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Publications de la Chambre

Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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TABLE DES MATIÈRES

Le lundi 24 avril 1995

MESSAGE DU SÉNAT

    Le président suppléant (M. Kilger) 11649

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

LA LOI SUR LA GESTION DES FINANCES PUBLIQUES

    Projet de loi C-263. Reprise de l'étude de la motion de deuxième lecture 11649
    Adoption de la motion 11649
    Report du vote sur la motion 11656

SUSPENSION DE LA SÉANCE

    Suspension de la séance à 11 h 52 11656

REPRISE DE LA SÉANCE

    Reprise de la séance à 12 h 00 11656

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LOI DE 1995 SUR LA RÉVISION DES LIMITES DES CIRCONSCRIPTIONS ÉLECTORALES

    Projet de loi C-69. Reprise de l'étude de la motion en troisième lecture 11656
    M. Harper (Calgary-Ouest) 11660
    M. Harper (Calgary-Ouest) 11665
    Report du vote sur la motion 11669

LA LOI SUR LES PRÊTS DESTINÉS AUX AMÉLIORATIONS AGRICOLES ET À LA COMMERCIALISATION SELON LA FORMULE COOPÉRATIVE

    Projet de loi C-75. Motion portant deuxième lecture 11669
    M. Chrétien (Frontenac) 11670

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

LA TRAGÉDIE DE OKLAHOMA CITY

LA TRAGÉDIE DE OKLAHOMA CITY

LA TRAGÉDIE DE OKLAHOMA CITY

LA JOURNÉE «NAÎTRE À LA LECTURE»

LE CHAMPIONNAT MONDIAL DE CURLING

LES SOINS DE SANTÉ

LE PEUPLE ARMÉNIEN

LA SOCIÉTÉ CANADIENNE DE SCHIZOPHRÉNIE

LA YELLOWHEAD HIGHWAY ASSOCIATION

LA JOURNÉE «NAÎTRE À LA LECTURE»

LE CHAMPIONNAT NATIONAL JUNIOR DE JUDO

LES SERVICES DE SÉCURITÉ

LE RÉFÉRENDUM QUÉBÉCOIS

LE RWANDA

LA VIOLENCE

    M. Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine) 11674

LE RWANDA

LA CONTREBANDE

    M. Harper (Simcoe-Centre) 11675

LA SEMAINE NATIONALE DE L'ACTION BÉNÉVOLE

QUESTIONS ORALES

LE SOMMET DU G-7

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 11675
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 11676
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 11676

LE SERVICE CANADIEN DU RENSEIGNEMENT DE SÉCURITÉ

LE CRTC

LA TAXE SUR LES PRODUITS ET SERVICES

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 11678
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 11678

L'ÉCONOMIE

    M. Speaker (Lethbridge) 11678
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 11678
    M. Speaker (Lethbridge) 11678
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 11678

LA COTE DE CRÉDIT DU CANADA

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 11679
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 11679

L'IMMIGRATION

LES TÉLÉCOMMUNICATIONS

    Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 11679
    Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 11680

LES TÉLÉCOMMUNICATIONS

L'IMMIGRATION

    M. Harper (Simcoe-Centre) 11680
    M. Harper (Simcoe-Centre) 11680

LE RWANDA

L'INFRASTRUCTURE

    M. White (Fraser Valley-Ouest) 11681
    M. White (Fraser Valley-Ouest) 11681

L'ASSURANCE SUR LA VIE

L'IMMIGRATION

    M. Gauthier (Roberval) 11682
    M. Gauthier (Roberval) 11682
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 11682

L'AÉROPORT INTERNATIONAL PEARSON

L'ANALPHABÉTISME

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 11683
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 11683

L'ÉDUCATION

PRÉSENCE À LA TRIBUNE

AFFAIRES COURANTES

LE RAPPORT SUR LES ÉLECTIONS PARTIELLES

NOMINATIONS PAR DÉCRET

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE

    Motion d'approbation du 73e rapport 11684
    Adoption de la motion 11684

LA MOTION NO M-5

    Annulation de l'ordre; retrait de la motion 11684

PÉTITIONS

LA TAXE SUR LES PRODUITS ET SERVICES

LE PEUPLE ARMÉNIEN

LES DROITS DE LA PERSONNE

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

LES BOÎTES VOCALES

LA COMMISSION CANADIENNE DU BLÉ

LA LOI SUR LES ARMES À FEU

L'AIDE AU SUICIDE

LA SOMATOTROPHINE BOVINE

QUESTIONS AU FEUILLETON

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LOI SUR LES PRÊTS DESTINÉS AUX AMÉLIORATIONS AGRICOLES ET À LA COMMERCIALISATION SELON LA FORMULE COOPÉRATIVE

    Projet de loi C-75. Reprise de l'étude de la motion 11688
    M. Chrétien (Frontenac) 11688
    Adoption de la motion; deuxième lecture du projet de loi et renvoi à un comité 11699

LA LOI DE L'IMPÔT SUR LE REVENU

    Projet de loi C-70. Motion de deuxième lecture 11699
    M. Mills (Broadview-Greenwood) 11712

MOTION D'AJOURNEMENT

LA FONCTION PUBLIQUE


11649


CHAMBRE DES COMMUNES

Le lundi 24 avril 1995


La séance est ouverte à 11 heures.

_______________

Prière

_______________

[Traduction]

MESSAGE DU SÉNAT

Le président suppléant (M. Kilger): J'ai l'honneur d'annoncer à la Chambre que le Sénat lui a adressé un message pour l'informer qu'il a adopté le projet de loi S-7, Loi visant à promouvoir l'utilisation de carburants de remplacement pour les véhicules automobiles.

_____________________________________________

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

[Traduction]

LA LOI SUR LA GESTION DES FINANCES PUBLIQUES

La Chambre reprend l'étude, interrompue le 28 mars, de la motion: Que le projet de loi C-263, Loi modifiant la Loi sur la gestion des finances publiques et d'autres lois en conséquence (sociétés d'État exemptées), soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

M. Don Boudria (Glengarry-Prescott-Russell, Lib.): Monsieur le Président, vous constaterez qu'il y a unanimité en ce qui concerne la motion suivante:

Que, nonobstant tout ordre de la Chambre, tout vote par appel nominal demandé aujourd'hui concernant le projet de loi C-263 soit différé jusqu'au mardi 25 avril 1995, à 17h30.
Le président suppléant (M. Kilger): La Chambre a entendu la motion. Y a-t-il consentement unanime?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

Le président suppléant (M. Kilger): La dernière fois que la Chambre a examiné le projet de loi C-263, il restait environ cinq minutes au député de Saint-Boniface pour intervenir dans le débat.

M. Ronald J. Duhamel (secrétaire parlementaire du président du Conseil du Trésor, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de reprendre mon exposé sur le projet de loi présenté par le député d'Okanagan-Similkameen-Merritt. Comme je l'ai déjà dit, je crois que ce projet de loi part d'une bonne intention. Mes collègues sont, comme moi, en faveur d'obliger toutes les sociétés d'État à rendre des comptes. Ce projet de loi présente cependant un certain nombre de lacunes que je vais continuer d'examiner aujourd'hui.

La dernière fois que j'ai parlé de ce projet de loi, j'ai examiné certaines raisons à la base de l'exemption de ces sociétés d'État. L'exemption de ces sociétés reflète les cordes particulièrement sensibles des relations qui existent entre elles et le gouvernement. Chacune de ces sociétés a été créée par une loi spéciale, avec un mandat très précis. Dans le cas de certaines, la loi expose les exigences en ce qui concerne l'administration des ressources. Cela est particulièrement important si l'on veut veiller à la responsabilité des sociétés d'État qui, par exemple, accordent des subventions. Le cas typique est celui du Conseil des arts du Canada.

[Français]

Il est primordial que le Conseil des arts du Canada ait toute la latitude voulue pour ce qui est du choix des bénéficiaires de subventions et qu'il soit perçu comme tel. Pour ma part, je suis d'avis que la valeur artistique n'est pas une question politique et qu'il ne convient pas que le gouvernement impose ses conditions à cet égard.

[Traduction]

De même, je suis fermement convaincu qu'il faut protéger la liberté dont jouit la SRC de par son mandat en matière de programmation et d'indépendance journalistique. C'est dans cette optique que la SRC a été également exemptée de la partie X en 1984.

Je reconnais que le député a délibérément omis la SRC afin d'éviter, autant que possible, tout point litigieux. Je crains cependant que les raisons invoquées pour exempter de la partie X d'autres organismes, dont la Commission canadienne du blé, soulèvent des questions qui risquent de sembler toutes aussi litigieuses, spécialement aux yeux des Canadiens ou des groupes de Canadiens que servent ces sociétés.

[Français]

N'y aurait-il pas eu lieu d'étudier d'abord ces questions attentivement dans le cadre de consultations sérieuses auprès des parties touchées?

[Traduction]

Il me semble que le projet de loi n'accorde pas l'importance qu'il devrait au fait qu'en raison du mandat unique des organismes touchés, l'élaboration d'un cadre de responsabilisation approprié exige une réflexion plus approfondie.


11650

De toute évidence, si certains de ces organismes sont les mandataires de l'État et d'autres pas, c'est pour des raisons précises. Et si leurs employés ne sont pas fonctionnaires, c'est également pour des raisons précises. À mon avis, le projet de loi C-263 n'explique pas suffisamment clairement l'importance de ces dernières.

Les événements de ces dix dernières années prouvent qu'en général, il serait justifié d'assujettir d'autres sociétés à un cadre de responsabilisation différent, similaire au régime en place à la SRC. Toutefois, le projet de loi C-263 ne prévoit pas de telles modifications que, pour ma part, je juge nécessaires.

Je suis certain que ce gouvernement va prendre des mesures supplémentaires pour parvenir à un juste équilibre entre l'amélioration de la responsabilisation des sociétés d'État exemptées et le degré d'indépendance souhaitable. En fait, ce projet de loi est un pas dans cette direction.

En raison des réserves que m'inspire l'incohérence de l'approche du projet de loi C-263-et je ne dis pas cela méchamment, sachant que le député ne disposait pas de tous les éléments voulus-, je me vois obligé de déclarer que je ne peux recommander l'adoption de ce projet de loi tel que présenté à la Chambre. Je tiens cependant à ajouter que, bien que je sois opposé à ce projet de loi, le gouvernement tient à la bonne gestion financière de toutes les sociétés d'État. Les améliorations sont toujours possibles, et nous y procéderons.

(1110)

Nous reconnaissons que la situation des sociétés d'État exemptées dont il est fait mention dans le projet de loi du député est tout à fait unique et que ce projet de loi ne constitue pas la solution appropriée. Il ne s'ensuit pas néanmoins que nous soyons aveuglément opposés à un réexamen des moyens d'assurer un bon processus de reddition des comptes.

Le président du Conseil du Trésor communiquera donc avec ses collègues responsables de ces sociétés afin de les prier de bien vouloir réexaminer les possibilités d'améliorer le système de reddition des comptes actuellement en vigueur au sein de chacune d'entre elles. Il s'agira d'une étude individuelle, conforme aux exigences particulières du mandat de chacune d'elles. Elle consistera notamment à étudier les modifications à apporter à la loi suivant le modèle adopté pour la SRC, le cas échéant.

On peut s'y prendre de bien des façons. Je suis convaincu qu'en collaboration avec les administrateurs et les directeurs des sociétés d'État, le gouvernement s'efforcera encore et toujours de gérer les sociétés de façon efficace et dans le respect des meilleurs principes de la responsabilité envers le contribuable.

M. Dick Harris (Prince George-Bulkley Valley, Réf.): Monsieur le Président, le projet de loi C-263 veille à ce que le gouvernement fédéral rende des comptes aux contribuables canadiens. Je crois fermement que les députés de tous les côtés de la Chambre devraient appuyer ce projet de loi afin que nous puissions affirmer franchement que nous avons tenté de répondre aux attentes de la population qui nous a délégués à cetteChambre.

Comme les députés le savent, durant l'exercice financier de 1993, les sociétés d'État ont enregistré des pertes totalisant quelque 57 millions de dollars. Leurs emprunts nets auprès du gouvernement du Canada se sont élevés à 14,2 milliards de dollars et elles ont reçu 4,6 milliards du gouvernement par le truchement des crédits budgétaires.

Notre tâche en cette Chambre est d'assurer à nos électeurs que chaque ministère et organisme gouvernemental rende compte de chaque dollar dépensé. J'ose affirmer que chaque député veut pouvoir dire à ses électeurs que le gouvernement peut rendre des comptes à ceux qui payent la facture en fin de compte, c'est-à-dire aux contribuables canadiens.

Le vérificateur général a un rôle clé à jouer à cet égard. Dans bien des cas, dont je parlerai dans un moment, il a non seulement rendu publics les faits et les chiffres exacts concernant les activités et le rendement de notre gouvernement fédéral, mais il a aussi contribué à l'amélioration de ces activités et de ce rendement en disséquant et en évaluant le travail des organismes et des ministères.

Il n'y a rien de honteux dans la fonction du vérificateur général. Les Canadiens considèrent son travail comme normal et s'attendent même à ce qu'il repère toute médiocrité de rendement et à ce qu'il fasse des recommandations en conséquence. Les grandes et petites entreprises canadiennes soumettent leurs propres activités et leur rendement à des vérifications, lesquelles montrent parfois qu'elles sont en voie d'atteindre les objectifs fixés et parfois qu'elles doivent prendre des mesures difficiles pour remédier à certaines lacunes repérées durant les vérifications.

Ce genre d'examen fait partie de la vie courante des entreprises et devrait s'appliquer aussi au gouvernement. Les Canadiens attendent de leur gouvernement qu'il suive les meilleures pratiques commerciales utilisées dans le secteur privé.

Personne ne peut nier la qualité du travail du vérificateur général au cours des dernières années. En fait, des progrès notables ont été faits. Le vérificateur général a le pouvoir d'étudier l'utilisation qui a été faite de ses recommandations. Le résultat, c'est que dans beaucoup de cas les Canadiens obtiennent un meilleur rendement de leur argent, en raison des efforts du vérificateur général.

Grâce aux réformes mises en place en 1984, la plupart des sociétés d'État fonctionnent dans un cadre de responsabilité établi en vertu de la partie X de la Loi sur la gestion des finances publiques. Cette partie exige que les sociétés d'État présentent un rapport annuel. Celui-ci, ainsi que l'état financier et le rapport du vérificateur général renseignent sur la réalisation des objectifs de la société pendant la période visée. Deuxièmement, les sociétés d'État doivent présenter un plan d'entreprise et, troisièmement, un résumé de leur budget pour dépôt au Parlement. Ce sont de bonnes mesures. À mon avis, ces exigencessont essentielles et simples. Elles ne sont pas déraisonnables et pourtant les sociétés d'État ne sont pas toutes soumises à cesexigences.


11651

(1115)

Les Canadiens désirent voir leur argent dépensé d'une façon qu'ils puissent contrôler. Lorsqu'ils se rendent compte que le gouvernement fédéral dépense de l'argent sans respecter les critères ci-dessus, ils deviennent évidemment soupçonneux.

Il y a de bonnes raisons pour que les Canadiens aient cette impression. La Loi sur la gestion des finances publiques pourrait facilement être rendue applicable aux sociétés d'État qui figurent dans le projet de loi C-263. Il y a 49 sociétés d'État. Le projet de loi C-263 porte sur cinq d'entre elles qui ne sont pas soumises à l'application de la Loi sur la gestion des finances publiques. Ce sont le Conseil des arts du Canada, la Société de développement de l'industrie cinématographique canadienne, la Commission canadienne du blé, la Centre de recherches pour le développement international et le Centre national des arts.

Le projet de loi C-263 placerait ces sociétés d'État sous la surveillance du vérificateur général. C'est une nécessité absolue si l'on considère la quantité d'argent dépensé par ces cinq organismes.

La Société Radio-Canada ne figure pas dans le projet de loi C-263. C'est parce que les dispositions de la Loi sur la gestion des finances publiques qui s'appliquent à la Société Radio-Canada figurent dans la Loi sur la radiodiffusion de 1991. En bref, la SRC est déjà sujette aux exigences de responsabilité du projet de loi C-263 et de la Loi sur la gestion des finances publiques.

Il est important que les députés prennent note de ce dernier point. Radio-Canada reçoit environ 70 p. 100 de tout l'argent du gouvernement qui est fourni aux sociétés d'État non visées par la loi. Le projet de loi C-263 parachève donc le travail déjà entrepris par le Parlement. Depuis 1991, la Société Radio-Canada s'est adaptée aux exigences en ce qui a trait aux comptes à rendre, qui figurent à la partie X de la Loi sur la gestion des finances publiques.

Les députés seront peut-être d'accord avec moi pour dire que, parmi toutes les sociétés d'État exemptées figurant dans le projet de loi C-263, c'est la Société Radio-Canada qui a insisté le plus sur la très grande importance de maintenir son indépendance à l'égard du gouvernement. Pourtant, la société n'a pas eu autant de mal qu'elle le prévoyait à s'adapter à ces exigences. Elle fonctionne à l'intérieur de ce cadre depuis quatre ans sans éprouver trop de problèmes.

Je rappelle à mes collègues que le vérificateur général soumet déjà les cinq sociétés figurant dans le projet de loi C-263 à des vérifications financières. Cependant, ces vérifications ne donnent pas au vérificateur général la possibilité de donner son opinion sur la pertinence des activités de ces cinq sociétés, ni encore de préciser jusque dans quelle mesure chacune remplit bien son mandat.

À l'heure actuelle, il ne s'agit pas de vérifications de l'optimisation des ressources. Cela doit être une nécessité pour ces cinq sociétés. On effectue des vérifications de ce genre tous les cinq ans. Elles diffèrent des vérifications annuelles en ce sens qu'on se penche sur la gestion, ainsi que sur les objectifs de la société.

Il est juste de dire que les conseils d'administration des sociétés profitant d'une exemption devraient voir les vérifications de l'optimisation des ressources d'un aussi bon oeil que les entreprises privées considèrent leurs vérifications annuelles dans le cadre desquelles leurs actionnaires et, en fait, un vérificateur examinent leurs prévisions et leur plan d'entreprise.

Il n'est pas inconcevable que les administrateurs jugent que ces vérifications peuvent leur être utiles dans leur propre travail et sont une mesure constructive pour ce qui est de rendre des comptes, chose qui fait défaut dans beaucoup de ces sociétés d'État dans le cadre des opérations gouvernementales.

Cela fait maintenant dix ans qu'on a établi ce cadre de responsabilité pour les sociétés d'État. Les sociétés exemptes ont maintenant eu une décennie pour examiner et analyser les répercussions de la Loi sur la gestion des finances publiques sur l'indépendance des sociétés d'État ne profitant pas d'une exemption. Il est très probable qu'elles en soient venues à la conclusion que la Loi sur la gestion des finances publiques ne les menace pas vraiment. La Société Radio-Canada est un bon exemple. On a inclus des dispositions de la Loi sur la gestion des finances publiques dans la nouvelle Loi sur la radiodiffusion adoptée en 1991.

(1120)

Il est raisonnable d'exiger des cinq sociétés d'État en question de préparer un plan d'entreprise pour que les Canadiens, les contribuables, ceux qui financent les programmes, puissent contrôler et évaluer leur rendement.

Il arrive que les rapports annuels des sociétés d'État diffèrent des objectifs établis dans leur plan d'entreprise, même si les sociétés d'État exemptées peuvent inviter le vérificateur général à effectuer des examens spéciaux. On ne transmet les résultats de la vérification qu'au conseil d'administration et non au Parlement. Le Parlement doit en être saisi. Il faut que tous les députés puissent examiner ces résultats pour être en mesure de s'assurer qu'on sait au juste comment ces sociétés dépensent les deniers publics.

Il ne suffit pas de donner aux sociétés la possibilité d'«inviter» le vérificateur général à effectuer une vérification. Si le bureau du vérificateur général surveillait régulièrement le fonctionnement des sociétés, les objectifs écrits dans le plan d'entreprise ne différeraient pas des objectifs figurant dans le rapport annuel.

Nous sommes tous d'accord pour dire qu'en période d'austérité, comme à l'heure actuelle, ceux qui dépensent l'argent du contribuable doivent savoir plus que jamais qu'ils ont des comptes à rendre sur la façon dont ils le font. Étant donné que la partie X de la Loi sur la gestion des finances publiques est si efficace pour les autres sociétés d'État, il semble raisonnable, logique et tout à fait sensé de faire en sorte que les cinq sociétés d'État dont il est question dans le projet de loi C-263 soient visées également. J'exhorte tous les députés à souscrire au projet de loi C-263.

Mme Jean Augustine (secrétaire parlementaire du premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureuse de participer au débat d'aujourd'hui sur le projet de loi C-263, Loi modifiant la Loi sur la gestion des finances publiques et d'autres


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lois en conséquence, projet de loi parrainé par le député d'Okanagan-Similkaneen-Merritt.

J'appuie également les objectifs de ce projet de loi qui sont d'accroître la responsabilité des sociétés d'État exemptées face aux contribuables du Canada. Par ailleurs, je me demande si cette proposition constitue la meilleure façon d'aborder la question.

Tout d'abord, je voudrais parler de la proposition qui vise à faire en sorte que le personnel du Conseil des arts du Canada, du Centre national des arts et du Centre de recherches pour le développement international fasse partie de la fonction publique du Canada.

Le 27 février 1995, le ministre des Finances a présenté à la Chambre un budget historique. Il a dit, entre autres, qu'il fallait réduire la taille de la fonction publique et supprimer environ 45 000 postes au cours des trois prochaines années. Il s'agit là d'une entreprise importante qui ne sera pas facile à gérer et qui exigera beaucoup de sagesse et de compassion.

Ces trois sociétés comptent, au total, environ 850 employés. Le Conseil des arts du Canada en compte, en gros, 230, le Centre national des arts, 280, et le CRDI, 340.

Je pense que c'est aller à contre-courant que d'ajouter 850 postes à la fonction publique à ce moment-ci. Pour cette raison, à tout le moins, je ne peux pas appuyer le projet de loi tel qu'il est présenté à la Chambre.

Je partage le point de vue exprimé plus tôt, au cours du débat, par le député de La Prairie qui prétend qu'une mesure législative globale, comme celle proposée dans le projet de loi C-263, ne constitue pas le seul moyen d'aborder cette question. Il existe d'autres approches qui peuvent être prises et qui ont d'ailleurs déjà été prises récemment pour renforcer la responsabilité de nos sociétés d'État.

Une telle approche améliore la qualité de la gestion commune. Je parle ici du rôle du conseil d'administration dont la responsabilité consiste tout simplement à gérer les cadres. À ce sujet, j'invite la Chambre à consulter le rapport final du ministre chargé du Renouveau de la fonction publique et de l'examen des organismes qui a été publié le 16 février 1995, le même jour que le budget.

(1125)

Comme l'annonçait le budget de février 1994, l'examen porte sur l'utilité et l'actualité du mandat du gouvernement fédéral et de plusieurs centaines de ses organismes et commissions.

Parmi les mesures adoptées dans le rapport final pour rationaliser le processus de nomination, le gouvernement a décidé de réduire l'effectif des conseils d'administration de nombreux organismes gouvernementaux, dont les sociétés d'État.

L'utilisation responsable de l'argent des contribuables constitue un facteur fondamental pour les sociétés exemptées. Il convient de signaler à cet égard que l'examen a mené à la conclusion que la réduction du nombre de nominations par décret dans trois sociétés exemptées, dont deux sont nommées dans le projet de loi.

Le nombre de membres du conseil d'administration de la Société Radio-Canada passe de 15 à 12 et celui du conseil d'administration du Centre national est passé de onze à huit. Le poste de secrétaire à Téléfilm Canada, qui est une nomination par décret, sera supprimé. Dans l'ensembe, l'examen donnera lieu à l'élimination de quelque 589 postes dotés par décret.

Le rapport final et l'examen des organismes ont également permis de moderniser les dispositions du processus de nomination relatives à la durée du mandat, de sorte qu'il sera dorénavant plus facile pour le gouvernement de démettre de leurs fonctions les employés à temps plein ayant un rendement insuffisant, notamment les agents des sociétés d'État nommés par décret. Les titulaires occuperont désormais leurs postes à titre amovible. Le gouvernement est déterminé à améliorer le processus de nomination, y compris en ce qui concerne les nominations aux conseils d'administration des sociétés d'État.

Cette mesure avait été annoncée dans le livre rouge et elle fait partie des recommandations du rapport commandé par le premier ministre et soumis par M. Gérard Veilleux. En juillet dernier, le ministre chargé du Renouveau de la fonction publique a rendu public le document intitulé «Une entreprise de longue haleine: Rapport sur le processus de nomination aux conseils d'administration des sociétés d'État». Ce rapport a été l'objet d'une conférence que le président du Conseil du Trésor a organisée en octobre à l'intention des présidents et des dirigeants des sociétés d'État.

Le sujet de cette conférence fera peut-être mieux comprendre à l'auteur de ce projet de loi qu'il existe d'autres moyens, à part une mesure législative, pour améliorer le régime de responsabilisation de toutes les sociétés d'État, y compris celles qui sont exemptées.

La conférence tenue en octobre, qui s'intitulait «Régie des sociétés d'État: Amélioration de l'efficacité des conseils d'administration des sociétés d'État», était composée de quatre colloques destinés aux participants. Le premier portait sur l'élaboration et l'approbation de stratégies.

Ce groupe a examiné l'importance d'élaborer et d'approuver des stratégies précises, le défi consistant à lier l'élaboration de stratégies au mandat de la société d'État, les rapports qui existent entre le conseil d'administration et la direction, ainsi que les facteurs qui contribuent au succès d'un conseil d'administration.

Le deuxième colloque traitait de la composition et de l'évaluation du conseil d'administration. Dans ces groupes, la discussion a porté sur les rôles du président et du dirigeant, la sélection et l'évaluation des membres du conseil, le fonctionnement du processus de nomination, l'auto-évaluation du conseil, l'orientation et la sensibilisation des administrateurs ainsi que toutes les questions de communication connexes.

Le troisième colloque traitait de l'équilibre à établir entre la mission de la société d'État et le bien public. Les groupes ont discuté des compromis à atteindre entre la réalisation des objectifs commerciaux et financiers ainsi que la réalisation des


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objectifs d'orientation fixés dans le mandat, tout cela sans oublier les contraintes imposées à une entreprise publique qui doit rendre des comptes.

Le dernier colloque portait sur la satisfaction des besoins d'information du conseil d'administration. Les participants ont examiné les besoins en information du conseil d'administration selon divers points de vue, y compris le point de vue souvent unique des sociétés d'État exemptées dont il est question dans le projet de loi C-263.

Les travaux se poursuivent là-dessus. On étudie diverses options concernant un programme d'information destiné aux nouveaux administrateurs des sociétés d'État, afin d'établir l'équilibre qu'il faut atteindre entre la responsabilité fiduciaire des administrateurs et le rôle d'une société d'État face à la politique officielle.

Le vérificateur général garde aussi un dossier permanent sur cette question. Toutes ces mesures ont pour objet d'accroître l'obligation de rendre compte des sociétés d'État, y compris celles qui sont exemptées.

J'attire l'attention des députés sur les décisions concernant l'examen de programmes qui ont été annoncées dans le budget de février.

(1130)

Selon ce budget, le gouvernement va revoir en profondeur l'appui qu'il accorde à Radio-Canada, à l'ONF et à Téléfilm Canada, ainsi que les mandats qu'il leur confie. Les stratégies et les mandats ont été élaborés dans des circonstances totalement différentes et ils doivent être réexaminés à la lumière des possibilités actuelles de la technologie, ainsi que de l'évolution de l'industrie audiovisuelle et du marché intérieur.

Grâce à cet examen et à d'autres activités de ce genre, le député pourra peut-être mieux poursuivre l'intérêt fort louable qu'il a d'accroître l'obligation de rendre compte des sociétés d'État exemptées. Une telle démarche préservera le régime de flexibilité et de responsabilité des sociétés d'État qui exigent une certaine indépendance face à la capacité directe du gouvernement d'intervenir dans leurs décisions politiques et administratives.

Mme Shaughnessy Cohen (Windsor-Sainte-Claire, Lib.): Monsieur le Président, le projet de loi C-263 a pour objet d'imposer à cinq organismes les dispositions de la Loi sur la gestion des finances publiques concernant l'imputabilité de la gestion qui s'appliquent déjà à toutes les autres sociétés d'État. Les organismes visés sont le Conseil des arts du Canada, la Société du Centre national des Arts, la Commission canadienne du blé, Téléfilm Canada et le Centre de recherches pour le développement international.

Les députés ont déjà entendu d'autres orateurs vanter les avantages que procurerait l'existence d'un seul bon système de contrôle et de reddition de comptes qui s'appliquerait à l'ensemble des sociétés d'État. Je ne peux qu'appuyer ceux qui expriment le désir de voir les sociétés d'État être bien gérées, mais je ne peux souscrire au projet de loi C-263.

Une saine gestion des investissements de l'État n'implique ni une foule de règlements et de principes bureaucratiques ni un système boiteux ne parvenant pas à fournir les outils nécessaires à l'évaluation du rendement des sociétés. Pour avoir un bon cadre de responsabilisation, il faut chercher à établir l'équilibre entre le contrôle et la latitude à accorder aux administrateurs des sociétés pour leur permettre d'être efficaces et efficients. Après tout, les sociétés d'État ont un rôle concret et précieux à jouer dans l'intérêt public.

Je suis convaincue que tous les députés désirent veiller à ce que les grands organismes publics, comme le Conseil des arts du Canada, la Société de développement de l'industrie cinématographique canadienne et bien d'autres, soient responsables des résultats qu'ils obtiennent et de l'argent qu'ils dépensent. Je suis tout aussi convaincue que les députés ne veulent pas que les mandats de ces organismes soient compromis, mandats que le Parlement a pris soin de protéger en les insérant dans des lois habilitantes. Où est-ce l'objectif que vise ce projet de loi?

L'objectif caché consiste peut-être à remettre en question l'indépendance de ces sociétés d'État par rapport au gouvernement et leur liberté d'action. Il s'agit peut-être en réalité d'étouffer la créativité à l'oeuvre au sein du Conseil des arts du Canada, de Téléfilm Canada et du Centre national des Arts. Il s'agit peut-être en réalité de supprimer le travail du Centre de recherches pour le développement international ou d'empêcher la Commission canadienne du blé d'exercer sa mission qui s'est révélée si utile tout particulièrement pour les provinces de l'Ouest.

En quoi consiste véritablement l'obligation de rendre des comptes pour ces sociétés? Il est clair que le système actuel de lois, de règlements et de politiques concernant les sociétés d'État a évolué énormément. Il permet au Parlement et au gouvernement d'obtenir beaucoup d'information utile et l'assurance que les sociétés publiques sont bien gérées.

Le vérificateur général fait régulièrement rapport à la Chambre sur les affaires des sociétés d'État. Le vérificateur général sert en effet de vérificateur ou de covérificateur pour 35 des 48 sociétés publiques, dont quatre sont visées par la mesure à l'étude: le Centre national des Arts, le Conseil des arts du Canada, le Centre de recherches pour le développement international et Téléfilm Canada.

Par ailleurs, le Conseil du Trésor examine les activités des sociétés d'État. Il s'occupe des affaires budgétaires des sociétés qui sont soustraites à l'application de la partie X de la Loi sur la gestion des finances publiques, mais qui ont néanmoins besoin des crédits que leur affecte le gouvernement.

Il est également important de noter que la loi constitutive de chacune des sociétés d'État les place sous l'autorité d'un ministre titulaire, par le truchement duquel elles rendent des comptes au Parlement. Les ministres doivent déposer un certain nombre d'importants documents rendant compte des activités des sociétés d'État dont ils ont la responsabilité, comme les rapports annuels, les sommaires de plans généraux ainsi que les budgets de fonctionnement et d'immobilisations.


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(1135)

En prenant du recul pour considérer la responsabilité dans un contexte plus large, je crois que les défis d'ordre financier que le gouvernement a à relever auront nécessairement des répercussions sur sa gestion des sociétés d'État. Il sera encore plus nécessaire que maintenant de trouver les moyens d'appliquer la politique d'intérêt public de façon efficace et pratique.

Il semblerait qu'un élément de solution soit de réduire ou tout au moins de limiter la taille de la fonction publique. Chose curieuse, le projet de loi C-263 aurait pour effet d'accroître la taille de la fonction publique, car les employés du Conseil des arts du Canada, du Centre canadien de recherches pour le développement international et du Centre national des Arts iraient en gonfler les rangs. Cette proposition semble aller dans le sens contraire de ce que préconisent habituellement ceux qui veulent réduire la taille de l'administration publique.

J'ajoute que cela va également à l'encontre des idées fondamentales voulant que les sociétés d'État soient des employeurs distincts et exercent directement leurs responsabilités en matière de personnel. Ces responsabilités, elles doivent s'en acquitter de manière juste et efficace dans leurs propres intérêts fondamentaux.

C'est un bel exemple de la manière dont le recours à ces sociétés, dotées de leur propre structure inspirée du secteur privé, peut simplifier les procédures administratives et la prise de décisions. Cette simplification de l'administration du personnel, de la gestion des ressources humaines est un avantage de la formule des sociétés d'État. Celle-ci pourrait se révéler de plus en plus intéressante pour appliquer plus efficacement certains programmes de l'État. L'accent sera mis de plus en plus sur les compétences de ceux qui ont la responsabilité directe de diriger les sociétés au jour le jour et sur celles des conseils d'administration.

Le public a exigé que toutes les institutions gouvernementales soient transparentes et rendent des comptes. Le public veut avant tout que ceux qui ont la responsabilité de diriger ces institutions soient intègres. Dans les mois qui ont suivi son accession au pouvoir, le premier ministre a subordonné à cet impératif la lettre et l'esprit des mesures du gouvernement. Dans la gestion et le régime de responsabilité de toutes les institutions de l'État, il faut rechercher la responsabilité financière et le bon sens.

Ces dernières années, un certain nombre d'études sur la régie des sociétés ont été réalisées, dont une par Peter Dey, pour la Bourse de Toronto. Nous savons que le public a effectivement exprimé sa déception de ne pas être considéré dans le processus et les structures de régie des sociétés du secteur privé ou d'en être écarté. Les conseils d'administration et les gestionnaires de sociétés voient que tous les Canadiens accordent de plus en plus d'importance à la démocratisation qui a touché de nombreux autres aspects de leur quotidien: nos familles, nos collectivités, nos tribunaux et nos écoles, sans compter les sociétés privées.

Bon nombre voient maintenant dans la société commerciale moderne une institution à la fois économique et sociale. Cette façon de voir s'apparente davantage à la façon dont on a toujours perçu nos sociétés d'État dans leur volonté d'harmoniser les activités de nature commerciale qu'elles mènent efficacement avec les mesures d'intérêt public.

En raison de ses attentes accrues, la population exerce des pressions pour que soient adoptés des règles et règlements plus officiels, des principes et des codes de déontologie aux fins du processus et à l'intention de ceux qui influencent la prise de décisions au sein des sociétés. Le gouvernement est parfaitement conscient de l'évolution de la régie des sociétés et il a pris à cet égard un certain nombre de mesures importantes qui visent les sociétés d'État, y compris celles dont il est fait mention dans le projet de loi C-263.

Le Secrétariat du Conseil du Trésor, en collaboration avec le Conference Board du Canada et le Centre canadien de gestion ont rédigé et publié un document préliminaire sur les rôles et les responsabilités des administrateurs de sociétés d'État, afin de présenter des lignes directrices sur les responsabilités qui leur incombent. Ce document a été bien accueilli depuis sa publication en juillet 1993.

Dans un effort pour arriver à rendre moins épineuses certaines questions liées à la régie des sociétés, on a organisé, l'automne dernier, une conférence de formation à l'intention de tous les directeurs généraux et présidents de sociétés d'État, afin qu'ils améliorent le rendement de leur conseil d'administration. Parmi les quatre principaux sujets abordés, mentionnons le défi consistant à bien équilibrer les priorités de la société et l'intérêt public.

Ces mesures montrent bien l'attention particulière qu'on accorde, en ayant recours à un processus de consultation ouvert, à l'évolution des questions concernant la responsabilité des sociétés d'État. Pour élaborer de nouvelles dispositions législatives régissant l'obligation de rendre compte des cinq sociétés d'État mentionnées dans le projet de loi C-263, il faudrait suivre un processus consultatif semblable. Il faudrait tenir compte des besoins particuliers des sociétés d'État visées ou des nombreuses personnes concernées parmi la population canadienne.

Tout ce que je puis dire, c'est que le projet de loi présenté par le député d'Okanagan-Similkameen-Merritt tient compte des intérêts des contribuables canadiens, mais qu'il ne satisfait pas aux critères de consultation publique si chers au gouvernement actuel. J'invite les députés à le rejeter.

(1140)

M. Brent St. Denis (Algoma, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole après la députée de Windsor-St. Claire, qui a déjà dit à la Chambre que notre parti applaudissait à l'objet du projet de loi C-263, mais qu'il continuait de considérer la proposition du député d'Okanagan-Similkameen-Merritt comme fatalement viciée.

La proposition centrale du projet de loi, et je ne doute pas que tous ont examiné ce dernier avec soin, consiste à supprimer, pour


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cinq sociétés d'État, l'exemption de l'application de la partie X de la Loi sur la gestion des finances publiques, qui établit un régime de reddition des comptes général pour les sociétés d'État. Ces cinq sociétés sont le Conseil des arts du Canada, la Société du Centre national des Arts, le Centre de recherches pour le développement international, la Société de développement de l'industrie cinématographique canadienne et la Commission canadienne du blé.

Ce projet de loi comporte un certain nombre de problèmes. En tentant de faire des fonctionnaires des employés de trois sociétés d'État exemptées, on fera en sorte que ces employés soient assujettis à la politique sur le réaménagement des effectifs, ce qui aurait pour effet de compliquer inutilement les efforts globaux de réduction des effectifs du gouvernement. Il y aurait environ 800 fonctionnaires de plus si ce projet de loi était adopté.

Prenons, par exemple, le Centre de recherches pour le développement international. Au moment où le projet de loi C-24 a été présenté en mars 1984, cette affaire a été soulevée dans le cadre d'une question du député de Capilano d'alors. Le premier ministre de l'époque, le très honorable Pierre Elliott Trudeau, avait répondu à cette question.

La loi habilitante adoptée au début des années 60 prévoit qu'un maximum de 21 administrateurs du CRDI, y compris le président et le vice-président, peuvent être des citoyens d'autres pays n'ayant pas la citoyenneté canadienne. On visait pas là à promouvoir la formation d'un centre de recherches sur des questions nord-sud qui suivrait l'exemple du Canada dans le domaine du développement international.

À l'époque où le projet de loi C-24 a été présenté à la Chambre, on visait à ce que le CRDI reste indépendant de la direction politique du Canada. C'est pourquoi il a été ajouté à la liste des sociétés d'État exemptées figurant au paragraphe 85(1) du projet de loi.

La proposition du député réformiste aurait pour effet de nous faire revenir en arrière. Le projet de loi présenté par le député comporte certes des éléments positifs, mais il aurait, de façon générale, des effets négatifs.

D'autres éléments du projet de loi C-263 me laissent perplexe. Il s'agit des modifications touchant d'autres lois et aux termes desquelles les administrateurs et les employés du Conseil des arts, de la Société de développement de l'industrie cinématographique canadienne, ou Téléfilm Canada comme on l'appelle communément, et de la Société du Centre national des Arts feraient partie de la fonction publique du Canada. Franchement, l'expérience récente permet de croire qu'il s'agit de mesures allant dans la mauvaise direction.

Cela me fait penser aux tribulations du gouvernement de la Nouvelle-Zélande, aux prises avec une dette extrêmement lourde et de graves déficits au début des années 1980. Des mesures radicales ont été proposées dans différents secteurs pour relever l'énorme défi qui se posait.

On a notamment assisté à une restructuration complète de la fonction publique néo-zélandaise, allant de la méthode de nomination des sous-ministres et de leur responsabilisation jusqu'à la décentralisation des ministères. Suffisamment de temps s'est maintenant écoulé depuis l'introduction des mesures pour nous permettre d'en faire une évaluation froide. Les éléments très bénéfiques de l'initiative du gouvernement de la Nouvelle-Zélande font un large consensus dans ce pays et parmi les observateurs éclairés des administrations publiques de nombreux pays occidentaux.

Je pense notamment à l'adoption d'une loi qui fait de chaque ministère du gouvernement un employeur distinct aux fins des négociations collectives dans la fonction publique. Cette mesure à elle seule serait un des principaux éléments ayant contribué au succès de la réforme. Elle a permis à chaque gestionnaire de constituer les équipes d'employés en fonction des mandats précis de chaque agence restructurée, ce qui a réduit considérablement la force d'inertie et la rigidité du service. Peut-être devrions-nous étudier sérieusement les avantages qu'il y aurait à augmenter plutôt qu'à diminuer le nombre d'employeurs dans la fonction publique?

Il ne fait aucun doute que la Nouvelle-Zélande a eu des choix extrêmement difficiles à exercer et je crois que la plupart des députés admettront que l'importance de la dette et du déficit posent aussi au Canada de grands défis. Les efforts déployés par la Nouvelle-Zélande pour se sortir de cette situation montrent bien, je crois, que l'intention du gouvernement de se donner plus de flexibilité dans la façon de gérer ses affaires est vraiment la chose à faire. En essayant d'assujettir ces organismes et leurs travailleurs à un plus grand contrôle gouvernemental, on va à l'encontre de nos efforts en vue de réduire la taille de la fonction publique, de rendre cette dernière plus efficiente et de faire un meilleur travail avec les ressources que les Canadiens nous fournissent en payant des impôts sur leur revenu durement gagné. Nous devons utiliser ces ressources de façon plus judicieuse.

(1145)

Il me semble que l'idée de rendre notre système plus rigide, comme le propose ce projet de loi, ne soit pas la bonne solution à nos problèmes actuels. Il ne fait pas de doute que l'intention du député d'Okanagan-Similkameen-Merritt est de rendre ces organismes d'État plus efficients. Cependant, à mon avis, cette mesure aurait plutôt l'effet contraire.

L'intégration des employés de ces organismes dans la structure monolithique de la fonction publique fédérale, comme le propose le député, détruirait le compromis très délicat auquel le gouvernement et la communauté culturelle en sont arrivés, il y a plus de dix ans, avec l'adoption du projet de loi C-24.

La force de ces organismes découle de la culture distincte que chacun d'eux a développée au cours des dernières décennies. Il serait très malheureux de détruire l'identité que ces organismes se sont donné en déclarant que leurs dirigeants et leurs employés font désormais partie de la fonction publique. À mon avis, ce serait un pas en arrière.

Une telle mesure risquerait de miner la confiance des partenaires et des clients de ces organismes dans les pratiques

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telles que les évaluations par les pairs et de nuire à la réputation que certaines personnes ont acquise grâce à leur mobilité au sein des industries culturelles.

C'est pour ces raisons que je recommande à tous les députés de rejeter le projet de loi C-263.

Le président suppléant (M. Kilger): Reprise du débat. Ne voyant aucun député se lever, l'auteur de la motion, le député d'Okanagan-Similkameen-Merritt, a donné avis à la présidence qu'il allait demander le droit de réplique.

Encore une fois, je dois signaler à la Chambre que, si le député d'Okanagan-Similkameen-Merritt prend la parole, cela clôt le débat. Aucun député ne pourra prendre la parole ensuite et je mettrai la question aux voix immédiatement après son intervention qui ne doit pas durer plus de deux minutes.

M. Hart: Monsieur le Président, Christophe Colomb était un visionnaire. Il n'acceptait pas le statu quo. Souvent, les gens lui ont dit qu'il avait tort de faire ce qu'il faisait et qu'il ne devrait même pas essayer de voir plus loin, ni d'aller au-delà de l'horizon. S'il allait au-delà de l'horizon, il allait à coup sûr tomber de cette terre plate.

M. Mitchell: Vous voulez dire qu'il y avait aussi des réformistes à cette époque?

M. Hart: Ces gens négatifs auxquels avait affaire Christophe Colomb étaient de toute évidence des libéraux. Christophe Colomb a été probablement le premier réformiste.

Comme Christophe Colomb, le projet de loi C-263 remet en question le statu quo. Contrairement à ses idées cependant, les idées que renferme le projet de loi C-263 ne sont pas aussi radicales. Elles ne constituent pas un changement radical mais plutôt un changement nécessaire pour le Parlement, pour les opérations du gouvernement et pour toutes les sociétés d'État.

Le cadre de responsabilité auquel nous voulons soumettre ces cinq sociétés d'État est le même que celui auquel sont soumises toutes les autres sociétés d'État. Il n'y a pas de raison que ces cinq sociétés soient exemptées.

Il est vraiment honteux que les députés ne se soient pas donné la peine de lire les rapports publiés par le vérificateur général de 1989 à 1991, dans lesquels il dit son inquiétude à ce sujet. Permettez-moi de citer la section 4.100 du rapport de 1991 du vérificateur général:

Le Bureau était bien d'accord avec le renforcement du cadre législatif régissant les sociétés d'État et a toujours recommandé fortement que les sociétés d'État exemptées de la partie X de la LGFP soient soumises aux dispositions sur la reddition des comptes de cette loi. Il est important que le Parlement ait la certitude que les dispositions pertinentes de la loi en matière de reddition des comptes s'appliquent à toutes les sociétés d'État mères. Lorsque des exemptions sont accordées, il faudrait trouver des moyens d'assurer un contrôle et une reddition des comptes satisfaisants.
Je prie tous les députés d'appuyer le projet de loi C-263.

Le président suppléant (M. Kilger): La Chambre a entendu la motion. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): À mon avis, les non l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le président suppléant (M. Kilger): Conformément à l'ordre adopté aujourd'hui, le vote par appel nominal sur la motion est reporté à 17 h 30 le mardi 25 avril 1995.

Je demande l'avis de la Chambre. Nous devions terminer le débat environ à cette heure et faire sonner ensuite le timbre pendant 15 minutes avant le vote. Toutefois, en vertu des dispositions prises plus tôt aujourd'hui visant le report du vote, je peux soit suspendre la séance jusqu'à l'appel de la présidence, soit passer à un autre article de l'ordre du jour.

M. Boudria: Monsieur le Président, je propose une suspension de 10 minutes et une reprise des travaux à l'étape des initiatives ministérielles à 12 heures.

SUSPENSION DE LA SÉANCE

Le président suppléant (M. Kilger): La Chambre consent-elle à suspendre la séance jusqu'à l'appel de la présidence?

Des voix: D'accord.

(La séance est suspendue à 11 h 52.)

_______________

REPRISE DE LA SÉANCE

La séance reprend à 12 h 00.


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INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Français]

LOI DE 1995 SUR LA RÉVISION DES LIMITES DES CIRCONSCRIPTIONS ÉLECTORALES

La Chambre reprend l'étude, interrompue le 29 mars, de la motion: Que le projet de loi C-69, Loi portant sur la création de commissions de délimitation des circonscriptions électorales et la révision des limites des circonscriptions électorales, soit lu pour la troisième fois et adopté.

Le président suppléant (M. Kilger): À l'heure de l'ajour-nement, il restait encore 15 minutes de débat à l'honorable députée de Mercier.

Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Monsieur le Président, quand le débat s'est terminé il y a maintenant quelques semaines, je parlais, à l'occasion de cette question extrêmement importante soumise à la Chambre par le Bloc québécois, de la


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reconnaissance d'un nombre minimum de députés, que l'on a établi à 25 p. 100 pour le Québec, pour le peuple québécois.

Il m'a semblé nécessaire de rappeler que ce minimum est loin de la reconnaissance à laquelle le peuple québécois peut s'attendre. J'ai voulu rappeler que M. Daniel Johnson, qui était premier ministre du Québec en 1966, avait écrit un bouquin, en 1965, qui portait le titre de «Égalité ou Indépendance». Le père de M. Daniel Johnson, le père du chef de l'opposition officielle du Québec, était immigrant d'Irlande et ne parlait pas français. M. Daniel Johnson, né d'un père irlandais et d'une mère irlandaise établis au Québec, est devenu premier ministre du Québec. C'est lui qui, après avoir été député et ministre, pour relancer son parti dans le cadre des débats de l'époque, avait dit: «La nation canadienne-française doit avoir, dans le Canada, l'égalité ou alors, il sera légitime de rechercher au Québec les moyens d'un État complet.»

