:
Je déclare la séance ouverte.
Je vous souhaite la bienvenue à la 93e réunion du Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire.
Je vais d'abord faire quelques rappels. La réunion d'aujourd’hui se déroule selon une formule hybride. Les délibérations seront diffusées sur le site Web de la Chambre des communes. À titre d'information, je précise que la diffusion Web montrera toujours la personne qui parle, plutôt que l'ensemble du Comité.
Conformément à l'article 108(2) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le jeudi 2 novembre 2023, le Comité reprend son étude sur les défis relatifs au secteur horticole.
J'aimerais maintenant souhaiter la bienvenue aux témoins qui seront avec nous au cours de cette première heure. Nous accueillons, de l'Association des producteurs de fraises et de framboises du Québec, Mme Stéphanie Forcier, directrice générale par intérim, qui se joint à nous par vidéoconférence.
Je vous souhaite la bienvenue, madame Forcier.
[Traduction]
Nous accueillons également des représentants de l'Ontario Greenhouse Vegetable Growers, en la personne de son président, M. George Gilvesy, et de son directeur exécutif, M. Richard Lee. Enfin, M. Alvin Keenan, directeur-propriétaire de la société Rollo Bay Holdings Limited, établie dans la magnifique province de l'Île‑du‑Prince‑Édouard, se joint à nous par vidéoconférence.
Nous vous remercions de participer à l'audience que tient le Comité aujourd'hui.
Chaque témoin et chaque organisation disposera de cinq minutes pour faire une déclaration préliminaire. Nous passerons ensuite aux questions.
Avant d'aller plus loin, on m'a rappelé que le 27 février est un jour important pour notre comité, non seulement parce que nous étudions l'horticulture, un secteur important, mais aussi parce que c'est aussi l'anniversaire de naissance de Mme Rood et de M. Steinley.
Nous ne chanterons pas joyeux anniversaire parce que ce n'est pas la formule retenue — et je ne t'ai pas acheté de gâteau, Lianne —, mais je distribuerai ces biscuits autour de la table. Nous procéderons de cette façon.
Joyeux anniversaire Lianne. Nous offrirons également nos vœux à Warren lorsqu'il arrivera.
Sans plus attendre, je cède la parole aux témoins.
[Français]
Madame Forcier, vous avez la parole pour cinq minutes.
:
J'aurais dû être sur place à Ottawa, selon ce que je vois, puisqu'il y a des biscuits. Joyeux anniversaire!
Monsieur le président, membres du Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire, je vous remercie de l'occasion qui m'est offerte aujourd'hui de prendre la parole à titre de directrice générale par intérim de l'Association des producteurs de fraises et de framboises du Québec.
L'Association représente près de 350 entreprises de toutes tailles dans toutes les régions de la province. En 2021, la valeur du secteur s'élevait à plus de 85 millions de dollars.
Le Québec est la principale province productrice de fraises au pays, et la troisième en importance pour la production de framboises. L'horticulture, et plus spécifiquement la culture des fraises et des framboises au Québec, est une composante majeure de notre économie agricole et de notre patrimoine culturel, voire de notre identité. Les fraises, c'est viscéral, au Québec. Nos producteurs travaillent avec passion et dévouement pour fournir des fruits de qualité exceptionnelle à nos concitoyens, et même au-delà de nos frontières, puisque certains exportent maintenant aux États‑Unis.
Cependant, malgré les efforts, la passion et l'innovation, notre industrie est confrontée à plusieurs défis qui menacent sa durabilité à long terme. S'appuyer sur la résilience des productrices et des producteurs, c'est assez.
Premièrement, je voudrais souligner l'importance de soutenir nos entreprises face aux défis climatiques croissants. Les variations météorologiques extrêmes, les changements de température soudains et les phénomènes météorologiques imprévisibles ont eu un impact considérable sur nos cultures. D'ailleurs, la saison de 2023 laissera des traces longtemps: gel, sécheresse et excès de pluie, tout ça dans la même année. On a qualifié, à maintes reprises, la dernière saison de catastrophique, et elle l'a été. Nous appelons donc à des mesures concrètes pour aider les producteurs à s'adapter à ces conditions changeantes en améliorant les programmes de gestion des risques.
Prenons le cas de figure de l'assurance-récolte. L'année 2023 aura révélé que deux producteurs sur trois ne sont pas inscrits à l'assurance-récolte. En juillet dernier, nous avons demandé que le processus d'Agri-relance soit déclenché. Nous voilà le 27 février, et je n'ai malheureusement pas encore vu de résultat quant à l'analyse de notre dossier. À situation exceptionnelle, moyens exceptionnels, mais force est de constater qu'il y a absence de filet de sécurité.
Mes collègues de l'Association des producteurs maraîchers du Québec, que vous avez reçus le 15 février dernier, vous parlaient de la nécessité d'un programme « agri-catastrophe ». Laissez-moi mentionner à nouveau la nécessité d'un tel programme, quel que soit son nom. De plus, permettez-moi de proposer d'ajouter aux programmes « agri-compliqués », comme nous les appelons dans le milieu, de l'« agri-adaptabilité » et de l'« agri-rapidité ». Deux ans pour traiter un dossier d'Agri-stabilité, c'est trop long, surtout quand, en bas de la facture, il est écrit « payable dans les 30 jours ».
On nous parle d'adaptation aux changements climatiques, et cette adaptation se fera sur plusieurs fronts, notamment par un soutien financier pour l'adoption de technologies ou de nouvelles méthodes culturales. À titre d'exemple, prenons la culture de fraises hors sol sous abri, qui, chez nos consœurs et confrères en Europe, est maintenant la norme. Des investissements dans l'infrastructure agricole sont donc nécessaires pour sécuriser notre approvisionnement alimentaire. Le développement de la recherche sur les variétés résistantes aux conditions climatiques extrêmes est une autre composante de cette adaptation.
