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NDVA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON NATIONAL DEFENCE AND VETERANS AFFAIRS

COMITÉ PERMANENT DE LA DÉFENSE NATIONALE ET DES ANCIENS COMBATTANTS

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 30 octobre 1997

• 1530

[Français]

Le président (M. Robert Bertrand (Pontiac—Gatineau—Labelle, Lib.)): J'aimerais vous souhaiter la bienvenue à notre comité. Avant que nous ne débutions, j'aimerais vous demander quelques minutes pour nous permettre de passer une ou deux motions.

[Traduction]

Monsieur Hanger, pourriez-vous proposer la motion dont le comité directeur a discuté ce matin?

M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est, Réf.): Je propose d'abord l'abrogation de la motion portant sur l'interrogatoire des témoins qui a été adoptée le 9 octobre 1997.

(La motion est adoptée)

Le président: Et la deuxième motion?

M. Art Hanger: Je propose que le comité adopte la formule proposée en ce qui touche l'ordre des intervenants pendant la période des questions.

(La motion est adoptée)

M. Dick Proctor (Palliser, NPD): Je croyais, monsieur le président, que ce dont nous avions convenu ce matin, c'est qu'il y aura un deuxième tour de cinq minutes après que chacun des cinq partis aura pris la parole, c'est-à-dire après les 10 minutes réservées aux conservateurs. Ai-je raison?

Le président: Oui.

M. Dick Proctor: Je voulais simplement avoir une précision. Je vous remercie.

Le président: Et la troisième motion.

M. Art Hanger: Lorsqu'il est impossible de consacrer toute la période des questions à un témoin, je propose que le président répartisse le temps de façon proportionnelle entre tous les partis.

(La motion est adoptée)

Le président: Nous avons maintenant réglé toutes les questions administratives. Général, vous avez maintenant la parole.

[Français]

Général J.M.G. Baril (chef d'état-major de la Défense, ministère de la Défense nationale et des anciens combattants): Merci, monsieur le président. Ces choses-là arrivent dans notre organisation également.

[Traduction]

Avant que je ne débute, monsieur le président, j'aimerais vous présenter M. Parent, adjudant-chef des Forces armées canadiennes. Il est mon conseiller personnel sur toutes les questions qui touchent les sous-officiers des Forces canadiennes, qu'ils appartiennent aux forces régulières ou à la réserve.

Au nom de tous les membres des Forces canadiennes, je souhaite, monsieur le président, remercier personnellement le comité d'avoir entrepris la tâche très importante d'étudier les conditions socio-économiques actuelles des militaires ou, si je peux m'exprimer ainsi, les besoins en ressources des forces armées.

Comme le comité le sait, la mission des Forces canadiennes est de défendre le Canada et les intérêts canadiens tout en favorisant la paix et la sécurité internationales. Notre objectif est toujours de constituer une équipe de défense hautement compétente, pleinement en mesure d'exécuter notre mission en faisant honneur aux Canadiens. Pour les hommes et les femmes qui appartiennent aux Forces canadiennes, il ne s'agit pas d'un emploi comme un autre. Ces hommes et ces femmes de talent se dévouent pour leur pays et le font dans le respect des plus hautes normes de professionnalisme militaire. Il s'agit d'hommes et de femmes qui sont prêts à sacrifier leur vie pour le pays et auxquels on peut faire appel 24 heures par jour et sept jours par semaine. Tous nos membres témoignent quotidiennement de leur engagement envers le Canada et les valeurs canadiennes tant au pays qu'à l'étranger. Ils constituent une famille animée du même objectif.

[Français]

Les Canadiens et la communauté internationale savent qu'ils peuvent compter sur les Forces canadiennes pour mener, à très brève échéance, des opérations souvent dangereuses dans des conflits et des circonstances difficiles.

C'est pourquoi nous devons nous assurer que nos forces disposent des outils voulus pour effectuer leur travail efficacement et avec le maximum de sécurité. Nous avons donc amélioré notre capacité de mettre sur pied et de soutenir des forces opérationnelles ainsi que la façon dont les forces sont préparées en vue des missions, et nous nous sommes penchés sur les besoins en matière d'équipement clé.

• 1535

L'un des outils dont nos militaires ont besoin est la tranquillité d'esprit. Ils doivent savoir que tout va bien à la maison, surtout lorsqu'ils sont déployés loin de chez eux. Parce que nous savons que le moral influe grandement sur l'efficacité opérationnelle, nous devons par tous les moyens possibles renforcer le soutien que nous offrons aux hommes et aux femmes des forces ainsi qu'à leurs familles.

[Traduction]

Nous avons beaucoup accompli dans le domaine. Avec votre aide, je crois cependant que nous devons trouver d'autres moyens d'améliorer nos programmes de soutien pour qu'ils répondent véritablement aux besoins et aux souhaits des membres des Forces canadiennes.

Le comité s'est vu confier la tâche d'entreprendre un examen exhaustif des conditions socio-économiques des militaires et de recommander des mesures de soutien et d'indemnisation susceptibles de répondre aux besoins des militaires et de leurs familles. Nous espérons que ces recommandations nous aideront à trouver des solutions aux problèmes qui ne sont pas du seul ressort du ministère de la Défense nationale.

Voici comment se présentent les choses. Les membres des Forces canadiennes font preuve d'un dévouement total envers le Canada et doivent savoir ce que le Canada est prêt à faire pour eux en retour. Lorsque j'ai accepté le poste de chef d'état-major, j'ai dit que j'allais accorder la priorité au soutien et à l'appui des membres des Forces canadiennes. À mon sens, il faut que les militaires sachent qu'on les traitera de façon juste et équitable, c'est-à-dire d'une façon qui reflète les attentes raisonnables des Canadiens et qui tienne compte aussi de l'apport bien spécial des militaires à la société canadienne.

Nous devons collaborer. Les recommandations du comité aideront les Forces canadiennes à continuer d'attirer et de retenir les jeunes gens les plus talentueux du pays. C'est tout à fait essentiel pour que les Forces canadiennes puissent remplir la mission que leur confient les Canadiens.

Avant que je ne vous entretienne de questions bien précises qui font partie du mandat du comité, permettez-moi de souligner le fait que les Forces canadiennes constituent une institution sans pareil au Canada. Les membres des Forces canadiennes doivent être prêts, dans le cadre de leurs fonctions, à s'exposer à des blessures graves ou à la mort. Ils doivent aussi être prêts à participer au pied levé à des opérations militaires qui sont menées dans des régions du monde dont la culture est parfois très éloignée de la nôtre et dans des régions parfois très dangereuses.

Les membres des Forces canadiennes doivent aussi accepter pour eux-mêmes et leurs familles les perturbations qui découlent inévitablement de déménagements fréquents au Canada et à l'étranger. Ils doivent aussi accepter d'être parfois séparés pendant de longues périodes de leurs familles, que leur vie familiale soit perturbée, et que le revenu familial soit beaucoup moins élevé qu'il ne pourrait l'être et que leur liberté personnelle soit réduite. Y a-t-il d'autres professions aussi exigeantes?

[Français]

Voilà le genre de vie auquel s'engagent nos militaires lorsqu'ils s'enrôlent dans les Forces canadiennes. Tel est le marché qu'ils ont conclu et je crois qu'ils ont plus que respecté leur obligation. Cependant, les militaires et leurs familles espèrent aussi recevoir une reconnaissance et une compensation à la hauteur de leurs services. Selon moi, ils le méritent.

C'est cet aspect du marché qu'il nous faut éclaircir. Autrement dit, il s'agit d'une déclaration d'engagement sous forme de contrat social conclu entre le Canada et les Forces canadiennes. La société canadienne a subi des changements profonds depuis notre dernier examen complet des conditions de service. La plupart des militaires célibataires vivaient alors à bord d'un navire, dans les bases ou dans un appartement à proximité de celles-ci.

De nombreux militaires mariés vivaient dans des logements familiaux et ne disposaient généralement que d'un seul revenu. Chaque base avait sa propre infrastructure sociale avec gymnase, cinéma, église et magasins pour répondre aux besoins des militaires et de leurs familles.

[Traduction]

Les forces armées reflètent aujourd'hui les changements survenus dans la société canadienne. Nous comptons maintenant plus de femmes, beaucoup plus de familles à deux revenus dont les enfants sont confiés à des services de garde et plus de familles monoparentales. Un plus grand nombre de membres des Forces canadiennes demeurent maintenant dans des localités situées près de leurs bases et soit sont propriétaires de leurs maisons, soit les louent. Ils se comparent à bien des égards au reste des Canadiens, mais ils s'en distinguent aussi de nombreuses façons. Les Forces canadiennes sont unifiées, mais comme vous le dira chaque chef d'état-major, l'armée, la marine et l'aviation ont un rôle, une culture et une tradition distinctes.

• 1540

Même si les conditions socio-économiques des membres de chacune des composantes des forces armées sont semblables, il peut être nécessaire de recourir à différentes solutions pour régler les problèmes qui risquent de se poser. Ainsi, une famille militaire composée de quatre personnes et n'ayant qu'un seul revenu en poste à Edmonton n'a pas les mêmes besoins ni les mêmes préoccupations que la même famille en poste à Esquimalt.

Nos politiques devraient le refléter. Nous devrions nous assurer qu'il n'y a pas de désavantage à appartenir ou à avoir appartenu aux Forces canadiennes, tant pour les membres eux-mêmes que pour leurs familles. Puisque nos forces se composent de membres réguliers et de réservistes, nos politiques doivent, le cas échéant, s'appliquer de façon uniforme.

Les conditions de service propres aux forces armées, les changements sociaux et la diversité des forces sont des facteurs qui nous amènent à nous poser la question fondamentale suivante: comment s'assurer que les membres des Forces canadiennes sont adéquatement indemnisés pour le dévouement très spécial dont ils font preuve?

[Français]

Nous espérons que votre étude nous soumettra des idées novatrices qui nous aideront à régler ces questions externes dont la solution ne dépend pas des Forces canadiennes.

Je suis certain que votre étude nous permettra aussi de prouver à tous les militaires actuels et aux anciens militaires que les Canadiens sont prêts non seulement à reconnaître le caractère unique de leurs conditions de service, mais aussi à prendre des mesures pour appuyer les Forces canadiennes et leurs familles.

Permettez-moi de mettre la situation en contexte en décrivant certaines des pressions et des réalités auxquelles sont confrontés les effectifs considérablement réduits des Forces canadiennes dans les années 1990.

[Traduction]

Nous respectons les engagements pris dans le Livre blanc sur la défense paru en 1994, mais comme nos déploiements à l'étranger ont augmenté, nos membres sont mis lourdement à contribution. Qu'il me suffise de mentionner notre participation l'an dernier aux missions en Bosnie et à Haïti, les efforts spectaculaires déployés par nos membres dans la région du Saguenay ou lors de l'inondation au Manitoba ainsi que notre apport aux opérations militaires dans la région des Grands Lacs, en Afrique.

Nous menons ces activités tout en respectant le budget qui nous a été alloué. En 1999 le budget du ministère aura été réduit de 23 p. 100, ce qui représente une réduction de 30 p. 100 de notre pouvoir d'achat. Compte tenu de ce budget, il nous faudra en 1999 réduire à 60 000 le nombre des militaires, soit une réduction générale de 32 p. 100 de nos effectifs depuis 1989.

