:
Je déclare la séance ouverte.
Bienvenue à la 103e réunion du Comité permanent des anciens combattants de la Chambre des communes.
[Français]
Conformément à l'article 108(2) du Règlement et aux motions adoptées par le Comité le 9 mars 2023 et le mardi 5 décembre 2023, le Comité reprend son étude sur la reconnaissance des anciens combattants du golfe Persique et le service en temps de guerre.
Avant de commencer, je demanderais à tous les participants en personne de lire les lignes directrices inscrites sur les cartes mises à jour qui se trouvent sur la table en ce qui concerne les problèmes acoustiques qui peuvent se produire, parce que ces ceux-ci peuvent causer des blessures auditives aux participants, mais surtout aux interprètes. Alors, je demande à tous de ne pas rapprocher les écouteurs du micro.
Je vous rappelle aussi que toutes les observations doivent être adressées à la présidence.
[Traduction]
J'aimerais maintenant souhaiter la bienvenue à notre témoin.
Nous entendrons aujourd'hui Kevin « Sammy » Sampson, président de l'Association canadienne des vétérans du Rwanda.
Monsieur Sampson, vous disposez de cinq minutes pour votre déclaration liminaire, après quoi les membres du Comité auront l'occasion de vous poser des questions. Avant de commencer toutefois, j'aimerais donner la parole à M. Desilets.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Je m'appelle Kevin Sampson, mais on m'appelle couramment Sammy. J'ai servi en Iran, au Rwanda, en Haïti, en Bosnie, en Afrique centrale, en Afghanistan et dans les opérations de libération du Koweït. Je suis le président de l'Association des vétérans du Rwanda et je suis le chercheur principal à l'appui de la réclamation faite par les vétérans de la guerre du Golfe. Ces derniers demandent que les opérations qu'ils y ont menées soient considérées comme du service en temps de guerre.
Je pourrai répondre à vos questions sur la politique relative au service en temps de guerre ainsi qu'aux questions culturelles que vous pourriez avoir, telles que les raisons pour lesquelles on n'accorde plus ce statut, les conséquences de cette politique, etc.
On m'a demandé de vous parler de deux sujets bien précis: la politique d'assurance, d'une part, et d'autre part la dissimulation de cette politique et sa relative méconnaissance dans la population générale, parmi les députés et chez les vétérans eux-mêmes. Je m'attends à une discussion intéressante.
Je vais commencer par le premier sujet, soit la politique d'assurance et la couverture offerte selon qu'on sert en temps de guerre ou dans des opérations de service spécial.
Disons les choses clairement. Les députés mettent le personnel des Forces armées canadiennes en service actif en invoquant la Loi sur la défense nationale. Vous nous déployez, muni d'une arme, dans un pays dangereux et vous nous demandez de vivre dans une zone de guerre. À cette fin, vous nous mettez en service actif pour que des officiers militaires puissent nous ordonner d'effectuer des tâches très dangereuses qu'on serait généralement porté à éviter.
Comment amène‑t‑on les gens à effectuer ces tâches dangereuses? Ce n'est pas en leur demandant de bien vouloir les faire. C'est en adoptant des lois sur le service actif, selon lesquelles les soldats canadiens doivent rendre des comptes s'ils n'obéissent pas à des ordres légaux les intimant d'accepter des tâches dangereuses. Ce sont les députés qui adoptent ces lois, et c'est vous qui nous mettez en service actif.
C'est le ministère de la Défense nationale, ou MDN, qui, de son propre chef, divise le service actif en deux catégories différentes, l'une d'entre elles étant le service en temps de guerre. Aucun membre des Forces canadiennes n'est toutefois considéré comme ayant servi en temps de guerre depuis 1953, et il a fallu se battre contre le Parlement pendant des décennies pour obtenir cette reconnaissance. Les vétérans de la Deuxième Guerre mondiale ont dû se battre, les vétérans de la guerre de Corée ont dû se battre, les vétérans de la marine marchande aussi. Tout le monde s'est battu pendant 30 ans pour obtenir ce statut.
C'est le cadeau que nous offre le ministère de la Défense nationale quand vous nous mettez en service actif et dans des situations dangereuses. Le ministère considère toutes nos opérations, non pas comme du service en temps de guerre, mais comme des « opérations de service spécial », et tout le monde se demande pourquoi.
Contrairement au Canada, l'Australie reconnaît à ses soldats le statut de service en temps de guerre quand ces derniers prennent part à des opérations où les risques de blessures sont élevés. L'Australie accorde en effet ce statut à ses soldats, ce qui leur permet de bénéficier d'une meilleure couverture d'assurance, car ils assument des risques importants.
