ENVI Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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STANDING COMMITTEE ON ENVIRONMENT AND SUSTAINABLE DEVELOPMENT
COMITÉ PERMANENT DE L'ENVIRONNEMENT ET DU DÉVELOPPEMENT DURABLE
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le mercredi 6 juin 2001
Le président (M. Charles Caccia (Davenport, Lib.)): Bienvenue à la réunion, qui porte sur les aspects juridiques du projet de loi C-5. Nous disposons d'un temps limité, jusqu'à 17 heures, et nous devrions donc commencer maintenant. Nous avons le quorum.
Au nom des membres du comité, j'aimerais souhaiter la bienvenue à Mme Dawson et à M. Piragoff, du ministère de la Justice.
Les membres du comité ont l'impression que l'interprétation des pouvoirs constitutionnels du gouvernement fédéral mérite plus ample discussion. Il y a un document qui aboutit à cette conclusion, document publié en novembre 1999 par l'honorable Gérard La Forest, Dale Gibson et Rangi Jeerakathil, que vous connaissez sans doute très bien. Comme vous le savez sans doute aussi, Dale Gibson a comparu devant le comité, et il nous a exprimé son point de vue par écrit aussi.
Entre autres, des juristes éminents ont averti le comité que si la loi devait prévoir des interdictions établies par voie de règlement, le projet de loi C-5 risquerait davantage d'être perçu comme étant de nature réglementaire plutôt que pénale; bien sûr, cette observation mérite notre attention.
Sans aller dans les détails concernant le contexte et les raisons pour lesquelles nous avons décidé de tenir cette réunion, il vaudrait peut-être mieux demander d'abord aux représentants du ministère de la Justice de nous présenter leur exposé, pour lequel il n'y a pas de document écrit, si je comprends bien, et nous passerons ensuite aux questions.
Mme Mary Dawson (sous-ministre déléguée, Affaires constitutionnelles, ministère de la Justice): Merci. J'aimerais remercier le comité d'avoir invité le ministère de la Justice à comparaître ici cet après-midi. Si vous me le permettez, je ferai quelques remarques liminaires, et je crois que vous aurez ensuite des questions.
Vous avez invité le ministère de la Justice à comparaître pour aider le comité à traiter des questions constitutionnelles de nature générale qui toucheraient le projet de loi C-5.
Le président: Nous en sommes très conscients.
Mme Mary Dawson: J'espère pouvoir vous être utile en évoquant, de façon générale, certaines des questions constitutionnelles qui vous intéressent.
En tant que conseillère juridique auprès du gouvernement, c'est le gouvernement et non le Parlement qui est mon client, mais je tâcherai de vous donner le plus d'information possible. Le projet de loi C-5, dans sa forme actuelle, a été étudié en détail par le ministère de la Justice. Au cours des huit dernières années, le ministère a tenu compte de toute une gamme d'avis juridiques. Cela s'est fait soit en demandant des mémoires, soit, dans certains cas, en organisant des rencontres avec les juristes ayant fourni des avis et différents fonctionnaires du ministère. Il y a eu beaucoup de consultation et de discussion au sujet des différents projets de loi présentés au cours de la dernière décennie. Nous sommes convaincus que le projet de loi C-5, dans sa forme actuelle, est constitutionnel.
La compétence sur l'environnement n'est pas une question simple. Il n'est pas étonnant que vous ayez entendu des avis divergents à cet égard. L'environnement n'est pas énuméré comme tel à l'article 91 ou 92 de la Loi constitutionnelle de 1867. Pour déterminer qui, du gouvernement fédéral ou des provinces, a compétence, il faut s'appuyer sur au moins une des catégories énumérées à l'article 91 ou 92, le cas échéant. La compétence provinciale pourrait être justifiée en vertu du paragraphe 92.5, l'administration des terres publiques appartenant à la province; du paragraphe 92.13, la propriété et les droits civils; ou du paragraphe 92.16, les matières d'une nature locale ou privée.
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La compétence fédérale, pour sa part, pourrait s'appuyer sur
le paragraphe 91.12, les pêches côtières et intérieures, le
paragraphe 91.1A, la dette et la propriété publiques, le
paragraphe 91.24, les Indiens et les terres réservées pour les
Indiens, le paragraphe 91.27, le droit pénal, ou la paix, l'ordre
et le bon gouvernement selon le critère de la dimension nationale,
ou sur l'effet combiné de l'article 132 et de la Loi sur la
Convention concernant les oiseaux migrateurs, qui est un traité de
l'Empire britannique.
Cette liste seule devrait suffire à donner une idée de l'ampleur des divergences d'opinions. Il faut faire une évaluation du risque quand on conteste les avis juridiques donnés au sujet des pouvoirs législatifs en matière d'environnement. Dans ce domaine, rien n'est blanc ou noir.
Le projet de loi C-5 protège les espèces en péril. Il s'applique à toutes les espèces sur les terres domaniales, les espèces aquatiques et les oiseaux migrateurs, selon la portée de la Loi sur la convention concernant les oiseaux migrateurs. Le pouvoir du fédéral en vertu du droit pénal a été employé dans le cas des interdictions générales contre l'élimination, la possession, la destruction de la résidence et la destruction de l'habitat essentiel non pas seulement des espèces gérées par le gouvernement fédéral mais aussi des espèces normalement gérées par les gouvernements provinciaux. Les interdictions s'appliquent par décret du gouverneur en conseil. Avant la prise de décrets, des procédures doivent être suivies. Dans le cas de l'habitat essentiel, les exigences de la procédure sont plus détaillées que pour les autres interdictions, et c'est aussi le cas des secteurs normalement gérés par les gouvernements provinciaux.
Je m'arrête après ces brefs commentaires; j'aiderai volontiers les membres du comité en répondant de mon mieux à leurs questions.
Le président: Monsieur Piragoff, voulez-vous dire quelque chose?
Maître Donald K. Piragoff (avocat général, Section de la politique en matière de droit pénal, ministère de la Justice): Je n'ai pas de commentaires liminaires, monsieur le président.
Le président: Bien.
Nous pouvons donc commencer la discussion. Voulez-vous être le premier, monsieur Mills? Vous avez la parole.
M. Bob Mills (Red Deer, Alliance canadienne): Pour commencer, je déplore que la secrétaire parlementaire ne soit pas ici, puisqu'elle voulait que soit tenue cette réunion. Mais nous, nous sommes là.
Pour les questions, la première...
Une voix: Elle est là.
M. Bob Mills: Vous voyez, j'aurais mieux fait de me taire.
Présumons qu'il y ait un conflit entre une province et le gouvernement fédéral, au sujet d'une espèce. L'espèce A figure sur la liste fédérale, mais la province déclare qu'elle n'est pas en péril, qu'il s'agit en fait de son territoire nordique, ou quelque chose de ce genre. Quels genres de problèmes juridiques avons-nous? Qui a compétence? Comment traitera-t-on de la question?
Mme Mary Dawson: De la façon dont j'interprète la loi, ce sont au bout du compte les pouvoirs fédéraux qui serviront à décider s'il faut prendre un décret concernant ces diverses interdictions. En cas de désaccord entre le gouvernement fédéral et la province, après que le gouvernement fédéral aura entendu les arguments de la province, c'est lui qui décidera de ce qui doit être fait.
M. Bob Mills: Cela ne créera-t-il pas un grave problème politique, et probablement aussi pour l'espèce en péril? Je crois que les gens de cette province auraient tendance à se ranger du côté du gouvernement provincial, ce qui accroîtrait le risque pour l'espèce en question.
Mme Mary Dawson: Je crois qu'en vertu de cette loi, le gouvernement fédéral a l'obligation de protéger l'espèce, et fera de son mieux pour la protéger. C'est tout ce que je peux dire.
M. Bob Mills: Oui, je pourrais être d'accord avec vous, mais le gouvernement fédéral n'est pas nécessairement le plus populaire du monde. Mais je n'irai pas plus loin.
Au sujet de la question autochtone, il doit y avoir des consultations avec la communauté autochtone au sujet d'une espèce en péril; ce qui m'inquiète, étant donné qu'on se soucie tant de la question autochtone, c'est que si l'espèce vit à la fois dans la réserve et en dehors, on peut se servir de la méthode du bâton pour intervenir pour l'espèce à l'extérieur de la réserve, par exemple pour forcer les propriétaires à protéger l'espèce et son habitat, mais le gouvernement a-t-il autant d'autorité pour veiller à la préservation de cette espèce dans la réserve?
Mme Mary Dawson: D'après ce que je comprends, oui. Des dispositions sur la consultation sont nécessaires pour les Autochtones, mais au bout du compte, le pouvoir existe. D'après le libellé de la loi, c'est essentiellement le même pouvoir, de la façon dont je l'interprète.
M. Bob Mills: Les premières nations ne vont donc pas contester ce pouvoir?
Mme Mary Dawson: Qu'elles le fassent ou non, je ne saurais vous dire; je suis ici pour répondre à des questions d'ordre juridique. Toute cette question est épineuse et doit être traitée avec prudence.
M. Bob Mills: Environ le tiers du projet de loi porte sur des mesures punitives, soit la méthode du bâton. D'un point de vue juridique, pour certains, cela peut sembler un mauvais équilibre, puisque ce projet de loi vise la collaboration, la consultation et l'acceptation par tous. L'existence de ces sanctions, pour les pires cas, je l'admets, ne compromet-elle pas l'efficacité du projet de loi, d'un point de vue juridique?
Mme Mary Dawson: Nous avons estimé que la meilleure assise constitutionnelle pour ce projet de loi était le pouvoir du fédéral en vertu du droit pénal.
M. Bob Mills: Bien.
On nous a dit que le projet de loi aurait dû intégrer la mens rea, ou en devenir une partie importante. Quels sont vos commentaires à ce sujet?
