'on sacrifie les enfants sur l'autel d'une augmentation du PIB tient-elle vraiment toujours lorsque tous ces facteurs sont intégrés dans l'équation?

Les États-Unis qui, comme je crois le savoir, considèrent la famille plutôt que le particulier comme une unité fiscale affichent toujours une productivité par habitant bien plus élevée que le Canada. Par ailleurs, si on pense vraiment que ce sont les parents intelligents, instruits et dynamiques qui ont le plus à offrir à l'économie, ne sont-ils pas eux aussi ceux qui ont le plus à offrir à leurs enfants? Et je ne parle pas ici de l'élément financier.

En offrant des milliers de dollars d'incitatifs aux gens pour qu'ils aillent travailler moyennant salaire, ce que vous nous dites en fait, c'est que s'occuper des enfants est, pour votre gouvernement, beaucoup moins important que ces objectifs financiers. La façon dont les avantages sont actuellement distribués traite l'enfant comme un obstacle au gain financier et guère plus. Les femmes qui travaillent à la maison sont à juste titre dépréciées par ces politiques, mais qu'en est-il de leurs enfants, eux qui doivent subir les conséquences financières de ces politiques? C'est bien beau d'abandonner un salaire parce qu'on croit que cela en vaut la peine pour l'enfant, mais se faire insulter et voir sa famille pénaliser en conséquence, c'est toute autre chose.

• 1010

Beaucoup de politiciens se plaisent à affirmer que les familles à double revenu sont la réalité d'aujourd'hui, et c'est quelque chose que nous devons admettre, mais il n'empêche que le gouvernement est en grande partie à l'origine de cette réalité. Si, après avoir renoncé à un salaire, vous vous trouvez pénalisé à hauteur de 7 000 $ d'impôts parce que vous n'engagez pas une gardienne pour aller gagner de l'argent, et à hauteur de plusieurs milliers de dollars de plus parce que la famille n'a qu'un seul chèque de paie au lieu de deux, la réalité est peut-être que le gouvernement a mis complètement hors d'atteinte la possibilité pour vous de subvenir vous-même à l'éducation de vos enfants dans une économie axée sur les familles à deux revenus. Les politiques actuelles ne donnent le choix de rester à la maison pour élever ses enfants qu'à ceux qui ont suffisamment d'argent pour ne pas être gênés financièrement par un système fiscal discriminatoire. Sont-ce là les seules personnes qui, pour le gouvernement, devraient avoir le droit de pouvoir rester à la maison avec leurs enfants? Les dépenses que j'ai préconisées étendraient à beaucoup d'autres Canadiens le privilège de pouvoir s'occuper eux-mêmes de leurs enfants, si telle est leur décision.

En définitive, les politiques actuelles sont le reflet d'une définition masculine de ce qui est utile pour la société, un travail pour lequel vous êtes rémunéré. L'égalité des possibilités offerte aux femmes de faire partie de la population active n'est pas le seul élément de progrès pour les femmes. Il est temps que la société dont nous faisons partie applique pleinement la théorie de la liberté de choisir ce qui est bien, lorsque 20 ou 30 années d'expérience nous ont appris le juste milieu entre la vie familiale et la vie professionnelle, au lieu de limiter la définition de la légalité de manière à exclure les rôles traditionnellement féminins. Si nous ne travaillons pas pour de l'argent, non seulement ne sommes-nous pas payées, ce qui est normal, nous sommes punies par une fiscalité discriminatoire qui, chaque année, coûte à nos familles plus que la plupart des amendes imposées lorsqu'on a enfreint la loi.

Le système fiscal devrait être neutre lorsqu'il s'agit, chose importante, de choisir de rester à la maison pour s'occuper de ses enfants ou d'aller travailler. De nombreux psychologues et spécialistes de la santé mentale estiment qu'un lien ininterrompu avec un parent parfaitement attentif, toujours disponible et aucunement stressé est fondamental au développement intellectuel et affectif de l'enfant. Les politiques de l'État ne devraient pas pouvoir influer sur le choix des parents dans ce domaine. Le financement des frais de garde d'enfants ne devrait avoir aucun rapport avec le niveau du revenu des parents. Les Canadiens sont censés pouvoir choisir librement leur religion, leur statut matrimonial ou leur affinité sexuelle, et l'État tente de demeurer fiscalement neutre à cet égard. Les femmes sont libres de concevoir des enfants ou d'interrompre une grossesse, et c'est tout naturel, et pourtant le système fiscal est radicalement discriminatoire au point d'en devenir pénalisant lorsqu'il s'agit de choisir la façon d'élever ses enfants.

Davantage de fonds pour les services de garde d'enfants rémunérés, davantage de prétendus programmes destinés aux enfants, de centres d'accueil subventionnés et autres concessions fiscales universelles, ce n'est pas cela que veulent les familles canadiennes, ce n'est pas cela non plus dont l'économie canadienne a besoin. Nous n'avons pas besoin de dépenser davantage d'argent pour les enfants qui bénéficient déjà des plus grandes largesses. Un dégrèvement fiscal qui mettrait les familles à un seul revenu sur un pied d'égalité financier avec les familles à deux revenus, pourvu que le revenu total brut reste le même, c'est cela qui aiderait l'économie nationale et profiterait aux enfants comme aucune autre mesure ne le ferait, pour la simple raison que ce serait les gens qui ont le plus besoin d'argent à dépenser qui en bénéficieraient. Les familles qui ont des enfants doivent acheter davantage de produits, de services, d'appareils électroménagers et ainsi de suite que les familles qui n'ont pas d'enfants, et les familles à un seul revenu sont depuis longtemps handicapées dans leur niveau de vie et dans leur pouvoir d'achat. On l'a dit et répété maintes fois, réduire les impôts des riches ne fait que stimuler l'épargne alors que réduire les impôts des pauvres permet de stimuler l'économie, et le même raisonnement s'applique ici.

Enfin, on a également trop souvent dit que le gouvernement actuel ne se sentait pas interpellé ni incité à écouter la population. Les parents qui élèvent eux-mêmes leurs enfants constituent un groupe qui n'est ni particulièrement visible, ni particulièrement puissant sur le plan politique. Le gouvernement a le devoir de protéger les droits de tous, mais pas uniquement de ceux dont la voix porte le plus. Si les enfants avaient une voix au chapitre, demanderaient-ils davantage d'argent pour financer les services de garde ou davantage d'argent pour que leurs parents puissent rester à leurs côtés?

J'implore le gouvernement de profiter de l'occasion qui lui est donnée de montrer l'exemple en faisant son devoir, en corrigeant une iniquité de longue date, comme en fait état le rapport déposé le 19 juin 1999 par le Sous-comité pour l'équité fiscale des familles canadiennes ayant des enfants à charge au lieu d'essayer d'apaiser tous les électeurs qui s'insurgent contre le dernier scandale mais en laissant grossir d'une année à l'autre toujours les mêmes injustices.

Je vous remercie.

Le président: Merci beaucoup.

Nous allons maintenant passer à l'Association des pilotes de ligne. Qui va prendre la parole? Monsieur Linthwaite.

Capitaine Steve Linthwaite (Association des pilotes de ligne): Monsieur le président, je vous remercie. Merci à vous, mesdames et messieurs.

Comme votre comité procède à ses consultations prébudgétaires annuelles en prévision du prochain budget fédéral, nous vous demandons de prendre en considération la requête suivante. Air Canada demande une nouvelle aide financière. À notre avis, sans vouloir débattre des tenants plus particuliers de cette aide financière, le gouvernement devrait réfléchir sérieusement aux éléments suivants avant de prendre une décision à cet égard.

Pour commencer, je voudrais vous présenter le commandant Vince Charron, qui est le représentant aux affaires publiques des pilotes régionaux d'Air Canada, et le commandant Brian Chury, le président du Comité de négociations des pilotes régionaux d'Air Canada. Quant à moi, je suis le président des pilotes régionaux d'Air Canada à l'Association des pilotes de ligne.

• 1015

Pour vous situer un peu, parce que vous entendrez beaucoup de témoignages aujourd'hui, l'Association des pilotes de ligne et le syndicat qui représente 66 000 pilotes et 47 compagnies aériennes aux États-Unis et au Canada. Aujourd'hui, nous représentons les 1 500 pilotes des lignes aériennes régionales d'Air Canada. On nous oublie parfois dans la grande société Air Canada, mais nous représentons la fusion de compagnies que vous connaissez sans doute: Air B.C., Air Nova, Air Ontario et Lignes aériennes régionales Canadien. Nous comptons plus de 5 500 employés. Nous sommes une filiale à part entière d'Air Canada et nous remontons à 1934—autrement dit, si vous me passez l'expression, nous n'allons pas nous envoyer à tire-d'aile du jour au lendemain. Pour ce qui est de la place que nous occupons financièrement au sein d'Air Canada, je me rapporte au rapport annuel de l'an 2000 de la société. Même si nous ne représentons que 7 p. 100 de la capacité d'Air Canada, nous intervenons pour 14 p. 100 des recettes. Vous voyez donc quel est notre poids financier et combien nos activités sont efficientes.

Chose plus importante, nous assurons le service à plus de 70 localités au pays, plus que toute autre compagnie aérienne au Canada, et cela ne comprend pas nos liaisons avec les États-Unis. Nous sommes la compagnie aérienne des localités de petite et de moyenne tailles au Canada, et c'est là je crois quelque chose d'important. Si nous sommes ici aujourd'hui, c'est pour manifester notre appui en faveur d'une aide financière supplémentaire du gouvernement du Canada aux lignes aériennes du pays, et en particulier Air Canada. Avant que vous ne preniez une décision, nous aimerions toutefois porter à votre attention certains problèmes.

Les transports sont une question difficile au Canada depuis la Confédération—nous le savons tous—en raison de notre géographie et d'une population relativement petite étendue sur un large territoire. Après les annonces des dernières semaines, on peut s'attendre à ce que les liaisons aériennes aux petites et moyennes localités du pays soient durement touchées. L'annonce faite par Air Canada Régional dans son communiqué de la semaine dernière évoquait une réduction de 24 p. 100 de la capacité à Air Canada Régional. Par rapport à l'époque où Air Canada était le transporteur dominant, en janvier 2000, après cette annonce, la capacité aura été réduite de plus de 40 p. 100. Cela touche directement le service que nous offrons aux localités du pays. Autre élément important du communiqué qui a peut-être été oublié, c'est que même si Air Canada a de nombreux appareils—28, je crois—commandés pour remplacer certains des avions cloués au sol, Air Canada Régional n'en a aucun. Nous n'avons donc aucun avion de remplacement et nous subissons une réduction de 40 p. 100 en un an et demi. Cela aura des conséquences directes sur le service que nous offrons aux localités.

Nous sommes ici en face d'une entreprise privée qui dicte dans les faits la politique nationale en matière de transports en raison de sa taille et de sa situation dominante. Si cette tendance se maintient, il arrivera quelque chose de très semblable à ce qui s'est produit dans le secteur ferroviaire, ou les grandes villes seront bien desservies, parce qu'elles sont rentables, alors que les trajets courts vers des localités plus petites sont progressivement supprimés. Bien sûr, un service sera assuré, mais ce ne sera pas un service de qualité: à peine un squelette de service et personne ici ne veut de cela, j'en suis sûr.

Pourquoi cela se produit-il? Le problème fondamental, c'est la structure d'Air Canada. Le rapport entre Air Canada et Air Canada Régional fait que les avantages d'Air Canada Régional sont sous-utilisés. Dans notre mémoire, nous employons un terme qu'il y a lieu de définir: «portée». C'est un terme particulier au secteur de l'aviation et en termes de profane, il s'agit d'une clause de non-impartition, que les syndiqués que nous sommes appuyons. Le problème est la façon dont elle est employée dans la famille de compagnies d'Air Canada. En effet, nous sommes une filiale à 100 p. 100, de sorte qu'il ne s'agit pas d'un problème d'impartition mais de travail à l'interne. Nous connaissons des problèmes structurels de base à cause des restrictions imposées à la société mère qui l'empêchent de se servir des compagnies régionales, ce qui nuit donc au service aux localités du pays. Ces restrictions portent sur le nombre d'appareils que nous pouvons utiliser, leur taille et leur catégorie. Ce n'est pas nous qui décidons; la décision est prise à l'externe, à Air Canada.

Autre chose intéressante actuellement, Air Canada veut lancer un transporteur économique. Pour nous, la société n'a pas à faire des dépenses pour le faire: la structure économique, c'est nous qui l'avons. Nous existons déjà à l'intérieur d'Air Canada et on devrait faire appel à nous à la pleine mesure de nos moyens avant d'emprunter cette voie.

En résumé, les trois éléments à dégager de nos exposés sont les suivants: nous appuyons le financement exceptionnel de l'industrie du transport aérien, en particulier d'Air Canada, mais vous devrez vous assurer auparavant que le service aux petites et moyennes localités se poursuit.

• 1020

De plus, je vous invite à examiner la structure d'Air Canada—la société mère et ses transporteurs régionaux—avant d'accorder aveuglement du financement.

Je vous remercie du temps que vous m'avez accordé.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Linthwaite.

Nous allons maintenant entendre l'Association canadienne des restaurateurs et des services alimentaires, représentée par Joyce Reynolds et Becky McKinnon. Je vous souhaite la bienvenue.

Mme Becky McKinnon (présidente, Timothy's World Coffee; Association canadienne des restaurateurs et des services alimentaires): Merci, monsieur le président.

Je m'appelle Becky McKinnon. Je suis membre du conseil d'administration et présidente sortante de l'Association canadienne des restaurateurs et des services alimentaires. L'association compte 15 900 compagnies du secteur de l'alimentation au service de plus de 47 500 restaurants. Cette activité pèse 40 milliards de dollars et emploie près d'un million de Canadiens. Dans une autre incarnation, je suis également présidente de Timothy's World Coffee. Nous avons 150 cafés au Canada; nos franchisés et nos magasins emploient environ un millier de personnes.

Monsieur le président, vous nous avez demandé d'énoncer nos priorités et de formuler des recommandations précises en fonction des objectifs du comité. Nous proposons l'adoption d'une exemption annuelle de base (EAB) de 3 000 $ à l'égard des cotisations à l'assurance-emploi. C'est là une priorité pour les entreprises d'alimentation à fort coefficient de main-d'oeuvre qui ont désespérément besoin d'un allégement des charges sociales. Cette proposition répond également aux objectifs budgétaires, économiques et socio-économiques du comité puisqu'elle favorise une plus grande équité fiscale et la promesse d'un plus grand nombre d'emplois pour les nouveaux venus sur le marché du travail. Cette mesure peut être introduite à un coût pour l'État inférieur à celui de tout autre allégement fiscal.

Je sais que la plupart d'entre vous connaissent déjà l'exemption annuelle de base que nous proposons de façon détaillée dans notre mémoire. Depuis que ce document a été rédigé, nos vies ont été transformées. La menace terroriste qui pèse sur le monde à la suite de l'attentat du 11 septembre a porté un dur coup au tourisme et aux services d'accueil comme les restaurants. Les voyageurs d'affaires et d'agrément ont annulé leurs projets de déplacement. Les ménages réduisent leurs dépenses discrétionnaires. Même si toutes les entreprises doivent faire face au ralentissement de l'économie, les difficultés sont particulièrement grandes dans le cas des entreprises d'accueil à fort coefficient de main- d'oeuvre. La nécessité d'un allégement ciblé des charges sociales se fait donc sentir de façon de plus en plus pressante.

La rentabilité avant impôt des restaurants est passée de 9,6 p. 100 en 1990 à 6,6 p. 100 en 2000. Pendant cette période, le nombre moyen de travailleurs par restaurant est passé de 14 à 12. Cela représente 114 000 emplois disparus. Cela tient largement au fait que l'État dépende de plus en plus des recettes tirées des charges sociales. Une étude récente du Conference Board du Canada montre que les charges sociales représentent 40 p. 100 du fardeau fiscal du restaurant moyen, par rapport à 29 p. 100 du fardeau fiscal de l'entreprise canadienne moyenne. Les charges sociales fédérales pour un restaurant moyen ont augmenté de 50 p. 100 depuis 1989. Comme ces charges sont insensibles aux bénéfices et n'ont aucun rapport avec la capacité de payer de l'entreprise, le rythme de leur progression a extorqué un lourd tribut à un secteur connu pour sa faible rentabilité. La réaction des restaurants a été de réduire la main-d'oeuvre.

Jusqu'à présent, j'ai donné deux raisons pour justifier l'allégement des charges sociales, le rythme effarant de leur progression et le lien entre leur alourdissement et la perte d'emplois. La troisième raison, c'est le caractère régressif des charges sociales. Elles imposent un fardeau fiscal disproportionné aux travailleurs les moins rémunérés. L'EAB, que préconise le Comité des ressources humaines, réussirait particulièrement à apaiser les préoccupations que je viens d'évoquer. En effet, la mesure vise les citoyens à faible revenu ainsi que les entreprises à forte intensité de main-d'oeuvre, les groupes les plus pénalisés par cette forme régressive d'imposition.

Nous savons à quelles incertitudes économiques et immenses pressions externes est confronté l'État et combien elles limitent notre marge de manoeuvre. La rigueur budgétaire reste de mise. Toutefois, étant donné que les cotisations au RPC vont augmenter encore de 40 cents les 100 $ de rémunération en janvier, une réduction des cotisations d'assurance-emploi n'est pas une option pour vous, mais le genre de réductions des cotisations d'assurance-emploi devient aujourd'hui encore plus important. Une EAB est la mesure la plus sensée en cette période d'incertitude économique grandissante.

Le redressement de l'économie canadienne dépendra de la propension des ménages à dépenser. Les réductions d'impôt visant les gagne-petit sont reconnues pour être les meilleures mesures de relance d'une économie faible, parce que les gagne-petit sont les plus portés à dépenser. C'est la raison pour laquelle aux États-Unis un mouvement bipartisan prend de l'ampleur en faveur de ce genre de réductions des charges sociales. De plus, comme le rappelle notre mémoire, une étude récente du Conference Board du Canada confirme que la réduction des charges sociales apporterait à l'État des recettes fiscales plus rapidement que toute autre forme de réduction d'impôt.

• 1025

En résumé, une EAB dans le cadre du programme d'AE rendrait plus progressives les charges sociales, allégerait le fardeau de plus en plus lourd des charges sociales, stimulerait la création d'emplois, notamment pour les nouveaux venus sur le marché du travail et les jeunes. C'est la mesure qui coûte le moins cher et qui apporte les plus grands bienfaits socio-économiques aux citoyens. C'est une solution gagnante pour les nouveaux travailleurs, les entreprises à forte intensité de main-d'oeuvre et l'État.

Merci beaucoup.

Le président: Merci beaucoup, madame McKinnon.

Nous entendrons maintenant les représentants du Régime de retraite des employés municipaux de l'Ontario, Dale E. Richmond et Walter Borthwick.

M. Walter Borthwick (président du conseil, Régime de retraite des employés municipaux de l'Ontario): Merci beaucoup, monsieur le président et mesdames et messieurs les députés. Au nom de notre conseil, je tiens à vous dire toute notre gratitude de l'occasion qui nous est offerte de comparaître devant vous aujourd'hui. Nos réflexions et nos propos porteront surtout sur des modifications relativement simples à la politique du gouvernement qui, à notre avis, auraient des effets profonds importants et très positifs sur la sécurité de plusieurs milliers de retraités canadiens. Je vais demander à notre président et chef de la direction, Dale Richmond, de faire l'exposé.

M. Dale E. Richmond (président et chef de la direction, Régime de retraite des employés municipaux de l'Ontario): Bonjour, mesdames et messieurs. Je crois que tout le monde a le document entre les mains; je vais donc me contenter de le commenter brièvement.

Tout d'abord, nous sommes le plus important régime de retraite du secteur public au pays. Depuis 40 ans, nous prévoyons notre avenir. Nous sommes le régime de retraite des fonctionnaires locaux de l'Ontario, de tous ces organismes, conseils et commissions ainsi que de tout le personnel non enseignant des conseils scolaires. Notre régime compte 300 000 cotisants. Le conseil de direction, mixte, gère aujourd'hui plus de 30 milliards de dollars d'actif.

J'aimerais commenter deux recommandations de modification à la politique gouvernementale que nous proposons ce matin. La première porte sur le surplus autorisé des régimes de retraite et l'autre sur le plafonnement et des cotisations au régime de retraite enregistré et de ses prestations.

Je parlerai d'abord du plafonnement du surplus des régimes de retraite. Le problème, c'est la limite actuelle de 10 p. 100 de surplus que l'on peut détenir dans un régime de retraite enregistré. Ce plafond nuit vraiment à la gestion financière prudente des grands régimes de retraite du secteur public. La gestion prudente de notre caisse de retraite exige que nos décisions portent sur le très long terme. La limite de 10 p. 100 de surplus prévue dans la Loi de l'impôt sur le revenu elle, au contraire, est fixée de l'extérieur et ne vise que le court terme et provoque l'arrêt abrupt et complet des cotisations au régime. Lorsque les cotisations reviennent, les conséquences financières de ces cotisations nulles feront que le régime sera insuffisamment capitalisé, à la fois comme entité en activité et sur le plan de la solvabilité. Cela produit le paradoxe suivant: lorsque les cotisations reprennent, elles doivent être supérieures à ce qu'elles étaient ce qui, évidemment, rend la vie plus difficile aux employeurs, aux employés et, dans le cas de tous les régimes du secteur public, aux contribuables du pays.

