Passer au contenu
;

INDU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain
Passer à la navigation dans le document Passer au contenu du document






Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de l'industrie et de la technologie


NUMÉRO 130 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 12 juin 2024

[Enregistrement électronique]

(1635)

[Traduction]

    Bienvenue à la 130e réunion du Comité permanent de l'industrie et de la technologie de la Chambre des communes.
    Notre réunion se déroulera dans un cadre hybride, conformément au Règlement.
    Conformément à l'ordre de renvoi du mercredi 7 février 2024, le Comité poursuit son étude du projet de loi C‑352, Loi modifiant la Loi sur la concurrence et la Loi sur le Tribunal de la concurrence.
    Je vais vous donner un condensé des consignes à suivre pour la réunion. Nous avons une petite oreillette à notre disposition. Si vous ne l'utilisez pas, éloignez l'oreillette du microphone et déposez‑la sur l'autocollant pour éviter les réactions acoustiques qui peuvent blesser les interprètes.
    J'invoque le Règlement, monsieur le président. Je suis désolé de vous interrompre, mais je vois des gens des médias dans la salle. Je ne crois pas qu'ils sont autorisés à rester après le début des travaux.
    Ils peuvent rester dans la salle.
    Ils ne peuvent pas filmer la réunion.
    Jusqu'à quand?
    Une fois que la réunion a commencé, je ne crois pas qu'ils ont l'autorisation de filmer.
    C'est ce que je me disais.
    C'est un rappel au Règlement pertinent. Merci, monsieur Turnbull.
    Pour ceux qui veulent suivre la réunion, il existe divers moyens. Visitez le site ParlVU.ca.
    Éloignez l'oreillette du microphone si vous ne l'utilisez pas pour éviter des lésions comme celles qu'ont déjà subies certains de nos merveilleux interprètes à la Chambre des communes.
    Je vais sans plus tarder vous présenter nos témoins.
    Nous recevons M. Sylvain Charlebois, directeur principal de l'Agri-Food Analytics Lab — situé dans mon coin de pays — et professeur à la merveilleuse Université Dalhousie. Il nous joint par vidéoconférence. Vous l'avez peut-être vu dans les médias, où il est connu sous le surnom de « Food Professor ».
    Nous accueillons également des représentants de Québecor Média inc., soit M. Pierre Karl Péladeau, président et chef de la direction, ainsi que Jean Péladeau, vice-président, Convergence opérationnelle, Québecor Média inc. et Freedom Mobile.
    Enfin, M. Jean-François Lescadres, vice-président, Finances, est ici au nom de Vidéotron ltée.
    On me signale que les témoins et les membres du Comité qui participent à la réunion en ligne ont fait les essais sonores d'usage.
    Chaque organisme dispose de cinq minutes pour nous présenter une déclaration liminaire.
    Monsieur Charlebois, nous allons commencer avec vous.
    Honorable président, mesdames et messieurs les membres du Comité, merci de nous avoir invités à témoigner aujourd'hui au sujet du projet de loi C‑352, la Loi sur la réduction des prix pour les Canadiens, qui modifie la Loi sur la concurrence et la Loi sur le Tribunal de la concurrence.
     Les changements proposés visent à augmenter les sanctions pour les actes anticoncurrentiels, à modifier les processus d'examen des fusions et à renforcer les mesures de protection de la concurrence sur le marché. Ces amendements sont essentiels pour favoriser un marché équitable et concurrentiel, en particulier dans le secteur agroalimentaire, qui est crucial pour l'économie et la sécurité alimentaire du Canada. Le secteur agroalimentaire se situe à l'intersection unique de l'agriculture et des marchés de consommation, ce qui en fait un élément vital de notre intérêt national. Des politiques de concurrence efficaces sont indispensables pour garantir que ce secteur reste dynamique, innovant et capable de répondre aux besoins diversifiés des consommateurs canadiens. Les modifications proposées à la Loi sur la concurrence sont opportunes et nécessaires pour relever les défis évolutifs de cette industrie.
    Nous soutenons fermement l'augmentation des sanctions, les améliorations proposées à l'examen des fusions et l'accent mis sur les conditions du marché. Ces mesures visent collectivement à prévenir la domination du marché, à garantir des prix équitables et à promouvoir des pratiques concurrentielles. Cependant, il est important de reconnaître les différences régionales à travers le pays.
    Premièrement, nous recommandons d'établir un organe de surveillance du marché agroalimentaire au sein du Bureau de la concurrence pour mener des études de marché et produire des rapports réguliers. Cet organe devrait se concentrer sur l'identification des pratiques anticoncurrentielles et des conditions du marché spécifiques au secteur agroalimentaire. En fournissant des informations transparentes et détaillées, cette initiative peut aborder de manière proactive les problèmes potentiels avant qu'ils n'entraînent des perturbations importantes du marché.
    Deuxièmement, nous recommandons de mettre en oeuvre des politiques qui soutiennent spécifiquement les petites et moyennes entreprises, ou PME, agroalimentaires dans la navigation des complexités du paysage concurrentiel. Cela comprend l'offre de données de marché, d'assistance juridique et financière pour se conformer aux lois sur la concurrence et la promotion de l'innovation par le biais de subventions et de subventions. Assurer que les PME puissent rivaliser efficacement promouvra la diversité et la résilience au sein du marché agroalimentaire.
    Troisièmement, nous recommandons d'encourager les politiques qui soutiennent les réseaux de distribution alimentaire régionaux et locaux. Cela peut inclure des subventions pour les centres alimentaires locaux, des investissements dans les infrastructures de distribution régionale et des incitations pour que les détaillants stockent des produits locaux.
    Quatrièmement, nous recommandons d'établir et de faire respecter un code de conduite pour les détaillants et distributeurs alimentaires afin de garantir des pratiques commerciales équitables. Ce code devrait couvrir des domaines tels que les conditions de paiement, l'équité des contrats et les mécanismes de résolution des litiges. En assurant des transactions équitables entre fournisseurs et détaillants, le marché peut rester concurrentiel et les petites entreprises peuvent prospérer.
    Et cinquièmement, nous recommandons d'encourager l'adoption de technologies avancées dans la distribution alimentaire, telles que les chaînes de blocs pour la traçabilité, l'intelligence artificielle pour la prévision de la demande et l'Internet des objets pour l'efficacité de la chaîne d'approvisionnement. L'innovation technologique peut réduire les coûts, améliorer la transparence et l'efficacité globale des réseaux de distribution alimentaire.
    En conclusion, le projet de loi C‑352 présente un cadre solide pour améliorer la concurrence au sein de l'industrie agroalimentaire canadienne. En mettant en oeuvre ces recommandations, nous pouvons renforcer notre engagement envers un marché équitable, dynamique et durable.
     Merci de nous donner l'occasion de présenter nos vues, et nous attendons vos questions avec impatience.
    Merci, monsieur Charlebois.

[Français]

     Monsieur Péladeau, vous avez la parole pour cinq minutes.
(1640)
    Bonjour, messieurs et mesdames les députés.
    Permettez-moi de vous présenter Jean‑François Lescadres, qui est vice-président des finances chez Vidéotron et Jean Péladeau, qui est vice-président de la convergence opérationnelle chez Québecor, et qui est aussi mon jeune frère de 32 ans. « Aux âmes bien nées, la valeur n'attend point le nombre des années », disait Pierre Corneille.
    D'entrée de jeu, je dois souligner que la vente au détail représente une part très importante des revenus générés par l'industrie canadienne du sans-fil. Selon nos estimations, en 2023, au Canada, plus de 80 % des ventes de produits sans fil ont été réalisées en personne et en boutique.
     Bien sûr, les trois grands acteurs, comme nous aimons appeler Bell, Rogers et Telus, exercent un contrôle indéniable sur le marché de la vente au détail de services sans fil. En plus de leurs boutiques respectives, elles comptent sur un réseau de détaillants tiers, qu'elles contrôlent en tout ou partie, opérant sous des noms génériques comme « La cabine t », « Wave sans fil », « Wow! mobile boutique » et plusieurs autres.

[Traduction]

    Au Canada, les détaillants tiers de services sans fil réalisent plus de la moitié de leurs ventes dans des emplacements contrôlés par un des trois grands acteurs, dont des centaines sont exploités par le géant GLENTEL. Cette coentreprise de Bell et de Rogers vend exclusivement les produits et les services des propriétaires ou de leurs marques défensives.

[Français]

     Nous avons d'ailleurs appris l'intention de Loblaws de retirer les produits et services de notre filiale Freedom Mobile de ses boutiques The Mobile Shop à compter du 30 juin au profit de ce qui serait, selon toute vraisemblance, un accord exclusif avec Glentel.
    The Mobile Shop était, jusqu'à maintenant, un revendeur neutre offrant à sa clientèle les produits et services de tous les principaux fournisseurs de services sans fil canadiens. Nous avons donc accueilli cette nouvelle avec surprise et inquiétude, puisque cette neutralité est désormais mise à mal. La perte de ces importants points de vente pour Freedom Mobile ralentira l'expansion de notre marque dans certains marchés.
    Si son accord avec Loblaws se confirme, Glentel bonifiera son portefeuille opérationnel de 180 points de vente The Mobile Shop dans les épiceries appartenant à Loblaws. Cela signifiera aussi la perte de 180 points de vente potentiels pour d'autres marques concurrentielles, comme Freedom Mobile. La mainmise de l'oligopole sur le marché canadien de la téléphonie mobile s'en trouvera encore renforcée.

[Traduction]

    Nous avons fait part de nos inquiétudes au président de la Banque PC et à l'administration centrale de Loblaw. Ils ont toutefois maintenu leur décision de faire primer les intérêts commerciaux sur ceux des consommateurs. Nous nous sommes aussi enquis auprès du président et chef de la direction de GLENTEL de la possibilité de distribuer les produits Freedom Mobile dans leurs points de vente et, sans surprise, le refus a été instantané et catégorique.
    Tout cela se passe au moment où nous cherchons à étendre le territoire desservi par Freedom Mobile au titre du régime d'accès pour les exploitants de réseaux mobiles virtuels. Notre objectif est d'offrir nos services à un plus grand nombre de Canadiens dans de nouveaux marchés, comme nous venons de le faire au Manitoba. Ce que Loblaw qualifie de décision banale concernant des fournisseurs qui, en ses propres termes, ne contribuent d'aucune façon à la concurrence aura pour effet de freiner nos efforts pour favoriser une concurrence réelle dans plus de marchés.
(1645)
    À Winnipeg, si GLENTEL va de l'avant et prend le contrôle de The Mobile Shop, 73 % — j'ai bien dit 73 % — des détaillants tiers se retrouveraient sous la coupe des trois grands acteurs. Il restera très peu de place pour l'expansion de Freedom. À elle seule, GLENTEL exploitera plus de la moitié des détaillants tiers de services sans fil dans la région.

[Français]

     Il nous apparaît clair que cette entente entre Loblaws, Bell et Rogers représente une nouvelle tentative de la part des acteurs dominants du marché de contrecarrer la concurrence dans le domaine du sans-fil au Canada. Cette nouvelle pression exercée par Loblaws, une entreprise sur laquelle le Bureau de la concurrence enquête actuellement pour tactiques anticoncurrentielles dans le secteur de l'alimentation, doit être sérieusement prise en compte.

[Traduction]

    C'est important de bien comprendre que le modèle d'affaires de coentreprises comme GLENTEL, s'il n'y a pas de cadre, vise exclusivement à concentrer le marché. Aucun autre marché oligopolistique ne permettrait à deux des trois acteurs dominants de s'associer pour évincer la concurrence dans un réseau de vente aussi névralgique et de continuer à donner une illusion d'objectivité aux consommateurs.

[Français]

     À titre de parlementaires, vous avez le pouvoir d'agir pour forcer Loblaws à revenir sur sa décision et pour démanteler les coentreprises comme Glentel dont le modèle d'affaires, en restreignant les choix offerts aux Canadiens et aux Canadiennes, entrave l'intérêt public et la saine concurrence.
    Je vous remercie de votre attention.