Une voix: Je crois que c'est à l'article 100.
Mme Mary Dawson: S'agit-il de savoir si la démarche doit se fonder sur la mens rea plutôt que sur la responsabilité stricte?
M. Bob Mills: Oui.
Mme Mary Dawson: Ce que je peux vous dire, c'est qu'en dehors du Code criminel, dont c'est la règle générale, mais non exclusive, il y a des infractions de mens rea. La plupart des lois fédérales qui reposent sur le pouvoir en vertu du droit pénal comprennent en fait des infractions de responsabilité stricte. Ce projet de loi n'est donc pas une exception. Par exemple, la Loi canadienne sur la protection de l'environnement contient aussi des infractions de responsabilité stricte.
Dans le cas des infractions contre le bien-être public, sur les genres d'infractions qu'on trouve dans ces lois, on accepte que ce soit l'accusé qui ait le fardeau de la preuve, puisqu'il peut être mieux en mesure d'expliquer ses actes. Mais essentiellement, il n'est pas inhabituel que des infractions de responsabilité stricte en dehors du Code criminel soient fondées sur le pouvoir en vertu du droit pénal.
M. Bob Mills: Ce qui m'inquiète, c'est que cela nuise à la collaboration ou y soit moins propice et que cela compromette davantage les espèces en péril.
Mme Mary Dawson: En fait, je pense que les arguments sont plus faciles à trouver dans le cas d'une infraction de responsabilité stricte que pour une infraction de mens rea et je ne peux pas être d'accord avec vous sur cette conclusion.
Le président: Merci.
Voici la liste de ceux qui ont demandé à intervenir: M. Herron, M. Lincoln, Mme Carroll, M. Bigras, M. Comartin puis M. Knutson.
Monsieur Herron.
M. John Herron (Fundy—Royal, PC): Voici ma première question: comme vous le savez sans doute, il y a une divergence de vue entre les conseils donnés par le ministère de la Justice au gouvernement du Canada et ce qu'on trouve dans les décisions du juge La Forest et M. Gibson, au sujet des oiseaux migrateurs, en particulier de leur résidence ou habitat.
Pour mémoire, je tiens à dire qu'il est impératif, suivant le thème de nos tables rondes, que nous ayons une sorte de forum, parce que les fonctionnaires ont essentiellement déclaré qu'ils sont les avocats du gouvernement du Canada, et non du Parlement, et c'est votre responsabilité. Étant donné que vous avez clairement une relation d'avocat à client avec le gouvernement, je crois qu'il est impératif que nous ayons une table ronde de ce genre, pour tirer au clair cette question.
• 1555
Je ne tiens pas à ce que vous capituliez, mais ne voyez-vous
pas une possibilité de nette divergence de vue, quand Gibson et
La Forest vont dans un sens, et vous, dans un autre?
Mme Mary Dawson: Oui. Voulez-vous que je vous parle un peu de la Convention concernant les oiseaux migrateurs et des questions s'y rapportant?
M. John Herron: Oui, et si vous êtes bien à l'aise, dites-nous plus particulièrement pourquoi vous croyez que le juge en chef La Forest et M. Gibson ont tort.
Mme Mary Dawson: Bien. Permettez-moi simplement de vous décrire le contexte de la Convention concernant les oiseaux migrateurs, afin que nous soyons tous sur la même longueur d'onde.
La Convention concernant les oiseaux migrateurs est ce qu'on appelle un traité de l'Empire britannique. Avant 1931, la Grande-Bretagne s'occupait des traités à notre place, mais par exception, en vertu de l'article 132 de la Constitution, le gouvernement fédéral a le pouvoir de mettre en oeuvre tous les aspects des traités de l'Empire.
Ce n'est pas le cas habituellement et je pense qu'il est important de le rappeler. Le pouvoir de mettre en oeuvre les traités sur des questions qui ne relèvent pas des traités de l'Empire britannique incombe à la fois aux gouvernements fédéral et provinciaux, selon la répartition habituelle des pouvoirs.
Comme le pouvoir du fédéral en matière d'oiseaux migrateurs découle de la Convention concernant les oiseaux migrateurs, il faut examiner la Convention elle-même pour déterminer quelle est la portée de ce pouvoir.
La Convention porte explicitement sur l'ouverture et la fermeture de la chasse, sur la récolte des oeufs et des nids des oiseaux migrateurs couverts par la Convention. Ce sont des pouvoirs ou des sujets très précis, très expressément énoncés. La Convention ne porte aucunement sur l'habitat. Le préambule établit bien le contexte de la Convention, expliquant que les signataires sont... Je vous le lis:
-
[...] désireux de sauver du massacre général les oiseaux migrateurs
qui sont utiles à l'homme ou inoffensifs, et d'assurer la
conservation de ces oiseaux [...]
Nous ne pensons pas que la formulation du préambule puisse servir à justifier une extension de la portée du pouvoir fédéral au-delà des questions très précises dont traite la Convention.
Mme Aileen Carroll (Barrie—Simcoe—Bradford, Lib.): Madame Dawson, auriez-vous l'obligeance de répéter la dernière partie de...
Mme Mary Dawson: La citation de la Convention?
Mme Aileen Carroll: À partir de quand vous avez dit «nous ne pensons pas»...
Mme Mary Dawson: Nous ne pensons pas que la formulation du préambule puisse servir à justifier une extension de la portée du pouvoir fédéral au-delà des questions très précises dont traite la Convention, et c'est là-dessus que nous ne sommes pas d'accord.
M. John Herron: J'ai une très courte question, en terminant. Je crois que Aileen voudra y revenir à ma place, plus tard.
En 1995, pendant notre examen du projet de loi C-65, Environnement Canada avait divulgué l'avis constitutionnel reçu du ministère de la Justice sur ce genre de questions. Je présume qu'il revient à Environnement Canada de révéler l'avis constitutionnel que vous lui avez fourni sur ces questions très précises et que vous ne pouvez le faire de votre propre initiative. Ai-je raison de croire que c'est Environnement Canada qui devrait le faire, ou pouvons-nous avoir une copie de l'information que vous avez fournie au...
Mme Mary Dawson: En fait, j'ignorais que vous aviez une copie de l'avis juridique que nous avions donné.
M. John Herron: C'était au sujet du projet de loi C-65.
Mme Mary Dawson: Je n'étais pas au courant, mais ce serait alors assez inhabituel.
M. John Herron: Je ne sais pas, peut-être est-ce arrivé parce que le sujet de nos discussions était controversé et que le même genre de questions était alors soulevé. Je pourrais peut-être demander à ceux qui étaient au comité à l'époque.
Merci, monsieur le président.
Le président: Êtes-vous certain d'en avoir copie?
M. John Herron: Je lis le texte de nos érudits attachés de recherche:
-
En 1995, Environnement Canada a bien divulgué l'avis
constitutionnel reçu du ministère de la Justice au sujet du projet
de loi qui a précédé celui-ci, le projet de loi C-65. Cet avis a
été diffusé au comité et aux membres du public intéressés.
C'est l'information que j'ai. Si je me trompe, alors, vous aurez raison.
Mme Mary Dawson: Peut-être qu'on l'a donné d'une façon générale, oralement. Je serais bien étonnée si vous aviez reçu l'avis écrit.
Le président: Merci.
Monsieur Lincoln, s'il vous plaît, suivi de Mme Carroll.
M. Clifford Lincoln (Lac-Saint-Louis, Lib.): En lisant la Loi sur la convention concernant les oiseaux migrateurs, on constate que la loi fait allusion, à deux endroits, à «la protection des oiseaux et des nids ainsi qu'à la surveillance et à la gestion de ces zones». Ensuite, dans le règlement, on lit:
-
il est interdit de déposer ou de permettre de déposer du pétrole,
des résidus du pétrole ou d'autres substances
—etc.—
-
nocives pour les oiseaux migrateurs dans des eaux ou une région
fréquentées par ces oiseaux.
Comment définir le mot «région», s'il ne s'agit pas de l'habitat, si c'est la région générale qu'ils fréquentent? On utilise ces mots dans la loi et dans le règlement.
Mme Mary Dawson: Je ne suis pas une experte de cette loi environnementale. Je suis plutôt une conseillère juridique en droit constitutionnel et je n'ai aucune connaissance pratique de tous les aspects de ces lois.
Le mot «habitat» a une portée très large. L'interprétation de ce mot peut varier selon les personnes. En vertu de la Loi sur la convention concernant les oiseaux migrateurs, je crois que ce projet de loi peut faciliter la réalisation des objectifs visés dans la Convention, tels que la protection des nids et des oeufs. Par conséquent, le projet de loi fédéral prévoit une certaine souplesse en vertu de la Convention pour permettre les démarches nécessaires pour protéger ces nids et ces oeufs.
Il s'agit de savoir dans quelle mesure on dépasse la portée de la Convention.
M. Clifford Lincoln: Exactement. Si vous voulez protéger plus que la région où le nid et l'oeuf se trouvent, et vous parlez d'une région qui couvre le nid et l'oeuf, c'est ce que l'on appelle, généralement, un «habitat». En effet, aux États-Unis, les Américains, en interprétant la convention, ont décidé d'y accorder le sens d'habitat.
On voit exactement la même chose à l'article 36 de la Loi sur les pêches. Si on dépose une substance nocive pour les poissons dans les eaux, il y a automatiquement inversion du fardeau de la preuve qu'on a nui au poisson parce que cela couvre l'habitat. Nous savons que les poissons fraient dans une région précise, mais les oeufs flottent partout, les poissons nagent partout, alors nous avons effectivement un habitat.
Comment peut-on dire, d'une part, que nous protégeons le nid ainsi que les oeufs dans ce projet de loi, qui suit la convention, et la région avoisinante nécessaire pour la protection des oiseaux et des oeufs et, d'autre part, dire, en l'occurrence, que nous devons nous limiter au nid lui-même? Est-ce une contradiction ou est-ce que la convention dépasse sa portée?