La règle des 10 p. 100 a été adoptée à l'origine pour empêcher les employeurs de mettre des sommes excessives à l'abri de l'impôt grâce à leurs régimes de retraite. La réglementation des régimes de retraite a toutefois beaucoup évolué depuis que cette règle a été adoptée. Ainsi, des modifications ont été apportées aux normes comptables afin de limiter ce qui peut être déduit comme dépenses. Tous les régimes de retraite doivent par ailleurs être attestés par un actuaire. La jurisprudence relative à la gestion des surplus et la législation provinciale sur les régimes de retraite ont aussi beaucoup changé. Les marchés boursiers sont plus volatiles, et les régimes eux-mêmes, bien sûr, devenus plus importants.

• 1030

À tel point que les changements d'orientation ne peuvent pas se faire du jour au lendemain et qu'il est assez difficile d'arrêter ou de réinstituer rapidement les cotisations. Nous sommes d'avis que les règles fiscales actuelles sont vraiment trop restrictives et qu'elles sont peut-être même inutiles étant donné qu'il faut gérer ces régimes pour le long terme—et nous devons les gérer pour des périodes allant de 20 à 40 ans. De nos jours, les gens passent souvent plus de temps à la retraite qu'ils n'en ont passé à travailler. Aussi, nous tentons de fixer les taux de cotisation en tenant compte du fait qu'il y aura des périodes de croissance et qu'il y aura aussi, bien entendu, des périodes déficitaires.

Exiger un congé de cotisation égal au plein montant du surplus généré par un relèvement provisoire du marché aurait pour effet de créer un déséquilibre dans le financement global à long terme du régime, puisqu'on y engloutirait le surplus à court terme dont on pourrait avoir besoin pour compenser les périodes déficitaires futures—et c'est justement ce qui nous arrive à l'heure où nous nous parlons. Pareil déséquilibre contribue énormément à la volatilité des régimes, et tout le monde en souffre.

Tout comme les responsables d'autres importants régimes—celui des enseignants, celui des hôpitaux—nous avons discuté avec les fonctionnaires du ministère à Ottawa de modifications qui pourraient être apportées à cet égard. Les discussions semblent assez prometteuses, mais il nous faut une certaine volonté politique à l'appui des changements proposés. C'est pourquoi nous incitons vivement le gouvernement à modifier la règle des 10 p. 100, soit en faisant passer le surplus maximal à 20 p. 100, soit en permettant la mise en place d'un plan de gestion du surplus à plus long terme comme moyen de réduire progressivement les surplus que peuvent afficher les caisses de retraite. Voilà pour la première série de recommandations.

La deuxième vise les limites fixées pour les prestations et les cotisations des régimes enregistrés. En limitant comme à l'heure actuelle les cotisations aux REER et aux régimes de retraite enregistrés, on désavantage des dizaines de milliers de Canadiens qui ne peuvent pas de ce fait mettre suffisamment d'argent de côté ou contribuer suffisamment à leurs régimes de retraite pour protéger leur niveau de vie quand ils seront retraités. Beaucoup d'entre eux contribuent cependant par leurs impôts au financement de programmes comme le supplément du revenu garanti et la sécurité de la vieillesse pour que d'autres aient l'assurance qu'ils ne subiront pas une baisse déraisonnable de leurs revenus une fois retraités. Beaucoup d'entre eux ne peuvent toutefois avoir cette assurance pour eux-mêmes. Le montant maximal de la pension payable à partir d'un régime de retraite enregistré est gelé depuis 23 ans—c'est quelque chose de tout à fait surprenant—alors que la déduction maximale au titre d'un REER n'a pas encore atteint les 15 500 $ que le gouvernement avait promis il y a de cela assez longtemps.

Nous considérons que le gouvernement devrait à tout le moins s'engager à doubler la limite des cotisations à un REER pour la faire passer de 13 500 $ comme c'est le cas à l'heure actuelle à 27 000 $. Nous souhaiterions également que la politique soit modifiée afin d'accroître le plafond des régimes à prestation déterminée pour le faire passer de 1 722 $ par an à 3 000 $ par an. Ces deux modifications aideraient les Canadiens à mieux prévoir eux-mêmes la sécurité du revenu dont ils auront besoin quand ils seront à la retraite et à moins dépendre des programmes gouvernementaux.

Le président: Merci beaucoup.

Y a-t-il d'autres observations sur ce point? Non? D'accord.

Nous allons maintenant entendre Terry Ruffel, président de l'Association canadienne des professionnels de la vente.

M. Terry Ruffel (président, Association canadienne des professionnels de la vente): Merci, monsieur le président.

Je m'appelle Terry Ruffel, et je suis président de l'Association canadienne des professionnels de la vente. Notre association compte 30 000 membres qui représentent tous les aspects de la vente et du marketing au Canada. Elle regroupe tant des petits entrepreneurs indépendants que des professionnels de la vente et du marketing à l'emploi de grandes sociétés. Nos membres sont présents dans toutes les provinces et tous les territoires et ils apportent une contribution importante à la vitalité économique de toutes les localités canadiennes, quelle que soit leur taille. Par ailleurs, ils vendent aussi des produits et des services canadiens à l'échelle du monde entier.

Je peux affirmer avec confiance que le mémoire que nous avons préparé pour les consultations prébudgétaires reflète les opinions de nos membres puisque nous avons fait une importante enquête transversale sur le sujet au cours de l'été.

• 1035

Quand le comité permanent a invité l'ACPV à participer encore une fois cette année aux consultations prébudgétaires, nous avons été invités à nous prononcer sur l'utilisation qui devrait être faite de l'excédent budgétaire annuel. Après enquête, nos membres ont clairement indiqué qu'il serait bien plus important selon eux d'utiliser l'excédent budgétaire pour réduire les impôts et la dette nationale que pour accroître les dépenses au titre de quelque programme ou service nationaux que ce soit.

Les réductions de l'impôt des particuliers qui sont entrées en vigueur au 1er janvier ont contribué de façon importante à empêcher jusqu'à maintenant que l'économie canadienne ne sombre dans la récession en redonnant confiance aux consommateurs et en relevant les niveaux de revenu disponible. Étant donné le marasme économique que nous connaissons au Canada ces derniers temps, surtout depuis le 11 septembre, il n'est pas surprenant que 45 p. 100 de nos membres considéraient que le surplus devrait d'abord et avant tout servir à réduire les impôts encore davantage.

Notre mémoire fait état du peu de confiance qu'ont nos membres dans la capacité de l'économie de croître de façon appréciable l'an prochain. Ils sont à peine 5 p. 100 à s'attendre à ce que la croissance dépasse 3 p. 100, alors que près de 48 p. 100 d'entre eux estiment qu'elle ne dépassera pas 1 p. 100. Ils ne sont que 35 p. 100 à penser que la confiance des consommateurs est suffisante pour nous assurer une économie porteuse l'an prochain. Ces spécialistes de la vente sont pourtant réputés pour leur optimisme.

L'ACPV incite donc vivement le comité permanent à recommander un allégement considérable du fardeau que constituent les taux d'imposition du revenu des particuliers de même qu'une réduction du taux d'imposition supérieur pour le ramener à 27 p. 100. Nous recommandons également au comité permanent d'appuyer l'adoption d'un échéancier accéléré de réduction de l'impôt des sociétés.

Après l'allégement fiscal, nos membres—ils étaient un plus de 41 p. 100 à le penser—considéraient que l'excédent budgétaire devrait servir à réduire la dette. Les quelque 42 milliards de dollars d'impôts qui sont pris dans les poches des contribuables canadiens pour payer les intérêts sur la dette nationale abaissent considérablement le revenu disponible tant des consommateurs que des entreprises.

Enfin, 13 p. 100 seulement de nos membres étaient d'avis que le surplus devrait être utilisé pour accroître les dépenses au titre des programmes et des services nationaux. Le comité permanent nous demandait de choisir entre divers secteurs de dépenses. Comme nous le faisons remarquer dans notre mémoire, les soins de santé et l'éducation sont les principaux secteurs de dépenses retenus par nos membres.

Les membres de l'ACPV s'étaient prononcés contre un accroissement des dépenses à ce chapitre avant les attentats terroristes du mois dernier, mais il nous paraît évident qu'il faudra inévitablement accroître les dépenses au titre de la défense et du renseignement de sécurité à la suite de ces attentats. Il nous apparaît tout aussi clairement que de nouvelles dépenses seront dans une certaine mesure nécessaire afin d'assurer la sécurité. Il faudra donc limiter les dépenses dans d'autres secteurs. C'est pour cette raison que nous prions instamment le comité permanent de continuer ses efforts en vue de l'adoption d'un pacte sur la productivité comme moyen de limiter les dépenses publiques non essentielles ou inutiles.

Nous formulons dans notre mémoire un certain nombre de recommandations qui témoignent du fait qu'un grand nombre de nos membres proviennent du milieu de la petite entreprise. Vous les trouverez dans la liste des recommandations qui figure aux deux dernières pages de notre mémoire. Je tiens donc, au nom des membres de l'Association canadienne des professionnels de la vente, à vous remercier de nous avoir invités ici aujourd'hui.

Merci, monsieur le président.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Ruffel.

Nous allons maintenant entendre l'Association canadienne des chefs de pompiers et Donald F. Warden, qui en est le président sortant. Soyez le bienvenu.

Chef Donald F. Warden (président sortant, Association canadienne des chefs de pompiers): Merci, monsieur le président.

Je m'appelle Donald Warden, et je suis chef des pompiers de Wasaga Beach, en Ontario. Je témoigne toutefois devant vous aujourd'hui en ma qualité de président sortant de l'Association canadienne des chefs de pompiers, qui regroupe 1 100 chefs de pompiers répartis dans toutes les provinces et tous les territoires.

À la page 1 de notre mémoire, vous trouverez la composition des services d'incendie canadiens et à la page 2, le mandat de ces services. Vous trouverez une description du processus que nous suivons lors de notre assemblée annuelle pour approuver démocratiquement les résolutions qui sont à la base de ce mémoire. Comme je n'ai pas beaucoup de temps ce matin, je ne vais même pas essayer de résumer toute cette documentation.

À l'occasion de ces consultations prébudgétaires, vous allez certainement entendre des tas de gens vous expliquer en quoi les événements du 11 septembre ont changé pour toujours notre existence. C'est évidemment profondément vrai dans le cas des services d'incendie du Canada. Les pompiers du monde forment une grande famille. Quand un de nos frères tombe, où que ce soit dans le monde, nous sommes tous en deuil.

Beaucoup d'intervenants parlent du 11 septembre après coup, mais dans notre mémoire, qui a été présenté le 8 août, nous recommandions déjà que le prochain budget prévoie un financement et un soutien des services d'incendie canadiens pour nous permettre de nous préparer correctement à des attentats terroristes. Nous avons expliqué que les services d'incendie et les autres services de première urgence locaux devaient faire seuls face à la situation pendant de nombreuses heures avant qu'une aide fédérale sérieuse ne puisse intervenir.

À la page 4 de notre mémoire, nous mentionnons des exemples de propriété intellectuelle de notre association, à commencer par l'initiative de partenariat pour des communautés plus sûres. Cette propriété intellectuelle appartenait précédemment au Conseil canadien des accidents industriels majeurs, une organisation qui était financée par le gouvernement du Canada et le secteur privé. Quand le conseil a disparu en 1999, ce soutien financier a aussi disparu.

• 1040

Notre association fait de gros efforts pour perpétuer ces programmes de préparation aux situations d'urgence, mais nous avons besoin de votre aide. C'est pourquoi nous avons recommandé qu'on prévoie dans le prochain budget des mesures de soutien financier pour les organisations dont le mandat prévoit la prévention des catastrophes naturelles et humaines ou l'intervention en réponse à ces catastrophes.

Dans les deux dernières pages de notre mémoire, nous résumons nos huit recommandations. Vous remarquerez que cinq d'entre elles sont consacrées à la prévention des catastrophes et à la planification des interventions pour y répondre, ainsi qu'à la nécessité d'une bonne planification face à la menace terroriste.

L'objectif principal des services d'incendie n'est pas de lutter contre le terrorisme mais, comme je l'ai déjà dit, nous sommes là pour protéger les individus et les biens en cas d'attentat. Les événements du 11 septembre ont montré l'importance de la préparation à cette intervention. Bien que les événements qui se sont produits à New York et à Washington ne soient pas mentionnés dans le mémoire que nous avions rédigé en juillet, ils sont venus confirmer qu'il fallait inclure dans le prochain budget fédéral des mesures qui n'étaient pas envisagées cet été. Il faut débloquer ces fonds pour permettre aux services d'incendie du Canada de se doter du matériel et de l'équipement nécessaires pour faire face à des incidents biologiques et chimiques, notamment à des attentats terroristes, et aussi de disposer des moyens de secours urbains appropriés.

Nos trois dernières recommandations portent sur d'autres sujets importants pour les services d'incendie. La recommandation 6 concerne un problème qui irrite les pompiers depuis plusieurs années. En fait, la gravité de la situation a justifié l'adoption d'une résolution à notre conférence du mois dernier. Nous nous devons d'attirer l'attention du comité permanent sur ce problème, car nos démarches auprès du ministère des Finances et de l'Agence canadienne des douanes et du revenu ont été sans effet.

Souvent, les municipalités mettent à la disposition des pompiers des véhicules d'intervention d'urgence. Quand ils ne sont pas en service, ces pompiers n'ont pas d'autres choix que de ramener ces véhicules chez eux après leurs heures de travail normales. En général, ces véhicules sont équipés de feux à éclat, d'une sirène, d'un appareil radio émetteur-récepteur et du matériel personnel de lutte contre les incendies. En outre, le nom du service d'incendie est généralement peint sur le véhicule.

Jusqu'en 1999, il n'y a pas eu de problèmes. Toutefois, cette année-là, Revenu Canada a décidé que ce véhicule d'intervention d'urgence mis à la disposition des pompiers était un avantage personnel et par conséquent imposable. En intervenant sur ce problème dans son rapport prébudgétaire à la Chambre, le comité permanent peut adresser un message positif aux services d'incendie du Canada. Le comité affirmerait que les véhicules d'intervention d'urgence mis à la disposition des pompiers par une municipalité dans le but express de répondre à des menaces graves pour les personnes et les biens ne sont pas la même chose que les véhicules de société utilisés en dehors du travail.

Merci de votre attention. Je suis impatient de discuter de ces questions avec vous ce matin.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Warden.

Nous passons donc aux questions et c'est M. Solberg qui commencera, pour un tour de cinq minutes.

M. Monte Solberg: Merci beaucoup, monsieur le président.

Je remercie tous nos témoins. Vos exposés m'ont beaucoup intéressé.

J'espère que les témoins comprendront également que le Comité des finances se trouve dans une position difficile. L'année dernière, les dépenses de programme ont augmenté de 9 p. 100 au Canada. Toutefois, depuis, il y a eu un ralentissement de l'économie. Les recettes dégringolent. Évidemment, ce qui s'est passé le 11 septembre n'a fait qu'aggraver les choses et nous vivons maintenant dans un climat de grande incertitude. Je me doute bien que depuis le 11 septembre, la liste des priorités en matière de dépenses a été modifiée.

Monsieur le président, je favorise un grand nombre des suggestions faites ici mais j'estime qu'il serait presque obligatoire que ceux qui proposent des façons pour le gouvernement de réduire les impôts—ce que je préconise absolument—ou qui suggèrent qu'on augmente les dépenses dans d'autres secteurs, assortissent leurs propositions de moyens de réduire les dépenses, car il y a un grand gaspillage au gouvernement et des suppressions s'imposent. Voilà ce que je voulais dire.

Tout d'abord, madame Whicher, je suis entièrement avec votre raisonnement. Je pense que vous avez tout à fait raison. Je tiens à vous dire que M. Bevilacqua est un assez bon gars, même s'il est libéral.

Le président: Silence, s'il vous plaît.

M. Monte Solberg: Il m'appuie sans doute en secret. Sachez que des députés de l'opposition vont continuer de propager votre message. Je suis entièrement d'accord avec vous. Je ne vais pas vous poser de questions là-dessus. Vous pourrez faire des remarques plus tard.

• 1045

Je tiens toutefois à poser une question aux pilotes de ligne.

Dans votre exposé, vous faites valoir que pendant que le gouvernement envisage un train de mesures pour venir en aide à Air Canada, on devrait en même temps tenir compte de la structure des coûts des lignes aériennes régionales, de ce genre d'élément. C'est de bonne guerre mais je voudrais contester cette prémisse. Je me demande pourquoi vous estimez que le gouvernement devrait venir en aide à Air Canada maintenant alors que la vaste majorité des problèmes de la société existait bien avant le 11 septembre.

Capt Steve Linthwaite: Merci, monsieur Solberg.

Je pense que cela touche un de mes arguments—à savoir l'importance des transports au Canada. Si on se reporte au moment de la restructuration du secteur il y a 18 mois, personne ne niera qu'Air Canada, avec sa filiale, Air Canada Régional, est devenue une présence dominante, d'autant plus dominante dans les localités que nous desservons.

Pour la majorité de nos parcours, nous n'avons quasiment pas de concurrence. La concurrence qui existe en effet touche les liaisons avec Calgary, Toronto, Vancouver et Halifax. Ces liaisons sont très concurrentielles. Mais les liaisons avec Timmins, Ganders et Terraces—dans toutes ces localités il n'y a pas de concurrence.

Actuellement, étant donné les difficultés financières... je reconnais que l'essentiel de ces difficultés existait auparavant. Nous en convenons. Mais la nouvelle donne les a aggravées. Nous tenons à dire qu'avant d'injecter de l'argent aveuglément, il faudrait repenser la structure, car la structure actuelle a des répercussions sur le service offert aux petites et moyennes localités de petite et moyenne tailles.

Je conviens avec vous qu'il faut que ce soit revu. C'est en fait ce que nous préconisons. On ne devrait pas injecter de l'argent aveuglément. Toutefois, il ne faut pas oublier l'important service que nous fournissons aux collectivités dans les régions. Nous sommes le transporteur aérien. Là-bas, il n'existe rien d'autre. À défaut de nos services, il y a le service d'autobus ou un train.

Voilà ce que nous essayons de faire comprendre ici aujourd'hui. Avec ce qui s'est passé, ce message est oublié. Évidemment, il n'y a pas beaucoup de sympathie pour Air Canada actuellement, et pour M. Milton en particulier. C'est un fait, je le reconnais. Toutefois, que cela n'infléchisse pas vos décisions au détriment du service aux petites collectivités canadiennes.

M. Monte Solberg: D'accord. Nous avons peu de temps; je m'adresserai donc tout de suite à l'Association canadienne des restaurateurs et des services alimentaires.

Vous savez, 2,3 milliards de dollars, c'est beaucoup d'argent. Je me demande ce que coûtera la pleine mise en oeuvre de votre programme. Selon vous, quelles dépenses le gouvernement devrait-il réduire pour pouvoir payer un programme tel que celui que vous préconisez?

Mme Becky McKinnon: À la page 15 de notre mémoire, vous trouverez un tableau explicatif du Conference Board.

Permettez-moi d'ajouter deux choses. L'augmentation des charges sociales des restaurateurs a entraîné la perte de nombreux emplois. Si vous examinez le taux de chômage chez les moins de 25 ans par rapport aux plus de 25 ans, vous constaterez que chez les jeunes, le taux de chômage est deux fois plus élevé, soit 12,5 p. 100. Nous pouvons présumer que ce taux augmentera encore, car notre secteur a été touché très durement. Nous avons dû réviser nos projections à la baisse.

Il y aura toutefois reprise avec l'augmentation de l'emploi et des dépenses. Cet argent est recyclé très rapidement par l'économie. Si vous tenez compte du fait que nous verserons davantage en charges sociales en raison de l'augmentation des contributions au RPC, la situation de notre secteur est délicate, autant au niveau de l'emploi que de sa santé générale.

M. Monte Solberg: Chaque année, DRHC verse de l'argent à des entreprises. Serait-ce une bonne idée de mettre fin à ce financement afin de permettre...

Mme Becky McKinnon: Est-ce que vous parlez du programme pour l'embauche de nouveaux travailleurs?

M. Monte Solberg: Non. Je parle simplement des subventions et contributions versées par DRHC aux fins du développement régional et industriel.

Mme Becky McKinnon: Cela nous plairait. Ce serait plus équitable et plus de gens pourraient en profiter. Il y aurait alors accès égal pour tous et ce serait relativement facile à administrer.

Joyce est première vice-présidente aux Affaires gouvernementales à l'Association canadienne des restaurateurs et des services alimentaires. Elle pourra vous donner des statistiques plus détaillées que moi.

Mme Joyce Reynolds (directrice principale, Affaires gouvernementales, Association canadienne des restaurateurs et des services alimentaires): Je voulais simplement ajouter que nous sommes d'avis que les programmes de contribution aux entreprises ont souvent un effet de distorsion sur le marché. Nous serions donc inquiets à l'idée qu'on veuille augmenter les dépenses à cet égard.

En ce qui a trait à notre proposition, il faut aussi tenir compte du fait que, l'an dernier, 7 milliards de dollars provenant de la caisse de l'assurance-emploi ont été versés au trésor. Ces quelques dernières années, ces sommes se sont élevées jusqu'à 40 milliards de dollars.

• 1050

Je ne crois pas que nous demandions des allégements fiscaux. Nous demandons qu'on redonne aux employeurs et aux employés l'argent qu'ils ont versé à ce régime.

M. Monte Solberg: C'est une remarque pertinente.

Le président: Merci, madame Reynolds.

Monsieur Brison, vous avez la parole.

M. Scott Brison: En fait, nous pourrions peut-être commencer par...

Le président: Par M. Nystrom?

M. Scott Brison: Ou par M. Loubier. Je vous laisse le soin...

M. Lorne Nystrom: Comment procède-t-on généralement?

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe—Bagot, BQ): Pourquoi adoptez-vous une autre méthode à Toronto?