Il soulignait que la nation canadienne-française était ouverte et, lorsqu'on venait d'un autre pays, qu'on pouvait la choisir comme on pouvait choisir d'être Canadiens anglais. Il concluait en disant ceci: «Je démontrerai pourquoi et comment les Canadiens français cherchent à s'identifier à l'État du Québec, le seul ou ils puissent prétendre être maîtres de leur destin et le seul qu'ils puissent utiliser à l'épanouissement complet de leur communauté, tandis que la nation canadienne-anglaise tend, de son côté, à faire d'Ottawa le centre de sa vie communautaire».

Cela a été un texte, dans notre histoire, dans l'histoire du Québec et du Canada, qui a été très important. Depuis ce temps, on ne parle plus guère au Québec-on le fait dans le reste du Canada et nous sommes extrêmement fiers des Canadiens français hors Québec qui se débattent dans des conditions extrêmement difficiles-mais au Québec, on ne parle plus guère que de peuple québécois et désormais, la très grande majorité de la population s'identifie à ce peuple québécois.

La révision de la carte électorale est l'occasion de considérer que ce peuple québécois a droit à une reconnaissance minimale quel que soit le choix qu'il fera, parce que l'histoire est la réalité de l'importance du Québec et elle force, entraîne et devrait canaliser un appui important du Canada à ce choix.

Si, au Canada hors Québec, on avait été en mesure de seulement montrer qu'on était prêts à reconnaître le peuple québécois, l'histoire récente aurait été extrêmement différente. Si vous remontez à la source de la volonté minimaliste du premier ministre Bourassa, à l'occasion de l'entente du lac Meech, et si vous remontez au refus de l'entente de Charlottetown, vous trouverez cette volonté de reconnaissance minimale, je le répète, que le peuple québécois a droit à certains égards.

(1205)

Pourtant, au fil de l'histoire récente-disons jusqu'aux années 1960-c'est à l'égalité que le peuple québécois a prétendu. Non seulement Daniel Johnson, mais également, si nous nous en souvenons, André Laurendeau, auquel l'honorable premier ministre canadien de l'époque, Lester B. Pearson, avait confié la présidence d'une commission royale intitulée Commission sur le bilinguisme et le biculturalisme. André Laurendeau cherchait lui aussi désespérément, comme l'ont fait régulièrement dans cette histoire les Canadiens français, à faire reconnaître l'égalité comme peuple, comme nation canadienne-française à l'époque, pour les Québécois, pour la nation canadienne-française du temps d'André Laurendeau, «from coast to coast», bien sûr avec le foyer au Québec.

André Laurendeau a cherché à convaincre le Canada. Il est parvenu à convaincre nombre des commissaires qui étaient avec lui. Malheureusement, il n'a pas convaincu le premier ministre, M. Trudeau, qui aurait pu mettre en oeuvre le rapport, qui est resté, comme bien d'autres, sur une tablette.

Cet épisode, comme beaucoup d'autres, rappelle que, pour les Québécois qui, eux, ont la possibilité d'un autre avenir, le choix répété par le Canada a été: «Vous acceptez d'être une province comme les autres, ou alors. . .»

Dans la réalité de l'interprétation de l'histoire, ceux qui n'ont pas voulu bâtir un Canada avec une place non seulement suffisante, une place méritée par le peuple Québécois, ce ne sont, encore une fois, ni les Canadiens français ni les Québécois. Pourquoi? Certains nous accusent d'avoir les yeux tournés vers le passé; c'est le contraire. Pourquoi ne se demanderait-on pas si ce n'est pas ceux qui ont refusé au Québec une vraie place qui ont les yeux tournés vers le passé? Pourquoi ont-ils refusé? Ils ont refusé peut-être parce que les colons français étaient colons de la France et que cette France avait été vaincue et avait choisi d'abandonner dans cette guerre la colonie. Est-ce que ce ne sont pas eux qui persistent à traiter les descendants des colons français non pas comme la souche de ce peuple mais comme des vaincus? Autrement, ils reconnaîtraient ce que le monde reconnaît, soit qu'il y a ici, sur cette Terre, toutes les caractéristiques d'une nation et d'un peuple.

La définition de n'importe quel dictionnaire montre que «peuple» et «nation» convient comme un gant à la population qui vit sur le territoire québécois. Nous sommes un peuple; nous sommes une nation. Si le Canada hors Québec n'avait pas les yeux tournés vers le passé et qu'il avait voulu vraiment bâtir un pays nouveau, il aurait reconnu ce fait, parce que l'important pour les Québécoises et Québécois et les Canadiens et Canadiennes, c'est de bâtir l'avenir.

(1210)

L'avenir suppose qu'on se donne les moyens, suivant notre culture, de se développer, d'assurer la survie de la population et d'assurer son développement culturel, social et économique. Or, pour le Québec, développer sa population, sa culture, son économie suivant son dynamisme profond, suivant son identité, est fondamental.

C'est pour cette raison que les Québécoises et Québécois, nombreuses et nombreux, et la majorité, vont choisir la souveraineté. Pour plusieurs d'entre eux, ce ne sera pas un premier choix, je le dis, et c'est cela qu'il faut constater, parce que le peuple québécois qui s'est appelé d'abord canadien, «canayen», se sent chez lui sur tout le territoire. Il a fallu qu'il accepte de concentrer sa volonté sur ce territoire québécois où il pouvait se développer, comme le disait Daniel Johnson père. Mais en réalité, il est important de savoir combien ces premiers «Canayens», devenus Canadiens français, ont essaimé partout sur le territoire et la preuve en est encore là.

Il est aussi important de savoir que les femmes canadiennes-françaises qui ont fait tant d'enfants dans cette période surtout de 1870 jusqu'à 1960, où elles étaient les seules en Amérique du Nord à avoir un si fort taux de natalité, ont vu, le coeur brisé, leurs enfants, les jeunes familles, partir vers où? Vers les États-Unis. Ce fait n'est pas bien connu, mais 10 000


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Canadiens français et Canadiennes françaises ont quitté chaque année, pendant plus de cent ans-et on peut compter combien cela fait-parce que la province de Québec ne comportait pas, d'une part, ce qu'il fallait pour leur permettre de se développer et également parce que le Canada, l'Ouest canadien leur était fermé.

Il faut dire, lorsqu'à raison de 10 000 par année, les Canadiens français quittaient vers les États-Unis, qu'il y avait une politique d'immigration canadienne, «Canadian» comme aurait dit mon vieux professeur Michel Brunet, qui faisait venir les immigrants des îles britanniques et de l'Europe et qui leur permettait, avec un montant dérisoire, de se rendre dans l'Ouest. J'ai des chiffres tirés du quotidien Le Devoir de 1928: pour une famille de dix enfants, quand on était Canadien français et si on voulait aller dans l'Ouest, il en coûtait 968 $ et quand on venait d'une île britannique, il en coûtait 48 $.

Si on veut préparer l'avenir, il faut regarder le passé. Le passé, pour le Québec, a été une recherche dans des conditions difficiles, que ce soit pour les Canadiens français dans les provinces autres que le Québec ou que ce soit au Québec. Il y a eu une recherche presque désespérée de se faire une vraie place comme Canadien français et plus tard, dans les années 1960, comme Québécois, parce que l'identité est très clairement devenue québécoise.

(1215)

Et cette quête, cette recherche qui, chez certains, est encore présente, nous avons soutenu qu'elle pouvait avoir une petite partie de réalisation dans l'amendement présenté par mon collègue. Encore une fois, quelle que soit l'histoire, nous sommes appelés à vivre côte à côte. Et s'il est encore possible de convaincre les collègues et les Canadiens et Canadiennes que le peuple québécois existe, qu'il veut entretenir des relations d'égal à égal et de fraternité, il y a des manifestations qui peuvent venir non seulement de ce côté, mais de l'autre côté.

M. Eugène Bellemare (Carleton-Gloucester, Lib.): Monsieur le Président, j'aimerais faire un commentaire sur le discours de la députée de Mercier, députée que je considère séparatiste, qui se dit souverainiste. Madame la députée séparatiste a parlé des Québécois avec grande fierté, et sur ce point je la félicite d'être fière des Québécois. Moi-même, d'ailleurs, je suis fier des Québécois.

Je dois noter immédiatement que je suis un Franco-Ontarien depuis quatre générations. Cela, madame la députée séparatiste, ne m'a pas empêché, moi. . .

Le président suppléant (M. Kilger): Je tiens à rappeler à la Chambre que toute intervention se doit d'être placée par l'entremise de la Présidence et non directement l'un à l'autre.

M. Bellemare: Je vous remercie de me rappeler à l'ordre sur ce point très important, monsieur le Président. Monsieur le Président, madame la députée de Mercier a été très fière de montrer son allégeance, son patriotisme, mais je crois que son patriotisme est un peu mal placé. Elle oublie qu'elle appartient à une grande nation canadienne, elle oublie que si les provinces et les territoires ont pu se développer, si les deux langues officielles du Canada ont pu évoluer, c'est grâce à l'unité canadienne et non parce qu'il y a des gens qui mâchonnent dans un coin ou l'autre du pays pour s'examiner le nombril et faire seulement leur petite chose paroissiale.

Les francophones hors Québec ont bien réussi, je crois que j'en suis un exemple. Financièrement, j'ai bien réussi; au point de vue d'éducation, j'ai bien réussi; au point de vue d'élection, au point de vue politique, j'ai bien réussi. Jamais, jamais les Canadiens hors Québec, ou les Canadiens à l'intérieur du Québec, ne m'ont empêché de réussir. C'est plutôt une attitude nationale qui m'a donné le goût de vouloir réussir, de vouloir rester au pays.

La députée de Mercier parlait toujours des Canadiens et des Canadiennes qui quittaient anciennement le pays pour aller aux États-Unis. Je dois lui faire la remarque que la plupart de ces gens étaient du Québec. C'est drôle de voir que la députée de Mercier, elle, lorsque les choses sont négatives, se sert du terme Canadiens et Canadiennes et lorsqu'elles sont positives, c'est seulement les Québécois et les Québécoises qui font du bien.

Je dois souligner immédiatement que tout le monde au Canada fait du bien, et que si on peut réussir, même dans l'avenir, à être encore plus fort comme nation, plus riche comme nation, avoir un niveau d'éducation extraordinaire à travers l'univers, c'est grâce à notre unité canadienne et non pas à la volonté de se séparer et de se chamailler en famille constamment.

Mme Lalonde: Monsieur le Président, je voudrais répondre à mon collègue que notre avenir serait beaucoup plus brillant et notre prospérité beaucoup mieux assurée si le Canada hors Québec cessait de refuser la reconnaissance que le Québec a demandée comme peuple, car ces refus à répétition ont provoqué des crises qui furent la manifestation de la volonté de ce peuple et de cette nation.

(1220)

Un peuple et une nation ne se mettent pas sous le boisseau. Cela revient toujours, parce que le droit des peuples est fondamental. La démocratie a reposé sur les peuples. Et la prospérité de ce Canada serait bien plus grande. Elle aurait pu être bien plus grande si, au lieu de refuser de reconnaître que nous sommes un peuple et une nation, on l'avait accepté. C'est vrai aujourd'hui et ce sera vrai demain, parce que s'il y a une insécurité que certains brandissent, elle ne vient que d'un élément, et c'est la possibilité du refus que vous nous feriez de notre décision de peuple. C'est là la seule insécurité; il n'y en a pas d'autres.

Alors, oui, parlons de prospérité, oui, parlons d'avenir. Reconnaissez que nous sommes un peuple et une nation, que notre choix sera notre choix et que, de toutes les manières, vous ne pouvez passer à côté de ce fait qui est fondamental.

[Traduction]

M. Dick Harris (Prince George-Bulkley Valley, Réf.): Monsieur le Président, je ne sais si c'est tout simplement parce que c'est lundi matin, ou si ma tolérance et ma patience sont à bout à force d'écouter jour après jour cette petite bande de séparatistes proférer dans cette Chambre leur désir de détruire notre pays.

Il n'y a aujourd'hui rien de plus destructeur et subversif dans ce pays que d'écouter ce groupe répéter chaque jour qu'il veut constituer une nation séparée au sein du Canada. Ce qui fait la force de ce pays, c'est la participation de toutes les provinces et de tout un chacun, pas la séparation dont parle cette bande.


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Les séparatistes n'ont pas l'appui de la majorité des Québécois. Ce n'est que lorsqu'ils mettent de l'eau dans leur vin et parlent d'un genre de souveraineté-association qu'ils s'approchent de la moitié des voix dans les sondages.

Cette bande de séparatistes devrait avoir honte de se montrer dans cette Chambre. Chaque mois, ils empochent le chèque de paye que leur verse le gouvernement canadien et les contribuables de l'Ouest et continuent à prêcher la destruction du pays. Ils devraient avoir honte et peut-être songer à s'en retourner dans leur circonscription et à y rester jusqu'à ce qu'ils changent et adoptent une attitude un peu plus canadienne avant d'oser se monter dans cette Chambre des communes, ce Parlement canadien qui représente tous les Canadiens.

[Français]

Mme Lalonde: Monsieur le Président, nous sommes élus par nos concitoyens pour parler de ce qui est extrêmement important pour eux, c'est-à-dire la reconnaissance. Et c'est tellement important que, depuis les 30 dernières années, cela a occupé non seulement du temps mais cela a empêché de s'adonner à des préoccupations extrêmement importantes.

Vous ne pouvez pas passer à côté. Vous pouvez dire qu'on est une petite bande, mais le malheur c'est que nous ne sommes pas une petite bande. Nous représentons un peuple et une nation, comme il y en a de nombreux dans ce monde, qui veut pacifiquement se faire reconnaître et qui a voulu, depuis le début, se faire reconnaître. C'est ce qu'on vient vous dire et on vous dit que vous allez encore en entendre parler et que vous êtes mieux de regarder, d'écouter et de comprendre que ce peuple et cette nation a droit d'exister.

M. Harris: Go home!

Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Non, je ne retournerai pas chez nous. Il faudrait traduire cela, monsieur le Président. Il faudrait traduire cela. Je trouve innommable qu'en représentant mes concitoyens et concitoyennes, en rappelant l'histoire, en disant que ce que nous voulons c'est la prospérité et que la prospérité passe par notre égalité, je me fasse dire de retourner chez nous.

(1225)

Il y a là une injure que je trouve inqualifiable, inadmissible. Si vous pensez que c'est comme ça que vous allez bâtir la prospérité de votre pays, je pense que vous vous trompez lourdement.

M. Réginald Bélair (secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, tout d'abord, je me demande si l'on parle ici des frontières du Québec ou si l'on parle des frontières électorales qui seront à déterminer avec les nouvelles commissions qui seront mises sur pied.

Tout d'abord, il y a beaucoup de choses qui ont été dites ici ainsi qu'au Comité de la procédure et des affaires de la Chambre, au sujet des nouvelles frontières électorales, notamment en ce qui a trait au nord de l'Ontario et plus précisément à mon comté de Cochrane-Supérieur. Le sort de mon comté, tout comme le sort du nord de l'Ontario en général, repose sur les recommandations que la commission pourrait bien apporter.

Tout d'abord, ce qu'il faut mentionner en cette Chambre, c'est que tous les Canadiens, où qu'ils vivent au Canada, ont droit à une représentation juste et équitable. Ces deux mots, évidemment, sont lourds de signification; le mot équitable, en particulier, qui signifie, d'après le dictionnaire Larousse: conforme à la justice. C'est le point le plus important et qui devrait nous préoccuper dans tout ce débat, celui de la justice au niveau de la représentation, c'est-à-dire que les régions rurales du Canada devraient toujours pouvoir jouir de la présence de leur député au sein de leur communauté. Il n'est pas suffisant qu'un député ou que ses commettants puissent faire affaire ensemble par le biais du téléphone, par le biais du télécopieur, parce que finalement, cela dépersonnalise tout ce que le Canada représente.

[Traduction]

Le Comité des affaires de la Chambre a préservé un certain équilibre quand il a autorisé les commissions qui seront mises sur pied à accepter un amendement en vertu duquel une commission peut ne pas se soumettre aux règles pour tenir compte de certains facteurs tels que les économies, les frontières traditionnelles et naturelles, le fait qu'il s'agisse d'un territoire rural ainsi que l'accès aux moyens de communication et de transport.

En d'autres termes, la commission peut, si elle le juge pertinent, outrepasser les 25 p. 100 prescrits quand il y va des intérêts de la population. Ainsi, une circonscription peut être inférieure aux 25 p. 100 admissibles, compte tenu du quotient fixé pour une province donnée. C'est le cas de la circonscription de Cochrane-Supérieur que je représente et de la circonscription de Timiskaming-French River.

Désormais il sera presque impossible d'atteindre le chiffre magique de 97 000 habitants dans une circonscription du nord de l'Ontario, comme d'ailleurs dans la plupart des circonscriptions du nord du pays. Qu'il me suffise de dire qu'une fois que les commissions auront été constituées et que les audiences auront débuté, mes collègues du nord de l'Ontario et moi ainsi que les citoyens et les organismes intéressés, nous allons lutter jusqu'au bout pour sauver la circonscription de Cochrane-Supérieur. Il ne s'agit pas simplement d'assurer la survie d'une circonscription, mais également de veiller à ce que la voix des régions rurales continue de se faire entendre au Parlement.

Il y a en tout au Canada 13 circonscriptions qui s'étendent sur au moins 100 000 kilomètres carrés. La circonscription de Cochrane-Supérieur a une superficie de 351 000 kilomètres carrés et compte 41 grandes localités. Elle s'étend du Québec, à l'est, à la circonscription de Thunder Bay-Nipigon, à l'ouest, soit une distance de 425 milles.

(1230)

En 1994, j'ai moi-même parcouru 23 000 kilomètres pour servir mes électeurs de mon mieux. Il faut mettre 18 heures pour couvrir la circonscription de Cochrane-Supérieur. Si on les


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divisait en quatre, comme il est recommandé, si on annexait les quatre territoires aux circonscriptions actuelles, dans la plupart des cas, ces circonscriptions doubleraient de taille, et chacune compterait 16 000 habitants de plus.

Dans d'autres circonscriptions, notamment les circonscriptions urbaines, un député peut assister à des événements qui se déroulent aux deux extrémités de sa circonscription le même jour et, dans certains cas, il peut se rendre de l'un à l'autre en moins d'une heure quand ce n'est pas en quelques minutes. Je n'entends pas par là que les parlementaires des villes se la coulent douce. Nous qui représentons le nord de l'Ontario savons que ces circonscriptions ont une population beaucoup plus importante et que, par conséquent, leurs députés passent plus de temps avec leurs électeurs. Ce que j'essaie de dire, c'est que les électeurs doivent pouvoir s'adresser à leur député, quelles que soient les circonstances.

Dans les grandes circonscriptions rurales, beaucoup de gens s'estiment isolés, et c'est pourquoi il est important que le député rencontre ses électeurs personnellement. Ces gens doivent également être entendus et comptés, et ils doivent avoir l'impression de faire partie du pays et ne pas penser que tout se décide dans les circonscriptions urbaines. J'ajouterais également que les personnes handicapées ou âgées, vu les distances à parcourir dans les circonscriptions rurales, n'ont pratiquement aucune chance de rencontrer leur député, à moins qu'il ou elle ne les visite personnellement. Augmenter encore la taille des circonscriptions rurales serait un désastre pour beaucoup de Canadiens habitant ces circonscriptions, en particulier ceux des régions isolées.

[Français]

Suite à une conversation extrêmement intéressante que j'ai eue avec un fonctionnaire, j'aimerais rapporter l'essence de cette conversation en lisant ceci: «Une circonscription électorale est beaucoup plus qu'une démarcation géographique à des fins électorales. Une circonscription électorale représente un ensemble économique, social et culturel regroupant plusieurs milliers de personnes. Une circonscription électorale est aussi bien un outil permettant le rassemblement d'intérêts communs qu'un moyen d'expression de l'identité, du mode de vie des citoyens qui l'habitent, enfin un ensemble des valeurs communes. À cet égard, une circonscription électorale doit être classée au même titre qu'une ville, une province ou un pays. Toute modification substantielle des limites d'une circonscription électorale risque de provoquer des changements économiques et sociaux importants au sein de cette même circonscription. Il est important d'accomplir une révision équitable des limites des circonscriptions électorales existantes tout en conservant l'équilibre économique et social de telles circonscriptions.»

Je vous soumets des exemples concrets pour illustrer cela, en parlant tout d'abord du choix du candidat. Si ma circonscription était divisée en quatre et annexée à quatre comtés avoisinants, dans tous les cas, les chances d'une personne d'une région rurale désirant se présenter à l'investiture d'un parti pour devenir candidat seraient à peu près nulles. Si une personne provenant d'une région urbaine, d'une plus grande ville, avec ses nombreux partisans et la vente de cartes de membres, enfin tout, se présentait aussi, les personnes vivant en région rurale, dans le vrai sens du mot, n'auraient à peu près pas de chance d'être élues à la Chambre des communes.

(1235)

Le deuxième exemple dont je veux parler sont les régions rurales et leurs apports économiques au Canada. Nous sommes riches en ressources naturelles et c'est là notre viabilité économique. La vitalité de notre économie dépend de ces mêmes ressources naturelles et le reste du Canada devrait savoir apprécier notre contribution.

Je pourrais aussi faire une comparaison avec le Nouveau-Brunswick et l'Île-du-Prince-Édouard. Il est évident que nous ne pouvons refaire l'Acte constitutionnel de 1867 et les ententes qui ont été conclues à ce moment-là, notamment que le Nouveau-Brunswick, sous cette même loi, a une garantie de dix comtés et l'Île-du-Prince-Édouard de quatre comtés. Cependant, en superficie et en population, ces deux provinces mises ensemble se comparent avec le Nord ontarien.

Présentement, nous comptons 11 circonscriptions électorales et le Nouveau-Brunswick et l'Île-du-Prince-Édouard en ont 14. C'est une iniquité. Comme je le disais, à moins d'un changement à la Loi constitutionnelle de 1982, cela serait très difficile. Mais le point que je veux soulever, c'est qu'on reconnaisse à tout le moins que dans le nord de l'Ontario, si l'on se compare à d'autres régions du pays, nous sommes sous-représentés et nous ne pouvons absolument pas perdre une voix additionnelle au Parlement.

[Traduction]

Sur le plan géographique, le Canada est un immense problème et ce problème ne sera pas résolu avant de nombreuses années. Le fait que les Canadiens des régions rurales ne représentent qu'une faible proportion de la population n'est pas une raison suffisante pour qu'ils ne soient pas représentés de façon juste et adéquate à la Chambre des communes.

M. Stephen Harper (Calgary-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, je voudrais remercier le député de Cochrane-Supérieur, qui vient d'intervenir, pour ses observations, non pas parce que je suis nécessairement d'accord avec lui sur tout, mais bien parce qu'il s'en est tenu à l'objet de ce projet de loi, chose que peu de députés font malheureusement dans le cadre de ce débat.

Nous discutons du projet de loi C-69, Loi portant sur la création de commissions de délimitation des circonscriptions électorales et la révision des limites des circonscriptions électorales. Il s'agit, plus précisément, de mettre un terme au processus entrepris l'année dernière pour établir de nouvelles limites en fonction du recensement de 1991 et de mettre en branle un tout nouveau processus.

Nous sommes en train de terminer un débat parlementaire sur cette question qu'on a lancé il y a plus d'un an et dans le cadre duquel, selon nous, on n'est parvenu à apporter que des améliorations minimes au processus de délimitation des circonscriptions électorales.

La motion à la base de ce projet de loi demandait au Comité de la procédure et des affaires de la Chambre d'examiner les méthodes permettant de plafonner et de réduire la taille de la Chambre des communes, ainsi que d'améliorer le processus de sélection des commissaires, de voir comment les commissions


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de délimitation des circonscriptions électorales accomplissaient leur travail et d'envisager la possibilité de laisser la population participer au processus. Dans trois de ces domaines, on a réalisé certains progrès mineurs. Cependant, le projet de loi ne règle en rien le problème du nombre excessif et croissant de députés à la Chambre des communes. C'est ce qui empêche en particulier notre parti de souscrire à cette mesure.

Même, si selon nous, les modifications apportées au processus de délimitation des circonscriptions vont être utiles pour des recensements futurs, cela ne justifie pas de supprimer les commissions ou de rejeter les rapports des commissions actuelles.

Nous nous opposons à ce projet de loi et les députés du Bloc font de même, mais pour des raisons tout à fait différentes, et c'est ce sur quoi je voudrais me pencher maintenant.

La position du Bloc sur tout ce processus, dans le cas des projets de loi C-18 et C-69, est tout à fait incohérente. On a appuyé ce processus et, ensuite, on s'y est opposé.

Au départ, on s'inquiétait des limites. Maintenant on se plaint du fait que le Québec n'est pas assuré d'avoir 25 p. 100 des sièges. En vertu de la formule soumise, je tiens à souligner que nous nous penchons, en fait, sur une question de fond. Nous examinons la demande du Bloc québécois qui voudrait qu'on garantisse au Québec 25 p. 100 des 301 sièges qu'il y aura à la Chambre après la révision des limites des circonscriptions électorales, ce qui correspond à 75,25 sièges. Or, en vertu de la formule, le Québec obtiendra 75 sièges et c'est donc probablement le plus grand verbiage qu'on n'ait jamais entendu à la Chambre au sujet d'un quart de siège.

(1240)

Je dois dire cependant que je ne sais pas si cette position n'est pas encore en train de changer. Au cours du congé de Pâques, le chef du Bloc québécois a dit que le Québec voulait maintenant 50 p. 100 des sièges. Cette position change constamment.

Je voudrais parler de cette question, et l'aborder sérieu-sement, parce qu'il y a beaucoup de renseignements inexacts et de déclarations erronées à ce sujet. Je voudrais dire clairement ce qu'il en est. Le Bloc a fait au moins quatre déclarations contestables, des déclarations portant sur des faits, qui sont directement liées à ce projet de loi et à la question du 25 p. 100 des sièges.

La première de ces déclarations et celle qui ressort le plus, c'est que l'on pourrait obtenir ce genre de garantie sans modifier la Constitution. Nous savons que ce n'est pas vrai. C'était une disposition de l'accord constitutionnel de Charlottetown à laquelle le Bloc québécois s'était opposé. J'en reparlerai plus tard. Cette disposition figurait dans l'accord précisément parce qu'elle nécessitait une modification constitutionnelle.

La Loi constitutionnelle de 1867 énonce la formule à utiliser pour la nouvelle répartition des sièges à la Chambre des communes, tous les dix ans. Cette formule figure essentiellement à l'article 51. L'article 52 dit clairement que, même si l'on peut changer le nombre de sièges à la Chambre, celle-ci ne peut pas modifier la formule de répartition d'une façon qui ne tienne pas compte de la proportion établie dans la représentation des provinces. L'article 52 dit clairement qu'il faut respecter ce principe.

De plus, l'alinéa 42(1)a) de la Loi constitutionnelle de 1982 indique clairement qu'une modification constitutionnelle touchant la représentation proportionnelle à la Chambre des communes doit être approuvée par le Parlement et les deux tiers des provinces dont la population représente au moins 50 p. 100 de la population canadienne.

La deuxième affirmation inexacte du Bloc est qu'en vertu de la formule constitutionnelle actuelle seules les provinces du Nouveau-Brunswick et de l'Île-du-Prince-Édouard ont la garantie de conserver un nombre minimum de sièges à la Chambre des communes. C'est, là encore, une inexactitude. L'alinéa 51a) de la Loi constitutionnelle de 1867 garantit clairement à chaque province au moins le même nombre de sièges à la Chambre des communes qu'au Sénat. Cette disposition a été ajoutée en 1915.

Sans cette protection, le Nouveau-Brunswick et l'Île-du-Prince-Édouard verraient respectivement le nombre de leurs sièges à la Chambre tomber en deça de dix et quatre. Cette disposition vise toutes les provinces. Le Québec se voit ainsi assuré d'un minimum de 24 sièges, soit beaucoup plus que le Nouveau-Brunswick et l'Île-du-Prince-Édouard, bien que le Québec compte beaucoup plus de représentants.

D'autre part, l'alinéa 42b) de la Loi constitutionnelle de 1982, la formule de modification, indique clairement qu'une modification constitutionnelle portant sur une question qui touche une province exige un consentement unanime. Nous savons tous à quel point il est difficile d'obtenir l'unanimité. Je parlerai plus tard de certaines questions que nous aimerions aborder, mais qui ne font pas actuellement partie du jeu, ne serait-ce que parce que tous les gouvernements au Canada savent bien qu'il nous serait impossible d'obtenir l'appui du gouvernement du Québec à quelque mesure ou modification constitutionnelle que ce soit, qu'elle soit positive ou négative.

L'article 51 de la Loi constitutionnelle de 1867, qui porte sur les droits acquis, vient lui aussi contredire le Bloc lorsqu'il affirme que seuls le Nouveau-Brunswick et l'Île-du-Prince-Édouard sont protégés. Cet article ne protège pas certaines provinces en particulier, mais garantit à toutes la représentation qu'elles avaient à la Chambre des communes au milieu des années 70. Mon parti n'appuie pas cette disposition, qui peut être modifiée par une loi du Parlement, mais que ce projet de loi ne modifie pas. Elle garantit au Québec les 75 sièges qu'il possède actuellement. N'eût été de cette disposition, le Québec aurait probablement un ou deux sièges de moins.

La troisième affirmation que fait le Bloc dans ce débat et qui n'est pas exacte, c'est que le Québec a toujours réclamé 25 p. 100 des sièges à la Chambre des communes. Cela m'apparaît très curieux. Lorsque je travaillais avec les partisans du non lors du référendum sur la Constitution, je me souviens qu'on faisait souvent valoir, tant au Québec qu'ailleurs, que le Québec n'avait pas toujours insisté sur cette disposition de l'accord de Charlottetown garantissant 25 p. 100 des sièges au Québec, mais qu'elle était en fait ressortie des négociations précipitées qui ont


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eu lieu à l'été 1992. J'ai décidé d'effectuer un peu de recherches à ce sujet et elles me confirment que tel est le cas.

(1245)

Nous avons peut-être fait un oubli, mais je ne peux trouver aucun document indiquant qu'un important acteur du Québec ait exigé avant l'accord de Charlottetown qu'on garantisse à cette province 25 p. 100 des sièges à la Chambre des communes.

À mon avis, cette exigence provient peut-être de la proposition faite lors de la conférence de Victoria. En 1971, l'accord constitutionnel de Victoria proposait de garantir indéfiniment un veto constitutionnel à chaque province comptant à l'époque au moins 25 p. 100 de la population canadienne. Ainsi, l'Ontario et le Québec auraient eu un droit de veto sur toute modification apportée à la Constitution. Bien sûr, il est ironique que cet accord ait également échoué, en parti à cause des attaques lancées par le Parti québécois et par les séparatistes du Québec à l'époque. En fin de compte, les fédéralistes du Québec ont eux aussi rejeté l'accord.

Je le répète, le fait est que, autant que nous puissions en juger, cette exigence n'existe pas depuis longtemps, bien que, comme pour beaucoup d'autres choses, l'élément séparatiste qui a rejeté l'accord au début réclame maintenant cette garantie, un peu comme les séparatistes qui ont rejeté l'accord sur la Confédération à l'époque appuient maintenant certaines versions de cet accord.

J'en arrive au quatrième argument du Bloc, selon lequel le fait de ne pas garantir au Québec une représentation à la Chambre des communes constitue une violation de l'accord de confédération. Il est particulièrement intéressant de se demander comment cela peut représenter une violation quand l'accord n'a jamais existé. Une telle disposition n'a jamais été inscrite dans la Constitution de 1867.

En faisant valoir cet argument, les bloquistes ont souligné que, dans l'ancien Canada, l'union des deux provinces fondatrices dont on parle tant et qui a existé entre 1841 et 1867, le Québec avait droit à 50 p. 100 des sièges et il y a avait deux premiers ministres, comme les députés s'en rappellent.

Eh bien, la Confédération a vu le jour justement parce que cet arrangement a été rompu du fait qu'il était absolument impraticable d'avoir une Chambre principale où le nombre de sièges garantis ne pouvait varier selon la population et où il devait y avoir une sorte de mariage égal. Le système n'a pas fonctionné. Il a abouti à la Confédération. De plus, si la Confédération devait un jour échouer à l'égard du Québec, comme les séparatistes le prédisent, le reste du Canada ne serait certes pas intéressé à conclure un accord qui recréerait une union dissoute dans les années 1800.

Il importe de se rappeler ce qu'a fait l'accord de 1867. Il n'a pas garanti au Québec un pourcentage de sièges à la Chambre basse, comme c'était le cas avant 1867. Il a comporté trois éléments distincts qui répondaient avec beaucoup plus de créativité aux préoccupations du Québec et des autres régions ainsi que des nouveaux partenaires dans la Confédération.

Premièrement, cet accord a créé une Chambre des communes où la représentation devait être fondée sur la population, principe qui est admis partout dans les pays démocratiques.

Deuxièmement, il a créé un système fédéral. Il ne faut pas l'oublier. Les députés bloquistes répètent constamment que le pouvoir du Québec dans la Confédération a diminué, passant de 50 à 35 p. 100. En réalité, ce n'est pas le cas. La proportion de sièges du Québec à ce niveau est passé de 50 à 35 p. 100, mais l'aspect le plus important de la Confédération demeure l'établissement d'un régime fédéral et la création de la province de Québec en tant qu'entité juridique. L'Acte constitutionnel accordait aux Québécois, par l'entremise de leur assemblée nationale, pleine autonomie dans un certain nombre de secteurs de compétence exclusive.

Je dois signaler que mon parti s'oppose aux tentatives des libéraux fédéraux qui ont toujours cherché à miner les secteurs de compétence exclusive des provinces. Ces secteurs de compétence doivent être respectés et, à notre avis, le gouvernement fédéral ne devrait pas utiliser son pouvoir de dépenser pour s'immiscer dans les secteurs de compétence exclusive des provinces.

Troisièmement, l'accord de 1867 a créé le Sénat. Il a créé un chambre distincte ayant pour but de garantir la représentation des diverses régions du pays. Les députés ne sont pas sans savoir que j'ai déjà abordé cette question à plusieurs reprises. Il s'agit de la chambre où la représentation du Québec et des autres provinces devait être garantie.

(1250)

Cette partie de l'accord n'a pas fonctionné comme l'auraient voulu les régions du pays. L'une des choses qui nous laisse, nous les Canadiens de l'Ouest, constamment perplexes est le fait que les séparatistes du Québec réclament l'abolition de la Chambre haute au lieu de vouloir en faire le fondement même de la représentation des régions que nous, les habitants des régions, désirons pour compenser l'énorme poids démographique de l'Ontario. Ce principe est constamment rejeté, même s'il constitue l'un des éléments de presque toutes les fédérations démocratiques du monde entier.

L'historique de cette institution est très intéressant, car le Québec avait été assuré initialement d'obtenir plus tard le tiers des sièges à la Chambre haute à mesure que grandirait le pays. Quand les provinces de l'Ouest sont entrées dans la confédération, cette proportion a été réduite au quart des sièges, puisqu'on reconnaissait l'existence de quatre régions. Des sièges ont bien sûr été ajoutés par la suite pour Terre-Neuve et les Territoires, qui n'étaient pas parties à l'entente régionale initiale.

Le Québec a donc été assuré d'une certaine représentation au Parlement, et c'est au Sénat qu'elle lui est assurée. Nos provinces de l'Ouest aimeraient bien que le Sénat devienne plus efficace. Nous aimerions nous voir assurés nous aussi d'une véritable représentation. C'est ainsi qu'on doit résoudre le problème.


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Les députés s'en rappelleront, l'Accord de Charlottetown a été rejeté dans la plupart des régions du pays. Le Bloc québécois, qui trouve maintenant un intérêt soudain au quart des sièges au Sénat que l'accord de Charlottetown garantissait au Québec, oublie que cette garantie ne constituait pas tout l'accord à elle seule mais faisait partie d'un ensemble de réformes concernant le Sénat et la Chambre des communes.

Ces propositions de réforme ont été rejetées pour un grand nombre de raisons et non pas simplement parce qu'elles s'écartaient du principe de la représentation proportionnelle, mais aussi à cause de l'accroissement des effectifs de la Chambre des communes dont le nombre serait passé à 317 députés du jour au lendemain et aurait augmenté encore plus rapidement par la suite. C'est une des raisons qui explique le rejet de l'accord, que nous reproduisons maintenant avec ce projet de loi, bien que de façon pas aussi terrible.

L'accord a bien sûr été rejeté également à cause des dispositions manifestement insatisfaisantes concernant le Sénat, car elles ne garantissaient pas l'élection des membres de la Chambre haute ni l'octroi de pouvoirs réels à cette institution pour protéger les divers intérêts régionaux qu'elle est censée préserver.

Je ne veux pas poursuivre bien longtemps dans cette veine, car j'ai déjà discuté abondamment du projet de loi depuis un an, mais je tiens à dire pour terminer que nous demeurons opposés aux dispositions du projet de loi, à l'idée que nous devrions démanteler les commissions actuelles de délimitation des circonscriptions électorales pour tout reprendre à zéro. Les quelques améliorations valables que propose le projet de loi peuvent certainement être reportées au recensement de 1996. Cela ferait économiser 5 millions de dollars aux contribuables.

En exprimant notre opposition au projet de loi, je tiens à souligner que nous n'approuvons absolument pas les tactiques d'obstruction du Bloc québécois, qui s'y oppose pour des raisons totalement différentes liées à la cause de la séparation du Québec. La garantie du quart des sièges que les bloquistes exigent pour le Québec et la justification qu'ils invoquent pour appuyer cette exigence ne résistent tout simplement pas à l'examen des faits.

J'ajouterai en terminant qu'il est de plus en plus évident que, si les députés du Bloc québécois tiennent tant à l'assurance d'un certain nombre de sièges pour le Québec à la Chambre des communes, c'est qu'ils se rendent bien compte que le Québec y sera représenté lors des prochaines élections fédérales et lors de beaucoup d'autres élections par la suite. Nous y comptons bien.

[Français]

M. Michel Bellehumeur (Berthier-Montcalm, BQ): Mon-sieur le Président, j'ai écouté surtout la dernière partie du discours du député. Il connaît son histoire du Canada, il connaît l'histoire que les Québécois vivent depuis Charlottetown et depuis Meech. À plusieurs reprises, le Québec s'est fait dire non par le Canada anglais.

(1255)

Ne croit-il pas qu'il serait tout simplement légitime que le peuple du Québec, qui est un des deux peuples fondateurs du Canada, obtienne cette garantie de 25 p. 100? Je pense que c'est un minimum que le Québec demande. Il y a une certaine unanimité face à cette demande, et je ne comprends pas le député de l'Ouest qui, sous de faux prétextes, veut ignorer complètement cette demande légitime du Québec. J'aimerais sincèrement qu'il m'explique le pourquoi.

M. Harper (Calgary-Ouest): Monsieur le Président, comme je l'ai dit dans mon discours, j'appuie le principe de la représentation par pourcentage de la population à la Chambre des communes. C'est un principe de démocratie et c'est dans la Constitution.

En effet, le Québec pourrait obtenir plus ou moins 25 p. 100 de la représentation à la Chambre des communes avec la redistribution que nous aurons.

De plus, lorsque le député parle de l'histoire du Québec après l'accord du lac Meech, je remarque une chose évidente, soit que le Québécois et Québécoises veulent garder leur identitié québécoise et canadienne, et c'est seulement dans un État fédéral que les deux sont possibles.

[Traduction]

M. Ted McWhinney (Vancouver Quadra, Lib.): Monsieur le Président, le débat porte sur le projet de loi C-69. Il s'agit d'une mesure d'une vaste portée, mais le mandat y est défini avec précision et le projet de loi ne concerne que la révision des limites des circonscriptions. Ce n'est pas le moment de revenir sur des débats qui ont eu lieu ailleurs et auxquels moi et d'autres députés avons eu l'occasion de participer. Ce n'est pas davantage une reprise du débat sur l'accord de Charlottetown ni d'autres débats portant sur ce qu'on a appelé le statut constitutionnel particulier du Québec ou d'autres arrangements spéciaux. Ceux-ci sont peut-être justifiables, mais la question est étrangère au débat d'aujourd'hui.

Ce qui nous intéresse ici, c'est un changement, une réforme, une modernisation, si l'on veut, du processus de révision des limites des circonscriptions électorales du Canada. Il n'est pas faux de dire que nous sommes un peu en retard, sur le plan constitutionnel, dans notre attitude à l'égard du processus électoral et que nous n'avançons que timidement vers une constitutionnalisation nécessaire et inévitable de ce processus. Dans d'autres démocraties constitutionnelles, certaines plus anciennes que la nôtre et d'autres plus jeunes, le processus est intégralement constitutionnalisé, et le Parlement y joue un rôle auquel, pour notre part, nous semblons renoncer. Il n'y a aucune difficulté particulière à ce que le Parlement lui-même établisse les limites des circonscriptions électorales pourvu qu'il soit assujetti à un ensemble de principes constitutionnels, inscrit de préférence dans la constitution même, et pourvu que soit prévue une révision judiciaire complète et efficace. C'est précisément de cette façon que les États-Unis ont progressé vers l'égalité complète et la démocratie directe.


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Plus récemment, après la Seconde Guerre mondiale, le caractère constitutionnel du processus électoral a été reconnu dans la Constitution allemande, dans les lois électorales de ce pays et dans une série de décisions importantes rendues par ses tribunaux.

Je crois que c'est ce qui va se produire au Canada: les tribunaux reconnaîtront que le processus électoral est lié au pouvoir de l'électorat. Il s'agit d'un pouvoir préconstitutionnel, mais le fonctionnement d'un gouvernement constitutionnel est fondé sur des élections honnêtes, justes et ouvertes, dont tous les aspects peuvent être examinés par le public.

Je crois que la meilleure solution consiste à inclure cela dans la Constitution et à avoir un tribunal constitutionnel actif et vigilant qui ne craint pas d'aborder les questions électorales, contrairement à ce qu'ont fait nos tribunaux pendant de nombreuses années. Ces questions ne sont pas difficiles à examiner. Les cours suprêmes de pays aussi différents que l'Allemagne, les États-Unis, le Japon et l'Inde ont examiné les fondements d'équité et de probité de ces questions. Le processus fonctionne.

(1300)

En l'occurrence, un comité de la Chambre-que je qualifierais de très compétent, pour employer le langage des tribunaux, et au sein duquel sont fort bien représentés le parti ministériel, celui de l'opposition officielle et le deuxième parti d'opposition-a longuement étudié la question et présenté un projet de loi.

Il n'a toutefois pas abordé la question de savoir si une province devait avoir le quart des sièges à la Chambre. Cela n'aurait pas relevé de son mandat. Quoi qu'il en soit, j'aurais cru que, compte tenu de l'évolution de la démocratie constitutionnelle au Canada, pareille question ne pourrait être réglée que par un processus dûment démocratique, la population s'exprimant par référendum. Le processus de Charlottetown a, à tout le moins, établi ce principe, et je pense que tous veulent s'y conformer.

J'ai écouté avec beaucoup de respect et d'admiration les arguments exprimés par les députés du deuxième parti de l'opposition. Toutefois, je dois dire que j'estime que la Chambre n'est pas l'endroit où il faut débattre de la réduction ou de l'augmentation du nombre de sièges aux Communes pour des raisons autres que celles découlant logiquement et inévitablement des données du recensement, sur lesquelles on se fonde maintenant pour le processus électoral.

On tente ici de modifier le processus d'établissement des limites des circonscriptions électorales en examinant la question de savoir qui prend les décisions. Si c'est le pouvoir des électeurs, c'est le pouvoir du Parlement lui-même qui est en cause, et c'est sans doute un pouvoir bien plus grand que celui des juges. Et pourtant, jusqu'à présent, il a été exercé par des commissaires nommés par le gouvernement et n'ayant de comptes à rendre qu'à leur propre conscience, dans la mesure où les tribunaux n'ont pas, comme je l'ai déjà dit, exercé des contrôles au Canada.

Ce que nous avons fait dans ce projet de loi témoigne de l'atmosphère de cordialité régnant au comité à cet égard. On a établi un système où l'exécutif conserve certes le pouvoir de nomination-le Parlement conserve au moins ce pouvoir-et où le public doit être informé et consulté. Il va de soi que les chefs de tous les partis doivent être consultés. Est-ce que le projet de loi va assez loin? Nous allons voir. Cependant, il représente certainement un progrès par rapport à la situation actuelle.

Je le dis parce que j'ai moi-même fait office de commissaire électoral. Le Président de la Chambre de l'époque, Mme Sauvé, m'avait demandé de faire fonction de commissaire de délimitation des circonscriptions électorales parce qu'elle voulait dépolitiser le processus. Ce n'est pas un emploi qui rapporte des récompenses particulières, mais on l'accepte par volonté de rendre service à la population. C'est bien, mais il reste que c'est un système sans balises. C'est pourquoi les propositions représentent un progrès.

Si nous examinons à nouveau les rapports récents de commissions de délimitation des circonscriptions électorales, nous constatons que leurs justifications demeurent, au mieux, très succinctes-elles ne comptent que quelques lignes. Les commissions n'expliquent pas vraiment leurs décisions ni comment elles y sont arrivés ni sur les critères utilisés.

Dans le projet de loi que le comité nous a renvoyé, les commissions doivent produire trois cartes pour chaque circonscription sur laquelle elles font rapport. Elles doivent expliquer pourquoi elles en privilégient une plutôt que les deux autres.

Je crois que c'est encore un progrès remarquable. Peut-être aurait-on pu aller plus loin, mais étant donné la nature du comité, son fonctionnement et la volonté d'arriver à un consensus, le président a jugé que c'était la voie à adopter. Je crois que c'est la bonne. Par conséquent, je suis optimiste quant aux progrès qui pourront être accomplis lorsque le projet de loi sera adopté. Il nous faut un processus transparent. Il nous faut aussi la participation la plus large possible de la population et un bon processus d'examen.

Je crois que les tribunaux ont encore un rôle à jouer. J'aimerais bien que, dans ce domaine, le ministère de la Justice finance les contestations judiciaires comme il le fait dans le cas de celles qui se rattachent à la Loi sur les langues officielles. Peut-être des cas types portant sur des limites de circonscriptions électorales pourraient-ils être présentés aux tribunaux lorsqu'ils touchent des principes constitutionnels? Par exemple, est-ce que, dans leur travail, les commissions ont donné suffisamment d'importance au principe de l'égalité de la représentation? Certains principes constitutionnels s'appliquent dans un tel cas. Au Japon, en Inde et dans d'autres pays, des tribunaux les ont appliqués sans difficulté, et la même chose pourrait être faite ici.

(1305)

Avec ce projet de loi, nous avons l'exemple d'un comité qui s'est acquitté de son mandat en respectant scrupuleusement le critère de la pertinence. Il n'a pas tenté d'outrepasser son mandat. Il a reconnu que certains problèmes, aussi apparentés soient-ils de ceux qui l'occupaient, devaient être réglés dans d'autres projets de loi. Je crois donc que nous avons fait beaucoup de progrès.


11665

Encore une fois, ce n'est pas une répétition de Charlottetown. Les Canadiens ont voté de façon très décisive sur l'accord de Charlottetown, qui n'est maintenant plus qu'une page de notre histoire. Certaines parties de cet accord étaient intéressantes et valables. Elles vaudraient peut-être la peine d'être réexaminées, mais c'est une question qu'il faudrait débattre ailleurs, pas ici, et à une autre occasion.

Bien que j'apprécie l'éloquence du député de Mercier et la contribution qu'il a apportée au débat, je ne crois pas que son intervention soit vraiment liée au mandat du comité.