Mme Mary Dawson: En ce qui concerne votre dernière question, je ne suis pas vraiment en mesure de répondre parce que je n'ai pas examiné cette loi, mais il me semble, d'après ce que vous avez lu, que ce n'est pas aussi vaste que l'interprétation ordinaire du mot «habitat», qui comprend, par exemple, les endroits où les oiseaux se posent. Il pourrait comprendre toutes sortes de choses, et je ne suis pas une experte en la matière.
De plus, je devrais peut-être expliquer que la jurisprudence américaine ne s'applique pas nécessairement au Canada, parce que j'imagine que le gouvernement fédéral dispose de certains pouvoirs aux États-Unis pour la mise en vigueur des traités. En fait, j'en suis presque certaine. La situation aux États-Unis est différente de la nôtre.
M. Clifford Lincoln: À l'exception de la décision rendue par le juge La Forest—c'est lui qui a rendu la décision en ce qui concerne le barrage de la rivière Oldman, et il est reconnu comme l'autorité en matière constitutionnelle dans le domaine des compétences environnementales. Il déclare très clairement dans son avis juridique que la loi interprète le mot «région» qu'on trouve dans la convention dans un sens plus large, comme un habitat.
Il existe par conséquent une dichotomie entre le ministère de la Justice, qui lui accorde un sens très étroit, et le juge La Forest et M. Gibson qui disent, non, il faut lui accorder un sens beaucoup plus large que ce que vous dites. Il s'agit, par conséquent, de savoir si on veut adopter l'avis le plus restreint... et curieusement ils ont décidé d'adopter un avis qui ressemble beaucoup à celui des États-Unis. Je comprends que la loi aux États-Unis est différente de la nôtre.
• 1605
En même temps, lorsqu'ils regardent la convention, ils
considèrent la région comme étant l'habitat. Nous semblons toujours
retenir la définition la plus restrictive. Pourquoi avons-nous si
peur? Est-ce que la politique provinciale nous fait tellement peur
que nous n'osons pas retenir l'avis le moins restrictif?
Mme Mary Dawson: À mon avis, l'approche préconisée par ce projet de loi en ce qui concerne cette question est solide du point de vue constitutionnel et nous permet de faire le travail. C'est sans doute la réponse à votre question.
M. Clifford Lincoln: Mais d'un autre point de vue, est-ce que l'autre définition pourrait être aussi solide? Le ministère de la Justice croit que cette approche est solide, mais ne serait-il pas possible que l'avis prononcé par le juge La Forest le soit aussi?
Mme Mary Dawson: Je crois qu'il serait utile de répéter les observations que j'ai faites dans mon exposé. Il s'agit d'un domaine très complexe où toutes sortes de gens raisonnables divergent d'opinion. Si vous examinez les décisions rendues par la Cour suprême, vous constaterez que, dans ce domaine, les décisions sont rendues à la majorité, cinq à quatre. Et je ne sais pas de quel côté M. le juge La Forest se trouvait dans certaines de ces décisions. Il aurait pu exprimer son opinion dissidente ou bien il aurait pu faire partie de la majorité.
Il n'existe pas de règle rigoureuse qui s'applique à ce domaine. Il faut faire preuve de jugement et évaluer le risque pour déterminer la voie la plus prudente à suivre et quel risque on est prêt à assumer. Il est certes évident que dans un domaine qui évolue et qui comporte beaucoup d'incertitudes comme celui-là, il y aura des divergences d'opinions entre des gens très réputés des deux côtés.
Le président: Merci, monsieur Lincoln. Nous allons maintenant faire un deuxième tour. Mme Carroll, suivie de M. Bigras, M. Comartin, M. Knutson et Mme Redman.
Madame Carroll.
Mme Aileen Carroll: Merci, monsieur le président.
Madame Dawson, j'espère que je ne vous rends pas folle, mais j'ai essayé d'écrire votre dernière phrase, qui commence avec les mots suivants «Nous ne croyons pas que le préambule...». Pourriez-vous me terminer cette phrase? C'était votre dernière phrase. J'en ai besoin parce que je crois qu'elle est vraiment primordiale pour la question que j'aimerais vous poser.
Mme Mary Dawson: Je ne sais pas exactement ce que j'ai dit, mais nous ne croyons pas que le préambule...
Mme Aileen Carroll: Je crois que vous avez fait allusion à vos notes écrites, alors...
Mme Mary Dawson: Mais je ne sais pas lesquelles. Dans l'ensemble, nous ne croyons pas que le préambule justifierait une interprétation de la loi qui permettrait d'aller au-delà des dispositions de fond, surtout qu'elles sont tellement précises. Les dispositions de fond par rapport au... Comprenez-vous la distinction?
Mme Aileen Carroll: Oui. Ensuite vous vous êtes décrite comme une conseillère juridique en matière constitutionnelle, et là encore je répète vos mots. Mais j'ai beaucoup de mal à comprendre pourquoi les fonctionnaires de votre ministère ont clairement dit devant ce comité qu'ils n'acceptent pas les décisions rendues par les juges La Forest et Gibson, à deux reprises. On considère ces messieurs, et je crois que tout le monde serait d'accord, comme des gens raisonnables—j'aime bien la façon dont vous avez formulé votre phrase—et comme des autorités dans ce domaine, des autorités de la Cour suprême, qui ont rendu leur décision en ce qui concerne cette question.
Vous savez pourquoi nous vous avons convoquée de nouveau, mais vous nous avez dit de façon presque impérieuse, dédaigneuse: «On ne suit pas cette voie.» Je vous demanderais donc de nous expliquer sur quoi vous vous fondez pour affirmer une telle chose. Lorsqu'il s'agit d'interprétation judiciaire, vous savez aussi bien que moi que celui qui peut citer le plus grand nombre d'autorités sort gagnant le plus souvent.
Nous sommes très à l'aise avec l'analyse et les décisions des juges La Forest et Gibson, mais vous ne nous dites pas sur quoi vous vous fondez et ce que vous enseigne votre jurisprudence. Si vous me le disiez, je crois que je serais capable d'accepter votre point de vue voulant que des gens raisonnables peuvent avoir une divergence d'opinion raisonnable et j'en serais satisfaite. Pourriez-vous m'aider?
Mme Mary Dawson: Nous n'étions pas d'accord avec une ou deux questions soulevées par M. le juge La Forest et M. Gibson et je pourrais vous parler d'une ou deux de ces questions...
Mme Aileen Carroll: Faites-le, je vous prie.
Mme Mary Dawson: Une question a trait à la paix, l'ordre et le bon gouvernement et l'autre a trait à la portée de l'application de la Loi sur les oiseaux migrateurs. Aimeriez-vous que je vous parle de chacune de ces questions?
Mme Aileen Carroll: J'aimerais que vous... Je déteste être difficile, madame Dawson, mais malgré tout le respect que je vous dois en raison de votre poste et de votre esprit juridique, je tiens à ce que vous disiez sur quoi vous vous fondez. Je veux savoir non pas comment vous vous sentez un moment donné, mais les autorités sur lesquelles vous vous appuyez pour arriver à un avis différent.
Mme Mary Dawson: D'accord. Je préférerais me concentrer sur des questions précises parce que je ne peux pas citer mot à mot exactement ce que M. le juge La Forest a dit. Cette séance n'est pas censée être une évaluation juridique approfondie, mais plutôt une séance d'information générale, mais je peux vous dire que si...
Le président: Non, je regrette, madame Dawson, mais cette séance n'est pas censée être une séance d'information générale.
Mme Mary Dawson: Je suis désolée, c'était un lapsus. Je voulais dire une explication de notre avis juridique général sans entrer dans tous les détails pour qu'on finisse par comparer un mot à un autre. Mais je suis tout à fait...
Mme Aileen Carroll: Mais, madame Dawson, vous donnez des conseils au ministre de l'Environnement. Vous êtes son avocat et lui, c'est votre client et vous lui conseillez d'intégrer à ce projet de loi une interprétation qui est tout à fait différente de la nôtre. Il me semble que lorsque vous lui conseillez de faire cela—quand je dis vous j'entends le ministère de la Justice—vous lui fournissez de nombreux précédents juridiques...
Mme Mary Dawson: Non, je...
Mme Aileen Carroll: ...pour justifier une orientation qui n'est pas ordinairement tenue comme valide.
Mme Mary Dawson: Non, je suis désolée. On ne fait rien dans ce projet de loi qui contredit l'avis de ces personnes. Nous avons adopté une approche différente en ayant recours au pouvoir en vertu du droit pénal parce que nous croyons que cette approche est plus prudente du point de vue du risque juridique.
Vous m'avez demandé de citer les autorités. En général, c'est la jurisprudence des 10 ou 15 dernières années qui constituent les autorités. Deux ou trois cas principaux examinent en détail le critère de la dimension nationale de la disposition concernant la paix, l'ordre et le bon gouvernement. Je pourrai développer cette question, si vous le voulez, un peu plus tard.
Quant à la Loi sur la convention concernant les oiseaux migrateurs, il s'agit d'une question d'interprétation et nous croyons fermement que c'est aller très loin que de présumer, à partir des deux ou trois cas précis qui figurent dans la convention, qu'il existe un vaste pouvoir fédéral en ce qui concerne l'habitat. Nous nous fondons sur la jurisprudence des 10 ou 15 dernières années pour affirmer cela.
Le président: D'accord. Il vous reste une question.
Mme Aileen Carroll: Merci.
