Passer au contenu
;

FAIT Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain

37e LÉGISLATURE, 1re SESSION

Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le jeudi 9 mai 2002




¿ 0910
V         La présidente (Mme Jean Augustine(Etobicoke--Lakeshore, Lib.))

¿ 0915
V         M. Michael Hurst (maire, Ville de Windsor)

¿ 0920
V         

¿ 0925
V         La présidente
V         

¿ 0930
V         M. Comartin
V         M. Michael Hurst
V         La présidente
V         M. John Tofflemire (commissaire à l'infrastructure routière, Windsor)

¿ 0935
V         M. Joe Comartin
V         M. John Tofflemire
V         Mr. Comartin
V         M. Michael Hurst
V         M. Joe Comartin

¿ 0940
V         M. Michael Hurst
V         M. John Tofflemire
V         La présidente
V         M. John Tofflemire
V         La présidente
V         M. Jerry Pickard (Chatham--Kent Essex, Lib.)

¿ 0945
V         M. Pickard

¿ 0950
V         La présidente
V         M. Michael Hurst
V         

¿ 0955
V         M. Jerry Pickard
V         M. Michael Hurst
V         M. John Tofflemire
V         

À 1000
V         M. Pickard
V         La présidente

À 1005
V         M. Michael Hurst
V         La présidente
V         M. Michael Hurst
V         La présidente
V         M. Fritz Rieger (professeur associé de gestion, Odette School of Business, Université de Windsor)

À 1010
V         

À 1015
V         La présidente
V         M. Fritz Rieger
V         

À 1020
V         

À 1025
V         La présidente
V         M. Comartin
V         M. Fritz Rieger
V         M. Comartin
V         

À 1030
V         M. Fritz Rieger
V         Mr. Comartin
V         M. Fritz Rieger
V         

À 1035
V         La présidente
V         M. Jerry Pickard
V         M. Fritz Rieger
V         

À 1040
V         M. Pickard
V         La présidente
V         

À 1045
V         M. Fritz Rieger
V         La présidente

À 1050
V         M. Fritz Rieger
V         La présidente
V         Mme Linda Smith (présidente, Chambre de commerce de Windsor et du district)
V         

À 1055
V         

Á 1100
V         

Á 1105
V         La présidente
V         M. Alfie Morgan (membre du conseil d'administration de la Chambre de commerce de Windsor et du district)
V         

Á 1110
V         La présidente
V         M. Alfie Morgan

Á 1115
V         La présidente
V         M. Joe Comartin
V         La présidente
V         M. Joe Comartin
V         La présidente
V         M. Joe Comartin
V         La présidente
V         Mme Linda Smith
V         M. Joe Comartin
V         La présidente

Á 1120
V         M. Jerry Pickard
V         

Á 1125
V         M. Alfie Morgan
V         M. Jerry Pickard
V         M. Alfie Morgan
V         Mme Linda Smith
V         La présidente
V         Mme Linda Smith

Á 1130
V         M. Jerry Pickard
V         Mme Lori Shaloub (directrice de la politique publique et des affaires extérieures, DaimlerChrylser Canada; Chambre de commerce de Windsor et du district)
V         M. Pickard
V         

Á 1135
V         Mme Lori Shaloub
V         M. Jerry Pickard
V         La présidente
V         M. Jim Drummond (membre, conseil d'administration, Chambre de commerce de Windsor et du district)
V         La présidente
V         










CANADA

Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international


NUMÉRO 081 
l
1re SESSION 
l
37e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 9 mai 2002

[Enregistrement électronique]

¿  +(0910)  

[Traduction]

+

    La présidente (Mme Jean Augustine(Etobicoke--Lakeshore, Lib.)): Nous avons le quorum, nous pouvons commencer.

    Ceci est une réunion du Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international, conformément au paragraphe 108(2) du Règlement qui tient des audiences publiques sur l'étude de l'intégration nord-américaine et le rôle du Canada face au nouveau défi que pose la sécurité et sur l'étude du programme du sommet du G-8 de 2002.

    Permettez-moi d'accueillir nos témoins. Nous avons le maire de Windsor, M. Michael Hurst et il est accompagné de son commissaire à l'infrastructure routière, M. J.B. Tofflemire. Messieurs, soyez les bienvenus.

    Messieurs, nous poursuivons à Windsor l'étude de questions très importantes, le rôle du Canada sur la scène internationale et le rôle du Canada sur la scène nord-américaine.

    Nous estimons essentiel de consulter directement les citoyens, des gens comme vous, d'un bout à l'autre du pays sur les enjeux clés de la politique étrangère, les enjeux du sommet du G-8 et les enjeux de nos relations avec nos voisins du continent nord-américain.

    Comme vous le savez, le Canada est le président du G-8 cette année. Nous accueillerons le sommet à la fin du mois de juin à Kananaskis, en Alberta. En plus des problèmes liés à la situation économique mondiale et à la lutte internationale contre le terrorisme, le Canada a décidé de donner une priorité toute particulière à un plan d'action pour l'Afrique, fondé sur l'initiative africaine pour un nouveau partenariat de développement.

    Les audiences de notre comité regroupent les questions portant sur le programme du sommet du G-8 et sur l'évolution de nos relations nord-américaines, pour des raisons de temps et de budget. Nous avons déjà tenu des audiences dans la région de l'Atlantique, au Québec, ainsi qu'à Ottawa.

    Cette semaine, pour mener à sa conclusion cet exercice national, notre comité s'est scindé en deux. Nous avons été au Manitoba. Nous étions à Winnipeg, ensuite à Toronto et aujourd'hui à Windsor. L'autre groupe a tenu ses audiences dans les provinces le plus à l'ouest.

    Pour ce qui est des questions concernant le G-8, notre comité déposera son rapport d'ici la fin du mois, avant les dernières réunions préparatoires pour le sommet. Pour ce qui est de l'étude nord-américaine, tous les aspects des liens canado-américains, canado-mexicains et trilatéraux seront examinés, et nous prévoyons de déposer notre rapport à l'automne.

    Certains d'entre vous ont peut-être lu l'article du professeur Clarkson dans le Globe and Mail qui accusait le comité d'avoir déjà tiré ses conclusions. Permettez-moi de vous assurer que rien n'est décidé et que tout peut encore être discuté. Nous réfléchissons à nos recommandations. Rien n'est décidé.

    Tout ce que vous nous direz aujourd'hui est enregistré, vous devez d'ailleurs vous en douter en voyant le matériel qui se trouve dans cette salle, et sera diffusé sur le site Web de notre comité. Nous ferons des recommandations au gouvernement. Vos recommandations seront incluses sur notre site avec celles des autres témoins. Nous faisons ce qu'il faut, en débattant avec vous aujourd'hui, pour que ce que vous nous dites puisse être lu et relu quand nous préparerons notre rapport.

    Monsieur le maire, permettez-nous de vous remercier d'avoir pris le temps de vous joindre à nous ce matin. Je sais que l'emploi du temps d'un maire est très chargé.

    Vous avez environ 10 à 15 minutes pour faire un exposé et ensuite nous passerons au dialogue.

¿  +-(0915)  

+-

    M. Michael Hurst (maire, Ville de Windsor): Merci, madame la présidente, mesdames et messieurs.

    Bonjour et bienvenue à Windsor la magnifique. Je suis d'accord avec vous, il pourrait faire un peu plus beau. Le soleil devrait faire son apparition dans à peu près deux heures. J'espère que vous serez encore en ville.

    Permettez-moi de commencer par vous dire que notre communauté vous sait gré de pouvoir vous exprimer ses opinions et ses préoccupations. Cela fait longtemps que nous sommes reconnus comme étant le point de passage à la frontière entre le Canada et les États-Unis d'Amérique le plus fréquenté et le plus vital.

    J'ai l'honneur d'être le maire de la ville de Windsor depuis 11 ans, et pendant tout ce temps et avant—et ce sera certainement encore le cas pour longtemps—il y a toujours eu une constante immuable, à savoir le rôle pivot que notre communauté joue au niveau des interactions commerciales et sociales entre notre nation et les États-Unis d'Amérique.

    Permettez-moi de citer quelques preuves à l'appui de ce commentaire général. Si notre région géographique, la péninsule de Windsor et du comté d'Essex, était une province du Canada, son produit provincial brut occuperait le cinquième rang. Notre produit intérieur brut est de 25 milliards de dollars par an, un des PIB les plus élevés par habitant du pays.

    J'ai dit que notre région jouait un rôle de pivot et je n'entendais pas simplement par là une sorte de point d'équilibre entre le Canada et les États-Unis, bien que cela soit certainement aussi le cas. Mais en plus de l'économie de la région Windsor-Essex et de ses liens essentiels avec l'économie du Sud-Est du Michigan, il y a les économies provinciales et internationales.

    Ces trois éléments combinés forment, d'après moi, un exemple classique d'intégration. Quelque 90 p. 100 de nos exportations vont aux États-Unis, et cette énorme part de notre commerce représente 40 p. 100 de toute la richesse du Canada. Le Canada est le meilleur client des États-Unis et vice versa. Les relations commerciales de nos deux pays sont les plus exhaustives et les plus intégrées du monde entier.

    Le fait qu'un bon tiers des échanges commerciaux entre le Canada et les États-Unis passe par nos communautés a des conséquences primordiales pour les habitants de la région de Windsor-Essex. En termes d'argent, cela représente 300 millions de dollars par jour, 365 jours par an. Et je crois que cela nous donne toutes les qualifications nécessaires pour discuter des défis que pose en permanence et quotidiennement la gestion d'activités commerciales de cette ampleur.

    Au cours des 100 dernières années, Windsor a gagné—et à juste titre, j'ajouterais—le titre de capitale de l'automobile du Canada. Je le rappelle parce que selon une étude du Centre de recherche et développement de l'automobile publiée en janvier dernier, «il y a une interdépendance sans précédent» entre le Canada et les États-Unis d'Amérique dans le secteur de l'automobile.

    En termes de trafic routier, 12 000 camions passent quotidiennement la frontière entre Windsor et Détroit, et beaucoup de ces camions transportent des pièces détachées et des composantes vitales pour les chaînes de montage automobile qui fonctionnent en flux tendu.

    Il ne faut surtout pas oublier que notre industrie automobile intégrée assure un emploi sur sept au Canada et un emploi sur six ici en Ontario. Je ne veux pas vous noyer sous un flot de statistiques, mais il ne sera jamais suffisamment rappelé que l'industrie de l'automobile est et reste le secteur industriel le plus important du Canada.

    Ce secteur rapporte 120 milliards de dollars canadiens par an, dont 97 p. 100 sont sous forme d'exportations vers les États-Unis. Ce qui m'amène à parler encore une fois de «pivot». Notre communauté est le point de contact et de transfert, le lieu de passage privilégié entre les secteurs canadien et américain de cette industrie intégrée et désormais presque en flux ininterrompu.

    Près de 150 milliards de dollars passent la frontière à Windsor chaque année. Je dis «passent» et c'est justement la manière dont ils passent dont j'aimerais tout particulièrement vous parler ce matin. Ce flot commercial de biens et de personnes emprunte un réseau routier, un tunnel international sous la rivière et un pont international vieux de 70 ans. Nous avons aussi un tunnel ferroviaire qui a pratiquement un siècle. Il a été construit avant même qu'il y ait des automobiles et encore moins une industrie automobile.

¿  +-(0920)  

+-

     Le problème, c'est que malgré que nous soyons le point de passage le plus fréquenté et le plus vital entre le Canada et les États-Unis, aucune nouvelle infrastructure pour prendre en compte cette réalité n'a été construite depuis environ 1930. La région de Windsor--Essex doit faire face aux besoins du XXI siècle avec notre infrastructure routière datant de la grande dépression.

    L'énorme volume de biens et de personnes circulant entre le Canada et les États-Unis essaie de se frayer péniblement un passage en empruntant un pont saturé et congestionné, une route à deux voies sur la rivière et un tunnel ferroviaire tout droit sorti de l'âge de la vapeur. C'est une situation qui a fini par nous envahir. Nous avons évolué au coup par coup. Bien que nous fassions de notre mieux pour que cela marche, c'est devenu terriblement difficile, c'est le moins qu'on puisse dire. C'est un peu comme si après avoir fabriqué un moteur merveilleux d'économie et d'efficacité, nous avions réduit au maximum l'arrivée d'essence. Madame la présidente, c'est aussi grave que cela.

    La route qui relie le réseau de la 401 au réseau inter-États américain n'est pas du tout une autoroute. c'est la Huron Church Road. Au départ, c'était une simple rue de Windsor, avec des maisons, des magasins, des écoles et des églises, des étales de marchands et des parcs, tout au long des quatre milles entre la 401 et le pont Ambassador. La Huron Church Road est congestionnée. Elle est dangereuse. Elle est gravement surchargée. Et comme la majorité de ses usagers vous le diront, je crois, on n'y avance pas.

    La ville de Windsor réclame depuis longtemps un branchement direct entre 401 et la 75 dans le sud du Michigan. Comme je l'ai déjà dit, 12 000 camions par jour traversent la frontière. Selon nous, un branchement direct entre le Canada et les États-Unis est essentiel pour l'économie internationale.

    Comme vous le savez, le Canada et les États-Unis se sont mis d'accord sur un plan en 30 points pour gérer la frontière. Nous applaudissons cette initiative des deux gouvernements. Il sera beaucoup plus facile d'appliquer ce programme nécessaire s'il y a un nouveau point de passage entre Windsor et Détroit, pour la première fois depuis plus de 70 ans.

    Il y a des progrès. La ville de Windsor constate avec grand plaisir que les quatre niveaux d'autorité prennent des actions décisives. Les gouvernements du Canada et des États-Unis et les gouvernements de la province de l'Ontario et de l'État du Michigan ont accepté de participer en coopération à une évaluation environnementale binationale pour déterminer l'emplacement d'un nouveau ou de nouveaux passages frontaliers. Notre économie aura enfin ce qu'elle réclame...depuis 100 ans. Cet exercice rigoureux et complexe a tout notre soutien. Nous souhaitons que cette évaluation se fasse le plus rapidement possible tout en tenant compte de certaines considérations indispensables. Comme vous le savez, des modèles différents de passages frontaliers ont également été suggérés. Nous espérons qu'ils seront analysés dans le contexte de cet exercice binational

    Madame la présidente, mesdames et messieurs, encore une fois, permettez-moi de vous exprimer ma gratitude pour m'avoir offert la possibilité de vous présenter les préoccupations et les propositions de la ville de Windsor. Vous êtes venus à un endroit où nous traversons la frontière internationale depuis 1747. Dans un certain sens, nos relations avec nos amis américains de la rive nord de la rivière Detroit—et ici les États-Unis sont au nord du Canada—sont si étroits et si traditionnels qu'ils sont pratiquement considérés pour acquis...mais peut-être plus autant depuis le 11 septembre.

    Les délibérations d'aujourd'hui peuvent être la pierre angulaire de la consolidation d'une ère nouvelle et encore plus efficace pour l'industrie automobile, notre commerce et l'harmonie sociale. Veuillez accepter notre gratitude pour cette tribune et pour l'intérêt que vous montrez pour sa situation vitale mais remédiable.

    Merci, madame la présidente, mesdames et messieurs.

