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NDVA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON NATIONAL DEFENCE AND VETERANS AFFAIRS

COMITÉ PERMANENT DE LA DÉFENSE NATIONALE ET DES ANCIENS COMBATTANTS

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 27 janvier 1998

• 0821

[Traduction]

Le président (M. Robert Bertrand (Pontiac—Gatineau—Labelle, Lib.)): Bonjour tout le monde. Avant de nous mettre en train ce matin, je crois que l'amiral Moore a quelque chose à dire.

Le contre-amiral Russell Moore (commandant, Forces maritimes du Pacifique (FMPA), Forces armées canadiennes): Monsieur le président, membres du Comité permanent de la défense nationale et des anciens combattants, membres de la collectivité militaire, camarades des forces navales et tous nos amis présents, j'ai seulement deux rôles à assumer ce matin. Le premier consiste à accueillir officiellement ce très important comité au commandement des Forces maritimes du Pacifique.

Hier, les membres du comité ont goûté un peu de la vie en mer à bord du NCSM Vancouver faisant la traversée de Vancouver à Victoria et ils ont eu l'occasion de se faire une petite idée de ce qu'est la vie en mer et de l'utilité de nos navires et avions pour la population du Canada.

Hier soir, comme vous l'avez sans doute entendu si vous avez écouté les nouvelles de ce matin et lu le Times Colonist, nous avons eu une séance excellente. Je sais qu'il en ira de même ce matin. Étant donné que quelques officiers supérieurs sont présents on avait craint au départ que les témoins hésitent un peu à exposer au comité leurs préoccupations et les questions qui les tracassent, mais on a constaté hier soir qu'il était inutile de s'inquiéter et je sais que les choses se passeront de même ce matin.

En outre, je vous remercie une fois de plus d'être venus assister à cette réunion. Le comité est là pour vous écouter. Profitez donc de l'occasion.

Monsieur le président, je vous rends les rênes.

Le président: Merci beaucoup.

Je voudrais signaler que nous avons sept ou huit témoins ce matin et étant donné le temps limité dont nous disposons, je devrais veiller à ce que l'on ne dépasse pas le temps imparti. Nous procéderons de la même manière qu'hier soir. Les témoins feront leurs exposés, et si des membres du comité veulent poser des questions, ils le feront une fois l'exposé terminé.

• 1125

[Français]

Pour les personnes qui ont besoin de l'interprétation, des appareils sont disponibles tout près de la porte.

Nous allons procéder exactement de la même façon qu'hier soir. Les témoins vont se présenter à l'avant et faire leur présentation et, si les membres du comité ont des questions à leur poser, ils le feront après la présentation.

[Traduction]

Je prie maintenant Mme Myrna Borleske de bien vouloir venir faire son exposé.

Mme Myrna Borleske (ancienne présidente, Chambre de commerce de Victoria): Bonjour tout le monde; je tiens à vous remercier tous de me donner l'occasion d'être le porte-parole d'un groupe significatif de notre collectivité, le personnel militaire qui travail contre rémunération ou pas, qui réside et qui contribue de bien d'autres façons à l'essor de la région métropolitaine de Victoria.

Depuis plusieurs années, j'ai eu le privilège d'assister à de nombreuses cérémonies aux côtés de militaires, les nôtres aussi bien que ceux d'autres pays du monde entier. Je suis d'avis que nous devrions être fiers du calibre des membres de nos forces armées et toujours nous rappeler qu'ils sont nos ambassadeurs ou qu'ils voyagent pour notre compte.

Après avoir observé ce groupe de gens qui savent s'exprimer et qui sont bien formés, et dont les besoins sont les mêmes que ceux de la collectivité en général, j'ai été extrêmement déçue d'apprendre les difficultés auxquelles ils font face avec leurs familles par suite de difficultés financières. Lorsque de jeunes hommes et femmes sont loin de chez eux et de leurs familles à servir leur pays, nous devons veiller à ce que leur moral ne fléchisse pas par suite de tracas financiers indépendants de leur volonté. À notre époque de compressions et d'austérité, nous devons faire en sorte que ceux qui défendent notre pays et qui assurent la paix dans le monde, sont suffisamment bien rémunérés pour vivre décemment. On ne peut s'attendre à ce que des gens concentrent toute leur attention à la tâche qu'on leur confie si des difficultés financières accaparent leur énergie.

Une collectivité se porte bien lorsque sa main-d'oeuvre est instruite, qu'elle a un faible niveau de chômage et peu d'assistés sociaux. Les militaires garantissent les deux premiers critères à notre société, mais si les rémunérations et avantages sont trop faibles, ils doivent recourir à l'assistance sociale tout comme d'autres secteurs de la collectivité. C'est une situation démoralisante et honteuse et qui coûte énormément à la société en général.

Cependant, il existe des solutions. Par exemple, le service diplomatique offre à ses membres une indemnité de vie chère qui porte leur niveau de vie à celui des économies des pays où ils résident. Nos militaires à tous les niveaux devraient obtenir cette indemnité vu qu'ils ne choisissent pas l'endroit où ils habitent; et lorsqu'ils sont mutés dans des zones où le coût de la vie est élevé, comme le nôtre, ils devraient toucher une indemnité de vie chère qui aligne leur revenu sur le coût de la vie local.

Nous, qui dépensons des millions de dollars à des opérations de maintien de la paix, dans le monde entier, devrions veiller à ce que nos militaires soient traités avec respect et dignité, en leur versant notamment un salaire raisonnable. Je ne pense pas qu'ils doivent s'attendre à moins.

Le président: Merci de votre exposé.

J'invite maintenant M. Cedric Steele à prendre la parole.

M. Cedric Steele (témoignage à titre individuel): Bonjour, monsieur le président et membres du comité. Je vous remercie beaucoup de me donner l'occasion de comparaître devant vous.

Je veux que vous sachiez que Mme Myrna Borleske a été présidente de la Chambre de commerce de notre collectivité. Elle s'est beaucoup intéressée aux militaires. Moi aussi j'ai été président de la Chambre de commerce en 1980. Donc, tous les deux nous nous intéressons à cette collectivité depuis pas mal de temps.

Je suis un homme d'affaires de l'endroit. Je m'occupe d'immobilier et de golf. J'ai participé à divers projets de notre collectivité que je sers depuis 25 ans. J'ai eu le privilège d'être nommé capitaine honoraire de la Marine canadienne, il y a un an. J'ai eu l'occasion de rencontrer un grand nombre d'hommes et de femmes de notre marine, tant à bord de nos navires qu'à terre.

• 1130

Dans mes entretiens avec les hommes et femmes des forces armées, j'ai constaté que leur plus gros souci concerne leur avenir financier, actuellement et aussi à la retraite.

Dans le secteur civil, outre les pensions, les plans d'épargne-retraite et ainsi de suite, que le personnel civil accumule, en général lorsqu'un civil prend sa retraite, son actif principal est sa résidence principale. À cause des déménagements nombreux auxquels est exposé le personnel des forces armées, ces gens-là habitent rarement suffisamment longtemps dans une collectivité pour y établir une résidence personnelle et la garder pour leurs années de retraite. La plus grande partie de la richesse accumulée par la plupart des gens réside dans leur résidence principale et le fait qu'ils peuvent la vendre sans imposition, permet à la plupart des civils de prévoir des revenus pour leurs années de retraite.

Je crois que vous devriez considérer la question du logement destiné à vos forces armées sous un angle créateur et imaginatif. Par exemple, dans notre collectivité, on trouve énormément de terrains appartenant à l'État qui sont actuellement inutilisés. Je vous propose de créer un organisme de logement sans but lucratif pour aider le personnel militaire à se doter de logements abordables.

Par exemple, une fois cet organisme à but non lucratif établi, on pourrait inventorier divers terrains immobiliers pour voir s'ils conviendraient à la construction de logements. On devrait tenir compte des terrains inventoriés et s'ils sont jugés appropriés, on devrait affecter ces terrains à la construction de logements individuels, de maisons à deux ou quatre logements et d'immeubles à logements multiples.

L'association à but non lucratif devrait chercher à obtenir de l'État un bail foncier d'une durée de 66 ans. Par conséquent, les terrains ne seraient pas aliénés, puisque les maisons et les biens reviendraient à l'État à la fin du bail. L'association pourrait alors contracter des sous-baux, pour la même durée moins un jour, avec les utilisateurs potentiels des terrains.

Je crois que la SCHL accordera 95 p. 100 du financement aux acheteurs de leur première maison, et 90 p. 100 du financement à ceux qui ont acheté une maison dans le passé.

C'est actuellement une occasion unique étant donné que les taux d'intérêt sont très bas. Par exemple, si une maison de 1 200 pieds carrés était construite sur un lot en copropriété à raison de 75 $ le pied carré, la maison coûterait 90 000 $. Avec un acompte de 5 p. 100, c'est-à-dire 4 500 $, le solde pourrait alors être financé sur une période de 25 ans à un taux d'intérêt de 6,5 p. 100, par exemple et le taux hypothécaire mensuel serait de 572 $ par mois. En outre, un montant d'achat-bail raisonnable de 125 $ par mois, par exemple, pourrait être versé. Par conséquent, le coût du logement serait raisonnable pour le propriétaire du terrain qui accumulerait un avoir de telle sorte que la propriété serait exempte de dette au bout de 25 ans.

À la fin de cette période, la propriété pourrait être louée à d'autres militaires ce qui rapporterait un revenu raisonnable aux propriétaires ou encore le reste du bail pourrait être vendu à un nouvel acheteur.

De la même manière, on pourrait construire des maisons mitoyennes, des condominiums et des duplex. De toute évidence on commencerait avec un projet de petite envergure pour en déterminer la viabilité.

Cette idée a suscité beaucoup d'intérêt de la part des gens de la collectivité—j'ai eu des entretiens avec eux—parce que cela créerait beaucoup d'emplois dans notre collectivité pour les travailleurs du bâtiment et des domaines connexes.

Ce projet réaliserait de multiples objectifs notamment en fournissant une mise de fonds à notre personnel des forces armées au moment de leur retraite. L'État en bénéficiera puisque ces maisons lui reviendraient à l'expiration du bail. En outre, je crois que le coût peu élevé du logement contribuerait à rendre le séjour sur la côte du personnel plus abordable.

Au cas où les occupants de la propriété seraient mutés sur la côte Est, l'association pourrait les aider à louer la propriété pour couvrir l'hypothèque et l'achat-bail avec peut-être un petit supplément, et un honoraire de gestion peu élevé pourrait être exigé pour couvrir les frais encourus par l'organisme à but non lucratif.

• 1135

J'espère sincèrement que vous envisagerez cette idée parmi d'autres idées créatives que pourraient présenter je crois les gens qui s'intéressent à ce que les hommes et les femmes des forces armées connaissent une qualité de vie que nous, leurs homologues civils, connaissons dans notre collectivité.

Je vous remercie de votre attention, monsieur le président.

Le président: Merci beaucoup. C'était une idée vraiment intéressante.

M. Cedric Steele: Merci, monsieur.

Le président: Le groupe a-t-il des questions à poser? Madame Venne.

[Français]

Mme Pierrette Venne (Saint-Bruno—Saint-Hubert, BQ): Il est vrai que ce serait peut-être une bonne idée, mais je me demande comment réagirait la population en apprenant qu'on se propose de construire ici tandis qu'on ferme ailleurs, comme c'est le cas à Saint-Hubert. Qu'en pensez-vous et comment pourriez-vous justifier la chose?

[Traduction]

M. Cedric Steele: Merci de la question, madame.

Je crois que l'on devrait envisager la question du logement d'un bout à l'autre du Canada et s'efforcer d'utiliser tout logement qui devient disponible à l'intention d'usagers éventuels. De même, bien des civils qui disposent d'un revenu de retraite ont bien du mal à joindre les deux bouts. Je suis d'avis que nous devrons rapprocher les militaires des civils si bien que si une base est fermée et que des logements deviennent disponibles, on devrait voir s'il n'y a pas moyen de construire un village de retraités à cet endroit-là.

Je comprends votre inquiétude et je ne m'attends absolument pas à ce que l'on favorise les gens de la côte Ouest. J'aimerais que l'on donne suite à l'idée que je vous propose d'abord en Colombie-Britannique, ou ici à Esquimalt, et si elle se révèle efficace, j'aimerais qu'on l'applique à l'armée, à la marine et à toutes sortes de personnel. J'estime donc que c'est une idée qui devrait être appliquée à toutes les forces armées.

Votre question est certainement valable. Lorsqu'on s'inquiète de la fermeture des bases, j'estime que ces dernières devraient être mises de nouveau à la disposition des civils à titre d'achat-bail où des retraités pourraient habiter sur ces bases.

Le président: Merci beaucoup.

M. Cedric Steele: Merci monsieur le président.

Le président: Madame Friessen, vous avez la parole.

Mme Anne Friessen (témoignage à titre personnel): Bonjour. Je m'appelle Anne Friessen et je suis venue ce matin pour discuter de la question du salaire et des indemnités, de mon propre point de vue. Je suis mariée à un matelot breveté Anthony Harvey Friessen, qui fait partie de l'équipage du NCSM Protecteur.

Je suis venue m'adresser ce matin à votre groupe à propos des rajustements salariaux récents reçus en décembre 1997. Je suis venue témoigner pour vous faire précisément remarquer le résultat net de l'augmentation de salaire. L'augmentation au 31 décembre 1997 se chiffre après déduction à 27,04 $. Ce montant a ensuite été augmenté en janvier 1998, par suite des redressements aux déductions au titre du RPC et de l'AE, ce qui se traduit par une augmentation nette de 31,90 $. Cette augmentation de salaire de 31,90 $ sera en outre compensée en 1998 par deux facteurs que voici:

(1) Rajustements triple A. Le récent redressement de salaire pour le personnel qui n'occupe pas de logements familiaux a occasionné une diminution de 15 p. 100. Si cette tendance se maintient pour les militaires qui occupent des logements familiaux, dans ce cas notre augmentation de salaire serait réduite de 23 $ par mois avant impôt. Le résultat net sera une réduction de 13,82 $, ce qui ramène l'augmentation de salaire à 18,8 $ par mois.

(2) Augmentation du loyer des logements familiaux. Cette augmentation pour 1988 n'a pas encore été approuvée par Ottawa. Mais, en se fondant sur l'augmentation de l'année dernière qui était de 5,36 $, l'augmentation de salaire se trouverait réduite alors à 12,72 $ par mois.

• 1140

Je voudrais en outre ajouter que le redressement de solde a simplement amélioré la qualité de vie de mon mari à bord: une solde mensuelle de 76 $, moins les frais de mess est égale à 66 $, 33 $ par jour ce qui est égal en fonds américains à 20 $ lorsque mon mari se trouve dans un port étranger, San Diego par exemple. Il n'y a eu aucun changement dans le montant en espèces servant aux fonds de ménage.

Il faut noter également l'augmentation de 60 $ de la franchise qui est passée de 40 $ à 100 $ pour notre régime de santé, ce qui a réduit encore le montant net disponible pour nos dépenses de ménage. Ces dépenses mensuelles... J'ai joint un feuillet ici et je vais vous le lire: alimentation, 200 $; électricité, 30 $; essence, 70 $; câblovision, 35 $, assurance-automobile, 65 $, dépenses médicales, 50 $, remboursement d'emprunt pour l'achat d'un ordinateur, 195 $; carte de crédit, 100 $; habillement, 100 $; loisirs, si on peut s'en permettre, 50 $; le montant total des dépenses mensuelles s'établit à 900$. Notre revenu net pour le mois de janvier 1998 s'établit à 966,82 $. Si nous acquittons une assurance-maison et une assurance-vie, il ne reste rien.