Deuxièmement, je souhaite aborder la question cruciale de la main-d'œuvre agricole. Notre industrie dépend fortement du travail saisonnier, et le recrutement de main-d'œuvre qualifiée et fiable constitue un défi constant. Je précise que 52 % de nos coûts de production sont liés à la main-d'œuvre, et que 80 % de cette dernière est composée de travailleurs étrangers. Malheureusement, la progression de l'automatisation est encore trop lente pour contrer le manque de main-d'œuvre, d'où la nécessité de veiller à la modernisation des programmes et de reconnaître la valeur associée aux services d'accompagnement et d'encadrement qu'offrent nos producteurs.
Je souhaite également mettre en lumière l'importance de promouvoir la durabilité environnementale dans notre industrie. Les consommateurs sont de plus en plus sensibles aux questions environnementales, et les producteurs répondent à leurs attentes en adoptant des pratiques agricoles durables. Toutefois, il faut être cohérent et conséquent avec nos choix de société, en ayant les pouvoirs et la volonté d'appliquer le principe de la réciprocité des normes. Par normes, j'entends également les normes sociales.
Cela m'amène à notre plus grand défi actuellement, soit l'environnement d'affaires. Les récriminations des productrices et producteurs du Vieux Continent trouvent écho ici, puisque la situation est malheureusement la même. Avant de légiférer davantage sur le plan de l'environnement, assurons-nous que nos entreprises peuvent évoluer dans un environnement d'affaires propice et durable.
La conciliation entre le prix du panier d'épicerie que souhaite payer le consommateur et les normes imposées à nos producteurs est de plus en plus dure à réaliser, ce qui mènera très rapidement notre industrie à un point de rupture. La pression est énorme sur les producteurs, qui doivent aussi faire face à une hausse du prix des intrants et des taux d'intérêt. La marge de profit diminue donc radicalement pour le producteur alors que tout augmente. Ce point de rupture mettra évidemment à mal toutes nos aspirations concernant la sécurité alimentaire.
En conclusion, pour assurer la prospérité future du secteur horticole, nous devons relever les défis actuels avec détermination et une vision. Je vous exhorte, en tant que membres du Comité, à soutenir nos efforts pour renforcer notre industrie horticole et assurer un avenir florissant aux producteurs de fraises et de framboises du Québec. En fait, changeons notre champ lexical et remplaçons le mot « soutien » par le mot« investissement ». En effet, il ne s'agit pas uniquement de soutenir notre industrie, mais également d'investir dans ce qui est fondamental, c'est-à-dire se nourrir.
Je vous remercie de votre attention.
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Monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du Comité, je vous remercie de m'avoir invité à m'adresser à vous aujourd'hui au nom de l'Ontario Greenhouse Vegetable Growers. Je suis accompagné de M. Richard Lee, notre directeur exécutif.
L'Ontario Greenhouse Vegetable Growers représente plus de 170 producteurs de légumes de serre dans toute la province, qui produisent des tomates, des poivrons et des concombres sur plus de 3 900 acres de terres. Le secteur des légumes de serre est l'un des volets de l'agriculture canadienne qui connaît la croissance la plus rapide. Nos membres ont réalisé des ventes à la ferme de 1,4 milliard de dollars en 2022, fournissent plus de 14 000 emplois et affichent une croissance constante. Le secteur contribue de manière importante à l'économie de l'Ontario et du Canada et représente l'avenir de l'agriculture au Canada, car il est capable de produire 20 fois plus que l'agriculture conventionnelle dans les champs et il s'adapte au changement climatique.
Notre secteur est axé sur les exportations — plus de 81 % de nos produits sont exportés aux États‑Unis — et fournit des produits frais et nutritifs aux consommateurs de toute l'Amérique du Nord. Notre dépendance à l'égard des exportations et du commerce a été confirmée lors de la pandémie qui a marqué l'intégration du système alimentaire nord-américain. Par ailleurs, cette dépendance entraîne la nécessité de mettre en place des politiques susceptibles de permettre de soutenir la concurrence de manière durable sur le marché mondial tout en gérant la crise du coût des denrées alimentaires pour les consommateurs.
L'approche du Canada en matière de changement climatique pose un défi de taille aux agriculteurs canadiens. La tarification du carbone ne peut fonctionner que si les utilisateurs sont en mesure d'effectuer une transition vers des sources d'énergie de remplacement. Or, en raison du peu de technologies disponibles et des limites de l'infrastructure publique, principalement dans le réseau électrique, les agriculteurs sont confrontés à des obstacles considérables lorsqu'il s'agit de faire la transition et de respecter les échéanciers. Le Canada continue de pénaliser les producteurs de denrées alimentaires, tandis que les États‑Unis adoptent des mesures d'incitation pour atteindre leurs objectifs en matière de changement climatique au moyen de l'Inflation Reduction Act et des divers programmes qui en découlent.
En 2024, nos membres paieront plus de 18 millions de dollars au titre de la taxe sur le carbone, déduction faite de l'allégement de 80 % dont nous bénéficions actuellement. Or, si on se fie à la production actuelle, cette facture devrait s'élever à plus de 40 millions de dollars d'ici 2030, si l'allégement de 80 % est maintenu. En bref, sur une période de 10 ans, nos membres auront payé plus de 242 millions de dollars en taxe sur le carbone.
Le Canada n'est pas isolé et nous craignons que les politiques relatives au carbone et aux plastiques ne nuisent à la croissance et à l'investissement continus dans la serriculture à l'échelle du Canada. On continuera de construire des serres pour répondre aux besoins croissants des consommateurs en matière de sécurité alimentaire et de produits frais, mais il restera à savoir si cet investissement aura lieu dans un pays qui pénalise la production alimentaire ou dans un pays qui offre des incitatifs. Entretemps, nous encourageons la Chambre des communes à adopter rapidement le projet de loi dans sa forme initiale.
