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ENSU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON ENVIRONMENT AND SUSTAINABLE DEVELOPMENT

COMITÉ PERMANENT DE L'ENVIRONNEMENT ET DU DÉVELOPPEMENT DURABLE

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mercredi 5 novembre 1997

• 1552

[Français]

Le président (M. Charles Caccia (Davenport, Lib.)): Bon après-midi, mesdames et messieurs. Nous reprenons nos travaux. Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous faisons l'étude des questions concernant les changements climatiques relativement aux préparatifs canadiens pour la Conférence des parties sur la convention cadre des Nations unies sur les changements climatiques.

[Traduction]

Nous nous excusons pour le retard, qui était dû à des raisons techniques, et nous remercions les techniciens qui sont rapidement venus à notre aide.

Notre témoin aujourd'hui d'Environnement Canada est M. Robert Audet, de la Direction des questions atmosphériques. De Ressources naturelles Canada, nous avons M. Nick Marty, directeur de la Division de l'élaboration de la politique et de l'analyse, et M. Neil McIlveen, directeur de la Division de prévisions énergétiques.

Nous vous souhaitons la bienvenue à notre comité. Vous pouvez procéder dans l'ordre que vous choisissez. Je suppose que ce sera d'abord Environnement Canada, suivi de Ressources naturelles, soit une intervention de 10 minutes chacun, de sorte qu'à la fin des trois interventions nous ayons le temps de vous poser des questions avant la levée de la séance à 17 h 30.

Voulez-vous commencer, monsieur Audet?

[Français]

Je vous invite à vous présenter, en précisant votre nom et votre titre. Je vous souhaite la bienvenue au comité.

M. Robert Audet (Direction des questions atmosphériques, Service de la protection de l'environnement, Environnement Canada): Monsieur le président, mesdames et messieurs, permettez-moi en premier lieu de vous remercier de nous avoir invités et de nous donner la chance de parler du deuxième rapport national du Canada sur les changements climatiques.

Cette présentation porte principalement sur deux points. Je parlerai d'abord de la raison d'être du rapport et par la suite de ses faits saillants. Si vous me le permettez, je ferai la première partie de ma présentation en français et la deuxième, en anglais.

• 1555

Le deuxième rapport national du Canada sur les changements climatiques a pour but de répondre aux engagements internationaux du gouvernement du Canada dans la convention cadre des Nations unies sur les changements climatiques. On l'appelle aussi CCCC sous sa forme abrégée ou, en anglais, FCCC.

En 1992, le Canada et plus de 150 autres pays ont signé la convention cadre dont l'objectif consistait, pour les pays industrialisés, à viser à réduire les émissions de gaz à effet de serre au niveau de 1990 d'ici l'an 2000.

Selon les articles 4 et 12 de la convention, les parties sont tenues d'établir et de mettre à jour régulièrement des inventaires nationaux des émissions, de les publier et de les mettre à la disposition du secrétariat de la Conférence des parties. Les inventaires comprennent les émissions entropiques de tout gaz à effet de serre qui n'est pas réglementé par le Protocole de Montréal.

Le deuxième rapport national sur les changements climatiques a été rédigé conformément à un ensemble détaillé de directives fournies par l'Organe subsidiaire du Conseil scientifique et technologique ainsi que l'Organe subsidiaire de mise en oeuvre de la CCCC.

Les directives servent à trois fins principales. Elles servent d'abord à aider les pays membres à respecter leur engagement, à dresser les inventaires nationaux, à les mettre à jour, à les publier et à les mettre à la disposition de la Conférence des parties. En deuxième lieu, elles visent à faciliter le processus de production de communications nationales, c'est-à-dire les rapports nationaux, y compris la rédaction de documents d'analyse techniques utiles, tout en présentant cette information d'une façon uniforme, transparente et comparable. Finalement, elles visent à assurer que la Conférence des parties possède suffisamment d'information pour s'acquitter de ses responsabilités au niveau de l'évaluation et de l'application de la CCCC, ainsi que de la pertinence de ses engagements.

Les directives suggèrent même une table des matières. Le rapport, dans sa forme actuelle, comprend neuf chapitres. Il donne entre autres un aperçu de la science du changement climatique; les facteurs déterminants des émissions de gaz à effet de serre au Canada; les émissions actuelles de gaz à effet de serre au Canada et les projections des émissions jusqu'à l'an 2000; la situation et les résultats des inventaires sur le changement climatique; les impacts éventuels du changement climatique sur le Canada; la recherche sur les changements climatiques et les nouvelles technologies; l'aide financière internationale et le transfert technologique; et enfin, l'éducation et la sensibilisation du public aux problèmes reliés au changement climatique.

La production du rapport a été réalisée conjointement par Environnement Canada et Ressources naturelles Canada. Cependant, il aurait été impossible de publier cette étude sans l'aide et la contribution d'autres ministères fédéraux, dont Agriculture Canada, l'ACDI, Affaires étrangères et Commerce international, ainsi que de toutes les provinces et territoires et des intervenants non gouvernementaux.

Le rapport est un ensemble d'études, d'analyses et de données de base déjà existantes préparées par différents auteurs et organismes. Il comprend également des extraits d'études plus volumineuses et plus détaillées.

[Traduction]

Le président: Je m'excuse de vous interrompre, monsieur Audet. Il serait très utile pour les membres de notre comité si nous pouvions suivre votre texte. Nous avons les tableaux, qui sont effectivement très utiles, mais nous aimerions également pouvoir poser nos questions à partir de votre exposé. Pourriez-vous nous distribuer votre texte, s'il vous plaît?

M. Robert Audet: Je n'en ai qu'un exemplaire. Dans environ une minute, je parlerai de ces tableaux.

Le président: Je comprends cela. Vous nous parlez de choses très importantes et très intéressantes. Nous trouverons extrêmement difficile de vous poser des questions à partir de votre exposé si nous n'avons pas le texte sous les yeux.

M. Robert Audet: Je le sais. Je n'ai qu'un exemplaire avec quelques notes.

• 1600

Le président: Allez-y. Nous pourrons peut-être faire une photocopie lorsque vous aurez terminé. Est-ce que cela vous convient?

M. Robert Audet: C'est possible. J'ai ici des notes que je peux étoffer.

Je vais maintenant vous parler des grandes lignes du rapport. Nous parlons des émissions de gaz à effet de serre.

Après avoir légèrement diminué en 1991, les émissions canadiennes de gaz à effet de serre ont augmenté constamment par la suite; de 567 millions de tonnes en équivalent CO2 en 1990, elles sont passées à 589 millions de tonnes en 1994, puis à 619 millions de tonnes en 1995, ce qui représente pour cette dernière année une augmentation de 9 p. 100 par rapport au niveau de 1990, alors que, pendant la même période, la population s'est accrue de 5,6 p. 100, soit une augmentation par habitant de près de 3 p. 100. Les 619 millions de tonnes de gaz à effet de serre représentent environ 2 p. 100 des émissions mondiales.

Si on regarde la figure 1 et les sources d'émissions, nous constatons que le pétrole, le gaz naturel et le charbon représentent environ 89 p. 100 des émissions totales de gaz à effet de serre.

Par secteur, les industries énergétiques représentent environ 34 p. 100; l'industrie, 20 p. 100; les transports, 27 p. 100; le secteur résidentiel, 10 p. 100; et les secteurs commercial et agricole, 5 p. 100 chacun des émissions totales de gaz à effet de serre en 1995.

Parmi les gaz à effet de serre, c'est le dioxyde de carbone qui a le plus contribué, à raison de 81 p. 100, suivi du méthane, à 12 p. 100, de l'oxyde nitreux, à 5 p. 100, et des perfluocarbures, à 1 p. 100.

Si on regarde le tableau, on constate que dans certains cas le total arrive à 101 p. 100, mais c'est parce qu'on a arrondi certains chiffres. Cela n'est pas une erreur; c'est tout simplement dû au fait qu'on a arrondi certains pourcentages.

La projection des tendances présentée dans le rapport n'est pas le seul aboutissement possible. Il s'agit plutôt d'une opinion arrêtée, fondée sur un ensemble d'hypothèses raisonnables au sujet des facteurs qui influent sur les tendances futures des émissions. Cela étant dit, tout autre sous-ensemble d'hypothèses concernant l'avenir donnera un résultat différent.

En outre, il est évident que les hypothèses à court ou à moyen terme sont plus fiables parce qu'il est difficile de prévoir certains changements technologiques pour une longue période de temps. Il est aussi à souligner que cette projection n'est pas, au sens strict du terme, une prévision.

Si on regarde la figure 2, on constate que, d'après notre modèle, à long terme les émissions de gaz à effet de serre par type d'émissions devraient légèrement diminuer en l'an 2000, et ce, en raison d'une faible utilisation du charbon en Ontario et d'un changement au niveau du procédé de fabrication de l'acide adipique pour la production du nylon.

En 2010, les émissions seront de 19 p. 100 plus élevées qu'en 1990, et en 2020 elles seront de 36 p. 100 plus élevées. La principale raison de ces augmentations est la croissance démographique et économique jointe aux bas prix de l'énergie et à un virage vers les combustibles fossiles, notamment le gaz naturel, pour la production de l'électricité.

Veuillez noter que les émissions pour l'année de référence 1990 dans cette projection, à la figure 2, sont de 564 millions de tonnes comparativement au chiffre mentionné dans l'inventaire de 567 millions de tonnes, parce que l'aperçu a été établi avant la confirmation des révisions des données de l'inventaire.

La figure 3 montre l'accroissement à long terme des émissions par secteur. On s'aperçoit que le secteur des transports contribue le plus aux émissions, à la fois en chiffres absolus et en taux d'accroissement. L'augmentation des émissions du secteur industriel est également importante, mais elle se fait à un rythme un peu plus lent. Le secteur commercial connaît une modeste augmentation des émissions, et le secteur résidentiel, une diminution absolue. Dans ce dernier cas, les résultats sont étroitement liés à l'impact des règlements concernant l'efficacité énergétique sur les systèmes de chauffage des immeubles et autres équipements qui consomment de l'énergie.

• 1605

En ce qui concerne les politiques et mesures, le Programme national d'action sur le changement climatique (PNACC) est la réponse du Canada à la CCCC. Ce programme a été conçu comme une initiative des gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux, et approuvé par les ministres de l'Énergie et de l'Environnement de ces instances.