¿  +-(0925)  

+-

    La présidente: Merci, monsieur le maire. Et merci de ce mémoire qui résume si bien la situation de votre région.

    Je suis certaine que vous savez que les représentants de cette région font tout pour s'assurer que le gouvernement, notre caucus, et ceux qui ont des responsabilités n'ignorent rien de vos problèmes de congestion. C'est une question qui revient pratiquement sur le tapis toutes semaines, surtout lors de notre caucus. Jerry ne me contredira certainement pas. C'est une question qui ne cesse de revenir sur le tapis.

+-

     Deuxièmement, je tiens également à ce que vous sachiez que cet après-midi nous profiterons de notre visite, avec nos attachés de recherche et d'autres spécialistes de notre personnel, pour retrouver Pat Moran, qui a pris des dispositions pour que nous puissions voir de nous-mêmes comment fonctionnent les divers partenariats en matière de commerce et de douanes. Nous visiterons aussi les installations du point d'entrée, de CIC et de l'ADRC, si bien que nous pourrons faire un tour assez complet de la question.

    Troisièmement, un groupe parlementaire canado-américain—un groupe de membres du congrès et du Sénat américain et des sénateurs et des parlementaires canadiens—doit se réunir ce week-end et il y aura donc amples occasions de discuter de ces questions.

    Vous avez si bien présenté vos arguments, avec tant de concision et de clarté que Jerry et les autres membres du comité voudront y revenir. Comme je l'ai dit tout à l'heure, la transcription de cette réunion sera intégrée à nos discussions. Je vous remercie.

    Selon notre procédure habituelle, nous procéderons par un tour de table pendant lequel les députés feront des commentaires, vous poseront des questions et vous demanderont des éclaircissements. Généralement, nous commençons par l'opposition et je demanderai donc à M. Comartin de commencer. Nous voulons que votre témoignage soit le plus instructif pour nos délibérations. Merci.

    Monsieur Comartin.

¿  +-(0930)  

+-

    M. Joe Comartin (Windsor—St. Clair, NPD): Merci, madame la présidente.

    Tout d'abord, l'annonce faite par les quatre niveaux de gouvernement—deux de notre côté et deux du côté américain—a été faite en mai dernier et le nom de l'expert-conseil embauché n'a été annoncé qu'il y a environ quatre semaines ce qui, d'après moi, n'est pas une coïncidence vu qu'il doit y avoir une élection partielle dans la circonscription que traverse cette route. Vous n'êtes pas obligé d'être d'accord avec moi.

    Vous a-t-on donné des explications sur les raisons pour lesquelles il a fallu 11 mois pour embaucher l'expert qui sera chargé de conduire la phase initiale de cette étude? Comprenez-vous le contenu de cette étude? L'administration de la ville ou le conseil de Windsor participeront-ils d'une façon quelconque à la phase initiale de planification ou à l'étude?

+-

    M. Michael Hurst: Pour être tout à fait franc avec vous, nous avons été assez déçus qu'il faille attendre presque un an pour la nomination d'un expert. Je ne sais pas exactement pourquoi il a fallu tout ce temps, mais le plus important est que cet expert ait été engagé et que le processus soit lancé. Nous en sommes tout à fait contents.

    Nous avons saisi pratiquement toutes les occasions pour encourager le démarrage du processus dans les meilleurs délais. Nous avons rappelé la nécessité, pour lancer le processus, d'engager les services d'un expert pour la première phase et c'est finalement ce qui a été fait. C'est un signe positif. La première phase est un processus long et ardu qui doit être entrepris avant de pouvoir être en mesure de réaliser un passage ou des passages frontaliers supplémentaires entre Windsor et Détroit. Nous sommes heureux que le processus ait finalement commencé.

    Il est évident que le pilote de ce processus n'est pas la ville de Windsor. Nous avons été constamment sollicités. Nous sommes persuadés que nos préoccupations et nos points de vue particuliers seront pris en compte. La meilleure description que je pourrais faire, c'est que nous sommes une partie très intéressée qui aura ample possibilité de faire des propositions, de donner des conseils et d'être intégrée à la première phase du processus pour le faire avancer.

    John Tofflemire est intimement impliqué depuis le premier jour et il a peut-être des informations plus détaillées à vous donner.

+-

    La présidente: Monsieur Tofflemire.

+-

    M. John Tofflemire (commissaire à l'infrastructure routière, Windsor): Merci, madame la présidente et monsieur le maire.

    J'ai déjà rencontré officieusement les membres du groupe d'experts. Mon personnel, en passant, est en train ce matin de préparer des données, de réunir certaines des études que nous avons déjà faites sur la question et je leur ai dit que pour nous c'était la priorité des priorités.

    Le problème, cependant—si je peux faire quelques commentaires sur le calendrier, ce qui nous ramène à la question de M. Comartin—c'est que cette situation ne date pas d'aujourd'hui. Elle est la conséquence d'une carence de planification qui dure depuis 40 ou 50 ans. Depuis la construction de la 401, le dossier de planification sur le problème de la frontière est resté totalement inactif.

    Et c'est une planification qui prend du temps. Il n'y a pas de raccourci possible. Il faut le faire et le plus tôt nous commencerons, le plus tôt nous y consacrerons toutes nos énergies, mieux ce sera pour tous. C'est extrêmement important.

¿  +-(0935)  

+-

    M. Joe Comartin: Rapidement, et toujours sur ce même sujet, et ensuite j'aimerais passer à un autre, je ne sais pas si c'est une personne ou un cabinet qui a été engagé, mais cet expert vous a-t-il donné une idée de la durée probable de cette phase initiale?

+-

    M. John Tofflemire: J'ai cru comprendre que pour la première phase il faudra compter sur un an ou deux, 18 mois ou deux ans, mais ils m'ont indiqué qu'ils recherchent activement le moyen d'accélérer le processus et que les partenaires souhaitaient raccourcir les délais au maximum.

+-

    M. Joe Comartin: À propos du plan en 30 points contenu dans le protocole entre notre gouvernement fédéral et le gouvernement fédéral américain, la ville de Windsor a-t-elle été consultée sur les problèmes spécifiques que lui pose le fait d'avoir sur sa commune ce passage de frontière crucial? Vous a-t-on consulté à propos d'un de ces 30 points, vous a-t-on demandé de fournir des renseignements ou avez-vous participé à des négociations sur les travaux préliminaires indispensables?

+-

    M. Michael Hurst: Nous avons été consultés sur le plan en 30 points. Nous avons pu donner notre opinion sur plusieurs des points de ce plan.

    Je dois dire que Susan Whelan nous a beaucoup aidés en nous faisant souvent participer aux discussions sur ce plan. Elle a organisé pour moi—et je crois d'ailleurs que Jerry était aussi là—une réunion avec la ministre, Mme Caplan, qui a été fort instructive et qui nous a permis de mesurer le sérieux des efforts pour que les 30 points du plan finissent par être tous appliqués.

    Certaines mesures devront être prises d'une manière assez urgente et d'autres nécessiteront un complément de travail avant d'être appliquées, mais d'une manière générale, monsieur Tofflemire, je crois que nous sommes satisfaits du degré d'interaction de ces derniers temps. Encore une fois, je suis persuadé, si je m'en tiens aux commentaires de Susan Whelan et de la ministre, Mme Caplan, que nous serons constamment consultés sur la meilleure méthode de mise en oeuvre des composantes du plan.

+-

    M. Joe Comartin: Nous ne cessons de débattre à Ottawa depuis le 11 septembre de la nécessité des mesures de sécurité suite à cet incident sans pour autant perturber, sur le plan économique, la fluidité des échanges commerciaux. Je vous le signale simplement au cas où vous auriez des commentaires à faire sur ce que le fédéral pourrait faire, selon vous, pour que ces deux aspects soient pris en compte et traités d'une manière raisonnable.

¿  +-(0940)  

+-

    M. Michael Hurst: Pour commencer, il n'est pas facile de faire la part des choses, il n'y a pas de solution facile et nous n'avons pas de baguette magique. Mais il me semble que concentrer l'effort sur ce que je qualifierais de voyageur à haut risque ou de camion à haut risque serait déjà un bon début. Il y a littéralement des milliers de personnes qui franchissent quotidiennement les frontières et qui ne présentent, même en faisant preuve de beaucoup d'imagination, ni risque ni menace. Je crois qu'il existe déjà depuis un certain temps sur le marché une technologie qui permettrait de faire franchir la frontière à ces voyageurs d'une manière relativement simple, dégageant ainsi des ressources que nous pourrions consacrer aux travailleurs présentant plus de risques, si on veut les appeler ainsi. Et encore une fois, il existe sur le marché une technologie qui permet de déterminer qui peut ou ne doit pas emprunter la voie d'accès à franchissement rapide.

    Il faut faire la part des choses, mais ce n'est pas aisé. Et il faut peut-être faire plus appel à la technologie que nous ne l'avons fait jusqu'à présent. Il faudra investir quelques dollars pour utiliser cette technologie, mais nous entendons beaucoup parler de frontière «intelligente». Et, bien entendu, cela sous-entend une utilisation plus massive de la technologie, de plus gros investissements dans la technologie pour nous aider à faire la différence entre les voyageurs à faible risque et les voyageurs à haut risque.

    John vous aviez quelque chose à ajouter?

+-

    M. John Tofflemire: J'appuierais ce que vient de dire le maire en ajoutant que si nous voulons faire la part des choses entre la libre circulation et les questions de sécurité, le problème c'est que nous sommes arrivés au point de saturation. Toute mesure de sécurité supplémentaire a chez nous une incidence largement supérieure sur la fluidité du passage à la frontière que n'importe où ailleurs. Trouver un juste équilibre est donc ici plus critique qu'ailleurs. En conséquence, il faut que les solutions à court terme soient axées sur la technologie.

    Nous y sommes tout à fait favorables. C'est tout simple, il faut l'espace et les infrastructures. Par exemple, pour rétablir les anciennes inspections douanières, il faut de l'espace, des voies d'accès, toute une série d'autres services et d'installations qui ne sont pas actuellement dans le système. L'impact sur le trafic est immédiat et important. L'évaluation de l'environnement dans la planification est donc inévitable.

    Pour améliorer la situation à court terme, il faut chercher du côté de la technologie, des systèmes de prédédouanement, des nouvelles méthodes de gestion du commerce international qui ne vous obligent pas à investir immédiatement dans ces infrastructures qui, en plus, coûtent très cher. J'estime que la technologie est aussi la solution à long terme. Il y a donc une certaine synergie. Si vous donnez la priorité à la technologie, nous en recueillerons les bénéfices pendant tout le prochain siècle, alors que des solutions liées à l'infrastructure nous poseront plus de problèmes à court terme et seront moins durables.

+-

    La présidente: Merci.

+-

    M. John Tofflemire: J'en aurais encore beaucoup à dire mais...

+-

    La présidente: C'est à M. Pickard et ensuite ce sera de nouveau à vous.

    Monsieur Pickard.

+-

    M. Jerry Pickard (Chatham--Kent Essex, Lib.): Merci beaucoup, madame la présidente.

    Monsieur le maire, je tiens encore une fois à vous féliciter de cet excellent exposé. Ce n'est pas la première fois. Quand le ministre M. Pettigrew est venu, vous lui avez fort bien exposé la situation de la municipalité et où les choses devraient en être pour le pont. Il en a été de même, je crois, lors de la visite de Mme Caplan et de M. Gray. Le comité de l'immigration est aussi venu pour examiner des questions très corollaires. J'ai donc eu plusieurs fois l'occasion de vous entendre si bien exprimer le point de vue de votre ville d'une manière tout à fait positive, selon moi.

    Je considère personnellement le pont Ambassador et le passage de la frontière à Windsor comme un corps fluide et vivant. On peut examiner un corps et considérer que tout va bien quand tout d'un coup il y a un blocage juste avant le coeur et un pontage est nécessaire. Nous nous trouvons dans la même situation sauf qu'au lieu de sang, ce sont des biens et des services qui ont du mal à circuler.

    C'est un élément très important, très positif pour le secteur de l'automobile, le secteur manufacturier, les transports, la circulation des biens et des personnes et le tourisme. Toutes ces activités ont un effet majeur, et la conjoncture économique de Windsor dépend énormément de ses relations avec le Michigan, l'Ohio et les autres États voisins des États-Unis.

    Quand je réfléchis au problème, je me dis qu'il y a deux aspects. Vous y avez fait allusion. Le premier, c'est le court terme: il faut voir ce qui peut être fait à court terme. Et le deuxième, c'est le long terme. BIen sûr, comme vous le savez et comme tout le monde le sait, plusieurs solutions ont été proposées, des solutions à long terme différentes en fonction des groupes qui les proposent.

    Or, nous avons un gros problème au niveau de la livraison des marchandises qui doivent être livrées à temps—le concept du flux tendu—il faut donc absolument faire quelque chose. Selon moi, la meilleure option est le prédédouanement. Les compagnies Ford, Chrysler et General Motors ont toutes fait des recommandations visant à faciliter ces livraisons en flux tendu afin que le moteur fabriqué à Windsor soit livré dans l'heure à l'usine de Détroit. C'est primordial.

    Le prédédouanement semble être la meilleure solution—non seulement pour les biens mais aussi pour les personnes. D'aucuns prétendent que seul le prédédouanement permettra d'accélérer la livraison en flux tendu et facilitera la libre circulation des personnes. Il est possible que ceux qui ne bénéficieront pas de ce prédédouanement en pâtissent. Il est possible qu'ils aient à attendre un peu plus longtemps à la frontière, mais ce n'est rien en comparaison des besoins des entreprises de nos deux économies.

    D'autres suggestions ont été faites. Il y a les nouvelles technologies. Lors de notre visite, nous observerons le temps qu'il faut au personnel à la frontière pour relever le numéro des plaques d'immatriculation, identifier des véhicules, remplir toutes les tâches que doivent remplir les agents des douanes et de l'immigration.

    Mes déplacements m'ont permis de mesurer la situation dans l'Ouest du Canada. Lorsque je suis revenu à Windsor, je me suis immédiatement rendu compte que le volume du trafic sur le pont Ambassador et dans le tunnel dépasse tout ce qu'on peut trouver dans l'Ouest du Canada. Il faut bien faire attention à ce que la Huron Line Road ne ressemble pas à un parc de stationnement mais à une vraie route. Il est indispensable de raccorder la 401 au réseau américain, je suis tout à fait d'accord avec vous.

    C'est le plan à long terme qui me pose des problèmes. Un deuxième pont sur la rivière est possible, tout comme le déplacement des sites comme John l'a suggéré. L'emplacement de ces sites est très important pour que le prédédouanement puisse être fait correctement et que les marchandises puissent facilement traverser la frontière.

¿  +-(0945)  

+-

     Il y a un autre problème critique à mon avis et j'aimerais savoir ce que vous en pensez. Les files d'attente que je vois du côté canadien pour les gens qui se rendent aux États-Unis sont souvent beaucoup plus longues que dans l'autre sens. Il faudrait, pensent certains, dire à nos homologues américains de rappeler à leurs agents des douanes et de l'immigration la nécessité de laisser circuler plus rapidement les biens et les personnes. Il y a tout juste un mois j'étais sur la Huron Line Road. Il y avait quatre kilomètres de file d'attente. Généralement, c'est pendant la saison touristique que cela arrive.