Ces dépenses ont augmenté sensiblement depuis un an et on s'attend à ce qu'elles continuent d'augmenter en 1998. On a aussi fortement recommandé que nous achetions de l'assurance-vie, ce qui coûterait environ 50 $ par mois comme je vous l'ai dit, ainsi qu'une forme d'assurance-santé, ce que nous n'avons pas pu nous permettre depuis deux ans et qui coûte environ 20 $ par mois. Ces assurances essentielles sont des dépenses que nous ne pouvons nous offrir vu notre niveau actuel de revenu.

En effet, le taux d'augmentation n'arrive pas à compenser les augmentations du coût de la vie que nous avons connues jusqu'ici et auxquelles nous nous attendons cette année. Voici la question que je vous pose: comment le gouvernement du Canada s'attend-il à ce que les militaires existent, étant donné le marché économique actuel, quand le montant net des redressements de salaire de 1997 n'atteignait que 12,72 $ par mois en 1998?

Le président: Merci beaucoup.

Quelqu'un a-t-il des questions? Monsieur Hanger.

M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est, Réf.): Que faites-vous lorsqu'il vous arrive un coup dur?

Mme Anne Friessen: Je me sers de l'argent qui devait servir à payer une autre facture.

M. Art Hanger: Je n'ai pas compris...?

Mme Anne Friessen: Comme dit mon mari j'emprunte à Pierre pour en payer Paul. Si nous avons une urgence médicale—et j'ai en fait un problème de santé—et si je dois me procurer une nouvelle ordonnance qui coûte plus que l'ancienne, je devrais puiser sur ma facture de téléphone de Colombie-Britannique ou sur le montant que je devais rembourser sur ma carte de crédit. Je devrais bien sûr rembourser ce montant le mois suivant. Nous avons à peine de quoi survivre.

M. Art Hanger: Est-ce que les services militaires vous offrent une certaine forme d'aide dans les situations critiques?

Mme Anne Friessen: On peut demander un emprunt pour parer à une crise, ce que nous avons déjà fait. Il faut rembourser ce montant d'ici un mois et on ne peut pas en demander un autre prêt. On ne pourrait pas d'ailleurs se le permettre, même si c'était possible.

M. Art Hanger: Merci.

M. David Pratt (Nepean—Carleton, Lib.): Monsieur le président, les témoins qui lisent leurs témoignages pourraient peut-être fournir leurs notes au greffier. Ces remarques contiennent des détails dont nous aimerions disposer intégralement pour rédiger notre rapport.

Le président: Vous serait-il possible de remettre au greffier les notes dont vous vous êtes inspirées pour votre témoignage?

Mme Anne Friessen: Bien sûr.

Le président: Merci.

Y a-t-il d'autres questions? Non?

Merci infiniment, madame Friessen.

Mme Anne Friessen: Merci.

• 1145

Le président: J'invite maintenant le caporal G.H. Berard à prendre la parole.

Le caporal G.H. Berard (témoignage à tire personnel): Bonjour. Je m'appelle Gwen Berard. Je suis caporal au Bureau du génie construction de la base ici à Esquimalt. Je suis dans les forces armées depuis seize ans, soit neuf ans et demi aux communications et sept ans en qualité de technicienne des procédures de génie construction, et maintenant je fais partie du nouveau groupe des métiers de gestion des ressources.

Je suis chef de famille monoparentale depuis sept ans, soit depuis mon divorce. J'ai deux enfants, un de sept ans et demi et l'autre de deux ans et demi; manifestement, il y en a un autre qui s'en vient ce printemps. Mes sujets de préoccupation concernent uniquement la famille—la famille occupe tout mon temps lorsque je ne suis pas au travail—et les aspects financiers qui limitent la qualité de notre vie et notre accès au mode de vie auquel nous avons droit.

En ce qui concerne nos soucis financiers, avant ma mutation à Esquimalt, j'étais affectée à Chilliwack. J'étais propriétaire de ma propre maison et je pouvais me permettre de petites vacances et des excursions de camping avec mes enfants. Aujourd'hui, j'habite dans un logement familial où il n'y a pas de sous-sol ni de locaux de rangement et je loue un garage pour entreposer mes choses. Je ne peux plus me permettre d'excursions de camping.

Mon revenu disponible est consacré à la nourriture et au transport entre mon logement et le bureau. Je suis incapable de constituer un plus important versement initial pour l'achat d'une autre maison ni de planifier pour ma retraite.

Mon hypothèque à Chilliwack, taxes, chauffage et électricité compris, était moins de 700 $ par mois. Ma demeure se trouvait à moins de trois kilomètres de la base. C'était très pratique. Aujourd'hui, je paye 706,93 $ par mois en plus du chauffage et de l'électricité, sans ne rien retirer à long terme, pour un logement familial qui est inférieur aux normes de logement social de la Colombie-Britannique.

Sur le continent, le pain se vendait 69c. Ici à Victoria, s'il y a moyen de le trouver à un prix spécial, il coûte 1,09 $ ou plus. Tout coûte plus cher à Victoria—tout.

L'indemnité d'aide au logement est une prestation très importante pour les militaires qui sont mutés dans des régions où la vie est chère, mais elle ne permet pas d'absorber toutes les conséquences économiques pour une famille. Ceux qui achètent une maison n'ont pas droit à ces prestations et c'est pourquoi ils n'ont vraiment pas le goût d'acheter une maison ou d'investir dans leur avenir.

Une rémunération d'adaptation à l'économie qui viserait d'autres choses que simplement le logement aiderait beaucoup à surmonter ces difficultés. Je ne sais pas combien d'entre vous le savent, mais l'indemnité d'aide au logement que reçoit un officier supérieur est plus élevée que celle d'un simple soldat. Les gens dont les salaires sont les moins élevés touchent les prestations les moins élevées qui sont offertes au titre de l'aide au logement.

L'indemnité d'aide au logement est versée pendant le congé de maternité, mais dès le début du congé parental, à la fin du congé de maternité, ces prestations cessent. Le complément salarial qui est versé aux militaires en congé de maternité est supprimé lui aussi à la fin du congé de maternité et au début du congé parental. Pendant nos dernières semaines à la maison avec notre enfant, notre solde est amputée de 30 p. 100.

Quant aux problèmes qui concernent la famille, je suis un parent seul. Je n'ai pas de conjoint qui puisse assumer une part des tâches et des engagements que représente le soin d'un enfant. Pour travailler, je dois embaucher un étranger qui prend soin de mes enfants le jour. Lorsque je suis affectée à une mission où je dois partir seule outre-mer, au Québec, à Winnipeg—en fait n'importe où au Canada ou dans le monde—, je dois laisser mes enfants entre les mains d'étrangers, parfois dans la maison d'un étranger.

De plus, un de mes enfants a des problèmes neurologiques qui se manifestent par différentes formes de crises. Je ne puis pas embaucher le premier venu. Il me faut quelqu'un qui a des connaissances médicales.

Pendant la période de congé de 1996-1997, j'ai consacré 17 de mes 25 jours de vacances à des rendez-vous chez le médecin avec mes enfants. Les employés du MDN ont le droit de demander des congés en tranches de 15 minutes. Les militaires ne peuvent demander moins d'une journée. Si nous avions droit à un congé d'une demi-journée, cela nous aiderait beaucoup à nous servir de nos congés de la même manière que les autres.

Lorsque nous retournons au travail après la naissance, l'enfant a moins de six mois. Les sociétés canadiennes et américaines de pédiatrie recommandent que l'enfant passe un an avec sa mère. Ce que je crains le plus lorsque je retourne au travail, c'est d'être mutée loin de mon enfant pour un cours ou une mission. Je m'expose à des sanctions sur le plan de ma carrière si mon premier souci est de veiller à ce que mon enfant reçoive l'alimentation et les antibiotiques qu'il lui faut pour combattre la maladie et si j'essaie d'épargner encore 150 $ par mois pour ma famille afin de payer le lait maternisé.

Il y a environ un an, on a annoncé que les parents seuls pouvaient demander le remboursement des frais de garde d'enfant dans certaines circonstances. À ma connaissance, l'admissibilité à ce remboursement n'a jamais été clairement définie. J'ai essayé de me faire rembourser ces frais dans différentes circonstances mais on m'a toujours répondu que qu'ils n'étaient pas remboursables.

• 1150

D'autre part, pourquoi les militaires mariés à un autre militaire ou à un civil n'ont-ils pas droit à ce remboursement. Puisqu'il ne s'applique qu'aux parents seuls, il faut croire que le conjoint est corvéable à merci lorsque les Forces canadiennes ont besoin des services du militaire.

Si jamais je suis envoyée en mission, il me faudra des services de garde 24 heures sur 24 pour mes enfants. Selon la loi de la Colombie-Britannique et des autres régions du Canada, les travailleurs des services à l'enfance doivent recevoir au moins le salaire minimum. Ici, il est de 7 $ l'heure et il va passer bientôt à 7,15 $ l'heure. On doit payer également les heures supplémentaires au taux majoré de moitié et au taux double, la paye de vacance, les avantages sociaux et les impôts. Les services ordinaires de garde d'enfants coûtent 1 232 $ par mois. Si je suis envoyée en mission, je devrai débourser trois fois ce montant; si je ne procédais pas ainsi, je laisserais mes enfants entre les mains d'une personne pendant une période qui dépasse celle que permet la loi. Cela représente presque 4 000 $ par mois pour la garde des enfants. Ma solde brute s'élève à 3 200 $.

La crainte que je sois séparée de mes enfants d'âge préscolaire est une chose qui se répercute quotidiennement sur la qualité de ma vie. Je comprends que l'on puisse dire dans l'armée que quiconque ne peut être muté ne peut être employé, mais je serais très heureuse d'être mutée souvent à des endroits moins populaires où je pourrais rester avec mes enfants, plutôt que de me faire dire par un gestionnaire qu'elle va m'envoyer en mer dans l'année qui suit la naissance pour qu'elle puisse me garder ici à Esquimalt.

Lorsqu'elle est mutée, une famille militaire peut comprendre un conjoint serviable qui conduira la voiture pendant une partie du trajet, qui aidera les enfants à s'accorder et qui fera sa part pour amuser les enfants dans les chambres d'hôtel le soir. Essayez de faire tout cela seul. Une fois arrivé à destination, le conjoint s'occupe du déballage de toutes les choses dans le nouveau logement et ne cherche un emploi qu'après avoir pris les dispositions nécessaires pour assurer la garde des enfants. Les parents seuls ne peuvent compter là-dessus. Nous arrivons à destination et il nous faut des services de garde avant l'arrivée des déménageurs, car lorsqu'il y a des enfants qui courent dans la maison pendant que les déménageurs sont là, c'est l'enfer. Puis nous devons surveiller le déballage, tout mettre en place, repasser nos uniformes, trouver des services de garde permanents et nous présenter à notre nouveau poste plein d'enthousiasme et d'énergie. C'est beaucoup demander.

On peut très difficilement aller voir son patron et dire: «Voilà trois jours que je suis ici, mais il me faudrait encore un jour de congé pour que je puisse mettre de l'ordre dans ma cuisine afin de pouvoir préparer le petit déjeuner le matin». Il vous fixera et dira: «Vous demandez un traitement spécial parce que vous êtes parent seul». Il n'y a pas de temps prévu pour le déballage.

Je vais vous énumérer très rapidement certains des grands sujets de préoccupation d'ordre systémique. Il faut toute une journée pour se faire attribuer la catégorie médicale de militaire enceinte et ensuite pour se faire retirer de cette catégorie. Vous êtes enceinte depuis quatre mois et cela commence à paraître, mais ils doivent confirmer que vous êtes vraiment enceinte. Cela prend toute une journée. Ils vous font subir un test de l'ouïe et de la vue et ils notent votre taille et votre poids. La seule chose qui a changé dans mon cas est mon poids, et je ne vous en dirai pas plus là-dessus.

Il doit y avoir une manière plus simple de procéder. Les uniformes de maternité sont mal ajustés, ils sont difficiles à repasser, leur nettoyage à sec coûte cher et ils ne conviennent que pour le bureau. Nous avons besoin d'autres choses à porter. Lorsque l'on reprend le travail, on sort de la penderie le même uniforme qu'on a reçu lorsqu'on avait 19 ans et on l'enfile. Après le troisième enfant, cet uniforme ne tombe pas tout à fait aussi bien et il ne convient pas du tout à une mère qui a repris le travail mais qui allaite son enfant. Nous avons des soutiens-gorge à bonnets ouverts, des tampons pour l'allaitement et un tour de taille qui n'est plus le même.

Pour terminer, cette dernière mutation a bouleversé ma vie et la vie de ma famille. Nous adorons la région mais les coûts font que nous ne sommes pas en mesure d'apprécier beaucoup ce qu'elle a à offrir. Je dois débourser plus pour un logement de moins bonne qualité et pour les nécessités comme la nourriture, le chauffage et le transport. Je peux me tirer d'affaire pour ce qui est du logement, mais il me faut une allocation raisonnable pour que ma famille puisse avoir un mode de vie acceptable, comme dans les autres bases.

L'enseignement privé dont jouissait mon enfant aux autres bases est un luxe impossible ici, tout comme les leçon de danse, de gymnastique ou d'équitation. Je dois m'en remettre à une subvention provinciale pour subvenir aux besoins spéciaux de mon fils à la garderie. Ici, je crains davantage d'être séparée de mes enfants. Je veille toujours à mon épanouissement professionnel dans les forces armées en poursuivant des études en sciences militaires au niveau du baccalauréat au Collège militaire royal et en me portant volontaire à des programmes comme celui-ci.

Pendant la plus grande partie de leur carrière dans les Forces canadiennes, les femmes sont en âge de procréer. Les forces armées de demain doivent considérer la famille comme partie intégrante de la vie d'un militaire. J'ai voulu décrire quelques-uns des aspects injustes de l'allocation de l'indemnité d'aide au logement, les lacunes du congé parental sur le plan financier et les conséquences pour la vie professionnelle des parents seuls des orientations de carrière que peut adopter le militaire. Je vous en fournis une version écrite. Je répondrai volontiers à vos questions.

Merci beaucoup.

Le président: Merci infiniment. Avez-vous droit aux prestations d'assurance-emploi lorsque vous êtes en congé de maternité.

• 1155

Cpl G.H. Berard: Lorsque nous sommes en congé de maternité, nous recevons des prestations d'assurance-emploi correspondant à 55 p. 100 de la solde pendant le congé de maternité et le congé parental. Pendant le congé de maternité, nous recevons un complément salarial qui porte notre revenu à 93 p. 100 de la solde. Dès le premier jour de congé parental, ce complément est supprimé, tout comme l'indemnité d'aide au logement.

Le président: Merci.

Le lieutenant-commander Jean Lavallée.

Le lieutenant-commander Jean Lavallée (maire, Conseil communautaire de Work Point): C'est avec une grande fierté que je vous souhaite à tous la bienvenue à la communauté Work Point. Comme on l'a indiqué, je suis le lieutenant-commander Jean Lavallée, maire de cette communauté.

Au nom des habitants de Belmont Park et de Work Point, je vais vous parler aujourd'hui des questions qui les préoccupent et des divers problèmes que nous rencontrons.

Pour ce qui est des compressions budgétaires que la BFC Esquimalt a subies depuis 1995, celles-ci ont eu des répercussions directes sur la qualité de la vie des résidants des logements familiaux. Nous avons été témoins d'une réduction générale du degré d'entretien de nos installations communes, par exemple les terrains de jeu et les commodités semblables. Il est évident que le budget restreint qui est confié au commandant de formation a bien souvent un impact direct sur les diverses commodités que les conseils communautaires essaient de mettre à la disposition des habitants.

D'autre part, quant aux améliorations que le Bureau du logement des Forces canadiennes apporte à nos habitations, il en résulte bien souvent une augmentation de la valeur ou de la qualité de nos logements familiaux, mais en bout de ligne, les militaires les paient parce que le loyer des logements familiaux augmentera.