Le PNACC témoigne de l'intention du Canada de gérer le changement climatique dans le contexte global du développement durable et se veut un guide pour certaines mesures d'atténuation, notamment le Programme Défi-climat, la mise en oeuvre conjointe, un programme national de communication et la coopération internationale.

Le président: Je m'excuse de vous interrompre encore une fois. Je voudrais signaler aux membres du comité que M. Audet traite maintenant du chapitre 4 du rapport intitulé «Politique et mesures.»

Merci. Vous pouvez continuer.

M. Robert Audet: Le PNACC souligne également les activités d'atténuation prévues ou en cours dans un certain nombre de secteurs différents, y compris le gouvernement, l'industrie, les secteurs résidentiel et commercial, l'agriculture et la foresterie. Le PNACC établit également les orientations stratégiques pour les mesures reliées aux sciences et à l'adaptation.

Pour le Canada, les projections indiquent encore que le réchauffement sera plus considérable dans les régions continentales qu'au large des côtes, et dans l'Arctique que dans le Sud pendant l'hiver.

Le président: Excusez-moi. Je voudrais signaler aux membres du comité que nous avons maintenant sauté au chapitre 6. Est-ce exact?

M. Robert Audet: Oui.

Le président: Bien. Il serait peut-être utile que vous l'indiquiez aux membres du comité afin qu'ils puissent vous suivre, monsieur Audet. Merci.

M. Robert Audet: Je vais tout simplement recommencer.

Pour le Canada, les projections indiquent encore que le réchauffement sera encore plus considérable dans les régions continentales qu'au large des côtes, et dans l'Arctique que dans le Sud pendant l'hiver.

La plupart des modèles, sauf quelques-uns, continuent de prédire une augmentation moyenne des précipitations pendant l'hiver dans tout le Canada ainsi qu'une diminution de la teneur nette en eau du sol et des ressources hydriques dans la partie continentale du pays pendant l'été.

Les prédictions indiquent aussi que la fréquence et l'intensité des épisodes de chaleur et des tempêtes de convection pendant l'été augmenteront, mais que le nombre de jours secs, et donc la possibilité de sécheresse, pourront aussi augmenter. Pendant l'hiver, les épisodes de froid seront moins intenses, mais la fréquence des fortes tempêtes de neige augmentera peut-être.

De tels changements dans les extrêmes climatiques seront probablement plus dangereux pour les écosystèmes et la société canadienne que les changements des conditions climatiques moyennes qui sont à leur origine. D'après les projections, la santé des Canadiens serait compromise par de plus fréquentes vagues ou épisodes de chaleur, notamment dans les villes. Les personnes qui souffrent de troubles respiratoires et les personnes âgées qui supportent moins la chaleur seront les plus vulnérables. Les villes où il se produit des épisodes de smog accompagnés de chaleur connaîtront probablement les plus fortes augmentations du nombre d'hospitalisations et de mortalités.

L'adaptation n'est pas considérée comme une solution de rechange à l'atténuation nécessaire. Même si l'atténuation des effets au niveau mondial porte fruit, les mesures d'adaptation s'avéreront nécessaires.

Au Canada, on a retenu les domaines suivants comme champs d'action et de recherche pour l'établissement du potentiel d'adaptation ou l'application de stratégies ou de mesures: l'agriculture, spécialement quant au développement technologique; les ressources en eau; la foresterie et l'aménagement forestier; les zones côtières et les zones à risques; l'infrastructure urbaine et l'industrie de la construction; et enfin, l'économie.

• 1610

À Environnement Canada, le Groupe de recherche sur l'adaptation environnementale a été spécialement créé comme plaque tournante fédérale pour la recherche sur les changements atmosphériques visant à produire des connaissances qui faciliteront la prise de décisions ainsi que l'élaboration et la mise en oeuvre de mesures d'adaptation.

Une bonne partie de ces recherches ont comme point de convergence l'Étude canadienne sur les impacts climatiques et l'adaptation, une initiative fédérale dirigée par le Groupe de recherche sur l'adaptation environnementale d'Environnement Canada qui met à contribution divers collaborateurs du gouvernement fédéral, des provinces, du milieu universitaire, des organismes non gouvernementaux et du secteur privé dans le but d'évaluer les effets de la variabilité et du changement climatique sur l'ensemble du territoire canadien et de recenser et d'évaluer les mesures d'adaptation.

Enfin, je n'ai pas vraiment parlé des initiatives et de l'impact des initiatives. Mon collègue de Ressources naturelles Canada vous parlera davantage de ces questions.

[Français]

Monsieur le président, mesdames et messieurs, c'était un très bref résumé de mon exposé. Nous pourrons répondre à vos questions. Merci.

Le président: Merci, monsieur Audet. Nous essaierons d'obtenir un exemplaire de votre texte, lequel pourra servir de base pour notre rapport.

[Traduction]

Êtes-vous prêt à prendre la parole, monsieur Marty?

M. Neil McIlveen (directeur, Division de prévisions énergétiques, Ressources naturelles Canada): Oui, monsieur le président.

J'aimerais revenir brièvement sur ce que disait M. Audet concernant les prévisions et peut-être aider les membres du comité à les situer. Il est important de reconnaître que pour ce qui est des projections ou de l'aperçu concernant les émissions, on parle parfois de scénarios de maintien du statu quo. Cela signifie que sur le plan pratique la politique provinciale et fédérale actuelle est constante. Nous ne faisons pas d'hypothèses sur ce que la politique pourrait être dans l'avenir. Cela ne veut pas dire que nous croyons que la politique ne changera pas en 25 ans, mais le but de l'exercice consiste à déterminer les conséquences de la politique actuelle afin que les décisionnaires puissent déterminer si des changements sont nécessaires.

Cependant, nous tentons d'inclure le plus possible dans les prévisions les initiatives de politique actuelles ou vraiment probables—celles qui sont allées assez loin pour permettre d'en discerner les impacts. Je crois que quelqu'un vous a remis un petit tableau, qui se trouve également dans le rapport national. Il vous donne une idée de ce que nous pensons que sera l'impact de ces initiatives qui sont liées au Programme national d'action sur le changement climatique. Il s'agit d'initiatives fédérales, provinciales et municipales, et naturellement du Programme Défi-climat.

Le tableau montre l'augmentation des émissions par rapport au niveau de 1990. On commence donc à zéro en 1990 et tout ce qui est au-dessus ou qui serait au-dessus de cela en 2010 ou 2020, par exemple. Nous estimons que sans ces initiatives les émissions en l'an 2000 seraient d'environ 84 mégatonnes plus élevées qu'elles ne l'étaient en 1990. En l'an 2020, elles seraient de 311 mégatonnes plus élevées.

Grâce à ces initiatives, nous estimons que les émissions seront beaucoup moins élevées. D'ici à l'an 2000, elles seront de 46 mégatonnes supérieures au niveau de 1990, et d'ici à l'an 2020, elles ne seront que de 200 mégatonnes supérieures à la projection de référence.

L'impact est donc assez considérable, en prenant par exemple le chiffre de 2020. On parle de réduire les émissions de l'ordre de 100 mégatonnes sur un total de 600 ou 700 mégatonnes.

• 1615

Une autre conclusion que l'on peut déduire à partir de ce tableau, si on regarde l'espace blanc qui se trouve en bas, c'est que la réalisation d'un objectif de stabilisation à long terme, par exemple, est un défi considérable. Si on a réglé environ le tiers du problème grâce à ces initiatives courantes, il reste encore au moins les deux tiers à faire. Je suppose que l'on pourrait faire valoir qu'en un sens les initiatives actuelles portent sur des mesures qui sont très rentables. Dès qu'on commence à aller plus loin, on se retrouve avec des mesures qui sont peut-être moins rentables.

Merci.

Le président suppléant (M. David Pratt (Nepean—Carleton, Lib.)): Monsieur Marty, voulez-vous faire une déclaration?

M. Nick Marty (directeur, Division de l'élaboration de la politique et de l'analyse, Ressources naturelles Canada): Je parlerai tout simplement de la contribution de mon groupe à ce rapport.

Je suis directeur de la Division de l'élaboration de la politique et de l'analyse de la Direction générale de l'efficacité énergétique de Ressources naturelles Canada. Mon groupe a dressé la liste des programmes d'efficacité énergétique et des programmes d'énergie de remplacement qui sont décrits et énumérés dans cette publication. Nous avons par ailleurs effectué l'analyse des tendances en matière d'efficacité énergétique pour la période de 1990 à 1995. À la page 13 du rapport se trouve un tableau qui résume l'analyse. Il montre que même si la consommation d'énergie a augmenté entre 1990 et 1995, il y a eu une amélioration considérable de l'intensité énergétique et par conséquent de l'efficacité énergétique.

Mon groupe a également participé à l'évaluation de l'impact des divers programmes, notamment les programmes du gouvernement fédéral et ceux des provinces et des services publics, de sorte que je peux répondre à vos questions sur n'importe lequel de ces sujets.

Le président suppléant (M. David Pratt): Merci, monsieur Marty.

Le premier intervenant à poser des questions sera M. Casson, de l'opposition.

M. Rick Casson (Lethbridge, Réf.): Merci, monsieur le président.

Monsieur Audet, vous avez dit que la projection que vous avez ici est une projection, et non pas une prévision. Qu'entendez-vous par là? Qui a dit...?

M. Neil McIlveen: Je crois que c'est lui, mais je pense que je pourrais répondre à cette question.

Ceux qui travaillent dans le domaine aiment faire une distinction entre une projection et une prévision. Lorsqu'on fait une prévision, tous les éléments peuvent varier. Donc, si on faisait par exemple une prévision sur la demande en énergie, on tenterait d'incorporer les changements probables à la politique du gouvernement dans cette prévision. On aurait donc toutes sortes de variables.

Notre projection est un peu plus étroite en ce sens que nous gardons délibérément constante la politique du gouvernement et nous déterminons les conséquences du fait que l'on garde cette politique constante pendant une longue période. L'un des objectifs de l'aperçu de la projection que nous faisons consiste à trouver un appui pour l'analyse de la politique et la décision stratégique. On doit donc connaître en fait son point de départ.

M. Rick Casson: Un autre aspect de la question était l'adaptation, c'est-à-dire que certaines choses devront être faites, peu importe ce qui se produira d'ici là. Ai-je bien compris? Est-ce ce que vous voulez dire lorsque vous parlez de s'adapter à la situation?