    Avez-vous constaté une amélioration, ou semblerait-il...? J'ai l'impression que depuis un mois ou deux la situation a empiré. Je crois que nous avons besoin du soutien et de l'appui de ce comité, des parlementaires qui rendent visite à leurs homologues à Washington, et de nos ministres pour essayer au moins que ces marchandises passent la frontière dans les deux sens le plus rapidement possible.

    J'aimerais également que vous me disiez ce que vous pensez de ce qui se passe du côté canadien. Faisons-nous autant que nous le devrions sur le plan des effectifs et des installations pour faciliter l'entrée des marchandises au Canada? Si nous ne le faisons pas, il nous faudra en parler à nos homologues.

¿  +-(0950)  

+-

    La présidente: Monsieur le maire.

+-

    M. Michael Hurst: Il y a quelques mois nous avons uni nos forces à celles de la ville de Détroit, des membres du Sénat du Michigan et des représentants du Congrès pour persuader le gouvernement américain.

    Jerry, cela fait des années que l'importance de la frontière du Nord est négligée. Une analyse des discours des dernières années démontrerait que lorsque les Américains parlent de problèmes de frontière, ils ne parlent jamais de la frontière du Nord. Ils parlent de la frontière entre les États-Unis et le Mexique. En conséquence, je crois que beaucoup de gens ont perdu de vue l'importance critique de cette frontière du Nord pour l'économie nationale américaine. Donc, chaque fois que des crédits ont été accordés par le gouvernement fédéral du côté américain, à 99 p. 100 c'était pour la frontière du Sud.

    Les événements du 11 septembre nous ont offert la possibilité d'unir nos forces pour convaincre les décideurs américains, au niveau fédéral, qu'il était de leur intérêt de ne plus négliger la frontière du Nord. Conséquemment, nous avons pu jouer un rôle dans l'adoption d'une loi prévoyant des crédits un peu plus généreux pour la frontière du Nord, pour les services de douane et d'immigration, des services de naturalisation, et les services liés à la sécurité, etc, etc.

    Ils ont donc bénéficié de quelques crédits supplémentaires qui leur ont permis d'embaucher du personnel supplémentaire de première ligne du côté américain. Je suppose que la question est de savoir si ces crédits seront renouvelés. Bien entendu, c'est ce que nous espérons. Sont-ils suffisants? Personnellement, je ne le pense pas. Les crédits ne sont toujours pas suffisants pour embaucher le personnel nécessaire tous les jours du côté américain.

    John Tofflemire vous dira que notre système est à saturation. Si un élément quelconque du système retarde la procédure, les files d'attente s'allongent. Si les modalités du côté américain prennent un temps déraisonnable, les conséquences se font ressentir au niveau du pont Ambassador, tout le long de la Huron Church Road et de la 401, etc.

    Du côté canadien, nous avons connu des problèmes analogues, mais pas aussi importants, il y a quelques années. Nous les avons portés à l'attention du gouvernement fédéral. Je dois avouer que le gouvernement fédéral y a mieux répondu que nous ne nous y attendions. On peut dire que du côté canadien le problème est réglé, mais du côté américain la bataille continue.

+-

     Si vous le permettez, madame la présidente, j'aimerais que M. Tofflemire nous dise un mot sur la saturation du système et qu'il nous en explique un peu plus en détail les conséquences.

    Si un de ces gros camions crève un pneu sur le pont Ambassador, les conséquences sont assez incroyables et infinies. L'embouteillage commence dans les rues de la ville, pour se poursuivre tout le long de la Huron Church Road et sur la 401. La liste n'en finit plus. Les résidents et les propriétaires de petites entreprises tout le long de la Huron Church Road ne cessent de nous appeler.

    Laissez-moi vous dire aussi, madame la présidente, que les représentants des trois gros constructeurs n'hésitent pas à nous appeler. Bien entendu, ils fonctionnent sur le principe du flux tendu et il leur faut leurs pièces détachées à temps. Pour eux, c'est très grave.

    C'est aussi très grave pour nous tous, bien entendu, parce que nous voulons que notre industrie automobile fonctionne, et fonctionne dans les meilleures conditions. Il n'y va pas seulement de l'intérêt économique de Windsor et du comté d'Essex, mais aussi de celui de la province. Nous allons même jusqu'à dire qu'il y va aussi de l'intérêt de l'économie nationale.

    J'ai été assez long mais je pense avoir répondu à chacune de vos questions.

¿  +-(0955)  

+-

    M. Jerry Pickard: C'est parfait.

    Puis-je vous poser encore une question, monsieur le maire? Je sais que vous écoutez attentivement les commentaires des représentants des entreprises et des compagnies de Windsor sur le mouvement des marchandises à la frontière. Lorsque les files d'attente ont atteint des kilomètres sur le pont nous avons tous les deux, bien évidemment, participé à des réunions. Les représentants des entrepreneurs et des sociétés se sont amèrement plaints. Voudriez-vous nous énumérer certaines de ces plaintes? Je crois qu'il est essentiel qu'elles figurent dans le compte rendu de notre comité.

+-

    M. Michael Hurst: Le fond du problème c'est que les industries automobiles canadiennes et américaines ne font qu'une. Elles sont devenues tellement intégrées avec le temps, à mon avis, que dans cette perspective on peut parler d'industries intégrées. Bien entendu, le Canada face aux États-Unis se trouve dans un environnement hautement compétitif lorsqu'il s'agit d'inciter les décideurs à investir dans notre pays pour nous aider à être encore plus compétitifs sur la scène automobile internationale.

    Comprenant l'étroitesse de notre intégration d'une part et d'autre part notre position très forte sur le plan concurrentiel, l'industrie a des demandes. Elle demande, et je crois que c'est assez urgent, que des mesures soient prises pour résoudre les problèmes, du point de vue canadien, de livraison des produits sur le marché. En gros, c'est ça. Le produit fabriqué au Canada est généralement destiné au marché américain. Nous vous avons d'ailleurs donné quelques chiffres à l'appui dans notre exposé de ce matin.

    Pour les points plus particuliers, je demanderais à John de vous donner des détails.

    Vous avez dit tout à l'heure qu'il fallait considérer le court terme et le long terme. Je ne pourrais pas être plus d'accord avec vous. Et une des raisons pour lesquelles nous sommes d'accord avec vous, c'est parce que nos fabricants nous disent que la situation est urgente. Il faut que des mesures soient prises dans des délais opportuns si nous voulons continuer à pouvoir offrir des avantages économiques que l'excellente santé de l'industrie automobile offre au Canada, non seulement à des régions comme Windsor et le comté d'Essex, mais en réalité à toute la province de l'Ontario et à tout le pays.

    John, vous pourriez peut-être apporter quelques détails supplémentaires sur les préoccupations des fabricants.

+-

    M. John Tofflemire: Merci, monsieur le maire.

    Monsieur Pickard, vous avez eu tout à fait raison de faire une grosse distinction entre les problèmes à court terme et les problèmes à long terme. Il faut que votre comité insiste sur la nécessité de faire cette distinction.

+-

     J'ai parlé tout à l'heure d'une des solutions à court terme ou de certains des avantages à court terme de nouvelles technologies en matière de sécurité, de prédédouanement, etc.

    L'autre élément important de la solution à court terme, ce sont le personnel et les crédits. Une des premières réponses du côté américain aux événements du 11 septembre a été d'augmenter les crédits pour le personnel à ces points d'entrée. Ils ont dû procéder à des réallocations de crédits à court terme, et il faudra qu'elles soient renouvelées si leur intention est de maintenir le protocole de sécurité actuel. Dans une certaine mesure, les résultats sont là. Il n'y a plus de file d'attente de 20 kilomètres.

    Ce qui reste important, encore une fois, c'est que tout le système est à son point de saturation, si bien que ces réallocations de crédits devront être maintenues en permanence pour simplement rester au niveau où nous en sommes. Cela ne change rien pour ceux qui sont dans la file d'attente; ils ne savent pas si c'est parce qu'il y a des travaux qu'ils se retrouvent sur une seule voie sur le pont, ou si c'est un problème de véhicule d'entretien. Nous avons eu un problème du même genre quand le magasin hors taxes faisait des soldes et que les camions étaient en file d'attente parce que le stationnement du magasin débordait. Quand vous êtes arrêté deux kilomètres avant la frontière vous ne savez pas pourquoi. Cela démontre que tout le système est au point de saturation. Ces embouteillages peuvent être créés par n'importe quoi, même le mauvais temps.

    J'aimerais dire une chose parce que très souvent on parle de congestion sur la Huron Church Road. La circulation n'est pas bloquée à cause d'un problème de capacité sur la Huron Church Road. Tout part du pont. S'il y avait un problème de capacité sur la Huron Church Road, la circulation serait bloquée à partir du feu de signalisation de Tecumseh Road ou de Grand Marris ou n'importe où ailleurs. Ça ne se passe pas comme ça. C'est à cause des problèmes de congestion sur le pont.

    D'après moi, un des facteurs les plus importants, c'est le protocole douanier américain. Ils ont des modalités à respecter et la solution à cela a été d'augmenter de manière conséquente les effectifs. Mais à long terme, ce ne sera pas suffisant. À long terme, il nous faut des points de passage supplémentaires avec accès direct, avec accès contrôlé, à la 401.

À  +-(1000)  

+-

    M. Jerry Pickard: Il y a peut-être encore un ou deux points que je pourrais aborder. D'après ce que me disent les commerçants, il est clair qu'après le 11 septembre certains types d'activités ont diminué en volume de 30, 40 ou 50 p. 100. Cela peut sembler anecdotique, mais quand on additionne toutes ces pertes... Prenez la restauration, par exemple. Beaucoup de responsables du Michigan viennent à Windsor pour discuter avec des fonctionnaires et s'attablent dans un restaurant pour manger et travailler. S'il faut quatre heures pour traverser le pont, ou deux heures pour traverser le pont, ce genre de réunions en face-à-face est supprimé et tout finit par se faire au téléphone ce qui n'est pas bon pour les affaires.

    Le bon climat d'affaires qui régnait entre les compagnies à Windsor a été complètement perturbé. Que ce soit entre les fournisseurs et les monteurs, ou entre toutes sortes d'autres éléments, les rapports se sont tendus, la bonne volonté a disparu et il faut en tenir compte. Cela ne concerne pas le simple mouvement des marchandises. C'est une question de communication, de contact visuel, de réunion et dialogue.

    Le maire a parlé de frontière perméable et c'est une absolue nécessité. La frontière ne doit pas être une entrave aux échanges commerciaux et c'est ce qu'elle est aujourd'hui. Tant que nous ne reviendrons pas à un niveau de mouvement acceptable, tant que nous l'aurons pas amélioré, cela restera un problème majeur pour le commerce.

    Il n'y a pas que le mouvement des marchandises mais toute une série d'autres facteurs que je tenais à mentionner parce que c'est notre avenir économique qui est en jeu. Sans frontière perméable,l cet avenir est très incertain. Il est possible que certaines compagnies décident de ne plus travailler que d'un seul côté, que des bureaux ne restent ouverts que d'un seul côté et nous risquons d'y perdre beaucoup.

+-

    La présidente: Monsieur le maire, je crois que vous n'auriez pas mieux dit.

À  +-(1005)  

+-

    M. Michael Hurst: Tout à fait et avec passion. Excellent. Merci.

+-

    La présidente: Tout en vous écoutant parler, monsieur Pickard, je réfléchis au G-8, à la libre circulation des personnes et aux menaces que posent les événements du 11 septembre. Vous avez parlé de saturation à la frontière. Je me demande quelles pourraient être les répercussions si la sécurité réclamait des mesures encore plus contraignantes. Dans la conjoncture actuelle, ce n'est même pas envisageable, encore moins planifiable.

    Le G-8 fait partie de notre étude. Une partie de notre travail concerne directement le G-8. Un des points à l'ordre du jour du G-8 est bien entendu la sécurité mondiale, la question du terrorisme. Toutes ces questions évoquées aujourd'hui concernant la libre circulation, l'accélération des procédures, des procédures de prédédouanement en particulier, sont, je l'imagine, toutes à l'esprit des responsables de la planification de la conférence du G-8.

    Quand vous nous parlez de saturation, de congestion, de nouvelles infrastructures indispensables, du fait qu'on n'a pratiquement pas touché à l'infrastructure routière depuis les années 30, je pense que ce sont des questions très importantes et très cruciales qu'il faudra aborder avec nos homologues de l'autre côté de la frontière.

    Je crois, comme vous l'avez dit vous-même, monsieur le maire, que les événements du 11 septembre nous donnent l'occasion de donner la priorité au nord et à la frontière du Nord et de travailler en collaboration pour veiller à ce que nos besoins tous comme ceux des États-Unis soient pris en compte et que les réunions en face à face, dont M. Pickard a rappelé l'importance, puissent continuer, mais aussi que les marchandises continuent à circuler librement.

    Donc je crois que notre venue ici aujourd'hui, votre témoignage et le versement de ces questions importantes à notre dossier nous aideront à rédiger les recommandations nécessaires... Je conclurais en vous remerciant d'avoir pris le temps de venir nous voir et de vous être fait accompagner par M. Tofflemire. Nous avons un horaire à respecter et le représentant de l'Université de Windsor attend son tour. Je tiens donc à vous remercier et à vous remercier de votre hospitalité. Tout est parfait sauf que vous pourriez peut-être faire un petit effort sur le plan de la météo.

+-

    M. Michael Hurst: Comptez sur nous. Merci madame la présidente. Merci, mesdames et messieurs.

+-

    La présidente: Merci.

    Nous poursuivons nos audiences. Nous recevons le professeur Fritz Rieger de l'Université de Windsor.

    Professeur, soyez le bienvenu. Comme je l'ai dit, si nos rangs sont clairsemés c'est parce que nous sommes un peu dispersés, tenant aussi bien audiences dans l'Ouest que dans cette partie du pays en même temps.

    Hier, nous avons entendu des représentants de l'Université York et de l'Université de Toronto. Nous avons entendu comme témoins beaucoup d'universitaires comme vous de toutes les régions du pays. Nous nous intéressons tout particulièrement aux problèmes qui se posent au G-8, et nous sommes très heureux que vous ayez pu vous joindre à nous ce matin. Professeur. Merci.

+-

    M. Fritz Rieger (professeur associé de gestion, Odette School of Business, Université de Windsor): Merci beaucoup, madame la présidente. Merci de m'avoir invité à venir vous parler.

    Je m'appelle Fritz Rieger. Je suis professeur associé de gestion à l'Odette School of Business de l'Université de Windsor.

    Mon expertise dans ce domaine est limitée. Cependant, je donne un cours sur la gestion stratégique mondiale au niveau de la maîtrise, et j'ai fait quelques recherches dans le passé sur les entreprises d'État en Europe, en Amérique latine et en Asie. Mais mes connaissances sont assez limitées et je m'adresse à vous comme non spécialiste.

    J'aimerais vous parler du plan d'action du G-8 pour l'Afrique, de certaines des questions de gouvernance qui entourent la réunion du G-8 et aussi de la gouvernance des institutions financières internationales. Je finirai par quelques observations sur les questions de sécurité à la frontière ici et par un mot sur une conférence que nous avons organisée il y a quelques années dont le sujet pourrait sembler touchant aujourd'hui compte tenu de l'évolution de la mondialisation.