Le président: Parce que Toronto, c'est un autre monde.

Des voix: Oh, oh!

M. Scott Brison: Je serai le premier à prendre la parole à Halifax.

M. Lorne Nystrom: Et je serai le premier dans les provinces de l'Ouest.

Le président: Bon. D'accord. Je cède donc la parole à M. Loubier.

[Français]

M. Yvan Loubier: Merci, monsieur le président.

Avant de poser ma question aux gens de l'air, je crois qu'il serait peut-être important de revenir sur ce que M. Solberg a mentionné tout à l'heure, soit qu'il faut faire attention à la psychose du ralentissement économique. Il ne faut pas non plus trop mettre sur le compte des événements du 11 septembre un ralentissement économique qui pourrait jouer sur les surplus fédéraux.

D'ailleurs, on aurait aimé que le ministre des Finances nous présente l'état de la situation, parce qu'il est censé être le seul à savoir l'état des finances publiques fédérales. Cela aurait ajouté à la pertinence d'un exercice comme celui que nous faisons aujourd'hui, et que nous allons faire un peu partout au Canada.

Jusqu'à présent—et nous ne nous sommes pas trompés de 150 p. 100 comme le ministre des Finances le fait depuis cinq ans—même en tenant compte d'une croissance nulle pour les mois de juillet et août et d'une décroissance de 2 p. 100 du PIB pour les six derniers mois de cette année, on arrive à des surplus qui dépassent les 13 milliards de dollars.

Il y a encore de l'argent dans les coffres fédéraux, et les surplus seront plus importants que jamais cette année. Jusqu'à présent, pour les quatre premiers mois de cette année, M. Martin a accumulé 11 milliards de dollars de surplus. Alors, il faut arrêter de dramatiser en disant qu'il faut couper à nouveau dans les dépenses. Je pense qu'on a fait les compressions qu'il fallait faire au cours des dernières années. Il y a de l'argent. Comme vous l'avez mentionné, madame Reynolds, au niveau de l'assurance-emploi, il y avait encore un surplus de 7 milliards de dollars dans la caisse de l'assurance-emploi lors du dernier exercice.

Alors, s'il y a des mesures à mettre de l'avant pour donner de l'oxygène aux PME comme les vôtres ou pour aider les familles, par exemple, il y a une marge de manoeuvre passablement importante. Il faut arrêter de se faire des idées sur l'inexistence de surplus pour cette année. Ce ne sont que des histoires à dormir debout auxquelles le ministre des Finances nous a habitués et qu'il nous transmet à tous les ans un peu avant son exercice budgétaire pour nous effrayer, un peu au même titre qu'un épouvantail dans un champ de maïs. M. Cullen trouve l'histoire de l'épouvantail drôle.

J'aimerais poser une question aux pilotes de l'air. Comme députés, nous vivons une situation assez dramatique dans les régions, et c'est probablement la même chose dans... J'ai l'occasion de le voir presque hebdomadairement parce que je fais le tour des régions du Québec, y inclus les plus éloignées d'entre elles. En Ontario, c'est probablement la même chose aussi. Je me rappelle un temps où les vols était beaucoup plus fréquents qu'ils ne le sont à l'heure actuelle pour aller, par exemple, à North Bay, à Sudbury ou ailleurs.

Mais je vais vous parler de ce que je connais mieux. Dans les régions du Québec, c'est devenu dramatique, tant et si bien que lorsqu'on rencontre des gens d'affaires de ces régions dites éloignées, comme l'Abitibi ou la haute Côte-Nord, ils nous disent que le développement économique et l'avenir économique de ces communautés vont dépendre de la fréquence des services aériens. Or, cette fréquence a été coupée de façon incroyable, en particulier depuis la fusion entre Canadien et Air Canada.

J'ai en quelque sorte l'impression que les régions sont prises en otages. Vous semblez dire que ce n'est pas une question de fonds, que ce n'est pas une question de moyens dont ne disposerait plus Air Canada, que ce n'est pas une question de coûts de restructuration, mais que c'est parce qu'on vous coupe les services les plus efficaces et les parties d'Air Canada qui, justement, pourraient s'avérer les plus rentables.

• 1055

Pouvez-vous m'expliquer comment une compagnie de l'ampleur d'Air Canada peut sacrifier délibérément des services qui sont optimaux, comme vous l'avez mentionné, qui sont efficaces, et qui pourraient être rentables comme, par exemple, Air Canada Régional? Ça ne m'entre pas dans la tête. Comment une entreprise peut-elle se tirer dans le pied de cette façon?

Capitaine Vincent Charron (Association des pilotes de l'air): C'est un commentaire intéressant. Je vous remercie de votre question, monsieur Loubier.

Effectivement, c'est la raison pour laquelle nous avons pris position à l'égard de la demande d'Air Canada pour une assistance financière draconienne en vous demandant tout simplement d'examiner la façon de faire chez Air Canada, de voir si elle utilise toutes les ressources déjà en place, y compris la filiale régionale, et de questionner la société afin de savoir si cette utilisation est faite de façon saine et s'il n'y a pas des économies d'échelle à explorer à ce niveau.

De toute évidence, les régions, le service aux communautés, c'est nous. C'est par l'intermédiaire des filiales régionales qu'on peut offrir les services. Nous avons des personnes en place, des employés d'un bout à l'autre du Canada. Nous avons des types d'appareils qui sont adaptés. Nous avons besoin d'autres types d'appareils pour nous adapter un peu mieux, mais ça, c'est un autre problème. Ça fait partie des restrictions, au niveau d'Air Canada, qui nous empêchent d'avoir les outils nécessaires pour offrir un service adéquat aux régions.

Nous pouvons effectivement constater, en tant qu'employés, en tant que pilotes, la diminution des services. Malheureusement, les décisions qui sont prises dans ce sens viennent de la maison-mère, d'Air Canada. Donc, d'une certaine façon, nous sommes autant des victimes que les passagers, que les hommes d'affaires en région qui tentent d'avoir un service aérien adéquat. Je ne peux que faire l'analyse d'une situation très déplorable.

M. Yvan Loubier: Quelle serait la solution? Qu'Air Canada considère Air Canada Régional comme une entité de gestion vraiment distincte? Qu'on mette peut-être en commun certains services qui peuvent passer de l'un à l'autre sans contrainte? Quelle serait la solution?

Capt Vincent Charron: Il y a probablement plusieurs solutions possibles, mais je crois qu'on doit principalement donner à la filiale régionale la liberté de mettre de l'avant un plan d'affaires. On se fait dire par la haute direction d'Air Canada Régional, qui est à toutes fins pratiques nommée par Air Canada, qu'il y a tout le temps un délai ou une difficulté pour mettre de l'avant un plan d'affaires.

On entend parler d'un nouveau plan d'affaires. On entend parler de l'acquisition de nouveaux appareils depuis plusieurs années. Tout ce qu'on constate, en fait, c'est l'inverse; c'est l'incapacité de mettre de l'avant un plan d'affaires qui, selon nos dirigeants, serait une façon d'offrir un meilleur service. Tant et aussi longtemps qu'on ne pourra pas enlever les menottes qui sont rattachées au plan d'affaires régional, on ne pourra pas, entre autres, avoir au Canada les services aux communautés qu'on mérite.

D'ailleurs, on avait fait plusieurs suggestions. L'une d'elles consistait tout simplement à faire tomber ces barrières fictives, comparatives entre Air Canada et la filiale et à exploiter le tout comme une grande entreprise ayant la flexibilité nécessaire pour offrir la fréquence de vols et le type d'appareils là où le besoin se ferait sentir.

M. Yvan Loubier: Est-ce que vous pouvez nous assurer, surtout pour les régions dites éloignées, périphériques, partout au Canada, que vos représentations et vos suggestions se solderaient par une fréquence suffisante et des services de qualité offerts aux gens des régions, qui sont des citoyens au même titre que ceux vivant n'importe où au Canada? Est-ce que vous êtes certains que les services pourraient être rehaussés sans qu'Air Canada sombre dans des problèmes de déficits croissants, comme on a pu le voir par le passé avec Canadien, par exemple?

Capt Vincent Charron: Il va sans dire que l'importance a été déterminée par les régions. On a même utilisé une firme de sondage, il y a quelques années, afin de savoir ce qui était le plus important pour les passagers qui voyagent à partir des régions. Il va sans dire que la fréquence était une des priorités les plus importantes.

Comme je vous l'ai dit tout à l'heure, on a les outils à notre disposition. Malheureusement, on est menottés. On a de la difficulté à implanter un plan d'affaires qui fasse en sorte que la fréquence des voyages dans les régions éloignées... Si vous regardez notre carte de réseau, vous verrez qu'on fait presque toutes les régions éloignées qui offrent un aéroport ayant de l'allure.

• 1100

Par contre, si notre direction locale n'a pas les moyens nécessaires à sa disposition, on va sombrer avec ces coupures, qui sont toujours des décisions unilatérales venant de la maison-mère.

M. Yvan Loubier: Merci.

[Traduction]

Le président: Merci beaucoup, monsieur Loubier.

Ce sera maintenant au tour de M. Cullen, suivi de M. Guarnieri.

M. Roy Cullen: Merci, monsieur le président, et merci à tous les témoins.

J'ai une courte question pour M. Warden. Dans votre mémoire, je n'ai vu aucune mention du taux d'accumulation des prestations de retraite. Certains d'entre nous ont reçu des demandes à ce sujet de la part de l'Association internationale des pompiers. Ce n'est pas une question budgétaire comme tel, mais êtes-vous au courant du dossier et appuyez-vous les efforts des pompiers en vue d'obtenir un changement au taux d'accumulation des prestations de retraite?

Chef Donald Warden: Oui. Nous sommes au courant de cette demande et je crois que nous avons envoyé une lettre à votre comité pour vous faire part de notre appui total.

M. Roy Cullen: Merci.

J'ai maintenant une question qui s'adresse aux représentants des pilotes. Quel que soit le genre restructuration qu'on effectue à Air Canada, j'ai l'impression que tous devront mettre un peu d'eau dans leur vin. Il y a de nombreux exemples de lignes aériennes dont les employés avaient des parts de l'entreprise: US Air, Delta et Canadien, bien que dans ce dernier cas, on pourrait faire valoir que ça n'a pas beaucoup aidé même si, à mon avis, cette société avait d'autres problèmes plus fondamentaux.

Je serai honnête avec vous: comme bien des Canadiens, j'estime qu'Air Canada n'a pas su axer ses services sur les besoins de ses clients. Je sais que nous avons tous des hauts et des bas, mais si les employés étaient actionnaires de l'entreprise, cela les inciterait à offrir un bon service, à donner un bon rendement, etc. Croyez-vous que ce serait une bonne idée d'envisager cela dans le cadre d'une restructuration d'Air Canada, permettre aux employés d'acheter des parts de leur entreprise?

Capt Steve Linthwaite: C'est une idée intéressante. D'ailleurs, il existe déjà un programme d'actionnariat pour les employés. Il était offert seulement aux employés de la ligne principale d'Air Canada jusqu'à il y a quelques mois, jusqu'en juin dernier, je crois, lorsqu'on a décidé de l'offrir aussi aux employés régionaux. Pour nous, c'est donc assez nouveau.

Je crois que vous pensez à permettre aux employés de posséder une plus grande part de l'entreprise, n'est-ce pas?

M. Roy Cullen: Oui. Delta et US Air sont détenus par les employés à 19 et 20 p. 100. Ce n'est pas non plus un programme facultatif, comme un régime d'achat d'actions, 20 p. 100 des actions doivent être détenues par les employés qui détiennent aussi un ou deux sièges au sein du conseil d'administration. Bien sûr, comme vous le savez, ce n'est pas gratuit.

Capt Steve Linthwaite: Oui, c'est une question intéressante. Nous ne sommes pas des économistes, nous sommes des pilotes de formation. Nous sommes disposés à examiner toutes les options qui sont dans l'intérêt de la société et des employés. Ce pourrait être une solution, mais je dois vous avouer que nous n'avions pas envisagé un achat si important.

M. Roy Cullen: Je vois. Si, après y avoir réfléchi, vous voulez envoyer vos observations au président ou au greffier du comité, j'aimerais bien en prendre connaissance.

Madame McKinnon, madame Reynolds, en ce qui a trait à l'exemption annuelle de base, si le gouvernement adoptait cette mesure, ne croyez-vous pas que cela encouragerait les employeurs à limiter les revenus de leurs employés à un niveau inférieur à 3 000 $ et à remplacer ainsi leurs employés pour éviter de payer les charges sociales? Cela ne pourrait-il pas se produire?

Mme Becky McKinnon: Je peux vous faire part du point de vue de l'employeur; Joyce pourra ensuite vous donner des statistiques.

À titre d'employeur, nous ne pourrions même pas envisager cela. Notre secteur est axé sur le service. Je dépends de mes employés pour offrir un service et ainsi garder mes clients. Ce genre de chose ne peut tout simplement pas être envisagé. Nous tentons d'engager de bons employés et de les garder lorsque nous les trouvons. Nous ne nous préoccupons pas de savoir à quel moment ils atteignent un revenu qui nous oblige à verser des cotisations.

Je crois que Joyce peut vous donner des chiffres à ce sujet.

Mme Joyce Reynolds: L'exemption annuelle de base s'échelonnerait sur toute l'année. Elle s'appliquerait également, que votre revenu soit de 3 000 $, 3 005 $, 4 000 $, 11 000 $ ou 39 000 $. De toute façon, vous auriez droit à l'exemption annuelle de base. Absolument rien n'inciterait l'employeur à licencier l'employé dès que celui-ci a gagné 3 000 $. Je suis heureuse que vous ayez posé la question, parce que l'exemption ne s'applique pas à la première tranche de 3 000 $, mais bien à 3 000 $ des revenus de toute une année.

M. Roy Cullen: Merci.

Vous en estimez les coûts à 2,3 milliards de dollars. Le gouvernement a régulièrement réduit les cotisations à l'assurance-emploi depuis notre arrivée au pouvoir, en 1993, à tel point qu'il y a une épargne de plus de six milliards de dollars par an, je crois. Si on adopte l'exemption annuelle de base, je ne vois pas comment le gouvernement pourrait encore réduire les cotisations générales, au rythme actuel, sans causer de réactions dans le milieu des affaires.

• 1105

Voici où je veux en venir: pensez-vous que dans le milieu des affaires, on appuierait l'adoption d'une exemption annuelle de base, si c'est au détriment des réductions du taux général?

Mme Becky McKinnon: Voulez-vous que je réponde?

Mme Joyce Reynolds: Oui, bien sûr.

Mme Becky McKinnon: Bien, je vais donner une réponse, et si ce n'est pas complet, Joyce terminera.

Nous avons l'appui du Conseil canadien du commerce de détail et du secteur du tourisme qui tous nous appuient. Il y a des associations qui représentent 26 p. 100 de la main-d'oeuvre canadienne qui sont aussi en faveur de cette démarche. S'il y a des réductions, elles sont ainsi destinées aux entreprises à plus forte intensité de main-d'oeuvre et aux employés qui ont le plus besoin des réductions.

Le président: Madame Reynolds.

Mme Joyce Reynolds: Et pour ajouter à ce qu'a dit Becky, outre les associations d'employeurs et les entreprises à forte intensité de main-d'oeuvre, l'Organisation nationale anti-pauvreté appuie cette proposition. Le Syndicat des employés d'hôtellerie et de restauration aussi. En fait, si vous lisez le numéro d'aujourd'hui du Hill times, vous y verrez une publicité portant le logo de toutes ces organisations: le Conseil canadien du commerce de détail, l'Association de l'industrie touristique du Canada, l'Association des hôtels du Canada et l'Association canadienne des restaurateurs et des services alimentaires.

M. Roy Cullen: Merci.

Clarifions une chose: l'exemption de 3 000 $ s'appliquerait aux employeurs et aux employés. Pour les employés, la première tranche de 2 000 $ est déjà remboursable et par conséquent, la partie de l'employé sera portée de 2 000 $ à 3 000 $, et celle de l'employeur, à 3 000 $, n'est-ce pas?

Mme Joyce Reynolds: C'est exact. Mais ce ne sont pas tous les employés qui y ont droit qui l'obtiennent. En outre, actuellement, si vous gagnez 2 001 $, vous n'avez pas droit au remboursement. Si vous gagnez 3 000 $, vous n'avez aucun remboursement. Avec cette proposition, les employés à faible revenu, qui ne gagnent que 3 000 $, 4 000 $ ou 10 000 $, profiteront tous de cette exemption de base annuelle.

M. Roy Cullen: Je n'ai qu'un petit commentaire à formuler, monsieur le président, au sujet de ce qu'a dit M. Loubier sur tous ces gros surplus.

C'est parce que le ministre des Finances a été prudent que nous avions des réserves pour faire face à ce genre d'événements, soit le 11 septembre et ce qui a suivi. En fait, même le gouvernement du Québec s'est trompé dans ses chiffres, puisque personne ne pouvait prédire où iraient les économies réalisées. Je pense donc que vous devriez revoir vos théories, monsieur Loubier, sur ce que le ministre des Finances fait...

M. Yvan Loubier: Trois cents personnes par an. C'est un prétexte. Vous voulez rire?

M. Roy Cullen: Oui, eh bien, vérifiez avec la province de Québec, ce qui est arrivé lorsqu'elle a essayé de prédire les revenus.

Le président: Silence, s'il vous plaît.

M. Yvan Loubier: Voyons!

Le président: Ottawa et le Parlement leur manquent. Ils ont besoin d'un débat.

Madame Guarnieri.

Mme Albina Guarnieri (Mississauga-Est, Lib.): Nous souffrons tous d'être sevrés de la période de questions.

Monsieur Warden, à la lumière des événements du 11 septembre, comme vous le disiez, nous sommes certainement plus sensibilisés aux risques pris par les pompiers et à l'importance de leur formation, de l'équipement de protection, de même que des prestations de retraite et des prestations au survivant.

Depuis des années, on nous a certainement exprimé des préoccupations relativement au moment où sont versées les prestations au survivant, mais pas au sujet de leur taux. Pouvez-vous nous donner une idée des prestations versées habituellement, par exemple aux familles des pompiers qui meurent en service? Avez-vous ces chiffres sous la main?

Chef Donald Warden: Je ne peux vous parler que de l'Ontario, la province d'où je viens. En Ontario, c'est en fonction du régime de retraite. Si je me blesse au travail, ma femme, je crois, reçoit les deux tiers, depuis les changements à notre régime de retraite. Elle a droit à ces prestations jusqu'à l'âge de 65 ans, je crois. Mes enfants auront aussi droit à quelque chose tant qu'ils sont aux études.

Je crois fermement qu'il faut penser à une pension de 100 p. 100 pour les veuves de pompiers ou de n'importe quel membre d'une équipe d'intervention d'urgence, et jusqu'à leur décès.

Mme Albina Guarnieri: Évidemment, il faut s'attendre à ce que tous les efforts soient déployés pour qu'il ne soit pas nécessaire de verser des prestations au survivant.

Malheureusement, le quotidien du pompier fait en sorte, comme vous nous l'avez dit, qu'il est exposé à des substances toxiques qui sans lui nuire immédiatement, peuvent avoir un effet plus tard. C'est une chose que les pompiers nous rappellent depuis des années, pas seulement depuis le 11 septembre.

• 1110

À votre avis, au niveau national, fait-on suffisamment d'efforts, des efforts coordonnés, pour évaluer les risques auxquels est exposé le personnel de lutte contre les incendies? Fait-on une évaluation nationale des risques à long terme pour la santé des pompiers? Croyez-vous qu'il faut faire davantage d'efforts au niveau national pour connaître et faire connaître les risques et les traitements, par exemple, pour les nombreux produits chimiques auxquels sont exposés vos membres?

Chef Donald Warden: Oui, je crois qu'il est impérieux qu'une base de données nationale soit créée pour le constater. Vous avez raison, il n'y en a pas actuellement. L'Ontario a fait beaucoup dans ce domaine, avec la CSPAAT, en mettant sur pied un nouveau programme. Tous les services d'incendie conserveront maintenant en dossiers toutes les substances auxquelles sont exposés les pompiers, et les pompiers eux-mêmes garderont une copie de ces dossiers.

Je crois que c'est nécessaire. On a prouvé en Ontario et ailleurs au Canada que les pompiers sont plus exposés à des produits chimiques cancérigènes, et plus tôt que les membres de toute autre profession. Je suis en faveur de cette proposition et je sais que notre association l'est aussi, et qu'elle sera présente.

Mme Albina Guarnieri: Merci. Il est certainement grand temps qu'on agisse.

J'ai quelques courtes questions pour les représentants de l'Association des pilotes de ligne. Si j'ai bien compris votre mémoire, vous dites qu'au niveau régional, la structure des coûts est inférieure à celle du niveau principal. De quelle différence parle-t-on?

J'ai une autre question: M. Collenette a annoncé récemment un programme d'aide de 160 millions de dollars. Quelle proportion a été attribuée à Air Canada Régional, par exemple?

Capitaine Brian Chury (Association des pilotes de ligne): Merci, monsieur le président.

Pour ce qui est de la structure des coûts, les nombres qu'on présente habituellement sont différents pour chaque groupe d'employés d'Air Canada Régional, mais la moyenne tourne autour de 30 p. 100. Nous ne parlons évidemment que des coûts de main-d'oeuvre.

