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FEWO Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la condition féminine


NUMÉRO 110 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 23 mai 2024

[Enregistrement électronique]

(1530)

[Traduction]

    Bienvenue à la 109 e réunion du Comité permanent de la condition féminine de la Chambre des communes.
    Avant de commencer, j'aimerais demander à tous les députés et aux autres participants dans la salle de consulter les fiches sur les tables pour obtenir des directives sur la prévention des incidents acoustiques.
    Veuillez prendre note des mesures préventives suivantes qui sont en place pour protéger la santé et la sécurité de tous les participants, y compris des interprètes. N'utilisez que les oreillettes approuvées, qui sont de couleur noire. Il ne faut plus utiliser les anciennes oreillettes grises. Assurez-vous de tenir votre oreillette loin des microphones en tout temps. Lorsque vous n'utilisez pas votre oreillette, veuillez la placer face vers le bas, au milieu de l'autocollant prévu à cette fin, que vous trouverez sur la table.
    Je rappelle aux députés d'attendre que je les nomme avant de prendre la parole. Je vous remercie tous à l'avance de votre coopération à cet égard.
    Pour les députés dans la salle, veuillez lever la main si vous souhaitez prendre la parole. Pour les députés sur Zoom, veuillez utiliser la fonction « Lever la main ». La greffière et moi ferons certainement de notre mieux pour respecter l'ordre des interventions.
    Je vous ferai signe lorsqu'il vous restera 30 secondes et lorsque votre temps sera écoulé.
    Voici maintenant quelques consignes à l'intention des témoins.
    Avant de prendre la parole, veuillez attendre que je vous nomme. Si vous participez par vidéoconférence, cliquez sur l'icône du microphone pour activer votre micro, et assurez-vous de le désactiver lorsque vous ne parlez pas. Si vous êtes dans la salle, votre microphone sera contrôlé par l'agent des délibérations et des vérifications.
    Vous pouvez vous exprimer dans la langue officielle de votre choix. Des services d'interprétation sont offerts. Vous avez le choix entre le parquet, l'anglais ou le français pour votre oreillette. Si vous perdez l'interprétation, veuillez m'en aviser immédiatement et nous veillerons à ce que le service soit rétabli.
    Conformément à l'article 108(2) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le lundi 27 novembre 2023, le Comité poursuit son étude sur les comportements coercitifs.
    Avant d'accueillir nos témoins, j'aimerais également vous avertir que nous allons discuter d'expériences liées à la violence et au contrôle coercitif. Cela peut provoquer des réactions chez les personnes qui ont vécu des expériences similaires. Si vous vous sentez en détresse ou si vous avez besoin d'aide, veuillez en informer la greffière.
    Pour les témoins comme pour les députés, il est important de reconnaître que ce sont effectivement des discussions difficiles. Tâchons donc de faire preuve de la plus grande compassion possible dans nos conversations.
    J'aimerais maintenant souhaiter la bienvenue à nos témoins.
    Nous accueillons, à titre personnel, Jennifer Koshan, professeure à la Faculté de droit de l'Université de Calgary, qui se joint à nous par vidéoconférence. Du Regroupement des maisons pour femmes victimes de violence conjugale, nous recevons Karine Barrette, avocate et chargée de projet, et Louise Riendeau, coresponsable des dossiers politiques. Enfin, du Fonds d'action et d'éducation juridique pour les femmes, nous accueillons Roxana Parsa, avocate-conseil à l'interne, qui comparaît par vidéoconférence.
    Vous disposerez chacune de cinq minutes pour faire votre déclaration préliminaire, après quoi nous passerons aux questions.
    Je vais céder la parole à Mme Koshan pour commencer. Ensuite, nous entendrons Mme Barrette et Mme Riendeau, qui partageront les cinq minutes. Enfin, ce sera au tour de Mme Parsa.
    Nous vous écoutons.
(1535)
    Merci beaucoup de me donner l'occasion de participer à votre étude sur le contrôle coercitif.
    Je me joins à vous aujourd'hui depuis le territoire du Traité n o 7, à Mohkinstsis, qui désigne Calgary en langue pied-noir.
    Je parle aujourd'hui en mon nom personnel, mais j'ai présenté en mars 2024 un mémoire, rédigé avec trois coauteures, au Comité permanent de la justice et des droits de la personne dans le cadre de son étude du projet de loi C‑332. Dans notre mémoire, nous soulevions des préoccupations au sujet de la criminalisation du contrôle coercitif. Je ne les répéterai pas dans ma déclaration préliminaire, mais je serai certainement heureuse de répondre à vos questions à ce sujet.
    Dans le temps qui m'est alloué aujourd'hui, je vais me concentrer sur la recherche que j'ai menée avec mes collègues Janet Mosher et Wanda Wiegers sur la façon dont le contrôle coercitif est interprété et appliqué en vertu de la Loi sur le divorce. Cette recherche révèle plusieurs sujets de préoccupation, dont deux que je vais souligner aujourd'hui.
    Premièrement, le contrôle coercitif est utilisé contre les survivantes. Nous avons trouvé plusieurs cas où le contrôle coercitif avait été interprété de manière large par les tribunaux de la famille...
    Je suis désolée, mais nous allons devoir nous interrompre un instant et suspendre nos travaux. Nous éprouvons des difficultés liées aux oreillettes. Plusieurs d'entre elles ne fonctionnent pas. Je suis vraiment désolée de devoir vous interrompre. Nous allons suspendre la séance pendant quelques minutes pour faire fonctionner les oreillettes.
(1535)

(1535)
    Madame Koshan, vous pouvez poursuivre.
    Nous avons, bien sûr, arrêté l'horloge pour que vous puissiez reprendre là où vous vous êtes arrêtée.
     Merci.
    Je précise encore une fois que notre première préoccupation, c'est le fait que le contrôle coercitif est utilisé contre les survivants. Même s'il peut sembler positif que les tribunaux de la famille interprètent le contrôle coercitif de manière large, des conclusions de contrôle coercitif sont formulées à l'encontre de mères qui cherchent à protéger leurs enfants de la violence familiale en limitant leurs contacts avec des pères violents. Des arguments dits d'aliénation parentale sont souvent invoqués par les pères en réponse aux allégations de mauvais traitements, et les tribunaux considèrent parfois que les femmes sont les auteurs du contrôle coercitif simplement parce qu'elles essaient de protéger leurs enfants. Dans d'autres cas, si les allégations de violence des femmes s'avèrent non fondées, cela peut également être interprété comme de la violence familiale de la part des femmes, en se basant sur des mythes et des stéréotypes selon lesquels les femmes qui cherchent à obtenir un avantage soi-disant stratégique dans des instances de droit de la famille font de fausses allégations de violence.
    Ces affaires révèlent l'incapacité des tribunaux à comprendre la différence entre le comportement protecteur des mères, d'une part, et le contrôle coercitif réel des pères, d'autre part. Elles confirment également non seulement la difficulté pour les femmes maltraitées de prouver l'existence d'un contrôle coercitif, mais aussi la façon dont leur incapacité à prouver l'existence d'un contrôle coercitif peut être utilisée contre elles. À cet égard, nos recherches appuient les recommandations de l'Association nationale Femmes et Droit sur la nécessité de limiter les arguments d'aliénation parentale devant les tribunaux de la famille. Dans l'ensemble, le système du droit de la famille indique que les juges ont du mal à comprendre le contrôle coercitif et les types de preuves qui peuvent contribuer à l'établir. Il faut entreprendre de former tous les professionnels du droit avant que toute nouvelle infraction de contrôle coercitif ne soit mise en œuvre au Canada.
    Notre deuxième préoccupation, c'est le fait que les survivants ont besoin de soutien pour se protéger contre les litiges et les abus systémiques, y compris dans les affaires de droit de la famille. Nous savons que les auteurs de mauvais traitements utilisent souvent les procédures judiciaires pour renforcer leur contrôle coercitif. Dans le domaine du droit pénal, il existe des mécanismes de protection pour les plaignants ou les témoins, telles que des limites au contre-interrogatoire par des accusés qui assure leur propre représentation, et l'autorisation par un juge de témoigner derrière un écran ou avec une personne de soutien. Toutefois, ce type de protections n'existe pas dans la loi sur le divorce.
    À titre d'exemple, nous avons trouvé une affaire datant de 2023 dans laquelle un père reconnu coupable de violence familiale qui assurait sa propre représentation a été autorisé à contre-interroger sa femme pendant sept jours. Bien que le juge ait autorisé cette dernière à témoigner derrière un écran, cette décision était discrétionnaire, et nous avons constaté que ce type de mesure était rarement ordonné dans des dossiers de droit de la famille impliquant des allégations de contrôle coercitif. Ce type de conduite pendant un litige peut constituer en soi un acte de violence familiale, mais, comme cela a été indiqué, il est rare que les tribunaux du droit de la famille imposent des limites à ce type de conduite. Nos recherches sur la Loi sur le divorce montrent donc qu'il est nécessaire d'apporter des modifications à cette loi pour limiter ce type de conduite abusive pendant un litige en imposant des restrictions sur les contre-interrogatoires personnels, en autorisant les témoignages derrière des écrans et en prévoyant des mesures de soutien des parties aux litiges familiaux.
    À titre de comparaison, au Royaume-Uni, les réformes apportées à la Domestic Abuse Act en 2021 permettent aux tribunaux de mettre en place ce type de mesures spéciales pour protéger les victimes de violence dans les procédures de droit de la famille, et certains États australiens font de même. Dans l'ensemble, nous pouvons tirer des enseignements des interventions juridiques d'autres pays dans des cas de contrôle coercitif, mais aussi des interventions juridiques canadiennes, lorsque nous examinons la manière dont la Loi sur le divorce est mise en œuvre. Nous devons également garder à l'esprit que les femmes victimes d'inégalités interdépendantes peuvent avoir du mal à faire entendre et accepter leurs revendications d'une manière qui soit fondée sur les traumatismes et sur les principes de l'égalité réelle.
    Je vous remercie de votre attention, et je suis impatiente de répondre à vos questions.
(1540)
    Allez‑y, madame Riendeau.

[Français]

    Nous remercions le Comité de nous permettre de nous exprimer aujourd'hui sur le comportement coercitif.
    Notre regroupement comprend 46 maisons pour femmes victimes de violence conjugale, qui sont réparties dans l'ensemble du Québec. Elles hébergent annuellement quelque 3 300 femmes et près de 2 000 enfants. Elles offrent 30 000 services sans hébergement à ces femmes et à ces enfants. Au total, elles répondent à 90 000 demandes d'aide.
    Le contrôle coercitif...

[Traduction]

    J'invoque le Règlement.
    Oui.
    Je suis désolée, madame la présidente, mais je n'entends pas l'interprétation.
    Nous allons suspendre la séance pendant une minute, le temps de régler la question de l'interprétation.
(1540)

(1545)
    Nous reprenons la séance. Encore une fois, je m'excuse de l'interruption.
    Veuillez poursuivre.

[Français]