    Je préfacerai mes remarques par une déclaration de principe et de croyances personnelles qui explique mes réponses aux questions présentées dans les documents de travail. Je vais essayer de répondre à certaines de ces questions, tout particulièrement celles concernant le plan pour l'Afrique ainsi que celles sur la gouvernance.

    Mon premier point concerne le rôle de leader joué par le Canada au niveau de la réduction de la pauvreté dans le monde dans le contexte du G-8. C'est l'idée sous-jacente à mes remarques d'aujourd'hui, mais j'aimerais commencer par vous dire un mot sur la mondialisation.

    Je vais vous citer aujourd'hui deux auteurs, Thomas Friedman, un auteur populaire et bien connu sur la mondialisation, et Joseph Nye, le doyen de la Kennedy School of Government de l'Université Harvard, dont les arguments me laissent un peu sceptique. C'est avec une certaine nervosité que je cite ces auteurs connus et importants.

    Je pense que Friedman, qui est très connu pour son livre The Lexus and the Olive Tree, avait tout à fait raison lorsqu'il disait qu'en fait les processus de mondialisation ne peuvent pratiquement être contrôlés par aucun gouvernement, voire par aucune organisation multilatérale, et qu'il ne faut surtout pas l'oublier. En vérité, plus personne n'est responsable de la mondialisation. Lorsque nous avons organisé cette conférence dont j'ai parlé tout à l'heure il y a quelque 12 ans, la situation était différente. À ses débuts, le phénomène de mondialisation a été considéré avec scepticisme, mais l'évolution a été tellement spectaculaire au cours des dernières années qu'il est pratiquement impossible de le nier.

    Les pays du monde peuvent en réalité soit s'adapter rapidement aux forces de la mondialisation, soit être marginalisés. Beaucoup de pays pauvres, surtout en Afrique, n'ont pas vraiment le choix. Ils sont tout simplement écartés sans pratiquement aucune possibilité de s'adapter et de récolter les bénéfices de la mondialisation.

    Friedman fait aussi remarquer que le malaise de beaucoup de pays devant la mondialisation trouve sa source dans une crainte justifiée d'incapacité d'être à la hauteur sur le plan technologique. Mais au-delà de tout cela, il s'est enraciné dans la culture, et non pas simplement dans une partialité anticapitaliste et antioccidentale ou dans l'antiaméricanisme, mais dans une méfiance vis-à-vis de la modernisation. Selon lui, les technologies de communication et Internet ont sur le plan positif donné des pouvoirs aux particuliers du monde occidental et les ont émancipés. Une des conséquences est que cela conforte les tendances individualistes de ces sociétés et du même coût cela pose d'énormes problèmes aux sociétés plus traditionnelles, plus collectives. Il y a donc un énorme fossé culturel qui doit être comblé.

À  +-(1010)  

+-

     Je dis dans le texte que les pays ont quatre façons d'aborder la mondialisation. Il y a ceux qui désirent y participer et peuvent s'y adapter, c'est-à-dire ceux qui sont prêts. Il y a ceux qui voudraient s'adapter mais ne sont pas prêts. Le troisième groupe, c'est celui des pays qui pourraient s'adapter mais choisissent de ne pas le faire, éventuellement à cause de ces menaces culturelles—on peut le constater clairement dans la région du Proche-Orient actuellement—et enfin il y a ceux qui ne souhaitent pas s'adapter et ne sont d'ailleurs pas prêts à le faire.

    Pour chacune de ces catégories, il faut une démarche différente. Parmi les pays qui ne sont pas intéressés, par exemple, il y en a peut-être qui voudraient bien participer à l'économie mondiale mais ont déjà fait une tentative qui a échoué et ont décidé de se mettre en retrait. Je cite souvent l'exemple de la Malaisie qui a pleinement participé à cette économie pendant un certain temps et qui a ensuite fait beaucoup machine arrière.

    La deuxième perspective que je souhaiterais mentionner—et je dois dire que je n'ai pas de preuve directe ici, mais que j'ai des soupçons car mon domaine universitaire, c'est la théorie de l'organisation—c'est que les institutions financières internationales doivent probablement aborder le changement sous un angle révolutionnaire. Or, dans les documents, l'esprit du G-8 est essentiellement évolutionnaire. Ces institutions sont éminemment professionnelles. J'ai un énorme respect pour les personnes de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international et d'autres banques régionales de développement qui s'occupent de l'aide. Mais je pars ici du principe plus général selon lequel plus une organisation est professionnelle—et on le constate aussi, par exemple, dans les universités—plus les attitudes conventionnelles face aux problèmes sont ancrées. La seule façon de vraiment progresser, c'est de secouer tout cela. Or, ce bouleversement ne viendra probablement pas de l'intérieur. Mais quand on a quelque 7 000 professionnels à la Banque mondiale, tous éminemment qualifiés avec une expérience très poussée, etc., on se demande comment on peut repenser toute la question de l'aide. Peut-être faudra-t-il mettre cela à l'ordre du jour, d'autant plus que le Canada occupe un rôle unique au sein du G-8.

    J'aimerais aussi faire brièvement allusion à la coordination qu'il faudrait établir entre membres du G-8, institutions gouvernementales, institutions non gouvernementales et sociétés multinationales. D'après les documents de référence élaborés en prévision du G-8, j'ai l'impression qu'on n'a pas beaucoup approfondi cette question, mais il semble qu'il faudrait tout de même l'aborder plus tard dans l'ordre du jour.

    Enfin, ma dernière conviction, avant d'en arriver aux questions, concerne la nécessité d'une focalisation et de ce qu'on appelle en jargon l'intention stratégique. Ce que je conseille—ou en tout cas ce que j'aimerais proposer plutôt que conseiller—à la délégation canadienne au G-8, c'est de se concentrer plus étroitement sur ce qu'elle veut faire en matière de réduction de la pauvreté avec le plus grand soin de manière à pouvoir atteindre ces objectifs plutôt que de se disperser. Vous comprenez bien que les autres États ont toutes sortes d'objectifs différents aussi. La clé du progrès—face à la situation tragique de l'Afrique, qui ouvre en même temps de vastes possibilités—c'est de se concentrer sur certains objectifs et de s'astreindre à réaliser certaines choses concrètes.

    Prévenez-moi si je dépasse mon temps. J'ai parcouru toute cette liste et je me suis efforcé de la réviser et de la repenser et je ne sais pas combien de temps il me faudra pour faire le tour de la question.

À  +-(1015)  

+-

    La présidente: Il vous reste cinq minutes.

+-

    M. Fritz Rieger: Cinq minutes. Dans ce cas, je vais vous présenter quelques grandes lignes. Je suis un homme de mots.

    Donc, pour ce qui est des objectifs du G-8 concernant le plan d'action pour l'Afrique, je crois que le premier objectif devrait être par-dessus tout la réduction immédiate de la pauvreté, qui est le critère fondamental—la réduction de la pauvreté est la priorité absolue.

    Ensuite, il faut classer les objectifs par priorité. J'ai remanié un peu les points présentés dans le document d'information. J'ai ramené la réduction de la dette et l'accès au marché à la troisième place, alors que généralement ils figurent en tête de liste. L'idée, c'est d'amener les pays à se concentrer sur la réduction du risque pour qu'ils soient plus attrayants pour les prêteurs et éventuellement d'autres investisseurs, et ainsi de renforcer la communauté au départ.

+-

     D'autres priorités importantes ont été mentionnées, notamment pour l'Afrique, à propos des maladies transmissibles et de la technologie des communications, qui sont dans une classe presque à part. Ce sont des priorités très importantes aussi. Mais dans l'ensemble, je crois que ce qui est important d'abord, c'est de réduire le risque.

    Le deuxième problème auquel il faut s'attaquer—et je vais le mentionner très rapidement—surtout du point de vue de la gouvernance, c'est la corruption. Comment réduire la corruption? Je vais sauter directement à l'argument de conclusion ici.

    Les mesures punitives et la conditionnalité, dont on a traité abondamment dans de nombreux documents, posent des tas de problèmes. Ce que je propose ici, c'est une autre forme de conditionnalité consistant à exercer une influence pour essayer de réduire la corruption dans les pays récipiendaires, parce que c'est un problème fondamental.

    L'une des propositions serait d'avoir un système d'incitatifs plutôt qu'un système de dissuasion. On pourrait, par exemple, faire l'essai de crédits pour accomplir certains objectifs un peu dans la même idée que les crédits pour la pollution dont parle la revue The Economist. Mais dans ce cas-ci, au lieu d'avoir encore une nouvelle forme de vérification pour essayer d'enrayer la corruption, on traiterait directement sur une base individuelle avec les chefs d'État ou les personnes responsables de ces pays qui seraient récompensés pour leurs bonnes actions.

    Je vais sauter l'essentiel du reste pour en arriver à la fin, pour pouvoir dire deux choses.

    Premièrement, la sixième question dans le cadre du plan pour l'Afrique était de savoir comment on pouvait mobiliser l'appui populaire au plan d'action pour l'Afrique. Je crois que c'est un programme tellement intéressant que le Canada devrait vraiment essayer de mobiliser la base autour de ce programme. Nous avons là vraiment un thème mobilisateur pour le pays—le Canada a déjà investi 500 millions de dollars pour la promotion de ce programme. Il ne s'agit pas nécessairement d'utiliser l'argent des gens, mais d'avoir une poussée suffisante pour mobiliser l'appui des gens au niveau de l'enseignement, la participation des écoles, une saturation du marché local en soulignant le rôle de leadership du Canada au sein du G-8 et du G-20, et en coordonnant les activités avec les ONG et l'ACDI.

    J'ajoute que l'accent que met l'ACDI sur les femmes et les enfants est particulièrement important, même si je n'avais pas vraiment l'intention d'aborder la question des femmes. À l'université, nous avons vu de nombreuses étudiantes internationales venues faire une maîtrise. Beaucoup d'entre elles décident de rester au Canada, mais certaines repartent dans leurs pays et nous avons pu garder contact avec elles et suivre leurs progrès grâce au courrier électronique.

    Je crois que la professionnalisation des femmes, surtout dans les pays intermédiaires, est particulièrement importante. Là aussi, nous pouvons peut-être faire un travail de promotion au Canada en faisant venir ici des femmes qui vont obtenir des diplômes poussés dans l'intention de repartir ensuite dans leurs pays.

    Je crois que je suis au bout de mon temps. J'ai dit que j'allais parler de la sécurité, simplement pour appuyer ce qui a déjà été dit à propos de la sécurité aux frontières. Il y a aussi une chose que j'ai constatée lors de conversations avec les dirigeants américains de filiales canadiennes dans le domaine de l'automobile ou d'autres industries manufacturières connexes, c'est que beaucoup d'entre eux sont ici contre leur gré. Il a fallu choisir à un moment donné l'emplacement d'une usine, et c'est Windsor ou cette région qui a été choisie pour toutes sortes de raisons économiques. Mais il y a beaucoup de gens dans ces entreprises qui ne cherchent qu'une excuse pour repartir ou pour cesser d'investir, et les problèmes de frontières leur apportent des munitions.

À  +-(1020)  

+-

     Je crois que cela va plus loin que les défauts de l'analyse économique. C'est devenu une question affective depuis le 11 septembre. Quand on commence à avoir des retards importants, des ennuis à la frontière, la pagaille, quand on impose des droits antidumping parce que la paperasserie n'a pas été correctement remplie ou pour une raison quelconque, on entend toutes sortes d'arguments hostiles à la poursuite des investissements ici.

    Merci beaucoup. Je me ferai un plaisir d'aborder d'autres sujets si nous en avons le temps durant la période de questions. Merci de votre attention. Je vous en suis très reconnaissant.

À  +-(1025)  

+-

    La présidente: Merci beaucoup, monsieur Rieger. Je crois qu'il est important de nous concentrer sur les points que vous soulevez dans votre document.

    À propos, nous avons déjà entendu M. Joseph Nye. Il a comparu devant notre comité à Ottawa. Nous en avons profité pour discuter avec lui et approfondir notamment certains aspects de ses deux récents documents ou livres. Nos attachés de recherche ont profité de sa comparution pour creuser ces questions.

    Je remarque que vous avez parlé d'une chose que j'aurai peut-être l'occasion d'approfondir tout à l'heure: vous avez parlé de la façon dont le G-8 devrait gérer les gouvernements. Nous y reviendrons peut-être.

    Je vais commencer par donner la parole à mon collègue M. Comartin, et nous verrons quel genre de questions il veut aborder avec vous.

+-

    M. Joe Comartin: Monsieur Rieger, j'aimerais poursuivre sur le dernier sujet que vous avez abordé. Je dois dire que j'ai eu une expérience assez semblable et j'aimerais donc bien clarifier les choses avec vous.

    Si je vous comprends bien, vous dites que certains cadres moyens et supérieurs de ce secteur, notamment du secteur de l'automobile, ne sont pas motivés à rester ici, même si les analyses économiques montrent qu'il est logique d'implanter les usines de production ici.

    Est-ce que leur autre motivation est d'ordre patriotique ou est-ce que c'est simplement parce qu'ils s'ennuient de leurs villes d'origine et qu'ils voudraient simplement y retourner? Que constatez-vous? Est-ce que c'est une question de patriotisme américain en général qui les pousserait à vouloir repartir aux États-Unis, ou est-ce qu'ils veulent simplement repartir parce qu'ils sont de Détroit ou d'une ville quelconque du Wisconsin?

+-

    M. Fritz Rieger: Je ne peux pas le dire catégoriquement. Je pense qu'il y a un élément de patriotisme qui date probablement d'avant le 11 septembre, et qu'ils se disent qu'ils auraient été mieux là-bas. Je pense à deux cas particuliers, quelqu'un de chez Ford et quelqu'un d'autre de chez National Steel avec leur usine DMN ici. Tous deux m'ont fait part d'inquiétudes, sans entrer dans le détail.

    Dans le cas de National Steel, j'ai parlé du dumping. Il se trouve qu'on a imposé un droit antidumping prévu sur l'acier qui était amené au Canada et ensuite réexporté aux États-Unis. Je discutais avec un vice-président de la société à l'époque et il était blême. Il n'aurait jamais voulu que ce programme soit implanté ici. Il était furieux qu'on l'ait implanté à Windsor, etc.

    Dans le cas de Ford, il y avait un certain scepticisme et l'idée qu'on aurait pu faire les choses plus près de Cleveland, de Romeo ou des autres usines de moteur.

    Je crois que c'était surtout une question de patriotisme général, car les avantages économiques sur le plan de la qualité étaient écrasants ici. Les raisons d'investir dans le sud de l'Ontario étaient multiples. Je pense qu'ils en avaient un peu honte. Au cours du début des années 90, il n'y avait pas le moindre doute sur la question de la qualité. On faisait un travail de bien meilleure qualité ici, avec moins d'erreurs et de reprises.

+-

    M. Joe Comartin: J'aimerais changer de sujet un instant. Pourriez-vous développer un peu ce que vous nous avez dit à propos de la gouvernance et, plus particulièrement en Afrique, de la question de la corruption? Jusqu'où un pays étranger comme le Canada peut-il aller pour exiger qu'on mette fin à la corruption et qu'on ait une administration transparente?

