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ENVI Rapport du Comité

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17.    LE DILEMME DU FINANCEMENT


Le budget de l'ARLA et le recouvrement des coûts

17.1    Les dépenses de l'ARLA pour l'année financière 1998-1999 ont été de 26,7 millions de dollars. De ce total, quelque 7,8 millions de dollars ont été payés par recouvrement des coûts. En 1997-1998, sur un budget d'exploitation de 24,8 millions, environ 7,5 millions ont été recouvrés. En 1999-2000, on prévoit recouvrer 8,5 millions sur un budget prévu de 28,3 millions289. Ces chiffres sont reproduits dans le tableau qui suit à des fins de comparaison.

Tableau 17.1 : Dépenses totales et coûts recouvrés de l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire
(millions de dollars)

Exercice 1995-1996 1996-1997 1997-1998 1998-1999 1999/2000
(prév.)
Frais recouvrés s.o. s.o. 7,5 7,8 8,5
Deepenses totales 21,5 24,8 24,8 26,7 28,3

 

17.2    Ces frais de recouvrement des coûts, établis par règlement en 1997290, s'appliquent à la majorité des demandes d'homologation et sont exigibles au début de chaque étape du processus d'examen (10 p. 100 sur présentation de la demande, 25 p. 100 sur acceptation de son examen préliminaire et 65 p. 100 sur acceptation de son évaluation). Des frais précis sont exigés pour chaque composante du processus d'examen, et ils varient de 150 $ pour un certain type d'examen d'étiquette à 98 248 $ pour un examen des données toxicologiques à l'appui d'une demande d'homologation d'un pesticide contenant un nouvel ingrédient actif (tableau 17.2).

17.3    Les frais sont payables, peu importe si le produit est homologué ou non. Une demande d'homologation pour un nouvel ingrédient actif peut coûter aux environs de 228 000 $. Des frais réduits sont toutefois prévus selon des critères d'admissibilité pour faciliter l'accès au marché canadien de produits spécialisés vendus en faible quantité. Sont également exemptés de frais certains types de demandes. Ainsi, aucun frais n'est exigé pour l'examen de données sur des biopesticides, même si des frais modestes sont exigés pour les examens d'étiquette (154 $ à 262 $), le renouvellement des certificats (154 $) et les permis de recherche (150 $).

17.4    Des frais annuels de maintien de 2 690 $ par produit homologué sont également exigés pour le droit de fabriquer ou de vendre le produit au Canada, mais une demande peut être présentée pour réduire ce montant si les ventes du produit sont inférieures à 89 667 $. Le montant minimal pour les produits dont les ventes sont inférieures à 2 500 $ est de 75 $, alors que, pour les produits dont les ventes se situent entre 2 500 $ et 89 667 $, le montant est de 3 p. 100 des ventes de l'année financière précédente291.

Tableau 17.2: Frais de recouvrement des coûts choisis

Frais maximaux, demandes d'homologation les plus complexes ... (environ) 228 000 $

Exemples de frais pour des éléments précis du régime d'évaluation :

  • examen des données toxicologiques accompagnant une demande visant un
    produit contenant un nouvel ingrédient actif  ...  98 248 $
  • examen des données environnementales pour une demande visant un produit
    contenant un nouvel ingrédient actif  ...  26 953 $
  • examen des données d'expositions accompagnant, une demande
  • visant un produit contenant un nouvel ingrédient actif  ...  24 384 $
  • examen des données écotoxicologiques accompagnant une demande visant
    un produit contenant un nouvel ingrédient actif  ...  14 882 $
  • examen des données sur les résidus  ...  8 448 $
  • examen des données métaboliques  ...  6 034 $
  • examen des données sur la valeur et l'efficacité  ...  906 $
  • examen de l'étiquette accompagnant une demande visant un produit contenant
    un nouvel ingrédient actif  ...  262 $
  • autre examen concernant l'étiquette    154 $

Frais annuels maximaux de maintien de l'homologation  ...   2 690 $

Source : Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire, Guide des frais à payer dans le cadre du recouvrement des coûts du programme de réglementation de la lutte antiparasitaire, le 16 avril 1997

 