Comme la plupart d'entre vous le savent sans doute, les municipalités touchent des versements tenant lieu d'impôts. Toutefois, les communautés de logements familiaux comme la notre n'ont pas pu compter sur les mêmes types de commodités que les habitants de Colwood ou d'Esquimalt ont à leur disposition. Il s'agit par exemple de trottoirs, de terrains de jeu convenablement entretenus et gérés ou d'installations communautaires pour les habitants.

La première préoccupation de tous est le coût de l'habitation, qu'il s'agisse d'un logement militaire, d'un logement dans le milieu civil ou du marché de l'immobilier. On va nous annoncer au début du mois, comme certains l'ont déjà mentionné, que notre indemnité d'aide au logement sera réduite en janvier 1998, au même moment où le Bureau du logement des Forces canadiennes va annoncer une augmentation des loyers des logements familiaux.

Pour vous situer un peu, je vous rappelle que l'augmentation des loyers des logements familiaux est fondée sur la valeur marchande des logements selon les analyses de la SCHL et sur les directives du Conseil du Trésor selon lesquelles les loyers des logements familiaux doivent, d'ici à la fin du siècle, être établis selon la valeur marchande. Voici ma question: Si nous devons payer la valeur marchande pour nos logements, quand notre rémunération va-t-elle correspondre à la valeur marchande?

De plus, les gens qui louent un logement dans le milieu civil ont un recours s'ils veulent contester une augmentation de loyer, contrairement aux résidants des logements familiaux.

L'année dernière, pour faire progresser tous les dossiers concernant les logements familiaux, la base a examiné la possibilité de regrouper tous les logements familiaux dans un seul secteur. Le plan était sérieux, mais il avait deux grandes lacunes. Premièrement, les loyers des logements familiaux pourraient augmenter considérablement et, deuxièmement, ces logements auraient été construits selon les normes établies pour les logements sociaux.

• 1200

Comme on peut l'imaginer, ce projet aurait obligé encore plus de résidants à demander l'aide sociale pour parvenir à joindre les deux bouts. De plus, à cause des normes de logement qui ont été retenues, le projet n'était certainement pas de bon augure pour ce qui est de la fierté de nos membres. Tout compte fait, les résidants en ont conclu que les règles auxquelles nous sommes assujetties aujourd'hui nous condamnent à l'immobilisme.

On pourrait demander: y a-t-il une issue? Serait-ce la régionalisation de la solde et des allocations des militaires? S'agit-il d'accorder au Bureau du logement des Forces canadiennes la marge de manoeuvre lui permettant de se réaliser pleinement? S'agit-il d'accorder aux commandants des bases la même liberté d'action pour gérer les terrains que pour gérer toutes les autres ressources qui leur sont confiées, ou s'agit-il de commercialiser ou de privatiser tout simplement les logements familiaux? Quel que soit le modèle adopté, le résultat net, espère-t-on, sera l'allégement du fardeau financier des résidants des logements familiaux et de tous les militaires habitant dans la région de Victoria.

Monsieur le président, le moral de nos familles a atteint un bas que je n'ai sans doute jamais vu au cours de mes quatorze ans de carrière. Depuis un an ou deux, nous entendons nos chefs parler des nombreuses initiatives visant à alléger ces difficultés financières, mais aucune de ces initiatives n'a débouché sur les types de mesures et de possibilités qu'ils voulaient voir apparaître. Monsieur, votre comité est considéré comme étant un élément essentiel pouvant permettre de réaliser ce que nos chefs dévoués et sincères n'ont pas pu réaliser. Je vous le dis franchement, on voit en vous notre dernier espoir.

Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité, je vous remercie infiniment de m'avoir écouté.

Le président: Merci beaucoup.

Je crois que M. Richardson a une question.

M. John Richardson (Perth—Middlesex, Lib.): Je vous remercie, monsieur le président.

Merci infiniment, lieutenant-commander, de nous avoir fait part de vos vues en votre qualité de maire de la région de Work Point.

Vous soulevez ici un point qui est encore confus dans mon esprit et qui est certainement encore confus dans l'esprit des gens qui vous versent votre solde. Je veux parler de la valeur marchande. Vous avez dit je crois que votre solde devrait correspondre à la valeur marchande établie pour votre loyer, mais recevez-vous la valeur marchande pour les services que vous offrez, pour les heures que vous passez au travail, dans l'ensemble, par rapport à ce que touchent les civils dans des métiers semblables? Voilà des choses qui étonneraient vraiment beaucoup de gens à Ottawa, lorsque l'on pense que nos militaires passent peut-être 200 jours en mer, 24 heures sur 24, éloignés de leur famille, comparativement à d'autres métiers professionnels et semi-professionnels que l'on retrouve dans la marine. Selon moi, nous devons tout mettre en oeuvre pour peser ces choses sur le plan de la valeur, parce que j'ai l'impression que les grattes papier du Conseil du Trésor et dans d'autres bureaux ne font qu'une évaluation sommaire et ne savent vraiment pas combien de temps vous passez en fait au travail et à servir la population, par exemple à titre de maire, qui est du temps que vous donnez. C'est du bénévolat et je le reconnais.

C'est un calcul que nous devons parvenir à ramener à ce qui est strictement essentiel. Si quelqu'un pouvait y arriver et nous l'expliquer, ce comité jouirait d'une crédibilité qui lui permettrait de faire augmenter le revenu réel. Si l'on vous impose ce qui, selon eux, sont des loyers réalistes, ils pourraient les faire entrer dans la balance: «permettez-nous de garnir un peu notre bourse et nous pourrons payer des loyers en proportion du revenu réel que nous touchons, mais nous ne touchons pas le revenu réel qui correspond à nos heures de service».

• 1205

C'est tout ce que j'avais à dire. Pour pouvoir prétendre que nous ne recevons pas notre juste part, il faudrait trouver une équation plus réaliste.

Merci beaucoup.

Le président: Le capitaine Dave Wong, s'il vous plaît.

Le capitaine Dave Wong (officier, travailleur social de la base, Forces maritimes du Pacifique, Esquimalt): Bonjour.

On m'a demandé de vous parler des stress auxquels sont soumis nos membres et leurs familles. J'ai préparé un mémoire écrit dont je vais vous présenter les points saillants, en espérant que vous aurez le temps de le lire en détail plus tard.

Voici une liste des sources d'anxiété dont on nous parle, et dans mon bureau et dans les bureaux des autres services de soutien qui existent à Esquimalt: insuffisance de ressources financières personnelles; les difficultés qu'éprouvent les conjoints et conjointes qui cherchent de l'emploi; le coût du logement; un malaise dû à la perception que son emploi est moins sûr qu'il ne l'était; des exigences de réadaptation constante dues aux nombreuses réorganisations; les changements apportés aux règles et aux programmes, ainsi que les compressions; la diminution des chances d'avancement et de perfectionnement professionnel; la compression des effectifs, qui signifie qu'il y a moins de personnel pour effectuer le même travail ou même un travail accru, augmentation qui est parfois due aux changements eux-mêmes; moins de soutien organisationnel pour les besoins personnels et familiaux; l'absence d'une mission, d'objectifs et de rôles bien définis; un leadership inadéquat, et l'impression contradictoire que le service des membres des forces armées est apprécié par le gouvernement et la population, mais pas suffisamment pour leur donner le personnel et les ressources dont ils ont besoin pour exécuter leurs tâches, ni la rémunération, les avantages ou la sécurité d'emploi nécessaires à la constitution d'une vie familiale normale pendant qu'ils essaient de répondre aux exigences du service.

Voici les effets que nous constatons: la crainte et l'anxiété généralisées; la colère et la frustration généralisées; les maladies psychosomatiques; la dépression; des cas de maladies ou de blessures auto-infligées ou de suicide; la violence conjugale; le recours aux substances nocives; la violence envers les enfants; des problèmes de comportement et des problèmes à l'école chez les enfants; la détresse financière; la discorde conjugale; un sens profond d'impuissance et de désespoir; le sentiment d'être isolé des communautés et du soutien des familles élargies; moins de motivation et de dévouement au devoir.

J'aimerais vous parler un petit peu de ce dernier point. Je pense que cela découle du leadership du gouvernement. Certains de nos chefs adoptent une éthique du chacun pour soi et du débrouillez-vous. On s'attend à ce que les subalternes traitent et règlent leurs propres problèmes et ceux qui n'y arrivent pas sont dénigrés, on leur impose des ultimatums déraisonnables, on les menace ou on verse des avertissements à leur dossier, on les envoie en counselling, ils sont mis en probation, ou renvoyés. Je pense que c'est attribuable au fait qu'il y a déjà trop de travail pour le personnel existant et les unités ne peuvent tout simplement pas se permettre de perdre quelqu'un à qui on accorderait une affectation pour motifs personnels; les unités ne peuvent même pas affecter les ressources nécessaires pour résoudre les problèmes.

Vous devez comprendre que le militaire est un homme d'action, par définition; nous avons l'habitude de toujours faire tout ce que nous pouvons; nous faisons ce qu'on nous dit de faire, quand on nous dit de le faire.

Certains chefs désirent aussi donner l'impression que leurs départements n'ont pas de problèmes pour qu'on estime qu'ils sont des gestionnaires compétents qui gèrent de bons départements. Trop souvent, un bon département, un bon membre des forces armées est jugé comme tel non pas selon la qualité et la quantité du travail effectué, mais en fonction de la présence ou de l'absence de problèmes. Tous nos leaders ne deviennent pas aussi durs. Certains d'entre eux croulent tout simplement sous l'énorme pression des tâches et autres attributions qui réduisent leur capacité décisionnelle quand il s'agit d'aider, de demander de l'aide ou de défendre leurs subalternes. Ainsi, ils passent le ballon, en espérant que d'autres résoudront les problèmes de la division, prendront les décisions qui s'imposent ou prendront la part de leurs membres à leur place.

Certains craignent outre mesure que leurs décisions seront suivies d'un tollé ou craignent simplement de ne pas prendre la meilleure décision possible. Ils sont habités par cette crainte parce que la culture des Forces canadiennes de nos jours en est une où trop souvent, on monte en épingle la mauvaise gestion et on n'entend presque jamais parler de la bonne gestion, tant et si bien que l'on récompense la négativité et la critique. Ces chefs évitent de prendre des décisions et choisissent l'ignorance passive jusqu'à ce que leurs subalternes quittent les FC ou deviennent des fardeaux administratifs qui doivent être éjectés. Cela ne signifie pas que le système divisionnel soit en train de s'effondrer, car dans la vaste majorité des cas ce système fonctionne fort bien, répond aux besoins et permet de faire preuve de compassion. Malheureusement, on voit de plus en plus de cas d'échec du système, suffisamment pour éclipser les autres cas, les réussites du système.

• 1210

Quelles sont les solutions qu'il nous faut? Au niveau organisationnel, il faut que le gouvernement définisse en termes concrets et précis ce qu'on attend des familles et des militaires individuels. Quelle doit être la durée des affectations en mer des marins? Veut-on que les militaires prennent leurs congés en fonction des exigences du service ou risquer de les perdre, plutôt qu'à leur convenance, à un moment où ces congés pourraient avoir un effet bénéfique? Les familles doivent-elles s'attendre à ce que les militaires soient plus souvent loin d'elles, et doivent-elles dépendre de soutiens moins nombreux pour les aider à survivre pendant que leur conjoint ou conjointe militaire est ailleurs?

Les membres et les familles ont besoin de connaître précisément ce qu'on attend d'eux, les limites de ces attentes, et ils ont besoin que l'on reconnaisse que ces attentes existent. Ils ont besoin qu'on définisse en termes concrets ce qu'on entend par une qualité de vie satisfaisante. Plutôt que d'avoir à vous dire ce qu'il nous faut, il faut que vous nous disiez ce que vous estimez être une qualité de vie satisfaisante, et que vous définissiez ce à quoi on peut s'attendre dans le cadre de ce contrat social.

Il nous faut une méthode qui nous permette de mesurer où nous en sommes en ce qui a trait à ce contrat social, et la qualité de vie, pour que nous puissions voir si nous progressons vers l'atteinte des normes que vous aurez spécifiées. C'est important parce que la recherche en remaniement des organisations montre que sans méthode permettant de mesurer et d'évaluer ces initiatives, 57 p. 100 d'entre elles sont vouées à l'échec.

Au niveau individuel, il faut que nous reconnaissions que le personnel des Forces canadiennes et leurs familles souffrent de dépersonnalisation, des obstacles que l'organisation impose à leur réalisation personnelle, ainsi que du manque d'estime de soi qui s'ensuit.

Chose plus importante, il faut que le gouvernement donne suite rapidement aux observations des soldats et montre ainsi qu'il les a écoutés. Trop souvent, on interroge les militaires, on recueille leurs commentaires, puis on étudie les résultats pendant très longtemps; par la suite, les membres constatent qu'on fait fi de leur avis et que les chefs du gouvernement font ce qu'ils voulaient faire au départ.

Voici quelques remèdes que les membres et leurs familles m'ont proposés, ainsi qu'à mes collègues:

Il faudrait certainement une augmentation de la paye et des allocations; vous devez savoir que les dernières augmentations salariales étaient minimes et n'ont fait que mettre en colère les bénéficiaires. Il faut restructurer les échelles salariales des soldats pour inclure un plus grand nombre de primes d'encouragement, afin de compenser l'absence d'occasions d'avancement.

Il faut mettre la responsabilité des compressions budgétaires et des restructurations organisationnelles entre les mains des militaires en leur donnant la possibilité de concevoir et de mettre en oeuvre des mesures d'économie.

Nous avons de fait essayé cette approche ici à Esquimalt en ce qui a trait à la section de l'approvisionnement de la base. Les gestionnaires et les travailleurs ont uni leurs efforts pour atteindre des objectifs d'économie et d'efficience. Le résultat a été que le service d'approvisionnement de la base est devenu le service le plus efficient, non seulement de toutes les FC mais aussi du gouvernement. Toutefois, malgré le moral accru, le sentiment d'accomplissement et l'amélioration de l'estime de soi chez ceux qui avaient agencé cette réussite, on a fait des modifications en faisant venir des choses d'ailleurs, et leurs gains ont été perdus.

Il faut trouver le moyen de mieux reconnaître le bon travail et l'atteinte des normes. Les soldats arborent fièrement et visiblement certaines médailles d'honneur en tant que symbole de leurs réalisations personnelles. Il y a d'autres programmes excellents comme le programme de vols aériens pour les militaires qu'on estime méritants. Mais il y en a simplement trop peu pour qu'ils soient des éléments de motivation tangible.

Il faut réduire le recours aux experts-conseils de l'extérieur des forces armées. Chaque fois qu'on fait appel à eux, on fait comprendre aux militaires qualifiés qu'on ne reconnaît pas leurs qualifications, qu'elles ne sont pas appréciées à leur juste valeur ou que l'administration n'a pas confiance en leurs compétences.

Je vais vous citer un exemple en faisant allusion encore une fois au service d'approvisionnement de la base. Mon collègue a préparé un programme, l'a mis en oeuvre et a obtenu d'excellents résultats. Le QGDN a estimé que ce programme était excellent, l'a adopté et l'a remis entre les mains d'un expert-conseil; l'exécution de ce programme coûte maintenant 12 fois ce qu'il en aurait coûté de détacher son concepteur au quartier général pour mettre en oeuvre ce programme, en le remplaçant pendant son absence.

On vous a déjà parlé des besoins en matière de logement. Il faut aussi rénover les logements familiaux pour en faire des coopératives de logement. Ce sont les résidants qui, généralement, savent ce qui vaut mieux pour leurs collectivités, des services d'entretien et de réparation jusqu'aux améliorations et installations qui rendent la vie plus agréable.