Depuis des années, nos membres s'efforcent d'améliorer l'emballage de nos produits. Nous avons adopté des emballages recyclables afin de protéger l'intégrité de nos produits, tout en assurant la sécurité alimentaire et la traçabilité et en offrant aux consommateurs de nouvelles options en matière de produits sains prêts à consommer en format collation.
Nous sommes également très préoccupés par l'imposition de règles sur les plastiques qui font abstraction de bon nombre des avantages mentionnés, tout en augmentant les déchets alimentaires et le coût potentiel des produits d'environ 34 % — selon Deloitte — et en nuisant aux habitudes alimentaires saines. Cette politique concernant les plastiques créera deux exigences de marché qui différeront entre les États‑Unis et le Canada, ce qui pourrait entraîner l'indisponibilité de certains produits pour les consommateurs canadiens si les expéditeurs ne considèrent plus le Canada comme un marché viable.
S'agissant de la production alimentaire, nous posons la question suivante: est‑il judicieux d'instaurer des politiques et des taxes directes qui font augmenter le coût des denrées alimentaires? Tout le monde a besoin de nourriture, et nous répétons encore une fois que le fait de favoriser le changement peut constituer une meilleure approche et donner de meilleurs résultats.
Nous avons également quelques observations à faire sur certains autres points.
L'Ontario Greenhouse Vegetable Growers appuie vigoureusement l'adoption rapide du projet de loi , actuellement à l'étude au Sénat. La sécurité financière constitue un élément crucial pour soutenir les agriculteurs et ce projet de loi remédie à une lacune qui existe depuis longtemps dans le secteur des fruits et légumes frais. En outre, il propose une mesure corrective à l'égard d'un vieux différend commercial avec les États‑Unis.
L'Ontario Greenhouse Vegetable Growers estime que dans le contexte du changement climatique, le Canada devrait envisager une stratégie de périmètre concernant les ravageurs et les maladies.
À la lumière d'évaluations phytosanitaires antérieures, l'Agence canadienne d'inspection des aliments estime que ces organismes ne survivront pas à nos hivers froids. Toutefois, ces estimations sont dépassée car le climat change tout comme la disponibilité des hôtes, étant donné l'expansion des serres et de l'agriculture d'intérieur. Il convient de revoir nos évaluations des risques phytosanitaires.
Pour terminer, monsieur le président, je précise que les producteurs serricoles n'ont pas accès à l'assurance-production et que les filets de sécurité actuels ne sont pas représentatifs de l'agriculture en environnement contrôlé. En outre, notre expérience avec Agri-relance a été désastreuse, en dépit de pertes de plusieurs millions de dollars et de graves répercussions sur nos membres.
Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de comparaître devant le Comité aujourd'hui.
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Je remercie le Comité de m'accueillir. Lorsque j'ai reçu le premier appel téléphonique, on m'a demandé de comparaître à distance, alors me voici aujourd'hui. Je ne suis pas aussi bien préparé que George Gilvesy de l'Ontario Greenhouse Vegetable Growers, mais j'ai travaillé dans le secteur agricole de l'Île‑du‑Prince‑Édouard toute ma vie, plus précisément dans l'industrie de la pomme de terre.
Certains bouleversements liés au changement climatique surviennent très rapidement, de manière très violente et sous de multiples formes: les ravageurs s'attaquent aux cultures et les conditions météorologiques, notamment des automnes plus doux et des tempêtes tropicales, entraînent de fortes précipitations.
Les programmes d'assurance-récolte doivent être mis à jour afin que les producteurs puissent utiliser la technologie actuelle. Il n'y a pas assez de main-d'œuvre pour parcourir les champs et contrôler les quantités de légumes non récoltés. On laisse une partie de la récolte dans les champs parce que tous les légumes ne peuvent être conservés dans les entrepôts. Il faut en exclure une partie. À moins que la superficie exclue ne dépasse deux acres, il est un peu difficile pour les producteurs de surveiller ce genre de choses.
Aujourd'hui, il existe une technologie qui permet la mesure des champs au moyen de drones. Cet outil serait plus utile à l'agriculture de précision pour documenter les intrants, ce qu'on peut maintenant faire électroniquement avec le GPS des tracteurs. Cependant, cette technologie surcharge les tours de téléphonie cellulaire, de sorte que la communication ne peut pas passer du tracteur à la tour de téléphonie cellulaire, puis au satellite, et que les machines restent dans les champs. Comme de plus en plus de gens ont des téléphones cellulaires, cette technologie est presque inadéquate et n'est pas fiable.
J'ai l'impression d'énumérer ce qui ne va pas dans notre industrie et de m'en plaindre. Cependant, mon objectif aujourd'hui est de vous aider à comprendre qu'il est nécessaire de rendre cette technologie fiable.
Je crois que je vais en rester là. Merci.
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Merci beaucoup, monsieur le président, et merci à tous nos témoins.
Messieurs Lee et Gilvesy, je vais commencer par vous.
En ce qui concerne la question des matières plastiques, je suis très sensible à la situation difficile que vit votre industrie, mais je tiens à apporter un contrepoint à l'intervention de Mme Rood.
Tout d'abord, nous avons vu récemment dans les médias que l'industrie du plastique a menti de manière flagrante sur la viabilité économique du recyclage de ses produits. Cela est dû au fait que les matières plastiques se présentent sous des milliers de formes différentes et avec des compositions chimiques différentes. Elles ne peuvent pas être mélangées, ce qui rend le recyclage encore plus difficile.
Je dois également présenter le point de vue d'une collectivité côtière. Nous obtenons une grande partie de notre nourriture de l'océan. Dans l'océan, nous avons évidemment un problème avec les microplastiques et la bioaccumulation dans les poissons que nous mangeons. Bien entendu, ces microplastiques se retrouveront chez les êtres humains.