J'ai bien accueilli les remarques de mon collègue d'en face, le député de Calgary-Ouest. Beaucoup des questions qu'il a soulevées ont fait l'objet de recherches approfondies par lui-même et par d'autres. Je suis d'accord avec lui sur certains points, encore une fois, je ne crois pas qu'il convienne d'aborder ces questions durant le débat sur ce projet de loi.

Je suis fier d'être membre du comité qui a étudié ce projet de loi. Il a fait du très bon travail. Cette mesure législative est une tentative en vue de remplacer un système qui était quelque peu arbitraire en ce sens que les commissaires n'étaient pas choisis par un processus soumis à un véritable examen. Ils n'étaient pas tenus de fournir des critères pour justifier leurs décisions. Essentiellement, nous nous sommes retrouvés dans des situations où les décisions prises n'étaient pas toujours équitables. Ce n'est pas là du bon constitutionnalisme.

Ce projet de loi représente un progrès important. C'est pourquoi je recommande à la Chambre de l'adopter.

[Français]

M. Paul Mercier (Blainville-Deux-Montagnes, BQ): Monsieur le Président, mon collègue d'en face faisait à l'instant allusion à l'allocution de ma collègue de Mercier. Il voulait bien souligner l'intérêt qu'il avait trouvé à ses propos et de mon côté, j'ai trouvé très intéressant que mon collègue d'en face évoque, à l'appui de sa thèse, des exemples tirés de l'étranger et de l'histoire.

Je voudrais savoir si, dans ces exemples qu'il évoque, il a connaissance du fait qu'au début du XIXe siècle, les Hongrois, à l'intérieur de l'empire austro-hongrois, se trouvaient dans une situation assez analogue à celle dans laquelle les Québécois se trouvent dans l'ensemble canadien, c'est-à-dire qu'ils y étaient minoritaires et malheureux. Ils se sont révoltés, ils ont été battus, mais à la suite de cela, les Autrichiens, qui dominaient majoritairement l'empire, sont venus à table et ont reconnu ce qu'on a appelé la double monarchie, c'est-à-dire une structure à l'intérieur de laquelle les deux peuples, le minoritaire et le majoritaire, avaient, à un certain niveau, l'égalité pour défendre les intérêts qu'ils pouvaient avoir en commun ou, au contraire, en opposition.

Au cours du même siècle, autre exemple tout à fait semblable au nôtre, est le cas des Norvégiens qui étaient malheureux dans le royaume de Suède. Ils y étaient minoritaires et malheureux. Comme les Hongrois, ils se sont révoltés. Ils ont été battus. À la suite de cela quand même, les Suédois sont venus à table et ont reconnu un statut, qui s'appelait aussi la double monarchie, à l'intérieur de laquelle il y avait aussi une structure paritaire différente du Parlement, mais une structure paritaire tout de même. Je vous rappelle qu'au XXe siècle, et la Hongrie et la Norvège sont devenues toutes les deux indépendantes, se sont vu reconnaître l'indépendance.

Je demande donc à mon collègue d'en face s'il estime-il peut avoir des arguments-que dans ce Parlement, la représentation doit être proportionnelle à la population?

(1310)

Reconnaît-il d'une manière quelconque qu'il y a deux peuples fondateurs ici? Et à quel niveau voit-il une structure paritaire pour reconnaître ces deux peuples fondateurs? Ou bien nie-t-il qu'il y a deux peuples fondateurs dans ce pays?

M. McWhinney: Monsieur le Président, je voudrais remercier l'honorable député de son intervention. Je connais bien l'histoire de l'empire autrichien-hongrois et sa théorie constitutionnelle spéciale. J'en parle dans quelques-uns de mes propres livres, et cela a été très souvent cité par des savants québécois dans le débat sur l'évolution de la Révolution tranquille.

Néanmoins, il faut examiner tous les faits. L'empire autrichien-hongrois n'était pas vraiment une démocratie développée telle que nous la connaissons aujourd'hui. Il faut aussi reconnaître que la monarchie doublée était d'une façon intolérante des droits des autres minorités. On n'a pas reconnu les revendications de la minorité slave, et c'est pour cette raison qu'on peut examiner la faillite de l'empire autrichien-hongrois étant donné, même, sa défaite dans la Première Guerre mondiale.

Il y a des comparaisons qu'on peut faire entre le Canada et l'empire autrichien-hongrois du XIXe siècle, et surtout l'accord, l'Ausgleich, comme on le dit en allemand, de 1867. Mais les comparaisons sont très limitées. Si on veut soulever la question à savoir si la Constitution canadienne peut s'accommoder à une situation comparable à celle de l'empire autrichien-hongrois du temps, je dois rappeler que le système fédéral est très souple et capable d'accommoder beaucoup de modalités constitution-nelles différentes.

Néanmoins, la condition préalable aujourd'hui, c'est que ces revendications soient adoptées par un vote populaire. C'est la leçon primaire de la faillite de l'Accord de Charlottetown. Dans ces circonstances, si la question se pose dans l'avenir, oui, nous sommes capables d'accommoder, dans notre système fédéral, n'importe quelle forme de variation constitutionnelle, mais à condition que cela soit soumis au peuple et adopté par un vote populaire.

[Traduction]

M. Stephen Harper (Calgary-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, par égard pour le député de Vancouver Quadra, je m'abstiendrai de poser une question qui dépasse le cadre de ce projet de loi et m'en tiendrai plutôt à une question qui reste dans les limites de cette mesure législative.

Le député a fait certaines remarques quant à la constitutionnalisation de ces dispositions. Il y a, dans ce projet de loi, un point de la loi existante que nous conservons, à savoir l'écart de 25 p. 100 entre la taille de la population de la circonscription élecrorale et le quotient. Non seulement nous nous en tenons à cet écart dans des circonstances normales, mais


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nous laissons la possibilité à cet écart de s'accentuer dans des circonstances extraordinaires.

Le député sait qu'aux États-Unis, la tendance générale imposée en partie par les tribunaux au fil du temps a été pour la Chambre des représentants de délimiter des circonscriptions ayant pratiquement une population égale, avec bien sûr certaines particularités que nous ne permettrions pas nécessairement ici.

J'aimerais qu'en tant que spécialiste, le député explique à la Chambre pourquoi nous avons permis ces très larges écarts au Canada, alors que les États-Unis, un pays de taille similaire, ont réussi à délimiter des circonscriptions électorales de taille pratiquement égale. Voudrait-il que notre pays s'oriente dans cette direction à l'avenir?

M. McWhinney: Monsieur le Président, je remercie le député de Calgary-Ouest de sa question très réfléchie. Comme il le sait, c'est un sujet que nous avons discuté au comité, et sur certains points, ma position était plus proche de la sienne que le rapport du comité ne le donne à penser.

(1315)

L'évolution de la Constitution américaine a abouti à la représentation égale au Sénat, ce qui fait qu'il n'est pas nécessaire de justifier, dans la même mesure que dans d'autres pays, un électorat disproportionnellement nombreux dans certains États et disproportionnellement peu nombreux dans d'autres.

La Cour suprême des États-Unis, du moins le juge Douglas, a dit qu'en vertu du principe de l'égalité devant la loi, les choses égales devaient être traitées également, mais que ce même principe d'égalité ne s'appliquait pas aux choses inégales. Exprimé de cette façon, l'argument selon lequel les circonscriptions rurales peuvent contenir un nombre inférieur d'électeurs m'apparaît justifié à moi, député d'une région urbaine. J'admets un écart de 15 p. 100. Vingt-cinq pour cent me semble un peu déraisonnable, mais je sais qu'au comité, on cherche à dégager un consensus, qu'il faut ensuite accepter.

Nous n'en sommes pas encore à la situation qui s'est produite au Japon où la Cour suprême a été appelée à prendre une décision concernant les circonscriptions électorales de Tokyo qui renfermaient cinq fois plus d'électeurs que les circonscriptions des régions avoisinantes. Une telle disproportion est clairement intolérable.

Mais où s'arrêter? Notre comité-les députés des régions urbaines comme moi et mon collègue d'en face ayant fait certaines concessions-a essayé de reconnaître la qualité de vie spéciale aux circonscriptions rurales du Canada et que, de ce fait, elles pouvaient contenir un nombre inférieur d'électeurs. C'est dans cette optique qu'il faut voir les 25 p. 100. Toutefois, ce serait plus simple si nous avions un Sénat à représentation égale ou quelque chose du genre. La réforme du Sénat est un sujet sur lequel le député et moi avons beaucoup d'idées, mais ce n'est pas le thème de notre discussion.

[Français]

M. Michel Bellehumeur (Berthier-Montcalm, BQ): Monsieur le Président, c'est un honneur pour moi d'intervenir de nouveau à cette étape-ci de l'étude du projet de loi au nom de l'opposition officielle, au nom du Bloc québécois, le parti souverainiste à Ottawa, sur une question aussi importante que la Loi portant création de commissions de délimitation des circonscriptions électorales et pourvoyant à la révision des limites des circonscriptions électorales.

De façon plus claire, si je vulgarise ce titre afin que nos auditeurs puissent comprendre ce qu'il signifie en termes très simples, c'est qu'avec ce projet de loi, on est en train de délimiter, d'établir des règles pour d'éventuelles élections fédérales.

À prime abord, un député du Bloc québécois pourrait demeurer indifférent face à ce projet de loi. Le Canada anglais pourrait s'organiser lui-même puisque, aux prochaines élections fédérales, le Québec sera sans doute un pays souverain.

Cependant, en octobre 1993, j'ai été élu-et je le répète parce que je sais que cela fait plaisir à mes collègues d'en face de l'entendre-premièrement, pour défendre les intérêts du Québec et, deuxièmement, comme je le fais souvent, pour promouvoir la souveraineté à Ottawa.

Mais afin de remplir ce mandat de défendre les intérêts du Québec, les députés du Bloc québécois doivent être vigilants. Et notre vigilance nous amène à dénoncer ce projet de loi qui n'est pas bon pour le Québec.

Le processus qui a conduit à l'élaboration du projet de loi C-69 passe par le projet de loi C-18 présenté en cette Chambre il y a plus d'un an. Avec le projet de loi C-18, on suspendait le processus de révision électorale alors en cours pour une période de 24 mois avant qu'une nouvelle discussion sur la redistribution ne débute.

Malheureusement, le Parti réformiste s'est objecté à ce projet de loi et au délai de suspension de 24 mois avancé par celui-ci. Malgré tout, la Chambre, comme on le sait, a adopté le projet de loi C-18.

Cependant, rendu dans l'autre Chambre, les honorables sénateurs ont exactement fait la job de bras que les réformistes avaient commencée ici. L'autre Chambre a inclus dans le projet de loi C-18 un amendement prévoyant qu'un nouveau projet de loi devrait être déposé au plus tard en juin 1995, sinon l'ancienne loi reviendrait et les commissions qui étaient suspendues par l'application du projet de loi C-18 reviendraient également.

Le projet de loi à l'étude présentement a deux objectifs. Il y a l'objectif officiel de ce projet de loi, mais il y a également l'objectif officieux, tout aussi sinon plus important encore, qui est de «rétrécir le plus possible le poids politique du Québec en cette Chambre».

(1320)

Bien sûr, la stratégie a changé. Depuis le rapport de Lord Durham, les Anglais, les fédéralistes, ont changé de tactique, ils


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sont plus subtils. Mais l'objectif est le même, soit parvenir à l'assimilation des Québécois et des Québécoises.

Comment y parvenir? Ne pas reconnaître le Québec, les Québécois et les Québécoises, comme peuple fondateur, ne pas reconnaître leur caractère distinct, refuser tout ce qu'ils demandent et légiférer dans le but d'étrangler le poids politique des Québécois à Ottawa dans une mer de députés venant de l'extérieur du Québec qui, à la première occasion, comme on le voit régulièrement en cette Chambre, votera contre le Québec et mettra le Québec à sa place.

Mais l'histoire nous a démontré qu'il n'était pas nécessaire de venir de l'extérieur du Québec pour voter avec la majorité du Canada anglais et surtout contre le Québec. Non, il n'est pas nécessaire de reculer bien loin dans l'histoire pour s'apercevoir de cela. Depuis que je suis ici, je le vois régulièrement de mes yeux et je l'ai encore vu de mes yeux lors du vote à l'étape du rapport, où des députés libéraux du Québec, présents en cette Chambre, ont ignoré le Québec en rejetant une motion du Bloc québécois qui garantissait un plancher de 25 p. 100 des sièges de la Chambre des communes au Québec.

Pourtant, la motion qui était présentée, je vais vous la rappeler, monsieur le Président, était très simple et se lisait comme suit: «Par dérogation à ce qui précède, lorsque, par l'application du présent paragraphe, le nombre de sièges à attribuer à la province de Québec est inférieur à 25 p. 100 du nombre total de sièges à la Chambre des communes, le directeur général des élections attribue au moins 25 p. 100 de ces sièges à la province de Québec.»

Ce n'est pas dans 100 ans que le Québec va commencer à péricliter, à perdre du poids décisionnel en cette Chambre, ce sera immédiatement. Lors des prochaines élections fédérales, le Québec va immédiatement perdre ce poids décisionnel ou en tout cas, il sera diminué, rétréci. Les chiffres sont là, on va baisser, on va tomber sous les 25 p. 100 qu'on a toujours eus ici. Jamais, dans l'histoire du Québec, a-t-on vu des députés du Québec refuser une motion protégeant les droits légitimes du Québec, protégeant le poids politique du Québec au sein de la fédération canadienne.

Nous, députés du Québec, pourquoi sommes-nous ici? Pourquoi avons-nous été élus? Tous les députés du Québec en cette Chambre, rouges, bleus, jaunes, carreautés, de n'importe quelle couleur, ont été élus par des Québécois et des Québécoises pour défendre les intérêts du Québec. Je pense qu'une motion protégeant un plancher de 25 p. 100 visait à défendre les intérêts du Québec et c'est pour cela qu'on l'a présentée.

Notre devoir, le devoir de tous ces députés, est entre autres de protéger le poids politique et décisionnel du Québec. Le gouvernement libéral a oublié le Québec dans ce projet de loi. Le Québec oubliera à son tour le Canada dans un proche avenir. Lorsque je vois le gouvernement et le troisième parti, le Parti réformiste, main dans la main pour faire front commun contre le Québec, il est grand temps qu'on fasse nos valises.

La motion du Bloc aurait garanti le quart des sièges à l'un des deux peuples fondateurs du Canada, tout en répondant aux demandes historiques et légitimes des Québécois de conserver un poids politique minimal au sein de la fédération canadienne. L'attitude affichée par les députés du Parti libéral relève de l'hypocrisie, car ce sont ces mêmes députés qui défendaient, il y a à peine trois ans, le droit du Québec à 25 p. 100 des sièges à la Chambre des communes. À cette époque, ils étaient dans l'opposition. C'est drôle comme le temps fait changer les choses.

Avec cette attitude, tout le côté positif de cette loi est anéanti, parce qu'il y en a, des côtés positifs à cette loi. Il y a des parlementaires qui ont travaillé fort pour présenter un projet de loi qui visait à améliorer tout ce processus de redistribution. Mais c'est en vain qu'ils l'ont fait, parce qu'on a ignoré des choses extrêmement importantes.

Ce projet de loi aurait pu envoyer, en y indiquant très clairement certaines choses, un ultime message aux Québécois et aux Québécoises, mais le gouvernement a préféré s'enquiquiner avec les réformistes pour mettre encore une fois le Québec en position de faiblesse. Je m'en voudrais, comme je l'ai dit tout à l'heure, malgré tout, de ne pas souligner minimalement les points positifs de ce projet de loi. Je vais en énumérer quelques-uns.

(1325)

Il y a les modifications de la carte électorale qui, après un recensement décennal, seront suivies d'un ajustement cinq ans plus tard afin d'éviter de trop grands bouleversements des circonscriptions électorales. C'est bien, cela répond à un besoin.

Les circonscriptions électorales pourront avoir une variation de plus ou moins 25 p. 100 du quotient provincial. C'est également vrai, je pense que c'est un minimum qu'on doit prévoir dans ce projet de loi.

Les commissions provinciales seront tenues de recevoir l'avis du public avant de débuter leurs travaux. C'est une demande légitime. On l'a entendue de nos électeurs de chacun de nos comtés.

Les commissions provinciales devront tenir compte, dans l'établissement des circonscriptions électorales, de la communauté d'intérêts, de la taille de chaque circonscription et des changements géographiques prévisibles. Dans un comté comme celui de Berthier-Montcalm, que j'ai l'honneur de représenter, ce sont des critères évidents. Autrement, on se retrouve avec des aberrations, des circonscriptions qui ont 50, 52 ou 60 municipalités. Il faut vraiment avoir un lien minimal d'appartenance et je pense que le projet de loi offre ce lien.

Les commissions provinciales devront produire trois projets de cartes et tenir de nouvelles audiences si la demande le justifie. Cette assurance est également très souhaitable.

Comme le disait mon collègue, le député de Kamouraska-Rivière-du-Loup, il fallait faire quelque chose. Je le cite parce que je pense qu'il a mis le doigt sur un élément extrêmement important. Il disait: «Il me semble aussi que la question n'est pas simplement d'assurer une représentation mathématique adéquate, mais d'assurer une représentation adéquate.» Voilà toute la différence. L'équité n'est pas une question d'arithmétique.


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Si c'était une question d'arithmétique, on réglerait cela avec une calculatrice et on économiserait beaucoup d'argent. Mais quand une circonscription correspond à six coins de rue de Toronto, Montréal ou Vancouver versus une autre circonscription, comme la mienne, comme Berthier-Montcalm, de 55 ou 60 municipalités, n'y a-t-il pas d'autres critères dont on devrait tenir compte pour s'assurer que les citoyens de ces comtés vont être aussi bien représentés au Parlement que ceux du centre-ville d'une grande ville urbaine?

Les modifications suggérées répondaient à cette question, mais, comme je l'ai dit au début, le pied-de-nez que le Canada fait au Québec dans ce projet de loi est tout à fait inacceptable. En effet, et je terminerai là-dessus, le projet de loi C-69 ne donne aucun mandat. On aurait pu très aisément, sans aucun problème, donner un mandat à un comité parlementaire quelconque. Je pense que ce ne sont pas les limites, ce ne sont pas les outils qui nous manquent en cette Chambre, de trouver une solution au problème de l'érosion de la représentation du Québec à la Chambre des communes.

Pire encore, le projet de loi C-69 n'offre aucune garantie permettant de freiner la diminution continue du nombre de députés québécois dans cette enceinte. Au contraire, le projet de loi maintient la formule prévue à l'article 51 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique qui a comme conséquence d'affaiblir l'influence québécoise dans les institutions fédérales.

Vous comprendrez que tant et aussi longtemps que le peuple du Québec n'aura pas tranché sur la question de son avenir, décision qui se fera sans conteste en faveur de la souveraineté du Québec, il est d'une très grande importance que celui-ci conserve une représentation adéquate au sein des institutions fédérales.

Contrairement à certains commentaires que j'ai entendus de la part du député réformiste, je pense que compte tenu que nous sommes ici pour défendre les intérêts du Québec, c'est de jouer gagnant, c'est de jouer sûr de dire que présentement on est dans le système et qu'on fera tout pour garantir un minimum de représentation et c'est garantir un minimum pour le Québec au niveau de la force décisionnelle en cette Chambre que d'exiger ce 25 p. 100.

Ce n'est pas parce qu'on dit qu'on va perdre le référendum, au contraire, on le gagnera. Mais je pense que, minimalement, un député qui représente les intérêts du Québec devait présenter cette motion pour garantir le 25 p. 100 aux Québecois, 25 p. 100 qu'on a toujours eu depuis la Confédération et qu'on perdra aux prochaines élections à cause du gouvernement libéral qui n'a rien prévu dans ce projet de loi.

Tous les Québécois et Québécoises sont d'accord avec cela. Indépendamment, qu'ils soient d'accord sur la souveraineté ou pas, je pense qu'ils sont tous d'accord, et c'est de façon très unanime qu'on veut que le Québec conserve minimalement 25 p. 100. Je pense que, puisqu'on nous aime nous les Québécois et Québécoises, c'est du moins ce qu'on dit, qu'on peut avoir un consensus unanime en cette Chambre.

Je demande aux députés libéraux du Québec et du gouvernement de rescinder le vote antérieur pour ainsi permettre d'avoir un projet de loi qui correspondrait aux volontés exprimées unanimement par les Québécois et Québécoises, y compris par les fédéralistes québécois à la politique du castor empaillé, comme on dit présentement à la radio, politique de M. Daniel Johnson.

(1330)

Même les libéraux du Québec, et je vois qu'il y a des représentants de l'autre côté qui ont déjà siégé à l'Assemblée nationale, qui connaissent très bien les allégeances politiques de M. Daniel Johnson, même lui a dit que, oui, le Québec devait avoir au moins 25 p. 100. Je crois qu'il y a unanimité au Québec.

Je suis sûr qu'il y a une formule quelconque qu'on pourrait s'approprier en cette Chambre pour rescinder le vote à l'étape du rapport et inclure la motion que le Bloc québécois avait présentée. Je pense qu'avec du recul, avec tout ce que nous avons lu dans les journaux, avec toutes les pressions que les libéraux ont eu de l'autre côté par rapport à cette motion présentée par le Bloc québécois et qui était tout à faire légitime, je suis sûr qu'il y a une façon quelconque de rescinder ce vote afin de permettre et de garantir ce 25 p. 100 aux Québécois et aux Québécoises.

M. Jean-Paul Marchand (Québec-Est, BQ): Monsieur le Président, j'aimerais poser une question à mon collègue.

Quel est son avis par rapport au rôle des députés du Québec qui sont en faveur de ce projet de loi? Est-ce qu'il estime que les députés qui sont du Québec et en faveur de ce projet de loi défendent les intérêts du Québec?

M. Bellehumeur: Monsieur le Président, je tenterai de répondre à la question tout en ne commentant pas-je pense qu'il y a une règle-intégralement le vote pris par les députés libéraux venant du Québec.

Cependant, je pense, comme je le disais dans mon allocution, que si nous venons du Québec, si nous sommes des députés du Québec et que l'on a été élus par des Québécois et des Québécoises, que si vraiment on est ici pour défendre ces intérêts, on ne pouvait pas faire autrement que de voter en faveur de cette motion qui garantissait 25 p. 100 des sièges. On ne demandait pas la lune, on ne demandait pas des pouvoirs épouvantables, on demandait de reconnaître dans ce projet de loi que le Québec était un des deux peuples fondateurs. C'était simple. C'était facile de nous le donner. On aurait pu le prévoir.

Je pense que les libéraux venant du Québec comprennent très bien. On aurait pu prévoir, s'ils avaient fait du lobbyisme, parce que les libéraux sont forts avec les lobbies, on sait cela, les députés venant du Québec auraient pu faire du lobbyisme dans leur propre caucus, auprès de leurs propres ministres pour inclure dans ce projet de loi un article donnant mandat à un groupe de parlementaires de trouver une solution pour permettre au Québec d'avoir les 25 p. 100 de représentation que nous demandons, que le Bloc québécois demande, mais aussi que tous les Québécois et Québécoises demandent. Mais non, ils ne l'ont pas fait. Je pense que, poser la question comme le député de Québec-Est l'a fait, c'est d'y répondre. Je pense que les intérêts du Québec l'exigeaient et qu'ils ne l'ont pas fait.

[Traduction]

Le président suppléant (M. Kilger): La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le président suppléant (M. Kilger): Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.


11669

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): À mon avis, les non l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le président suppléant (M. Kilger): Conformément à l'article 45 du Règlement, le vote sur la question dont la Chambre est saisie est reporté à 17 h 30 demain. Le timbre ne sonnera pas plus de 15 minutes.

* * *

(1335)

LA LOI SUR LES PRÊTS DESTINÉS AUX AMÉLIORATIONS AGRICOLES ET À LA COMMERCIALISATION SELON LA FORMULE COOPÉRATIVE

L'hon. Fernand Robichaud (au nom du ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.) propose: Que le projet de loi C-75, Loi modifiant la Loi sur les prêts destinés aux améliorations agricoles et à la commercialisation selon la formule coopérative, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

M. Lyle Vanclief (secrétaire parlementaire du ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, c'est un plaisir pour moi que de prendre la parole pour ouvrir le débat de deuxième lecture au nom du gouvernement et du ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire.

Le projet de loi C-75 vise à modifier la Loi sur les prêts destinés aux améliorations agricoles et à la commercialisation selon la formule coopérative. La modification ne porte que sur un article de la loi. Toutefois, sans cette modification, nous devrions suspendre le programme. Le projet de loi C-75 aurait pour effet de porter le montant des prêts qui peuvent être garantis en vertu de la loi, pendant la période de cinq ans, de 1,5 milliard à 3 milliards de dollars. Avant de dire pourquoi nous devons faire cette modification, je voudrais parler un peu du programme créé en vertu de la loi elle-même.

Ce programme existe depuis cinquante ans. Il a commencé avec la Loi sur les prêts destinés aux améliorations agricoles, adoptée en 1943 et entrée en vigueur en 1945. C'était le premier programme de prêts garantis au Canada et il a été suivi par la suite par des prêts pour les étudiants et les petites entreprises. De tous ces programmes, c'est probablement celui qui a eu le plus de succès.

Au départ, le programme des prêts destinés aux améliorations agricoles visait à aider les agriculteurs locataires à obtenir des fonds pour améliorer leur exploitation et leur logement. Il fallait des garanties. Ces gens ne pouvaient pas hypothéquer la terre car ils n'en étaient que locataires. Ils ne pouvaient donc pas obtenir des prêts auprès des banques. Au fil des ans, ce programme est devenu de plus en plus populaire dans l'Ouest, comme partout ailleurs au Canada.

Les agriculteurs recourent actuellement au programme afin d'emprunter des montants pouvant aller jusqu'à 250 000 $ pour financer une gamme étendue de programmes et de projets agricoles tels que l'acquisition d'autres animaux de reproduction ou d'autres terres, les travaux d'amélioration des bâtiments, de clôturage ou d'irrigation, des améliorations aux installations d'élimination des déchets, et ainsi de suite. On pourrait également l'utiliser, et c'est le cas, pour mettre à l'essai de nouvelles pratiques agricoles, qu'il s'agisse de l'agriculture biologique ou d'autres méthodes que les agriculteurs essaient activement pour diversifier leurs activités.

De plus, le programme facilite l'accès au crédit dans le cas des coopératives de commercialisation appartenant à des agriculteurs et qui souhaitent une production agricole à valeur ajoutée. Ainsi, en vertu de la Loi sur les prêts destinés aux améliorations agricoles et à la commercialisation selon la formule coopérative, une coopérative peut emprunter jusqu'à trois millions de dollars pour construire une usine de jus, faire quelque chose avec des légumes ou entreprendre quelque autre activité destinée à accroître la valeur ajoutée ou à améliorer la transformation des produits agricoles.

Le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire doit approuver les prêts consentis aux coopératives. Grâce à ce programme, les emprunteurs peuvent réaliser des économies d'environ 0,5 p. 100 sur les taux d'intérêt et, dans leur cas, les besoins en capitaux propres sont généralement au moins 20 p. 100 inférieurs.

Le programme est déjà très populaire et sa popularité grandit même d'année en année. Il y a cinq ans, le ministère a commencé à encourager les coopératives de crédit et les caisses populaires à proposer le programme à leurs clients. Il a désigné 600 prêteurs de plus à l'échelle nationale.

Dans les localités qui ne comptent qu'une banque ou une coopérative de crédit ou qui ne possèdent ni l'une ni l'autre, les agriculteurs devaient souvent se rendre ailleurs pour emprunter. Grâce à cette mesure, voilà que subitement ils pouvaient traiter avec un bien plus grand nombre de prêteurs. En outre, ces dernières années, nous avons vu les taux d'intérêt se stabiliser, puis baisser, les ventes de matériel agricole augmenter et l'endettement des agriculteurs s'améliorer.

Comme il fallait s'y attendre, le nombre des prêts consentis en vertu du programme a plus que triplé, passant de 4 800 en 1990-1991 à près de 18 500 en 1994-1995. Le montant annuel total de ces prêts qui s'élevait à un peu moins de 82 millions de dollars atteint maintenant 515 millions de dollars. Cette année, on s'attend à ce que les prêts atteignent 550 millions de dollars, pour un total de 1,4 milliard de dollars sur cinq ans. Ce chiffre devrait demeurer constant durant les années à venir. Nous pourrons continuer d'offrir le programme avec un plafond de trois milliards de dollars. C'est surtout au Québec et en Alberta qu'on constate cette croissance dans les prêts accordés.

(1340)

Il n'y a pas si longtemps, un seul prêteur utilisait le programme au Québec. Maintenant, l'énorme Mouvement des Caisses populaires Desjardins est devenu un participant im-portant et le Québec est au troisième rang pour ce qui est des prêts consentis. De même, en Alberta, la province qui occupe le


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deuxième rang, les bureaux du Trésor albertain sont devenus des prêteurs importants en vertu de la Loi sur les prêts destinés aux améliorations agricoles et à la commercialisation selon la formule coopérative. Cependant, c'est encore la Saskatchewan qui a le plus recours à ce programme.

C'est cette nouvelle croissance qui a incité le gouvernement à proposer cette modification pour accroître le plafond. Faute de quoi, je le répète, nous risquons d'atteindre le plafond de 1,5 milliard de dollars en juin de cette année et nous devrons ensuite suspendre l'application du programme pendant environ deux ans.

Pour préparer cette modification, nous avons consulté les gens les plus étroitement liés au programme, notamment les grandes organisations agricoles comme la Fédération canadienne de l'agriculture, ainsi que les prêteurs commerciaux.

Je voudrais aussi répondre à la question inévitable sur les raisons pour lesquelles nous augmentons ce plafond de 1,5 milliard de dollars en pleine période d'austérité. Je tiens à préciser clairement que cette modification ne représente en rien 1,5 milliard de dollars de nouvelles dépenses. Au cours des 30 dernières années, le programme a coûté, en moyenne, un peu plus d'un million de dollars par année. Il s'agit d'une garantie de prêt et non d'un prêt même.

Sur 25 ans, le taux net de pertes en vertu de la loi a été d'environ 1 p. 100. Lorsqu'on examine d'autres programmes gouvernementaux, on s'aperçoit que les bénéficiaires de ces prêts sont bien décidés à les rembourser et que ce programme nous a coûté très peu au fil des ans. En fait, les intéressés peuvent être fiers de cela. Ces pertes ont été plus élevées dans les années 80 pour des raisons évidentes, mais nous nous attendons maintenant à ce qu'elles demeurent à moins de 1 p. 100 dans un avenir prévisible.

Le gouvernement s'est engagé à fournir aux agriculteurs les outils dont ils ont besoin. La Loi sur les prêts destinés aux améliorations agricoles et à la commercialisation selon la formule coopérative est un de ces outils, peu coûteux, et elle apporte une aide considérable à ce secteur agroalimentaire. Elle favorise l'adaptation, ainsi que la diversification, en plus d'encourager le développement régional et la création d'emplois.

Le gouvernement a décidé récemment, pour la même raison, de faire passer à 12 milliards de dollars le plafond pour les prêts aux petites entreprises. Là encore, nous demandons d'augmenter le plafond dans le cadre de la Loi sur les prêts destinés aux améliorations agricoles et à la commercialisation selon la formule coopérative.

À ce stade-ci, j'exhorte tous les députés à souscrire à cette modification qui doublera le plafond prévu pour ce qui est des prêts consentis en vertu de cette loi. On maintiendra ainsi l'aide peu coûteuse apportée aux agriculteurs, et je compte sur l'appui de tous les députés.

[Français]

M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac, BQ): Monsieur le Pré-sident, le projet de loi C-75 dont nous discutons cet après-midi n'est pas très volumineux ni complexe. En fait, ce projet de loi se résume à un seul article, un seul article très simple qui dit que l'on va passer d'un maximum de prêts garantis de 1,5 milliard à 3 milliards de dollars.

Comme mon collègue, le secrétaire parlementaire au ministre de l'Agriculture vient de le signaler, ce n'est qu'une garantie de prêts. Ce n'est pas 3 milliards ou 1,5 milliard d'argent frais que ce gouvernement injecte dans l'agriculture, loin de là. Donc, le projet de loi C-75 se résume à une modification à la Loi sur les prêts destinés aux améliorations agricoles et à la commercialisation selon la formule coopérative.

(1345)

Je dois vous avouer, lorsque j'ai lu le titre de cette loi, qu'il m'est apparu comme relativement long. Je me suis permis, comme le premier ministre, de compter les mots. Effectivement, il y a 16 mots dans le titre d'une loi qui aurait pu, à mon sens, être beaucoup plus court.

Donc, la modification apportée vise à doubler le montant et le nombre des prêts garantis aux termes de cette loi. La modification ne fait qu'accroître le plafond de garantie pour les prêts consentis par les institutions bancaires compte tenu de l'accroissement de la demande. Le plafond actuel est de 1,5 milliard de dollars, et avec l'adoption du projet de loi C-75, on portera cette limite à 3 milliards de dollars. Pour de nombreux agriculteurs, le résultat de cette augmentation signifie un accès accru au financement.

Même s'il s'agit de garanties de prêts et non d'investis-sements de nouvel argent, une question d'importance qu'il convient de poser cet après-midi est celle-ci: Est-ce que les contribuables devront faire directement les frais de cette augmentation? Puisque même s'il s'agit d'une garantie de prêts, le risque de non-paiement est toujours présent et, en bout de ligne, ce sont toujours les contribuables qui doivent en payer la note.

Selon les données du ministère de l'Agriculture et de l'Agro-alimentaire, les pertes pour non-paiement ou pour non-remboursement s'élèvent à plus ou moins 1 p. 100 de l'ensemble des prêts garantis. Donc, le coût de ce programme serait relativement faible. Or, 1 p. 100 de 3 milliards de dollars pourrait éventuellement coûter aux contribuables canadiens 30 millions de dollars.

Donc, pour le bien des agriculteurs, le Bloc québécois va endosser l'augmentation du plafond de 1,5 milliard à 3 milliards de dollars en appuyant le projet de loi C-75. Dans le contexte actuel, il est quasi impossible pour les provinces d'obtenir un peu plus d'autonomie de la part du fédéral. La seule solution à court terme, et c'est uniquement pour nos agriculteurs, je le répète, c'est de permettre au gouvernement d'aller de l'avant avec le projet de loi C-75.

Cependant, je tiens à préciser que notre appui est uniquement basé sur un souci de permettre aux agriculteurs d'avoir accès au financement auquel ils ont besoin et auquel ils ont droit. Mis à part cet aspect primordial, il est clair comme de l'eau de roche que nous ne pouvons passer sous silence un dédoublement. Ici, j'aimerais attirer l'attention de tous mes collègues et tout particulièrement votre attention, monsieur le Président, sur un dédoublement tel que celui du projet de loi C-75 dans lequel on peut laisser entrevoir le dédoublement à deux paliers de gouvernement, et je vais vous l'expliquer.

La question de fond que nous devons réellement nous poser n'est pas seulement de savoir si le plafond de la loi sur les prêts destinés aux améliorations agricoles et à la commercialisation selon la formule coopérative est suffisamment élevé, mais bien

11671

de s'interroger sur la pertinence du programme dans son ensemble. Toujours selon les chiffres d'Agriculture Canada, la demande de garanties de prêts est croissante. C'est cette trop grande demande qui justifie l'augmentation du plafond.

Or, vous savez très bien, monsieur le Président, vous comme moi, que le prix des fermes agricoles a augmenté, que le prix des constructions, des agrandissements a augmenté, que le prix de la machinerie agricole, les tracteurs, moissonneuses-batteuses, a augmenté, voire doublé depuis les dix dernières années. Le prix de construction de fosses à purin, de fosses à fumier augmente de plus en plus. Il était, je pense, justifié d'augmenter ce plafond.

(1350)

Je ne nierai aucunement l'importance pour les agriculteurs d'avoir accès à du financement pour améliorer leurs installations ou pour prendre de l'expansion. Raison de plus pour leur faciliter la vie et leur permettre de combler leurs besoins dans un seul et même endroit. Le principe d'un guichet unique, cela vous dit quelque chose, et au Québec de plus en plus on souhaite effectivemnt obtenir à tous les paliers le principe de ce guichet unique. Actuellement, au Québec, il y a trois organismes en place pour aider les agriculteurs du Québec qui désirent obtenir du financement.

En fin de semaine, je rencontrais plusieurs intervenants agricoles dont un de mes collègues, un de mes amis, Bertrand Lacroix, de la Deuxième rue à Disraëli qui m'expliquait la complexité dans laquelle on se retrouve. D'un côté, vous avez ce qu'on appelle la Société du financement agricole du Québec qui portait comme nom, il y a quelques années, l'Office du crédit agricole, qui relève du gouvernement québécois. Vous avez la Société du crédit agricole qui relève du gouvernement fédéral. Et de deux. Et de trois, tout comme la loi dont nous parlons cet après-midi a seize mots, la Loi sur les prêts destinés aux améliorations agricoles et à la commercialisation selon la formule coopérative. Dorénavant, je me servirai des lettres d'abbréviation: la LPAACFC. Voyez-vous la complexité, et on court après.

Je suis très loin d'être fier cet après-midi de donner l'aval du Bloc québécois à ce projet de loi. On dépasse les 550 milliards de dollars de déficit accumulé. On va friser les 40 milliards de déficit pour l'exercice financier en cours et on augmente la duplication des chevauchements. Vous avez un bel exemple ici de chevauchement à l'intérieur du même gouvernement. L'agriculteur a le choix d'emprunter au niveau fédéral soit de la Société du crédit agricole ou de la LPAACFC. Pourquoi ne pas mettre tout cela sous le même parapluie? Je suis certain qu'on économiserait plusieurs dizaines de millions de dollars par année. En plus d'économiser des dizaines de millions de dollars par année, ce gouvernement, avec la classe agricole, serait drôlement plus efficace. Pire encore, lorsqu'on est sur le territoire du Québec s'ajoute un troisième volet: la Société de financement agricole.

Un agriculteur me racontait samedi après-midi lorsque je lui rendais visite, il me dit: Pour financer ma nouvelle construction, j'ai marchandé. Il a fait les trois et il a convenu que le plus profitable, dans son cas, je ne dis pas que dans tous les cas ce serait la même chose, mais dans son cas, l'endroit le plus profitable, le plus avantageux pour qu'il puisse prendre de l'expansion était la Société de financement du Québec. Dans d'autres situations, il est possible que ce soit la Société du crédit agricole. Dans son cas, il me disait qu'il avait marchandé les trois possibilités et que le plus avantageux était la Société de financement agricole qu'on appelait avant l'Office de crédit agricole.

Donc, les programmes offerts par ces trois organismes différents, j'en conviens, créent beaucoup d'argent dépensé totalement inutilement. Lorsque les gouvernements des différentes provinces, notamment au Québec et en Ontario, lorsque ces deux grosses provinces présenteront leur budget, ils devront imiter probablement notre ministre des Finances et attaquer de plein front leurs contribuables. Ils devront défendre justement les sommes d'argent dépensées, à mon sens, totalement inutilement en dédoublements. Et au Québec, on sait ce que c'est le dédoublement. On le sait depuis déjà plusieurs années et c'est la raison pour laquelle on aimerait posséder notre coffre à outils avec tous les outils à l'intérieur pour s'épanouir totalement, librement et complètement.

(1355)

Même si les trois programmes que je viens de nommer diffèrent, n'est-ce pas justement parce que les ressources sont éparpillées en trois endroits différents? Si la Société du financement agricole disposait des ressources des deux autres organismes, il y a fort à parier qu'elle pourrait offrir de nouveaux programmes. C'est ce qu'on pourrait appeler un centre de guichet unique.

Sinon, il est possible que cette province ait établi des critères et des normes qui lui sont propres qui ne concordent pas avec ce que le fédéral a décidé. Admettons par exemple qu'au Québec, les normes de la Société du financement agricole soient plus sévères que celles de la loi dont il est question dans le projet de loi C-75, peu importe les raisons, alors le fédéral, en agissant de façon parallèle, vient encore s'immiscer dans les affaires du provincial.

Plutôt que de poursuivre, monsieur le Président, je pourrais interrompre mon allocution et vous laisser la parole pour les déclarations de députés et continuer après la période des questions orales.

Le Président: Certainement, cher collègue. Je vous remercie de m'avoir donné la parole, comme on dit.

Comme il est 14 heures, conformément au paragraphe 30(5) du Règlement, la Chambre procédera maintenant aux déclarations des députés.

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DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Traduction]

LA TRAGÉDIE DE OKLAHOMA CITY

Mme Maria Minna (Beaches-Woodbine, Lib.): Monsieur le Président, le mercredi 19 avril dernier, un événement tragique et terrible s'est produit au coeur de l'Amérique. L'attentat à la bombe perpétré contre un immeuble fédéral d'Oklahoma City a bouleversé le monde entier. Cet attentat à la bombe montre que personne n'est à l'abri des actes terroristes et que le terrorisme peut frapper n'importe où, même aux endroits jusque-là considérés comme sûrs, à preuve ce qui s'est passé au Canada la semaine dernière, devant l'Assemblée législative de l'Île-du-Prince-Édouard.


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L'aspect le plus dévastateur de cet attentat à la bombe est le nombre de jeunes enfants qui ont été tués par l'explosion. Je ne peux pas comprendre comment on peut ainsi jouer avec des vies, surtout quand il s'agit de la vie d'enfants innocents.

Je suis sûre que je me fais la porte-parole de tous les députés ici présents en disant aux habitants d'Oklahoma City que nous partageons leur chagrin. Puissent-ils trouver la force de reconstruire et de continuer. Je suis sûre aussi que tous mes collègues se joignent à moi pour condamner cet acte terroriste des plus lâches.

* * *

[Français]

LA TRAGÉDIE DE OKLAHOMA CITY

M. Pierre de Savoye (Portneuf, BQ): Monsieur le Président, il est de ces situations qui suscitent des courants de sympathie et de solidarité entre les peuples et les nations, les individus et les collectivités.

Nous joignons notre voix à celles qui dénoncent avec force et énergie l'attentat commis la semaine dernière à Oklahoma City.

Peu importe qui, en définitive, est responsable de cet attentat, et peu importe les motifs, il est totalement injustifiable que des individus ou des groupes organisés aient recours à la violence et au massacre.

L'acte ignoble commis à Oklahoma City contre des dizaines d'innocents, dont, faut-il le rappeler, des enfants fréquentant une garderie, heurte de plein fouet les valeurs de tolérance, de solidarité, de respect et de démocratie qui caractérisent nos sociétés.

C'est un message de sympathie et de solidarité que nous adressons aujourd'hui aux blessés, aux familles et aux proches des victimes, à la communauté d'Oklahoma City et au peuple américain tout entier.

* * *

[Traduction]

LA TRAGÉDIE DE OKLAHOMA CITY

Mme Deborah Grey (Beaver River, Réf.): Monsieur le Président, je voudrais aussi parler de la terrible tragédie qui s'est produite à Oklahoma City la semaine dernière, le 19 avril. Cela a été un véritable choc pour le monde entier.

Nous offrons nos condoléances à toutes les personnes qui ont perdu des amis et des proches dans cet attentat des plus lâches qui a fait d'innocentes victimes. Nous offrons nos condoléances en particulier aux familles des enfants qui sont morts et aux enfants qui ont perdu leurs parents dans cette tragédie.

Ce crime dégoûtant et ignoble est l'oeuvre d'un élément malade de la société, un élément dont on ne pouvait même pas soupçonner l'existence dans notre pays et dans les pays du monde entier.

J'espère que l'on établira de meilleures procédures pour déceler la présence de ces personnes et comprendre le danger qu'elles peuvent constituer pour la société. Il faudra juger sans attendre les lâches qui ont commis ce crime atroce et faire en sorte que la peine soit proportionnelle à la gravité du crime.

Oklahoma, nos pensées et nos prières vous accompagnent.

LA JOURNÉE «NAÎTRE À LA LECTURE»

M. John Finlay (Oxford, Lib.): Monsieur le Président, nous célébrons aujourd'hui la journée «Naître à la lecture».

Près de deux millions d'écoliers canadiens, de la maternelle à la troisième année, recevront un exemplaire gratuit de Naître à la lecture, un manuel pratique qui encourage les parents à passer plus de temps à lire avec leurs enfants.

Prenant conscience de la gravité du problème d'analphabétisme dans la population canadienne et du fait que l'alphabétisation commence à la maison, l'auteur et dessinateur Ben Wicks a créé un manuel qui explique aux parents comment aider leurs enfants à aimer la lecture.

Ce projet est le fruit des efforts combinés de certaines des plus grandes sociétés canadiennes, des gouvernements fédéral et provinciaux et des cinq principaux organismes d'alphabétisation au Canada.

Vingt-quatre pour cent des Canadiens adultes sont des analphabètes fonctionnels. En tant qu'ancien enseignant, je trouve cette statistique consternante. Je suis bien conscient des bienfaits de l'alphabétisation, et c'est pourquoi je remercie M. Ben Wicks pour son importante initiative de lutte contre l'analphabétisme.

* * *

LE CHAMPIONNAT MONDIAL DE CURLING

M. John Harvard (Winnipeg St. James, Lib.): Monsieur le Président, c'est la première fois que j'ai l'occasion, à la Chambre des communes, de féliciter le Canada, qui a remporté le Championnat mondial de curling.

L'équipe canadienne se compose du skip Kerry Burtnyk, du troisième Jeff Ryan, du deuxième Rob Meakin et du premier Keith Fenton. Ces quatre joueurs remarquables pratiquent leur sport au Club de curling Assiniboine Memorial de Winnipeg, situé au bout de la rue où j'habite. J'admets humblement ressentir une certaine fierté pour ma localité.

Les membres de l'équipe Burtnyk n'en sont pas moins de vrais champions mondiaux. Ils ont été les vainqueurs du tournoi à Brandon, remportant les onze parties au complet et le titre convoité, en réussissant une double sortie spectaculaire sur leur dernière pierre, lors de la dernière partie qui les opposait à l'équipe écossaise.

Leur victoire est le couronnement d'une saison exceptionnelle pour les joueurs de curling du Manitoba, une saison au cours de laquelle les équipes manitobaines ont raflé deux titres mondiaux et deux championnats nationaux.

Je tiens à féliciter encore une fois Kerry Burtnyk, Jeff Ryan, Rob Meakin et Keith Fenton, les champions mondiaux pour 1995. Ils sont d'excellents citoyens du Manitoba, foyer du curling au Canada.

* * *

LES SOINS DE SANTÉ

M. Stan Keyes (Hamilton-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, certains des meilleurs médecins au monde pratiquent ici, au Canada.


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En Ontario, toutefois, les médecins se remettent tant bien que mal du mauvais traitement que leur a infligé, pendant trois années consécutives, le gouvernement néo-démocrate de Bob Rae. À ce jour, le gouvernement Rae n'est pas arrivé à établir une collaboration significative avec les intervenants du domaine des soins de santé, pour prendre des décisions plus judicieuses en matière de planification et de prestation des services. Par exemple, il devrait y avoir des incitatifs pour amener les gens à s'adresser aux cliniques communautaires plutôt qu'à l'urgence des hôpitaux, dont les coûts sont cinq fois plus élevés.

De plus, le gouvernement Rae n'a pratiquement pas appuyé la profession médicale dans ses efforts pour élaborer de nouveaux modèles de paiement permettant de gérer les coûts. En Ontario, le gouvernement Rae exerce sur les médecins une pression tellement forte qu'elle compromet leur capacité de fournir des services. Les patients innocents en subissent les conséquences.

Les Ontariens en ont assez. Il est temps pour eux d'avoir un nouveau leadership efficace. Ils ont besoin d'un gouvernement provincial qui s'engage à leur fournir des services de soins de santé de qualité.