M. Robert Audet: Ma responsabilité dans ce rapport a été de prendre des éléments ici et là dans le rapport, de les assembler et de m'assurer qu'ils se lisaient bien. Je n'ai pas participé à chacune de ces études indépendantes. Le chapitre sur l'adaptation a été préparé surtout par notre service atmosphérique environnemental. C'est Roger Street et son groupe qui ont surtout préparé ce chapitre. Je n'ai pas participé à l'aspect recherche du rapport, particulièrement en ce qui concerne ce chapitre.

• 1620

Il faudrait peut-être poser cette question plus tard à certains de mes collègues d'Environnement Canada.

M. Rick Casson: Très bien.

Il y a aussi l'impact des initiatives sur les émissions de gaz à effet de serre, entre 1990 et 2020—le tableau que j'ai ici. Vous nous avez dit que vos résultats projetés s'appuyaient sur les conclusions de 1990 à 1995, la différence, et que vous faisiez ensuite une projection selon le scénario de réduction actuel. J'essaie de comprendre ce tableau.

M. Neil McIlveen: Non, ce n'est sans doute pas aussi simple que cela. On ne prend pas tout simplement ce qui s'est passé entre 1990 et 1995, par exemple, pour faire des projections.

Nous avons en fait commencé avec toutes les initiatives qui ont été annoncées par les gouvernements fédéral et provinciaux et les administrations municipales ainsi que par les services publics, puis nous avons déterminé lesquelles semblaient avoir un effet perceptible, où il était possible de décerner un effet quantitatif. Nous avons donc tenté de prévoir ce qui pourrait arriver si ces politiques, ces programmes ou ces initiatives étaient maintenus.

M. Marty serait peut-être mieux placé que moi pour en parler, mais si on prend par exemple la réglementation concernant l'énergie et les logements, ou les appareils de chauffage à air chaud, il faudrait regarder non seulement ce qui se passe lorsque la réglementation entre en vigueur, mais également ce qui arrive à mesure qu'il y a roulement du stock des appareils de chauffage sur une période de 25 ans. On essaie d'en tenir compte. On doit donc dans ce cas particulier tenir compte du nombre de nouveaux appareils de chauffage à air chaud qui pourraient être achetés au cours d'une année donnée et combien de ces appareils risquent de devenir périmés au cours d'une année donnée. C'est assez complexe d'une certaine façon, mais on tente ainsi d'examiner chacune des initiatives et d'évaluer l'impact probable de cette initiative dans l'avenir.

M. Rick Casson: Le tableau dont je parle montre une diminution de l'utilisation finale entre 1995 et 2000. Est-ce exact?

M. Neil McIlveen: Je ne pense pas qu'il montre en fait une diminution. Si vous regardez l'espace entre le haut et le bas, il y a en fait une augmentation.

M. Rick Casson: Très bien. C'est de cela que vous parlez.

Merci, monsieur le président.

Le président suppléant (M. David Pratt): Merci, monsieur Casson. Monsieur Laliberte.

M. Rick Laliberte (Rivière Churchill, NPD): Je m'intéresse beaucoup à votre rapport. Comment mesure-t-on les émissions de dioxyde de carbone? C'est toujours un mystère pour moi. Comment sont calculées les émissions de dioxyde de carbone?

M. Robert Audet: Pour vous donner une réponse exacte, je devrai consulter mes collègues. Je n'ai pas participé à ce calcul. Je sais qu'ils ont des lignes directrices très strictes. Certaines de ces lignes directrices proviennent du GIEC. Ils doivent respecter certaines lignes directrices et certaines règles pour pouvoir faire tous les calculs.

M. Neil McIlveen: Je peux vous en parler davantage. Je ne fais pas ce travail, mais je connais les gens qui le font.

Comme vous le savez, les émissions de gaz à effet de serre proviennent surtout de l'énergie, particulièrement pour ce qui est du dioxyde de carbone. D'une certaine façon, l'estimation des émissions pour une année donnée est essentiellement une opération mathématique. Si on connaît la consommation d'énergie—quelle quantité de pétrole, de gaz naturel ou de charbon a été utilisé ou brûlé—il suffit de multiplier cette quantité par un facteur qui représente la quantité d'émissions associées à une unité de cette source d'énergie.

• 1625

Ces émissions sont établies de façon scientifique. Si on les connaît, il s'agit de faire un calcul relativement simple, c'est-à-dire de multiplier ce facteur par la quantité d'énergie qui est utilisée. Par exemple, Statistique Canada recueille l'information de façon trimestrielle.

Je crois que cela devient un peu plus complexe lorsqu'on essaie de calculer les émissions d'autres gaz, et lorsqu'il ne s'agit pas de sources d'énergie, par exemple, pour calculer le méthane provenant des décharges. Personne ne va inspecter toutes les décharges au Canada. On fait l'inspection de certaines décharges et on calcule la quantité de méthane selon la quantité de remplissage qui se trouve dans cette décharge.

Vous voudrez peut-être obtenir un avis plus scientifique sur la question, mais je pense que le niveau de confiance s'élargit à mesure qu'on s'éloigne de l'énergie.

M. Rick Laliberte: Très bien, je voulais tout simplement comprendre cela.

L'autre aspect est l'impact des émissions, le réchauffement de certaines régions des continents. Nous sommes tombés hier sur un petit document qui nous a été remis par les délégués chinois. Au cours des dernières années, leur température a augmenté de 0,25 degré, et l'impact de cette augmentation sur la région du Nord... Je pense que Mme Kraft Sloan nous a sensibilisés lorsqu'elle a apporté l'étude sur le delta du Mackenzie. Cette étude porte sur l'impact du changement climatique sur les régions du Nord.

Je voulais souligner que les initiatives dont vous parlez ici sont celles qui ont été prises depuis 1995. Il y a effectivement eu une augmentation, et nous disons qu'il s'agit d'une augmentation d'environ 13 p. 100 à l'heure actuelle par rapport au niveau de 1990. Mais peu importent ces initiatives, les émissions augmentent toujours; les émissions ne diminuent pas. Ce rapport contient-il une recommandation pour réduire les émissions, ou s'agit-il tout simplement d'une fiche de rendement?

M. Robert Audet: Exactement. Ce rapport ne fait que donner les faits pour le secrétariat et ceux qui participent à la conférence. Il a été effectué selon certaines lignes directrices pour permettre au secrétariat et à ceux qui participent à la conférence de comparer les pays entre eux.

M. Rick Laliberte: Donc c'est comme la terminologie des projections?

M. Robert Audet: Oui.

M. Rick Laliberte: Projection plutôt que prévision?

M. Robert Audet: Oui.

M. Neil McIlveen: Oui, c'est exact. Il faut voir ce rapport comme une projection plutôt que comme une prévision.

Je ne sais pas s'il y a une recommandation dans ce rapport. Je pense que cela est assez évident, c'est-à-dire qu'à notre avis tout au moins on ne pourra pas atteindre un objectif de stabilisation à long terme avec les mesures actuelles qui sont en place.

M. Rick Laliberte: Merci.

Le président suppléant (M. David Pratt): J'ai sur ma liste Mme Kraft Sloan, M. Jordan, puis M. de Savoye.

Mme Karen Kraft Sloan (York-Nord, Lib.): Tout d'abord, monsieur Knowles, si le comité ne les a pas déjà, je recommanderais que nous obtenions un exemplaire de toutes les études régionales qui ont été publiées jusqu'à ce jour. Je crois qu'il y a l'étude d'impact sur le bassin du Mackenzie, l'étude du Québec et l'étude de l'Atlantique, qui sera publiée ou qui a été publiée cette semaine. On a fait du travail sur l'étude des Grands Lacs, et l'étude canadienne devrait être publiée le 26 ou le 28 novembre.

• 1630

Je ferai tout simplement ma publicité à titre de secrétaire parlementaire. Je suis en train d'obtenir de l'information pour le comité concernant le symposium sur l'étude canadienne qui se tiendra à Toronto du 24 au 26 novembre, afin que les membres du comité puissent avoir cette information.

Pourriez-vous me dire ce que les gaz à effet de serre... Ce tableau s'arrête en 1990, et je demande si les émissions de gaz à effet de serre étaient plus élevées ou moins élevées en 1988 et en 1989.

M. Neil McIlveen: Il me faudra peut-être une minute.

M. Robert Audet: Eh bien, l'année de référence était 1990.

Mme Karen Kraft Sloan: Oui, mais j'aimerais savoir ce qu'il en était pour les années précédant l'année de référence.

M. Robert Audet: Oh. Je n'en suis pas certain.

M. Neil McIlveen: Voilà; si j'arrive à le lire. Je suis désolé, je croyais qu'il y avait davantage de données au sujet des années passées...

Mme Karen Kraft Sloan: Est-il possible d'obtenir ces chiffres?

M. Neil McIlveen: Il est possible de les obtenir. Si je continue à chercher, je vais peut-être les trouver, mais, oui, il est certainement possible de les obtenir.

Mme Karen Kraft Sloan: Très bien.

Je me demande si vous pouvez me dire si l'impact obtenu... À la figure 3, on a la production de combustibles fossiles pour 1990, 2000, 20l0 et 2020. Avez-vous tenu compte des sables bitumineux dans ces calculs?

M. Neil McIlveen: La réponse courte est oui. Les émissions associées à la production de sables bitumineux se trouvent dans l'avant-dernière série de barres.

Mme Karen Kraft Sloan: Très bien; donc vous avez de l'information concernant les niveaux de production de sables bitumineux pour l'an 2020?

M. Neil McIlveen: Oui; en fait, c'est contenu dans les prévisions sous-jacentes.

Mme Karen Kraft Sloan: Je serais curieuse de savoir quel est ce pourcentage pour les sables bitumineux.

M. Neil McIlveen: J'ai un tableau ici. J'aurai peut-être un peu de difficulté à lire ce tableau. Si je pouvais vous le donner... C'est le tableau 4.9.

Mme Karen Kraft Sloan: Je dois le lire aux fins du compte rendu, mais si vous voulez prendre quelques minutes pour trouver cette information, c'est très bien.

Donc vous avez dit qu'on avait tenu compte des sables bitumineux.

M. Neil McIlveen: Oui.

Mme Karen Kraft Sloan: Vous avez des données pour ce qui est du niveau de production de sables bitumineux en l'an 2020. Je suppose que nous avons une idée du coût d'extraction du pétrole des sables bitumineux, des produits pétroliers des sables bitumineux, ainsi que des recettes obtenues.

Nous avons eu de la difficulté à obtenir de l'information du ministère des Finances pour ce qui est du niveau de subventions prévu jusqu'en 2020, ou au-delà des quelques années suivantes. Puisque vous avez de l'information sur la production des combustibles fossiles, je pense que le ministère des Finances devrait avoir certaines données financières à cet égard.