Manque à gagner dans le recouvrement des coûts et priorités de l'ARLA

17.5    Pour les années financières 1997-1998 et 1998-1999, le manque à gagner annuel dans le recouvrement des coûts a été de 4 millions de dollars, que l'ARLA attribue à la perception de frais annuels de maintien inférieurs à ceux qu'on avait prévus. À cause de ce manque à gagner total de 8 millions de dollars, l'ARLA a retardé son programme de réévaluation des anciens pesticides292. Comme nous l'avons mentionné dans le chapitre 10, plusieurs témoins préoccupés par ce retard ont demandé que le programme reçoive un financement indépendant suffisant et ne dépende pas de fonds réalisés ou épargnés dans d'autres secteurs. Le Comité profite de l'occasion pour réitérer la recommandation qu'il a faite dans le chapitre 10, c'est-à-dire que le programme reçoive un financement suffisant et que tous les pesticides d'avant 1995 soient réévalués d'ici 2006. Il est urgent de réévaluer ces anciens pesticides, dont certains sont sur le marché depuis 40 ans et plus, en fonction des normes plus rigoureuses actuelles, notamment en appliquant un facteur de sécurité additionnel de 10 pour tenir compte de la vulnérabilité particulière des enfants et des autres segments sensibles de la population.

17.6    Le retard de la réévaluation des anciens pesticides n'est pas le seul problème soulevé par les témoins au sujet du programme de recouvrement des coûts de l'ARLA. Selon certains, comme l'homologation des pesticides génère des revenus provenant des frais de recouvrement des coûts, l'ARLA met l'accent sur les homologations plutôt que sur d'autres activités non payantes qui s'inscrivent dans son mandat. Le Fonds mondial pour la nature a déclaré :

Lors des négociations de recouvrement des coûts avec l'industrie, l'ARLA a dû réduire son budget d'ensemble. Elle avait promis d'économiser de l'argent grâce à des améliorations sur le plan de l'efficience et elle avait également promis de respecter les délais en matière d'homologation demandés par l'industrie.
Elle a manqué d'argent deux années de suite. Elle est sérieusement à court d'argent. Ce sont les activités qui ne paient pas leurs frais, comme par exemple la réévaluation, l'élaboration d'une base de données sur les pesticides, et les exigences en matière de rapports sur les effets néfastes, qui ont été mises à l'arrière-plan, reprofilées si vous voulez, et ne seront réactivées que si de l'argent est économisé. Cela est parfaitement inacceptable293.

17.7    Cette critique semblerait fondée. D'après les données financières fournies au Comité par l'ARLA (voir le tableau 17.3), seulement 0,8 million de dollars a été dépensé pour des solutions de remplacement pendant l'année financière 1998-1999. Par ailleurs, 15,3 millions de dollars ont été dépensés pour des activités d'homologation. Même si, comme le note l'ARLA, une partie des 2,6 millions de dollars dépensés pour les politiques a servi à des activités liées à des « solutions de remplacement », il fait peu de doute que ces solutions de remplacement et d'autres activités qui ne rapportent pas n'ont pas été financées autant qu'il l'aurait fallu pour l'atteinte de l'objectif primordial de l'ARLA, à savoir protéger la santé humaine et l'environnement. En effet, le Comité est très préoccupé du fait que l'ARLA n'a pas encore mis au point un système de déclaration des effets nocifs et une politique officielle de réduction du risque, même si l'ARLA nous informe que des efforts ont été entrepris dans les deux cas294.

17.8    Le Comité note que ces deux initiatives, ainsi que celles qui concernent la réévaluation des anciens pesticides, étaient prévues dans les engagements du Livre mauve de 1994 du gouvernement fédéral, qui faisait suite aux recommandations du Livre bleu de 1990 de l'Équipe d'examen sur l'homologation des pesticides. Le Comité est d'accord avec le Fonds mondial pour la nature, qui a déclaré qu'il est tout à fait inacceptable que ces initiatives importantes aient été reléguées au second plan pendant si longtemps. Dans la foulée de ses préoccupations, le Comité a fait des recommandations précises concernant ces initiatives dans les chapitres précédents (voir au chapitre 9 la recommandation sur le signalement des effets nocifs et au chapitre 12 la recommandation sur l'élaboration d'un protocole national de réduction des pesticides).


