:
Nous allons commencer la séance. La séance est ouverte.
[Français]
Bienvenue à la quatrième réunion du Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire.
La réunion d'aujourd'hui se déroule selon une formule hybride, conformément à l'ordre de la Chambre du 25 novembre 2021. Les délibérations sont diffusées sur le site Web de la Chambre des communes. Je précise, à titre d'information, que la diffusion Web montrera toujours la personne qui parle, plutôt que l'ensemble du Comité. Les captures d'écran ou la prise de photos de votre écran ne sont pas autorisées.
[Traduction]
Chers collègues, j'aimerais vous rappeler brièvement quelques-unes des procédures à suivre.
Bien entendu, si vous souhaitez prendre la parole, la greffière et moi-même assurerons la liaison entre les groupes en mode hybride. Les personnes qui utilisent Zoom lèveront la main, et celles qui sont dans la salle pourront peut-être faire signe à la greffière pour lui indiquer qu'elles souhaitent prendre la parole.
Les personnes qui se trouvent dans la salle doivent évidemment toujours respecter les protocoles sanitaires qui ont été établis par le Bureau de régie interne. Je sais que la greffière travaillera avec moi pour veiller à l'application de ces protocoles.
Je rappelle aux personnes qui participent en ligne d'utiliser leur microphone certifié par la Chambre des communes afin de faciliter la tâche à nos interprètes.
Je vous rappelle également que tous les commentaires des députés et des témoins doivent être adressés au président.
Tout d'abord, mesdames et messieurs les députés, j'aimerais demander au Comité de se prononcer sur l'adoption du budget de l'étude sur la chaîne d'approvisionnement agricole et agroalimentaire. Vous avez tous reçu ce document par courriel. Il couvre les coûts liés à la tenue de la séance.
Cette question est très procédurale, mais convenez-vous d'adopter ce budget?
Des députés: Oui.
Le président: Étant donné qu'il y a consensus, madame la greffière, je pense que cette question est réglée.
Chers collègues, je vais poursuivre. J'ai quelques commentaires à formuler à l'intention de nos témoins.
Pour ce qui est de l'interprétation, vous pouvez choisir entre l'anglais et le français. Lorsque vous ne parlez pas, veillez à mettre votre microphone en sourdine.
Conformément à l'article 108(2) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le lundi 31 janvier, le Comité entame son étude sur la chaîne d'approvisionnement agricole et agroalimentaire.
J'aimerais maintenant souhaiter la bienvenue à notre premier groupe de témoins. Nous accueillons aujourd'hui par vidéoconférence, du ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Tom Rosser, sous-ministre adjoint de la Direction générale des services à l'industrie et aux marchés, et Justine Akman, directrice générale de l'Équipe spéciale Marché du détail et Consommateur.
Vous aurez cinq minutes au plus pour formuler votre déclaration préliminaire, après quoi nous passerons aux séries de questions.
Vous avez la parole pour cinq minutes.
:
Merci, monsieur le président.
[Traduction]
Permettez-moi de commencer par dire que j'ai toujours beaucoup de plaisir à me présenter devant ce comité et à essayer de contribuer au travail qu'il accomplit.
Comme vous le savez, monsieur le président, j'ai le plaisir aujourd'hui d'être accompagné de l'une de mes collègues du ministère, Justine Akman.
[Français]
Je tiens à remercier le Comité d'avoir entrepris cette étude. Il s'agit d'un pas important pour soutenir la stabilité et la résilience à long terme de la chaîne d'approvisionnement agricole et agroalimentaire du Canada.
Comme les membres du Comité le savent, la chaîne d'approvisionnement agricole et agroalimentaire concerne l'ensemble de la population et des collectivités canadiennes. Cela comprend une pléiade d'intervenants, qui vont des producteurs jusqu'aux consommateurs, en passant par les détaillants, les transformateurs, les grossistes, et ainsi de suite, de même que tous les fournisseurs d'intrants et de services qui les soutiennent dans leur travail.
[Traduction]
Malgré les perturbations et les difficultés majeures causées par la pandémie et des phénomènes météorologiques extrêmes, comme les inondations en Colombie-Britannique au cours des deux dernières années, la chaîne d’approvisionnement alimentaire canadienne a su démontrer sa grande capacité d’adaptation et sa résilience.
En dépit de difficultés importantes, elle continue d'assurer aux Canadiens un accès fiable aux aliments tout en maintenant une croissance économique saine. Par exemple, au début de la pandémie, les producteurs primaires ont rapidement modifié leurs pratiques pour se conformer aux nouvelles mesures sanitaires applicables aux exploitations. Les détaillants et les services alimentaires ont quant à eux transformé leur manière d'offrir des aliments aux consommateurs afin de répondre aux besoins et aux préférences en constante évolution.
Il est essentiel que les consommateurs, tant locaux qu'internationaux, aient confiance dans la fiabilité de notre chaîne d'approvisionnement alimentaire et sa capacité à continuer de fournir des aliments.
Dans cette optique, Agriculture et Agroalimentaire Canada travaille avec diligence depuis le début de la pandémie pour veiller à ce que la chaîne d'approvisionnement alimentaire canadienne fonctionne bien pour l'ensemble de la population.
Nous avons mis sur pied le Réseau du secteur alimentaire, qui est coprésidé par Agriculture et Agroalimentaire Canada et l'industrie, pour nous assurer de surveiller collectivement les difficultés qui touchent le secteur en temps réel et ainsi mieux prévoir les urgences à venir.
En partie grâce à ce dialogue, AAC a lancé un certain nombre de nouveaux programmes dès le début de la pandémie, notamment le Fonds d'urgence pour la sécurité alimentaire et le Programme de récupération d'aliments excédentaires.
Plus récemment, l'octroi d'un montant de 228 millions de dollars a été annoncé pour soutenir le Programme de rétablissement Canada-C.‑B. pour assurer la sécurité alimentaire à la suite des inondations. Ce programme, qui sera mis en œuvre par la province, mettra à profit le cadre Agri-relance et les accords d'aide financière en cas de catastrophe du gouvernement fédéral.
En plus d'Agri-relance, une série de programmes de gestion des risques de l'entreprise est offerte aux producteurs pour les aider à gérer les risques qui menacent fortement la viabilité de leurs exploitations. On recommande aux producteurs de s'inscrire au programme Agri-stabilité, qui couvre les baisses importantes de revenu agricole.
Dans l'avenir, les négociations avec les provinces en vue de la conclusion du prochain accord-cadre seront également une occasion de s'assurer que le Partenariat canadien pour l'agriculture tienne compte des principales difficultés qui touchent la chaîne d'approvisionnement. Il ne fait aucun doute que le renforcement de la résilience de la chaîne d'approvisionnement exigera une approche pangouvernementale coordonnée. Pour cette raison, l'élaboration d'une telle approche a été définie comme une priorité dans les lettres de mandat de plusieurs ministres, et intégrée aux engagements à renforcer les chaînes d'approvisionnement.