Nous mettons aussi en oeuvre un plan ambitieux afin d'améliorer l'efficacité de nos opérations. Nous entamons la quatrième année de la mise en oeuvre d'un programme visant sur une période de cinq ans à réduire le nombre de quartiers généraux, à rationaliser l'infrastructure et à améliorer les pratiques et les techniques de gestion. L'objectif primordial du programme de renouvellement est de maintenir la capacité opérationnelle des forces afin que nous puissions mener à bien la vaste gamme de tâches exigeantes qui nous ont été confiées en 1994.

Nous améliorons ce que nous appelons chez les militaires notre ratio «dents-queue». Cela veut dire que nous réduisons les ressources consacrées au soutien logistique et que nous les affectons plutôt aux opérations, c'est-à-dire aux dents.

Nous faisons vraiment face à des pressions budgétaires. Nous devons maintenir un équilibre précaire entre le financement des programmes de soutien nécessaires à nos militaires et à leurs familles et un financement suffisant pour fournir du matériel moderne et la formation dont nos soldats ont besoin. Vu que nous affectons déjà près de 52 p. 100 de notre budget à notre personnel et aux programmes reliés au personnel, nous aurons besoin de votre aide pour trouver des solutions nouvelles, novatrices et abordables si vous décidez de recommander de nouveaux programmes de soutien.

On ne peut pas fermer les yeux sur les conséquences pour les membres des forces armées d'une réduction aussi importante du nombre de soldats, de marins et d'aviateurs et d'aviatrices, compte tenu du rythme intensif de nos opérations et de notre effort massif de réoutillage et de restructuration, sans oublier le blocage des salaires pour cinq ans et l'examen intensif des forces armées par les médias et le public. Nous savons que ces facteurs ont eu de lourdes conséquences que nous ne pouvons pas prendre à la légère. Il y a indubitablement un lien certain entre le bien-être socio-économique, un bon moral et l'efficacité opérationnelle des forces armées, sans parler de la santé et de l'avenir de l'organisation.

• 1545

Comme le disait le maréchal vicomte Montgomery of El Alamein, si vous gagnez la confiance de vos gens et s'ils pensent que vous pourrez bien protéger leurs intérêts, vous avez en main un précieux atout, et les plus grandes réalisations deviennent possibles.

[Français]

En examinant les conditions sociales et économiques des membres des Forces canadiennes, nous ne voulons pas seulement améliorer leur sort à court terme. Nous devons être aussi en mesure de perpétuer la tradition dont nous sommes fiers en attirant et en retenant à l'avenir des personnes de grande qualité.

Permettez-moi de signaler quelques-unes des mesures que nous avons entreprises et certains des domaines où, selon moi, les délibérations et les recommandations innovatrices du Comité permanent pourraient nous être particulièrement utiles.

[Traduction]

En avril, nous avons annoncé la première partie d'un programme de comparabilité de la rémunération pour les membres des Forces canadiennes. Ce programme fera plus tard disparaître l'écart entre la rémunération des membres des Forces canadiennes et celle des fonctionnaires. En même temps, nous savons que nos efforts dans ce domaine seront touchés par le résultat des négociations en cours entre la fonction publique et le Conseil du Trésor. Nous espérons que vous pourrez recommander des façons d'éliminer cet écart important et de garantir qu'il ne se reproduira plus jamais. Je voudrais aussi que vous nous proposiez de nouvelles façons de calculer la rémunération et les avantages sociaux pour refléter de façon uniforme et exacte le service particulier que fournissent les forces armées.

Nous avons déjà amélioré la rémunération et les avantages sociaux des membres de la réserve et nous continuerons de le faire. Je crois cependant que nous pouvons faire mieux.

Nous participons maintenant au projet de plan garanti de vente d'habitations du gouvernement fédéral. Ce plan élimine bon nombre des problèmes reliés à la propriété résidentielle, mais il impose malgré tout des pénalités financières à certains membres des Forces canadiennes. Je voudrais bien que vous nous recommandiez quelque chose à ce sujet aussi.

Les familles où les deux conjoints ont un revenu sont de plus en plus la norme au Canada, mais vu que les membres des forces armées doivent déménager souvent, une telle chose peut être presque impossible pour les familles militaires. Offrons-nous à nos membres une indemnisation suffisante pour compenser les bouleversements sociaux et financiers qu'entraînent les déménagements? L'indemnisation est-elle suffisante lorsqu'un militaire est posté dans une région où le coût de la vie est plus élevé ou dans un endroit isolé? Que pourriez-vous recommander pour minimiser ou éliminer les difficultés financières causées par les déménagements constants un peu partout dans le pays et autour du monde?

Nous avons créé un service consultatif d'information sur les allocations d'invalidité pour aider les membres des forces armées qui ont quitté ou qui sont sur le point de quitter les forces armées pour incapacité. Nous avons commencé à collaborer de beaucoup plus près avec Anciens combattants Canada et la Légion royale canadienne pour garantir la permanence des soins de nos membres à la retraite, de nos anciens combattants et de leurs familles. Néanmoins, certaines lacunes pourraient exister dans les services. Je vous saurais gré de nous faire part de vos opinions et de vos recommandations pour mettre au point un système réfléchi et uniforme qui nous permette de nous occuper de nos militaires pendant leur service et par la suite.

[Français]

Malgré les mesures que nous avons prises, je ne suis personnellement pas convaincu que nous en faisons assez pour nous occuper de nos familles et de nos militaires, particulièrement pendant et après les déploiements opérationnels. La question qui se pose alors est la suivante: quelle autre mesure pourrions-nous prendre pour satisfaire les besoins des militaires et de leurs familles durant cette période critique?

Nous avons pris des mesures pour améliorer la qualité de vie de tous les membres des forces, mais en avons-nous fait assez? Nos programmes et nos installations en termes de soutien aux familles, d'aide à l'éducation, de loisirs et de services communautaires répondent-ils aux besoins des familles militaires? Les soins médicaux et dentaires offerts aux personnes à charge doivent-ils être ajustés? Offrons-nous la bonne combinaison de programmes et d'installations?

[Traduction]

Le logement est une autre question importante. Dans quelle mesure le gouvernement a-t-il l'obligation d'offrir des logements abordables aux membres des Forces canadiennes et à leurs familles? Quels doivent être le rôle et le mandat du Bureau du logement des Forces canadiennes et d'autres organismes pour nous permettre de nous acquitter de nos obligations à cet égard?

Et pour finir, les forces de réserve. Leur rapport est important au niveau du total de nos effectifs, mais satisfaisons-nous nos besoins? J'espère que votre comité se penchera sur les questions comme la sécurité d'emploi, les risques de perte d'ancienneté dans leurs occupations civiles ou les pertes d'emplois dues à des blessures pendant les périodes d'incorporation dans la réserve. En se penchant sur ces questions, votre comité nous aidera à prendre les mesures nécessaires pour que les Forces armées canadiennes bénéficient de toute la logistique nécessaire et soient compensées proportionnellement pour les services qu'elles rendent, et elles ne méritent pas moins.

• 1550

Vous aurez aussi, aspect des plus importants de votre étude, à déterminer si les conditions du contrat social sont suffisantes pour préserver notre réputation de métier de choix pour les Canadiens. Quelle devrait être la nature du contrat social entre le gouvernement du Canada et les Forces armées canadiennes? Dans ce contexte, nous avons demandé à plusieurs universitaires renommés de nous donner leur point de vue sur cette question. Mais étant donné la nature unique de la profession militaire et des circonstances exigeantes dans lesquelles les forces armées travaillent, nous examinerons avec intérêt votre définition des responsabilités du gouvernement envers les Forces armées canadiennes.

Ce n'est qu'un bref résumé des nombreuses questions qui vous deviendront plus familières au cours des prochains mois. Les régler est essentiel pour aider les forces armées à entamer correctement le prochain siècle.

Les Forces armées canadiennes ont une fière tradition d'excellence et de dévouement. Il faut nous assurer qu'elles sont correctement compensées et récompensées pour la fonction unique et redoutable qu'elles remplissent.

Vous avez mon soutien personnel pour l'importante étude que vous allez faire. Je crois à la nécessité de bonnes politiques pour toutes les catégories de personnel des Forces armées canadiennes.

Votre désir de vous rendre dans diverses bases des Forces armées canadiennes est le bienvenu, et je suis certain que vos entrevues vous donneront une idée d'ensemble du sentiment des membres des Forces armées canadiennes et de leurs familles. C'est avec plaisir que je reviendrai vous voir pour entendre vos conclusions à la fin de votre étude, et, bien entendu, monsieur le président, je me tiendrai à votre disposition chaque fois que vous aurez besoin de moi, ainsi que mes collaborateurs. Je vous remercie infiniment.

Monsieur le président, quelqu'un a demandé hier au ministre quand j'avais l'intention de déposer mon rapport. Si vous me le permettez, j'aimerais répondre à cette question.

Le ministre de la Défense nationale a dit au premier ministre que le rapport serait terminé et serait communiqué au ministre de la Défense nationale d'ici le 15 mai 1998. Ce rapport devrait contenir des renseignements sur l'état actuel et les réalisations des forces armées; un résumé des opérations de cette année; les leçons apprises; l'état de préparation des Forces armées canadiennes et de toutes leurs unités et les mesures prises pour évaluer cet état de préparation; un rapport d'étape sur l'évolution des plans militaires; un rapport sur l'équipement; un rapport sur l'application des recommandations contenues dans le rapport du ministre au premier ministre concernant certains points problématiques, et bien entendu un sommaire.

Merci beaucoup.

[Français]

Maintenant, je suis prêt à répondre à vos questions.

[Traduction]

Le président: Merci beaucoup, général. Nous passons immédiatement aux questions.

Je signale aux députés qui ne sont pas membres du comité directeur que nous avons modifié la procédure. Désormais chaque parti aura dix minutes, que vous les donniez à une seule personne ou que vous les répartissiez entre plusieurs; c'est à vous de choisir.

Monsieur Hanger.

M. Art Hanger: Merci, monsieur le président, et merci, mon général, d'être venu comparaître devant notre comité.

J'ai remarqué que vous avez consacré un temps assez considérable au bien-être social de notre personnel militaire, et je suis d'avis que c'est un point fort essentiel. J'ai l'intention de vous poser quelques questions pratiques à ce sujet—le bien-être, le moral, etc. C'est un sujet qui a été abordé hier à la Chambre avec le ministre de la Défense à propos d'un missile en folie du NCSM Huron. Il est certain que d'après les dernières images vidéo que j'ai pu voir il semblait piquer directement sur le NCSM Vancouver—je dirais dangereusement, étant donné que ces engins se déplacent à une telle allure et qu'ils ne sont pas contrôlables—touchant l'eau juste devant le NCSM Vancouver.

• 1555

Le ministre a répondu que personne n'avait été informé, car il n'y avait eu ni perte de vie ni dégât matériel. J'aimerais savoir ce que vous pensez de cette réponse du ministre. Qu'il y ait ou non perte de vie, doit-on considérer un tel incident comme dangereux ou grave? N'aurait-il pas dû faire l'objet d'un rapport, et, dans l'affirmative, la pratique générale ne veut-elle pas que le ministre et le chef d'état-major soient informés et qu'une déclaration soit faite à la presse et aux médias? Ne pensez-vous pas que les familles de vos hommes ont le droit d'être informées quand quelque chose de ce genre arrive?

Corollairement, accompagnant les renseignements de lancement de missiles à partir d'un bateau, n'y a-t-il pas automatiquement constitution d'un dossier de tir, informatisé ou autre, quand de tels engins sont utilisés? Et n'y a-t-il pas eu enquête pour déterminer la raison pour laquelle le rapport sur cet incident a été effacé de la mémoire de l'ordinateur? En d'autres termes, a-t-on joué, si vous voulez, avec la boîte noire? Je crois savoir que c'est ce qui est arrivé.