* * *

[Français]

LE PEUPLE ARMÉNIEN

M. Michel Daviault (Ahuntsic, BQ): Monsieur le Président, le Bloc québécois joint sa voix à celle de tous les Arméniens afin de souligner la commémoration du 80e anniversaire du génocide arménien qui a commencé en avril 1915. Ce crime odieux contre l'humanité ne doit pas sombrer dans l'oubli.

Il y a lieu de s'indigner devant le manque évident de leadership du Canada face à ce crime impuni. Le Québec, sous René Lévesque, a reconnu le génocide arménien. Manifestement, le présent gouvernement libéral fait preuve d'un manque flagrant de courage et de lucidité, car il ignore toujours ce génocide.

Au nom de tous les Québécois et Canadiens, le Bloc québécois, lui, se souvient et sympathise avec le peuple arménien.

* * *

[Traduction]

LA SOCIÉTÉ CANADIENNE DE SCHIZOPHRÉNIE

Mme Diane Ablonczy (Calgary-Nord, Réf.): Monsieur le Président, la Société canadienne de schizophrénie lance aujourd'hui une grande campagne en vue d'éliminer les mythes et les fausses idées qui circulent sur la schizophrénie et d'informer la population sur les symptômes réels de la maladie et sur ses répercussions. Le thème de la campagne nationale souligne que, s'il est difficile d'épeler le nom de la maladie, il l'est encore plus de vivre avec elle.

(1405)

La schizophrénie affecte une personne sur cent, c'est-à-dire 270 000 Canadiens. C'est l'une des formes de maladie mentale les plus courantes. Malheureusement, 40 p. 100 des personnes atteintes tentent de se suicider et, pire encore, le quart d'entre elles y parviennent.

La schizophrénie est causée par un déséquilibre chimique dans le cerveau et elle frappe généralement à la fin de l'adolescence ou au début de la vingtaine, et dure souvent pendant toute la vie.

Je loue les efforts de la Société canadienne de schizophrénie qui travaille pour alléger la souffrance causée par la maladie.

* * *

LA YELLOWHEAD HIGHWAY ASSOCIATION

M. Len Taylor (The Battlefords-Meadow Lake, NPD): Mon-sieur le Président, en fin de semaine, la Yellowhead Highway Association tenait sa 49e assemblée annuelle, à Edmonton. Cette organisation, représentant les localités situées sur la route Yellowhead, allant de Winnipeg, au Manitoba, à Merritt et Masset, en Colombie-Britannique, a contribué à améliorer la sécurité, le commerce et le tourisme le long de la route la plus fréquentée de l'Ouest du Canada.

Malgré l'énorme succès remporté par cette association, il reste encore beaucoup d'améliorations à apporter, ce qui nécessitera l'appui soutenu des gouvernements fédéral et provinciaux. Le gouvernement fédéral doit continuer de subventionner le réseau routier national et de fournir les ressources nécessaires à l'amélioration des commodités que la nouvelle route transcanadienne Yellowhead offre aux touristes.

J'exhorte le ministre des Transports à se joindre aux nombreux habitants de l'ouest du Canada qui appuient la route Yellowhead, à reconsidérer sa décision de ne plus subventionner le réseau routier national et à s'engager de nouveau à fournir les ressources nécessaires au bon entretien de cette route.

* * *

LA JOURNÉE «NAÎTRE À LA LECTURE»

M. Eugène Bellemare (Carleton-Gloucester, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais remercier Ben Wicks, l'un des plus grands caricaturistes canadiens, dont le livre intitulé Naître à la lecture a été distribué aujourd'hui dans plus de 10 000 écoles partout au Canada.

Le lancement officiel de son livre a eu lieu ce matin, au cours d'une cérémonie à laquelle il a participé sur la colline du Parlement, en présence du gouverneur général Roméo LeBlanc et du sénateur Joyce Fairbairn, ministre responsable de l'alphabétisation.

[Français]

Étant caricaturiste amateur et ancien éducateur, je ressens beaucoup de fierté envers cet outil que Ben Wicks offre aux parents des jeunes enfants, un outil qui leur permettra de rendre l'introduction à la lecture un exercice intéressant autant qu'éducationnel.

De plus, je n'ai aucun doute que ce livre sera un renforcement important dans la lutte contre l'analphabétisme.


11674

[Traduction]

Merci, Ben Wicks, et félicitations.

* * *

LE CHAMPIONNAT NATIONAL JUNIOR DE JUDO

L'hon. Roger Simmons (Burin-Saint-Georges, Lib.): Monsieur le Président, les épreuves du championnat national junior de judo se sont tenues le week-end dernier à Terre-Neuve pour la première fois en 20 ans. La ville de Stephenville, dans ma circonscription, a été l'hôte de cet événement et a magnifiquement relevé ce défi. J'y étais pour contribuer à mousser l'esprit qui doit animer un événement sportif d'une telle envergure.

Le championnat a réuni 300 concurrents venus des dix provinces du pays, dont Jeremy Delaney, Eric Hynes, Gary Lasaga et Jeff Pollard, tous de Stephenville.

Les Terre-Neuviens sont très fiers de leur équipe, qui a remporté sa toute première médaille d'or dans le cadre d'un championnat national de judo. J'adresse mes félicitations à tous les responsables, notamment à Aden White, William MacNeil, Della McIsaac, Rodger Farrell, ainsi qu'aux athlètes, aux entraîneurs, aux officiels et aux bénévoles. Pour Aiden White en particulier, ce fut un rêve devenu réalité. Félicitations à tous pour leur bon travail.

* * *

LES SERVICES DE SÉCURITÉ

M. Leonard Hopkins (Renfrew-Nipissing-Pembroke, Lib.): Monsieur le Président, je prends aujourd'hui la parole pour rendre hommage aux Services de sécurité de la Chambre des communes, qui célèbrent cette année leur 75e anniversaire.

En effet, c'est en 1920 que, aux termes d'une loi du Parlement, le service de protection de la Chambre a été mis sur pied et chargé de protéger le Parlement, ses députés et ses locaux. Avec le temps, il est devenu la force que nous connaissons aujourd'hui et qui se caractérise par son efficacité et son professionnalisme. Le Service de sécurité s'est toujours efforcé, par des mesures de prévention et d'intervention, d'assurer l'excellent service auquel nous sommes habitués.

Le personnel de sécurité est constamment aux prises avec le même dilemme: assurer la sécurité sans limiter ni entraver l'accès aux immeubles pour le public et garantir une sécurité suffisante pour protéger adéquatement les députés, les employés, les visiteurs et les touristes à une époque où la criminalité et le terrorisme s'aggravent.

À titre de membre honoraire des Services de sécurité, j'invite tous les députés à se joindre à moi pour souhaiter au personnel de sécurité un heureux 75e anniversaire et de longues années de succès.

(1410)

[Français]

LE RÉFÉRENDUM QUÉBÉCOIS

Mme Pauline Picard (Drummond, BQ): Monsieur le Président, non seulement le camp du non n'a rien à offrir aux Québécois lors du prochain référendum, mais plus encore, le Parti libéral du Québec renie désormais les revendications traditionnelles du Québec.

Balayant du revers de la main quatre des cinq conditions posées lors des négociations du lac Meech, jugées alors minimales par le Parti libéral, les ténors fédéralistes proposent désormais de se baser sur d'obscures ententes administratives pour assurer le développement du Québec et définir sa place au sein de la fédération canadienne.

La reconnaissance de l'existence d'un peuple et la dévolution des pouvoirs qui sont nécessaires à son développement ne se sont jamais effectuées par le biais d'ententes administratives. Ce que le Parti libéral propose n'est pas «l'affirmation tranquille», mais plutôt une stratégie de «résignation tranquille».

* * *

[Traduction]

LE RWANDA

M. Jack Frazer (Saanich-Les Îles-du-Golfe, Réf.): Monsieur le Président, les dissensions interethniques ont éclaté de nouveau au Rwanda samedi, et le monde a été témoin d'un autre massacre, des soldats du gouvernement tutsi tuant des milliers de réfugiés hutus.

De plus petits groupes de réfugiés avaient déjà été tués auparavant, ce qui laissait nettement présager le massacre de samedi. Ce n'était qu'une question de temps. Pourtant, le monde et l'ONU sont encore une fois demeurés des spectateurs impuissants.

En ce 50e anniversaire de l'ONU, des événements tels que ceux-là rendent absolument indispensable une collaboration à l'échelle internationale pour réformer les structures et les méthodes de l'organisation afin que celle-ci puisse réagir efficacement dans de brefs délais pour que des atrocités comme le massacre tragique du week-end dernier deviennent chose du passé.

Dans l'immédiat, la communauté internationale doit veiller à ce que les responsables de ces horreurs soient identifiés et punis. C'est la seule manière de montrer clairement que le monde ne peut pas accepter et n'acceptera pas un comportement semblable.

* * *

[Français]

LA VIOLENCE

M. Patrick Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine, Lib.): Monsieur le Président, la semaine qui vient de se terminer

11675

a été marquée par des gestes d'une violence inouïe que nous devons tous condamner sans réserve.

Nos sociétés dites industrialisées semblent être devenues une cible de choix pour les marchands de haine et de mort. Quels que soient les motifs qui amènent certains individus à poser ces gestes sauvages et insensés, ils ne peuvent et ne pourront jamais être considérés comme une justification valable à leur folie meurtrière.

J'en appelle à tous les députés de cette Chambre ainsi qu'à tous les Canadiens et Canadiennes de joindre nos efforts afin de combattre et d'éliminer l'intolérance et la haine dans notre société.

* * *

[Traduction]

LE RWANDA

M. John Godfrey (Don Valley-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, pour continuer dans la même veine que le député qui vient de prendre la parole, je suis persuadé que, comme l'ensemble des Canadiens, tous les députés se joignent à moi pour condamner les atrocités incessantes au Rwanda. Ce week-end, nous avons appris qu'une autre attaque avait été menée contre des civils innocents et qu'elle avait entraîné la mort de plusieurs milliers de Rwandais.

Au nom du respect de la personne et de ses droits à l'échelle internationale, il vient un moment où il faut mettre de côté le principe international reconnaissant de longue date la préséance du droit absolu à la souveraineté nationale sur tous les autres droits.

Je crois que les citoyens du Rwanda, comme ceux de la Somalie ou de l'ex-Yougoslavie, ont des droits inaliénables à la liberté et à la vie. De toute évidence, ces droits n'existent plus. Le gouvernement du Rwanda doit rendre compte de la conduite de son armée, et il faut que justice soit rendue.

Je crois que les Canadiens ont un rôle à jouer dans la pacification de cette région. Nous avons été et demeurons des chefs de file dans la lutte pour la paix. Les meurtres collectifs et les purges ethniques n'ont nulle part leur raison d'être dans le monde. Il faut que la voix de la paix et de la liberté soit entendue.

* * *

LA CONTREBANDE

M. Ed Harper (Simcoe-Centre, Réf.): Monsieur le Pré-sident, les Ontariens sont des gens bienveillants. Depuis que leur province a vu le jour, ils ont contribué généreusement à la Confédération.

Le gouvernement met toutefois leur générosité à l'épreuve. Malgré l'élection de 98 députés libéraux en Ontario lors du dernier scrutin général, les préoccupations de cette province ne sont pas prises en considération. Rien ne saurait mieux illustrer cette représentation laissant à désirer que le problème croissant de la contrebande.

La solution au problème de la contrebande que les libéraux ont annoncée dans le budget de février dernier n'a pas le moindrement empêché le trafic d'armes, d'alcool, de drogues et de tabac en Ontario. La contrebande est à l'origine de la majorité des cas où des armes à feu sont utilisées à des fins criminelles en Ontario et elle facilite la consommation illégale de drogues. Elle a coûté des milliers d'emplois dans les distilleries, et le gouvernement a perdu, à cause d'elle, des milliards de dollars de recettes.

Le vieil adage selon lequel plus on est nombreux, moins il y a de danger ne s'applique visiblement pas à la représentation de l'Ontario à Ottawa.

* * *

(1415)

LA SEMAINE NATIONALE DE L'ACTION BÉNÉVOLE

Mme Jean Payne (St. John's-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, la Semaine nationale de l'action bénévole a lieu cette année du 23 au 29 avril. Cette semaine, des collectivités d'un bout à l'autre du pays rendent hommage aux gens qui mettent leur temps et leurs connaissances à la disposition de leurs concitoyens.

La Semaine nationale de l'action bénévole a été proclamée pour la première fois en 1943. Plus de cinquante ans plus tard, nous profitons de cette occasion pour reconnaître la contribution des bénévoles à la société. Des personnes qui siègent au conseil d'administration d'organismes communautaires, comme l'Ambulance Saint-Jean, aux entraîneurs de hockey qui sacrifient leurs matinées du samedi à montrer aux jeunes les joies et la valeur du travail d'équipe, les bénévoles font don du cadeau le plus précieux: leur temps.

Je voudrais plus particulièrement signaler la contribution d'un de mes électeurs, M. John O'Regan, qui a été nommé bénévole de l'année par la Chambre de commerce de Terre-Neuve et du Labrador pour ses nombreuses années de services communautaires dévoués.

J'invite tous les députés à faire comme moi et à rendre hommage à tous les Canadiens qui mettent leur temps et leurs connaissances à la disposition de leurs concitoyens pour faire du Canada le grand pays qu'il est.

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QUESTIONS ORALES

[Français]

LE SOMMET DU G-7

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le Président, vendredi dernier, lors de son passage à la base militaire de Valcartier, le premier ministre a déclaré que Québec a perdu le Sommet du G-7 parce que le drapeau du Canada ne flotte pas sur l'hôtel de ville.

Ma question s'adresse au premier ministre. Je lui demande s'il ne trouve pas mesquin d'avoir écarté la ville de Québec de la tenue du Sommet du G-7 pour une histoire de drapeau?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieurle Président, la ville d'Halifax a été choisie pour la valeur du site d'Halifax. Le premier Sommet économique avait eu lieu au Québec, à Montebello, le deuxième à Toronto et le troisième, nous avons décidé de le tenir à Halifax, la partie du Canada maritime qui n'a pas souvent d'occasions comme celle-là. Aussi, à l'époque, nous avions eu des représentations de certaines personnes de la ville de Québec, et j'ai dit à cette


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époque comme je le dis aujourd'hui, que ce n'est pas très agréable lorsqu'un maire d'une ville au Québec vient demander des faveurs au gouvernement canadien et qu'il refuse de montrer le drapeau de son pays, le drapeau du Canada. Alors que le premier ministre du Canada allait inviter des chefs internationaux à venir dans la ville de Québec, le maire n'avait même pas la gentillesse de montrer qu'il était lui-même un Canadien.

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le Président, il n'y a personnne au Québec qui demande une faveur à qui que ce soit, et surtout pas le maire de Québec dans l'exercice de ses responsabilités de maire. On paie des impôts ici, nous! On paie des impôts! C'est notre argent que vous gérez et on veut notre juste part. Ce n'est pas vrai qu'on nous fait passer pour des quémandeurs de faveurs vis-à-vis du gouvernement fédéral.

Des voix: Bravo!

M. Loubier: Cela nous coûte 30 milliards de taxes et d'impôts!

M. Bouchard: Monsieur le Président, faut-il comprendre que cette décision mesquine et basse du premier ministre d'écarter Québec comme site de la tenue du Sommet du G-7, qu'elle s'inspire de la même attitude revancharde qui a prévalu dans les dossiers de la MIL Davie, de la formation de la main-d'oeuvre, dans les coupures dans les paiements de transfert pour les programmes sociaux, et cela pour punir les Québécois d'avoir appuyé le Parti québécois et le Bloc québécois?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je vois que le chef de l'opposition s'excite facilement parce que pour nous la meilleure preuve que nous avons à coeur les intérêts de la ville de Québec, et ce, malgré l'impolitesse du maire de Québec, c'est qu'à travers le monde, au moment où on se parle, les ambassadeurs du Canada dans tous les pays du monde travaillent pour obtenir pour la ville de Québec les Jeux d'hiver de l'an 2002 malgré le maire de Québec.

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le Président, si le premier ministre considère comme impolis tous les maires du Québec qui sont souverainistes, il y a tout un groupe qui a été frappé aujourd'hui d'une accusation comme celle-là, parce qu'il y en a plusieurs des maires impolis au Québec. Il y a plusieurs personnes au Québec qui sont impolies dans ce sens et qui le montreront quand tous les souverainistes iront dans la même direction où ils vont présentement et vont faire cet automne un référendum gagnant pour la souveraineté.

Des voix: Bravo!

M. Loubier: Il va être gagnant celui-là!

M. Bouchard: Monsieur le Président, doit-on déduire des propos du premier ministre à Valcartier que sa seule stratégie constitue maintenant à faire peur aux Québécois à la veille du référendum qui aura lieu bientôt?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieurle Président, le chef de l'opposition veut avoir un référendum au plus sacrant. Ce n'est pas cela qu'il disait à M. Parizeau la semaine passée. Si le chef de l'opposition veut avoir un référendum gagnant, la question à poser est une question très simple et très claire. Demandez aux Québécois: Voulez-vous demeurer au Canada? Et nous voterons tous oui, y compris les péquistes.

Des voix: Bravo!

* * *

(1420)

LE SERVICE CANADIEN DU RENSEIGNEMENT DE SÉCURITÉ

M. Michel Bellehumeur (Berthier-Montcalm, BQ): Mon-sieur le Président, ma question s'adresse au solliciteur général.

En septembre dernier, Me Michel Robert, porte-parole du Comité de surveillance des activités du renseignement de sécurité, déclarait au Sous-comité sur la sécurité nationale qu'il ignorait où était passé l'informateur Grant Bristow. Or le Toronto Star l'a débusqué à Edmonton, avec une nouvelle identité, une nouvelle maison, deux voitures et un revenu de 3 000 $ par mois, gracieuseté du gouvernement canadien aux frais des contribuables.

Avant d'offrir une nouvelle identité à Grant Bristow et de le faire disparaître à nouveau, le solliciteur général reconnaît-il que la comparution de M. Bristow devant le Sous-comité sur la sécurité nationale demeure essentielle si on veut faire toute la lumière sur son rôle dans le groupe raciste Heritage Front et dans l'infiltration de l'entourage du leader du Parti réformiste?

[Traduction]

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, il n'a jamais été prouvé que Grant Bristow est ou a été un informateur du SCRS. Je n'ai donc rien à ajouter en réponse à la question du député.

[Français]

M. Michel Bellehumeur (Berthier-Montcalm, BQ): Monsieur le Président, comment le solliciteur général peut-il abdiquer ses responsabilités à l'égard du rôle joué par M. Grant Bristow comme informateur du SCRS, alors qu'un rapport du comité de surveillance estime que M. Bristow a outrepassé le mandat d'un informateur du SCRS?

Pourquoi le solliciteur général met-il autant d'efforts à vouloir cacher M. Grant Bristow?

[Traduction]

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, je pense que le député fait erreur. Le rapport du CSARS, le Comité de surveillance des activités du renseignement de sécurité, ne confirme pas que Grant Bristow était un informateur du SCRS. Il confirme bien toutefois que le SCRS a fait du bon travail dans son enquête nécessaire et pertinente sur le Heritage Front.


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LE CRTC

M. Jim Silye (Calgary-Centre, Réf.): Monsieur le Président, demain, le Cabinet fera quelque chose qu'il n'a jamais fait auparavant. Il émettra une directive renversant une décision du CRTC concernant la télédiffusion directe à domicile par satellite à la demande expresse de la société Power Corp.

En fait, la société Power Corp. est allée jusqu'à déclarer qu'elle retirerait sa soumission si le Cabinet ne prenait pas son parti. Il est étonnant de voir ce que l'on peut accomplir lorsqu'on a des amis ou un beau-père en haut lieu.

Ma question s'adresse au premier ministre: Si le gouvernement voulait tellement ouvrir le marché de la télédiffusion par satellite à la concurrence, pourquoi n'a-t-il pas pris les voies normales? Pourquoi Power Corp. peut-elle dicter sa volonté?

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, il est dommage que la porte-parole habituelle ne soit pas là. Peut-être comprend-elle le processus un peu mieux. Le député devrait savoir. . .

Des voix: Règlement!

Le Président: Chers collègues, nous avons été absents pendant un petit moment et nous avons probablement oublié que l'on ne doit pas souligner la présence ou l'absence des députés à la Chambre. Je demande au ministre de s'en souvenir.

M. Manley: Monsieur le Président, en fait, je ne sais jamais avec certitude si les députés sont ici ou s'ils n'y sont pas.

Le député devrait savoir que les préoccupations dont le gouvernement a fait part au sujet de l'ordonnance que le CRTC a émise l'été dernier vont justement dans le sens de sa question. Le CRTC a autorisé le consortium à lancer un service de télédiffusion directe à domicile par satellite sans émettre au préalable de licence et sans avoir suivi un processus public transparent. En émettant une ordonnance d'exemption en ce sens, le CRTC établissait un monopole, comme le député devrait le savoir.

(1425)

Si le Parti réformiste est en faveur des monopoles et s'oppose à un système transparent d'émission des licences, qu'il le dise. C'est ce que laisse croire la question du député.

M. Jim Silye (Calgary-Centre, Réf.): Je suppose, monsieur le Président, que je vois là une expression d'arrogance.

Le Parti réformiste favorise la concurrence et une politique ferme qui protège les intérêts du pays et des Canadiens. Toutefois, si on exprime des doutes quant à la régularité de l'entente, le gouvernement ne peut rejeter le blâme sur personne d'autre que lui-même. La Power Corp. a fait une demande, et le Cabinet et le premier ministre se sont empressés d'y acquiescer en recourant à leurs pouvoirs spéciaux pour renverser la décision initiale du CRTC. Et tout cela s'est fait dans le secret. Cela sera certainement profitable aux consommateurs, mais la fin ne justifie pas les moyens.

Voici ma question complémentaire: Le ministre assurera-t-il à la Chambre que toute décision future sur l'industrie de la radiodiffusion directe à domicile par satellite sera prise dans le cadre d'un processus public et non à huis clos lors d'une réunion spéciale du Cabinet?

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, il est difficile de ne pas se faire accuser d'être arrogant lorsqu'on répond à une question truffée d'erreurs.

La réalité, c'est que nous avons invité le groupe d'experts à faire appel à un processus ouvert et transparent. Toutes les demandes reçues par le groupe ont été rendues publiques et on a prévu suffisamment de temps pour que la population puisse réagir à ces demandes, contrairement à ce qui fut le cas pour l'ordonnance d'exemption.

Si le Cabinet décide d'accepter les recommandations du groupe d'experts, il le fera de façon transparente en renvoyant l'ordonnance à la Chambre des communes et au Sénat, qui auront quarante jours pour l'examiner, comme le prévoit la loi. C'est un processus tout à fait ouvert et transparent. Si nous décidons d'aller dans ce sens, le député et ses collègues seront cordialement invités à exprimer leur point de vue sur la concurrence et sur l'avenir des services de radiodiffusion directe à domicile par satellite.

M. Jim Silye (Calgary-Centre, Réf.): Monsieur le Président, en se servant pour la première fois de pouvoirs spéciaux pour renverser une décision du CRTC, ce qui va à l'encontre de la promesse d'un gouvernement ouvert faite par les libéraux dans leur livre rouge, le gouvernement fédéral devient de plus en plus puissant et fait de plus en plus de choses dans le secret.

Par exemple, la Loi sur l'efficacité de la réglementation donnera au Cabinet le pouvoir d'exempter des sociétés de la réglementation au moyen de régimes d'observation privés spéciaux. Les possibilités d'abus sont renversantes. Ce sont les Canadiens qui devraient diriger le pays et non le Cabinet et les groupes d'intérêts. Le système doit être transparent.

Le gouvernement retirera-t-il immédiatement son projet de loi sur l'efficacité de la réglementation et laissera-t-il le pouvoir entre les mains du Parlement, là où il doit être?

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, encore une fois, le préambule à la question passe à côté de l'objectif que nous visons en renversant la décision du CRTC. Oui, c'est la première fois, mais la loi vient d'être adoptée. C'était l'une des premières occasions que nous avions d'exercer ce pouvoir, qui est bien délimité dans la Loi sur la radiodiffusion. Par conséquent, si nous faisons ce choix, il est important pour nous de procéder d'une façon qui soit ouverte, transparente et conforme à la loi. C'est essentiellement ce que nous essayons d'accomplir relativement à cette ordonnance.

Pour ce qui est de la Loi sur l'efficacité de la réglementation, le député a parfaitement le droit de lancer un débat sur cette


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question, mais il devrait comprendre que l'un des objectifs de cette mesure législative est de réduire le fardeau réglementaire imposé aux petites et moyennes entreprises en particulier afin de favoriser la croissance économique.

Si le Parti réformiste veut accroître le fardeau réglementaire imposé aux entreprises, qu'il le dise clairement.

* * *

[Français]

LA TAXE SUR LES PRODUITS ET SERVICES

M. Pierre Brien (Témiscamingue, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre. Lors de la dernière campagne électorale, le premier ministre s'engageait à abolir la TPS avant janvier 1996. Le premier ministre déclarait, et je cite: «Nous haïssons cette taxe et nous allons la faire disparaître.» Or, nous apprenions la semaine dernière que le gouvernement aurait renoncé à réformer la TPS avant le 1er janvier 1996.

(1430)

Doit-on comprendre du nouveau report de l'échéancier relatif à la réforme de la TPS que le premier ministre a renié son engagement électoral d'abolir la TPS et qu'il entend désormais maintenir le fouillis et l'iniquité engendrés par la TPS?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieurle Président, la réponse est non.

M. Pierre Brien (Témiscamingue, BQ): Monsieur le Président, le premier ministre peut-il prendre l'engagement devant cette Chambre de ne pas profiter de l'élection probable d'un gouvernement libéral en Ontario pour imposer une réforme de la TPS sans l'accord du Québec?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieurle Président, je suis content de voir que le député prévoit une victoire libérale, et je l'en remercie. Quant à nos engagements concernant la TPS, nous essayons de trouver une solution de remplacement à cette taxe. Nous avons écrit dans notre livre rouge que nous voulions la remplacer.

Nous avons énoncé des conditions dans le livre rouge dans lesquelles on mentionne qu'il est nécessaire de coordonner la solution avec les gouvernements provinciaux, y compris le gouvernement du Québec.

* * *

[Traduction]

L'ÉCONOMIE

M. Ray Speaker (Lethbridge, Réf.): Monsieur le Président, le gouvernement répète sans cesse aux Canadiens que tout va bien. Toutefois, puisque Moody's a abaissé la cote du Canada, il semble évident que ce n'est pas le cas.

Si la politique financière du gouvernement est aussi bonne, le premier ministre peut-il nous expliquer pourquoi les taux d'intérêt ont augmenté de plus de 400 points depuis le premier budget que ce gouvernement aprésenté? Pourquoi les taux hypothécaires de cinq ans ont-ils fait un bon de plus de 2 p. 100, ce qui augmente la facture de 300 $ par mois pour une hypothèque de 100 000 $? Pourquoi le dollar a-t-il perdu plus de 20 p. 100 de sa valeur face au yen et au mark?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, la valeur des principes fondamentaux de nos politiques économiques a été reconnue.

Ce matin encore, le FMI a déclaré que, selon ses prévisions, le Canada connaîtrait cette année le meilleur taux de croissance. En outre, notre taux d'inflation est parmi les plus bas au monde. Évidemment, les taux d'intérêt ont augmenté, mais à cause de circonstances qui ne sont pas nécessairement de notre ressort.

Nous nous efforçons de les faire baisser. On a vu récemment le dollar canadien gagner de la valeur et les taux d'intérêt diminuer. Les politiques économiques du gouvernement vont effectivement produire les résultats escomptés et créer les emplois nécessaires à notre économie.

M. Ray Speaker (Lethbridge, Réf.): Monsieur le Président, certains de ces objectifs sont à court terme et ne peuvent s'inscrire dans un plan financier à long terme qui doit régler les problèmes du Canada.

Le premier ministre doit reconnaître que, depuis l'arrivée au pouvoir du gouvernement, les taux d'intérêt plus élevés ont fait grand tort à l'industrie de la construction domiciliaire. En mars, la revente de maisons a baissé de 42 p. 100 par rapport à l'année dernière. Au même moment, l'augmentation du taux d'inflation de quelque deux pour cent a forcé la Banque du Canada à maintenir les taux d'intérêt à un niveau relativement élevé.

Le premier ministre ne réalise-t-il pas que la faiblesse de la politique financière du gouvernement place la Banque du Canada dans une position impossible puisqu'elle doit simultanément soutenir le dollar, contenir l'inflation et faire baisser les taux d'intérêt?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, durant le week-end, le gouverneur de la Banque du Canada a déclaré que les politiques du gouvernement étaient justes et que le budget était adéquat.

Je suis heureux de voir que le chef de l'opposition a changé d'avis encore une fois et qu'il souhaite maintenant que le référendum ait lieu le plus tôt possible. Une fois le problème du référendum réglé, tout ira mieux pour l'économie du Canada.

* * *

[Français]

LA COTE DE CRÉDIT DU CANADA

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe-Bagot, BQ): Monsieur le Président, après la mise sous surveillance de la cote de crédit du Canada 11 jours avant le Budget, l'agence d'évaluation Moody's a abaissé, le 12 avril dernier, la cote de crédit du gouvernement du Canada. Cette décision de Moody's s'explique par un jugement sévère quant à la timidité des mesures de réduction des dépenses et du déficit à moyen terme annoncées par le Budget.

Ma question au premier ministre est celle-ci: La décote décrétée par Moody's ne confirme-t-elle pas, comme le soutenait l'opposition officielle, que le gouvernement a fait de mauvais choix, n'a pas suffisamment coupé dans l'appareil fédéral, n'a pas révisé la fiscalité comme le requiert la situation


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dramatique des finances publiques et s'est contenté plutôt de tranférer son déficit aux provinces?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le jugement de Moody's a été reçu avec scepticisme, parce que dès le lendemain de cette annonce, le dollar a augmenté sur le marché international et les taux d'intérêt ont baissé.

(1435)

Tous les autres observateurs avaient applaudi avec enthousiasme le Budget présenté au mois de février. Il y a la firme Moody's qui n'avait pas un bon «mood» cette journée-là, ça peut arriver. Alors que le «mood» a changé pour eux, cela n'a pas été le cas pour le reste du monde.

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe-Bagot, BQ): Monsieur le Président, le premier ministre se permet de faire des blagues alors qu'il y a une situation sérieuse et catastrophique des finances publiques au Canada.

M. Bouchard: Absolument!

Des voix: Bravo!

M. Loubier: Le premier ministre réalise-t-il que si la cote de crédit du gouvernement est abaissée en dépit de la reprise économique soutenue, c'est que Moody's n'a pas été dupe de la politique attentiste de son gouvernement, qui se laisse porter par la reprise économique à court terme, qui pellette son déficit dans la cour des provinces, qui laisse la dette de 550 milliards de dollars grossir à vue d'oeil, plutôt que de s'attaquer aux vrais problèmes? C'est cela, la vérité!

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le Fonds monétaire international a émis un rapport aujourd'hui même à l'effet que le rendement économique du Canada était l'un des meilleurs au monde. J'ai eu l'occasion de rencontrer, il y a trois semaines à Washington, le directeur général du Fonds monétaire international, qui m'a félicité du Budget présenté par le ministre des Finances du Canada.

Il est certain qu'il y a eu une firme qui a décidé de porter un jugement négatif, mais la grande majorité des firmes et des observateurs et, surtout, le marché, ont donné de bonnes notes au gouvernement canadien, à la suite du Budget présenté à la fin de février.

* * *

[Traduction]

L'IMMIGRATION

M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est, Réf.): Monsieur le Président, dans le dernier budget, le ministre de l'Immigration décidait de percevoir une taxe de 975 $ sur les réfugiés et les immigrants pour financer les services d'installation. Il disait que l'on prêterait l'argent nécessaire à ceux qui ne seraient pas en mesure de payer cette taxe.

Comment le ministre de l'Immigration entend-il payer pour l'énorme bureaucratie qui sera nécessaire pour administrer les prêts destinés à financer cette taxe? Est-ce que c'est une taxe parce que le produit va au Trésor?

L'hon. Sergio Marchi (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, le montant de 975 $ qui a été annoncé par le ministre des Finances dans le budget est un droit d'immigration qui permet de récupérer les coûts du programme. Le député devrait savoir que, au gouvernement fédéral, tous les droits visant à récupérer les coûts sont versés au Trésor.

Le député semble contester la chose. Lorsque ce droit a été annoncé, lui et son parti étaient en faveur. Ensuite, au comité, lorsqu'il a appris que l'argent irait au Trésor et non au ministère, ce qui n'améliorera pas la situation financière du ministère, il s'est dit opposé à la taxe.

Le fait est que le droit d'immigration est la meilleure façon de garantir que l'aide à l'installation des immigrants et des réfugiés continue. C'est la meilleure d'une série d'options qui n'étaient pas aussi progressistes.

J'aimerais bien savoir, une fois pour toutes, où se situe le Parti réformiste sur cette question.

M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est, Réf.): Monsieur le Président, si vous voulez vraiment le savoir, les services de perception du gouvernement sont désastreux. Ils ne peuvent même pas suivre les accords de parrainage.

Seul le ministre peut voir la logique d'une bureaucratie destinée à administrer des prêts pour financer une taxe destinée à compenser des coûts d'immigration qui montent en flèche, alors que l'argent ne reste même pas au ministère de l'Immigration.

Pourquoi le ministre a-t-il choisi d'étendre son empire à l'immigration et d'imposer une nouvelle taxe, alors qu'il aurait été facile de réduire le nombre des immigrants qui ont besoin de services d'installation et de forcer ceux qui en ont besoin à les payer, comme cela se fait dans les autres pays?

L'hon. Sergio Marchi (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, nous avons maintenant la vérité sur le programme réformiste: il se cache derrière une taxe fictive.

Il ne s'agit pas d'augmenter ce qu'il appelle un empire. Si le député avait fait son travail de parlementaire, il saurait que le budget des dépenses ne prévoit aucune des augmentations dont il parle. Nous percevons déjà les remboursements des prêts du transport assisté auprès des réfugiés.

Il parle de remboursements. Je peux dire au député que, depuis 1951, 97 p. 100 des prêts de 3 000 $, 4 000 $ ou 5 000 $ pour le transport assisté ont été remboursés. Il n'y a pas d'augmentation de la bureaucratie.

* * *

[Français]

LES TÉLÉCOMMUNICATIONS

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Patrimoine. Récemment, le directeur de Power DirecTv lançait


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un ultimatum au gouvernement, et je le cite: «Si vous ne bougez pas avant le 24 avril, nous devrons abandonner nos projets.» Le gouvernement fédéral aurait donc l'intention d'émettre un décret pour renverser une décision du CRTC.

Comment le ministre du Patrimoine justifie-t-il l'empres-sement de son gouvernement à bulldozer le CRTC dans le dossier de la télévision par satellite, autrement que pour faire plaisir aux amis du régime, qui sont légion chez Power Corporation?

(1440)

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, comme la députée le sait très bien, il s'agit aussi d'une préoccupation dans le secteur de l'autoroute de l'information.

Nous avons indiqué fréquemment que nous sommes en faveur d'un système compétitif. La question n'est pas claire à savoir si les bloquistes sont pour ou contre la compétition ou pour un système transparent d'attribution de permis de diffusion par satellite, mais il est clair que presque tous les commentaires au sujet du rapport d'experts remis au gouvernement le 6 avril étaient favorables. Les critiques les plus importantes étaient peut-être celles faites par Power Corporation qui n'était pas très heureuse de ce rapport.

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata, BQ): Monsieur le Président, ma question complémentaire s'adresse au ministre du Patrimoine.

Comment le ministre peut-il nier qu'il existe présentement une possibilité pour Power DirecTv de faire comme Expressvu et de diffuser par satellite? C'est se soumettre aux conditions du CRTC.

Pourquoi alors priver Expressvu de diffuser et le soumettre à un autre processus seulement pour plaire à Power DirecTv?

[Traduction]

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, je suis persuadé que, si elle y réfléchit un instant, la députée se rendra compte qu'un processus d'attribution de permis, comme il en existe ailleurs, qui soit transparent et qui permette la discussion ainsi que le débat sur la place publique, est préférable à la méthode indirecte des décrets d'exemption, comme celle qu'appliquait le CRTC à cet égard. Si nous avons soumis la question au groupe d'experts, c'est précisément, entre autres, parce que nous voulions qu'ils se prononcent sur le processus en vigueur.

Je pense que la députée finira par admettre que, en ce qui concerne les demandes de permis, si nous introduisons la mesure que propose le groupe d'experts, cela sera dans l'intérêt de quiconque répond à certains critères qui sont ceux que l'on exige des télédiffuseurs par exemple. Cela assurera le financement nécessaire à la promotion de la culture canadienne et à la réalisation d'autres initiatives par quiconque est désireux de dispenser ce genre de service.

LES TÉLÉCOMMUNICATIONS

Mme Eleni Bakopanos (Saint-Denis, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de l'Industrie.

Il y a un mois, Bell Canada a annoncé l'élimination d'environ 10 000 emplois. Récemment, nous avons appris que les difficultés financières que connaît actuellement Unitel risquaient d'entraîner d'autres licenciements. Compte tenu de ces faits nouveaux, quelle est la position du gouvernement à l'égard de la concurrence sur le marché canadien des télécommunications?

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, encore une fois, je tiens à réitérer l'engagement du gouvernement à l'égard de la compétition dans ce secteur que nous estimons être le meilleur moyen d'assurer aux Canadiens les tarifs les plus bas, le plus grand choix qui soit et les possibilités d'innovation les plus intéressantes.

Le secteur des télécommunications est peut-être de tous les secteurs celui qui est le plus mondialement compétitif. Il est l'un des plus importants sur le plan des coûts pour les entreprises canadiennes. C'est pourquoi nous estimons que sa structure doit être compétitive.

Nous partageons, bien sûr, les préoccupations du député. Nous savons que beaucoup d'entreprises traversent actuellement une période d'ajustement, voire, dans beaucoup de cas, de réduction des effectifs. Je crois qu'il s'agit d'un phénomène passager. Le nombre d'emplois qui seront créés à long terme dans le secteur de la technologie de l'information finira par l'emporter de loin sur le nombre d'emplois perdus à court terme durant cette période d'ajustement.

* * *

L'IMMIGRATION

M. Ed Harper (Simcoe-Centre, Réf.): Monsieur le Pré-sident, des immigrants parrainés ont entrepris une action en justice incroyable contre le gouvernement ontarien. Ils poursuivent l'Ontario pour avoir déduit 100 $ de leur chèque d'assistance sociale, alors que leurs parrains ne respectent pas la garantie qu'ils ont signée lorsqu'ils se sont engagés à les prendre entièrement en charge.

Le ministre de l'Immigration va-t-il aider l'Ontario à se défendre, étant donné que ce genre d'abus coûte 700 millions de dollars aux contribuables canadiens?

(1445)

L'hon. Sergio Marchi (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, le député est un peu en retard et devrait s'adresser au porte-parole de son parti en matière d'immigration.

Au mois de novembre, lorsque nous avons annoncé à la Chambre les nouveaux niveaux d'immigration, nous avons été très clairs quant aux modalités de parrainage des membres de la famille.

M. Ed Harper (Simcoe-Centre, Réf.): Monsieur le Président, être très clairs et prendre les mesures appropriées sont deux choses fort différentes.


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Le ministre n'a toujours pas fait ce qu'il a promis, à savoir instaurer un système exigeant des parrains des garanties couvrant ces frais. Étant donné que l'Ontario a réussi à identifier les personnes qui abusent du système, est-ce que le ministre va faire respecter les contrats de parrainage?

L'hon. Sergio Marchi (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, le député est mal informé. Nous avons pris les mesures qui s'imposaient.

Nous avons dit très clairement que nous voulions obliger les 14 p. 100 environ des parrains de la catégorie de la famille qui faillissent à leurs obligations à respecter leurs engagements, sans perdre de vue que la vaste majorité des immigrants qui sont parrainés par un parent respectent les règlements.

Le sujet a été abordé au comité. J'espère que le député consultera le porte-parole de son parti en matière d'immigration pour se tenir au courant.

* * *

[Français]

LE RWANDA

M. Réjean Lefebvre (Champlain, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires étrangères.

L'armée rwandaise a commis un véritable carnage en s'attaquant samedi, avec des armes automatiques et des grenades, au camp de réfugiés de Kibeho. Selon diverses sources, l'armée, par ce nouveau massacre, aurait tué des milliers de réfugiés hutu.

Le ministre des Affaires étrangères peut-il nous indiquer si son gouvernement est intervenu auprès des autorités rwandaises pour que cesse ce massacre des réfugiés à Kibeho et ailleurs?

L'hon. André Ouellet (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement canadien a condamné avec la plus grande énergie ce massacre qui vient d'être décrit pas l'honorable député. Nous avons dépêché immédiatement sur place l'ambassadeur Dusseault qui fera enquête et nous fera rapport dans les meilleurs délais.

M. Réjean Lefebvre (Champlain, BQ): Monsieur le Président, est-ce que les incidents survenus au camp de réfugiés de Kibeho sont susceptibles d'inciter le gouvernement à reconsidérer son aide et son soutien au nouveau gouvernement du Rwanda, et ce dans le contexte où des rumeurs se multiplient quant au détournement de l'aide canadienne par les autorités rwandaises?

L'hon. André Ouellet (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, il est évident que cette action inconsidérée de la part de l'armée remet en cause tous les efforts faits au cours des dernières semaines pour amener un processus de réconciliation entre les différents groupes, les différentes factions.

Il est certain que nous nous posons des questions à ce moment-ci, d'autant plus que la bonne foi du gouvernement et les efforts de ce gouvernement au cours des dernières semaines semblaient prometteurs. Nous attendons avec impatience le rapport de l'ambassadeur Dusseault et nous agirons à la lumière des recommandations qu'il nous fera. Je garderai à l'esprit les suggestions de l'honorable député.

* * *

[Traduction]

L'INFRASTRUCTURE

M. Randy White (Fraser Valley-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux.

Je crois comprendre que le ministre des Travaux publics a consulté le ministre des Transports au sujet du transfert possible de 26 millions de dollars du programme fédéral d'amélioration des routes stratégiques, qui étaient destinés au départ à la rocade de Wentworth Valley, en Nouvelle-Écosse. Elle est bien connue comme un des tronçons les plus dangereux au Canada.

Où est allé cet argent? Dans la propre circonscription du ministre, au Cap-Breton, bien entendu, pour la construction d'une route touristique. Comment le ministre peut-il expliquer aux Canadiens un conflit d'intérêts aussi flagrant?

L'hon. Douglas Young (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, je suis persuadé que le député est conscient du fait que, même si une partie de l'argent vient du gouvernement fédéral, la répartition des fonds consacrés à la construction de routes relève de la compétence provinciale.

Je tiens à garantir à mon collègue qu'il y a constamment avec la Nouvelle-Écosse, ainsi qu'avec de nombreuses autres provinces du pays, des négociations et qu'on décide, de temps à autre, de réaffecter certains fonds à d'autres projets. Cependant, si on réaffecte parfois les fonds, c'est toujours en fonction de ces négociations avec les provinces auxquelles il incombe, en fin de compte, non seulement de dépenser cet argent, mais également de choisir les routes visées.

(1450)

M. Randy White (Fraser Valley-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, la piste fleur de lis, dont le ministre est en quelque sorte en train de parler, n'entre pas dans ce programme de financement. L'entente a été modifiée par le ministre des Travaux publics et le ministre des Transports. Le vérificateur général de la Nouvelle-Écosse estime qu'ils ne peuvent pas justifier la modification qui a été apportée.

Comment le ministre peut-il faire passer l'industrie touristique du Cap-Breton avant la sécurité des Canadiens?

L'hon. Douglas Young (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, je réponds habituellement à des questions posées par des députés qui sont mieux informés.

La réaffectation des fonds dans le cadre de cette entente et de toute autre entente est le résultat de demandes faites par les gouvernements provinciaux. Cela n'arrive pas seulement en Nouvelle-Écosse. Cela arrive fréquemment. Le député devrait savoir dans quelle mesure les provinces exercent leurs compétences pour ce qui est de consacrer des fonds à des routes et de déterminer où ces routes doivent passer.


11682

Le gouvernement de la Nouvelle-Écosse a annoncé récemment la construction d'une route, si je comprends bien, là où le député aurait voulu qu'elle soit, au départ. Nous sommes très heureux de participer également à ce projet.

* * *

L'ASSURANCE SUR LA VIE

M. Sarkis Assadourian (Don Valley-Nord, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au secrétaire d'État chargé des Institutions financières internationales.

Les compagnies d'assurance sur la vie placent le vol, la course, la navigation, la motoneige et les randonnées en montgolfière parmi les sports dangereux. Étant donné que des centaines de Canadiens meurent ou sont blessés chaque année dans des activités comportant l'utilisation d'armes à feu, que peut faire le ministre pour s'assurer que les compagnies canadiennes d'assurance sur la vie considèrent aussi ces activités comme des sports dangereux?

L'hon. Douglas Peters (secrétaire d'État (Institutions financières internationales), Lib.): Monsieur le Président, je remercie le député de sa question.

Comme le sait mon collègue, ce genre de décision relève des compagnies d'assurance elles-mêmes. Aussi, je crois qu'il devrait s'adresser à elles. Il n'appartient pas au gouvernement d'établir les catégories et d'évaluer les risques. Les décisions de ce genre relèvent de l'entreprise privée, en l'occurrence les compagnies d'assurance.

* * *

[Français]

L'IMMIGRATION

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, le 27 mars dernier, lors d'une rencontre des libéraux fédéraux du comté de Bourassa et en présence du secrétaire d'État aux Affaires parlementaires, le directeur de l'aile québécoise du Parti libéral, M. Denis Coderre, a tenu des propos méprisants à l'endroit des immigrants et réfugiés à l'effet qu'il fallait adopter une loi pour déporter les immigrants souverainistes.

Ma question s'adresse au premier ministre. Peut-il nous indiquer si les propos de M. Coderre constituent la nouvelle politique du gouvernement en matière d'immigration alors qu'hier encore, lors d'un congrès international sur les droits de la personne, lui-même déclarait que la haine, le nationalisme ethnique, le fanatisme religieux et le racisme ne sauraient être tolérés?

L'hon. Sergio Marchi (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, je suis un peu surpris parce qu'un député de son parti, le Bloc québécois, a suggéré dans le passé que les immigrants dans la province de Québec ne devraient pas avoir le droit de voter lors du référendum. Je trouve particulier que le député parle maintenant de cette question.

M. Coderre, après sa déclaration, a fait une clarification, et je pense que la question est close.

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, ce sont des excuses qui doivent être faites.

Ma question additionnelle s'adresse au premier ministre. Entend-il non seulement demander des excuses publiques à M. Coderre mais également à son secrétaire d'État aux Affaires parlementaires qui était présent lors de la déclaration de M. Coderre et qui n'a pas jugé important, en tant que membre du gouvernement, de s'en dissocier immédiatement?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieurle Président, les propos ont été cités hors contexte. Depuis longtemps, le Parti libéral a été reconnu comme étant le parti au Canada qui a favorisé l'immigration. J'ai fait un discours hier soir devant des parlementaires internationaux de toutes les parties du monde dans lequel j'ai réaffirmé les valeurs canadiennes qui sont, entre autres, la tolérance. C'est une des qualités que nous préconisons à l'intérieur de notre parti depuis très longtemps.

* * *

(1455)

[Traduction]

L'AÉROPORT INTERNATIONAL PEARSON

M. Jim Gouk (Kootenay-Ouest-Revelstoke, Réf.): Monsieur le Président, de nombreux éléments de Transports Canada, dont le contrôle de la circulation aérienne, le matériel de navigation aérienne, les aéroports et le CN, sont sur le point d'être commercialisés ou privatisés. On songe également à privatiser les ports canadiens, la Voie maritime du Saint-Laurent et peut-être même certaines parties de la Garde côtière.

Étant donné ce grand projet de privatisation et la nécessité pour la population de comprendre et d'accepter ce processus, le ministre des Transports ne convient-il pas que la seule façon d'assurer cela est d'ordonner la tenue d'une enquête publique ouverte et transparente sur tous les aspects concernant le contrat de réaménagement de l'aéroport Pearson?