Si l'on prend un tout petit exemple, en comparant la ligne principale à la ligne régionale, le meilleur serait celui de l'utilisation des jets régionaux de Canadair, dans le réseau principal d'Air Canada, par rapport à son emploi dans notre réseau. En employant cet avion à réaction, dans le système régional, on épargne plus de 30 p. 100. On le voit partout dans le monde, quand c'est cet avion qui est utilisé. Air Canada est la seule ligne aérienne de la planète qui s'en sert dans son réseau principal.

Cet avion à réaction s'appelle un avion à réaction régional parce que c'est là qu'on l'emploie. C'est ce que nous faisons—des vols régionaux—et c'est là que nous excellons. Nous avons créé et mis sur pied un réseau régional durable pour le pays. Actuellement, tous nos avions à réaction régionaux sont retirés de notre réseau. Au début de la fusion, nous en avions 39, nous n'aurons plus aucun dans l'année qui vient.

Il est important de signaler que ces avions à réaction représentent un pourcentage considérable de notre capacité totale. Comme beaucoup des membres du comité le savent, la capacité est mesurée en sièges-miles offerts, soit le nombre de sièges et la vitesse de l'aéronef.

Nous avons commencé avec un parc d'environ 128. Nous avons maintenant 39 avions à réaction, et on nous les retire. Mais ce qui est le plus difficile à accepter dans tout cela, et que nous voulons que vous compreniez bien, c'est que c'est nous qu'on retire du réseau. Comme Steve l'a dit plus tôt, aucun avion de remplacement n'est prévu. Qui remplacera ces vols? C'est le réseau principal d'Air Canada. Bien entendu, sa structure de coûts est beaucoup plus élevé.

Nous voulons qu'il soit clair qu'il ne s'agit pas d'une course vers le pire, pour voir qui fera le travail au moindre prix. C'est simplement notre travail, c'est ce que nous faisons, et nous y excellons.

Pourriez-vous répéter la deuxième partie de votre question?

Mme Albina Guarnieri: M. Collenette a annoncé 160 millions de dollars. Quelle proportion ira à Canadien Régional?

Capt Brian Chury: Ce n'est pas encore décidé. Pour l'instant, on nous a dit que la gestion d'Air Canada Régional faisait une demande au ministre des Transports pour des fonds proportionnels à la taille de la ligne aérienne. On ne sait vraiment pas combien d'argent sera accordé à Air Canada Régional.

• 1115

En toute honnêteté, je crois que 100 millions de dollars ont été accordés à Air Canada, sur les 160 millions de dollars. Mais nous ne savons pas si nous faisons partie de ces 100 millions de dollars. On nous intègre parfois aux chiffres consolidés, parfois, non. Dans ce cas-ci, Air Canada Régional semble se comporter comme si nous n'étions pas inclus. Nous présumons pour l'instant que nous aurons une certaine portion de ces 160 millions de dollars, selon notre capacité dans le marché.

Mme Albina Guarnieri: Monsieur le président, on pourrait peut-être se renseigner, à savoir s'ils sont inclus ou pas.

Le président: Volontiers.

Mme Albina Guarnieri: Merci.

Le président: Monsieur Murphy.

M. Shawn Murphy: Merci, monsieur le président.

Je veux revenir à Becky McKinnon et Joyce Reynolds, sur une question dont a traité M. Cullen. Je veux que les choses soient très claires, parce que c'est à mon avis très important.

Le ministre Martin réduit les cotisations à l'assurance-emploi depuis six ou sept ans—de l'ordre de 20 ou 30 cents par an, je crois—et il est irréaliste de s'attendre à ce que cette réduction soit maintenue, en plus de l'exemption annuelle de base.

Je crois comprendre que votre organisation, de même que le conseil du commerce de détail et l'Association hôtelière préféreraient l'exemption annuelle de base à la réduction de 20 cents.

Mme Becky McKinnon: Oui, c'est exact. On voudrait avoir les deux, mais pour être réaliste, s'il faut choisir, nous préférons certainement l'exemption annuelle de base.

M. Shawn Murphy: Exactement. Ce n'est pas comme si, advenant l'exemption annuelle de base, vous vous plaigniez de ne pas avoir...

Mme Joyce Reynolds: Non, absolument pas.

M. Shawn Murphy: Ma deuxième question s'adresse à vous, Joyce Reynolds. En passant, j'appuie cette proposition. Voyez-vous des problèmes logistiques dans l'administration de cette exemption annuelle de base? Pensons aux exemples d'étudiants qui ont deux ou trois emplois, en même temps, sans gagner plus de 3 000 $ par an, ou celui de personnes qui changent d'emploi deux ou trois fois par an. Y a-t-il des problèmes logistiques dans l'administration du programme?

M. Joyce Reynolds: Non, puisque le précédent existe déjà. Il existe dans le cas du Régime de pensions du Canada. Il y a une exemption annuelle de base de 3 500 $ qui semble extrêmement simple à administrer.

La période paie retenue par l'employeur serait divisée en tranches de 3 000 $. Les cotisations faites par l'employeur au nom de l'employé, chaque mois, seraient retenues sur le salaire de l'employé pour le mois, s'il s'agit d'une période de paie mensuelle, multipliées par le taux de cotisation.

Ce serait très simple. S'il y a un trop-payé, il sera remboursé l'année suivante, dans le cadre de la déclaration de revenus. C'est ainsi qu'on fait pour le RPC. C'est très simple.

M. Shawn Murphy: Merci.

La question suivante est pour le commandant Linthwaite. Dans les discussions portant sur la réorganisation ou la restructuration d'Air Canada et de tout le réseau aérien canadien, certains ont recommandé un concept, qui devrait assurer la réussite à long terme. N'oublions pas que nous avons déjà fait cet exercice il y a 20 mois et que nous ne voulons pas le refaire dans 20 moins. On propose d'ordonner à Air Canada de se défaire de ses transporteurs régionaux, de développer la concurrence sur le réseau principal, dont vous avez parlé, qui serait desservi par des entreprises indépendantes, ayant leurs propres conseils d'administration, leurs propres actionnaires et leurs propres collectivités à desservir—leurs parties intéressées, et non pas d'autres quelconque.

Êtes-vous d'accord avec une telle idée? Avez-vous une opinion sur la question?

Capt Steve Linthwaite: Nous ne sommes pas contre, en principe. En fait, c'est l'une des solutions à envisager; toutefois, il faut rester prudent. Bien sûr, nous souhaitons une solution durable. Je travaille chez Air Canada Régional Inc. depuis 16 ans, et j'espère pouvoir y travailler jusqu'à ma retraite, malgré toute l'agitation qui règne dans cette industrie. Outre le plan d'affaires solide, c'est une des solutions à envisager.

L'un des aspects importants d'une telle solution—et c'est là l'un des éléments complexes de l'industrie du transport dont je vous ferai grâce—est le partage des codes. On ne peut tout simplement se départir d'une compagnie aérienne et lui dire: «d'accord, vous êtes indépendants, allez générer des profits». L'industrie du transport aérien s'est internationalisée et les codes des transporteurs sont désormais de la plus haute importance. Dans toute solution de ce genre, donc, il faut maintenir le partage des codes, condition essentielle au succès dans l'industrie du transport aérien au Canada.

• 1120

M. Shawn Murphy: Voilà qui m'amène à ma question suivante. D'aucuns soutiennent que le gouvernement devrait légiférer de façon à rendre obligatoire le partage des codes, pour garantir la concurrence dans les régions. Ainsi, le transporteur national, qu'il s'agisse de WesJet ou d'Air Canada, serait tenu de partager ses codes avec les transporteurs régionaux. Qu'en pensez-vous?

Capt Steve Linthwaite: Franchement, c'est une arme à double tranchant. Si le transporteur national se départit du transporteur régional, je crois qu'il devait être obligé de permettre au transporteur régional de figurer sous son code.

Toutefois, notre raison d'être, c'est le partage des codes d'Air Canada avec les collectivités que nous desservons. Si un transporteur indépendant pouvait désormais fonctionner avec les codes d'Air Canada, cela ne ferait que diluer le marché. Bien honnêtement, nous commettrions ainsi une erreur de jugement en tant que transporteur régional.

La question est très complexe, c'est pourquoi je ne veux pas aborder ici les problèmes structurels. Mais je crois que ça mérite d'être examiné. La cession est une option qui devrait être étudiée par des experts en économie et en affaires. Je crois que ça pourrait fonctionner.

Quant à la restructuration d'Air Canada... comme je l'ai dit, le système actuel est tout à fait dysfonctionnel. La restructuration demeure une solution de rechange qui pourrait être envisagée et qui pourrait fonctionner.

Tout comme vous, je souhaite trouver une solution à long terme, vu l'importance capitale du transport au Canada, et en particulier de l'industrie du transport aérien, en raison de sa taille. La solution doit être durable.

M. Shawn Murphy: Merci.

Le président: Vous avez parlé, notamment, des perspectives à long terme. Lorsqu'on regarde en avant, on voit une intégration progressive de l'économie nord-américaine. Croyez-vous que l'industrie du transport devrait faire partie de cette stratégie? En d'autres mots, avez-vous des objections à ce qu'un transporteur étranger détienne plus de 25 p. 100 d'Air Canada? Si, à terme, nous nous retrouvons en effet avec un espace économique nord-américain—et cette zone est déjà plus intégrée que ne le croient la plupart des gens, soit dit en passant—devrions-nous amorcer un dialogue en ce sens dans l'industrie du transport aérien?

Capt Steve Linthwaite: C'est pratiquement une question à deux volets. D'une part, il est question de participation étrangère, et de l'autre, de l'intégration des économies internationales. Nous avons déjà un système de transport aérien international. Dans notre cas, il s'agit de la Star Alliance. Il y a d'autres alliances du genre, dont Oneworld, notamment. Il s'agit essentiellement de compagnies aériennes fusionnées qui réussissent à contourner les lois nationales en matière de travail et de commerce partout dans le monde. Voilà ce que sont ces alliances.

United Airlines accepte de se placer sous les codes d'Air Canada. Lufthansa et ses transporteurs régionaux aussi. Nous acceptons de nous placer sous les couleurs de Lufthansa, de United, ainsi de suite, c'est un système déjà en place. Le partage de codes représente un avantage précieux pour les compagnies aériennes, puisqu'il permet aux voyageurs de profiter d'un trajet intégré d'un endroit isolé d'Asie à un endroit isolé au Canada, par exemple.

Le président: Je parlais de l'Amérique du Nord.

Capt Steve Linthwaite: En Amérique du Nord, le libre-échange est en vigueur...

Le président: La politique ciels ouverts.

Capt Steve Linthwaite: Oui, la politique ciels ouverts est déjà en vigueur. Je vous remercie.

Le président: Cependant, la compagnie American Airlines n'est pas autorisée à prendre des passagers ou des marchandises à Ottawa et à les transporter jusqu'à Toronto.

Capt Steve Linthwaite: Non, car il s'agit de cabotage, et je puis vous assurer que les Américains n'autoriseraient jamais ce genre de chose dans leur propre pays. Ils sont très protectionnistes à cet égard, et je tiens à vous mettre en garde. Ne permettez pas ce genre de pratique au Canada à moins de réciprocité, dans l'autre pays, autrement, l'industrie canadienne du transport aérien serait décimée.

Le président: Bien entendu, on aurait la réciprocité. On ne signerait pas une entente de ce genre sans qu'elle soit équitable pour les deux parties.

Capt Steve Linthwaite: Ce serait ma seule inquiétude.

Le président: La question fondamentale que je me pose est à savoir combien de temps les Canadiens pourront payer les tarifs exigés par Air Canada. Combien de temps encore est-ce que les Canadiens pourront consacrer une part aussi importante de leur revenu au transport aérien? C'est ici que la concurrence et des mesures novatrices de toutes sortes prennent énormément d'importance car franchement, on ne peut soutenir de tels tarifs.

Capt Steve Linthwaite: Il n'y a pas de solution simple à ce problème. Dans un microcosme, lorsqu'on a déréglementé aux États- Unis, c'était censé réduire les tarifs. En fin de compte, on a assisté à une hausse du prix des billets dans bien des endroits, en raison de la rationalisation, qui intervient toujours dans ce genre de situation. Les entreprises rationalisent toujours, elles diminuent la concurrence pour augmenter leurs bénéfices. Cela crée donc une conjoncture très difficile. Toutefois, je suis loin d'être un spécialiste des questions économiques de ce genre. Cela dit, je me rends bien compte que les tarifs sont une question épineuse pour tous les Canadiens.

Le président: Extrêmement épineuse. Merci.

Monsieur Nystrom.

• 1125

M. Lorne Nystrom: Merci. Je tiens à souhaiter la bienvenue à nos témoins de ce matin. J'aimerais poser ma première question aux représentants de l'association des restaurateurs et leur dire d'emblée que je vois un conflit ici.

Lorsqu'on tient compte des facteurs qui stimuleraient l'industrie de la restauration et encourageraient les restaurateurs à embaucher davantage d'employés, quels seraient les coûts nets de votre proposition? D'après vous, combien cela coûterait-il, au gouvernement fédéral s'entend, car cela serait manifestement avantageux pour l'industrie de la restauration.

Mme Joyce Reynolds: Nous avons dû revoir nos prévisions à la baisse. D'ailleurs, un communiqué sera émis sur le sujet cet après-midi. Nous avions projeté une croissance de 3,8 p. 100 mais avons dû la réduire au rythme plus modeste de 0,3 p. 100. Nous prévoyons les pires résultats depuis 1991, lorsque la TPS est entrée en vigueur et que nous avons vécu une autre récession. Nous sommes justement très préoccupés par ce qui nous attend l'année prochaine.

Si toutefois on met en oeuvre l'exemption annuelle de base, j'ignore combien d'emplois on pourrait sauver, mais je suis sûre qu'il y en aura, cela ne fait aucun doute.

Le président: Madame McKinnon.

Mme Becky McKinnon: Ce que nous pouvons fournir de plus exact... nous avons demandé au Conference Board de concevoir certains scénarios de ce genre. À la page 15 du mémoire, on dit que les premières répercussions de cela s'établiraient à 2,3 milliards de dollars, et ce, strictement pour ce qui est des cotisations, mais vous remarquerez que cette hypothèse est fondée sur une exemption annuelle de base de 2 000 $. C'est bien cela?

Mme Joyce Reynolds: Non, ça c'était...

Mme Becky McKinnon: Oh, pardon. Il s'agit là d'une baisse de 10 p. 100. Cependant, vous pouvez observer qu'il y a un retour du balancier après quelque temps et qu'on prévoit une reprise de l'emploi. N'oublions pas cependant que si les gens perdent leur emploi, cela crée des pressions sur le système d'assurance-emploi. Si nous pouvons maintenir les emplois, cela entraîne deux répercussions favorables.

M. Lorne Nystrom: Ma prochaine question s'adresse à l'Association des pilotes de ligne.

Je suis de Regina. Air Canada a desservi cette ville pendant nombre d'années, mais depuis la fusion, c'est un transporteur régional. Or un bulletin de nouvelles diffusé à la CBC a suscité beaucoup de colère en Saskatchewan. Regina compte 200 000 habitants, le sud de la Saskatchewan en dénombre quelque 500 000 et on trouve à peu près le même nombre à Saskatoon. Dans le bulletin de nouvelles de la CBC, une femme prenait la parole... Je vais me contenter de vous lire l'article:

    Selon la porte-parole d'Air Canada, Nicole Couture-Simard, la demande est insuffisante pour justifier un service aérien en Saskatchewan. Elle poursuit en affirmant que si les gens ne sont pas satisfaits de la situation actuelle, ils devraient se tourner vers d'autres transporteurs aériens.

    «Eh bien, et WestJet? Pourquoi est-ce que cette ligne aérienne n'offre pas de vols en Saskatchewan?» de dire Mme Couture-Simard, ne semblant pas se rendre compte que ce transporteur aérien, dont le siège se trouve à Calgary offre déjà des vols réguliers à destination et en provenance de la Saskatchewan et fait une concurrence directe à Air Canada [...]

Cela fait longtemps que cette compagnie est active dans la région, tout comme Canada 3000.

    «Pourquoi est-ce que quelqu'un d'autre ne lance pas de nouveaux services de transport aérien en Saskatchewan?» poursuit-elle. «S'il y a vraiment un marché dans cette région et un nombre suffisant de passagers pour justifier le service, alors un service sera fourni».

    Mme Couture-Simard dit aussi que si un habitant de la Saskatchewan souhaite prendre un vol Tango bon marché, il lui faudra se rendre dans une ville avoisinante qui offre ce service à tarif réduit.

    Cependant, selon les tarifs publiés, cela ne représenterait aucune économie. Un vol de Regina à Toronto coûte la même chose qu'un vol de Regina à Toronto avec escale à Winnipeg [...]

C'est ce genre de remarques qui dresse vraiment les gens contre Air Canada. Ils n'éprouvent aucune sympathie pour Robert Milton et trouvent les relations publiques du transporteur désastreuses.

Je me demande si vous pouvez répondre à cela. En passant, je sais fort bien que vous n'êtes pas Robert Milton.

Capt Steve Linthwaite: Je partage tout à fait le mécontentement du public. Je crois que cela décrit bien mes sentiments.

M. Lorne Nystrom: En passant, la personne qui m'a communiqué ces renseignements est un syndiqué des TCA, il s'agit d'un préposé à la vente des billets travaillant à Regina. Il était tout à fait furieux, et il m'a aussi montré une copie du discours prononcé par Robert Milton à Montréal. Beaucoup de gens sont furieux d'un tel manque de sensibilité.

Les vols d'Air Canada rayonnent depuis Regina. Cela fait quelque 30 ans que je prends ces vols entre 40 et 50 fois par semaine. Ça illustre à quel point la compagnie ignore ce qui se passe dans sa propre entreprise.

Capt Steve Linthwaite: Cela souligne les raisons pour lesquelles nous sommes venus ici pour faire valoir notre cause. Dans tous les bouleversements récents, on a tout simplement oublié nos services, y compris les services que nous offrons aux petites villes et aux petites agglomérations du Canada. Les gens oublient tout simplement.

Je reconnais que cette dame a fait des remarques très cavalières. Elle ne mentionne nullement le fait que les services régionaux d'Air Canada desservent la région très fréquemment. Je sais aussi que les lignes aériennes régionales de Canadien ont une base à Saskatoon et offrent des services aériens là-bas depuis quelque temps déjà. Il y a donc un grand manque de sensibilité dans de tels propos.

M. Lorne Nystrom: Le fait qu'il y a trois vols quotidiens directs Regina—Toronto et qu'ils soient presque toujours complets ne semblent compter pour rien. Il ne s'agit pas d'un petit marché.

• 1130

Capt Steve Linthwaite: Si vous me permettez de poursuivre, je crois qu'il y a eu beaucoup d'alarmisme. Au moment même où nous nous parlons, on procède à des compressions de façon quasi- automatique. Or, bien que nous soyons en négociation et que nos propos paraîtront quelque peu intéressés, nos volumes ont remonté, et les compressions générales de 20 p. 100 se font à l'aveuglette. Vos propos rejoignent tout à fait notre argument, à savoir que les services offerts à Saskatoon, à Regina et dans d'autres villes de cette taille font l'objet de réductions aveugles, ce en dépit d'une demande réelle. Il s'agit simplement d'une réaction automatique de rigueur financière.

Le président: Merci beaucoup. Merci beaucoup, monsieur Nystrom.

Je tiens à préciser que M. Nystrom voulait sans doute parler de 40 à 50 vols par année et non par semaine—c'est bien cela?

M. Lorne Nystrom: Oui, naturellement. Ai-je dit par semaine?

Le président: Oui.

M. Lorne Nystrom: Cela nous semble être le cas ces jours-ci.

Le président: J'allais justement vous dire que votre prochain vol s'apprête à partir.

Monsieur Brison.

M. Scott Brison: Merci, monsieur le président et merci à tous pour vos interventions.

La première question s'adresse à l'Association des pilotes d'Air Canada ou l'Association des pilotes d'Air Canada Régional. On utilise deux séries de chiffres relativement au financement—certains utilisent le mot «sauvetage». La première est directement attribuable aux attentats du 11 septembre et à leurs répercussions, à leur impact sur l'industrie, et je ne crois pas que quiconque s'oppose à ce que l'industrie aérienne en général reçoive une aide en reconnaissance de cet impact. L'autre série de chiffres cependant s'appliquerait de façon plus générale à Air Canada et à son manque à gagner avant le 11 septembre, et je pense que c'est avec cela que la plupart des gens ont un problème. Si on regarde la compétitivité d'Air Canada par le passé... Vous ne serez peut-être pas d'accord avec moi là-dessus, mais, par exemple, étant donné que CanJet va à Halifax, je suis encore surpris que le Bureau de la concurrence n'ait pas été plus vigilant lors de son enquête, car à ce moment-là j'étais d'avis que CanJet devait faire face à une concurrence nettement injuste et abusive.

Je suis encore davantage préoccupé à l'heure actuelle par ces tarifs réduits, la stratégie d'Air Canada, et je suis certain que vous partagez certaines de ces préoccupations. Premièrement, il y a très peu d'exemples de succès de la part de lignes aériennes à service complet qui ont mis sur pied un service à tarifs réduits. Les tentatives en ce sens se sont toutes soldées par un échec. Deuxièmement, avec Canada 3000 et WestJet, je ne voudrais pas qu'on utilise l'argent des contribuables pour en fait permettre à Air Canada de faire une concurrence abusive à ces lignes aériennes qui offrent des services. Troisièmement, je serai honnête, je ne peux imaginer comment vous pouvez offrir un service qui soit davantage sans superflus que celui que vous offrez à l'heure actuelle, car il y a eu un changement marqué quant au niveau des services offerts. Lorsqu'on prend Canada 3000, comme je l'ai fait la semaine dernière, on nous sert un repas. Hier soir, j'ai pris Air Canada pour faire le même trajet et non seulement je n'ai pas eu de repas, mais on ne m'a même pas offert de noix d'acajou ni d'amandes. Donc, si je suis grognon aujourd'hui, c'est parce que j'ai très faim. Je ne voudrais pas qu'on utilise l'argent des contribuables pour permettre à Air Canada de faire concurrence à ces autres lignes aériennes indépendantes qui, à mon avis, font un assez bon travail à ce moment-ci.