[Traduction]

    Merci beaucoup, monsieur Péladeau.
    Nous allons entamer la période des questions.
    Le premier tour de six minutes sera dévolu à M. Ryan Williams.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à tous les témoins de participer à cette discussion de la plus haute importance sur la concurrence.
    Monsieur Péladeau, c'est intéressant d'entendre que GLENTEL collabore exclusivement avec Loblaw pour exclure Vidéotron.
    Ma première question sera très simple. Est‑ce que le ministre d'Innovation, Sciences et Développement économique Canada — le ministre de l'Industrie — et le Bureau de la concurrence ont été saisis de cette question? Leur avez-vous parlé à tous les deux? Le cas échéant, quelle a été la réponse?
    Oui, nous leur en avons parlé. Nous leur avons même envoyé une lettre plus tôt aujourd'hui.
    Nous avons aussi eu des échanges avec eux ces derniers jours. Bien entendu, on nous a donné une date, le 30 juin. Nous allons nous assurer que cela se fera et que nous ne serons pas exclus de ce très important marché de détail...
    Je suis désolé, mais le temps file. J'aimerais savoir si vous avez reçu une réponse de l'un ou l'autre? Avez-vous l'impression qu'il existe une réponse?
    Avant d'interpeller le Bureau, nous avons bien eu des discussions à ce sujet avec les principaux intéressés, le président et chef de la direction de GLENTEL et d'autres parties à la transaction. À ce jour, en ce moment même, je ne sais pas si nous avons reçu des réponses.
    Merci, monsieur.
    Monsieur Charlebois, il a beaucoup été question ces derniers temps d'insécurité alimentaire. Nous nous demandons jusqu'où le prix des aliments va continuer de grimper. Un panier d'épicerie qui coûtait 100 $ aux Canadiens en avril 2021 leur coûte maintenant 121 $. C'est une hausse de 21 %. Parallèlement, la taxe sur le carbone a augmenté de 23 % cette année, et une autre hausse de 19 % est prévue l'année prochaine.
    Selon vous, quelles vont être les répercussions de cette taxe sur le carbone pour les fabricants de produits alimentaires à l'échelle du Canada et sur leur capacité de gérer les coûts et de maintenir l'abordabilité pour les consommateurs?
    Merci, monsieur Williams, pour cette question.
    Nous avons fait des recherches sur la taxe sur le carbone et sur la politique de tarification du carbone. La conclusion est qu'il est très difficile d'établir, au‑delà d'un doute raisonnable, les répercussions précises de la taxe sur le carbone sur les prix de détail. Beaucoup d'autres facteurs peuvent influer sur ces prix. Un détaillant peut choisir un produit d'appel, par exemple, ou promouvoir certains produits ciblés. C'est très difficile.
    Cela dit, nous avons relevé certains écarts entre les prix de gros et les prix industriels dans la chaîne d'approvisionnement. L'écart semble se creuser entre les prix de gros et les prix industriels des aliments au Canada et aux États-Unis depuis 2021. C'est très préoccupant. Nous ne disons pas que la taxe sur le carbone est le seul facteur qui contribue à accroître cet écart, mais nous pensons qu'elle joue un rôle.
    Vous avez dit que le secteur de la fabrication est l'enfant oublié de la chaîne d'approvisionnement alimentaire. De toute évidence, la politique de tarification du carbone impose des taxes plus élevées ici que chez nos voisins du Sud, et des changements ont été annoncés aux rajustements liés aux gains en capital pour revitaliser le secteur canadien de la fabrication de produits alimentaires, alors que nous parlons d'insécurité alimentaire. Ces changements vont-ils faire augmenter les coûts des aliments provenant de ces fabricants, en particulier au Canada atlantique et en Colombie-Britannique?
(1650)
    C'est clair que ces signaux ne sont pas vraiment favorables pour stimuler la croissance économique. Par exemple, une grève est en cours à l'usine Cargill de Guelph. J'ai eu l'occasion de visiter cette usine il y a bien des années et, si je me fie à cet exemple, je peux vous assurer que le secteur de la transformation des aliments est sous-capitalisé, gravement sous-capitalisé. Si l'objectif est d'encourager les investissements… La hausse des taux d'imposition des gains en capital et, bien évidemment, la politique de la tarification du carbone ne donnent certainement pas de signaux encourageants aux investisseurs. Je dirais plutôt que ce genre de mesures décourage les investissements en général.
    Par ailleurs, dans le secteur de l'agriculture... Vous avez aussi écrit au sujet des restaurateurs. Ils sont aussi touchés. Sur le plan de la sécurité alimentaire, quelles vont être les répercussions si on impose davantage les agriculteurs, les restaurateurs, les fabricants? Est‑ce que la sécurité alimentaire du Canada va s'améliorer ou au contraire se détériorer?
    C'est complexe. Une chose que j'aimerais que les parlementaires comprennent, c'est que dans le secteur alimentaire, tout est une question de faibles marges et de gros volumes. Pour cette raison, le secteur lui-même est souvent peu enclin à prendre des risques, et il faut envisager la question en nous demandant dans quelle mesure nous voulons favoriser sa croissance. Pour établir si la sécurité alimentaire du pays se maintient, il faut analyser le niveau de concurrence de la ferme au magasin ou au restaurant. Pour le moment, je ne suis pas certain que nous sommes sur la bonne voie.
    Le cas échéant, pouvez-vous nous soumettre ce que vous avez écrit ou vos recherches sur ce sujet afin que nous puissions nous en servir dans le cadre de cette étude? Nous vous en serions reconnaissants, monsieur.
    Vous avez écrit notamment que les Canadiens n'ont même pas les moyens d'acheter de la bière actuellement. Le prix de la bière monte. Tous ceux qui veulent savourer une bière au Canada sont touchés. C'est dommage dans un pays où la fabrication de bière est une grande fierté. Est‑ce que c'est un exemple révélateur d'un régime d'imposition qui étouffe les Canadiens et qui tue l'industrie?
    Oui, tout à fait. La demande pour la bière a baissé de 3,5 % jusqu'ici cette année, et elle avait reculé de 3,5 % l'an dernier, en 2023. Elle n'est pas en hausse, c'est évident, et c'est un secteur très important.
    Le cas des microbrasseries est intéressant. Nous avons donné de généreuses subventions aux microbrasseries dans le passé, et je pense que c'était une excellente idée. Malheureusement, faute de développement, beaucoup de microbrasseries sont en train de fermer. Je suggère un soutien plus ciblé et plus stratégique aux entreprises en démarrage au Canada, et surtout un soutien qui sera axé sur le développement des PME et des entreprises en démarrage. Le Canada n'a pas fait du bon travail dans ce domaine depuis plusieurs années.
    Merci, monsieur Williams.
    Le prochain à poser des questions sera M. Van Bynen, pour six minutes.
    Merci, monsieur le président. Je remercie les témoins de participer à ce débat sur un sujet d'une grande importance pour ce comité et probablement pour l'ensemble de la population canadienne.
    Je vais me reporter au rapport publié par le Bureau de la concurrence en octobre 2023, dans lequel il conclut que « l’intensité concurrentielle a diminué entre 2000 et 2020 ». Plus particulièrement, il a constaté que « les industries les plus concentrées » ont vu une augmentation de leur concentration, et que « le nombre d’industries hautement concentrées a également augmenté ». Selon ce rapport, il est « moins probable que les grandes sociétés » voient leur position menacée, moins de sociétés sont entrées dans les industries, et les profits et les marges des sociétés ont augmenté de manière générale.
    Selon le Bureau, ces constatations montrent qu’il est essentiel de « moderniser les lois régissant la concurrence au Canada pour répondre aux réalités de l’économie d’aujourd’hui ». C'est ce qui a motivé une partie des nouvelles modifications que nous proposons et notre étude du projet de loi aujourd'hui.
    Monsieur Péladeau, quels sont les facteurs qui ont conduit à une diminution du niveau d’intensité concurrentielle au Canada depuis 2000?
(1655)
    À la suite de la décision du gouvernement, et considérant que le Bureau de la concurrence s'est fermement opposé à la transaction entre Rogers et Shaw pour des raisons de concurrence… Cela dit, le principal aspect était les actifs sans fil…
    Depuis que Vidéotron-Québecor a acheté Freedom Mobile, nous pouvons conclure… Là encore, ces chiffres ne viennent pas de nous, mais de Statistique Canada. C'est un sujet que nous avons abordé durant des réunions précédentes ici. Les prix des services sans fil ont baissé de 26 %. Quand il y a de nouveaux acteurs et une nouvelle concurrence sur le marché, comme c'est arrivé pour les services sans fil, tous les Canadiens en bénéficient. Non seulement les prix ont chuté de 26 %, mais l'offre s'est diversifiée et il y a plus d'innovations, ce qui force les acteurs en place à réagir et à faire mieux. Je le répète, c'est dans l'intérêt de tous les Canadiens.
    Si on observe les marchés en général, il faut énormément de capitaux pour faire face à la concurrence dans les plus grands marchés. Pensez-vous, premièrement, que le Bureau de la concurrence a un rôle à jouer à cet égard et, deuxièmement, comment pouvons-nous changer cela?
    Je partage vos préoccupations. Quelle influence le gouvernement, par l'intermédiaire du Bureau de la concurrence, peut‑il avoir sur les projets de regroupement dans les secteurs des télécommunications, des finances, des assurances et, dans certains cas, dans le secteur de l'immobilier?
    Comme je ne siège pas au Parlement, c'est difficile pour moi de répondre à cela, mais je peux certainement dire que le gouvernement intervient depuis au moins 15 ans. Tout a commencé avec le regretté Jim Prentice, qui était alors ministre de l'Industrie et qui a mis en place un cadre approprié pour les enchères du spectre. C'est à ce moment que la concurrence a commencé au Québec. J'imagine que le gouvernement a pris note de ce qui se passait… Le fait est que pour les services de télécommunication, le Québec a profité de prix beaucoup plus bas qu'ailleurs au Canada.
    Il y a une politique gouvernementale et, en plus, le Bureau de la concurrence mène des enquêtes et donne le feu vert, ou non, aux transactions importantes. L'objectif est d'empêcher les opérations de concentration du marché, comme celle dont nous parlons aujourd'hui. Ce ne serait pas dans l'intérêt du secteur de permettre une trop grande concentration des détaillants et le regroupement des fournisseurs dans le but de contrôler ce très important canal de vente au détail.
    Je crois comprendre que ce qui vous préoccupe, ce sont les clauses restrictives et le contrôle des espaces commerciaux. À votre avis, le Bureau de la concurrence a‑t‑il des pouvoirs suffisants pour contester le genre de contrats ou d'arrangements restrictifs contre lesquels vous vous battez actuellement?
    Je suis diplômé en droit, mais je dois avouer que mon cours sur la concurrence remonte à assez loin en arrière. Je ne me considère donc pas comme un expert, mais dans mon souvenir, la loi accorde beaucoup de pouvoirs au Bureau. S'il veut intervenir, il peut le faire. Il le fait d'ailleurs de plus en plus et je crois que c'est dans l'intérêt des Canadiens parce que le choix est plus grand, les prix sont meilleurs et les produits sont de meilleure qualité.
     Monsieur Charlebois, je sais que vous avez fait énormément de recherches et que vous décrivez votre organisme comme ayant une perspective mondiale. Quelles sont les similitudes entre le projet de loi C‑352 et la Politique de concurrence européenne?
    Pour vous donner une réponse courte, je dirais que je suis d'accord avec M. Péladeau. Comme lui, je pense que le gouvernement dispose des outils nécessaires pour intervenir de façon énergique, comme on le voit ailleurs, et particulièrement aux États-Unis ou même en Europe.
    Je ne crois toutefois pas que le Bureau a fait ce qu'il devait et qu'il a utilisé ces outils. Nous avons déjà collaboré à quelques enquêtes du Bureau sur l'acquisition d'épiceries par d'autres épiceries, et c'était assez évident que la portée de son analyse était extrêmement étroite. Nous avons notamment collaboré avec le Bureau au moment de l'acquisition de Farm Boy par Sobeys il y a quelques années, et il n'a pas évalué les répercussions de cette transaction sur les épiciers indépendants dans la région du Grand Toronto, entre autres, ou dans le Sud de l'Ontario. C'était un signe à notre avis que la portée des analyses devait être adaptée au contexte auquel elle s'applique.
(1700)
    Avez-vous des préoccupations concernant des dispositions précises de ce projet de loi et, le cas échéant, quelles améliorations proposeriez-vous?
    Je crois que l'esprit du projet de loi est tout à fait approprié. Les parlementaires doivent donner le plus de pouvoirs possible au Bureau, et je crois que c'est ce qui est visé par le projet de loi.
    Si je ne me trompe pas, le gouvernement a engagé une somme de 98 millions de dollars pour élargir les pouvoirs du Bureau de la concurrence. Je pense que c'est un pas important.
    Je n'ai pas d'autres questions, monsieur le président.
    Merci. Nous avons dépassé un peu le temps alloué, mais c'était intéressant.
    Monsieur le président…
    Le prochain tour de six minutes sera réservé à M. Garon.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Permettez-moi d'abord d'offrir mes salutations à nos témoins, MM. Charlebois, Péladeau et Lescadres, et de leur souhaiter la bienvenue au comité.
    Je vais commencer par vous, monsieur Péladeau. Parlons de Glentel. Dans les dernières modifications apportées à la Loi sur la concurrence, attendues depuis longtemps et proposées par le ministre Champagne, on s'est attaqué à des pratiques anticoncurrentielles dans le secteur immobilier et dans les contrats. Par exemple, le ministre a défini comme étant une pratique anticoncurrentielle le fait qu'une épicerie loue un espace dans un centre commercial et exige, dans son bail, qu'aucun autre magasin d'alimentation ne s'établisse dans le même centre commercial ou aux alentours.
    On retrouve le même genre de comportement dans le modèle de coentreprise qu'est Glentel. Pour une raison qui m'échappe, la loi semble encore permettre ce genre de pratique, qui est pourtant de même nature. Par ailleurs, il me semble qu'il y a une couche supplémentaire dans ce cas. En effet, il ne s'agit pas d'une coentreprise normale, mais plutôt d'une coentreprise formée des deux acteurs les plus importants du marché. Cette coentreprise aura pour effet de freiner l'entrée d'acteurs émergents, dont fait partie Québecor, notamment dans l'Ouest canadien.
    Avons-nous laissé tomber quelque chose lorsque nous avons apporté les dernières modifications à la Loi sur la concurrence?
    J'aimerais entendre vos réflexions à ce sujet, car je suis certain que vous en avez beaucoup.
     Votre prédécesseur a posé cette question, et cela m'a permis d'y réfléchir.
    J'aimerais d'abord mentionner à M. Williams que nous sommes effectivement en communication avec le Bureau de la concurrence. Nous avons déposé une plainte et ses représentants vont nous convoquer pour discuter avec eux. Cela dit, l'issue de chaque cas dépend du leadership du Bureau. Il faut le mentionner. Il peut faire preuve de plus de leadership dans un cas que dans l'autre, selon les gens qui le dirigent.
    Il est également important de mentionner que, dans un cas comme celui-ci, sur le plan juridique, si j'ai bien compris, seul le Bureau de la concurrence peut porter une affaire devant le Tribunal de la concurrence. Ce n'est pas une partie civile ou une partie privée. Si c'était le cas, peut-être qu'il y aurait des mesures à considérer pour éviter un engorgement des tribunaux, mais le fait que le Bureau soit le seul à avoir la capacité d'agir freine aussi probablement la capacité des gens à porter plainte concernant des mesures anticoncurrentielles.
     Je ne suis pas juriste au sens strict du terme, mais, comme les députés ont l'initiative des lois, en matière de vente au détail, les citoyens ou les parties privées devraient peut-être avoir le pouvoir de déposer une plainte devant le Tribunal de la concurrence plutôt que devant le Bureau de la concurrence, compte tenu de l'importance de ce réseau de distribution et de commercialisation pour le sans-fil, de l'importance du sans-fil au Canada et des prix élevés. On a pris des mesures qui ont fait baisser les prix, mais avant, c'était au Canada qu'on retrouvait les prix les plus élevés dans le domaine du sans-fil...
(1705)
    Bien entendu.
    Je me permets de vous interrompre, parce que j'ai une autre question à vous poser et le temps file. Vous savez que le temps est une denrée rare, au Comité.
    Sur le projet de loi qui nous occupe, avec tout le respect dû au professeur Charlebois, tous les autres experts que nous avons reçus avant aujourd'hui nous ont dit que, à force d'imposer des règles strictes comme celles qui sont dans le projet de loi de M. Singh, qui interdit toute fusion ou acquisition donnant lieu à une part de marché combinée de plus de 60 %, entre autres, ces règles s'empilent et font en sorte qu'il y a plus de possibilités de litige sur les parts de marché que sur les situations concurrentielles elles-mêmes.
    On nous dit que, dans d'autres pays, comme en Europe, mais surtout aux États‑Unis, les autorités de la concurrence ont un cadre bien défini, mais que leur capacité d'action est aussi beaucoup plus flexible et que, par ailleurs, elles ont le droit d'avoir un préjugé en faveur du consommateur sans avoir à se justifier autant que le commissaire à la concurrence canadien doit le faire.
    Malgré les bonnes intentions derrière ce projet de loi, pensez-vous que l'approche adoptée dans celui-ci, qui consiste à rajouter encore des contraintes pouvant mener à des litiges, est la bonne?
    Vous me posez une colle, parce que je n'ai pas eu l'occasion d'examiner le projet de loi en détail.
     Le commissaire à la concurrence devrait-il avoir davantage les coudées franches? Devrait-on simplifier son travail plutôt que le complexifier, essentiellement?
    Certainement. D'ailleurs, puisqu'il est question de concurrence, peut-être pourrait-on créer également de la concurrence au Bureau de la concurrence en donnant aux parties la capacité de s'adresser au Tribunal de la concurrence.
     Monsieur Charlebois, vous avez parlé d'un code de conduite. On en a beaucoup parlé au cours de la dernière année et demie. Le ministre Champagne a commencé à faire des pas dans cette direction, et vous en avez parlé dans votre introduction. C'est très intéressant.
    Le code de conduite que vous avez en tête serait-il basé sur une participation volontaire, ce qui correspondrait à une autoréglementation, ou serait-ce un cadre créé par une loi et établi par le ministre par voie réglementaire? Pouvez-vous préciser cela, s'il vous plaît?
    C'est une bonne question, monsieur le président.
    Ce qui pourrait fonctionner dans ce secteur, c'est un code de conduite volontaire qui requiert la participation de tout le monde, c'est-à-dire des cinq grandes entreprises: Costco, Walmart, Metro, Sobeys et Loblaws.
    Pour qu'un code de conduite volontaire fonctionne, il est important que tout le monde y adhère. Sinon, il va falloir que le Comité et le ministre considèrent d'autres options.
     Merci, monsieur Garon.