Gén J.M.G. Baril: Merci beaucoup, monsieur le président. Je sais maintenant que j'aurais dû venir avec mon astrophysicien de service plutôt qu'avec mon adjudant-chef.

À propos de ce missile, permettez-moi de vous rappeler qu'il a été lancé pendant des manoeuvres de printemps assez importantes. Il s'agissait d'analyser la capacité opérationnelle de nos missiles embarqués sur nos navires classiques et sur nos nouveaux escorteurs rapides. Comme vous le savez probablement, ils ont des systèmes de défense différents parce que leurs missions sont quelque peu différentes. Il y avait 19 cibles, et elles ont fait l'objet de 13 tirs de missile. Vous faites allusion à un incident très précis.

Cette même journée, et je ne sais si vous en avez déjà parlé, un autre missile a été lancé à partir de l'escorteur Vancouver. Un seul missile devait viser cette cible, et deux missiles ont été lancés en même temps. L'enquête technique a immédiatement révélé que c'était une erreur humaine. Je suppose que celui qui a appuyé sur le bouton ne savait pas que c'était un engin à guidage semi-automatique. Si on appuie deux fois sur le bouton, il y en a deux qui partent. Lors de manoeuvres avec tirs de ce genre la tension est presque aussi élevée que sur le champ de bataille, et il peut y avoir des erreurs de ce genre.

Quant au deuxième, certains membres de l'équipage estiment que ce missile est tombé très près. Nous utilisons un système de tir très sophistiqué au large d'Hawaï, avec tous les moyens électroniques qui montrent en trois dimensions tout ce qui se passe dans toute la zone de tir. La position des bateaux est également indiquée, et les agents de sécurité maîtrisent entièrement toutes les mesures de sécurité.

Si je peux me permettre, s'il n'y a pas eu de blessés, c'est parce que les mesures de sécurité que nous avions mises en place ont fonctionné. Les exercices ont donné les résultats escomptés. Des erreurs humaines ont été faites, mais elles ont été compensées, et tout a bien marché.

Quant à savoir si ce missile a touché l'eau à 1 000 ou 1 250 mètres du bateau—et nous avions des images vidéo pour le prouver—il faudrait confier le travail à un scientifique pour qu'il puisse mesurer exactement s'il a touché l'eau à 1 000 mètres. J'ai vu certaines de ces images, les mêmes qu'à la télévision, et c'est très joli. Mais, sauf erreur, la partie arrière du pont du Vancouver est ouverte à l'équipage, et ils ne se sont pas du tout sentis en danger. Je crois qu'il y avait pas mal de caméras vidéo sur le pont arrière du Vancouver pendant le vol du missile du Huron, qui a été suivi par pas mal de gens. Il y a eu beaucoup de vidéos de faites; vous pouvez donc mettre la main sur pas mal d'autres, mais elles ne feront que confirmer, d'après mon astrophysicien, celle que nous avons vue hier à la télévision.

• 1600

On estime que l'équipage du Vancouver n'a pas été mis en danger. Toutefois, je vous rappelle que notre métier peut parfois être très dangereux. Sinon, n'importe qui pourrait l'exercer. Lorsque nous faisons des exercices de tir, nous essayons de simuler le plus possible les conditions d'un combat. J'avoue qu'il y a parfois des blessés, parce que quelqu'un commet une erreur ou ne respecte pas les règles. Il y a parfois des décès, comme cela a été le cas à Suffield il y a deux ans environ. Les commandants, s'ils sont responsables de ces incidents, sont très sévèrement punis. Nous sommes tous humains, et il arrive parfois que nos gens se fassent tuer en raison d'un concours de circonstances. C'est inacceptable, mais malheureusement ce sont des choses qui arrivent.

Pour ce qui est de la boîte noire, les exercices de tir sont effectués dans un champ de tir très perfectionné. Ces champs sont dotés partout de radars, afin de suivre le missile tout au long de sa trajectoire. Le navire lui-même est équipé d'un appareil d'enregistrement et d'ordinateurs. Je n'en sais hélas pas suffisamment pour vous fournir une multitude de détails, mais tout est enregistré.

Chaque tir fait l'objet d'un rapport, et tous ces rapports sont compilés ensemble. Dans un vaste exercice comme celui dont nous parlons, l'analyse de la capacité opérationnelle, le rapport est généralement mis à notre disposition, et nous pouvons le consulter, sauf bien sûr pour ce qui est des données classifiées. Ces rapports ne peuvent être publiés en raison des contrats que nous avons signés avec le fournisseur et certains de nos alliés. Toutefois, nous communiquons toutes les données du rapport à ceux de nos alliés qui ont les mêmes systèmes d'armement que nous.

Aurions-nous dû faire rapport de cet incident? Lorsque nous effectuons un exercice et que tout se passe selon la procédure normale, selon les limites de sécurité, et qu'on estime que les dangers n'ont pas été supérieurs à la normale—et nous vivons toujours assez dangereusement... les tirs de missile font toujours l'objet de rapports. Ces rapports ne nous sont pas seulement communiqués à nous, ils le sont aussi au NORAD et à d'autres organismes de ce genre. Chaque tir de missile fait l'objet d'un rapport dans lequel est indiqué si la cible a été atteinte ou non, si le tir a été raté, ainsi que tout autre renseignement que nous pouvons transmettre et ajouter à la base de données de notre navire de guerre pour la corriger.

Le tir dont vous parlez a fait l'objet d'un rapport d'ordre technique. Pour ce qui est de savoir si nous aurions dû le rendre public...

Une voix: Pourquoi ne pas le rendre public?

Gén J.M.G. Baril: Ce n'est pas moi qui commandais cet exercice. À cette époque, j'étais commandant de l'armée. Je ne sais pas si mon prédécesseur a lu ou non le rapport. Le ministre était également différent à cette époque, et j'ignore s'il a été informé de cet incident. On a décidé de traiter l'affaire selon la procédure habituelle. Pour vous, le tir de 300 000 ou 600 000 missiles, ce n'est peut-être pas la routine. Mais le tir de chacun de ces missiles est pour nous une affaire de routine.

M. Art Hanger: Nous savons tous que les accidents sont inévitables, mais les médias ont été informés d'un incident dans lequel un membre d'équipage trop nerveux avait mis à feu deux missiles en appuyant deux fois sur le bouton. Par contre, les médias n'ont pas été informés de ce que l'on avait perdu le contrôle d'un missile.

Je m'étonne. N'est-il pas normal que l'équipage, le capitaine ou le commandant envoie un message directement au quartier général de la défense pour attendre des instructions? De quoi faites-vous rapport exactement? Ne faites-vous de rapport que lorsqu'un missile est mis à feu d'un navire à quai et fait exploser un garage, endommageant ainsi la propriété d'autrui? Il me semble très étonnant que cet incident n'ait pas été signalé.

Gén J.M.G. Baril: Je comprends, mais vous devez comprendre pour votre part que les journalistes qui ont signalé la double mise à feu étaient sur place. Ils ont vu l'incident se produire et ont constaté qu'il n'y avait pas eu de danger. C'était une question de procédure habituelle; autrement ils l'auraient signalé.

M. Art Hanger: L'équipage, lui, était inquiet. Si vous regardez ce vidéo, vous constaterez que l'équipage était très conscient du danger.

Gén J.M.G. Baril: Non, j'ai...

Une voix: En quoi est-ce pertinent?

M. Art Hanger: C'est tout à fait pertinent.

Le président: Merci beaucoup.

Laissons maintenant la parole à Mme Venne.

[Français]

Mme Pierrette Venne (Saint-Bruno—Saint-Hubert, BQ): Général, bonjour.

Comme vous le savez, on demande à notre comité de se pencher sur les questions de rémunération et d'avantages sociaux des militaires.

• 1605

Nous savons que le 1er avril 1996, tout le personnel non officier a bénéficié d'une augmentation de 2.2 p. 100 de sa solde. Également, le 1er avril, ce personnel recevait un rajustement de 1.5 p. 100, tandis que ce rajustement a été de 2.4 p. 100 pour les officiers du service général. De plus, le ministre nous apprenait l'autre jour qu'une autre augmentation de salaire était prévue avant les Fêtes.

Ma question est la suivante. Puisque le ministre accorde actuellement ces augmentations sans demander l'avis du Comité de la défense nationale, est-ce que notre rôle va se résumer à examiner les dépenses de logement, de loisirs et de services de garde?

On dit que le salaire des fonctionnaires est devenu pratiquement l'étalon des forces armées quant aux salaires; c'est-à-dire que nous prenons modèle sur le salaire des fonctionnaires pour décider du salaire que l'on veut attribuer aux militaires. J'aimerais savoir si c'est la façon dont on procède aussi dans d'autres pays. Si oui, lesquels?

Gén J.M.G. Baril: Merci pour la première partie de votre question. Les augmentations dont vous avez parlé font partie du plan de rattrapage de la différence des salaires entre nos militaires et la Fonction publique du Canada.

Nous avons commencé le 1er avril 1996, comme vous l'avez dit, et cela devrait se prolonger—si on part du 1er novembre—pendant deux ans pour les sous-officiers et pendant trois ans pour les officiers, afin de combler l'écart, qui était de 14 p. 100 pour les officiers et de 6 p. 100 pour les sous-officiers. Cela devrait donc être réglé, mais ce n'est pas une augmentation de salaire. C'est un rattrapage. Pour celui qui le reçoit, c'est effectivement une augmentation de salaire, mais techniquement, cela ne l'est pas.

M. le ministre avait également mentionné hier qu'il espérait que les négociations entre la Fonction publique et le Conseil du Trésor permettraient de donner une véritable augmentation de salaire et non pas un rattrapage.

Maintenant, je vais répondre à la deuxième partie de votre question. Je ne sais pas exactement si d'autres pays ont relié le salaire de leurs militaires à celui de la Fonction publique. Je sais par contre que certains pays de l'Amérique du Sud, par exemple, ne l'ont pas fait. Mais en ce qui concerne les pays avec lesquels on a l'habitude de fonctionner, je ne pourrais pas le dire. Pour notre part, cela fait plusieurs années que c'est la même chose et j'espère que votre comité ne s'attardera pas seulement sur les garderies et sur les autres services, mais également sur le problème de la rémunération des hommes et des femmes qui servent en uniforme.

Personnellement, j'ai le sérieux souci d'attirer les meilleurs éléments que nous avons au Canada et surtout de les garder après avoir dépensé, dans certains cas, des millions pour les entraîner, comme pour nos pilotes. C'est épouvantable de ne pas être capable de garder des experts en informatique par exemple, parce qu'ils sont très en demande, tout comme nos pilotes que l'on perd souvent en fin de contrat. Lorsque le contrat est terminé, il faut bien accepter que leur loyauté envers les Forces canadiennes se termine aussi. Si Air Canada est très heureuse de voir arriver un pilote de F-18, les Forces armées le sont moins parce qu'elles ont dépensé des millions de dollars pour entraîner celui-ci et qu'elles vont devoir à nouveau dépenser quelques millions de dollars pour entraîner un autre pilote.

Il faut donc être compétitif sur le marché de l'emploi pour pouvoir attirer les meilleurs hommes et les meilleures femmes qui vont nous servir dans l'avenir.

Mme Pierrette Venne: Mon autre question concerne l'Opération Minerve. Tantôt vous avez parlé des femmes et vous avez dit qu'il y en avait plus maintenant qu'auparavant. Comme vous devez le savoir, il y a une campagne de recrutement des femmes, connue sous le nom d'Opération Minerve. J'ai deux questions à vous poser à ce sujet.