Le président: Je pense que ce serait très sage de terminer et d'aller manger.

Capt Steve Linthwaite: Ou de manger des noix d'acajou.

Je ne voudrais pas vous donner la mauvaise impression. Nous ne sommes pas ici pour tenter d'obtenir le maximum d'argent pour la société Air Canada, c'est-à-dire pour nous. Ce que nous disons, c'est que l'idée se fonde sur d'excellents principes. Je suppose que ce sont les gens qui sont ici, ou d'autres personnes au gouvernement qui détermineront le montant. En fait, nous disons exactement ce que vous dites: si vous donnez de l'argent, ne le faites pas aveuglément. Il y a des problèmes structurels, comme vous l'avez souligné. Il y a des problèmes au niveau du service aux collectivités, et je pense que vous avez souligné qu'il y avait d'autres problèmes au niveau de la concurrence. Avant de prendre une décision à cet égard, je pense qu'il faudrait tenir compte de toutes ces questions, car vous soulevez un point excellent, et vous ne voulez pas subventionner l'effondrement d'une autre ligne aérienne à l'avenir prometteur. Je suis d'accord avec cela.

M. Scott Brison: Très bien. Merci.

Tout d'abord, j'aimerais faire une observation qui s'adresse à l'association des restaurateurs. Je pense que votre proposition est excellente et qu'elle pourrait avoir un impact. Je pense qu'elle pourrait avoir un avantage important, et elle est encore plus logique dans le contexte à la suite des attentats du 11 septembre.

• 1135

Vous pourriez aussi travailler avec d'autres organismes et d'autres groupes qui n'appuieraient peut-être pas dans la même mesure que vous les réductions des charges sociales, mais qui seraient d'accord pour réduire les impôts qui ne tiennent pas compte des profits, car cela inclurait également l'impôt sur le capital. Je vous encourage vivement à tenter d'élargir cette base également. On a mentionné le fait qu'il s'agissait d'un impôt qui ne tenait pas compte des profits. J'insisterais sur ce point davantage que vous le faites à l'heure actuelle, car je pense qu'il est très important d'établir un lien non seulement avec les charges sociales mais aussi avec les impôts sur le capital.

Pour les gens de l'OMERS, monsieur Richmond, j'ai une courte question. Devez-vous respecter les mêmes limites de contenu étranger que les particuliers canadiens, dans les investissements?

M. Dale E. Richmond: Oui.

M. Scott Brison: J'aimerais avoir votre point de vue là-dessus. Au sujet de l'augmentation des limites des REER, vous avez présenté un bon argument, mais je pense qu'on pourrait le renforcer en tenant compte de la bombe démographique de 20 ans, qui pourrait tout changer. Le relèvement du plafond des REER ne réduit pas les recettes fiscales, il ne fait que les reporter au moment où nous en avons vraiment besoin, plus tard. Je suis d'accord avec vous au sujet des limites sur votre excédent, mais un accroissement du contenu étranger serait utile.

M. Dale E. Richmond: Notre dernière comparution devant le comité remonte à 1999 et nous avions alors parlé de la règle sur les biens étrangers. Elle est passée de 20 à 30 p. 100 et nous en avons profité pour diversifier les portefeuilles du fonds. Cela a donc été avantageux. Nous continuons toutefois de prétendre qu'aucune limite n'est justifiée et que les investisseurs devraient trouver une proportion naturelle de diversification de leurs portefeuilles, pour leurs membres et pour leurs régimes de retraite.

Le président: Merci, monsieur Brison, et monsieur Richmond.

Au nom du comité, je remercie sincèrement nos témoins. Comme vous devez le savoir, il faut faire des compromis, en gardant toujours à l'esprit l'intérêt des Canadiens. Soyez assurés qu'en entamant notre réflexion sur les nombreuses recommandations que vous avez faites, nous analyserons ces propositions avec beaucoup de sérieux, comme je l'ai dit plus tôt, en tenant compte des intérêts des Canadiens.

Merci beaucoup.

La séance est suspendue de cinq à sept minutes, de manière à nous préparer pour le dernier groupe de témoins de la matinée.

• 1138




• 1148

Le président: Nous reprenons nos travaux et je souhaite la bienvenue à tous les membres de notre troisième groupe de témoins à Toronto.

Voici nos témoins: de la Coalition ontarienne pour l'amélioration des services de garde d'enfants, Mary-Anne Bedard et Susan Sperling; du Centre canadien de philanthropie, Patrick Johnson, président-directeur général; de Conservation de la nature Canada, John Lounds, le président, et Thea Silver, directrice des relations gouvernementales; de la Association for Healthcare Philanthropy, Michael Farrell et Diane Lester; de la Multi-Employer Benefit Plan Council of Canada, Bill Anderson, président, et Thomas Levy.

Nous ne suivrons pas l'ordre du jour et nous commencerons avec M. Bill Anderson, de la Multi-Employer Benefit Plan Council of Canada.

Vous savez sans doute comment nous fonctionnons. Vous avez le cinq à sept minutes pour vos observations liminaires puis nous passerons à une période de questions.

Monsieur Anderson, bienvenue.

M. William Anderson (président, Multi-Employer Benefit Plan Council of Canada): Merci, monsieur Bevilacqua. Merci, aussi, aux membres du comité.

Je n'aime pas lire un exposé, mais faute de temps, c'est ce que je ferai, du moins, en partie.

Le Mutli-Employer Benefit Plan Council of Canada représente les intérêts des régimes de prestations et de retraite interentreprises du Canada et représente toutes les personnes et disciplines de ce secteur, y compris les fiduciaires de syndicats et d'employeurs, les tiers administrateurs professionnels et les administrateurs de régimes internes à but non lucratif. Parmi nos nombreux membres se trouvent les régimes de retraite interentreprises qui offrent des pensions à leurs membres. Il y a environ 360 de ces régimes de retraite interentreprises au Canada, regroupant près de 700 000 Canadiens. En 1994, les contributions de l'employeur aux régimes de prestations et de retraite interentreprises dépassaient 1,1 milliard de dollars. Je les estimerais aujourd'hui plus probablement à 1,8 milliard de dollars. La majorité des Canadiens qui participent à ce genre de régime ont un revenu de faible à moyen.

• 1150

En outre, notre conseil représente les intérêts des régimes de prestations interentreprises.

Il est important que vous compreniez qu'un régime de retraite ou un régime de prestations interentreprises se compare à un régime de retraite d'un employeur unique. Le régime de retraite interentreprises existe dans les secteurs de la construction, du transport, de la confection, des arts graphiques, de la sécurité et de l'alimentation, où les travailleurs sont très mobiles tout en demeurant au sein d'un secteur. Un régime interentreprises leur permet de conserver leur régime de retraite et d'avantages sociaux, pour eux-mêmes et pour leur famille.

Nous estimons que les régimes au Canada constituent une approche patronale-syndicale unique en son genre qui répond bien aux besoins des travailleurs et de leurs personnes à charge. Non seulement le gouvernement devrait-il reconnaître ce rôle mais il devrait également le préserver et même l'encourager en prolongeant les incitatifs fiscaux pour à la fois offrir les prestations de soins de santé et de soins dentaires nécessaires qui ne sont pas disponibles par le biais du régime d'assurance-maladie public et faire la promotion des prestations de retraite.

Cette présomption voulant que le traitement des cotisations aux régimes d'assurance-maladie et aux pensions est inéquitable ou constitue une échappatoire fiscale est erronée. Le système fiscal procure une multitude d'incitatifs visant une multitude d'objectifs. Les objectifs sociaux, c'est-à-dire préserver le bien-être des Canadiens et l'indépendance financière de nos aînés—ont engendré certains incitatifs dans notre système fiscal. Ceux qui ont choisi de se prévaloir de ces incitatifs ne devraient pas maintenant en être pénalisés.

L'objectif de notre mémoire donc est d'aider le gouvernement à atteindre ses objectifs fiscaux et monétaires et de représenter les intérêts de nos membres pour ce qui est des questions touchant la retraite ou l'impôt. Permettez-moi de vous signaler certaines de nos recommandations.

Au chapitre des soins de santé, nous félicitons le gouvernement fédéral d'avoir établi une commission sur l'avenir des soins de santé au Canada, présidée par l'honorable Roy Romanow. Cette commission représente une reconnaissance des recommandations antérieures de MEBCO au gouvernement visant l'établissement d'une tierce partie pour évaluer et surveiller les besoins en soins de santé au Canada. Nous avons très hâte de travailler avec la commission à cet égard.

Le gouvernement fédéral doit jouer un rôle dans le domaine de l'assurance-maladie. Toutefois, ce jeu d'astuces politiques entre les deux paliers de gouvernement doit cesser. Le Canada a besoin d'un régime de soins de santé qui répond aux besoins de la société moderne et qui peut s'adapter aux technologies nouvelles et plus efficaces. On doit se pencher sur les pressions qui s'exercent sur notre système de santé dans ce contexte et non seulement du point de vue financier.

En outre, l'augmentation des coûts associés aux produits pharmaceutiques ne peut pas durer. La montée de ces coûts représente un fardeau pour tous les Canadiens, pour les gouvernements, et pour nos membres et leurs régimes d'avantages sociaux.

MEBCO loue la décision du gouvernement dans son budget de 1998 de permettre une déduction pour dépenses médicales et dentaires supplémentaires défrayées par les travailleurs autonomes, favorisant ainsi l'égalité entre les employés et les personnes travaillant à leur propre compte. MEBCO s'oppose toujours à l'imposition des régimes d'avantages sociaux collectifs, ce qui aurait pour effet de réduire la participation à ce genre de régime, augmentant ainsi le fardeau sur notre régime de soins de santé public. Donc, MEBCO appuie le statu quo, c'est-à-dire que l'on continue d'exonérer d'impôt l'assurance médicale et l'assurance dentaire complémentaires.

Pour ce qui est de l'harmonisation de la TPS et de la taxe de vente, au cas où la taxe de vente de l'Ontario serait harmonisée avec la TPS, les contributions reçues sous forme de cotisations payables par ces programmes devraient être exemptées de cette taxe harmonisée. Sinon, les régimes d'assurance subiront une augmentation immédiate de leurs coûts, à hauteur de 7 p. 100, ce qui entraînerait des réductions correspondantes des avantages sociaux des membres du régime. Ici aussi, ces coûts supplémentaires sont passés au gouvernement.

Nous demandons qu'un rabais soit offert aux régimes d'assurance collectifs multi-employeurs pour ce qui est de la TPS payée pour les services d'administration. Cela se fait déjà dans le cas des régimes de retraite multi-employeurs, grâce à l'aide de votre comité et du gouvernement libéral, et nous demandons donc le même rabais pour ce qui est des régimes d'assurance.

Comme solution de rechange à la proposition de l'épargne obligatoire, où la déductibilité, concernant les contributions aux régimes de retraite, un crédit d'impôt à la retraite devrait être instauré afin que pour chaque dollar additionnel cotisé à un régime enregistré de retraite, les personnes gagnant jusqu'à concurrence d'un revenu déterminé auraient droit à un crédit d'impôt, ce qui diminuerait l'impôt qu'ils doivent payer cette année-là.

• 1155

Puisque les données indiquent que les Canadiens à revenu faible et moyen sont les moins susceptibles d'épargner régulièrement pour leur retraite, ce crédit serait un nouvel incitatif à l'épargne pour ce groupe ciblé. Étant donné les tendances démographiques dans notre pays, c'est absolument nécessaire. Ces crédits d'impôt pourraient être remboursés en argent comptant.

J'ai deux autres observations à faire, si vous me le permettez.

Premièrement, afin de répondre aux besoins des travailleurs qui changent d'emploi ou de carrière souvent, il faut modifier les règles de l'impôt sur le revenu visant la retraite anticipée de façon à leur permettre de bénéficier d'une pension non réduite en tenant compte de l'âge et de toutes les années de service ouvrant droit à pension, chez tous les employeurs pour qui ils ont travaillé pendant leur carrière. Cela deviendra encore plus important à l'avenir parce que la population active deviendra de plus en plus mobile. En d'autres mots, il faut modifier la règle existante selon laquelle le service ouvrant droit à pension doit s'accumuler à l'intérieur d'un seul régime de retraite pour tenir compte de toutes les années de service à l'intérieur de tous les régimes de pension.

Finalement, permettez-moi de vous expliquer notre position sur les exonérations d'impôt. Le MEBCO s'oppose à l'impôt sur les revenus de placement ou sur les cotisations aux régimes de pension agréés et aux REER. Le Canada devrait maintenir son approche de ne pas imposer les cotisations, de ne pas imposer les revenus de placement, mais prélever des impôts sur les prestations ou sur le montant forfaitaire au moment de l'encaissement.

En passant, j'ai aimé ce qui a été dit plus tôt, qu'il faut procéder comme s'il s'agissait d'un report de l'impôt plutôt que d'une dépense.

En conclusion, j'aimerais remercier le comité encore une fois pour cette occasion qui nous est donnée de faire part de nos conseils et de nos recommandations.

Merci.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Anderson.

Nous allons maintenant entendre l'exposé de la Coalition ontarienne pour l'amélioration des services de garde d'enfants. Soyez les bienvenues, madame Bédard et madame Sperling.

Mme Mary-Anne Bedard (directrice générale, Coalition ontarienne pour l'amélioration des services de garde d'enfants): Bonjour.

Merci, monsieur le président et membres du comité, de nous avoir donné cette occasion de vous adresser la parole ce matin et de vous communiquer nos opinions sur le prochain budget fédéral.

Comme vous l'avez dit, je suis la directrice générale de la coalition. Je suis accompagnée ce matin de Susan Sperling, notre coordinatrice de l'éducation du public. Nous allons faire la présentation ensemble.

Fondée en 1981, la Coalition ontarienne pour l'amélioration des services de garde d'enfants est un organisme d'intérêt public qui cherche à sensibiliser tant les décideurs que le public aux bienfaits de l'éducation et des services offerts aux jeunes enfants.

J'aimerais commencer mon exposé ce matin en situant les problèmes reliés aux soins destinés aux enfants dans le contexte fédéral. Tout simplement, depuis cinq ans, le gouvernement fédéral n'accorde aucun financement direct pour les services de garde d'enfants.

Mme Susan Sperling (coordinatrice de l'éducation du public, Coalition ontarienne pour l'amélioration des services de garde d'enfants): Le dévoilement en 1999 du Plan d'action national pour les enfants a redonné espoir aux millions de parents canadiens qui élèvent leurs enfants sans pouvoir compter sur le soutien dont ils ont besoin. Malgré les nombreuses attentes fondées sur le Budget 2000, qui devait être le «budget des enfants» et prévoir un plan d'action pour les enfants de même que des engagements considérables pour les services de développement de la petite enfance, ni le plan d'action ni les engagements ne se sont concrétisés.

À la place, plusieurs mois plus tard, nous avons eu la signature d'une entente entre les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux, entente qui prévoyait un financement fédéral de 2,2 milliards de dollars sur cinq ans, sans les orientations ou un échéancier pour la création d'une stratégie nationale visant le développement de la petite enfance. Les provinces ne sont pas chargées d'affecter la moindre partie de ce financement aux services de garde d'enfants, qui constitue la pierre angulaire d'un système complet et inclusif.

Mme Mary-Anne Bedard: Bien que certains diraient qu'il s'agissait là d'un premier pas important, le montant était nettement insuffisant et c'était loin d'être une solution exhaustive. En effet, 2,2 milliards de dollars sur cinq ans est nettement insuffisant par rapport à ce qu'il faudrait pour que tous les enfants aient accès à un programme intégré de services de développement de la petite enfance leur permettant de partir du bon pied dans la vie. À vrai dire, cela représente un peu plus de 100 $ par enfant par année, ce qui n'est certainement pas assez.

Mme Susan Sperling: Supposons, par exemple, que je suis mère d'un bout de chou à Toronto. Avec 100 $, je pourrais acheter pour mon enfant deux jours de service de garde de qualité, ou un costume de neige avec des bottes, ou un siège d'auto, ou moins de 10 p. 100 de notre loyer mensuel.

Mme Mary-Anne Bedard: En 1995, quand le Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux est venu remplacer le Régime d'assistance publique du Canada, l'aide fédérale destinée à subventionner les services de garde d'enfants était de 320 millions de dollars. Cette année, les fonds réservés à l'ICPE pour l'ensemble des quatre champs d'action s'élèvent à moins de 300 millions de dollars.

Mme Susan Sperling: À titre comparatif, mentionnons que, d'après le Caledon Institute, un groupe de recherche en politique publique, il faudrait un investissement d'au moins 7,5 milliards de dollars sur cinq ans pour mettre sur pied un programme complet. Par ailleurs, l'Union européenne recommande que 1 p. 100 du PIB soit réservé aux soins aux enfants.

Selon le Childcare Resource and Research Unit de l'Université de Toronto, il en coûterait 10 milliards de dollars par an, soit 1 p. 100 du PIB canadien, pour assurer un financement complet, non pas seulement des structures d'accueil, mais des quatre volets des initiatives de développement de la petite enfance.

• 1200

Mme Mary-Anne Bedard: À l'encontre du Régime d'assistance publique du Canada, l'aide fédérale au titre de l'IDPE n'est assortie d'aucune condition exigeant une aide équivalente ou complémentaire des provinces. Les provinces jouissent également d'une discrétion totale quant à l'utilisation qu'elles font de l'argent. Il appartient donc à chaque administration provinciale et territoriale de décider du montant de l'aide fédérale qu'elle investira dans divers services, y compris les services de garde, si elle juge opportun d'y investir.

L'obligation qu'a la province de rendre compte de ces dépenses à ce titre se limite au rapport qu'elle doit rendre public, d'où l'absence de responsabilité presque totale. Il n'existe pas de mécanismes pour s'assurer que les provinces investissent dans les domaines où les collectivités ont les besoins les plus pressants. Cette situation pourrait avoir des conséquences désastreuses pour les familles canadiennes qui ont besoin de services de garde abordables, réglementés et de qualité. Ne pas se soucier des services de garde d'enfants à une époque où les mères de jeunes enfants sont de plus en plus nombreuses—70 p. 100 au Canada—à participer au marché du travail tient de la négligence et de l'irresponsabilité.

Mme Susan Sperling: Les gouvernements provinciaux doivent être tenus de rendre des comptes non seulement du montant qu'ils affectent à divers programmes et services, mais aussi quant aux mesures qu'ils prennent pour s'assurer que la répartition des fonds respecte les principes de la transparence, de la participation et du respect.

Prenons l'exemple de l'Ontario. Le gouvernement conservateur de Mike Harris a choisi d'exclure complètement les services de garde de sa stratégie d'investissement dans le DPE. Plusieurs semaines après avoir reçu le premier versement de 114 millions de dollars, il a dévoilé son plan d'action. Les services de garde étaient complètement absents. Ce gouvernement ne verse pas un cent de ce montant fédéral aux services visant à promouvoir l'épanouissement des enfants et à faciliter la participation des parents au marché du travail.

Nous sommes également au courant d'au moins un cas où les fonds fédéraux ont servi à financer pour 15 millions de dollars des dépenses déjà engagées par la province.

Mme Mary-Anne Bedard: Il est inadmissible que le gouvernement agisse ainsi alors que seulement 10 p. 100 des enfants qui ont besoin des services de garde ont accès à des services agréés et réglementés. Le Canada doit maintenant aller au-delà de cette initiative de développement de la petite enfance pour élaborer un programme national d'action complet pour les enfants.

La Coalition ontarienne pour l'amélioration des services de garde d'enfants vient de terminer une tournée provinciale de même que la deuxième phase de son étude sur la situation des services de garde d'enfants en Ontario. Les statistiques ainsi que les informations anecdotiques indiquent clairement que la situation est critique en Ontario et qu'il faut à tout prix investir davantage.

Nous savons et nous comprenons que suite aux événements du 11 septembre, la sécurité est devenue une nouvelle priorité. Nous sommes au courant des priorités actuelles de votre gouvernement, mais plus que jamais, ce sont les premières années qui sont absolument essentielles à l'épanouissement d'une société canadienne qui est à la fois productive, en santé et en sécurité. De nombreuses recherches appuient cette hypothèse.

Mme Susan Sperling: L'Organisation de coopération et de développement économique, dans son rapport de juin 2001, intitulé Petite enfance, grand défi: Éducation et structure d'accueil, réclame que l'accès se fonde sur le principe de l'universalité.

    Il est important, dit l'OCDE, de garantir un accès équitable qui assure à tous les enfants des chances égales de fréquenter des structures d'éducation et d'accueil de la petite enfance indépendamment du revenu familial, de la participation des parents au marché du travail, de leurs besoins éducatifs spéciaux ou de leur origine ethnique ou linguistique.

Mme Mary-Anne Bedard: Dans son rapport intitulé La situation des enfants dans le monde 2001, l'UNICEF conclut sans équivoque à la nécessité d'un financement complet des services à la petite enfance de la part des particuliers, des gouvernements, des agences internationales et des donateurs, car les soins à la petite enfance sont une question de droits de la personne; la science et l'expérience montrent le bien-fondé des soins à la petite enfance et les soins à la petite enfance sont un investissement rentable.