L'hon. Douglas Young (ministre des Transports, Lib.): Mon-sieur le Président, le député a pris bien des détours avant de poser sa question. Cependant, je tiens à le remercier d'avoir énuméré les objectifs de Transports Canada.

Je ne veux pas commenter des questions dont l'autre endroit est actuellement saisi, mais je crois savoir qu'on y examine la possibilité d'une enquête. Je tiens toutefois à souligner que le gouvernement souhaite vivement que les travaux débutent à l'aéroport Pearson, afin qu'il devienne le plus important au Canada.

Certains invoqueront toutes sortes de raisons pour que les travaux soient retardés. Pour notre part, nous estimons qu'il y a


11683

fort longtemps que des milliers de personnes devraient s'atteler à la tâche à l'aéroport international de Pearson, pour en faire le joyau du système de transport aérien au Canada.

M. Jim Gouk (Kootenay-Ouest-Revelstoke, Réf.): Monsieur le Président, je n'ai jamais mis en doute le droit du gouvernement d'annuler le contrat de l'aéroport Pearson. Mais ce droit s'accompagne de l'obligation envers le contribuable canadien de montrer que cette mesure est nécessaire et d'indiquer combien elle coûtera et où le gouvernement prendra l'argent pour trouver une autre solution.

En utilisant les propres chiffres du gouvernement, je constate que, si la règle du droit est respectée, l'annulation du contrat coûtera au bas mot 500 millions de dollars et, si l'État se charge de la construction, cela coûtera un milliard de dollars de plus.

Où le gouvernement prendra-t-il ce montant de 1,5 milliard qui n'est pas prévu dans le dernier budget des libéraux?

L'hon. Douglas Young (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, je crois que le député a mis dans le mille avec sa question complémentaire.

Il ne fait aucun doute que, si nous poursuivons les démarches que certains ont entreprises, comme le député le dit, les contribuables canadiens risquent de devoir débourser 500 millions de dollars sans qu'un seul clou ou qu'un seul pouce d'asphalte ne soit posé.

Le fait est que le gouvernement du Canada a fait connaître sa position. Nous sommes prêts à verser jusqu'à 30 millions de dollars en dédommagement pour les dépenses raisonnables qu'ont encourues ceux qui ont participé au processus ayant mené à l'octroi du contrat définitif, même si bon nombre sont des tiers qui n'y ont pas participé directement.

L'ennui avec les réformistes, c'est que, comme d'habitude, ils veulent le beurre et l'argent du beurre. Ce n'est pas ainsi que les choses se passent dans la réalité.

* * *

L'ANALPHABÉTISME

L'hon. Audrey McLaughlin (Yukon, NPD): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre.

Sur la colline du Parlement, on a procédé aujourd'hui au lancement du livre de Ben Wicks, intitulé Naître à la lecture, qui souligne l'envergure et la gravité du problème que constitue l'analphabétisme au Canada. Toutefois, le gouvernement ne fait rien pour montrer qu'il prend ce problème au sérieux.

Environ sept millions de Canadiens éprouvent de la difficulté à lire ou en sont même incapables. Puisque les groupes d'alphabétisation nationaux doivent toujours compter sur un financement annuel et non sur un financement de base, il leur est bien difficile de planifier.

Le premier ministre peut-il faire des observations à cet égard et s'engager à fournir aux groupes d'alphabétisation un financement à long terme, au lieu d'un financement annuel, pour qu'ils règlent ce problème?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieurle Président, l'éducation est un domaine qui relève davantage de la compétence des provinces, et nos programmes nationaux visent à aider ces dernières.

Le gouvernement fédéral est donc confronté à un problème particulier avec ce programme, qui est financé sur une base annuelle pour l'instant. Tout le monde sait que le gouvernement est aux prises avec des difficultés financières. Je vais étudier la question pour voir ce que nous pouvons faire.

L'hon. Audrey McLaughlin (Yukon, NPD): Monsieur le Président, le premier ministre conviendra sûrement que le fait d'avoir sept millions de Canadiens qui lisent difficilement ou qui en sont incapables pour se débrouiller dans la vie de tous les jours nuit au développement économique et social du Canada.

Le premier ministre peut-il promettre un financement à long terme ou prendre un engagement sérieux selon lequel le gouvernement va s'attaquer au problème de l'analphabétisme au Canada?

(1500)

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, cela fait partie de la tâche que nous avons confiée au ministre du Développement des ressources humaines, dans le cadre de la réforme de l'assurance-chômage et des programmes sociaux qu'il réalisera dans les mois qui viennent. Il devra notamment veiller à ce que tous les Canadiens puissent bénéficier de notre politique qui consiste à faire de la formation et de l'acquisition de connaissances la clé qui leur permettra de décrocher des emplois dans notre société.

Cela fera également partie des discussions que nous aurons à la Chambre sur la réforme des programmes sociaux et des programmes de transfert. Le chef du NPD pourra alors faire valoir son point de vue sur la question.

* * *

L'ÉDUCATION

M. Harold Culbert (Carleton-Charlotte, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au secrétaire parlementaire du ministre du Développement des ressources humaines.

Dès cette semaine, de nombreux étudiants des collèges et des universités retourneront chez eux, dans la circonscription de Carleton-Charlotte, et commenceront à chercher l'emploi d'été dont ils ont grandement besoin s'ils veulent amasser l'argent nécessaire pour payer leurs études l'automne prochain.

Quelles mesures le gouvernement prend-il pour offrir des perspectives d'emploi aux jeunes de nos localités?

M. Maurizio Bevilacqua (secrétaire parlementaire du ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, conformément à l'engagement qu'il a pris dans le livre rouge, notre gouvernement accorde effectivement la priorité aux jeunes. Nous avons pris des mesures pour leur offrir la possibilité d'acquérir des compétences qui leur seront très utiles.

Je suis heureux d'annoncer, comme je l'ai fait il y a trois semaines à Vaughan, que le budget total réservé à la création d'emplois et aux services pour les jeunes a augmenté de 43 millions de dollars, et ce, même en cette période de grande austérité. Cela en dit long sur l'engagement que prend notre gouvernement envers les jeunes Canadiens.

11684

PRÉSENCE À LA TRIBUNE

Le Président: Je voudrais signaler aux députés la présence à notre tribune de l'honorable Stephen Kakfwi, ministre de la Justice et ministère des Affaires intergouvernementales et autochtones, à l'assemblée législative des Territoires du Nord-Ouest.

Des voix: Bravo!

[Français]

Le Président: Chers collègues, j'aimerais aussi souligner la présence dans la tribune de Son Excellence Ricardo Alarcon de Quesada, président de l'Assemblée nationale du pouvoir populaire de la République de Cuba.

Des voix: Bravo!

[Traduction]

Cela met fin à la période des questions orales.

_____________________________________________


11684

AFFAIRES COURANTES

[Traduction]

LE RAPPORT SUR LES ÉLECTIONS PARTIELLES

Le Président: J'ai l'honneur de déposer le rapport du directeur général des élections du Canada, intitulé Les élections partielles de février 1995: Une nouvelle étape.

[Français]

En conséquence, conformément à l'article 32(5) du Règlement, ce document est réputé renvoyé en permanence au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre.

* * *

[Traduction]

NOMINATIONS PAR DÉCRET

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, j'ai le plaisir de déposer, dans les deux langues officielles, quelques décrets annonçant les nominations faites par le gouvernement.

Conformément au paragraphe 110(1) du Règlement, ces décrets sont renvoyés d'office aux comités permanents énumérés dans la liste jointe.

* * *

[Français]

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, pendant que j'ai la parole et conformément au paragraphe 36(8) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, la réponse du gouvernement à 36 pétitions.

(1505)

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter le 73e rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre au sujet de la liste des membres des comités.

Si la Chambre donne son consentement, j'ai l'intention de proposer l'adoption du 73e rapport plus tard aujourd'hui.

[Traduction]

Monsieur le Président, je propose que le 73e rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, déposé aujourd'hui, soit agréé.

(La motion est adoptée.)

* * *

LA MOTION NO M-5

M. Jim Jordan (Leeds-Grenville, Lib.): Monsieur le Pré-sident, je demande le consentement de la Chambre pour retirer la motion no M-5 que j'avais proposée, dans le cadre des initiatives parlementaires, au sujet des taxes d'accise sur l'éthanol.

En décembre, le gouvernement a déposé un projet de loi qui réglera le problème à ma satisfaction. Le nouveau programme relatif à l'éthanol, qui apporte une solution, a été présenté à ce moment-là, et il est inutile de poursuivre le débat.

(L'ordre est annulé et la motion est retirée.)

* * *

PÉTITIONS

LA TAXE SUR LES PRODUITS ET SERVICES

Mme Shirley Maheu (Saint-Laurent-Cartierville, Lib.): Monsieur le Président, j'ai le plaisir de présenter une pétition signée par un certain nombre de Québécois et plus particulièrement par le groupe Affordable Textbooks Now.

Comme les manuels nécessaires aux étudiants coûtent de plus en plus cher, un grand nombre d'entre eux sont contraints d'enfreindre la loi en photocopiant en totalité ou en partie beaucoup de manuels qu'ils n'ont pas les moyens d'acheter.

Les pétitionnaires demandent donc au Parlement d'éliminer la TPS sur les manuels et de tenir compte du coût élevé des manuels lorsqu'il arrête les budgets de financement de l'éducation.

[Français]

LE PEUPLE ARMÉNIEN

M. Michel Daviault (Ahuntsic, BQ): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter une pétition signée par plus de 1 000 pétitionnaires concernant le génocide arménien. Les pétitionnaires rappellent que notre pays, reconnu comme un défenseur actif des principes démocratiques et des droits de


11685

l'homme, n'a pas encore condamné officiellement les atrocités ni commémoré le premier génocide du XXe siècle.

Par conséquent, les pétitionnaires demandent au Parlement de changer sa politique d'indifférence envers le génocide arménien, de prendre l'initiative et de promouvoir activement des efforts internationaux afin de persuader la Turquie de reconnaître son crime contre l'humanité.

[Traduction]

LES DROITS DE LA PERSONNE

M. Jack Frazer (Saanich-Les Îles-du-Golfe, Réf.): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, j'ai le devoir et l'honneur de présenter à la Chambre une pétition, dûment certifiée par le greffier des pétitions, au nom de 43 électeurs de la circonscription de Saanich-Les Îles-du-Golfe, plus précisément de l'île de Saltspring.

Les pétitionnaires demandent au Parlement de modifier la Loi canadienne sur les droits de la personne afin de protéger les citoyens contre la discrimination fondée sur l'orientation sexuelle.

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

M. Dick Harris (Prince George-Bulkley Valley, Réf.): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, j'ai le plaisir de présenter aujourd'hui à la Chambre quatre pétitions provenant de ma circonscription, Prince George-Bulkley Valley, en Colombie-Britannique, portant plusieurs centaines de signatures et concernant les propositions de réglementation des armes à feu.

Une pétition vient de M. Dan Varma, de Prince George, deux autres viennent de M. Jim Eisert, de Fraser Lake, et la dernière de la section de Prince George de la Responsible Firearms Coalition.

Tous ces pétitionnaires demandent au Parlement d'appuyer des lois qui puniront sévèrement tous les auteurs de crimes avec violence qui font usage d'armes à feu en commettant leurs crimes. Ils lui demandent en outre de veiller à ce que les nouvelles dispositions apportées au Code criminel en matière de contrôle des armes à feu reconnaissent et protègent le droit des citoyens respectueux des lois de posséder et d'utiliser des armes à feu à des fins récréatives. Ils lui demandent enfin d'appuyer une mesure législative visant à abroger et à modifier les dispositions actuelles en matière de contrôle des armes à feu qui n'ont pas permis d'améliorer la sécurité publique et qui se sont révélées ni efficaces ni économiques, sinon exagérément complexes au point d'être inefficaces et impossibles à mettre en application.

(1510)

[Français]

LES BOÎTES VOCALES

M. Gilbert Fillion (Chicoutimi, BQ): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, il me fait plaisir de déposer en cette Chambre une pétition provenant de résidants du comté de Chicoutimi qui désirent attirer l'attention du Parlement sur les faits suivants: les personnes âgées sont naturellement plus démunies face à la technologie des boîtes vocales; les personnes âgées ont droit à un service approprié en ce qui concerne leurs demandes touchant la sécurité du revenu. Les pétitionnaires demandent donc au gouvernement de renoncer au projet d'implantation de boîtes vocales pour personnes âgées.

[Traduction]

LA COMMISSION CANADIENNE DU BLÉ

M. Bernie Collins (Souris-Moose Mountain, Lib.): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, j'ai le plaisir de présenter ces pétitions au nom des électeurs de ma circonscription, Souris-Moose Mountain, et d'autres régions de la Saskatchewan.

Les 238 signataires de la première pétition appuient le maintien de la Commission canadienne du blé.

LA LOI SUR LES ARMES À FEU

M. Bernie Collins (Souris-Moose Mountain, Lib.): Monsieur le Président, les 300 signataires de la deuxième pétition s'opposent au projet de loi C-68 et demandent au Parlement de ne pas mettre en application de nouvelles dispositions législatives sur les armes à feu.

L'AIDE AU SUICIDE

M. Bernie Collins (Souris-Moose Mountain, Lib.): Monsieur le Président, les 315 signataires de la troisième pétition s'opposent au suicide assisté par un médecin.

LA SOMATOTROPHINE BOVINE

M. Paul DeVillers (Simcoe-Nord, Lib.): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, j'ai le plaisir de présenter des pétitions qui ont été signées par 201 personnes vivant pour la plupart dans ma circonscription, Simcoe-Nord.

Les pétitionnaires demandent au Parlement d'interdire l'utilisation de la BST au Canada et de ne pas accepter les produits laitiers d'autres pays où l'on utilise la BST pour traiter le bétail.

M. Wayne Easter (Malpèque, Lib.): Monsieur le Président, aux termes de l'article 36 du Règlement, je voudrais présenter des pétitions au nom de 183 habitants de l'Île-du-Prince-Édouard.

Ces pétitionnaires prient humblement le Parlement de renoncer à légaliser l'usage de la somatotrophine bovine, ou rbGH, au Canada. Ils demandent en outre au Parlement d'adopter une loi exigeant que toutes les importations produites à partir de vaches traitées à la somatotrophine bovine soient ainsi identifiées. J'appuie cette pétition.

* * *

QUESTIONS AU FEUILLETON

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, nous répondons aujourd'hui aux questions nos 133, 141 et 159.

[Texte]

Question no 133-M. Simmons:

Concernant le programme de recherche et de sauvetage, quelles mesures le gouvernement va-t-il prendre en réponse aux constatations du rapport de 1994 du vérificateur général concernant «la lenteur à donner suite à nos recommandations», notamment a) «il reste à élaborer d'importants éléments du Programme national de recherche et de sauvetage», b) «absence de normes de service fondées sur le critère du temps», c) «il faudrait envisager un recours accru à des bénévoles et à d'autres ressources» et d) «possibilité de faire davantage recours à d'autres ressources fédérales pour la recherche et le sauvetage»?


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M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Les ministères de la Défense nationale et des Transports m'informent comme suit:

a) En ce qui a trait au secteur de responsabilité du gouver-nement fédéral, le système permettant de diriger le fonctionnement des activités et des ressources de recherche et de sauvetage (SAR) est bien établi. On a également accompli des progrès significatifs relativement à l'élaboration de principes et de plans de gestion de la partie fédérale du Programme national de recherche et de sauvetage. Pour ce qui est de la participation des gouvernements provinciaux et territoriaux à ce programme, les progrès ont évidemment été plus lents étant donné que les provinces et les territoires s'efforcent de déterminer la valeur de leur contribution dans le cadre d'un programme coopératif tel que le Programme SAR. Le gouvernement fédéral continuera de faire preuve de leadership dans ce domaine.

b) Depuis que le vérificateur général a recommandé pour la première fois en 1992 l'établissement de normes fondées sur le temps en ce qui a trait aux services de recherche et de sauvetage, les ministères de la Défense nationale et des Transports ont toujours indiqué qu'ils étaient en désaccord avec cette recommandation. Les deux ministères ont élaboré des normes de service appropriées et ils ne croient pas que des normes fondées sur le temps constituent un indicateur précis ou efficace du rendement du programme.

La Garde côtière canadienne (GCC) s'occupe de 6 000 à 8 000 incidents de recherche et de sauvetage de tous les types chaque année. Le système actuel inclut la Garde côtière, d'autres navires du gouvernement, le Service auxiliaire canadien de sauvetage maritime et des navires opportuns.

Les niveaux de service actuels indiquent qu'en moyenne 90 p. 100 des vies en détresse dans le secteur maritime sont sauvées par tous les intervenants, les particuliers et le gouvernement. Par conséquent, les services de recherche et de sauvetage du Canada se comparent favorablement à ceux d'autres pays.

La GCC a publié de nombreuses normes en matière de recherche et de sauvetage. Elles portent sur les opérations, la coordination, la planification et le rendement. Ces normes s'appliquent aux centres de coordination du sauvetage et aux centres auxiliaires, aux navires primaires et secondaires, au Service auxiliaire canadien de sauvetage maritime et à d'autres composantes du système de recherche et sauvetage de la Garde côtière.

La GCC a établi des niveaux de service de recherche et de sauvetage axés sur la qualité et sur l'envergure du service ainsi que sur l'efficacité de l'intervention, en fonction des probabilités de sauvetage. Sur le plan de ces niveaux de service, notons, à titre comparatif, que les taux de réussite de tout le système de recherche et sauvetage maritime du Canada et celui des États-Unis ont été de 90,5 p. 100 et 80,3 p. 100 respectivement de 1986 à 1990.

Les ministères qui participent à la recherche et au sauvetage sont en train d'améliorer et d'intégrer leurs systèmes d'information afin d'augmenter l'efficacité de l'intervention et des analyses. Naguère, ils manquaient d'un système d'information en vue de fournir des données opportunes sur le rendement des ressources fédérales de recherche et de sauvetage. De plus, une analyse approfondie de la gravité des incidents et du type de secours fournis continue d'entrer en ligne de compte dans les décisions relatives aux niveaux de service, à l'acquisition des ressources et à la gestion de celles-ci.

Un nouveau système informatique appelé SISAR est présentement utilisé par la Garde côtière canadienne et le ministère de la Défense nationale. Ce nouveau système, qui capte des données précises et uniformes sur les incidents de recherche et sauvetage, établit une source de base qui va fournir des renseignements essentiels pour considération dans le développement des décisions à prendre aux fins du programme de recherche et de sauvetage.

c) En 1978, la GCC a établi le Service auxiliaire canadien de sauvetage maritime (SACSM), constitué entièrement de bénévoles. Composé uniquement de quatre membres en Nouvelle-Écosse au début, cet organisme a évolué sous la forme de cinq associations distinctes comptant quelque 3 300 membres et 1 200 embarcations. L'an dernier, ces bénévoles ont effectué quelque 1 800 missions de recherche et de sauvetage, soit 25 p. 100 du total. La GCC continue de soutenir et d'élargir les capacités de ces bénévoles efficaces.

En 1992, Le Bureau régional des Laurentides de la GCC a été chargé de trouver une façon de promouvoir la collaboration locale à la prestation des services de recherche et de sauvetage dans les eaux intérieures, de prodiguer des conseils aux ressources locales et d'effectuer le transfert de la technologie nécessaire en ce qui a trait à la formation en recherche et en sauvetage, au matériel et aux connaissances spécialisées. Le Bureau régional des Laurentides a entrepris avec succès, dans la zone du lac Saint-Jean (Québec), un projet-pilote qui sert actuellement de modèle aux fins des autres bureaux de la GCC à travers le pays.

Le gouvernement du Canada valorise grandement la contribution d'organisations bénévoles de recherche et de sauvetage comme l'Association civile de recherches et de sauvetage aérien (ACRSA) et le Service auxiliaire canadien de sauvetage maritime (SACSM). En raison de l'accroissement des restrictions financières, la participation de bénévoles au Programme national de recherche et de sauvetage devient de plus en plus importante. Mentionnons, à titre d'exemple, que le gouvernement fournit 800 000 $ par année et les services de 12 membres des forces canadiennes pour l'instruction et le soutien des bénévoles de l'ACRSA. Il fournit aussi de l'équipement SAR spécialisé aux fins d'installation à bord des aéronefs de l'ACRSA. Les responsables de la recherche et du sauvetage au gouvernement fédéral continueront d'avoir recours à des bénévoles chaque fois qu'il est possible dans le cadre des activités SAR.

d) Le Comité interministériel de recherche et de sauvetage (CIRES) est chargé de coordonner la participation fédérale aux


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activités de recherche et de sauvetage. Présentement, le gouvernement fédéral applique activement une politique de coopération interministérielle afin d'affecter des ressources à la recherche et au sauvetage et de fournir un service SAR d'un bon rapport coût-efficacité.

Le système de recherche et de sauvetage comprend la tenue d'un inventaire de toutes les ressources fédérales disponibles dans chaque aire de recherche et de sauvetage. En vertu de la loi, tous les navires doivent intervenir dans les situations de détresse. La GCC dispose de navires spécialisés en recherche et en sauvetage et sa politique exige que tous ses autres navires puissent être affectés à de multiples tâches, notamment des tâches spécialisées en recherche et en sauvetage dans certaines zones de recherche et de sauvetage. De plus, certaines ressources fédérales telles que des navires du ministère des Pêches et des Océans, du ministère de la Défense nationale et de la Gendarmerie royale du Canada exécutent des opérations de recherche et de sauvetage qui leur sont confiées par des centres de coordination du sauvetage.

Question no 141-M. Mayfield:

Relativement à la rationalisation de l'espace à bureau prévue par Citoyenneté et Immigration Canada dans la région de la capitale nationale, a) combien coûte chaque année chacun des 11 bureaux détenus actuellement par le ministère, b) à quelle date chaque bail viendra-t-il à échéance et c) combien le plan de rationalisation devrait-il faire économiser chaque année?
L'hon. David Dingwall (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux et ministre de l'Agence de promo-tion économique du Canada atlantique, Lib.): En ce qui concerne Travaux publics et Services gouvernementaux Canada:








c) Nous estimons que cette relocalisation entraînera des épargnes de l'ordre de 1,4 million de dollars et 1,7 million de dollars par année pour 10 ans. Cette économie est basée sur une réduction nette de 7 050 mètres carrés à l'échelle du marché se situant entre 200 $ et 250 $ le mètre carré.

L'offre concernant ce critère a pris fin le 26 janvier 1995.

L'analyse de Travaux publics et Services gouvernementaux conclut qu'aucune des six soumissions présentées ne répondait aux critères techniques établis dans l'appel d'offres de location. Les enveloppes financières non ouvertes ont été retournées aux soumissionnaires.

Le 3 mars 1995, j'ai annoncé que l'offre relative à cette relocalisation serait examinée par une tierce partie avant d'entreprendre la poursuite du projet.

Question no 159-M. Caccia:

Dans les aéroports partout au Canada, Transports Canada prend-il des dispositions pour la collecte des liquides de dégivrage conformément aux directives afférentes à la Loi canadienne sur la protection de l'environnement; dans l'affirmative, a) dans quels aéroports relevant de Transports Canada ou gérés par Transports Canada la collecte se fait-elle et b) comment se fait-elle, sinon, quand et ou un système de collecte sera-t-il aménagé?
L'hon. Douglas Young (ministre des Transports, Lib.): a) et b) La responsabilité de la récupération des liquides de dégivrage aux aéroports de Transports Canada incombe aux transporteurs aériens ou aux exploitants de services de dégivrage. Les méthodes de récupération et d'élimination sont définies dans le plan d'atténuation des impacts du glycol de l'aéroport qui est soumis à Transports Canada.

Des plans d'atténuation des impacts du glycol ont été présentés aux aéroports suivants: aéroport international d'Halifax, aéroport

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de Québec, aéroport international Macdonald-Cartier (Ottawa), aéroport international Lester B. Pearson (Toronto), aéroport de Thunder Bay, aéroport de Regina et aéroport international de Winnipeg. Les quatre administrations aéroportuaires ont également des plans en place c'est-à-dire Vancouver, Calgary, Edmonton et les aéroports de Montréal (Dorval et Mirabel).

Les plans d'atténuation visent à ce que les liquides de dégivrage utilisés soient confinés, récupérés et éliminés d'une manière qui est sans danger pour l'environnement.

L'efficacité des plans peut se mesurer par le volume de liquides ainsi récupérés et par l'analyse des eaux de ruissellement effectuée conformément aux directives afférentes à la LCPE.

À noter que les plans d'atténuation des impacts du glycol ont été transmis au Comité permanent de l'environnement et du développement durable.

[Traduction]

M. Milliken: Monsieur le Président, je demande que les autres questions restent au Feuilleton.

Le vice-président: Est-ce d'accord?

Des voix: D'accord.

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INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Français]

LA LOI SUR LES PRÊTS DESTINÉS AUX AMÉLIORATIONS
AGRICOLES ET À LA COMMERCIALISATION SELON
LA FORMULE COOPÉRATIVE

La Chambre reprend l'étude de la motion: Que le projet de loi C-75, Loi modifiant la Loi sur les prêts destinés aux améliorations agricoles et à la commercialisation selon la formule coopérative, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac, BQ): Monsieur le Président, pour se resituer dans le contexte dans lequel on se trouvait il y a environ 67 minutes, nous étions en train de donner la réplique au secrétaire parlementaire de l'Agriculture concernant le projet de loi C-75, projet de loi qui extensionne de 1,5 milliard à 3 milliards de dollars les prêts garantis par le gouvernement aux agriculteurs.

Comme j'ai dû scinder mon discours en deux, il serait peut-être important de rappeler que cette loi porte un titre quand même relativement long, et je le répète devant vous: Loi sur les prêts destinés aux améliorations agricoles et à la commercialisation selon la formule coopérative. Donc, je poursuis mon allocution là où on s'était laissés à 14 heures, c'est-à-dire il y a environ 67 minutes.

Admettons, par exemple, que la société du Québec prête un oeil vigilant au taux d'accroissement de l'endettement des agriculteurs et que pour cette raison, elle modifie ses normes et critères. Elle ne pourrait jamais mettre ses décisions complètement en oeuvre puisqu'un organisme fédéral viendrait jouer encore une fois dans ses plates-bandes et brouiller l'objectif de départ du gouvernement du Québec. Les critères d'admission du gouvernement fédéral ne reflètent pas nécessai- rement les priorités des provinces.

(1515)

Ainsi, les organismes fédéraux viennent faire concurrence aux organismes provinciaux qui, eux, peuvent avoir des critères plus serrés. Et, je dois le dire, les provinces sont mieux positionnées pour connaîtres les besoins véritables de leurs commettants. En tous cas, elles le sont beaucoup plus que le fédéral qui doit, lui, de son côté, édicter des politiques générales qui doivent être réalistes et applicables d'un océan à l'autre.

Ce qu'il faut retenir c'est qu'encore une fois, au lieu d'éliminer les chevauchements et de remettre aux provinces leur coffre à outils en mains propre, le gouvernement libéral s'entête à tout vouloir garder dans sa cour. Par le maintien de ces chevauchements, le fédéral se garde la possibilité d'intervenir dans la façon dont nous désirons gérer notre secteur agricole au Québec.

Il faut par ailleurs souligner qu'il est fort étrange que cette loi soit administrée par le ministère au lieu d'être gérée par la Société du crédit agricole. Même si les programmes diffèrent, la Société du crédit agricole fait déjà de la garantie de prêts. Il s'agit d'un bel exemple frappant de dédoublement administratif. Nous ne parlons pas seulement de dédoublement entre paliers de gouvernement, mais bien de dédoublements au sein du même gouvernement.

Nous souhaitons, nous du Bloc québécois, que le gouver-nement remette aux provinces les ressources financières qui leur reviennent. Comme le disait tout à l'heure le premier ministre lors d'une réponse au chef de l'opposition, nous ne demandons pas, nous, du Québec, du quémandage. Ce que l'on demande, c'est recevoir ce qui nous est dû.

Les provinces pourront ainsi gérer elles-mêmes des programmes comme celui dont il est question justement dans le projet de loi C-75. Je tiens à ce que notre position soit claire: nous ne sommes pas contre ce projet de loi, mais nous dénonçons fortement le maintien des chevauchements et des dédouble-ments, que ce soit au sein du même gouvernement, soit le gouvernement fédéral, ou que ce soit entre les gouvernements, c'est-à-dire le fédéral et les provinces. Nous croyons au bien-fondé de la mesure, bien sûr, mais nous déplorons qu'elle perpétue les dédoublements.

Maintenant, j'aimerais présenter quelques statistiques que nos recherchistes ont trouvé concernant la LPAACFC, donc le projet de loi C-75. Je voudrais d'abord vous rappeler que depuis février 1988, lorsque les modifications ci-dessus ont été mises en vigueur, plus de 65 000 prêts, représentant plus de 1,5 milliard de dollars, ont été consentis dans le cadre de cette loi.

Je pourrais aussi vous rappeler que la province qui bénéficie le plus largement de cette loi est la Saskatchewan, suivie de l'Alberta et suivie du Québec. Je présume que l'Ontario est la quatrième province en ce qui concerne l'utilisation, mais je dois rappeler que l'Ontario rural jouit d'un fort standard du côté agricole et des besoins en investissements. Nous comptons présentement dix prêts consentis aux coopératives, en vertu de cette loi, pour des projets d'une valeur ajoutée s'élevant à 14,2 millions de dollars.

En 1994-1995, par exemple, 17 000 prêts ont été consentis dans le cadre de cette loi, ce qui représente plus de 475 millions de dollars. Toujours en 1994-1995, la moyenne des prêts consentis


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était de 27 000 $ et la moyenne des cinq dernières années était de 22 000 $.

(1520)

Au cours des 25 dernières années, les pertes nettes encourues dans le cadre de la loi représentent, bon an mal an, 1 p. 100 de l'ensemble des prêts garantis.

Je voudrais maintenant vous parler aussi des taux d'intérêt. Les taux d'intérêt m'apparaissent raisonnables et avantageux pour les agriculteurs. Or, le taux d'intérêt maximum que les prêteurs peuvent imposer est le taux préférentiel plus 1 p. 100 pour le cas des taux variables. Si vous voulez, le taux variable serait le taux préférentiel plus 1 p. 100; or, cela varie comme la marée. Si les taux d'intérêt augmentent, l'agriculteur verra son taux d'intérêt à payer sur son prêt garanti dans le cadre de cette loi augmenter lui aussi et s'ils baissent, son taux baissera.

Cependant, s'il désire un taux fixe pour cinq ans, à ce moment-là, ce sera le taux préférentiel au moment où il négocie son emprunt, plus 2,25 p. 100. Cela ne doit pas dépasser, cependant, une période fixe de cinq ans. Dans le cadre de mes statistiques que je vous énumère, je voudrais vous rappeler qu'en 1991, environ 683 prêteurs des milieux ruraux, telles des caisses populaires et des coopératives de crédit, ont été récemment accrédités comme prêteurs dans le cadre de cette loi.

Vous savez, monsieur le Président, antérieurement, il y avait encore une fois une iniquité envers les caisses populaires, parce qu'au Québec, le réseau des caisses populaires joue un rôle extrêmement important. Souvent, comme c'était moins lucratif pour les grandes banques dans les régions rurales, elles se sont repliées sur elles-mêmes dans les grands centres. Elles ont laissé libre cours, dans le milieu rural, aux caisses populaires, si bien qu'il était difficile pour nos agriculteurs, à ce moment-là, d'emprunter, puisque les caisses populaires n'étaient même pas accréditées.

Cela ne prenait-il pas du culot, pour un gouvernement central, qui se dit respectueux des institutions, de ne pas vouloir accréditer les caisses populaires? Seules les grandes banques avaient ce privilège, parce qu'on sait très bien que les caisses populaires n'offrent jamais d'argent à un parti politique, pas plus au Bloc québécois qu'à un autre parti politique.

Voyez-vous, comme elles n'étaient pas de gros fournisseurs aux caisses électorales, on les avait tout simplement tassées dans ce genre de prêts. C'est honteux! Heureusement, les pressions de fervents nationalistes, dont les membres du Parti québécois de qui ici je dois saluer le courage, ont su faire comprendre et raisonner le gouvernement fédéral pour qu'il accepte des caisses populaires comme prêteurs dans cette garantie de prêts.

Le Québec, qui est quand même une province représentant le quart de la population canadienne, n'est qu'au troisième rang pour l'utilisation de cette loi ici, de ces prêts garantis par le gouvernement fédéral à un taux d'intérêt qui me semble avantageux. Pourquoi, au Québec, les agriculteurs n'utilisent-ils pas ce guichet? C'est qu'il est très méconnu. Alors, avec votre permission, je vais ici en faire un résumé que j'essaierai de faire le plus simple et le plus bref possible.

Tout d'abord, je dois vous dire que cette loi ne s'applique pas pour un agriculteur qui désire faire ses débuts en agriculture. Alors, si vous voulez acquérir une ferme pour devenir, éventuellement, un agriculteur à votre compte, vous ne devez pas aller vers cette loi, vous devez aller à la Société du crédit agricole, qui relève du gouvernement fédéral, du même gouvernement, ou encore aller à la Société du financement agricole qui, elle, relève du Québec.

(1525)

Le projet de loi dont nous discutons cet après-midi s'adresse aux agriculteurs qui désirent améliorer leur situation, qui désirent agrandir leurs fermes, acheter le voisin, par exemple, qui désirent faire un agrandissement, agrandir une porcherie, qui désirent faire une route sur leurs fermes pour aller sortir le bois qui est à l'autre extrémité, qui désirent installer une génératrice dans une porcherie, qui désirent encore refinancer, consolider tous leurs frais en un seul prêt. À ce moment-là, ce serait possible de passer par ce prêt. Cela pourrait également être possible pour quelqu'un qui voudrait procéder à un achat de bétail ou à l'installation d'un nouveau silo, ou encore acheter le silo du voisin pour le déménager, pour la construction de fosses à purin, de fosses à fumier, l'achat de tracteurs, de faucheuses rotatives ou encore de moisonneuses-batteuses qui, vous le savez très bien, coûtent de plus en plus cher.

Évidemment, le gouvernement ici ne garantit des prêts dont la base minimale est de 2 000 $. Vous comprendrez qu'il ne faut pas non plus aujourd'hui, en 1995, brasser plus de papiers que la valeur du papier en vaut. Mais il y a un maximum. Pour les agriculteurs, le maximum est de 250 000 $ et pour les sociétés coopératives agricoles, on peut se rendre jusqu'à 3 millions.

Cependant, il y a des achats qui ne sont pas admissibles et j'aimerais vous en citer quelques-uns, dont les biens à court terme. Quelqu'un qui voudrait acheter des porcelets de 35, 45 livres, cela ne serait pas applicable dans le cadre du projet de loi C-75 parce que c'est seulement un court terme de cinq à six mois environ. Ce n'est pas applicable dans ce cas-là. Ou encore, faire des réparations dans la maison familiale sur la ferme, cela ne serait pas applicable non plus. Ce ne serait pas applicable non plus pour l'achat de quotas. Or l'agriculteur laitier qui aimerait acheter du quota pour obtenir des payes plus substantielles, ce ne serait pas applicable dans ce cas-là.

Donc, le maximum qu'un agriculteur peut emprunter dans le cadre de cette loi, c'est 250 000 $, et pour une société coopérative, 3 millions. Évidemment, la garantie de prêt doit couvrir le maximum de 80 p. 100. On ne peut pas garantir plus de 80 p. 100 de l'actif acheté. Le maximum pour le remboursement de l'emprunt, dans le cas d'une ferme, d'un agrandissement de terre, c'est 15 ans, et dans le cas de tout autre produit, de biens, le maximum est de 10 ans. Évidemment, si on achète un produit dont la longétivité n'est que de quatre ans, alors le maximum de temps alloué pour le remboursement ne serait pas à ce moment-là de 10 ans mais vous comprendrez comme moi, serait de 4 ans, bien sûr.

Et les versements maintenant. Cela pourrait être un versement mensuel, mais on ne pourrait pas, cependant, prendre moins d'un versement annuel. Quelqu'un qui dit: Moi, je veux payer seulement aux deux ans, ce ne serait pas applicable dans ce projet de loi, il doit faire un paiement minimum par année.

Les intérêts, j'en ai parlé tout à l'heure, alors je le rappelle rapidement. Si c'est un taux d'intérêt variable, qui flotte, c'est le taux préférentiel plus 1 p. 100, et si on choisit un taux fixe, c'est beaucoup plus dispendieux. Le taux fixe n'est valable que pour une période de 5 ans. C'est le taux préférentiel plus 2,25 p. 100.


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Finalement, je pourrais prendre une minute si on le veut bien pour parler du droit d'inscription et des frais d'administration.

(1530)

Tout agriculteur qui désire emprunter sous le volet de la Loi sur les prêts destinés aux améliorations agricoles et à la commercialisation selon la formule coopérative doit verser la moitié de 1 p. 100, donc 0,5 p. 100 du prêt. Ce montant est remis au receveur général du Canada pour étudier sa garantie de prêt. Le prêteur peut également ajouter à ce 0,5 p. 100 le moindre des deux montants suivants, soit 250 $ ou encore le quart de 1 p. 100 du montant, sans dépasser 250 000 $.

Comme on le disait tout à l'heure, cela s'applique également aux sociétés coopératives agricoles qui sont fort nombreuses au Québec. La Société coopérative agricole de Disraëli, tout près de chez nous, a déjà accepté un prêt, il y a quelques années, lorsqu'elle a installé des silos pour faire sa propre moulée. Ce prêt avait été garanti par le gouvernement fédéral.

Une société coopérative agricole peut donc se rendre à un montant maximal de prêt de 3 millions au même taux d'intérêt que celui énuméré plus tôt pour les agriculteurs.

Nous, du Bloc québécois, allons donner notre aval à ce projet de loi C-75. Mais, encore une fois, je voudrais qu'il soit très clair qu'on donne notre aval dans le but d'accorder à nos agriculteurs les sommes d'argent pour financer, pour prendre de l'expansion et aller chercher dans les poches du gouvernement fédéral cette garantie à laquelle ils ont droit parce qu'ils paient leurs impôts de la même façon que les autres corps de métier au Canada et au Québec particulièrement.

Mais là où le bât blesse, j'en ai parlé quelques instants tout à l'heure, c'est en ce qui a trait aux dédoublements et aux chevauchements.

Durant les quatre jours de congé de la semaine pascale, j'ai visité plusieurs de mes amis et collègues agriculteurs. Je leur disais justement que j'allais intervenir aujourd'hui sur ce projet de loi. La très, très grande majorité d'entre eux-je ne dis pas la totalité mais la très grande majorité-disaient ne pas connaître cette loi. C'est sûrement la raison pour laquelle les agriculteurs du Québec n'ont utilisé le guichet de cette loi qu'au troisième rang des dix provinces du pays. Pourtant, le Québec produit à lui seul plus de 17 p. 100 des activités agricoles de ce pays.

Une petite province en population, la Saskatchewan, occupe le premier rang. C'est qu'il s'est fait de la promotion là-bas. Un producteur de porc de Lyster, M. Fernand Fillion, me disait, lui, qu'il avait étudié, marchandé, avant de construire sa nouvelle porcherie qui a nécessité beaucoup plus qu'un million de dollars d'investissement, les services offerts par la Société de crédit agricole, la Société de financement agricole qui relève de Québec et cette loi. Il a découvert que c'était la Société de financement agricole du Québec qui offrait, dans son cas, l'emprunt le plus profitable pour lui.

L'agriculteur a trois choix: emprunter par l'entremise de la Société de financement agricole du Québec, de la Société de crédit agricole du Québec ou de la Loi sur les prêts destinés aux améliorations agricoles et à la commercialisation selon la formule coopérative. Pourquoi, par souci d'économie, n'aurions-nous pas un guichet unique? L'agriculteur n'aurait pas à cogner à trois portes, à devoir bien souvent visiter jusqu'à trois villes pour aller rencontrer ces fonctionnaires qui coûtent beaucoup d'argent, parce que ce sont toujours les mêmes contribuables qui paient pour ce fonctionnement distorsionné, ces dédoublements.

(1535)

Quand, nous du Bloc québécois, nous promenons dans nos campagnes, dans nos rangs, dans nos municipalités, dans nos petites villes, et que nous leur expliquons ces doublements, ils comprennent facilement et rapidement quand et pourquoi on arrive à des 40 et 45 milliards de déficit par année.

C'est facile, on pourrait économiser des dizaines et des dizaines de millions de dollars. J'en ai un beau cas de dédoublement à l'intérieur du même gouvernement. À la blague, un agriculteur me disait encore la semaine dernière: «Nous, monsieur le député, on souhaiterait avoir affaire seulement qu'au ministère de l'Agriculture du Québec. C'est lui qu'on connaît. Le ministre de l'Agriculture du gouvernement fédéral, on ne sait même pas son nom, puis quand il vient nous voir, il a beaucoup de difficulté à nous parler dans notre langue». Ce n'est pas un mal, bien sûr, mais il faut comprendre que la réalité du Québec, c'est qu'on est plus collés à notre gouvernement de Québec qu'à notre gouvernement d'Ottawa.

À cet égard, je dis ceci au ministre de l'Agriculture, qui nous dit régulièrement que son but ultime, c'est de travailler pour les agriculteurs: Si vous désirez vraiment travailler pour les agriculteurs, pourquoi ne pas faciliter la tâche à ceux-ci, et par l'économie que vous ferez, en faisant un guichet unique, on pourrait abaisser les taux d'intérêt. Cela ne vous coûterait pas un cent de plus et les agriculteurs seraient bien plus heureux.

J'invite cet après-midi le ministre de l'Agriculture à venir se promener au Québec dans les rangs, prendre une semaine de congé et se promener avec les agriculteurs du milieu. Il y en a sûrement parmi les 17 ou 18 députés libéraux qui représentent le Québec ici, à l'intérieur de ce gouvernement. Il doit y en avoir qui demeurent dans des régions rurales. Cela ne doit pas être seulement des députés du West Island, des députés de ville. Il doit y en avoir quelques-uns parmi ceux-là qui ont déjà vu une vache de proche, qui ont déjà été dans une porcherie. Alors, qu'ils viennent se promener. Il y a le premier ministre, que je connais bien, qui est le représentant du beau comté de Saint-Maurice. Il y a des belles fermes agricoles dans le comté de Saint-Maurice. J'invite, par exemple, le ministre de l'Ariculture à venir se promener dans le comté de Saint-Maurice et s'enquérir auprès des agriculteurs de ce qu'ils désirent, de ce qu'ils souhaitent obtenir. Le comté de Saint-Maurice, ce n'est pas le comté de Frontenac, il doit bien y avoir des fédéralistes dans ce coin là, puisqu'ils ont élu notre premier ministre. Alors, il faut aller là.

Je vous le dis, monsieur le Président, les agriculteurs sont conscients qu'ils se font avoir par ce gouvernement. Voyez-vous, lundi avant-midi, je rencontrais un agriculteur qui me disait-parce qu'il avait suivi la journée d'opposition sur les coupures en matière agricole, étant lui-même dans la production laitière destinée au lait de transformation-qu'il calculait de perdre environ 4 000 $. Et cela, c'est 4 000 $. C'est le dernier millier de dollars qui est payant, ce n'est pas le premier.


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Vous savez, monsieur le Président, dans une vacherie, ce n'est pas la première vache que l'on trait le matin qui est payante, c'est toujours la dernière. Alors, la dernière est à tout profit. On vient donc chercher, dans la coupure du 30 p. 100 du subside au lait de transformation, cette dernière vache qui lui rapportait justement son 4 000 $ à la fin de l'année fiscale.

(1540)

Il n'avait pas à me convaincre, bien sûr, mais la crainte de cet agriculteur laitier était ceci: au mois d'août, on va augmenter le prix des produits laitiers. En augmentant le prix des produits laitiers, et c'est prouvé, on va abaisser la consommation et lorsqu'on abaisse la consommation, on doit abaisser le quota. Alors, je comprends tout, monsieur le Président. Je vous explique ces choses et vous les comprenez avant que je ne vous en fasse part. Et si vous êtes de mon avis, il faudrait essayer de travailler non pas pour nous, mais pour nos agriculteurs, une fois pour toutes.

[Traduction]

M. Allan Kerpan (Moose Jaw-Lake Centre, Réf.): Monsieur le Président, j'écoutais le débat d'aujourd'hui assis dans mon fauteuil et je me demandais à nouveau: Pourquoi sommes-nous ici? Pourquoi présentons-nous, comme cela s'est vu si souvent dans le passé, des propositions d'amendement à des projets de loi ou de nouveaux projets de loi?

Je reproche au gouvernement d'esquiver la question importante. Cependant, je n'ai pas de critiques précises à formuler contre la Loi sur les prêts destinés aux améliorations agricoles, car, en gros, je crois que c'est un bon programme, comme il a été dit auparavant. Il a été tout particulièrement bien accueilli dans ma province, la Saskatchewan, où il a été très utile. Le secrétaire parlementaire du ministre a parfaitement raison. Le taux de défaut de paiement n'est pas très élevé si l'on considère tout l'argent prêté en vertu de ce programme.

Mais, je le répète, je crois que l'on élude la véritable question, du moins, dans une certaine mesure. Je voudrais revenir à ce qu'a dit mon collègue du Bloc. Pour des raisons évidentes, le député du Bloc et moi n'avons pas les mêmes plans ni les mêmes espoirs et les mêmes aspirations pour nos provinces et nos régions respectives. Je partage une bonne partie de ce qu'il a dit sur les dédoublements et les chevauchements dans ce genre de programmes.

En Saskatchewan, si les agriculteurs qui veulent emprunter de l'argent désirent l'aide du gouvernement, ils peuvent s'adresser au programme créé par la Loi sur les prêts destinés aux améliorations agricoles, au programme de prêts aux petites entreprises, à la Société du crédit agricole ou, uniquement dans le cas de la Saskatchewan, à la Société du crédit agricole de cette province. Comme mon collègue bloquiste l'a dit, un agriculteur peut s'adresser à quatre endroits différents pour emprunter de l'argent. Je me demande bien pourquoi. Je ne vois absolument aucune raison d'avoir quatre bureaucraties pour aboutir au même résultat.

J'ai moi-même présenté une motion d'initiative parle-mentaire dont l'un des éléments essentiels consiste à réduire les dédoublements et les chevauchements ainsi qu'à confier les services et les programmes qui ne peuvent pas être privatisés au palier de gouvernement le plus près du citoyen.

Je crois que personne à la Chambre ne peut nier que les agriculteurs doivent avoir accès à des capitaux pour financer leurs activités tout comme n'importe quelle autre entreprise. À cause des caractéristiques uniques de l'agriculture et des risques particuliers auxquels ce secteur est exposé, je dois admettre que l'industrie des services financiers privés a souvent hésité à offrir aux agriculteurs et aux entreprises agroalimentaires les services dont ils ont besoin. Les risques particuliers auxquels le secteur agricole est exposé sont liés au fait que nous sommes beaucoup à la merci de dame nature et que nous produisons surtout des denrées périssables qui doivent être rapidement transportées vers les marchés et vendues.

Dans notre environnement commercial intégré à l'échelle mondiale où les produits alimentaires et non alimentaires sont transportés d'un pays à l'autre par bateau, par avion ou par camion, un désastre naturel comme une sécheresse, une inondation ou une averse de grêle dans un coin du monde peut créer une pénurie que les agriculteurs d'ailleurs devront combler.

Le marché agricole international peut donc être très instable, subissant les effets des hausses et des baisses de prix, des surplus et des pénuries. Ces uniques réalités de la vie auxquelles sont confrontés les agriculteurs créent des besoins financiers uniques que ceux qui dispensent des services financiers doivent satisfaire.

(1545)

La discussion que nous avons sur le financement agricole devrait tourner autour d'une simple question: Comment la société et le monde peuvent-ils répondre aux besoins financiers de l'industrie agricole de manière à nous assurer des disponibilités alimentaires sûres, stables, abondantes et à un prix abordable?

