Bienvenue à la 10e réunion du Comité permanent de la défense nationale de la Chambre des communes.
Conformément à l'ordre adopté par la Chambre le 23 septembre 2020, nous siégeons aujourd'hui suivant une formule hybride.
Nos délibérations seront diffusées via le site Web de la Chambre des communes.
Nous allons maintenant souhaiter la bienvenue à nos témoins.
[Français]
Je souhaite la bienvenue à tous nos témoins d'aujourd'hui.
Votre présence est très importante pour nous. Nous vous sommes reconnaissants du temps que vous nous accordez.
[Traduction]
Nous accueillons aujourd'hui quatre témoins.
Nous recevons la contre-amirale Geneviève Bernatchez qui est juge-avocate générale. Elle est accompagnée de la colonelle Jill Wry, juge-avocate générale adjointe, et du colonel Rakesh Jetly, psychiatre principal, Direction de la santé mentale, Groupe des services de santé des Forces canadiennes.
Nous accueillons également Mme Kyndra Rotunda, professeure en droit militaire et international à l'Université Chapman.
Nous allons suivre cet ordre pour les observations préliminaires de nos témoins, après quoi les membres du Comité pourront poser leurs questions.
Je demanderais donc à la contre-amirale Geneviève Bernatchez, juge-avocate générale, de bien vouloir commencer.
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Un moment, s'il vous plait.
[Traduction]
Merci à tout le monde. Malheureusement, nous n'avons pas pu régler le problème.
Il est possible qu'il soit attribuable à votre ordinateur, contre-amirale. Un membre de l'équipe technique va communiquer avec vous pour voir ce qu'il est possible de faire.
D'ici là, je vais demander au colonel Rakesh Jetly de nous présenter ses remarques préliminaires. Espérons que cela nous laissera le temps de régler le problème pour que nous puissions entendre par la suite la contre-amirale Bernatchez.
Colonel Jetly, à vous la parole.
Colonel, peut-être pourriez-vous vous débrancher, puis vous rebrancher. Nous n'avons pas du tout accès à votre signal.
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Un instant, s'il vous plaît.
Colonel Jetly, je vous prierais de bien vouloir nous aider un peu. Vous pouvez poursuivre votre allocution, mais nous vous demanderons ensuite de tout reprendre du début. Pour l'instant, nous voulons entendre votre signal pour voir s'il nous est possible de repérer le problème ici dans la salle du Comité. Nos techniciens semblent croire que le problème vient d'ici. Permettez-nous seulement d'avoir accès à votre signal audio, et peut-être pourrons-nous le retracer.
Voilà maintenant que nous avons des difficultés avec l'interprétation.
Un instant, s'il vous plaît.
Colonel Jetly, puis-je vous demander de nous parler encore un peu, peut-être une vingtaine de secondes. Vous pouvez dire ce que vous voulez.
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Merci. Comme nous avons perdu un peu de temps, je vais essayer d'être bref.
Madame la présidente et mesdames et messieurs les membres du Comité permanent de la défense nationale, je suis le psychiatre principal des Forces armées canadiennes (FAC). Plusieurs fonctions importantes me sont confiées. Je suis chargé de conseiller le commandement relativement aux questions de santé mentale. Je suis en outre le clinicien principal en santé mentale des FAC. Je dirige de nombreux travaux de recherche sur la santé mentale des militaires ou j'en facilite la réalisation. De plus, je représente les FAC au sein des comités internationaux de l'OTAN et sur d'autres tribunes s'intéressant à la santé mentale.
Je vous remercie de l'intérêt que vous portez au bien-être des hommes et des femmes faisant partie des Forces armées canadiennes, et plus particulièrement à leur santé mentale.
Comme nos efforts de recherche de pointe nous l'ont appris au fil des ans, la maladie mentale est chose courante au sein des Forces armées comme elle l'est dans la société civile. Nos différentes études, y compris les éditions 2002 et 2013 de l'Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes - Santé mentale (volet FAC), nous ont permis de comprendre le fardeau que les problèmes de santé mentale font peser sur notre organisation, comparativement à ce qui se passe dans la société civile. Les deux études ont révélé pour nous des taux de dépression supérieurs à ceux enregistrés dans la population en général. La prévalence des cas de stress post-traumatique a augmenté considérablement dans nos rangs entre 2002 et 2013, ce qui n'est guère étonnant compte tenu de nos campagnes en Afghanistan.