C'est le dilemme auquel nous sommes confrontés en tant que décideurs. Nous voulons évidemment reconnaître les difficultés éprouvées par votre industrie, mais nous voulons aussi tenir compte du fait que l'industrie du plastique a menti aux décideurs. Il y a le problème de la bioaccumulation dans nos océans.
En ce qui concerne les recommandations, avez-vous des idées sur la manière dont le gouvernement fédéral pourrait s'attaquer à l'industrie du plastique pour faciliter le recyclage de sorte que votre industrie et les consommateurs ne soient pas confrontés à ce problème et que nous remettions la responsabilité là où elle devrait être? Avez-vous des suggestions à faire à cet égard?
Lorsqu'il est question de météo extrême, toutes sortes de facteurs entrent en compte. Dans les cas des ouragans qui ont abattu des régions boisées entières, par exemple, je ne peux que me demander où la croissance se fera et si, dans l'avenir, il restera même une quelconque industrie du bois.
Si on remonte dans le temps, ailleurs au pays, il y a eu un énorme incendie au XIXe siècle dans la région de Miramichi, au Nouveau‑Brunswick. Depuis, la forêt a repoussé, alors l'industrie du sciage est présente là‑bas.
Ce qu'il faut, ce sont de la main-d'œuvre et des jeunes. Il y a des barrières commerciales entre les provinces, sur tout et n'importe quoi, y compris pour quelque chose d'aussi simple que d'apporter de la bière d'une province à l'autre. Les mécaniciens, le personnel infirmier et les membres de tous les métiers désignés Sceau rouge ne peuvent pas aller travailler dans une autre province, pour offrir les mêmes services, sans subir un perfectionnement professionnel scrupuleux. Je me pose donc des questions sur le résultat. Je pense qu'après avoir fait ce qu'il fallait pour se protéger, il est temps de se demander comment éviter — et j'hésite à le dire — de crever de faim. C'est assez cruel comme expression, mais il n'en reste pas moins qu'il faut se pencher sur tout ce qui se rapporte au protectionnisme.
À vrai dire, tout revient réparer les dégâts dans les régions dévastées. Déjà, nous avons eu beaucoup de chance qu'il pleuve autant, l'été dernier, car malgré tous les arbres abattus, il n'y a pas eu d'énorme feu de forêt. Si les conditions se maintiennent, dans un an à peu près, les risques d'incendie auront largement diminué, car le bois commencera à pourrir. Il sera humide sinon gorgé d'eau, alors le feu aura du mal à prendre.
Pour revenir à la question, il faut examiner toutes les politiques dans le but de favoriser la prospérité des industries de chez nous, par exemple en résorbant la pénurie de personnel infirmier dans le domaine de la santé, de mécaniciens, d'ingénieurs et ainsi de suite.
:
Chers collègues, je vous souhaite à nouveau la bienvenue.
Conformément à l'article 108(2) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le jeudi 19 octobre 2023, le Comité reprend son étude des efforts de stabilisation du prix des aliments.
[Français]
J'aimerais maintenant souhaiter la bienvenue à l'honorable François‑Philippe Champagne, ministre de l'Innovation, des Sciences et de l'Industrie.
Bienvenue, mon ami.
Deux hauts fonctionnaires du ministère l'accompagnent:
[Traduction]
Mark Schaan, sous-ministre adjoint principal, Secteur des stratégies et politiques d’innovation, et Étienne-René Massie, sous-ministre adjoint, Services axés sur le marché, le tourisme et la petite entreprise.
Chers collègues, je remercie le ministre d'avoir pris le temps de venir nous rencontrer. Il s'agit de la dernière heure de notre étude, puis nous passerons à l'étude des recommandations qui en découleront.
Monsieur le ministre, c'est un plaisir de vous accueillir. Comme vous pouvez le constater, vous attirez la foule: les bancs sont bondés.
Laissez-moi présenter certaines personnes qui sont ici.
Il y a M. Perkins, qui vient de ma province; M. Williams, qui vient de la région de Belleville, je crois; et Mme Idlout, députée néo-démocrate de Nunavut. Madame Idlout, je sais que vous partagerez votre temps de parole avec M. MacGregor lors de la deuxième ou de la troisième période de questions.
C'est un plaisir de vous voir tous ici.
Avant de donner la parole au ministre, je tiens à dire que le Comité jouit d'une excellente réputation. Je ferai en sorte que nous conservions cette réputation aujourd'hui parce que je sais que le ministre veut être capable de répondre aux questions. Vous allez vouloir poser des questions très difficiles, mais tâchons de respecter le cadre collaboratif du Comité. Je sais que vous me ferez honneur sur ce point.
Monsieur le ministre, je vous cède la parole pour cinq minutes. Je vous laisse un peu de liberté.
:
Monsieur le président, à ce sujet, vous savez, nous allons tous être... Toutefois, je tiens à remercier mes collègues qui sont ici.
[Français]
Chers collègues des deux côtés de la Chambre, je vous remercie de votre présence. Je pense que c'est un des comités où on peut avoir une des discussions les plus importantes. On sait que la question de l'épicerie et du coût de la vie est une préoccupation de tous les jours pour les Canadiens.
[Traduction]
Je suis vraiment très heureux d'être ici accompagné de collègues avec qui j'interagis quotidiennement.
L'abordabilité des aliments est une question cruciale qui touche tous les Canadiens. C'est pourquoi ce comité est probablement l'un des plus importants en raison du travail qu'il accomplit. Comme vous l'avez constaté, le gouvernement est vraiment déterminé à stabiliser le prix des aliments au Canada. Au cours du dernier mois et, je dirais, de la dernière année, nous avons pris des mesures décisives à cette fin et nous commençons à en voir les résultats.