[Traduction]

    Monsieur Masse, c'est votre tour. Vous avez six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci aux témoins d'être ici.
    Je vais commencer avec M. Charlebois. Mes questions vont porter sur le code volontaire.
    J'ai soumis un projet de loi à la Chambre, qui l'a adopté. Il portait sur le droit de réparer pour le marché secondaire de l'automobile. C'était il y a 10 ans, peut-être 12. Avant, les Canadiens ne pouvaient pas faire réparer leur véhicule parce que les grandes sociétés — pas toutes, mais la plupart — ne fournissaient pas les logiciels, l'équipement et les outils au marché secondaire. Les gens étaient obligés d'aller chez le concessionnaire pour des réparations. Même pour une simple réinitialisation de l'ordinateur de bord, le véhicule devait être remorqué chez le concessionnaire. C'est mauvais pour l'environnement, la sécurité publique et la concurrence, de toute évidence.
    Le projet de loi a été adopté par la Chambre des Communes et il allait être renvoyé au Sénat, mais l'industrie a décidé de se donner un code volontaire. À l'époque, le ministre responsable était Tony Clement. L'industrie a donc un code volontaire actuellement, mais la situation est loin d'être optimale. L'informatisation a beaucoup évolué dans l'industrie, comme nous l'avions prédit. Il y a encore des problèmes. L'aspect de la concurrence pour ce qui est du code volontaire est problématique. Il y a de bons joueurs, qui respectent le code, mais d'autres continuent de poser problème.
    Avez-vous des suggestions à nous faire concernant le code de conduite volontaire des épiciers par opposition à un code qui serait obligatoire? Le fait que la question ressurgisse [difficultés techniques]. La Chambre des communes est actuellement saisie de trois projets de loi d'initiative parlementaire qui portent sur la concurrence dans le marché secondaire, la réparation des véhicules et ce genre de choses. Avez-vous des réflexions à nous livrer à cet égard?
    Ce serait une grande déception si nous retombons dans le même panneau. C'est là où nous en sommes 10 ans plus tard. Nous pouvons faire réparer nos véhicules… Des sociétés ont fait des progrès, mais pas toutes. Comme le code est volontaire, nous sommes impuissants. C'est le noeud du problème.
(1710)
    C'est une excellente question, monsieur Masse.
    Je ne connais pas vraiment le code volontaire lié au droit de réparer. Je ne sais pas si toutes les parties ont été invitées à y adhérer.
    Pour ce qui concerne le code de conduite des épiciers, c'est un facteur déterminant du succès: les cinq grands doivent y adhérer. Nous savons tous que Walmart et Costco ont refusé jusqu'ici. Les trois autres grands ont indiqué qu'ils adhéreraient au code si tous les autres le font. Je suis d'accord avec cette vision.
    Si les sociétés américaines présentes au Canada continuent d'hésiter, je suggère au Comité de recommander la voie législative. J'ai fait la même suggestion au comité de l'agriculture en février.
    Vous soulevez d'excellents points.
    Je suis content de vous entendre parler de Walmart et de Costco. Très honnêtement, je crois qu'il y a un peu plus de transparence du côté de Costco pour ce qui est des prix.
    C'est un grossiste. La marge de 4 000 articles dans ses magasins est de 15 %. C'est un modèle complètement différent. J'ai vraiment l'impression que Costco adhère un peu plus au concept que Walmart.
    Merci de ces explications.
    Combien de temps allons-nous tolérer cette valse-hésitation avant d'imposer un code de conduite obligatoire?
    J'aimerais mentionner quelques éléments dont il n'a pas encore été question. Plusieurs des idées que vous avez avancées me plaisent. Je ne sais trop si elles tombent sous la portée de ce projet de loi, mais elles méritent clairement qu'on s'y attarde.
    Par exemple, les applications des épiceries n'indiquent pas les écarts de prix en magasin et en ligne. Le client doit faire ses propres recherches. Je crois que c'est un bon exemple de ce qu'il faudrait inclure dans un code de conduite.
    Un autre enjeu est lié à la réduflation, lorsque le poids des produits offerts est réduit sans que ce soit indiqué sur le produit.
    Nous avons recommandé, entre autres, la collecte de données et leur vulgarisation par le Bureau. C'est un peu ce que vous dites, monsieur Masse. Il faut faire en sorte que le marché nous informe plus clairement sur les prix, la disponibilité et les quantités.
    Je sais que mon temps est limité, et je vais donc poser mes questions à M. Péladeau au tour suivant.
    Je ne veux pas accaparer le temps du Comité pour ce débat, mais je tiens néanmoins à inscrire au compte rendu un avis de motion que m'ont inspiré ces audiences. C'est un des aspects positifs de ce projet de loi: il a fait émerger de très bonnes idées. M. Charlebois nous en a apporté d'autres aujourd'hui, mais ma motion porte sur une idée proposée par le Bureau de la concurrence.
    Je vais lire l'avis de motion aux fins du compte rendu, et je vais m'arrêter là pour l'instant:
Que, conformément à l’article 108(2) du Règlement, le Comité invite le commissaire de la concurrence, Matthew Boswell, et d’autres experts du domaine de la concurrence, y compris, mais sans s’y limiter, des représentants du ministère de l'Industrie, des intervenants de l’industrie et des experts externes, syndicats, ainsi que des universitaires spécialisés dans le droit de la concurrence et l’économie du Canada, et consacre un minimum de trois réunions à l’étude des obstacles réglementaires qui limitent la concurrence au pays et continuent de faire grimper les prix pour les Canadiens dans leur vie de tous les jours.
    Je vais déposer l'avis de motion. Je serai ouvert à toute proposition d'amendement que me feront mes collègues après en avoir pris connaissance.
    Merci de m'avoir accordé du temps. Je vais poser mes questions à M. Péladeau au prochain tour.
    Merci beaucoup, monsieur Masse, pour cet avis de motion, dont nous allons certainement reparler plus tard.
    Nous allons entamer une seconde période de questions, avec M. Généreux pour commencer. Vous disposez de cinq minutes.

[Français]

     Je remercie nos témoins d'être présents aujourd'hui.
     Monsieur Péladeau, vous avez dit tantôt qu'en 2023, 80 % des ventes au détail au Canada avaient été faites en magasin. Parliez-vous des cellulaires, des forfaits ou des deux?
(1715)
     Il y a deux modèles, monsieur le député. Il y a ce qu'on appelle « prenez vos appareils personnels », et il y a aussi l'option d'acheter un téléphone cellulaire. Ces deux modèles se vendent également au détail.
    Au Québec, si je ne m'abuse, chez Vidéotron, vous avez un réseau de vente dans vos magasins. Vous êtes aussi dans les centres commerciaux. Vous avez un assez grand nombre de magasins.
    L'entente avec Glentel vise-t-elle particulièrement l'Ouest canadien et l'Ontario, ou vise-t-elle aussi le Québec?
     Cette entente ne touche pas le Québec. Glentel, en fait, Loblaws n'offre pas de Mobile Shop au Québec en tant que tel.
     Vous avez parlé de 180 magasins dans le reste du Canada. Je me fais un peu l'avocat du diable: existe-t-il d'autres réseaux auxquels vous pourriez vous associer? Par exemple, Freedom Mobile pourrait-elle s'associer à la chaîne Costco ou à d'autres chaînes de magasins où vous pourriez vendre vos produits, pour être en concurrence avec les trois autres grands joueurs?
    J'ai une autre question: est-ce que cela touche également Telus?
    Je vais vous répondre par étapes. En réponse à votre première question, nous sommes constamment en discussion avec différents partenaires. Nous sommes proactifs. Nous tenons des discussions. Évidemment, comme nous l'avons dit dans notre allocution d'ouverture, idéalement, nous recherchons des partenaires neutres. Ainsi, pour établir des partenaires neutres, il faut avoir des discussions avec des partenaires potentiels, et également déterminer si ces derniers sont prêts à être des partenaires neutres. Nous ne pensons pas qu'une approche unitaire, où on offre seulement nos produits, est la solution gagnante au bout du compte. Nous sommes, en effet, en pourparlers avec un certain nombre de partenaires potentiels.
    Si je comprends bien, l'accord convenu entre Glentel, Bell et Rogers est une entente exclusive, mais elle ne l'était pas au début. Elle est donc devenue exclusive, et c'est ce que vous contestez particulièrement.
    Je vais revenir à votre deuxième point tout à l'heure.
    Effectivement, ce que nous comprenons de cette entente — nous n'avons pas reçu de confirmation officielle de la part de Loblaws —, c'est que Telus serait également exclue de cette nouvelle entente exclusive.
    Je vais vous donner l'exemple du Manitoba, où nous venons de lancer, le 23 mai dernier, les services de Freedom Mobile, précisément à Winnipeg. En ce qui concerne notre lancement, nous aurions lancé nos services dans un peu plus de 21 points de vente en incluant les magasins Mobile Shop. Cependant, étant donné le retrait de Mobile Shop, nous n'avons évidemment pas été en mesure de nous lancer de la même façon dans ce nouveau territoire. Nous avons donc lancé les services avec seulement 12 points de vente. Vous comprendrez que cette différence a des répercussions sur la performance que nous pouvons générer sur le plan des ventes dans le territoire en question.
     Encore là, je me fais l'avocat du diable. Ne le prenez pas de façon personnelle; je suis également dans les affaires.
    Ma compagnie est petite par rapport aux vôtres, bien sûr, mais je n'ai jamais eu peur de la concurrence et je ne crois pas non plus que vous, MM. Péladeau, en ayez peur, d'aucune façon. Vous serez possiblement en mesure, malgré une entente comme celle-là, de développer de futurs réseaux ou de nouveaux réseaux, qui vont vous permettre d’obtenir des gains plus importants que ceux que vous auriez obtenus avec eux. Si je comprends bien, Telus est exclu également, cela veut dire que vous pourriez conclure des ententes avec elle qui vous permettraient de faire des ventes dans l'Ouest canadien, particulièrement.
    Je ne sais pas si je dis n'importe quoi. Peut-être pourrez-vous me dire si mes propos ont du sens ou non.
     Je peux très bien répondre à votre question.
    Pour ce qui est de savoir si de telles ententes pourraient être conclues, c'est une possibilité. Cela étant dit, un problème de clarté se pose à l'égard du consommateur. Quand les consommateurs se présentent dans ces magasins, ils ont l'impression de voir ce qui est offert dans l'industrie en général pour ce qui est de ces appareils. Ils ne savent aucunement que ces magasins sont sous le contrôle de Bell et de Rogers.
     Comme on l'a dit un peu plus tôt, est-il vraiment normal que deux des trois compagnies formant un oligopole puissent agir ainsi pour exclure un nouveau concurrent de leurs opérations? On a parlé plus tôt des pouvoirs dont dispose le Bureau de la concurrence. Je ne connais assurément pas, moi non plus, les détails de cette loi, mais il nous paraît aberrant qu'on puisse procéder de cette façon. À nos yeux, cela signifie tromper le consommateur.
     Je suis totalement d'accord sur ce que vous dites. Nous sommes tous favorables au fait qu'il y ait davantage de concurrence. D'ailleurs, monsieur Péladeau, vous avez dit que, depuis l'acquisition de Freedom Mobile, il y a environ un an, je crois, vous aviez fait baisser d'environ 23 % les prix des forfaits sans fil.
     Quelles sont vos intentions? Qu'avez-vous obtenu en matière de pénétration du marché depuis que vous avez acquis Freedom Mobile?
(1720)
     Monsieur le député, ce n'est pas nous qui le disons, mais bien Statistique Canada. On parle donc d'une tierce partie, qui est, je le présume, entièrement objective.
    De plus, vous vous souviendrez peut-être que nous avons pris des engagements envers le gouvernement, envers le ministère. Nous disposions d'une période spécifique pour offrir une baisse déterminée. Or, nous avons atteint tous ces objectifs dans un délai plus court que celui qu'on nous avait donné et que nous devions respecter.
    Bien sûr, nous allons continuer de progresser et faire en sorte de pouvoir offrir de nouveaux produits. Mon frère Jean le disait récemment. Nous venons de lancer les produits et services de Freedom Mobile à Winnipeg. Nous souhaiterions également pouvoir offrir des forfaits plus importants. Je ne vais pas entrer dans les détails, mais disons qu'il nous serait difficile d'aller jusque là. Il reste que, pour la première fois, nous offrons aux gens qui utilisent peu de données un forfait à bas prix qu'ils n'ont jamais connu avant.
    Nous avons l'intention de lancer également ce qu'on appelle les assemblages pour les services sans fil. Les gens auront accès à Internet et à la câblodistribution. Un nouveau concurrent comme Freedom Mobile, qui est sur le marché depuis un peu plus d'un an, soit depuis 14 mois, fera en sorte que les Canadiens et les Canadiennes puissent profiter de nouveaux produits à de meilleurs prix.
    Je vais maintenant m'adresser à M. Charlebois. J'aimerais savoir si la taxe sur le carbone fait augmenter le prix des aliments que nous achetons en magasin.
     Comme je l'ai dit à M. Williams en réponse à une question, il est très difficile de créer un coefficient qui mesure précisément l'impact de cette politique sur les prix au détail. La situation est différente du côté industriel et du commerce en gros, où on observe actuellement un écart assez important entre les États‑Unis et le Canada en matière de prix.