    Le contrôle coercitif n'est pas une nouvelle forme de violence conjugale ni un synonyme de la violence psychologique. Il s'agit plutôt d'une vision élargie de la violence conjugale. Le motif principal pour demander de l'aide dans nos maisons pour femmes n'est pas la violence physique, mais d'autres formes de violence. Parmi toutes les femmes qui reçoivent des services en externe, plus de 44 % y ont recours en raison de la violence consécutive à une séparation.
    Grâce à une subvention de Femmes et Égalité des genres Canada, nous menons un projet afin que les différents acteurs judiciaires intègrent le concept de contrôle coercitif dans leurs pratiques. Plus de deux ans après le démarrage du projet, les retombées sont nombreuses. Nous avons d'abord créé une boîte à outils destinée à ces différents acteurs et un livret à l'intention des femmes elles-mêmes.
    En outre, plus de 6 000 professionnels ont reçu une formation afin de les aider à mieux détecter le contrôle coercitif. En conséquence, les stratégies de contrôle coercitif commencent à être notées dans les rapports de police. Nous constatons également une meilleure compréhension des acteurs en ce qui concerne le risque lié au contrôle coercitif, notamment pour prévenir les homicides.
    De plus, le ministère de la Sécurité publique du Québec a bonifié la déclaration de la victime afin d'y inclure les éléments de contrôle coercitif, et il a diffusé un webinaire destiné à l'ensemble des policiers et des policières de la province. S'ajoute à cela un napperon policier conçu pour être utilisé dans tous les postes de police.
    En outre, le directeur des poursuites criminelles et pénales demande maintenant aux procureurs de tenir compte du contrôle coercitif dans les dossiers de violence qu'ils traitent.
    Enfin, nous assistons à un changement de discours dans les médias sur la façon de présenter la violence conjugale.
    Ces changements nous permettent de croire à la capacité du milieu judiciaire de mieux tenir compte du contrôle coercitif. Le Regroupement des maisons pour femmes victimes de violence conjugale milite pour la criminalisation du contrôle coercitif. Il appuie le projet de loi C‑332, tel qu'il a été modifié par le Comité permanent de la justice et des droits de la personne.
    Pour nous, cette criminalisation contribuerait à valider l'expérience des victimes et de leurs enfants et à montrer que ce comportement est socialement inacceptable. Cela représenterait une avancée importante en matière de droits des femmes à la sécurité, à la dignité, à l'autonomie et à la liberté.
    Cette nouvelle infraction permettrait aussi de fournir des leviers supplémentaires aux professionnels du domaine judiciaire pour briser plus tôt le cycle de la violence et intervenir adéquatement compte tenu de la dangerosité de cette violence.
    L'an dernier, nous sommes allées à la rencontre d'intervenants de l'Angleterre et de l'Écosse afin de recenser les apprentissages générés par la criminalisation du contrôle coercitif. Tous s'entendent pour dire qu'ils ne reviendraient pas en arrière. Dans quelques jours, nous y entreprendrons une nouvelle mission pour mieux saisir le cheminement et le traitement des infractions qui visent les conduites contrôlantes et coercitives.
    Cette criminalisation doit néanmoins être accompagnée des conditions nécessaires à sa réussite. Il faut d'abord effectuer une mise en place progressive permettant aux acteurs judiciaires de se préparer à son entrée en vigueur. Par la suite, il faut inviter les victimes à des séances de consultation, y compris les victimes des communautés autochtones.
    Il faut évidemment prévoir l'ajout de ressources humaines et financières afin que les acteurs aient les moyens concrets nécessaires pour opérer les changements de pratique escomptés. Il convient aussi d'assurer la mise en place d'activités de sensibilisation et de formation au sein de toutes les parties prenantes du système de justice, y compris les conseils de la magistrature.
    Pour ce faire, les parties prenantes devraient s'appuyer sur les ressources spécialisées en matière de violence conjugale et mettre en œuvre une campagne de sensibilisation du public. Il faut également poursuivre les travaux pour la mise en œuvre effective du Plan d'action national pour mettre fin à la violence fondée sur le sexe et assurer l'accessibilité à des ressources d'aide et d'accompagnement pour les victimes, de même que leur financement adéquat et récurrent.
    Enfin, il est nécessaire d'évaluer les mesures législatives à intervalles réguliers, en collaboration avec des ressources expertes en matière de violence conjugale et avec des survivantes.
    Pour permettre aux femmes et aux enfants victimes de violence conjugale d'y échapper, d'autres mesures sont essentielles, par exemple, développer rapidement des projets de logements sociaux, mettre à la disposition des victimes un fonds d'aide à la réinstallation, comme le fait l'Australie, et faciliter l'accès à un revenu décent.
    Le Regroupement salue l'initiative du Comité permanent de la condition féminine qui, en étudiant le concept de contrôle coercitif, permet de mieux l'appréhender et de reconnaître ce comportement. C'est ainsi que nous pourrons protéger les victimes.
    Merci.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Nous passons maintenant à Mme Roxana Parsa, pour cinq minutes.
(1550)
    Bonjour. Je m'appelle Roxana Parsa et je suis avocate-conseil à l'interne au Fonds d'action et d'éducation juridique pour les femmes, ou FAEJ.
    Je suis ravie de comparaître aujourd'hui depuis le lieu qui s'appelle maintenant Toronto, lequel se trouve sur les terres traditionnelles des Mississaugas de Credit, des Wendats, des Anishinabes et des Haudenosaunee.
    Comme vous le savez, le FAEJ est un organisme de bienfaisance national qui travaille à la promotion des droits à l'égalité des femmes, des filles et des personnes trans et non binaires dans le cadre de litiges, de la réforme du droit et de l'éducation du public. Depuis maintenant près de 40 ans, le FAEJ fait valoir la nécessité d'améliorer la réaction du système de justice à la violence fondée sur le sexe.
    Je vous remercie de m'avoir invitée ici aujourd'hui pour parler du contrôle coercitif. Nous nous réjouissons que le Comité se penche sur cette question. Comme le Comité l'a entendu, le contrôle coercitif est répandu dans toutes les sphères de la société. Il peut se présenter comme un comportement abusif prenant la forme de menaces, d'intimidation, de contrôle et de peur induite, le tout s'étalant souvent sur de nombreuses années. Le contrôle coercitif peut s'insinuer dans tous les aspects de la vie d'une personne et avoir des répercussions sur sa liberté financière, sa vie sociale, ses liens communautaires et sa liberté physique, des éléments comme le statut d'immigrant pouvant même être utilisés aux fins de menace. Il faut admettre que ces comportements constituent une forme de violence insidieuse qui peut avoir des conséquences dévastatrices.
    Cependant, c'est cette nature très nuancée et complexe du contrôle coercitif qui rend également difficile la réaction juridique pénale et qui soulève des préoccupations importantes au sujet de la mise en œuvre d'une loi. L'absence fréquente de preuves physiques signifie que l'admission de l'existence de la violence exige une compréhension des nuances et du contexte d'une relation, souvent sur de nombreuses années. Comment une survivante peut-elle prouver ces superpositions de formes de contrôle à un agent de police ou fournir suffisamment de preuves de dommages psychologiques pour s'acquitter du fardeau de la preuve exigé par le tribunal? Même lorsqu'il y a une arrestation, l'expérience au Royaume-Uni a montré que la grande majorité des dossiers ne débouchent pas sur des accusations, et encore moins sur une condamnation. De plus, comment pouvons-nous nous assurer que le pouvoir discrétionnaire du policier est utilisé de manière à reconnaître les abus subtils lorsqu'ils sont présents?
    L'oppression systémique, y compris les relents de colonialisme et de racisme ancrés dans le système de justice, augmente considérablement le risque d'erreur ou de mauvaise application de la loi. Nous avons vu des risques semblables se présenter dans le passé quand des politiques de mise en accusation obligatoire ont fait en sorte que des accusations soient portées contre des survivantes de violence. En outre, nous savons que le droit pénal et le système juridique en général continuent de laisser tomber les survivantes de la violence fondée sur le sexe. Ces systèmes ne rendent pas justice et n'améliorent pas la sécurité. Nous entendons régulièrement parler de survivantes qui continuent d'être traumatisées de nouveau par leurs expériences. Le fait qu'on se fie au système de justice pénale pour réagir à la violence peut empêcher involontairement de nombreuses personnes de simplement demander de l'aide. Le risque de préjudice est particulièrement élevé pour les survivantes de communautés déjà vulnérables, comme les Noirs, les Autochtones et les personnes en situation de handicap ou sans statut, qui ont des raisons valables de se méfier de ces systèmes. Cette situation ne fait qu'aggraver les inégalités existantes.
    La loi n'existe pas dans le vide et nous considérons qu'il importe de réfléchir aux réalités de l'accès à la loi et à la façon dont elle sera appliquée sur le terrain. Voilà pourquoi nous recommandons vivement de miser sur la prévention et l'éducation plutôt que sur le droit pénal. Il faut pour cela fournir un financement accru pour les refuges et les logements de transition, en plus de financer des logements abordables à long terme pour que les survivantes aient un endroit où vivre lorsqu'elles quittent leur relation. Nous avons besoin d'un financement continu et durable pour les services sociaux afin de fournir des services de lutte contre l'oppression tenant compte des traumatismes, comme des soins de santé mentale ou des services de garde d'enfants, afin que les survivantes sachent qu'elles ont des endroits vers lesquels se tourner pour obtenir du soutien. Il faut également fournir plus de financement pour des programmes comme l'aide juridique et les conseils juridiques indépendants afin que les survivantes puissent obtenir l'aide juridique dont elles peuvent avoir besoin pour évaluer leurs options.
    Nous faisons également écho aux nombreux témoins qui ont plaidé en faveur d'un accroissement de l'éducation. Il faut donner une formation obligatoire sur le contrôle coercitif aux acteurs du système de justice, ainsi qu'une formation continue sur les préjugés et le racisme systémiques. Il faut également sensibiliser le public au contrôle coercitif afin que les survivantes et leurs communautés puissent repérer ces comportements, se sentir validés et comprendre que ces comportements sont reconnus comme de la violence.
    Depuis des décennies, l'augmentation des taux de violence fondée sur le sexe a constamment montré que le recours au système de justice pénale s'avère inefficace. Nous pensons qu'il est temps de changer de cap et d'affecter des ressources à nos communautés et à nos systèmes afin qu'ils disposent des infrastructures nécessaires pour offrir une véritable sécurité aux survivantes et leur permettre d'aller de l'avant. Je vous remercie du temps que vous m'avez accordé. Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
    Merci beaucoup à vous toutes pour vos déclarations préliminaires. Nous passerons maintenant aux questions des députées.
    J'accorderai la parole à Mme Roberts en premier pour six minutes.
    Merci, madame la présidente. Ma première question s'adresse à Mme Koshan.
    Vous avez fait une observation sur l'éducation. Je pense que c'est important. Nous devons éduquer non seulement les hommes qui nous entourent, mais aussi les juges et les avocats pour qu'ils comprennent mieux ce qu'est le contrôle coercitif. Je parlerai de l'importance de ce fait au nom des enfants, parce qu'ils finissent par être des victimes dans tout cela, tout comme les mères.
    Je vais vous parler d'un événement qui a eu lieu le jour de Noël, en décembre 2017. Chloe et Aubrey Berry, âgées respectivement de six et quatre ans, ont été trouvées par la police dans un appartement du rez‑de‑chaussée à Oak Bay. Elles avaient été assassinées par leur père. Si vous prenez connaissance du dossier, vous verrez que la mère a continuellement tenté d'alerter les tribunaux, mais personne ne l'a écoutée.
    Quels conseils prodigueriez-vous aux tribunaux aujourd'hui? Ce n'est là qu'un des nombreux drames qui se produisent. Comment pouvons-nous changer la donne pour criminaliser le père, parce que nous ne protégeons pas nos enfants?
(1555)
    Je vous remercie beaucoup de cette question.
    Oui, l'affaire Berry est très troublante. Malheureusement, ce n'est qu'un des nombreux cas d'enfants tués par des pères violents.
    Dans le cadre de notre recherche sur la Loi sur le divorce dont j'ai parlé, nous avons constaté que même si cette loi exige maintenant que l'exposition des enfants à la violence familiale soit prise en compte au moment de rendre des ordonnances parentales, il semble que les tribunaux ont encore beaucoup de mal à comprendre ce que cela signifie. Dans bien des cas, ils cherchent à savoir si les enfants ont été directement exposés à la violence, plutôt que de tenir compte de la façon dont l'exposition indirecte des enfants à la violence peut avoir sur des effets très préjudiciables.
    Nous constatons que les tribunaux rendent très rarement des ordonnances de temps parental supervisé. Même quand des accusations criminelles sont portées, si la personne est incarcérée, elle finira bien par sortir de prison.
    J'encourage le Comité à réfléchir non seulement à l'aspect criminel de la question, mais aussi à la facette de droit de la famille du contrôle coercitif et à la nécessité d'éduquer les tribunaux et les professionnels du droit afin qu'ils comprennent les répercussions sur les enfants et la nécessité de rendre parfois des ordonnances de temps parental supervisé pour essayer de prévenir ce genre de meurtre à l'avenir.
    Si nous n'incarcérons pas les hommes violents et ne les soumettons pas à des traitements pendant leur incarcération, comment protégeons-nous les enfants? C'est ce qui me laisse perplexe, parce que s'ils paient pour leurs crimes et si on les éduque et travaille avec eux, on peut espérer qu'ils se comporteront mieux quand ils sortiront de prison.
    Êtes-vous d'accord?
    Je pense que la formation, le counseling et les services de ce genre peuvent également être offerts sans qu'il y ait d'incarcération. En Alberta, ma province d'origine, les tribunaux saisis d'affaires de violence familiale recourent assez régulièrement à des engagements de ne pas troubler l'ordre public. Ainsi, les gens ne sont pas incarcérés, mais s'ils admettent leur responsabilité, ils sont quand même envoyés en thérapie.
    Les données ne permettent toutefois pas de savoir si ce genre de traitement fonctionne. Je vous encourage donc à envisager tant le recours au droit pénal que le domaine du droit de la famille afin de pouvoir réfléchir à la façon dont ces deux systèmes fonctionnent ensemble. Il faut tenir compte du fait qu'il faut parfois prendre des mesures de protection dans la sphère du droit de la famille, même le système pénal a ordonné un traitement ou une incarcération.
    Je vous remercie.
    Je poserai la même question à Mme Riendeau.
    Nous pourrions étudier de nombreux cas. Nous pourrions examiner la loi de Keira, où la situation était la même. Le père était très contrôlant. Les doléances de l'enfant et la mère ont été ignorées, et une autre tragédie s'en est suivie.
    Nous devons nous assurer de protéger les victimes. Comment pouvons-nous le faire si nous ne contrôlons pas les hommes qui commettent le crime?

[Français]

     Vous avez raison de dire qu'il existe un défi très important en matière de droit de la famille.
    Effectivement, on constate chaque jour que les juges pensent souvent que la violence est exercée envers la femme, et qu'il n'y a pas de conséquences sur les enfants si aucune violence directe n'est exercée. On pense aussi, à tort, que la violence arrête au moment de la séparation, alors que c'est souvent le moment où ça devient le plus dangereux.
    Il faut établir un dialogue entre le système pénal et le système du droit de la famille. Il faut que le droit de la famille reconnaisse que la présence de violence conjugale est dangereuse, tant pour les mères que pour les enfants, et qu'il mette en place des mesures. On entend souvent parler de garde partagée, notamment. Au fond, c'est une situation qui oblige les parents à rester très souvent en contact pour les enfants, ce qui multiplie les occasions pour des conjoints contrôlants d'exercer leur violence envers leur ex-partenaire ou envers les enfants.
(1600)

[Traduction]