[Français]
L'été dernier, notre gouvernement a lancé le programme de remboursement pour l'épicerie, qui a offert un montant d'argent aux Canadiens, en plus du paiement trimestriel du crédit pour la TPS/TVH. Cela a été suivi, l'automne dernier, par une série de rencontres avec les principaux acteurs de l'ensemble de la chaîne d'approvisionnement alimentaire, tant les épiciers que les fournisseurs, pour les inciter à prendre des mesures adéquates pour stabiliser les prix des produits alimentaires au Canada. C'est une des premières fois, m'a-t-on dit, que les PDG des cinq grandes chaînes alimentaires étaient réunis à Ottawa. Au nom des 40 millions de Canadiens et de Canadiennes, je leur ai exprimé notre frustration et, certainement, notre demande d'agir concrètement pour nous aider à stabiliser les prix au Canada.
[Traduction]
En effet, en septembre dernier, j'ai rencontré les dirigeants des cinq plus grandes chaînes d'alimentation du Canada pour souligner que le gouvernement s'attendait à ce qu'ils prennent des mesures pour stabiliser le prix des aliments au Canada.
Puis, en octobre dernier, vous vous souviendrez que j'ai annoncé le triplement de notre investissement pour soutenir les organismes de protection des consommateurs: il est passé de 1,6 million de dollars à 5 millions de dollars pour les cinq prochaines années. Cette mesure visait vraiment à créer une culture de protection des consommateurs. Cette culture est présente dans certaines régions du pays, mais pas partout. À mon avis, elle est très bien ancrée au Québec. Je suis sûr que M. Perron pourra en parler. Cette culture doit s'étendre aux quatre coins du pays pour que les intérêts des consommateurs soient bien représentés.
En accordant ces fonds supplémentaires, nous veillons à ce que les organismes de protection des consommateurs disposent du soutien dont ils ont besoin pour défendre les intérêts des consommateurs et s'attaquer à des questions urgentes, comme la réduflation, dont, comme vous le savez, le professeur Charlebois a parlé au Comité. La réduflation et la déqualiflation représentent de gros problèmes pour les consommateurs.
Quelques semaines plus tard, en novembre dernier, nous avons lancé le Carrefour de données sur les prix des aliments afin d'améliorer la disponibilité et l'accessibilité des données sur le prix des aliments. Un certain nombre d'intervenants de la chaîne d'approvisionnement nous ont indiqué que l'accès à l'information est essentiel pour établir un meilleur rapport de force entre les différents acteurs sur le marché. Le Carrefour de données sur les prix des aliments fournit aux Canadiens des informations détaillées sur le prix des aliments et il aide les consommateurs à prendre des décisions éclairées concernant leurs achats d'aliments.
[Français]
Dans le cadre de nos efforts pour stabiliser les prix à l'épicerie, nous tenons compte du rôle central que jouent les provinces et les territoires, et sommes conscients de la nécessité d'une plus grande coopération entre nous, à Ottawa, et nos homologues provinciaux et territoriaux. Je sais que vous avez eu la chance d'entendre des témoignages de plusieurs acteurs dans ce secteur.
Ainsi, en décembre dernier, mon collègue le et moi-même avons rencontré nos homologues provinciaux et territoriaux pour discuter des prochaines étapes visant à stabiliser les prix des aliments partout au pays. D'ailleurs, je veux saluer le travail de ces homologues. Il y a beaucoup à faire. Par exemple, le prix unitaire est une mesure qui existe seulement au Québec. Que pouvons-nous faire pour l'étendre à l'échelle nationale?
Nous avons parlé ensemble de plusieurs grandes initiatives lors de cette importante réunion. On me dit que la dernière réunion avait eu lieu vers 2017. Vous voyez comme il est important d'en tenir. Il n'y a pas eu souvent de grandes réunions comme celles-là, où sont interpellés nos partenaires provinciaux et territoriaux. Je pense que c'est la bonne chose à faire pour travailler ensemble.
[Traduction]
Comme vous le savez, les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux ont travaillé d'arrache-pied avec des partenaires de l'industrie sur le Code de conduite du secteur des produits d’épicerie. Il s'agit d'une mesure importante qui assurera l'équité, la transparence et la stabilité dans le secteur de l'épicerie et la chaîne d'approvisionnement.
[Français]
Cela dit, après trois ans de négociation et de délais non respectés, nous sommes extrêmement déçus que certains partenaires de la chaîne d'approvisionnement, dont deux des cinq principaux détaillants, n'aient toujours pas adhéré au code de conduite des épiceries. C'est pourquoi le gouvernement examine actuellement toutes les options, y compris des options législatives pour garantir des pratiques équitables et transparentes dans l'industrie de l'alimentation.
[Traduction]
Soyons clairs: d'une façon ou d'une autre, le Code de conduite du secteur des produits d’épicerie sera mis en place. Selon moi, ceux qui nous écoutent — et je suis sûr que plusieurs personnes nous écoutent aujourd'hui — devraient prendre ces paroles très au sérieux. Nous exigeons que des mesures soient prises, nous jugeons les mesures prises, puis il y a des conséquences.
Vous l'avez constaté quand nous avons modifié la Loi sur la concurrence. Nous examinons tous les outils à notre disposition pour pouvoir mettre en place le code de conduite.
[Français]
Par ailleurs, nous reconnaissons que le maintien et le renforcement d'une saine concurrence dans le secteur de l'alimentation sont essentiels à la stabilisation des prix à l'épicerie.
[Traduction]
C'est pourquoi le gouvernement a présenté et adopté le , la Loi sur le logement et l’épicerie à prix abordable. Cette nouvelle loi confère notamment au Bureau de la concurrence des pouvoirs d'assignation pour mener des études de marché rigoureuses et exhaustives. Monsieur le président, cette mesure était exigée par la plupart des acteurs du marché. Il était impensable que, en 2024, le principal organisme d'application de la loi n'ait pas de pouvoir d'assignation, alors nous avons corrigé la situation.
Nous avons également supprimé la soi-disant défense fondée sur les gains en efficience afin que les fusions anticoncurrentielles puissent être contestées. Cette mesure donne au Bureau davantage de pouvoirs pour contester les pratiques commerciales des grandes entreprises dominantes qui nuisent à la concurrence et qui font grimper les prix.