• 1215

Trop souvent, on ne fait pas cas de l'avis des résidants. C'est ce qu'on a pu voir à Aldergrove, où les résidants ont conseillé au BLFC d'installer au moins, des lampes thermiques à l'intérieur de trois logements familiaux vacants. On a fait fi de leurs conseils et il faut maintenant dépenser 40 000 $ par unité en réparations pour que ces maisons soient à nouveau habitables; cela ne se fera pas.

Il faut un programme de voyage pour que les familles puissent maintenir le contact avec les autres membres de leur famille et avec les enfants dont ils n'ont pas la garde. J'ai pris connaissance d'un programme il y a quelques années qui permettait aux militaires américains et à leur famille postés en Europe de se rendre n'importe où aux États-Unis en avion pour 99 $. Des militaires canadiens en ont aussi profité. Si nous avions un programme semblable ici qui permettait à nos militaires de se rendre n'importe où au Canada par avion ou même par autobus ou par train, les compagnies de transport civil auraient ainsi l'occasion de montrer qu'elles apprécient les contributions des militaires canadiens.

Dans la même veine, si on pouvait étendre le programme des escomptes pour les militaires et inclure le CANEX... Notre système d'échange des Forces canadiennes n'est même pas jumelé au programme instauré par la Chambre de commerce de Victoria qui nous accorde des escomptes. Les commerçants membres de la Chambre de commerce de Victoria qui participent à ce programme manifestent ainsi leur appréciation pour les services que nous fournissons à la collectivité.

Il faudrait aussi prolonger, afin de faciliter tout effort de transition, le programme de fonds de recyclage destiné au lancement d'une deuxième carrière pour qu'on puisse y avoir recours un peu plus longtemps que pendant l'année suivant le départ des forces armées.

Il faudrait aussi assouplir la politique des FC pour permettre aux militaires qui veulent absolument partir de le faire.

Il faudrait un programme d'aide aux employés destiné aux conjoints.

On pourrait aussi envisager d'admettre d'autres personnes au programme de recyclage outre ceux ou celles qui reçoivent des prestations d'assurance-emploi.

Un programme de protection de l'emploi est nécessaire pour les réservistes pour qu'ils puissent se joindre à nous et être formés et disponibles; ainsi, quand les commandants doivent doter des postes pour que certains membres de leur effectif puissent prendre des congés, les réservistes pourraient les remplacer du moins pour une période temporaire.

Pour conclure, je dirais que nous devons reconnaître que nous sommes un service extrêmement stressé à l'heure actuelle qui est en mal de stabilisation. À long terme, cette stabilisation doit provenir de nos chefs. Dans l'immédiat il nous faut quelques programmes pour nous aider à survivre au stress auquel nous sommes soumis à l'heure actuelle.

Je vous remercie.

Le président: Capitaine, le comité pourrait-il avoir une copie de vos notes?

Capt Dave Wong: Bien sûr.

Le président: Les membres du comité ont-ils des questions à poser? Madame Venne.

[Français]

Mme Pierrette Venne: Considérez-vous que dans les forces, les problèmes de violence conjugale, d'alcoolisme et d'autres toxicomanies, qui découlent finalement de problèmes financiers, sont comparables à ceux qui se vivent dans la société civile en général?

[Traduction]

Capt Dave Wong: Le problème, madame, c'est que je ne peux vous relater que des cas particuliers. Des méthodes existent à l'heure actuelle pour qu'on puisse mesurer ces éléments et les comparer à la population civile, mais je ne dispose tout simplement pas des ressources—c'est aussi le cas de mes collègues—pour recueillir ces données qui nous permettraient de dire si le phénomène est plus fréquent ou plus aigu chez nous que parmi la population civile.

Je ne pense pas que ce soit le cas, bien que cette opinion soit très personnelle. C'est aussi, par contre, l'opinion de mes collègues. Certains pensent que c'est même un peu moins élevé puisque nous sommes un peu plus protégés, mais je ne peux pas vous citer de chiffres.

[Français]

Mme Pierrette Venne: Merci.

[Traduction]

Le président: Monsieur Hanger.

M. Art Hanger: Capitaine, j'ai apprécié votre longue liste. Je pense que vous avez su mettre en lumière un certain nombre de domaines dont on ne nous avait pas encore parlé jusqu'à présent.

Je suis curieux à propos d'une des choses auxquelles vous avez fait allusion, soit la référence aux congés. Vous avez dit que si vous n'acceptiez pas de prendre ces congés à des moments bien précis, vous les perdiez.

• 1220

Capt Dave Wong: Oui, monsieur. La politique sur les congés a été modifiée. Auparavant, nous pouvions accumuler nos congés non pris. Maintenant, nous ne pouvons accumuler pendant toute notre carrière que 25 jours de congé, en raison de cinq jours par année, sur autorisation des instances supérieures et seulement en expliquant pour des raisons opérationnelles nous n'avons pas pu prendre nos congés pendant les périodes prescrites.

M. Art Hanger: Vous parlez donc davantage de l'aspect cumulatif?

Capt Dave Wong: Le fait est, monsieur, que si nous ne prenons pas nos congés, nous les perdons à moins que nous puissions démontrer à notre commandant que nous n'avons pu le faire en raison des besoins du service.

M. Art Hanger: Oui, d'accord, je vous remercie.

J'ai une autre question au sujet des différents modes de prestation de services. Vous avez cité un exemple aux services d'approvisionnement de la base. Vous avez parlé de la façon dont vous êtes parvenu à en accroître l'efficience et des différents modes de prestation de services.

Capt Dave Wong: Les différents modes de prestation de services font leur apparition. Je n'en connais pas les détails. Mon collègue et partenaire de bureau Phil Katie travaillait en collaboration avec les services d'approvisionnement de la base là-dessus. D'après ce que j'ai cru comprendre, une bonne partie du travail qu'ils accomplissaient est maintenant confiée à des sous-traitants.

M. Art Hanger: Je crois comprendre que la sous-traitance a permis d'accroître l'efficacité partout à la défense. Comment évaluer l'efficience dans un domaine, même en ce qui a trait par exemple aux services d'approvisionnement de la base? Quel peut être votre point de comparaison?

Capt Dave Wong: Monsieur, il faudrait que vous posiez la question aux gens qui leur ont dit qu'ils étaient les plus efficients au sein du gouvernement. C'est une équipe de l'extérieur qui a évalué leur travail. J'ignore sur quels critères ils se sont fondés.

M. Art Hanger: Très bien. Je vous remercie.

Le président: Monsieur Pratt, la parole est à vous.

M. David Pratt: Je vous remercie, capitaine Wong, de ce que je crois être un exposé très exhaustif et très bien conçu.

Pour résumer vos impressions, et d'un point de vue organisationnel, je ne veux pas vous faire dire ce que vous n'avez pas dit, mais diriez-vous que les Forces canadiennes à l'heure actuelle sont aux prises avec de graves problèmes ou qu'elles sont dans une situation critique?

Capt Dave Wong: Je parlerais d'une organisation dans une situation de crise plutôt que d'une organisation aux prises avec de graves problèmes. Je dis cela parce que, en partie, beaucoup de militaires... Vous devez comprendre que je vois beaucoup de ces formulaires portant le titre «Pathologie». Je consacre probablement 65 p. 100 de mon temps à le faire. Cependant, au fil de mes rencontres avec d'autres membres des forces armées dans le cadre d'ateliers et d'exposés, j'en ai déduit que la situation est grave mais qu'on peut y remédier. Les membres des forces armées veulent qu'on trouve une solution et sont disposés à faire tout ce qu'il faut pour cela. À ce bout-ci du pays, nous avons à coup sûr la volonté de trouver une solution et d'atténuer les problèmes.

Le président: Bob.

M. Bob Wood (Nipissing, Lib.): J'ai trouvé intéressant, capitaine, que vous nous demandiez de définir la qualité de la vie. Je crois que vous vous en êtes tiré avec brio de suite après lorsque vous avez dit que vous vous attendiez à ce que nous trouvions les réponses. Je pense que vous venez tout juste de nous les donner.

Je voulais que nous approfondissions une ou deux choses. J'ai pris note d'un ou deux points. Vous avez parlé d'ajouter des niveaux aux primes d'encouragement. Pouvez-vous nous donner des précisions? Avez-vous réfléchi à la question?

Capt Dave Wong: Monsieur, les niveaux de primes d'encouragement des militaires du rang ont fait l'objet d'un certain nombre de discussions. Un groupe de travail s'est penché récemment sur la question et a rejeter l'idée simplement parce qu'elle était trop coûteuse.

La situation à l'heure actuelle c'est que les militaires du rang ont au maximum, je crois, quatre niveaux de primes d'encouragement. En fin de compte, on parle de niveaux d'environ 25 $ par mois. Pour certains militaires cela ne posait pas de véritable problème étant donné qu'ils considéraient les promotions comme un moyen d'augmenter leur salaire. Mais ils disent de plus en plus qu'il n'y a plus d'avancement. Comme, ils sont plus nombreux à se retrouver au sommet, il y a moins de débouchés. Ils ont moins d'occasions d'augmenter leur salaire mensuel.

La hausse des niveaux des primes d'encouragement, permettrait certes—et ils envient les capitaines avec leurs dix niveaux de primes d'encouragement qui sont en moyenne de 100 $ par mois.

• 1225

M. Bob Wood: Combien y a-t-il de niveaux pour les gradés et les hommes de troupe?

Capt Dave Wong: Je crois qu'au maximum il y en a cinq et qu'il y en a quatre pour les caporaux. Je crois que c'est le maximum.

Est-ce bien quatre? Oui, il s'agit de quatre niveaux. Je suis désolé. Cela fait longtemps que je suis sorti du rang.

Il y a quatre niveaux de primes d'encouragement, ils sont d'environ 25 $ par intervalles d'un mois, ce qui...

M. Bob Wood: Et dans le cas des capitaines ils sont de 100 $?

Capt Dave Wong: On parle d'une moyenne d'environ 100 $ pour les capitaines et il y a dix niveaux.

M. Bob Wood: Lorsque vous avez répondu à ma question, vous avez parlé du programme AMCC et vous avez dit qu'il était trop coûteux.

Capt Dave Wong: L'AMCC est le Programme d'avancement dans le métier selon la compétence et les connaissances.

M. Bob Wood: Le rapport a-t-il été publié? Serait-il possible d'en obtenir un exemplaire?

Capt Dave Wong: Ce programme a fait l'objet de nombreux rapports que l'on peut dénicher, j'en suis convaincu. Je ne suis pas sûr de la personne qui détient ces documents, mais je sais que la question a été largement étudiée.

M. Bob Wood: Est-ce que ce sont des gens de la base qui ont dit que le programme était trop coûteux? Est-ce le commandement maritime ou qui d'autre encore?

Capt Dave Wong: À ce que je crois comprendre, c'est un problème du quartier général de la défense. On a tout d'abord étudié la question plus particulièrement pour les métiers de l'armée de l'air.

M. Bob Wood: L'augmentation des niveaux de primes d'encouragement dont vous avez parlé pour récompenser le bon travail... Selon vous, est-ce que tout cela va ensemble?

Capt Dave Wong: Je crois que oui. Les primes d'encouragement incitent les gens à continuer et leur donnent de l'espoir. Cela leur permet de se réjouir d'avance. Ils se disent que ce n'est peut-être que 25 $ mais que l'an prochain c'est ce quÂils toucheront de plus à chaque mois. Cela peut sembler dérisoire—et je suis convaincu que beaucoup de gens assis derrière moi hochent la tête et se disent «et puis après?»—mais tel est l'effet que cela a sur certains militaires.

Bien sûr la reconnaissance... Il arrive trop souvent que nous circulions ici en craignant d'être rabroués parce que nous avons mal fait. On devrait plutôt nous accueillir à la grille en nous félicitant d'avoir ciré nos bottes et pressé notre pantalon en noble soldat que nous sommes et que les gens reconnaissent comme tels. Cette reconnaissance doit venir du sommet. On nous critique trop souvent et on ne nous félicite pas assez pour ce que nous faisons.

M. Bob Wood: Oui, je suis d'accord avec cela.

Le président: J'ai quelques petites questions à vous poser au sujet des niveaux des primes d'encouragement. Vous avez dit que pour les capitaines, il y en avait environ dix.

Capt Dave Wong: Oui, monsieur.

Le président: Vous avez parlé d'une moyenne de 100 $?

Capt Dave Wong: Une moyenne. Dans le cas des capitaines, au milieu de l'échelle, les primes sont d'environ 125 $ par mois. À l'une ou l'autre extrémité, elles valent un peu moins, ce qui donne en moyenne 100 $ par mois.

Le président: Ce n'est pas pour chaque mois?

Capt Dave Wong: Chaque année.

Le président: Il s'agit de 100 $ pour les dix primes d'encouragement si la personne y a droit? Est-ce que je vous comprends bien?

Capt Dave Wong: Chaque prime. Cela peut aller jusqu'à 100 $ par mois environ.

Le président: Chaque prime?

Capt Dave Wong: Chaque prime. L'année dernière, je gagnais par mois 100 $ de moins que cette année.

Le président: Est-ce que le nombre de primes augmente à mesure que vous progressez dans la chaîne de commandement?

Capt Dave Wong: Pour les officiers, bien sûr, le nombre de primes d'encouragement varie selon niveaux de rangs. Ce sont les capitaines qui ont le plus grand nombre de niveaux. Dans le cas des majors et des capitaines de corvette, je crois qu'il y en a cinq. En ce qui concerne les lieutenants, les sous-lieutenants et les sous-lieutenants intérimaires, il y en a deux, trois et quatre, selon les divers programmes d'enrôlement.

Mme Judi Longfield (Whitby—Ajax, Lib.): J'écoute ce que vous dites au sujet des primes d'encouragement et il s'agit assurément d'un domaine que j'aimerais approfondir. Mais il y a aussi les possibilités d'avancement. Une fois de plus, nous avons entendu dire qu'il fut un temps où vous pouviez espérer obtenir des promotions assez régulièrement. Le plus grand obstacle à l'avancement est-il attribuable à la réduction des effectifs ou peut-être au fait que le personnel des niveaux supérieurs reste en poste plus longtemps qu'il aurait pu le faire par le passé?

• 1230

Capt Dave Wong: C'est attribuable à la réduction des effectifs. Il y a de moins en moins de postes. Un grand nombre d'entre eux ont été abolis. Certains des employés plus âgés...

Par exemple, dans le poste que j'occupe nous ne sommes pas encore vraiment certains que nous allons à vrai dire rester au sein des forces armées, du moins en uniforme, et nous n'avons pas reçu d'avis écrit. Nous ne sommes plus que trois... Nous avons perdu un poste de lieutenant-colonel et trois postes de major. Pour le reste, il s'agit de capitaines ou de lieutenants. Nous avons à l'heure actuelle huit majors et un lieutenant-colonel. Lorsqu'il partira, son poste disparaîtra. Sur les huit autres majors, deux prennent leur retraite dans un ou deux ans mais il nous faudra attendre qu'ils partent avant d'espérer avoir de l'avancement.

Je crois que cela est une bonne indication de ce qui se passe pour les autres métiers, sans aucun doute pour les métiers des sous-officiers. On a réduit dans leur cas les débouchés au sommet c'est-à-dire les possibilités d'accéder aux niveaux de premier maître. Des métiers ont été amalgamés ce qui limite encore plus leurs chances de promotion. En d'autres mots, la base a été élargie.

Mme Judi Longfield: Dans quelles mesures la plupart des gens qui sont prêts à quitter les forces armées éprouvent-ils de l'appréhension?

Capt Dave Wong: La plupart des gens ne veulent même pas y penser. Ils ne sont pas très enthousiasmés par l'idée. Ils font un travail qu'ils aiment vraiment. Ils ont beaucoup d'expérience dans leur travail. Ils ont cela dans le sang. La plupart d'entre eux ne veulent pas y penser tant qu'ils n'y sont pas vraiment confrontés.