M. Neil McIlveen: Vous devriez leur poser la question. Le fait que nous ayons une estimation de la production n'implique pas nécessairement qu'ils aient fait une estimation de l'investissement. Néanmoins, cette étude contient une estimation de l'investissement pour les sables bitumineux.

Mme Karen Kraft Sloan: Très bien.

M. Neil McIlveen: Je suppose qu'on peut donc se servir de ces chiffres pour en tirer les conclusions que vous...

Mme Karen Kraft Sloan: Certaines conclusions. Je sais qu'il faut inclure l'inflation et d'autres facteurs de ce genre.

Le président suppléant (M. David Pratt): Madame Kraft Sloan, pourriez-vous terminer? C'est le tour de M. Jordan.

Mme Karen Kraft Sloan: Bien sûr.

Le président suppléant (M. David Pratt): Voulez-vous que je vous inscrive aussi pour le deuxième tour?

Mme Karen Kraft Sloan: Oui.

• 1635

Si je comprends votre graphique, de 1990 à l'an 2000, c'est la production de combustibles fossiles qui est responsable d'une augmentation d'environ un tiers des émissions de gaz à effet de serre? Ma maîtrise des mathématiques ne dépasse pas la neuvième année.

M. Neil McIlveen: Oui, c'est à peu près ça. Oui, de 1990 à l'an 2000, c'est exact; j'ai l'impression que cela fait environ un tiers.

Cependant, il ne faut pas non plus oublier qu'au-delà de l'an 2000 la courbe s'aplatit. Encore une fois, c'est une projection fondée en grande partie sur les initiatives que prends, nous le croyons, l'industrie du gaz et du pétrole pour améliorer l'efficacité de la production et réduire les émissions à la fois de gaz carbonique, conséquence avant tout de sa propre consommation d'énergie, et de méthane dites fugitives.

Mme Karen Kraft Sloan: Oui, et c'est sur ce point que je tiens à vous interroger, car...

Le président suppléant (M. David Pratt): C'est le tour de M. Jordan. Vous avez déjà dépassé votre temps.

Mme Karen Kraft Sloan: Merci.

M. Joe Jordan (Leeds—Grenville, Lib.): Je voudrais revenir à ce tableau. Si je comprends bien, vous nous montrez trois choses. Vous nous montrez une projection des émissions fondée sur les initiatives et vous nous montrez où nous en serions si nous n'avions pas pris ces initiatives. N'est-ce pas?

M. Neil McIlveen: Oui, monsieur.

M. Joe Jordan: Très bien. Est-ce que la largeur des zones ombrées nous montre dans les résultats d'émissions projetés la part et le niveau de chaque secteur?

M. Neil McIlveen: Oui.

M. Joe Jordan: Donc, si je considère les chiffres, si je regarde le point où nous en sommes après les initiatives... Quand ces initiatives ont-elles commencé? En 1992?

M. Neil McIlveen: Il y a certaines variations. Nous avons essayé de saisir l'impact à partir, grosso modo, de 1995. C'est la raison pour laquelle il n'y a rien avant 1995.

M. Joe Jordan: Donc, sans ces initiatives, la pente de cette courbe aurait été beaucoup plus accentuée, montant aux environs de 130 mégatonnes en 1995? N'est-ce pas?

M. Neil McIlveen: Je ne suis pas sûr que votre lecture soit la bonne. Cette courbe montre qu'en 1995 il y avait 54 mégatonnes d'émissions de plus qu'en 1990.

Au-delà, en l'an 2000, par exemple, en l'absence d'initiatives associées pour l'essentiel au PNACC, selon nos projections les émissions seraient de 84 mégatonnes de plus. Cependant, grâce aux initiatives elles n'augmenteront que de 46 mégatonnes.

M. Joe Jordan: Et l'augmentation de ces émissions est la simple conséquence de la croissance démographique? Vous faites une simple extrapolation des utilisations et des besoins actuels? Je me demande pourquoi il n'y a pas plus de stabilité.

M. Neil McIlveen: Ce n'est pas tout à fait une extrapolation. Pour l'essentiel, nous sommes partis de certaines hypothèses—hypothèses généralement acceptées—sur la croissance démographique, la croissance économique et celle des prix de l'énergie, entre autres.

M. Joe Jordan: On peut donc en conclure que grâce à ces initiatives nos émissions n'augmentent pas autant qu'elles auraient dû?

M. Neil McIlveen: Oui.

M. Joe Jordan: Dans ce cas, j'aimerais poursuivre l'analogie de M. Laliberte.

Donc nous obtenons de bonnes notes, mais ce sont de bonnes notes de cours d'été. Il n'est pas certain que cela donne des résultats. Nous n'arriverons pas à une stabilisation ou, oserais-je dire, à une réduction sans ajustement de certains des facteurs que vous considérez comme constants, l'un d'entre eux étant la politique gouvernementale. C'est bien cela?

M. Neil McIlveen: Oui, je crois...

M. Joe Jordan: Il s'agit de l'importance relative des résultats. Comme un de nos témoins nous l'a dit l'autre jour, nous ramassons les fruits les plus faciles à attraper.

M. Neil McIlveen: Oui.

M. Joe Jordan: Merci.

Le président suppléant (M. David Pratt): Monsieur de Savoye.

[Français]

M. Pierre de Savoye (Portneuf, BQ): Merci, monsieur le président.

[Traduction]

Si je comprends bien vos projections, je n'aurai plus besoin d'aller dans le Sud en 2020; c'est le sud qui viendra à moi. Mais si je vous comprends toujours bien, je n'en serai pas content pour autant.

Le tableau que nous avons entre les mains—et si je me trompe, ne vous gênez pas pour me le dire—nous montre les émissions de gaz carbonique de sources canadiennes. Elles ne représentent que 2 p. 100 des émissions mondiales. Cela ne nous donne pas une idée de la quantité de gaz qui se déplacera dans les airs au cours des prochaines années, mais seulement une idée de ce que sera notre part grâce à ces initiatives. Suis-je pessimiste ou réaliste quand je dis qu'il faudra attendre un bon siècle que cela empire avant même qu'il y ait une raison d'espérer une certaine stabilisation? C'est vous les spécialistes. Quel est votre avis?

• 1640

M. Robert Audet: Je ne peux pas vraiment vous répondre. Il faudrait poser la question à un sous-ministre adjoint ou à quelqu'un de plus haut placé que moi dans la hiérarchie.

M. Pierre de Savoye: Pouvez-vous me dire si je suis pessimiste ou réaliste?

M. Robert Audet: Vous êtes réaliste.

[Français]

M. Pierre de Savoye: Si nous nous intéressons presque uniquement à la réduction des émissions, ce qui est important, nous devons aussi nous employer à apporter une aide aux autres pays pour qu'ils assurent également une réduction. Mais nous devrons surtout probablement faire des investissements considérables pour survivre au prochain siècle, qui risque d'avoir des effets dévastateurs sur la façon dont notre civilisation vit. Est-ce qu'un de vous serait en mesure d'apporter un éclairage à ce sujet?

[Traduction]

M. Neil McIlveen: Vous avez raison, c'est un problème mondial. De plus, la majorité des prévisions que j'ai vues suggèrent que la croissance des taux d'émissions dans les pays en voie de développement est beaucoup plus rapide que dans les pays industrialisés, et à un certain moment au cours du prochain siècle la contribution des pays en voie de développement au total des émissions sera probablement supérieure à celle d'aujourd'hui des pays industrialisés.

Il serait donc judicieux d'examiner avec soin les options d'investissement et les transferts de technologie de diverses sortes pour ces pays en voie de développement qui leur permettraient de continuer à se développer—c'est ce qu'ils veulent, et je ne crois pas que quiconque veuille les en empêcher—mais qu'ils le fassent d'une manière ou en utilisant des technologies qui reposent moins sur le carbone qu'ils ne le font ou qu'ils sont susceptibles de le faire actuellement. Je pense donc que vous avez raison. Il serait bon de prêter une très grande attention aux possibilités d'investissement ou de transfert de technologie pour ces pays.

[Français]

M. Pierre de Savoye: À votre connaissance, messieurs, existe-t-il quelque part dans le monde ou ici, au Canada, une étude qui chiffre l'investissement que nous devrions faire pour réussir à maintenir notre civilisation jusqu'au XXIIe siècle? C'est ça qui est en cause présentement.

M. Robert Audet: Le chapitre 8 parle de l'aide financière apportée aux autres pays, et on a les chiffres pour le Canada. Je m'apprête à mettre à jour ce chapitre 8 avec les nouvelles données que vient de nous transmettre l'ADCI. Très prochainement, je serai en mesure de mettre à jour le chapitre 8 et de vous en faire parvenir une partie.

Il y a plusieurs programmes d'aide nationaux et internationaux. Le Canada s'est engagé de façon active en vue d'aider les pays en voie de développement. Je ne saurais vous donner un chiffre au niveau du globe.

M. Pierre de Savoye: Merci.

• 1645

[Traduction]

Le président suppléant (M. David Pratt): Merci, monsieur de Savoye. Monsieur Charbonneau.

[Français]

M. Yvon Charbonneau (Anjou—Rivière-des-Prairies, Lib.): Je voudrais vous donner l'occasion de nous expliquer davantage certains passages du document que vous nous avez remis au moment où vous commenciez à parler. J'imagine que ce deuxième rapport d'évaluation sur l'évolution du climat a été préparé par des groupes d'experts intergouvernementaux. Est-ce que c'est bien le document que ces gens connaissent?

M. Robert Audet: C'est quelque chose de complètement différent.

M. Yvon Charbonneau: Il nous a été remis pendant que vous parliez. Puisque vous n'aviez pas soumis de mémoire, je pensais qu'il était important de lire ce document.

[Traduction]

Le président suppléant (M. David Pratt): Certains des documents qui ont été distribués concernent la réunion de ce soir.

[Français]

M. Yvon Charbonneau: Aux pages 50, 51 et 52 du deuxième rapport d'évaluation du groupe intergouvernemental sur l'évolution du climat figurent des passages qui jettent une douche d'eau froide sur la tendance à faire des projections à partir de modèles mathématiques qui s'empilent les uns sur les autres. Par exemple, quand on détecte une augmentation d'un demi-degré, la marge d'erreur du modèle est parfois plus grande que la variation constatée.