    Je vous remercie.
    Il vous reste 30 secondes.
    J'aimerais poser la même question à Mme Barrette, parce qu'il y a eu un autre incident au milieu des années 1990, alors qu'un père était censé avoir des visites supervisées avec ses enfants. Le couple s'était séparé parce qu'il était très contrôlant. Non seulement la supervision était lacunaire, mais il a fini par assassiner ses quatre enfants et se tuer par balle, après avoir mis le feu à la maison.
    Il avait suivi une sorte de traitement, qui n'avait manifestement pas fonctionné. Comment notre société peut-elle protéger ses enfants?
    Madame Roberts, votre temps est malheureusement écoulé. Elle pourra peut-être répondre à votre question en répondant à celle de quelqu'un d'autre.
    Je vous remercie.
    La parole est maintenant à Mme Damoff.
    Vous disposez également de six minutes.
    C'est un plaisir de remplacer une membre du Comité dans le cadre d'une étude aussi importante. Je félicite les membres du Comité permanent de la condition féminine d'examiner cette question.
    Madame Koshan, vous avez parlé de l'aliénation parentale. J'ai récemment parrainé une pétition à ce sujet pour demander des modifications au Code criminel, mais je me demande si nous pourrions parler brièvement d'aliénation parentale.
    Au cours de mes réunions, il a été question des camps de réunification et du fait qu'ils ressemblent beaucoup à la thérapie de conversion et sont utilisés pour envoyer de jeunes enfants dans des camps aux États-Unis, ce qui coûte des dizaines de milliers de dollars aux mères pour essentiellement les convertir afin de les réunir avec un partenaire violent.
    Avez-vous des observations à formuler à ce sujet? Pensez-vous que le gouvernement fédéral devrait faire quelque chose, que ce soit par voie législative ou réglementaire, au sujet de ces camps de réunification?
    Je vous remercie beaucoup de cette question.
    Comme je crois l'avoir souligné dans ma déclaration préliminaire, notre recherche sur le droit de la famille appuie fortement les recommandations formulées par l'Association nationale Femmes et Droit au sujet de la nécessité de limiter les arguments d'aliénation parentale dans les affaires de droit de la famille, car ils sont souvent utilisés en réaction aux allégations de violence familiale faites par des femmes.
    Vous avez entièrement raison de dire que des juges adhèrent parfois au concept d'aliénation parentale, alors qu'en réalité, la mère tente de protéger ses enfants contre les mauvais traitements. Par la suite, dans des affaires considérées extrêmes, les enfants sont envoyés dans des camps de réunification, ce qui leur est extrêmement préjudiciable.
    Oui, j'exhorterais le Comité à envisager d'imposer des limites à la fois sur la mesure dans laquelle ces genres d'arguments peuvent être présentés dans le cadre de procédures en droit de la famille et sur les sortes de mesures de redressement qui peuvent être ordonnées. Je crois qu'il faut vraiment imposer des limites à ces prétendues thérapies de réunification.
    Oui. Je connais la recommandation de l'Association nationale Femmes et Droit. Je l'ai rencontrée et j'appuie sans réserve ce qu'elle cherche à accomplir.
    Les mères et les enfants qui ont été soumis à ces camps ont notamment dit que si on mettait fin à la thérapie de réunification et aux camps de réunification, cela mettrait fin aux ponctions financières et ferait en sorte que les juges ne les recommandent pas.
    Je sais que c'est à vous que je pose mes questions, madame Koshan, parce que c'est vous qui en avez parlé, mais si le FAEJ ou quelqu'un d'autre veut intervenir, n'hésitez pas à le faire.
    Je ferai peut-être brièvement référence aux recherches de Linda Neilson dans ce domaine. Elle a constaté que les personnes qui témoignent à titre d'experts des affaires d'aliénation parentale sont parfois les mêmes qui dirigent les camps de réunification et pourraient donc en profiter directement.
    Je vous laisserai la parole dans un instant, madame Riendeau, mais ces camps coûtent des dizaines de milliers de dollars. Comme ce sont les mères qui paient la note, elles doivent souvent hypothéquer leur maison. Ce que je veux dire, c'est que ce ne sont pas des petites sommes qu'il faut verser pour tenter d'aider les enfants.
    Il est absolument horrible de parler aux jeunes qui ont été soumis à ces camps ou à ces thérapies.
    Vouliez-vous ajouter quelque chose?

[Français]

     Oui. Outre le fait d'interdire les camps, il faut que tout un travail soit fait pour éduquer les tribunaux et les experts en psychologie légale: quand une femme tente de protéger ses enfants ou qu'un enfant dit ne pas vouloir voir son père parce qu'il a vécu ou vu de la violence, il faut l'écouter.
     On commence à parler de violence judiciaire, qui est effectivement un des moyens que les conjoints utilisent pour continuer à contrôler leur partenaire. Pour notre part, nous sommes totalement d'accord sur les recommandations de l'Association nationale Femmes et Droit qui visent à interdire le recours à l'aliénation parentale. Ce concept, qui n'est pas basé sur la science, a malheureusement été adopté par trop de tribunaux de la famille et de la jeunesse. Nous pensons que c'est simplement une façon de maintenir le statu quo et le pouvoir des pères qui sont contrôlants et violents.
(1605)

[Traduction]

    Je pense que deux problèmes se posent, toutefois.
    Le premier, c'est que l'Association nationale Femmes et Droit recommande d'interdire l'aliénation parentale dans la loi, mais propose aussi l'élimination de la thérapie de réunification. Seriez-vous d'accord pour interdire la thérapie dans les camps? Vous hochez la tête en signe d'assentiment. D'accord.

[Français]

     Oui.

[Traduction]

    La formation obligatoire pose cependant un problème. Le Comité a étudié la loi de Keira, grâce à la députée Dhillon. J'ai travaillé à ce dossier. Nous ne pouvons rendre obligatoire la formation des juges. Je me réjouis que la province de l'Ontario ait, comme le Manitoba, mis en œuvre la loi de Keira. J'encouragerais le Québec à en faire autant, mais à titre de législateurs, notre capacité d'exiger une formation pour les juges est vraiment limitée. En outre, bon nombre des intervenants qui ont besoin d'une formation relèvent en fait des compétences provinciales, comme les sociétés d'aide à l'enfance et les procureurs de la Couronne. Je pense que nous avons parcouru beaucoup de chemin grâce au projet de loi d'initiative parlementaire de la députée Dhillon et au travail de Jennifer Kagan, mais notre capacité d'éducateur est très limitée sur le plan de la formation.
    Je pense qu'il me reste une quinzaine de secondes, alors je m'arrêterai ici.
    Je vous remercie.
    C'est parfait.

[Français]

    Madame Larouche, vous avez la parole pour six minutes.
     Merci beaucoup, madame la présidente.
    Je remercie les quatre témoins d'être des nôtres dans le cadre de cette étude.
     Malheureusement, l'actualité nous rappelle, d'une façon assez dramatique, à quel point nous devons faire plus pour qu'il n'y en ait pas une victime de plus. Un article de Mme Stéphanie Grammond est d'ailleurs paru dans La Presse ce matin, rappelant encore que les chiffres sont alarmants en ce moment au Québec. Nous pourrons y revenir.
    Mesdames Barrette et Riendeau, nous venons d'aborder la question de l'éducation. J'ai eu l'occasion de découvrir votre outil l'été dernier, alors que je réfléchissais à la façon de soumettre cette étude sur le contrôle coercitif au Comité. Pouvez-vous nous en dire un peu plus à ce sujet, et en quoi, justement, ça ajoute un complément à notre étude sur le contrôle coercitif?
     On le sait, cet outil n'est pas une baguette magique, il ne réglera pas tout, mais il y a tout un continuum de services ou de solutions à proposer. Je vous laisserai quelques instants pour nous parler davantage de votre outil.
     Merci beaucoup de cette question.
    En fait, nous travaillons sur le projet, depuis octobre 2021, comme le mentionnait ma collègue. Nous travaillons avec un comité consultatif composé d'une trentaine de membres de toute la chaîne d'intervenants du milieu judiciaire: des corps de police, l'École nationale de police du Québec, des chercheurs universitaires, des intervenantes en maisons d'aide et d'hébergement, des juristes, le Directeur des poursuites criminelles et pénales, des procureurs et les services correctionnels. Selon nous, iI est important de travailler avec tous ces gens.
     L'idée était de développer des outils qui allaient vraiment répondre aux besoins de ces intervenants sur le terrain, d'une part pour comprendre ce qu'est le contrôle coercitif dans leur mission respective, mais aussi pour voir quelles sont les limites sur le terrain. Ensuite, il s'agissait de voir comment ces intervenants s'y prennent pour détecter le contrôle coercitif, puisqu'un patrouilleur ne le détecte pas de la même manière qu'un avocat en droit de la famille ou en droit de l'immigration. Il s'agissait aussi de voir comment mieux documenter le contrôle coercitif, afin de comprendre la dangerosité d'une situation de violence conjugale.
    Nous avons donc développé une boîte à outils ainsi qu'un « napperon policier », un aide-mémoire à l'intention des policiers, qui indique comment se manifestent les différentes tactiques de contrôle coercitif. Les membres du comité consultatif voulaient vraiment avoir des exemples concrets. N'ayant pas vécu ce genre de situation, ils nous disaient vouloir savoir comment se présentent les situations de détournement cognitif et comment développer la surveillance et l'interrogatoire sur le terrain.
    Nous avons conçu ces outils pour soutenir ces intervenants et, comme l'a mentionné ma collègue, nous avons créé ce « napperon policier », qui aide maintenant les policiers à rédiger leurs rapports, afin qu'ils puissent faire mention de ce qui est constaté sur le terrain. Ce sont tous des outils parmi d'autres, mais qui ont une influence majeure. Nous avons aussi développé d'autres volets sur les femmes en situation de précarité économique et sur les femmes issues des communautés ethnoculturelles.
(1610)
    On sait qu'on ne peut pas penser à aider les victimes de violence conjugale à se sortir du cycle de cette violence si on ne travaille pas davantage à briser la violence économique pour sortir les femmes de ce cycle de la pauvreté et de la précarité, qui les gardent très souvent dans le cycle de la violence conjugale.
     J'aimerais revenir à l'article qui est paru ce matin, qui donne quand même un petit peu froid dans le dos. On parle de l'histoire de Naima Rezzek, qui a été poignardée par son ex-conjoint samedi dernier. Il s'agit de la deuxième femme tuée en trois jours et de la quatorzième femme tuée depuis le début de l'année au Québec. Parmi celles-ci, huit ont été tuées dans un contexte de violence conjugale. L'auteure de l'article s'interroge: « Que se passe-t-il donc? En moins de cinq mois, le nombre de féminicides est déjà plus élevé que pour l'année 2023 au complet. »
    Ma réflexion sur la question du contrôle coercitif vient du fait que j'ai été interpellée par une députée de Québec à ce sujet. Pour votre part, vous me disiez avoir été consultée relativement à cet article. Je sais que vous avez non seulement été consultée au sujet de cet article, mais que vous avez aussi contribué au rapport intitulé « Rebâtir la confiance », qui a mis en place différentes initiatives au Québec. C'est un peu ce qu'on dit dans l'article.
    Il y a beaucoup de choses que le Québec peut faire mieux, mais la balle est maintenant dans le camp du fédéral en matière de criminalisation du contrôle coercitif et on ne peut pas jouer avec cette balle.
    En quoi ces chiffres reflètent-ils cette situation? Comment cet outil pour détecter le contrôle coercitif pourrait-il aider à faire diminuer le nombre de crimes envers les femmes?
     En fait, la raison pour laquelle nous saluons l'étude qui est faite ici aujourd'hui, c'est parce qu'il est important de parler de ce concept et de le faire connaître. Beaucoup de professionnels et de victimes, quoique celles-ci savent ce qu'elles vivent, vont penser que violence conjugale signifie violence physique. Or, nous savons que les victimes vivent toutes sortes de formes de contrôle et nous savons que le contrôle coercitif est un indicateur de létalité très important. Une étude menée en Angleterre a montré que, dans plus de 90 % des cas d'homicide conjugal, la victime avait subi du contrôle coercitif par le passé.
    Il faut que la population soit au fait de ce concept, mais il faut surtout que les professionnels le soient, afin qu'ils puissent aider les victimes et pousser les auteurs à changer de comportement. À mon avis, c'est à ce prix-là qu'on va réussir: il faut documenter les situations, les nommer, prendre des mesures pour contrecarrer le comportement coercitif et arrêter de banaliser ces gestes qui, pris isolément, peuvent effectivement avoir l'air banal. Il faut que les gens soient plus informés, qu'ils agissent contre le contrôle coercitif et qu'ils le reconnaissent comme une forme de violence.
     Madame Barrette, si vous n'avez rien à ajouter à ce sujet, je vais vous poser une question: qu'avez-vous appris de cette tournée? Vous avez dit qu'il n'y avait pas un pays ayant soulevé la question de la criminalisation qui voulait revenir en arrière.
    Nous sommes d'accord sur ce qu'a dit l'autre témoin: tous les acteurs peuvent aider au dépistage. Comme on l'a mentionné, quand il y a absence de violence physique, les victimes ne sont pas nécessairement au courant qu'elles sont victimes de violence conjugale. Si on reconnaît que le contrôle coercitif va au-delà de la violence physique, les acteurs du milieu judiciaire, que ce soit en droit de la famille ou en droit criminel, vont pouvoir intervenir pour éclairer les victimes.

[Traduction]

    Excellent. Je vous remercie.
    La parole est maintenant à Leah Gazan.
    Vous disposez de six minutes.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Je remercie toutes les témoins de comparaître aujourd'hui dans le cadre de cette étude très importante.
    Ma première question s'adresse à Mme Koshan.
    Recommanderiez-vous au Comité de ne pas criminaliser le contrôle coercitif?
    Je vous remercie beaucoup de cette question.
    C'est la position que j'ai adoptée avec mes collègues dans le mémoire que nous avons déposé devant le Comité permanent de la justice et des droits de la personne.
    Nous comprenons parfaitement que le contrôle coercitif constitue une préoccupation réelle et que nous devons réfléchir aux moyens juridiques de réagir à ce comportement, mais nous partageons certaines préoccupations soulevées par Roxana Parsa du FAEJ dans sa déclaration préliminaire. Nous avons tiré quelques leçons de mesures comme les politiques de mise en accusation et de poursuites obligatoires dans des affaires de violence familiale.
    Nous soulevons également certaines questions quant à la façon dont le contrôle coercitif est traité en droit de la famille. Il est utilisé contre les femmes. Les mesures de protection des femmes...
    Madame Kashan, je suis désolée de vous interrompre, mais mon temps est limité.
    Êtes-vous d'accord pour dire que nous ne devrions pas criminaliser le contrôle coercitif, oui ou non?
(1615)
    Je suis d'accord pour le criminaliser, mais pas maintenant. Il y a encore du travail à faire.
    D'accord, parfait.
    J'aimerais maintenant m'adresser à vous, madame Parsa.
    Seriez-vous aussi d'accord pour ne pas criminaliser le contrôle coercitif?
    Oui, nous sommes d'accord.
    Nous avons également présenté au Comité permanent de la justice et des droits de la personne un mémoire qui explique nos points de vue plus en détail.
    J'ai une autre question à vous poser.
    Vous avez parlé de miser plutôt sur la prévention ou sur les manières dont les personnes qui veulent échapper à la violence peuvent y parvenir.
    J'ai proposé une mesure qui fera l'objet d'un vote à l'automne: l'instauration d'un revenu de base garanti suffisant.
    Convenez-vous que nous avons besoin d'un revenu de base garanti suffisant pour faire face à la crise de la violence fondée sur le sexe?
    Je pense que le fait d'avoir un revenu de base, ainsi que des services publics abordables, des logements et des protections sociales accrues aiderait certainement les survivantes à savoir qu'elles peuvent être en sécurité si elles doivent quitter leur relation.
    Recommanderiez-vous un revenu de base garanti suffisant en plus des autres mesures de soutien et services conçus pour répondre à des besoins particuliers?
    Oui.
    D'accord, merci.
    Je passerai maintenant à vous, madame Koshan. Êtes-vous d'accord?
    Oui, exactement pour les mêmes raisons que celles évoquées par Mme Parsa. Je conviens que c'est une manière très importante d'offrir du soutien social et économique.
    D'accord. C'est excellent.
    Mesdames Barrette et Riendeau, recommanderiez-vous l'instauration d'un revenu de base garanti suffisant en plus des autres mesures de soutien conçues pour combler des besoins précis et particuliers à titre de mesure clé pour faire face à la violence fondée sur le sexe et pour aider les personnes qui fuient le contrôle coercitif?