Mme Judi Longfield: D'après votre expérience, sur le nombre de ceux qui ont pris leur retraite combien sont restés dans la région et combien—donnez-moi un chiffre approximatif—sont déménagés à l'est des Rocheuses?

Capt Dave Wong: Combien sont déménagés à l'est des Rocheuses après avoir pris leur retraite? Je ne pourrais vous le dire.

Mme Judi Longfield: Je songe seulement au coût de la vie et à tout le reste. S'ils ont l'occasion de partir, le font-ils?

Capt Dave Wong: Beaucoup de retraités habitent la partie nord de l'île, au-dessus de Malahat, où il en coûte moins cher pour se loger. Un grand nombre d'entre eux ont déménagé à l'intérieur de l'île. Ils aiment la Colombie-Britannique, mais ils déménagent là où ils veulent. Je ne sais tout simplement pas combien ont déménagé en raison du coût de la vie.

J'ai eu entre les mains des chiffres. Le commandant de la base de North Bay m'a dit qu'à sa connaissance environ le tiers de ceux qui ont pris leur retraite à 55 ans sont morts d'une crise cardiaque dans les six mois qui ont suivi leur départ.

Le président: Bob, vous aviez une question?

M. Bob Wood: Comme je viens de North Bay, je veux savoir qui lui a dit cela.

J'ai pris beaucoup de cortes notes ici et je veux vous poser une autre question. Vous avez parlé de crédits réservés à la reconversion professionnelle. De toute évidence cela s'adressait aux gens qui cherchent un second revenu...

Capt Dave Wong: Ce programme s'appelle le Service de préparation à une seconde carrière.

Les gens peuvent recevoir jusqu'à concurrence de 2 500 $, ce qui paie la moitié des coûts de frais de scolarité à l'égard d'un programme de reconversion professionnelle. Quant à la définition d'un programme de ce genre, elle se fonde en grande partie sur les compétences. Il va sans dire que vous ne pouvez y recourir pour des cours de perfectionnement; il existe un autre programme à cet égard. La reconversion doit être concentrée dans l'année qui suit la retraite sinon vous n'êtes pas remboursé.

Le problème c'est que 2 500 $ ce n'est pas beaucoup d'argent. Mais si vous ne pouvez vous permettre de payer d'avance vos frais de scolarité, encore moins vous en faire rembourser la moitié après que vous aurez terminé un an plus tard, cela n'est pas très avantageux pour vous.

M. Bob Wood: David, pensez-vous... Capitaine...

Capt Dave Wong: Je me souviens de vous, monsieur.

M. Bob Wood: Je sais que vous ne m'avez pas oublié.

Je viens tout juste de me souvenir de quelque chose que nous avons tenté de faire lorsque nous avons posé des questions à ce sujet au comité à Ottawa. J'aimerais que vous me disiez ce que vous en pensez. Croyez-vous qu'il soit possible de mettre sur pied en collaboration avec les milieux d'affaires du lieu d'affectation un programme de jumelage d'emplois et de travailleurs qui permettrait au conjoint de poursuivre sa carrière? Est-ce que cela est possible et le fait-on ailleurs? Je ne sais pas si cela se fait. Je crois simplement qu'il s'agit là d'une idée que le comité ou la communauté pourrait étudier. Autant que vous sachiez, est-ce que cela se fait quelque part?

Capt Dave Wong: Je ne connais pas d'endroit où cela se fait, de façon systématique en tous les cas. Il arrive bien sûr que certaines entreprises accordent un transfert à un conjoint. C'est à peu près le plus que nous pouvons obtenir.

Nous en avons parlé assurément à l'intérieur de mon service et avec d'autres employés des services de soutien. C'est du domaine du possible. Nous y pensons et cela pourrait arriver.

Mais pour y parvenir, il faudrait bien sûr que nous coopérions avec le secteur des entreprises. Il faudrait nous dire que nous allons prendre quelqu'un qui vient de Halifax ou d'Esquimalt et, qu'après avoir examiné ses compétences nous déterminerons de quelle manière cette personne peut nous aider lorsqu'elle sera ici. Au lieu de cela, nous nous disons qu'une famille militaire va déménager ici dans un ou deux ans, que nous devrons passer par les processus d'embauche et reconversion professionnelle une fois de plus et que nous n'allons même pas nous donner la peine de songer à leur trouver de l'emploi.

• 1235

M. Bob Wood: Je sais par expérience que la Chambre de commerce de North Bay a essayé de faire cela avec les familles militaires qui viennent s'installer ici et qui en repartent. Je me demandais simplement si cela se faisait ici ou si la Chambre de commerce peut étudier la question.

Capt Dave Wong: À part, assurément. Je connais bien la Chambre de commerce de North Bay. Nous avons parlé de cela lorsque j'y étais il y a quelques années et je suis heureux d'apprendre qu'elle met son idée de l'avant. D'autres collectivités tentent de le faire de façon désordonnée, mais c'est un pis-aller. Mais nous pourrions élargir le programme.

M. Bob Wood: Bien. Je vous remercie.

[Français]

Mme Pierrette Venne: J'aimerais simplement obtenir un éclaircissement et savoir s'il est possible de cumuler plusieurs primes d'encouragement de sorte qu'on obtienne de 200 $ à 300 $ de plus par mois. Est-ce possible ou si l'on ne peut se prévaloir que d'une prime à la fois?

[Traduction]

Capt Dave Wong: Une prime d'encouragement à la fois. Nous commençons au salaire de base et l'année suivante nous passons au premier niveau de prime, puis au niveau suivant et ainsi de suite jusqu'au maximum.

Le président: Colonel Little.

Le lieutenant-colonel Chris Little (commandant, 443e escadron, BFC Esquimalt): Monsieur le président et membres du comité, je suis le commandant du 443e escadron qui regroupe à peu près 200 personnes. Nous travaillons à Patricia Bay à l'aéroport, à environ 30 kilomètres au nord d'ici. Notre escadron s'occupe des hélicoptères Sea King qui décollent des navires de la flotte ancrés ici. Je tiens à dire que notre unité surpasse toutes celles de la force aérienne.

Un peu plus tard aujourd'hui, lorsque vous nous rendrez une brève visite avant de repartir, les membres de mon escadron vous feront part de certaines de leurs préoccupations. Cependant, je vais dès maintenant traiter de l'une d'entre elles, la plus grande préoccupation de tout militaire qui est affecté à Esquimalt. Je veux parler du coût de la vie et plus particulièrement du coût du logement dans la région de Victoria.

Je suis déménagé ici avec ma famille en 1996 depuis Winnipeg. Pour deux fois le prix que nous avions payé notre maison là-bas, nous en avons déniché une beaucoup plus petite, sans garage, sans sous-sol et sur un terrain la moitié moins grand. Nous nous saignons aux quatre veines pour la payer. Je consacre plus de la moitié de mon salaire à l'hypothèque, au chauffage, à l'électricité et à l'assurance.

Sachant combien la situation était difficile pour ma famille, je me suis tout de suite demandé, lorsque j'ai pris le commandement de l'escadron, comment les personnes sous mes ordres s'en tiraient. J'ai sous mon commandement un certain nombre de lieutenants subalternes et de militaires de rang subalternes. Je me suis donc informé à la ronde.

Comme certains d'entre eux vivent dans des logements familiaux, ils doivent parcourir tous les jours 80 kilomètres aller-retour pour se rendre au travail et ils ne touchent aucune allocation pour se faire. Certains d'entre eux partagent des maisons tandis que d'autres vivent dans des bicoques. Un certain nombre de militaires louent en fait la moitié d'une maison et n'habitent qu'un seul étage. Il leur en coûterait plus qu'un paiement hypothécaire pour louer une maison complète.

Certains d'entre eux, en fait un assez petit nombre, travaillent à temps partiel la fin de semaine et le soir, s'ils peuvent trouver un employeur qui fasse preuve de souplesse. Ainsi, quand je ne les rappelle pas au travail la fin de semaine, ce qui arrive souvent, ils peuvent livrer des pizzas ou travailler dans une quincaillerie.

Un petit nombre de militaires déterminés à acheter une maison qu'ils peuvent s'offrir vivent à 100 kilomètres d'ici et font le trajet en voiture tous les jours. Mais cela signifie qu'ils ont une chance d'accéder à la propriété.

Je suis parmi les rares qui sont prêts à tout pour s'acheter une maison, comme annuler tout abonnement à des revues, ne pas acheter de REER et ne jamais prendre de vacances. Ils finissent par trouver l'argent et acheter une maison.

• 1240

Peu importe la personne à qui je parle à l'escadron, nos discussions tournent toujours autour du même sujet: comment allons-nous joindre les deux bouts pour le mois. Tous s'inquiètent de leurs obligations et du montant de leur chèque. Je n'ai pas étudié en détail les répercussions des redressements de solde sur mon salaire, mais en janvier j'ai touché 50 $ de moins qu'en septembre.

Pour les forces de l'air ici, la situation est légèrement différente de celle de la marine en général. Grâce au système de division de port d'attache, un marin peut s'attendre à venir ici et à y rester 20 ans. Ceux qui sont assez futés au début pour saisir l'occasion et prendre le temps de chercher une maison... qui sait l'un de ces bâtiments à retaper qui sera convenable dans 20 ans.

En ce qui concerne les forces de l'air, vous passez quatre ans ici—et cela veut dire en réalité entre deux ou cinq ans—et vous repartez. Lorsque vous arrivez, vous avez cinq jours pour trouver un logement. Les deux premiers jours vous n'en revenez pas et vous ne pouvez savoir si le prix demandé est raisonnable ou non. Mon agent d'immeuble m'a dit: «Eh bien! Tout se passe toujours entre vous et le vendeur; il n'y a aucune façon de savoir si c'est bon ou non.» Lorsque nous partons, nous avons la chance de perdre 20 000 $ ici, sans aide.

Lorsque vous venez ici pour une courte période—et j'ai vécu dans cinq provinces et deux pays différents au cours de ma carrière—vous traînez des choses comme des pneus à neige et des pelles. J'étais le seul dans mon quartier à avoir une pelle lorsqu'il a neigé l'an dernier à Noël. Ma voiture a 12 ans. Elle tombe en morceaux et est bonne pour la ferraille. Si j'avais vécu 20 ans ici, elle roulerait toujours aussi bien.

Et cela va bien au-delà des simples difficultés personnelles. Ceux qui travaillent à bord des Sea King doivent suivre un long programme de formation avant de pouvoir même conduire ou réparer ces appareils. Mon escadron compte 110 techniciens. Étant donné le coût élevé de la vie, les personnes qui ont la formation et sont prêtes à venir choisissent plutôt de quitter l'armée plutôt que d'accepter une affectation à Victoria. J'ai 40 techniciens qui sont arrivés ici sans formation pour travailler à bord des hélicoptères Sea King. Cela m'impose un énorme fardeau en ce qui a trait à la formation. En effet, 30 p. 100 de mes gens n'ont pas la formation qu'il faut pour être affectés en mer lorsqu'ils arrivent... Je ne peux satisfaire aux exigences opérationnelles qu'on attend de moi pour appuyer la flotte. C'est très difficile pour moi de dire: «Désolé, patron, je ne peux faire ce que vous me demandez», quand tout le monde est à ce point consciencieux. J'avais un seul pilote interdit de vol qui ne peut participer au prochain déploiement à bord de l'Ottawa, qui part pour une mission de six mois, et à deux heures d'avis j'avais trois volontaires pour le remplacer.

Il y a une solution à cela. Nous versons toujours aux militaires affectés à l'extérieur du pays une allocation de service extérieur sous prétexte qu'ils se trouvent dans une région où le coût de la vie est élevé; comme ils ne peuvent joindre les deux bouts nous leur versons de l'argent. Ils atteignent ainsi le niveau de vie auquel nous pouvons nous attendre au Canada. Cela ne s'applique pas ici. L'allocation de logement que certains obtiennent limite leurs possibilités. Ils cessent de chercher à devenir propriétaires et décident de louer. Mais quand même, ce n'est pas beaucoup.

Si vous combinez les deux programmes, que le triple A est utilisé partout au pays et qu'il existe un moyen d'en juger, là où le coût de la vie est vraiment élevé, comme à Toronto, et peut-être moins élevé mais tout de même supérieur à la moyenne, comme à Ottawa... Combinez cela à une indemnité de service à l'étranger à laquelle ont droit tous ceux qui travaillent dans cette région, voilà qui aidera les gens à s'en tirer!

C'est ici que prend fin mon exposé, car les membres de mon escadron vous donneront tous les autres détails, cet après-midi. Y a-t-il des questions?

Le président: Je vous remercie beaucoup de cet exposé.

Lcol Chris Little: C'est moi qui vous remercie.

Le président: Nous prenons maintenant une pause de 15 à 20 minutes.

• 1244




• 1314

Le président: J'aimerais savoir si, parmi les personnes présentes, il y en a qui aimeraient faire un exposé ou des commentaires. Je vous demanderais de vous identifier aux fins du compte rendu.

Premier maître de 1re classe Humphrey (témoignage à titre personnel): Monsieur le président, mesdames et messieurs, je vous souhaite le bonjour. Je suis premier maître de 1re classe Humphrey. En fait, c'est moi qui conseille les ingénieurs navals en matière d'emploi dans la marine sur la côte Ouest. Je me fais aussi le porte-parole de deux autres métiers de la mécanique navale, soit des techniciens de coque et des électriciens de marine.

Je ne risque pas de me tromper en disant que les dernières années ont été très exigeantes et chargées pour les conseillers en matière d'emploi dans la Marine. Pour ceux qui ne savent pas trop pourquoi nous sommes là, je préciserai peut-être que nos postes ont été créés pour permettre au personnel d'occupations connexes de former un tout au sein de groupes professionnels et donc de se rapprocher.

• 1315

Notre rôle consiste avant tout à servir de centre de coordination pour tout ce qui touche à la formation au sein du Commandement maritime, soit, dans mon cas, au sein des Forces maritimes du Pacifique, et de conseiller le commandant de formation pour tout ce qui touche l'emploi dans la marine, grâce aux conseillers de division, dès qu'il est question de moral des troupes, de formation et d'organigramme.

Aujourd'hui, j'aimerais vous parler de certaines préoccupations dont doivent traiter collectivement les conseillers en matière d'emploi dans la mécanique navale ou de problèmes qui ont été portés à leur attention. Nous aimerions ainsi éclairer la lanterne de ceux qui ne connaissent peut-être pas bien les problèmes auxquels font face nos métiers respectifs. Ces problèmes ne sont pas abordés dans un ordre particulier. Par ailleurs, bien qu'individuellement, ils puissent sembler simples à régler, lorsqu'ils sont vus comme un tout, ils semblent à bon nombre d'entre nous insurmontables.

Ainsi, parlons du temps en mer des électriciens de marine et des ingénieurs navals. Beaucoup de nos marins sont en mer depuis au moins neuf ans, sans interruption. Cela représente souvent le double presque de la durée d'affectation de leurs homologues d'ailleurs.

Il faut aussi mentionner l'absence d'augmentations salariales ou des augmentations minimales. Certains de nos membres subalternes ont été obligés de faire appel aux services d'aide sociale pour nourrir et vêtir leurs familles. Le coût de vivre et de travailler dans la grande région de Victoria excède la capacité de bon nombre d'entre eux.

Beaucoup d'entre eux disent que ce sont les marins qui font les sacrifices qui permettent de continuer d'envoyer les navires en mer. Il ne faudrait pas obliger leurs familles à faire les mêmes sacrifices.