Le mandat d'AAC prévoit l'élaboration d'une stratégie sectorielle en matière de main-d'œuvre pour combler les pénuries de main-d'œuvre chroniques et persistantes dans les secteurs de l'agriculture et de la transformation des aliments à court et long terme. Cette stratégie sera élaborée au cours de l'année à venir avec l'aide de la ainsi qu'en partenariat avec les provinces, les territoires, les employeurs, les syndicats et les travailleurs.
Dans le cadre de nos efforts collectifs, AAC est également résolu à appuyer le dans le cadre de la mobilisation des investissements du Fonds national des corridors commerciaux, afin d'établir une stratégie nationale relative à la chaîne d'approvisionnement qui permettra de régler les problèmes liés à l'engorgement du réseau de transport ainsi qu'à améliorer l'efficacité et la fluidité dans l'ensemble du réseau en misant sur une collaboration accrue.
Dans le cadre de notre discussion sur le rendement de nos chaînes d'approvisionnement, il est important de se rappeler que nous nous inscrivons dans un contexte mondial. Les pressions sur les chaînes d'approvisionnement se sont accrues tout au long de la pandémie, en particulier en ce qui concerne les conteneurs, ce qui a entraîné une congestion considérable et une augmentation des coûts.
Les graves perturbations survenues tout au long de la pandémie de COVID‑19 ont également poussé les États-Unis à prendre un certain nombre de mesures pour étudier et mettre en place des chaînes d'approvisionnement plus résilientes. Le département de l'Agriculture des États-Unis a récemment terminé l'évaluation des chaînes d'approvisionnement du secteur, notamment pour ce qui est des denrées agricoles et des produits alimentaires. Ce rapport paraîtra plus tard ce mois‑ci.
Le Canada peut chercher à tirer profit du travail accompli afin de favoriser la résilience de la chaîne d'approvisionnement de manière coordonnée et complémentaire avec nos homologues américains.
En résumé, les récents événements liés à la pandémie et aux inondations en Colombie-Britannique ont démontré la résilience de la chaîne d'approvisionnement alimentaire canadienne, mais ont également fait ressortir les domaines qui devront être renforcés et mieux soutenus alors que nous travaillons aux prochaines étapes de l'amélioration de sa résilience.
[Français]
Merci encore, monsieur le président.
Mme Akman et moi nous ferons un plaisir de répondre à vos questions.
:
Merci beaucoup, monsieur le président, et merci à M. Rosser d'avoir pris le temps de venir témoigner. Il est toujours bon de vous voir et de recueillir votre point de vue.
Alors que nous entamons cette étude sur la chaîne d'approvisionnement, je pense que nous sommes tous d'accord pour dire que la fiabilité et la solidité de la chaîne d'approvisionnement sont fonction de son maillon le plus faible. À l'heure actuelle, un certain nombre de ces maillons présentent assurément des failles. Je dirais également que le moment serait mal choisi pour ajouter des irritants supplémentaires à cette chaîne d'approvisionnement.
Monsieur Rosser, je voulais aujourd'hui commencer par parler de l'industrie bovine. Nous constatons assurément certains problèmes liés au transport du bétail et des aliments pour animaux. Le secteur de l'élevage bovin demande toutefois également que l'application de ce que je qualifierais de nouveaux règlements très peu scientifiques sur le transport des animaux, qui doivent être mis en œuvre par le gouvernement... Ces règlements sont censés entrer en vigueur le 20 février.
Ce secteur demande que cette date soit repoussée, car ces nouvelles règles pourraient causer davantage de problèmes en matière de bien-être des animaux et de transport. Compte tenu de la situation actuelle et de l'état de notre chaîne d'approvisionnement, est‑il question de repousser cette échéance jusqu'à ce que nous ayons plus de temps pour nous assurer que nous disposons des ressources et des infrastructures nécessaires pour répondre à ces exigences?
:
Je suis tout à fait d'accord avec le député pour dire que nous vivons une période de stress accru découlant de tout un éventail de sources liées à nos chaînes d'approvisionnement.
Je crois savoir que le Comité entendra sous peu des représentants du secteur de l'élevage bovin, qui pourront lui communiquer directement leur point de vue. Nous entretenons un dialogue actif avec eux au sujet de certaines de leurs préoccupations liées aux aliments pour animaux. Je sais qu'ils ont fait des déclarations concernant les problèmes à la frontière canado-américaine et, en particulier, au poste de Coutts. Nous dialoguons activement avec eux depuis un certain temps au sujet du Règlement sur la santé des animaux, auquel le député a fait référence. Si je me souviens bien, la Cattle Association effectue des recherches pour soutenir ce dialogue.
Ces règlements relèvent de la responsabilité de l'Agence canadienne d’inspection des aliments. J'hésite donc à formuler des commentaires détaillés. Cependant, tout au long de la pandémie, l'Agence canadienne d'inspection des aliments a cherché des occasions de faire preuve de souplesse réglementaire, lorsqu'elle le pouvait, pour atténuer les pénuries de la chaîne d'approvisionnement.
Nous dialoguons activement avec le secteur bovin.
:
Il ne fait aucun doute que la main-d'œuvre est un problème de longue date pour les intervenants du secteur agricole et agroalimentaire.
Le dialogue se fait de plus en plus pressant. Au cours des dernières semaines, Aliments et boissons Canada et de nombreuses entreprises membres ont également dialogué avec des fonctionnaires du ministère et avec la au sujet de certaines de leurs suggestions, à court et à long terme, pour corriger la situation.
Si je me souviens bien, ce comité a abordé la question du travail dans certaines des recommandations de son rapport de juin dernier. Comme le député l'a souligné, la a pour mandat de créer une stratégie du travail. Nous sommes heureux de recevoir les commentaires de ce comité et des intervenants à ce sujet.
J'aimerais également souligner l'annonce faite le mois dernier concernant la hausse du plafond de l'utilisation des travailleurs étrangers temporaires par une installation à 20 % au Québec. Quelques mesures à plus court terme ont été prises. Nous sommes très ouverts aux idées, à court et à long terme, et à un dialogue plus actif à ce sujet.
:
Monsieur le président, membres du Comité, bonjour. Je suis très heureuse de me joindre à vous pour la première fois dans le cadre de mes nouvelles fonctions.
Je précise que mon nouveau titre a été modifié très récemment et que je suis désormais directrice générale de la chaîne d'approvisionnement, ce qui ne fait que souligner l'importance des chaînes d'approvisionnement au sein de notre ministère et la nécessité de se pencher très sérieusement sur ces questions.
Pour compléter ce qu'a dit M. Rosser, nous considérons que ces questions sont urgentes, comme vous le savez tous, mais qu'il faut aussi les envisager davantage à moyen et à long terme. Certains de ces problèmes sont de très longue haleine, notamment celui des travailleurs étrangers temporaires.