Tableau 17.3 : DÉPENSES DE L'AGENCE DE RÉGLEMENTATION DE LA LUTTE ANTIPARASITAIRE
(en milliers de dollars)

de 1997-1998 à 1999-2000

 

Note 1:    Le domaine d'activité Politiques comporte également des activités sur de Nouvelles stratégies, plus particulièrement l'élaboration de politiques dans le cadre des activités de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) et de l'ALENA, comme la réduction du risque, les examens conjoints de produits et de biopesticides à faible risque et le renforcement des capacités de réglementation dans des domaines comme la formation des opérateurs antiparasitaires, les zones tampons pour les environnements sensibles ainsi que les produits de formulation.

*  Reflète une partie des récentes injections de fonds du gouvernement fédéral (budget fédéral de 1999) du Programme de salubrité des aliments, qui vont permettre à l'Agence de mettre en place un programme amélioré de réévaluation.

Source : Tableau fourni au Comité par l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire.

 

Frais de recouvrement des coûts : irritant possible pour l'homologation de pesticides plus sécuritaires

17.9    Le programme de recouvrement des coûts de l'ARLA a également été critiqué parce que les frais pourraient décourager les demandeurs d'homologation dans certains cas. Un des membres du Comité s'est dit particulièrement inquiet au sujet des difficultés des petites entreprises qui mélangent des produits chimiques pour préparer un pesticide, mais ne peuvent payer les frais fixes d'homologation alors que les grandes entreprises qui mettent au point un produit peuvent facilement absorber ces frais. Le Comité a aussi entendu des témoins comme le Conseil canadien de l'horticulture affirmer que certains nouveaux produits présumément plus sécuritaires disponibles dans d'autres pays, surtout aux États-Unis, pourraient ne pas être disponibles au Canada. Comme le marché canadien est relativement petit, on a dit au Comité qu'il n'est peut-être pas profitable pour les fabricants de demander l'homologation au Canada, surtout s'ils doivent produire des données différentes ou additionnelles à l'appui de leur demande d'homologation295.

17.10    Le Comité a entendu trop peu de témoignages sur les frais de recouvrement des coûts pour pouvoir conclure que ces frais nuisent à l'homologation au Canada. Les problèmes connexes de l'obligation de produire des données parfois différentes au Canada et du petit marché canadien peuvent constituer des irritants. Dans un rapport préparé en 1998 pour Santé Canada, Nephin Consulting Partners indique que le lieu des essais sur le terrain et l'entrée sur le marché ont un effet sur ces problèmes :

Au cours de nos entretiens, nous avons découvert que la pratique veut qu'on homologue d'abord un produit aux États-Unis, où on le commercialise avant de présenter une demande au Canada. Ce n'est pas parce qu'il est moins coûteux de l'homologuer au États-Unis, mais parce que les essais en milieu réel se déroulent habituellement dans ce pays, si bien que le produit est prêt à y être homologué plus tôt. L'autre raison pour laquelle les demandes d'homologation sont d'abord présentées aux États-Unis semble [surtout] tenir au fait qu'avant toute autre chose, les sociétés veulent s'assurer que le marché plus vaste que constitue les États-Unis sera ouvert à leur produit. Selon le calcul des risques effectué par ces sociétés, [la décision de lancer un produit sur un nouveau marché] paraît plus importante que le droit d'homologation canadien. Cependant, certaines sociétés nous ont déclaré que des droits d'homologation de l'ordre de 200 000 $ sont suffisamment élevés pour les obliger à revoir leurs analyses de rentabilité296.

17.11    Le Comité note toutefois que le Canada offre aux demandeurs d'homologation de nouveaux produits admissibles des réductions de frais pouvant atteindre 10 p. 100 des ventes prévues297. L'ARLA a aussi mis en place un programme d'« homologation des usages limités à la demande des utilisateurs », qui permet aux utilisateurs ou groupes d'utilisateurs canadiens de commanditer l'homologation d'un pesticide au Canada dans certaines conditions lorsque le volume de vente prévu du produit n'est pas suffisant pour persuader son fabricant d'homologuer ou de vendre le produit au pays. Des réductions de frais sont aussi consenties pour l'homologation d'usages limités, à la demande des utilisateurs dans certains cas applicables298.