En général, les agriculteurs et les négociants agricoles se sont révélés de bons emprunteurs qui respectent les conditions et remboursent leurs prêts à temps et en totalité. Comme le secrétaire parlementaire l'a dit, c'est le cas en ce qui concerne ce programme.

Il y a eu des années où une avalanche de malheurs s'est abattue sur les agriculteurs qui ont eu du mal à joindre les deux bouts. En de telles périodes, les gouvernements fédéral et provinciaux sont intervenus et ont accordé aux agriculteurs une aide d'urgence parce que la stabilité des disponibilités alimentaires et donc l'intérêt public était menacés.

Monsieur le Président, après avoir passé toute ma vie dans l'industrie agricole, je suis bien placé pour vous dire que les agriculteurs ne veulent pas de l'aide du gouvernement. Pas un agriculteur ne veut avoir le gouvernement comme partenaire à temps plein. Nous avons maintes fois dit et redit à la Chambre que, comme les autres entrepreneurs, les agriculteurs veulent que le gouvernement les laissent tranquilles et arrête de leur soutirer de l'argent. Ce que nous voulons, ce sont des impôts et des coûts de production moins élevés. Ce que nous voulons, c'est un système de réglementation simple et efficace. Nous voulons que les gouvernements négocient de bons accords de commerce et nous ouvrent l'accès au marché de façon à ce que nous puissions atteindre notre plein potentiel et relever la concurrence sur le marché mondial.

Ce qui me déplaît dans les mesures législatives comme le projet de loi C-75, c'est que le gouvernement intervient et


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s'empare d'un rôle dont l'industrie privée des services financiers pourrait et devrait peut-être se charger. Tant que ce gouvernement ou tout autre gouvernement s'obstinera dans ce type d'activité financière, je ne crois pas que le secteur privé sera suffisamment motivé ou suffisamment compétitif pour assurer au secteur agricole les services financiers dont il a besoin. Pourquoi le ferait-il?

Je trouve également paradoxale la confiance que semble avoir le secteur privé dans la garantie du gouvernement fédéral. Je sais que le gouvernement fédéral va sans doute avoir environ 120 milliards recettes fiscales cette année et que la somme de 3 milliards de dollars prévue dans la loi au titre de la garantie des prêts est probablement une mesure sage même si la totalité des prêts n'était pas remboursée, ce qui n'arrivera pas. Ce type de programme financier pose une question quelque peu paradoxale: Comment une organisation qui est endettée de 550 milliards de dollars et qui doit payer près de 50 milliards de dollars en intérêts seulement au cours de l'année, peut-elle agir à titre de caution de quoi que ce soit?

C'est le gouvernement qui est endetté et qui a besoin d'aide financière et non les agriculteurs ou les prêteurs. Nous avons peut-être mis la charrue avant les boeufs dans ce cas.

À mon avis, il est temps de nous demander quelle est l'approche adéquate quant aux services financiers pour le secteur agricole. Est-ce bien le moment pour le gouvernement d'augmenter les programmes de garantie des prêts? Comment peut-il offrir une garantie valable alors que ses propres finances sont dans un tel état? Ne devrait-il pas plutôt encourager l'industrie des services financiers du secteur privé à servir l'industrie de l'agriculture?

Je crois que certaines institutions financières s'engageraient volontiers dans ce marché de services, que cela créerait une certaine concurrence et que les agriculteurs obtiendraient ainsi un bon service. Le gouvernement devrait faire clairement savoir au secteur privé quelles seront les limites de sa participation, puis élaborer ensuite une politique en ce sens.

Rien n'est gratuit. Tous tant que nous sommes, agriculteurs, gens d'affaires ou autres, nous devons payer les biens et les services dont nous avons besoin. Si nous les obtenons du secteur privé, nous paierons en dollars. Si nous les obtenons du secteur public, nous paierons en impôts. Monsieur le Président, c'est scandaleux de voir que mes enfants et les vôtres devront rembourser la dette de 550 milliards de dollars que nous devons aujourd'hui pour des services qui nous ont été rendus. La dette n'est rien d'autre qu'un impôt différé et le transfert des obligations financières d'une génération à l'autre.

Je vous le demande, monsieur le Président, le Parlement ne devrait-il pas, avant que le problème ne s'envenime, reconnaître l'importance d'une répartition des responsabilités plus claire et mieux définie entre les secteurs public et privé, entre le paiement en impôts ou en dollars? Bien entendu, nous ne devrions pas simplement approuver ce projet de loi ou toute autre mesure semblable sans nous demander au préalable combien cela va coûter, comment nous allons financer tout cela et si c'est bien la meilleure façon de procéder. Si nous voulons assumer nos responsabilités et ne pas transmettre nos problèmes aux générations futures, nous devons certes nous poser ces questions et chercher à obtenir les meilleures réponses.

(1550)

On ne peut plus permettre au gouvernement de continuer à agir quotidiennement, année après année, programme après programme, comme une industrie qui fonctionne en vase clos et ne vit que pour elle-même, en se fichant totalement des conséquences à long terme de ses actions. Ou nous mettons de l'ordre dans nos finances maintenant ou nos enfants devront le faire, à moins que ce ne soit des gens de l'extérieur qui s'en chargent.

À l'étape du comité du projet de loi C-75, mes collègues réformistes et moi voulons parler de ces questions. Nous croyons que certains amendements à ce projet de loi s'imposent. Nous écouterons ce que les autres députés, ainsi que les fonctionnaires, ont à dire. Cependant, soyez assurés que nous poursuivrons nos efforts, en tant que réformistes, au cours de la dernière décennie de ce siècle et de ce millénaire pour faire en sorte que nos enfants ne subissent pas les répercussions catastrophiques des actes irresponsables que nous commettons, en tant que parents.

En conclusion, je tiens à dire que ce qu'on reproche à cette modification figurant dans le projet de loi C-75, c'est qu'elle ne prévoit pas le remplacement de cette loi. Je le répète, on pourrait simplement la regrouper avec la Loi sur les prêts aux petites entreprises et la faire relever peut-être de la Société du crédit agricole si c'est là la façon la plus efficiente et la plus efficace de procéder pour faire disparaître les énormes bureaucraties, comme mon collègue du Bloc l'a mentionné.

Il y a trois bureaucraties fédérales en Saskatchewan. Je crois fermement qu'on pourrait en supprimer au moins une et probablement deux. Il faut examiner de près tous ces types de garanties de prêts que le gouvernement fédéral accorde au secteur agricole. On doit se pencher sur l'ensemble de la question et non simplement sur une modification qui n'est qu'une solution de fortune.

Le secrétaire parlementaire a raison de dire que, faute d'adopter cette modification, il faudra retarder l'application de ce programme pendant deux ans. Cependant, nous pouvons faire mieux que cela et ne plus étouffer le système en n'étant pas prêts, en fait, à envisager un regroupement et la suppression des chevauchements.

Comme je l'ai mentionné plus tôt, mes collègues et moi soumettrons des amendements à l'étape du comité. Nous demanderons au gouvernement et à l'opposition officielle de nous appuyer et de collaborer avec nous pour apporter tout amendement capable de rendre notre système plus rentable et efficace.

M. Glen McKinnon (Brandon-Souris, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais d'abord faire observer que l'intérêt que le monde agricole porte à cet aspect du financement est très grand.

L'accès aux capitaux est probablement d'une suprême importance dans la réalisation d'objectifs agricoles à long terme, qu'il s'agisse d'améliorations des bâtiments, de transformation, de distribution ou de commercialisation des produits agricoles. Le programme s'est révélé très populaire auprès des agriculteurs. Le plafond fixé à 1,5 milliard de dollars en cinq ans a presque été atteint. Nous voici donc face à un dilemme: augmenter le montant total des prêts autorisés ou mettre fin temporairement au programme. J'aimerais profiter de l'occasion pour examiner ces deux options un peu plus à fond.


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La première option consiste à augmenter l'ensemble des prêts consentis conformément à la Loi sur les prêts destinés aux améliorations agricoles, le faisant passer de 1, 5 milliard de dollars à trois milliards. Dans le cas de cette option, on pourrait s'interroger sur le degré de risque que présente ce programme et sur le nombre de prêts qui peuvent rester non payés? Le bilan est excellent. Le taux net des créances, c'est-à-dire le montant brut moins les recouvrements, s'élève à environ 1 p. 100 et n'a pratiquement pas bougé au cours de ces 25 dernières années. Il y a eu des soubresauts. Il est arrivé que ce taux atteigne même 1,5 p. 100. Dans les années 80, cela a entraîné une augmentation des taux d'intérêt, une diminution des revenus agricoles et une dévaluation des terres.

(1555)

Depuis 1992, on assiste à une réduction importante du nombre des demandes d'indemnisation, et le programme affiche des mouvements de trésorerie positifs. On s'attend à ce qu'il en soit ainsi au moins jusqu'en 1997. Une élévation du plafond total entraînera des coûts supplémentaires, mais des mesures seront prises pour compenser. Ainsi, une augmentation d'à peine un quart de 1 p. 100 du droit d'inscription serait suffisante pour compenser ces coûts supplémentaires et assurerait le maintien du plafond d'indemnisation actuel pour au moins cinq ans encore. Dans le cas d'un prêt moyen, soit 27 000 $, cela équivaudrait à une augmentation de 67 $.

Le nombre des prêts et des pertes éventuelles continueront de faire l'objet d'une surveillance de tous les instants si le taux net des créances est plus élevé que prévu. Les coûts liés au programme pourraient faire l'objet de mesures de contrôle. Ainsi, on pourrait abaisser la part garantie qui est de 95 p. 100 et on pourrait restreindre l'admissibilité aux prêts ou encore augmenter les frais d'inscription. En somme, il est possible d'élever le plafond sans occasionner de grands frais pour le gouvernement, tout en satisfaisant les besoins du programme sur une période de dix ans encore. C'est une mesure positive que le secteur de l'agroalimentaire et les prêteurs commerciaux appuient.

La deuxième option consiste à maintenir le statu quo, à conserver le plafond global à 1,5 milliard de dollars et à suspendre le programme quand le plafond aura été atteint.

Au cours des neuf premiers mois de 1994-1995, on a garanti des prêts de 422 millions de dollars en vertu de la loi établissant le plafond global des prêts, pour cinq ans, à 1,24 milliard de dollars. Si la tendance actuelle se poursuit, on pourrait atteindre la limite actuelle de 1,5 milliard de dollars dès juin et il faudra alors suspendre le programme. Étant donné que l'on s'attend à ce que les prêts annuels enregistrés continuent de se situer dans les 500 millions de dollars et que les prêts venant à échéance vaudront 80 millions de dollars cette année, 115 millions de dollars l'an prochain et 196 millions de dollars l'année suivante, il faudra vraisemblablement suspendre le programme pour environ deux autres années.

Comme l'enregistrement ne produira pas de nouvelles recettes au cours de cette période, le passif éventuel du programme ne sera pas différent de ce qui est prévu dans la première option, c'est-à-dire qu'on augmentera le plafond total à trois milliards de dollars et qu'on augmentera simultanément les frais d'enregistrement d'un quart de 1 p. 100. Si le statu quo devait se poursuivre, le passif du programme, à long terme, demeurerait probablement conforme aux estimations actuelles et serait de 16 milliards de dollars.

Les agriculteurs, leurs organisations, surtout la Fédération canadienne de l'agriculture, et les prêteurs appuient la Loi sur les prêts destinés aux améliorations agricoles et à la commercialisation selon la formule coopérative. Je crois que ce serait une erreur que de suspendre ce programme qui est un moyen économique, pour le gouvernement, d'aider le secteur agroalimentaire. Le taux de perte nette, en 25 ans, n'a été que d'environ 1 p. 100. Le fait d'augmenter le plafond prévu dans la Loi sur les prêts destinés aux améliorations agricoles et à la commercialisation selon la formule coopérative permettrait de maintenir cette aide peu coûteuse.

Pour terminer, je demande à la Chambre d'appuyer le projet de loi C-75 et d'augmenter le capital des prêts qui peuvent être garantis. On pourra ainsi continuer d'offrir ce programme aux agriculteurs et aux coopératives de commercialisation qu'ils possèdent.

M. Bernie Collins (Souris-Moose Mountain, Lib.): Mon-sieur le Président, je suis très heureux de prendre la parole au sujet d'un projet de loi très important, le projet de loi C-75, Loi modifiant la Loi sur les prêts destinés aux améliorations agricoles et à la commercialisation selon la formule coopérative. Cette loi facilite l'accès au crédit agricole, les améliorations du processus de transformation et de distribution et la commercialisation des produits de la ferme. Les députés reconnaîtront tous, j'en suis sûr, l'importance considérable de ce projet de loi pour le secteur agricole.

(1600)

Le programme, qui connaît un grand succès, a aidé de nombreuses exploitations agricoles et coopératives de commer-cialisation à améliorer leurs activités ou à en lancer de nouvelles. En 1994-1995, le programme de la Loi sur les prêts destinés aux améliorations agricoles et à la commercialisation selon la for-mule coopérative a permis de faciliter l'obtention de plus de 17 000 prêts d'une valeur totale de 475 millions de dollars. Les prêts consentis en 1994-1995 ont une valeur moyenne à 27 000 $, ou 22 000 $ étalés sur une période de cinq ans.

Le programme a été particulièrement bénéfique pour les agriculteurs de Souris-Moose Mountain. La population de ma circonscription se préoccupe en particulier des répercussions qu'auront le récent accord du GATT et l'Organisation mondiale du commerce sur la vie et les activités courantes de nos agriculteurs.

Évidemment, il est très important de tenir compte de certaines contraintes auxquelles devront se plier les agriculteurs de notre région, maintenant que nos méthodes d'acheminement et autres pratiques d'exportation doivent être conformes aux exigences des marchés mondiaux. Nous devons nous tourner vers les produits à valeur ajoutée si nous voulons améliorer nos chances.

Je voudrais parler d'un groupe de personnes de ma circons-cription qui a adopté cette idée. Le groupe, composé de six familles agricoles de Souris-Moose Mountain, s'est constitué en coopé-rative afin de créer, dans le cadre d'une coentreprise avec une société hollandaise, une ferme de base pour la reproduction de porcs en Saskatchewan. Ce projet assurera, pour la première fois en 37 ans, une présence canadienne sur le marché européen continental.


11694

L'octroi d'un prêt en vertu de la Loi sur les prêts destinés aux améliorations agricoles et à la commercialisation selon la formule coopérative a permis la création d'une ferme coopérative. Cette coentreprise sera en mesure d'exploiter les nouveaux débouchés offerts par l'Organisation mondiale du commerce. Elle ouvre la voie à l'amélioration de l'élevage du porc en Saskatchewan selon la formule coopérative.

Les agriculteurs auront droit à des animaux de première qualité qui accroîtront la capacité de production de leurs entreprises actuelles et la rentabilité de leurs porcheries. La coopérative sera la première à faire venir des porcs Dalland en Amérique du Nord. Elle exploitera aussi le premier centre d'insémination artificielle à partir du sperme de porcs dans l'ouest du Canada.

La coopérative créera de l'emploi et stabilisera le revenu des agriculteurs. Les membres de la région de Kipling ont vraiment apprécié de pouvoir s'associer au secteur agricole pour veiller à la réalisation de ce programme.

Par exemple, la distribution de sperme et la commercialisation d'animaux d'élevage exigent du transport. À cette fin, on aura recours au matériel de camionnage actuel de chaque agriculteur, qui en obtiendra ainsi un meilleur rendement. Comme la coopérative aura besoin de personnel pour la production, la gestion et le travail de bureau, elle embauchera des membres des familles des agriculteurs, augmentant ainsi le revenu agricole et le rendement de chacun.

La coopérative sera plus qu'un producteur primaire de produits agricoles. Elle commercialisera un produit de qualité supérieure de façon profitable pour le groupe d'agriculteurs. L'emplacement géographique avantageux et les coûts de production plus bas rendront les produits de ces agriculteurs concurrentiels sur le marché nord-américain. Cette initiative marque le début d'un processus innovateur pour distribuer efficacement de nouvelles espèces dans l'industrie porcine nord-américaine, ce qui est très important dans ma circonscription.

Rien de tout cela n'aurait été possible si la Loi sur les prêts destinés aux améliorations agricoles et à la commercialisation selon la formule coopérative n'avait pas été là pour garantir les prêts que les agriculteurs devaient contracter pour satisfaire à des besoins, concrétiser de nouvelles idées et appliquer de nouvelles et meilleures manières de faire les choses. Avec une diligence raisonnable et des techniques d'évaluation appropriées, les garanties aux termes de cette loi présentent un risque peu élevé. On l'a vu dans le passé. Depuis 25 ans, les pertes nettes ont représenté environ 1 p. 100 de tous les prêts garantis. À cause du faible revenu agricole et de la dépréciation des terres, un plus grand nombre d'emprunteurs n'ont pu respecter leurs échéances, même en tenant compte des garanties de prêts, y compris celles accordées pendant la période difficile des années 80 où les taux d'intérêt étaient élevés. Le programme a été jugé excellent. Voilà pourquoi nous devons adopter le projet de loi dont nous sommes saisis aujourd'hui. Le programme offre au gouvernement une façon sûre et économique d'aider les agriculteurs à s'aider eux-mêmes en cette période de grands changements.

(1605)

Lorsque je parcours ma circonscription et que je rencontre mes électeurs, d'ardents travailleurs, sincères et intelligents, me proposent des centaines de bonnes idées. Avec un coup de pouce,

ces gens peuvent aller très loin. Nous n'avons qu'à leur ouvrir la voie.

De plus, la mesure législative prévoit des dispositions visant à compenser les dépenses supplémentaires qui accompagnent inévitablement toute augmentation du plafond. Le montant nécessaire pour compenser ces dépenses est minime. Par exemple, une augmentation de seulement 0,25 p. 100 des frais d'inscription suffirait à compenser les dépenses supplémentaires et à maintenir la dette à son niveau actuel pour au moins cinq ans. Pour un emprunt moyen de 27 000 $, cela représente une somme de 64 $.

Sans la modification qui est proposée, les prêteurs devront cesser d'appliquer le programme lorsque le plafond d'un milliard cinq cents millions de dollars sera atteint. Cela serait irresponsable. Pouvons-nous nous imaginer être dans l'obli-gation de refuser un prêt aux coopératives de la Saskatchewan que je viens de mentionner et de leur dire que, même si vous vous rendez compte que leur projet stabilisera le revenu, créera des emplois et favorisera les exportations du Canada, un plafond arbitraire vous empêche de continuer de les appuyer?

Il faut nous réjouir de la nécessité d'accroître le plafond. Cela signifie que le programme fonctionne bien et que plus de gens le découvrent, constatent son succès et décident de s'en prévaloir. Ce qui leur semblait auparavant impossible devient tout à coup possible.

La faiblesse durable des taux d'intérêt, la diminution de l'endettement agricole, l'arrivée d'environ 600 nouveaux prêteurs désignés et une meilleure promotion du programme ont contribué au succès de la loi. Pour dire les choses simplement, en relevant légèrement le montant global sans qu'il en coûte quoi que ce soit au gouvernement, ou alors très peu, il devrait être possible de satisfaire à la demande au cours des dix prochaines années.

Il s'agit d'une mesure constructive qui est appuyée par le secteur agroalimentaire et les sociétés de crédit commercial. Le programme est devenu de plus en plus important pour les prêteurs ruraux comme les coopératives de crédit qui proposent leurs services aux agriculteurs. L'Association des banquiers canadiens et la centrale des coopératives de crédit de la Saskatchewan appuient l'augmentation proposée. La Fédération canadienne de l'agriculture et d'autres grandes associations agricoles ont également été consultées et elles appuient la modification envisagée. Cette mesure est peu coûteuse et aidera le secteur agroalimentaire.

Les contribuables sont ici bien servis. En effet, les amélio-rations apportées contribuent à renforcer l'économie canadienne et à atténuer la dépendance à l'égard des subventions de l'État.

Je demande aux députés d'appuyer le projet de loi C-75. Si nous augmentons le montant global des prêts que nous pouvons garantir, il sera possible de continuer d'offrir le programme aux agriculteurs et aux coopératives, ce qui peut faire une vraie différence pour nous tous.

M. Allan Kerpan (Moose Jaw-Lake Centre, Réf.): Monsieur le Président, je voudrais faire quelques observations et poser une question au député de Souris-Moose Mountain. Il me semble que nous observons ici un exemple classique où l'on essaie de fermer la porte de l'écurie après la fuite du cheval. Je reviens


11695

encore une fois à ce que je disais il y a un instant. J'invite le député à dire ce qu'il pense de mon idée.

Je voudrais qu'il me dise pourquoi le gouvernement n'approuverait pas la consolidation des trois ou quatre programmes fédéraux existants permettant d'offrir de l'aide sous forme de prêts aux agriculteurs.

L'existence de la Société du crédit agricole est généralement bien connue au Canada. Pourquoi ne pas supprimer les deux autres services chargés d'appliquer la Loi sur les prêts aux petites entreprises et la Loi sur les prêts destinés aux améliorations agricoles, pour les réunir dans le giron de la Société du crédit agricole?

(1610)

Il semblerait que la garantie accordée par l'État à d'autres institutions de prêt constitue un certain conflit d'intérêts, car cela entre en concurrence directe avec la Société du crédit agricole. Je voudrais que le député nous dise ce qu'il pense de l'idée de consolider les services et de supprimer ce double emploi.

M. Collins: Monsieur le Président, en ce qui a trait aux questions qu'on vient de poser et à la Loi elle-même sur les prêts destinés aux améliorations agricoles et à la commercialisation selon la formule coopérative, nous devons nous rappeler que le projet de loi vise essentiellement à hausser le plafond de 1,5 à trois milliards de dollars. Nous devons nous concentrer sur cet objectif et le maintenir.

Nous devons faire un examen englobant tous les organismes gouvernementaux, les services de crédit agricole et tout le secteur agricole. Je suis persuadé que, dans cet esprit, le ministre de l'Agriculture examine toutes les solutions qui se présentent.

Cependant, pour ce qui est du projet de loi C-75, je ne voudrais pas que nous retardions l'adoption de cette mesure très importante pour le bien du monde agricole.

M. Kerpan: Monsieur le Président, je tiens à préciser à l'intention du député que je ne critique vraiment pas l'intention de porter le plafond à trois milliards de dollars. J'en comprends très bien la nécessité. Tout ce à quoi je trouve à redire, c'est qu'on essaie d'apporter des modifications symboliques à une loi, alors qu'on pourrait faire beaucoup mieux pour l'améliorer en examinant la situation dans son ensemble.

M. Collins: Monsieur le Président, j'ai écouté le député avec beaucoup d'attention. Il a émis des réserves au sujet de la disposition relative au plafond d'indemnisation. Il s'agit d'une mesure très importante.

Étant donné que le député vient du monde agricole, je prends très au sérieux ses réflexions au sujet de la façon dont nous dirigeons les affaires publiques, surtout en ce qui concerne le secteur agricole.

[Français]

M. Jean Landry (Lotbinière, BQ): Monsieur le Président, je désire aujourd'hui prendre la parole sur le projet de loi C-75, Loi modifiant la Loi sur les prêts destinés aux améliorations agricoles et à la commercialisation selon la formule coopérative.

Je crois bien que je vais faire plaisir au gouvernement en lui disant que son intention d'augmenter les garanties de prêts à 3 milliards de dollars est très bonne. S'il pense que le pot viendra après les fleurs, il a parfaitement raison. Commençons par le positif. En réalité, la modification ne fait qu'augmenter le plafond de garantie pour les prêts consentis par les institutions financières, en raison de l'accroissement de la demande.

Selon les données fournies par le ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, le programme est très efficace puisque son coût est faible. Il en coûte 1,5 million de dollars annuellement, ce qui correspond aux pertes pour non-remboursement de prêts. On parle donc de 1 p. 100 de l'ensemble des prêts garantis. C'est donc dire qu'avec le plafond de 3 milliards, le coût annuel devrait passer à 3 millions de dollars, ce qui est fort acceptable.

Nous ne sommes pas contre la logique. En 1994-1995, toujours selon les données d'Agriculture et Agroalimentaire Canada, plus de 17 000 prêts ont été consentis par l'entremise de la Loi sur les prêts destinés aux améliorations agricoles et à la commercialisation selon la formule coopérative, pour un total de 475 millions de dollars. La valeur globale des prêts garantis approche la limite de 1,5 milliard.

La demande et le service rendu justifient amplement l'accroissement du plafond de garantie. Non, nous ne sommes pas contre cette mesure qui permet aux entreprises agricoles de se développer en ayant accès au crédit sans que l'État s'engage à donner des subventions payées en réalité par les contribuables.

Toutefois, une bonne critique constructive fera du bien à ce gouvernement qui ne voit pas, ou ne veut pas voir, que le maintien des chevauchements coûte aussi des sous aux contribuables qui n'en peuvent plus de débourser, surtout quand on peut l'éviter.

(1615)

En effet, cette mesure confirme le maintien des chevauchements au sein du gouvernement fédéral entre le ministère et la Société du crédit agricole, ainsi qu'avec le Québec. Le Québec offre les mêmes services que le fédéral par l'entremise de la Société du financement agricole. Oui, encore les chevauchements. Quand ça rentre par une oreille, ça ressort par l'autre. La population entend, elle, et surtout, elle a compris. Les chevauchements, donc.

Et dans le cas qui nous intéresse aujourd'hui, précisons qu'il ne s'agit pas seulement des dédoublements d'activités, mais également de la façon de faire les choses. Les garanties de prêts ont leur utilité, mais elles augmentent l'endettement des entreprises. Tous reconnaîtront l'importance d'évaluer le potentiel de l'entreprise et des marchés avant d'offrir davantage de prêts. Trop d'endettement place l'entreprise en mauvaise posture face à la concurrence. C'est pourquoi nous soutenons que le Québec, et c'est bien sûr le cas pour les autres provinces, est le mieux placé pour identifier les secteurs de croissance de son économie et pour établir des politiques d'accès au crédit.

Ses politiques sont évidemment établies conformément aux stratégies de développement définies en concertation avec le milieu. La Société de financement agricole du Québec spécifie, dans son dernier rapport annuel, que sa propre création et l'élaboration des nouveaux programmes se sont effectuées de concert avec les représentants des milieux agricole et financier. Le Québec a établi une tradition de concertation en matière d'agriculture, avec les états généraux du monde rural, en 1991; les tables de concertation qui dégagèrent, lors du Sommet de Trois-Rivières, en 1992, des consensus sur des grandes avenues à privilégier pour assurer le développement de l'agroalimentaire au Québec et enfin, le Sommet de Trois-Rivières lui-même.


11696

L'expertise, le Québec la possède pour prendre en charge ce programme, avec les fonds qui lui reviennent, bien entendu. Le gouvernement fédéral épargnerait ainsi de fortes sommes à un ministère qui en a grandement besoin. Le ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire n'est-il pas l'un de ceux qui a le plus écopé, au niveau des dernières coupures budgétaires?

Agriculture et Agroalimentaire Canada est l'un des plus affectés en termes de diminution de personnel. Il est déplorable de maintenir des chevauchements dans ces conditions, alors qu'on a coupé en des endroits où on ne retrouve pas de tels chevauchements. Un exemple: les services d'inspection, qui sont dorénavant tarifiés, alors qu'il y a trois services d'inspection qui se chevauchent. Où va-t-on chercher l'argent pour simplement payer le budget de fonctionnement de ces services? Dans la poche des industries qui se trouvent à payer pour le maintien des dédoublements.

Le ministre n'est pas sans savoir que les fonctionnaires qui ont travaillé à l'élaboration de cette Loi sur les prêts destinés aux améliorations agricoles et à la commercialisation selon la formule coopérative ont reconnu qu'elle venait en concurrence avec des programmes québécois équivalents. Pour ceux et celles qui seraient peu familiers avec la Société de financement agricole, je peux vous parler brièvement de ses réalisations concernant les prêts agricoles.

Ceci est tiré du dernier rapport annuel de l'organisme. La Société de financement agricole autorise et garantit des prêts ainsi que des ouvertures de crédit. Le montant global des prêts qui peut être garanti est de 800 000 $ par entreprise et le montant des prêts à taux réduit, de 200 000 $. Le taux d'intérêt pour les prêts garantis est basé sur le taux d'intérêt hypothécaire résidentiel qu'offrent les institutions financières. Les producteurs agricoles peuvent maintenant choisir des termes d'un an, trois ans ou cinq ans, et bénéficier d'un taux d'intérêt fixe pour la durée choisie.

Au cours de l'exercice financier 1993-1994, la Société a accordé 4 682 prêts agricoles, pour un montant de 353,3 millions de dollars, ce qui représente une augmentation de 12 p. 100 du nombre et de 39 p. 100 du montant. Parmi ce total, 3 305 prêts, représentant 279,6 millions de dollars, bénéficient de la réduction d'intérêt prévue au programme de financement.

(1620)

De plus, la Société a autorisé le transfert de prêts existants pour une somme additionnelle de 39,5 millions de dollars. Le montant total des prêts ainsi que des transferts de prêts a donc atteint 392,8 millions de dollars.

Le Québec offre donc déjà les services. Il est mieux placé pour comprendre, comme je l'expliquais il y a quelques instants, en raison du modèle unique de concertation qu'il a créé en Amérique du Nord. Le monde agricole québécois a pensé au développement régional durable, lui.

La Société de financement agricole est plus proche des entreprises, plus proche de la réalité des marchés, mieux placée pour élaborer une politique de crédit cohérente avec les stratégies de développement économique identifiées par le milieu. Qu'Agriculture et Agroalimentaire Canada lui laisse administrer les garanties de prêts auxquelles le Québec a droit et on ne parlera plus de dédoublement.

Si le projet de loi C-75 est valable pour les entreprises agricoles du reste du Canada, permettez-moi d'émettre des réserves en ce qui a trait à l'impact du programme au Québec. Qu'est-ce que le gouvernement canadien va faire? Dira-t-il oui à un agriculteur dont la demande de prêt vient d'être refusée par la Société de financement agricole? Si une analyse de projet est faite par des experts, est-ce que le rôle du fédéral sera de faire une contre-expertise? On nage encore et toujours dans les eaux troubles du fédéralisme dédoubleur, inefficace et nuisible.

De plus, le Québec subit déjà des dédoublements avec la présence de la Société du crédit agricole, société d'État redevable au Parlement par l'entremise du ministre de l'Agriculture. Si, au Québec, nous venons de démontrer la capacité de la Société de financement agricole pour gérer ce programme de garantie de prêts, le reste du Canada pourrait bénéficier de l'expertise de la Société du crédit agricole, qui est le plus important prêteur agricole à long terme du Canada. Dans un document fourni par la SCA elle-même, on y apprend qu'elle possède les ressources humaines et l'expertise nécessaire en matière de financement agricole.

En plus de consentir des prêts traditionnels, la SCA peut maintenant financer des projets de diversification sur la ferme même ou des entreprises agricoles à valeur ajoutée à l'extérieur de la ferme. De plus, la SCA peut dorénavant administrer des programmes et des services conjointement avec des organismes fédéraux, des gouvernements provinciaux et d'autres prêteurs.

En face, on va encore nous dire qu'il n'y a pas de dédoublement. D'ailleurs, les fonctionnaires ont précisé que le programme d'Agriculture et Agroalimentaire Canada ne dédoublait pas les activités de la Société du crédit agricole puisque cette dernière n'offrait pas un programme identique. On se fait toujours servir de tels arguments. Une fois pour toutes, ce gouvernement comprendra-t-il que ce genre d'analyse ne tient pas debout? Regardons cela froidement. Puisque le programme semble être considéré valable par l'industrie, pourquoi la Société du crédit agricole n'utiliserait-elle pas ses propres ressources pour l'offrir?

La SCA possède les compétences pour le faire avec ses 760 employés et plus qui assurent le service à la clientèle à partir de six bureaux régionaux et de 101 bureaux de district et de campagne. Le portefeuille de prêts de la SCA comprend quelque 55 000 comptes qui sont évalués à 3,3 milliards de dollars.

C'est donc une analyse biaisée, malhonnête et fausse d'affirmer qu'il n'y a pas de chevauchement entre les activités d'Agriculture et Agroalimentaire Canada et la Société du crédit agricole. Celle-ci, je le répète, possède tout ce qu'il faut pour offrir le programme ailleurs qu'au Québec où la Société de financement agricole pourrait le faire.

Le fédéral parle de guichet unique par-ci, de guichet unique par-là, mais quand il s'agit de le rendre opérant, alors là, c'est une autre histoire.

Voici le tableau: vous avez un gouvernement qui prend une mesure tout à fait logique.

On sait qu'aux termes de la loi, lorsque la limite de 1,5 milliard sera atteinte, le gouvernement ne sera plus tenu de garantir les prêts consentis par les prêteurs. Ce qui mettra, bien sûr, fin à la possibilité d'accepter de nouveaux prêts dans le cadre de la Loi sur les prêts destinés aux améliorations agricoles et à la commercialisation selon la formule coopérative.


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(1625)

Nous convenons donc de la nécessité de modifier la loi afin d'augmenter la limite des prêts pour cinq ans, à trois milliards de dollars. On s'entend sur les avantages d'une telle mesure: le programme facilite l'accès au crédit des agriculteurs et à leurs coopératives de commercialisation pour une vaste gamme de projets visant l'amélioration agricole.

De plus, les emprunteurs bénéficient de taux d'intérêt avantageux et d'exigences moins rigoureuses quant à l'avoir propre. Le programme favorise les investissements dans les nouvelles machines et technologies ainsi que dans les entreprises agricoles sortant des sentiers battus, comme cela se fait de plus en plus dans mon comté où on retrouve, notamment, un élevage d'autruches. Jusque-là, on s'entend avec le gouvernement. Par contre, le tableau perd de son intérêt en raison de l'incapacité du gouvernement de se servir des ressources existantes et compétentes pour administrer le programme.

Nous avons démontré, et pas seulement aujourd'hui, que le Québec est le mieux placé pour identifier les secteurs en croissance de son économie et pour établir des politiques d'accès au crédit conformément aux stratégies de développement définies en concertation avec le milieu. Pourtant, avec sa loi sur les prêts destinés aux améliorations agricoles et à la commercialisation selon la formule coopérative, le fédéral vient concurrencer des programmes québécois équivalents.

Au Québec, la Société de financement agricole possède toute l'expertise requise pour administrer le programme. Ailleurs au Canada, là où la Société du crédit agricole possède des bureaux, cette dernière possède également les ressources adéquates pour offrir le programme. Nous voilà plutôt plongés dans le cercle vicieux des chevauchements; au revoir, la logique.

Le fédéral, malgré les compressions draconiennes qu'il vient de faire subir à sa fonction publique, ne rationalise pas ses activités de façon efficace. Il maintient encore et toujours des chevauchements inutiles au sein de son administration. Nous en avons encore aujourd'hui dénoncé un exemple. La population en subira les conséquences et nous disons: assez.

[Traduction]

M. Wayne Easter (Malpèque, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux d'appuyer le projet de loi modifiant la Loi sur les prêts destinés aux améliorations agricoles et à la commercialisation selon la formule coopérative.

Comme on l'a déjà dit, nous voulons modifier la loi de manière à hausser le plafond global d'indemnisation des prêteurs en vertu de la loi, le faisant passer de 1,5 milliard de dollars à 3 milliards de dollars. C'est un programme déjà fort populaire auprès des agriculteurs. En fait, j'ai moi-même acquis une grande expérience des lois sur le crédit agricole dans mes activités agricoles.

Par suite de cette demande, le plafond quinquennal actuel de 1,5 milliard de dollars est presque atteint. Le programme que constitue la Loi sur les prêts destinés aux améliorations agricoles et à la commercialisation selon la formule coopérative compte parmi les programmes agricoles les mieux acceptés par les agriculteurs, qui y ont abondamment recours.

Cette loi est un programme de garantie de prêt conçu pour accroître le crédit offert à des conditions raisonnables aux agriculteurs et aux coopératives de commercialisation appartenant à des agriculteurs. Elle facilite les investissements en matériel et en technologies nouvelles et couvre une vaste gamme de projets d'améliorations agricoles.

Je voudrais toutefois souligner que nous devrions faire preuve d'un peu de prudence et ne pas simplement accorder des garanties pour les banques. Si les établissements de crédit s'engagent, il faut aussi que les agriculteurs s'engagent. Nous ne voulons pas en arriver à la situation où les banques ont recours aux garanties même si ce n'est pas nécessaire pour consentir des prêts. L'objectif doit donc être d'injecter plus de capital dans le système et de venir en aide aux agriculteurs qui, autrement, auraient de la difficulté à obtenir du crédit.

(1630)

Parmi les améliorations pour lesquelles des prêts pourraient être consentis, on compte l'achat de matériel agricole, le défrichage, l'installation de systèmes d'irrigation ou de drainage, l'installation de clôtures, la construction ou la rénovation de bâtiments agricoles et l'achat de bétail ou de terres agricoles. Les prêts peuvent également être utilisés par des associations coopératives pour l'investissement dans la production à valeur ajoutée. Cela pourrait comprendre des installations pour la transformation, la distribution ou la commercialisation de produits agricoles, comme des usines d'empaquetage ou de lavage. Nous avons eu un nombre assez élevé de ce genre d'activités dans l'industrie de la pomme de terre de ma circonscription.

En outre, les prêts peuvent servir à des entreprises agricoles spéciales, comme la production organique. C'est là un secteur d'une très grande importance qui devrait connaître une forte croissance parce qu'il y a certainement un marché à développer pour les produits organiques.

Les agriculteurs biologiques ont parfois beaucoup de difficulté à obtenir du financement de la manière habituelle. C'est pourquoi le relèvement du plafond d'indemnisation devrait permettre à ces producteurs d'obtenir les fonds dont ils besoin pour leurs activités.

Il importe de mentionner que les effets environnementaux de ces projets sont pris en compte. Le processus d'évaluation environnementale est couramment utilisé pour les projets plus importants.

Grâce à ce programme, les agriculteurs bénéficient de taux d'intérêt plus avantageux que ceux qui sont normalement consentis; il s'agit de taux habituellement de 0,5 à 1 p. 100 inférieurs à ceux qui ont cours. Ils peuvent aussi emprunter avec un minimum de capitaux propres de 20 p. 100, ce qui est extrêmement important, notamment pour les jeunes agriculteurs qui débutent ou pour certaines entreprises agricoles plus risquées.

La loi facilite aussi l'accès au crédit dans les régions rurales, conférant un pouvoir d'investissement aux producteurs et aux coopératives de commercialisation. Elle renforce donc la production et la stabilité financière des régions rurales canadiennes.


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La loi encourage l'adaptation, la diversification et le développement des régions rurales et elle stimule la création d'emplois. Le programme est devenu de plus en plus important pour les prêteurs des régions rurales, comme les coopératives de crédit et les caisses populaires qui offrent du financement aux producteurs agricoles. L'Association des banquiers canadiens, la Centrale des caisses de crédit de la Saskatchewan et la Confédération des caisses populaires Desjardins sont toutes en faveur de l'augmentation proposée. La Fédération canadienne de l'agriculture et d'autres groupes importants ont aussi été consultés et appuient la modification proposée.

Le programme a permis au gouvernement d'appuyer à peu de frais les producteurs primaires et les industries en aval. De tout temps, les pertes nettes concernant les prêts consentis dans le cadre de ce programme n'ont été que de 1 p. 100. Tous les coûts supplémentaires occasionnés par la nouvelle loi seront compensés par une hausse des frais d'enregistrement payés par les producteurs et les coopératives de commercialisation bénéficiant du programme. Les intérêts des contribuables sont également bien servis. Les améliorations apportées en vertu du programme contribuent à renforcer l'économie canadienne et à réduire la dépendance par rapport aux subventions gouvernementales.

En conclusion, je demande aux députés d'appuyer le projet de loi C-75, qui hausse le plafond global des prêts pouvant être garantis. Nous continuerons de mettre le programme à la disposition des agriculteurs et des coopératives de commer-cialisation qui leur appartiennent. Nous appuierons ainsi l'une des industries qui contribue le plus à la richesse de notre pays, en permettant à des producteurs primaires d'avoir accès à du capital à des conditions raisonnables, de manière qu'ils puissent faire fonctionner une industrie prospère dont de nombreuses autres industries tirent leur richesse.

(1635)

M. Murray Calder (Wellington-Grey-Dufferin-Simcoe, Lib.): Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui pour parler en faveur du projet de loi C-75, Loi modifiant la Loi sur les prêts destinés aux améliorations agricoles et à la commercialisation selon la formule coopérative.

Je vais commencer par dire quelques mots sur l'importance du financement abordable pour les agriculteurs. Je me souviens d'un de mes premiers contacts avec les banques et je n'oublierai jamais comment, sans la Loi sur les prêts destinés aux améliorations agricoles, j'aurais été à la merci du monde capricieux de la finance. Il est fort possible que, sans la Loi sur les prêts destinés aux améliorations agricoles, non seulement moi mais beaucoup d'autres agriculteurs auraient été incapables de travailler de la même façon que nous le faisons aujourd'hui. Je voudrais faire quelques remarques à ce sujet.

En 1973, j'ai quitté la Stelco et je suis devenu agriculteur. À ce moment-là, j'ai obtenu un prêt destiné aux améliorations agricoles de 5 400 $ pour acheter un tracteur Massey-Ferguson 165 et une charrue à quatre sillons. Je sais que le député de Malpèque aimerait bien qu'on puisse encore faire de tels marchés dans le secteur agricole aujourd'hui, mais c'est impossible. Aujourd'hui, nous mettons en marché 360 000 poulets par année, soit plus d'un million de livres de volaille. Et j'ai encore mon tracteur Massey-Ferguson 165. C'est quelque chose qui me rappelle mes débuts dans le secteur agricole.

Une voix: Que vaut ce tracteur aujourd'hui?

M. Calder: Je crois qu'il vaut environ 7 000 $ ou 8 000 $. Je pourrais donc faire de l'argent si je le vendais. C'est un bien que je suis très fier de posséder.

Le programme vise à permettre aux agriculteurs et aux coopératives agricoles d'obtenir plus facilement du crédit à un taux d'intérêt raisonnable afin d'améliorer l'actif agricole, de renforcer la production privée et d'accroître la stabilité financière.

On a modifié cette loi en 1987 en portant de 100 000 $ à 250 000 $ le montant maximum des prêts non remboursés pour les emprunteurs, en prévoyant des prêts à taux fixe et des prêts de consolidation ou de refinancement des dettes, en élargissant la portée de la loi afin d'offrir des garanties de prêts pouvant aller jusqu'à 3 millions de dollars pour les coopératives de commercialisation appartenant à des agriculteurs et pour des projets de commercialisation, de transformation ou de distribution de produits à valeur ajoutée, et en exigeant des droits équivalant à 0,5 p. 100 du montant du prêt.

Depuis l'entrée en vigueur des modifications susmentionnées en février 1988, plus de 65 000 prêts d'une valeur totale de 1,5 milliard de dollars ont été consentis en vertu de la loi. Depuis 1990, plus de 55 000 prêts ont été consentis aux termes de cette loi. Il y a actuellement 10 prêts actifs à des coopératives de commercialisation de produits à valeur ajoutée totalisant 14,2 millions de dollars. Personnellement, je crois que la commercialisation de produits à valeur ajoutée est la voie de l'avenir. Ce secteur connaîtra une forte croissance au cours des années qui viennent.

L'an dernier, cette loi a permis de faciliter plus de 18 000 prêts totalisant plus de 475 millions de dollars. En 1994-1995, la moyenne des prêts s'établissait à 27 000 $ et, sur cinq ans, cette moyenne est de 22 000 $.

Au cours des 25 dernières années, les pertes nettes du programme ont été d'environ 1 p. 100 du total des prêts garantis. Actuellement, les emprunteurs paient deux types de frais en un versement chacun. Il y a tout d'abord les frais d'enregistrement du prêt, qui sont envoyés à Agriculture et Agroalimentaire Canada. Ces frais représentent 0,5 p. 100 du montant du prêt. Les deuxièmes sont des frais d'administration payés au prêteur. Ils représentent le montant inférieur de 0,5 p. 100 du montant du prêt ou de 250 $ sur les prêts de moins de 250 000 $ ou 0,1 p. 100 sur les prêts de 250 000 $ et plus.

Le taux d'intérêt maximal pouvant être exigé par les prêteurs est équivalent au taux préférentiel plus 1 p. 100, pour un prêt à taux variable, ou au taux préférentiel plus 1 p. 100 plus 0,25 p. 100 pour chaque année pour un prêt à terme. Par exemple, sur un prêt à terme de cinq ans, le taux d'intérêt serait le taux préférentiel plus 2,25 p. 100. Dans le cas d'un prêt de 27 000 $, les frais supplémentaires seraient d'environ 67 $. Depuis 1991, environ 683 prêteurs ruraux, comme des sociétés de crédit, ont été désignés prêteurs aux termes de la loi.

(1640)

Aux termes de la loi actuelle, dès que la limite quinquennale des garanties de prêt de 1,5 milliard de dollars aura été atteinte, le gouvernement ne pourra plus garantir les prêts consentis par les


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prêteurs. Cela rendrait tout nouveau prêt en vertu de la loi impossible. Par conséquent, il est essentiel de modifier la loi pour faire passer la limite des garanties de prêt à trois milliards de dollars.

J'ai expliqué aux députés quelle était pour moi l'importance du programme, mais je crains que les grandes banques ne soient pas du même avis que moi. Je ne pense pas que les banques aient sérieusement amélioré l'accès aux capitaux pour les agriculteurs. En fait, on a suggéré que les banques décourageaient le recours à ces emprunts au profit d'autres emprunts qui leur rapporteraient plus.

Plus d'efforts doivent être faits pour répondre aux besoins de crédit des agriculteurs. Comme les banques, les coopératives agricoles ont été lentes à financer les petites entreprises. Les banques ont néanmoins reconnu qu'elles pouvaient faire mieux en ce qui concerne les prêts au secteur agricole et ont pris un certain nombre de mesures pour améliorer la situation. Toutefois, les milieux agricoles nous font entendre que plus d'efforts sont nécessaires.

En tant que député libéral ontarien membre du groupe de travail fédéral sur l'accès des petites entreprises aux capitaux, j'ai entendu toute une série de témoignages indiquant que les banques sont indifférentes aux petites entreprises. En tant qu'agriculteur, j'étais tout à fait au courant que nombre des préoccupations des petites entreprises étaient les mêmes que celles du secteur agricole.

Bien qu'il soit difficile de documenter la validité de ce que chacun prétend, le nombre de plaintes montre que les relations avec les établissements bancaires ne sont pas faciles. J'espère que la situation va s'arranger à présent que nous avons l'attention des banques grâce à la levée de l'impôt provisoire sur le capital des grandes institutions de dépôt prévue dans le budget 1995 du ministre des Finances.

Le gouvernement s'efforcera avec les banques d'établir des points de référence appropriés pour les petites entreprises. Pour ma part, j'inclurais le secteur agricole dans la définition des petites entreprises. Nous avons promis dans le livre rouge de prendre des mesures afin d'accroître les capitaux disponibles dans les régions rurales. Nous tenons notre promesse avec le projet de loi C-75.

J'encourage tous les députés à manifester leur soutien à la communauté agricole en appuyant ce projet de loi.

M. Bernie Collins (Souris-Moose Mountain, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais demander à mon collègue d'Ontario s'il peut nous donner une idée des conséquences qu'aura, dans sa région, l'augmentation des garanties de prêt en vertu de la loi, lesquelles passent de 1,5 milliard à 3 milliards de dollars. Est-ce qu'il y a différents groupes agricoles qui seraient susceptibles d'utiliser ce financement? Comment le plafon-nement influerait-il sur ces groupes?