[Traduction]

    Merci, monsieur Généreux.
    La parole ira maintenant à M. Gaheer, pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci aux témoins de comparaître devant le Comité et de nous donner leurs éclairages.
    Mes questions s'adressent à M. Charlebois.
    Monsieur, dans votre déclaration préliminaire, il a été question du soutien aux PME de l'industrie agroalimentaire. Je pense que vous avez parlé de subventions. Pouvez-vous nous en dire davantage sur d'autres mesures de soutien que les différents ordres de gouvernement pourraient accorder à l'industrie agroalimentaire?
    C'est une très bonne question. Merci.
    Essentiellement, comme M. Williams l'a souligné, je crois que les activités de transformation sont les laissées-pour-compte dans le secteur alimentaire en général. J'ai toujours assimilé la transformation aux racines d'un arbre. Nous voyons tous l'arbre, les branches, les feuilles, mais jamais ses racines. Pourtant, ce sont les racines qui permettent à l'arbre d'être droit et de rester debout. Au Canada, nous avons très mal fait notre travail de soutien aux PME de ce maillon particulier de la chaîne d'approvisionnement.
    Depuis des années, je vois des PME qui payent des frais de présentation, de conformité en matière de salubrité alimentaire, de recherche et développement, et toutes sortes d'autres frais qu'elles n'ont pas prévus. Je pense vraiment que le gouvernement peut faire quelque chose pour aider les petites et moyennes entreprises qui veulent se lancer dans la transformation alimentaire.
    Le secteur de la transformation est vraiment en difficulté d'un bout à l'autre du pays, mais la situation est encore pire au Canada atlantique et en Colombie-Britannique, pour différentes raisons. Je ne crois pas que nous avons soutenu suffisamment le secteur de la transformation alimentaire de façon générale, et que nous avons bien accompagné ces entreprises qui n'ont pas les reins assez solides pour rivaliser avec les grandes sociétés du secteur des biens emballés pour la vente au détail qui nous arrivent de l'étranger.
    Merci.
    Je suppose que la transformation exige énormément de capitaux, surtout au début, et que c'est peut-être un obstacle à l'entrée des PME dans ce secteur. Selon vous, quel rôle le gouvernement pourrait‑il jouer à cet égard? J'imagine que le financement initial des coûts d'installation d'une usine de transformation n'est pas facile à trouver. Qu'est-ce que le gouvernement pourrait faire d'autre?
(1725)
    C'est surtout une question de réglementation. Je pense que certaines réformes pourraient être apportées aux politiques de clémence pour ce qui concerne les autorisations, notamment. Actuellement, les politiques imposent beaucoup de contraintes qui sont des obstacles. Je pense entre autres à l'accès à du terrain ou au lieu de construction, aux démarches auprès des municipalités, à l'accès à l'eau et au traitement de cette eau. L'idée n'est pas de faire preuve de clémence partout et pour tout, mais je crois vraiment que les coûts sont prohibitifs pour les PME dans le secteur de la transformation des aliments.
    Le gouvernement envisage souvent la fabrication des produits alimentaires de la même façon que la fabrication de voitures ou d'autres produits. La réalité, c'est que les marges sont extrêmement faibles et que, par conséquent, la marge d'erreur est quasiment nulle. C'est pourquoi nous voyons beaucoup d'usines, en Ontario et ailleurs, qui sont sous-capitalisées. Actuellement, elles devraient accélérer leur automatisation, recourir davantage à la robotique, mais il n'y a pas d'investissements pour les aider. Il y a même une usine de Cargill en grève à Guelph, et une grève est imminente dans une autre de ses usines à Calgary. Cargill, c'est une immense organisation, qui a généré des revenus de 170 milliards de dollars l'an dernier, mais qui hésite à investir au Canada en raison de notre réglementation.
     J'en ai discuté avec M. Champagne. La rhétorique autour de la stimulation de la concurrence sonne un peu faux à mes oreilles. L'important, je pense, c'est que les gouvernements en viennent à comprendre que la concurrence s'exerce si les conditions sont propices. C'est vraiment ce qui compte le plus, mais ce n'est pas ce que nous observons dans le secteur alimentaire.
    C'est très intéressant. Merci.
    Je me dois quand même de souligner que certains aspects dont vous avez parlé relèvent de la réglementation municipale. Quoi qu'il en soit, tous les ordres de gouvernement pourraient assurément en faire un peu plus pour établir ou favoriser un environnement propice à la concurrence.
    Dans votre déclaration liminaire, vous avez aussi mentionné les réseaux de distribution alimentaire. Pouvez-vous nous en dire davantage à ce sujet, et plus particulièrement sur les goulots d'étranglement que nous voyons actuellement? Pouvez-vous nous dire ce qui pourrait être fait en matière réglementaire pour aider les réseaux de distribution alimentaire?
    Avec plaisir. Je vais utiliser l'exemple du Marché des produits alimentaires de l'Ontario, qui à mon avis offre un merveilleux cas d'école pour le Canada. Cet organisme existe depuis de très, très nombreuses années, et il a aidé à la création de nouvelles entreprises. Il a aussi aidé les fournisseurs de services et les détaillants du secteur de l'alimentation à établir des liens avec les grossistes et les agriculteurs. C'est un exemple seulement.
    En fait, le gouvernement ontarien s'apprête à réaliser un examen du Marché des produits alimentaires de l'Ontario. Il doit poursuivre ses activités, mais il doit aussi les étendre. Ses bureaux sont à Etobicoke et l'espace commence à manquer. Il faudra faire quelque chose. Je pense que beaucoup d'autres endroits au pays auraient besoin d'un Marché des produits alimentaires de l'Ontario, y compris ici, au Canada Atlantique. C'est un modèle qui serait très utile ici même, à Halifax, pour faciliter l'accès des restaurateurs, des détaillants et des épiciers indépendants à divers produits.
    La distribution alimentaire est un enjeu complexe au Canada. Nous avons beaucoup d'espace et les coûts de distribution peuvent être très élevés. Nous devons être stratégiques. L'établissement stratégique de centres alimentaires pourrait véritablement contribuer au soutien des détaillants et des fournisseurs de services pour accroître l'accès des consommateurs aux produits locaux.
    Formidable. Merci.
    Merci, monsieur Gaheer.
    Monsieur Garon, c'est à vous.
    Vous avez deux minutes et demie environ.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
     Monsieur Péladeau, je reviens à Glentel.
     Mon collègue M. Généreux a posé des questions très intéressantes. Je suis d'accord avec lui quand il se fait l'avocat du diable en disant que rien ne vous empêche de vendre vos services ailleurs.
     Pourtant, mon âme d'économiste me porte à croire que la même pratique commerciale dans deux environnements différents peut produire des résultats différents.
    D'après ce que je comprends, vous dites avoir été une menace pour les acteurs les plus importants dans l'Ouest, parce que vous prévoyiez des baisses de prix et que la forme de coentreprise créée par les deux grands, essentiellement, avait pour but explicite de freiner votre entrée dans ce marché.
    Croyez-vous que le but explicite était celui-là?
    Selon vous, quel est l'effet sur les consommateurs? Qu'est-ce qui pourrait être offert à grande échelle aux consommateurs du Manitoba, par exemple, qui ne le serait pas maintenant que Glentel a pris ces actions?
(1730)
    Je vais commencer par répondre à votre question, et je laisserai Jean Péladeau donner les détails.
     Je dirais que l'un n'empêche pas l'autre. Ce n'est pas parce que nous demeurons dans le réseau de la vente au détail que nous allons cesser la commercialisation par d'autres canaux. Effectivement, c'est le cas. M. Généreux parlait du Québec. Ici, au Québec, on fait également beaucoup de vente en centre d'appel, ce qui n'est pas une pratique très répandue dans les autres régions canadiennes. On va faire de plus en plus de la vente par l'entremise du Web. Là aussi, cela varie d'une région à l'autre.
    Cependant, cela ne veut pas dire que se faire expulser est une bonne chose. Au contraire, cela va réduire la possibilité de ceux et celles qui souhaitent continuer ainsi. Comme on le dit en bon français, le « magasinage » est important au Québec aussi. C'est important également ailleurs. Si on diminue la possibilité des clients d'avoir des choix, je ne vois pas en quoi cela va servir la concurrence. C'est indéniablement le cas.
    Maintenant, y a-t-il une intention de nuire à la concurrence? C'est difficile à dire. Je ne peux pas le savoir, je n'ai pas les outils pour déterminer cela. Toutefois, on a peut-être des raisons de croire que ces mesures sont effectivement prises pour freiner et diminuer de façon importante la concurrence dans le domaine de la vente au détail, qui est le canal le plus important dans les provinces canadiennes.
    Pour continuer dans la même veine que sa réponse initiale, il apparaît clairement que la décision de cheminer avec une coentreprise de ce type était une décision délibérée de freiner notre élan dans le marché en ce moment et, justement, de réduire la vitesse à laquelle nous sommes en mesure d'obtenir des parts de marché auprès des clients et d'offrir notre prestation de services auprès des Canadiens et des Canadiennes.
    Cela dit, je vais me permettre d'ajouter un commentaire.
    Dans son discours d'ouverture, Pierre Karl Péladeau a mentionné que nous sommes quand même entrés en contact avec Glentel pour discuter de la situation et pour lui dire que nous comprenons le fait qu'elle ait une nouvelle entente, mais que nous aimerions nous associer avec eux et être commercialisés, justement, comme un détaillant neutre.
    Je vais me permettre de reprendre leurs propos en anglais, puisqu'on nous a répondu en anglais:

[Traduction]

    « Je ne crois pas que nous ayons quoi que ce soit à dire sur le sujet dont vous voulez discuter. »

[Français]

     Autrement dit, cela ne vaut même pas la peine de s'assoir pour en parler. C'était une fin de non-recevoir.