Mme Susan Sperling: Dans la première recommandation du rapport final de la Commission d'amélioration de l'éducation mise sur pied par le gouvernement de l'Ontario, on incite le gouvernement à renforcer son engagement envers les enfants de l'Ontario en assurant un accès à des programmes de garde d'enfants abordables et d'excellente qualité et à des normes optimales de nutrition, de santé et de sécurité.

M. Mary-Anne Bedard: Aux études réalisées par ces organisations, je vous assure que l'opinion publique est aussi favorable à l'idée d'investir dans les services de garde d'enfants. Selon des sondages réalisés récemment, 90 p. 100 des Canadiens croient en l'importance de services de garde d'enfants de grande qualité pour assurer le bien-être socio-économique de la population canadienne. Quatre-vingt-un pour cent des répondants estiment que les gouvernements devraient élaborer un plan d'action en vue d'améliorer les services de garde d'enfants. Selon un autre sondage, 76 p. 100 des Canadiens estiment que toutes les familles devraient avoir accès à des services de garde d'enfants, le coût de ces services devant être partagés par les gouvernements et les familles. Soixante-cinq pour cent des répondants seraient prêts à payer plus d'impôts pour garantir aux enfants l'accès au programme.

Mme Susan Sperling: Il est aussi important de sensibiliser les Canadiens aux avantages de l'apprentissage continu pour assurer la prospérité du pays. Là encore, il existe de la recherche pour appuyer cette notion.

Dans son étude Early years qui a fait autorité en 1999, Fraser Mustard conclut à l'importance du développement de la petite enfance, y compris des structures d'accueil de qualité, dans l'évolution vers une société possédant les compétences en lecture et en écriture si nécessaires pour soutenir la concurrence à l'échelle planétaire.

• 1205

Mme Mary-Anne Bedard: Vous êtes aussi sans doute au courant d'une étude menée en 1998 par deux économistes réputés qui sont arrivés à la conclusion que si nous offrions des services de garde à tous les enfants canadiens âgés de deux à cinq ans, notre économie en retirerait un avantage immédiat en ce sens que les parents de ces enfants seraient plus employables et qu'ils auraient un revenu plus élevé et paieraient davantage d'impôts, si bien qu'il en résulterait une diminution du budget de l'aide sociale. Plus tard, les enfants eux-mêmes récolteraient des avantages semblables, car les bons soins pendant les trois premières années de la vie sont un facteur déterminant de la réussite scolaire et professionnelle.

À long terme, l'existence d'un réseau complet de structures d'accueil rapporterait aux enfants, aux parents et à la société, deux dollars pour chaque dollar investi. Le rapport de l'OCDE que nous avons cité plus tôt indique que les décideurs des quatre coins du monde reconnaissent que l'accès équitable à des services d'éducation et d'accueil de qualité pour la petite enfance peut renforcer les fondements permettant de favoriser l'apprentissage continu chez tous les enfants et l'atteinte des besoins globaux des familles sur le plan éducatif et social. Pour ce faire, cette organisation a énoncé huit éléments clés pour que sa politique d'éducation de la petite enfance soit un succès: une approche systémique et intégrée de l'élaboration et de la mise en oeuvre de la politique; pour la politique de développement et pour l'application; une étroite collaboration avec le système d'éducation; une approche universelle face à l'accès, en accordant une attention particulière aux enfants qui ont besoin d'une aide particulière; une infrastructure dotée d'un investissement public important au niveau des services; une approche participative de l'amélioration et de l'assurance de la qualité; des conditions de travail et une formation appropriées pour le personnel à tous les niveaux; une attention systématique au contrôle et à la collecte des données; et enfin, un cadre stable pour la recherche et l'évaluation à long terme.

Pour en arriver à un réseau vraiment complet, il faudrait intégrer les volets qui, à l'heure actuelle, sont distincts, soit l'éducation de la petite enfance et les structures d'accueil. Il faudrait donc que ces volets soient reliés entre eux et coordonnés avec une multitude d'autres programmes et services, notamment les soins prénatals et postnatals et les services d'appui aux parents, et il faudrait aussi qu'ils soient conçus pour mieux répondre aux besoins de toutes les familles indépendamment de leur situation financière ou professionnelle.

Idéalement, les services doivent être intégrés afin d'assurer aux jeunes enfants et à leur famille des services holistiques. Ils doivent englober les programmes et services existants en éducation, service social et santé de même que les programmes et les ressources des paliers fédéral, provincial et local. Tous les enfants auraient accès aux services de développement de la petite enfance indépendamment de leur lieu de résidence, de leur langue, de leur capacité ou du revenu familial. Les services doivent tenir compte des besoins culturels et linguistiques. Le coût ne doit pas être un obstacle au niveau de participation que les parents choisissent pour leurs enfants.

Nous savons qu'un réseau comme celui-là exigerait un investissement considérable en fait de temps, d'argent et de collaboration, et je vais donc vous faire part de nos recommandations.

La Coalition ontarienne pour l'amélioration des services de garde d'enfants demande au gouvernement fédéral d'adopter les mesures suivantes pour le prochain budget:

(1) Accroître à 2 milliards de dollars par année sur les quatre prochaines années le financement des services de développement de la petite enfance, ce qui permettrait à ces services de répondre aux besoins de tous les enfants du Canada.

(2) Prolonger le financement des services de développement de la petite enfance au-delà des cinq années de l'entente IDPE. Le gouvernement fédéral doit s'engager à financer de façon permanente un plan d'action national complet pour les enfants, au moins un niveau de financement cumulatif lorsque l'accord actuel prendra fin.

(3) Accroître la responsabilité des gouvernements provinciaux et territoriaux. Il faudrait notamment faire en sorte qu'à l'avenir les provinces et les territoires reçoivent des fonds affectés à des fins particulières—c'est-à-dire, qu'une partie importante du financement fédéral serve à mettre en place des programmes de développement de la petite enfance dans les provinces et dans les territoires qui s'inscrivent dans une stratégie nationale en matière de garde d'enfants qui aurait été négociée pour tous les enfants du Canada.

Enfin, il faut inclure les responsables de la prestation des services dans la prise de décisions. Le processus de planification et de prise de décisions aux termes de l'entente IDPE actuelle et de toutes les ententes futures doit prévoir la participation des groupes communautaires et des responsables de la prestation des services. Le processus doit être transparent et inclusif, tenir compte des acquis et se placer sous le signe de la collaboration et du respect de la diversité des familles et des collectivités.

Je vous remercie de votre temps.

Le président: Merci beaucoup, madame Bédard et madame Sperling.

Nous allons maintenant entendre M. Patrick Johnson, du Centre canadien de philanthropie. Bienvenue.

M. Patrick Johnson (président-directeur général, Centre canadien de philanthropie): Merci, monsieur le président, de m'avoir invité à me joindre à vous aujourd'hui.

Comme vous le savez, monsieur le président et membres du comité, le Centre canadien de philanthropie est un réseau national d'organismes de bienfaisance sans but lucratif à l'oeuvre dans des collectivités dans l'ensemble du pays. Nos membres travaillent et exécutent des programmes dans les dix provinces et les trois territoires d'un océan à l'autre.

• 1210

Vous aurez reçu un exemplaire de notre mémoire écrit officiel qui, naturellement, a été préparé et présenté bien avant l'heureuse annonce du ministère des Finances vendredi. Par ailleurs, il a été naturellement préparé bien avant les événements du 11 septembre. Dans le peu de temps dont je dispose ce matin, je m'appuierai sur les positions précises présentées dans notre mémoire plutôt que de les répéter.

Comme l'un des témoins l'a déjà mentionné, je pense que la plupart des gens ici et ailleurs au Canada sont conscients que la sécurité constitue maintenant la principale préoccupation du gouvernement fédéral, et ce, à juste titre. Nous voudrions tout simplement exhorter les membres du comité et le gouvernement à adopter une définition du terme sécurité qui soit la plus large et la plus générale possible. Naturellement, nous devons examiner la collecte des renseignements, les systèmes militaires, les processus pour les réfugiés—toutes ces questions qui, traditionnellement, font partie de la sécurité du pays. J'estime cependant que nous devons vraiment songer à une définition plus large, plus complète de ce que nous entendons du terme sécurité, de ce qui donne aux Canadiens un sentiment de sécurité.

Vous vous rappellerez sans doute que quelques heures après les horribles attentats du 11 septembre, ce sont des groupes comme la Croix-Rouge, United Way of New York et Community Trust of New York qui se sont rendus immédiatement sur les lieux, et qui ont travaillé côte-à-côte avec les organismes des divers paliers de gouvernement pour tenter d'évaluer les besoins des survivants et des familles des victimes de cette horrible série d'événements.

Je pense que les préoccupations des Canadiens se tournent maintenant vers l'étranger, plus particulièrement en ce qui a trait aux conséquences de ces événements pour les innocents citoyens afghans qui ont été pris en gage par les terroristes. Je pense que bon nombre de Canadiens comprennent tout à fait que notre sentiment de sécurité est directement lié aux circonstances désespérées dans lesquelles se trouvent les citoyens afghans qui sont innocents. Notre sentiment de sécurité sera amélioré dans la mesure où nous comprenons que les organisations humanitaires—qu'il s'agisse de l'aide à l'enfance, d'OXFAM ou de Médecins sans frontières—ont la capacité de répondre aux besoins des réfugiés en Afghanistan dans la même mesure où la Croix-Rouge et United Way of New York ont la capacité de répondre aux besoins des citoyens de New York.

Donc, pour donner aux Canadiens ce sentiment de sécurité, il faut entre autres s'assurer que les organismes de bienfaisance sans but lucratif qui oeuvrent ici au pays et à l'étranger ont la capacité de réagir aussi efficacement que nos homologues américains ont pu réagir.

L'un des principaux leviers dont dispose le gouvernement fédéral pour appuyer et rehausser le travail des organismes de bienveillance, ce sont les dispositions du régime fiscal sur les dons de charité. Vous vous souviendrez que dans notre mémoire, nous avions recommandé au gouvernement fédéral de rendre permanente la mesure du budget de 1997 au sujet des dons d'actions cotées en bourse. Nous avons donc été très heureux d'entendre l'annonce du ministère des Finances, vendredi dernier, sur le fait que le gouvernement a maintenant décidé que cette mesure serait permanente. Nous en remercions sincèrement le gouvernement fédéral car, comme nous le disons dans notre mémoire, cette mesure a eu un effet positif et a permis aux organisations de charité canadiennes d'obtenir de nouvelles ressources auxquelles elles n'auraient pas pu autrement avoir accès.

Nous avons également été heureux de constater que le ministère des Finances est prêt à continuer de chercher des moyens d'étendre cette mesure afin que les organisations de bienveillance du Canada puissent en tirer le maximum. Dans notre mémoire, nous avons mentionné deux améliorations qui pourraient être apportées à cette mesure, notamment son application aux fondations privées et à d'autres formes de titres. Par exemple, on pourrait peut-être inclure dans cette mesure les biens fonciers.

J'invite les membres du comité à participer à cette discussion sur les façons d'améliorer cette mesure et j'espère que vous envisagerez également d'autres mesures qui pourraient inciter les Canadiens à appuyer davantage les organisations de bienveillance et de bénévoles.

Pour conclure, je rappelle aux membres du comité que les événements du mois dernier soulèvent de graves préoccupations quant à leurs effets sur l'économie. Ces événements risquent d'avoir des effets négatifs pour les sociétés privées. Ils risquent également d'avoir des effets négatifs pour les organisations de bienveillance canadiennes et les organismes à but non lucratif, qui dépendent, comme les sociétés privées, des cycles économiques.

• 1215

Dans l'examen des dispositions qui doivent se trouver dans le prochain budget fédéral, j'exhorte les membres du comité à examiner la mesure dans laquelle l'appui aux organismes de bienfaisance et à but non lucratif peut contribuer à accroître le sentiment de sécurité des Canadiens.

Merci beaucoup.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Johnston.

Je tiens également à manifester notre reconnaissance envers les gens qui comme vous, par leurs interventions, ont amené le gouvernement à faire progresser un certain nombre de dossiers. Cela montre bien l'importance que le gouvernement canadien accorde aux consultations prébudgétaires dans l'établissement du budget. Merci encore.

Nous entendrons maintenant M. Lounds, de Conservation de la nature Canada.

M. John Lounds (président, Conservation de la nature Canada): Merci, monsieur le président.

Je vais également me limiter aux points saillants de notre mémoire, intitulé Réussir en conservation: Mesures pour encourager le secteur bénévole ainsi que tous les Canadiens et Canadiennes à préserver le patrimoine naturel du Canada, dont vous avez je crois reçu copie. Je suis d'accord avec M. Johnston pour ce qui est du rôle du secteur bénévole. Je tiens également à remercier le gouvernement d'avoir prolongé l'application des dispositions sur les dons de titres cotés en bourse, vu leur importance pour tous les organismes de bienveillance et leur travail.

Parmi les nombreuses priorités que le gouvernement s'est fixées à long terme, la protection de l'intégrité écologique des parcs nationaux et le maintien d'un patrimoine naturel pour tous les Canadiens sont des objectifs importants pour ce qu'est et ce que sera le Canada. Nous avons deux messages à vous transmettre aujourd'hui.

Nous encourageons le gouvernement à élaborer plus activement avec le secteur des bénévoles, maintenant et à plus long terme. Cette collaboration a déjà existé dans de nombreux cas mais elle pourrait être accrue dans le cas du secteur de la conservation de la nature.

Deuxièmement, nous voulons nous assurer que tous les Canadiens puissent participer aux programmes qui ont été mis sur pied pour permettre les dons écologiques de terrains à des organisations, dont Conservation de la nature Canada. Le gouvernement a apporté des changements positifs qui ont grandement amélioré le programme de dons écologiques, mais il existe encore certains obstacles à la participation des Canadiens et des sociétés canadiennes à ce programme. Permettez-moi de vous les décrire brièvement.

Tout d'abord, je voudrais vous parler de ce que le secteur bénévole peut apporter à la table en matière de priorités concernant la conservation. Les organismes non gouvernementaux peuvent aider le gouvernement canadien à honorer ses engagements en matière de conservation en levant des fonds de contrepartie dans le secteur privé et auprès d'autres paliers de gouvernement. Quoiqu'il y ait manifestement des programmes de conservation exigeant une intervention directe du gouvernement, en ce qui concerne notamment la conservation des terres à valeur écologique, les sites essentiels au maintien de l'intégrité écologique des paysages canadiens peuvent probablement être conservés à la moitié de ce qu'il en coûterait directement au gouvernement d'acquérir les terres en question. Étant l'un des partenaires potentiels du gouvernement, la Société canadienne pour la conservation de la nature est prête à engager jusqu'à 20 millions de dollars par an pendant cinq ans au moins pour la conservation des terres sur tout le territoire canadien. Nous savons que d'autres mouvements actifs dans le domaine de la conservation, par exemple Canards Illimités Canada, sont également disposés à intervenir à un niveau équivalent.

Ce genre de programme a produit d'excellents résultats avec une série de projets ponctuels conduits un peu partout au Canada. Ici, en Ontario, Middle Island est un excellent exemple: le gouvernement et le secteur privé ont chacun offert 50 p. 100 des financements nécessaires pour que cette île puisse faire partie du système des parcs nationaux canadiens. Vous trouverez sur la table là-bas un supplément qui a été réalisé au printemps dernier pour le Globe and Mail et qui vous donnera plus de renseignements au sujet de la Société et de ses activités, activités conduites également conjointement avec le gouvernement.

Aux États-Unis, il existe un programme fédéral institué au titre de la North American Wetlands Conservation Act. Ce programme dispense des concours financiers à hauteur des fonds qui sont recueillis auprès de sources non fédérales et une partie de cet argent est d'ailleurs investie ici, au Canada, pourvu toutefois qu'il y ait un financement de contrepartie. Ce qui a limité l'augmentation de ce genre d'investissement, c'est qu'il n'a pas été possible d'obtenir du gouvernement canadien qu'il finance lui aussi ce programme. Par ailleurs, depuis deux ans, les électeurs américains ont approuvé, par une série de votes conduits dans plusieurs États, une enveloppe de dépenses publiques consacrée à la conservation des espaces libres et dont le total est supérieur à 17,6 milliards de dollars. Il faut que le Canada utilise lui aussi des mesures semblables pour atteindre ses objectifs.

• 1220

En second lieu, je voudrais vous dire quelques mots au sujet de la nécessité qu'il y a de continuer à encourager les dons de terres écosensibles au Canada. Je voudrais remercier les membres du comité—nous avons déjà comparu pour en parler—qui ont aidé à concrétiser certains des changements survenus à cet égard, et en particulier le fait que les dons de terres écosensibles font désormais l'objet du même traitement fiscal que les dons de valeur mobilière.

Il y a une ou deux choses qui continuent à entraver la participation de tous les Canadiens, et je voudrais rapidement en dire deux mots. Quelqu'un qui ne peut pas se permettre de faire don de toute sa propriété mais qui souhaiterait quand même faire un don d'intérêt écologique ne peut pas prendre part au programme, et cela en raison de la définition des cadeaux donnée par la Loi de l'impôt sur le revenu. Supposons que vous possédiez une propriété valant 100 000 $ et que la conservation vous tienne à coeur, et supposons également que vous deviez tirer un certain revenu de cette propriété et que vous vouliez la vendre à la Société, pour 50 000 $ par exemple, vous ne pouvez pas obtenir un reçu aux fins d'impôt pour les 50 000 $ restants, c'est-à-dire la différence entre le prix de vente et la valeur vénale, même s'il existe déjà une formule permettant d'attester la validité de l'évaluation des valeurs vénales dans le cadre du programme des dons de biens écosensibles. Cela pourrait être selon nous un excellent moyen d'encourager davantage de Canadiens à faire don de biens fonciers, à condition qu'on leur permette de vendre ainsi leurs propriétés à rabais ou en parcelles à des oeuvres de charité ou au gouvernement.

En second lieu, le programme de don de biens écosensibles n'est valable que pour les biens immobilisés, et il est donc utile pour les sociétés qui possèdent des terres considérées comme immobilisations. Certaines sociétés ne procèdent pas de cette façon, surtout dans le domaine du lotissement, où les terrains sont considérés comme faisant partie de l'inventaire. Les biens en inventaire ne sont pas couverts par le programme de don de biens écosensibles, de sorte que la moraine d'Oak Ridges par exemple, qui intéresse beaucoup les sociétés de lotissement, échappe aux dispositions de ce programme. La raison en est que les gains réalisés sur les biens en inventaire sont considérés comme un bénéfice, et cela n'est donc pas considéré comme faisant partie du programme de don de biens écosensibles, et les avantages fiscaux associés ne sont donc pas les mêmes.

En conclusion, nous demandons au comité d'appuyer la continuation et la croissance du travail avec les organismes bénévoles afin de tirer le maximum des fonds dépensés pour les priorités du gouvernement. Nous demandons par ailleurs que des modifications soient apportées à la Loi de l'impôt sur le revenu afin d'inclure les dons de parties de terres et les terres figurant à l'inventaire dans le programme de dons de biens écosensibles, ce qui permettrait à une plus grande gamme de Canadiens et à toutes les sociétés canadiennes de participer à la conservation du patrimoine naturel du Canada.

Merci.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Lounds.

Nous allons maintenant entendre M. Michael Farrell, président de l'Association for Healthcare Philanthropy qui est accompagné de Diane Lester. Bienvenue.

M. Michael Farrell (président, Association for Healthcare Philanthropy): Merci, monsieur le président, et merci aux membres du comité. Nous vous présenterons les points saillants d'un mémoire qui vous a été envoyé le 10 août pour étude.

L'Association for Healthcare Philanthropy Canada compte plus de 400 membres qui travaillent dans les bureaux de la fondation et du développement dans les hôpitaux dans l'ensemble du pays et au sein d'organismes de soins de santé. Avec une armée de milliers de bénévoles, ils forment ensemble le partenariat communautaire qui a construit l'infrastructure du système de soins de santé au Canada, et nous sommes fiers de continuer à le faire.

Je dois ajouter immédiatement, que puisse que vous avez annoncé vendredi le maintien de l'aide fédérale spéciale pour les dons de charité de valeurs inscrites à la bourse, cela a réduit mon exposé d'une minute ou deux, et que cette nouvelle nous ravit et que nous vous en remercions et que nous reconnaissons l'importance de cette décision pour le centre philanthrope. Avant de dire autre chose, je pense qu'il est très important de dire que la philanthropie c'est ce que nous faisons, et non seulement cela permet d'optimiser les dons, mais cela nous permet d'aller chercher des gens qui n'auraient peut-être pas été philanthropistes et ces gens font leur premier don. D'après notre expérience, une fois que les gens sont devenus philanthropes, ils ne cessent pas de l'être, ils continuent. J'applaudis votre excellent travail. Merci.

Le président: Vous prenez une minute de plus pour remercier le gouvernement.

Des voix: Oh, oh!

M. Michael Farrell: Pour revenir maintenant aux questions qui nous intéressent et sur lesquelles nous aimerions attirer votre attention aujourd'hui, la recherche en santé, dont la majeure partie se fait dans nos hôpitaux, est devenue partie intégrante de notre travail.

• 1225

En ce qui concerne le rôle de nos organisations en matière de campagnes de financement, la demande a en quelque sorte monté en flèche étant donné qu'il y a eu une restructuration dans l'ensemble du pays. La restructuration a été accompagnée de la demande de la participation communautaire à chacun de ces projets. L'élément campagne de financement a donc monté en flèche, si vous voulez. Par exemple, la table ronde de Toronto a déterminé que les objectifs de collectes de fonds pour les trois à cinq prochaines années s'élèveront à 2,5 milliards de dollars. Tout cela se fait en partenariat avec le reste du développement du système de soins de santé. Je pense que cela explique pourquoi la question de la recherche nous préoccupe tout particulièrement.