Au Canada, en revanche, personne n'est admis dans la catégorie du service en temps de guerre. Le golfe Persique, service spécial. L'Afghanistan, service spécial. Si l'on souhaite résoudre le problème des assurances, il faut d'abord reconnaître que le MDN, après que vous nous avez mis en service actif, relègue malicieusement nos missions au rang d'opération de service spécial.
Le MDN substitue malicieusement la définition du service actif à celle des opérations de service spécial, et je vais vous expliquer pourquoi. Au début des années 2000, le gouvernement canadien s'est engagé à déployer ses soldats dans les provinces les plus dangereuses d'Afghanistan, plus précisément à Kandahar. Avant de prendre cet engagement, il ne fait aucun doute que le ministère de la Défense nationale et Anciens Combattants Canada ont calculé combien coûteraient les blessures subies lors de ces opérations au cours des 50 années suivantes. Les députés et le ministère de la Défense nationale ont accès à ces données, mais pas nous. Supposons un taux de blessure global de 10 à 15 %. La facture pour les blessures et les décès lors d'un conflit à haut risque comme celui en Afghanistan pourrait s'élever à des milliards de dollars sur une période de 50 ans.
Il va sans dire que le gouvernement savait très bien ce que coûterait la mission en Afghanistan. Et c'est à ce moment‑là qu'il a fait l'impensable: le gouvernement a réduit la couverture d'assurance pour les opérations de service spécial de 80 %. Si nous avions un syndicat pour nous représenter, il ferait valoir avec véhémence que vous avez maintenu le pouvoir que vous confère la loi de nous ordonner d'accepter des tâches qui peuvent être mortelles, tout en réduisant notre couverture d'assurance en cas de blessures de 80 %. C'est 80 % de moins que la couverture pour service en temps de guerre, et 80 % de moins que la GRC, qui fait partie du même régime de prestations.
En gros, vous dites aux Canadiens que la couverture est de 100 % pour une balle allemande, de 100 % pour une balle coréenne, mais si on a le malheur d'avoir été atteint par un taliban, on n'est indemnisé qu'à hauteur de 20 % pour la blessure qui en résulte. Rien de tel que de réduire nos assurances aussi radicalement pour faire comprendre aux soldats canadiens que vous ne valorisez pas leur service actif. Un nouveau parti politique a ensuite été élu, et la couverture a été bonifiée pour s'établir à 40 %. Ce taux est toujours en vigueur à l'heure actuelle.
Pour terminer, il y a un autre pays dans le monde qui utilise de telles expressions. Vladimir Poutine appelle sciemment sa mission en Ukraine une « opération militaire spéciale ». On la trouve bien drôle, mais je tiens à vous dire, mesdames et messieurs les députés, qu'on ne la trouve plus très drôle quand on s'aperçoit que Vladimir Poutine s'est inspiré de nous.
La dernière fois que le Canada a été en guerre, c'était en 1945, contre l'Allemagne. Le Canada a nettement réduit les assurances. C'est la raison précise pour laquelle Vladimir Poutine agit de même en Russie: pour éviter d'avoir à rendre des comptes par rapport à la guerre et pour réduire les prestations d'assurance qu'il doit verser à ses soldats. Merci.
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Merci beaucoup pour la question. C'est une très bonne question. La réponse, c'est que sur le terrain, quand les soldats sont mis en service actif, l'officier auquel ils répondent a le droit, en vertu de la loi, de prendre des décisions de vie ou de mort à leur égard. Il arrive qu'on nous demande de faire certaines choses. Par exemple, on peut demander aux membres du personnel des armes de combat de chasser les talibans d'un endroit. Certains d'entre nous y laisseront leur vie, mais nous le faisons. La loi nous oblige à le faire.
Sur le terrain, la loi ne change rien. Les talibans se moquent du fait que nous avons droit à 20 % de l'assurance et qu'il s'agit d'une opération de service spécial. Ils se moquent du fait que nos prestations d'assurance sont inférieures. Ils se moquent de ce qui est, en gros, un problème de main-d'œuvre lié aux droits et libertés des soldats canadiens sur le terrain. Au front, lorsque nous affrontons les combattants ennemis — que ce soit les génocidaires rwandais, les soldats irakiens, les talibans ou les membres de l'État islamique —, nous sommes tenus de suivre les ordres du commandant sur le terrain.
Sur le plan légal, il n'y a pas de différence notable dans le travail que nous faisons. C'est exactement la même chose. La seule différence, c'est que vous nous versez des prestations d'assurance inférieures quand nous nous blessons dans l'exercice de nos fonctions.
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Oui, monsieur. Il faut d'abord examiner le problème dans son ensemble. Le problème, c'est l'absence d'un système logique de classification des missions. Je vous l'explique très rapidement.
Nous sommes allés en Afghanistan pour combattre les talibans, et vous avez appelé cela une guerre. Nous sommes allés au Mali pour combattre l'État islamique, qui était plus dangereux que les talibans, et vous avez appelé cela une mission de maintien de la paix. Déjà, des questions s'imposent. D'après moi, ces groupes ne sont que des organismes contractants par l'intermédiaire desquels les affaires étrangères font entrer leurs soldats.