17.12    Pour fin de comparaison, le Résumé de l'étude d'impact de la réglementation, publié dans le règlement de 1997 établissant les frais de recouvrement des coûts de l'ARLA, indique que les États-Unis avaient mis en place des frais d'homologation pendant une courte période en 1988, mais que, à cause d'une contestation devant les tribunaux, les frais ont été suspendus jusqu'à la fin de septembre 1997. Cette suspension a été prolongée au-delà de 2001 en vertu de la Food Quality Protection Act de 1996 des États-Unis. Par ailleurs, le Royaume-Uni exige un droit annuel sur les ventes ainsi que des frais d'homologation initiaux. Dans le budget du Pesticides Safety Directorate (direction générale de la sécurité des pesticides) du Royaume-Uni, qui s'élevait à 24,2 millions de dollars canadiens en 1995-1996, un total de 13,26 millions de dollars (ou 55 p. 100) a été recouvré auprès de l'industrie, dont 11,19 millions (46,8 p. 100) en droits sur les ventes au taux de 1,46 p. 100 et 2,06 millions (8,6 p. 100) en frais d'homologation299.

17.13    Nephin Consulting Partners a aussi examiné les frais de recouvrement des coûts exigés dans les pays suivants : Australie, Canada, Royaume-Uni et États-Unis. Elle a noté que les États-Unis n'exigent que des frais pour l'établissement de la tolérance aux pesticides (l'équivalent de la limite maximale de résidus (LMR) au Canada) des produits agricoles bruts et des produits alimentaires, mais que, dans son budget de 1999, le gouvernement américain proposait de réintroduire des frais d'homologation de pesticides pour recouvrer les coûts d'examen des demandes d'homologation de l'Environmental Protection Agency (EPA). Hormis l'exception existante aux États-Unis, Nephin Consulting Partners a conclu que les frais de demande au Canada s'avèrent les plus étalés dans l'ensemble des quatre pays : ils sont les plus élevés pour une nouvelle demande d'importance et les plus faibles pour les petits changements administratifs. Le Canada s'est toutefois avéré le seul pays qui consent une réduction des frais lorsque le volume prévu des ventes est faible300. Le tableau 17.4 présente les frais exigés dans chaque pays pour l'homologation d'un produit contenant un nouvel ingrédient actif.

Tableau 17.4 : Comparaison entre les droits d'homologation

Registration of a
New Active Ingredient

Canada1

Australia

United
Kingdom

United States
of America3

­ product with a new active
ingredient, food use
$228,832 $20,000 $149,000 $95,000
(tolerance
level only)
­ new product use, non-food $58,191 $12,000 $97,000 $0
­ user requested minor use
registration (minimum fee)
$22,883 N/A $1,142 N/A
­ exempted products2 $262      
  1. Le droit indiqué pour le Canada est le montant maximal payable; il est possible d'obtenir des réductions en fonction des prévisions de vente pour les trois premières années. Le droit minimal pour un nouveau produit contenant un nouvel ingrédient actif peut ne pas dépasser 10 p. 100 du montant indiqué dans ce tableau. Le droit indiqué pour l'homologation d'un usage limité à la demande d'un utilisateur reflète les 10 p. 100 minimaux.
  2. Plusieurs types de produits sont exonérés de la plupart des droits d'homologation au Canada.
  3. Le droit de tolérance indiqué pour le traitement aux États-Unis est le montant minimal payable; il peut être plus élevé selon le nombre de cultures vivrières concernées.

Source :     Nephin Consulting Partners, Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire, Étude comparative, Rapport final, le 15 juillet 1998, partie du tableau XIII.

17.14    Selon ces données, il semblerait que les frais initiaux d'homologation soient en général plus élevés au Canada que dans les autres pays. Nephin Consulting Partners a toutefois souligné que les frais après homologation dans chaque pays (frais de maintien annuels ou droits sur les ventes annuelles, etc., selon le régime) sont en général moins élevés au Canada qu'ailleurs (voir le tableau 17.5). Après avoir ajouté ces frais aux frais initiaux de demande et les avoir calculés pour une période hypothétique de 15 ans, Nephin Consulting Partners a conclu que le total des frais payés au Canada est quelque peu inférieur à ceux exigés aux États-Unis, au Royaume-Uni et en Australie pour des produits dont le volume annuel des ventes est moyen à élevé (500 000 $), mais qu'ils sont beaucoup plus élevés qu'ailleurs pour les produits dont le volume annuel des ventes est faible (75 000 $)301.