J'aimerais vous présenter Diane Lester de la Fondation de The Hospital for Sick Children, qui s'occupe de cet aspect. Elle fera le point sur cette partie de notre exposé.

Mme Diane Lester (directrice générale, Fondation de Hospital for Sick Children): Merci beaucoup de nous avoir invités à venir vous rencontrer ce matin.

Permettez-moi tout d'abord de vous remercier. En plus d'être directrice générale de la Fondation de The Hospital for Sick Children, je suis présidente du Canadian Council for the Association of Fundraising Professionals. Nous avons été invités à comparaître devant votre comité le 27 septembre. Nos représentants étaient Nicholas Offord et Jim Pitblado. Jim Pitblado m'a laissé un message dans ma boîte vocale à la maison à 19 heures vendredi soir et il était ravi de l'annonce qui venait d'être faite. Nous devons dire qu'il s'agit là sans doute de la décision à court terme la plus fondamentale qui puisse être prise pour accroître la capacité des organismes bénévoles. Vous devez tous vous attribuer le mérite d'avoir tenu compte de cette recommandation et des mémoires des autres professionnels qui ont comparu devant votre comité.

Sur la question précise dont nous traitons aujourd'hui, j'aimerais fournir le contexte. Au cours des quatre dernières années, le gouvernement fédéral a contribué considérablement à la recherche au Canada par le truchement de programmes comme ceux relatifs à la Fondation canadienne pour l'innovation, au Programme des chaires de recherche du Canada, et par la création des Instituts de recherche en santé du Canada. En Ontario, comme contrepartie à ces initiatives, on a créé le Fonds ontarien d'encouragement à la R-D visant tout particulièrement à épauler le financement fédéral en matière de R-D et de recherche en santé.

Cependant, contrairement à leurs homologues aux États-Unis, et notamment le National Institutes of Health, les organismes subventionnaires ne couvrent pas les coûts d'infrastructure. Ainsi, le chercheur ou le scientifique qui prépare une demande d'une valeur de 200 000 $, par exemple, et qui réunit une équipe de chercheurs principaux et d'associés qui collaborent dans le cadre d'un programme donné, l'établissement d'accueil assume les salaires, participe au coût d'infrastructure, assure l'achat de matériel, assume le coût des animaux de laboratoire et de l'entretien des appareils. Le coût de la nouvelle équipe de chercheurs est assumé par l'organisation hôte et non pas par l'organisme subventionnaire.

Tous les centres universitaires en sciences de la santé, à savoir les hôpitaux d'enseignement qui sont affiliés aux universités un peu partout au pays, sont affiliés à une fondation. Dans le cas du Hospital for Sick Children, l'hôpital demande à notre fondation d'assumer les coûts indirects de la recherche de manière à ce que tous les coûts soient couverts. Parfois, il s'agit d'une simple proportion du financement. Voilà comment on peut faire en sorte que les coûts indirects de la recherche soient financés par des organisations philanthropiques.

Il convient de répéter que les milieux de la philanthropie sont extrêmement satisfaits de l'annonce du 12 octobre du ministre des Finances. La mesure a été annoncée, comme l'a souligné Patrick Johnson, à un moment fort opportun. En effet, nous ne connaissons pas les répercussions des événements du 11 septembre, non seulement sur l'économie, mais également sur la réaffectation du soutien du public en matière de philanthropie. Tout est sous la loupe à l'heure actuelle. J'en parlais justement sur les ondes de la CBC ce matin. Il s'agit d'un phénomène qui inquiète tout le monde. Les gestes de philanthropie ont été nombreux et importants. Cependant, en plus de devoir vivre avec une économie anémique, nous devons assumer l'incertitude à court, ou à même à moyen terme.

En dépit de l'importance de la mesure d'incitation fiscale—et je crois que l'histoire nous confirmera à quel point elle a été faite à un moment opportun—elle ne suffira pas à permettre aux fondations des hôpitaux canadiens de combler l'écart de financement. Il se peut donc que le gouvernement se trouve dans la situation inhabituelle et peu souhaitable d'attribuer du financement que les organisations hôtes ne pourraient réunir autrement. D'excellents projets scientifiques risquent donc d'être rejetés par manque de financement de coûts d'infrastructure, qui peuvent parfois se chiffrer dans les millions de dollars.

• 1230

Selon les données statistiques de 1999—qui sont contenues en bonne partie dans le mémoire que nous avons déposé antérieurement, et que je ne vais donc rappeler que de façon sélective—les Canadiens ont donné environ 1,25 milliard de dollars aux organismes de bienfaisance du domaine de la santé. Ces organismes englobent l'ensemble des organisations de soins de santé du pays, de sorte que ce n'est qu'une proportion du montant qui est affecté à la R-D des fondations affiliées aux hôpitaux. Le montant de 1,25 milliard de dollars représente donc l'enveloppe totale des sommes accordées par les Canadiens—qu'il s'agisse de personnes morales ou de particuliers—pour le secteur des soins de santé en 1999.

L'écart vient du fait que, compte tenu du financement additionnel consenti par le gouvernement fédéral à la recherche en soins de santé, la capacité des organisations de combler l'écart n'existe pas. C'est le cas pour le Hospital for Sick Children, pour les Hamilton Health Sciences Centres que représente Mike.

En juin 2001, la FCI avait attribué 920,9 millions de dollars en projets depuis son lancement en 1997. Cela impliquait, une fois considéré l'effet de levier au palier provincial devant provenir du secteur privé, 460,5 millions de dollars.

Cela veut dire pour les hôpitaux que les fondations tentent soit d'appliquer leurs fonds sans affectation restreinte pour combler le manque, soit d'appliquer leurs dotations annuelles sans affection restreinte, qui auraient pu servir pour les bâtiments, l'infrastructure et d'autres coûts directs des hôpitaux—la technologie, les systèmes d'IRM—à des programmes d'appariement, soit qu'ils font des pieds et des mains pour trouver de nouveaux donateurs.

Les IRSC avaient accordé des subventions totalisant 345 millions de dollars et, selon une formule mise au point par le groupe Hay, qui figure au mémoire, cela voulait dire que 60 p. 100 était couvert par le gouvernement et qu'il restait un écart de 40 p. 100 nécessitant la participation d'un autre partenaire. En l'occurrence, il y aurait un manque à gagner de 230 millions de dollars à être financés par des organisations hôtes, du fait que les hôpitaux se tourneraient vers leurs fondations pour obtenir le soutien nécessaire.

Les données sur cette question étant disparates, toute évaluation chiffrée demeure conjoncturelle. Cependant, au meilleur de notre connaissance, les seuls budgets des IRSC et de la FCI engendreraient annuellement un écart de 500 millions de dollars. Ainsi, par rapport au montant de 1,5 milliard de dollars attribué en 1999 à l'ensemble des organismes de bienfaisance du secteur de la santé, on peut constater que la proportion affectée à la R-D doit être tout à fait considérable.

Toute fondation responsable ne peut financer la R-D de façon viable et continue qu'en faisant fructifier ses fonds de dotation. On ne peut tout simplement financer à partir... La recherche scientifique ne porte fruit qu'après de nombreuses années. Carolyn Bennett le comprendra certainement. Pour transposer des résultats scientifiques en amélioration concrète sur le plan de la santé, il faut compter des décennies. On ne peut financer la recherche en vendant des gaminets et en organisant des tournois de golf. La recherche scientifique doit avoir des assises financières stables; d'où la nécessité des capitaux de dotation. Ce ne sont pourtant que certains milieux qui peuvent faire fructifier de tels capitaux, certaines personnes fortunées qui vont profiter de la mesure d'incitatifs fiscaux rendue permanente vendredi. Ce sont des personnes qui ont une image de marque.

Vous trouverez dans mon mémoire un tableau qui illustre les plus importants hôpitaux d'enseignement de la grande région de Toronto. Aucun d'entre eux, y compris le Hospital for Sick Children, ne dispose de fonds de dotation pouvant engendrer les revenus nécessaires au financement complémentaire.

Au nombre des coûts indirects de la recherche qui méritent d'être considérés, il faut englober autre chose que le coût des installations où la recherche se déroule. Pour recruter les meilleurs chercheurs du pays et les inviter à participer à un important programme de R-D dans l'un des grands centres de recherche en santé du Canada, on doit être disposé à répondre à leurs exigences. Ils vont vouloir disposer de laboratoires, s'associer des chercheurs universitaires et des adjoints de recherche. Il leur faudra du soutien sur le plan de la technique, de la statistique et de l'informatique. Autrement dit, toute initiative de recrutement ou de financement relative à un projet a un effet multiplicateur.

• 1235

Et pour réunir une équipe de chercheurs, nous sommes en concurrence à l'échelle de la planète. Nous sommes en concurrence avec Stanford, Harvard, Johns Hopkins et le Children Hospital de Philadelphie, qui bénéficient des services de soutien dont j'ai parlé. Ainsi, l'infrastructure est critique. Si on finance un aquarium, il ne faut pas oublier l'eau. Il faut financer le tout.

Plus précisément donc, nous recommandons un financement additionnel. Cela est extrêmement important. Je suis convaincu que, s'il était présent, Alan Bernstein ne souhaiterait pas que la part des IRSC soit tout simplement amputée pour être affectée au coût indirect de la recherche, ce qui exclurait toute possibilité de croissance. Nous proposons que vous examiniez la formule de financement dans son ensemble en vue d'appuyer une augmentation visant l'infrastructure, sans laquelle les scientifiques ne pourront persévérer.

Il nous apparaît que, sur une longue période, le montant nécessaire pourrait représenter jusqu'à 40 p. 100 du financement des projets. Il s'agit là d'une norme internationale bien établie, à savoir que l'attribution destinée aux coûts d'infrastructure représente environ 40 p. 100 du total.

Je vous remercie de m'avoir accordé la parole ce matin. Nous sommes disposés à répondre à toutes vos questions.

Le président: Merci beaucoup, madame Lester, monsieur Farrell.

Il y aura maintenant un tour de cinq minutes pour les personnes suivantes, dans l'ordre: M. Solberg, suivi de M. Loubier, de M. Brison, de M. Cullen et de Mme Bennett.

Monsieur Solberg.

M. Monte Solberg: Merci beaucoup, monsieur le président.

D'entrée de jeu, je tiens à dire que le ministre des Finances a eu une bonne idée en rendant permanent le traitement fiscal généreux accordé aux valeurs mobilières. Je tiens d'ailleurs à signaler que c'est l'un de nos membres qui s'est fait le défenseur de cette idée il y a bien longtemps. Il s'agit de M. Grubel. De toute manière, nous sommes heureux que cette idée importante ait été adoptée.

Depuis le 11 septembre, bien entendu, tout a changé. La chose est vrai, même si c'est devenu un cliché de le dire. Et toutes les organisations philanthropiques qui sont représentées ici aujourd'hui ont de bons arguments à l'appui de ce qu'elles font à l'heure actuelle.

Monsieur Johnson, je crois que vous avez eu raison de dire à quel point il est important pour le Canada de faire ce qu'il peut pour venir en aide aux réfugiés afghans, par exemple. Voilà qui est fort important sur le plan de la politique étrangère, étant donné que les Canadiens veulent être utiles. Évidemment, du même coup, nous sommes toujours à court de financement pour les soins de santé. Cela reste vrai.

Mais je me demande, sans vouloir faire preuve d'ingratitude par rapport à ce qui a été accordé, si on n'a pas poussé plus loin l'étude pour déterminer comment le traitement fiscal pourrait être rendu encore plus favorable, surtout si l'on tient compte de l'incertitude liée au ralentissement de l'économie. Existe-t-il des études nous permettant de déterminer ce qui se produirait si la taxe sur les gains en capital était supprimée complètement pour de tels dons, et ce que cela représenterait comme dépense fiscale?

M. Patrick Johnson: Permettez-moi de formuler une première réponse, à laquelle Diane ou Mike pourront vouloir ajouter quelque chose.

Je crois savoir que certains travaux ont été effectués par le passé, notamment au ministère des Finances. On a tenté d'évaluer quel serait l'effet d'une élimination totale due taux d'inclusion. Je crois utile d'ajouter que ni les gens du ministère des Finances, ni ceux de l'extérieur ne s'entendent sur l'effet exact qu'aurait une telle initiative. Je crois ne pas me tromper, cependant, en disant que, aux États-Unis—et Diane le saura mieux que moi—on a pratiquement éliminé le taux et que cela ne semble avoir eu aucun effet néfaste sur le Trésor américain tout en permettant, assurément, un effet de levier beaucoup plus considérable. À moins que je ne me trompe, à peu près 25 p. 100 des contributions totales de philanthropes individuels aux États-Unis sont représentées par des dons de valeurs mobilières. Et cela va beaucoup plus loin: on englobe également les biens immobiliers.

Ainsi, compte tenu de l'information dont on dispose, pour ce qui est des États-Unis, j'ai bien l'impression que l'élargissement de la mesure aurait dans l'ensemble un effet fort positif.

Mme Diane Lester: Je crois savoir que Don Johnson comparaît devant le comité demain. Comme vous le savez, Don vient de chez Nesbitt Burns, où il a été responsable de l'ensemble des analyses financières. Ce que nous savons en tout cas, c'est que, en fonction de ses propositions, qui sont les mêmes que celles de l'AFP—à savoir la suppression totale des gains en capital—il a été en mesure de convaincre le gouvernement du Royaume-Uni de ne pas prendre de demi-mesures et ainsi de supprimer les gains en capital. Nous pouvons donc nous inspirer de ce qui s'est fait dans d'autres pays.

Je n'ai pas de statistiques sur les comparaisons de pertes de revenu.

• 1240

Ce qui ressort toutefois—et vous le verrez d'après le rapport Deloitte Touche qui a servi à soutenir l'exposé de l'AFP et la présentation du centre—c'est que nous avons identifié de nouveaux donateurs qui ne se seraient pas manifestés sans la mesure d'incitation fiscale. Nous élargissons donc le marché de la philanthropie, autrement qu'en permettant à un ensemble de philanthropes d'accaparer une plus grosse partie du gâteau. Selon moi, voilà qui est tout à fait critique.

L'autre incitatif, à ma connaissance, c'est que aussi bien l'Association canadienne des professionnels en dons planifiés et le Centre canadien de philanthropie ont englobé les fondations privées. Ces dernières gèrent une richesse considérable et cela aura donc des répercussions, comme nous pouvons bien l'imaginer.

M. Monte Solberg: J'aurais une question à poser au représentant de Conservation de la nature Canada.

Le président: M. Farrell s'apprêtait à ajouter quelque chose.

M. Monte Solberg: Excusez-moi.

M. Michael Farrell: Très succinctement, je dirais que l'on voit souvent des comparaisons entre nous et les États-Unis, même si elles sont fondées dans bien des cas sur des renseignements fragmentaires. Bien souvent, certaines études laissent entendre que les gens des États-Unis sont plus généreux que nous. Je pense que nous pouvons prévoir que le changement dont nous parlons aura à lui seul pour effet de donner l'occasion aux gens de faire mentir ce genre de comparaison.

M. Monte Solberg: Tout d'abord, monsieur Lounds, vous qui représentez la Société canadienne pour la conservation de la nature, j'estime que vous faites un excellent travail. Je crois que vous le savez.

Un certain nombre de vos recommandations m'intéressent. Pour ce qui est de la proposition de vente à rabais, avez-vous une idée de ce qu'il en coûterait au gouvernement en perte de revenus? Avez-vous effectué des études à ce sujet ou au sujet d'autres propositions portant sur les terrains mis en valeur, les terrains qui sont détenus par les promoteurs?

M. John Lounds: Je crois que les résultats des calculs que nous avons soumis dans notre mémoire précédent continuent d'être valables. Nous avions effectivement demandé à ce moment-là que les gains en capital soient supprimés pour les dons de terres ayant une importance sur le plan de l'écologie. Je n'ai pas les chiffres en mémoire, mais je suis certainement d'accord avec mes collègues pour dire que les chiffres concernant les répercussions possibles ne concordent pas avec ceux des fonctionnaires du Trésor.

Encore ici, par comparaison avec les États-Unis, nous constatons que dans ce pays, toutes les formes de biens immobiliers sont exemptées de gains en capital. Je ne crois pas que cela ait une incidence sur l'économie des États-Unis. Il me semble qu'il faut aussi voir la philanthropie au Canada dans d'autres optiques... Selon une étude de la U.S. Nature Conservancy, le total des éléments d'actif des fondations du Canada est égal à ceux de la Ford Foundation aux États-Unis. Voilà pourquoi l'activité philanthropique est tellement plus considérable aux États-Unis que chez nous.

M. Monte Solberg: Monsieur le président, je crois constater l'unanimité pour ce qui est de supprimer la taxe sur les gains en capital visant...

[Note de la rédaction: Inaudible]

Le président: ...

M. Monte Solberg: C'est ce que je voulais dire—et ici également.

Le président: Je vous prie de ne pas considérer cela comme une recommandation.

Monsieur Brison.

M. Scott Brison: Je vous remercie tous de vos interventions.

Nous accueillons très favorablement la décision annoncée vendredi par le ministre des Finances. Cependant, nous tenons à signaler qu'elle place les organismes de bienfaisance canadiens dans une position moins désavantageuse par rapport à celles d'autres pays. Nous sommes en concurrence dans toute une gamme de domaines, y compris celui qui nous concerne aujourd'hui.

J'aimerais savoir si la possibilité que j'envisage est réelle et si elle s'est déjà concrétisée. Supposons que le détenteur d'une action peut échanger, ne pouvant la vendre donc à sa valeur nominale—supposons qu'il s'agisse d'une action valant 5 $—qu'il trouve donc une porte de sortie du fait qu'il puisse la donner à un organisme de bienfaisance à ce montant et ainsi exploiter le gain en capital pour obtenir un avantage qu'il n'aurait pas pu avoir, du fait qu'il n'aurait pas pu vendre l'action à ce prix sur un marché où trop peu de transactions se déroulent.

Y a-t-il eu ou pourrait-il y avoir, selon vos évaluations, ce genre de manipulation de la disposition dont nous parlons? La question est peut-être plus hypothétique qu'elle ne l'était il y a quelques années, étant donné qu'il y a bon nombre de sociétés qui se trouvent dans ce genre de situation et que bien des gens ayant fait des achats sur marge pourraient avoir là une stratégie de sortie intéressante qui leur permettrait de se débarrasser d'un titre qu'ils n'auraient pas pu vendre à une valeur théorique sur un marché inexistant.

• 1245

A-t-on pu constater si cela se produisait ou non?

M. Michael Farrell: Je crois que la définition même d'une valeur cotée en bourse exclut cette possibilité. Le titre doit être négocié sur le marché public, et le reçu de transaction correspond au jour de transaction. En effet, nous devons pouvoir déterminer le coût réel, la valeur réelle du titre le jour où il a changé de mains.

M. Scott Brison: Bien sûr, mais il y a à la bourse de Toronto des sociétés à faible capitalisation dont les actions s'échangent peu, dont le marché est peu liquide. Il s'échange quelques milliers d'actions par jour pour lesquelles il n'y a pas... Je ne veux pas consacrer trop de temps à cette question, mais je suis curieux, puisqu'il s'agit d'entreprises cotées à la bourse. Elles sont cotées non seulement sur le CDNX mais aussi à la bourse de Toronto et elles font partie de ce qu'on pourrait appeler l'enfer des titres à faible capitalisation. Je ne verrais pas d'obstacle à ce qu'on puisse faire don de ces titres cotés à la bourse.

Mme Diane Lester: Nous n'avons pas posé cette question précise quand nous avons réalisé notre enquête auprès de 800 ou 900 associations canadiennes. Nous avons réalisé ce sondage au mois de juin dernier dans le cadre de la préparation du rapport de Deloitte Touche. Je vous signale en passant que l'hôpital Sick Kids' reçoit plutôt des actions de banque.

Les organismes de bienfaisance ont généralement une politique relative à l'acceptation de dons. Les comités de placement responsables de l'acceptation des actions et d'émettre le reçu aux fins de l'impôt prennent au sérieux leurs responsabilités.

M. Scott Brison: D'accord. C'est important. Il faut qu'il y ait des contrepoids. Je suis ravi d'apprendre qu'ils existent.

Étant donné l'importance et le rôle accru du secteur bénévole au Canada, avez-vous envisagé de recommander une approche plus holistique à la prestation de services? Il me semble que le secteur bénévole est mieux placé pour définir les besoins et répondre de façon efficace et efficiente que ne le sont les organismes publics, dans bien des cas.

J'hésite à citer l'exemple américain, celui de l'initiative du président Bush à l'égard des oeuvres de bienfaisance des Églises. J'estime que nous devrions à tout le moins explorer cette idée sans toutefois nous en remettre entièrement aux organisations religieuses. Nous devrions chercher à promouvoir un secteur bénévole plus large et plus diversifié. Quelqu'un a-t-il examiné la proposition américaine? Quelqu'un a-t-il évalué la faisabilité de l'initiative du secteur bénévole en laissant de côté l'idée qu'il n'y a que des organismes caritatifs associés aux organismes religieux? Comment certaines de ces idées pourraient-elles être adaptées à la réalité canadienne?

M. Patrick Johnson: Puis-je essayer de répondre aux questions?

Je ne crois pas que les organismes caritatifs canadiens soient tentés d'importer cette disposition adoptée par l'administration Bush, et cela pour toute une foule de raisons. Cela dit, je crois que la tendance actuelle constitue une reconnaissance de la contribution énorme du secteur caritatif, à but non lucratif, dans les collectivités d'un bout à l'autre du pays et que, depuis 30 ou 40 ans, le rôle joué par les gouvernements s'est accru. Dans une certaine mesure, les gouvernements ont assumé la responsabilité de la prestation de services dont s'étaient chargés auparavant les organismes caritatifs ou à but non lucratif.