Le gouvernement du Canada a appelé la mission au Mali une opération de maintien de la paix multidimensionnelle. Du point de vue législatif, c'était exactement la même chose qu'en Afghanistan. Nous avons combattu l'insurrection. La seule différence, c'est que nous portions des casques bleus plutôt que des casques verts. D'abord et avant tout, il faut un système de classification des missions que les gens comprennent, y compris les anciens combattants, parce qu'à l'heure actuelle, les anciens combattants ne comprennent pas les différences entre les types de missions auxquelles on leur demande de participer.
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C'est une très bonne question.
Quand les anciens combattants parlent de prestations d'invalidité, ils entendent généralement la seule et unique prestation que tous les anciens combattants reçoivent. Il y en a seulement une. Il s'agit de la prestation d'invalidité mensuelle non imposable pour blessure. Les anciens combattants ayant servi en temps de guerre reçoivent 3 000 $. C'est le montant maximal. Un ancien combattant souffrant d'incapacité totale reçoit une prestation non imposable de 3 000 $.
Il importe de souligner que cette prestation est exempte de tout impôt. De plus, le tribunal de la famille ne peut pas y toucher. En cas de divorce, elle ne peut pas être divisée. Elle est liée à l'individu parce que c'est un dédommagement de la part du gouvernement pour une blessure subie durant le service actif. La prestation demeure liée à l'ancien combattant, quelles que soient les circonstances. Peu importe où il se trouve, il est dédommagé pour sa blessure.
Dans la Loi sur le bien-être des vétérans, la prestation est réduite à 1 200 $. C'est la proportion de 40 % dont j'ai parlé. Au début, le taux était de 20 %. Le gouvernement versait 600 $ par mois. Il a augmenté la prestation à 1 200 $, ce qui équivaut à 40 % de la pension pour le service en temps de guerre. L'écart considérable entre les deux régimes de pension saute aux yeux.
J'oublie d'en parler, mais la GRC utilise elle aussi ce régime, et ce n'est pas sans raison. Elle a choisi de garder ce régime quand le gouvernement a essayé de lui imposer le même régime que nous. Elle a choisi ce régime parce qu'il est supérieur.
La prestation d'invalidité mensuelle est sans contredit la question la plus litigieuse touchant les anciens combattants. Je le répète, une balle allemande donne droit à 3 000 $, tandis qu'une balle des talibans donne droit à 1 200 $.
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Votre question comprend plusieurs éléments. Je vais les prendre en note.
La différence entre l'article 31 et l'article 33 est liée aux concepts du service actif et du service en temps de guerre. Je reviens en arrière pour préciser ce que je veux dire. L'article 31 de la Loi sur la Défense nationale porte sur le service actif, et l'article 33, sur le service. Un membre de l'armée, de la marine ou de l'aviation passe 95 % de sa carrière en service, à la maison, avec sa mère, son père, sa famille et ses enfants, à jouer dans des équipes sportives et à travailler de 9 heures à 17 heures.
Un membre en service peut tenir compte de la sécurité au travail. Disons qu'une personne se voit confier une tâche et que cette tâche est dangereuse. Pour un membre en service, la sécurité au travail est un facteur, et le membre peut refuser la tâche. L'exemple que je donne le plus souvent, c'est celui d'un technicien en recherche et sauvetage qui est assis sur une rampe et qui s'apprête à sauter dans la mer du Labrador pour sauver la vie d'un marin durant une tempête. Ce membre de l'équipe de recherche et sauvetage est en service. Il a le choix de sauter de l'avion pour sauver la vie du marin ou de dire que c'est trop dangereux. Il a l'option de choisir.
Quand j'étais en service actif, il m'est arrivé de recevoir des ordres, et je n'avais pas le choix de faire ce qu'on m'ordonnait de faire. On ne peut soulever ni la question de la sécurité ni le risque de mort. On ne peut rien dire. La différence entre le service et le service actif se résume en un mot: « choix ».
Quand on est mis en service actif, on entre dans une zone grise. La Charte canadienne des droits et libertés l'emporte‑t‑elle sur l'article 31 de la Loi sur la Défense nationale, ou l'article 31 de la Loi sur la Défense nationale l'emporte‑t‑il sur la Charte canadienne des droits et libertés? C'est la question qui se joue sur le terrain. Quand un commandant vous donne un ordre, vous ne soulevez pas la question de la Charte canadienne des droits et libertés parce que vous n'avez pas de droits et de libertés. Quand un commandant vous ordonne de faire des tâches d'une difficulté à peine imaginable, vous les faites.
Voilà la différence entre le service et le service actif.