+-

     Disons que si l'on veut essayer d'encourager le plus possible la mise en place de véritables démocraties dans ce continent, comment peut-on trouver un équilibre entre les mesures rigoureuses imposées par un pays étranger comme le Canada et en même temps les efforts pour développer la démocratie?

À  +-(1030)  

+-

    M. Fritz Rieger: Je crois qu'il y a deux façons d'aborder le problème. D'une part, on peut considérer le Canada comme une entité en soi, avec ses programmes d'aide, etc.; d'autre part, on peut prendre n'importe quel pays du G-8 comme partie prenante aux institutions internationales. C'est vraiment aux institutions internationales de mettre en place un programme. C'est cela que j'envisageais.

    Dans un excellent document sur la gouvernance—et il faudrait que je vérifie pour retrouver le nom de l'auteur—on considère que le Canada est un des intervenants du FMI, de la Banque mondiale et des autres banques de développement, et que c'est par l'intermédiaire de ces organismes que la gouvernance doit s'imposer.

    Je vais vous citer une petite anecdote: nous sommes toujours contents quand nos étudiants réussissent bien. J'ai gardé le contact avec une de nos étudiantes qui était une étudiante internationale chinoise qui a terminé ses études à Windsor cette année et est partie faire un PhD à l'Université de l'Alberta. Je correspondais avec elle par courriel à propos de cette conférence d'aujourd'hui. Quand elle en est arrivée à la question de la gouvernance, elle a dit: «Oh, c'est le problème de l'agent principal»—reprenant le vocabulaire d'un étudiant de première année en PhD, et c'était excellent. «Mais», a-t-elle ajouté, «la seule façon de régler les problèmes d'agence principale, ce sont les contrats exécutoires», c'est-à-dire qu'il faut avoir des contrats officiels. En tout cas, c'est la première étape qu'on expose dans la documentation.

    Je suis allé un peu plus loin en suggérant un système d'encouragement par opposition à un système dissuasif de conditionnalité. Il est intéressant que M. Nye aussi... Je ne suis pas certain que ce soit un problème d'agent principal. Cela supposerait que le gouvernement du pays récipiendaire est un agent d'une organisation internationale. Mais c'est le point de vue que soutient Nye. Il dit que ces gouvernements sont des agents d'un programme de réduction de la pauvreté dirigé par le pays occidental ou l'organisation internationale.

    Il est important d'avoir des contrôles très stricts. Je crois que la démocratisation du processus et la transparence sont aussi importantes. C'est aussi un peu le problème d'Enron. Quelle leçon pouvons-nous tirer ici en matière de contrôle, pour ouvrir les portes le plus possible? Peut-être faut-il qu'il y ait une certaine motivation de la société à coopérer.

    On pourrait peut-être aussi avoir une espèce d'échelle de corruption pour les gouvernements: ceux qui sont corrompus de façon endémique vont poser énormément de difficultés; il y a aussi ceux qui sont corrompus de manière occasionnelle ou opportuniste, et là on peut avoir une définition plus souple de la notion de corruption. Il devrait être plus facile de s'occuper des gouvernements où l'on trouve des gens honnêtes que d'essayer de révolutionner un pays dans lequel la corruption est profondément ancrée.

+-

    M. Joe Comartin: Poursuivons sur cette notion de stimulant que vous évoquez. Avez-vous des exemples, des études de cas montrant que cette formule a réussi?

+-

    M. Fritz Rieger: Non. J'imagine qu'il y en a, mais je n'ai pas suffisamment creusé la question.

    Je vois ça un peu comme un système de primes dans une entreprise: il y aurait une récompense pour ceux qui livreraient la marchandise. On examinerait le rendement avec des mesures de contrôle de ce rendement.

+-

     Si le contrôle permettait d'établir que les objectifs de rendement ont été atteints et qu'il y a eu une amélioration des notes, ou que le niveau de lecture est passé à un niveau de troisième année par rapport à un niveau de jardin d'enfants—quelque chose comme cela—il y aurait des crédits et même des récompenses aussi bien... peut-être que les récompenses psychiques sont aussi importantes que les récompenses financières.

    Je sais bien que c'est assez radical comme façon de penser. Dès qu'on commence à parle de paiements accessoires, on évoque la notion de corruption. Mais si c'est quelque chose d'institutionnalisé, d'objectif et de transparent, on peut soutenir que cela vaut beaucoup mieux qu'un dessous-de-table.

À  +-(1035)  

+-

    La présidente: Merci.

    Monsieur Pickard.

+-

    M. Jerry Pickard: Merci beaucoup, madame la présidente.

    Monsieur Rieger, merci d'être venu. Je ne connais pas le sujet aussi bien que je le souhaiterais. Je suis assez terrifié par certaines des remarques que j'ai entendues. Nous parlons de la part de l'Afrique dans les échanges commerciaux: elle représente 10 p. 100 de la population des nations commerçantes, mais elle n'a que 1,5 p. 100 de ces échanges. Et encore, c'est un pourcentage qui a baissé de moitié depuis 1980. Donc, c'est un continent qui perd du terrain au lieu d'en gagner, et qui en perd beaucoup et très vite.

    La sécurité des personnes est un problème fondamental. J'ai vu une émission spéciale hier soir sur les camps de réfugiés et la situation précaire des femmes et des enfants. C'était effroyable: les viols, la famine, toutes sortes de choses, et je crois que tout cela vient de la corruption. Mais nous avons un pays qui a de vastes problèmes à régler.

    Je félicite le premier ministre d'avoir décidé de consacrer 500 millions de dollars à l'aide à l'Afrique. Nous voulons aussi essayer de régler à Kananaskis certains des problèmes soulevés par le nouveau partenariat pour l'Afrique. Mais je crois qu'il faut réaliser un effort coordonné des nations, du Fonds monétaire international, des ONG et des intervenants sur pratiquement tous les fronts. Il va falloir un effort concerté et coordonné. En même temps, j'ai l'impression que si l'on agit de cette façon, on va supprimer l'indépendance d'un pays pendant un certain temps pour qu'il puisse s'orienter dans la bonne direction.

    D'un point de vue mondial, pensez-vous que la bonne formule consiste à imposer des orientations et un programme de l'extérieur? Et si c'est le cas, comment pouvons-nous promouvoir cette cause et susciter cet intérêt pour une amélioration de la situation au sein de l'Afrique elle-même et au sein de ces pays qui peuvent être corrompus mais receler aussi des éléments de valeur—il faut en tenir compte—et comment pouvons-nous convaincre des gens qui se débattent dans des conditions très difficiles qu'il y a de l'espoir et qu'ils peuvent envisager un avenir plus positif?

+-

    M. Fritz Rieger: Je vais essayer de répondre, mais comme je n'ai pas une expérience approfondie de l'Afrique, ce sera simplement une supposition. Je pars simplement de principes généraux que l'on pourrait utiliser pour aborder un problème de ce genre.

    Je n'irai jamais jusqu'à dire qu'il faut mettre de côté les processus démocratiques pour atteindre un objectif, même si je sais bien qu'on y est obligé quelquefois en cas d'urgence. Je crois que c'est non seulement une excuse, mais une solution de facilité. Il est donc essentiel de préserver la dignité du pays, et comme je crois que nul pays au monde n'est plus sensible à cette notion que le Canada, c'est le pays naturel pour le faire.

    Il y a eu d'excellentes questions. En fait, j'ai choisi de parler de l'Afrique en partie parce que les questions posées dans la partie sur l'Afrique étaient tellement judicieuses qu'elles appelaient une réponse.

+-

     L'une de ces questions était de savoir s'il fallait commencer par les pays les plus prometteurs ou les pays où c'était le plus facile plutôt que de se disperser dans tous les pays d'Afrique. À mon avis, c'est un faux problème car il faut faire les deux. Mais il faut bien savoir pourquoi on le fait. Il faut commencer par ceux que l'on peut influencer et qui sont les plus prometteurs, parce qu'on veut créer des témoignages de réussite. On ne peut s'attaquer simplement aux cas les plus problématiques. Il faut qu'il y ait des exemples de succès. Et comme le succès nourrit le succès, il faut espérer que cela incitera les pays récipiendaires, les pays qui ont besoin d'aide, à participer de leur plein gré à ce processus et à accepter l'aide offerte de cette manière. Je crois que les succès qui seront remportés inciteront d'autres pays à participer spontanément au lieu d'y être forcés.

    Pour le reste, je ne sais pas. Chaque pays est particulier. L'Afrique est un continent particulièrement intéressant. Je connais l'Afrique surtout par les contacts que j'ai avec des collègues qui travaillent là-bas et qui me donnent une idée du potentiel de ce continent.

    Je voudrais dire une chose. J'ai récemment bénéficié des largesses d'une banque de développement qui m'ont permis d'organiser un colloque de deux semaines au Sri Lanka avec un collègue. Cela m'a amené à me poser bien des questions sur la façon dont les projets sont distribués. Je crois que nous avons fait un travail très convaincant en tant que représentants de l'université, mais il demeure des questions. Pourquoi a-t-on choisi notre projet? Parce que c'était le meilleur? Est-ce que c'est simplement la concurrence du marché et le fait que quelqu'un qui a un projet raisonnable au bon moment va avoir le feu vert?

    Ces questions sur le type d'aide et le type de projets qui sont choisis sont particulièrement importantes. Je comprends bien que cela doit représenter un travail énorme pour les organismes de développement.

À  +-(1040)  

+-

    M. Jerry Pickard: En gros, si je vous comprends bien, nous devons nous occuper de tous les pays mais en établissant des priorités. Il faut cibler les pays dans lesquels nous sommes susceptibles d'obtenir rapidement des succès pour entraîner d'autres pays. Il faut détecter les forces démocratiques des pays à tous les niveaux possibles et essayer d'exploiter ces forces. En gros, nous amènerions certains pays sur la voie du succès pour inciter les autres à suivre la même orientation. Je crois que la tâche des gens à Kananaskis sera difficile et que ce ne sera pas facile de coordonner toutes les initiatives pour faire progresser un programme positif pour l'Afrique. Mais il est logique d'établir des priorités et d'essayer de créer des exemples positifs pour que les autres pays suivent cette voie.

    M. Fritz Rieger:Oui.

+-

    La présidente: N'oublions pas que le Nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique vient des Africains eux-mêmes. Les dirigeants de divers pays, notamment ceux qui bénéficient d'un bon gouvernement et qui essaient de progresser, comme l'Afrique du Sud, le Nigéria, l'Algérie et quelques autres, qui sont les instigateurs du NPDA, ont examiné aussi d'autres plans et d'autres visions de l'avenir et ils ont présenté quelque chose qui représente l'esprit de ce qu'ils appellent la renaissance de l'Afrique. Ils ont mis au programme du G-8 à Gênes et du G-8 de cette année aussi—sous la direction de M. Chrétien—des questions de gouvernance, d'accès aux marchés, de résolution de conflits, de santé et d'éducation. Toutes ces questions sont à l'ordre du jour et nous sommes en train d'élaborer un plan d'action pour le G-8.

+-

     Ainsi, nous entendons nos collègues et des Canadiens en général nous parler de certains points qui, nous l'espérons, feront partie du plan d'action des leaders, qui sera soumis aux dirigeants africains pour leur signifier: «Voici comment les pays du G-8 peuvent vous aider.» Je crois que les Africains eux-mêmes savent fort bien ce qu'ils veulent et ont une idée claire du cheminement qu'ils veulent suivre.

    Je voulais vous poser une question sur un processus d'examen par les pairs, parce que je crois que les propos de mon collègue vont en ce sens. Ce sont les Africains eux-mêmes qui disent: «Nous voulons pouvoir nous évaluer entre nous. Nous voulons pouvoir regrouper nos pays, ou encore pouvoir nous encourager, établir des mesures d'incitation et de dissuasion permettant à nos pays de progresser. Mais nous affirmons que vous, les pays du G-8, devez nous faire une place, qu'il s'agisse d'ouvrir vos marchés à nos produits ou encore autre chose.»

    Ainsi, il est important que nous comprenions bien, en tant que Canadiens, que les Africains connaissent désormais le chemin qu'ils veulent suivre. Mais les ONG nous précisent que les pays africains doivent faire partie du processus, bien comprendre le NPDA et sa portée, et bien comprendre l'orientation des leaders.

    Professeur, hier les témoins nous ont beaucoup parlé des conditions liées à l'aide du FMI et de la Banque mondiale, les deux organismes, soutiennent les témoins, qui ont placé les économies africaines dans la situation qu'elles connaissent actuellement. Quels que soient les sujets de discussion, nous espérons que ces questions de conditionnalité occuperont une place importante.

À  +-(1045)  

+-

    M. Fritz Rieger: Oui, assurément.

    Permettez-moi de parler du NPDA. D'abord, il me semble qu'il s'agit d'un grand pas en avant et d'une occasion en or. L'un des documents distribués était une analyse de la genèse du NPDA. On peut y lire qu'il faut établir une distinction entre enjeux régionaux et nationaux, et que le NPDA devrait fonctionner au niveau régional, ce qui est sage, bien sûr. Cette approche est suffisamment souple pour permettre que les programmes nationaux soient menés de concert avec une supervision régionale dans le cadre du NPDA.

    Bien sûr, les conditions assorties à l'aide semblent avoir occasionné de très graves problèmes sur le plan de la réduction de la dette et des exigences macro-économiques. Je crois qu'il doit y avoir... C'est un problème qui est presque devenu incontrôlable.

    Permettez-moi de revenir à certains des propos de M. Pickard, et je dirais que la concentration est cruciale. C'est le thème récurrent. Je crois également que le Canada et les autres pays bailleurs de fonds doivent établir des priorités et se fixer comme critère l'étendue des retombées positives. Qu'est-ce qui bénéficie au plus grand nombre?

    Entre autres choses, la possibilité de succès d'une mesure est un facteur important, mais celui-ci doit aussi être mesuré en fonction des besoins les plus criants. La probabilité de succès est importante parce que, à force de patience, cette approche aidera à bâtir des programmes durables. En revanche, l'idée de savoir où se trouvent les besoins urgents... J'imagine que le NPDA jouera un rôle très important et fort utile pour ce qui est de cerner les besoins les plus criants.

+-

    La présidente: Merci beaucoup, professeur, d'être venu ce matin nous présenter votre mémoire ainsi que votre ouvrage International Management Research: Looking to the Future. Je suis certaine que ce document nous sera utile.

À  +-(1050)  

+-

    M. Fritz Rieger: Avec votre permission, voici pourquoi je l'ai apporté. Le livre est paru il y a quelques années déjà, mais l'un de ses chapitres rédigé par Henry Mintzberg de l'Université McGill, offrait une vision très sceptique de la signification de la mondialisation. C'était non seulement un point de vue sceptique, mais un point de vue qui soulève des questions, et je crois que c'est une démarche à laquelle nous devrions constamment nous livrer. Bien qu'il date de quelques années, ce chapitre précis pourrait bien être l'élément le plus pertinent du livre. Il pourrait vous offrir des pistes de réflexion sur la façon d'envisager la mondialisation.

    Je vous remercie sincèrement de m'avoir invité à prendre la parole devant vous.

+-

    La présidente: Merci, professeur, et au revoir.