Il existe manifestement un manque d'affectations à terre pour les mécaniciens de marine, soit nos métiers les moins bien payés. Actuellement, je ne suis au courant d'aucune affectation à terre dans la Marine canadienne. Bon nombre de ces marins cherchent à obtenir leur libération parce qu'ils ne parviennent pas à se faire inscrire à un cours de 20 mois qui leur permettrait de se qualifier au niveau 5 ou à obtenir une affectation à terre. Ils sont obligés de demeurer en mer. Presque tous ces employés sont en mer depuis au moins sept ans.

Quant à la réalisation des effectifs, il semble continuellement manquer du personnel dans certains postes névralgiques à bord des navires qui partent en mer. Il est très rare que les cinq ingénieurs mécaniciens de quart se trouvent à bord lorsque le navire quitte le porte d'Esquimalt. Quand les navires partent en mer sans équipage complet, il faut que ceux qui sont à bord fassent le travail du personnel manquant. Cela signifie qu'ils travaillent plus de quarts et qu'ils font de plus longues heures.

Nous voulions aussi vous parler de la «qualité de vie». C'est décevant à dire, mais beaucoup de nos métiers estiment que les officiers supérieurs et le gouvernement se servent de cette expression comme d'un bouclier derrière lequel ils se cachent. De très nombreux marins à bord des navires et à terre estiment que la qualité de vie s'est détériorée depuis la mise en oeuvre de certains nouveaux programmes.

Le moral des troupes n'a jamais été aussi bas. Cela vaut autant pour l'officier que pour le militaire du rang. Trop de nos compagnons cherchent à obtenir leur libération parce qu'ils en ont assez d'attendre l'arrivée de jours meilleurs.

On continue de nous demander de «faire plus avec moins». Nous avions un programme d'achat de nouvelles frégates de patrouille. Plutôt que de réparer et d'entretenir les vieilles, nous devions les remplacer. En raison du coût, cette idée a rapidement été écartée. Étant donné les compressions constantes dont fait l'objet le budget de l'entretien, nos marins sont obligés de travailler plus longtemps et plus fort pour que les navires puissent continuer d'aller en mer.

C'est fort probablement en raison du moral que de nombreux marins ont choisi de ralentir leur formation. Quand on parle à ces jeunes marins, beaucoup d'entre eux affirment ne pas voir pourquoi ils voudraient accéder à un niveau supérieur au sein de la Marine canadienne.

Il y a aussi le manque de confiance. C'est peut-être le plus démoralisant problème que cherchent à régler les conseillers en matière d'emploi dans la marine. Il semble que de nombreux marins ne croient pas que leurs supérieurs ou le gouvernement joindront le geste à la parole et garderont pour eux une information qui leur est communiquée à titre confidentiel.

La division de la mécanique navale, ainsi que d'autres métiers, a de nombreuses préoccupations et il n'existe pas de solution facile à la plupart d'entre elles. Ces préoccupations affectent beaucoup l'état du métier actuellement et sont susceptibles d'avoir beaucoup d'influence sur l'état de la flotte plus tard.

• 1320

Il y a quelques mois, alors qu'il décrivait les problèmes et les préoccupations, un de mes homologues s'est fait demander par un officier supérieur: «Si vous n'êtes pas heureux dans la Marine, pourquoi ne partez-vous pas?» Ce à quoi il a répondu: «J'adore la Marine». Je vous parle de cela parce que j'aime la marine et que j'espère que la vie dans les forces va s'améliorer.

On ne peut se contenter d'espérer que les problèmes disparaîtront comme par enchantement. Nous sommes tous responsables de porter ces problèmes à l'attention de nos supérieurs qui sont, eux, responsables de les régler de manière équitable, honnête et diligente. Il faut avoir le courage de s'attaquer à ces questions. C'est le seul moyen de rétablir la confiance et la loyauté qui semblent faire défaut actuellement dans la marine.

Dans le passé, nous avons été témoins de la dénonciation, par certains hauts gradés, des insuffisances des militaires. Nous les avons aussi vus être retirés de leurs fonctions. Pour n'en nommer que quelques-uns, citons le vice-amiral Murray, l'amiral Anderson et le vice-amiral Thomas.

Il faut écouter ceux et celles qui sont au service du pays, qui le protègent et qui sont disposés à faire le sacrifice ultime, et il faut donner suite à ce qu'ils disent.

Au nom de mes collègues conseillers en matière d'emploi dans la marine et des membres de nos métiers respectifs, je vous remercie de nous avoir écoutés. Il me tarde de voir des jours meilleurs dans la Marine.

Le président: Je vous remercie beaucoup.

Le groupe d'experts a-t-il des questions à poser? Non? Merci.

Premier maître de 1re classe Robert Sankpiel (témoignage à titre personnel): Je suis le premier maître de 1re classe Sankpiel. Je vois que les graisseurs sont les premiers à se faire entendre, comme il se doit.

Je suis entièrement d'accord avec tout ce qui a été dit jusqu'ici. Je vous parlerai, pour ma part, de ce que je considère être des problèmes systémiques.

Je ne m'excuse pas du cynisme de mes propos. Je l'ai acquis avec le temps et j'ai gagné le droit, en tant que membre de la Marine, d'être cynique.

Il n'y a pas si longtemps, Phillips a fait une étude de plusieurs problèmes avec lesquels sont aux prises les militaires. Je suis d'accord avec les recommandations de cette étude et j'en appuie les résultats. Nous assistons à l'éclatement généralisé de l'organisation militaire.

Quelque chose cloche quand un capitaine naval m'explique qu'il prend ses décisions en fonction de ce que dit le Globe and Mail. Nos chefs sont devenus des politiques et des gestionnaires.

Je ne suis pas un gestionnaire; je suis un premier maître de 1re classe. Je n'ai pas un job; je suis dans la marine. La partie «finances» ne m'intéresse pas. Mon travail consiste à assurer le fonctionnement de bâtiments gris comme l'ordonne mon gouvernement.

Un officier supérieur m'a expliqué récemment, à bord d'un avion, qu'il n'était pas forcément mauvais que le moral des troupes dans une organisation militaire en pleine période de compressions soit bas. On semble aussi le croire à Ottawa.

Une déclaration que j'aimerais vous faire se fonde sur Robertson Davies, qui a essayé de départager le mythe de la réalité au Canada.

• 1325

Au Canada, on croit avoir une force professionnelle et bien formée qui a l'appui voulu pour faire le travail que lui confie le gouvernement du Canada. La réalité est ce que vous entendez aujourd'hui. En fait, si j'effectuais le même travail ou une partie de ce travail dans la vie civile, je ferais beaucoup plus d'argent que je n'en fais actuellement. En réalité, si je travaillais dans le civil, ma formation correspondrait véritablement au travail effectué. Je peux fréquenter un collège civil. Je peux suivre un cours qui est reconnu et je peux faire mon travail avec efficacité, si on m'en donne les ressources, car on sait que, dans la société contemporaine, la mise en oeuvre d'une politique ou la mise en place d'une structure ne se fait pas sans argent.

Les Canadiens veulent une force militaire, mais ils ne sont pas disposés à la payer. Les forces armées me rappellent beaucoup le service des incendies: nul ne veut le payer jusqu'à ce qu'il en ait besoin.

Un des problèmes avec lesquels sont aux prises les militaires, aujourd'hui, et j'en reviens à l'idée que nos chefs font davantage de la politique plutôt que de diriger une armée... Je suis un membre actif des Forces armées du Canada. Vos programmes en tant que gouvernement du Canada me laissent indifférent. Ce n'est pas à moi de les mettre en oeuvre. Nul n'a jamais réussi à m'expliquer quelle importance juridique un énoncé de politique a pour les Forces armées du Canada. Je connais les ordres à exécuter et les règlements à respecter. Où s'insèrent les énoncés de politique qui nous arrivent constamment d'en haut? Si vous faites des énoncés de politique, appuyez-les de règlements. C'est ainsi que nous fonctionnons.

Aujourd'hui, vous avez entendu quelqu'un vous parler des besoins opérationnels. Nos chefs se servent des besoins opérationnels comme prétexte pour refuser la libération aux membres des forces qui y auraient normalement droit. Ils invoquent les «besoins opérationnels» pour justifier la différence de paie et d'avantages entre nous et les autres membres de la fonction publique. Trouvez-moi une définition des besoins opérationnels. Je vous en serais très reconnaissant. Autrement, ce n'est qu'une excuse commode.

La recommandation que j'aimerais vous faire, si vous exercez une influence sur les décisions du gouvernement—et j'espère que c'est le cas—, est de séparer les militaires de la structure civile au QGDN. Nos membres en uniforme sont des militaires et des chefs. Ce ne sont pas des gestionnaires, des politiciens et des bureaucrates. Quand je vois un amiral, je veux voir le chef d'une flotte, pas un comptable.

Je vous remercie.

Le président: Merci beaucoup de cet exposé.

Officier marinier Andrew P. Scott (témoignage à titre personnel): Bonjour. Je suis du NCSM Winnipeg. Moi aussi, je suis ingénieur naval. Comme vous l'avez dit, il ne faut pas s'attendre à recevoir des fleurs ici aujourd'hui.

Je ne suis pas aussi bon orateur que les premiers maîtres Sankpiel ou Humphrey. Je ne tiens certes pas à comparer la situation chez moi à la misère abjecte dans laquelle vivent certains membres des forces à la base d'Esquimalt.

Je suis las. Après 15 années de service, je suis fatigué de ne pas pouvoir avancer. Comme l'a laissé entendre l'estimé collègue du premier maître Humphrey, si la situation vous déplaît, allez voir ailleurs. Moi, j'aimerais vous dire ce qui arrive quand quelqu'un veut quitter les forces. Il présente une demande de libération. En conformité avec la politique des Forces armées canadiennes, sur le plan administratif, il a droit à son congé dans les 30 jours, selon les besoins du service, ce qui est une expression plutôt vague, comme l'a fait remarquer le premier maître Sankpiel.

• 1330

Si un membre des forces est malheureux, qu'il n'aime pas son travail, qu'il en a trouvé un autre, laissez-le partir. À tout le moins, en fonction des besoins du service évidemment, examinez sa demande plutôt que de simplement répondre qu'étant donné qu'il est qualifié au niveau 3, il faut qu'il aille en mer.

Il faut passer en revue chacune de ces politiques. Il faudrait examiner chaque demande individuellement, non pas en appliquant les ordres à la lettre, mais en faisant appel à son jugement, en faisant preuve d'un peu d'humanité et en se souciant véritablement du bien-être de la personne qui fait la demande.

Merci.

Le président: C'est nous qui vous remercions.

Monsieur Hanger, vous avez une question.

M. Art Hanger: Officier marinier Scott, je suis curieux. D'autres ont fait le même commentaire. Vous dites que, lorsqu'un membre des forces se plaint des conditions, ses supérieurs lui répondent que, s'il n'est pas content, il n'a qu'à quitter les forces ou font des déclarations en ce sens à d'autres.

Officier marinier Andrew Scott: C'est l'attitude générale que j'ai pu constater durant ma carrière, effectivement. Je précise que mes supérieurs à bord du MCSM Winnipeg ont été très coopératifs pour m'aider à obtenir ma libération. Le problème se situe aux échelons supérieurs.

Si la vie militaire vous déplaît et que vous voulez en sortir, pourquoi vous en empêcher au moyen de politiques draconiennes, en pleine période de compressions? Pourquoi empêchez-vous les gens de prendre en main leur destin? Est-il préférable de demeurer à Esquimalt, de perdre son emploi et de toucher de l'assistance sociale? Parce que, quand la demande de libération est faite, un autre ordre est envoyé. On invoque les besoins du service.

M. Art Hanger: J'ai compris.

Le président: Je vous remercie beaucoup.

La sergente Danielle Goulet (témoignage à titre personnel): Mesdames et messieurs, membres du comité, je me présente. Je m'appelle Danielle Goulet et j'ai le rang de sergente dans l'armée de l'air. Au risque de faire l'objet de certaines railleries, j'ai mis le bon col.

J'aimerais remercier le comité de cette merveilleuse occasion de me faire entendre. Je vous en suis profondément reconnaissante. En tant que membre des forces armées, je suis obligée de respecter la chaîne de commandement pour tout. Le processus est souvent long et frustrant. Je suis convaincue qu'il faut que les Forces armées canadiennes changent d'opinion et d'attitude à l'égard des obligations familiales des militaires. Votre comité représente pour moi une voie d'accès directe à ce changement essentiel. Par conséquent, je me présente ici pleine d'espoir.

Les renseignements que je vais vous donner viennent d'un groupe de discussion mis sur pied à l'intention des parents en uniforme, plus particulièrement des militaires qui sont soit chefs de famille monoparentaux ou dont le conjoint porte aussi l'uniforme. Les membres du groupe avaient l'impression générale que les forces armées n'évoluent pas au même rythme que le reste de la société. Aujourd'hui, on reconnaît l'importance des obligations familiales comme facteur de succès dans les entreprises. À titre de comparaison, l'opinion générale dans les forces armées continue de se résumer en une seule phrase très simple: «Si les forces armées avaient voulu que vous ayez une famille, elles vous en auraient donné une».

• 1335

Cette petite phrase est habituellement suivie de l'infâme: «Les forces armées ne peuvent pas employer les militaires qu'elles ne peuvent affecter comme bon leur semble». Si c'est la devise pour la prochaine décennie, il faudra que le gouvernement reconnaisse les conditions de travail et les exigences particulières des militaires. Par conséquent, il faut que le gouvernement offre des formules de soutien uniques aux membres des forces armées et à leurs familles.

Voici une liste détaillée, mais pas exhaustive, des points mentionnés au sein du groupe de discussion.

Au sujet de l'allaitement—tenez-vous bien, on va parler de «boules». L'allaitement est fortement conseillé par les médecins et jouit de l'appui de la profession. En fait, les Canadiens ont changé leur fusil d'épaule au sujet de l'allaitement et le reconnaissent maintenant comme le moyen le plus sain de nourrir un bébé. Toutefois, les forces armées canadiennes accusent du retard. La mère qui allaite son enfant trouve peu d'appui chez les superviseurs, si elle en trouve. Nous reconnaissons qu'il existe des situations où les besoins des Forces canadiennes priment. Toutefois, la plupart du temps, il y a amplement moyen de faire preuve de souplesse et de discernement.

Voici quelques exemples. Pour ce qui est du service à la base, bien qu'il varie en longueur et en fréquence d'une base à l'autre et selon le rang, je me servirai de la règle suivie à Esquimalt pour faire valoir mon point de vue. Quand une membre des forces demande à être temporairement excusée du service à la base parce qu'elle allaite son bébé, sa demande est catégoriquement refusée. On estime qu'elle peut facilement tirer son lait avant de commencer son service.

On peut facilement démolir ce premier argument en faisant valoir tout simplement que ce ne sont pas toutes les femmes qui peuvent tirer leur lait. De plus, il faut parfois des jours, si ce n'est des semaines, pour habituer le bébé allaité à prendre le biberon, puis à revenir au sein. Sans me lancer dans une explication détaillée du processus d'allaitement, je précise que d'essayer de tirer le lait pour pouvoir travailler pendant quelques heures—j'avoue cependant que le service peut s'étirer jusqu'à 24 heures—peut être très pénible pour la mère et extrêmement troublant pour l'enfant.

Le deuxième argument que j'entends souvent invoquer est que le retrait du tableau de service accroît le service que doivent assumer les autres membres. Si la base n'est pas disposée à excuser temporairement une militaire parce qu'elle allaite son bébé, lui est-il si difficile de simplement reporter à plus tard le service? La militaire pourra faire son service quand elle aura fini d'allaiter.