Monsieur le président, ces nouveaux pouvoirs ne resteront pas en veilleuse. Le mois dernier, je crois qu'un représentant du Bureau de la concurrence a témoigné devant le Comité. Moi, j'ai également envoyé une lettre au commissaire de la concurrence pour saluer le travail effectué par le Bureau dans son Étude de marché sur le secteur de l’épicerie de détail de 2023. Ce rapport a clairement cerné d'importants obstacles à la concurrence et a formulé des recommandations utiles pour résoudre ce problème.
[Français]
Toujours dans cette lettre, j'en ai profité pour exprimer ma déception d'apprendre que l'étude du Bureau de la concurrence n'avait pas reçu la pleine collaboration des grands épiciers. J'espère que les nouveaux pouvoirs accordés par le projet de loi constitueront un outil utile pour le Bureau de la concurrence dans ses efforts pour contrer les abus potentiels dans le marché.
[Traduction]
En outre, nous sommes déterminés à renforcer davantage la concurrence au Canada grâce aux réformes ciblées proposées dans le projet de loi , Loi d’exécution de l’énoncé économique de l’automne 2023. Cette proposition globale vise à encourager une concurrence accrue sur tous les marchés, notamment le secteur canadien de l'épicerie.
Comme je m'adresse à mes collègues qui siègent au Comité, je tiens à profiter de l'occasion pour demander une fois de plus à tous les parlementaires d'appuyer cette réforme indispensable pour appuyer les consommateurs canadiens. Un geste concret que chaque député peut poser est de voter pour nous permettre de poursuivre notre réforme de la Loi sur la concurrence.
Entre autres choses, la mesure proposée modernisera le régime d'examen des fusions. Je pense que tous mes collègues souscrivent à cette idée. La mesure renforcerait le cadre d'application concernant les collaborations qui nuisent à la concurrence. Je ne peux pas imaginer qu'un député puisse s'opposer à une telle chose. En outre, la mesure élargirait le recours au Tribunal de la concurrence par les parties privées, ce dont nous ont parlé certains témoins.
Monsieur le président, au‑delà de la modernisation du régime de concurrence canadien, nous continuons, bien sûr, à favoriser un plus grand choix pour les consommateurs canadiens. C'est pourquoi nous collaborons avec des épiciers internationaux qui ont joué un rôle essentiel dans l'amélioration de l'abordabilité sur les marchés mondiaux. Si vous avez des questions à ce sujet, je serai heureux d'en parler.
Monsieur le président, permettez-moi de conclure ainsi: le gouvernement prend des mesures décisives en ce qui concerne le prix des aliments au Canada. Nous sommes déterminés à stabiliser le prix des aliments partout au pays et nous continuerons à collaborer avec tous les ordres de gouvernement afin que les consommateurs canadiens obtiennent l'allégement dont ils ont grandement besoin à la caisse et qu'ils méritent.
Je tiens à remercier tous les membres du Comité. Monsieur le président, je sais que vous avez récemment envoyé une lettre pour demander que des mesures soient prises. Je pense que tous les membres du Comité ont un rôle à jouer pour veiller à ce que nous travaillions pour les Canadiens.
:
Madame Taylor‑Roy, c'est un grand plaisir de vous entendre poser une question en français et de vous répondre dans cette langue.
Vous avez raison. La courbe montre que l'inflation ralentit dans le secteur de l'épicerie. C'est un fait, et ce sont des données de Statistique Canada. Les mesures que nous avons prises ont maintenant un effet sur le marché, mais nous devons en faire plus. C'est pourquoi, quand j'ai rencontré les épiciers pour la première fois en septembre 2023, je leur ai demandé de travailler avec nous pour mettre en place des mesures. Nous nous sommes inspirés non seulement du Canada, mais aussi d'autres pays. Nous avons regardé ce qui se faisait en France, en Angleterre et dans d'autres pays. Nous avons dit aux épiciers canadiens que nous avions besoin qu'ils travaillent avec le gouvernement du Canada pour nous aider à stabiliser les prix des aliments au pays.
Les grands épiciers, dont vous avez entendu les témoignages ici, sont revenus avec certaines idées. Cependant, je trouvais que ce n'était pas suffisant et je n'étais pas satisfait. Alors, je leur ai dit que nous allions changer la loi pour donner des pouvoirs supplémentaires au Bureau de la concurrence afin qu'il puisse faire toute la lumière sur cette question. C'est ce que nous avons fait.
Quand nous rencontrons les grands épiciers du Canada, ils nous disent que la chaîne d'approvisionnement est complexe et que beaucoup de facteurs ont une incidence sur le prix des aliments. Je leur ai dit: jouez cartes sur table et, si c'est complexe, dites-le aux Canadiens et aux Canadiennes, et nous pourrons alors décider des mesures que nous devons prendre.
Nous avons lancé la plus grande réforme de la Loi sur la concurrence des 40 dernières années. De plus, nous avons fait des investissements record dans le Bureau de la consommation, qui fait partie de mon ministère. Ensuite, il y a eu une réunion fédérale-provinciale sur ce qu'on appelle les défis de la consommation. Certains m'ont dit que c'était la première depuis la Confédération. Je veux bien les croire, mais il y en a certainement eu une depuis ce temps. On me dit que la dernière aurait été tenue autour des années 2000, ce qu'on est en train de vérifier.
Nous avons fait pression sur l'industrie, parce que nous nous disions que tout le monde avait un rôle à jouer là-dedans. D'ailleurs, nous n'avons pas rencontré que les grands épiciers, mais aussi les gens de l'industrie, c'est-à-dire ceux qui ont un rôle à jouer, y compris les grands acteurs canadiens et étrangers de l'industrie de la transformation au Canada. Nous les avons rencontrés à Ottawa et leur avons demandé de faire partie de la solution.