    J'invite maintenant les témoins suivants à prendre place: Mme Linda Smith, présidente de la Chambre de commerce de Windsor et du district; le professeur Alfie Morgan, membre du conseil d'administration et enseignant à l'Université de Windsor; M. Jim Drummond, également membre du conseil d'administration et principal spécialiste en matière d'environnement; et Mme Lori Shalhoub, directrice des affaires extérieures et de la politique publique, DaimlerChrysler Canada. Soyez les bienvenus.

    Merci d'avoir attendu, et merci d'être venus. La présence des représentants de la Chambre de commerce est appréciée. En parcourant le pays, notre comité a accueilli les témoignages d'autres chambres de commerce qui viennent nous présenter officiellement le point de vue régional. Nous sommes conscients que le niveau de participation à la base est peu élevé, mais je crois que vous avez les éléments les plus talentueux.

    Vous disposez d'un certain temps pour faire votre exposé, puis pour répondre aux questions.

+-

    Mme Linda Smith (présidente, Chambre de commerce de Windsor et du district): Madame la présidente, membres du comité, bonjour et bienvenue à Windsor et dans le comté d'Essex. Je m'appelle Linda Smith. Je suis présidente de la Chambre de commerce de Windsor et du district. Je suis accompagnée de M. Alfie Morgan, qui enseigne la gestion des affaires à la Odette School of Business de l'Université de Windsor; il est également membre du conseil d'administration de la Chambre. J'ai également à mes côtés M. Jim Drummond, principal spécialiste en matière d'environnement chez Golder Associates Ltd. et membre du conseil d'administration de la Chambre.

    Nous nous réjouissons que Lorraine ait pu nous accompagner. Nous savions que nous serions appelés à répondre à des questions après l'exposé, et elle est ici comme personne-ressource. Lorraine est directrice des affaires extérieures et de la politique publique chez DaimlerChrysler Canada. En outre, DaimlerChrysler Canada est le membre le plus important de la Chambre de commerce de Windsor et du district.

    La Chambre de commerce de Windsor et du district représente 1 400 entreprises membres, qui emploient plus de 80 000 personnes dans la région de Windsor et le comté d'Essex. Nous vous sommes reconnaissants de l'occasion qui nous est offerte de témoigner devant votre comité sur la gestion des frontières et la relation économique canado-américaine. C'est M. Morgan qui parlera de l'aspect économique.

    Il est bien connu que le gouvernement du Canada a fait du commerce et de la sécurité nationale des enjeux prioritaires. Le fait de confier officiellement ces responsabilités au vice-premier ministre, conjugué à l'énoncé budgétaire et à la déclaration sur la frontière intelligente et son plan d'action en 30 points, prépare le terrain pour une mise en oeuvre immédiate de bon nombre d'initiatives nécessaires dans de nombreuses régions du pays.

    Le Canada est un des grands pays exportateurs du monde. Notre économie se fonde sur le commerce et l'exportation de produits de qualité à valeur élevée. Dans la région de Windsor, nous comprenons très bien cette réalité. La région de Windsor est la capitale canadienne de l'industrie automobile. Le siège social canadien de DaimlerChrysler est à Windsor. DaimlerChrysler, Ford et General Motors ont investi ensemble plus de 6 milliards de dollars dans notre région depuis 1991.

+-

     Windsor est la capitale canadienne des machines, des outils, des matrices et des moules. C'est à Windsor--Essex que se trouvent 20 p. 100 de tous les fabricants canadiens d'outils et de matrices, et 50 p. 100 des fabricants de moules industriels. La région de Windsor--Essex et Chatham--Kent est le grenier du Canada, Leamington étant la capitale nord-américaine de la culture en serre. Les cultures légumineuses en serre ont dépassé les 300 millions de dollars l'an dernier. Comme vous le savez, la majeure partie de ces produits agricoles est exportée.

    Voici quelques données économiques rapides. Le Canada envoie 87 p. 100 de ses exportations aux États-Unis, tandis que 25 p. 100 des exportations américaines trouvent preneurs au Canada. Quarante pour cent du PIB canadien est généré par les ventes à l'exportation. Ainsi, le tiers de l'économie canadienne relève entièrement de l'exportation aux États-Unis. Le commerce bilatéral canado-américain s'est accru de 11 p. 100 par année depuis 1993, sous le régime de l'ALENA. En tout et pour tout, 1,5 milliard de dollars de produits traversent chaque jour la frontière canado-américaine, et 70 p. 100 de ces produits sont acheminés par camion. L'industrie de l'automobile compte sur un flot régulier de pièces pour pouvoir respecter ses horaires de livraison juste à temps, qui représentent quelque 500 millions de dollars.

    Le sud-est du Michigan vient au premier rang des partenaires commerciaux du Canada, affichant un chiffre total de 103 524 570 $ d'importations et d'exportations pour l'an 2000. Plus de 40 p. 100 du commerce canado-américain passe par la frontière Michigan-Ontario. Quarante pour cent du trafic transfrontalier de camions emprunte le pont Ambassador. Le poste frontalier Windsor-Détroit est le plus achalandé de la frontière canado-américaine. En conséquence, les entreprises de Windsor et Essex doivent faire leur part pour assurer l'acheminement des biens.

    Il est important de souligner que la crise de gestion frontalière se prépare depuis de nombreuses années. Les événements tragiques du 11 septembre n'ont fait qu'aggraver une situation qui avait été longtemps ignorée ou reléguée au second plan. Windsor--Essex est devenu le témoin de la crise. Le nombre insuffisant de ponts et de tunnels, et la capacité insuffisante des postes frontaliers ont été ignorés par le gouvernement en dépit d'une demande croissante. Depuis des années, le milieu réclame la mise à niveau des infrastructures. Les services de douanes et d'immigration souffrent d'une insuffisance de fonds chroniques, tant sur le plan des effectifs que de la technologie, en particulier du côté américain.

    Aux États-Unis, l'INS—le département de la Justice—et le service des douanes—ainsi que le département du Trésor—se partagent la responsabilité de la première et de la deuxième inspections, et le personnel de ces différents services se partage à tour de rôle les guérites. C'est toujours l'INS qui a connu les plus importants problèmes d'effectifs. Avant le 11 septembre, la frontière canado-américaine comptait 900 douaniers pour l'inspection primaire, effectif qui demeure inchangé depuis 1980. L'effectif de la frontière américano-mexicaine a doublé en 1991 et 1998. L'Aéroport John F. Kennedy a lui seul compte 500 douaniers et inspecteurs de l'INS. Le point d'entrée de Détroit comptait 15 p. 100 seulement du nombre requis d'agents de l'INS.

    La frontière septentrionale des États-Unis, longue de 4 000 milles, compte 1 773 membres dans l'effectif. Sa frontière méridionale, longue de 2 000 milles, en compte 8 300.

    La frontière demeure précaire. Aujourd'hui, le trafic de camions est de retour à la normale, mais le trafic des véhicules et passagers accuse toujours un recul de 20 p. 100, recul encore plus marqué les fins de semaine. La sécurité des postes frontaliers dépend d'un service policier bénévole, la Garde nationale, dont le financement n'est pas permanent et est sujet à des renouvellements. Le plafonnement des heures supplémentaires aux douanes et à l'INS, auquel on avait renoncé initialement, a été réinstauré. Les États-Unis ne sont pas près de rouvrir toutes les guérites aux heures de grande affluence. Cela prend de 9 à 12 mois pour recruter et former des agents de douanes et d'immigration américains, et des centaines de candidats sont actuellement détournés vers le programme des policiers de l'air.

    Pour des raisons de sécurité, l'Association des exploitants de ponts et de tunnels a décidé de restreindre le trafic de façon à éviter que des véhicules n'attendent sur le pont ou dans les tunnels. Cette décision a provoqué un ralentissement et des bouchons locaux dans les villes de Windsor et de Détroit. L'attente aux douanes coûte 50 à 70 $ de l'heure aux entreprises de camionnage. Ces coûts sont absorbés par les expéditeurs lorsque les retards se prolongent. L'interruption de la chaîne de montage dans une usine de fabrication d'automobiles moyenne représente une perte de revenu d'environ 1,5 million de dollars à chaque heure.

    La frontière est déjà achalandée. Treize millions de véhicules, dont 3,4 millions de camions, traversent annuellement la frontière Windsor-Détroit via le pont Ambassador. C'est le poste frontalier commercial le plus achalandé en Amérique du Nord.

À  +-(1055)  

+-

     Neuf millions de véhicules traversent annuellement le tunnel Détroit-Windsor, le poste frontalier pour passagers le plus achalandé au pays. Le tunnel ferroviaire Detroit River a vu passer 446 000 wagons en 2000. En 1999, plus de 9 millions de touristes ont visité la région de Windsor; 7,9 millions d'entre eux étaient américains, et sur ce nombre, 7,5 millions sont venus faire une excursion d'une journée.

    Les postes frontaliers canado-américains, surtout celui de Windsor-Détroit, ont toujours souffert d'un personnel trop peu nombreux, de mauvaises pratiques de gestion de la frontière et d'un financement insuffisant pour l'acquisition de nouvelles technologies permettant d'accélérer la circulation des marchandises et des personnes. Depuis le 11 septembre, nous sommes aux prises avec les mêmes problèmes, auxquels viennent toutefois s'ajouter la menace à la sécurité des ponts, tunnels et postes frontaliers terrestres ainsi que le fardeau d'une nouvelle procédure d'inspection plus rigoureuse. Le tunnel Détroit-Windsor, à titre d'exemple, prévoit qu'il sera nécessaire de doubler la taille de son point d'entrée ou encore de trouver un site secondaire pour les inspections et les prélèvements.

    L'infrastructure actuelle—soit un pont routier, un tunnel routier et un tunnel ferroviaire—est inefficace, mal conçue et inadaptée aux besoins futurs. Les frontières sont en fait des systèmes composés de plusieurs éléments critiques—routes d'accès et intersections, guérites, routes, postes d'inspection primaire et secondaire pour les voitures et les camions, routes de sortie et intersections. La capacité et l'efficacité des frontières se mesurent par le plus faible de ces éléments. Le système actuel est comme un tuyaux d'arrosage: s'il y a un pli dans le boyau, peu importe où il se trouve, l'effet est le même sur le débit.

    Le système frontalier idéal, à long terme, doit garantir que chacun de ces éléments présente une capacité comparable. Compte tenu des taux de croissance d'avant le 11 septembre, on peut dire que les postes d'inspection primaire et secondaire constituent aujourd'hui le point d'étranglement clé et conditionnent la durée des retards dans l'ensemble du système. Les problèmes de capacité insuffisante et les retards ne surviennent que pendant les heures de grande affluence, et ne s'appliquent pas à des volumes quotidiens ou annuels moyens.

    La capacité de l'inspection primaire dépend du temps qu'il faut pour compléter cette étape et du nombre de guérites en service. La capacité de l'inspection primaire est conditionnée par le temps de traitement à la douane, les taux de renvoi et le nombre de places de stationnement. À Windsor-Détroit, aux heures d'affluence normales, le trafic dépasse les capacités américaines d'inspection primaire du double ou du triple, même si toutes les guérites sont ouvertes, ce qui n'est pas le cas. Durant ces mêmes périodes, la capacité américaine d'inspection secondaire est dépassée dès qu'on atteint le seuil des 30 p. 100 de renvois, avec un temps de traitement de 45 minutes et un taux d'inspection des véhicules de 1 p. 100. L'accroissement des effectifs à lui seul ne saurait résoudre le problème de capacité.

    Le temps considérable qu'il faut pour compléter les contrôles de sécurité ne fera que réduire davantage cette capacité. L'un des problèmes que posent les programmes de grands voyageurs, c'est que les postes frontaliers sont trop petits et que les véhicules attendent tous ensemble dans la même file jusqu'à la dernière minute avant d'arriver à la guérite. Il y a différentes solutions. Les capacités d'inspection primaire et secondaire pourraient être accrues au moyen d'inspections préalables sur un site plus vaste, et en prévoyant une surveillance vidéo de la route. Traditionnellement, le service des douanes américains s'est opposé à cela. Le Canada applique déjà cette pratique pour les inspections secondaires à Windsor. Les États-Unis le font pour l'inspection secondaire des camions au tunnel.

    Par ailleurs, on pourrait envisager des installations d'inspection partagées pour accroître la sécurité de l'infrastructure. Au moins trois entreprises privées proposent des solutions à long terme au problème de la capacité frontalière: la première proposition est le projet de pont Mich-Can pour Windsor ouest; la deuxième est le jumelage du pont Ambassador; et la troisième, le projet de supertunnel proposé par le CP et Borealis, qui consiste à convertir le tunnel ferroviaire pour en faire un tunnel pour camions tout en construisant un nouveau tunnel ferroviaire. Tous les projets comportent une route réservée aux camions pour relier l'autoroute 401 à l'autoroute américaine 75.

    L'avenir à long terme de nos postes frontaliers sera étudié dans le cadre d'un partenariat canado-américain comprenant des intervenants des gouvernements américain, canadien, ontarien et du Michigan. L'étude vise à confirmer qu'il existe un besoin de capacité accrue à la frontière, à recenser les différentes solutions possibles en matière de traverses frontalières et de transports, à évaluer la faisabilité des solutions de rechange du point de vue du transport et des points de vue environnemental et socio-économique; il s'agit aussi de cerner la nature et le lieu approximatif des solutions recommandées. Le mois dernier, le contrat a été accordé pour la réalisation de la première étape du processus de planification et d'évaluation environnementale en six étapes.

    Ce sont des décisions avec lesquelles nos collectivités devront vivre pour les 50 prochaines années. Elles sont délicates du point de vue environnemental et controversées du point de vue politique. Il est important que le gouvernement prenne l'initiative dans la recherche du meilleur projet.

Á  +-(1100)  

+-

     Permettez-moi de vous citer le Detroit Free Press: «C'est au gouvernement de veiller à ce que le choix se fonde sur l'intérêt général, et non sur la rapidité de mise en chantier».

    Je vous cite une lettre du NBEST northern border management task force au président des États-Unis et au premier ministre du Canada: «La sécurité nationale de nos deux pays est tributaire de notre sécurité économique, et notre sécurité économique dépend du bon fonctionnement de nos frontières.»

    L'incertitude liée aux attentes peut poser de réels problèmes au commerce et à notre économie. Les décisions d'investir à long terme et d'octroyer des contrats seront influencées par la fiabilité de la circulation transfrontalière des produits et des personnes.

    Les attentes et l'incertitude perpétuelles engendrent des coûts. Pour les produits, cela signifie un niveau moindre de spécialisation transfrontalière et un déclin de productivité; cela peut aussi entraîner une augmentation des stocks et une perte de souplesse; les entreprises de camionnage retardent les coûts aux points d'entrée privilégiés; et enfin, il y a les coûts engendrés par le détournement du trafic vers d'autres postes frontaliers. Pour les voyageurs, les retombées sont les suivantes: diminution du magasinage outre- frontière et des déplacements pour loisirs; perte d'accès à la main-d'oeuvre spécialisée d'outre-frontière; et coûts liés aux attentes pour les grands voyageurs.