Je vous soumets une autre proposition. Puisque vous êtes des experts sur les questions atmosphériques, pouvez-vous nous dire s'il est vrai que vos relevés proviennent essentiellement de mesures de températures prises à la surface et que vous prenez très peu ou pas du tout de mesures au niveau de la basse atmosphère, par exemple par sonde à micro-ondes à partir de satellites? Est-ce que vous combinez toutes ces méthodes?

M. Robert Audet: Franchement, je n'en ai aucune idée. Il faudrait peut-être poser cette question au Service de l'environnement atmosphérique où travaillent les spécialistes en ce domaine.

M. Yvon Charbonneau: Sur notre ordre du jour, on précise sous votre nom que vous travaillez à la Direction des questions atmosphériques. Je croyais que c'était le bon endroit pour soulever cette question.

M. Robert Audet: Pas vraiment. On s'occupe surtout des politique et des mesures à prendre pour essayer d'enrayer...

M. Yvon Charbonneau: Quelles politiques peut-on formuler sur les questions atmosphériques si on n'est pas capable de savoir où sont prises les mesures d'évolution de la température? Sur quoi base-t-on ces politiques? Est-ce que vous mesurez seulement les températures à la surface ou si vous tenez compte des mesures à basse atmosphère? Mes sources me disent que s'il est vrai que l'on constate à la surface une légère augmentation de la température depuis quelques années, mais lorsqu'on mesure la température à basse atmosphère par sonde à micro-ondes à partir de satellites, non seulement on ne constate pas d'augmentation de la chaleur depuis 25 ans, mais il y a même un léger refroidissement à cette hauteur-là. Est-ce que vous êtes en mesure de commenter?

M. Robert Audet: Je ne suis pas en mesure de défendre la qualité et l'exactitude des modèles utilisés, ni la façon dont l'information est recueillie. Tout ce qu'on fait, c'est prendre les résultats et les interpréter.

M. Yvon Charbonneau: Ça doit être embrouillant de faire des politiques si les bases sont aussi...

M. Robert Audet: En fait, les modèles sont aussi bons que la science qui, ne l'oubliez pas, évolue de jour en jour. Les modèles sont perfectionnés et révisés de façon constante. En fait, au niveau de l'inventaire, les modèles sont révisés de façon régulière. Tout à l'heure, Mme Kraft Sloan mentionnait qu'elle voulait obtenir des données remontant à 1985 ou 1988. Je me demande si elle sera capable de faire une comparaison parce qu'à ce moment-là, les gaz inclus dans l'inventaire n'étaient pas nécessairement tous les mêmes qu'en 1990 ou 1995. À ce moment-là, on risque peut-être de comparer des oranges et des pommes. Il est difficile de faire des comparaisons. Quant aux modèles, ils sont rajustés de façon constante.

• 1650

[Traduction]

Le président suppléant (M. David Pratt): Monsieur Charbonneau, je dois donner la parole à M. Herron. Votre temps est terminé. Monsieur Herron.

M. John Herron (Fundy—Royal, PC): J'ai un petit commentaire à faire qui fait suite à ceux de mon collègue à ma droite.

Quand on vous a demandé à propos de ces projections—surtout à propos de ce graphique en particulier—s'il est possible de faire des projections jusqu'en l'an 2000 ou 2010, si même une certaine stabilisation sera possible, vous nous avez répondu que ce serait préférable de poser la question à un sous-ministre adjoint ou à quelqu'un de ce niveau dans la hiérarchie. Je ne comprends pas pourquoi il faut monter jusque-là.

Deuxièmement, vous représentez la Division de prévisions énergétiques et la Division de l'élaboration de la politique et de l'analyse. Je pense que ce sont les services que vous représentez qui devraient nous donner ce genre de renseignements. Pour essayer de déterminer ce que devrait faire le Canada pour pouvoir stabiliser ces émissions, voire en réduire certaines si possible, d'ici une certaine année, il nous faut ce genre de renseignements et ce genre d'explications venant de gens qui ont étudié la question d'une manière beaucoup plus directe que nous, de gens comme vous. Je vous pose donc la même question: pensez-vous que d'ici à l'an 2010, compte tenu des émissions actuelles, nous arriverons à une stabilisation?

M. Nick Marty: Les initiatives actuellement en place ne permettront pas d'atteindre la stabilisation d'ici à l'an 2010. Il faudra d'autres initiatives pour y arriver. C'est pour l'essentiel ce que montre cette projection.

M. John Herron: Tous les gouvernements et tous les intéressés faisant preuve des meilleures intentions du monde, estimez-vous que certaines initiatives ou certaines technologies peuvent être développées, étant donné l'amplitude de la croissance sur ce graphique, pour arriver à une certaine forme de stabilisation?

M. Nick Marty: Il existe déjà des technologies dans un certain nombre de secteurs qui permettront de grandes améliorations en matière d'efficacité énergétique. Dans une large mesure, l'adoption de ces technologies est une question économique.

Par exemple, nos services technologiques ont fait la démonstration qu'il était possible de construire des maisons qui utilisent la moitié de l'énergie utilisée par les maisons actuelles. Mais il faudra attendre plus de dix ans, voire 15 ans, pour que ces technologies deviennent rentables. Le marché ne voudra pas les absorber. Vous avez donc le choix entre réduire leurs coûts ou les subventionner d'une manière ou d'une autre pour qu'elles soient adoptées. Dans de nombreux domaines, ces technologies existent, comme par exemple pour les véhicules automobiles, mais il faut arriver à convaincre le marché d'accepter ces technologies plus avancées.

M. John Herron: Nous avons donc besoin d'initiatives plus draconiennes ou de changements de culture politique si nous voulons garder un espoir pour notre civilisation en 2010.

M. Nick Marty: Cela varie. Pour certaines choses la rentabilité court sur un ou deux ans. Améliorer les pratiques d'éclairage dans les édifices commerciaux, par exemple, n'a pas coûté très cher. Un certain nombre de nos mesures essaient d'inciter les constructeurs et les propriétaires d'édifices commerciaux à les adapter pour les rendre plus efficaces. Mais plus on essaie d'économiser l'énergie, plus la facture s'alourdit, plus le terme de rentabilité de ces initiatives devient long.

• 1655

Le président suppléant (M. David Pratt): Merci, monsieur Herron. Madame Kraft Sloan.

Mme Karen Kraft Sloan: Je voudrais revenir sur ce graphique, sur l'impact des initiatives. Avez-vous pris en compte le PDC dans cette courbe?

M. Neil McIlveen: Oui. Comme vous le savez, le PDC recouvre beaucoup de choses. Il recouvre actuellement près de 600 plans.

Dans certains cas nous avons essayé d'incorporer le PDC de manière assez directe, et en particulier dans la production de combustibles fossiles, c'est-à-dire pour l'essentiel l'industrie du pétrole et du gaz et aussi les sources non énergétiques et l'électricité. C'est en partie parce que dans ces domaines le PDC est en fait une initiative majeure.

En aval, c'est-à-dire pour l'essentiel dans les secteurs commercial, résidentiel, industriel et des transports, il a été quelque peu difficile d'incorporer le PDC. Par exemple, nous avons pris en compte l'engagement du PEEIC visant une amélioration de 1 p. 100 de l'intensité énergétique dans les secteurs industriels.

Le problème, c'est que le PDC se mélange avec tout un tas de programmes déjà existants. Nous estimons, M. Marty et moi-même, que dans une certaine mesure le PDC avive des consciences sur toute la question des programmes d'efficacité énergétique.

En bref, pour certains des secteurs, il est pris en compte spécifiquement et directement. Pour d'autres, c'est un petit peu plus nuancé.

Mme Karen Kraft Sloan: Si c'est très important pour le secteur de production des combustibles fossiles, par exemple, la partie de la courbe qui montre à quel point les émissions de gaz à effet de serre seront réduites d'ici à l'an 2020 est très importante du point de vue du PDC, n'est-ce pas? Est-ce qu'une partie assez importante du graphique concernant la production de combustibles fossiles est la conséquence du PDC?

M. Neil McIlveen: En fait, pratiquement tout.

Mme Karen Kraft Sloan: Êtes-vous au courant de la controverse à propos du PDC, qu'on soupçonne de ne pas véritablement réduire les émissions de gaz à effet de serre?

M. Neil McIlveen: Oui, je sais qu'il y a des opinions divergentes sur l'efficacité de ce programme.

Mme Karen Kraft Sloan: Il pourrait donc y avoir divergence d'opinions, et tout le monde ne conclurait pas en voyant ce graphique à un impact réel des politiques nationales—et j'inclus tous les paliers de gouvernement—censées aboutir à une réduction de 100 mégatonnes. Il ne s'agit pas de constatations.

M. Neil McIlveen: Non, il s'agit de prévisions.

Mme Karen Kraft Sloan: C'est ce qui est censé se produire.

M. Neil McIlveen: Exactement. Il peut y avoir divergence d'opinions. Néanmoins, c'est une opinion relativement informée. Elle n'est pas isolée. Nous avons discuté avec toutes sortes d'organismes, qu'il s'agisse des consommateurs ou des producteurs d'énergie, de ce qui était possible ou raisonnable. Dans le cas de la réduction des émissions associées à l'industrie des combustibles fossiles, nous avons eu de nombreuses discussions avec les représentants de l'Association canadienne des producteurs pétroliers. Nous leur avons fait part de notre intention de faire une projection qui attirerait l'attention sur leur industrie. Nous leur avons demandé si cela leur convenait. Ils nous ont répondu que oui. Ils estiment possible ce genre d'améliorations grâce à leurs initiatives de PDC et, à la rigueur, à une prolongation de celles-ci dans le temps.

• 1700

Mme Karen Kraft Sloan: Vous m'excuserez d'être aussi critique, mais c'est là pure conjecture. Rien ne permet d'affirmer que ces politiques et ces programmes, appliqués par tous les partenaires, que ce soit ceux du gouvernement ou ceux du secteur privé, rempliront effectivement leurs promesses. C'est une possibilité, mais cette possibilité de réduction des émissions de gaz à effet de serre existait déjà après Rio, en 1992. Nous n'avons pas vraiment rempli nos promesses, n'est-ce pas?

M. Neil McIlveen: Non.

Mme Karen Kraft Sloan: Si c'est le PDC qui doit assurer une part relativement importante de cette réduction et qu'il est entouré de controverses, j'ai du mal à croire que nous arriverons véritablement à faire descendre le volume à 203 plutôt qu'à 311 en l'an 2020. Nous avons peut-être besoin d'autres politiques gouvernementales.