Pour ajouter deux ou trois choses, au début de la pandémie, nous disposions d'un Fonds d'urgence pour la sécurité alimentaire de 330 millions de dollars, d'un Programme de récupération d’aliments excédentaires de 50 millions de dollars, puis dans le budget 2021, certains de ces programmes ont reçu des fonds complémentaires: 140 millions de dollars pour le Fonds d'urgence pour la sécurité alimentaire et le Fonds des infrastructures alimentaires locales, ainsi que le fonds de 57 millions de dollars pour les travailleurs étrangers temporaires et la nécessité d'une mise en quarantaine.
Des réponses très différentes ont été apportées tout au long de la pandémie, et maintenant, comme l'a mentionné M. Rosser, notre ministre a participé très activement au Sommet sur la chaîne d'approvisionnement organisé récemment par le ministre des Transports. Des réunions de suivi seront également organisées pour faire participer les parties prenantes au repérage de solutions à moyen et à long terme.
Merci.
Merci aux témoins, M. Rosser et Mme Akman, d'être parmi nous.
Comme l'étude sur la chaîne d'approvisionnement est extrêmement vaste, nous avons essayé de déterminer certains aspects que nous voulions approfondir. Un des éléments dont nous entendons parler le plus, sur le terrain, c'est le grave manque de main-d’œuvre.
Chaque fois que nous rencontrons des intervenants du domaine de la transformation alimentaire, ils nous affirment que jusqu'à 25 % de leurs postes sont vacants. Ils nous ont soumis des propositions concrètes, dont une concerne un plan d'urgence pour le Programme des travailleurs étrangers temporaires.
Avez-vous vu ce plan? Envisagez-vous sérieusement des options de cet ordre?
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Je vous remercie de votre réponse.
J'exerce un peu de pression sur vous: nous comptons sur vous pour que des mesures soient prises rapidement, parce que l'industrie en a vraiment besoin.
Avant d'entamer l'étude, les membres du Comité ont déterminé un deuxième facteur important, soit celui de la fluctuation du coût des intrants. La main-d’œuvre y est directement liée, parce que l'augmentation des coûts est très souvent due à l'augmentation des délais, qui, pour leur part, sont dus au manque de main-d’œuvre. Le phénomène s'observe dans le domaine de la transformation alimentaire, mais aussi dans ceux du camionnage et de l'agriculture. En fait, on le voit un peu partout.
Différentes mesures pourraient aider, par exemple des mesures pour faciliter l'accès à la résidence permanente des gens qui travaillent dans ce secteur et qui veulent faire venir leur famille au Canada.
J'aimerais entendre votre opinion là-dessus.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Merci aux témoins qui sont présents aujourd'hui.
Je vais commencer par une déclaration de la Fédération canadienne de l'agriculture, ou FCA, faite en mai 2016 devant le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce sur des questions liées aux obstacles au commerce national. Pendant sa déclaration liminaire, le représentant de la FCA a cerné deux obstacles clés au commerce interprovincial ou national, soit les divergences entre les règlements provinciaux sur le transport et les incohérences entre les inspections provinciales et fédérales exigées dans les installations de transformation de la viande.
Ma question s'adresse à M. Rosser.
À propos de l'imposition d'exigences interprovinciales en matière de vaccination des camionneurs, est‑ce que le gouvernement a consulté Agriculture et Agroalimentaire Canada sur ses intentions à cet effet ou d'autres exigences à venir? Vous a‑t‑on consulté là‑dessus?
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Je souhaite d'abord vous remercier, madame Akman et monsieur Rosser, pour votre présence parmi nous aujourd'hui, ainsi que pour tout le travail que vous avez fait en agriculture et en agroalimentaire durant cette pandémie afin de soutenir les agriculteurs et de collaborer avec les associations du secteur pour fournir l'aide accordée aux agriculteurs et à l'industrie de la transformation alimentaire.
Mes questions sont beaucoup plus générales et portent sur la façon dont la résilience de la chaîne d'approvisionnement peut être améliorée.
Il a été question des difficultés relatives au commerce interprovincial et aussi de certains effets généraux de la pandémie sur les chaînes d'approvisionnement. Deux choses m'intriguent.
Il y a d'une part les produits locaux. Vous avez parlé du moyen terme et du long terme. Mais y a‑t‑il un plan pour stimuler l'agriculture locale à petite échelle et la capacité de ces producteurs à offrir leurs aliments sur le marché dans les zones où il y a un besoin?
:
Merci de vos observations et du travail que vous faites à cet égard. Je voudrais, bien sûr, appuyer ce qui a été dit au sujet des obstacles au commerce interprovincial et dire qu'il serait formidable que davantage de produits « fabriqués au Canada » puissent traverser les frontières.
Sur ce point et en ce qui concerne les bonnes protéines de la Saskatchewan, j'ajouterais également, en tant que végétarienne, que les protéines végétales sont un excellent produit. En Saskatchewan, nous avons eu cette supergrappe. Beaucoup de travail a été fait là‑bas. Comme je l'ai mentionné à la Chambre l'autre jour, l'un de mes produits préférés est le pois chiche de Three Farmers.
Nous avons un nouveau guide alimentaire. Nous avons mis l'accent sur les produits qui sont plus durables sur le plan environnemental et qui ne sont probablement pas soumis à autant de difficultés dans la chaîne d'approvisionnement, comme c'est le cas des aliments périssables. J'ajouterais à cela, les préoccupations formulées à l'égard du bien-être des animaux.
Est‑ce que le ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire fait quelque chose pour promouvoir notre nouveau guide alimentaire? Eh bien, il n'est plus tout à fait aussi nouveau. Est‑ce que quelque chose est fait pour promouvoir ce guide alimentaire afin d'encourager les gens à manger plus d'aliments d'origine végétale, et pour intégrer cet aspect à nos discussions sur nos chaînes d'approvisionnement et notre résilience globale?
:
Merci beaucoup, monsieur le président.
Nous couvrons les questions relatives à la chaîne d'approvisionnement depuis ce qui semble être deux bonnes années maintenant. Notre comité de l'agriculture était l'un des rares à fonctionner dans les premiers jours de la pandémie. Bien sûr, nous avons produit un rapport assez substantiel sur la capacité de traitement au cours de la législature précédente.
Monsieur Rosser, nous avons entendu de nombreux témoignages sur la centralisation de notre capacité d'abattage, en particulier dans les usines de transformation de la viande comme celles de grandes multinationales comme Cargill. Nous avons beaucoup parlé de programmes comme le Fonds des infrastructures alimentaires locales, et de nombreux témoins n'ont pas manqué de demander que le gouvernement fédéral intervienne davantage pour fournir le capital nécessaire pour favoriser cette décentralisation.