    Le problème de l'incertitude par rapport aux attentes ne se pose pas uniquement à Windsor; c'est une menace qui pèse sur toute l'économie du pays. Les fabricants d'automobiles et les fournisseurs attendent de voir le succès que connaîtront la déclaration pour la création d'une frontière intelligente et d'autres initiatives avant d'orienter leurs investissements ou leurs stratégies. L'interdépendance croissante des industries canadiennes et américaines de l'automobile pourrait être menacée si nous ne parvenons pas à garantir des délais de traversée de la frontière qui soient prévisibles.

    Des décisions sont en voie d'être prises sur des questions de gestion frontalière qui auront une incidence sur l'avenir de l'économie canadienne. C'est une occasion unique qui s'offre à nous de régler des problèmes de frontière que nous connaissons depuis des années. La conjoncture est unique car elle réunit la volonté politique des deux pays, l'appui de l'opinion publique et les fonds nécessaires.

    Avant de céder la parole à M. Morgan, je vous signale qu'il y a des documents d'information dans vos dossiers, plus précisément l'article du Detroit Free Press que j'ai cité ainsi que d'autres documents.

    J'invite maintenant M. Morgan à parler de la relation économique canado-américaine.

Á  +-(1105)  

+-

    La présidente: Merci.

    Je voulais simplement vous dire que le maire était ici ce matin et qu'il a soulevé avec fermeté beaucoup des points que vous avez abordés ici et que ses propos ont été appuyés par mes collègues, qui s'y connaissent dans le dossier. J'ai souligné à tout le monde que nous avons prévu une visite à la frontière pour y rencontrer quelques intervenants, ce qui nous permettra de constater la portée de vos propos.

    Deuxièmement, nos collègues rencontreront leurs homologues américains—sénateurs et représentants—pour discuter à fond de ces enjeux. J'espère que tout cela sera inclus dans les recommandations que formulera le comité.

    Tout ce que nous disons ici est transcrit et sera affiché sur notre site Web, ainsi que les délibérations du comité. Nous espérons pouvoir intégrer vos recommandations et vos propos dans le processus visant à régler les problèmes frontaliers.

    Monsieur Morgan.

+-

    M. Alfie Morgan (membre du conseil d'administration de la Chambre de commerce de Windsor et du district): Merci, madame la présidente.

    Je ne reviendrai pas sur ce dont vous avez discuté ce matin avec le maire et sur ce qu'a dit Mme Smith. Je me réjouis de voir que vous êtes conscients du fait que la situation est critique à Windsor. Je suis également heureux de voir que MM. Pickard et Comartin siègent au comité, ce qui fait que nous serons très bien représentés, je crois, au moment du rapport final.

    Vous avez entendu la situation actuelle exposée en détail: les faits sur le terrain au moment où on se parle. Je vais aborder la question plus générale des relations économiques canado-américaines, et plus précisément l'avenir de cette relation.

    Il s'avère que l'ALE et l'ALENA ont créé beaucoup de débouchés pour les entreprises canadiennes. Conséquemment, bon nombre de ces entreprises ont adopté une vision nord-américaine du marché et ont commencé à se comporter en conséquence. Il en résulte qu'aujourd'hui, nous avons une plus grande intégration et une plus grande dépendance en Amérique du Nord.

+-

     D'une certaine façon, une vision semble se dégager du comportement des entreprises, et c'est une vision d'un marché nord-américain qui mène à une seule économie nord-américaine. Dieu seul sait quelles en seront les conséquences politiques, je me réjouis d'en parler ce matin. Essentiellement, il faut se demander quel est l'avenir vers lequel nous mène cette intégration. Il nous faut une vision. Voilà le plus important: Il faut se fixer une vision ou une stratégie. Sommes-nous d'accord pour créer un marché nord-américain unique, une économie nord-américaine unique?

    Sur cette question, des choix s'offrent à nous. Certains modèles de relation sont présentés dans les documents d'information. Je ne vais pas les énumérer parce que vous les connaissez déjà. Mais lorsque l'on discute avec le milieu des affaires, et mon point de vue se veut davantage un résumé des points de vue de la communauté des affaires plutôt qu'un point de vue personnel, il semble qu'une approche à deux volets s'impose.

    À court terme, la plupart des gens d'affaires de la région—et je suis convaincu que ceux du reste de l'Ontario et du Canada sont d'accord—s'entendent pour dire qu'il nous faut approfondir l'ALENA. Voilà ce qui semble être la solution à court terme la plus appropriée.

    Lorsque je parle d'approfondissement, j'entends une collaboration avec les États-Unis pour éliminer les irritants commerciaux qui existent nous. Ces irritants commerciaux découlent du fait que, bien que nous nous efforcions de créer un marché commun nord-américain, les partenaires de l'ALENA ont conservé le pouvoir d'agir comme des pays souverains. Alors que s'exercent sur eux des pressions tendant à l'interdépendance, les partenaires maintiennent ces pouvoirs d'indépendance. Les Américains, par exemple, pourraient appliquer des mesures antidumping ou toute autre barrière non tarifaire à leur guise. Or, il faut agir pour créer une communauté, ou du moins pour diminuer ce degré d'indépendance des trois pays, de façon qu'ils puissent former un seul marché et réaliser la vision de l'ALENA—si toutefois il y en avait une.

    À court terme, bien sûr, comme je l'a dit, l'approfondissement de l'ALENA s'avérera la bonne solution. La déclaration sur la frontière intelligente est une mesure importante en vue de l'approfondissement de l'ALENA, et je me réjouis de voir qu'elle est mise en oeuvre ici. Une fois que ces 30 points auront été mis en oeuvre, la moitié du travail aura été fait pour concrétiser cette solution. Si nous pouvons aller un peu plus loin et harmoniser nos normes et nos procédures de façon qu'elles deviennent prévisibles pour les entreprises et que la circulation commerciale devienne prévisible aussi, ce serait excellent.

    À long terme, nous devrions peut-être envisager l'union douanière. Ce n'est pas une panacée. L'union douanière ne réglera pas tous les problèmes parce que les trois pays aimeraient conserver leur indépendance et leur pouvoir unilatéral de prendre des mesures commerciales. Toutefois, l'union douanière permettrait au moins en bonne partie de réduire les irritants commerciaux. Elle faciliterait la circulation des produits. Peut-être pourrions-nous aller un peu plus loin pour faciliter la circulation des personnes aussi. Cela constituerait une bonne base sur laquelle bâtir l'avenir, que nous choisissions ou non d'adopter une véritable politique de marché et d'économie unique.

    Je m'arrête là parce que je suis sûr que vous me poserez beaucoup de questions. Je me ferai un plaisir d'y répondre. Je souhaite également laisser à mes collègues l'occasion de s'exprimer.

Á  +-(1110)  

+-

    La présidente: Merci.

    Hier, nous étions à Toronto où nous avons pris part à une vive discussion sur cette vision et les questions entourant l'ALENA: l'approfondissement de l'ALENA, le contraste entre les règles de l'ALENA et de l'OMC, et le point de vue, appuyé par certains, selon lequel les règles le l'OMC sont beaucoup plus claires et beaucoup plus équitables, etc. C'est pourquoi je vous remercie, monsieur Morgan; vous vous inscrivez dans la lignée d'autres témoins qui sont venus comparaître.

+-

    M. Alfie Morgan: Je suis désolé de ne pas avoir mentionné cela. Je crois que nous avons une excellente occasion de faire pencher cette relation en notre faveur. Si nous laissons les événements se dérouler d'eux-mêmes, Dieu sait ce que l'avenir nous réserve. Si nous avons une vision et une stratégie qui nous permettent plus ou moins d'orienter la relation en notre faveur—je tiens compte, évidemment, de la taille relative des États-Unis, mais nous aurons suffisamment d'influence pour orienter la relation—, profitons-en dès maintenant, et le plus tôt possible.

Á  +-(1115)  

+-

    La présidente: Merci.

    Madame Smith?

    Monsieur Comartin, dans ce cas. Avez-vous des questions ou des remarques?

+-

    M. Joe Comartin: Merci, madame la présidente.

    J'aimerais remercier les représentants de la Chambre de commerce d'être venus nous rencontrer. J'aimerais signaler qu'ils ne se sont pas vantés lorsqu'ils étaient des nôtres mais j'aimerais rappeler qu'après le 11 septembre, la Chambre de commerce du côté canadien de la frontière et la Chambre de commerce de Détroit ont collaboré et fait de l'excellent travail de base dans le dossier des postes frontaliers, ce qui m'a permis bien franchement de poser de très bonnes questions à la Chambre.

    Vous avez été une excellente source de renseignements à cet égard. Je voulais le reconnaître publiquement. Et encore une fois, j'aimerais vous remercier de ce que vous avez fait aujourd'hui parce que je crois que vous êtes venus nous présenter des chiffres très révélateurs dans un format pratique pour le comité.

    Monsieur Morgan, je dois malheureusement partir, c'est regrettable, car j'étais impatient d'avoir avec vous une bonne discussion parce que je crois que votre façon de voir les choses et la mienne sont bien différentes. Je reconnais, comme vous l'avez signalé, qu'il nous faut une vision compte tenu du point où nous en sommes avec l'ALENA et certains des problèmes qui se manifestent dans les secteurs forestier, agricole et, plus récemment, automobile. La façon dont nos accords commerciaux sont mis en oeuvre devient de plus en plus importante pour l'économie, tout particulièrement ici, à Windsor, dans le secteur de l'automobile.

    Ayant fait ces commentaires, madame la présidente, j'aimerais poser une question. Je devrai par la suite partir. J'ai déjà parlé de la question à Mme Smith, mais j'aimerais vous donner de plus amples détails.

    Il y a un autre problème dans cette région qu'on n'a pas encore mentionné aujourd'hui, celui du tourisme. Par le passé, nous laissions, dans cette région, les gens passer d'un côté à l'autre de la frontière--et il s'agit principalement de plaisanciers--s'ils étaient détenteurs d'un formulaire qu'on appelait le I-68. Ce document leur permettait de traverser la frontière en bateau. Tout ce qu'ils avaient à faire, lorsqu'ils avaient le formulaire, était de téléphoner et de dire aux services des douanes qu'ils étaient dans l'autre pays--tout particulièrement les États-Unis--et c'était tout. Parfois les agents de douane venaient vérifier leur embarcation, mais habituellement il suffisait de téléphoner.

    Encore une fois, aux fins du procès-verbal, j'aimerais rappeler que la rivière Détroit est le cours d'eau le plus achalandé du monde. Cela n'est pas attribuable exclusivement à la circulation commerciale car un très grand nombre d'embarcations privées circulent dans ce cours d'eau.

+-

    La présidente: Avez-vous dit la plus achalandée au monde?

+-

    M. Joe Comartin: C'est ça, au monde. Tout le monde ne le sait pas, mais c'est un fait.

+-

    La présidente: Au monde?

+-

    M. Joe Comartin: Au monde. On retrouve le plus grand nombre d'embarcations dans la rivière Détroit qu'ailleurs au monde. C'est un fait.

    Depuis le 11 septembre, il est beaucoup plus difficile d'obtenir ces formulaires I-68. Évidemment, nous n'en sommes pas vraiment conscients parce que, après ces attentats, est venu l'automne, on préparait les bateaux pour l'hiver et on ne s'en est pas servi depuis en raison du mauvais temps. Le fait est que la semaine dernière on a entendu dire qu'on songeait à prélever des empreintes digitales comme nouvelle méthode d'identification.

    J'ai parlé à Mme Smith et elle m'a dit qu'elle ne savait pas vraiment où en était cette proposition. Nombre de plaisanciers, des deux côtés de la frontières, m'ont dit qu'ils s'inquiétaient de la situation.

    Mme Smith m'a dit que la Chambre de commerce se renseignera et qu'elle nous fournira les données pertinentes. Une fois que nous aurons ces renseignements, j'aimerais que cela soit annexé aux témoignages du comité.

    Cela dit, je ne sais pas si Mme Smith veut ajouter quelque chose, mais je dois vraiment vous quitter.

+-

    La présidente: Nous allons vous excuser; nous vous sommes reconnaissants d'avoir pu passer une si longue période avec nous aujourd'hui. Merci beaucoup, monsieur Comartin. Bonne journée.

    Madame Smith, voulez-vous ajouter quelque chose sur le formulaire I-68?

+-

    Mme Linda Smith: Je peux simplement confirmer que c'est ce dont nous avons parlé. Nous serons heureux de vous fournir de plus amples renseignements. En fait, ce n'est qu'au cours des cinq ou six derniers jours qu'on a attiré l'attention de la Chambre de commerce sur cette question, simplement parce que la saison commence. Nous vous fournirons ces renseignements le plus tôt possible. En fait, nous communiquerons avec le bureau de M. Comartin ainsi que celui de la présidente.

+-

    M. Joe Comartin: J'aimerais signaler, madame la présidente, que le consulat canadien à Détroit a été d'une très grande aide dans ce dossier. En effet, les employés du consulat surveillent la situation de près pour moi. Je n'ai pas eu l'occasion de communiquer avec le consulat au cours des 10 derniers jours, et vous voudrez peut-être les contacter pour leur demander de faire le point sur la question.

+-

    La présidente: Nous leur parlerons peut-être cet après-midi. Qui sait? J'espère que vous n'hésiterez pas à communiquer avec nous pour nous fournir de plus amples renseignements sur les questions qui ont été abordées aujourd'hui, car tout cela serait fort utile à nos attachés de recherche. Merci.

    Monsieur Pickard, voulez-vous ajouter quelque chose?

Á  +-(1120)  

+-

    M. Jerry Pickard: J'aimerais tout d'abord féliciter la Chambre de commerce de cette excellente présentation. Madame Smith, vous avez vraiment bien su expliquer l'importance économique stratégique de notre région, et cela est très important. Je crois que le gouvernement canadien doit faire tout ce qu'il peut pour assurer une croissance économique saine de la région. Le potentiel de croissance dans cette région est excellent.

    À mon avis, l'Accord de libre-échange nord-américain est des plus importants pour Windsor, Détroit, le Canada, les États-Unis, l'Ontario et le Michigan parce que tous ces intervenants profitent énormément de cette entente. L'élimination de pratiquement tous les tarifs sur les pièces automobiles et l'élimination des tarifs sur les véhicules assemblés qui sont expédiés du Canada aux États-Unis et vice versa rendent cet appui continu essentiel. Nous savons de plus que d'ici la fin de l'année prochaine les tarifs imposés aux véhicules venant du Mexique seront abolis. Encore une fois, les véhicules et les pièces automobiles permettront aux monteurs ici à Windsor d'obtenir des pièces n'importe où et, à mon avis, de participer à un cycle plus dynamique en Amérique du Nord.

    Monsieur Morgan, ce que vous avez décrit est essentiel. Je crois que le gouvernement canadien a tout fait pour créer les mécanismes qui appuieront notre secteur de l'automobile, nos fournisseurs, et tous ceux qui participent à l'industrie de la construction automobile. À mon avis, de très bonnes choses ont été faites au nom du gouvernement fédéral également, et je crois qu'il importe de rappeler que d'ici l'an 2005, le taux d'imposition des sociétés sera plus avantageux au Canada qu'aux États-Unis, et ce, de 5 p. 100. Je crois qu'il importe de signaler ce que notre gouvernement a fait et de s'assurer, dans des régions données, que l'industrie de l'automobile ainsi que l'industrie manufacturière s'épanouissent.