Je ressens le besoin de citer. Pour que vous n'ayez pas l'impression que je vous fais perdre votre temps, madame Dawson, j'ai fait mes devoirs, tout comme bien des membres, et nous avons lu des textes juridiques. M. le juge La Forest et M. Gibson se sont inspirés du pouvoir en vertu du droit pénal et je vais vous citer exactement ce qu'ils ont dit:
-
Il est très clair que le Parlement pourrait, compte tenu de son
pouvoir en vertu du droit pénal, adopter une loi globale comportant
des interdictions générales et prévoyant un nombre limité
d'exemptions, ayant trait à la protection de toutes les espèces en
voie de disparition et menacées ainsi que leur habitat. Ces
exemptions pourraient ressembler à celles qu'on trouve dans la Loi
sur les aliments et drogues, la Loi sur les armes à feu ou la Loi
canadienne de protection de l'environnement, et les critères
devraient être précisés afin de limiter le pouvoir discrétionnaire
pour l'octroi d'exemptions. Une telle loi respecterait toutes les
exigences voulues pour l'exercice valide du pouvoir en vertu du
droit pénal; c'est-à-dire, une interdiction liée à une pénalité
dans le but de protéger l'environnement, ce qui est un but valable,
neutre en droit pénal. Cependant, si la loi devait prévoir des
interdictions établies par voie de règlement, la loi risquerait
davantage d'être perçue comme étant de nature réglementaire plutôt
que pénale. Par conséquent, il serait plus prudent d'intégrer les
interdictions dans la loi elle-même.
Ils utilisent le pouvoir conféré en vertu du droit pénal.
Mme Mary Dawson: Mais les interdictions sont dans la loi elle-même. Il est très important de préciser de quelle question nous parlons, et il y a un certain nombre de questions très différentes qui semblent être les mêmes dans ce projet de loi. Le fait est qu'on a délibérément précisé très clairement dans le projet de loi quelles sont les interdictions tant en ce qui a trait aux terres fédérales qu'aux terres provinciales. En fait, nous avons fait bien attention de ne pas aller au-delà des interdictions dans l'exercice de notre pouvoir en vertu du droit pénal, car si nous le faisons, nous courons le risque—comme on semble en fait l'exprimer ici—de passer dans un mode de réglementation. C'est à ce moment-là qu'il faudrait présenter les arguments du pouvoir fondé sur la paix, l'ordre et le bon gouvernement et le critère de la dimension nationale, ce dont nous n'avons pas encore parlé. Je crois cependant que c'est une question sur laquelle il y a divergence également.
Mme Aileen Carroll: Merci, monsieur le président.
Le président: Nous allons maintenant entreprendre le deuxième tour de table.
M. Bigras, M. Comartin, M. Knutson, Mme Redman.
Monsieur Bigras.
[Français]
M. Bernard Bigras (Rosemont—Petite-Patrie, BQ): Merci, monsieur le président.
Tout d'abord, je vais y aller d'une question simple et j'aimerais aussi obtenir une réponse simple et claire. Première question: est-ce que vous estimez que la protection de l'habitat est de responsabilité fédérale ou provinciale?
[Traduction]
Mme Mary Dawson: En règle générale, cela dépend de la façon dont on s'y prend pour exercer la protection. Si nous tentions d'utiliser une...
[Français]
M. Bernard Bigras: Monsieur le président, je voudrais avoir une réponse claire. Est-ce que la protection de l'habitat est de responsabilité provinciale?
[Traduction]
Mme Mary Dawson: Ma réponse est la suivante: cela dépend de la façon dont la loi est rédigée. De façon générale, c'est une responsabilité provinciale, mais le gouvernement fédéral peut assurer la protection de l'habitat aux termes du pouvoir conféré par le droit pénal.
Me Donald Piragoff: Permettez-moi de répondre à la question en donnant un autre exemple. Les routes relèvent-elles de la compétence provinciale ou fédérale? On ne peut pas donner une réponse simple en disant que les routes, ou le contrôle de la circulation sur les routes, relèvent de la compétence provinciale ou fédérale, car selon la nature de la conduite, et selon ce que la loi tente de faire, cela peut relever de la compétence fédérale ou de la compétence provinciale. S'il s'agit de conduite sur les routes en état d'ébriété, une activité qui concerne le bien-être public, alors le gouvernement fédéral a le droit d'invoquer le pouvoir du droit pénal, même si cela fait intervenir une décision concernant ce qui se passe sur les routes provinciales.
Quoi qu'il en soit, aux termes de la Constitution, la province réglemente des choses comme la limite de vitesse, l'intensité des phares à l'avant de la voiture ou la nécessité d'avoir des feux rouges à l'arrière de la voiture. Le gouvernement fédéral n'intervient pas nécessairement dans les questions de circulation sur les routes. En vertu du droit pénal, le gouvernement fédéral a le pouvoir de réglementer certains types de conduite ou de situation. Donc, le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux peuvent réglementer la circulation routière. Ils peuvent également réglementer dans le domaine de l'environnement.
Comme Mme Dawson l'a dit, ce qu'il est possible de faire dans des domaines particuliers dépend exactement de ce qu'ils ont l'intention de faire et de la façon dont ils ont l'intention de s'y prendre. Tentent-ils d'interdire ou de réglementer? Ce sont là certaines des limites. Il n'y a pas de réponse noir sur blanc, comme dans bon nombre d'autres domaines de responsabilité partagée entre les deux paliers de gouvernement.
[Français]
M. Bernard Bigras: Monsieur le président, j'aimerais, à ce moment-là, qu'on m'explique la rationalité constitutionnelle. Madame vient de le dire: en général, la protection de l'habitat est de responsabilité provinciale. Pouvez-vous m'expliquer la rationalité constitutionnelle. En vertu du double filet et de la loi, le fédéral peut intervenir sur des terres qui ne sont pas fédérales, alors qu'il n'utilise même pas un pouvoir reconnu par les provinces, soit la Loi sur la convention concernant les oiseaux migrateurs, dont la mise en oeuvre est une responsabilité reconnue du gouvernement fédéral, et qu'il n'ose même pas appliquer cette loi dans ses champs de compétence. Par ailleurs, il s'apprête à se mêler des affaires des provinces.
J'aimerais qu'on m'explique cette rationalité constitutionnelle parce que je ne la comprends pas. Dans ses champs de compétence, le fédéral n'applique pas ses responsabilités, et dans les champs de compétence provinciale, on se mêle des affaires des provinces. Je vous dirais que s'il y a une rationalité, j'aimerais que vous me l'expliquiez parce que moi, je ne la comprends pas.
[Traduction]
Mme Mary Dawson: Le projet de loi tente de prévoir le plus de coopération possible avec les provinces et de respecter le plus possible le pouvoir de ces dernières. Le gouvernement fédéral a assumé une responsabilité dans le domaine environnemental. Si j'ai bien compris, il y a une très bonne coopération entre le gouvernement fédéral et les provinces dans ce domaine, mais la loi prévoit que le gouvernement fédéral, en ce qui a trait aux infractions, doit intervenir s'il estime que la loi provinciale ne règle pas le problème de façon adéquate. On ne s'attend pas nécessairement à ce que cela se produise. La loi prévoit ce pouvoir, mais elle est rédigée d'une façon qui respecte tout à fait les champs de compétence des provinces.
M. Bernard Bigras: J'ai une autre question, monsieur le président.
Il y a des communautés qui sont venues nous rappeler qu'en vertu de la Convention de la Baie James et du Nord québécois, certaines terres sont de juridiction fédérale, alors que d'autres sont de juridiction provinciale.
Comment voyez-vous l'application de cela et que dites-vous aujourd'hui aux communautés inuits qui ont signé la Convention de la Baie James? Qu'est-ce que vous leur dites? Est-ce que cette loi va s'appliquer sur des terres qui sont de juridiction provinciale malgré l'accord de la Convention de la Baie James qui a été signé?
[Traduction]
Mme Mary Dawson: Je ne peux faire de commentaires sur les aspects techniques concernant la façon dont cela fonctionnerait. Tout ce que je peux dire, c'est que le gouvernement fédéral exerce son pouvoir pénal et le projet de loi permet au gouvernement fédéral d'exercer ce pouvoir. Je ne peux cependant vraiment pas expliquer dans les détails de quelle façon cela va fonctionner dans le cas de la Baie James.
[Français]
M. Bernard Bigras: J'ai une dernière question. Si je comprends la logique que vous venez d'énoncer il y a à peu près deux ou trois minutes, en principe, la loi fédérale devrait s'appliquer sur les terres de juridiction provinciale telles que définies dans la Convention de la Baie James. Si cette loi fédérale peut s'appliquer sur des terres provinciales qui sont autres que celles prévues dans la convention, elle peut très certainement s'appliquer sur celles qui sont clairement définies dans la Convention de la Baie James. La même logique s'applique.
[Traduction]
Mme Mary Dawson: Je ne peux vraiment pas répondre à cette question.
Une voix: Vérifiez avec Lucien Bouchard lorsqu'il était ministre...
Le président: Merci, monsieur Bigras.
[Français]
Une voix: Ça ne paraît pas que vous étiez ministre de l'environnement au Québec. C'est vrai que vous n'étiez plus là à ce moment-là.
[Traduction]
Le président: M. Comartin, suivi de M. Knutson.
M. Joe Comartin (Windsor—St. Clair, NPD): Merci, monsieur le président.
Je voudrais revenir à l'avis juridique. Je suppose que vous traitez cet avis comme étant la propriété du ministère de l'Environnement.
Mme Mary Dawson: De quel avis voulez-vous parler?
M. Joe Comartin: De l'avis que vous avez donné concernant le projet de loi à l'étude, de votre avis.
Mme Mary Dawson: C'est le gouvernement qui décide de ce qui arrive à cet avis.
M. Joe Comartin: Donc ce n'est pas à vous de décider. Dans ce cas particulier, c'est au ministre de l'Environnement de décider s'il doit être ou non publié.