M. Nick Marty: Quand on estime l'impact d'une initiative réglementée, le degré de certitude est beaucoup plus élevé. Quand nous estimons l'impact de notre réglementation minimum sur les équipements consommant de l'énergie, le degré de certitude est plus élevé que quand il s'agit de mesures volontaires, voire d'incitations financières. Il y a une certaine incertitude au niveau des résultats, car il est impossible de savoir si les promesses seront tenues ou non. L'avenir nous dira s'ils les tiennent.

Les industries consommatrices d'énergie en aval, comme l'industrie des pâtes et papiers, l'industrie chimique, jusqu'au PEEIC... ils préparent un rapport annuel pour 13 groupes différents d'industries dans lequel ils mesurent en permanence leurs progrès et la progression admissible fixée. Ces mesures sont prises d'une année sur l'autre, et nous pourrons déterminer ainsi si les résultats sont à la hauteur des prévisions.

Mme Karen Kraft Sloan: Je crois que c'est très utile pour déterminer les possibilités... Si nous faisons ce que nous disons vouloir faire, et étant donné que l'industrie et les autres partenaires s'y sont aussi engagés, je crois que c'est utile pour leur garder les pieds au chaud, pour ainsi dire, quitte à réduire la chaleur s'ils le méritent. Merci.

Le président suppléant (M. David Pratt): Monsieur Casson.

M. Rick Casson: Ce rapport sera-t-il utilisé par le gouvernement pour préparer sa position pour Kyoto?

M. Robert Audet: Il a été présenté au secrétariat au début de l'été. Il sera donné à toutes les parties présentes à Kyoto, et il pourra peut-être servir de base pour les nouvelles négociations.

M. Rick Casson: D'accord. Serait-il utile d'accumuler des données sur une plus longue période de temps pour avoir des projections plus précises? Il me semble, et je pense que c'est justement ce que vous disiez, que si nous continuons à accumuler des données précises pendant cinq ans de plus et que nous les ajoutions à celles que nous avons déjà recueillies, nous serons mieux en mesure de projeter ce qui se passera en l'an 2020.

• 1705

M. Nick Marty: Oui, nous croyons que recueillir de bonnes données est très important. Pour suivre l'évolution dans ce domaine, il faut également recueillir des données à toutes sortes de niveaux. Il faut que nous connaissions les progrès de l'efficacité énergétique pour les édifices, l'équipement et toutes les autres choses. Une des mesures mises en place par notre ministère est une initiative majeure d'amélioration de la collecte de données concernant l'efficacité énergétique. Nous soumettons tous les domaines énergétiques à des enquêtes très complètes, et notre intention est de faire de nouvelles enquêtes pour obtenir de meilleurs renseignements. Cela nous aidera à la fois à évaluer ce que nous pouvons faire et à évaluer l'impact de ce que nous faisons. Cela nous aidera aussi à mesurer les progrès des mesures déjà en place.

M. Rick Casson: Les mesures utilisées en 1990 qui ont servi de point de départ et que vous continuez à utiliser aujourd'hui en 1997... y a-t-il eu une amélioration considérable au niveau des procédés, de l'équipement, de tous les facteurs qui sont pris en compte pour faire ces projections?

M. Robert Audet: Me demandez-vous s'il y a eu des améliorations au niveau des données...

M. Rick Casson: Au niveau des procédures de collecte des données.

M. Nick Marty: Oui, nous avons, par exemple, lancé une enquête sur la consommation énergétique domestique. La première enquête a été faite en 1993, et la prochaine aura lieu en 1998. Nous sondons donc les foyers canadiens et nous recueillons des renseignements sur l'efficacité énergétique des divers produits utilisés. Ces sondages ne sont pas donnés. L'un d'entre eux va nous coûter près d'un million de dollars; nous ne pouvons donc nous permettre de les faire tous les ans. Nous ne pouvons faire ces sondages que tous les trois ou quatre ans.

Du côté de l'industrie, notre enquête sur les données a été élargie et inclut désormais des données plus détaillées sur divers segments du secteur industriel. Nous travaillons sur cette enquête en collaboration avec l'industrie. Nous travaillons également en collaboration avec Environnement Canada pour nous assurer que les données qu'ils ont sur les émissions sont compatibles avec les données que nous avons sur la consommation énergétique, afin d'être certains que nous travaillons sur les mêmes renseignements et que nous évaluons les progrès réalisés sur les mêmes bases.

M. Rick Casson: Étant donné la difficulté que pose l'obtention de renseignements précis pour un problème qui risque de nous toucher pendant des années, j'estime qu'un million de dollars par an n'est pas trop cher payer. C'est tellement crucial et important. Les conséquences sont énormes. Il est absolument essentiel d'avoir des données précises.

Vous est-il possible de projeter—je suppose que c'est difficile—quelle sera la technologie de demain pour les maisons, pour l'industrie, pour les voitures, et pouvez-vous l'inclure? Pouvez-vous l'inclure de façon à ce que la population, devenant de plus en plus consciente des problèmes d'énergie, fasse tout pour l'économiser?

M. Nick Marty: Comme Neil vous l'a dit tout à l'heure, ces projections sont le reflet de nos attentes au niveau des réactions du marché résultant de ces initiatives. Nous avons toute une série de programmes de R-D qui permettent de démontrer l'efficacité et les capacités technologiques existantes. Nous avons des renseignements sur les technologies existantes et sur celles de demain. Le problème majeur est de trouver les moyens de les faire accepter par le marché.

M. Neil McIlveen: Pour compléter ce que M. Marty a dit, nous essayons assurément d'incorporer dans les projections les percées technologiques. Comme il vient de le dire, dans le cas des technologies qui existent déjà et dont la commercialisation est raisonnablement proche, nous en tenons compte.

• 1710

Il est évident que plus on avance plus cela devient difficile, parce qu'il faut presque conjecturer sur certaines techniques dont on ne sait pas encore grand-chose. Si l'on fait des projections sur 20 ou 25 ans, il faut essayer de cerner les possibilités en portant un jugement sur l'intensité énergétique de l'économie. Mais quand on est à ce point éloigné dans l'avenir, cela devient un peu une devinette.

Le ministère des Ressources naturelles s'efforce de mettre au point un modèle qui tiendrait beaucoup mieux compte de la technologie, et j'espère que nous y parviendrons bientôt. Il existe des modèles de ce genre ailleurs dans le monde, et nous étudions la question. Cela semble être prometteur pour ce qui est de rendre les projections un peu plus pointues et de capturer au moins en partie le potentiel technologique.

M. Rick Casson: Merci.

Le président suppléant (M. David Pratt): Monsieur de Savoye.

M. Pierre de Savoye: Merci, monsieur le président.

Il y a quelques instants, M. Charbonneau a mis en doute l'utilité de la modélisation. Ces modèles sont-ils précis et sont-ils fiables? Je voudrais vous rappeler ce que disait Blaise Pascal au sujet du ciel et de l'enfer: «J'ignore s'ils existent, mais si je fais comme s'ils n'existaient pas et que je me trompe, j'en subirai les conséquences pour l'éternité. Je ne prendrai donc aucun risque; je vivrai ma vie comme si le ciel et l'enfer existaient.»

Pour revenir au sujet qui nous occupe, il n'existe pas deux modèles qui prédisent exactement la même chose, mais tous les modèles prédisent la même tendance. En outre, si M. Charbonneau était ici, je pense qu'il lui faudrait admettre que les nouvelles ne sont pas aussi bonnes qu'il le pensait, à cause des températures plus froides observées dans la haute atmosphère. On a observé par satellite la capacité calorifique de la couche nuageuse, on a mesuré sa capacité d'absorption de la chaleur. Les scientifiques ont constaté, à leur grand étonnement, que les nuages conservent beaucoup plus de chaleur qu'on ne le croyait. Par conséquent, plus il fait froid là-haut, plus il fera chaud ici-bas. Voilà de mauvaises nouvelles pour M. Charbonneau, et de mauvaises nouvelles pour nous tous.

Je fais des observations auxquelles vous voudrez probablement répondre, mais je vais continuer pendant quelques instants et je vais vous poser une question précise.

Chaque fois que nous dépensons un dollar au Canada pour réduire nos émissions de gaz, nous nous attaquons à seulement 2 p. 100 des émissions mondiales. Il est évident qu'il faudra que d'autres pays apportent leur contribution. C'est absolument nécessaire, parce que même si nous obtenions des résultats deux fois meilleurs que prévus, nous serions dans le pétrin si le reste du monde obtenait les résultats que l'on prévoit. Il faut faire beaucoup mieux.

Devrions-nous investir l'argent en question dans notre pays, ou bien quelque part ailleurs dans le monde, où l'effort sera beaucoup plus productif? Ce n'est pas leur sort qui m'inquiète, c'est le mien. Qu'en pensez-vous?

M. Neil McIlveen: C'est une question lourde de sens sur le plan politique, et ce n'est pas vraiment à nous de décider des aspects politiques de la question.

Comme nous le disions tout à l'heure, il est certain qu'il est logique d'investir dans les régions où ce que les économistes appellent le coût marginal de réduction du carbone est plus bas. Je suis certain qu'il y a dans d'autres pays, et peut-être dans des pays en développement, des possibilités intéressantes qui n'existent pas ici.

Par contre, je ne sais pas si l'on pourrait adopter une politique qui se limiterait à cela. Je pense que c'est impossible pour plusieurs raisons. Mais je suis assurément d'accord pour dire que ce serait un élément utile de la politique que de voir ce qu'il est possible de faire à l'étranger. En fait, par l'entremise de notre ministère—et d'autres ministères y participent aussi par l'entremise de ce que l'on appelle la mise en oeuvre conjointe et d'un programme dont je ne me rappelle jamais le sigle—nous participons à la mise en oeuvre conjointe, qui revient précisément à cette idée: que les compagnies canadiennes peuvent investir dans des activités visant à réduire les émissions dans d'autres pays et obtenir des crédits pour ces activités.

• 1715

C'est une idée très répandue au sein de la communauté internationale. Je crois savoir que le peu de progrès réalisé s'explique par le fait que les pays en développement s'inquiètent de savoir ce que tout cela signifie pour eux. Ce qui sous-tend la notion d'une mise en oeuvre commune, c'est la possibilité que l'on fasse des investissements dans la réduction des émissions qui seraient plus efficients et plus efficaces, peut-être dans les pays en développement ou ailleurs en tout cas.