[Français]

     Oui, absolument.
    L'accès à un revenu décent, à des logements sociaux abordables et sécuritaires et à différentes politiques sociales sont des éléments essentiels pour permettre aux femmes qui fuient la violence de le faire plus facilement.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Madame Koshan, vous avez beaucoup parlé d'aliénation parentale. Selon vous, devrait‑on interdire le recours aux arguments d'aliénation parentale devant les tribunaux?
    Oui, je suis en faveur de cette proposition. Cependant, il y a une mise en garde que j'aimerais faire si je peux prendre quelques secondes pour en parler. Il faut établir une distinction entre des allégations d'aliénation parentale faites à l'encontre de mères d'une part et, d'autre part, un comportement de certains pères qui se livrent à un véritable sabotage de la relation entre les enfants et leur mère. Ce sabotage est en soi une forme de violence familiale. Si nous maintenons la distinction entre ces deux conduites différentes, je pense qu'en effet, il faut empêcher que des arguments d'aliénation parentale soient présentés dans les tribunaux de la famille.
    Allez‑y, madame Parsa.
    À ce stade, le Fonds d'action et d'éducation juridique pour les femmes, ou FAEJ, n'appuie pas une interdiction complète des arguments d'aliénation parentale. Nous devons faire davantage de recherche à l'interne avant de déterminer quelle sera notre position sur cette question. Nous croyons toutefois qu'il est certainement extrêmement important que tous les professionnels de la justice, y compris les juges, soient formés sur la manière dont les litiges sont utilisés comme forme de violence.
    Nous craignons que, si le contrôle coercitif devient une nouvelle infraction criminelle, cette infraction même sera utilisée contre les femmes comme forme de contrôle coercitif. Nous estimons qu'il est essentiel que les tribunaux et les membres du système judiciaire soient sensibilisés et continuent d'apprendre à ce sujet.
    Recommandez-vous que les acteurs judiciaires et d'autres personnes soient éduqués sur ce qu'est l'aliénation parentale?
    Absolument.
    D'accord, c'est très bien.
    Combien de temps me reste‑t‑il?
    Vous avez quatre secondes, madame Gazan.
    Dans ce cas, je m'arrête ici.
    Merci.
    Madame Ferreri, vous avez cinq minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Je remercie les témoins de leur présence aujourd'hui au comité de la condition féminine, ou FEWO, dans le cadre de son étude sur le contrôle coercitif.
    Il y a eu une montée en flèche de la violence familiale. Nous avons entendu des histoires affolantes de la part de mes collègues autour de la table et de toutes les femmes ici présentes.
    Je vais commencer avec vous, madame Koshan. Je crois qu'il serait utile de retrouver une définition du concept de mère protectrice dans le rapport, comme vous l'avez souligné. Aux fins du compte rendu, je tiens toujours à dire que cela arrive aussi aux hommes. Je tiens toujours à le souligner. Ici, nous nous concentrons sur les femmes, mais cela peut se produire partout. Quelle est la différence entre une mère protectrice et le contrôle coercitif? Quelle serait la définition? À mon avis, il s'agit d'un élément clé de cette conversation.
(1620)
    Oui. C'est difficile de le faire en si peu de temps, mais...
    Vous pouvez très bien soumettre une réponse écrite, parce que je comprends que c'est très gros, et que c'est comme si on vous disait: « Oh, parlez-nous‑en en 10 secondes. » Je comprends cela, alors si vous voulez nous soumettre un mémoire écrit, nous vous en serions reconnaissants.
    Oui, merci.
    Ce que je vais peut-être faire, simplement pour essayer de préciser les choses, c'est dire que le contrôle coercitif, considéré comme une forme de violence entre partenaires intimes ou de violence familiale, concerne l'incidence qu'il a sur l'autonomie de la victime, et c'est donc un type de comportement qui a une incidence sur l'autonomie de la victime.
    Alors que, si nous pensons au comportement protecteur des mères, elles ne se livrent pas à ce comportement dans le but de nuire à l'autonomie des pères; elles essaient de protéger leurs enfants. Je pense que c'est en partie la différence dans l'intention derrière le comportement, ce qu'elles essaient d'accomplir par ce comportement, et je pense qu'il y a une réelle distinction à faire entre essayer de protéger ses enfants et tenter de contrôler son partenaire d'une manière qui porte atteinte à son autonomie.
    Oui. Je pense que vous avez souligné les défis et les complications que cela présente et la raison pour laquelle il est si important que les juges soient si bien formés à cet égard. Il y a une nuance à faire. Pour quiconque a vécu une relation abusive, la violence ou la relation toxique entre les partenaires intimes est parfois ignoble, mais ils peuvent avoir des relations avec leurs enfants, ou les enfants ont besoin de voir chaque parent, mais le système est maintenant organisé de sorte que les enfants sont des pions pour l'argent, pour toutes ces raisons.
    La crise du coût de la vie aliène encore plus les femmes ou les force à s'engager dans des relations abusives. Il y a maintenant des statistiques. Le National Post a publié un article intitulé « Le taux de divorce au Canada diminue parce que les Canadiens ne peuvent tout simplement pas se le permettre ». Nous savons déjà que l'argent est l'une des principales raisons pour lesquelles on ne peut pas mettre fin à une relation, s'il y a un contrôle financier.
    Je vous remercie des excellents documents que vous nous avez remis. Ils sont très utiles pour informer le public en ce qui concerne les définitions.
    Beaucoup de gens ne savent même pas qu'ils sont dans une relation malsaine parce que c'est tout ce qu'ils ont jamais connu, et les enfants ne le savent pas non plus. Nous voulons intervenir et briser cette tendance, mais il y a des articles comme celui‑ci qui disent que « les principales raisons pour lesquelles les cloches de mariage ne sonnent pas semblent être le prix élevé et le coût général de la vie », ou l'incapacité de se permettre de partir ou de trouver un logement.
    Je ne sais pas qui veut intervenir à ce sujet, mais j'aimerais beaucoup voir quelque chose à ce sujet dans le rapport. Le coût de la vie est un facteur très important pour permettre aux femmes de se libérer d'une relation abusive.
    Je vois Mme Riendeau me jeter un regard, alors je vais lui demander de répondre.

[Français]

     Nous constatons effectivement que certaines femmes qui demandent l'aide des maisons d'hébergement vont parfois décider de retourner auprès du conjoint violent parce qu'elles sont incapables de trouver un logement abordable et sécuritaire qui leur permettra de continuer à nourrir leurs enfants, à les éduquer et à les habiller. Ce sont là des défis importants. Nous constatons aussi chaque jour que, depuis la hausse de la crise du logement au Québec, les femmes restent plus longtemps dans les maisons d'aide et d'hébergement. Ça cause d'autres problèmes et empêche d'autres femmes d'accéder à ces maisons.
    Il faut donc absolument travailler sur la situation et l'autonomie économiques des femmes; il faut leur donner accès à des emplois qui leur permettent d'avoir cette liberté. Il faut aussi travailler à repérer les signes de contrôle, comme des conjoints qui amènent des femmes à quitter leur emploi ou les privent de l'accès aux ressources financières du couple. Ce sont aussi des choses qu'il faut arriver à détecter si on veut aider les femmes.
(1625)
    Merci beaucoup.

[Traduction]

    J'invite maintenant Mme Vandenbeld à poser ses questions.
    Je remercie tous les témoins. Leurs témoignages sont extrêmement utiles, non seulement pour nous éclairer sur les moyens de remédier à la situation, mais également pour nous aider à bien la comprendre. Je pense que notre comité est rapidement passé de la compréhension du contrôle coercitif à ce que peuvent faire le gouvernement et le système de justice, notamment en matière de sensibilisation, mais nous n'avons pas vraiment consigné au compte rendu ce dont il s'agit exactement. Des témoins nous ont parlé d'exploitation financière et économique, de violence physique contre les femmes, les filles, les personnes non binaires et issues de la diversité de genre. Mais qu'entend‑on exactement par « contrôle coercitif »?
    Avant que vous répondiez précisément à cette question, je remarque que Mme Riendeau et Mme Barrette vous ont remis un document. Je viens d'y jeter un coup d'œil et je l'ai trouvé très utile. J'espère que vous le déposerez afin qu'il soit versé avec les documents officiels du Comité. On y parle de surveillance et d'interrogatoires, de menaces, de violence sexuelle, de manipulation, d'exploitation financière, de violence spirituelle, de harcèlement, d'humiliation, d'agressions technologiques, de blâme, de violence physique et d'isolement. Si un proche les a subis, ou si on a subi soi-même le contrôle coercitif, on le sait d'instinct, même si on n'est pas nécessairement en mesure de le décrire ou de le définir, surtout à un juge ou à d'autres personnes.
    Je vais vous donner quelques minutes pour expliquer, aux fins du compte rendu, de quoi il s'agit exactement lorsque l'on parle de contrôle coercitif.

[Français]

     Dans le fond, le contrôle coercitif est un continuum de tactiques, de stratégies ou de manifestations de violence ou d'exploitation visant à terroriser ou à dominer la victime et à la priver de ses droits. Comme l'a mentionné un autre témoin, il y a vraiment une intention qui se cache derrière ça. C'est souvent fait de manière graduelle et sournoise par un partenaire ou un ancien partenaire. De plus, c'est répété dans le temps.
    Quand on a une bonne compréhension du contrôle coercitif, on ne va pas le confondre avec un comportement protégeant, parce qu'on voit l'intention qui se cache derrière. On ne confond pas ça avec une chicane ou une dispute. Le comportement coercitif est établi dans le temps. Il s'agit d'une prise de contrôle, et non d'une perte de contrôle. Ce contrôle peut s'exercer de nombreuses façons.
    On a fait référence à l'outil que nous utilisons pour donner des exemples, mais ce n'est pas limitatif. Un auteur de violence va parfois utiliser un type de manifestation ou de tactique, mais, si ça ne fonctionne plus et que la victime veut reprendre le pouvoir, il va malheureusement avoir recours à un autre outil du coffre et, parfois, recourir à de la violence physique.
    Il peut aussi y avoir une situation de contrôle coercitif dans une relation où il n'y aura jamais de violence physique parce qu'elle ne sera pas nécessaire. Les victimes qui se retrouvent souvent dans ce genre de situation ne savent pas toujours qu'elles vivaient du contrôle coercitif. Nous avons développé un outil destiné aux victimes, le livret Ce n'est pas de l'amour… c'est du contrôle. Des victimes nous ont dit que, quand elles consultaient les ressources et qu'elles voyaient les mots « violence conjugale », elles ne les lisaient pas, parce que leur partenaire n'avait jamais été violent envers elles et ne les avait jamais touchées. Pourtant, quand elles prennent connaissance de notre outil, il y a un effet eurêka.
    Chaque fois que nous nous adressons aux médias, écrits ou autres, pour parler du contrôle coercitif, nous recevons des appels et des courriels de personnes qui nous disent que c'est ce qu'elles vivent. Elles nous disent qu'elles pensaient qu'elles étaient folles, que leur partenaire leur disait qu'elles exagéraient, qu'elles mentaient ou qu'elles avaient un problème de santé mentale. Leur partenaire disait à leur famille qu'elles étaient trop sensibles. Maintenant, elles s'aperçoivent que c'est ce qu'elles vivent et que leur partenaire était en train de tisser sa toile autour d'elles. Comme il n'est pas toujours question de violence physique, il est plus difficile pour les victimes de se rendre compte de leur situation.
    Plus tous les intervenants judiciaires vont être éclairés à cet égard, plus ils vont avoir un rôle de sentinelles et plus ils vont être en mesure d'informer les victimes. Parfois, il n'y a même pas de processus pénal. Ça peut être une démarche d'immigration ou une démarche en droit de la famille. Ça peut être les notaires. Il est important que tout le monde le sache. De cette façon, on rend visible l'invisible; on le fait pour les victimes.
    J'aimerais ajouter que nous avons voulu créer des outils pour chaque intervenant judiciaire, afin qu'il pose les bonnes questions. Il faut que ceux qui travaillent en droit de la famille soient capables de documenter le contrôle coercitif. Il faut que ceux qui travaillent en droit de l'immigration soient capables de voir les façons précises utilisées par les conjoints pour contrôler leur partenaire qui a un statut précaire.

[Traduction]

    J'ai remarqué que nos deux autres témoins ont parlé de l'importance de l'éducation.
    Ce que vous décrivez porte sur l'intention et une tendance, ce qui n'augure rien de bon pour le système judiciaire, le système de justice pénale.
    J'aimerais commencer par Mme Koshan.
    Vous avez dit que la criminalisation n'était probablement pas une bonne idée, mais pourriez-vous nous parler des interventions en matière d'éducation?
(1630)
    Malheureusement, madame Vandenbeld, vos cinq minutes sont écoulées.
    Je serais heureuse que ce témoignage soit ajouté, mais peut-être à un autre endroit lors du prochain tour.
    Madame Larouche, vous avez deux minutes et demie.