J'interviens ici en milieu de séance, alors il se peut que vous ayez déjà répondu à la question que je vais vous poser, mais pourriez-vous vous prêter au jeu et faire le point sur les efforts déployés par Agriculture et Agroalimentaire Canada pour favoriser une approche décentralisée de notre capacité d'abattage et nous permettre ainsi de résister à ce genre de perturbations à l'avenir?
:
Merci, monsieur le président.
Merci encore à nos témoins de leur présence, et merci de nous donner de bons renseignements.
Monsieur Rosser, j'aimerais revenir sur les tables de consultation du secteur. Je crois que ce qui me préoccupe ici, c'est que nous avons remplacé un programme et les tables rondes sur la chaîne de valeur par quelque chose qui est loin d'être aussi substantiel. Regardez les noms de ces tables de consultation du secteur — Réglementation souple, Durabilité, Demande des consommateurs et tendances du marché, et Développement des compétences. On ne fait aucune mention de la question clé qui nous occupe: la chaîne d'approvisionnement.
Je vous ai posé la question auparavant, et je n'ai pas vraiment obtenu de réponse. Je suis juste curieux de savoir si l'une de ces tables de consultation abordera effectivement la question de la chaîne d'approvisionnement. Si oui, pouvez-vous me dire laquelle? Quelles parties prenantes ont-elles demandé à être intégrées à ce processus?
Oui, j'ai oublié de mentionner l'automatisation, qui est un sujet que nous avons étudié précédemment. Je suis conscient de cela.
Je m'en voudrais de ne pas parler des passages frontaliers. Vous avez mentionné les passages frontaliers, les blocages qui se produisent en Alberta et qui nuisent à l'industrie bovine et à la livraison des aliments destinés aux animaux. Vous avez également parlé de Windsor, où le blocage a des répercussions sur notre secteur des serres, et je pense que vous avez mentionné le porc, ainsi que les engrais et autres intrants. Vous avez également dit que nous sommes très dépendants des intrants pour les fruits et légumes, surtout en hiver. Je crois savoir que nous avons un système de juste‑à‑temps.
Alors que nous essayons d'éviter que les choses ne dérapent, certaines commandes sont annulées. Il semble que ces interruptions à la frontière vont commencer à se répercuter dans les supermarchés. Pouvez-vous nous en dire plus sur le temps qu'il nous reste avant que l'interruption de nourriture attribuable à ces blocages ne se fasse réellement sentir par les consommateurs?
Au nom du Comité, je remercie les témoins, Mme Akman et M. Rosser, de leur présence.
Nous allons passer au deuxième groupe de témoins.
Chers collègues, je vous prie de ne pas trop vous éloigner parce que la transition sera rapide. Nous allons passer directement au deuxième groupe de témoins. Nous reprendrons dans un instant.
Le président: Quelle transition rapide!
Merci aux témoins, ainsi qu'à notre greffière et à l'équipe exceptionnelle dans la salle pour leur bon travail.
Nous entamons la deuxième partie de la réunion. Aujourd'hui, nous avons le plaisir de recevoir plusieurs témoins par vidéoconférence.
Nous accueillons M. Serge Buy, président-directeur général du Conseil de l'innovation agroalimentaire; M. Bob Lowe, président, et Mme Fawn Jackson, directrice, Politique et affaires internationales, de la Canadian Cattlemen's Association; ainsi que Mme Kathleen Sullivan, présidente-directrice générale d'Aliments et boissons Canada.
Les témoins disposeront de cinq minutes chacun pour faire leur déclaration préliminaire.
Nous allons commencer par vous, monsieur Buy.
:
Merci beaucoup, monsieur le président. Bonjour, mesdames et messieurs.
Tous les maillons de la chaîne d'approvisionnement agroalimentaire connaissent des problèmes qui existaient avant la pandémie. D'abord, la production alimentaire subit les effets des maladies, des ravageurs, des phénomènes météorologiques — comme la sécheresse dans les Prairies en 2021, les incendies et les inondations en Colombie-Britannique —, de la disponibilité de la main-d'œuvre, de la capacité d'adopter de nouvelles technologies, etc.
Ensuite, le secteur de la transformation et de l'emballage subit également les contrecoups du manque de main-d'œuvre, d'une moins grande adoption des nouvelles technologies ici que chez certains de nos concurrents internationaux et, durant la pandémie, de la difficulté de s'adapter aux nouveaux besoins. En outre, les grèves, les barrages, les inondations, les incendies et d'autres événements ont aussi des répercussions sur la logistique.
Finalement, le secteur de la distribution fait face à ses propres difficultés liées à la disponibilité de la main-d'œuvre.
D'autres témoins très compétents se concentreront sur les questions relatives à la réglementation, aux ressources financières et à la pénurie de main-d'œuvre. Pour sa part, le Conseil de l'innovation agroalimentaire mettra l'accent sur le rôle que la recherche et l'innovation peuvent jouer pour régler certains problèmes qui touchent la chaîne d'approvisionnement.
Grâce à la recherche et à l'innovation, nous avons mis au point des cultures qui poussent bien dans notre climat froid et qui résistent à certains ravageurs et à certaines maladies. Le canola est un exemple de nos exploits: aujourd'hui, il génère près de 12 milliards de dollars en exportations. Nous avons également conçu de nouvelles variétés de vignes, malgré des températures inférieures à 30 degrés. Je suis sûr que M. Drouin vous invitera toutes et tous à visiter Stonehouse Vineyard, un nouveau vignoble situé près d'Alexandria qui produit de très bons vins.
Nous savons tous que les conditions météorologiques changent. Il peut sembler un peu étrange de parler de réchauffement climatique alors que la majorité d'entre nous avons encore de la neige à pelleter — peut-être pas M. MacGregor. Cependant, c'est une réalité qui nous oblige à nous préparer à faire face à des situations et à des maladies qui continueront d'avoir des répercussions sur la production alimentaire au Canada. À titre d'exemple, le projet 4DWheat, soutenu par Genome Prairie et Ontario Genomics, cherche à augmenter le gain et à gérer le risque lié à d'importantes maladies.
Par ailleurs, nous devons aussi nous efforcer d'accroître l'autonomie du Canada pour remédier au problème de la sécurité alimentaire. Les prix des aliments augmentent; les fruits et les légumes coûtent de plus en plus cher; par conséquent, des segments de la population ne peuvent pas offrir de choix sains à leurs familles. Une des solutions à ce problème est d'investir dans des technologies qui permettront d'augmenter la production de l'agriculture verticale de manière durable et à un coût moins élevé. De plus, en accroissant la production locale, on diminuera la pression sur le système. Je ne suggère pas que le Nunavut devrait commencer à cultiver et à exporter des ananas, mais peut‑on donner aux différentes collectivités les moyens de produire les aliments dont elles ont besoin à un coût raisonnable? À cet égard, j'applaudis la Fondation de la famille Weston: elle a annoncé mardi qu'elle lançait une initiative de plus de 33 millions de dollars pour mettre sur pied des centres d'innovation qui chercheront des moyens de cultiver des fruits et des légumes au Canada durant toute l'année.