M. Nick Marty: J'aimerais ajouter à cela que nous pouvons au Canada tirer des bénéfices économiques d'un investissement dans les économies d'énergie, du moins jusqu'à un certain point. Nous en avons certainement fait l'expérience avec nos immeubles commerciaux. Nous avons constaté qu'il est possible de mettre en conformité des immeubles commerciaux pour qu'ils consomment 20 p. 100 moins d'énergie. Les économies réalisées compensent les coûts initiaux à tel point que les fournisseurs de services énergétiques dans le secteur privé peuvent entreprendre ces travaux de mise en conformité et être payés grâce aux économies réalisées; personne d'autre n'a à investir quelque somme que ce soit. D'ailleurs, comme vous le savez, nous faisons la même chose au gouvernement fédéral par notre initiative visant les immeubles fédéraux.

Ainsi, il y a des avantages à en tirer. Toutefois, dans certains secteurs, le Canada peut se vanter d'une plus grande efficacité énergétique que d'autres pays. Le fait que nous soyons de grands consommateurs d'énergie donne plutôt l'impression du contraire, mais nous sommes très économes d'énergie dans un certain nombre de secteurs. Quand on songe à d'autres pays, l'Europe de l'Est et certains pays en développement, par exemple, il serait possible de réaliser pour le même investissement davantage d'économies que ce ne serait le cas au Canada. Ainsi, il serait possible de s'attaquer à ce problème mondial en agissant à ce niveau-là aussi.

M. Robert Audet: La rencontre à Kyoto portera sur tous ces aspects. Voilà la raison pour laquelle nous négocions cet accord.

M. Pierre de Savoye: Me permettez-vous une dernière intervention?

Existe-t-il un graphique comparant les coûts de l'inaction aux coûts de la prévention? Par exemple, si ne rien faire pendant un an coûte tant, cela vaut-il la peine? Je ne parle pas de la dimension humaine, mais uniquement des considérations d'ordre économique. Si nous ne faisons pas cet investissement nous n'échapperons pas à la dépense de toute façon, puisque nous perdrons des cultures en Alberta et des forêts au Québec, nous aurons des problèmes de santé, etc. Existe-t-il un graphique qui pourrait nous aider à décider quelle somme nous devons investir à la grandeur du globe afin de diminuer nos risques ou de repousser les risques qui existent?

M. Neil McIlveen: Je ne le crois pas. J'ai vu quelques études théoriques qui tentent de faire ce que vous réclamez, à savoir une analyse coûts-avantages qui pourrait nous servir de point de départ. Je ne me souviens pas d'avoir vu une analyse aussi détaillée que cela.

Dans un certain sens, nous devons tenter de nous faire une idée des avantages de l'action comparativement aux coûts de l'inaction—et c'est, je crois, ce que vise à faire l'étude canadienne—et d'exprimer au moins en termes physiques ce dont il s'agit: quel effet cela a-t-il sur le rendement des récoltes, sur la croissance de la matière ligneuse, ce genre de choses. Si l'on peut en arriver à un consensus quelconque sur les conséquences physiques, il sera peut-être moins difficile de tenter ensuite de chiffrer certaines des conséquences et de faire un calcul coûts-avantages, comme vous le suggérez. Je ne connais pas tout ce qui a été écrit sur le sujet, mais je ne crois pas qu'une telle analyse détaillée existe.

C'est bien différent pour les pluies acides et autres choses de ce genre. Nous savons que les poissons meurent ou encore que les arbres ne deviennent pas aussi gros. Il est donc possible de donner une valeur monétaire aux conséquences et de faire une analyse coûts-avantages de la réduction des émissions d'anhydride sulfureux. C'est plus difficile à faire pour le dioxyde de carbone ou les gaz à effet de serre.

• 1720

M. Pierre de Savoye: Merci.

Le président suppléant (M. David Pratt): Monsieur Jordan.

M. Joe Jordan: J'aimerais remercier mon collège parce qu'il a fait dévier la discussion, qui est maintenant beaucoup plus intéressante que les propos sur les courbes de régression. Je sais que nous nous éloignons de votre domaine de compétence.

Quand j'analyse la question... et je crois partager la passion du député. Certains comparent ce débat à celui sur le tabac et sur le lien entre le tabagisme et le cancer: un groupe dit que la cigarette le cause et l'autre groupe dit le contraire. Je pense qu'au bout du compte il suffit d'admettre que ce n'est jamais une bonne chose d'émettre ces polluants dans l'environnement. Si nous devons attendre d'avoir des preuves incontestables, nous risquons d'attendre trop longtemps et de nous retrouver avec des effets dévastateurs.

À mon avis, nous devons concentrer nos efforts sur une question beaucoup plus vaste, celle du développement durable. Le réchauffement de la planète est le symptôme d'un problème—à savoir que nos pratiques ne laissent pas l'environnement inchangé. Nous nous retrouverons devant rien si nous ne changeons pas nos façons de faire. Je ne crois pas que cela soit l'essentiel... je pense que vous êtes beaucoup mieux placés sur ce terrain-là.

Cela dit, je ne crois pas que nous puissions régler le problème, à moins de trouver à court terme des pratiques durables au plan de l'environnement et de l'économie qui nous serviront de point de départ. Ainsi, le fait que le Canada soit responsable de 2 p. 100 des émissions, avec « p. 100 de la population... Au plan structurel, je crois que notre économie reflète le problème plus général, à savoir que les pays industrialisés contribuent une part disproportionnée des polluants. Nous devons changer cette tendance.

Nous ne réussirons jamais à convaincre tous les pays du monde à assumer les conséquences économiques. Au Canada, nous ne réussissons même pas à convaincre les provinces d'accepter les conséquences économiques de normes et autres choses de ce genre. Le Canada doit à mon avis s'engager à adopter à court terme des pratiques durables aux plans de l'environnement et de l'économie, et ces pratiques existent déjà, et il doit démontrer que les entreprises peuvent malgré tout devenir plus compétitives. Nous devons prêcher par l'exemple au lieu de nous contenter de suivre le mouvement.

L'idéal serait un consensus mondial, mais c'est un rêve inatteignable. Nous devons mieux cibler l'utilisation des ressources dont nous disposons. L'un des groupes de témoins nous a dit que les initiatives d'économie d'énergie au Canada ont entraîné des économies d'environ quatre milliards de dollars.

Si vous donniez quatre milliards de dollars aux experts en sources d'énergie de remplacement, je pense que nous pourrions faire de réels progrès. Je ne vois pas comment nous pourrions procéder autrement. L'avenir sera très sombre si nous n'agissons pas. Pour se rendre de A à B, il faut que toutes les étapes rapportent des avantages économiques à court terme. Sans cela rien ne se fera. Je ne vois pas ce qui nous motiverait à agir sans cette contrepartie.

Ce sont les prochaines générations qui paieront le prix de l'inaction. Nous n'avons pas l'habitude de réfléchir de cette façon. Et même quand nous le faisons, nous n'avons pas l'habitude d'agir pour prévenir cela.

Je ne fais qu'apporter ma pierre à l'édifice. Je ne sais pas si ma contribution est utile, mais il me semble que le Canada a un rôle à jouer. Nous pouvons démontrer que des pratiques durables comportent des avantages économiques certains, et cela incitera d'autres pays à emboîter le pas. Sans cela, ils seront désavantagés au plan économique. Nous y gagnerons des parts de marché. Nous leur ferons comprendre, en utilisant un vocabulaire qu'ils comprennent, celui de l'argent et de l'économie, que c'est la voie à suivre.

Sans cela, rien ne se fera.

M. Robert Audet: J'aimerais commenter la première partie de votre exposé. C'est bien vrai que le Canada est responsable de 2 p. 100 du total des émissions et compte environ 5 p. 100 de la population mondiale. Par habitant, cela nous place au troisième rang des pollueurs, après le Japon et les États-Unis. Mais il est tout aussi important de tenir compte des circonstances qui expliquent ce phénomène. Le Canada est un pays septentrional. Il fait très froid. Les distances sont énormes.

Voilà la réalité avec laquelle nous devons vivre. Je ne dis pas que nous devons prendre prétexte de cela pour ne rien faire, mais...

M. Joe Jordan: Mais si nous y parvenons ici, c'est possible partout ailleurs.

• 1725

M. Robert Audet: Oui, sans doute. Nous ne pouvons pas utiliser ce prétexte, mais nous ne pourrons sans doute jamais nous comparer à un pays méridional ou à un très petit pays où il est plus facile de contrôler les émissions.

Le président suppléant (M. David Pratt): Monsieur Audet, permettez-moi de vous interrompre—c'est l'une des prérogatives de la présidence—mais avez-vous bien dit que le Canada est responsable de 2 p. 100 des émissions, mais compte 5 p. 100 de la population mondiale?

M. Robert Audet: C'est 0,5 p. 100.

Le président suppléant (M. David Pratt): Ah, 0,5; je suis désolé. Cela a plus d'allure.

Avez-vous terminé, monsieur Jordan?

M. Joe Jordan: Oui.

Le président suppléant (M. David Pratt): Madame Kraft Sloan.

Mme Karen Kraft Sloan: J'aimerais revenir sur le point soulevé par M. Jordan. Il y a quelques années, le marché mondial des produits écologiques s'élevait d'après certains calculs à environ 600 milliards de dollars. On calcule maintenant que cela représente plus de 900 milliards de dollars, ce qui est une augmentation remarquable. Cela montre que le Canada pourrait jouer gagnant sur tous les tableaux: nettoyer l'environnement et favoriser le développement économique, la croissance du commerce et la création d'emplois, parce que ces industries ont généralement un fort coefficient de main-d'oeuvre.

Si je me reporte à votre graphique sur l'impact des initiatives de lutte contre les émissions de gaz à effet de serre, je me demande si vous pouvez faire au comité quelques suggestions propres à accentuer la tendance à la baisse ou à ralentir la croissance des émissions de gaz à effet de serre.

M. Joe Jordan: À la cantonade...

Des voix: Ah, ah.

Mme Karen Kraft Sloan: Avez-vous des suggestions à nous faire?

M. Joe Jordan: ... sauf que quelqu'un prend tout cela par écrit.

M. Nick Marty: Je pourrais mentionner quelques secteurs où nous devrons réduire notre consommation énergétique, certainement au niveau de l'utilisation finale. Il reste encore d'importants progrès à faire dans les secteurs résidentiel et commercial, même s'ils semblent contribuer moins que d'autres secteurs au problème, d'après les graphiques. Cela est dû en partie au fait que souvent les émissions du secteur de l'électricité sont attribuées à ce secteur, et il est donc important d'économiser l'électricité.