[Français]

     Merci, madame la présidente.
    Mesdames Riendeau et Barrette, je poursuis sur ce que vous venez de dire. Ce n'est pas parce que ce n'est pas toujours frappant que ça ne fait pas toujours mal, et ce n'est pas parce que la violence prend la forme d'un contrôle coercitif qu'elle ne peut pas mener au féminicide. Je pense que c'est la raison pour laquelle nous nous intéressons grandement à cette question. Si vous avez des commentaires à faire sur ce que je viens de dire, vous êtes les bienvenues.
    J'aimerais aussi revenir sur un aspect qui n'a pas beaucoup été abordé aujourd'hui, c'est-à-dire le projet de loi C‑332. Vous en avez parlé dans vos remarques préliminaires, et vous avez dit que vous étiez en faveur de celui-ci.
    Récemment, j'ai participé à un colloque sur les violences faites aux femmes. Ce colloque avait lieu dans ma région, et les groupes présents étaient très intéressés par le projet de loi. Cependant, il faut peut-être y apporter certaines nuances, car ce projet de loi ne permet pas de régler tous les problèmes, même ceux en lien avec la question du contrôle coercitif. Avez-vous des propositions à nous faire concernant ce projet de loi?
    Merci beaucoup.
    J'aimerais revenir sur votre premier commentaire, selon lequel ce n'est pas parce qu'il n'y a pas de violence physique que ce n'est pas dangereux. Selon une statistique américaine, dans le tiers des cas d'homicide conjugal ou de tentative d'homicide conjugal, il n'y avait pas d'antécédents de violence physique.
    Quand on donne de la formation aux policiers et aux policières, on leur dit donc qu'ils ne doivent pas attendre qu'il y ait de la violence physique ou des voies de fait pour y voir du danger. Il s'agit d'un élément super important.
    Pour ce qui est du projet de loi C‑332, nous sommes effectivement en faveur de celui-ci. Nous avions plusieurs recommandations que nous souhaitions voir intégrer à la première mouture du projet de loi. D'ailleurs, nous avons eu la chance de présenter ces recommandations lorsque nous avons témoigné devant le Comité permanent de la justice et des droits de la personne. La dernière mouture du projet de loi reprend la plupart de nos recommandations. Une chose est certaine: le projet de loi et la criminalisation du comportement coercitif ne suffiront pas. On ne peut pas simplement criminaliser un comportement et espérer régler le problème comme par magie. Il faut que ce soit assorti de conditions essentielles, comme nous l'avons mentionné lorsque nous avons fait notre allocution d'ouverture.
     Je pense qu'il faut effectivement parler de formation des professionnels. Il faut des ressources suffisantes pour qu'ils puissent intégrer ça dans les nouvelles pratiques. Il faut sensibiliser la population. Il faut réfléchir à prévenir les effets pervers que la judiciarisation du contrôle coercitif pourrait entraîner en discutant avec les victimes et les groupes marginalisés. Il faut donc qu'une série de mesures soient mises en place avant même l'entrée en vigueur du projet de loi.

[Traduction]

     Merci.
    Par la suite, nous avons Leah Gazan.
    Vous avez deux minutes et demie.
     Merci beaucoup.
    Mes questions s'adressent à Mme Parsa.
    Vous avez parlé de l'oppression systémique et de la mauvaise application de la loi. Vous avez parlé un peu des peines obligatoires. J'essaie de comprendre comment formuler cela. Pour les communautés de personnes autochtones, noires et de couleur, ou PANDC, pourquoi la criminalisation du contrôle coercitif est-elle un problème plus important?
    Je pense qu'il y a deux raisons principales que nous avons soulevées.
    D'abord, si vous regardez l'histoire du droit pénal et si vous examinez précisément des choses comme la mise en accusation obligatoire et les politiques en matière de violence conjugale, vous verrez que la violence et les abus sont souvent traités différemment lorsque les communautés des PANDC y sont confrontées. Les policiers et les membres du système judiciaire ne les comprennent pas de la même manière. Souvent, la victime est accusée d'être l'agresseur.
    Des études ont montré que cela se produit beaucoup plus souvent chez les femmes autochtones et noires. Elles sont identifiées et inculpées en tant que principaux agresseurs dans des situations de violence conjugale alors qu'elles étaient en réalité les survivantes. C'est un risque qui, selon nous, devrait être pris au sérieux avec toute nouvelle infraction pénale.
    Deuxièmement, les communautés marginalisées, les communautés racialisées, les femmes handicapées et les communautés queer ont toutes des raisons valables et historiques de se méfier de la police et du système judiciaire. Le fait de compter sur le système judiciaire et le système de justice pénale comme solution place ces personnes en dehors du système et leur enlève la possibilité de demander de l'aide. Les personnes qui se sentent plus à l'aise de s'adresser au système judiciaire et aux agents de police peuvent avoir l'impression d'avoir accès au droit pénal, mais beaucoup de ces communautés ne voudront pas chercher à obtenir...
(1635)
    Que recommanderiez-vous sinon?
    Ce que nous recommanderions comme solution de rechange, comme je l'ai dit, c'est le financement des services sociaux, du logement et de l'éducation. Je pense que c'est une excellente idée de sensibiliser les fournisseurs de première ligne, les travailleurs sociaux — la boîte à outils dont il a été question —, afin que les gens soient conscients du contrôle coercitif. Si on assiste à ces événements, les gens vont comprendre qu'il s'agit d'abus et que quelqu'un pourrait avoir besoin d'aide.
    Je pense que les services sociaux, le logement et, comme vous le disiez, le revenu de base devraient tous être priorisés.
    Merci.
    Merci, madame Gazan.
    Quelques personnes ont mentionné — je sais que Mme Vandenbeld l'a fait — que la trousse d'outils devrait être déposée au Comité. Peut-être la greffière pourrait-elle en demander une copie électronique et nous pourrons alors l'avoir.
    Je remercie tous les témoins de leurs témoignages.
    Nous allons faire une pause de quelques minutes. Le prochain groupe de témoins est en ligne, alors nous allons procéder rapidement à un changement, puis nous reprendrons.
    Merci.
    Nous allons suspendre la séance pendant quatre ou cinq minutes.
(1635)

(1645)
    Nous reprenons nos travaux.
    Le Comité reprend sa réunion et son étude sur les comportements coercitifs.
    Nous accueillons maintenant notre deuxième groupe de témoins.
    J'aimerais faire quelques observations à l'intention des témoins.
    Avant de prendre la parole, veuillez attendre que je vous nomme.
    Si vous participez par vidéoconférence, cliquez sur l'icône du microphone pour activer votre micro. Veuillez mettre votre microphone en sourdine lorsque vous ne parlez pas.
    Pour ceux qui sont dans la salle, votre microphone sera contrôlé... Mais comme il n'y a personne dans la salle, tout va bien.
    Vous pouvez vous exprimer dans la langue officielle de votre choix. Des services d'interprétation sont disponibles. Vous avez le choix entre l'anglais et le français pour votre oreillette. Si vous n'avez plus l'interprétation, faites-moi signe de la main. Je surveillerai la situation.
    J'aimerais maintenant souhaiter la bienvenue à nos témoins.
    Nous accueillons Lori Chambers, professeure à l'Université Lakehead, qui comparaît à titre personnel. Du Regroupement québécois des centres d'aide et de lutte contre les agressions à caractère sexuel, nous accueillons Gabrielle Comtois, analyste politique. Du YWCA Hamilton, nous accueillons Amy Deschamps, directrice, Services d'hébergement et de soutien aux violences basées sur le genre.
    Vous disposerez chacune de cinq minutes pour faire votre déclaration liminaire, qui sera suivie de nos questions.
    J'aimerais maintenant céder la parole à Mme Chambers.
    Vous avez cinq minutes.
    Je vous remercie.
    Le contrôle coercitif est un comportement très sexospécifique. C'est un point de départ. C'est un élément qui est trop souvent négligé lorsque nous parlons de la violence entre partenaires intimes. Il s'agit d'une série d'actes visant délibérément à faire en sorte qu'une personne se sente subordonnée et dépendante et à l'isoler des sources de soutien et des moyens de mettre fin à la relation.
    Cela peut inclure la violence, mais ce n'est pas toujours le cas. Il est extrêmement difficile pour les gens de reconnaître le contrôle coercitif de l'extérieur, et il est parfois difficile pour les gens de reconnaître qu'ils sont eux-mêmes soumis à un contrôle coercitif.
    Le risque de décès est élevé pour les personnes qui sont soumises à un contrôle coercitif. Le contrôle coercitif mène beaucoup plus souvent au féminicide que toute autre violence physique qu'un homme peut infliger à sa partenaire.
    Les tactiques de contrôle coercitif sont assez simples lorsqu'on les énumère, mais elles sont plus difficiles à détecter. Je pense que le plus grand défi auquel nous faisons face, c'est que la plupart des gens ne comprennent pas vraiment la nature de ce comportement. Il s'agit du recours à l'intimidation, à l'isolement, au contrôle, à la privation, à l'agression sexuelle, à l'exploitation économique et au harcèlement juridique pour priver une personne de son autonomie et de sa personnalité individuelle. Il s'agit d'une atteinte fondamentale à l'autonomie d'une personne à tous les égards.
    La victime est constamment menacée, interrogée et abaissée. Cela peut s'accompagner de violence au début d'une relation ou à tout moment par la suite pour confirmer le contrôle, mais ensuite, il peut simplement s'agir d'une menace d'autres incidents violents et rien d'autre n'est plus nécessaire. Il n'est pas rare que des personnes se disent que puisqu'elles n'ont pas été frappées, elles ne peuvent pas avoir été maltraitées, mais cela ne signifie pas qu'il n'y a pas de maltraitance, et même de maltraitance grave.
    La technologie alimente ce comportement, car les systèmes GPS, les petites caméras, les téléphones intelligents et les enregistreurs audio et vidéo permettent aux agresseurs de continuer à exercer leur contrôle même à grande distance, de sorte que, peu importe où se trouve la victime, il peut toujours la retrouver et la harceler.
    L'isolement est un autre facteur. L'accès à la famille, aux amis et à d'autres personnes qui sont des sources de soutien est souvent complètement bloqué. Ces ressources, ces capacités et ces habiletés sont utilisées au profit de l'agresseur, et non de la victime. Les victimes sont privées de leur indépendance, et même du contrôle de leur vie quotidienne. L'agresseur lui dicte comment s'habiller, quoi manger, quand ne pas manger, quand elle peut aller aux toilettes, etc.
    Ce type de contrôle peut être omniprésent dans tous les aspects de la vie et de l'identité de la victime. Cela signifie qu'elle perd progressivement la capacité de prendre des décisions pour elle-même parce qu'elle n'est pas autorisée à le faire, ce qui l'empêche souvent de partir.
    L'agresseur se sert également de la coercition sexuelle. On ne parle pas assez du fait que la violence sexuelle est une composante à part entière du contrôle coercitif. Les personnes qui subissent un contrôle coercitif sont victimes d'agressions. Elles ne pensent pas forcément qu'il s'agit d'un viol parce que notre société ne reconnaît pas que le viol se produit dans le cadre d'une relation à long terme. Nous minimisons ce problème. Nous considérons que les partenaires — particulièrement les femmes — doivent s'acquitter de leur devoir sexuel envers leur partenaire masculin. Mais si on demande à une personne de faire quelque chose ou si on lui dit de faire quelque chose ou si on la force à faire quelque chose, car elle subira des conséquences négatives si elle ne le fait pas, même si elle ne reçoit pas de coups physiques pendant le viol, il s'agit de coercition sexuelle. L'obligation de faire des choses qui déplaisent à une personne à un moment où elle n'en a pas envie fait partie du modèle de contrôle coercitif.
    L'agresseur a aussi recours au contrôle financier et à l'exploitation économique, c'est‑à‑dire qu'il obtient des cartes de crédit et des prêts au nom de sa victime, il l'endette, il la prive de sa capacité de travailler, il sabote sa capacité de se rendre au travail et d'avoir des amis au travail et il ne lui laisse qu'une petite somme d'argent pour acheter de la nourriture pour la famille, de sorte qu'elle est affamée et qu'elle ne peut pas mettre de l'argent de côté pour faire quoi que ce soit de manière indépendante. Il s'arrange aussi pour que sa victime ne puisse pas garder un emploi et il réduit sa capacité d'obtenir une éducation pour améliorer sa situation. Tous ces éléments sont des caractéristiques et des composantes du contrôle.
    Si la victime réussit à partir, elle doit ensuite faire face au harcèlement juridique. C'est particulièrement terrifiant et terrible lorsque les femmes pensent qu'elles ont pu s'échapper, mais que leur agresseur recommence à les harceler, à les menacer d'actes de violence, à les suivre et à être constamment avec leurs enfants.
(1650)
     Ensuite, dans le cadre des ententes de garde d'enfants, la victime doit se rendre devant le tribunal, où on remet en question sa version des faits sur son comportement et celui de l'agresseur.
    Ces tendances ne sont pas reconnues par la police, de sorte que si une victime demande de l'aide, ce comportement n'est pas détecté. Lorsqu'elle se présente devant le tribunal de la famille, cette situation n'est pas reconnue.
    Nous savons que des femmes et des enfants meurent à cause de cette situation. Nous devons mieux comprendre comment ces tactiques fonctionnent ensemble et mieux former les intervenants qui répondent à ces appels. Nous devons verser plus d'argent aux femmes — et leur procurer un logement et des options — pour qu'elles puissent mettre fin à ce type de relation.
    Je vous remercie.
    Merci beaucoup. Nous savons tous que les cinq minutes imparties passent très vite. Je suis sûre qu'en de nombreuses occasions, nous aimerions avoir 10 minutes.
    Comme le temps est limité, nous allons maintenant entendre Mme Comtois.
    Vous avez cinq minutes.