Tout au long de ma carrière, j'ai vu les Forces armées canadiennes appuyer des activités sportives et des loisirs qui coûtent beaucoup de temps et d'argent. Je n'ai rien à redire. Cet appui est nécessaire pour le bien-être et le bon moral des troupes. Pourtant, la mère qui allaite ne peut pas prolonger son heure de déjeuner pour nourrir son enfant. J'ai vu des militaires ivres se blesser au point où il leur a fallu des jours, des semaines et parfois des mois de congé de maladie avant de pouvoir reprendre leurs fonctions normales. Nul ne s'y opposait. En fait, on en traitait avec humour. Pourtant, l'idée d'exempter une militaire qui allaite son bébé de son service trimestriel est perçue comme étant tout à fait injuste.

Il importe au plus haut point que les Forces armées canadiennes sortent de la grande noirceur et qu'elles appuient davantage les militaires qui allaitent. Une certaine souplesse et du discernement de la part de l'employeur sont essentiels. Il faudrait que les militaires puissent nourrir leur enfant aussi longtemps qu'elles le souhaitent sans crainte de représailles ou de conséquences négatives sur leur carrière.

Nous avons aussi parlé des uniformes des femmes. Le corps des femmes subit d'énormes changements durant la grossesse et après l'accouchement. Il faut en moyenne entre six et 24 mois pour reprendre la forme. Certaines ne la reprennent jamais. Le plus souvent, étant donné que même la structure osseuse change, il leur est presque toujours impossible de retrouver leur taille d'antan. Les indemnités d'habillement ne couvrent pas l'achat de nouveaux uniformes.

De plus, les règles et règlements concernant le port de l'uniforme ne tiennent pas compte de ces changements. Les coussins d'allaitement sont très visibles à travers les chemisiers trop ajustés, et la situation devient rapidement très embarrassante quand la mère a une montée de lait. C'est pourquoi la plupart des femmes décident de porter le chandail, ce qui peut être très inconfortable par une chaude journée d'été.

• 1340

Il y a également des cas dans l'armée où le port du chandail ou de la veste est interdit. J'ai moi-même bravé cette interdiction au risque de faire l'objet d'une accusation. Alors que deux auréoles tachaient mon chemisier, je ne pouvais pas me résoudre à l'idée de circuler parmi des gens insensibles qui pensent que les règles et les règlements l'emportent sur le bon sens et la considération.

Nous devons rendre nos uniformes de maternité à la fin du congé de maternité et, par conséquent, porter le chemisier ordinaire; or, ce chemisier ne permet pas de cacher les conséquences de l'allaitement au cours de la journée. La plupart d'entre nous finissent par porter un chemisier trop petit ou trop grand.

Il faut modifier les règles et les règlements. Une femme devrait pouvoir porter le chemisier ou l'uniforme de maternité, voire même une tenue civile, après avoir accouché, tant qu'elle souhaite allaiter son bébé.

Il faudrait changer ces chemisiers qui devraient être taillés dans un tissu moins voyant et par ailleurs, permettre aux militaires qui reviennent d'un congé de maternité d'échanger leurs uniformes.

Assez parlé des «boules».

Service temporaire: Il ne se passe pas un seul jour où je ne remercie Dieu d'avoir été affectée à un emploi pour lequel je dois suivre des cours aux États-Unis et non au Canada.

Je suis mère célibataire et je me suis présentée à mon premier cours avec mon enfant âgé d'un an. À mon arrivée à la base américaine, on m'a donné un logement familial, pour lequel j'ai payé la différence de loyer; j'ai reçu une carte de prêt qui me permettait d'emprunter ce dont j'avais besoin pour le bébé: un berceau, une chaise haute, une poussette, absolument tout. On m'a donné également une liste de gardiennes recommandées, disponibles à la base, et on n'a cessé de me dire qu'elles étaient là pour m'apporter un appui au cas où j'aurais besoin de quoi que ce soit.

Le deuxième cours que j'ai suivi se donnait dans un autre État. Je me suis présentée, enceinte de six mois et avec mon enfant âgé alors de deux ans et demi. Là encore, on m'a donné un logement familial, offert des services de garderie et même des soins médicaux.

Passons maintenant à la version canadienne d'un tel scénario. Il y a deux ans environ, j'ai été sélectionnée pour suivre un cours de trois mois à Saint-Jean, au Québec. J'ai trouvé toute seule et à mes frais une dame qui me fournissait le vivre et le logement, tout près de mon travail où je pouvais me rendre à pied. Elle pouvait également garder mes enfants; bref, c'était le paradis sur terre.

J'ai ensuite essayé de réserver à mes frais une place supplémentaire dans l'avion que je devais prendre et c'est là que les problèmes ont commencé. L'armée ne voulait pas me laisser payer la place. Elle ne voulait pas réserver la place de priorité deux à laquelle j'avais droit pour mon enfant. On m'a simplement recommandé de réserver une place pour mon enfant en priorité cinq et de l'inscrire sur la liste d'attente au cas où cela ne marcherait pas. J'ai fait remarquer que mon enfant n'avait que trois ans et que je ne pouvais le laisser à l'aéroport au cas où il n'obtiendrait pas de place. On m'a répondu, c'est bien dommage, vous êtes militaire, vous êtes en service, vous partez, l'enfant reste. J'ai dû refuser de participer à ce cours, car je n'étais pas prête à partir pendant trois mois, c'est-à-dire longtemps, tout en laissant mes enfants, si jeunes à ce moment-là.

Tous les intéressés auraient gagné à me laisser suivre le cours et à amener mes enfants. Les FC auraient eu quelqu'un de mieux formé, tout en économisant de l'argent, puisque je payais le vivre et le logement, qu'elles auraient dû autrement payer. J'aurais amélioré mes qualifications théoriques, tout en étant assurée chaque jour du bien-être de mes enfants, lesquels n'auraient pas connu les bouleversements affectifs liés à l'absence prolongée d'un parent. Personne n'aurait été perdant, tout le monde aurait été gagnant.

Les FC devraient apporter l'appui nécessaire à tout militaire qui souhaite amener sa famille en ST chaque fois que c'est possible. Des logements familiaux temporaires devraient être prévus, lorsqu'ils sont disponibles, de même que des places à bord des avions, car les familles ont tout de même leur importance.

• 1345

Les services de garderie sont un autre point que nous avons abordé. On nous demande d'être disponibles 24 heures sur 24. Nos heures de travail sont irrégulières et nous devons souvent faire de nombreuses heures supplémentaires pour lesquelles nous ne sommes pas payés. Par conséquent, nous avons besoin de services de garderie à la base 24 heures, par jour, 7 jours par semaine. Nous ne savons pas comment parvenir à un tel idéal, car nous avons conscience des difficultés financières, des limites de chaque province et d'autres problèmes. Toutefois, vouloir, c'est pouvoir, et les FC devraient examiner de près les diverses options disponibles pour assurer des services de garderie fiables dans les bases.

Nous recommandons fortement que les FC examinent toute la question de la maternité et la considèrent comme un problème à part entière, car pour l'instant, les droits et privilèges liés à la maternité prévus par les FC sont noyés dans les règles et règlements actuels, lesquels ne tiennent pas compte des besoins réels des militaires. Nous recommandons que les FC soient moins rigides et ne décrètent pas systématiquement qu'elles ne peuvent pas employer les militaires qu'elles ne peuvent affecter comme bon leur semble.

D'après les dernières statistiques données par les médias, plus de 49 p. 100 des parents sont des parents célibataires. La plupart des familles de notre société ont un double revenu. Si les FC ne devaient embaucher que ceux qu'elles peuvent véritablement affecter comme bon leur semble, elles seraient quasiment exclusivement composées d'hommes célibataires sans enfants. Il suffit d'apporter le soutien nécessaire pour que tous puissent être affectés. Ce n'est qu'ainsi que l'on pourra aborder la prochaine décennie tout en maintenant notre efficacité opérationnelle et en protégeant le respect que nous avons de nous-mêmes.

Je n'ai pas abordé les aspects financiers qui devraient également figurer dans ce rapport sur la qualité de la vie; je veux parler de subventions pour garderies, d'indemnités de transport en congé pour parents célibataires, de traitement particulier pour les parents dont les enfants ont des besoins spéciaux ou pour les parents de triplets. J'imagine que vous en entendrez parler à plusieurs reprises au cours de vos déplacements. Je ne prétends pas non plus avoir toutes les solutions, mais nous espérons que le comité utilisera ses ressources et ses moyens pour corriger certains des problèmes.

Au nom des militaires qui ont participé au groupe d'étude des parents en uniforme, j'aimerais de nouveau vous remercier de nous avoir donné l'occasion de comparaître. Nous sommes heureux de voir qu'il y a des gens prêts à entendre le point de vue du menu peuple. Il y aurait encore tant de points à débattre et à examiner, mais je crains que l'on ne s'endorme; je termine donc en vous remerciant.

[Français]

Le président: Merci beaucoup, madame.

[Traduction]

Y a-t-il des questions?

[Français]

Merci. C'était très intéressant.

[Traduction]

M. Lorne Jones (témoignage à titre personnel): Mesdames et messieurs, je suis militaire à la retraite.

Il y a certainement quelque chose qui cloche, lorsqu'on ne peut pas se permettre de faire du sport à Victoria. C'est à cause des salaires des militaires; il faudrait songer à les payer davantage.

Merci beaucoup.

Le président: Merci.

Mme Debbie McPhail (témoignage à titre personnel): Je n'ai pas l'habitude de parler en public, mais je vais faire de mon mieux. J'ai beaucoup à dire, lorsque je me trouve dans mon salon avec mes amis, et je vous remercie de me donner la possibilité de vous parler.

En avril 1996, nous habitions à Trenton, en Ontario. Le gestionnaire de carrières de mon mari lui a demandé: «Voulez-vous rester ou être affecté ailleurs?» Il a répondu «J'aimerais mieux rester ici». Une semaine plus tard, on lui a dit: «Vous êtes muté; voulez-vous la côte Est ou la côte Ouest?» Il a répondu: «La côte Est, s'il vous plaît». Deux semaines plus tard, il a reçu son avis d'affectation à Esquimalt.

Nous n'avons rien à redire à ce sujet, car nous pensons que tous les militaires doivent remplir leurs fonctions là où ils sont envoyés. Mon père était dans l'armée, si bien que je suis habituée à ce genre de vie. Toutefois, on nous a dit qu'une fois ici, on y reste longtemps.

Ce que j'aimerais, c'est que si vous êtes envoyé dans un endroit que vous n'avez pas vraiment demandé... Certains veulent passer toute leur carrière ici, parce que leur famille s'y trouve. Nous n'avons pas demandé à venir ici; nous sommes prêts à «servir», mais je crois qu'il faudrait fixer une limite à la période d'affectation. Nous ne pouvons espérer acheter une maison ici, et pas même économiser pour les études de nos deux enfants, car nous vivons d'une paie à l'autre.

• 1350

Le LF que nous avons à Esquimalt est de qualité inférieure à celui que nous avions à Trenton. L'indemnité triple A que nous avons ici ne permet même pas de payer la différence de loyer, et notre LF de Trenton était beaucoup plus agréable.

À mon avis, un militaire qui vit, par exemple, à Greenwood, en Nouvelle-Écosse, ou dans n'importe quelle autre base, qui a le même grade, le même métier, ne devrait pas pouvoir... Tant mieux pour lui, je suis heureuse qu'il puisse épargner pour les études et le logement, mais nous devrions avoir les mêmes possibilités. Les familles seraient beaucoup plus heureuses si à leur arrivée à Esquimalt, elles savaient que d'ici cinq ans elles pourraient repartir et voir la lumière au bout du tunnel.

Dans le concept de l'indemnité triple A, il faudrait également tenir compte du fait que ce n'est pas seulement le logement qui est plus cher ici; en effet, nous payons pratiquement le double pour l'assurance-auto, l'alimentation, l'essence. Nous vivons d'une paie à l'autre.

Comme tout le monde l'a dit, les Forces armées canadiennes manquent de bon sens à l'heure actuelle. Alors qu'il avait indiqué six mois à l'avance qu'il voulait rentrer, mon mari n'a pu être à la maison pour la naissance de notre enfant; or, je n'ai pas de famille ici, puisqu'elle se trouve à des milliers de milles. Lorsque vous vivez d'une paie à l'autre, vous ne pouvez même pas aider un membre de votre famille à prendre un avion pour être près de vous. Mon mari n'a pas tellement apprécié qu'on lui apprenne la naissance de son fils à bord de son navire.

J'ai également appris que l'on envisageait de faire une étude pour déterminer s'il vaut mieux garder les marins dans la marine, les aviateurs dans l'aviation, les soldats dans l'armée de terre. Dans certains cas, on n'a pas d'autre choix; en effet, si vous avez un métier propre à la marine, il est assez difficile de travailler ailleurs; par contre, lorsque votre métier peut servir n'importe où, je crois que le gouvernement devrait envisager de vous envoyer dans des endroits différents afin de vous donner le temps de reprendre votre souffle. Si vous êtes coincé dans la marine, vous devriez à tout le moins avoir la possibilité, si vous le désirez, d'aller sur la côte Est et de reprendre votre souffle, au plan financier, pendant quelques années. Ne les envoyez donc pas systématiquement sur la côte Ouest sous prétexte qu'ils sont marins de la côte Ouest.

Je vous remercie de nouveau de m'avoir donné l'occasion de prendre la parole aujourd'hui.

Le caporal-chef Robert Todd MacNeill (témoignage à titre personnel): J'aimerais aborder deux points rapidement.

Un peu plus tôt, un des intervenants a indiqué qu'il était entré dans l'armée pour servir son pays. C'était aussi mon attitude il y a 17 ans.

Il y a deux ans, j'ai été affecté à Petawawa. Pardonnez-moi si je laisse paraître mes sentiments ici. Je faisais partie du régiment aéroporté au moment de sa dispersion. Je suis également père célibataire et j'ai trois enfants. Je ne suis pas allé en Somalie et pourtant, en 1996, j'ai dû quitter Petawawa au moment des événements.

Il était facile de joindre les deux bouts à Petawawa où je payais 325 $ de loyer LF. Aujourd'hui j'en paie 750. Je suis affecté à bord d'un navire et je viens de terminer une période de service de six mois à l'étranger.

C'est un fait, je suis entré dans l'armée et j'obéis aux ordres qui me sont donnés; pourtant, j'ai été jugé et inculpé par les médias, alors que je n'ai rien fait; je ne suis pas allé en Somalie et pourtant le régiment a été dispersé et les militaires envoyés aux quatre vents; c'est pour ça que je me trouve ici.

J'aimerais que les militaires puissent contrôler ce qui se passe dans l'armée; en cas de problème, les militaires devraient avoir le droit de le régler et disposer du temps nécessaire pour le faire—et non pas être la cible des médias et se faire dire comment agir. Les commandants devraient avoir le temps de régler les problèmes, car il ne s'agit pas d'être mis au pilori par les journalistes ou simplement rejetés uniquement pour des raisons politiques.

Ce n'est pas juste pour les familles; c'est déjà difficile pour nous, militaires, mais c'est encore pire pour les familles.

Comme je l'ai dit plus tôt, je payais 325 $ de loyer pour un LF à Petawawa, et maintenant je paye 750 $ pour une maison dont l'état est encore pire et où il est pratiquement impossible de faire faire des réparations. Depuis mon arrivée ici il y a dix-huit mois, j'ai en effet demandé à 11 reprises que l'on vienne faire des réparations; deux seulement ont été faites et je paye les autres de ma poche.

J'en ai assez dit; j'attends la retraite d'ici quelques années, puisque, compte tenu de la réduction des effectifs militaires, on ne peut plus compter sur des promotions. Il y a dix ans, les gens sortaient de l'armée avec le grade d'adjudant, de chef et d'officier supérieur, alors qu'aujourd'hui, nous devons quitter l'armée au bout d'une carrière de 25 ans de caporal et de caporal-chef, comme parents célibataires. Bien sûr, il se peut que l'on trouve du travail—ou non. Au bout du compte, ce sont les enfants qui en souffrent.