[Traduction]

    Merci, monsieur Garon.
    La parole ira ensuite à M. Masse, pour deux minutes et demie.
    Merci, monsieur le président.
    La question s'adresse à un des deux Péladeau. Je vous laisse le soin de choisir lequel y répondra.
    Dans la plainte que vous avez soumise au Bureau de la concurrence, il est mentionné que l'oligopole a, ou pourrait avoir le contrôle sur 62,5 % de l'ensemble des détaillants tiers. Pouvez-vous nous donner des détails sur ces prévisions et la part de marché qu'il pourrait accaparer?
    Monsieur Masse, je suis désolé, mais aucun des Péladeau ne va répondre à votre question.
    Je vais céder la parole à M. Jean-François Lescadres, notre directeur financier et vice-président, Finances. Il connaît bien le dossier et il va pouvoir vous donner une réponse juste et précise.
    Aucun souci. Merci.
    Essentiellement, nous parlons des boutiques The Mobile Shop, et c'est exactement la situation dans laquelle nous nous trouvons actuellement. Ce genre de manoeuvres visant à exclure la concurrence sont déjà utilisées dans beaucoup de magasins.
    C'est le cas chez Costco, dont nous venons de parler. Leur magasin s'appelle WIRELESS etc., ou SANS-FIL etc. au Québec. Des magasins vendaient déjà les produits de Glentel et les produits de Freedom Mobile étaient exclus.
    Il existe d'autres modèles, dont WOW! Mobile, qui est dans ce cas‑ci une coentreprise de Telus et Rogers. C'est un autre exemple de deux acteurs déjà en place qui s'associent et qui excluent les produits d'autres marques de leur offre.
    Je ne veux pas me répéter… Comme Pierre Karl Péladeau l'a évoqué, nous n'avons pas trouvé d'autres exemples dans le monde où deux acteurs d'un oligopole ont pu unir leurs forces pour exclure les autres. Nous avons fait des recherches. Existe-t-il des exemples comparables? Si oui, nous ne les avons pas encore trouvés.
(1735)
    Très bien.
    Un des problèmes, qui durent depuis plusieurs décennies, est que les nouveaux arrivés se font avaler. Dans certains cas, leurs marques ont été conservées, mais elles peuvent aussi avoir été changées, et je ne suis pas certain si les consommateurs sont sensibilisés et s'ils comprennent que ces entreprises sont en fait des filiales de Bell, Rogers ou Telus.
    Si vous avez une opinion à ce sujet… Je me demande s'il y aurait lieu d'exiger plus d'honnêteté dans la publicité, et s'il faut obliger ces nouveaux arrivés et les fournisseurs du marché à indiquer clairement qui sont leurs propriétaires dans leurs annonces publicitaires.
    Monsieur Masse, c'est une bonne idée, mais pourquoi ne pas agir en amont dans la chaîne alimentaire en interdisant purement et simplement ce genre de situation?
    C'est un bon point.
    Si on bloque l'accès un canal de vente au détail qui est un des plus importants, peu importe ce qui est dit dans les annonces publicitaires… Nous avons vu des annonces de Bell… C'est impossible à lire. Imposer une taille pour ces annonces peut être un peu exagéré et un peu trop compliqué, je pense. De toute manière, je ne suis pas certain qu'une interdiction totale va donner les résultats escomptés.
    Merci.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur Masse.
    Monsieur Vis, vous avez la parole pour cinq minutes.
    Monsieur Charlebois, je suis très heureux que vous soyez des nôtres. Je vous suis sur Twitter.
    Vous apportez un vent de fraîcheur dans le paysage universitaire, notamment parce que vous avez parlé de centres alimentaires. Je viens de la vallée du Fraser, et nous venons d'en créer un dans la région d'Abbotsford-Mission. Ce que vous avez dit à propos du développement du secteur de la transformation alimentaire est particulièrement pertinent pour la région où je vis.
    Plus tôt cette année, j'ai assisté à une réunion de la Fraser Valley's Mainland Mild Producers Association, durant laquelle Phil Vanderpol a pris la parole. Durant son exposé, il a affiché à l'écran les coûts réels de la construction d'une nouvelle beurrerie dans ma circonscription. Dans les faits, le projet qu'il a lancé il y a quelques années n'est plus faisable à cause de l'augmentation du coût des intrants, du coût élevé de production lié à la main-d'oeuvre, ainsi que du régime fiscal non concurrentiel pour ce qui touche l'investissement dans l'équipement.
    Pour aider les producteurs d'aliments qui veulent faire de la transformation, que pouvons-nous faire, du point de vue du régime fiscal, pour encourager l'achat de nouvel équipement, entre autres pour automatiser les installations, comme vous l'avez évoqué tout à l'heure?
    C'est une excellente question.
    Je me rappelle que le gouvernement du Québec a octroyé du financement à Kraft Heinz pour l'inciter à construire une usine de production de ketchup à Montréal. Pourquoi ne pas faire la même chose pour des entreprises canadiennes?
    Au cours des 10 dernières années, plus de 4 000 nouvelles usines de transformation d'aliments ont été construites aux États-Unis. Durant la même période, nous en avons construit moins d'une trentaine au Canada.
    La construction de nouvelles usines coûte cher à cause des exigences gouvernementales, parfois à l'échelon du fédéral… En fait, c'est souvent à l'échelon du fédéral parce que pour obtenir une licence du fédéral, il faut la demander à l'Agence canadienne d'inspection des aliments, l'ACIA, ce qui entraîne énormément de coûts et d'inspections, et beaucoup de lourdeur bureaucratique.
    Je pense qu'il faudra décider à un moment ou un autre si nous voulons soutenir le secteur de la transformation et les nouvelles entreprises. Votre exemple du beurre est lié à la gestion de l'offre. S'il y a un domaine où nous devrions investir, c'est dans celui de la gestion de l'offre.
    Tout à fait.
    À Kingston, en Ontario, nous avons autorisé la Chine à construire l'usine Canada Royal Milk, qui fabrique des préparations pour nourrissons. C'est un signe flagrant que nous n'en faisons pas assez en matière d'intégration verticale dans ce pays. Nous permettons à d'autres pays d'investir chez nous pour faire le travail que nous sommes censés faire.
(1740)
    Merci de cette réponse.
    Avez-vous des précisions à nous donner… Je suis entièrement d'accord avec vous pour ce qui concerne l'ACIA. Elle semble plus encline à compliquer la tâche des transformateurs en place qu'à collaborer avec eux.
    Avez-vous des recommandations concrètes à nous donner concernant les modifications à apporter aux méthodes d'inspection de l'ACIA?
    Je peux vous soumettre des recommandations détaillées, mais je ne les ai pas ici.
    Merci énormément. Je suis impatient…
    Je pourrai, après la…
    Merci.
    Nous sommes ici aujourd'hui pour étudier ce projet de loi parce que le chef du Nouveau Parti démocratique, M. Singh, a beaucoup parlé des profits excessifs des épiciers. À ce jour, personne ne m'a expliqué ce qu'on entend par « profits excessifs » et ce que cela signifie pour un épicier et l'achat de produits alimentaires.
    Puisque vous êtes un de nos grands experts, pouvez-vous nous expliquer ce qu'on entend au juste par « profits excessifs »?
    Non, je ne peux pas. J'ai posé la même question à M. Singh. Je ne pense pas qu'il devrait y avoir une définition. Nous devrions, pour commencer, nous rappeler la raison d'être des entreprises, qui est de dégager des bénéfices.
    Je pense que ce qu'il faut vraiment souligner ici, c'est notre capacité d'encourager l'innovation et de soutenir la concurrence, mais aussi de réglementer. Je pense qu'une grande partie de la colère des Canadiens tient au fait qu'ils ne se sentent pas protégés. C'est pourquoi je pense que ce projet de loi est très important, car il permet à l'entreprise de faire son travail.
    L'enquête sur la fixation concertée du prix du pain dure depuis neuf ans et elle n'est toujours pas terminée. Les Canadiens ont tout à fait le droit d'être en colère et sceptiques face à ce qui se passe. Ce que nous voyons dernièrement de la part du Bureau de la concurrence à propos des contrôles de propriété est une bouffée d'air frais. À mon avis, il faut continuer dans ce sens.
    Je vous remercie.
    Je comprends vos commentaires pendant votre échange avec M. Gaheer sur la nécessité de veiller à ce que les conditions soient réunies pour favoriser la concurrence. Je ne pense pas qu'elles le soient, notamment dans le secteur de la vente au détail de produits alimentaires dans notre pays. C'est pourquoi je suis pessimiste quant aux dispositions que notre parti a même accepté d'appuyer pour réduire les prix que les Canadiens constatent dans les épiceries. Il faudra du temps, selon moi, pour qu'une concurrence se dessine dans ce secteur.
    Quels sont, selon vous, les deux ou trois éléments clés nécessaires pour qu'apparaissent les conditions nécessaires à la concurrence?
    Réglez dès que possible la question des obstacles interprovinciaux. Il le faut. Parlez avec n'importe quelle entreprise agroalimentaire, y compris dans votre propre circonscription, je suppose, dans la vallée du Fraser. Il est plus facile de faire des affaires avec les États-Unis qu'avec d'autres provinces. C'est un très gros problème.
    Ici même, en Nouvelle-Écosse, nous avons beaucoup d'entreprises formidables, mais elles ne peuvent pas se développer à cause de certains de ces obstacles.
    C'est certainement une des choses que je ferais aussi rapidement que possible.
    Je vous remercie.
    Je vous remercie, monsieur Vis.
    La parole est à M. Turnbull pour cinq minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je remercie tous les témoins de leur présence aujourd'hui. Il s'agit d'une conversation importante, comme beaucoup que nous avons au comité de l'industrie.
    Monsieur Péladeau, je commencerai par vous, peut-être. Je remarque qu'un article de presse récent, paru hier, rapporte que le juge de la Cour fédérale a ordonné aux deux sociétés mères, Loblaw et Sobeys, de remettre des documents au Bureau de la concurrence du Canada, ce qui est conforme au nouveau pouvoir conféré par le Parlement au Bureau de la concurrence au terme de nos travaux. Il s'agit d'exiger de la documentation et de réaliser des études de marché plus approfondies, ce qui est, nous avons tous constaté, je crois, une bonne chose, mais aussi d'enquêter sur des collaborations entre des industries qui seraient considérées comme anticoncurrentielles.
    Il me semble que vous vous trouvez actuellement face à une situation très similaire. Dans le cas particulier auquel je fais référence, il s'agit de contrôles de propriété. Pouvez-vous nous parler du fait que le Bureau de la concurrence a maintenant ce nouveau pouvoir d'enquêter et d'exiger des documents, ce que confirment les tribunaux? Je suis sûr que vous conviendrez que, dans le cas que vous avez soumis au Comité, il s'agit d'une évolution positive, le Bureau ayant plus de pouvoir pour traiter le problème dont vous êtes venu parler.
(1745)
    Oui, plus l'on dote le Bureau de la concurrence d'outils pour enquêter sur une situation particulière, plus il réussira à faire en sorte que les mesures anticoncurrentielles soient interdites et sanctionnées. Je dirai que le meilleur est à venir, s'il en a la capacité.
    Je répète qu'en plus de cela, il faut, en fin de compte, avoir le leadership, ce qui est primordial pour s'assurer que la loi sera appliquée. S'il n'a pas d'éléments qui l'obligent à agir, cela devient une question de priorités. Il continuera en fonction des moyens dont il dispose et des priorités qu'il établit. Par conséquent, s'il estime que dans un aspect de la vie quotidienne des consommateurs canadiens, ce n'est pas important, ce ne sera pas prioritaire dans le dossier, et il faudra attendre le bon vouloir ou l'humeur de la direction du Bureau pour que ce soit examiné.
    Je vous remercie de votre réponse.
     Monsieur Sylvain Charlebois, je vais vous poser une question similaire à propos du projet de loi C‑56. L'exemple que j'ai donné est celui d'un récent article rapportant que le juge de la Cour fédérale a confirmé, d'une certaine manière, les nouveaux pouvoirs que le Parlement a conférés au Bureau de la concurrence.
    Nous savons, ou du moins le Bureau de la concurrence soupçonne, qu'il existe des pratiques anticoncurrentielles bien ancrées dans ces contrôles de propriété et que, dans certains cas, Loblaw et d'autres entreprises ont des participations importantes dans les fiducies de placements immobiliers, les FPI, qui contrôlent les centres commerciaux.
    En gros, il existe des pactes et des conditions. Il se peut qu'ils empêchent — ou que les conditions dictées dans ces contrats empêchent — des concurrents d'être présents dans ces mêmes centres commerciaux.
    Que pensez-vous du fait que le Bureau de la concurrence dispose maintenant de ce nouveau pouvoir? Trouvez-vous positif qu'une enquête puisse creuser plus loin dans ce qui se passe réellement dans ces collaborations qui peuvent être anticoncurrentielles?
    Je dirai que c'est assurément un pas dans la bonne direction.
    Voici ce que je pense qu'il se passe. D'un côté, vous avez des épiciers qui, à mon avis, croient fermement que ce qu'ils font est normal et légal, parce que beaucoup de gens savent que ces choses se font depuis très longtemps.
    J'étudie la distribution alimentaire depuis 25 ans. Je ne me souviens pas de la première fois où j'ai entendu parler de ces pratiques, qui se sont normalisées au fil des ans. Aujourd'hui, nous constatons que le public est moins tolérant à l'égard de certaines d'entre elles. Elles sont apparues au grand jour à cause de la hausse des prix de l'alimentation, et les citoyens s'attendent à autre chose.
    C'est là que le Bureau de la concurrence a un rôle à jouer, à mon sens, pour donner un ton différent, afin de créer un changement culturel au sein de l'industrie, en disant aux épiciers que si cela était probablement acceptable socialement dans le passé, ce n'est plus le cas aujourd'hui.
    En effet.
    Je pense que c'est de cela que parle M. Péladeau, de ce leadership qui pourrait amener les épiciers à comprendre qu'ils ne sont plus au Kansas.
    Je vous remercie.
    Je pense que c'est un bon signe, et il est réconfortant d'entendre que les deux témoins aujourd'hui sont d'accord avec ce changement.
     Autre changement notable dans le projet de loi C‑56, qui est un projet de loi d'initiative ministérielle, la suppression de la défense fondée sur les gains en efficience qui, depuis longtemps dans les examens de fusion, servait à justifier des fusions dont on estimerait autrement qu'elles réduisent considérablement la concurrence.
    Êtes-vous d'accord que supprimer la défense fondée sur les gains en efficience, motif souvent invoqué pour justifier des fusions qui, souvent, ont accentué la concentration des marchés, est une bonne chose pour accroître la concurrence?
    Je dirai que oui. À mon avis, le paysage de la distribution alimentaire serait très différent au Canada aujourd'hui si cette mesure avait été prise, par exemple, avant 1998, année où Loblaw a fait l'acquisition de Provigo; en 2005, année, me semble‑t‑il, où Metro a racheté A&P; et en 2013, année où Sobeys a repris Safeway.
     Ces trois acquisitions particulières n'auraient pas eu lieu si le projet de loi C‑56 avait été adopté ou entériné avant 1998.
(1750)
    Pour poursuivre sur le sujet, je sais que les avocats et les témoins d'excellente réputation que nous avons reçus plus tôt cette semaine ont dit à propos du projet de loi C‑352 qu'il réintroduit peut-être indirectement dans le droit de la concurrence la défense fondée sur les gains d'efficience. Or, ce n'est pas le cas. C'est une des questions qui restent en suspens. Il y avait trois questions, et peut-être que si j'ai une autre occasion d'intervenir, je me concentrerai sur les deux autres.