Vous avez posé une question concernant les personnes qui ne savent pas à quel type de missions elles participent. Tout le monde sait que ce n'est pas considéré comme du service en temps de guerre puisque le gouvernement s'oppose toujours fermement à donner cette désignation aux missions. C'est la raison pour laquelle nous sommes ici.
Le problème que pose l'absence d'un système de classification des missions, c'est que les soldats déployés dans le cadre d'opérations de service spécial, comme une mission de maintien de la paix multidimensionnelle, ne comprennent pas toujours exactement pourquoi ils sont là. C'est ce qui m'est arrivé au Rwanda. Nous avons été envoyés au Rwanda sans savoir si nous étions là pour maintenir la paix ou pour nous battre. Nous ne savions pas si nous étions là pour sauver des vies ou pour enlever des vies. Il a fallu au moins 30 jours pour que la situation soit mise au clair. L'absence d'un système de classification des missions est un facteur clé.
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Merci de votre question, monsieur Desilets.
Le message est clair: si vous avez deux enfants, il faut choisir lequel recevra toutes les prestations pour la famille, tandis que l'autre enfant en recevra seulement 40 %.
[Traduction]
C'est ce qui en fait l'un des pires documents. C'est comme si vous disiez à vos enfants que vous alliez investir davantage dans les études, les soins et les prestations de l'aîné. Par le fait même, vous dites au cadet qu'il ne pourra pas fréquenter l'université, qu'il n'ira nulle part, qu'il sera coincé dans la classe inférieure, qu'il sera pauvre et qu'il ne recevra jamais plus de 40 % des prestations.
C'est exactement cela, monsieur.
Je souligne que vous parlez du document 1447 d'Anciens Combattants Canada, intitulé « Principe d'assurance ». Au moins, Anciens Combattants Canada a produit un document qui explique la distinction que fait le gouvernement entre le service en temps de guerre et le service spécial.
Le ministère de la Défense nationale n'a pas de document pareil. C'est comme une licorne. Avant qu'on commence à poser des questions au ministère sur la manière dont les décisions sont prises... Le ministère de la Défense nationale a déclaré soudainement: « Nous prenons une décision arbitraire. Toutes les opérations sont systématiquement considérées comme des opérations de service spécial. »
C'est le message que nous avons reçu du ministère.
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Merci, monsieur le président.
Je tiens à vous remercier infiniment d'être ici avec nous, Sammy. J'espère que cela ne vous dérange pas si je vous appelle Sammy. Merci beaucoup de votre service, et merci d'avoir pris le temps d'expliquer avec rigueur bon nombre de ces choses.
Une des choses que j'ai apprises dans ce rôle, c'est qu'on pense s'y connaître un peu, puis on découvre qu'on ignore beaucoup de choses et qu'il faut simplement redoubler d'ardeur. Merci de nous aider à comprendre.
Je veux simplement que ce soit clair dans mon esprit. Vous avez parlé d'assurances à quelques reprises, puis vous avez parlé de pensions, en mentionnant des pourcentages de 20 % et de 40 %. Pouvez-vous me donner des explications à ce sujet afin que je comprenne de quoi il est question?
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Mon point de vue sur le ministère des Anciens Combattants n'est pas unique. Je vois Anciens Combattants Canada comme une organisation au sein du gouvernement du Canada qui s'occupe principalement des commémorations et des assurances pour les anciens combattants.
Lorsque je parle d'assurances et de pensions, je parle en particulier de la prestation d'invalidité mensuelle non imposable. Si vous voulez montrer à un Canadien que son service vaut autant que celui d'anciens combattants ayant servi en temps de guerre, vous devez alors verser le même montant à ceux qui ont été blessés. Lorsque je parle d'assurances et de pensions, je vous rappelle simplement que la pension que nous recevons n'est pas une pension parce que nous avons servi. Ce n'est pas une pension liée au service. Ce n'est pas de l'argent que les anciens combattants canadiens reçoivent parce qu'ils sont de bonnes personnes. C'est parce que nous avons perdu une jambe.
À mon retour du Rwanda, j'avais un TSPT, de multiples parasites intestinaux et des parasites dans la peau, et ces problèmes ont perduré pendant une décennie. On ne vous verse pas de pension pour cela, mais des prestations d'assurance pour blessures, qui sont gérées par l'intermédiaire de diverses pensions.
Les anciens combattants utilisent souvent le terme « pensions », ce qui induit souvent les gens en erreur et les porte à croire qu'il est question d'autre chose qu'une assurance en cas de blessure. C'est, en fait, une assurance pour blessure.
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C'était très utile. Merci beaucoup. Cela m'a vraiment aidée à comprendre.