À titre d'exemple, l'enquête de 2013 a révélé que 15,7 % des membres des FAC allaient souffrir de dépression au cours de leur vie. Pour les troubles de stress post-traumatique, ce taux de prévalence était estimé à 11,1 %. L'importance de ces constats ne se limite pas aux seuls chiffres. Ces études nous en ont aussi beaucoup appris sur la propension à demander de l'aide, les obstacles perçus quant à l'accès aux soins et les lacunes à combler pour que l'offre de soins soit mieux adaptée aux besoins.
Nous poursuivons nos efforts pour faire évoluer nos programmes en nous inspirant de ces études et des observations scientifiques disponibles afin que les membres des FAC puissent avoir facilement accès à des soins fondés sur des données probantes. Parmi les obstacles à éliminer à cette fin, notons la nécessité de faire comprendre à certains qu'ils souffrent peut-être d'une maladie mentale pouvant être traitée. Il y a aussi le fait que les gens préfèrent régler eux-mêmes leurs problèmes. Ils craignent que leur carrière en souffre. Il y a également bien sûr les préjugés. Les autres pourraient croire qu'un militaire fait montre de faiblesse en demandant à obtenir des soins en santé mentale.
Les programmes que nous avons mis en place au fil des ans visent expressément à écarter ces obstacles. Ainsi, le programme En route vers la préparation mentale permet de sensibiliser les personnes touchées, d'améliorer leur capacité d'adaptation, d'atténuer les préjugés à leur endroit et de les inciter à demander de l'aide. L'utilisation du terme « blessure de stress opérationnel » confère une légitimité aux blessures psychologiques en les plaçant sur le même pied que les blessures physiques.
Je crois que vous souhaitez également en savoir plus long sur la prévention du suicide au sein des FAC. Il y a malheureusement dans notre société des gens qui se suicident, et les Forces armées canadiennes ne font pas exception. Les chiffres varient selon les sources, mais si l'on s'en tient de façon conservatrice aux données de Statistique Canada, il y a chaque jour 11 Canadiens qui s'enlèvent la vie. Cela donne un total d'environ 4 000 suicides par année. Le suicide est la deuxième cause principale de décès chez les jeunes Canadiens de 15 à 34 ans et est trois plus fréquent chez les hommes. Le groupe d'âge des 45 à 59 ans compte pour le tiers des décès par suicide. Un survol rapide de ces chiffres nous amène à constater que les hommes et les femmes des Forces armées canadiennes font partie de ces groupes démographiques les plus à risque.
Nos services de santé sont déterminés à mieux comprendre la problématique du suicide de manière à pouvoir gérer et atténuer les risques plus efficacement. Nous demeurons en contact avec nos alliés afin de tirer parti de la sagesse collective pour mettre en œuvre des approches qui nous semblent prometteuses. Par ailleurs, il ne faut pas oublier que le suicide est davantage le résultat d'un état complexe d'origine multifactorielle que la conséquence d'un problème de santé unique. Cet état est généralement attribuable à l'effet combiné d'un problème de santé mentale, diagnostiqué ou non; d'un facteur de stress, le plus souvent interpersonnel; de certains traits de personnalité, comme l'impulsivité; et, bien sûr, de l'accès à des moyens de se donner la mort.
Je pourrai vous en dire davantage si la chose vous intéresse, mais notons pour l'heure que le modèle en question offre de nombreuses options d'intervention pour lutter contre le suicide. Au sein des Forces armées canadiennes, nous considérons que la prévention du suicide est une responsabilité collective qui exige la contribution du commandement, des collègues et des pairs, des professionnels de la santé et de la société dans son ensemble.
En 2009 et en 2016, nous avons réuni des experts universitaires et militaires en prévention du suicide provenant du Canada et de nos pays alliés pour nous aider à mieux évaluer et orienter nos efforts relativement à cet enjeu de premier plan.