Il est important aussi d'améliorer l'efficacité énergétique du parc résidentiel existant. Nous croyons qu'il serait possible de faire là de nettes améliorations; le problème, c'est de savoir exactement comment s'y prendre. Il en va de même des immeubles commerciaux existants. Nous croyons qu'il serait possible d'accroître de 20 p. 100 ou plus l'efficacité énergétique des immeubles commerciaux.

Le secteur de l'industrie pose un problème plus épineux. Il y aurait certainement moyen d'agir au niveau des systèmes auxiliaires, des moteurs, des entraînements par moteur, des ventilateurs et des pompes, par exemple, qui comptent pour une forte consommation d'électricité dans le secteur industriel. Il reste beaucoup à faire pour optimiser l'utilisation des moteurs, et non pas uniquement des moteurs eux-mêmes, mais de tous les systèmes d'entraînement par moteur. Ce serait un important terrain d'action.

Il y a aussi des possibilités au niveau de la cogénération, où l'on utilise les rejets de chaleur en les recyclant dans les immeubles ou dans les processus industriels ou en les utilisant pour produire de l'électricité.

Il y aurait moyen d'agir aussi au niveau des procédés industriels eux-mêmes, mais cela se fait en réalité quand l'industrie elle-même décide de faire de nouveaux investissements pour améliorer l'efficacité de ses usines. C'est à ce moment-là qu'elle doit faire des investissements pour accroître l'efficacité énergétique.

Le secteur des transports reste un énorme défi. C'est un secteur qui consomme énormément de carburants fossiles et qui contribue donc énormément aux émissions. Il faut soit rendre les véhicules moins énergivores, soit convaincre les gens de laisser leur voiture à la maison et de pratiquer le covoiturage ou d'utiliser d'autres modes de transport. Dans l'avenir il sera certainement possible d'utiliser des carburants de remplacement dans le secteur des transports, mais ce n'est pas pour demain.

• 1730

Ces suggestions concernent en réalité les utilisations finales, mais c'est un véritable défi de trouver les mécanismes ou les instruments de politique pour obtenir que des progrès soient faits dans ces secteurs.

Neil, vous voudrez peut-être ajouter quelque chose sur la production.

M. Neil McIlveen: Oui. Nous pourrions mettre l'accent entre autres sur les émissions provenant de la production d'électricité. Ces émissions comptent pour 15 à 20 p. 100 du total. La plupart sont dues à l'utilisation de charbon, et, dans une moindre mesure, de pétrole et de gaz naturel.

L'Association canadienne de l'électricité a donné à entendre qu'il serait peut-être possible de réduire ces émissions en convertissant au gaz naturel les usines alimentées au charbon lorsqu'elles atteindront la limite de leur durée de vie utile. Il serait aussi possible de restructurer le secteur de l'industrie et d'améliorer les perspectives de commerce interprovincial. Si vous songez que l'Ontario est situé entre deux provinces qui produisent essentiellement de l'hydro-électricité—qui n'est pas polluante, bien sûr—cela donne à penser que le commerce pourrait s'avérer avantageux.

Comme vous le savez sans doute, c'est ce qui sous-tend le chapitre sur l'énergie de l'accord sur le commerce intérieur. Il vise à faire la promotion de ce commerce. Ainsi, j'estime qu'il existe des pistes d'action dans le secteur de l'électricité, même si elles ne mettent pas en jeu des moyens technologiques, et les sources d'énergie renouvelable auraient aussi leur place. À mon avis, la préférence ira à la conversion du charbon au gaz et à la réduction des obstacles au commerce.

Quant au pétrole et au gaz, je crois qu'il y a des possibilités, mais il faudrait que j'aie des connaissances en science beaucoup plus poussées pour pouvoir vous les décrire toutes. Je crois comprendre qu'il y a de la place pour l'amélioration dans ce secteur, malgré ce que nous avons indiqué sur le graphique, pour ce qui est d'améliorer les pratiques de production du secteur du pétrole et du gaz.

Si vous connaissez le concept de la séquestration, vous savez qu'il serait possible de prendre le dioxyde de carbone d'une centrale électrique alimentée au charbon, par exemple, et de l'injecter dans les puits pour assister à la récupération du pétrole. Cela permet d'extraire davantage de pétrole. Certains pourront croire que c'est peu de chose, mais ce serait une façon de recycler le dioxyde de carbone. Il y a donc des possibilités à ce niveau-là. On a fait peu d'études là-dessus, et je pense qu'il faudrait peut-être accroître l'effort.

M. Karen Kraft Sloan: Bien, merci.

Le président suppléant (M. David Pratt): Monsieur de Savoye.

[Français]

M. Pierre de Savoye: Vous venez de parler de la fabrication d'électricité à partir d'usines chauffées au charbon. Nous savons que les Américains proposent la déréglementation, laquelle est déjà d'ailleurs en vigueur aux États-Unis et à laquelle Hydro-Québec s'est déjà associée, bien que d'autres provinces canadiennes ne l'aient pas encore fait.

À deux reprises au cours des deux dernières années, j'ai eu l'occasion de rencontrer nos collègues américains. Je leur ai demandé si le transport de l'électricité à travers le continent amènerait des entreprises de services américaines à fabriquer davantage d'électricité à partir de combustible fossile, ce qui irait à l'encontre des objectifs que l'on vise. On m'a dit de ne pas m'inquiéter, mais je m'inquiète quand même. J'aimerais avoir votre opinion à ce sujet.

[Traduction]

M. Neil McIlveen: Vous devrez me pardonner, mais je n'ai pas tout saisi.

M. Pierre de Savoye: Les Américains projettent de transporter l'électricité sur tout le continent. Ils produiront cette électricité dans des centrales alimentées par des combustibles fossiles. Cela contribuera dans une certaine mesure à accentuer les courbes, et non pas à réduire les émissions. C'est ce que j'ai expliqué à nos homologues américains. Qu'en pensez-vous? Cette production d'électricité risque-t-elle de faire augmenter le total des rejets de dioxyde de carbone?

• 1735

M. Neil McIlveen: Je ne suis pas certain de connaître la réponse à cette question. Dans un sens comptable très strict, cela n'entraînera peut-être pas d'augmentation de nos émissions, mais les leurs augmenteront. Cependant, le total des émissions pourra augmenter.

Je ne cherche pas à me défiler, mais c'est certainement une possibilité. Certains suggèrent qu'il y ait déréglementation aux États-Unis, étant donné que leurs centrales sont en majorité alimentées au charbon, et, comme vous l'avez dit, ils pourront transporter cette électricité d'un État à l'autre, et même l'exporter, et cela ferait augmenter leurs émissions et, par conséquent, le total mondial des émissions.

C'est une possibilité. J'hésiterais à dire que c'est probable. C'est possible. Cela dépendra de l'attitude du secteur de l'électricité aux États-Unis une fois qu'il aura été déréglementé. Les centrales alimentés au charbon sont-elles rentables? Je suppose qu'elles le sont dans un certain sens. Elles sont pour la plupart vieilles, et l'amortissement a été pris.

Par contre, la technologie au gaz, qui est évidemment moins polluante, est extrêmement compétitive par rapport à une centrale thermique alimentée au charbon à l'heure actuelle. C'est rapide, c'est modulaire, et il n'est pas nécessaire de faire des études environnementales très poussées pour construire une telle installation. C'est très possible que des entrepreneurs, des entreprises, aux États—Unis, choisissent le gaz plutôt que le charbon, même s'ils en ont beaucoup, parce que, au bout du compte, cela pourrait leur coûter moins cher, et c'est plus rentable pour eux.

Comme vous vous en rendez probablement compte, je suis ambivalent à ce sujet. Je ne suis pas sûr que...

M. Pierre de Savoye: Mais cela illustre le fait que nous pourrions fort bien, en dépit de nos meilleures intentions, acheter de l'électricité aux États-Unis, qui contribuent peut-être à empirer le problème des gaz à effet de serre.

M. Neil McIlveen: De plus en plus, avec la restructuration de l'industrie, certains soutiennent qu'on ne peut pas vraiment savoir d'où provient l'électricité qu'on achète. On n'ira plus s'adresser directement à la Con Edison ou à une autre entreprise pour acheter telle quantité de kilowattheures. On passera probablement par un courtier. En tout cas, c'est ainsi que cela se passe dans le secteur du gaz naturel. On ne sait pas nécessairement d'où provient l'électricité. Le courtier est l'intermédiaire.

M. Pierre de Savoye: Dans ce cas, je vais continuer à exercer des pressions sur nos homologues américains.

Le président suppléant (M. David Pratt): Je pense qu'il n'y a pas d'autres questions. Oui, monsieur McIlveen.

M. Neil McIlveen: Je crois que Mme Karen Kraft Sloan a posé une question au sujet des sables bitumineux ou pétrolifères. J'avais trouvé la réponse, mais je l'ai immédiatement perdue. Nous avons tenu compte dans nos prévisions de... nous avons réparti cela en deux types, l'extraction des sables bitumineux et ce que nous appelons l'exploitation in situ. Pour l'extraction des sables, d'après nos projections, la production passerait d'environ 280 000 barils par jour actuellement à environ 450 000 barils par jour en 2020, c'est-à-dire qu'elle ne doublerait pas tout à fait, mais presque.

Quant à la récupération in situ, procédé qui est utilisé à Cold Lake, la production passerait de 150 000 barils par jour à 400 000 barils par jour. Si l'on additionne les deux, cela donne la production totale pour les sables bitumineux. Ces chiffres sont essentiellement fondés sur de nombreux entretiens avec des représentants de l'Alberta et du groupe de travail national de l'évaluation. En fait, ces prévisions sont peut-être un peu basses, car j'ai entendu dire depuis que bon nombre de demandes ont été présentées relativement à des projets d'exploitation des sables bitumineux.

• 1740

Mme Karen Kraft Sloan: Oui, il y en a plus.

M. Neil McIlveen: Ces projets ne seront pas tous nécessairement réalisés, mais ce chiffre est peut-être un peu bas.

Mme Karen Kraft Sloan: Merci beaucoup.

Le président suppléant (M. David Pratt): Merci encore, monsieur McIlveen, monsieur Audet et monsieur Marty, d'être venus nous faire profiter de vos connaissances cet après-midi. Nous vous en sommes reconnaissants.

Merci aux membres du comité d'avoir été indulgents pour le président suppléant.

La séance est levée.