Dans votre première intervention, vous avez indiqué que l'Australie a un modèle fondé sur le risque. Lorsque nous examinons ce que nous espérons proposer au gouvernement... et je suis d'accord. Nous savons, comme vous l'avez dit dans votre exposé, que les anciens combattants de la guerre de Corée se sont battus pour cela. Cela a pris une trentaine d'années, et les vétérans de la guerre du Golfe font maintenant de même, et ensuite, ce sera les anciens combattants de l'Afghanistan. Il me semble que les anciens combattants qui ont servi doivent consacrer du temps considérable pour mener ce combat, simplement pour obtenir quelque chose qui tienne compte de leur service.
Simple curiosité. Vous avez parlé de l'Australie. Est‑ce un modèle que nous devrions envisager? Comment le risque est‑il évalué? Je pense que ce que vous avez dit est vraiment important: cela peut être classé dans n'importe quelle catégorie, mais ce qui compte vraiment, c'est le risque.
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C'est une excellente question, et c'est une question à laquelle le ministère de la Défense nationale ne veut pas que je réponde, parce qu'il existe des documents juridiques qui nous aideront à classer les missions et qui proviennent d'organisations dont nous sommes membres: les Nations unies et l'OTAN.
Premièrement, concernant l'Australie, il existe le modèle d'assurance de la société Commonwealth, qui comporte trois niveaux. L'Australie utilise le bronze, l'argent et l'or. Leurs soldats qui se blessent à la guerre reçoivent une carte d'assurance or — elle est vraiment de couleur or —, qui leur offre plus d'avantages. Ils obtiennent cette carte lorsqu'ils vont dans des endroits où le risque de maladie et de décès est plus grand, et parce qu'on leur demande de faire des choses qui, souvent, entraînent des blessures ou des préjudices graves.
C'est ce que l'ONU appelle des missions en vertu du chapitre VII. Savez-vous ce que c'est? En tant que pays qui respecte la primauté du droit, le Canada ne fera jamais une intervention armée dans un pays étranger, sauf si les Nations unies adoptent une résolution indiquant clairement qu'il s'agit d'une mission en vertu du chapitre VI ou du chapitre VII. Pour de telles missions, des documents juridiques précisent dans quelles circonstances nous sommes autorisés à ouvrir le feu. Ce sont ces documents juridiques que nous utilisons pour déterminer s'il s'agit d'une mission de maintien de la paix ou de guerre.
Pour les missions de maintien de la paix, on vous invite dans le pays pour faire du maintien de la paix. Dans le cas d'une guerre, on ne vous invite pas à entrer dans le pays, et vous y entrez pour leur enlever ce qui leur appartient. Chaque mission vient avec la documentation connexe, et c'est cette documentation que le gouvernement australien utilise pour classer ses missions.
Si vous êtes en service dans votre pays et que vous vous blessez en tombant dans votre bureau, vous obtenez à peu près la même chose que ce qu'un Australien reçoit pour un accident ou une maladie du travail. C'est normal. Si vous êtes en service actif et que vous participez à une mission de maintien de la paix et qu'on ne vous tire pas vraiment dessus, mais qu'il existe des risques, vous obtenez plus d'argent. Lorsqu'on va à la guerre et qu'on se fait dire que deux personnes sur douze mourront probablement aujourd'hui, que quatre seront blessées, mais qu'il faut prendre cette colline, c'est une assurance de niveau or, et c'est ce que le Canada appelle le service en temps de guerre, le service spécial.
La seule différence entre notre système et le système australien, c'est que nous atteignons seulement les deux niveaux inférieurs. Le gouvernement du Canada nous empêche toujours d'atteindre le niveau de « service en temps de guerre », n'en parle jamais et espère que cela tombera aux oubliettes et finira par disparaître, et que Mike, Harold et moi ne viendrons jamais en parler aux parlementaires.
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Merci beaucoup pour cette question. Elle est vaste.
M. Bryan May: Oui.
M. Kevin (Sammy) Sampson: Il s'agit d'une question très vaste à laquelle j'essaierai de répondre en cinq minutes.
Avant de répondre à cette question, je vais citer le document PRB 00‑06F de la Bibliothèque du Parlement, intitulé « Déploiement à l'étranger des Forces canadiennes: Rôle du Parlement ». J'ai envoyé ce document à la personne qui se trouve là‑bas. Il pourra probablement vous le transmettre si vous le souhaitez. Il est publié en français et en anglais et explique comment on nous déploie.
L'un des points abordés en détail dans ce document est le fait que les gouvernements successifs n'ont pas observé la loi fédérale lors du déploiement des Forces armées canadiennes, en particulier l'article 32. Il s'agissait surtout d'un parti, le Parti libéral du Canada, qui n'a malheureusement pas observé la loi. Ce document ne nous dit toutefois pas pourquoi et comment les choses se sont produites. Il ne nous donne aucune indication sur la manière dont les choses se sont passées.