D'une part, comment pouvez-vous concilier la réduction des effectifs, comme vous l'avez mentionné tout à l'heure, de la force régulière, qui va passer à 60 000 en 1999, et votre programme de recrutement des femmes?

• 1610

D'autre part, j'aimerais savoir si vous pouvez nous dire comment cette campagne de recrutement se manifeste. Pour ma part, je n'ai rien vu sur cette campagne destinée exclusivement aux femmes.

Je peux vous dire que j'ai téléphoné au centre de recrutement de la région de la rive sud de Montréal, et on m'a répondu que les circulaires et la documentation étaient à l'impression actuellement. On sait que le délai qui vous est donné par la Commission canadienne des droits de la personne se termine en 1999. Il ne vous reste pas beaucoup de temps pour augmenter la proportion des femmes au sein des forces armées. Vous n'en êtes qu'à l'impression de la publicité. Alors, j'aimerais savoir ce que que vous pouvez nous dire là-dessus.

Gén J.M.G. Baril: Merci, madame.

Premièrement, au sujet de la réduction des Forces canadiennes à 60 000 hommes, but qui doit être atteint en 1999, nous en sommes déjà à environ 61 500. On est donc presque à la limite qu'on s'était fixée et qu'on va atteindre en 1999.

Maintenant, lorsqu'on l'atteindra en 1999, si on ne fait pas de recrutement, on va créer un trou dans l'âge et l'expérience des hommes et des femmes qui servent. Notre taux d'attrition varie évidemment selon la condition économique de notre pays, et celui-ci, dans la classification des pilotes, est d'à peu près 14 p. 100 présentement. La moyenne dans toutes les Forces canadiennes est probablement de 4 ou 5 p. 100. Ceci veut dire qu'il faut en recruter plusieurs milliers par année, parce que le taux de perte à l'entraînement est quand même assez élevé. Il faut que nous ayons un système de recrutement continu et un système d'entraînement continu pour injecter du sang neuf à nos forces.

La campagne de recrutement qui s'adresse directement aux femmes est évidemment faite pour répondre à la directive de la Commission des droits de la personne. C'est un ordre. C'est la loi dans notre pays. Personnellement, sans accuser personne, je dois dire qu'on n'en a pas fait assez. C'est assez clair. On nous a dit, en 1987 ou 1988, d'ouvrir tous nos métiers aux femmes. On l'a fait techniquement, mais je me demande si on l'a fait du fond de notre coeur à ce moment-là. Je me sens un peu responsable aussi, parce que j'étais dans les systèmes de commandement et d'entraînement au moment où on a permis aux femmes de se joindre à toutes les armes de combat. Mais je ne crois pas qu'on leur ait souhaité la bienvenue et je ne pense pas qu'on leur ait rendu la vie facile.

En fait, je pense qu'on voulait faire en sorte que les femmes puissent atteindre les plus hauts standards alors qu'il est moins sûr que nous ayons fait la même chose pour les hommes qui s'entraînaient dans la même école. On était d'avis que les femmes se décourageraient si on s'en tenait à des objectifs très serrés et qu'elles ne viendraient pas nous déranger dans l'infanterie, dans les blindés ou dans l'artillerie.

Malheureusement, je pense que c'est très vrai. On n'a pas changé les traditions et les points de vue, et on n'a pas permis que l'entraînement soit plus accessible. Je pense même qu'on est allé jusqu'au point de laisser les plus jeunes s'occuper de l'entraînement des femmes, sans surveillance, ce qui fait qu'un jeune capitaine pouvait penser que c'était une bonne idée que de rendre l'entraînement tellement difficile que cela découragerait les femmes de vouloir se joindre aux forces armées. Mon explication peut vous paraître simple, mais je crois que c'est ce qui est arrivé.

J'ai dit à plusieurs reprises que, dans les Forces canadiennes, on n'a plus la patience d'attendre ceux qui ne sont pas prêts à vivre avec ça, d'attendre plusieurs années pour qu'ils s'habituent et qu'ils changent tranquillement. Je n'ai plus la patience d'attendre cela. Je pense que tout Canadien ou Canadienne qui est capable de supporter l'entraînement et qui arrive à atteindre les standards voulus peut porter le même uniforme que M. Parent et moi-même. Cela ne me gêne aucunement que ce soit un homme ou une femme. Cela fait longtemps que je le pense.

• 1615

Concernant la campagne de recrutement, nous avions demandé de cibler spécialement les femmes pour les attirer, pour leur démontrer que nos institutions d'entraînement, tout comme notre mentalité, ont changé et d'essayer d'en recruter le plus possible. Je peux vous assurer que ceux qui entrent dans l'infanterie, par exemple, ont du mérite parce que c'est une classification très difficile, aussi bien pour les hommes que pour les femmes, et que les standards sont très difficiles à atteindre. Celui ou celle qui recevra le diplôme, à la fin, aura atteint les normes des Forces canadiennes, sinon il ou elle ne l'aura pas. Donc, on essaye d'en recruter beaucoup. Lorsqu'on parle d'une cible de 25, de 15 ou de 20 p. 100, c'est à l'entrée. C'est au bureau de recrutement. Sur les 20 p. 100 qui vont se présenter, peut-être que 15 p. 100 vont lire des documents, que 10 p. 100 vont s'engager, que 7 p. 100 vont être entraînés et que 3 p. 100 en sortiront à l'autre bout. Nous voulons donc essayer d'élargir le recrutement, d'une part pour respecter la loi canadienne et d'autre part pour donner une chance à tous les Canadiens de servir dans notre grande institution.

[Traduction]

Le président: George.

M. George Proud (Hillsborough, Lib.): Merci, monsieur le président.

Général, adjudant-chef, bienvenue.

Pour continuer dans la même veine que Mme Venne, sur les récentes augmentations de la rémunération, la solde des membres des forces armées demeure bien en deçà du salaire des fonctionnaires, malgré ces augmentations. Si vous tenez compte en plus de l'écart entre la rémunération du secteur public et celle du secteur privé, c'est encore pire. Vous avez dit dans votre exposé, monsieur, que pour recruter et conserver un personnel très qualifié, vous devez offrir une rémunération qui les incitera à demeurer dans vos rangs. C'est difficile.

J'ai trois questions à vous poser également sur autre chose. La rémunération du personnel représente près du tiers d'un budget à la baisse. Comment le ministère pourra-t-il offrir aux militaires les augmentations de salaire dont ils ont tant besoin sans pour autant compromettre d'autres domaines d'opération, plus particulièrement pour ce qui est de la formation et de l'entretien?

Deuxièmement, compte tenu des récentes initiatives visant à améliorer les régimes de commandement et de justice au sein des forces armées, j'aimerais savoir si, à votre avis, les mutations fréquentes sont vraiment nécessaires. Ces mutations fréquentes ont, je le répète, des effets négatifs pour les familles des militaires. Leurs conjoints ont de la difficulté à trouver des emplois dans certaines régions du pays, et cela cause des difficultés aux enfants. Vous avez vous-même beaucoup déménagé, comme bon nombre d'entre nous, et vous savez donc quel effet cela peut avoir pour les familles. Je me demande donc quelles seront les répercussions des récentes initiatives et s'il est vraiment nécessaire que les militaires déménagent aussi souvent.

Enfin, j'étais membre du Comité mixte d'examen de la politique de défense, et nous pensions que la proposition visant à offrir une sécurité d'emploi aux réservistes recevrait un solide appui. Nous pensions qu'une mesure législative à ce sujet serait adoptée sans problème. Le premier à commenter cette mesure était un ancien ministre des Finances de l'Alberta. Il était certain que la proposition serait facilement acceptée. La Chambre de commerce de l'Alberta avait adopté une motion faisant de cette proposition une priorité. Nous avons toutefois constaté, en voyageant dans tout le pays, que les réservistes eux-mêmes et les militaires—et bien sûr le groupe consultatif attaché au ministre—n'accordaient pas à cette question un très haut degré de priorité.

J'aimerais connaître votre opinion sur l'adoption d'une mesure législative qui garantirait une sécurité d'emploi aux réservistes appelés sous les drapeaux. Comme on l'a constaté durant la campagne de Bosnie, certains membres de la réserve ont été appelés à se rendre là-bas une fois, deux fois, et parfois même trois fois.

J'aimerais connaître vos réponses à ces trois questions, monsieur. Merci.

Gén J.M.G. Baril: Merci beaucoup, monsieur.

Ce qui vous intéresse, je crois, c'est le coût du personnel des Forces canadiennes. Comme je l'ai dit dans ma déclaration préliminaire, cela représente actuellement 53 p. 100 environ de nos dépenses. Parallèlement, j'ai demandé au comité de chercher des moyens de diminuer ces coûts ou ceux d'autres de nos activités, de rendre le système plus efficace, de façon à ce que nous ayons l'équipement et la formation nécessaires à notre personnel. C'est extrêmement difficile, et c'est la plus grande dépense à notre budget: la rémunération du personnel. Il faut bien sûr tenir compte de tout élément ou de toute augmentation qui vise à améliorer le bien-être de nos troupes. Également, il faut déterminer si notre budget nous le permet ou si l'argent peut venir de l'extérieur.

• 1620

On m'a dit que l'argent destiné aux augmentations de salaire dans la fonction publique ou dans les Forces canadiennes est tiré du Trésor, selon ce qu'approuve le Conseil du Trésor. J'ai été très heureux d'apprendre cette nouvelle, puisque je l'ignorais. J'espère que notre ministre en est également informé. Je ne saurais dire s'il s'agit d'une règle inscrite dans un manuel quelconque, mais il nous serait très difficile à nous d'absorber une augmentation des salaires.

M. George Proud: Nous nous assurerons qu'il en sera informé.

Gén J.M.G. Baril: Il l'est probablement déjà.

Vous avez parlé de déménagement et de stabilité des familles. Lorsqu'on me demande combien de fois j'ai déménagé dans les 31 années de mon mariage, je réponds toujours 18 fois. Ma femme, qui est généralement près de moi, répondra 22 fois. Elle dit que pour les quatre qui me manquent, ou bien j'étais absent, ou bien je ne m'en souviens pas. Je crains fort qu'elle n'ait raison.

Ma femme est enseignante, et elle a dû très souvent donner sa démission. Je sais qu'elle a démissionné à Ottawa. Elle a démissionné deux fois à Brandon, au Manitoba. Elle a démissionné à Toronto. Elle a démissionné à Gagetown et en Allemagne. Elle a toujours aimé son travail, mais elle m'a suivi parce que nous avions décidé que, dans notre famille, nous n'aurions qu'une orientation.

Il en va de même pour nos enfants. L'un a 28 ans, l'autre, 18. Je ne saurais vous mentionner toutes les écoles qu'ils ont fréquentées, la liste serait trop longue. Mais notre fille de 18 ans a fréquenté des écoles à Toronto, à Ottawa, deux écoles au Nouveau-Brunswick, à New York, à Manhattan et à Québec. Elle a reçu son diplôme d'études secondaires l'an dernier à Ottawa et elle fréquente maintenant l'université.

C'est très dur pour la famille. Je suis bien placé pour en parler. Notre fille avait trois mois lorsque je l'ai vue pour la première fois. Je revenais du Moyen-Orient. Nous venions de quitter l'Allemagne, et ma femme était enceinte de six mois lorsque je l'ai lâchement abandonnée au Canada pour une affectation de six mois aux Nations Unies. Mais il en a toujours été ainsi, et je ne suis qu'un parmi tant d'autres—pas seulement dans l'armée de terre, mais aussi dans la marine et dans l'aviation. Dans la marine, il est de règle d'affecter le personnel à l'étranger environ six mois chaque année. Les maris ou les femmes—ce sont de plus en plus les maris—doivent se débrouiller.