[Français]

     Depuis plus de 45 ans, le Regroupement québécois des centres d'aide et de lutte contre les agressions à caractère sexuel se consacre à favoriser l'échange d'expertise entre ses membres, à soutenir la recherche de solutions pour enrayer les agressions à caractère sexuel, et à assurer le développement des services d'intervention féministes intersectionnels pour les femmes au Québec.
    Pour le Regroupement, le contrôle coercitif est non seulement un problème individuel, mais aussi un problème collectif qui prend racine dans des rapports d'inégalité. Nous utilisons l'expression « continuum de violences sexistes » pour désigner les comportements qui visent à contrôler et à subordonner les femmes dans notre société par des leviers de domination comme la violence et la discrimination.
    En tant que groupe national sur la violence sexuelle, nous aimerions attirer l'attention du Comité sur la notion de coercition sexuelle en particulier. Selon l'experte Tanya Palmer, la violence sexuelle, dans le contexte du contrôle coercitif, peut se manifester comme une violation sexuelle chronique, c'est-à-dire l'effritement progressif de l'autonomie sexuelle d'une victime au fil du temps. La nature routinière d'une grande partie des agressions sexuelles, comme les viols nocturnes, les attouchements constants, le déni de l'intimité et le fait qu'une seule personne dicte si, quand et comment les rapports sexuels doivent avoir lieu, dégrade l'autonomie sexuelle de la victime. En d'autres mots, le contrôle coercitif crée un climat général dans lequel il n'est pas possible de donner un consentement enthousiaste, libre et éclairé à une activité sexuelle, car le refus d'obtempérer peut avoir des conséquences, surtout quand c'est accompagné d'autres types de violence, comme la violence physique ou la violence psychologique.
    Il faut donc arrêter de voir les incidents de violence sexuelle entre partenaires intimes comme des incidents isolés, et commencer à les envisager comme l'une des manifestations d'un continuum de tactiques employées par l'agresseur pour maintenir la victime dans une situation de violence.
    En ce qui concerne les pistes de solution, le Regroupement est particulièrement préoccupé par le fait que la criminalisation représente actuellement la principale stratégie du gouvernement pour prévenir le contrôle coercitif et y remédier. Les mesures de justice pénale ne devraient constituer qu'un seul élément d'une stratégie plus vaste.
    Comme vous le savez sûrement, actuellement, au Canada, seulement 5 % des crimes sexuels sont signalés à la police. Nous savons également que les personnes les plus exposées à la violence sexuelle, comme les femmes autochtones, les femmes noires et racisées, les femmes handicapées, les personnes ayant un statut d'immigration précaire ou les membres de la communauté LGBTQIA+, sont plus susceptibles d'avoir eu des interactions négatives avec le système de justice pénale et ont donc moins tendance à y avoir recours. Considérant que, selon la Fondation canadienne des femmes, plus de 55 % de la population au Canada ne comprend pas pleinement la notion de consentement à des activités sexuelles, nous invitons le gouvernement fédéral à miser plutôt sur l'éducation populaire et les campagnes de sensibilisation afin de prévenir la violence avant même qu'elle n'ait lieu.
    Les organismes de lutte contre la violence sexuelle sont aux premières lignes en ce qui concerne l'élaboration et la promotion de programmes de prévention et de sensibilisation au sein des communautés canadiennes. Cependant, ces organismes font face à une demande qui ne fait que s'accroître d'année en année, et l'absence de ressources adéquates se traduit directement par une augmentation du temps d'attente pour les victimes qui souhaitent recevoir les soins dont elles ont besoin pour amorcer leur guérison. Il faut donc que le gouvernement fédéral s'assure que ces organismes disposent de ressources adéquates pour accomplir le travail absolument vital qu'ils font dans nos communautés, partout au pays, en matière de prévention et de sensibilisation.
    Finalement, l'un des principaux facteurs qui maintiennent les femmes dans des dynamiques de contrôle coercitif sont les inégalités économiques, comme les membres du Comité en parlaient juste avant. Le Comité va certainement continuer d'entendre parler de la problématique des inégalités économiques pendant son étude actuelle. Celles-ci persistent encore aujourd'hui. La précarité économique force souvent les femmes à devoir se placer ou demeurer dans des situations dangereuses pour avoir un toit au-dessus de leur tête et subvenir à leurs besoins de base.
    Pour le Regroupement, il est crucial de s'attaquer à la problématique des inégalités économiques afin de permettre aux femmes de sortir du joug de leur agresseur. Nous avons récemment vu la mise en œuvre du Plan d'action national pour mettre fin à la violence fondée sur le sexe, que le Regroupement voit d'un oeil favorable. Cependant, nous constatons, comme l'Association canadienne pour mettre fin à la violence, que les acteurs de la lutte contre la violence sexuelle sont un peu laissés pour compte dans le Plan d'action.
(1655)
     Nous demandons au gouvernement fédéral d'accorder plus de place et plus de ressources aux organismes communautaires d'aide aux personnes victimes d'agression sexuelle et de cesser de voir la violence sexuelle et la violence conjugale isolément. Il faut plutôt les voir de manière transversale. Il y a des agressions à caractère sexuel entre partenaires intimes, et ça s'ajoute aux dynamiques de violence conjugale. Il s'agit d'un continuum, et non de deux problèmes distincts. Selon nous, on a l'occasion d'améliorer le Plan d'action en donnant une place plus privilégiée aux intervenants en matière de lutte contre les agressions à caractère sexuel.

[Traduction]

    Je vous remercie beaucoup.
    Madame Deschamps, vous avez cinq minutes.
    Je vous remercie, madame la présidente et membres du Comité, de m'avoir invitée à prendre la parole devant vous aujourd'hui sur la question de la criminalisation du contrôle coercitif. Je livre mon témoignage depuis les territoires traditionnels des Haudenosaunee et des Anishinabes. Je suis directrice des services d'hébergement et de soutien aux violences basées sur le genre au YWCA Hamilton. J'ai près de 10 ans d'expérience de première ligne dans le domaine de la violence faite aux femmes. Je suis également une survivante de violence familiale subie pendant mon enfance.
    Au cours de l'année écoulée, le YWCA Hamilton a aidé, par l'entremise d'une série de programmes préventifs et réactifs, près de 2 000 personnes touchées par la violence fondée sur le sexe. Nous nous efforçons de centrer les voix des personnes qui ont une expérience passée et présente, ainsi que notre personnel de première ligne, dans notre travail et dans nos activités de défense des intérêts.
    Même s'il existe des réponses intersectorielles importantes qui reconnaissent le rôle de la loi et de son application dans le travail d'éradication de la violence fondée sur le sexe, de nombreuses survivantes que nous aidons, en particulier celles issues de communautés marginalisées ou diverses, indiquent que leurs expériences au sein de ces systèmes n'ont pas mené à de meilleurs résultats pour elles-mêmes ou pour leurs enfants. Ces systèmes ont réussi, dans une faible mesure, à lutter contre la récidive par les moyens d'intervention et de suivi existants. Nous savons que la violence fondée sur le sexe, comme nous l'avons entendu aujourd'hui, est enracinée dans le patriarcat et l'oppression systémique et que l'application de toute loi, politique ou réponse est également vulnérable à ces lacunes.
    Nous pouvons le constater dans les taux — comme l'ont mentionné d'autres témoins — de double mise en accusation et dans les taux croissants de survivantes qui sont les seules inculpées depuis l'introduction de l'inculpation obligatoire. Nous le constatons également dans les taux de violence fondée sur le sexe plus élevés que la moyenne qui, nous le savons, existent dans les endroits où les agresseurs ont accès à des armes à feu dans le cadre de leur travail et où ils ont des niveaux d'autorité plus élevés que la moyenne sur les communautés. Pour améliorer concrètement la sécurité des survivantes, lorsqu'il est essentiel de renforcer et d'améliorer le système juridique, j'aimerais me faire l'écho des mesures fondées sur la recherche et les données probantes qui, selon nous, devraient être prises avant toute introduction du contrôle coercitif dans le Code criminel. Ces mesures ont été mises en évidence par de nombreux témoignages présentés au Comité, comme celui, très convaincant, de la directrice générale de l'organisme WomenatthecentrE, Nneka MacGregor, en 2022, ainsi que dans des publications très importantes de l'OAITH et de Luke's Place sur le sujet.
    Je pense, comme on l'a déjà beaucoup dit aujourd'hui, qu'il est difficile de saisir avec précision les différentes formes et nuances de…
(1700)

[Français]

     Excusez-moi de vous interrompre, madame Deschamps.
    Madame la présidente, sauf erreur de ma part, il n'y a pas d'interprétation.

[Traduction]

    N'y a‑t‑il pas d'interprétation? D'accord. Je vais continuer à parler et voir si Mme...

[Français]

    C'est revenu. Je vous remercie.

[Traduction]

    Je vous remercie, madame Vien.
    Madame Deschamps, veuillez poursuivre votre intervention. Je suis désolée de cette interruption.
    Il n'y a pas de problème. Je vous remercie.
    Je doute que le système actuel, qui ne traite pas de manière appropriée même les formes de violence les plus manifestes et physiques, ait la capacité de répondre aux complexités du contrôle coercitif, dont ma collègue, Mme Chambers, a parlé avec tant d'éloquence. Dans le contexte actuel, il peut être difficile de prouver la présence du contrôle coercitif, car il repose souvent sur des modèles de comportement et de manipulation psychologique plutôt que sur des preuves physiques, et le fardeau de la preuve repose donc sur la victime, ce qui entraîne souvent, peut-être, un sentiment de déception face au système judiciaire et un traumatisme supplémentaire pour les survivantes.
    Le contrôle coercitif est souvent lié à d'autres formes d'oppression, comme le sexisme, le racisme, le classisme et le capacitisme. Les lois doivent tenir compte de l'incidence de ces facteurs croisés sur les expériences des personnes et elles doivent donner aux survivantes la possibilité d'avoir accès à des options en matière de soutien à l'extérieur de ces systèmes si elles choisissent de ne pas y participer, par exemple en envisageant des approches réparatrices et transformatrices. Des ressources et un financement adéquats pour les services existants, comme les centres d'accueil pour les victimes de la violence faite aux femmes, afin de répondre de manière appropriée aux besoins des survivantes en matière de sécurité, de logement, de coût de la vie et de garde d'enfants, sont probablement plus susceptibles de produire les résultats souhaités en apportant les réponses en amont et les réponses en matière de prévention que nous souhaitons mettre en place.
    Je sais que nous avons tous l'objectif d'accroître la sécurité des survivantes et de responsabiliser les auteurs d'actes de violence tout en atténuant les conséquences involontaires des décisions politiques. Nous devons toutefois commencer par nous attaquer aux inégalités fondamentales présentes au sein des systèmes juridiques et d'application de la loi existants. Lorsqu'on s'attaque à ces enjeux par des moyens traditionnels, comme nous l'avons déjà tenté, mais sans succès, pour être tout à fait honnête...
    Je vous remercie beaucoup, madame Deschamps.
    Nous devons maintenant passer aux questions. Je tiens à ce que nous puissions poser le plus de questions possible à nos témoins, et nous allons donc réduire la première série de questions à cinq minutes chacune.
    Mme Roberts a la parole. Elle a cinq minutes.
    Je vous remercie, madame la présidente.
    Je remercie les témoins d'être ici aujourd'hui. C'est un sujet très important.
    J'aimerais d'abord m'adresser à Mme Chambers.
    Madame Chambers, veuillez répondre par oui ou par non. Êtes-vous d'accord pour dire que le contrôle coercitif est une porte d'entrée vers la violence physique?
    Ce n'est pas la bonne façon de conceptualiser ce comportement, c'est‑à‑dire comme une porte d'entrée. C'est…
    J'aimerais revenir en arrière, car je n'ai pas beaucoup de temps.
    La violence n'est que l'un des outils à la disposition d'un agresseur qui a un comportement coercitif, et il ne l'utilisera pas nécessairement. L'image de la porte d'entrée n'est donc pas appropriée.
    Je n'ai pas beaucoup de temps. Je suis vraiment désolée, madame Chambers.
    J'aimerais mentionner deux affaires. La première remonte à avril 1997. Un mari a tué ses quatre enfants, dont ses fils de 15 et 14 ans, ses filles de 12 et 11 ans et sa femme Helen, qui avait 36 ans. Il y a aussi votre affaire de décembre 2017.
    Ces affaires ont 20 ans d'écart, mais elles présentent les mêmes circonstances. Ces agresseurs ne sont pas punis. Ils sont passés outre les tribunaux. Ils sont passés outre les ordonnances restrictives. Le système ne les a pas du tout pris en charge.
    Comment pouvons-nous protéger nos mères, nos enfants et nos familles? La sensibilisation est une bonne chose, mais dans certains cas, nous devons écouter les enfants et les parents pour pouvoir protéger ces personnes. Êtes-vous d'accord avec cela?
(1705)
    Je suis d'accord avec le fait que nous devons [difficultés techniques], particulièrement dans l'affaire de 2017 que vous avez soulignée et dont j'ai parlé. Le système judiciaire a échoué. Les juges doivent comprendre que cela fait partie du système. On a beau vouloir l'éviter complètement, ce n'est pas toujours possible. Lorsqu'une victime quitte son conjoint, elle doit faire face à un litige concernant la garde de ses enfants.
    Les personnes qui interprètent le droit de la famille doivent suivre une formation sur le contrôle coercitif. Ces deux petites filles seraient encore en vie si le juge avait compris ce qu'est le contrôle coercitif et s'il n'était pas passé à côté de signaux d'alarme assez graves.
    Permettez-moi de vous poser une question. Il y a 20 ans, cet individu a reçu du counselling, des séances de sensibilisation, et tout ce qu'il faut. Il faisait l'objet d'ordonnances restrictives. Les intervenants ont travaillé avec lui et, au bout du compte, ils lui ont dit qu'il allait bien et qu'ils allaient le laisser voir ses enfants. Mais devinez quoi? Il faisait semblant.
    La raison pour laquelle je connais cette affaire, c'est…
    Il y a des gens qui ne devraient jamais revoir leurs enfants.
    Oui, tout à fait.
    Ce que je tente de dire, c'est qu'il faut parfois s'engager dans cette voie pour s'assurer de protéger nos enfants. Dans le cas du contrôle coercitif, si nous ne pouvons pas protéger les victimes — les jeunes enfants, les parents, les mères —, comment pouvons-nous...?
    Cet homme a reçu de nombreuses séances de sensibilisation. Je connais personnellement cette affaire, car j'y ai participé. On a dit qu'il avait fait tout ce qu'il fallait. Pourtant, 20 ans plus tard, c'est reparti. Rien n'a changé. Rien du tout. Il aurait dû aller en prison. Êtes-vous d'accord?
    Je suis d'accord, mais ma principale préoccupation n'est pas de savoir si l'homme est envoyé en prison. Il s'agit plutôt d'assurer la sécurité des enfants. Pour assurer la sécurité des enfants, il faudrait que le tribunal de la famille comprenne mieux ce type de situation. C'est plus important. C'est une meilleure option pour la mère, afin qu'elle puisse partir et se rendre, avec ses enfants, dans un autre endroit où ils seront plus en sécurité.
    Les séances d'information sont plus importantes que la criminalisation de l'homme…
    Je comprends cela. Je suis désolée de vous interrompre, mais je n'ai pas beaucoup de temps.
    Madame Chambers, je suis au courant de l'autre affaire qui s'est déroulée en 1997. L'homme en question avait reçu de nombreuses séances de sensibilisation et avait suivi une thérapie intensive. Cela n'a pas fonctionné. Parfois, nous devons accepter le fait que certains individus ne peuvent pas changer.
    Dans ces cas particuliers, nous devons non seulement sensibiliser les intervenants du système juridique, les travailleurs sociaux et les thérapeutes, mais nous devons également nous assurer que nous écoutons les enfants. Êtes-vous d'accord?
    Oui, tout à fait. Ces enfants avaient peur de leur père.
    Il n'était pas là pour eux.
    Je pense qu'il faut criminaliser le contrôle coercitif. Je crois que c'est la seule façon de protéger nos enfants. J'aimerais savoir si vous êtes d'accord avec cela.
    J'hésite à criminaliser le contrôle coercitif en l'absence de toute une série de mesures de soutien.
    Nous allons devoir en rester là. Je suis désolée.
    La parole est maintenant à Mme Hepfner. Elle a cinq minutes.
    Je pense que c'est au tour de Mme Lambropoulos. Il y a deux autres intervenantes sur la liste, n'est‑ce pas?
    C'est le tour de Mme Lambropoulos. Vous avez raison. Je vous remercie.
    Je tiens d'abord à remercier toutes les témoins de leur présence aujourd'hui. Vos témoignages sont très intéressants.
    Mes premières questions s'adressent à Mme Chambers.
    J'ai remarqué que vous n'avez pas parlé d'aliénation parentale dans votre témoignage. J'en parle, car je veux poser une question précise à ce sujet.
    Quelques-uns de nos témoins, lors des réunions précédentes, et même aujourd'hui, ont dit que les arguments d'aliénation parentale ne devraient pas être utilisés contre les mères dans les affaires de droit de la famille. Je me demande ce que vous en pensez. Par ailleurs, j'aimerais obtenir une vue d'ensemble aussi complète que possible. Je sais que certaines témoins ici aujourd'hui travaillent avec des femmes, et je veux, bien sûr, être en mesure d'aider les femmes et leurs enfants. Leur sécurité est ma priorité.
    Les témoins ici présentes ont-elles déjà vu des cas où l'aliénation parentale était un problème?
    Madame Chambers, vous pouvez répondre en premier, au sujet de l'aliénation parentale. Je pourrai ensuite passer aux autres témoins.
(1710)
    L'aliénation parentale se fonde sur des recherches de mauvaise qualité. Les preuves qui ont été présentées à ce sujet ne sont pas fondées sur des recherches sérieuses. Ce n'est pas un vrai problème, mais les hommes l'utilisent comme moyen de coercition pour manipuler et dévaloriser leurs partenaires. C'est un grave problème que ce soit pris au sérieux dans les tribunaux. C'est une arme qui est utilisée par les hommes violents.
    Je n'accorderais aucune crédibilité à l'aliénation parentale dans le système judiciaire, car elle est non fondée et repose sur des données de pacotille et, donc, les tribunaux ne devraient pas la reconnaître, point final.
    Y a‑t‑il d'autres témoins qui souhaitent intervenir à ce sujet?
    Je peux me faire l'écho de ce que Mme Chambers a dit, à savoir que l'aliénation parentale est souvent une autre forme de violence. Nous savons que les enfants seront souvent utilisés comme pions dans le processus de garde légale et de droit de visite, comme on l'a dit plus tôt, et il s'agit là de l'une des armes de contrôle coercitif les plus puissantes qui soient. Elle constitue souvent une menace qui sera brandie par un partenaire violent. Je suis donc d'accord pour dire que l'aliénation parentale n'a pas sa place dans le système judiciaire.