Au chapitre de la transformation et de l'emballage, il faut continuer à investir dans la robotique, l'intelligence artificielle et les grands systèmes de données. L'avenir du secteur en dépend. Le domaine de la logistique a aussi des défis majeurs à relever: il utilise encore des tableurs pour analyser les routes et des modèles de transport datant du XIXe siècle. La recherche et l'innovation lui permettront de moderniser ses activités. Des aliments, des médicaments et de l'équipement de protection individuelle sont livrés par drones dans les régions rurales et éloignées du Canada.
Nous sommes ravis que de grandes sociétés, comme des entreprises de télécommunications, se joignent aux efforts. Telus est un exemple d'entreprise de télécommunications qui a intégré efficacement le secteur agroalimentaire: elle a lancé Telus Agriculture dans le but de fournir des solutions. M. James Nolan, professeur à l'Université de la Saskatchewan, a souligné que le recours à l'informatique quantique apporterait des gains d'efficacité dans le domaine de la logistique, tout en émettant des réserves par rapport au coût élevé de la technologie. Nous devrions faire des recherches dans ce domaine.
Nous devons employer une approche coordonnée pour relever les défis actuels et régler les problèmes futurs. Le Conseil de l'innovation agroalimentaire, appuyé par des dizaines d'organisations, recommande l'élaboration d'une stratégie nationale sur la recherche et l'innovation dans le secteur agroalimentaire. Cet effort devrait être codirigé par des représentants des gouvernements et de l'industrie. Il devrait cibler quelques objectifs tangibles et atteignables, avec des résultats mesurables et un échéancier serré. La mise en œuvre d'une stratégie globale nous permettra d'adopter une approche proactive pour affronter les défis actuels et éviter certaines crises à venir.
Merci. Je serai heureux de répondre à vos questions, en français ou en anglais.
Comme vous l'avez dit, je m'appelle Bob Lowe. Je suis un producteur de bœuf du Sud de l'Alberta et président de la Canadian Cattlemen's Association. Je suis accompagné de Mme Fawn Jackson, directrice de la politique et des affaires internationales de l'association.
Je vous remercie de nous avoir invités à discuter avec vous des défis liés à la chaîne d'approvisionnement dans le secteur canadien du bœuf et à parler des solutions que l'industrie et le gouvernement peuvent mettre en œuvre ensemble pour renforcer la résilience.
Quand la pandémie de COVID‑19 a été déclenchée, nous savions qu'il y aurait des perturbations dans les chaînes d'approvisionnement mondiales. Nous avons été ravis que le gouvernement du Canada reconnaisse que l'agriculture est un service essentiel, assurant ainsi le mouvement continu des produits au Canada et à l'étranger.
Au cours des trois dernières années, le secteur a obtenu des résultats remarquables compte tenu des circonstances. Cependant, la conjonction de la pandémie et de phénomènes météorologiques violents a mis en lumière des champs qui doivent être renforcés pour favoriser la résilience à long terme. Les défis liés à la chaîne d'approvisionnement comprennent le manque de redondance dans le secteur de la transformation, les pénuries de main-d'œuvre, les blocages de grandes routes commerciales et les effets de phénomènes météorologiques violents comme les incendies, les inondations et les sécheresses.
S'il y a une leçon à tirer des trois dernières années, c'est que les investissements dans des infrastructures solides, la création rapide de programmes d'urgence pertinents et la priorisation du commerce sont essentiels à la résilience à long terme. Notre secteur a cerné des investissements clés qui aideront à renforcer la résistance aux pressions actuelles et futures.
D'abord, il faut investir dans la main-d'œuvre pour l'ensemble du domaine de l'agriculture et des industries qui transportent les produits agricoles. La demande mondiale pour les produits agricoles canadiens croît rapidement, mais les problèmes persistants de main-d'œuvre minent le potentiel de croissance du marché et sa résilience face aux défis comme la COVID‑19.
En 2017, 16 500 postes de notre secteur sont demeurés vacants, ce qui nous a coûté 2,9 milliards de dollars en pertes de revenus. Dans toutes les provinces et pour tous les produits, les pénuries de main-d'œuvre ont des répercussions sur les niveaux de production actuels, sur la résilience de la chaîne d'approvisionnement et sur le potentiel de croissance.
J'ai mentionné le marché mondial. Notre industrie dépend du commerce: le secteur du bœuf exporte 50 % de sa production. D'un côté, nous devons être mesure d'acheminer nos produits vers les marchés; de l'autre, nous devons pouvoir importer des produits quand nous avons des problèmes, par exemple, de capacité de transformation. Les perturbations du commerce ont eu des répercussions énormes sur la résilience de notre secteur et, par conséquent, de nos chaînes d'approvisionnement alimentaire.
Pour favoriser la croissance économique du Canada et la stabilité des chaînes d'approvisionnement, il faut continuer à faire du commerce une priorité et à diversifier les marchés. Il faut également investir davantage dans les solutions visant à lever les obstacles non techniques au commerce.
J'en profite pour remercier la et la pour les efforts qu'elles ont déployés récemment en vue de convaincre la Corée du Sud et les Philippines de rouvrir leurs frontières. Je remercie également tous les membres du Comité, qui sont toujours prêts à nous offrir leur aide.
Par ailleurs, pour assurer notre succès à long terme, il faut investir dans les corridors de transport, de sorte que les routes, les chemins de fer, les ports, etc., puissent résister aux phénomènes météorologiques violents. Il faut les entretenir et les prémunir contre les changements climatiques, au moyen notamment de mesures de prévention, comme des digues, et de redondance, comme des routes de contournement. De plus, l'ensemble de la communauté doit accorder la priorité aux infrastructures rurales et investir dans celles‑ci, car une grande partie du PIB du Canada en dépend.
Nous recommandons d'investir dans les infrastructures rurales essentielles, y compris les systèmes d'irrigation, les routes, les ponts et les structures d'atténuation des inondations, ainsi que dans l'expansion de l'accès fiable et abordable à Internet à large bande en milieu rural.
Je cède maintenant la parole à Mme Jackson.
:
Je vous remercie, monsieur Lowe.
La pandémie a montré qu'il fallait avoir à sa disposition des vaccins efficaces et qu'il fallait être prêt à affronter des crises sanitaires. Cela comprend les menaces d'éclosions de maladies animales. Une crise grave touchant la santé des animaux aurait des répercussions importantes sur notre secteur.
En deux mots, nous ne sommes pas prêts à faire face à la menace réelle d'une éclosion de fièvre aphteuse. Il faut investir immédiatement dans une banque canadienne de vaccins contre la fièvre aphteuse, comme nos voisins du Sud l'ont fait. Une éclosion de fièvre aphteuse pourrait coûter entre 50 milliards et 60 milliards de dollars à l'économie canadienne. C'est une priorité absolue pour les producteurs canadiens de bœuf et une de nos plus importantes demandes de financement fédéral.