• 1355

À l'heure actuelle, il y a à bord de mon navire un militaire qui se trouve à peu près dans la même situation que moi. Il vient d'une région où le coût de la vie est peu élevé et se retrouve dans une autre où le coût de la vie est très élevé. Il doit verser une pension alimentaire pour enfants et payer ses factures; il essaye de joindre les deux bouts, mais comme c'est le cas de nombreux militaires ici, il se heurte à des problèmes financiers. On ne l'a aidé d'aucune manière et pourtant, on lui a dit que s'il ne réglait pas ses problèmes financiers, il serait libéré.

Où en sommes-nous arrivés? Nous avons fait déménager un militaire qui fonctionnait bien là où il se trouvait, dans une région dont le coût de la vie est peu élevé, à Moose Jaw, et l'avons forcé à venir dans une région dont le coût de la vie est élevé. Maintenant, sous prétexte qu'il a quelques problèmes financiers, l'armée veut le libérer.

Ce sont les problèmes que je voulais vous exposer et je vous remercie de m'avoir écouté.

M. Bob Wood: En tant que père célibataire, comment vous en sortez-vous?

Cplc Robert Todd MacNeill: Je vis dans la pauvreté, monsieur.

M. Bob Wood: Que se passe-t-il lorsque vous êtes à bord du navire?

Cplc Robert Todd MacNeill: Je joins les deux bouts; je paye une bonne d'enfants avec mes revenus. Je me passe du reste.

M. Bob Wood: Je ne suis pas au courant de ce que cela peut vous coûter pour engager une bonne d'enfants lorsque vous êtes à bord d'un navire, qu'il s'agisse d'une période d'un mois ou...

Cplc Robert Todd MacNeill: Pendant ma période de service à l'OTAN, j'ai payé environ 700 $ par mois. Je m'étais arrangé pour recevoir une subvention du gouvernement, mais je ne l'ai plus; à cause de mon revenu et de la situation dans laquelle je me trouvais à l'époque, j'avais droit à de l'aide, tandis que maintenant, je dois me débrouiller tout seul.

M. Bob Wood: Merci.

Le président: Monsieur Hanger.

M. Art Hanger: Caporal-chef, vous avez piqué ma curiosité; vous avez en effet parlé d'un autre militaire et de ses difficultés financières après son affectation.

Cplc Robert Todd MacNeill: Oui, monsieur.

M. Art Hanger: Est-ce la politique adoptée par les militaires en cas de problèmes financiers?

Cplc Robert Todd MacNeill: Je crois qu'il en a déjà été question à plusieurs reprises, monsieur. L'armée déplace les gens comme des pions et ne fait pas le tri qui permettrait de s'assurer que le militaire déplacé va continuer d'être efficace. Certains arrivent à survivre, mais s'ils sont affectés dans une région où le coût de la vie est plus élevé, ils ne disposent pas des mêmes moyens et commencent à devenir, pour reprendre l'expression utilisée par l'armée, un fardeau financier. Compte tenu de la politique des libérations et de la réduction des effectifs, l'armée se dit: «Les créanciers ne cessent de téléphoner et cette personne n'arrive pas à joindre les deux bouts». L'armée règle le problème en ne le réglant pas et en libérant le militaire. C'est un... financier, je ne suis pas sûr de la terminologie utilisée.

On a en fait réduit un militaire efficace à la pauvreté et on l'a mis à la rue.

M. Art Hanger: Merci.

Le président: Merci beaucoup.

Cplc Robert Todd MacNeill: Merci, monsieur.

Le matelot-chef Hodges Whittaker (témoignage à titre personnel): Mesdames et messieurs, je travaille actuellement aux installations de maintenance de la flotte.

Bine que je sois d'accord avec tout ce qui a été dit au sujet des réalités économiques, j'aimerais parler du système juridique militaire. Au cours des 18 derniers mois, j'ai été accusé d'un crime, à tort. Après une enquête de six mois, etc., lorsqu'il est apparu que j'avais été accusé à tort, j'ai fait remarquer à mes supérieurs que j'avais l'impression d'avoir été accusé par quelqu'un qui cherchait vengeance. Ils en ont convenu, officieusement; toutefois, je n'ai pas eu le droit de confronter mon accusateur et je ne sais toujours pas qui m'a accusé de vol.

• 1400

Le mois dernier, mon épouse a elle aussi été accusée à tort. Je suis en affectation pour motifs personnels, à cause de l'état de santé de mon épouse. Cette fois-ci, il n'a fallu que trois jours pour prouver le caractère erroné des allégations portées contre nous. La police militaire a envoyé un rapport à mon commandant; je n'ai pas vu ce rapport, mon épouse non plus et lorsque nous avons demandé à le voir, on nous a répondu qu'il fallait faire une demande en vertu de la Loi sur la protection de la vie privée. Toutefois, mon commandant, mon chef, et je ne sais qui d'autre, ont vu le rapport relatif aux allégations portées contre mon épouse.

La plupart des gens à qui j'ai parlé—et plusieurs sont membres de professions libérales—m'ont suggéré de contacter un avocat ou l'ombudsman de la province; je ne souhaite pas prendre de telles mesures et préfère m'en tenir au système divisionnaire. Toutefois, il se peut qu'il y ait procès pour diffamation, abus de confiance. Si la GRC envoyait au patron de qui que ce soit un rapport au sujet du conjoint de cette personne, ce serait la catastrophe.

Merci.

Le président: Merci.

Juste une question rapide: votre épouse est-elle militaire?

Matc Hodges Whittaker: Ma femme est membre de la réserve navale, mais n'est pas en activité actuellement à cause de sa santé.

Le président: Merci.

L'aumônier Doug K. Friesen (témoignage à titre personnel): Bonjour, je m'appelle Doug Friesen et je suis aumônier à la base; je travaille jusque dans le quartier LF de Belmont Park et depuis quelques années, je m'occupe du projet des paniers de Noël de la base.

J'aimerais faire deux remarques rapides.

Dans mon travail à Belmont Park et dans le cadre du projet des paniers de Noël, je me suis aperçu que tous les facteurs relatifs à la qualité de la vie sont étroitement liés. Je me suis rendu compte que les gens qui ont le plus de besoins sont ceux qui vivent des crises ou des problèmes familiaux. Souvent, c'est un divorce qui, par exemple, pousse une famille au bord du précipice financier alors qu'auparavant, elle arrivait, de peine et de misère, à joindre les deux bouts.

Il me semble donc qu'en plus d'un revenu supplémentaire, il faudrait prévoir des services de soutien pour les familles, comme le Centre de ressources pour les familles des militaires— excellent programme—, ainsi que des travailleurs sociaux, lesquels ont failli disparaître; nous aurions alors perdu des gens comme Dave Wong, qui a fait un excellent exposé ce matin.

En d'autres termes, ces facteurs sont étroitement liés. Bien sûr, les difficultés financières exercent des pressions sur les familles, mais l'éclatement des familles ainsi que les divorces peuvent également se traduire par des difficultés financières plus graves. Par conséquent, toutes les familles ont besoin d'appui. Ces facteurs sont étroitement liés et je pense que le fait d'apporter un soutien aux familles... Toute famille que l'on arrive à protéger du divorce peut en retirer des avantages financiers réels, et vice versa.

J'aimerais également dire qu'en me préparant pour cette séance du comité, j'ai parlé à plusieurs personnes qui m'ont fait part de l'ambivalence de leurs sentiments. En effet, elles voient avec un certain cynisme l'arrivée d'un comité d'Ottawa qui est censé les aider avant de disparaître de nouveau dans la neige de l'hiver; par ailleurs, la présence de ce comité suscite des espoirs et des attentes.

• 1405

J'ose espérer, en quelque sorte, que ce processus et les travaux de ce comité donneront des résultats concrets. Je crains que si rien ne se passe... Je ne pense pas que quiconque s'attende à ce que vous régliez tous nos problèmes, mais j'espère que les travaux du comité donneront quelques résultats concrets; cela permettrait en effet de restaurer la confiance et le respect envers le processus d'Ottawa.

Ce sont les deux points que je voulais soulever.

Le président: Je crois que M. Hanger a une question à poser.

M. Art Hanger: Effectivement.

Monsieur l'aumônier, la question de l'éclatement des familles est l'un des aspects qui n'a pas vraiment été souligné. Personne n'a vraiment parlé du divorce, or je sais qu'il existe, puisque beaucoup des témoins ont parlé de leur vie personnelle. Peut-on dire que les questions financières causent un stress qui serait à l'origine de la plupart des divorces ou y a-t-il d'autres facteurs en jeu?

Aumônier Doug Friesen: C'est très compliqué, car beaucoup de facteurs entrent en jeu et je crois que les difficultés financières sont un facteur de stress. Bien sûr, dans la marine, les longues périodes de séparation causent beaucoup de stress aux familles et souvent le fait d'être très éloignés de la famille élargie et d'un groupe de soutien est un autre facteur qu'il faudrait peut-être aussi prendre en considération. Par exemple, si la famille élargie se trouve à Halifax, en Nouvelle-Écosse, il faudrait peut-être en tenir compte. Très souvent, à la suite d'une affectation, le militaire et sa famille ne disposent plus d'un réseau de soutien élargi.

Les finances, les affectations, tous ces facteurs sont à l'origine de l'éclatement des familles et des divorces, ce qui entraîne de graves conséquences au plan financier; par conséquent, tous ces facteurs sont étroitement liés.

M. Art Hanger: D'accord. Vous avez soulevé un deuxième point dont il a été question à plusieurs reprises et je crois que notre comité devrait en fait s'y attarder.

Si je puis ouvrir le débat, monsieur le président, je crois qu'il importe que les personnes ici présentes, ainsi que celles qui étaient avec nous hier soir, comprennent le mandat de notre comité et aussi sa structure. Je vais parler en ma qualité de député de l'opposition de la façon dont je comprends le fonctionnement du comité au Parlement.

Beaucoup de points importants ont été soulevés. Tout le monde est prêt à convenir qu'il faut prendre d'importantes mesures et nous pouvons même nous mettre d'accord sur les mesures à prendre; toutefois, cela ne signifie pas que notre rapport va être pris en compte; il pourrait être complètement rejeté; c'est la réalité.

Notre comité devrait avoir plus de pouvoir qu'il n'en a, mais malheureusement, ce n'est pas le cas. À mon avis, cela devrait être dit haut et fort, car je ne veux pas susciter des attentes excessives en tant que membre du comité ou même député de l'opposition. J'ai un rôle à jouer, bien sûr, et je peux exercer des pressions sur le gouvernement pour qu'il prenne certaines mesures et atteigne certains objectifs, mais cela ne veut pas dire que c'est ce qui va se passer.

À part Mme Venne, les autres membres du comité ici présents sont du côté du gouvernement et, à ce titre, peuvent avoir accès à des informations tout à fait hors de ma portée en tant que député de l'opposition. Nous allons toutefois devoir modifier la présentation de ce que nous avons entendu au cours de nos audiences si nous voulons arriver à nos fins. Je sais que M. Bertrand voudra peut-être aborder la question d'une autre manière, mais, en tant que député de l'opposition, je ferai ce qui est attendu de moi; en effet, je pense avoir l'obligation de transmettre ce message à Ottawa et je saisirai toutes les occasions qui se présenteront à la Chambre, mais cela ne veut pas dire que nous allons parvenir à nos fins.

• 1410

Peut-être M. Bertrand souhaite-t-il aborder la question du point de vue du gouvernement et en sa qualité de président du comité—peut-être pense-t-il que notre comité est parfaitement en mesure de faire avancer les choses.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Hanger.

Il est vrai que notre comité a seulement le pouvoir de suggestion, mais en ma qualité de membre du Comité de la défense depuis deux ou trois ans, je peux vous dire qu'avant les dernières élections, le ministre Doug Young avait demandé à notre comité de faire cette étude et que l'actuel ministre de la Défense nationale, M. Eggleton, a réitéré cette demande. Il est donc vrai que nous ne pouvons imposer les recommandations qui se trouveront dans notre rapport, mais en tant que députés du gouvernement, nous pouvons user de notre pouvoir de persuasion auprès du ministre pour qu'il donne suite aux recommandations qui figureront dans notre rapport.

J'espère que...

Aumônier Doug Friesen: D'accord, nous attendons avec impatience la suite des événements. Merci.

Le président: À cause du temps limité dont nous disposons, nous allons entendre notre dernier témoin.

Mme Julie Simons: J'aimerais vous parler ce matin en tant qu'épouse de militaire, ancienne militaire ayant 10 années de service à son actif, et aussi en tant que fonctionnaire, puisque c'est ce que je suis actuellement.

En tant que militaire, c'était le Conseil du Trésor qui était mon employeur et en tant que fonctionnaire aujourd'hui, c'est toujours le Conseil du Trésor qui est mon employeur. Toutefois, j'aimerais porter à votre attention quelques graves injustices entre fonctionnaires et militaires.

Le Conseil du Trésor a reconnu la nécessité de rémunération régionale. Il y a des différences de rémunération selon les régions du pays en ce qui concerne les employés civils payés à l'heure. Ce n'est pas le cas pour les militaires.

En tant qu'employée civile, si j'occupe l'emploi de mon supérieur pour quelque durée que ce soit, je suis rémunérée à titre intérimaire. Si je dois travailler en plus de mes heures régulières ou si on me demande de le faire, je suis payée en heures supplémentaires. Si je dois amener un membre de ma famille chez le médecin ou à un autre rendez-vous, à l'école, par exemple, je peux utiliser un congé pour raisons familiales. Si je choisis de ne pas prendre mes congés annuels pour des raisons personnelles, je peux les accumuler.

Ce sont quelques-unes des différences entre la vie civile et la vie militaire.

Dans mon unité actuelle, nous avons des travailleurs qualifiés civils qui sont payés près de 50 000 $ par an. À côté d'eux, travaillant au même endroit, se trouve un caporal, qui est aussi travailleur qualifié, mais qui n'est payé que 36 000 $ pour faire exactement le même travail.

Si par conséquent le comité est en mesure de faire des recommandations, je lui recommanderais de s'adresser à notre employeur, soit le Conseil du Trésor, pour simplement lui demander de traiter ses employés de la même façon, qu'ils soient militaires ou civils. Nous avons tous les mêmes besoins, que nous portions un uniforme ou non.

Merci.

Le président: Merci beaucoup pour votre exposé.

Y a-t-il des questions? Monsieur Pratt.

• 1415

M. David Pratt: Je ne sais pas si le témoin peut nous donner une réponse complète, mais je crois que c'est la première personne qui soulève la question de la rémunération intérimaire et fait remarquer que les militaires qui occupent des postes de façon temporaire ne bénéficient pas de rémunération intérimaire.

Connaissez-vous beaucoup de cas où cela se produit de façon assez prolongée ou régulière?

Mme Julie Simons: Absolument. Dans l'armée, il est tout à fait courant de demander au «second» de remplacer son supérieur qui part en vacances.

Je vous dirais également que compte tenu des restrictions de la prochaine ATS en matière d'affectations, lorsque l'on ne trouvera personne pour remplacer ceux qui prennent leur retraite, surtout dans les grades supérieurs, cela se produira de plus en plus souvent, sans rémunération compensatoire.

Le président: Merci beaucoup.

C'est ainsi que se termine notre séance de ce matin; toute autre personne souhaitant faire part de ses points de vue peut le faire par écrit, à notre attention, à Ottawa; nous nous assurerons que ces nouveaux points de vue seront consignés.

Je tiens de nouveau à tous vous remercier pour vos observations qui ont été des plus appréciées.

J'aimerais également, au nom du comité et du personnel de soutien, vous remercier de votre hospitalité.