Mme Mary Dawson: C'est le ministre de l'Environnement à qui la demande a été adressée, mais le ministre de l'Environnement consultera, j'en suis certaine, le gouvernement avant de prendre une décision.
M. Joe Comartin: Ce que je tente de dire ici, c'est qu'ultimement la décision est prise à ce niveau-là, non pas à votre niveau. La décision est prise au niveau du Cabinet, non pas au niveau du ministère.
Mme Mary Dawson: Oui, je suppose que l'on peut dire cela.
M. Joe Comartin: Merci.
Une voix: C'est peut-être le premier ministre...
M. Joe Comartin: Peut-être bien, ou peut-être que nous pourrons inviter M. Marchi à revenir et à nous donner cet avis cette fois-ci.
Je voudrais revenir au point qu'a soulevé M. Lincoln concernant toute la question de l'habitat et du droit du gouvernement de légiférer dans ce domaine. Il vous a cité certains articles de la Loi sur la convention concernant les oiseaux migrateurs. Il y a un libellé semblable dans la Loi sur les pêches, et quatre ou cinq décisions ont été prises en vertu de cette loi, décisions qui reconnaissent que le gouvernement fédéral a le droit de légiférer dans ce domaine. Est-ce que cela ne constitue pas un précédent suffisant pour affirmer que les avis du juge La Forest et de M. Gibson sont valides et que le gouvernement fédéral a le droit de légiférer en ce qui concerne l'habitat?
Mme Mary Dawson: Je pense qu'il est important de comprendre que les pêches sont du ressort fédéral tandis que les ressources naturelles et la faune sont un champ de compétence provinciale. Nous pouvons faire n'importe quoi dans le domaine des pêches car toute la question relève de la compétence fédérale. Voilà la différence.
M. Joe Comartin: Mais une partie de ces terres relève clairement des provinces.
Mme Mary Dawson: Je ne connais pas suffisamment les détails.
M. Joe Comartin: C'est le cas. Les provinces ont un certain pouvoir en ce qui a trait à la propriété et aux droits civils.
Mme Mary Dawson: Mais nous avons le pouvoir dans le domaine des pêches, donc si la loi portait sur les pêches, elle serait fédérale.
M. Joe Comartin: Vous avez compétence en ce qui a trait aux oiseaux migrateurs également aux termes de la convention.
Mme Mary Dawson: Mais pas dans la même mesure que pour les pêches.
M. Joe Comartin: Le libellé est exactement le même.
Mme Mary Dawson: Le libellé de quoi?
M. Joe Comartin: Le libellé de la Loi sur les pêches en ce qui a trait au droit de protéger l'habitat pour le poisson, que M. Lincoln a cité, est presque exactement le même que celui que l'on retrouve dans la Convention sur les oiseaux migrateurs.
Mme Mary Dawson: Il y a toute une différence dans le fondement de notre pouvoir entre la Convention sur les oiseaux migrateurs et la Loi sur les pêches. Aux termes de la Loi sur les pêches, nous avons le plein pouvoir concernant les pêches. Aux termes de la Convention, nous avons le pouvoir de mettre en oeuvre le traité.
• 1625
Il faut regarder les modalités du traité pour comprendre ce
dont il s'agit. Le traité porte spécifiquement sur les nids, les
oeufs, et quelques autres éléments, mais il ne prévoit pas de
pouvoir général en ce qui concerne les oiseaux migrateurs.
M. Joe Comartin: Le gouvernement n'a aucun pouvoir autre que celui qui lui est conféré dans la Loi sur les pêches et dans la Loi sur la convention concernant les oiseaux migrateurs.
Mme Mary Dawson: Il ne faut pas confondre la Convention concernant les oiseaux migrateurs, qui est un traité international, et notre loi. Le libellé est peut-être identique, mais le fondement du pouvoir est différent.
M. Joe Comartin: Les deux ont le même libellé, et cinq décisions ont été rendues aux termes de la Loi sur les pêches disant que le gouvernement fédéral a le droit de légiférer pour ce qui est de la protection de l'habitat. Voilà ce dont il s'agissait dans ces cinq cas. Vous dites que cela ne constitue pas un précédent suffisant.
Mme Mary Dawson: Non, pas du tout. Notre pouvoir en matière de pêches nous est conféré dans la Constitution, ce qui n'est pas le cas en ce qui concerne les oiseaux migrateurs. Ce n'est que par exception que nous avons certains pouvoirs qui nous sont conférés dans la Convention concernant les oiseaux migrateurs. Le fondement du pouvoir est tout à fait différent.
M. Joe Comartin: J'ai une autre question, monsieur le président. Votre ministère a rendu un avis concernant la LCPE en 1987, avis qui recommandait d'adopter une approche plus prudente. On n'a pas tenu compte de cet avis. La loi a été adoptée. Cela concerne la définition d'une substance toxique. Malgré votre avis et le fait que la question soit allée jusque devant la Cour suprême du Canada, il reste que dans le cas d'Hydro-Québec, le tribunal a tranché en faveur de la loi, n'est-ce pas?
Mme Mary Dawson: Je ne suis pas au courant de certains de ces faits.
M. Joe Comartin: Pouvez-vous me dire le nom du fonctionnaire au ministère qui a donné cet avis?
Mme Mary Dawson: En 1987?
M. Joe Comartin: Non, en ce qui a trait au projet de loi à l'étude.
Mme Mary Dawson: Je pense qu'un certain nombre de fonctionnaires ont participé à la préparation de l'avis, et je ne pourrais vous donner les noms.
M. Joe Comartin: Pour ce qui est de la position que le ministère a adoptée, est-ce que la politique entre en ligne de compte de quelque façon que ce soit? Par exemple, est-ce que le fait que le gouvernement fédéral souhaite coopérer avec les provinces est pris en compte lorsqu'un avis est donné?
Mme Mary Dawson: Non, sauf dans la mesure où si un client venait nous voir et nous disait qu'il aimerait faire quelque chose et qu'il veut le faire relativement sans prendre de risque, nous utiliserions nos ressources juridiques pour le conseiller sur la meilleure façon d'y arriver.
M. Joe Comartin: En ce qui a trait au projet de loi à l'étude, vous a-t-on demandé de tenir compte des relations fédérales- provinciales avant de donner votre avis?
Mme Mary Dawson: Je ne le sais pas, car je n'ai pas préparé cet avis. L'avis juridique qui a été donné était certainement impartial.
Le président: Monsieur Comartin, il ne vous reste plus de temps.
À plusieurs occasions cet après-midi, Mme Dawson a dit que le projet de loi à l'étude était rédigé de façon à respecter les pouvoirs des provinces. C'est une façon très délicate de répondre à la question que vous posiez, il me semble.
M. Knutson est le suivant.
M. Gar Knutson (Elgin—Middlesex—London, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président.
Madame Dawson, à mon avis, c'est ce dernier point qui est vraiment important. Comme vous l'avez dit, le projet de loi a été rédigé de façon à respecter le pouvoir des provinces. Il est clair que le Service canadien de la faune est d'avis qu'il faut respecter le pouvoir des provinces.
Certains députés, peut-être ceux de la province de M. Harris, en Ontario, croient que le ministère provincial des Ressources naturelles a tellement subi de coupures au cours des dernières années qu'il ne pourra peut-être pas être en mesure de protéger les espèces en péril. C'est mon avis.
Là où les questions juridiques entrent en jeu, c'est lorsque je soulève ces préoccupations et que les gens me disent que si l'on modifie la loi, la Cour suprême du Canada risque de renverser la décision.
• 1630
Il ne s'agit pas tant de savoir ce que contient la Loi sur la
convention concernant les oiseaux migrateurs ni quelle en est la
portée, que de savoir si nous avons le pouvoir de modifier la loi
et de gagner toute poursuite provinciale qui pourrait alors être
intentée contre nous. Voilà la vraie question, à mon avis.
J'ai une question précise. Le comité a modifié le dernier projet de loi, le projet de loi C-65, pour dire au ministre que des règlements seront édictés concernant tout habitat de compétence fédérale. Cette modification a été approuvée par le Parlement à l'étape du rapport. Le gouvernement ne l'a pas radiée. On suppose donc que le ministère de la Justice aurait dit à ce moment-là et dirait toujours aujourd'hui que nous avons le pouvoir de protéger l'habitat de compétence... Nous pourrions modifier le présent projet de loi pour protéger tout habitat dans les régions de compétence fédérale.
Mme Mary Dawson: De compétence fédérale?
M. Gar Knutson: Oui, comme les parcs au nord du soixantième parallèle.
Mme Mary Dawson: Les terres fédérales. Oui, nous avons tout pouvoir sur ces régions, comme les pêches et les terres fédérales.
M. Gar Knutson: Ce n'est pas un problème.
Mme Mary Dawson: Il n'y a pas de doute concernant notre pouvoir de protéger les espèces qui se trouvent sur des terres fédérales.
M. Gar Knutson: Si on cible l'extinction plutôt que la protection de l'habitat en général, pourrait-on plaider, raisonnablement, que de détruire un habitat qui mènerait à l'extinction d'une espèce pourrait constituer un crime, assorti de sanctions, partout au pays?
Mme Mary Dawson: Oui. Notre pouvoir en vertu du droit pénal est plutôt large.
M. Gar Knutson: Y a-t-il lieu de croire que la Cour suprême dirait au gouvernement fédéral, tant et aussi longtemps qu'il s'agit d'extinction et de sa prévention, ce qui est l'objet du présent projet de loi, qu'il s'agit d'une question tellement sérieuse que nous allons vous permettre d'adopter une loi pour protéger l'habitat afin d'empêcher l'extinction d'espèces partout au pays. Qu'en pensez-vous?