J'ai apporté avec moi un document classifié du Cabinet qui n'a jamais été divulgué et qui remonte à 1994. Il porte sur une mission classifiée au Rwanda que le ministère de la Défense nationale a voulu cacher aux députés et aux Canadiens, et dont même nous, les anciens combattants, n'avions pas le droit de parler. Pour que cette mission puisse être menée à bien, il y avait un problème de taille: le Parlement. Vous, les députés, et la liberté de poser des questions sur les opérations militaires allaient sérieusement nuire à la possibilité de sauver Roméo Dallaire et de le sortir du pétrin dans lequel il se trouvait au Rwanda.
Encore une fois, le titre de ce document est « Rwanda: Rôle du Parlement ». Il a été envoyé au Cabinet avec des options permettant d'éviter de rendre des comptes et d'assurer la transparence. Ces faits se sont produits en 1994, en pleine enquête sur la Somalie, alors que les députés demandaient justement plus de responsabilisation et de transparence. Ce document, et lui seul, est responsable du fait que les gouvernements successifs n'ont pas respecté le processus parlementaire, qui aurait permis de poser des questions comme « S'agit‑il d'une guerre? », « Pourquoi nos soldats sont‑ils en Lettonie? » et « Pourquoi combattons-nous ISIS au Mali et dit‑on qu'il s'agit d'une opération de maintien de la paix? ».
Dans le contexte du Rwanda, ils auraient demandé: « Qui y va? ». On leur aurait répondu « Personne ». Ils auraient demandé: « Quand vont‑ils venir? ». On leur aurait dit: « Pas avant des mois. Les soldats canadiens y vont seuls ». Ils ont caché cette mission jusqu'en 2019, lorsque j'en ai parlé à la CBC et que j'ai été accusé d'usurpation de hauts faits. Le ministère de la Défense nationale ne connaissait même pas la vérité sur la mission et m'a traité de menteur. En fait, je suis devenu le complotiste le plus populaire de l'histoire du Canada, car j'ai raconté une histoire sur une mission secrète au Rwanda et 400 personnes ont corroboré ces faits.
J'ai fini par prouver que les historiens du ministère de la Défense nationale avaient tort et par remettre les pendules à l'heure. Cela ne change rien au fait que Roméo Dallaire, membre de l'Ordre du Canada et sénateur, a désobéi aux ordres légitimes du premier ministre du Canada et de son Cabinet, puis a caché les faits au Parlement pendant 30 ans. Cela fait 30 ans qu'il cache ces faits au Parlement. Le gouvernement a caché pendant 30 ans le fait que 400 soldats canadiens s'étaient rendus au Rwanda.
Ces situations se produisent et, dans le contexte du service actif, de toutes les missions auxquelles j'ai participé, le Rwanda a été la mission la plus folle que l'on puisse imaginer. C'était complètement fou. Il ne s'agissait pas d'une mission de maintien de la paix.
Il ne s'agissait pas de maintien de la paix. La mission consistait à effectuer un nettoyage post-génocide et à remédier à la question très difficile de l'image de la politique étrangère canadienne en matière de maintien de la paix, qui avait été traînée dans la boue devant les Nations unies et dans le monde entier, car elle n'avait pas réussi à sauver un million de personnes noires.
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Jusqu'à présent, je n'ai parlé que des assurances. Je vais maintenant parler très brièvement de la commémoration.
Les répercussions sur la personne... Vous remarquerez que je porte des médailles sur mon cœur, mais que celle‑ci n'est pas placée avec les autres. Cette médaille m'a été remise personnellement par l'ambassadeur du Koweït. Étant donné que ma mission n'était pas considérée comme du service en temps de guerre, je n'ai pas le droit de porter cette médaille de ce côté, sur mon cœur, et chaque fois que l'ambassadeur du Koweït la voit, nous sommes tous les deux gênés.
Au niveau international, l'idée que le service en temps de guerre et les règles qui y sont associées... Pour répondre à votre question très précise — et ma réponse compte deux volets — oui, il y a des conséquences sur l'homme et la femme. Vous jugez manifestement que mon service au Koweït n'équivaut pas à celui des anciens combattants de la Seconde Guerre mondiale ou de la guerre de Corée.
Le deuxième point dont je vais vous parler, monsieur, est la Croix de Victoria, qui n'est décernée que pour le service en temps de guerre. Je ne propose pas que l'on décerne la Croix de Victoria à quiconque a servi pendant la guerre du Golfe, mais je suis consterné par la décision du gouvernement de ne pas la décerner pour les soldats qui ont servi en Afghanistan, alors que tous nos collègues, alliés et amis — les pays du Commonwealth — l'ont fait. J'estime que la seule raison pour laquelle nous n'avons pas reçu la Croix de Victoria est que notre mission n'est pas considérée comme du service en temps de guerre. Le gouvernement du Canada ne décerne la Croix de Victoria que pour ce type de service. Il ne l'a pas fait ni pour la Corée ni pour l'Afghanistan. Ces soldats n'ont pas reçu la Croix de Victoria parce qu'il ne s'agissait pas de service en temps de guerre.