La semaine dernière, j'étais à Haïti. J'ai rencontré une sergente. Je lui ai demandé de ses nouvelles et si elle avait des enfants. Elle m'a répondu que oui. Ils se sont vus, je crois, pendant trois semaines, après que son mari fut revenu de Bosnie et avant qu'elle ne parte pour Haïti. Les enfants, de huit ou neuf ans, sont pris entre les deux.

Les réaffectations et la stabilité sont des éléments auxquels nous devons réfléchir, mais pas seulement pour ce qui est de la rémunération. Cela ne saurait être indemnisé avec de l'argent ou autre chose. Ce qu'il faut, c'est faciliter la vie de la famille, lorsqu'elle doit déménager.

Nous sommes tous assez traumatisés lorsqu'il nous faut vendre une maison et en acheter une autre. Quitter un logement familial après l'avoir nettoyé pour passer à un autre, cela va encore, surtout lorsqu'on est jeune. Mais décider en trois ou quatre jours d'investir toutes les économies de la famille dans une maison à Toronto sans savoir où en sera le marché dans deux ans et devoir faire appel au régime de vente garantie, c'est une tout autre affaire. Cela n'a rien d'amusant. C'est très dur lorsque la famille y a investi toutes ses économies.

Nous appliquons maintenant une nouvelle méthode—ce n'est pas en raison de notre grande sagesse, mais plutôt parce que les compressions budgétaires nous y ont obligés—qui consiste à concentrer notre armée, notre marine et notre aviation dans de vastes bases. Cela n'a pas été difficile dans le cas de la marine. Comme les installations doivent être situées près de la mer, elles sont à l'Est et à l'Ouest. C'est là que se trouvent les grandes garnisons. On essaie maintenant de s'assurer que les militaires du rang, ou plus spécialement les jeunes officiers, qui sont envoyés dans l'Ouest y resteront longtemps. Même chose pour l'Est.

• 1625

L'armée a été concentrée à Edmonton, Petawawa, Valcartier et Gagetown. Nous essayons de faire en sorte qu'un militaire en poste à Edmonton puisse y demeurer 10 ou 12 ans sans avoir à déménager. Par la suite, ce militaire aura peut-être à choisir entre la stabilité et la promotion dans les rangs. Dans certains cas, lorsque la stabilité est plus importante, le militaire peut retarder sa promotion. Mais il ne sera pas pénalisé pour cela. C'est ce que nous essayons de faire.

Nous avons beaucoup diminué les réaffectations. Il y a quelques années, 20 000 hommes et femmes déménageaient au Canada et à l'étranger chaque année. Ce nombre est maintenant inférieur à 7 000, je crois.

Nous savons que ce n'est pas amusant. Il y a eu beaucoup de changements au sein des forces armées. Nous n'avions plus l'argent nécessaire pour réaffecter autant de gens. Le nombre des déménagements à l'été 1998 sera le plus bas que l'on ait connu depuis longtemps, et j'estime que c'est une bonne chose.

Mais il faut se rappeler que l'armée est une grande organisation dont l'objectif est d'être prête à livrer bataille. Pour cela, nous devons former et perfectionner nos commandants et nos techniciens et les envoyer un peu partout. Notre effectif est très mobile, et nous devons conserver cette mobilité.

Quant à ceux qui n'acceptent pas cette mobilité, j'espère que nous pouvons leur trouver des postes suffisamment statiques. Mais il n'y a pas de garantie. L'armée passe en premier, la famille et tout le reste après.

Vous voulez connaître mon opinion sur l'adoption d'une mesure législative en matière de sécurité d'emploi. Certaines personnes qui connaissent bien notre pays et nos lois m'ont dit qu'une telle mesure ne serait probablement jamais adoptée. Cela dit, le fait que nous n'aurons probablement jamais une loi garantissant l'emploi des réservistes auxquels nous faisons appel ne signifie pas que nous nous désintéressons de la question.

Je suis tout particulièrement reconnaissant au conseil de liaison de la défense, qui oeuvre auprès de centaines d'entreprises. Nous disons à ces entreprises que si elles fournissent de bonnes conditions de travail à nos réservistes, ceux-ci seront de bien meilleurs travailleurs après que nous les aurons formés pour en faire des leaders. Nous permettons aux réservistes de participer à nos opérations partout dans le monde. Les hommes et les femmes qui en ont l'occasion en sont grandement enrichis.

Jusqu'à présent, nous n'avons jamais eu besoin de mesure législative pour que des réservistes participent à plein temps à nos missions; nous n'avons eu recours qu'à des volontaires. Nous signons avec eux des contrats de neuf à douze mois, s'il s'agit d'une mission de six mois. Nous devons nous assurer qu'ils reçoivent un entraînement de six mois.

Auparavant, nous les retournions dans leurs unités. Mais nous avons constaté, quelques années après le début de notre mission en ex-Yougoslavie, qu'il est inhumain de prendre quelqu'un qui a passé six mois avec un groupe sur un théâtre de guerre et de le renvoyer dans son unité de réserve quelques heures après son retour. Cela équivaut à un abandon total. Maintenant, nous les gardons chez nous. Nous leur accordons des vacances, comme à tous ceux qui reviennent d'une mission, puis ils restent au sein de cette unité pour décompresser.

Cela fait partie de notre programme et de nos méthodes de question du stress. Cela ne s'adresse pas seulement au soldat qui a participé à la mission, mais aussi à sa famille. Le programme s'applique lorsque le soldat part, pendant son absence, avant, pendant et après son retour. Nous avons un programme assez complet de gestion du stress.

Le président: Merci. Monsieur Proctor.

M. Dick Proctor: Tout d'abord, je tiens à féliciter le général Baril de sa nomination au poste de chef d'état-major de la Défense. J'ai eu le privilège d'être présent à la cérémonie d'investiture, à Rideau Hall, le mois dernier. J'estime qu'on a fait en vous un choix judicieux qui signalera aux Canadiens et à nos alliés étrangers que nous avons adopté une nouvelle orientation. Voilà pour les préliminaires.

J'aurais préféré poser ma question au ministre de la Défense lorsqu'il est venu nous rencontrer mardi, mais je n'en ai pas eu l'occasion.

Je suis assez sceptique quant à cette étude sur la qualité de vie et sur les conditions salariales des militaires. Je ne sais pas si notre comité permanent est bien l'organisme qui devrait s'occuper de cette question, voyager dans tout le pays et rencontrer les militaires et aussi les civils qui travaillent dans les bases militaires pour savoir si les salaires et les rations sont suffisants ou pas.

• 1630

À mon avis, un grand nombre de Canadiens estiment que ce n'est pas le cas. Si j'avais voulu m'attaquer à cette tâche, je suppose que j'aurais demandé un emploi à l'Union des employés de la Défense nationale au lieu de me présenter comme député au Parlement.

D'une façon générale, croyez-vous que ce soit une tâche appropriée pour le comité permanent? J'ai peut-être tort, du moins je l'espère. Je suis un nouveau député, et j'ai peut-être tort. Est-ce faire bon usage du comité permanent, et, si oui, pourquoi?

Gén J.M.G. Baril: Je suis également nouveau à mon poste. J'ai encore moins d'expérience que vous.

En tout cas, j'espère que c'est faire bon usage du comité. J'ai participé à une longue discussion avec le ministre de la Défense précédent à ce sujet. Permettez-moi d'aborder cette question dans l'optique d'un soldat. Nous avons constaté que, lorsque le comité précédent a entrepris ses travaux, les militaires s'attendaient à de grands résultats. Ils attendaient avec enthousiasme de pouvoir parler avec des gens situés près du pouvoir dans le pays et, en fait, avec vous tous, qui avez, croyait-on, votre mot à dire dans le gouvernement du pays.

Nous avons peut-être été trop discrets au cours des quatre ou cinq dernières années. Nous avons peut-être l'impression que les Canadiens ne nous accordent pas beaucoup de crédit. J'espère que ce n'est qu'une perception. Mais nous avons au moins le comité qui examine ce que nous faisons, qui écoute ce que nous disons et qui voit comment nous sommes traités. Je ne dis pas cela de façon négative, mais plutôt par comparaison avec le reste de la société.

À mon avis, il y a probablement deux façons de faire cette étude. Vous pouvez engager une firme et la charger d'examiner ce que nous faisons et de produire un rapport. Ce rapport nous serait remis, nous le donnerions au ministre, et il pourrait le défendre pendant plus d'un an.

Je préfère qu'un comité assez influent s'occupe de cette tâche. Si vous avez besoin de conseils de l'extérieur, vous pouvez retenir les services d'experts, après avoir entendu les militaires pour déterminer ce que nous méritons.

Là encore, c'est une question de compétitivité. En temps de paix, lorsqu'on travaille dans l'armée, au début du moins, tout le monde partage le même intérêt et le même sens de l'aventure. On nous fournit un uniforme, trois repas par jour, et c'est assez bien.

Mais viennent ensuite la famille, le métier, la carrière. Il faut pouvoir expliquer tout cela à votre femme et à vos enfants lorsque vous revenez chez vous le soir. Il faut pouvoir dire que quelqu'un s'occupe bien de vous en échange des sacrifices que vous faites pour votre pays, surtout lorsque vous travaillez à l'étranger.

C'est pourquoi, à mon très humble avis, il n'y a pas d'autre organisme mieux placé pour dire au leadership du Canada, à l'échelon le plus élevé, ce que méritent les hommes et les femmes en uniforme.

M. Dick Proctor: Voici ma question suivante, monsieur le président. Je suppose que lorsque nous serons en voyage, nous parlerons aussi à des civils. Votre témoignage portait davantage, à juste titre, sur les militaires. D'autres députés ont reçu ces lettres également, j'en suis sûr.

Un grand nombre de gens seront touchés par les différents modes de prestation des services lorsque leur base sera privatisée, du moins en partie. Cela provoque une frustration assez grande. C'est certes le cas à Moose Jaw, au 15 Wing. Cette base fait partie de ma circonscription. Le consortium Bombardier n'a pas annoncé qu'il reprenait la base, mais nous espérons qu'il le fera bientôt.

Bien des gens estiment qu'ils ne sont que des éléments de la masse critique. Ils pensent qu'on n'aura plus besoin d'eux, mais ils n'ont pas d'autre choix que d'attendre que Bombardier reprenne la base et décide quels employés seront conservés et lesquels devront partir.

Ces gens-là veulent simplement continuer leur vie. Il existe des offres de rachat, mais ils ne peuvent les accepter avant que tout cela n'ait été fait.

Je vois que vous hochez la tête; c'est donc que vous êtes au courant. Que pouvez-vous répondre à cela, alors?

• 1635

Gén J.M.G. Baril: Ce que je ne peux pas vous dire, c'est où nous en sommes dans notre projet avec l'OTAN. Vous en savez peut-être davantage que moi à ce sujet. Nous avons entrepris un projet très ambitieux.

Pour revenir aux différents modes de prestation des services, ou DMPS, ce n'est pas seulement une politique du gouvernement, mais aussi une nécessité pour les Forces canadiennes et le ministère de la Défense nationale si l'on veut fonctionner avec les ressources attribuées à notre ministère et continuer d'assumer la tâche qui nous a été confiée. Cela fait partie d'une orientation innovatrice.