Mme Mary Dawson: Non, il s'agit là d'une question tout à fait différente. Il ne s'agit pas d'un pouvoir en vertu du droit pénal. Vous parlez maintenant d'un pouvoir de réglementation afin de protéger l'habitat, n'est-ce pas?
M. Gar Knutson: Je n'ai pas dit qu'il s'agissait de réglementation et je n'ai pas parlé de «réglementer».
Mme Mary Dawson: Non, mais vous avez dit qu'il s'agissait d'adopter une loi pour protéger l'habitat, mais je ne sais pas de quel genre de loi vous parlez.
M. Gar Knutson: Disons qu'il s'agit d'une loi en vertu du droit pénal. Si vous asséchiez un marécage et que, conséquemment, les deux derniers oiseaux d'une espèce précise disparaissaient, alors un crime aurait été commis.
Mme Mary Dawson: Il est très dangereux d'exprimer une opinion juridique au pied levé de façon générale.
M. Gar Knutson: J'ai tout simplement demandé s'il pouvait s'agir d'un argument raisonnable.
Mme Mary Dawson: Absolument, si l'on crée un nouveau crime pour protéger le public, on peut le créer.
M. Gar Knutson: Parfait. Je pourrais donc protéger l'habitat pour empêcher l'extinction d'une espèce en me servant du droit pénal. Si l'on peut raisonnablement prétendre que nous voulons modifier le présent projet de loi pour protéger l'habitat, les tribunaux, parce que l'objet de la modification est d'empêcher l'extinction... Il ne s'agit pas d'empocher des amendes ou de faire certaines de ces choses que l'on peut normalement faire en vertu d'un règlement, il s'agit d'empêcher l'extinction d'une espèce.
Mme Mary Dawson: Ce sont toujours les détails qui mènent à l'échafaud. Il faudrait voir quelle méthode vous voulez employer.
M. Gar Knutson: Je vous lis quelque chose du professeur Hogg—à votre avis, il fait autorité en matière de droit constitutionnel?
Mme Mary Dawson: Oui, il fait assez autorité—il n'a pas toujours raison, mais il a raison la plupart du temps.
M. Gar Knutson: Dans le cas d'Hydro-Québec il dit que, et je cite:
-
[...] la loi fut jugée loi pénale et la tendance, en droit
contemporain, à accorder un pouvoir de réglementation assez étendu
en vertu du pouvoir conféré par le droit pénal a été
considérablement affermi.
C'est ce qu'il disait à propos du cas d'Hydro-Québec. Dans ce cas, puis-je avoir plus de certitude quant au résultat si j'adopte une loi sur les espèces en danger qui pourrait provoquer les provinces en usant d'une approche un peu moins coopérative quoique constitutionnellement solide?
Mme Mary Dawson: En vertu du pouvoir conféré par le droit pénal?
M. Gar Knutson: Oui
Mme Mary Dawson: Oui.
M. Gar Knutson: Je ne vois où se situe le problème, alors. Croyez-vous que du moment où nous rédigeons la loi en vertu du droit pénal, nous pouvons faire à peu près ce que nous voulons?
Mme Mary Dawson: Oui. Mais il y a... Enfin, non.
M. Gar Knutson: Oui?
Mme Mary Dawson: Désolée. Si vous rédigez la chose en invoquant le droit pénal—c'est la notion de base. Il faut vraiment faire attention en rédigeant une disposition en vertu du droit pénal de ne pas aller au-delà de ce qui relève du droit pénal. Vous ne pouvez pas envahir un champ de compétence provinciale en ayant recours à la réglementation. C'est une question de jugement, et dans la plupart des cas, on ne peut pas aller tellement loin.
M. Gar Knutson: D'après Hogg, la réglementation peut aller très loin. C'est ce qu'il dit à la page 18.11 du cahier à feuilles mobiles.
Mme Mary Dawson: Qu'on pourrait aller assez loin par voie de réglementation en vertu du pouvoir conféré par le droit pénal. Il peut fort bien avoir dit que...
M. Gar Knutson: Il dit «la tendance, en droit contemporain, à accorder un pouvoir de réglementation assez étendu en vertu du pouvoir conféré par le droit pénal».
Mme Mary Dawson: C'est une autorité en la matière.
M. Gar Knutson: Vous acceptez cet argument?
Mme Mary Dawson: Je ne suis pas sûre que je l'accepterais, à vrai dire.
M. Gar Knutson: Mais vous avouez qu'il s'agit d'un argument raisonnable.
Mme Mary Dawson: M. Hogg est une autorité constitutionnelle éminente, mais comme je le disais, nous ne sommes pas toujours d'accord avec ses conclusions surtout lorsqu'il ne s'agit pas d'un rapport sur ce qu'énonce le cas mais plutôt d'une hypothèse, ce qui est le cas ici, à mon avis.
M. Gar Knutson: Il parle d'une tendance...
Mme Mary Dawson: Oui. C'est son interprétation de la tendance. Je n'ai pas étudié ce passage. On pourrait certainement dire que même si l'on peut fixer des interdictions, il y a une limite précise au nombre de règlements que vous pouvez édicter autour de ces interdictions dans un champ qui autrement serait de compétence provinciale.
Le président: Merci, monsieur Knutson.
Madame Redman, s'il vous plaît.
Mme Karen Redman (Kitchener-Centre, Lib.): Merci, monsieur le président. J'ai trois questions et je vous demanderais de m'inscrire pour le deuxième tour si je ne réussis pas à toutes les poser.
Plusieurs témoins ont de vraies craintes concernant les amendes très élevées prévues dans le projet de loi C-5. J'ai demandé des éclaircissements maintes fois à savoir s'il s'agit en réalité de montants maximaux établis pour la gouverne des juges. Il est peu probable qu'un petit propriétaire de boisé qui, par inadvertance, tuerait une espèce se verrait imposer une amende de 250 000 $. À votre avis, quelle serait la justification pour ces niveaux et comment se comparent-ils aux lois actuelles?
Mme Mary Dawson: Je crois comprendre qu'il s'agit du même genre de niveaux que l'on retrouve dans d'autres lois semblables, y compris les lois sur l'environnement. Peut-être pourrais-je demander à M. Piragoff d'ajouter quelques éléments.
Me Donald Piragoff: On indique quelle serait l'amende maximale dans le pire des cas. Les tribunaux n'imposent habituellement pas l'amende maximale. Ces amendes sont prévues pour les cas les plus flagrants. La plupart du temps, les tribunaux ne se rendent jamais aux cas les plus flagrants, mais il y a toute une gamme d'amendes et la loi s'applique aux petites affaires comme le petit propriétaire de boisé qui tue une espèce en danger jusqu'à une situation où une grosse société, sachant fort bien ce qu'elle fait, décide quand même de polluer les eaux pour faire un profit. Le profit étant le motif menant au déversement et à la mort de poissons ou d'espèces en danger, ce n'est plus simplement un accident mais devient un cas de négligence, de calcul et de geste posé en toute connaissance de cause. Il s'agit donc de deux situations tout à fait différentes. Le tribunal étudie la situation, les faits, le niveau de culpabilité morale, les conséquences et ensuite impose une peine proportionnelle aux faits.
L'imposition d'amendes a plusieurs objectifs. D'abord, la punition, évidemment. Cela sert aussi à en dissuader d'autres de poser le même geste à nouveau. Évidemment, il y a aussi une question de souplesse et de proportionnalité vis-à-vis du sérieux de l'infraction et de la situation du coupable. C'est pour cela qu'il en existe toute une gamme. Toute loi fédérale prévoit une gamme assez large d'amendes. En réalité, il n'y a pas de maximum dans le Code criminel au niveau des amendes; il n'y a pas de limite. Le ministère laisse aux tribunaux le soin d'en décider.
• 1640
Dans les autres lois, il y a habituellement une limite—comme
vous l'avez dit 250 000 $ ou 50 000 $. Habituellement, dans ces
autres lois, le Parlement essaie d'imposer une certaine limite
quoiqu'elle puisse être assez élevée parfois. La Loi sur le droit
d'auteur prévoit même une amende de 1 million de dollars. Les gens
en étaient très inquiets, mais vous verrez que la disposition du
Code criminel ne prévoit aucune limite à l'amende. C'est donc
relatif et tout dépend des circonstances.
Mme Karen Redman: Merci. Il y a une autre chose dite par certains critiques du projet de loi C-5 et je crois que le Sierra Club of Canada en est. Ils disent que se servir du pouvoir conféré par le droit pénal de façon discrétionnaire comme filet de sûreté dans le cas des interdictions générales pourrait signifier que le projet de loi serait contesté au niveau constitutionnel. Qu'est-ce que vous en pensez?
Le président: Une réponse brève, s'il vous plaît.
Mme Mary Dawson: La loi prévoit des procédures additionnelles concernant toute espèce dans les zones qui ne se trouvent pas sur les terres fédérales, surtout pour ce qui est des interdictions concernant l'habitat essentiel.
Un processus qui s'ajoute avant qu'on puisse invoquer une loi ne limite en rien nos pouvoirs et il ne fait aucun doute que le Parlement peut décider de procédures différentes pour des situations différentes dans des contextes d'ordre criminel ou autres. De plus, point n'est besoin d'exercer tous nos pouvoirs afin de garder notre pouvoir, ce qui signifie que cette idée de filet de sûreté ne mine en rien, à notre avis, l'usage de nos pouvoirs.
Le président: Merci. Je vous pose une brève question et nous passons ensuite au deuxième tour.
Madame Dawson, dans cette répartition des pouvoirs entre le fédéral et les provinces, diriez-vous que le gouvernement fédéral est en position de supériorité d'après un grand nombre sinon la plupart des experts constitutionnels?
Mme Mary Dawson: De supériorité? À quel égard?
Le président: À l'égard des pouvoirs.