Les phénomènes météorologiques violents récents et la pandémie de COVID‑19 ont aussi montré l'importance des programmes de gestion des risques de l'entreprise pour la viabilité économique de nos producteurs. Durant les dernières années, nous avons eu recours à Agri-relance pour nous remettre des inondations, des incendies, des problèmes de capacité de transformation et des sécheresses. Il faut continuer à investir de plus en plus dans les programmes de gestion des risques de l'entreprise, car ces programmes aident les producteurs à surmonter les difficultés et à mieux se préparer pour l'avenir.
Nous remercions les équipes qui ont travaillé à la conception et à la prestation de ces programmes, et nous attendons avec impatience que des améliorations leur soient apportées pour qu'ils soient encore mieux adaptés aux problèmes de demain. Je n'ai pas le temps aujourd'hui d'entrer dans les détails, mais nous serions ravis de rencontrer les membres du Comité pour avoir une discussion approfondie sur les solutions pour l'avenir.
Merci. Nous répondrons avec plaisir à vos questions.
Je suis Kathleen Sullivan, présidente-directrice générale d'Aliments et boissons Canada. Nous représentons le secteur canadien de la fabrication des aliments et des boissons.
Je suis aussi coprésidente du Réseau du secteur de l'alimentation d'Agriculture et Agroalimentaire Canada, et je codirige un projet visant à dresser un plan stratégique sur la main-d'œuvre pour les secteurs canadiens de l'agriculture et de la fabrication des aliments et des boissons, en collaboration avec la Fédération canadienne de l'agriculture et le Conseil canadien pour les ressources humaines en agriculture.
Je vous remercie de m'avoir invitée à discuter avec vous.
La souveraineté alimentaire du Canada repose sur le système alimentaire du pays. Notre système alimentaire contribue aux économies nationale, provinciales, territoriales et régionales du Canada; il nous aide à atteindre nos objectifs en matière de commerce international; et il sous-tend la production et la sécurité alimentaires locales. Le système alimentaire est aussi une chaîne d'approvisionnement complexe qui relie près de 200 000 exploitations agricoles, 8 000 fabricants d'aliments et de boissons, 15 000 commerces de détail et 100 000 restaurants, qui travaillent tous ensemble, en collaboration avec les fournisseurs d'intrants et le secteur du transport, pour nourrir la population canadienne.
Durant les deux dernières années, la chaîne d'approvisionnement alimentaire du Canada a subi de la pression démesurée et déstabilisante. Aujourd'hui, plus de 90 % des entreprises alimentaires canadiennes ont des problèmes liés à la chaîne d'approvisionnement.
Les raisons sont complexes. Elles comprennent les perturbations des chaînes d'approvisionnement mondiales causées par la pandémie, la hausse des prix, les catastrophes naturelles et les perturbations des infrastructures de transport.
Dans le secteur de la fabrication des aliments et des boissons, le problème le plus grave est celui de la main-d'œuvre. Ce secteur est le plus important employeur manufacturier au pays. Cependant, aujourd'hui, la proportion moyenne de postes vacants chez les fabricants canadiens d'aliments et de boissons s'élève à 25 %. Ce chiffre est absolument ahurissant. D'après nos estimations, la pénurie de main-d'œuvre a entraîné une réduction de production excédant 20 %. Il y a donc 20 % moins d'aliments à exporter ou à utiliser pour nourrir la population canadienne.
La crise de la main-d'œuvre a des répercussions bien réelles sur l'ensemble des produits, des régions et des entreprises de toutes tailles. Je vous donne quelques exemples.
Aliments LUDA est une entreprise de transformation de taille moyenne située à Pointe-Claire, au Québec. Elle produit des soupes, des sauces et des mélanges sur mesure pour les services alimentaires et les marchés industriels. Au maximum de sa capacité, son effectif est de 80 employés, mais aujourd'hui, 20 % de ses postes sont vacants. L'entreprise réussit seulement à remplir 70 à 80 % de ses commandes, et elle perd des ventes.
À Winnipeg, Medallion Milk connaît des pénuries de main-d'œuvre depuis le début de la pandémie, plus précisément dans le secteur de la production. En moyenne, le taux de postes vacants dans son équipe de production est de 20 %. Je souligne qu'il ne faut surtout pas oublier à quel point le manque d'employés alourdit le fardeau porté par les employés qui restent.
Olymel est une des plus grandes entreprises de transformation de la viande au Canada. Elle a des usines au Québec, en Alberta, en Ontario et au Nouveau-Brunswick. L'automne dernier, les médias ont rapporté qu'elle avait besoin de 3 000 travailleurs. Olymel a annoncé qu'elle cessera ses activités d'abattage à son usine de Princeville, au Québec, en mars prochain à cause de son manque d'employés.
À Brampton, en Ontario, Maple Lodge Farms, la plus grande entreprise indépendante de transformation de poulet au Canada, mène ses activités avec un effectif réduit de 25 %. L'entreprise a apporté des changements importants à son offre de produits. Elle a aussi ajouté des heures supplémentaires, ce qui rend le travail encore plus exigeant pour les employés, qui sont déjà épuisés à cause de la pandémie.
Ce ne sont là que quelques exemples des histoires que nous avons entendues et que nous continuons à entendre de la part d'entreprises partout au pays. Nous sommes convaincus que les pénuries persisteront même après la fin de la pandémie; il est même probable qu'elles empirent. À titre d'exemple, un quart des employés de Maple Lodge Farms atteindront l'âge de 65 ans dans les cinq prochaines années. D'autres entreprises se trouvent dans la même situation. Maple Lodge Farms n'a jamais connu un taux de roulement aussi élevé.
Nous reconnaissons et nous accueillons très favorablement les engagements pris récemment par les gouvernements fédéral et provinciaux pour répondre aux problèmes de pénuries de main-d'œuvre. Ces engagements comprennent l'annonce récente d'un investissement de 85 millions de dollars de fonds nouveaux pour accélérer le traitement des demandes chez IRCC. Le problème, c'est que la mise en œuvre de ces initiatives prendra du temps; elles n'apporteront donc pas le secours immédiat qui est nécessaire.
En outre, nous avons été ravis de constater que les lettres de mandat de la et de la reconnaissent le besoin de se concentrer sur la main-d'œuvre et d'accorder la priorité à l'élaboration d'une stratégie pour remédier aux pénuries de main-d'œuvre chroniques dans les secteurs de l'agriculture et de la transformation des aliments.
De fait, l'industrie est déjà intervenue pour jouer un rôle de chef de file dans l'élaboration de cette stratégie.
L'automne dernier, le Conseil canadien pour les ressources humaines en agriculture, la Fédération canadienne de l'agriculture et mon organisation ont lancé un projet pour concevoir un plan stratégique en matière de main-d'œuvre pour nos secteurs afin de résoudre nos problèmes chroniques à cet égard. Ce projet, lancé à l'automne, est déjà en train...