Tableau 17.5 : Droits annuels maximaux exigés par produit ou par compagnie

Droit annuel
maximum
Canada Australie Royaume-
Uni
Étas-Unis
Fédéral    États1
­ par produit 2 690 $ 25 000 $ pas de max. 2 750 $ pas de max.
­ par déclarant pas de max. pas de max. pas de max. 138 000 $ pas de max.
  1. Aux États-Unis, un droit de 9 800 $ doit être acquitté dans tous les États pour homologuer un produit, plus une redevance non plafonnée sur les ventes en Californie.

Souce :    Nephin Consulting Partners, Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire, Étude comparative, Rapport final, le 15 juillet 1998, tableau XV.

 

La nécessité d'examiner le programme de recouvrement des coûts

17.15    Le Comité n'a pas eu l'occasion d'approfondir la question du recouvrement des coûts. Par conséquent, il lui est impossible de conclure qu'il faudrait maintenir, éliminer ou modifier les frais de recouvrement des coûts de l'ARLA. Certains membres du Comité appuient la politique de recouvrement des coûts du gouvernement et sont favorables au maintien des frais d'utilisation. Pourtant, d'autres membres s'opposent à la politique et exigent l'élimination des frais. D'autres encore sont en faveur de l'élimination des frais mais uniquement si le budget de l'ARLA est augmenté en conséquence pour compenser la perte de revenus.

17.16    Le gouvernement fédéral a affirmé, dans le Livre mauve, qu'un facteur important dans la conception du régime de recouvrement des coûts de l'ARLA serait de ne pas empêcher l'homologation des produits antiparasitaires, surtout les produits à usage limité et les produits de remplacement des produits chimiques traditionnels, ou encore de ne pas placer les utilisateurs de produits antiparasitaires dans une situation concurrentielle désavantageuse302. Le Comité note également que, lorsque le Conseil du Trésor a introduit la nouvelle politique de recouvrement des coûts du gouvernement en 1997, les ministères étaient tenus de faire des examens périodiques pour s'assurer du respect des exigences de la politique sur les frais d'utilisation. Ces examens visaient également à déterminer s'il y avait lieu d'augmenter ou de diminuer les frais en cas de changements dans la structure des coûts, dans le dosage des avantages publics et privés ou dans le niveau de service. Le Conseil du Trésor a dû à son tour entreprendre un examen de la politique de recouvrement des coûts du gouvernement dans les trois ans suivant sa mise en œuvre303.

17.17    Même si le Conseil du Trésor ne semble pas avoir terminé son examen, l'étude de Nephin Consulting Partners a été commandée par Santé Canada pour s'acquitter de son obligation, aux termes de la politique du Conseil du Trésor, de procéder à des examens périodiques. L'étude visait à examiner les frais de recouvrement des coûts, mais elle ne portait pas précisément sur l'effet que ces frais pourraient avoir sur l'homologation de produits plus sécuritaires et plus efficaces.

17.18    De l'avis du Comité, il importe d'évaluer sans délai l'impact des frais de recouvrement des coûts sur l'homologation de produits plus sécuritaires et plus efficaces. Si ces frais nuisent en fait à l'homologation de pesticides nouveaux et plus sécuritaires, cela aura pour effet d'empêcher ou de retarder l'application d'une des dispositions fondamentales que nous proposons d'inscrire dans la nouvelle loi sur la lutte antiparasitaire, à savoir le principe de substitution (dont il est question au chapitre 11). Si les frais de recouvrement des coûts nuisent à l'homologation de ces produits, il faut prendre sans délai les mesures correctives qui s'imposent.

Le Comité recommande :
a) que le ministre de la Santé et l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire réalisent immédiatement une étude pour déterminer si les frais de recouvrement des coûts nuisent à l'homologation au Canada de pesticides plus sécuritaires et plus efficaces;
b) que le ministre de la Santé dépose son étude au Parlement dans les six mois suivant le dépôt du présent rapport à la Chambre des communes.

Paiement au receveur général du Canada

17.19    Pour faire taire les inquiétudes voulant que l'ARLA fasse primer ses activités générant des recettes sur celles qui n'en génèrent pas, le Comité estime qu'il serait souhaitable que les frais applicables soient versés au receveur général du Canada, et non pas directement à l'ARLA. L'Agence serait alors peut-être moins encline à enrichir son budget d'exploitation par l'homologation des pesticides et pourrait accorder davantage d'attention aux activités de son mandat qui ne génèrent pas de recettes, notamment les programmes visant à développer des solutions de remplacement aux pesticides. Les frais de recouvrement des coûts exigés par le gouvernement fédéral sont payés au receveur général dans près de 50% des cas, et non au ministère ou à l'agence qui fournit effectivement le service. Selon le Comité, il serait utile que cette approche soit suivie également par l'ARLA.