Mme Mary Dawson: C'est plutôt général comme déclaration. En théorie, nous avons les pouvoirs résiduels concernant la paix, l'ordre et le bon gouvernement en vertu de l'article 91. À vrai dire, le pouvoir concernant la propriété et les droits civils à l'article 92.13 a été traité à bien des égards comme étant un pouvoir résiduel. Tout dépend donc de votre perspective et du domaine en question.
Le président: Donc, en gros...
Mme Mary Dawson: En gros, dans certaines circonstances, le gouvernement fédéral peut l'emporter sur les instances provinciales.
Le président: Merci. Êtes-vous d'accord avec La Forest qui dit «Si la loi»—c'est-à-dire le projet de loi que nous étudions—«devait prévoir des interdictions établies par voie de règlement, la loi risquerait davantage d'être perçue comme étant de nature réglementaire plutôt que pénale. Par conséquent, il serait plus prudent d'intégrer les interdictions dans la loi elle-même»?
Mme Mary Dawson: À mon avis, c'est bien dit. Je crois que c'est ce que nous avons fait.
Le président: Et vous croyez que cette loi atteint bien cette fin? Oui?
Mme Mary Dawson: Oui, que je sache. Encore une fois, je ne suis pas experte pour ce qui est de cette loi.
Le président: Enfin, l'interdiction de détruire un habitat essentiel que l'on trouve au paragraphe 61(1) ne s'appliquerait qu'à moins que cet habitat essentiel ne soit nommé précisément au paragraphe 61(2). Constitutionnellement, cette interdiction serait- elle plus solide si on l'appliquait à l'habitat essentiel de toutes les espèces inscrites sur la liste?
Mme Mary Dawson: Je ne le crois pas. Je pense que le mécanisme prévu au paragraphe 61(2) ne crée aucun problème.
Le président: Merci. Nous allons commencer le deuxième tour de table, une minute ou deux peut-être chacun. M. Forseth est le premier intervenant.
M. Paul Forseth (New Westminster—Coquitlam—Burnaby, Alliance canadienne): Merci, monsieur le président.
Il me faudra plus de temps, mais...
En ce qui a trait à ce projet de loi en particulier, vous pouvez peut-être faire des observations plus générales. À votre avis, y a-t-il quelque changement que ce soit au niveau de la marge du partage des pouvoirs? Le projet de loi apporte-t-il quoi que ce soit de nouveau en ce qui a trait au partage des pouvoirs? Change- t-il la marge de quelque façon que ce soit? Prenons-nous ici une nouvelle orientation?
Mme Mary Dawson: Je pense que le projet de loi ne comporte pas de risques sérieux. Nous nous fondons sur notre pouvoir en vertu du droit pénal dans une large mesure, de sorte que je dirais qu'à mon avis, il n'y a pas de changements importants.
M. Paul Forseth: De changements importants... Mais vous envisagez la possibilité d'un changement?
Mme Mary Dawson: Non, pas vraiment. Je ne connais pas vraiment suffisamment les détails du projet de loi pour pouvoir le dire. Mais, de façon générale, je pense que nous respectons tout à fait nos pouvoirs constitutionnels.
M. Paul Forseth: Ma question comporte une partie A et une partie B. La partie A est la suivante: au départ, vous avez mentionné que la relation avec le client était avec le gouvernement plutôt qu'avec le Parlement. Je me demande tout simplement comment cela a influé sur votre témoignage aujourd'hui. Vos observations liminaires ont été très brèves, mais comme vous connaissiez à l'avance les préoccupations qui avaient été soulevées au comité, vous êtes arrivée ici préparée. Voilà la partie A de ma question, et je vous demanderais de faire des commentaires à ce sujet.
Dans la partie B de ma question, je tente encore une fois d'aborder la question du pouvoir constitutionnel. Si une province contestait une question de compétence aux termes de la Constitution, pouvez-vous nous dire quels articles risqueraient de nous causer des problèmes, et de quelle façon à votre avis nous pourrions les régler?
Donnez-nous des exemples d'articles du projet de loi qui pourraient donner lieu à une contestation aux termes de la Constitution... «des mesures de prévention ont été prises», sont, je pense, les mots que vous avez utilisés. Vous avez également dit que cela était sans risque, de sorte que toute la question a certainement été examinée. J'aimerais que vous me disiez comment cela peut être effectivement sans risque. Où et comment vous en êtes-vous assurés?
Mme Mary Dawson: Eh bien, au risque de me répéter, je vous répondrai que nous nous en sommes assurés en nous appuyant sur notre pouvoir en vertu du droit pénal.
M. Paul Forseth: Très bien. Alors, je vous poserai peut-être une question supplémentaire. Ce que nous devrions faire, peut-être, c'est tout simplement présenter un petit projet de loi modifiant le Code criminel, ce qui répondrait à bon nombre de préoccupations, plutôt que de nous lancer dans ce bourbier constitutionnel. Car il y a dans le Code criminel des articles où on interdit de tuer des animaux, etc.—j'ai oublié de quel article il s'agit. Peut-être qu'avec un ou deux mots, ce serait une façon simple d'atteindre le même objectif.
Mme Mary Dawson: Nous sommes d'avis que le projet de loi atteint les objectifs visés.
M. Paul Forseth: La raison pour laquelle nous tournons en rond, ici, c'est que je prévois que le comité voudra peut-être modifier le projet de loi afin de le renforcer. Mais si c'est ce que le comité va faire, il ne va pas s'y prendre d'une façon qui causera des problèmes constitutionnels ou qui fera en sorte que le ministère va commencer à donner toutes sortes d'avis contraires, car on ne s'en sortirait plus.
Si le comité veut renforcer le projet de loi considérablement, il voudra s'assurer qu'il le fait d'une façon qui respecte la Constitution.
Mme Mary Dawson: On a un problème si l'on tente de réglementer plutôt que de se fonder uniquement sur le pouvoir conféré par le droit pénal. Vous ne m'avez pas demandé si on avait la capacité de légiférer, par exemple, en recourant à la disposition concernant la paix, l'ordre et le bon gouvernement, et je pense qu'il y a peut- être un certain désaccord sur cette question.
Nous croyons qu'on ne peut pas utiliser la disposition concernant la paix, l'ordre et le bon gouvernement pour une telle loi parce qu'il faudrait se fonder sur le critère de la dimension nationale qui, à notre avis, est un critère très restreint. Si vous voulez, je pourrai vous l'expliquer plus en détail. Au fond, nous ne croyons pas que c'est la voie à suivre. Un pouvoir de réglementation plus vaste pourrait donner lieu à des problèmes à ce niveau, si on se fonde sur le pouvoir en vertu du droit pénal.
Le président: Merci.
Je regrette, mais il nous reste sept minutes et il y a six députés qui veulent poser des questions. À vrai dire, M. Forseth en était à sa première ronde, alors c'était équitable de lui accorder plus de temps. Maintenant, puis-je demander aux députés de poser des questions courtes afin de limiter chaque échange à deux minutes?
Monsieur Bigras.
[Français]
M. Bernard Bigras: Monsieur le président, je vais essayer d'y aller assez clairement. À la lumière de nos discussions lors desquelles des éléments ont été apportés, entre autres, par M. Knutson, ne reconnaissez-vous pas que dans le cas d'Hydro-Québec, au fond, par rapport à la base de la jurisprudence prévue dans le cadre de la législation qui a recours au pouvoir pénal et qui permet l'utilisation du double filet, l'application de cette loi-là dépasse de beaucoup les terres domaniales et touche aussi l'ensemble des territoires appartenant aux provinces? N'y a-t-il pas un danger de faire en sorte qu'il n'y aura plus à la fin qu'un seul champ d'application, soit celui du fédéral, et que les provinces, au fond, n'existeront plus?
• 1650
Je comprends que c'est la situation en vertu de
notre Constitution, que c'est la
réalité. Mais n'y a-t-il pas, d'une part,
une tendance à faire en
sorte qu'il n'y ait qu'un seul champ d'application, soit le
champ du fédéral?
D'autre part, j'aimerais connaître la portée des avis que vous avez émis. Avaient-ils pour but de confirmer le pouvoir du fédéral en la matière ou avaient-ils plutôt pour but de vérifier le pouvoir du fédéral dans un contexte où les provinces ont aussi des responsabilités?
[Traduction]
Le président: Vous avez une minute.
Mme Mary Dawson: Je ne suis pas sûre d'avoir tout compris, mais essentiellement, le but de ce projet de loi c'est d'assurer en quelque sorte la protection environnementale pour les espèces en péril. On se sert pour cela du pouvoir conféré par le droit pénal parce que c'est la façon la plus facile, la plus directe, reconnue et incontestable de le faire. Je ne pense pas que nous nous ingérons dans un champ de compétence provinciale. Comme je l'ai déjà dit, ce projet de loi reconnaît certaines compétences aux provinces, mais il donne au gouvernement fédéral le pouvoir de prendre un décret, s'il le juge nécessaire.
Le président: Monsieur Comartin.
M. Joe Comartin: J'ai deux ou trois questions rapides.
M. Herron a suggéré la tenue d'une table ronde à l'automne. Compte tenu de la complexité de la question et des avis et conseils contradictoires que nous recevons, verriez-vous un inconvénient à comparaître encore une fois à l'automne?
Mme Mary Dawson: Je ne pense pas que c'est à moi de dire s'il devrait y avoir une table ronde. Il me semble qu'il faudrait demander au ministère.
Le président: C'est au comité, et non au ministère de la Justice, de décider.
M. Joe Comartin: Merci, monsieur le président.
Le ministère a-t-il sollicité des avis externes, ou son avis sur ce projet de loi a-t-il été produit en totalité à l'intérieur du ministère?
Mme Mary Dawson: Je ne suis pas certaine.
M. Joe Comartin: Pourriez-vous vous informer et nous laisser savoir la réponse?
Mme Mary Dawson: Oui.