Selon ce que nous ont affirmé des fonctionnaires ce matin et, certainement, ce que j'entends des 200 000 agriculteurs et 8 000 transformateurs du secteur de la fabrication d'aliments, c'est que la pénurie de main-d'œuvre constitue le principal problème, comme vous l'avez souligné dans votre exposé.
J'apprécie à sa juste valeur le travail que l'industrie accomplit en proposant des solutions et en participant aux tables rondes et aux réunions à long terme.
Des fonctionnaires nous ont indiqué que la a participé récemment à un sommet sur la chaîne d'approvisionnement, mais qu'en raison de la grave pénurie qui sévit actuellement, l'industrie était encouragée à tenir d'autres réunions. Considérez-vous que d'autres réunions s'imposent? Avez-vous le sentiment d'avoir été entendus avec le lancement de la prestation d'urgence pour les travailleurs?
J'ai ici le plan en cinq points. Je sais que nous avons déjà parlé de la question. L'invitation à tenir plus de réunions ne résout pas le problème. Je pense que le seuil de 20 % est bienvenu au Québec, mais je crois comprendre que c'est un seuil de 30 % qui est préconisé au Canada, selon le rapport sur la capacité de transformation.
Avez-vous quelque chose à dire à ce propos?
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Certainement. Comme vous le savez fort bien, nous avons rencontré environ 55 fonctionnaires jusqu'à présent pour discuter de la pénurie de main-d'œuvre et du besoin d'une réaction d'urgence. La semaine prochaine, nous devons rencontrer de hauts fonctionnaires d'Agriculture et Agroalimentaire Canada, d'Emploi et Développement économique Canada, et d'Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada. Nous espérons fort qu'ils nous fourniront alors une réponse à notre proposition.
En bref, chaque jour qui passe sans une réaction quelconque est un jour perdu et un jour où nous exerçons encore plus de pression sur nos travailleurs actuels.
Je sais que notre secteur et notre pays ne sont pas les seuls à affronter cette crise de la main-d'œuvre. Cependant, si nous voulons avoir une chance de rétablir notre économie au sortir de la pandémie, force nous est d'admettre que les paramètres fondamentaux de notre main-d'œuvre ont évolué au cours de la pandémie.
Nous devons absolument endiguer la saignée actuelle, stabiliser la main-d'œuvre et proposer collectivement des solutions d'avenir pour le secteur alimentaire et, j'oserais dire, l'ensemble de l'économie, car il s'agit du plus gros problème que de nombreux pays devront affronter.
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Je vous remercie, monsieur le président.
Je tiens à remercier tous les témoins de comparaître aujourd'hui. J'apprécie énormément vos organisations, le travail incroyable que vous accomplissez et tous les intervenants que vous représentez et qui sont essentiels à notre système alimentaire.
Je demanderai peut-être à M. Lowe et à Mme Jackson de ne pas s'offenser si mes questions portent principalement sur les fruits et les légumes et s'adressent à M. Buy aujourd'hui. Je mange du bœuf et j'adore cette viande. Le bœuf canadien est excellent, mais je poserai certaines de mes questions sur le document d'information que M. Buy nous a présenté.
Je remercie M. Buy de nous avoir informés que 80 % des fruits et des légumes du Canada sont importés, information que j'ai trouvée fort révélatrice et un peu choquante.
Je pense que les faits montrent certainement, particulièrement à la lumière des commentaires formulés précédemment sur le guide alimentaire, qu'un régime alimentaire durable comprend plus de fruits et de légumes que n'en consomme le Canadien moyen, de façon générale. Je pense qu'il va sans dire qu'on peut produire beaucoup plus de fruits et de légumes au Canada.
Je remarque, monsieur Buy, que votre document d'information indique qu'il est possible de faire preuve d'innovation à cet égard, notamment en s'adonnant à l'agriculture verticale.
Avez-vous effectué des recherches ou des travaux d'innovation pour remplacer les produits d'importation et établi des catégories précises de fruits et de légumes cultivables au Canada?
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Merci, monsieur le président.
Je commencerai en remerciant les représentants des trois organismes de prendre le temps d'être parmi nous aujourd'hui. Nous leur en sommes très reconnaissants.
Monsieur Buy, permettez-moi de poursuivre avec vous.
Vous avez parlé de la mise en place d'une stratégie nationale en recherche et innovation. Est-ce nécessaire qu'une telle stratégie soit très centralisée? Ne devrait-on pas plutôt donner une liberté d'action aux entreprises et aux établissements d'enseignement?
Entre autres, vous avez mentionné le Conseil des doyens en agriculture, alimentation et médecine vétérinaire. Ses représentants nous ont rencontrés à plusieurs reprises pour lever le drapeau rouge quant au manque d'investissements en recherche dans les universités.
Une politique gouvernementale qui donnerait un crédit d'impôt ou un soutien financier à tout ce qui touche à l'innovation et à la recherche ne serait-elle pas encore plus efficace, sans qu'on ait besoin d'une nouvelle structure administrative?
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Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.
Je commencerai peut-être par Mme Sullivan, d'Aliments et boissons Canada. Je suis enchanté que vous comparaissiez de nouveau devant le Comité.
En ce qui concerne les problèmes de main-d'œuvre que vous n'avez pas manqué de souligner, les chiffres sont vraiment décourageants. Même pour quelqu'un qui fait partie du Comité depuis quatre ans et qui connaît ce problème persistant, c'est assez choquant.
Dans ma région, les prix des logements ont bondi de 30 à 40 %. Je voudrais savoir si vos membres effectuent des sondages quelconques auprès de la main-d'œuvre. Que disent les travailleurs à propos du coût de la vie? Ont-ils seulement les moyens de vivre dans les régions où ils travaillent? Je sais que bien des gens aimeraient travailler, mais ils doivent aussi tenir compte d'autres aspects de leur vie, comme les prix des logements, les frais de transport et d'autres facteurs.
Pourriez-vous établir un lien avec cela? Le problème n'est pas isolé. Il doit y avoir des liens avec d'autres facteurs également.
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Vous avez absolument raison.
Dans la stratégie à long terme à laquelle nous travaillons, les infrastructures figurent parmi les questions auxquelles nous nous attaquons. Les prix des logements, et la disponibilité et l'abordabilité des services de garde d'enfants peuvent poser un problème. Ce n'est pas que le coût des transports collectifs qui entre en ligne de compte. Souvenez-vous que dans les usines, les employés travaillent par quarts. Parfois, la présence même des transports collectifs constitue un écueil. Nous devons réellement examiner la situation dans son ensemble et nous attarder à ce qui permet aux gens de travailler ou de vivre dans des régions où on a besoin d'eux.