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Merci beaucoup, madame Blaney. C'est une excellente question.
Si le gouvernement canadien peut se permettre de retirer des milliards de dollars de prestations d'invalidité aux Canadiens les plus vulnérables qui ont servi pour notre pays, il peut certainement se permettre de les leur rendre. C'est la seule réponse que je puisse donner. Si l'on avait classifié ces missions de façon adéquate. Si l'on avait déterminé qu'il s'agissait d'un service de guerre et que l'on avait payé les gens de manière appropriée, nous ne serions pas en train de discuter de la nécessité de verser des milliards de dollars aux anciens combattants pour résoudre le problème.
Cependant, je peux vous dire que si le gouvernement du Canada est assez fort pour prendre l'argent d'anciens combattants blessés qui ne peuvent pas se défendre, il l'est aussi pour payer pour ces personnes lorsqu'on les prend en train de commettre des actes répréhensibles.
Ma réponse est oui. Je vous rappelle qu'il y a eu un million d'anciens combattants de la Première Guerre mondiale et deux millions d'anciens combattants de la Seconde Guerre mondiale, et que les anciens de la GRC bénéficient de cette prestation depuis la nuit des temps. Si le Canada peut se permettre de les payer depuis les années 1900, il n'y a aucune raison pour que 40 000 anciens combattants de l'Afghanistan, 40 000 vétérans de Bosnie et 400 vétérans du Rwanda, etc., qui ont tous été placés en service actif et contraints par les élus de ce pays à se rendre dans un pays étranger et à y risquer leur vie...
Je ne pense pas que je dise quoi que ce soit d'injuste ou d'inéquitable. Si le gouvernement l'a fait, il peut continuer de le faire. Il n'a pas la volonté de verser ces indemnités. Il aurait dû réfléchir avant de donner l'argent des anciens combattants à d'autres organismes du Canada. Vous ne croyez pas?
Merci.
:
Je pense que nous devrions nous indigner de manière sélective du fait que nous sommes l'une des nations les plus bureaucratiques au monde et que nous apposons une étiquette sur tout. C'est un fait. Nous avons un processus. Nous vendons ces processus à l'échelle internationale. C'est un gros enjeu.
Il est très problématique que le gouvernement du Canada n'ait pas encore apposé d'étiquette sur ses missions afin de les définir avec précision pour les Canadiens, et le fait que vous vouliez apporter votre aide est pour moi une véritable source d'inspiration. J'aime beaucoup parler aux députés. Vous êtes utiles, mais nous nous heurtons au ministère de la Défense nationale. Quelqu'un doit aller au ministère de la Défense nationale et lui dire comment les choses devraient se faire. En règle générale, cela exige beaucoup de travail de la part du Parlement. Il faut des projets de loi, des lois, etc.
Je serais heureux de vous présenter un système très simple de classification des missions, qui vous aiderait, en tant que politiciens, à comprendre ce que nous exigeons des soldats canadiens. Je vais vous poser rapidement quelques questions.
Les personnes qui servent actuellement le gouvernement canadien en Lettonie seront-elles en guerre lorsqu'elles seront attaquées par des missiles, des roquettes et des bombes russes? S'agira‑t‑il de service en temps de guerre? Je vous parie que ces soldats en auront très vite le sentiment. Il n'y a pas de processus pour remédier à cette situation. Le processus consiste à s'attaquer au problème au niveau exécutif du ministère de la Défense nationale et à ce que j'appelle le « comportement toxique de l'homme blanc », qui consiste à tout assujettir.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Je vous remercie, monsieur Sampson. Nous apprenons beaucoup de choses. C'est beaucoup d'information, mais je vous remercie de votre franchise.
J'aimerais cependant faire un commentaire. Vous avez mentionné qu'il n'y a pas eu d'interaction avec la Chambre des communes après 1994. Est‑ce exact? J'aimerais simplement attirer l'attention sur le fait qu'alors que les avions de combat canadiens — et j'ai dû vérifier — survolaient l'espace aérien ennemi de la Libye, les quatre partis politiques ont mis de côté leurs positions préélectorales pendant quelques heures lundi pour soutenir le rôle du Canada dans la mission visant à contenir un bastion libyen tenu par Kadhafi. Nous avons été contraints d'intervenir, à la fois par notre devoir moral et par nos devoirs envers l'OTAN et les Nations unies. L'ancien ministre de la Défense, Peter MacKay, l'a dit à la Chambre des communes, en ouvrant le débat sur une motion à l'appui du déploiement. Les libéraux, les néo‑démocrates et les bloquistes ont soutenu à l'unanimité notre motion conservatrice. La discussion s'est ensuite poursuivie sur le fait qu'en ce qui concerne l'Afghanistan et d'autres sujets, nous devions nous tenir au fait de la situation et nous investir dans ces enjeux. Ce que je retiens de ce que vous avez dit aujourd'hui, c'est que nous avons échoué et que le gouvernement doit aborder les activités de nos forces armées à la Chambre des communes.