    Nous devons de plus féliciter des compagnies comme DaimlerChrysler d'avoir fait des investissements aussi importants. Je crois qu'on a investi 460 millions de dollars pour rééquiper une usine ici l'année prochaine. Les compagnies comme Honda, Toyota, General Motors et Ford ont toutes participé à la croissance de l'Ontario. À mon avis, il faut adopter une politique qui présentera le Canada comme étant l'endroit où il faut faire des affaires et, en agissant dans les dossiers des finances, de la technologie, de la main-d'oeuvre et d'autres dossiers, faire en fait du Canada le meilleur endroit au monde où faire des affaires.

    Je crois que notre partenariat--le gouvernement fédéral, le gouvernement provincial, les administrations municipales et les gens comme vous qui font partie du secteur privé--permet de mettre en commun les compétences nécessaires pour progresser rapidement. Je sais que vous avez toujours participé à ce partenariat. Je vous ai rencontré ainsi que vos homologues à plusieurs occasions afin de mieux comprendre les besoins de la région.

    Je me préoccupe beaucoup en ce moment d'une des questions que vous avez soulevées, Linda, soit le plafond que les Américains ont imposé aux heures supplémentaires à la frontière. Je suis convaincu que vous, plus que n'importe qui d'autre à la Chambre de commerce, savez pertinemment ce que cela peut représenter.

    Après le 11 septembre, le Service des douanes américain avait éliminé le plafond afin de laisser tous les agents des douanes travailler toutes les heures supplémentaires nécessaires afin d'assurer le service au poste frontalier. Il y a environ deux ou trois semaines, il a modifié sa politique.

+-

     Ce changement de politique crée une grave entrave dans la région. Je crois que notre comité, ainsi que nos collègues qui sont en contact avec nos homologues américains, doit vraiment indiquer que ce plafonnement nous créera de graves problèmes.

    Les Américains ont décidé que le plafond qui avait été éliminé après le 11 septembre serait rétabli. Non seulement cela, mais tout le temps supplémentaire accumulé par les agents des douanes du poste frontalier sera intégré au système. Ainsi, ils ne peuvent plus accumuler d'heures supplémentaires et devront les épuiser.

    Nous aurons moins de service à la frontière dorénavant. Je crois que c'est en partie pourquoi nous avons vu des files d'attente de quatre milles de long ces dernières semaines.

    Tout cela est attribuable à un système inefficace qui a été modifié en raison d'une politique adoptée par Washington. Il importe de communiquer nos inquiétudes à nos homologues et de nous assurer que l'on comprend bien que nous sommes forts gênés par ce plafonnement. Je mentionne cette question parce qu'il s'agit probablement là du problème le plus important que nous avons au niveau du débit de la circulation; il faut absolument régler le problème immédiatement.

    Linda ou Alfie, pourriez-vous nous parler de ce problème?

Á  +-(1125)  

+-

    M. Alfie Morgan: Je suis parfaitement d'accord avec vous. C'est une question fort critique. Au moment même où nous avons besoin d'un plus grand nombre d'employés, les Américains empêchent leurs employés de faire du temps supplémentaire. Les Américains disent qu'il faut entre huit et neuf mois de formation avant qu'un agent des douanes puisse entrer en fonction. Cependant, ils ne sont pas prêts à prendre des mesures à court terme pour régler le problème.

    J'aimerais réitérer ce que vous avez dit et même ajouter quelque chose. Le gouverneur Blanchard, l'ancien ambassadeur des États-Unis au Canada, est candidat au poste de gouverneur du Michigan, un poste qu'il a déjà occupé. À une émission radiophonique, il a dit que le gouvernement canadien avait fait tout ce qu'il pouvait, et qu'il était impatient de répondre aux exigences des Américains. Il a dit que le problème était principalement attribuable aux responsables de l'élaboration de la politique à Washington. En fait, il a dit qu'il se rendrait à Washington pour leur en faire voir de toutes les couleurs.

    Je ne veux pas répéter ce qu'il a dit, mais il voulait vraiment leur indiquer de la façon la plus claire possible que les Américains n'avaient aucune raison de laisser les choses en l'état. Les Canadiens ont fait tout ce qu'ils peuvent, et même plus. Il appartient maintenant aux Américains d'agir. C'est pourquoi il nous faut aller à Washington et lancer une campagne de lobbying pour les forcer à rajuster leur tir. Il a parfaitement raison.

+-

    M. Jerry Pickard: La Chambre de commerce pourra peut-être vous aider à travailler avec vos homologues américains, car vous avez de très bons rapports avec eux. Ils pourront peut-être exercer des pressions sur les politiciens américains du Michigan également.

+-

    M. Alfie Morgan: Nous le ferons. Les deux chambres de commerce se réunissent le 14 mai.

    Je vous promets que nous ferons ces commentaires. Nous leur demanderons d'utiliser leur influence, et de nous aider.

+-

    Mme Linda Smith: Vous aurez peut-être constaté que dans notre document il y avait beaucoup de commentaires touchant les Américains. C'était intentionnel.

    Avant et depuis le 11 septembre, nous avons eu d'excellents rapports avec la Detroit Regional Chamber of Commerce. Je dois les féliciter de leurs efforts. Ils ont plus de 21 employés à plein temps qui se penchent sur ce dossier, et ils ont su se faire les chefs de file dans cette affaire.

    Nous avons pu polariser le secteur des affaires des deux côtés de la frontière dès le début. Quelques jours après le 11 septembre, nous nous sommes rencontrés lors de plusieurs forums du même genre.

    Le NBEST--le Northern Border Economic Security Task Force--a rapidement été mis sur pied. La Chambre de commerce en fait partie. Chaque grand intervenant du secteur des affaires en fait également partie. J'ai une copie du dernier document envoyé à George Bush et à Jean Chrétien. Je vous le remettrai aujourd'hui, ou je pourrai vous faire parvenir les derniers communiqués de ce groupe lorsqu'ils seront disponibles.

+-

    La présidente: Si vous pouviez nous laisser ce document...

    La conjoncture est favorable car il pourrait y avoir un vote par tous les partis à la Chambre des communes et au Sénat. Les députés qui rencontrent leurs homologues du Congrès et du Sénat américains pourraient à ce moment-là soulever, entre autres, la question du plafonnement.

+-

    Mme Linda Smith: Je vous encourage également aujourd'hui lors de votre visite, lorsque vous serez sur les lieux—c'est-à-dire au pont et dans le tunnel—à lancer ce genre de dialogue, parce qu'ils feront tout ce qu'ils peuvent. La Chambre de Détroit a dit que ce n'était que provisoire. C'est pourquoi dans notre exposé nous avons abordé l'infrastructure et les besoins des postes frontaliers à court, à moyen et à long terme.

    Je tiens à vous remercier d'avoir soulevé la question parce qu'il s'agit d'un élément fondamental dans ce processus, en fait notre bouchon d'étranglement.

Á  +-(1130)  

+-

    M. Jerry Pickard: Certaines des propositions à long terme étaient très intéressantes et je crois que les diverses organisations ont fait preuve d'innovation lorsqu'elles ont étudié l'amélioration à long terme de cette frontière continue.

    Vous avez parfaitement raison, l'analogie du bouchon d'étranglement est parfaite, il faut donc insister là-dessus. Les solutions ne seront pas faciles.

    J'en reviens encore une fois à DaimlerChrysler, car votre entreprise reçoit d'excellents services ici à Windsor et fait beaucoup d'affaires aux États-Unis et au Canada; toute anicroche dans le système de livraison juste à temps vous crée de graves problèmes et se répercute sur les coûts. On m'a dit à plusieurs reprises que des représentants de votre compagnie ont indiqué très clairement qu'il vous était très difficile de fonctionner quand il y a des ralentissements.

    Peut-être pourriez-vous nous aider et ajouter un peu à ce que Linda a déjà dit. Je crois qu'elle a bien su nous expliquer la situation des ralentissements dans le secteur du camionnage, 50 $ à 60 $ de l'heure, et les fermetures d'usines, ce qui représente un million de dollars par jour. Cela veut dire que vous devez attendre pendant une heure et demie pour recevoir un moteur ou vous devez attendre une pièce pendant deux heures, et pendant ce temps-là, l'usine ne tourne pas.

+-

    Mme Lori Shaloub (directrice de la politique publique et des affaires extérieures, DaimlerChrylser Canada; Chambre de commerce de Windsor et du district): Merci, monsieur Pickard. Vos commentaires sont fort judicieux. En fait, en raison de notre intégration et de notre interdépendance avec les États-Unis, la livraison juste à temps est essentielle à notre compagnie. Comme Linda l'a signalé, chaque heure perdue à la ligne de montage représente une perte de revenu de 1,5 million de dollars.

    Cela vaut tout particulièrement dans la région de Windsor car nous lançons la Pacifica, une nouvelle voiture. Nous procéderons à l'usine de montage de Windsor à la fabrication souple, car nous pourrons fabriquer deux véhicules dans la même usine. Dans ces circonstances, la livraison juste à temps revêt une importance encore plus critique, parce que nous n'avons pas à l'usine d'espace d'entreposage supplémentaire pour de grandes quantités de pièces automobiles. En fait, on m'a dit que peu de temps après le 11 septembre, nous n'aurions même pas pu fonctionner quelques heures de plus si les livraisons n'avaient pas été faites.

    Évidemment, les pénuries, le manque à produire, les pertes de revenu sont des choses très importantes, non seulement pour notre organisation aux États-Unis, mais comme ce genre d'information est communiqué à notre organisation mère en Allemagne, ces questions sont critiques pour l'exercice de notre activité.

    DaimlerChrysler Canada est toujours intéressé à participer à des projets pilotes. Nous avons participé activement au programme d'autocotisation des douanes, ce qui a été fort utile dans le cadre du programme C-TPAT. Nous continuons à participer aux initiatives du gouvernement, lorsque c'est possible, et nous aussi nous félicitons le gouvernement pour tout ce qu'il a fait depuis le 11 septembre.

+-

    M. Jerry Pickard: Merci beaucoup.

    Il y a une dernière chose dont je voudrais parler à propos de l'industrie de l'automobile. D'aucuns disent que nous sommes menacés, que notre secteur ne va pas bien. D'après tous les renseignements que j'ai obtenus...Cela provient du ministre de l'Industrie. Après des consultations avec les grands fabricants d'automobiles, il affirme que le Canada est dans une situation très avantageuse en Amérique du Nord. Sur le plan des salaires, de la compétence des travailleurs, des bas taux d'intérêt, de la fiscalité, du coût de l'énergie, nous avons, dans tous les cas, un avantage net par rapport au Michigan, aux États du sud-ouest, ou à d'autres endroits. Nous sommes très compétitifs.

+-

     Le gouvernement s'est-il donné la peine d'écouter vos préoccupations, en vue d'y répondre grâce à un plan d'action pour faire avancer les choses? Il est capital que nous le sachions également.

Á  -(1135)  

+-

    Mme Lori Shaloub: C'est un point très important.

    L'Association canadienne des constructeurs de véhicules dont nous faisons partie, a préparé un document d'orientation intitulée «Politique stratégique de l'automobile pour le Canada et l'Ontario». Le document fait état de nombreux enjeux importants.

    La concurrence sur les marchés est extrêmement importante pour le Canada car de plus en plus les décisions concernant les investissements et la production sont prises à l'échelle mondiale. La concurrence n'existe plus seulement entre le Canada et les États-Unis, elle est désormais mondiale. Il est très important que les trois paliers de gouvernement reconnaissent cela. La concurrence devient de plus en plus serrée.

    Comme vous le savez sans doute, le gouvernement provincial, par l'intermédiaire du cabinet du ministre Flaherty, vient d'annoncer une table ronde sur l'automobile qui se déroulera en mai afin de discuter des enjeux importants pour l'industrie. L'essentiel est que nous puissions préserver nos investissements au Canada et les intensifier là où c'est possible.

    Nous allons donc participer à des discussions avec les représentants des gouvernements provincial et fédéral et nous espérons que le gouvernement nous écoutera avec attention. Il est capital d'agir maintenant pour protéger ce que nous avons déjà, pour le mettre en valeur, et pour que nous puissions être compétitifs au cours des 10, 15 ou 20 prochaines années.

+-

    M. Jerry Pickard: Je pense qu'il faut que les membres du comité comprennent que cette société, DaimlerChrysler, a investi 1,5 milliard de dollars en technologie ici à Windsor même au cours des dix dernières années. L'entreprise y joue donc un rôle important au niveau des affaires.

+-

    La présidente: Merci.

    Monsieur  Drummond, nous ne voulons pas oublier de parler de l'environnement pendant cette discussion. On nous a dit qu'il fallait des évaluations environnementales pour les infrastructures envisagées dans la région. Avez-vous quelque chose à ajouter?

+-

    M. Jim Drummond (membre, conseil d'administration, Chambre de commerce de Windsor et du district): Je me bornerai à dire que le processus d'évaluation environnementale devrait viser des solutions à court terme comme à long terme. Nous tenons à exhorter les membres du comité à veiller à ce que le processus d'examen se fasse rapidement.

    Autrefois, j'étais moi-même examinateur et je sais que ces documents ont tendance à être égarés dans le processus. Au moment des évaluations environnementales, il faut veiller à imposer aux examinateurs des dates butoirs pour que le processus se déroule rondement. Autrement, c'est un autre grain de sable dans l'engrenage.

    Merci.

+-

    La présidente: Merci.

    Je tiens à vous remercier d'être venus. Je sais que vous êtes pressés par le temps et que nous sommes déjà en retard sur notre horaire. Nous vous remercions d'être restés discuter avec nous. Je tiens à vous féliciter pour le travail que vous faites. Je tiens à vous dire que votre région est très bien représentée et que vos députés ne cessent de soulever les questions dont il faut s'occuper.

    Il ne s'agit pas seulement de Windsor. Il y a très longtemps, j'étais à Shanghai, et on ne cessait de dire que Shanghai était la tête du dragon. Quand la tête oscille, le reste du corps suit. Je pense qu'on peut utiliser cette analogie ici, car en présence d'une tête de dragon, il est important de veiller sur elle pour le reste de l'économie, le reste du pays, le reste de la province. On a aussi beaucoup entendu parler de négligence, de l'importance de cette frontière septentrionale et du travail nécessaire pour sensibiliser les gens.

    Nous vous remercions d'être venus et de nous avoir exposé les problèmes. Nous allons en tenir dûment compte au moment de la rédaction de notre rapport, qui, espérons-le, sera prêt à l'automne. Le rapport pour le G-8 sera prêt avant le début du mois de juin, parce qu'il y a une réunion ministérielle en vue de la préparation du plan d'action que l'on soumettra au G-8, et le temps presse si nous voulons que ce rapport soit utile dans le processus.

    Monsieur Morgan, vous avez évoqué un élément très important, une vision pour l'Amérique du Nord. Nous sommes allés à Washington et à Mexico. Nous avons examiné le dossier en posant des questions--sans préjuger, mais nous avons posé des questions sur ce qui est important si nous voulons nous voir comme appartenant... s'il y a une vision pour une communauté nord-américaine.

    Merci.

-

     C'est la fin de nos délibérations. La séance est levée.