Nous observons certainement des problèmes. Dans le secteur de la fabrication d'aliments, on se trouve parfois dans des régions rurales dépeuplées où on peine à trouver des employés. Parfois, on est en zone urbaine, où le coût de la vie fait en sorte qu'il est très difficile de trouver de la main-d'œuvre. Nous constatons que même dans les régions rurales, les prix des logements commencent à augmenter et deviennent légèrement prohibitifs pour nos employés. Nous devons examiner le problème. Le phénomène est relativement nouveau ou s'est certainement accéléré dernièrement en raison de la COVID.
Ce que les transformateurs d'aliments qui recourent au Programme des travailleurs étrangers temporaires ont fait, même avant la COVID, c'est acheter des groupes de logements, parfois par immeubles entiers, pour être certains que leurs employés peuvent habiter les logements à un prix raisonnable.
Comme nous l'avons constaté sur le plan de la disponibilité de la main-d'œuvre au cours des six derniers mois, la situation a évolué et nous allons devoir résoudre la question des infrastructures. Les services de garde d'enfants subventionnés joueront certainement un rôle, mais il y a ici un problème de taille que nous allons devoir résoudre.
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La situation fera sentir ses effets de diverses manières. Il y a d'abord notre capacité à exporter nos produits, puis celle de recevoir des intrants ou des fournitures, comme des emballages, des États-Unis.
Comme je l'ai souligné plus tôt, les transports semblent subir des perturbations majeures presque chaque année.
Dans mon secteur, où il se fait de la transformation, nous livrons souvent nos produits à des centres de distribution. Ces derniers disposent d'une certaine quantité de produits que nous avons fabriqués. Nous livrons juste à temps, mais disposons de cette marge de manœuvre.
Nous observons déjà des retards de camions, comme tout le monde. En raison du temps qu'il faut pour que les effets se manifestent dans les épiceries ou les usines incapables de fonctionner parce qu'elles manquent de fournitures, la situation n'a pas encore eu de répercussions.
Il faut que tout le monde comprenne que plus les blocus seront démantelés rapidement — comme ce serait le cas pour une grève ou autre chose —, mieux ce sera pour la chaîne d'approvisionnement.
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Merci, monsieur le président.
Je remercie les témoins d'être parmi nous cet après-midi.
Mes premières questions s'adresseront à M. Buy, du Conseil de l'innovation agroalimentaire.
D'abord, je vous remercie de nous avoir fait parvenir votre mémoire. Vous parlez beaucoup d'un problème très important qui concerne la main-d'œuvre, mais il y en a un autre, également très important, qui touche l'innovation et la robotisation dans nos entreprises de transformation, précisément dans le secteur animal. Je parle en connaissance de cause, étant donné l'usine d'Olymel qui se trouve dans ma circonscription.
Quels liens entretenez-vous avec les transformateurs du secteur de la transformation animale afin de faire progresser de façon beaucoup plus importante la robotisation? Celle-ci ne règlerait pas tous les problèmes, mais elle les atténuerait.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Je tiens à vous saluer, monsieur Buy. Mon collègue M. Turnbull vous a déjà posé de bonnes questions. Comme votre organisme est actif dans ma circonscription, j’irai vous voir à Alexandria. Je disposerai alors de plus de cinq minutes pour discuter avec vous en bonne et due forme de l’agroalimentaire.
[Traduction]
Je vais maintenant m'adresser à Mme Sullivan.
Vous avez soulevé quelques points relatifs au Programme des travailleurs étrangers temporaires. Je ne sais pas si vous avez mesuré les répercussions. Il y a deux ans, le premier ministre Legault a lancé un appel aux Québécois pour qu'ils viennent travailler dans les entreprises agroalimentaires. C'était à une époque où le taux de chômage était dans les deux chiffres parce que nous en étions aux débuts de la pandémie de COVID‑19.
Je me demande si vos membres ont constaté — en avril, mai ou juin 2020 — une augmentation du nombre de personnes intéressées à ces emplois.
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La hausse du plafond est l'une des mesures qui pourraient nous être les plus bénéfiques à l'heure actuelle. Dans le secteur de la fabrication de produits alimentaires et de boissons — alors que ce n'est pas le cas dans le secteur de l'agriculture primaire —, la main-d'œuvre ne peut pas être composée de plus de 10 % de travailleurs étrangers temporaires. Toute augmentation de ce plafond serait utile. Nous suggérons un plafond de 30 %. Dans un monde idéal, en temps de crise, nous n'aurions pas de plafond du tout, mais nous avons indiqué que le gouvernement fédéral pourrait tolérer un plafond de 30 %.
Nous suggérons également que le gouvernement fédéral passe, pour une période déterminée, d'un permis de travail d'un an dispensé de l'étude d’impact sur le marché du travail, ou EIMT, à un permis de travail de deux ans dispensé de l'EIMT, ce qui contribuerait à réduire la paperasserie pour les entreprises, mais aussi — et je pense que c'est très important, comme nous l'avons tous réalisé — à réduire les délais de traitement et le travail de traitement pour le gouvernement lui-même.
Je pense que ces deux mesures en elles-mêmes seraient très bénéfiques.
Il y a une autre chose qui est vraiment importante. Quelqu'un m'a demandé un jour pourquoi nous voulons utiliser des travailleurs étrangers temporaires. Sauf pour les emplois saisonniers, nous ne voulons pas faire appel à des travailleurs étrangers temporaires. Nous voulons accueillir au Canada des personnes qui deviendront des résidents permanents, qui occuperont ces emplois de façon permanente et qui feront partie de notre collectivité et de notre famille professionnelle. Nous devons avoir, dans le cadre de tout programme que nous mettons en place, des voies d'accès à la résidence permanente qui soient vraiment claires et réalisables pour tous ces travailleurs qui arrivent.
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Oui, absolument, nos membres ont fait des choses, et je suis sûre que d'autres mesures ont été prises.
Tout d'abord, comme je l'ai dit, les entreprises elles-mêmes achètent les logements nécessaires. Elles achètent des immeubles d'appartements entiers ou des maisons, qu'il s'agisse de logements collectifs ou de maisons individuelles, qui pourraient être utilisés par les travailleurs. Nous voyons également des entreprises qui, pour éliminer l'obstacle que représente le trajet vers le travail, mettent en place leurs propres lignes de bus. J'ai mentionné Maple Lodge Farms plus tôt. Cette entreprise a mis en place son propre système d'autobus privé pour permettre à ses travailleurs de se rendre de leur domicile au lieu de travail. Un projet pilote est également en cours en Ontario; il s'agit de collaborer avec les municipalités pour comprendre comment adapter l'infrastructure et ce genre de choses afin d'aider les gens à se rendre au travail.
Les gens expérimentent certaines choses. En fin de compte, je pense que nous devrons trouver des modèles d'industries ou de regroupements d'employeurs qui collaborent avec les municipalités, les gouvernements provinciaux et le gouvernement fédéral pour trouver des solutions à ce que j'appelle les problèmes d'infrastructure, de manière à faciliter le transport des travailleurs.