M. Calder: Monsieur le Président, il y a trois ou quatre semaines, j'étais dans la région de Collingwood. J'ai eu l'occasion d'aller là et de visiter une entreprise de condition-nement des pommes. Elle travaille à capacité. Les affaires vont vraiment bien. C'est une entreprise innovatrice qui presse les pommes pour faire du jus. Elle a aussi créé quelques combinaisons avec, par exemple, du jus de carottes. Elle en est au point où elle commence à exporter. Toutefois, elle est plus qu'à capacité et elle a besoin de capital pour s'agrandir.

Je voudrais dire au député que c'est exactement ce dont il parle. Cette usine existe depuis trois ans et elle doit s'agrandir. Elle a besoin de nouvelles machines et elle doit agrandir ses bâtiments. Il en résultera des créations d'emplois.

J'espère que cela répond à la question du député.

(1645)

Le vice-président: La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le vice-président: Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Une voix: Avec dissidence.

(La motion est adoptée, le projet de loi est lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.)

Le vice-président: Conformément à l'article 38 du Règlement, je dois faire connaître à la Chambre les questions qu'elle abordera à l'heure de l'ajournement, ce soir, à savoir: l'honorable député d'Ottawa-Ouest-La fonction publique.

* * *

LA LOI DE L'IMPÔT SUR LE REVENU

L'hon. Alfonso Gagliano (au nom du ministre des Finances, Lib.) propose: Que le projet de loi C-70, Loi modifiant la Loi de l'impôt sur le revenu, les Règles concernant l'application de l'impôt sur le revenu et des lois connexes, soit lu pour le deuxième fois et renvoyé à un comité.

M. David Walker (Winnipeg-Nord-Centre, Lib.): Monsieur le Président, je me réjouis de l'occasion qui m'est offerte de présenter le projet de loi C-70 à la Chambre pour qu'il soit lu pour la deuxième fois. C'est une mesure qui découle du processus budgétaire de l'année dernière, soit le budget présenté en février 1994.

Je voudrais expliquer le processus que nous suivons lorsqu'il s'agit de faire adopter une mesure législative pareille. Lorsque le ministre a prononcé le discours du budget, suit immédiatement, comme tout le monde le sait, un débat, après quoi on procède au vote. On présente ensuite la loi sur les mesures budgétaires. Cela consiste en plusieurs motions et plusieurs activités faisant appel à divers ministères. Le tout a débuté l'année dernière, puis repris par la Chambre des communes au mois de mai et au début de juin et par le Sénat en juin. Tout était terminé avant le 1er juillet.

Puis, aux yeux du public, nous nous sommes attaqués au budget pour 1995. Toutefois, nous n'en avions pas encore terminé avec le budget de 1994. Aujourd'hui, nous poursuivons le travail entrepris dans le cadre du budget de l'année dernière.


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L'automne dernier, nous avons constaté que la Loi de l'impôt sur le revenu devait être modifiée, ce qui constitue le deuxième aspect de tout processus budgétaire. Pour récapituler, disons qu'il y a d'abord les changements apportés aux activités ministérielles, y compris celles touchant à la Loi sur l'assurance-chômage. Puis, c'est le tour de la Loi de l'impôt sur le revenu. La Chambre s'est déjà penchée sur les propositions de modification à la Loi de l'impôt sur le revenu découlant du processus budgétaire de l'année dernière. Ces propositions de modification ont été étudiées à la Chambre des communes en novembre dernier, puis au comité au mois de décembre. Nous avons reçu quelques témoins. Nous avons examiné certaines modifications proposées par l'opposition et décidé d'aller de l'avant avec le projet de loi sous sa forme existante. On l'a ensuite soumis à la Chambre, puis au Sénat, et cette loi a maintenant été promulguée.

Du fait du nombre très important de modifications que nous avons apportées, nous avons divisé les modifications à la Loi de l'impôt sur le revenu en deux sections distinctes cette fois-ci. Ceci est la seconde section. Le projet de loi C-70 représente le second ensemble de modifications découlant du budget qu'on a présenté en février 1994.

Un certain nombre de modifications de nature technique touchent la situation, en ce qui concerne l'impôt sur le revenu, des gens d'affaires et des entreprises. En résumé, ces modifications mettent en oeuvre certaines mesures annoncées dans le budget du 22 février 1994 de même que d'autres mesures annoncées par le gouvernement en 1994.

Ces mesures concernent, premièrement, la remise de dettes. On oblige le débiteur qui a obtenu une remise de dette à appliquer le montant impayé en réduction du montant de ses pertes aux fins de l'impôt et du coût fiscal de biens dont il est propriétaire; les particuliers débiteurs dont le revenu dépasse 40 000 $ et les sociétés débitrices qui ne sont pas en faillite ou insolvables sont tenus d'ajouter à leur revenu tout solde non appliqué.

Deuxièmement, nous modifions certaines des règles en ce qui concerne le traitement accordé aux sociétés étrangères affiliées. On accroît les catégories de revenus de sociétés étrangères affiliées que les actionnaires canadiens de celles-ci sont tenus de déclarer comme revenu.

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On répond ainsi à un point de vue largement partagé par les Canadiens et dont ils nous ont certes fait part à la fin des années 80 et au début des années 90, lorsque nous étions dans l'opposition. Les Canadiens voyaient que les sociétés étaient en mesure de transférer de l'argent à des sociétés étrangères affiliées et d'éviter ainsi de payer des impôts à certains endroits, lorsqu'elles considéraient qu'ils étaient trop élevés. Dans notre premier budget, celui de février 1994, nous avons pris la mesure très progressiste d'élargir les règles et les façons nous donnant la possibilité de nous occuper des sociétés étrangères affiliées.

Troisièmement, la question des institutions financières. On oblige maintenant les institutions financières à déclarer, au titre du revenu plutôt qu'au titre du capital, les bénéfices et les pertes sur les titres détenus dans le cours normal de leur entreprise et à déclarer les bénéfices et les pertes sur certains titres à la valeur du marché.

J'ai participé très activement aux discussions initiales avec l'industrie lorsque nous avons annoncé les règles. Je suis très heureux de dire que les relations entre ces institutions financières et le gouvernement se sont beaucoup améliorées grâce à de nombreuses discussions.

L'industrie a jugé, au départ, que ces mesures fiscales étaient trop sévères et ne tenaient pas compte de certains faits historiques, surtout dans le secteur des assurances. Nous avons déclaré de façon énergique que nous devions veiller à ce qu'on comprenne bien ce secteur. Nous avons tenu des discussions non seulement à Ottawa, mais dans tout le pays. Nous avons écouté des représentants de nos associations et rencontré des cadres supérieurs d'entreprises. Ils ont dit que, si nous ne procédions pas avec prudence, leurs titres ne seraient plus évalués d'après les capitaux mais d'après les recettes, ce qui nuirait considérablement à leur entreprise.

L'industrie des assurances est très importante dans notre pays. Nous voulons être sûrs que les 140 sociétés d'assurances et plus qui oeuvrent dans notre pays sont stables et ne rien faire qui puisse nuire à leur capital de base ou à leur revenu de base.

Après plusieurs semaines de discussions, des modifications ont été proposées de part et d'autre. Je pense que tous reconnaîtront que les règles qui ont été présentées à la Chambre il y a quelques semaines et que l'on complète actuellement, à l'étape de la deuxième lecture, sont justes pour tout le monde.

Nous ne devons pas oublier que l'objectif du gouvernement du Canada est de faire en sorte que toutes les entreprises sont imposées correctement et pleinement et paient leur juste part, comme le souhaitent les Canadiens. L'industrie des assurances a très bien répondu à cela. Les sociétés d'assurances sont prêtes à payer leur juste part et estiment aujourd'hui que les règles et les règlements que nous sommes en train d'élaborer conviennent mieux à leurs activités.

Je profite de l'occasion pour remercier publiquement les représentants de l'industrie des assurances qui m'ont longuement expliqué la nature de leur entreprise. L'an dernier, c'était la première année que je travaillais dans le secteur des finances pour le compte du gouvernement du Canada. Une telle situation exige beaucoup de compréhension de la part des gens du secteur privé, qui ont dû m'expliquer comment ils fonctionnaient et dans quelle mesure les nouveaux règlements ou les nouveaux régimes fiscaux nuisaient à leur entreprise. Il n'y avait pas d'hostilité de leur part. Je les remercie beaucoup du temps qu'ils m'ont consacré pour que je comprenne bien leur situation.

Quatrièmement, les arrangements de services funéraires. Nous prévoyons ici une exonération des intérêts gagnés sur les sommes payées d'avance dans le cadre d'arrangements de services funéraires conclus par des particuliers en vue d'assurer le règlement de leurs frais de funérailles et de sépulture. Il s'agit là d'un ensemble de lois fédérales et provinciales, de règles et de règlements applicables aux personnes qui prennent des arrangements de sépulture à l'avance.

Ces fonds sont protégés grâce à des contrats de fiducie au niveau provincial. Cependant, en raison du coût élevé des biens-fonds, surtout dans les grandes zones métropolitaines de notre pays, nous constatons que les limites qui étaient envisagées au départ ne suffisent pas. Ce changement vise les personnes qui prennent des arrangements à l'avance. À notre avis, nous ne souffrons aucunement d'un fardeau financier superflu, mais


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nous devons examiner la réalité du coût élevé des biens-fonds. Nous ne voulions pas, à cause de règles fiscales injustes, mettre dans une situation précaire les contribuables canadiens, l'industrie ou les organismes sans but lucratif de ce secteur. Ces modifications portent donc sur ces questions.

(1655)

Cinquièmement, nous permettons aux fonds communs immobiliers inscrits en bourse d'être considérés comme des fiducies de fonds commun de placement aux fins de l'impôt.

Sixièmement, nous traitons des réorganisations d'organismes de placement collectif. Cela permettra aux sociétés d'investis-sement à capital variable de devenir, en franchise d'impôt, des fiducies de fonds commun de placement et permettra les fusions libres d'impôt de fiducies de fonds commun de placement.

Les députés savent que le secteur des fonds communs est un de ceux qui croissent le plus rapidement en Amérique du Nord. Sur le plan de la réglementation, nous avons fait tous les efforts nécessaires pour suivre l'évolution de ce secteur.

Avec cette Loi de l'impôt sur le revenu, de même que plusieurs autres initiatives que nous prenons dans le domaine des titres, nous visons à rendre notre régime fiscal équitable pour les titulaires de fonds communs et conforme aux pratiques maintenant établies. Si ce secteur continue d'évoluer aussi rapidement qu'il l'a fait, nous devrons apporter d'autres chan-gements au fur et à mesure.

Septièmement, nous traitons des oppositions et des appels, ce qui oblige les grandes sociétés à préciser dans leurs avis d'opposition à des cotisations d'impôt les questions à trancher et le montant du redressement demandé.

La Chambre connaît peut-être la pratique qui avait cours dans le passé, où les services du contentieux et de l'impôt des sociétés faisaient régulièrement parvenir à Revenu Canada un avis d'appel dans lequel ils s'opposaient aux impôts établis par le ministère. En faisant valoir une opposition générale, comme ces sociétés l'ont fait dans le passé, elles pouvaient attendre que des cas précis se présentent et, une fois le cas inscrit, elle pouvaient réexaminer leurs livres pour voir si le cas s'y appliquait. En conséquence, le gouvernement du Canada assume théoriquement chaque année une obligation très lourde dans le secteur de l'impôt sur le revenu des sociétés.

Nous cherchons à limiter désormais cette obligation en insistant pour que, dans un délai précis qui donnerait, à notre avis, amplement le temps à une société d'examiner sa cotisation, cette dernière présente un avis d'appel décrivant précisément l'objet de l'appel. On n'accepte plus l'appel général contre une cotisation, la société doit préciser exactement ce à quoi elle s'oppose et, le cas échéant, intenter des poursuites. Revenu Canada et le gouvernement canadien pourront ainsi aller de l'avant sans s'inquiéter des innombrables cas qui sont devant les tribunaux.

La huitième modification porte sur le prêt de valeurs mobilières. Elle permet aux courtiers en valeurs mobilières de déduire les deux tiers des indemnités versées, dans le cadre de mécanismes de prêt de valeurs mobilières, au titre des dividendes payables sur des titres empruntés.

Ce projet de loi renferme donc un éventail de mesures assez large. Il complète le premier discours du budget, soit le projet de loi sur le budget qui a été déposé l'an dernier, ainsi que les modifications à la Loi de l'impôt sur le revenu, qui ont été débattues à l'automne de 1994 et dont les discussions ont pris fin au printemps de 1995. Ce projet de loi présente des mesures précises sur des questions très condensées, notamment les services funéraires. Il établit certains principes d'équité. Les gouvernement en parlent beaucoup, mais n'agissent pas.

À en juger d'après les mesures que nous avons proposées, en ce qui a trait par exemple aux oppositions et aux appels ainsi qu'à la possibilité de contester continuellement les décisions en matière d'impôt, et en ce qui a trait à l'impôt payable par les sociétés étrangères affiliées, on peut dire que le ministre des Finances a accompli un excellent travail. Il a affirmé très souvent que l'un des principes que notre gouvernement ne cesserait de poursuivre était d'injecter davantage d'équité dans notre régime fiscal. Ces mesures à elles seules serviront de points de référence de la nouvelle équité de la Loi de l'impôt sur le revenu, tant pour les sociétés que pour les particuliers.

(1700)

Lorsque nous avons apporté d'importantes modifications touchant un secteur comme celui des assurances, non seulement nous l'avons fait avec la ferme intention de rendre les choses plus équitables pour tout le secteur, mais nous avons aussi tenu compte de la critique et des critiques. Nous avons volontiers discuté avec ces derniers de même qu'avec les dirigeants des différentes sociétés et avec les associations, et nous leur avons donné raison quand ils avaient bien fait valoir leur point de vue.

Pour avoir une bonne législation fiscale, il faut avoir la ferme intention d'être équitables; devant des erreurs évidentes, nous ne pouvons pas nous entêter et tenir mordicus à une position qui se révèle désavantageuse pour les entreprises. J'ai moi-même beaucoup appris au sujet du secteur des assurances grâce à ces mesures et j'espère que nous pourrons continuer à avoir de ces discussions dans d'autres secteurs.

Le gouvernement se réjouit de pouvoir élargir le débat, de faire adopter le projet de loi C-70 en deuxième lecture et de faire apporter des modifications à la Loi de l'impôt sur le revenu. Nous accueillons volontiers les observations de l'opposition et sa critique touchant ce que nous essayons de faire, de même que ses suggestions pour rendre la loi plus équitable à l'avenir.

Nous nous réjouissons également de pouvoir entendre des témoins aux comités de la Chambre des communes et plus tard du Sénat, de sorte que nous puissions connaître et prendre au sérieux les points de vue des spécialistes en la matière, et de sorte que le gouvernement puisse continuer à peaufiner la Loi de l'impôt sur le revenu pour la rendre plus juste et équitable aux yeux de plus de Canadiens et à y apporter au fil des années d'autres modifications pour faire en sorte que tous les Canadiens, aussi bien les particuliers que les sociétés, paient leur juste part d'impôt et trouvent en même temps le régime équitable d'après la façon dont ils sont eux-mêmes traités et celle dont les autres le sont.

[Français]

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe-Bagot, BQ): Monsieur le Président, je remercie le gouvernement de nous donner l'occasion, par l'entremise du projet de loi C-70, de parler, en fait, non seulement des dispositions précises qui sont contenues


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dans ce projet de loi qui met en application certaines mesures mises de l'avant lors du Budget de l'année dernière du ministre des Finances, mais qui aussi nous permet d'aborder toute la question de la révision de la fiscalité canadienne.

Je vous dis d'entrée de jeu que l'opposition officielle s'opposera au projet de loi C-70 présenté en deuxième lecture, non pas à cause des mesures particulières, mais en raison du maigre bilan du gouvernement libéral en matière d'échap-patoires fiscales et de révision de la fiscalité que le Bloc québécois lui demande depuis son entrée en fonction, il y a tout près de 15 mois.

J'entendais tout à l'heure le secrétaire d'État nous parler de révision de la fiscalité, révision profonde, d'ouverture de ce gouvernement face aux iniquités et aux injustices qu'on retrouve dans la politique fiscale canadienne, et sous des couverts de souci de justice sociale et d'équité, le gouvernement n'a strictement rien fait pour colmater un tant soit peu les brèches de la fiscalité canadienne depuis qu'il est en fonction.

Tout cela est contraire à ce qu'on disait dans le livre rouge, dans le «red book» qu'on nous a brandi pendant des mois. Vous voyez maintenant qu'on ne le montre plus, le livre rouge, parce qu'on a honte, on n'est plus capable de faire la concordance entre les engagements électoraux au niveau de la fiscalité ou ailleurs et les actions de ce gouvernement. Justement, le livre rouge contenait un tas de prises de position du Parti libéral en faveur de la justice fiscale, en faveur du fait que dans ce grand pays qui se dit être soucieux de l'équité d'un océan à l'autre, comme se plaît à le répéter le premier ministre, on retrouve des situations d'iniquité totale.

D'ailleurs, le livre rouge en faisait mention. On disait qu'il y avait des entreprises qui ne payaient pas un sou d'impôt depuis des années à cause du laxisme du gouvernement précédent et du fait que ce gouvernement précédent, supposément, avait des amis dans les grandes entreprises, chose que le Parti libéral n'avait pas. Le Parti libéral aussi avait dénoncé le fait que depuis 1984, la fiscalité des particuliers avait progressé à un rythme de beaucoup supérieur à la fiscalité des entreprises et voulait corriger, dès les deux premières années de son mandat, si ma mémoire est bonne, étant donné les discours que le premier ministre tenait à cette occasion, voulait corriger, dans les deux premières années du mandat, toutes ces iniquités et ces injustices fiscales.

Depuis qu'ils sont en fonction, ils n'ont pas respecté leur parole. Ils n'ont pas respecté les engagements électoraux qu'ils avaient pourtant pris pour se faire élire à la tête de ce gouver-nement.

(1705)

Je vous donnerai quelques exemples d'iniquité au niveau de la fiscalité. On parle des fiducies familiales. Ce n'est pas pour rien, ce n'est pas par plaisir qu'on répète depuis 15 mois, depuis notre entrée en fonction, que dans le régime des fiducies familiales on retrouve des injustices face à l'ensemble des contribuables québécois et canadiens. Ce n'est pas par plaisir qu'on talonne le gouvernement à peu près une fois par deux jours sur cette question des fiducies familiales, depuis décembre 1993. C'est parce qu'il y a vraiment une iniquité dans ce régime, une iniquité face au fait qu'on demande à l'ensemble des Canadiens et des Canadiennes de se serrer la ceinture, de se la serrer à double tour parce que les finances publiques sont dans un piètre état et qu'en même temps, on permet aux plus riches familles canadiennes d'accumuler des gains de capital année après année sans payer un cent d'impôt, et cela sur une période pouvant aller jusqu'à 80 années.

Chez les fiscalistes même c'est partagé. Il y a des fiscalistes qui travaillent pour les très riches familles canadiennes, il y en d'autres qui travaillent un peu plus pour l'intérêt public général. Parmi ceux qui travaillent pour l'intérêt public général, depuis deux ans, depuis trois ans, même depuis la révision il y a quatre ans et demi de ce régime des fiducies familiales, de la règle de 21 ans, en particulier, on a dénoncé chez les fiscalistes le maintien d'une telle mesure et le report de cet impôt sur les gains en capital sur une période pouvant atteindre 80 années.

Nous-mêmes, comme opposition officielle, nous en avons fait un cheval de bataille, d'autant plus que nous avons eu droit à des données parcellaires, des données partielles provenant du secteur privé, de certaines universités canadiennes qui nous disaient qu'il y avait possiblement des centaines de millions, sinon des milliards à récupérer en abolissant certains privilèges liés aux fiducies familiales et qui sont devenues des puissants instruments de planification fiscale pour les plus riches familles canadiennes ou les plus riches particuliers et entreprises du Canada.

On ne parle pas du principe même des fiducies familiales qui peuvent avoir du bon. On ne parle pas du principe des fiducies familiales qui peut s'appliquer, par exemple, à des familles où on retrouve un enfant handicapé, peu importe le handicap, qui va devoir bénéficier de soins dans le futur en l'absence de parents, peut-être qui seront décédés à ce moment-là. On ne met pas de côté l'ensemble des principes, la gestion de ces fiducies, mais ce qu'on remet en question depuis notre arrivée, et même avant, en pleine campagne électorale, c'est le fait qu'on puisse utiliser ce principe de report ad vitam aeternam du paiement des impôts sur les gains en capital alors qu'on est millionnaire. Cela, on ne l'accepte pas.

Qu'est-ce que nous a présenté le ministre des Finances lors de son dernier Budget? Il a voulu bien paraître. Il a dit: J'en ai un peu assez que l'opposition officielle me talonne sur un cas si flagrant d'injustice et d'iniquité sur le plan fiscal, que je vais mentionner l'expression «fiducie familiale» dans le discours sur le Budget pour qu'ils se la ferment, à l'avenir. Il a oublié qu'on avait des oreille pour entendre, des yeux pour lire et un cerveau pour analyser.

Lorsqu'il nous a présenté sa mesure en disant qu'il éliminait les bénéfices fiscaux des fiducies familiales en 1999, il nous a pris pour ce qu'on n'était pas. Il a pris les Québécois et les Canadiens pour ce qu'ils n'étaient pas non plus, en sachant pertinemment qu'en reportant à 1999 la nécessaire réforme uniquement au niveau des fiducies familiales, on avertissait quatre ans à l'avance les riches familles canadiennes pour les préparer quatre ans à l'avance à retirer l'ensemble des centaines de millions sinon des milliards qu'ils ont de placés en fiducie et de les placer dans d'autres véhicules financiers, dans d'autres outils puissants de planification fiscale parce que par ailleurs, on n'a absolument rien réglé à tous les trous de la fiscalité dont peuvent bénéficier ces riches familles et toutes les grandes entreprises canadiennes.

C'est cela le souci de justice sociale, d'équité sur le plan de la fiscalité d'un océan à l'autre? C'est cela qu'on nous présente comme étant ce souci? Ce gouvernement n'a qu'un souci, celui


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de bien paraître. Peu importe le contenu, c'est de bien paraître. Le dernier Budget, comme le budget précédent et le projet de loi C-70 que nous avons devant nous, nous donnent ces indices de cette propension du gouvernement à vouloir faire du maquillage, à vouloir nous présenter des réformes factices à la fiscalité, alors qu'il n'en est rien.

(1710)

Regardez aussi les conventions fiscales signées avec des pays considérés comme des paradis fiscaux. On est fatigants, nous de l'opposition, parce qu'on talonne le gouvernement à cet égard. On le talonne tellement, depuis même la campagne électorale, que dès le Budget de l'année dernière, le Budget de 1994-1995, le ministre des Finances a encore eu le goût qu'on se la ferme, qu'on cesse de dénoncer des iniquités ou les trous de la fiscalité contenus dans ces conventions fiscales par un exercice de théâtre.

Ce n'est pas pour rien, qu'à ce moment-là, le Globe and Mail qualifiait le ministre des Finances de stand-up comic de la politique fiscale canadienne. Il présentait les choses de façon tellement théâtrale, mais avec un manque de fond tellement évident, qu'à la fin de la lecture du discours, quelques minutes après qu'il eût été prononcé, on pouvait voir qu'il n'y avait rien de changer au niveau des conventions fiscales. Même le vérificateur général du Canada disait, peu de temps après le dépôt du Budget, qu'à part quelques petites mesures de correction administrative pour permettre à des entreprises qui veulent bénéficier des conventions fiscales avec des pays considérés comme des paradis fiscaux, rien n'avait changé au niveau de la fiscalité à cet égard.

Qu'est-ce que cela veut dire qu'il n'y a rien de changé? Cela veut dire qu'encore une fois, à ce moment-là, encore cette année, l'année prochaine, dans deux ans, dans trois ans, dans dix ans, la fiscalité canadienne va encore prévoir ce genre d'arrangements qui, en soi, ne sont pas mauvais, mais qui, signés avec des pays qui sont considérés comme des véritables passoires où transitent des milliards de dollars canadiens, des milliards de dollars américains, des dizaines de milliards de dollars européens et japonais, là, cela fait toute la différence.

Vous savez qu'en signant des conventions fiscales avec ces pays, il y a des entreprises canadiennes qui peuvent se permettre d'ouvrir des filiales bidon à l'étranger, qui peuvent se permettre de ne pas faire d'activités économiques à l'étranger, ne pas payer ou ne presque pas payer un sou d'impôt à l'étranger et de rapatrier des pertes qu'ils n'ont même pas effectuées à l'étranger pour les déduire des profits d'opérations qu'ils font en territoire canadien et pour éviter justement de payer leur dû au fisc canadien.

On ne parle pas des PME, des petites et moyennes entreprises qui, elles, font leur devoir sur le plan corporation, qui, elles, paient leur juste part d'impôt pour leur grande majorité. Il s'agit plutôt de grandes entreprises qui sont capables de bénéficier de ces trous de la fiscalité canadienne qui n'ont pas été corrigés, ni l'année dernière ni cette année par le Budget du ministre des Finances, par le gouvernement libéral qui se dit soucieux de la justice fiscale.

On retrouve peut-être, à partir de ces conventions fiscales signées avec 16 pays considérés comme des paradis fiscaux, la clé ou du moins une partie de l'amélioration de la position du gouvernement fédéral au niveau de la fiscalité canadienne. Pourtant, le ministre des Finances persiste à dire que ces conventions fiscales sont des bonnes conventions fiscales, qu'il n'y a pas de problèmes avec ces conventions-là et que dans une ère de mondialisation et d'internationalisation des échanges, il est normal d'avoir des conventions fiscales.

On a toujours dit que c'était normal d'avoir des conventions fiscales, que c'était normal que si les entreprises développaient des filiales à l'étranger et qu'elles payaient un montant d'impôt à peu près similaire à celui qu'elles auraient payé, normalement, en territoire canadien, que ce genre de conventions fiscales soient signées pour éviter la double imposition et pour permettre que les entreprises canadiennes évoluent dans un système de production qui est équitable sur le plan de la fiscalité et qui permet la création d'emplois, etc.

Mais le fait de signer des conventions avec des paradis fiscaux qui, de l'avis même du vérificateur général, n'ont pas d'allure, là, on ne marche plus. Le discours de l'internationalisation et de la mondialisation ne tient plus lorsqu'on met en péril et lorsqu'on exacerbe plutôt la situation de la fiscalité canadienne en ne faisant pas payer un sou ou pas grand-chose d'impôt à des grandes entreprises qui bénéficient de ces trous de la fiscalité.

Le ministère des Finances ne publie plus ce genre de données parce que c'est trop honteux. Mais en 1991, dernière année disponible pour ce genre de données, comme on dit dans le jargon des statisticiens, dernière année disponible avant que le gouvernement précédent et le gouvernement actuel aient honte de ces résultats, il n'y avait pas moins de 77 000 entreprises canadiennes qui n'avaient pas payé un sou d'impôt. Et là encore, on disait: «Ça dépend du cycle de production des produits des entreprises.» On peut comprendre cela.

(1715)

On peut comprendre qu'une entreprise fasse du développement de produits ou de services pendant une, deux ou trois années, peut-être, avant de se rentabiliser et également avant de se permettre de prendre une part de marché ou de maintenir une part de ce marché pour un produit x. Mais quand le cycle de production dure cinq, sept, dix ou douze ans pendant lequel ces entreprises ne paient pas un cent d'impôt, qu'elles réalisent des profits tous les ans, à l'instar des banques qui ont fait 4,8 milliards de profit l'année dernière en ne payant presque pas d'impôt, il y a un problème à quelque part.

Quand je vois le CN faire des profits et payer son administrateur 350 000 $ par année en plus de lui accorder un prêt sans intérêt de 400 000 $ pour l'achat d'une maison à Westmount et qu'en même temps on agit de façon cavalière, inhumaine et de façon je vous dirais barbare ou presque dans le conflit du rail, là aussi je me questionne sur les intentions de ce gouvernement par rapport aux engagements électoraux qu'il avait pris en ce qui concerne l'équité, la justice sociale, le respect des droits et la justice en général. Il y a un problème à quelque part. En passant, je vous dirais que le CN non plus n'a pas payé d'impôt.

Il y a un problème dans le domaine de la fiscalité et ces quelques mesures-malgré que quelques-unes soient valables du point de vue de l'opposition-sont tellement timides, étant donné l'ampleur des trous de la fiscalité canadienne, étant donné aussi que nous ne sommes plus les seuls à dire que la fiscalité souffre d'une révision qui n'a pas eu lieu depuis 35 ans, qu'on ne


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peut pas être en accord et qu'on ne peut pas encenser le gouve-rnement sur des petites mesures comme celles-là.

Quand j'entends des gens comme M. Séguin, par exemple, ancien ministre du Revenu du Québec, dire que depuis 30 ans tout ce qu'on a fait dans la fiscalité fédérale ou à peu près-je ne le cite pas directement mais de mémoire-c'est qu'on a ajouté des éléments de la fiscalité, on a fait des petites «réformettes» dans la fiscalité mais que, fondamentalement, tout ce qu'on a fait c'est du «top loading», c'est-à-dire qu'on a ajouté des mesures aux mesures existantes, ce qui fait que la fiscalité canadienne est rendue un monstre.

Quand on arrive en tant que nouveau député, en tant que porte-parole des finances en particulier, on veut toujours mettre le paquet et connaître à fond tous nos dossiers. Cela se poursuit par après, mais je vous dirais que, les premiers mois, pour connaître davantage les dossiers, pour s'imprégner des dossiers, on fait venir beaucoup de documentation. Je vous lance un défi, monsieur le Président. Essayez de lire tous les documents sur la politique fiscale canadienne. Essayez de voir, avec toutes les notes interprétatives, tous les projets de loi, tous les règlements qui s'y rattachent, tous les petits sous-règlements qui se sont ajoutés. Essayez de lire cela en l'espace de dix ans et je vais vous féliciter si vous êtes capable le faire.

Aux États-Unis, on avait le même problème, sous l'ère de M. Reagan. Tout le monde se rappelle qu'un des chevaux de bataille de M. Reagan était de réformer et de simplifier la fiscalité, lui qui était plus en faveur des entreprises que des particuliers, mais l'intention était là. Il a réformé la fiscalité américaine, ce qui a résulté en une simplification. On peut toujours se questionner sur l'équité, on peut toujours se questionner sur la propension à favoriser plutôt les entreprises et les très hauts revenus que les faibles ou moyens revenus aux États-Unis, mais le résultat est là, la fiscalité est simplifiée. Les gens peuvent voir justement quelles sont les échelles de taxation. Les gens peuvent voir également où se trouvent les iniquités du régime.

Nous, ici, devons faire appel à des spécialistes ou à des bons représentants de l'opposition officielle pour creuser la fiscalité et présenter à la population canadienne le vrai visage caché de cette fiscalité. Présenter à la population canadienne, par exemple, que, depuis 50 ans, où 50 p. 100 de l'assiette fiscale fédérale était constituée de taxes et d'impôts payés par les particuliers et 50 p. 100 de l'assiette fiscale fédérale était payée par les entreprises et qu'aujourd'hui on retrouve à peu près 17 p. 100 payé par les entreprises et le reste par les particuliers. Il faut le dire aux gens parce qu'ils ne le sauront pas des représentants de leur gouvernement, puisqu'on cache ces choses. On cache, comme le Parti libéral l'a fait lors de son premier mandat.

Je me rappelle le premier mandat où les iniquités entre les particuliers et les entreprises ont commencé à apparaître.

(1720)

Déjà, les amis du Parti libéral étaient soignés lors du premier mandat du Parti libéral du Canada et cela se poursuit. Il est facile pour tout le monde de voir, de réaliser, qu'en mettant la liste des gros donateurs à la caisse du Parti libéral du Canada à côté des politiques fiscales qui ne sont pas réformées parce qu'elles font l'affaire des très grandes sociétés, c'est facile de voir le recoupage qu'il y a à faire.

Quand la Banque royale, par exemple, donne à la caisse du Parti libéral du Canada plus de 45 000 $ par année, on comprend pourquoi, lors du dernier Budget, les banques canadiennes ont eu une petite augmentation de 150 millions de dollars d'impôt répartie sur deux ans, alors qu'elles ont réalisé près de cinq milliards de profits. On comprend qu'elles soient les principales bénéficiaires aussi des programmes de développement informatique offerts par le gouvernement fédéral. On comprend aussi, quand on regarde les principales grosses maisons qui gèrent les fiducies familiales, qui donnent entre 35 000 $ et 67 000 $ à la caisse du Parti libéral, on voit pourquoi on leur accorde jusqu'en 1999 pour s'adapter à la nouvelle réalité des fiducies familiales. Je trouve cela. . .

Une voix: Incroyable!

M. Loubier: Oui, c'est incroyable. On m'enlève les mots de la bouche. Je trouve cela incroyable qu'on nous présente, comme le secrétaire d'État l'a fait tout à l'heure, le projet de loi C-70 comme étant une grande réforme de la fiscalité, alors que tout ce qu'on fait, c'est ajouter quelques petits éléments positifs, on en ajoute quelques négatifs, encore une fois pour «complexifier» davantage la fiscalité.

Il est beaucoup plus facile pour ce gouvernement de sabrer dans les programmes sociaux, de sabrer dans la Caisse du fonds d'assurance-chômage, d'y sabrer outrageusement, parce que ces gens-là, le gouvernement fédéral, ne contribuent plus à la Caisse de l'assurance-chômage. Pourtant, il ira y chercher, au cours des trois prochaines années, autour de sept milliards de dollars.

Il ira chercher aussi, au cours des trois prochaines années, de 1994-1995 à 1997-1998, sur le dos des provinces, ce qu'il ne peut pas réaliser, en colmatant les brèches de la fiscalité canadienne parce qu'on veut ménager les riches amis du Parti ou les grandes entreprises qui sont aussi les grandes contributrices à la caisse du Parti libéral. On va aller chercher dans les transferts aux provinces 12,3 milliards. On transfère les problèmes de mauvaise gestion des finances publiques fédérales dans la cour des provinces.

On transfère une décote possible des grandes maisons de courtage dans la cour des provinces, malgré que, comme Moody's nous l'a démontré, le gouvernement fédéral, même s'il est représenté par plusieurs «stand-up comics» des finances publiques canadiennes, n'échappe pas à une analyse sérieuse de la situation des finances publiques, du manque de volonté politique de réformer, de redresser ces finances et la fiscalité en particulier, et de revoir l'ensemble des dépenses poste par poste, y compris les dépenses fiscales comme nous le lui demandons depuis notre entrée en fonction.

Moody's a compris que ce n'est pas avec de petites «réformettes» comme celles qu'on nous présente, même s'il y a environ 225 pages là-dedans, petites «réformettes» qui «complexifient» davantage la fiscalité qu'on en arrivera un jour à reprendre le contrôle sur l'ensemble du régime, sur l'ensemble de la fiscalité et sur les revenus présents et futurs du gouvernement.

Moody's a compris une chose, et on peut bien citer Moody's, qu'il y avait des mesures timides dans ce Budget. Il y avait des mesures qui permettaient au ministre des Finances de rencontrer


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son objectif en 1997-1998, c'est-à-dire 3 p. 100 du PIB pour le déficit à 25 milliards, mais après 1997-1998, il n'y a plus rien. C'est le vide, c'est le néant. On ne sait plus où on s'en va avec ces gens-là. Moody's a compris cela.

Moody's a compris que malgré tous les sacrifices, malgré toutes les coupures sur le dos des chômeurs, des personnes du troisième âge, des étudiants, des provinces, on n'arriverait pas à reprendre le dessus dans ce régime, on n'arriverait pas à moyen terme-et ce sont les termes de Moody's-à voir de quelle façon on pourrait contrôler le déficit et encore moins la dette accumulée du gouvernement fédéral.

(1725)

J'ai l'impression que Moody's sait calculer sur plus que quelques mois ou sur plus qu'une année. Moody's a fait le calcul, probablement celui qu'on a fait, que dans cinq ans, malgré tous ces sacrifices, malgré qu'on présente le dernier Budget et celui de l'année dernière, dont est issu le projet de loi C-70, comme des étapes importantes, majeures pour reprendre le dessus et pour en arriver à réduire l'incidence de la dette fédérale sur l'économie canadienne, Moody's a compris que dans cinq ans, la dette fédérale accumulée dépasserait les 750 milliards de dollars, pour avoisiner plutôt les 800 milliards. Moody's a compris.

Moody's a compris, parce que Moody's sait calculer et Moody's sait que rien, à moyen terme, encore moins à long terme, ne nous permet d'espérer qu'un jour ce régime, avec des «réformettes», avec des coups de mouchoir dans la fiscalité canadienne, rien ne nous permet de voir le jour où on reprendra un contrôle sur les finances publiques, où on rétablira une justice fiscale et où on permettra à ce régime de bien fonctionner. Moody's a compris, et malgré ce que le ministre des Affaires intergouvernementales a pu dire à la suite du rapport de Moody's, malgré ce que le premier ministre nous a répondu aujourd'hui, à la période des questions, nous disant que le Canada aurait le taux de croissance du Produit intérieur brut le plus élevé des pays industrialisés, malgré tout ça, Moody's a compris plusieurs choses de la conjoncture économique canadienne.

Premièrement, si cette année le Canada a la plus grosse croissance économique des pays industrialisés, c'est parce que le Canada part de loin, parce que le Canada est entré le premier dans la récession, provoquée à peu près de toute pièce par la politique monétaire de la Banque du Canada, qui a conduit le ministre des Finances et qui nous a conduits, justement, dans une des pires récessions que le Canada a connues. Moody's a compris que, quand un pays entre rapidement en récession avant les autres, il est normal que la reprise, surtout la reprise technique qui est supposée être là depuis trois ans, Moody's a compris que ce bond au niveau de la croissance économique était temporaire.

On est content que ça soit ça, parce que ça fait longtemps qu'on l'attend, cette reprise plus consistante, et on espère que pour cette année, cela va se solder en véritable création d'emplois de qualité pour l'ensemble des Québécois et des Canadiens. Mais par contre, Moody's dit: félicitations. Nous aussi on félicite la croissance économique qui n'est pas provoquée par ce gouvernement, même s'il se pète les bretelles à tous les jours pour dire que c'est à cause de lui.

Elle est provoquée par un cycle économique normal, où le ralentissement et le creux ont été plus longs que d'habitude, je vous dirais à cause de l'ajustement structurel, de la question de la mondialisation et de la nouvelle donne internationale mais qui, dans les faits, est tout à fait normale, étant donné qu'on était dans la cave et qu'on tente de se maintenir au rez-de-chaussée au cours de la prochaine année.

Moody's dit et rajoute, et nous partageons cette analyse, qu'aussitôt qu'un ralentissement va se faire sentir, au Canada, et on parle de fin 1996, on ne parle pas dans dix ans, aussitôt que ce ralentissement va se faire sentir, en partie lié au ralentissement de l'économie américaine qui est prévu dès l'année prochaine, là, ça va être grave et c'est pour cela que Moody's dit qu'à moyen terme, on n'a pas de contrôle sur le déficit et encore moins sur la dette.

Pourquoi? Parce que si, dans un an et demi, on revient dans un cycle de récession, cela veut dire que les recettes fiscales vont diminuer, cela veut dire que la confiance des investisseurs va diminuer aussi, parce que les problèmes de déficit du gouvernement fédéral, dès 1997-1998, risquent d'être plus grands, commandant des coupures encore plus draconiennes que celles que le ministre des Finances nous a fait endurer depuis deux ans, qui ne règlent rien.

Cela veut dire que les investisseurs étrangers en particulier, et c'est à eux que s'adressait Moody's, vont se poser de graves questions, à ce moment, sur l'avenir de la fédération canadienne, l'avenir du régime, si on n'en est pas sorti au Québec. Ils vont se poser de sérieuses questions là-dessus. Les investisseurs étrangers vont se poser de sérieuses questions sur la sécurité qu'ils peuvent avoir en détenant des titres canadiens, parce que quand la prochaine récession va frapper, avec une dette qui, à ce moment-là, va probablement avoisiner les 650 milliards de dollars, on parle de 1997, là, ça va faire mal, parce que les besoins de financement vont être là, vont être de plus en plus grands pour financer cette dette. L'épargne canadienne étant insuffisante, les marchés étrangers devenant un réservoir nécessaire pour le gouvernement canadien et les taux d'intérêt qu'on paiera à ce moment-là, se rappelant la décote de Moody's, les Québécois comme les Canadiens vont y goûter.

(1730)

D'où vient tout cela? Cela vient justement du fait que le ministre des Finances, au lieu de faire du théâtre, au lieu de regarder uniquement la situation à court terme, aurait dû voir plus loin que le bout de son nez ou plus loin que le prochain horizon des prochaines élections fédérales, ou plus loin que le fait qu'on soit en campagne référendaire au Québec. Il aurait dû faire preuve de responsabilité en ne faisant pas uniquement du maquillage, mais en procédant comme on le lui demandait à un véritable examen de l'ensemble des dépenses publiques, l'ensemble des dépenses fiscales aussi, les trous de la fiscalité qu'il n'a pas bouchés encore même après presque deux ans de règne libéral. C'est de là que ça vient.

On ne parle pas du court terme. Les milieux financiers ont regardé le court terme. Tout est bien beau, l'année prochaine, ce le sera moins et dans deux ans, encore bien moins. Moody's a regardé plus loin que cela. Je respecte cette boîte-là, parce qu'elle a eu le courage, même si elle savait qu'elle subirait des pressions politiques. Vous savez que les maisons de cotation se font rencontrer régulièrement par des lobbyistes. Les lobbyistes ne viennent pas juste sur la colline parlementaire. Il y a des


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lobbyistes de la colline parlementaire qui vont rencontrer ces gens-là et même les agences viennent directement rencontrer le ministre des Finances. Ils ont vu clair dans la situation.

Ceux qui se plaisent aujourd'hui à dire que la décote de Moody's n'a aucun effet à court terme, je trouve que ces gens-là aussi manquent de responsabilité, parce qu'ils disent à ce gouvernement, et ce sont des gens, des institutions financières importantes au Québec comme au Canada qui sont quelquefois collés aussi sur le Parti libéral pour quelques-uns d'entre eux, mais qui, pour d'autres, on peut respecter leur intrégrité. Mais je trouve qu'ils sont irresponsables par contre de dire que tout est beau, que les milieux financiers avaient déjà enregistré la décote de Moody's, qu'on avait averti le gouvernement fédéral le 11 février dernier que la décote s'en viendrait peut-être et de dire que, bon, tout est correct, qu'on peut continuer, que la croissance économique est là.

Je trouve qu'ils sont irresponsables de dire cela. Cela, c'est en dehors de toute partisanerie, en dehors du débat constitutionnel aussi. Il y a des gens qui sont irresponsables de dire que cela va bien. On encense ce gouvernement alors qu'il n'a aucunement mis en branle la réforme structurelle, les changements structurels profonds que requiert le désastre de ce régime-là. Et dans deux ans, ces mêmes gens-là, je les ai enregistrés, je vais garder cela dans mes archives, dans deux ans, ces gens-là diront: «Il y a deux ans, le gouvernement fédéral aurait dû prendre des mesures plus efficaces, plus corsées pour reprendre le dessus sur les finances publiques. Il aurait dû revoir la fiscalité il y a deux ans. On ne serait pas pris dans ce fouillis monumental de la fiscalité. On ne serait pas pris aussi avec une récession qui nous fait doublement mal parce qu'en plus d'être une récession normale, par ailleurs les investisseurs, ceux qui détiennent des titres canadiens ont perdu confiance au régime, ont perdu confiance en la capacité du gouvernement canadien de gérer ses finances publiques.» Ces gens vont dire exactement le contraire dans deux ans de ce qu'ils ont dit la semaine dernière et même encore en fin de semaine sur l'impact de la décote de Moody's.

Je demanderais à ces gens, s'ils ont encore le sens des responsabilités, de rappeler au gouvernement fédéral qu'il ne doit pas prendre de vacances à court terme. Il doit mettre en branle ce qu'on lui demande depuis qu'il est arrivé au pouvoir, c'est-à-dire revoir l'ensemble de tout ce qui se fait ici en attendant qu'au Québec, on fasse le choix de sortir d'un régime qui, de notre avis, n'a pas d'avenir. On nous fait la preuve, depuis deux ans, que ce régime, en l'absence de réforme, uniquement sur la fiscalité, non seulement sur le plan constitutionnel, que ce régime-là est irréformable, est inflexible.

Même sur le plan de la fiscalité, on ne peut pas bouger. On ne peut pas bouger à cause peut-être de la grosseur de la machine, à cause de la grosseur de la tâche, mais surtout parce qu'il y a des intérêts qui sont autres, j'en suis persuadé, que ceux de l'ensemble des citoyens québécois et canadiens qui sont défendus par ce gouvernement. L'absence de prise de position claire en faveur d'une équité fiscale, en faveur d'une révision complète de la fiscalité, en faveur de la mise sur pied d'un comité parlementaire, un comité d'élus pour réviser tout cela nous témoigne qu'il faut sortir, pour employer une expression souvent utilisée de ce temps-ci «au plus sacrant» du régime. Je parle aux Québécoises et aux Québécois. Il faut sortir avant de se faire imposer des choix.

(1735)

On n'a qu'à regarder l'histoire de l'Argentine, du Mexique. On dira que les pays de l'Amérique latine ne sont pas comparables, mais ils le sont. Au début des années 1970, l'Argentine était vue comme un pays d'avenir, un pays avec des richesses immenses, la même chose pour le Brésil. Rappelez-vous, jusqu'au début des années 1980, on parlait du miracle brésilien. Il y avait plein de possibilités.

Le Mexique, c'est pareil. Quand on a créé Pemex et le reste, c'était l'enthousiasme, c'était la richesse et il n'y avait pas de problèmes de dette aussi graves que ceux qu'on connaît ici au Canada. Et ces pays-là ont sombré. Ils se sont fait imposer par le Fonds monétaire international les mesures qu'ils auraient dû prendre eux-mêmes, mais avec un humanisme, avec une méthode graduelle, pour en arriver à faire mal le moins possible aux particuliers et aux entreprises. Ils se sont fait imposer des coupures draconiennes.

Je me souviens du Mexique, en 1984, avant son adhésion au GATT qui est devenu l'organisation mondiale du commerce, à qui on a dit qu'il devrait couper de 50 p. 100 les dépenses en éducation. D'un seul coup, 50 p. 100 des dépenses en éducation, 30 p. 100 des dépenses en santé, 45 p. 100 des dépenses en développement rural. Quand on parle de la ruralité, au Mexique, c'est quelque chose. Ce n'est pas comparable à la ruralité canadienne. Ils se sont fait imposer ces choses.

Si aujourd'hui, à 548 milliards de dette accumulée le régime fédéral est une catastrophe, de l'avis de Moody's en particulier, mais de bien d'autres gens qui, avant le dernier Budget, étaient du même avis que Moody's et que l'opposition officielle, imaginez dans cinq ans, quand cela frôlera ou même dépassera, peut-être, les 800 milliards. Et en absence d'inflation, 800 milliards dans cinq ans plutôt que 548 milliards, cela sera un fichu problème.

Tout ça pour vous dire qu'on a honte de ce qui nous est présenté comme seule mesure de réforme, de «réformette», de quelques petits aspects, de quelques petits règlements de la fiscalité canadienne, alors qu'on devrait changer au complet cette fiscalité si les Canadiens veulent bien continuer avec ce régime. Qu'on nous présente cela comme étant les besoins qu'éprouve le régime fiscal canadien en termes de réformes, on ne marche plus.

Je vais donc suggérer à mes collègues de l'opposition officielle de voter contre le projet de loi C-70 parce qu'à notre avis, au niveau des échappatoires fiscales, au niveau de la correction des injustices à la fiscalité canadienne, au niveau aussi des sacrifices qu'il peut imposer à certaines grandes entreprises qui ne font pas leur devoir au niveau de la fiscalité et certaines très riches familles canadiennes aussi, ce n'est pas suffisant pour nous. Nous réclamons beaucoup plus depuis 15 mois. Nous réclamons une vraie réforme, nous réclamons que le livre rouge soit appliqué à la réforme de la fiscalité et que la vraie


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justice fiscale se fasse sentir dans ce pays avant que les Québécois en sortent.