Le Comité recommande que le gouvernement prenne les mesures nécessaires pour que les frais de recouvrement des coûts facturés par l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire soient payés au receveur général du Canada et non à l'Agence.

Besoin d'un financement accru

17.20    Par-delà le recouvrement des coûts, il paraît évident au Comité que le financement de l'Agence est nettement insuffisant. Lorsque le gouvernement a convenu de créer l'Agence en 1994, il a indiqué dans le Livre mauve que 20 millions de dollars supplémentaires, pour un budget total de 34 millions, seraient requis pour l'exercice 1997-1998 et au-delà, afin que l'ARLA puisse mener à bien les grandes activités qui relèvent de son mandat. L'Agence a informé le Comité qu'en préparation pour le recouvrement de coûts en 1997, elle projetait des coûts annuels permanents de 28,2 millions de dollars pour réaliser le programme présenté dans le Livre mauve du gouvernement. Cependant, cette somme a été réduite à 27 millions à la suite d'une discussion avec les intervenants. Le dernier budget de l'ARLA prévoit 28,3 millions pour l'exercice 1999-2000304. Cette somme, faut-il le souligner, est inférieure de près de 6 millions à ce que le gouvernement considérait comme nécessaire à l'ARLA il y a cinq ans.

17.21    Comme l'a signalé le Fonds mondial pour la nature, l'ARLA est à court de fonds et a dû mettre en veilleuse de nombreux programmes importants. Le commissaire à l'environnement et au développement durable a exprimé la même doléance dans son Rapport de 1999. Il y a fait remarquer qu'à partir des budgets actuels, les ministères ont peine à remplir leurs responsabilités législatives, leurs engagements d'orientation et les obligations en vertu de traités internationaux et que, dans bien des cas, ils n'y arrivent pas. Le commissaire a noté le retard dans le nombre de pesticides existants qui nécessitent une réévaluation. Il a noté également que le nombre de substances potentiellement dangereuses continue de croître, les modulateurs endocriniens et l'effet cumulatif de l'exposition à des mélanges de substances toxiques, qui peuvent appeler de nouvelles recherches et réclamer à terme que certaines substances soient réévaluées. Devant tout ce travail qui s'accumule, le commissaire s'est demandé qui comblera les lacunes. Il a souligné que le gouvernement avait réduit le financement du Réseau canadien des centres de toxicologie, créé pour effectuer des recherches pour le compte des ministères fédéraux, ce qui en a compromis la masse critique et la capacité d'attirer des fonds nouveaux. Il a aussi signalé que les réductions budgétaires avaient entraîné le besoin d'un partenariat de recherche avec le secteur privé et d'autres sources de l'extérieur. Par conséquent, les projets ministériels se sont davantage alignés sur les priorités des bailleurs de fonds, priorités qui peuvent différer de celles des ministères, soulevant de l'inquiétude au sujet de la capacité des ministères à entreprendre des recherches pour le bien public. Il conclut :

Nous sommes alarmés par la grande inquiétude des scientifiques principaux de tous les ministères et des organismes scientifiques associés, face à la capacité décroissante du gouvernement de répondre aux nouvelles demandes et aux questions qui prennent de l'importance305.

17.22    Le Comité partage l'inquiétude du commissaire et joint sa voix aux nombreux témoins qui ont affirmé que la situation actuelle était inacceptable. Mme Barbara McElgunn, de l'Association canadienne des troubles d'apprentissage et du Conseil consultatif sur la gestion des pesticides, estime que l'ARLA devrait recevoir le budget majoré de 34 millions de dollars que le gouvernement s'était engagé à lui fournir dans le Livre mauve de 1994306. De l'avis du Comité, un budget global de 34 millions de dollars serait certainement un pas dans la bonne direction. Cependant, nous ne sommes pas convaincus que cette somme suffirait au travail. Dans le présent rapport, le Comité formule un grand nombre de recommandations qui vont au-delà du mandat envisagé pour l'ARLA dans le Livre mauve. Nous avons insisté sur le besoin d'accroître la recherche dans plusieurs domaines clés. Nous avons réclamé la création de diverses bases de données. Nous avons souligné la nécessité de rechercher des solutions de remplacement aux pesticides. Nous avons également réclamé la création d'un programme complet pour sensibiliser et éduquer le public sur les risques des pesticides. Toutes ces recommandations réclameront des ressources supplémentaires.