M. Joe Comartin: Laissez-nous savoir si ces avis ont été produits par un bureau d'avocats de l'extérieur.
Mme Mary Dawson: Oui, nous pourrions faire cela.
M. Joe Comartin: Enfin, savez-vous s'il y a des experts constitutionnels au Canada, par exemple le professeur Hogg, dont les opinions ne vont pas dans le même sens que celles du juge La Forest et de M. Gibson, qui les remettent en question dans un contexte universitaire?
Mme Mary Dawson: Je ne suis pas au courant de cela, non, je ne pourrais pas répondre.
M. Joe Comartin: Merci.
Le président: Merci, monsieur Comartin.
Monsieur Herron, allez-y.
M. John Herron: Le printemps dernier, j'ai eu un petit différend avec le ministre à propos de la hiérarchie de la protection. Ce que je proposais, c'était de rendre la protection de l'habitat obligatoire dans les zones de compétence fédérale et discrétionnaire ailleurs. Il y voyait un problème constitutionnel. La plupart des avis juridiques disaient que cela ne cadrait pas, parce qu'il y a d'autres projets de loi qui le font précisément. Alors, pour le compte rendu, existe-t-il des obstacles de nature constitutionnelle à faire de la protection de l'habitat une obligation dans les zones de compétence fédérale?
Mme Mary Dawson: Je ne sais pas exactement ce que le ministre a dit, mais je ne le pense pas.
M. John Herron: D'accord. Merci.
Le président: Monsieur Lincoln.
M. Clifford Lincoln: J'aimerais revenir à la contradiction entre la convention, comme vous l'interprétez—les nids et les oeufs des oiseaux—et la loi elle-même, notamment l'article 12, qui dit: «Établir des zones de protection pour les oiseaux migrateurs et leurs nids et en prévoir la surveillance et la gestion», notamment l'article 35 du règlement, qui dit: «ou d'autres substances nocives pour les oiseaux migrateurs dans des eaux ou une région fréquentées par ces oiseaux».
Le juge La Forest et M. Gibson, dans les avis, ont dit:
-
Le Parlement n'est pas simplement limité à la mise en «uvre des
exigences minimales de la Convention; le cas échéant, de grandes
parties de la loi et des règlements actuels seraient
inconstitutionnelles—ce qui n'est pas le cas.
Ils poursuivent, en disant que
-
le Parlement a le pouvoir d'intégrer dans la loi de mise en oeuvre
toute disposition corrélative lui permettant de respecter les
obligations et les buts de la Convention.
• 1655
Sachant que le mot «régions» ne veut pas dire «habitat» pour le
ministère de la Justice, qu'est-ce que cela veut dire? Qu'est-ce
que cela veut dire si cela ne veut pas dire quelque chose de plus
que les oiseaux et les nids?
Mme Mary Dawson: Je ne peux pas répondre à cette question parce que je n'ai pas étudié cette loi en particulier.
M. Clifford Lincoln: Alors je commence à voir la logique. Si la loi va au-delà de la convention à votre avis, il s'ensuit que la loi est inconstitutionnelle. Comment se fait-il qu'on ait jamais contesté cette loi?
Mme Mary Dawson: Je ne peux pas répondre à cette question.
M. Clifford Lincoln: Je pense que c'est ça. Vous avez répondu à ma question.
Le président: Merci, monsieur Lincoln.
Madame Carroll.
Mme Aileen Carroll: M. Herron a déjà posé ma question, mais j'aimerais quand même faire une observation très rapidement.
Madame Dawson, en répondant à une question, vous avez dit: «Nous croyons que le projet de loi est fort». Dites-vous cela en tant qu'avocate ou en tant qu'environnementaliste?
Mme Mary Dawson: J'ai répondu du point de vue juridique, à savoir si oui ou non on peut défendre ce projet de loi.
Mme Aileen Carroll: D'accord. En d'autres mots, le projet de loi est solide du point de vue juridique. Il réussit à faire ce que les législateurs voulaient qu'il fasse et son fondement juridique est solide, son libellé est solide. C'est ce que vous entendez lorsque vous dites que le projet de loi est fort, n'est-ce pas?
Mme Mary Dawson: Du point de vue constitutionnel, le projet de loi ne présente pas de grands risques—c'est ce que je veux dire. Et je ne peux pas vous donner mon opinion en ce qui concerne l'intention de la politique.
Mme Aileen Carroll: Je sais. Je voulais simplement m'assurer qu'il n'y a pas de risque. En fait, la barre est placée si bas qu'il n'y a pas le moindre risque au monde du point de vue constitutionnel?
Merci, madame Dawson.
Merci, monsieur le président.
Le président: Monsieur Knutson.
M. Gar Knutson: Merci beaucoup, monsieur le président.
Madame Dawson, je tiens à vous remercier d'être venue aujourd'hui, et je dois dire que j'ai beaucoup apprécié cette séance.
Je relis le document de M. Hogg qui porte sur la théorie de l'intérêt national justifiant l'exercice de la compétence en matière de paix, d'ordre et de bon gouvernement. Il explique que la loi stipule que l'intérêt national dépasse l'intérêt régional ou provincial et doit, par sa nature inhérente, être l'intérêt du pays dans son entier.
Ne croyez-vous pas que la prévention de la disparition des animaux, des plantes, des oiseaux ou peu importe constitue quelque chose qui dépasse l'intérêt régional? Nous signons ces traités internationaux sur la biodiversité ainsi que ces conventions internationales importantes. Est-ce que cela ne laisse pas entendre que, même si on décidait de faire fi de ce pouvoir pénal, pouvoir que nous pouvons utiliser d'après vous, nous serions toujours en mesure de le faire en vertu de...
Mme Mary Dawson: Il faut être prudent lorsqu'on utilise à la fois la terminologie juridique et la terminologie des profanes. À mon avis, la plupart des gens conviendraient qu'il faut protéger les espèces menacées, mais il faut absolument comprendre que dans la loi et dans les décisions des tribunaux, la théorie de l'intérêt national stipule que la paix, l'ordre et le bon gouvernement relèvent du gouvernement fédéral. Les tribunaux ont établi des paramètres très stricts pour déterminer si on peut avoir recours au pouvoir concernant l'intérêt national.
M. Gar Knutson: Et vous ne croyez pas que la prévention de la disparition serait... Le sujet de la prévention de la disparition...
Mme Mary Dawson: Permettez-moi de passer en revue très rapidement les trois aspects clés du critère permettant de déterminer si on peut invoquer l'intérêt national. Premièrement, le tribunal a dit que la matière doit avoir une unicité, une particularité et une indivisibilité. Ça ressemble à du charabia, mais le tribunal en donne une interprétation très stricte.
Deuxièmement, pour que le gouvernement fédéral intervienne de façon légitime, le gouvernement provincial doit ne pas être en mesure de s'occuper du sujet en question. De plus, ce projet de loi prévoit la possibilité que les provinces puissent s'occuper de certains aspects.
Troisièmement, il faut pouvoir démontrer que l'effet sur la compétence provinciale serait compatible avec le partage des pouvoirs entre le gouvernement fédéral et les provinces. Par conséquent, si le tribunal établit que les provinces s'occupent de certains aspects de la question ou bien disposent d'un mécanisme pour le faire, ce constat pourrait convaincre le tribunal que le gouvernement fédéral ne pourrait pas assumer cette responsabilité en invoquant l'intérêt national.
Si vous lisez un peu plus loin, j'imagine que vous verrez que Hogg en parle aussi.
M. Gar Knutson: D'accord.
Le président: Merci.
Madame Redman.
Mme Karen Redman: Très brièvement, monsieur le président, merci.
Certains témoins autochtones ont exprimé des préoccupations en ce qui concerne la clause de non-dérogation et ils ont même proposé de remplacer le libellé... Je crois qu'ils ont proposé le libellé qu'on trouve à l'article 35 de la Constitution.
Pourriez-vous nous préciser si oui ou non la clause de non- dérogation est constitutionnelle et compatible avec ce libellé?
Mme Mary Dawson: Oui, elle est certainement compatible. Elle est un tout petit peu plus vaste que les clauses de non-dérogation qui ont été utilisées, et je ne peux pas vraiment vous expliquer comment cela s'est fait, mais l'effet du libellé est plus ou moins pareil.
Mme Karen Redman: Merci.
Le président: Merci.
• 1700
En parlant de la question autochtone, pensez-vous que ce
projet de loi tienne compte des revendications territoriales des
Autochtones?
Mme Mary Dawson: Oui. Le projet de loi semble en tenir compte de façon adéquate.
Le président: Nous pouvons par conséquent rassurer les témoins des collectivités autochtones qui ont soulevé cette préoccupation devant le comité?
Mme Mary Dawson: Je crois que oui.
Le président: Vous croyez que oui?
Mme Mary Dawson: Oui. Je n'ai pas examiné les détails mais j'ai étudié les dispositions de façon sommaire.
Le président: Pour finir, selon Dale Gibson, le paragraphe 34(1) pose un problème parce qu'il semble contredire ou affaiblir considérablement les articles 32 et 33 précédents. Il modifie de façon importante les dispositions des articles 32 et 33. Êtes-vous d'accord avec M. Gibson?
Mme Mary Dawson: Eh bien, il prévoit un régime distinct, mais l'article 34 ne me pose pas de problème du point de vue constitutionnel.
Le président: Il le qualifie de limitation.
Mme Mary Dawson: C'est certainement une limitation, mais il s'agit d'une question de politique, et non pas d'une question juridique.
Le président: Vous croyez qu'il s'agit d'une question de politique?
Mme Mary Dawson: Oui.
Le président: Très bien.
Au nom des membres du comité et comme on vous l'a déjà dit, nous vous sommes reconnaissants de votre comparution. Merci beaucoup.
La séance est levée.