[Traduction]

M. John Williams (St-Albert, Réf.): Monsieur le Président, le député bloquiste qui a pris la parole avant moi a parlé de l'importance de réformer tout le système et de la honte qu'il éprouve parce que nous n'y apportons que quelques retouches.

Cela m'a rappelé certains commentaires que j'ai lus ces derniers jours dans le journal sur la façon dont les bloquistes estimaient pouvoir réformer tout le système. On voit maintenant qu'ils reculent. Le premier ministre du Québec croit maintenant que la séparation pure et simple ne sera pas acceptée. Il veut donc diluer son message et parler d'une option beaucoup moins draconienne que la séparation systématique. À l'instar du chef du Bloc québécois, il croit maintenant qu'une forme d'association économique serait la meilleure solution. C'est là où ils en sont en ce moment.

Le député qui a pris la parole avant moi a dit souhaiter une réforme complète du régime fiscal, mais je vois là un parallèle avec la réforme complète du système politique qu'il envisage pour le Québec et le Canada et qui pourrait fort bien ne pas aller très loin non plus. C'est à tout le moins ce que nous espérons.

Cela ne veut pas dire que le projet de loi dont nous sommes saisis soit une mesure législative extraordinaire. Premièrement, il a fallu un an avant que le projet de loi C-70 soit seulement présenté la Chambre. En effet, il fait suite au budget qui a été déposé il y a non pas six semaines, mais bien un an et six semaines. Les fonctionnaires ont eu besoin d'une année complète avant de présenter ces 200 pages que presque tous les Canadiens qualifieraient de charabia inintelligible. Cela dépasse nettement l'entendement de la plupart des gens.

(1740)

C'est ainsi que nous administrons notre régime fiscal de nos jours. La Loi de l'impôt sur le revenu est devenue incompréhensible non seulement pour la plupart des Canadiens, mais elle l'est même devenue à bien des égards pour les comptables. Elle est incompréhensible au même titre que le système de justice décrit par le juge en chef de la Cour suprême la semaine dernière; celui-ci a alors dit que le système de justice allait crouler sous son propre poids parce qu'il est devenu complexe au point où même les avocats n'arrivent pas à le comprendre.

On peut en dire autant de la Loi de l'impôt sur le revenu. Elle est devenue tellement complexe en raison de ses ajouts, de ses suppressions, de ses modifications et de ses changements que même les comptables ne s'y retrouvent pas. Nous la rendons ensuite encore plus complexe. Les comptables sont sensés être capables de comprendre tout cela avant même l'adoption d'un projet de loi qui vient seulement d'être présenté, même si le ministre des Finances avait fait état de ses intentions il y a plus d'un an. Les fonctionnaires de Revenu Canada traitent les déclarations d'impôt de cette année en se fondant sur le contenu du projet de loi. Cependant, il n'a été déposé que le 16 février 1995. Les gens ont produit leurs déclarations d'impôt avant que la mesure législative soit présentée, c'est-à-dire avant même que les renseignements devant leur servir existent.

Comment pouvons-nous nous attendre à ce que les comptables puissent conseiller avec compétence et efficacité leurs clients sur la manière de remplir leurs déclarations d'impôt s'ils doivent se baser sur une déclaration du ministre des Finances qui n'a été confirmée par aucune mesure législative et qui ne le sera peut-être jamais? La Chambre des communes n'a pas encore voté. J'espère que ce vote n'aura pas lieu seulement pour la forme.

Le Parlement tient les cordons de la bourse publique. La Chambre donne à l'exécutif le pouvoir de générer des recettes. L'exécutif a déjà généré ces recettes et il nous demande maintenant s'il peut le faire. Que se passera-t-il si nous disons non? Peut-être devrait-on dire non. Je crois que le gouvernement fait bien peu de cas du Parlement.

À mon sens, l'exécutif insulte le Parlement en levant un impôt, en fixant des règles, des peines et des conditions en fonction de la supposition qu'il présentera un jour une mesure législative pour officialiser tout cela. Il demandera ensuite au Parlement de voter en disant qu'il est allé de l'avant en supposant que nous allions donner notre assentiment. Quelle étrange façon de gouverner un pays! Peut-être cela n'est-il que révélateur du genre de bourbier dans lequel notre dette de 515 milliards de dollars nous plonge jusqu'au cou?

Après avoir été seulement trois ans en exercice, le gouvernement aura ajouté 100 milliards de dollars à la dette. Après ces trois années, il n'aura réduit le déficit que de 15 milliards de dollars, le faisant passer de 40 à 25 milliards.

Devant une crise financière, le gradualisme du gouvernement ne suffit pas. À un taux d'intérêt annuel de 8 p. 100, ces 100 milliards nous obligeront à donner chaque année huit milliards de dollars aux prêteurs. Cela signifie que des impôts payés par les travailleurs canadiens seront transférés à des banques des États-Unis, de l'Allemagne et du Japon. Cet argent, les contribuables canadiens n'en verront plus la couleur.

Nous payons les prêteurs et ce sont eux qui nous dictent la façon d'administrer le Canada. Nous sommes dans une situation désespérée et des plus déplorables. Le gouvernement libéral semble totalement incapable de comprendre toute la gravité de la situation.

Nous, les réformistes, demandons d'équilibrer le budget, de ne pas se soucier des 200 pages de la Loi de l'impôt sur le revenu qui ne traitent que de menue monnaie, mais de s'occuper de simplification et d'équilibre budgétaire. Nous avons affirmé que cela pouvait se faire en trois ans.

Le gouvernement a des recettes d'environ 120 milliards de dollars par année. En trois ans, il aura reçu trois fois 120 milliards de dollars, soit 360 milliards, mais, pendant la même période, il n'aura trouvé que 15 milliards de dollars de compressions à réaliser. Est-ce draconien? Est-ce vraiment s'attaquer à la question et dire que nous devons faire le travail tout de suite? J'en doute. Je ne pense pas et mes collègues non plus.

(1745)

Il est honteux que les parlementaires chargés d'administrer ce pays estiment que ce gradualisme soit la seule façon de s'attaquer à


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la question, alors que le pays se noie dans une vague de dettes. Le service de la dette est maintenant la plus grande dépense du gouvernement, puisqu'il atteint 50 milliards par année.

Si les Canadiens avaient su, il y a 20 ans, que le gouvernement libéral et que le premier ministre de l'époque ouvriraient les vannes et laisseraient l'argent s'écouler comme de l'eau, auraient-ils voté pour un tel gouvernement? Est-ce que les Canadiens, aujourd'hui, voteraient pour l'actuel gouvernement, sachant que 50 milliards par année sont consacrés à payer l'intérêt sur les sommes empruntées pour payer les excès du passé et la façon dont les gouvernements antérieurs ont essayé d'acheter le vote des contribuables avec leur argent? Nous payons actuellement 1 500 $ par homme, femme et enfant rien qu'en intérêts sur la dette.

Le jour où nous aurons un budget équilibré, pour chaque dollar d'impôt que nous percevrons, nous ne pourrons donner que 60c. en services. Le reste ira aux créanciers étrangers. Ce n'est pas une bonne affaire. Si vous payez un dollar et que vous n'obtenez que 60c. en échange, quel genre d'affaire est-ce là? Qui va au magasin avec un dollar en espérant rapporter 60c. de marchandises?

Ils diront au gouvernement qu'il n'aura pas de deuxième mandat parce que, de toute évidence, il ne sait pas comment régler le problème. Rappelez-vous que les députés de la majorité sont ceux qui, au cours de la dernière campagne électorale se pavanaient partout dans le pays en disant: «Faites-nous confiance, nous allons éliminer la TPS.»

M. Mills (Broadview-Greenwood): Nous allons le faire.

M. Williams: Ils vont le faire. Ils le feront peut-être le jour où les poules auront des dents.

Ils ont dit dans le livre rouge qu'ils allaient éliminer la TPS. Ils n'en ont toujours pas parlé. Cela n'a pas encore été mentionné. Quand avez-vous entendu pour la dernière fois un député de la majorité libérale se lever et dire qu'ils allaient éliminer la TPS? C'est une de ces choses qu'ils espèrent que l'on oubliera. Ils ont déchiré cette page du livre rouge qui en a maintenant une de moins. C'est une promesse qu'ils ont opportunément escamotée.

Ce qui contrarie aussi les Canadiens, c'est qu'on leur avait promis que la TPS servirait à réduire la dette. Est-ce que le déficit a diminué? Est-ce que la dette a diminué depuis que la TPS a été introduite?

M. Grubel: Non.

M. Williams: Non, absolument pas. Non seulement la dette n'a pas été réduite, mais elle ne cesse d'augmenter et nous croulons toujours sous le poids des paiements d'intérêt que nous ne pouvons plus acquitter. Le gouvernement a fait des promesses qu'il n'est pas en mesure de tenir dans l'espoir que les Canadiens les portent au pouvoir. Et les Canadiens l'ont élu à tort car nous nous rendons compte maintenant que le gouvernement ne va pas honorer sa promesse d'abolir la TPS.

À tout le moins le Parti réformiste a eu l'honnêteté de dire qu'il éliminerait la TPS une fois que le budget serait équilibré. Commençons par le plus difficile.

M. Jordan: Le Parti réformiste ne se mouille pas en parlant de la sorte.

M. Williams: Attelons-nous d'abord à la difficile tâche d'équilibrer le budget, puis nous nous occuperons d'allégement fiscal. Tel est l'engagement que nous avons pris. Nous avons dit que les temps seraient durs. Nous allons devoir réduire les dépenses. Mais réduire les dépenses, ça voulait dire octroyer moins d'argent aux Canadiens. Nous n'avons promis à aucun Canadien d'alléger son fardeau fiscal. Nous pensions que c'était injuste. Nous avons dit qu'il y avait de l'espoir. Passons aux actes! Une fois la tâche accomplie, nous pourrons promettre l'élimination progressive de la TPS.

Des collègues d'en face ont parcouru le pays en disant: «Nous allons abolir la TPS si vous votez pour nous.» Eh bien, les Canadiens ont bel et bien voté pour eux, mais ils attendent toujours. L'ennui, la mauvaise nouvelle, c'est que les Canadiens vont devoir encore patienter encore longtemps avant que le gouvernement n'honore sa promesse.

(1750)

Notre crédit s'en va à la dérive. L'agence de cotation Moody's a abaissé notre cote de crédit. Que va-t-il advenir? Nous devons maintenant payer des taux d'intérêt plus élevés parce que notre crédit bat de l'aile. Il s'ensuit que les entreprises voient leurs taux d'intérêt augmenter, qu'il en coûte plus cher au gouvernement pour emprunter et qu'on exige du contribuable canadien des impôts plus exorbitants encore.

Le gouvernement est incapable d'administrer les affaires du pays.Moody's a abaissé notre cote de crédit et cette décision se fera sentir des années durant. Comment pourrons-nous retrouver notre cote AAA?

Le Canada est un des grands pays du monde. Il possède de fabuleuses réserves de ressources naturelles. Nous avons des hydrocarbures et les champs de blé des Prairies, nous pouvons compter sur l'hydroélectricité, de grandes forêts et des minéraux, mais tout cela est disparu, car nous nous sommes adressés à la banque et avons tout donné en garantie pour emprunter de l'argent afin d'acheter davantage de voix. Nous vivons aujourd'hui dans l'un des plus merveilleux pays du monde. Nous avons des surplus de ressources naturelles. Notre pays offre de grands débouchés. Nous sommes le paradis pour les gens du monde entier qui ne peuvent que rêver d'un pays comme le nôtre. Tous ceux qui veulent venir au Canada pour prospérer grâce à leur travail acharné, ont la possibilité de le faire. C'était là le grand rêve canadien: les gens pouvaient venir ici en toute liberté, avec espoir, et compter sur des débouchés. Des millions l'ont fait. Ils ont peuplé notre pays et ils l'ont bâti pour voir ensuite tout cela s'effondrer sous le poids de la dette accumulée par des gouvernements qui s'inquiètent moins des Canadiens que de leurs propres intérêts.


11709

Le projet de loi de 200 pages renferme de nombreuses dispositions fiscales tout à fait incompréhensibles pour de nombreux Canadiens. Permettez-moi de m'arrêter sur quelques-unes d'entre elles.

Le gouvernement a affirmé ne pas vouloir accroître les impôts, mais d'une certaine façon, il élargit l'assiette fiscale pour faire payer un plus grand nombre de contribuables encore. Même si les taux d'imposition n'augmentent pas, le gouvernement fait tout en son pouvoir pour veiller à ce que davantage de gens paient des impôts. C'est le fondement du projet de loi C-70.

Le gouvernement dit vouloir faire le ménage dans les dispositions sur la remise de dettes. Cette remise s'applique lorsqu'une entreprise ou un particulier éprouve de graves problèmes financiers. Supposons qu'une personne possède un immeuble d'habitation dont la valeur diminue, car il n'y a pas de locataires. Les loyers ne sont pas suffisants pour payer l'hypothèque et la société des prêts hypothécaires saisit alors l'immeuble. Cette personne a perdu son investissement, mais le ministre des Finances veut sa part du gâteau. Cette personne a subi un grave échec. Cela pourrait s'appliquer à un Canadien qui possédait un bien locatif, une maison ou encore une entreprise, en fait à toute personne qui, pour une raison ou une autre, a vu sa situation financière se détériorer et a dû s'adresser à un prêteur pour obtenir une remise de dettes. Cependant, le ministère du Revenu lui rappelle qu'auparavant, il lui faut verser l'argent qu'il lui doit.

Cette personne a donc une dette envers le ministère du Revenu alors que sa situation financière se dégrade plutôt que de s'améliorer. J'ai toujours pensé que c'était un impôt sur le revenu. Je suppose que non, car le ministre des Finances croit de son devoir de venir prendre de l'argent dans les poches mêmes de chefs d'entreprise dont la société fait faillite.

(1755)

Qu'en est-il de certaines autres situations comme l'imposition du revenu des filiales de sociétés étrangères. Je sais qu'il arrive parfois que des entreprises essaient de réduire le plus possible les impôts qu'elles ont à verser. Cependant, là encore, on accroît les circonstances dans lesquelles le revenu tiré de biens-un revenu passif par opposition à un revenu actif ou d'entreprise-des filiales de sociétés étrangères n'est pas imposable au Canada.

Nous essayons d'élargir l'assiette fiscale le plus possible. Cela s'applique maintenant à l'étranger et on veut ainsi faire en sorte que chaque sou gagné dans le monde et pas seulement au Canada n'échappe pas au ministre des Finances et à ses bureaucrates qui semblent aller partout pour obtenir tout l'impôt sur le revenu possible dans le but de financer notre dette, les intérêts sur cette dernière, etc., c'est-à-dire tout ce qui détruit notre pays.

Il y a ensuite les institutions financières et les courtiers en valeurs mobilières. Nous avons maintenant modifié les règles qui les concernent également pour en accroître la portée et faire en sorte ainsi de percevoir davantage d'impôts.

Nous avons toujours cru qu'un dollar gagné était un dollar imposable. Nous ne sommes pas en désaccord avec cette idéologie de base, mais maintenant, nous nous apercevons que même l'argent que nous n'avons pas gagné est imposable. Ces gens devront dorénavant payer de l'impôt sur le revenu sur leurs actions comme si elles avaient été vendues, alors qu'ils les détiennent encore. À présent, les gens vont devoir payer de l'impôt comme s'ils les avaient vendues.

Nous avons ici une situation où une personne gère son argent, l'investit et est considérée comme un négociant en valeurs. Ses fonds sont totalement investis. Cette personne fait de bonnes affaires et ses actions augmentent. Elle n'en vend aucune parce qu'elle trouve qu'elles constituent des investissements valables. Elle constate, le 30 avril, qu'elle a une grosse facture d'impôt à payer même si elle n'a pas touché un cent parce que le ministre des Finances veut élargir l'assiette fiscale pour s'emparer du plus d'argent possible car il a désespérément besoin d'argent. Comme il a désespérément besoin d'argent, il se sent entièrement libre d'aller puiser dans les poches de tout le monde. Le fait que les gens aient ou non des problèmes de liquidités ne l'intéresse pas. C'est le moindre de ses soucis.

Prenons la personne qui va avoir des impôts et une dette à payer plus des intérêts si elle n'a pas l'argent nécessaire parce que les actions qu'elle détient et continue de détenir ont pris de la valeur et qu'elle ne les a pas vendues. Cette personne n'a pas d'argent. Elle n'a réalisé aucun gain, mais pourtant, elle a une charge fiscale. Les députés ne pensent-ils pas que c'est aller un peu trop loin? C'est ce que je pense.

Comment allons-nous encourager les investissements si chaque fois qu'une personne gagne un dollar, avant même avant qu'elle ne touche ce dollar, le fisc lui dit qu'elle lui doit de l'argent et que, si elle ne paie pas tout de suite, il va lui demander de l'intérêt et lui imposer des pénalités?

M. Mills (Broadview-Grenwood): Quelle est la solution?

M. Williams: La solution est très claire: remettons de l'ordre dans nos finances pour que nous puissions gérer notre trésorerie et laisser les entreprises et les Canadiens gérer leur liquidités. Faisons-les payer l'impôt quand ils ont touché leur argent. Rappelons-nous que seuls les dollars gagnés sont imposables. Je n'ai pas dit que les dollars non gagnés étaient imposables. C'est un important bond en avant du gouvernement dans un nouveau secteur d'imposition sur lequel nous ne pouvons vraiment pas fermer les yeux.

Non seulement ça, mais il y a apparence de compensation. Le gouvernement dit: «Si vos actions sont à la baisse, nous vous autoriserons à déclarer leur valeur marchande. Si vous accusez une perte ou quelques gains, dont l'un à la hausse et l'autre à la baisse, vous pourrez payer l'impôt sur le gain net.»

(1800)

Cette formule est acceptable dans un contexte inflationniste ou en période de croissance économique puisque, dans l'ensemble, la situation est à la hausse. Le gouvernement encaissera des recettes fiscales accrues en période faste, comme celle que nous connaissons actuellement. C'est certainement pour cette raison que le ministre des Finances a présenté ce projet de loi.


11710

Nous finirons par nous retrouver en récession. C'est inévitable car les choses se sont toujours passées ainsi et les économistes reconnaîtront certainement que ce sera malheureusement le cas tôt ou tard et probablement plus tôt que tard. Lorsque la récession surviendra, alors que tous ces titres auront été imposés sur leur valeur marchande, on sait qu'ils auront tendance à perdre de leur valeur. Leurs détenteurs demanderont alors des remboursements d'impôt qui viendront éroder encore davantage les recettes fiscales du gouvernement, au moment même où il aura le plus besoin d'argent.

La solution pour le gouvernement est de ne pas compter sur des recettes fiscales provenant de revenus à venir. Voilà la solution. Le gouvernement ne devrait pas se placer dans une situation qui aurait pour effet d'accroître l'instabilité de ses recettes fiscales.

N'importe quelle entreprise ou n'importe quel gouvernement devrait savoir que le plus important est d'avoir des revenus stables. Le projet de loi vise à accroître les recettes à court terme du gouvernement lorsque l'économie se porte bien, mais il ne fait aucun doute que, lorsque l'économie ralentira, les recettes fiscales baisseront au moment même où le gouvernement aura le plus besoin d'argent.

Le projet de loi comporte aussi des dispositions mineures, notamment en ce qui concerne les arrangements funéraires, un sujet dont la plupart des gens ne se préoccupent sans doute pas beaucoup. Le projet de loi C-70 permet au contribuable de placer 15 000 $ dans un fonds de fiducie en prévision des arrangements de services funéraires après son décès.

Je suis certain que les Canadiens moyens ont cet argent en poche et qu'ils s'empressent en ce moment même d'investir 15 000 $ dans un fonds de fiducie, non seulement pour être sûr d'avoir des funérailles décentes le moment venu, mais aussi pour pouvoir reporter l'impôt sur leur revenu.

Malheureusement, le Canadien moyen ne peut se permettre aujourd'hui de déposer 15 000 $ dans un fonds de fiducie pour s'assurer des funérailles convenables, mais les nantis le peuvent. On fait encore une concession aux Canadiens aisés en disant: «Bien sûr, tu peux protéger ton revenu. Dépose simplement 15 000 $ dans un fonds de fiducie pour t'assurer des funérailles convenables.» Grâce à ce montant plus les intérêts, les jeunes cadres des grandes villes vont vraiment pouvoir se payer de belles funérailles.

Je devrais peut-être acquérir des actions dans des salons funéraires. Ce sont des entreprises qui ne se tirent pas mal d'affaires. Je n'y avais pas pensé, mais il n'est jamais trop tard pour bien faire. Elles vont peut-être s'enrichir encore. Des funérailles de 15 000 $ s'imposeront peut-être à la place des cérémonies plus sobres qui conviendront à ceux qui possèdent moins d'argent. On ne sait jamais.

Comment se fait-il qu'en ces temps si durs, le ministre des Finances permet aux nantis de mettre 15 000 $ de côté plus les intérêts, en plus de leurs revenus, pour qu'ils n'aient plus de souci à se faire à ce sujet? Cette petite échappatoire vient d'apparaître, alors que le gouvernement a promis de les éliminer.

Les solutions exigent que nous soyons justes pour tous les Canadiens. Cette règle doit prévaloir; nous devons être justes, et nous devons veiller à ce qu'un petit groupe de gens qui ont déjà accès au ministériels et aux ministres, n'aient pas droit à un privilège spécial.

(1805)

Nous devons être équitables envers tous les Canadiens. Si le Canadien moyen ne peut se permettre de mettre 15 000 $ dans un fonds de fiducie en prévision de ses propres funérailles, je ne pense que les nantis devraient pouvoir le faire. S'ils sont riches, ils peuvent dépenser quelques dollars pour se faire enterrer quand le temps viendra.

Il y a des fiducies de placements immobiliers. Ces derniers temps, le marché immobilier-notamment celui des immeubles à bureaux- ne va pas trop bien. On a persuadé un trop grand nombre de Canadiens d'investir dans ces fonds communs et on a fait grimper les prix des immeubles à bureaux et autres immeubles dans les grandes villes comme Montréal et Toronto en s'imaginant que ces petits investisseurs allaient réaliser de gros bénéfices.

Or, qu'a-t-on constaté? La valeur des actions des fonds communs a chuté parce que trop de monde y avait souscrit. Les riches ont pris l'argent et se sont enfuis, en laissant le pauvre petit investisseur avec un édifice vide. Comme il y a perdu sa chemise, on a maintenant apporté quelques modifications à la fiscalité des fonds communs immobiliers pour permettre de transformer ces placements en REER.

On incite encore une fois les Canadiens, par des moyens artificiels, à investir dans l'immobilier. Dans cinq ou dix ans, quand le marché s'effondrera de nouveau, l'affaire leur restera sur les bras tandis que certains se tireront fort bien d'affaire. Je doute que ce seront les petits investisseurs.

Pendant le congé, à Edmonton, un immeuble à bureaux de neuf étages, libre d'hypothèque, a été cédé pour 1 $. Il n'y avait pas suffisamment de locataires pour payer les taxes. Les propriétaires perdaient 250 000 $ par année. J'ai lu ça dans le Edmonton Journal. L'immeuble a changé de mains pour 1 $. Il était libre de toute hypothèque. D'après l'évaluateur municipal, il valait plus de 2,5 millions de dollars, mais il a été cédé pour 1 $. S'il avait appartenu à un fonds commun immobilier, quelle part de ce dollar les investisseurs auraient-ils reçu? Rien.

Nous devons être prudents quand nous offrons ces stimulants fiscaux aux petits et moyens investisseurs. Quand nous offrons ces incitations artificielles, nous créons une demande qui ne devrait pas exister. Les gens entrent sur le marché, et la valeur des actions augmente. Nous avons entendu bien souvent cette histoire. C'est vraiment dommage, car ce sont toujours les petits investisseurs qui y perdent.

Il existe de nombreuses règles en matière de réorganisation d'organismes de placement collectif, là encore pour essayer de venir en aide aux petits investisseurs. Nous devons cependant prendre bien garde de ne pas leur offrir des incitations artificielles. S'ils perdent leur investissement, nous savons qui ils accuseront. Ils voudront récupérer leurs impôts. Cela


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provoquera une autre saignée des recettes de l'État. Tout cela suscite de l'instabilité.

Le projet de loi m'inspire quelques inquiétudes. Je voudrais bien que le gouvernement finisse par voir la réalité en face. Il faut prendre des mesures énergiques pour équilibrer le budget, non pas ces demi-mesures, pas plus que les profondes révisions proposées par le Bloc québécois.

Nous voulons un effort concerté et réel de la part du gouvernement pour admettre que la crise financière exige des mesures sérieuses pour équilibrer le budget. Cela fait, nous n'aurons plus à nous inquiéter des pressions pour augmenter les impôts. Nous n'aurons plus à chercher comment élargir l'assiette fiscale. Nous pourrons commencer à vivre selon nos moyens. Lorsque le gouvernement pense qu'il peut aller puiser dans les poches de quelqu'un d'autre pour régler ses problèmes d'argent, il en occasionne au contribuable qui doit payer davantage d'impôt. Le gouvernement ne semble pas s'en préoccuper.

(1810)

Si nous voulons créer des emplois au Canada, nous devons constituer des réserves de capitaux pour des entrepreneurs qui n'auront pas la crainte qu'on ne leur enlève de l'argent de manière arbitraire et prématurée par des impôts excessifs. Nous devons leur laisser la possibilité de réaliser des bénéfices pour qu'ils aient la confiance voulue pour bâtir des usines, vendre leurs produits, engager du personnel et créer les emplois qui font augmenter le nombre de contribuables. Il est bien mieux, plus facile et logique sur le plan financier d'avoir des citoyens qui contribuent au trésor public plutôt des citoyens qui coûtent de l'argent à l'État.

Je sais que c'est ce que propose le gouvernement libéral, mais c'est lui qui a embauché ces fonctionnaires en premier lieu. Nous devrions réduire la taille de la fonction publique parce que les fonctionnaires sont une charge pour le Trésor public. Il serait sûrement avantageux que nous les aidions à intégrer le secteur privé, voire à lancer leur propre entreprise, car ils contribueraient ainsi au Trésor public au lieu de puiser dans celui-ci.

Le week-end dernier, j'ai participé à une foire commerciale dans ma circonscription. J'ai parlé à une jeune femme qui a déjà travaillé dans le secteur des soins de santé et qui possède maintenant sa propre petite entreprise. Elle réussit fort bien et est très heureuse. Voilà l'exemple de quelqu'un qui était autrefois une charge pour le Trésor public et qui contribue maintenant à celui-ci.

Je me suis aussi entretenu avec un jeune entrepreneur qui ne me semblait pas avoir 30 ans, à en juger par son apparence, et qui se débrouille seul, sans aucune forme de subvention ou d'aide gouvernementale. Il a mis au point un programme informatique qu'il vend maintenant à de grands détaillants, partout au Canada. Si cela vous intéresse, le programme s'appelle «The Estimator». Il est très utile aux entreprises qui désirent évaluer de grands projets. Le créateur de ce programme veut le lancer sur les marchés internationaux dès qu'il aura une marge brute d'autofinancement suffisante.

C'est là l'exemple d'un jeune entrepreneur qui a réussi seul, sans subvention, à mettre au point un produit qui va bientôt rapporter des recettes d'exportation. Nous devons encourager ce genre de personnes au lieu de les accabler avec 200 nouvelles pages de règles fiscales tellement incompréhensibles qu'elles doivent maintenant embaucher des professionnels, des avocats, des comptables, etc., pour tenter de déterminer comment faire leur rapport d'impôt.

Une autre modification proposée dans le projet de loi concerne la marche à suivre pour présenter des avis d'opposition. Les grandes entreprises devront dorénavant préciser dans leur avis d'opposition les questions qu'elles contestent dans leur déclaration d'impôt, si un réexamen est demandé.

Au sein du comité des comptes publics, nous avons étudié ce qui s'est avéré être le fouillis de l'allocation des ressources: deux milliards de dollars de recettes fiscales ont été perdus à cause d'une faille toute simple et d'une fonction publique inefficace. Pour résumer, disons qu'en 1980, le gouvernement et une société pétrolière ne s'entendaient pas sur l'évaluation des impôts à payer. Ils ont décidé de recourir aux tribunaux pour régler la question. C'est une situation tout à fait typique. Neuf ans se sont écoulés avant que le gouvernement se présente devant le tribunal en 1989 et qu'il y soit débouté, à son grand désespoir et à son grand étonnement, parce qu'il croyait avoir des arguments à toute épreuve. Il a rédigé les règles et la loi. Il croyait les avoir comprises, mais il a été débouté. Ce n'était toutefois pas grave, car le gouvernement allait en appeler de la décision.

C'est ce qu'il a fait en 1991, et il a perdu. Il s'est alors demandé quelle somme était en jeu. Croyez-le ou non, il n'avait jamais calculé la somme en cause. En 1991, il a réalisé qu'il s'agissait de plus d'un milliard de dollars. Il était abasourdi. Le gouvernement n'avait pas idée que pareille somme était en jeu.

Il n'y avait toutefois pas lieu de s'alarmer, car il allait saisir la Cour suprême de la question et montrer à tout le monde qu'il pouvait avoir gain de cause. La Cour suprême a refusé d'entendre l'affaire. Le tout s'est terminé là, mais il y a eu un autre hic. La dernière cour d'appel qui a rendu un jugement à ce sujet a tellement favorisé la société pétrolière que, lorsque nous avons demandé aux fonctionnaires de Revenu Canada combien d'argent nous avions perdu, ils ont répondu que ce pourrait bien être encore 800 millions de dollars, plus les intérêts. Deux milliards de dollars ont été perdus parce que personne en 1980 n'a demandé quel montant d'argent était en jeu. Non seulement cela, cette situation est restée sans règlement pendant dix ans, de sorte que 40 autres sociétés pétrolières l'ont appris et ont rajusté aussi leurs impôts en remontant jusqu'en 1980.

(1815)

Cela a coûté 2 milliards de dollars aux contribuables canadiens parce que la fonction publique n'a pas réagi assez vite. À l'aide de cette mesure, le ministre des Finances a supprimé cette échap-patoire. L'échappatoire a été éliminée surtout à cause du travail fait par le Comité des comptes publics l'an dernier. Nous ne


11712

voulons pas que cela se reproduise de nouveau. Je ne veux pas avoir à dire, à titre de parlementaire responsable envers la population, «Voilà un autre milliard de dollars de perdu», mais c'est bien ce que j'ai dû faire.

Le Régime de pensions du Canada perd un milliard de dollars tous les cinq ans. Les responsables du RPC sont allés voir le Conseil du Trésor et lui ont demandé un nouveau système informatique. Ils ont dit: «Pour chaque dollar dépensé pour le nouveau système informatique, nous allons économiser trois dollars.» Cela m'a semblé être un bon investissement, mais le Conseil du Trésor a dit qu'il n'avait pas l'argent qu'il fallait. Nous allons donc perdre trois dollars et en économiser un.

C'est comme ça que fonctionne le gouvernement. Voilà le genre de choses qui se passent aujourd'hui. Quand je parle aux Canadiens de ces fiascos, ils ont du mal à croire que leurs impôts sont dépensés de cette manière. Quel haut fonctionnaire touchant un salaire élevé peut-il justifier le fait de renoncer à une dépense d'un dollar s'il est prouvé que ladite dépense permettra de réaliser des économies de trois dollars?

Nous perdrons un milliard de dollars en paiements en trop non recouvrables sur cinq ans parce que nous n'avons pas de système informatique efficace et global. Ce système nous aurait initialement coûté 250 millions de dollars. Il nous coûterait maintenant 340. Peut-être que d'ici à ce qu'il soit livré, son coût sera d'un milliard, et nous n'aurons encore rien économisé. Cependant, le fait est que nous payons ces gens intelligents, instruits et savants, dont le travail est de gérer l'argent des contribuables au profit des Canadiens. Nous sommes tellement empêtrés dans nos règles que nous n'arrivons plus à prendre une décision intelligente. Nous ne pouvons pas dire aux contribuables que nous gérons le pays d'une manière efficace.

Toutefois, nous pouvons produire, un an plus tard, une autre loi incompréhensible de 200 pages, que les Canadiens doivent respecter. Ce n'est pas seulement le projet de loi C-70 qui fait problème, mais tout le gouvernement qui ne s'attaque pas au fait que nous avons besoin d'un gouvernement responsable qui va équilibrer le budget et faire son travail.

M. Dennis J. Mills (secrétaire parlementaire du ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais pour commencer rappeler non seulement aux députés de l'autre côté mais à tous les Canadiens l'engagement que nous avons pris dans le livre rouge à l'égard de la TPS. Le député du Parti réformiste a suggéré que nous avions oublié, de ce côté-ci de la Chambre, l'engagement que nous avions pris durant les dernières élections. Le livre rouge stipule clairement, à la page 20, et je cite:

Justice, simplicité et harmonisation doivent être les trois mots d'ordre des politiques fiscales. Or, le gouvernement conservateur a décrété les hausses d'impôt les plus importantes de notre histoire et a aggravé les injustices et la complexité de notre fiscalité en instituant la TPS. [. . .]la TPS, dans l'esprit des citoyens, est venue exacerber l'injustice de la fiscalité.
La TPS a prolongé et aggravé la récession. Elle est une charge administrative onéreuse pour les petites entreprises. . .
(1820)

Nous avons déclaré que:

Dès la première session parlementaire, un gouvernement libéral chargera la commission tripartite des finances de mener de vastes concertations pendant douze mois avec la population et les pouvoirs publics provinciaux et de rendre ses conclusions sur les façons de rendre la fiscalité plus équitable [. . .]Cette commission étudiera aussi toutes les solutions de remplacement.
Je cite ces passages du livre rouge en particulier parce que je suis un député profondément convaincu que le système fiscal de ce pays doit être réformé. Alors que je me trouvais du côté de l'opposition, j'ai insisté pendant quatre ans sur le fait que la TPS n'était pas le bon moyen et que notre système fiscal actuel était compliqué et injuste, qu'il s'agisse de l'impôt sur le revenu des particuliers ou de l'impôt sur les sociétés.

Ma proposition était très précise. J'ai travaillé avec de nombreux comptables agréés et spécialistes du droit fiscal. Ensemble, nous avons mis au point un projet d'impôt unique. Aujourd'hui, après presque six ans de travail, j'ai eu le bonheur de voir le Globe and Mail reconnaître enfin que ce serait peut-être la voie à suivre.

Ce soir, je veux parler du rôle de l'opposition. J'ai été emballé d'apprendre que le Parti réformiste avait fait élire près de 50 députés lors des dernières élections, car il avait axé sa campagne électorale notamment sur une réforme en profondeur de la fiscalité.

Je me souviens du jour où le chef du Parti réformiste s'est rendu dans ma ville, Pickering, pour participer à une émission à l'une de nos plus importantes stations de radio, CFRB; pendant toute matinée, il a parlé de la nécessité de réformer le régime fiscal. En fait, il a même déclaré que le député de Broadview-Greenwood était sur la bonne voie lorsqu'il prônait l'impôt unique. Il a admis aussi que le Parti réformiste favorisait un système appelé l'impôt proportionnel. Il s'est engagé à mener son parti à la Chambre des communes et à proposer une façon constructive de corriger le fouillis actuel. Nous voilà donc tous ici, un an et demi plus tard, et nous entendons rarement l'opposition parler de cette proposition très précise sur laquelle s'appuyait sa campagne électorale.

Je soulève ce point parce que je crois que la nature et l'esprit de la Chambre reposent justement sur un débat constructif. C'est de l'action et de l'interaction, de l'accord et du désaccord qu'émergera éventuellement un régime fiscal global valable pour tous les Canadiens.

Or qu'avons-nous entendu aujourd'hui? Des critiques au sujet de ce qui reste de la Loi de l'impôt sur le revenu, dont une partie nous vient du gouvernement antérieur. Cependant, le député qui vient de parler n'a pas une seule fois mentionné la solution de remplacement dont le Parti réformiste avait tant parlé durant la dernière campagne électorale.

J'ai tendance à m'enflammer lorsque je parle de cela. Le principe de notre parti est d'en débattre vigoureusement, mais nous sommes également heureux d'entendre l'opinion des autres députés à la Chambre. En ce qui concerne la fiscalité, je pense que le Parti réformiste va à contre-courant.

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(1825)

Il a critiqué le système existant, mais il n'a pas reconfirmé la position qu'il avait adoptée pendant la dernière campagne électorale. En ce qui me concerne, moi qui crois sincèrement à cette question, je souhaiterais que le Parti réformiste revienne la-dessus et anime beaucoup plus le débat sur la fiscalité.

Je m'inquiète aussi parce que je vois maintenant que, aux États-Unis, les principaux candidats républicains à l'investiture présidentielle parlent d'un système d'impôt unique ou d'un système à taux uniforme. Nous avons même l'impression que certains des principaux démocrates envisagent une réforme totale du système fiscal.

Ça me préoccupe parce que, si les États-Unis d'Amérique adoptent un impôt à taux unique avant nous, nous allons assister à une fuite de nos capitaux, à une fuite de nos ressources et de nos capitaux humains sans précédent.

Voilà pourquoi, à mon avis, il s'agit là d'un débat essentiel et nécessaire, qui doit avoir lieu à la Chambre. Selon moi, si la Chambre procédait à une réforme fiscale totale et globale, nous pourrions tout aussi bien être témoins du retour de ces mêmes capitaux.

Tout le monde le sait, les vrais défis que nous devons tenter de relever au sein du gouvernement aujourd'hui, c'est de contenir cette fuite de capitaux. Nous le savons et nous parlons des manoeuvres dérivatives qui ont cours dans toutes les banques à charte et toutes les grandes institutions financières. Elles font circuler des milliards de dollars autour de la planète sur une simple commande par clavier.

L'une des façons d'attirer d'importants capitaux au Canada est de veiller à modifier en conséquence notre régime fiscal de base. Avec un régime modifié, nous attirerions d'importants capitaux, ce qui exercerait une pression à la baisse sur les taux d'intérêt.

Grâce à cette pression à la baisse exercée sur les taux d'intérêt, les entrepreneurs auraient accès aux capitaux dont ils ont désespérément besoin aujourd'hui pour lancer leurs petites et moyennes entreprises et prendre de l'expansion.

Voilà comment nous parviendrons à relancer l'économie canadienne. L'instrument que possède la Chambre et qu'elle pourrait utiliser pour gérer le mieux possible les mouvements de capitaux, l'enthousiasme que suscitent les investissements et l'accroissement possible de la productivité se trouve dans la Loi de l'impôt sur le revenu.

J'ai écouté le porte-parole du Bloc québécois en matière de finances qui s'est amusé à dénigrer le fait que nous proposions des petites modifications à la Loi de l'impôt. Pourquoi le Bloc québécois ne se penche-t-il pas sur la possibilité d'une réforme fiscale globale?

La question est intéressante. Lorsque nous avons fait cette proposition au Comité des finances il y a quelques mois, le porte-parole du Bloc en matière de finances au sein du comité a déclaré: «Lorsque nous nous séparerons, c'est un régime de taxe unique que nous aurons au Québec. Pourquoi le refuserions-nous au reste du Canada?»

J'espère que les partis d'opposition accepteraient d'unir leurs efforts pour se mesurer à nous dans le cadre d'un débat sur la réforme fiscale globale.

Si la Chambre des communes ne procède pas à une réforme fiscale globale, notre déficit et notre dette nous propulseront, d'ici 25 ou 30 mois, dans une situation désespérée.

La façon la plus rapide et la plus constructive de nous sortir du pétrin est de nous attaquer à l'un de nos problèmes fondamentaux, et cela passe par une réforme fiscale globale.

_____________________________________________


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MOTION D'AJOURNEMENT

(1830)

[Traduction]

L'ajournement de la Chambre est proposé d'office en conformité de l'article 38 du Règlement.

LA FONCTION PUBLIQUE

Mme Marlene Catterall (Ottawa-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureuse de pouvoir revenir sur la question que j'ai posée le 15 février au président du Conseil du Trésor, relativement à la sous-traitance dans la fonction publique.

Notre deuxième budget a montré clairement notre déter-mination à réduire les dépenses gouvernementales. Il y a toutefois un secteur qui a échappé aux compressions, et c'est celui de la sous-traitance.

Durant les cinq ans avant que notre parti ne soit porté au pouvoir, les coûts de la sous-traitance ont augmenté deux fois plus rapidement que ceux liés aux employés de l'État; ils ont augmenté de 7,5 p. 100 par année, passant de 2,9 à plus de 5 milliards de dollars. Sous le gouvernement précédent, on nous a dit que ces données n'étaient tout simplement pas disponibles. Notre gouvernement les a toutefois compilées et les a rendues publiques pour qu'elles puissent être examinées.

Ces données ne sont qu'un aspect de la question. Travaux publics et Services gouvernementaux Canada ont dit que la valeur des marchés qu'ils ont conclus pour obtenir, à l'extérieur, des biens et services pour les ministères a atteint 9,4 milliards de dollars, ce montant n'incluant pas la sous-traitance que les ministères effectuent directement. Cela ne tient pas compte non plus des coûts cachés de la sous-traitance, pour la préparation, l'évaluation et l'octroi des marchés, la supervision et le contrôle de la qualité, les locaux et le matériel du gouvernement que les sous-traitants utilisent, l'aide qu'ils obtiennent gratuitement des employés de l'État, ainsi que la perte de productivité de ces employés qui passent beaucoup de leur temps à s'entretenir avec des sous-traitants, au détriment de leur propre travail profes-sionnel.

Depuis le budget, la question est devenue particulièrement urgente. Le budget prévoit l'abolition de 45 000 postes dans la fonction publique. Nous nous sommes engagés à faire preuve de la plus grande équité et à réduire au minimum le nombre de départs involontaires. Nous verserons près de un milliard de dollars en indemnités de départ. La formation, le replacement et

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les incitations à la retraite anticipée représenteront des millions de dollars en plus.

Les coûts réels, en plus des montants en cause, sont la terrible anxiété des employés, le bouleversement de l'organisation et la perturbation des services pour les Canadiens.

Il n'est que juste de faire tous les efforts pour garder et recycler les fonctionnaires afin d'accomplir le travail qui doit se faire dans la fonction publique. Il est injustifiable de recourir davantage aux fournisseurs de l'extérieur pour leur confier le travail que pourrait accomplir un employé qui, s'il doit partir, ira se joindre au 1,5 million de chômeurs canadiens.

La sous-traitance constitue un outil essentiel pour bien gérer afin de faire face aux périodes de pointe temporaires, de mener à bien des projets, de trouver des compétences particulières pendant une période limitée, ainsi que de fournir des programmes et des services gouvernementaux à moindre coût. Cependant, rien ne garantit au Parlement qu'elle se fait seulement lorsque cela convient et lorsque c'est la façon la plus efficace de faire. Près de la moitié des marchés sont attribués sans appels d'offres. En une année, 17 000 marchés ont été attribués à des fournisseurs sans soumissions.

Dans bien des cas, les entrepreneurs travaillent côte à côte avec des fonctionnaires qui font le même travail, mais à un coût beaucoup plus élevé. Les fonctionnaires doivent passer par un processus de sélection au mérite rigoureux pour que les postes soient accordés aux meilleurs, mais les entrepreneurs ne subissent pas de sélection comparable.

Des préoccupations ont été exprimées devant certains cas de fonctionnaires qui, après avoir reçu des indemnités pour les convaincre de quitter la fonction publique, avaient décroché en quelques jours seulement des contrats de la fonction publique, que se soit à titre individuel ou par l'intermédiaire d'une entreprise, et qui, bien souvent, continuaient de recevoir une pension du gouvernement. On doit contrôler ce cumul de pension et de traitement.

Je prie instamment le président du Conseil du Trésor d'accepter la recommandation du vérificateur général et d'exiger que tous les ministères rendent compte l'an prochain du personnel à contrat en équivalents temps plein. Ce n'est qu'à ce moment-là que le Parlement saura si les sacrifices imposés aux fonctionnaires ne sont pas rendus inutiles par une fonction publique fantôme formée d'un nombre sans cesse croissant d'entrepreneurs. Je lui demande de s'assurer, à court terme, que nous n'enlevons pas aux gens leur emploi, leur revenu et leur espoir pour donner leur place à quelqu'un d'autre d'une façon détournée.

Nos décisions ont une incidence sur la vie des fonctionnaires, sur leur avenir, sur leur famille, sur leur foyer, sur leur carrière, sur l'éducation de leurs enfants et sur leur espoir d'avoir un niveau de vie convenable à l'âge de la retraite. C'est une lourde responsabilité, et je crois qu'il serait important que nous limitions le travail à contrat pour nous acquitter de cette responsabilité.

[Français]

M. Ronald J. Duhamel (secrétaire parlementaire du prési-dent du Conseil du Trésor, Lib.): Monsieur le Président, comme vous le savez, l'une des principales responsabilités du gouvernement est d'utiliser le mieux possible l'argent des contribuables. Quand il prend des décisions concernant la passation de contrats, le gouvernement cherche à obtenir la meilleure valeur possible pour l'argent des contribuables et il se fonde sur une bonne gestion.

[Traduction]

Même si le gouvernement se préoccupe de l'argent des contribuables, il sait aussi qu'il est un employeur important au Canada. À ce titre, il doit aussi se préoccuper de ses employés. Nous comptons réduire la fonction publique, ce qui signifie qu'un grand nombre de nos employés vivront des temps difficiles.

On n'a qu'à lire les journaux pour se rendre compte que le président du Conseil du Trésor se préoccupe du bien-être des fonctionnaires. Il a rencontré les représentants syndicaux et il a maintes fois déclaré que le gouvernement voulait traiter ses employés d'une façon équitable et avec compassion pendant la période de rationalisation que nous traversons.

Cela veut notamment dire que nous devons respecter notre engagement à trouver d'autres emplois pour le plus grand nombre possible d'employés nommés pour une période indéterminée qui sont touchés. À cet égard, le Conseil du Trésor s'attend à ce que les services de la fonction publique examinent leurs contrats de services aussi bien que les possibilités d'emplois internes dans le but d'offrir ces possibilités aux employés touchés. Des contrôles sont actuellement exercés sur la dotation en personnel dans la fonction publique.

Le Secrétariat du Conseil du Trésor, en consultation avec les ministères et les organismes centraux, a réexaminé les pratiques de gestion des ressources humaines et les pratiques en matière d'emploi en vue de déterminer quelles mesures nouvelles ou modifiées devraient être prises.

Je répète que notre objectif est de faire l'impossible pour réintégrer les employés touchés. Des efforts accrus sont con-sacrés à cette activité.

Le président du Conseil du Trésor a demandé au Comité permanent des opérations gouvernementales de réexaminer les pratiques de sous-traitance du gouvernement. Le comité a tenu de nombreuses audiences au cours de l'automne. Il continue de le faire et terminera bientôt son travail. Il présentera son rapport, que le gouvernement attend avec grand intérêt.

Nous devons encore faire appel à du personnel de l'extérieur pour certains services. Mentionnons, par exemple, les fluctuations de la charge de travail, comme à l'époque de la production des déclarations de revenus. Nous avons besoin de services spécialisés. Nous avons passé des marchés avec le secteur privé pour la gestion de la flotte de véhicules du gouvernement. Nous avons passé des marchés pour des services en cas d'urgence. Il se peut qu'un bateau soit immobilisé sur un récif lorsque les navires de la Garde côtière sont occupés ailleurs. Nous devons alors être en mesure de faire appel à d'autres services de secours.

[Français]

Je pense que c'est une approche qui est vraiment équitable, une approche pour administrer les affaires gouvernementales qui est juste, à la fois pour les employés et pour les contribuables canadiens.

11715

[Traduction]

Le vice-président: Conformément à l'article 38 du Règlement, la motion d'ajournement de la Chambre est adoptée d'offi-

ce. Par conséquent, la Chambre s'ajourne à 10 heures demain, conformément au paragraphe 24(1) du Règlement.

(La séance est levée à 18 h 37.)