Parmi les nouveautés dans notre approche en la matière, soulignons notre collaboration avec l'Association des psychiatres du Canada pour la création d'un guide clinique sur la prévention du suicide au sein des FAC. Il s'agit d'un document très complet qui permet de bien cerner les risques de suicide pour pouvoir les évaluer et les gérer efficacement. Nous avons par ailleurs adapté l'Échelle d'évaluation du risque de suicide de Columbia afin de normaliser nos façons de faire pour la détermination des risques élevés. Nous avons aussi mis en place un mécanisme de traitement cognitivo-comportemental du suicide dans le cadre d'un programme pancanadien de formation. Cette forme de thérapie vise à traiter les comportements suicidaires, et pas uniquement les problèmes de santé mentale sous-jacents.
En mars dernier, les membres des FAC ont été confrontés, en même temps que les autres Canadiens et le reste de la planète, à un facteur de stress sans précédent avec la pandémie de COVID-19 qui s'est déclarée. Nous en avons tous ressenti les impacts, et je sais que vous en avez amplement discuté sur cette tribune. Je tiens à ce que vous sachiez que nos services en santé mentale sont demeurés accessibles en tout temps, car notre commandement a considéré dès le départ que ces services étaient prioritaires pour les membres des Forces armées canadiennes.
Comme tous les systèmes de santé, nous avons connu notre part de difficultés. Nous avons dû nous conformer aux mesures mises en place par les autorités locales, municipales et provinciales tout en gérant les risques découlant de la pandémie pour nos patients et notre personnel. Nos services n'ont jamais été interrompus et continuent d'être accessibles encore aujourd'hui. Partout au pays, nous avons offert des soins en santé mentale dans nos cliniques en utilisant les différents moyens à notre disposition, des évaluations en personne avec le patient et le clinicien portant l'équipement de protection individuelle de façon appropriée jusqu'aux consultations au téléphone ou sur des plateformes vidéo en mode virtuel. Ce déploiement ne s'est pas fait sans certaines complications d'ordre technologique notamment attribuables à un accès limité aux communications sans fil dans certains de nos édifices et à l'incompatibilité avec certaines plateformes commerciales. Nous poursuivons nos efforts en vue d'améliorer les choses à ce chapitre.
Nous pourrons y revenir si vous le souhaitez, mais je vous dirais que j'ai joint les rangs des Forces armées canadiennes à la fin de la guerre froide et que je fais donc partie de ceux se souviennent que les services de santé sont là non seulement pour soigner les malades et les blessés, mais aussi pour maintenir un niveau adéquat de préparation opérationnelle en prévision des situations où nous sommes appelés à intervenir au bénéfice de la population canadienne et en son nom. Depuis le début de la pandémie, les Forces armées canadiennes sont intervenues tant au pays qu'à l'étranger lorsqu'on leur a demandé de le faire, et nos services de santé ont toujours été là pour appuyer ces opérations.
Je serai ravi de répondre à toutes les questions que les membres du Comité voudront bien me poser. J'aimerais également vous informer que ce sera la dernière fois que vous me verrez en uniforme, car je m'apprête à réintégrer la société civile au début de 2021 après 31 ans au sein des Forces armées canadiennes.
Merci.
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Tout semble indiquer que le problème ne pourra pas être réglé ce matin. Nous allons donc lever la séance pour en convoquer une nouvelle qui se tiendra vendredi. Vous allez recevoir un avis de convocation à cet effet. Nous allons tenir nos témoins au courant.
Je vais aussi communiquer avec chacun de vous par courriel pour discuter de la suite des choses. Il est possible que notre comité directeur doive se réunir. Vous pouvez attendre de mes nouvelles incessamment à ce sujet.
Je veux remercier nos témoins en leur demandant de bien vouloir nous excuser.
Je remercie tout particulièrement notre invitée de la Californie qui s'est levée très tôt ce matin pour pouvoir participer à cette séance. Nous vous en sommes vraiment reconnaissants.
Nous sommes désolés. Les événements qui touchent actuellement notre planète ont un impact sur bon nombre de nos activités, mais nous allons trouver un moyen de tenir cette réunion.
Merci donc à tous nos témoins d'avoir été des nôtres aujourd'hui. Nous vous communiquerons sous peu tous les détails concernant notre réunion de vendredi.
La séance est levée.