Je suis parti du pays pendant trois ans pour travailler aux Nations Unies. Lorsque je suis revenu, on avait déjà adopté cette nouvelle façon de fournir les services. L'armée est maintenant comme une entreprise, si l'on veut, qui pour demeurer concurrentielle doit s'assurer de ne conserver que ses fonctions essentielles. Pour ce qui est des autres fonctions, elles peuvent être réalisées en sous-traitance.

À l'heure actuelle, nous ne parlons pas de «fonctions essentielles» dans les Forces canadiennes, mais plutôt de «capacité de combat». Pour respecter nos budgets et être perçus comme tels tout en offrant un meilleur produit final, nous devons nous assurer que nos fonctions de combat sont intouchables, que celles-là soient conservées.

Pour ce qui est du reste, eh bien, il faut faire au mieux. Cela rend nos gens très nerveux. Je le comprends très bien, et nous ne sommes sans doute pas la seule organisation à procéder de cette façon. En plus de rendre les gens nerveux, le processus est très complexe et diffère d'un endroit à l'autre. Nos employés ont l'impression que nous déplaçons constamment le fil d'arrivée.

Je ne crois pas que ce soit le cas. Nous trouvons encore des moyens de rendre ces mesures équitables et acceptables. Nous nous assurons d'économiser de l'argent. Le but des DMPS n'est pas de rendre tout le monde misérable sans économiser d'argent. Nous voulons nous assurer que nous avons les ressources nécessaires et les utiliser pour ce qui nous semble essentiel.

Dans le bon vieux temps, lorsque j'étais soldat, je devais m'assurer que mes munitions m'étaient données par le quartier-maître, qui portait l'uniforme. Je savais que j'obtiendrais des munitions parce que je connaissais le sergent et que c'était lui qui me donnait les munitions. Maintenant, nous ne nous préoccupons plus de qui fournit les munitions. Mais je dois néanmoins avoir la garantie que j'aurai les munitions dont j'ai besoin, lorsque j'en aurai besoin.

Nous avons donc adopté une optique de capacité de combat, puis de service garanti. Ce service garanti doit nous être fourni de la façon la plus efficace et la plus rentable possible. C'est difficile, parce que nous sommes tout à fait engagés dans cette voie, tout comme le reste du monde.

Le président: Monsieur Borotsik.

M. Rick Borotsik (Brandon—Souris, PC): Merci, monsieur le président.

Je signale au général Baril et à l'adjudant—chef Parent que je ne suis pas membre de ce comité permanent. J'y remplace mon collègue, M. Price, qui doit malheureusement participer à une autre réunion. C'est pourquoi le président ne savait pas mon nom, général. Ce n'est pas parce que je suis timide et réservé, comme vous le savez fort bien, général.

Gén J.M.G. Baril: M. Price a été rappelé.

M. Rick Borotsik: Il a été rappelé.

Premièrement, je tiens à vous renouveler mes félicitations pour votre promotion au poste de chef d'état-major de la Défense. Je vous ai connu il y a plusieurs années, et je peux honnêtement dire que la plupart des officiers à qui j'ai parlé et moi-même vous félicitons. Vous avez certainement démontré vos aptitudes à commander, et je m'attends à voir des choses très intéressantes et très bonnes survenir dans les forces armées.

Il y a peut-être un peu de flatterie dans ce que je dis, parce que la BFC Shiloh est située dans ma circonscription. Je sais, général, que vous penserez toujours à la BFC Shiloh d'une manière favorable.

Je connais aussi très bien le secteur militaire et je peux honnêtement vous dire que je suis un ami des militaires. J'ai eu l'occasion, au cours des neuf dernières années, d'en apprendre peut-être plus que je ne l'aurais voulu au sujet des forces armées et de la façon dont elles ont réagi à des compressions assez importantes dans leur budget ces derniers temps.

• 1640

J'ai trois questions à poser, mais je dois d'abord dire que l'une des choses les plus positives qui soient arrivées aux forces armées, certainement au cours des 12 derniers mois—et ce n'est pas nécessairement positif pour le Canada—a été leur participation aux secours apportés lors des inondations de la rivière Rouge, au Manitoba. Je suis persuadé que toutes les personnes présentes ici ont vu ce qui s'est passé là-bas, et je peux honnêtement vous dire que c'était probablement le meilleur tonique non seulement pour le moral des militaires, mais aussi pour celui des Canadiens, qui ont pu vraiment voir que nous avons besoin des militaires au Canada.

Je ne souhaite à personne de vivre une inondation, croyez-moi, mais je dois dire, général, que tous les militaires, gradés, simples soldats et officiers, se sont certainement comportés en soldats professionnels et consciencieux. Je vous en remercie donc au nom du Manitoba.

Ma première question porte plutôt sur l'ouverture. Comme je l'ai dit, je connais le secteur militaire depuis bien des années, et j'ai vu ces deux ou trois dernières années une tendance très positive à ouvrir les bases. Nous avons maintenant des bases ouvertes plutôt que des bases fermées. Nous avons des militaires qui sont maintenant prêts à participer à la collectivité. Vos officiers, et j'ignore s'ils en ont reçu l'ordre de leurs supérieurs, participent maintenant aux activités communautaires.

Nous avons maintenant des journées des Forces armées canadiennes, des journées droit de cité, et j'ai constaté que les civils canadiens ont maintenant une bien meilleure idée de ce que sont les militaires. Auparavant, vous restiez enfermés. Lorsqu'on agit ainsi et qu'on fait tout à l'abri des regards indiscrets, un rideau tombe, et les civils ont tendance à hésiter peut-être à se mêler aux militaires.

Vous êtes maintenant le grand commandant, vous êtes le chef d'état-major de la Défense. Allez-vous poursuivre une politique d'ouverture qui permettra aux Canadiens de voir exactement de quoi il retourne dans les forces armées? C'est ma première question, et j'en ai deux autres à poser.

Gén J.M.G. Baril: Merci beaucoup. J'avais l'habitude de dire que nous n'obtenions jamais de traitement de faveur. Maintenant, nous n'obtenons jamais de compliments gratuits; nous devons les payer.

Merci beaucoup de vos bonnes paroles. Vous avez transformé non seulement ma journée, mais aussi mes deux dernières années, je pense.

Je peux sincèrement dire que l'an dernier j'ai pensé à un moment donné que nous devrions rentrer dans nos quartiers et y rester cachés quelque temps. Il aurait alors été très irresponsable de ma part d'agir ainsi, mais nous avions l'impression que nous n'étions pas les bienvenus en dehors de nos quartiers. La situation a changé, et j'en suis heureux.

La catastrophe qui a frappé le Manitoba est l'un des cas les plus évidents, et il y a aussi eu celle du Saguenay. À mon avis, il n'y a pas seulement ces deux cas qui auraient dû nous attirer les feux de la rampe, mais aussi ce que nous avons fait ailleurs dans le monde.

Je me suis rendu compte il y a longtemps que le meilleur ambassadeur que nous ayons est le jeune homme et la jeune femme en uniforme, le personnel non officier, les jeunes officiers désireux de montrer de quoi ils sont capables, fiers de montrer leur équipement, de montrer ce qu'ils ont fait, ainsi que leurs médailles, leurs chaussures bien cirées et leurs compétences en musique, en manoeuvres et dans l'utilisation d'un système de missiles très perfectionné.

Nous avons fait preuve d'ouverture. Lorsque nous parlons d'ouverture, on pourrait penser qu'il s'agit uniquement de nos rapports avec les médias, mais ce n'en est qu'une partie. D'esprit conservateur dans les forces armées, nous avons été forcés de nous ouvrir au monde. Nous avons retiré nos gardes à la barrière, parce que nous n'avions plus d'argent pour les payer. Nous avons dû affecter ailleurs les ressources disponibles. Nous n'avons jamais pensé qu'il y avait une autre façon d'agir, mais lorsque nous avons commencé à exercer des compressions, nous avons ouvert nos portes. Nous avons vu comme conséquence que tout à coup nous n'étions plus isolés de la collectivité.

Ce fut un grand choc et une grande révélation pour moi, la première fois que j'ai servi à Gagetown, au Nouveau-Brunswick. J'avais alors 18 ans de service dans les forces armées et je m'étais fait une carapace pour parvenir à vivre tout ce temps dans la collectivité. C'était la première fois que les gens de la localité déneigeaient nos rues et que nous partagions tout, les écoles... J'étais à la tête du mouvement scout. Je m'occupais de 500 ou 600 enfants parce qu'on m'en avait donné l'ordre, et j'ai découvert que nous avions beaucoup d'ascendant.

Oui, nous sommes ouverts, et... J'allais dire que s'il n'en tient qu'à moi—de fait il n'en tient qu'à moi! Les choses continueront ainsi, et nous n'allons pas seulement montrer de quoi nous sommes capables sur le plan militaire, mais nous allons montrer aussi nos capacités et nos talents face à toute la collectivité.

• 1645

M. Rick Borotsik: Je pose cette question, général, parce que c'est vous le responsable. Vous êtes le dirigeant, et un dirigeant très capable. Il est très important—et je pense que vous l'avez dit tout à l'heure—que les Canadiens reconnaissent ce que nous avons vraiment dans les forces armées. La seule façon pour vous d'obtenir ce résultat, général, c'est de vous assurer qu'ils sont invités à venir voir exactement de quoi est faite la vie militaire. Je sais que vous êtes capables de le faire, et j'aime votre réponse. Merci beaucoup.

Et n'attendez pas d'y être forcés. Insistez pour que vos officiers ainsi que vos gradés et hommes de troupe participent à la vie de la collectivité, parce que ses membres veulent en connaître davantage à votre sujet.

Mon autre question est un peu plus difficile et ne porte peut-être pas sur un élément aussi positif. Il y a un problème actuellement dans les forces armées en ce qui concerne la retraite forcée. La politique dans les forces armées—vous pourrez confirmer si elle existe encore ou non—fixe le moment de la retraite à 55 ans. Or il semble que certains de vos anciens soldats sont en train de soumettre la question à la Commission des droits de la personne. L'adjudant-chef pourrait peut-être répondre, mais je sais qu'une cause est en appel, bien que j'ignore où en est rendue l'affaire présentement.

Avez-vous réfléchi, ou les autorités militaires ont-elles réfléchi, à la question de l'âge de la retraite pour les membres des forces armées? Je ne sais pas quelle est la bonne solution, mais il y a de toute évidence un problème à cet égard, général. Pouvez-vous répondre à cette question?

Gén J.M.G. Baril: Vous avez raison de dire que c'est une question très difficile.

La plupart des armées du monde et la plupart des forces armées imposent une limite d'âge. De même, plusieurs pays imposent une limite d'âge selon le grade. Un simple soldat d'infanterie ne sera pas très utile dans son métier lorsqu'il aura 55 ans, et la seule chose qu'il peut faire est de porter une arme et de monter à l'assaut. Cependant, un adjudant-chef dans l'infanterie pourra faire beaucoup mieux que le fantassin à 55 ans, parce qu'il possède une formation différente. Par conséquent, les pays fixent un âge inférieur pour la retraite d'un caporal comparativement à d'autres militaires.

Dans les Forces canadiennes, nous avons choisi l'universalité du service. Toute personne en uniforme doit pouvoir accomplir un certain niveau d'activité, c'est-à-dire avoir la capacité de participer au combat, autrement elle ne peut pas porter l'uniforme. Ainsi, à cause de l'universalité du service, nous avons fixé l'âge de la retraite obligatoire à 55 ans pour tous.