    Je pense que vous serez d'accord pour dire, si j'en crois votre témoignage, que réintroduire dans le droit de la concurrence la défense fondée sur les gains d'efficience serait un retour en arrière et ne serait pas propice à une concurrence accrue.
    Je suis d'accord, monsieur Turnbull. Je pense que ce serait un recul, certainement.
    Je ne suis pas juriste, et je veux juste faire en sorte que les gens le sachent. J'étudie la distribution alimentaire en tant que sociologue et économiste.
    Je vous remercie, monsieur.
    Je vous remercie, monsieur Turnbull.
    Monsieur Garon, vous avez la parole.
    Un député: [Inaudible]
    Le vice-président (M. Rick Perkins): Non, vous avez raison. C'est le tour de M. Williams. Je suis désolé. Je suis allé trop bas dans la liste.
    Vous faites un excellent travail par ailleurs, monsieur le président.
    Monsieur Williams, vous disposez des cinq prochaines minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Monsieur Charlebois, les Producteurs de grains du Canada ont fait savoir aujourd'hui que les modifications au taux d'inclusion des gains en capital feront augmenter les impôts de 30 % — je dis bien 30 % — pour les exploitations céréalières familiales. L'ensemble de ces exploitations seraient touchées, selon eux. La question que je vous pose est la suivante: toute augmentation que subissent les exploitations agricoles comme celles des céréaliers canadiens est-elle répercutée sur les prix de l'épicerie, oui ou non?
    Parlez-vous plus particulièrement de l'impôt sur les gains en capital, monsieur Williams?
    Oui. Les Producteurs de grains du Canada ont fait savoir que la modification du taux d'inclusion des gains en capital fera augmenter de 30 % les impôts de ces agriculteurs.
    Je n'ai malheureusement pas vu l'évaluation aujourd'hui, mais je dirai que je suis surpris qu'il n'en ait pas été question avant. D'autres groupes de l'économie se sont exprimés.
    J'estime, toutefois, qu'il est trompeur de laisser entendre que ce changement ne concerne qu'un petit nombre de Canadiens. Je pense qu'il concerne, en fait, un grand nombre d'entreprises, y compris dans le secteur agroalimentaire, à commencer par les agriculteurs. Je ne suis donc pas surpris d'entendre ce que j'entends à présent.
    Dites-moi ce que vous entendez au sujet de ces modifications fiscales. Est‑ce qu'elles concerneront les agriculteurs ? Les fabricants ? Dites-nous ce que vous entendez sur la façon dont ces modifications de l'impôt sur les gains en capital toucheront d'autres Canadiens.
    Ces modifications influent sur la planification des entreprises et des agriculteurs. Ils doivent penser à la prochaine génération.
    Nous avons des problèmes avec l'agriculture, la prochaine génération suivante et les mesures à prendre pour que plus de personnes travaillent dans l'agriculture. Augmenter cet impôt n'est donc certainement pas quelque chose à faire, car cela décourage les investissements. On décourage les gens d'envisager de travailler dans l'agriculture. Par ailleurs, il faut aussi voir ce qui se passe dans la transformation.
    Le secteur agroalimentaire compte beaucoup d'entreprises familiales et c'est ce qui fait sa spécificité par rapport à d'autres secteurs. Beaucoup d'entreprises familiales estiment que cet impôt sur les gains en capital porte atteinte à leur propre patrimoine et à celui de la génération suivante.
    Je ne suis pas certain que nous en ayons suffisamment discuté depuis la présentation de ce nouveau projet de loi au Parlement.
    Étant donné que cette augmentation concernera les familles et les exploitations agricoles familiales et que beaucoup d'entre elles sont, évidemment, déjà préoccupées par les prix, et étant donné que — par l'intermédiaire des Producteurs de grains du Canada —, elles disent qu'elle s'ajoutera à la facture d'épicerie, d'après votre expérience, cela risque‑t‑il d'entraîner une augmentation des coûts pour les consommateurs?
    Comme je l'ai dit, je n'ai malheureusement pas vu l'évaluation des Producteurs de grains du Canada, mais il serait prématuré à ce stade de donner à penser que cela pourrait avoir un impact sur le prix de l'alimentation. Nous n'avons pas fait d'évaluation. Il me semble, cependant, qu'il s'agit du même argument que celui avancé pour la taxe carbone, par exemple, pour laquelle il est très difficile de pointer un seul facteur et son incidence éventuelle. L'augmentation de cet impôt aura une incidence sur la productivité de notre secteur agroalimentaire et sur sa compétitivité, mais la vente au détail est toujours difficile.
    À terme, cela pourrait avoir une incidence sur notre sécurité alimentaire, car il pourrait y avoir moins d'exploitations agricoles ou moins d'acteurs dans le secteur.
(1755)
    Vous avez parlé de la fixation concertée du prix du pain. Étant donné que l'enquête du Bureau de la concurrence à ce sujet dure depuis plus de neuf ans et qu'elle n'a donné lieu qu'à des mesures limitées, puisque seul Canada Bread s'est vu infliger une amende, que pensez-vous de l'inaction du gouvernement libéral face à ce problème?
    Par ailleurs, que devons-nous faire et quels changements devons-nous apporter pour éviter que cela se reproduise et se prolonge pendant neuf ans, étant donné surtout que les États-Unis semblent avoir procédé à des arrestations et infligé des amendes plus lourdes que le Canada?
    C'est exact. Par exemple, juste pour faire une comparaison entre les États-Unis et le Canada, aux États-Unis, il y a eu une affaire concernant du thon en conserve. Le PDG de Bumble Bee Foods a passé 40 mois en prison parce qu'il a été reconnu coupable de fixation concertée de prix pendant trois ans.
    Au Canada, il semblerait que la collusion sur le prix du pain a duré pendant 14 ans, de 2001 à 2015. L'enquête a débuté en 2015 avec la divulgation de Loblaw. En 2017, nous avons tous appris ce qui s'était passé, et nous n'avons plus entendu parler de l'enquête jusqu'à l'an dernier, lorsque Canada Bread a admis sa culpabilité et payé une amende.
    C'est tout simplement inacceptable, et c'est pourquoi beaucoup de gens doutent de la capacité du Bureau de la concurrence de résoudre quoi que ce soit. Avec cette enquête sur les contrôles de propriété, j'espère que le Bureau agira très rapidement, parce que je crois qu'il y a un vrai problème, et qu'il formulera des recommandations qui seront rendues publiques afin que les gens soient plus rassurés sur ce qui se passe.
    M. Ryan Williams: Je vous remercie.
    Je vous remercie, monsieur Williams.
    Nous passons maintenant à M. Turnbull pour cinq minutes. Je vous en prie.
    Je vous remercie, monsieur le président.
     Pour aller plus loin sur le sujet, je poserai deux autres questions dans le temps qu'il me reste. Deux autres aspects du projet de loi C‑352, qui est le projet de loi d'initiative parlementaire dont nous parlons, n'ont pas été abordés.
    Ce que nous ont dit les témoins, me semble‑t‑il, c'est que plus ou moins 98 ou 99 % de tout ce qui se trouve dans le projet de loi d'initiative parlementaire de M. Singh est déjà traité dans les projets de loi C‑19, C‑56 et C‑59, qui ont apporté au fil du temps des séries de modifications successives — je parlerais d'ensemble complet de modifications — au droit de la concurrence de notre pays. Je pourrais passer toutes ces modifications en revue, mais nous manquerions rapidement de temps.
    Je me concentrerai sur deux points.
    Le premier point est que le projet de loi C‑352 plafonne le montant des amendes prévues.
    Les avocats qui ont comparu devant le Comité il y a quelques jours nous ont dit qu'en fait, il valait mieux laisser aux tribunaux la possibilité de fixer une amende maximale — pour avoir des sanctions plus sévères — que de plafonner dans la loi le montant que des personnes pourraient avoir à payer.
    Monsieur Charlebois, êtes-vous d'accord avec l'avis d'expert donné par les avocats que nous ne devrions pas fixer de nouveau une limite supérieure?
    La plupart des procédures judiciaires ne commencent pas par une peine maximale et, au fil du temps, les tribunaux pourraient décider, en cas de comportement répété, de dépasser toute limite supérieure que nous pourrions définir ici aujourd'hui.
    Qu'en pensez-vous, monsieur Charlebois?
    Je suis tout à fait d'accord. Je pense, monsieur Turnbull, que vous soulevez un point intéressant.
    Je n'ai pas fait de commentaire sur les montants mentionnés dans le projet de loi, mais je me suis demandé pourquoi préciser un montant dans la loi.
    Dans le secteur agroalimentaire en particulier, les entreprises ne sont pas toutes pareilles et les sanctions varieront considérablement. J'imagine que pour Grupo Bimbo, le propriétaire de Canada Bread, 50 millions de dollars, ce n'est pas grand-chose.
    C'est pourquoi je dirai que si l'on veut vraiment envoyer un message clair, mieux vaut ne pas arrêter de montant exact et laisser à la discrétion des tribunaux le soin de décider de la sanction appropriée dans certaines circonstances.
(1800)
    Je vous remercie.
    Ma dernière question porte sur un autre point de débat qui reste en suspens, je crois.
     Dans les séries précédentes et dans les consultations menées après l'adoption du projet de loi C‑19, avant le dépôt des projets de loi C‑56, C‑59, et ces séries de modifications, il y a eu beaucoup de conversations sur ce que l'on appelle les présomptions structurelles et l'idée que dans un examen de fusion, nous examinons un certain nombre de facteurs.
    Selon moi, une grande partie de ce que nous avons entendu lors de la consultation est, en résumé, que la part de marché peut être un indicateur d'une nette diminution de la concurrence, mais que cela ne suffit pas en soi pour décider de bloquer ou pas une fusion.
     Le projet de loi C‑352, le projet de loi d'initiative parlementaire dont nous parlons, reprend cette idée. Cependant, nous l'avons éliminée dans le projet de loi C‑59. Nous avons supprimé l'article de la Loi sur la concurrence qui interdit expressément au tribunal de conclure qu'une fusion est susceptible de nuire à la concurrence « en raison seulement de la concentration ou de la part du marché ».
    Si la plupart des experts estiment que la part de marché ne suffit pas en soi, c'est en raison de facteurs contextuels. Il arrive que la part de marché ou la concentration augmente légèrement à la suite d'une fusion, mais cela ne nuit pas nécessairement à la concurrence dans tous les cas. Le fait est que les tribunaux peuvent toujours prendre en compte n'importe quel facteur. Il en va de même pour la défense fondée sur les gains d'efficience. Dans leur processus d'examen des fusions, les tribunaux peuvent toujours tenir compte des gains d'efficience, de même que de la part de marché et de la concentration, mais nous ne voulons pas réinsérer cela comme présomption structurelle qui serait le facteur déterminant de leurs décisions.
    Monsieur Charlebois, êtes-vous aussi de cet avis?
    Devrions-nous nous en tenir à ce que nous avons entendu lors de la consultation, ce qui a conduit à la modification apportée par le projet de loi C‑59, ou est‑ce que nous devrions revenir en arrière et réintroduire la part de marché dans l'équation?
    Je crains, monsieur Turnbull, que nous n'ayons pas de débat, car je suis encore d'accord avec vous. Je pense, en fait, qu'il est trompeur d'utiliser la part de marché comme seul indicateur.
    Loblaw en est un bon exemple. Loblaw détient 29 % du marché canadien de l'alimentation au détail. Ce pourcentage est un peu trompeur, car Loblaw est une entreprise très intégrée verticalement. Elle est propriétaire du Choix du Président et de « sans nom », et des centaines d'entreprises gravitent autour de Loblaw, ce qui lui confère un énorme pouvoir dans le secteur agroalimentaire. Ne pas traiter avec Loblaw... Loblaw est, de fait, le premier client de la plupart des entreprises. C'est pourquoi il est très imprudent et dangereux de ne tenir compte que de ce seul indicateur. À mon avis, il faut prendre en compte de nombreux autres, y compris l'intégration verticale.
    Je vous remercie.
    Je n'ai pas d'autre question. Je vous remercie encore.
    Je vous remercie, monsieur Turnbull.
    Nous passons à M. Garon pour deux minutes et demie.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
     Monsieur Charlebois, tout à l'heure, mon collègue M. Vis vous a demandé ce qu'était le profit excédentaire, un concept qu'on enseigne en première année d'économie. Le profit excédentaire est un niveau de profit qui est tel que, si on le taxe, à risque égal, l'investisseur ne déplacera pas son capital dans un autre secteur.
    Les témoins que nous avons entendus jusqu'à présent, dont M. Ross, de l'Université de la Colombie‑Britannique, nous ont mentionné qu'il n'y avait pas nécessairement de problème de profit excédentaire dans le secteur de l'épicerie. On a plutôt un problème de concurrence. Ce qui le démontre bien, c'est le fait que, entre 1984 et aujourd'hui, on est passé de 13 grandes chaînes à cinq, incluant Walmart et Costco, qui se partagent 80 % du marché.
    Monsieur Charlebois, vous nous avez parlé de plusieurs éléments intéressants — c'est la raison pour laquelle je m'adresse à vous. Ce qui a été soulevé par certains témoins, c'est que les barrières réglementaires à l'investissement font que les entreprises étrangères de vente au détail hésitent à venir au Canada.
    Voici une preuve anecdotique: le ministre de l’Innovation, des Sciences et de l’Industrie est très actif, mais il va de l'autre côté de la frontière pour tenter de persuader des distributeurs en alimentation d'investir au Canada, alors que, en moyenne, la marge est de 5 % au Canada et de 2 % aux États‑Unis. Il doit y avoir des barrières qui font que ces entreprises ne désirent pas venir au Canada.
     Quelles sont ces barrières?
(1805)
    Premièrement, il faut arrêter d'inviter les PDG des épiceries à Ottawa pour leur demander pourquoi ils font trop d'argent. Les Lidl et les Aldi de ce monde lisent les manchettes, comme tout le monde.
    Deuxièmement, je pense qu'il est important de reconnaître que les entreprises qui sont actuellement au Canada sont très bien gérées. Elles maîtrisent très bien le marché. Metro, Empire, Sobeys et Loblaws sont des entreprises très bien gérées. Elles profitent du fait que le marché les laisse grandir. Il ne faut pas oublier que Empire, Metro et Loblaws ont répondu à la menace américaine d'il y a 30 ans, soit l'arrivée de Walmart et Costco. C'est la raison pour laquelle on a vu beaucoup de consolidation.
    Comme on n'a pas pu réglementer ou arrêter les transactions, on en est arrivé à une grande concentration dans le marché. Ce qu'on voit présentement, c'est que M. Champagne veut recréer le même phénomène.
    Personnellement, j'ai toujours cru que, sur le plan national, la priorité devrait être de créer des conditions permettant à un épicier d'avoir de meilleurs résultats. Les barrières interprovinciales et les niveaux de taxation en sont des exemples. On taxe beaucoup de produits de détail. Par exemple, chez Loblaws, 4 600 produits sont taxés au détail. Plusieurs sont taxés en raison de la réduflation. Les gens s'en aperçoivent. Cela rend l'épicerie moins compétitive et plus chère pour tout monde.
    On doit se pencher sur ce genre de changements pour permettre aux Canadiens de respirer un peu plus.
     Merci beaucoup.