Il ne s'agit pas maintenant de décider laquelle des deux options est la meilleure puisque, manifestement—et je crois que les Canadiens seraient d'accord—les gouvernements devraient prendre en charge certaines fonctions et responsabilités, un point c'est tout. Or, il y a aussi des services et des programmes qui peuvent et qui devraient être pris en charge par le secteur caritatif et le secteur privé. C'est le juste équilibre qu'il faut trouver.

Le gouvernement fédéral a lancé une initiative importante—appelée l'Initiative sur le secteur bénévole et communautaire—de concert avec les organismes bénévoles de tout le pays. Il s'agit justement de déterminer quel serait le meilleur partage des rôles entre les secteurs privé, public, caritatif et à but non lucratif. Nous avons constaté que cette répartition des tâches évolue avec le temps.

Le président: Merci, monsieur Brison.

Monsieur Cullen, puis madame Bennett.

• 1250

M. Roy Cullen: Merci, monsieur le président, et merci à nos témoins.

J'aimerais poser quelques questions à la Société canadienne pour la conservation de la nature pour obtenir des éclaircissements mais avant cela, madame Lester, vous avez parlé de la nécessité de trouver un partenaire qui assumerait une partie des coûts indirects de la recherche. Si vous examinez les faits, le gouvernement fédéral a créé des chaires de recherches dans tout le Canada, il a créé la Fondation canadienne pour l'innovation, dont le budget est de 3,4 milliards de dollars, grosso modo, et nous avons augmenté les budgets des conseils subventionnaires. C'est en ma qualité de député de l'Ontario que je vous pose cette question: Pourquoi le gouvernement de l'Ontario n'a-t-il pas remanié ses priorités afin de participer au financement des coûts indirects de la recherche dans cette province?

Mme Diane Lester: Je crois qu'il y a là deux questions distinctes. D'abord, le gouvernement provincial a des programmes de partage des frais mais il y en a peu, et ils ne permettent pas de couvrir le plein montant. Souvent, on obtient 40 p. 100 du gouvernement fédéral et 40 p. 100 du gouvernement provincial, mais les 20 p. 100 qui restent ne sont pas couverts. Dans le cas d'un projet de 10 millions de dollars, cela représente une somme importante à absorber pour une fondation rattachée à un hôpital. Voilà le premier problème.

L'autre problème touche à la régie bicéphale de la recherche médicale qui se fait dans les hôpitaux. L'hôpital obtient son budget global de la province mais la recherche se fait souvent au niveau fédéral ou national. Personne n'en a la propriété exclusive. Voilà pourquoi l'hôpital doit compter sur les fondations individuelles lorsqu'il se tourne vers le secteur privé pour combler le manque à gagner. Ce sont des sommes importantes.

M. Roy Cullen: Je comprends la difficulté, mais je n'arrive pas à déterminer si cela touche les établissements d'enseignement ou le régime de santé. La province abdique toute responsabilité pour le financement des coûts indirects de la recherche tandis que le gouvernement fédéral, lui, a mis en place des initiatives assez remarquables.

Quoi qu'il en soit, j'aimerais maintenant poser une question au porte-parole de la Coalition ontarienne pour de meilleurs services de garde d'enfants. Vous avez semblé dire que 2,2 milliards de dollars c'était des poussières, une goutte d'eau dans l'océan. Vous pourriez peut-être préciser votre pensée. Je ne doute pas que cela soit une goutte d'eau dans l'océan au regard de l'ampleur des besoins, mais 2,2 milliards de dollars sur cinq ans c'est pour moi une somme conséquente. J'en viens toutefois à ma vraie question: dans le cadre du programme que nous avons offert aux provinces, ces dernières peuvent déclarer que les services de garde d'enfants sont pour elles une priorité et le gouvernement fédéral leur apportera son soutien. Le problème auquel vous vous heurtez, c'est sans doute que le gouvernement de l'Ontario ne voit pas les services de garde d'enfants comme une priorité parce que, s'il déclarait que c'est effectivement une priorité dans le cadre du Programme d'action national pour les enfants, je suis convaincu que le gouvernement fédéral, d'après ce que je sais, lui apporterait son soutien.

Mme Mary-Anne Bedard: Nous ne dirions pas que ce sont des poussières, mais c'est loin d'être suffisant. Comme nous l'avons dit, avant le démantèlement du RAPC, vous affectiez aux services de garde d'enfants davantage de fonds que vous ne le faites maintenant pour les quatre sous-programmes qu'englobe l'Accord sur le développement de la petite enfance.

Nous rappelons tout simplement qu'avant 1996, vous versiez 320 millions de dollars au titre des services de garde d'enfants. Vous venez de rétablir le rôle du gouvernement fédéral, mais pour les quatre programmes, vous accordez moins d'argent que ce que vous affectiez auparavant aux seuls services de garde d'enfants. Nous sommes ravis de voir que le gouvernement fédéral joue de nouveau un rôle à ce niveau-là, mais nous sommes d'avis que ce n'est pas suffisant.

Aux termes de l'Accord sur le développement de la petite enfance, c'est vrai que bon nombre de nos problèmes sont à imputer au gouvernement de l'Ontario et au budget qu'il consacre aux services de garde d'enfants. La décision d'investir ou non dans des services de garde d'enfants est politique et se prend au niveau provincial. Je crois que le gouvernement fédéral aurait un rôle à jouer s'il disait...

En vertu de l'Accord-cadre sur l'union sociale, l'Accord sur le développement de la petite enfance devait être l'aune à laquelle mesurer son succès. Cet accord était censé garantir un accès équitable aux services où que l'on vive au Canada. L'absence de repères et de lignes directrices dans l'ADPE signifie que les enfants de l'Ontario n'ont pas le même accès aux services que ceux des autres provinces. Je crois absolument que le rôle du gouvernement doit être de définir la vision. Il incombera ensuite à chaque province de choisir les moyens à mettre en oeuvre pour donner suite à cette vision sous réserve d'exigences minimales dans tel ou tel secteur.

Le président: Merci, monsieur Cullen.

Je voudrais passer à Mme Bennett.

• 1255

Mme Carolyn Bennett: Monsieur Cullen, voulez-vous poser des questions sur les détails relatifs à la Société canadienne pour la conservation de la nature?

M. Roy Cullen: Nous pourrons le faire en privé, si le temps manque.

Mme Carolyn Bennett: J'ai quelques questions. Bien sûr, la première porte sur les coûts indirects de la recherche. Ce n'est pas la première fois que le comité entend un exposé sur les coûts indirects. C'est une expression un peu nouvelle, et je pense que la première fois que j'ai entendu parler de ce problème sérieux, c'était à la réunion des PDG des hôpitaux de Toronto, qui a eu lieu en juin. Si on fait la comparaison avec nos collègues de Fredericton et de Winnipeg, ils souhaitent recevoir de l'argent de la FCI.

À l'échelle nationale, il est un peu difficile pour nous, un caucus national, d'expliquer pourquoi il n'y a pas plus d'argent pour les coûts indirects, étant donné que certains voudraient bien avoir cet argent. Il s'agit bien d'un financement nouveau, n'est-ce pas? Ce sont les règles assorties à l'argent qui posent problème—vous voulez avoir la possibilité de payer les coûts indirects avec l'argent dont vous disposez—ou bien, comme vous le dites dans votre mémoire, voulez-vous que les IRSC établissent un fonds nouveau pour les 40 p. 100 qui sont attribués aux coûts indirects?

J'ai déjà déclaré publiquement que les fonds des IRSC consacrés à la recherche doivent être augmentés et passer à un milliard de dollars dans les meilleurs délais. Donc, je suppose que cela doit encore être la priorité. Comme mon collègue, je crains que les provinces et ceux qui financent les hôpitaux d'enseignement aient démissionné pour ce qui est des coûts indirects, particulièrement parce que lors du dernier budget, nous avons lutté fort pour obtenir du financement pour les dépenses en immobilisations—les équipements d'imagerie par résonance magnétique et toutes les autres choses pour lesquelles on recueillait des fonds auparavant—et en effet, le gouvernement a accordé un financement pour ces dépenses.

Je suis encore un peu inquiète: si vous demandez un nouveau financement pour les coûts indirects, de l'ordre de 40 p. 100, est-ce que ce financement sera déduit du milliard de dollars que vous demandez pour la recherche, par rapport aux IRSC et ces autres organismes? Voilà ma question sur la recherche. Les nouveaux crédits ne seront pas énormes, alors en voulez-vous pour les coûts indirects ou la recherche?

Mme Diane Lester: Je dois répondre en tant que représentante de l'Association for Healthcare Philanthropy, car Michael et moi sommes ici pour représenter cette association. Je ne représente pas Alan Bernstein ni les hôpitaux comme tels; je représente les bailleurs de fonds qui essaient de financer ces choses.

À mon avis, il faut revoir toute la formule de financement, parce que très bientôt, on n'acceptera plus les recherches canadiennes, même si elles sont excellentes et examinées par les pairs. C'est une question qui touche tout le pays, pas uniquement l'Ontario.

Vendredi, j'ai assisté à une rencontre à Ottawa qui a réuni des représentants de toutes les fondations des hôpitaux pour enfants du Canada. Si vous accordez une subvention au centre hospitalier pour enfants Janeway, la fondation de cet hôpital ne pourra pas recueillir le montant correspondant. Elle ne fait que des événements de tierces parties; elle n'a pas de dotation.

C'est une question fondamentale. Est-ce bon de dépendre à ce point des organismes de bienfaisance pour financer les soins de santé?

Mme Carolyn Bennett: D'accord.

Quant à la garde des enfants, croyez-vous qu'il est possible de miser sur les compétences et l'innovation sans offrir des services de garde d'enfants?

Mme Mary-Anne Bedard: Non.

Mme Carolyn Bennett: Pour ce qui est de ma deuxième question, ici en Ontario, nous avons passé beaucoup de temps, depuis 1995, à chercher des façons intéressantes et innovatrices de compenser pour l'idéologie de cette province. Très souvent, nous avons offert du financement pour lequel les communautés peuvent faire une demande directement, sans passer par la province. Avant, nous offrions de l'argent dans le cadre du RAPC, mais les dollars pour les sans-abri, la prévention de la criminalité, le logement...

Dans le domaine des soins de santé, avec le Transfert social canadien en matière de santé et de programmes sociaux, si nous voulions de l'argent pour la réforme des soins primaires, les technologies de l'information, ou d'autres bonnes initiatives, nous devions les mettre dans des catégories distinctes. Mais cette formule ne fonctionne pas avec l'IDPE. On ne peut pas choisir une initiative d'un groupe et une autre d'un autre groupe, comme on choisit les plats dans un restaurant chinois.

• 1300

Avons-nous besoin d'un fonds distinct pour les services de garde d'enfants auprès duquel les communautés peuvent faire une demande directement, dans le cadre de l'IDPE, ou comme la prochaine étape de l'IDPE?

Deuxièmement, lors de la rencontre précédente, un témoin nous a parlé des crédits d'impôt pour la formation en apprentissage. Devrions-nous récompenser les entreprises et les grandes sociétés qui offrent des services de garde d'enfants avec un crédit d'impôt?

Mme Mary-Anne Bedard: Je pense que nous avons quelque chose à dire toutes les deux, donc nous nous efforcerons d'être brèves.

Les mesures pour encourager les services de garde d'enfants en milieu de travail existent depuis de nombreuses années. Ces encouragements n'ont pas réussi autant que certains l'auraient voulu. Un bon nombre de pays en Europe sont en train d'offrir la garde d'enfants comme service public, parce que si vous offrez la garde d'enfants comme un service public, vous reconnaissez que tout enfant doit y avoir accès, et pas seulement les enfants dont les parents appartiennent à la population active. Donc, si vous cherchez un changement systématique au Canada, considérons la garde d'enfants comme un service public.

Comme nous avons eu beaucoup de discussions et de problèmes de compétences avec l'IDPE, je pense que c'est une excellente idée d'établir un fonds désigné auprès duquel les gens pourraient faire une demande directement. En Ontario, les municipalités sont chargées de fournir les services de garde d'enfants, et elles n'ont rien à dire quant à l'utilisation des fonds de l'IDPE. Il n'y a eu aucune consultation avec le gouvernement provincial sur cette question.

Je sais que plusieurs municipalités veulent explorer de nouvelles possibilités, et elles seraient ravies d'entamer des discussions avec le gouvernement fédéral dans le but d'avoir accès à certains fonds désignés.

Mme Susan Sperling: La part de l'Ontario était de 114 millions de dollars la première année, et les municipalités seraient très contentes d'avoir accès à une partie de ce financement pour raccourcir les listes d'attente et atténuer les difficultés engendrées par le fait qu'elles ne peuvent pas fournir un service public qui est d'une importance capitale, plutôt que de voir l'établissement de centres de la petite enfance dans la province—ce sont essentiellement des kiosques d'information—ou de voir 15 millions de dollars du financement qui a été alloué à cette fin se substituer à un investissement provincial dans une initiative déjà annoncée.

Je suis certaine qu'une telle tendance va se dégager; les municipalités vont se tourner directement vers le gouvernement fédéral.

Mme Carolyn Bennett: Nous avons certainement entendu la même chose la semaine passée à la réunion du groupe de travail sur les questions urbaines que nous avons eue ici.

Mme Susan Sperling: Oui, sans doute.

Le président: Merci.

Madame Guarnieri, une dernière question.

Mme Albina Guarnieri: Merci.

Ma question s'adresse à Mme Bedard ou à Mme Sperling. L'année passée, les familles canadiennes ont pu tirer avantage pour la première fois de la prolongation des prestations de maternité de l'assurance-emploi. Je crois comprendre que le taux d'acceptation du programme a été très élevé, et bon nombre de familles ont choisi de toucher toute une année de prestations.

Avez-vous des données qui indiqueraient si ce programme a réduit la demande pour les services de garde d'enfants en Ontario? Avez-vous l'impression que le programme l'a fait?

Mme Mary-Anne Bedard: Je crois que l'on est encore en train de recueillir les données. Certains nous ont dit que la majorité des femmes ne peuvent toujours pas avoir accès à l'assurance-emploi. Donc même si la durée des prestations est maintenant d'un an, elles ne peuvent toujours pas y avoir accès. Comme les prestations représentent 55 p. 100 de leur revenu, beaucoup de femmes n'ont pas les moyens de laisser leur emploi pendant toute une année.

Donc, les gens qui peuvent se permettre de profiter du programme sont très enthousiasmés. Mais à mon sens, le programme comporte encore certaines difficultés qui font en sorte que bon nombre de personnes ne peuvent pas en tirer parti. Je ne pense pas que la prolongation de la durée des prestations ait réduit de quelque façon les besoins en matière de services de garde d'enfants.

Mme Albina Guarnieri: Mais les données n'ont pas été recueillies pour en faire la preuve.

Mme Mary-Anne Bedard: Je n'ai pas les statistiques en question. À l'heure actuelle, je n'ai que des preuves anecdotiques.

Nous savons que la crise la plus urgente est au niveau de la garde de nourrissons.

Mme Albina Guarnieri: Oui, cela se comprend.

• 1305

Je pense que vous vous rendez compte que le programme d'assurance-emploi et la prestation fiscale pour enfants sont les mécanismes d'appui direct aux familles que préconise le gouvernement. Je soupçonne que vous diriez que ces programmes ne répondent pas aux besoins pour un financement précis pour les services de garde d'enfants. Le gouvernement pourrait investir un milliard de dollars dans un programme national de garde d'enfants, ou bien il pourrait dépenser ce même montant directement pour les familles qui ont de jeunes enfants. Selon vous, quelles démarches seraient plus avantageuses pour les familles canadiennes?

Mme Mary-Anne Bedard: C'est vraiment une question de comptabilité. Cet argent aide certaines familles et d'autres non. Il nous est impossible de quantifier cette aide.

Lorsqu'on investit dans un régime public d'aide qui reconnaît la petite enfance et ne fait pas de distinction entre ce que font les parents, un enfant est un enfant. Peu importe si la mère est sur le marché du travail ou non, ou si elle fait un bon salaire ou non, tous les enfants bénéficient d'une éducation de la petite enfance.

Toutes les recherches en matière de politique nous mènent vers un régime universel et indiquent que c'est la marche à suivre. La petite enfance ne dure vraiment pas longtemps. L'ensemble de la société en bénéficiera.

Au Québec, où les parents ont accès à des places en garderie à cinq dollars par jour, les gens qui les réclament le plus sont les parents qui ne travaillent pas mais qui veulent que leurs enfants aient l'occasion d'interagir et d'échanger avec d'autres enfants.

En Europe, dans les endroits où très peu de femmes sont sur le marché du travail, lorsque des programmes pour la petite enfance existent, tout le monde inscrit son enfant.

En Ontario, 99 p. 100 des gens envoient leurs enfants à la prématernelle. Si cela existe, les gens s'en servent. Ils en voient l'importance.

Personne ne vous demande combien vous gagnez lorsque vous inscrivez votre enfant à la prématernelle. Les gens vous demandent combien vous gagnez et pourquoi vous mettez votre enfant en milieu de garde. On passe un jugement.

Je crois que nous devons adopter un système qui valorise l'éducation de la petite enfance et les droits des enfants d'y avoir accès.

Mme Albina Guarnieri: Vous dites que vous ne pouvez pas faire la distinction entre ce que font les parents; évidemment ils seraient les mieux placés pour comprendre les besoins des enfants.

J'ai été frappée par les analogies que vous avez faites dans votre mémoire quant à la qualité des vêtements pour l'hiver, les bottes ou les sièges de voiture. Pour moi, si on n'a pas assez d'argent pour acheter ces choses-là, elles semblent être assez essentielles. J'ai été un peu déçue de voir ces exemples.

Mme Susan Sperling: Je ne dis pas que ces articles ne sont pas essentiels. Je ne parlais pas de la prestation fiscale pour enfants. Je parlais précisément de l'accord sur l'initiative de développement de la petite enfance et du montant d'argent que cela représente par enfant.

Pour revenir à la question que vous avez posée plus tôt à propos des prestations fiscales pour enfants et le financement des services de garde, les études montrent que la majorité des parents à qui on a présenté une gamme d'options a choisi un bon service de garde autorisé. Les milliards de dollars sont utiles et cet argent permet aux gens d'acheter des vêtements pour la neige et des sièges de voiture, etc.

Mais cela ne crée pas de places en garderie. L'infrastructure n'existe pas. Il n'y a pas de progrès à ce niveau-là. Notre tournée de la province nous a montré que même pour les parents qui peuvent se permettre de payer le plein prix il n'y a pas assez de place. Les places n'existent tout simplement pas. Je dépense 775 $ par mois pour un bon service de garde pour mon enfant qui a deux ans et demi.

Lorsqu'on dit qu'il y a des places dans des services de garde autorisés pour environ 10 p. 100 des enfants qui en ont besoin, on ne parle pas de places subventionnées. On parle de places dans un service de garde autorisé.

En Ontario, il y a 165 000 places autorisées, mais il y a 1,6 million d'enfants de moins de 12 ans dont les parents travaillent et qui ont besoin d'une place dans un service de garde hors du milieu familial. L'argent doit être investi dans des services de garde de qualité pour s'assurer qu'il y a de la place pour les enfants des parents qui choisissent cette option.

Mme Albina Guarnieri: Merci.

Le président: Merci beaucoup, madame Guarnieri.

Avant de partir, quelqu'un a mentionné les dispositions du régime fiscal américain qui porte sur les dons de bienfaisance. Est-ce que c'est ce que vous préférez? Est-ce ce que vous dites?

• 1310

M. Patrick Johnson: Nous disons, monsieur le président, selon mon interprétation, qu'il y a des dispositions du régime fiscal américain qui sont très avantageuses et qui n'existent pas au Canada. Compte tenu de l'impact positif de ces mesures en matière de dons philanthropiques, pourquoi ne pas examiner cette possibilité? Les mesures pour les dons de titres, présentées au Canada en 1997, existent depuis fort longtemps aux États-Unis. Je crois donc qu'il y a encore des dispositions du régime américain que nous pouvons examiner et dont nous pourrions apprendre quelque chose.

Le président: À certains endroit. Vous voulez bien accepter une réponse nord-américaine à la convergence des politiques relatives aux dons de bienfaisance. C'est ce que vous dites, n'est- ce pas? Vous voulez emprunter les meilleurs éléments de ce régime et les incorporer au nôtre.

M. Patrick Johnson: Monsieur le président, je crois que l'approche canadienne a toujours été ainsi, c'est-à-dire d'examiner les meilleures possibilités.

Le président: Mais il est important de vous le faire dire pour les fins du procès-verbal.

Merci beaucoup. Comme j'ai déjà dit, cette table ronde a été excellente à mon avis. Lorsqu'on reçoit des commentaires de la part des Canadiens, ces idées se retrouvent dans les mesures prises par le gouvernement en matière de politique publique. C'est très important, car vous voyez la démocratie à l'oeuvre. Nous allons poursuivre cette approche encore longtemps et nous savons que notre taux de réussite est assez perceptible car nous mesurons nos progrès à cet égard.

J'aimerais vous remercier au nom des membres du comité. Nous allons prendre une des longues pauses de déjeuner auxquelles nous sommes habitués ici au Parlement, c'est-à-dire 15 minutes. Nous reprendrons nos travaux à 13 h 30.

La séance est levée.

Haut de la page