Cela dit, nous avons des contrats avec nos troupes. Ces contrats stipulent que les militaires peuvent prendre leur retraite après 20 ans de service ou à l'âge de 40 ans. Dans les cas où nous pouvons utiliser la flexibilité entre les différents groupes professionnels, afin de pouvoir garder les membres d'un groupe hautement spécialisé et si nous voulons les garder jusqu'à 55 ans, ils resteront jusqu'à 55 ans. Nous prévenons les militaires concernés longtemps d'avance ou nous leur accordons une prolongation de trois ans ou de cinq ans de leur contrat initial de 20 ans de service. Nous avons cette capacité.

Je crois qu'il y a sept ou huit cas actuellement devant les tribunaux, ou peut-être plus, de personnes qui contestent l'âge de la retraite obligatoire. Jusqu'ici, notre politique a été confirmée.

Nous avons certaines exceptions, c'est-à-dire des cas où l'on peut dépasser 55 ans. Des spécialistes officiers peuvent poursuivre leur carrière jusqu'à 58 ans ou 60 ans, selon leur grade, de colonel ou de général—il s'agit de médecins, d'avocats et de quelques autres professions. Nous avons également fait des exceptions dans des cas spéciaux pour des personnes très précises. Lorsque nous le faisons, cependant, nous prenons un risque, car nous devrons expliquer au tribunal pourquoi nous le faisons pour des personnes très précises, tout en défendant la limite de 55 ans pour les autres cas en litige. C'est très difficile, mais lorsque nous le faisons, c'est pour le bien du service et du pays.

M. Rick Borotsik: Vous avez donc décidé de maintenir la politique actuellement en vigueur.

Gén J.M.G. Baril: En effet.

M. Rick Borotsik: Bien, je vous remercie.

Le président: Nous allons maintenant passer à un tour de cinq minutes, en commençant par M. Benoit.

M. Leon E. Benoit (Lakeland, Réf.): Merci, monsieur le président.

Bienvenus, messieurs. Général, je tiens aussi à vous féliciter de votre nomination. C'est une grande responsabilité que vous portez sur vos épaules, non seulement face aux hommes et aux femmes qui font partie des forces armées, mais également face à la population canadienne en général, chez qui vous devez rétablir la confiance dans les forces armées. Je vous souhaite le meilleur succès possible dans votre tâche.

En réponse à une question du dernier député, vous avez dit que vous êtes un conservateur dans les forces armées, mais j'espère que vous pouvez m'assurer que vous êtes disposé à effectuer une véritable réforme dans les forces armées.

Une voix: C'était le cas aussi de Lew MacKenzie.

• 1650

M. Leon E. Benoit: Je veux d'abord vous poser une question au sujet de la création du poste d'inspecteur général indépendant, qui a été rejeté par le ministre. Il s'agissait bien sûr de l'une des recommandations découlant de l'enquête sur la Somalie. Le ministre, en rejetant cette idée, a dit que les officiers militaires ne pouvaient pas fonctionner avec quelqu'un qui surveille leurs moindres gestes. Je vous demande donc, général, si cela vous dérangerait que quelqu'un épie vos moindres gestes, si cette personne est un inspecteur général indépendant.

Gén J.M.G. Baril: Si j'étais tellement dérangé par le fait que quelqu'un surveille mes moindres gestes, je ne pense pas que je serais ici dans cet uniforme aujourd'hui, parce qu'il en a été ainsi pendant toute ma vie. On appelle cela la chaîne de commandement.

M. Leon E. Benoit: Mais ce serait quelqu'un de l'extérieur des forces. Cet inspecteur général indépendant représenterait le public canadien et tâcherait de voir ce qui se passe à l'intérieur des forces armées.

Gén J.M.G. Baril: Si cette personne est de l'extérieur, l'armée sera l'institution gouvernementale la plus surveillée de l'extérieur comme de l'intérieur.

On a peut-être freiné un peu sur cette histoire de l'inspecteur général de l'extérieur. Ce que nous avons à l'intérieur de notre système aujourd'hui, c'est un mécanisme de contrôle dirigé par le chef du service d'examen, qui fait à peu près tout ce que fait un inspecteur général, sauf qu'il relève de moi, du sous-ministre et du ministre. Nous avons le comité de surveillance, l'inspecteur de l'armée et plusieurs agents du Bureau du vérificateur général qui examinent ce que nous faisons. Mais pour ce qui concerne expressément l'inspecteur général, il est tout à fait vrai que nous avons pensé, et le ministre est d'accord avec nous, que nous avons suffisamment de mécanismes qui font la même chose.

Pour ce qui est d'avoir une personne de l'extérieur, certains pensent qu'il y a des inspecteurs généraux dans d'autres pays qui relèvent directement des gouvernants. Ce n'est pas toujours le cas, et la majorité de ceux qui portent le titre d'inspecteur général relèvent du chef de l'armée, du chef d'état-major interarmées ou du ministre. Celui qui porte ce titre et qui relève directement du gouvernement n'accomplit pas du tout la fonction d'un inspecteur général au sens où vous l'entendez.

Il y a donc différentes manières, diverses approches. Pour ce qui est d'avoir quelqu'un de l'extérieur qui me surveillerait, nous l'avons déjà. Il y a des organismes extérieurs qui nous surveillent tous les jours—et il ne s'agit pas seulement d'organismes de l'extérieur, parce que tout citoyen de notre pays peut savoir ce que nous faisons tous les jours.

M. Leon E. Benoit: Mais l'enquête sur la Somalie et d'autres sources, et même nos propres enquêtes qui ont emprunté la voie de l'accès à l'information, par exemple, ont confirmé le fait que ces informations ne sont pas toujours accessibles. D'ailleurs, je crois que M. Grace—je pense que c'est son nom—la personne qui est responsable de l'accès à l'information, a dit que l'armée a très mauvaise réputation lorsqu'il s'agit de divulguer des informations qui devraient être divulguées par les voies de l'accès à l'information.

Donc plusieurs sources ont dit clairement que cela ne marche pas, et elles ont dit qu'il fallait quelqu'un qui serait comptable devant le public canadien—pas nécessairement directement, parce qu'il y a diverses façons de faire cela—et cette personne aurait un rôle de chien de garde, et elle détiendrait un pouvoir supérieur à celui de quiconque, ou serait nommée par le ministre.

Gén J.M.G. Baril: Pour ce qui est de l'accès à l'information, je ne peux pas comparer l'armée aux autres ministères. Je n'ai pas pris une part personnelle à tout cela, parce que nous avons une section spécialisée qui s'en charge. Je pense que les critiques qu'on a entendues avaient trait à la mécanique, au temps que cela a pris, parce que le volume des demandes était tel que le système que nous avons en place ne suffisait pas à la tâche. Ce système a été amélioré de beaucoup. Mais pour ce qui est de dire que nous ne divulguons pas les informations qui devraient être divulguées, je pense que ce ne sont là que des propos du commissaire.

M. Leon E. Benoit: Mais si on a pris tant de temps...

Le président: Monsieur Benoit, merci. Votre temps est écoulé.

M. Leon E. Benoit: Monsieur le président, on a donné beaucoup plus de temps aux autres.

Le président: Le deuxième tour est commencé. Chacun a droit à cinq minutes au deuxième tour.

M. Leon E. Benoit: Je sais, mais vous les avez laissé dépasser les dix minutes de loin—le député libéral, par exemple.

• 1655

Le président: Monsieur Clouthier.

[Français]

M. Hec Clouthier (Renfrew—Nipissing—Pembroke, Lib.): Félicitations, général Baril. J'espère que nous avons maintenant un chef pour l'avenir.

[Traduction]

Vous avez dit que je suis un impatient. Cela me plaît, parce que j'ai la ferme conviction que les impatients, hommes ou femmes, font le travail qu'il y a à faire. Pendant trop longtemps, nous avons eu—et je suis d'accord avec certains de mes collègues d'en face—un certain penchant pour le secret au sein de l'armée. Je crois que cela doit changer, et j'espère qu'avec une personne telle que vous à la tête de l'état-major, cela va changer. D'après ce que j'ai vu et entendu cet après-midi, j'ai la conviction que ça va changer.

Cela dit, j'ai remarqué que vous avez cité le vicomte Montgomery. Si je me souviens bien, c'est lui aussi qui est connu pour avoir dit qu'«il ne faut jamais donner un ordre auquel on ne peut pas obéir», et je sais que vous tenez à ce que tous vos soldats obéissent à leurs chefs.

Je représente la circonscription de Renfrew—Nipissing—Pembroke. La base de Petawawa est située dans ma circonscription. Je suis né et j'ai été élevé à six kilomètres de la base; je la connais donc très bien. J'y ai passé toute ma vie. J'ai parlé avec les jeunes soldats, qui m'ont dit qu'une bonne partie de leur matériel est plus vieux qu'eux; donc, dans certains cas, cela les empêche d'obéir aux ordres parce qu'ils n'ont tout simplement pas le matériel qu'il leur faut pour faire leur devoir.

Je sais que certains articles de matériel sont très coûteux. Je sais aussi que le gouvernement et ceux qui l'ont précédé ont essayé de renouveler le matériel. Mais je crois savoir—et corrigez-moi si j'ai tort—que si l'armée vend son matériel dépassé ou usagé, l'argent est versé dans le Trésor fédéral. En ma qualité d'homme d'affaires, je ne suis pas d'accord. Je crois que l'argent que l'armée peut économiser doit rester dans l'armée, que l'on procède par modes différents de prestation de services ou par voie de marchés avec le secteur privé. Si vous faites bien votre travail—et il y a quelque chose qui me dit que vous faites bien votre travail—vous devriez être récompensés. Cet argent ne devrait pas être versé dans le Trésor fédéral. Je ne connais pas les intentions à long terme du gouvernement, mais, chose certaine, je serais favorable à cela, parce que vous auriez ainsi un fonds pour éventualités qui vous permettrait de moderniser votre matériel.

Pour ce qui est de l'impartition, j'ai assisté à plusieurs rencontres avec certaines personnes à la BFC de Petawawa. Le commandant de la base a été des plus francs avec eux. Dans certains cas, l'impartition a causé des pertes d'emplois, mais ces gens ont eu la possibilité de faire des soumissions, et s'ils perdent, ils perdent leurs emplois. Certains d'entre eux commencent à comprendre cela, parce que l'armée doit collaborer davantage avec le secteur privé.

Mon général, l'armée continuera-t-elle d'entreprendre, de concert avec le secteur privé, des initiatives de développement économique là où c'est possible, là où une situation favorable se présente?

Gén J.M.G. Baril: Merci.

En réponse à la première partie de votre question, je suis d'accord avec vous. Si c'est nous qui avons des idées innovatrices, nous devrions en conserver les bienfaits, mais dans certaines régions du pays la loi n'est pas la même. Cela change, et cela change à notre avantage. Et j'ai la certitude que notre sous-ministre adjoint, M. Finn, s'il témoigne devant votre comité, pourra vous donner les détails de nos initiatives et vous dire quel argent nous tirons de la liquidation de nos biens, qu'il s'agisse de biens fonciers ou d'une Jeep qui est finie.

Le «partenariat avec l'industrie» est une expression à la mode depuis longtemps, mais j'ai la conviction que nous sommes déjà actifs en ce sens. Il y a le projet de Moose Jaw, par exemple, qui est un superbe exemple de partenariat avec l'industrie. À Portage La Prairie, c'était sans doute la première fois qu'on mettait sur pied un projet à aussi grande échelle. C'est ce que nous espérons faire, particulièrement lorsqu'il s'agit de modifier du tout au tout le soutien que nous donnons à nos troupes, et encore là, en vue de réduire les coûts. La seule façon de réduire les coûts, c'est d'aller voir ce que l'industrie peut faire, comment elle procède elle-même, et comment on peut collaborer avec elle, et être beaucoup plus efficients et économiser plus d'argent pour que nous puissions renouveler le matériel qui commence à montrer son âge.