[Traduction]

    Je vous remercie, monsieur Garon.
    La parole est à M. Masse pour deux minutes et demie.
    Je n'ai pas entendu, mais je suppose que j'ai la parole. Enfin, j'espère.
    Oui, monsieur Masse, vous avez la parole.
    En ce qui concerne la discussion, je tiens à ajouter quelque chose pour mémoire. Les termes « impôt sur les bénéfices exceptionnels », « cupidiflation » ou « impôt exceptionnel » ont des connotations différentes, mais ce sont souvent les trois qui sont mentionnés. Ils sont très familiers ici, en Amérique du Nord.
    Les mesures prises par les États-Unis en 1917, 1935, 1933, 1940, 1943, 1950 et 1953 portaient toutes sur le fait que les bénéfices des grandes sociétés étaient excessifs parce qu'ils n'étaient pas le fruit de leur travail. Elles tiraient profit de la conjoncture économique et sociale de l'époque. C'est pourquoi les États-Unis ont pris ces mesures.
    En fait, outre-Atlantique, au Royaume-Uni, en Grande-Bretagne, le premier ministre conservateur a décidé de prélever 25 % sur les bénéfices du secteur de l'énergie et il a depuis porté ce pourcentage à 35 %. Cet impôt restera en vigueur, a‑t‑il annoncé récemment, jusqu'en 2029.
    Si l'on passe rapidement en revue les autres pays dans le monde qui se penchent sur cette question, il y a l'Autriche, qui applique un impôt exceptionnel aux compagnies d'électricité et aux sociétés pétrolières et gazières; la Belgique, qui en applique un aux producteurs d'électricité; la Bulgarie, qui en applique un au secteur de l'électricité et du raffinage; la Croatie, qui en applique un au secteur de l'électricité et également à d'autres entreprises; et la République tchèque, qui en applique un au secteur de l'électricité et aussi aux banques et à d'autres combustibles fossiles, comme beaucoup d'autres États européens.
    La Finlande applique un impôt exceptionnel aux compagnies d'électricité et aux sociétés pétrolières et gazières. La France en applique un aux producteurs d'électricité, à l'exploitation minière, au raffinage du pétrole et à la fabrication de produits à base de coke. L'Allemagne en applique un aux producteurs d'électricité. La Grèce en applique également un à certains secteurs de l'énergie. Il y a aussi la Hongrie, qui en applique un aux producteurs de pétrole, aux distributeurs de produits pharmaceutiques, sur les redevances minières, aux compagnies aériennes, ainsi qu'aux établissements banquiers et de crédit. Tous ces secteurs sont inclus. L'Irlande applique un impôt exceptionnel aux producteurs d'électricité. De même, l'Italie applique un impôt exceptionnel sur la vente d'électricité, de pétrole et de gaz et sur la distribution de produits dans le secteur bancaire. Il y a aussi la Lettonie, qui applique un impôt exceptionnel aux banques et aux entreprises du secteur de l'énergie, et la Lituanie, qui en applique un aux banques nationales et aux succursales de membres étrangers titulaires d'une licence aux États-Unis et dans l'Espace économique européen.
    Le Luxembourg applique un impôt exceptionnel aux producteurs d'électricité. Les Pays-Bas, au secteur de l'électricité également, et la Norvège applique aux parcs éoliens une taxe sur les profits excessifs. La Pologne applique un impôt exceptionnel aux sociétés charbonnières et minières. Le Portugal en applique un sur le pétrole et le raffinage du pétrole et aussi, ce qui est assez intéressant, sur la distribution alimentaire. La Roumanie applique un impôt exceptionnel aux sociétés de pétrole, de gaz naturel, de charbon et de raffinage, et la Slovaquie, en applique un aux producteurs d'électricité, de gaz naturel et sur le raffinage.
    Je conclurai ainsi, monsieur le président. Le fait est que la question d'une taxe sur les profits excessifs n'est pas étrangère à la politique publique en Amérique du Nord et qu'il s'agit même de la politique publique de l'Union européenne. Au fond, si nous regardons l'histoire récente, nous avons eu la réduction excessive de l'impôt sur les sociétés entre 2000 et 2020. En plus de cela, nous avons eu la crise financière et nous avons demandé au gouvernement Harper de mettre en place un plan de sauvetage pour de nombreux secteurs, dont le secteur bancaire, qui a reçu beaucoup de fonds publics.
    Enfin, nous avons eu la COVID‑19. La quantité d'argent dépensée par le secteur public pendant cette période a créé les marges bénéficiaires dont les consommateurs canadiens font aujourd'hui les frais. Je conclurai en disant qu'il ne s'agit pas d'une idée nouvelle en Amérique du Nord ou dans l'Union européenne, et que d'autres pays agissent parce que les citoyens souffrent.
    Les marges bénéficiaires dégagées ne sont pas le fruit de leurs pratiques commerciales, mais le résultat de la politique publique et sociale.
    Je vous remercie.
(1810)
    Je vous remercie, monsieur Masse.
    Avant de passer à la série de cinq minutes et à M. Vis, je demande au Comité de me permettre de poser une question.
    Comme nous recevons au Comité un des plus éminents dirigeants d'entreprise québécois — sinon le plus éminent — pour parler de ce sujet, monsieur Péladeau, si l'on vous appliquait un impôt exceptionnel, est‑ce que vous l'absorberiez ou est‑ce que vous le répercuteriez sur le consommateur, comme nous le faisons toujours, à ce que je sais pour avoir écrit des plans stratégiques pour des entreprises?
    Eh bien, vous savez quoi? Je dirai, monsieur le président, une fois de plus, que nous avons introduit la concurrence et que, puisqu'elle est là, elle restera. En fin de compte, que l'on répercute l'impôt ou pas, le marché veut que les consommateurs soient intéressés par un produit au prix le plus bas possible et de la meilleure qualité qui soit. Je dirai que cela n'a pas vraiment d'importance, si toutes les conditions sont réunies pour que la concurrence continue de jouer et qu'elle reste forte et viable.
    Je vous remercie, membres du Comité et monsieur Péladeau, de votre indulgence.
    La parole est à M. Vis pour cinq minutes.
    Je dirai que nous avons 15 minutes. Il y a une autre série pour les députés ministériels, s'ils le souhaitent, après cela. Nous pouvons aussi avoir une série ouverte. Je m'en remets au Comité.
    Je vous remercie.
    Je reviens vers vous, monsieur Charlebois, avant de céder la parole à M. Généreux dans deux minutes environ.
    Nous avons eu un excellent échange avec M. Schaan, du ministère de l'Industrie, quand nous avons parlé des pommes, et je reviens encore aux pommes. J'ai acheté un sac de pommes le week-end dernier au supermarché. Je pense que j'ai payé autour de 7 ou 8 $ pour un sac de pommes produites dans l'État de Washington, mais consommées régulièrement en Colombie-Britannique.
    Selon vous, comment se répartit le prix de ce sac de pommes que j'ai acheté? Quelle est la répartition?
    Tout d'abord, je n'arrive pas à croire que vous ayez acheté des pommes américaines [inaudible].
    Des voix: Oh, oh!
    Je sais. C'est honteux.
    Je dirai qu'évidemment, sur 8 $, si vous utilisez ce montant...
    Oui.
    ... très peu va à l'agriculteur.
    En moyenne, un agriculteur perçoit entre 3 et 10 % du produit que vous achetez à l'épicerie. Bien sûr, le pourcentage dépend du niveau de transformation. Pour une pomme, il y a très peu de transformation, donc je pense que c'est plus proche de 10 %. Ensuite, il y a les courtiers, les marchandiseurs, les transporteurs et, bien entendu, les distributeurs.
    Il s'agit d'un produit frais. Les marges sont assez élevées dans les rayons frais des épiceries. Elles varient beaucoup et vont de 30 à 50 %, en fonction de la catégorie d'aliments, donc...
(1815)
    Qu'en est‑il de la compote de pommes?
    Les marges sont bien plus petites sur la compote de pommes, qui demande plus de transformation. La majoration est beaucoup plus importante dans le secteur de la transformation, en particulier. Le pomiculteur obtiendra beaucoup moins — près de 3 ou 4 % — pour cette pomme.
    Je vous remercie.

[Français]

    Monsieur Péladeau, quelles sont vos véritables attentes relativement à la plainte que vous avez déposée aujourd'hui au Bureau de la concurrence?
    Monsieur le député, nous évoluons dans un secteur d'activité que l'on considérait comme un oligopole. Vous en avez discuté à plusieurs reprises au Comité et ailleurs, les prix du sans-fil au Canada figuraient parmi les plus élevés au monde.
    Notre plainte au Bureau de la concurrence vise à contrer une mesure parmi toutes celles qui mettent un frein à la concurrence. Nous espérons que cette plainte donnera justement lieu à une enquête, à une analyse et, le cas échéant, à des initiatives qui permettront d'éviter que des mesures soient prises pour freiner la concurrence. C'est ce que nous souhaitons.
    Nous avons démontré hors de tout doute, vous l'avez mentionné tout à l'heure, que nous étions un acteur qui n'a pas peur de la concurrence, ayant toujours évolué dans ce secteur. Lorsque nous nous sommes engagés dans le domaine des télécommunications, nous avons fait face à une culture que nous ne connaissions pas. La câblodistribution, pendant de très nombreuses années, a été un monopole, mais pas nécessairement dans l'intérêt supérieur des Canadiens et des Canadiennes. La concurrence a toujours bien meilleur goût et favorise les citoyens.
     Qu'en est-il de la concurrence au Québec, actuellement? On sait que Vidéotron , qui offre un très bon service, d'ailleurs, est un acteur extrêmement important en ce qui concerne la câblodistribution, entre autres. Vous avez aussi élargi des services que vous offrez au Québec.
    Les dernières décisions du CRTC concernant les ERMV, ou exploitants de réseaux mobiles virtuels, viennent-elles jouer dans l'élément compétitif que vous voulez voir de plus en plus, particulièrement au Québec?
     Vous avez raison de le souligner, monsieur le député, parce que les mesures qui ont été prises au cours des dernières années favorisent la concurrence, que ce soit le fait de passer d'un réseau à l'autre et le fait de pouvoir tirer profit de la politique dont vous avez fait mention, les ERMV, avec des conditions de construction de réseaux.
    On évite de faire en sorte que des acteurs viennent faire de la spéculation à l'intérieur de ce qu'on appelle les enchères du spectre, parce qu'il y a dorénavant une obligation rattachée à cela. Quand vous achetez du spectre, vous avez l'obligation de construire un réseau au cours des sept années suivantes. Si vous ne le faites pas, vous perdez le droit d'utiliser ce spectre. Par conséquent, toutes ces mesures ont fait en sorte que les Canadiens, au bout du compte, peuvent bénéficier des meilleures conditions de la concurrence.
     Cela dit, certaines considérations sont parfois extrêmement surprenantes. Pour le même produit, qu'on appelle la fibre optique, ou le FTTH, le prix sera de 69 $ au Québec par rapport à 89 $ à Toronto.
    Cela peut-il être considéré comme du dumping ou comme des mesures anticoncurrentielles? Certes, les Québécois en bénéficient, mais donnez-nous également accès aux réseaux comme, nous, Vidéotron, nous l'offrons à des utilisateurs. On appelle cela l'accès à Internet de tiers. En revanche, Bell vient d'acheter, en presque totalité, ces utilisateurs de réseaux. Il y a des mesures comme cela.
    Évidemment, nous sommes conscients de cela parce que c'est notre métier de tous les jours. Cependant, chaque chose doit faire l'objet d'une analyse de la part du Bureau de la concurrence et vous vous doutez bien que, en tant qu'acteurs de cette industrie, nous ne nous gênerons pas pour en informer le Bureau de la concurrence pour que cessent ces pratiques qui sont néfastes pour les Québécois et les Québécoises, ainsi que pour les Canadiens et les Canadiennes.
     Merci, monsieur Péladeau.