[Français]

     J'aimerais ajouter que le contrôle que l'agresseur exerce sur la vie de la femme peut commencer bien avant la conception d'enfants. On parle de coercition reproductive quand un pouvoir est exercé ou qu'il y a une dynamique de domination relativement au choix d'avoir des enfants ou d'employer des moyens de contraception. Ça fait aussi partie du continuum des violences vécues par les femmes dans des situations d'abus.
     Merci beaucoup.

[Traduction]

    Je vous remercie de vos réponses.

[Français]

    Madame Comtois, vous avez parlé un peu de l'importance d'éduquer davantage nos jeunes et la population générale sur la notion de consentement.
    J'aimerais savoir ce que vous pensez que le gouvernement du Canada peut faire à ce sujet.
    D'après les statistiques que nous voyons, 8 personnes sur 10 connaissent leur agresseur, et plus de la moitié des agressions à caractère sexuel surviennent dans des résidences privées. Il y a un mythe, dans le droit et dans la population en général, selon lequel les agressions à caractère sexuel sont tout le temps commises par des inconnus dans des ruelles sombres. Ce n'est pas le cas. Le plus souvent, en fait, elles impliquent des personnes qui se connaissent.
    Par conséquent, pour arrêter la violence avant même qu'elle se produise, nous pensons qu'il est crucial de mener des campagnes d'éducation auprès de la population. Le gouvernement fédéral peut agir sur ce plan, que ce soit en lançant des campagnes publicitaires ou en créant des vidéos éducatives. Il s'agit de changer la culture qui normalise ces comportements.
    Les premiers remparts, ce ne sont pas les organismes communautaires, ce sont les proches et les membres de la famille, qui peuvent reconnaître ces comportements de la part de l'agresseur et faire en sorte qu'ils ne soient plus permis. Ils peuvent aussi tendre la perche à la victime. Les organismes communautaires jouent un grand rôle, mais la communauté est le premier rempart.
     Merci beaucoup.

[Traduction]

    Est‑ce que mon temps est écoulé?
    Je ne vous ai pas fait signe lorsqu'il ne vous restait que 30 secondes, alors je pense que j'ai semé la confusion.
    Je remercie les témoins.
    Merci.
    Madame Larouche, vous avez cinq minutes.

[Français]

     Je remercie les témoins d'être parmi nous dans le cadre de cette importante étude. Au Québec, du moins, nous souhaitons que le contrôle coercitif soit criminalisé.
    Madame Comtois, vous avez mentionné le plan d'action national et vous avez dit déplorer le fait que les organismes travaillant dans le domaine de la violence conjugale et ceux travaillant dans le domaine de la violence sexuelle fonctionnent en vase clos. Pourriez-vous nous en dire plus sur ce qui devrait être modifié dans le plan d'action national pour contrer la violence envers les femmes et sur la façon dont ça pourrait être avantageux pour vous?
(1715)
    Le problème essentiel est le manque de ressources. D'année en année depuis la pandémie de la COVID‑19, nous constatons une augmentation de plus en plus marquée du nombre de survivantes et de survivants qui veulent recourir à nos services. Dans la foulée du mouvement #MeToo, nous remarquons que les gens attendent de moins en moins longtemps pour faire une dénonciation et que, de plus en plus, ils le font à un plus jeune âge. Nous voyons que la prévention fonctionne. Le problème est que nous sommes débordés. Les listes d'attente sont de plus en plus longues. Les travailleurs et travailleuses de première ligne ne sont plus en mesure d'offrir des services adéquats. C'est trop. Nous ne disposons que de la moitié des ressources dont nous aurions besoin pour bien fonctionner.
     Le plan d'action national pourrait supplémenter le financement destiné à soutenir la mission de ces organismes. En ce moment, nous fonctionnons beaucoup avec du financement par projet. C'est bien, mais chaque projet apporte un surplus de responsabilités. Comme nous avons des listes d'attente d'un an, prendre plus de responsabilités et piloter un tout nouveau projet n'est pas ce dont nous avons besoin. Ce n'est pas ce qui va nous permettre de répondre à la demande déjà existante, qui continue de s'accroître.
     Je ne sais pas si vous avez eu l'occasion de lire l'article de Stéphanie Grammond paru ce matin dans La Presse. Vous avez parlé de l'augmentation des demandes et du manque de ressources pour y répondre. Or, l'article déplore le fait que, depuis le début de l'année, 14 féminicides ont été commis au Québec, soit davantage que pour toute l'année 2023, alors que nous ne sommes qu'au mois de mai.
    Stéphanie Grammond aborde la question parce que des groupes, au Québec, demandent un projet de loi. Or, en ce moment au fédéral, le projet de loi C‑332, qui a été étudié au Comité permanent de la justice et des droits de la personne, parle justement de la criminalisation du contrôle coercitif. L'article de Mme Grammond souligne ce qui suit au sujet du projet de loi:

Mais la question ne fait pas l'unanimité. Certains plaident que la définition de contrôle coercitif est floue et que certains actes qui en font partie sont déjà criminels, comme le fait d'intimider quelqu'un en le surveillant, le menaçant, le privant de ses clés ou de son cellulaire.
     Vous avez parlé dans votre présentation du recours à plusieurs tactiques et de différents types de coercition. Croyez-vous que le Code criminel contient suffisamment de mesures à l'heure actuelle pour sanctionner le fait que des personnes sont surveillées, menacées et privées de leurs clés ou de leur cellulaire?
    En ce moment, l'idéal serait que les tribunaux et les juges puissent reconnaître le contrôle coercitif comme un élément contextuel. Je pense que certains éléments sont déjà criminalisés dans le droit pénal canadien. Cependant, pour faire suite à ce que certaines de mes homologues qui ont comparu devant le Comité avant moi ou qui y comparaissent maintenant ont dit, ainsi que les expertes du Nord, je serais très prudente pour ce qui est de promouvoir la criminalisation du contrôle coercitif. L'information dont on dispose présentement n'est pas suffisante pour promouvoir une telle mesure en matière pénale. Comme je l'ai dit déjà, le contrôle coercitif est un continuum. Il faut que les juges et les intervenants du système juridique le sachent, le comprennent et puissent le prendre en compte. Je suggérerais donc que ça puisse être pris en compte, mais que ce ne soit pas nécessairement inscrit dans le droit.
    J'espère que ça répond correctement à votre question.
    Vous avez aussi parlé d'inégalités économiques, mais mon collègue y reviendra lors d'un deuxième tour de questions. Ce que je retiens, en résumé, c'est que le plan d'action national devrait vous offrir une plus grande prévisibilité en matière de financement, et que le Code criminel devrait vous donner peut-être un peu plus d'outils pour intervenir davantage. Est-ce que j'ai bien compris?
     Oui, absolument. Merci beaucoup.

[Traduction]

    C'est excellent.
    Nous passons à Mme Gazan.
    Vous disposez de cinq minutes.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Ma première question s'adresse à Mme Deschamps.
    Dans votre témoignage, vous avez dit que vous doutiez que nos systèmes soient en mesure de criminaliser le contrôle coercitif, l'une des raisons étant que le fardeau de la preuve incombe aux survivantes. Pouvez-vous nous en dire plus?
    Bien sûr. Vous n'avez qu'à penser à l'endroit où l'évaluation doit commencer. Il faut former les policiers sur le terrain, qui vont évaluer la situation, les nuances et les complexités propres à une personne ou à une survivante qui tente d'expliquer son histoire et l'incidence d'un regard ou de nombreux exemples de ce genre de contrôle coercitif exercé dans sa relation, pendant une certaine période. Le policier devant elle, qui prend sa déposition, doit avoir la formation nécessaire pour évaluer la situation, et avoir la capacité et la volonté d'aller plus loin pour cerner ces éléments. C'est là où réside le problème.
(1720)
    Comment peut‑on criminaliser un comportement si ceux qui doivent faire appliquer la loi ne savent pas vraiment à quoi il ressemble? Cela devient on ne peut plus clair à mes yeux.
    Vous avez également parlé des personnes qui ont du pouvoir, par exemple dans le cadre de leur travail, et qui ont accès à des armes à feu. Pouvez-vous nous en dire plus? Cela m'intéresse. À qui faites-vous allusion lorsque vous parlez de gens qui ont accès à des armes à feu? De qui s'agit‑il?
    Des études et des rapports récents évoquent les taux d'actes de violence commis par des membres des forces de l'ordre. Ces taux sont nettement plus élevés que dans la population générale. Plusieurs études ont été réalisées à ce sujet. Je crois que 40 % des partenaires de policiers risquent d'être victimes de cette violence contre 10 % dans la population générale, je pense donc que...
    Je n'ai pas beaucoup de temps, et cela est très important.
    Je comprends.
    Je pose cette question parce que je l'ai posée lors d'une autre réunion. Je suis au fait des taux élevés de violence familiale attribuables aux policiers, ces mêmes policiers qui auraient ensuite la responsabilité de porter des accusations, alors qu'ils commettent également des actes de violence. C'est un peu un conflit d'intérêts, à mon avis.
    Vous avez dit qu'il faudrait plutôt investir — et d'autres témoins ont formulé des commentaires en ce sens — dans des mesures de soutien en dehors du système actuel. Dans ma circonscription, où sévit une crise de la violence fondée sur le sexe et où se trouve l'épicentre de la crise des femmes et des filles autochtones disparues ou assassinées, Winnipeg n'a jamais autant investi dans les services de police, et pourtant, je n'ai jamais vu, dans ma communauté, la violence prendre une telle ampleur. En parallèle, nous avons constaté une diminution des mesures de soutien.
    J'ai présenté un projet de loi pour mettre en place un revenu de base garanti suffisant, qui s'ajouterait aux mesures de soutien spéciales existantes, afin de répondre à des besoins précis et particuliers. Un revenu de base garanti suffisant serait‑il utile pour s'attaquer à la crise de la violence fondée sur le sexe, en aidant, plus particulièrement, les personnes qui tentent de fuir le contrôle coercitif? Je vous demanderais de répondre par oui ou par non, parce que je vais demander à toutes les...
    Oui.
    Madame Chambers, oui ou non?
    Absolument. Cette mesure serait utile.
    Madame Comtois, devrions-nous mettre en place un revenu de base garanti suffisant? Oui ou non?
    C'est absolument essentiel.
    C'est absolument essentiel. D'accord. Très bien.
    Madame Chambers, vous avez donné une excellente définition du contrôle coercitif. Nous avons essayé d'en trouver une. D'après votre définition, diriez-vous que le contrôle coercitif est un concept relativement nouveau?
    Ce concept existe depuis environ 20 ans. Il a été mis de l'avant par Evan Stark qui s'est inspiré de la roue du pouvoir et du contrôle, qui vient du modèle Duluth, créé 20 ans plus tôt. Ensuite, avec le temps, l'on a pu y ajouter des détails à l'aide d'exemples tirés de la vraie vie et en parlant à davantage de victimes.
    J'ai envoyé au Comité une liste de questions précises que nous utilisons en ce moment à l'échelle locale. Nous posons ces questions pour établir s'il y a contrôle coercitif ou non.
    Je l'ai vue. Êtes-vous d'avis que nous devrions mener davantage de recherches avant de criminaliser le contrôle coercitif? Oui ou non? Mon temps sera ensuite écoulé.
    Je crois que nous disposons des recherches nécessaires. Nous devons toutefois nous concentrer sur la sensibilisation, car il y a un risque de mal interpréter la loi, en raison des problèmes actuels que Mme Deschamps a évoqués et d'une application de la loi qui tient compte de l'origine ethnique et...
    Merci beaucoup, madame Chambers.
    J'aimerais entamer une deuxième série de questions, car ces témoignages sont percutants. Nous disposons de ressources pour encore un peu de temps, mais je vais quand même raccourcir la prochaine série de questions pour nous permettre d'avancer.
    Mesdames Vien et Hepfner — nos députées conservatrice et libérale —, vous aurez trois minutes chacune. Ensuite, puisque cette étude a été proposée par le Bloc, j'aimerais laisser deux minutes et demie à ce parti. Mme Gazan disposera également de deux minutes et demie. Est‑ce que cela vous convient?
    Madame Vien, vous avez trois minutes.
(1725)