• 1700

Je peux vous dire, du point de vue du matériel, que nos soldats ont raison de dire que le matériel est vieux. On a modernisé certains vieux articles de matériel, ou on en a du tout à fait nouveau, comme le nouveau Coyote. De nouveaux projets nous arrivent, qu'il s'agisse du nouveau matériel en goretex ou des nouvelles bottes, ou des nouveaux camions qui vont remplacer nos véhicules de reconnaissance.

Donc, je pense que nous allons de l'avant, mais ce n'est jamais assez vite pour l'impatient que je suis.

Le président: Monsieur Proctor.

M. Dick Proctor: J'aimerais maintenant poser quelques questions sur les hélicoptères. J'ai entendu le ministre dire l'autre jour qu'une annonce était imminente. Ce n'est certainement pas moi qui vais lui demander quel hélicoptère, ou rien du genre, mais ce que j'essaie de comprendre, c'est si l'armée a étudié les divers cahiers des charges des diverses entreprises qui ont fait une soumission. Avez-vous analysé ces cahiers et adresser une recommandation au ministre?

Gén J.M.G. Baril: S'il y a une chose que j'ai apprise il n'y a pas longtemps, c'est qu'il ne faut rien dire sur les grands projets imminents, et ça, c'est un grand projet.

Votre question porte sur le processus, le processus qui consiste à déterminer qui est le meilleur soumissionnaire. La réponse est oui, bien sûr, le processus en est à la phase finale, et le gouvernement va annoncer sa décision quand il le jugera opportun.

M. Dick Proctor: Mais voici ma question: l'armée a-t-elle analysé ces diverses propositions?

Gén J.M.G. Baril: Dans un processus normal, chaque soumission qui est acceptée et acceptable est analysée avec la plus grande minutie.

M. Dick Proctor: D'accord.

On ne cesse d'entendre des rumeurs selon lesquelles, et ça dépend chaque fois de l'hélicoptère qu'on pense choisir pour les opérations de recherche et de sauvetage, les frégates n'auraient pas la superstructure et, dans certains cas, devraient être réhabilitées, pour le Cormorant—je pense que c'est celui-là—ou le ballast le rendrait inutilisable dans une mer houleuse, à cause de son poids. Est-ce qu'il y a du vrai là-dedans?

Gén J.M.G. Baril: Je n'ai rien entendu de tel. Il faudra peut-être changer la poignée du garage sur le navire, mais je ne sais vraiment pas. Je n'ai rien entendu. J'ajoute que je ne suis pas en fonction depuis assez longtemps pour tout savoir sur toutes nos priorités.

M. Dick Proctor: D'accord.

J'ai remarqué cette semaine que le vérificateur général se préoccupait du réseau DEW. L'opération de nettoyage, dit-il, coûtera plusieurs fois ce qu'on a prévu au budget à l'origine. Ayant assisté à une séance d'information plus tôt, j'ai appris que la Défense nationale sera chargée de l'opération de nettoyage du réseau DEW. Je pense que cela nous ramène à la question du budget.

Est-ce que cet argent, les 250 millions ou peu importe ce qu'on a prévu au budget, viendra du budget de la Défense, et est-ce qu'il faudra y trouver de nouveaux crédits?

Gén J.M.G. Baril: C'est un projet qui remonte à assez longtemps. Vous songez à toutes ces stations radar...

M. Dick Proctor: Aux 21 sites, oui.

Gén J.M.G. Baril: ... qui ont été créées au cours des trente dernières années. L'estimation que nous avons, comme vous dites, se chiffre à 250 millions de dollars canadiens. Ce projet sera mis en oeuvre sur une période de dix ans, il coûtera donc un peu moins cher que ce à quoi on s'attendait. De même, nous espérons évidemment faire le travail en recourant, autant que possible, aux gens de l'endroit, afin que l'argent reste sur place.

Il se peut aussi qu'on constate que certaines opérations de nettoyage ont une ampleur plus grande que prévu. Je n'ai aucune information de ce côté. J'espère que ce ne sera pas le cas, mais si c'est le cas, il faudra alors en faire un projet spécial.

Pour ce qui est de la source exacte de financement, évidemment, l'argent viendra du gouvernement. Je pense qu'il proviendra évidemment de notre budget. C'est probablement prévu dans notre budget de base.

M. Dick Proctor: Je vois. Merci.

Le président: Monsieur Pratt.

M. David Pratt (Nepean—Carleton, Lib.): Merci, monsieur le président.

Général Baril, à l'instar de mes collègues, je tiens à vous féliciter pour votre nomination à la tête de l'état-major. Il est évident que vous prenez vos fonctions à un moment décisif pour les forces armées. À l'approche du siècle nouveau, vous voilà en mesure d'imprimer votre propre orientation aux forces armées, occasion unique s'il en est. Je tiens donc à vous adresser mes meilleurs voeux de réussite dans l'exercice de votre charge.

• 1705

J'aimerais vous poser la même question que j'ai posée au ministre lorsqu'il a comparu devant nous il y a quelques jours. Elle porte sur le rôle que peut jouer le ministère pour aider le gouvernement à appliquer sa stratégie de l'emploi. Je songe en particulier à certaines choses qui figuraient dans le discours du Trône et dans l'exposé économique de M. Martin au sujet des investissements stratégiques dans les secteurs fondés sur le savoir. Je songe notamment au domaine militaire, à l'aéronautique et aux télécommunications.

Si je ne m'abuse, votre ministère dispose du plus gros budget discrétionnaire du gouvernement pour l'acquisition d'immobilisations. Corrigez-moi si je me trompe. Ce budget vous offre une occasion unique de contribuer à la croissance de ces secteurs où le Canada possède déjà des atouts. Des compagnies canadiennes sont concurrentielles partout dans le monde dans ces domaines.

Je voudrais savoir précisément ce qu'entend faire le ministère de la Défense nationale pour s'assurer que les milliers de dollars qu'il dépense contribuent à renforcer notre infrastructure industrielle pour les années à venir.

Gén J.M.G. Baril: Je sais maintenant que j'aurais dû être accompagné de tout un aréopage de savants.

Il est extrêmement important pour nous non seulement de conserver le savoir que nous avons dans les forces, mais aussi d'en attirer et d'en produire. Nous engageons des diplômés universitaires et nous leur offrons une formation d'officiers. Nous formons aussi nos propres candidats dans notre collège.

Comme vous le savez sans doute, le Collège militaire de Kingston, dont la Faculté d'ingénierie est réputée—c'est sans doute la meilleure au Canada—a lancé un programme de génie aérospatial. Soit dit en passant, ma nièce et filleule vient d'obtenir son diplôme d'ingénierie spatiale de notre collège militaire. Aujourd'hui, elle porte l'uniforme de l'aviation.

Comme je l'ai déjà dit, nous avons du mal à conserver ces brillantes recrues dans l'armée car leurs compétences sont en grande demande à l'extérieur. Parfois, nous ne sommes pas concurrentiels. Il faut faire en sorte que le talent que nous avons contribué à développer, et pour lequel nous avons payé, reste dans les forces armées.

En outre, nous déployons beaucoup d'efforts pour que l'argent que nous consacrons à l'acquisition d'immobilisations reste en grande partie au Canada. En fait, ce critère fait partie de l'évaluation des projets. Nous prenons en compte de multiples facteurs lorsque nous décidons d'acheter à l'étranger. Nous faisons en sorte que lorsqu'il y a des achats à l'étranger, il y a parallèlement des retombées économiques au Canada. Si un projet est rentable, il sera facturé au Canada. Les retombées économiques font partie intégrante de l'évaluation de chaque projet.

D'après le peu que je sais, étant donné qu'il n'y a pas longtemps que j'assume ces fonctions, nous faisons tout pour que l'argent que nous dépensons, dans la mesure du possible, reste au Canada, sous une forme ou une autre. Ce n'est pas nécessairement que nous devions acheter au Canada, mais lorsque nous achetons à l'étranger, le pays en question, en contrepartie, accepte d'investir chez nous. De cette façon, l'argent dépensé par le Canada revient ici d'une façon ou d'une autre.

M. David Pratt: Je ne m'intéresse pas particulièrement au perfectionnement du personnel, même si c'est manifestement important dans la perspective de la formation. Mes propos avaient trait directement aux marchés de l'État. Je souhaiterais que les entreprises qui approvisionnent les Forces armées canadiennes, qu'il s'agisse de Bombardier, de Spar Aerospace ou de toute autre société, dans la mesure du possible, lorgnent du côté des marchés étrangers pour vendre, aux Français, aux Allemands, aux Anglais ou aux Américains les produits qu'ils mettent au point pour les forces armées. Si c'était chez eux une préoccupation constante, le budget du MDN servirait de belle façon à accroître notre capacité industrielle.

• 1710

Gén J.M.G. Baril: Je comprends. Comme vous pouvez l'imaginer, les Forces canadiennes et leur réseau jouent un rôle à cet égard, et la même chose vaut dans d'autres pays. Il va de soi que nous participons aux échanges internationaux de notre pays. Nous ne sommes pas timides lorsqu'il s'agit de mousser nos produits et nous aidons les secteurs industriels canadiens le plus possible, dans les limites de la loi canadienne. Cela dit, nous participons souvent, en fait, régulièrement, à des efforts en ce sens.

Le président: Monsieur O'Reilly.

M. John O'Reilly (Victoria—Haliburton, Lib.): Au cours de la dernière législature, le comité s'est penché sur un certain nombre de questions, comme le moral, la rémunération, une politique autonome, le logement, etc., et a entendu des témoins des forces armées. Je me demande si nous ne pourrions pas communiquer les notes de la Bibliothèque du Parlement ou les exposés aux nouveaux membres du comité. Nous avons étudié bon nombre de ces sujets et entendu des témoins avant la dissolution du Parlement. J'ai l'impression de poser constamment les mêmes questions, et voilà pourquoi j'ai attendu d'entendre ce que les autres avaient à dire.

Nous avons parlé du contrat social, des dispositions de départ, du soutien au conjoint lors des déménagements, d'un plan de logement, etc., et je me demandais si les documents en question ne pourraient pas être distribués. Je sais, général, que bon nombre de ces sujets ont été abordés, et je crois que la personne à l'arrière que j'ai promue au rang de général à la dernière séance—d'ailleurs je n'avais pas l'intention de lui faire grimper autant d'échelons—, mais je me demandais si...

Le président: Je crois savoir qu'il y a eu une entente à ce sujet. Le greffier a déjà téléphoné à la Défense nationale, et ces notes d'information, ainsi que certains exposés, seront distribués à tous les membres du comité, anciens et nouveaux.

M. John O'Reilly: Nous ne voulons pas perdre notre temps. Nous voulons aller de l'avant et déposer notre rapport et nos recommandations à la Chambre le plus rapidement possible. Tout ce que je veux, c'est que le comité ne perde pas de temps.

Le président: Vous avez raison, John.

[Français]

Général, je voudrais vous remercier grandement pour votre présence parmi nous. J'ai pris bonne note du fait que vous êtes disposé à revenir si nous avons encore besoin de vous parler. Encore une fois, merci beaucoup.

Gén J.M.G. Baril: Merci, monsieur le président.

Le président: La séance est levée.