Plus récemment, j'étais en discussion avec de grands épiciers aux États‑Unis pour voir un peu comment fonctionnait la dynamique de leur marché. J'ai appris une chose que ce comité devrait savoir. Un représentant d'une grande chaîne d'épiceries américaine dont le chiffre d'affaires tourne autour de 100 milliards de dollars m'a dit qu'elle avait essayé d'intégrer le marché canadien il y a quelques années, mais qu'elle n'avait pas été capable de louer des locaux. La chaîne cherchait 150 locaux au Canada, mais n'était pas capable de les trouver. J'ai répondu que nous venions d'apporter un changement à la loi pour interdire l'utilisation de clauses restrictives dans les baux conclus entre les locataires et les locateurs qui empêchent les concurrents de s'établir à proximité d'une grande chaîne d'épicerie. Le représentant m'a confirmé que c'était la raison pour laquelle la chaîne n'avait pas pu intégrer le marché canadien. On parle d'une entreprise qui a un chiffre d'affaires de 100 milliards de dollars. Le représentant m'a dit que, maintenant que nous avions changé la loi, la chaîne allait de nouveau envisager d'intégrer le marché canadien, parce qu'elle trouve que c'est un marché intéressant.
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Je réponds volontiers à cette question.
En passant, j'ai rencontré des représentants d'Unilever, de Lassonde, de Nestlé, de Lactalis, de Smucker's, de Kraft, et j'en passe. Je les ai rencontrés, c'est certain. Je leur ai dit une chose, que nous attendons d'eux de jouer un rôle dans la stabilisation des prix.
J'ai même parlé à des collègues internationaux, monsieur Perkins, pas seulement à ceux au Canada. Je m'entretiens avec nos partenaires du G7 pour savoir comment nous pouvons agir ensemble afin d'accroître la stabilité des prix.
Je ne vise pas seulement les épiciers. Je comprends la situation. J'ai passé ma vie dans le monde des affaires, tout comme vous, monsieur. Je comprends que chacun a un rôle à jouer. Il faut bien comprendre que les marges bénéficiaires des épiceries ont presque doublé au cours des cinq dernières années.
M. Rick Perkins: Bon...
L'hon. François-Philippe Champagne: Monsieur, si vous ne croyez pas le Bureau de la concurrence ni Statistique Canada, c'est un gros problème. Ce n'est pas moi qui le dis. Regardez le tableau.
Je vais faire appel à ma disposition, typique du Manitoba, à être amical.
Monsieur le ministre, merci beaucoup d'être venu.
Je vais revenir, dans mon préambule — qui sera peut-être un peu plus long que celui de certains de mes collègues — à quelques chiffres dont nous disposons. Mes collègues conservateurs d'en face, au Comité et à la Chambre, ont beaucoup parlé de l'inflation alimentaire. J'aimerais attirer l'attention du Comité, si je puis me permettre, sur quelques chiffres.
Je sais que vous avez parlé du début d'une stabilisation des prix des aliments aux alentours de l'Action de grâces. Je m'en souviens très bien parce que mon anniversaire tombe à peu près à la même date. C'est en octobre. Je regarde ce tableau, qui ressemble probablement à celui que vous avez. Il provient de Statistique Canada et a été fourni par la Bibliothèque du Parlement, puis il nous a été fourni par les analystes du Comité. Il nous dit qu'en octobre, les prix dans les épiceries s'étaient considérablement stabilisés depuis mars, mai et juillet. On observe en effet une baisse à environ 6 %. Les plus récentes données dont nous disposons — celles de janvier 2024 — indiquent une baisse à 4 %, ce qui correspond essentiellement à l'indice des prix à la consommation.
Mes collègues parlent aussi beaucoup de la tarification du carbone et de leur crainte qu'elle contribue à l'inflation alimentaire au Canada.
Comme vous l'avez mentionné, monsieur le ministre, différents facteurs contribuent au coût de la vie dans le monde, qu'on parle de la perturbation causée par la pandémie, des problèmes de gestion des chaînes d'approvisionnement ou de la guerre entre la Russie et l'Ukraine.
Je vais revenir à un tableau auquel je me suis reporté plusieurs fois dans ce comité et à la Chambre au cours du débat. Il a pour source des données de 2023 de l'OCDE montrant que le Canada est en gros à égalité avec les États‑Unis dans le G7, arrivant au deuxième rang parmi les taux d'inflation les plus bas. Comment se fait‑il — je le demande — que dans un pays où il n'y a pas de tarification du carbone, les prix des aliments et l'inflation alimentaire peuvent être à égalité avec ceux d'un pays où il y en a une? Je n'ai pas encore entendu de réponse satisfaisante de la part de mes collègues. C'est peut-être parce qu'ils ne veulent pas croire les données.
Je vais vous demander, monsieur le ministre, ce que vous en pensez. Toutefois, et plus important encore, j'aimerais que vous commentiez... Vous allez probablement répéter des choses que vous avez dites, mais j'aimerais vraiment les réentendre. Pourquoi croyez-vous — et j'aimerais savoir si c'est lié aux mesures prises par le gouvernement du Canada — que les prix des aliments sont plus bas, que le Canada est à égalité avec les États‑Unis et que nous commençons à voir un redressement de la situation et une plus forte baisse des prix des aliments que celles que nous voyons parmi nos alliés du G7 et dans le monde?
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J'aime beaucoup la question. Je pense que vous avez raison et je vais revenir à la question d'avant.
Oui, la tendance est à l'amélioration. Ce sont les données de Statistique Canada. Devons-nous en faire plus? Absolument. Allons-nous continuer de nous battre? Absolument. Est‑ce facile? Non. Cela en vaut‑il la peine? Absolument.
Ce n'est pas seulement pour le ministre de l'Industrie; c'est pour ce comité et pour tous les Canadiens. Tout le monde nous regarde aller.