[Français]

     Merci, madame la présidente.
    Madame Chambers, je vous remercie d'être des nôtres cet après-midi. Je n'ai pas beaucoup de temps, alors je vais aller droit au but.
     Je fais référence à l'article mentionné par notre collègue, Mme Larouche. Je l'ai lu ce matin et j'ai eu froid dans le dos à la lecture des statistiques qu'on y donne. Cependant, il mentionne un angle assez intéressant, sur lequel j'aimerais avoir votre avis. L'article dit que: « Pour agir en amont, Québec pourrait aussi s'inspirer de la “loi de Clare” qui permet de lever le voile sur le passé de son conjoint. » Cette loi britannique est née à la suite d'un assassinat au Royaume-Uni.
     En outre, l'article mentionne que dans les maisons d'hébergement, en particulier en région, on se rend compte que les femmes sont souvent victimes d'un même homme.
    Des provinces canadiennes ont adopté une version de la loi de Clare, afin d'avoir de l'information sur un homme violent. C'est notamment le cas de l'Alberta, du Manitoba, de Terre‑Neuve‑et‑Labrador et de la Saskatchewan. Ce n'est pas le cas du Québec, par contre. Avez-vous entendu parler de ça et qu'en pensez-vous?

[Traduction]

    Je pense que c'est une excellente idée. Plus les femmes disposeront de renseignements, mieux ce sera. Je ne vois aucun inconvénient à ce que des renseignements sur une personne soient rendus publics, si cela peut faire en sorte qu'on évitera de la fréquenter. L'idée est née au Royaume‑Uni, avec la loi de Clare. Je pense que chaque province devrait adopter sa propre loi de Clare.

[Français]

     Une de vos collègues parlait tout à l'heure — je ne sais pas si j'ai bien compris — du profil d'une personne toxique qui met pratiquement des femmes en esclavage. Quelle est la fréquence de tels cas dans la population? Est-ce un par million ou un par cent mille? Est-ce que ces cas sont documentés?

[Traduction]

    Nous n'avons pas vraiment de profil, en ce sens que nous n'avons pas beaucoup de statistiques, car nous n'avons pas accès aux dossiers, à l'exception de ceux qui concernent des actes de violence. Nous ne sommes pas au fait des cas qui n'aboutiront jamais devant les tribunaux. Nous n'avons pas toutes ces données probantes.
    En examinant le profil des victimes, on constate que ce sont majoritairement des hommes blancs privilégiés qui tuent leur partenaire, et que ce sont ces mêmes hommes qui peuvent ensuite se livrer à la violence de façon généralisée. Ils s'exercent d'abord sur les femmes de leur entourage.
    C'est horrible.

[Français]

     Je ne vois pas la présidente et je ne sais pas si elle m'a fait signe. Je ne sais pas combien de temps il me reste.

[Traduction]

    Malheureusement, madame Vien, votre temps est écoulé.

[Français]

    C'est terminé, merci.
     Oui, c'est terminé.

[Traduction]

    Madame Hepfner, vous disposez de trois minutes.
    Je vous remercie, madame la présidente.
    Je tiens à remercier toutes les témoins de leur présence aujourd'hui. Cette conversation n'est pas facile, mais elle est importante.
    Je n'ai pas non plus beaucoup de temps. Madame Deschamps, qui représentez mon cher YMCA à Hamilton, je vais vous poser mes questions.
    Je vous remercie de votre présence. J'ai beaucoup aimé votre déclaration liminaire lors de laquelle vous nous avez expliqué comment les victimes pourraient être traumatisées par le processus judiciaire, si le contrôle coercitif était criminalisé, car le contrôle coercitif ne peut être démontré à l'aide de preuves que la police peut facilement trouver. La victime devrait donc prouver qu'elle a subi un contrôle coercitif, et je ne sais pas quel genre de preuves elle pourrait présenter à cet effet devant un tribunal.
    Si nous n'avons pas de mesures législatives pour contrer le contrôle coercitif, quelle est, selon vous, la meilleure façon de s'y attaquer? Est‑il possible de faire en sorte que le système judiciaire soit plus en harmonie avec le système du droit de la famille?
     Il est absolument nécessaire d'améliorer l'harmonisation entre les systèmes de justice pénale et du droit de la famille, car nous savons que ces deux domaines sont indissociables, surtout lorsqu'il s'agit de violence conjugale. La réalité, c'est que le système actuel ne fait pas grand-chose pour de nombreuses personnes — femmes, enfants et personnes marginalisées — qui sont victimes de cette violence. Si nous commençons par là pour régler les problèmes qui existent, je crains que la criminalisation du contrôle coercitif ne soit qu'une mesure symbolique.
    Nous pouvons envisager de nombreuses autres possibilités pour apporter un changement. Par exemple, les 86 recommandations issues de l'enquête sur le comté de Renfrew établissent une feuille de route pour des investissements dans les types de changements nécessaires pour améliorer la situation.
    À mon avis, la criminalisation du contrôle coercitif est l'un des morceaux du casse-tête. Cependant, avant d'en arriver là, nous avons beaucoup à faire pour veiller à ce que les personnes qui évaluent la situation sur le terrain puissent prendre les bonnes décisions. Nos systèmes ont besoin de capacités. Nous avons besoin de temps et devons investir des ressources dans la formation de nos policiers et de notre personnel de première ligne. À l'heure actuelle, notre système, dans le domaine de la violence faite aux femmes, s'effondre, manque de ressources et déborde. Si l'on veut opérer un véritable changement, il faut commencer par les solutions concrètes.
(1730)
    Merci beaucoup, madame Deschamps.
    Madame Chambers, j'aimerais revenir à vous.
    Dans votre déclaration liminaire, vous avez dit que le contrôle coercitif se traduira plus souvent par un féminicide que la violence physique. Pourriez-vous nous expliquer cela plus en détail, s'il vous plaît?
    Il vous reste environ 25 secondes. Merci.
    Souvent, la violence physique est simplement le résultat de gens qui se fâchent et qui se battent, mais les féminicides sont planifiés. Des hommes qui exercent un contrôle et qui perdent ce contrôle choisiront de tuer plutôt que de perdre ce contrôle. C'est un comportement planifié.
    C'était très clair. Merci beaucoup.
    Merci.
    Nous passons maintenant à M. Gabriel Ste‑Marie.
    Vous avez deux minutes et demie.

[Français]

     Merci, madame la présidente.
     Je salue mes collègues et les témoins.
    Madame Comtois, en deux minutes et demie, j'aimerais vous entendre nous parler du problème de la violence économique et du contrôle des ressources. Ensuite, si vous avez le temps, j'aimerais que vous nous parliez des difficultés liées à la prévention et à la correction de ces comportements.
    Comme je l'ai dit, les proches, la communauté et la famille sont parmi les ressources les plus essentielles. Ce sont les premières personnes qui peuvent agir et aider les victimes à trouver des ressources et à y accéder. Ensuite, il y a tous les organismes de première ligne, comme les centres d'aide et de lutte contre les agressions à caractère sexuel, ou CALACS, et les maisons d'hébergement, qui peuvent aider les victimes à accéder aux ressources dont elles ont besoin pour amorcer leur trajectoire de guérison. Il y a enfin des services plus spécialisés, selon leurs besoins.
    Cependant, les femmes ont des besoins de base. Comme n'importe quel être humain, elles ont besoin d'avoir un toit sur la tête, d'avoir accès à des soins de santé et d'avoir accès au marché du travail, mais il y a des obstacles sur tous les plans dans plusieurs provinces. Actuellement, il y a une crise du logement, au Québec, on a de la difficulté à accéder aux soins de santé, particulièrement lorsqu'on est une femme, et les femmes ont plus de difficulté que les hommes à accéder au marché du travail.
    Établir un revenu de base pourrait permettre à ces femmes et, de façon plus large, à toutes les victimes, de se sortir de ces situations ou, à tout le moins, de mettre les chances de leur côté et d'améliorer leurs conditions de vie en général. Plusieurs femmes qui viennent dans les centres ne sont pas en mesure d'amorcer leur trajectoire de guérison parce qu'elles doivent répondre à des besoins plus immédiats, comme se nourrir et avoir un toit sur la tête. Ce n'est qu'ensuite qu'elles pensent à leur guérison. Il est sûr que les trajectoires individuelles diffèrent grandement d'une personne à l'autre, mais on doit actuellement répondre à des besoins qui, sur le plan hiérarchique, sont assez fondamentaux. Le gouvernement du Canada doit impérativement s'attaquer à cette problématique pour que ces femmes puissent répondre à leurs besoins de base.

[Traduction]

    Je vous remercie de votre réponse.

[Français]

     Merci beaucoup.

[Traduction]

    Enfin, nous avons Mme Gazan.
    Vous avez deux minutes et demie.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    D'après les témoignages que nous entendons, il est très clair à mes yeux que nous mettons l'accent sur les sanctions. Cependant, nous entendons, réunion après réunion, que si nous voulons réellement éradiquer la violence fondée sur le sexe, nous avons besoin de logements abordables dont le loyer est proportionnel au revenu, d'un programme national de garderies et d'un revenu de base garanti suffisant. Nous connaissons les solutions. Parfois, nous n'avons tout simplement pas la volonté politique de les mettre en oeuvre.
    Madame Chambers, vous avez parlé du profil des agresseurs.
    Je me demande si vous pouvez nous en dire plus à ce sujet, car nous parlons de problèmes dans le système de justice pénale qui touchent, plus particulièrement, les personnes autochtones, noires et de couleur. Je sais qu'à Winnipeg, les derniers agresseurs à ne pas avoir été officiellement condamnés — et il y a une affaire qui se déroule en ce moment, il s'agit de tueurs en série, en fait — étaient des hommes blancs. Je me demande si vous pouvez nous en dire plus sur le profil des agresseurs, sachant que l'incidence de la violence se fait sentir dans toutes les cultures et tous les groupes, mais le profil type, prédominant, d'une personne...
    Allez‑y.
(1735)
    Les tueurs en série et ceux qui provoquent des incidents causant des pertes massives sont en très grande majorité des hommes blancs qui jouissent d'un certain privilège. Ce ne sont pas les personnes les plus désavantagées.
    Les personnes autochtones, noires et de couleur, sont beaucoup plus susceptibles de faire l'objet de sanctions pénales. Les hommes blancs qui adoptent ces comportements avec leurs partenaires intimes pendant des années avant de commettre des meurtres en série ou des incidents causant des pertes massives ne sont pas dénoncés. Ils ne sont pas considérés comme violents, parce qu'ils sont protégés par un système qui cible d'autres hommes. Ainsi, leurs partenaires peuvent être en danger si ces comportements échappent à la justice.
    Cela me préoccupe, car je sais qu'il y a du racisme systémique.
    Oui.
    C'est un problème répandu, et c'est pour cette raison que la criminalisation du contrôle coercitif me préoccupe. En examinant les profils des agresseurs, l'on réalise qu'ils ont toujours été protégés par les systèmes.
    Êtes-vous d'accord?
    Oui.
    Merci.
    Merci, madame la présidente.
    Merci, madame Gazan.
    Voilà qui met fin à notre deuxième groupe de témoins.
    Au nom du Comité, je tiens à remercier toutes les témoins de leur présence et de leurs témoignages.
    Je rappelle à tous les députés que nous allons commencer l'étude de la première version du rapport sur l'Alerte robe rouge, qui sera distribuée à tout le monde aujourd'hui.
    Sur ce, le Comité est‑il d'accord pour lever la séance?
     Des députés: Oui.
     La présidente: Merci.
    La séance est levée.
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