M. Kevin (Sammy) Sampson: C'est exact.
Mme Cathy Wagantall: J'ai une question à vous poser, qui porte sur un commentaire de l'analyste. Vous avez présenté des pétitions. L'analyste indique que le principal argument contre les demandes que vous faites dans celle relative au golfe Persique est que si l'on étend la désignation « anciens combattants ayant servi en temps de guerre » aux anciens combattants du golfe Persique, on devra également l'étendre à tous les soldats qui ont servi après la guerre de Corée, et qui ont été déployés dans une zone de guerre en vertu d'une résolution de l'ONU ou autre sans que le Canada soit officiellement en guerre. Ce serait notamment le cas des 40 000 anciens combattants de la mission en Afghanistan.
Dans la réponse — parce qu'ils doivent toujours répondre aux pétitions — le a déclaré ce qui suit: « Cette catégorisation ne vise pas à accorder plus ou moins de respect au service accompli par les militaires et les anciens combattants. Aucune des deux catégories ne représente un risque moins élevé pour les personnes déployées. »
Lorsque j'entends cela, ils ne nous disent pas pourquoi ils le font. Ils disent simplement: « Non, non, ce n'est en aucun cas un manque de respect. » Je ne sais même pas quoi en penser. Qu'avez-vous ressenti en lisant ces réponses? Cela doit vous donner l'énergie nécessaire pour continuer.
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Lorsque je parle de 3 000 $, il s'agit d'un chiffre approximatif. Il en va de même pour les 1 200 $. Pour une incapacité totale, une personne recevra environ 3 000 $. Pour ce qui est du service spécial, les anciens combattants reçoivent 40 % de ce montant, soit 1 200 $.
Vos chiffres sont exacts. Vous avez bien compris la façon dont ces fonds sont attribués. Anciens Combattants Canada examine votre épaule et vous accorde 15 %. Vous obtiendrez alors 15 % de la somme initiale. Quoi qu'il arrive, vous ne pourrez pas dépasser 100 %. Vous ne toucherez jamais plus que ce montant total, soit 1 200 $ ou 3 000 $.
En ce qui concerne le montant alloué pour le service en temps de guerre, je n'ai pas été tout à fait honnête avec vous, car les anciens combattants qui ont servi en temps de guerre reçoivent automatiquement plus d'argent. Si vous avez une femme et un enfant, vous recevrez 500 ou 600 $ de plus pour votre femme — excusez‑moi, je ne connais pas les chiffres exacts — et environ la moitié de cette somme pour votre enfant. Au bout du compte, si vous êtes un époux ou une épouse qui part à la guerre, si vous avez un conjoint et un enfant, et si vous êtes blessé, vos enfants et votre conjoint sont automatiquement indemnisés par le gouvernement.
Aujourd'hui, vous devez vous battre pour obtenir une indemnité de conjoint pour votre femme qui doit s'occuper de vous. Il faut se battre avec le gouvernement pour l'obtenir, alors que pour le service en temps de guerre, c'était automatique. Vous n'avez pas à vous battre pour obtenir de l'argent supplémentaire pour vos enfants. Dans le cas du service spécial, le gouvernement s'en moque. Pour le service en temps de guerre, on vous versera un montant supplémentaire pour chaque enfant.
Pourquoi est‑ce important? En tant qu'ancien combattant du Rwanda, j'ai souvent essayé d'emmener ma fille voir des spectacles comme Disney on Ice, et je n'ai même pas pu sortir de chez moi. Il y avait quelque chose qui me tracassait, ou autre. Je ne suis pas faible. Je coupe du bois pour le plaisir. Je sors et je fais des choses. L'idée que je n'ai pas pu emmener ma fille voir Disney on Ice, c'est grave pour moi. Je ne la dédommage pas, mais c'est pour les 200 $ de billets que j'ai perdus à cause de problèmes psychologiques liés au Rwanda que cette indemnisation serait utile.
Le fait de donner un peu plus d'argent à votre femme ou à votre partenaire pour qu'il ou elle puisse aller dans un spa au lieu de s'inquiéter constamment au sujet des factures à payer et des problèmes à régler parce que vous êtes dans un état végétatif ou dans l'incapacité de faire ces choses à cause de votre blessure... L'ancienne loi leur permettait d'obtenir de l'argent pour ce genre de choses. Avec la nouvelle loi, soit nous ne recevons pas d'argent, soit nous devons nous battre pendant des années et des années, avec des retards considérables, pour obtenir ces sommes.