Quand j'entends les conservateurs critiquer, je pense presque: « Qu'avez-vous fait lorsque vous étiez au pouvoir? » Voici ce que j'ai fait en cinq mois: j'ai convoqué les PDG des chaînes d'épicerie; j'ai opéré la réforme de la concurrence la plus complète de l'histoire du Canada; nous avons injecté une somme record dans le Bureau de la consommation et nous avons tenu ce qui est probablement l'une des premières rencontres fédérales-provinciales-territoriales sur la consommation. C'est pourquoi je dis qu'en voyant notre bilan, je me sens très satisfait. Devons-nous continuer à nous battre? Absolument.
Y a‑t‑il des enjeux plus vastes? Je pense que M. Perkins essayait d'insinuer... Je ne sais pas s'il tentait de défendre certaines marges de profit, ce qui serait inquiétant pour la plupart des Canadiens, mais ce que je dis, c'est que nous comprenons que la chaîne d'approvisionnement est complexe et qu'il y a aussi des données montrant une augmentation des marges de profit.
Il y a beaucoup d'enjeux plus vastes: la guerre en Ukraine, la sortie d'une pandémie, des problèmes de chaînes d'approvisionnement, des sécheresses à certains endroits où se pratique la culture et des maladies touchant des animaux. Nous le comprenons. Toutefois, lorsque nous nous sommes entretenus avec les PDG des épiceries, ils ont dit que c'était complexe. J'ai dit: « Jouons cartes sur table. »
Pour répondre à la question posée avant, faisons-nous pression sur les entreprises internationales de transformation d'aliments? Absolument. Insistons-nous auprès d'eux? Absolument. Nous entretenons-nous avec nos alliés pour mettre de la pression? Absolument. Est‑ce facile? Non. Allons-nous continuer à nous battre? Oui.
Je pense que c'est ce à quoi s'attendent les Canadiens, et ils s'attendent à ce que nous considérions tous les outils dans le coffre à outils, dont le plus important, à mon avis, est la réforme de la concurrence. Si nos collègues conservateurs veulent aider les Canadiens, ils devraient voter en faveur du projet de loi qui mettrait en œuvre le dernier énoncé économique de l'automne, car il prévoit des mesures supplémentaires donnant plus de pouvoir au Bureau de la concurrence pour enquêter sur les problèmes qu'il observe.
Je ne crois pas que la meilleure façon de faire est de défendre la marge de profit des grandes épiceries internationales. J'ignore où voulait en venir notre collègue conservateur avec cela. Je ne pense pas qu'il trouverait beaucoup de Canadiens favorables à cette approche.
Nous nous battons pour les Canadiens de la classe moyenne qui trouvent cela très difficile chaque semaine lorsqu'ils vont à l'épicerie. Ils disent: « Continuez à vous battre, monsieur. Nous serons avec vous. » Je pense que c'est notre devoir, en qualité d'élus, et non seulement celui du ministre. Nous savons en nous entretenant avec les Canadiens que ce qui les préoccupe, c'est l'épicerie, le logement et les perspectives.
Mon souhait, monsieur le président, c'est que les Canadiens qui regardent les délibérations de ce comité à la maison — et je suis certain qu'ils sont nombreux — disent: « Ces gens comprennent. Ils travaillent ensemble. »
Je demande à mes collègues conservateurs de se joindre au combat et qu'ils se battent avec nous pour les consommateurs. Ne commencez pas à essayer de défendre la marge de profit des grandes entreprises internationales de transformation des aliments. Je ne suis pas certain que c'est un argument gagnant.
Le message principal, c'est que les Canadiens peuvent compter sur nous. Ils l'ont d'ailleurs constaté pendant la pandémie. Est‑ce que c'est facile? Non. Est‑ce que les questions qui ont été posées sont complexes? Oui. Est‑ce que le jeu en vaut la chandelle? Assurément.
Nous savons que le prix des aliments est l'un des principaux problèmes auxquels les Canadiens font face toutes les semaines. Je dirais que nous avons fait plus que tout autre gouvernement au cours des six derniers mois. J'entends parfois l'opposition remettre en cause ce que j'ai fait en six mois, et je me dis que j'en ai probablement fait plus que ce qui a été fait en 10 ou 20 ans pour réformer la concurrence, renforcer la protection du consommateur, améliorer les outils de mise en application du Bureau de la concurrence, inciter les dirigeants des grandes épiceries à agir, et veiller à ce que les collègues fédéraux, provinciaux et territoriaux travaillent tous dans le même sens. Dans l'histoire de notre pays, on a rarement vu autant de mesures prises pour s'attaquer à un problème précis dans l'intérêt des Canadiens.
Je dirais à mes collègues de l'opposition que nous sommes tous ici pour servir les Canadiens. Ce dossier n'est pas une question partisane. Le prix des aliments et la compétition ne sont pas des questions partisanes. Offrir davantage d'outils aux consommateurs n'est pas une question partisane non plus. Monsieur le président, j'espère vraiment que les Canadiens retiendront de cette réunion que nous réitérons tous notre engagement à travailler pour eux.
Partout au pays, les familles sont touchées par le prix élevé des aliments, et il n'y a pas de solution magique à ce problème. Ce n'est pas comme si je pouvais appuyer sur un bouton pour procurer immédiatement un répit, mais nous sommes sur la bonne voie.
Faut‑il en faire plus? Absolument. J'appelle d'ailleurs tous mes collègues de la Chambre à faire preuve de jugement pour que le projet de loi soit adopté, par exemple, afin de donner davantage de pouvoirs au Bureau de la concurrence. J'espère que les Canadiens constateront que tous les élus d'Ottawa se battent pour eux jour après jour. C'est ce qu'ils attendent de nous.
Nous voulons être justes et constructifs. Nous voulons qu'il y ait plus de choix, davantage de compétition et de meilleurs prix pour les Canadiens. C'est ce que je m'engage à faire et je continuerai à le faire avec votre appui, monsieur le président.