17.23    Le Comité est conscient que les demandes de nouveaux fonds restent souvent lettre morte. Nous tenons à souligner cependant que le prix de réduire les risques inhérents à l'utilisation des pesticides afin de protéger la santé humaine et l'environnement ne représente qu'un côté du livre des comptes. De l'autre côté, il y a le coût, souvent caché et difficile à saisir, de l'inaction, de l'action insuffisante ou de l'action tardive : le coût des soins de santé pour les Canadiens souffrant de maladies aiguës ou chroniques liées aux pesticides ou d'incapacités liées aux pesticides; le fardeau pour les municipalités de se débarrasser des pesticides qui contaminent l'eau potable; et le coût des revenus de pêche perdus à cause des mortalités massives de poissons contaminés par des pesticides. La liste est encore très longue.

17.24    De l'avis du Comité, il est imprudent et mal venu de centrer l'attention uniquement sur le coût économique immédiat des mesures de réduction ou d'élimination de la contamination par les pesticides. Il faut accorder un poids et une considération égale au coût à moyen et à long termes de l'inaction face aux précautions à prendre. Si, comme l'annonçait le discours du Trône, le gouvernement veut sérieusement protéger la santé des Canadiens en renforçant son programme de salubrité des aliments, en prenant des mesures additionnelles pour régler les problèmes de santé liés à l'environnement, y compris les risques sanitaires éventuels que présentent les pesticides, et en modernisant la protection de la santé en général dans un monde en évolution307, il doit accorder à l'ARLA les fonds dont elle a besoin pour fournir un travail de qualité.

Le Comité recommande que le gouvernement fournisse à l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire les ressources financières additionnelles nécessaires pour mener à bien l'ensemble de son programme.

289 Information supplémentaire fournie par écrit au Comité par l'ARLA, le 14 février 2000.

290 Le régime des frais de recouvrement des coûts actuels de l'ARLA a été établi en avril 1997 aux termes du Règlement fixant les prix à payer pour la prestation du service d'évaluation des demandes relatives aux produits antiparasitaires par Sa Majesté du chef du Canada ou en son nom, pour le droit ou l'avantage de fabriquer ou de vendre un produit antiparasitaire au Canada et pour la fixation des limites maximales de résidus à l'égard d'un produit antiparasitaire.

291 L'information sur les droits de recouvrements des coûts est principalement tirée de : Agence de réglementation des produits antiparasitaires, Guide des frais à payer dans le cadre du recouvrement des coûts du programme de réglementation de la lutte antiparasitaire, le 16 avril 1997.

292 Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire, lettre de suivi au Comité, le 24 janvier 2000.

293 Témoignages, réunion no 129, le 10 juin 1999.

294 Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire, lettre de suivi au Comité, le 14 février 2000.

295 Témoignages, réunion no 9, le 25 novembre 1999.

296 Nephin Consulting Partners, Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire, Étude comparative, Rapport final, le 15 juillet 1998, p. 7.8.

297 Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire, Guide des frais à payer dans le cadre du recouvrement des coûts du programme de réglementation de la lutte antiparasitaire, avril 1997.

298 Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire, Directive d'homologation, Programme d'homologation des usages limités à la demande des utilisateurs, DIR99-05, le 28 avril 1999.

299 Résumé de l'étude d'impact de la réglementation, Gazette du Canada, partie II, le 8 avril 1997 (DORS/97-173).

300 Nephin Consulting Partners, op. cit., p. 6.5.

301 Nephin Consulting Partners, op. cit., p. 6.13.

302 Gouvernement du Canada, Proposition du gouvernement concernant le système de réglementation de la lutte antiparasitaire, octobre 1994, p. 12.

303 Secrétariat du Conseil du Trésor, Politique sur le recouvrement des coûts et la tarification, avril 1997.

304 Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire, lettre de suivi au Comité, le 14 février 2000.

305 Rapport de 1999 du commissaire à l'environnement et au développement durable, chap. 3.

306 Témoignages, réunion no 4, le 16 novembre 1999.

307 Débats de la Chambre des communes, Hansard, no 1, le 12 octobre 1999 (36e législature, 2e session).