[Traduction]

    Je vous remercie, monsieur Généreux.
    Pour la prochaine série, nous passons à M. Turnbull pour cinq autres minutes, je vous en prie.
(1820)
    Monsieur Charlebois, je reviens vers vous.
    Je sais que le Bureau de la concurrence a réalisé, il y a un moment maintenant, une étude sur les prix des produits d'épicerie. Je siégeais alors au Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire. Nous avons reçu ce rapport et j'ai vraiment eu l'impression qu'il n'allait pas au fond des choses, étant donné le gonflement des prix de ces produits au Canada. Apparemment, le problème tenait en partie au fait que les pouvoirs du Bureau de la concurrence étaient limités pour ce qui est d'obtenir des données. Ce qui m'a inquiété, notamment, en entendant les géants de l'épicerie au Canada à ce comité à l'époque, c'est qu'ils disaient que leurs marges n'étaient pas vraiment plus élevées, alors que les données montrent, me semble‑t‑il, que leurs marges brutes sont passablement plus élevées — même si elles sont faibles dans ce secteur, c'est certain. Ce que je veux dire, c'est qu'ils semblaient dire que c'étaient leurs produits et gammes de produits de santé et de beauté qui leur rapportaient beaucoup plus — ou du moins est‑ce ce que le PDG de Loblaws, Galen Weston, nous a expliqué.
    Je vous poserai la question suivante. Pensez-vous que le Bureau de la concurrence, avec les nouveaux pouvoirs qui lui sont conférés pour obtenir des documents et des données... S'il était en mesure d'aller au fond des choses avec ces nouveaux pouvoirs, quel est, au fond, le problème des prix des produits d'épicerie et de la concentration du marché que nous observons au Canada, selon vous? Il est certain que la concentration fait partie du problème, et je pense que personne n'en doutera. Ce n'est peut-être pas tout le problème, mais c'est certainement un élément important. Que pensez-vous de ces pouvoirs d'obtenir des données et que découvrirons-nous, ou que découvrira le Bureau de la concurrence, selon vous?
    J'ai deux commentaires en réponse à votre question.
    Le premier porte sur les marges nettes et je dirai qu'en effet, elles sont très faibles au Canada par rapport à d'autres secteurs. Mais si l'on compare les marges nettes d'Empire, de Sobeys, de Loblaws et de Metro, elles sont, en moyenne, le double des marges américaines, si l'on prend Albertsons et Kroger. Donc, oui, le marché est concurrentiel au Canada, mais il est confortable pour ces entreprises aussi.
    Il s'agit pour la plupart d'entreprises intégrées qui vendent des produits à marge plus élevée, comme les cosmétiques, qui ont des pharmacies, etc. Mais je tiens à dire que la situation est confortable pour les principaux acteurs ici, au Canada.
    Ensuite, notre recommandation la plus importante, selon nous, en ce qui concerne le projet de loi C‑352, est la première que nous formulons et qui concerne les données. Nous évoluons dans le brouillard au Canada et c'est probablement la chose la plus frustrante que j'ai connue en tant qu'universitaire travaillant avec des entreprises. Je pense que le Bureau de la concurrence a un rôle à jouer pour démocratiser les données autant que possible, afin que le public en sache plus sur les marges et sur la concurrence au Canada.
    Cela aiderait aussi les entreprises qui s'intéressent à ce secteur. Notre laboratoire à l'Université Dalhousie a pour mission de démocratiser les données, mais nous ne pouvons pas tout faire nous-mêmes, et c'est pourquoi nous voulions recommander cette mesure en particulier. Même si cela n'entre pas dans le cadre du projet de loi C‑352, nous continuons de penser que la démocratisation des données devrait faire partie des priorités du Bureau.
    Je vous remercie. Je vais vous poser une autre question sur autre chose.
    J'ai remarqué dans ce rapport, quand je l'ai lu, qu'il recommandait d'avoir beaucoup plus d'épiceries indépendantes au Canada, mais qu'il ne proposait, à mon avis, aucune solution pour y parvenir.
    Je suis d'accord que nous avons besoin de plus d'épiceries indépendantes au Canada — peut-être pour briser cet oligopole et avoir plus de concurrence. En même temps, je pense que la concentration existe dans toute la chaîne d'approvisionnement dans la plupart des cas. L'agriculture primaire est regroupée depuis des années. J'ai vu les statistiques, et la distribution alimentaire et le commerce de gros se sont également concentrés.
    Je constate que vous avez mentionné l'importance des systèmes alimentaires régionaux et locaux, et je suis tout à fait d'accord avec vous sur ce point. Il me semble que nous devons constituer des chaînes d'approvisionnement à petite échelle pour que les épiciers indépendants disposent des chaînes d'approvisionnement qui leur permettent d'exister et d'être compétitifs. Êtes-vous d'accord avec cela? Vous avez parlé des centres alimentaires, et je pense que les centres alimentaires régionaux font partie des chaînons manquants de cette chaîne d'approvisionnement à petite échelle au Canada qui pourrait coexister avec les grands acteurs et accroître la concurrence. Êtes-vous d'accord avec moi qu'il nous faut plus de chaînes d'approvisionnement régionales qui soutiennent les épiciers indépendants?
(1825)
    Oui. La solution est très simple, à mon sens. Vous avez deux éléments: le code de déontologie et la transformation.
    Le code de déontologie renforcera évidemment notre secteur de la transformation alimentaire, car il lui permettra de négocier avec les épiciers, ce qui augmentera les chances de survie et de prospérité des transformateurs canadiens. Le choix s'élargit, par la même occasion, pour les épiciers indépendants, et l'on met sur un pied d'égalité les cinq grands épiciers et les épiciers indépendants. En outre, on donne plus de choix en amont de la chaîne alimentaire.
    À l'heure actuelle, nous avons un groupe de cinq épiciers qui vendent pour ainsi dire la même chose, car ils peuvent dicter qui gagne et qui perd dans la chaîne alimentaire. En permettant au secteur de la transformation alimentaire de se renforcer, on donne aux épiciers indépendants la possibilité de vendre autre chose, quelque chose de différent, d'unique. Oui, nous voulons plus d'épiciers indépendants, mais il faut plus de discipline et de rigueur dans la gouvernance du secteur, et je pense que beaucoup de gens espèrent que le code permettra d'y parvenir.
    Je vous remercie.
    Si le Comité le veut bien, je propose deux minutes et demie pour M. Garon, deux minutes et demie pour M. Masse, et il me semble que M. Williams souhaite poser une question à la fin, après eux.
    Je rappelle également aux membres du Comité, avant que tout le monde ne commence à penser à partir, que les amendements à ce projet de loi, le projet de loi C‑352, doivent avoir été remis à midi demain, si vous en avez.
    Monsieur Garon, vous disposez de deux minutes et demie.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Je remercie le Comité de sa générosité, comme c'est si bien dit.
     Monsieur Péladeau, on sent une nouvelle énergie au Bureau de la concurrence. Elle se manifeste par les nouveaux pouvoirs qu'on lui a confiés, par exemple, le fait qu'il entamera bientôt une étude sur les tarifs aériens.
    Pour ce qui est des boutiques mobiles dans les épiceries, on a vu le commissaire de la concurrence utiliser, pour la première fois, son pouvoir de délivrer des citations à comparaître. On sent cette nouvelle énergie.
    Vous savez certainement que, ce lundi, le Bureau de la concurrence a annoncé une entente avec Bell dans le dossier Outfront Media, où il a été reconnu qu'une fusion aurait des effets importants sur la concurrence dans plus de 600 boutiques à Toronto, à Montréal, à Sherbrooke, entre autres.
    Est-ce le genre d'entente ou de façon de faire efficace, rapide, en amont, à laquelle vous vous attendez, notamment dans le dossier qui vous occupe au Manitoba?
    Vous avez raison de le mentionner. Cet exemple est une belle illustration de la capacité et du leadership qu'on ressent. On le ressent également aussi du côté du CRTC, dont la présidente vient du même milieu, d'ailleurs.
     Selon moi, les mesures visant à promouvoir la concurrence ne sont ni « anti » ni « pro » entreprises; elles sont à l'avantage du citoyen. Elles obligent également les entreprises à s'investir encore davantage dans l'innovation. Au bout du compte, elles sont profitables à tout le monde. Le fait de rendre nos entreprises plus concurrentielles, plus attentives, plus dévouées à l'innovation, ne peut être que favorable. Vous avez raison de souligner que nous avons agi avec célérité.
    Vous vous doutez aussi sûrement que nous avons informé le Bureau de cette situation et qu'il l'a prise à bras-le-corps. Il a mené son enquête et ses analyses auprès des différents acteurs de l'industrie. Le résultat, c'est que nous avons justement agi avec la rapidité qui fait en sorte que — les résultats restent à voir —, d'un côté comme de l'autre, ce sera bon pour les concurrents. De plus, cela permettra aux Canadiens d'avoir plusieurs choix.
     Merci, monsieur Péladeau

[Traduction]

    Je vous remercie, monsieur Garon.
    La parole est à M. Masse pour deux minutes et demie.
(1830)
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Monsieur Péladeau, je réfléchissais à l'identification des entreprises pour les produits, etc. Vous avez soulevé un excellent point: pourquoi se donner la peine de notifier? Ai‑je raison de dire que vous seriez en faveur d'une seule marque pour la grande entreprise ?
    Je suis allé sur le site Web d'un de vos concurrents et aucune des sociétés affiliées qu'il possède dans le cadre de sa structure d'entreprise n'y est mentionnée. Il faut vraiment faire un effort supplémentaire pour les trouver. Je ne pense pas que ce soit bon pour la concurrence, en ceci qu'il s'agit d'une fausse concurrence à bien des égards, une fois qu'elles ont été absorbées.
    Qu'en pensez-vous?
    C'est ce qui se passe dans ce secteur. Parallèlement, c'est aussi le cas dans d'autres secteurs. Il y a des marques de qualité supérieure, puis des marques à bas prix. Nous parlons de marques « défensives » et « à prix modique ». Elles s'adressent à des segments particuliers de la clientèle. Est‑ce qu'il faudrait appeler Fido Rogers? Habituellement, si vous allez dans un centre commercial, vous constaterez que Fido se trouve juste à côté de Rogers. Cela ne veut pas dire qu'ils s'adressent au même marché. Selon moi, ce n'est pas le même.
    En fin de compte, offrir des choix à n'en plus... Vous savez, il est évident qu'il y a de nombreux acteurs sur le marché qui seront avantageux pour les consommateurs.
    Je vous remercie.
    C'était ma dernière question, monsieur le président.
    Je vous remercie, monsieur Masse.
    Pour une ou deux dernières questions, la parole est à M. Williams.
    Je vous remercie, monsieur le président. Je serai bref.
    Monsieur Charlebois, nous avons beaucoup parlé des épiceries, mais les fabricants affichent des bénéfices record. Ils ne sont pas nombreux: PepsiCo, Tyson Foods, Nestlé et Kraft Heinz. Outre les bénéfices, une des façons pour ces fabricants d'augmenter les prix en toute impunité consiste à proposer de moins en moins de produit pour le même prix. C'est ce que l'on appelle la « réduflation ».
    Faut‑il interdire la réduflation?
    Je ne pense pas. Cette pratique existe depuis des décennies.
    La réduflation m'inquiète cependant à deux égards.
    Premièrement, nous avons des données au laboratoire qui montrent que Statistique Canada ne tient peut-être pas vraiment compte de l'impact de la réduflation sur l'inflation des prix de l'alimentation, de manière générale. Autrement dit, parce qu'il ne le fait pas — et qu'il mentionne sur un site Web qu'il le mesure, mais nous n'en voyons pas la preuve —, il se peut que Statistique Canada sous-estime l'inflation des prix de l'alimentation. C'est une chose.
    Deuxièmement, l'imposition de la vente au détail. Une règle de l'ARC mentionne que, certains produits, s'ils sont réduits jusqu'à un certain point, deviennent des grignotines. C'est ce que nous appelons la taxe sur les grignotines. Ces produits passent du statut d'aliment à celui de grignotines. Par exemple, si un contenant de crème glacée est réduit à moins de 500 millilitres, il devient un article imposable. Beaucoup de Canadiens ne le savent pas quand ils vont à l'épicerie. Ils doivent regarder le ticket de caisse. Parfois, les taxes n'y sont pas détaillées. Il est donc difficile de s'en rendre compte.
    Ce sont, à mon avis, les questions que nous devons régler pour que les Canadiens comprennent les conséquences directes de la réduflation pour eux, en dehors du fait qu'on leur en donne moins pour le même prix. Je pense que ce sont deux choses que nous devons examiner plus sérieusement avec Statistique Canada et l'ARC, .
    Je vous remercie, monsieur Williams.
     Je remercie les témoins. C'est une étude très intéressante du projet de loi C‑352, qui est le projet d'initiative parlementaire de M. Singh.
    Je tiens à remercier le professeur Charlebois de son témoignage, ainsi que MM. Pierre Karl Péladeau et Jean Péladeau, et M. Lescadres. Merci de votre temps et de votre témoignage. C'était très intéressant.
    Avec la permission du Comité, la séance est levée.
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication
ParlVU